Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications
Fascicule nº 43 - Témoignages du 7 novembre 2018
OTTAWA, le mercredi 7 novembre 2018
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, auquel a été renvoyé le projet de loi C-64, Loi concernant les épaves, les bâtiments délabrés, abandonnés ou dangereux et les opérations d’assistance, se réunit aujourd’hui, à 18 h 43, afin d’étudier le projet de loi.
Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Mesdames et messieurs les sénateurs, avant que nous entendions le ministre, je vous informe que le Sénat nous a renvoyé quelques articles du projet de loi d’exécution du budget, soit le projet de loi C-86, afin que nous les étudiions. À la fin de la séance de ce soir, ne partez pas trop rapidement, car nous resterons quelques minutes de plus afin de retravailler notre calendrier en vue d’y intégrer cette étude. Nous devons faire rapport de ce projet de loi d’ici l’échéance du 4 décembre. Je suis certain que même M. Garneau comprend l’importance que cela revêt pour nous.
Pardonnez-moi, monsieur le ministre, de régler quelques questions de régie interne en votre présence.
Ce soir, nous amorçons notre étude du projet de loi C-64, Loi concernant les épaves, les bâtiments délabrés, abandonnés ou dangereux et les opérations d’assistance.
Nous sommes heureux que l’honorable Marc Garneau, C.P., député, comparaisse devant nous aujourd’hui. Il est accompagné par des fonctionnaires de Transports Canada, notamment Michelle Sanders, directrice, Politique sur l’eau propre, et Marc-Yves Bertin, directeur général, Politique maritime.
Nous accueillons également des représentants de la Garde côtière canadienne, notamment Marc Sanderson, directeur général par intérim, Stratégies nationales, et Julie Gascon, directrice générale, Opérations.
Je vous remercie d’être venus ce soir.
Je crois comprendre que nous avons une heure pour échanger avec vous, monsieur le ministre. Ensuite, nous entendrons vos fonctionnaires qui ont accepté de rester après votre départ. Monsieur Garneau, la parole est à vous.
[Français]
L’honorable Marc Garneau, C.P., député, ministre des Transports : Merci beaucoup, monsieur le président. C’est avec grand plaisir que je comparais devant le Comité sénatorial permanent des transports et des communications pour vous parler du projet de loi C-64, Loi concernant les épaves, les bâtiments délabrés, abandonnés ou dangereux et les opérations d’assistance.
Comme vous le savez, il existe un grand nombre de bâtiments abandonnés et d’épaves dans les eaux canadiennes. On n’a pas le chiffre exact, mais on est en voie de l’obtenir.
Alors que la plupart des propriétaires de bâtiments sont responsables et entretiennent correctement leur bâtiment, certains individus, malheureusement, sont négligents. Lorsque les propriétaires négligent de prendre soin d’un bâtiment, l’état de ce dernier se détériore ce qui peut accroître les risques qu’il ne devienne un danger pour l’environnement, l’économie ainsi que pour la santé et la sécurité publique.
De plus, lorsqu’un propriétaire se dérobe de ses responsabilités, le bâtiment devient un fardeau pour les communautés locales, les administrations portuaires et, bien sûr, les contribuables.
[Traduction]
Le projet de loi C-64 est un élément central de la stratégie nationale relative aux bateaux abandonnés et aux épaves du gouvernement du Canada, annoncée en novembre 2016 dans le cadre du Plan de protection des océans.
Nos efforts collectifs dans le cadre de cette stratégie nationale amélioreront la sécurité maritime et la navigation responsable, tout en protégeant davantage le milieu marin canadien. Au cœur de la stratégie nationale, l’accent est mis sur la responsabilité des propriétaires de bateaux afin que nous nous assurions que les propriétaires qui manquent à leurs responsabilités soient tenus responsables, en vertu de la loi, et imputables quant aux coûts et dépenses liés à l’enlèvement ou à la remise en état de leurs bâtiments.
Le projet de loi C-64 avertit les propriétaires que le gouvernement fédéral ne tolérera plus l’abandon ou la gestion irresponsable de leurs bâtiments et que, désormais, les communautés locales et les contribuables ne seront plus tenus d’assumer les coûts de nettoyage des épaves, des bâtiments abandonnés, délabrés ou qui présentent un danger.
Cette législation tient compte des nombreuses consultations sur les bâtiments abandonnés et les épaves que mon ministère et la Garde côtière du Canada ont menées à l’échelle nationale pendant plusieurs années auprès des intervenants du secteur maritime, de nos partenaires provinciaux et territoriaux, des propriétaires de bâtiments, ainsi que des Premières Nations.
[Français]
En février 2018, le projet de loi a été minutieusement étudié par le Comité permanent des transports, de l’infrastructure et des collectivités de la Chambre des communes. Le comité a entendu plus d’une vingtaine de témoins de l’industrie maritime, de groupes autochtones, de la société civile ainsi que d’autres ordres gouvernementaux. Je me réjouis du travail collaboratif du comité, qui s’est notamment concrétisé par l’adoption de six amendements, dont un a été proposé par un membre de l’opposition.
Par ailleurs, un important enjeu a été soulevé par le capitaine de la marine marchande, Paul Bender, ainsi que d’autres témoins lors de l’étape de l’étude par le comité, qui a mené à un rapport recommandant au gouvernement de protéger les sépultures océaniques de guerre.
En réponse à ce rapport, mon ministère, en collaboration avec Parcs Canada et le ministère de la Défense nationale, a fait part de son soutien à tout amendement au projet de loi C-64 qui assurerait que les pouvoirs réglementaires nécessaires à la mise en place de mesures destinées à protéger les épaves à valeur patrimoniale soient étendus aux épaves de bâtiments et d’aéronefs militaires canadiens et étrangers. En somme, ce changement accorderait donc au gouvernement fédéral les pouvoirs nécessaires pour accroître les mesures de protection pour les épaves à valeur patrimoniale.
Avec ces initiatives en cours, je suis ravi d’être votre premier témoin aujourd’hui, alors que le comité entame son étude approfondie du projet de loi C-64.
[Traduction]
Le projet de loi C-64 aborde la question des épaves et des bâtiments abandonnés et dangereux, aussi appelés bateaux posant problème, de manière exhaustive et tente de combler les lacunes du cadre législatif actuel.
Le gouvernement fédéral jouit en ce moment d’une autorité limitée à l’égard des bateaux posant problème. Ses pouvoirs actuels se limitent à l’atténuation de certaines des conséquences néfastes des bâtiments problématiques, telles que la pollution accidentelle ou l’obstruction de la navigation. Cependant, à l’heure actuelle, le gouvernement n’a pas le pouvoir de gérer les bâtiments en tant que tels, et sa capacité de prendre des mesures préventives à leur égard demeure limitée.
Vous serez peut-être étonné d’apprendre que rien dans la loi actuelle n’interdit à un propriétaire d’abandonner son bâtiment. De plus, les propriétaires de bâtiments ne sont pas tenus de souscrire à une assurance pour l’enlèvement d’épaves. Nous n’avons pas, non plus, les pouvoirs nécessaires pour leur ordonner de s’occuper de leurs épaves ou bâtiments dangereux.
Honorables membres du comité, lorsqu’un véhicule arrive à la fin de sa vie utile, nous n’acceptons pas que le propriétaire l’abandonne en bordure de la voie publique — du moins, plus maintenant — afin que quelqu’un d’autre s’en occupe. Par conséquent, nous ne devrions pas accepter cela dans le cas de bâtiments à flot. Nos eaux navigables ne doivent ni ne peuvent être traitées comme des dépotoirs lorsque les bateaux arrivent en fin de vie ou lorsqu’ils sont abandonnés.
C’est pourquoi, honorables sénateurs, nous avons présenté le projet de loi C-64. Ce projet de loi renforcera la responsabilité des propriétaires en interdisant l’abandon des bâtiments. Cela signifie qu’à l’avenir ils ne pourront plus abandonner leurs bâtiments sans s’exposer à des répercussions.
En plus d’interdire l’abandon de bâtiments, la mesure législative proposée interdit à un propriétaire de faire sombrer ou échouer sciemment un bâtiment, de laisser un bâtiment à la dérive pendant plus de 48 heures sans prendre de mesures pour le sécuriser, et de laisser un bâtiment en très mauvais état échoué, ancré, mouillé ou amarré au même endroit pendant plus de 60 jours consécutifs sans autorisation. Ces mesures visent les bâtiments les plus susceptibles d’être abandonnés ou de devenir des épaves.
Une autre importante dimension du projet de loi autorise le gouvernement fédéral à prendre des mesures préventives afin de s’occuper des bateaux posant problème avant que ceux-ci ne présentent des risques plus importants ou ne deviennent plus coûteux à gérer. L’une de ces mesures préventives permet notamment au gouvernement d’ordonner aux propriétaires de bateaux de prendre des mesures correctives dès qu’il est établi que le bateau présente, ou peut présenter, un danger.
Si le propriétaire d’un bâtiment est inconnu ou qu’il refuse ou n’est pas en mesure de suivre les ordres reçus, le gouvernement fédéral sera non seulement autorisé à prendre toutes les mesures jugées nécessaires pour régler tous les types de dangers posés par les épaves ou les bâtiments abandonnés ou délabrés, mais il pourra aussi tenir le propriétaire responsable des coûts et des frais engendrés par la prise desdites mesures.
[Français]
Le texte législatif propose d’intégrer à la loi canadienne la Convention internationale de Nairobi sur l’enlèvement des épaves, qui date de 2007.
Cela renforcera le principe de pollueur-payeur en requérant que les propriétaires de bâtiment d’une jauge brute égale ou supérieure à 300 tonnes soient couverts par une assurance ou une autre garantie financière afin de couvrir les coûts relatifs à l’enlèvement d’une épave dangereuse.
Il est aussi de la responsabilité du propriétaire de localiser, de signaler et d’enlever son épave si cette dernière présente un risque potentiel. Cette législation étend notamment ces exigences à l’ensemble des eaux canadiennes, y compris la zone économique exclusive du Canada.
La Convention de Nairobi établit des règles sur les droits et obligations des propriétaires de bâtiments, des États côtiers et des États du pavillon en ce qui a trait aux épaves. Elle accorde également aux États parties un régime mondial des responsabilités, d’assurance obligatoire et d’action directe à l’encontre des assureurs.
[Traduction]
Le projet de loi C-64 regroupe également les dispositions actuelles en matière d’épaves et d’assistance en un seul texte de loi, en y incorporant les dispositions de la Loi de 2001 sur la marine marchande du Canada qui traitent de la Convention internationale de 1989 sur l’assistance, en plus de celles qui portent sur les fonctions du receveur d’épaves.
Plusieurs importants changements ont notamment été apportés aux fonctions essentielles et établies depuis longtemps du receveur d’épaves, qui relève de Transports Canada, afin de mieux protéger et préserver les droits des propriétaires d’épaves et des assistants. Par exemple, pour pouvoir jouer efficacement son rôle de dépositaire, le receveur d’épaves doit être tenu informé de la découverte d’une épave par un assistant et de son désir de la conserver. Les nouvelles dispositions du projet de loi C-64 interdisent donc aux assistants de prendre possession d’une épave sans l’autorisation préalable et formelle du receveur d’épaves — à moins que l’épave soit en danger et requiert une protection immédiate.
Honorables sénateurs, ce projet de loi donnera à la stratégie nationale le mordant dont elle a besoin pour s’occuper des épaves et des bâtiments abandonnés ou dangereux. Le projet de loi C-64 prévoit notamment des sanctions administratives pécuniaires afin de décourager son non-respect, et prévoit aussi des infractions réglementaires afin de punir les contrevenants à la loi. Ce régime d’application de la loi couvre tant les embarcations de plaisance que les bâtiments commerciaux, qu’ils battent pavillon canadien ou étranger, qui se trouvent dans les eaux canadiennes et, dans certains cas, dans la zone économique exclusive du Canada.
[Français]
L’application de la nouvelle législation sera partagée entre Transports Canada et la Garde côtière canadienne. Ce partage des responsabilités tire avantage des rôles dissemblables, ainsi que des expertises et compétences distinctes des deux ministères. En particulier, la Garde côtière canadienne servira de premier point de contact afin de faciliter les procédures de rapport de bâtiments dangereux ou posant un problème.
De manière à appuyer la mise en œuvre efficace de la législation, la Garde côtière canadienne développe actuellement un inventaire national, ainsi qu’une méthodologie d’évaluation des risques afin de nous permettre de comprendre l’étendue de l’enjeu à l’échelle nationale et de nous aider à établir l’ordre de priorité de nos interventions en fonction des risques que posent les bâtiments.
De plus, les propriétaires de bateaux seront désormais responsables des coûts que peuvent comporter toutes mesures correctives entreprises par le gouvernement et lors des travaux de remise en état et de nettoyage. À cet égard, les propriétaires devront rendre des comptes. Le projet de loi C-64 donne également au gouvernement fédéral des autorités à la fois générales et clairement définies afin de remédier aux bâtiments et aux épaves qui présentent ou peuvent présenter des risques. Ainsi, le gouvernement fédéral sera en mesure d’intervenir en amont et de mener des actions sur tout bâtiment, peu importe la taille, le type ou l’endroit où il se trouve dans les eaux canadiennes.
[Traduction]
Permettez-moi de conclure en réaffirmant que le projet de loi C-64 est l’une des mesures qui composent la Stratégie nationale relative aux bateaux abandonnés et aux épaves. Les autres mesures de cette stratégie incluent : deux programmes de financement à court terme qui appuient les communautés dans l’évaluation et l’enlèvement de bâtiments abandonnés ou d’épaves. L’établissement par les propriétaires d’un financement à long terme pour la gestion des bateaux posant problème est une autre mesure dont nous assurerons le suivi, de même que l’amélioration de l’identification des propriétaires de bateaux et des initiatives visant à faire mieux connaître la nouvelle loi et à sensibiliser les intervenants aux questions de recyclage et de conception des bâtiments.
Cette stratégie globale vise à remédier aux causes, aux voies et aux répercussions de la gestion irresponsables des bâtiments. Nos côtes et nos voies navigables sont symboliques de la vie et de la culture canadienne. Ces mesures, conjuguées au projet de loi C-64, contribueront à prévenir l’existence d’épaves et de bâtiments abandonnés et délabrés dans les eaux canadiennes ou à réduire leur nombre pour le bien des générations futures.
Honorables sénateurs, j’aimerais vous remercier à nouveau pour l’attention particulière que vous porterez à l’examen de la mesure législative, et je me réjouis à la perspective de prendre connaissance de vos questions. Merci.
Le président : Merci, monsieur le ministre.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : Merci, monsieur le ministre, de votre présence. Évidemment, la situation idéale, c’est que les bateaux qui feraient naufrage auraient une assurance. Donc, on pourrait réclamer l’argent et tout y irait bien avec l’application de cette nouvelle loi. Si ce n’est pas le cas, quelles seront les mesures prises avec les provinces? Dans certains cas, je pense au Québec, vous pourriez déléguer les pouvoirs de cette loi au Québec pour qu’ils s’occupent de l’épave, du naufrage. Ensuite, qui va payer la note?
M. Garneau : Je vous remercie de cette question. Sous la Convention internationale de Nairobi, tous les bâtiments qui pèsent plus de 300 tonnes devront avoir une assurance qui couvre la situation d’assurance requise pour s’occuper d’une épave ou d’un bâtiment qui fait naufrage ou qui coule. En dessous de ce poids, ce n’est pas requis.
Quand on parle de petits bateaux, cela comprend aussi les petits bateaux de plaisance et de pêche. Nous voulons travailler avec les provinces et les territoires pour mettre en place un système d’enregistrement provincial semblable à celui utilisé pour l’enregistrement d’une automobile. On voudrait faire la même chose dans le cas de petits bateaux de plaisance et d’autres petits navires afin d’identifier les propriétaires de navires.
Dans le cas où un navire coule et que son propriétaire n’a pas d’assurances, qu’il ne veut pas payer ou qu’il a fait faillite, nous proposons le fonds que j’ai mentionné brièvement à la fin de ma présentation. Il s’agit d’un fonds consolidé auquel — on est en train de déterminer comment on pourrait le développer — contribueraient tous les propriétaires de bateaux. À l’achat de leur navire, les propriétaires verseraient un petit montant dans ce fonds qu’ils pourront utiliser, notamment lorsqu’ils n’ont pas d’assurance, ce qui évitera de répercuter ces coûts sur les contribuables. Il y a un nom un peu semblable en anglais, soit le Ship-source Oil Pollution Fund.
S’il y a un déversement, les coûts sont parfois couverts par ce fonds. Tous les propriétaires de bâtiments contribuent à ce fonds pour qu’un montant soit disponible lorsqu’il y a un déversement et que l’assurance n’est pas suffisante ou que le propriétaire n’a pas l’argent pour payer tous les frais de nettoyage et les compensations pour les victimes. On veut créer un fonds semblable pour ce qui est des épaves et des bâtiments abandonnés.
La sénatrice Miville-Dechêne : D’ici à ce que cela soit mis sur pied, s’il y a des opérations que vous déléguez au Québec...
M. Garneau : Nous ne comptons pas déléguer cela aux provinces à l’heure actuelle. La responsabilité est celle de la Garde côtière canadienne et du gouvernement fédéral. Par exemple, on vient de se débarrasser, à Beauharnois, du Kathryn Spirit. C’était un projet impliquant un gros navire. La Garde côtière canadienne a pris en charge le projet et, heureusement, vient de le compléter. C’était une de ces situations où l’argent n’était pas là et c’est le gouvernement fédéral qui a été obligé de payer. On ne veut pas faire cela continuellement. On veut que ce soit éventuellement un programme qui se finance, soit par les assurances des propriétaires ou par ce fonds que j’ai mentionné.
La sénatrice Miville-Dechêne : Merci.
M. Garneau : Bienvenue.
La sénatrice Gagné : Bienvenue, monsieur le ministre. Bienvenue à vous tous et à vous toutes. Ma question porte sur la gouvernance et l’attribution des pouvoirs. Le projet de loi définit les rôles et les responsabilités du ministre des Transports, du ministre des Pêches et des Océans et de la Garde côtière canadienne. On peut conclure les accords nécessaires pour voir à l’application de la loi.
Selon ma compréhension, les administrations portuaires canadiennes ont déjà certains pouvoirs en vertu de la Loi maritime du Canada. Je crois qu’ils seraient aussi appelés à mettre en application la loi. Dans ce contexte de gouvernance partagée, comment assure-t-on la coordination fluide, mais rigoureuse des activités de respect et d’application de cette loi?
M. Garneau : C’est une excellente question. J’ai tendance à penser que Pêches et Océans Canada, la Garde côtière canadienne et Transports Canada travaillent de très près sur divers projets. Si l’on remonte assez loin, la Garde côtière canadienne a déjà fait partie de Transports Canada. Il y a un historique là. Nous travaillons ensemble de très près et les responsabilités sont bien définies.
Par exemple, si Transports Canada juge qu’une épave représente un problème pour la navigation, cela relève de Transports Canada. Par contre, si une épave a des réservoirs de carburant à moitié pleins ou pleins et qu’une perforation de ces réservoirs cause un déversement, c’est la Garde côtière canadienne qui s’en occupe. Nos responsabilités sont bien définies et je ne crois pas qu’on arrive dans une situation où l’on se demande qui doit faire quoi.
La sénatrice Gagné : Pour ce qui est des administrations portuaires canadiennes, comment est-ce qu’elles seront impliquées?
M. Garneau : Quant aux autorités portuaires, je vais me tourner vers mon équipe. Bien sûr, elles ont un mandat d’agir en tant que ports de commerce. Elles ont des responsabilités en ce qui concerne les navires qui entrent dans ces ports. Disons, par exemple, qu’un navire délabré est stationné à un quai dans une autorité portuaire. Si ce navire y est toujours après 60 jours et qu’il y a la possibilité qu’il coule, d’abord, le propriétaire serait obligé de discuter avec l’autorité portuaire des mesures à prendre plutôt que de le laisser là.
Les autorités portuaires ont des responsabilités et c’est dans leur intérêt de ne pas avoir des bâtiments délabrés qui sont simplement abandonnés ou qui occupent un quai pour une longue période de temps. Dans ce sens-là, si ce n’est pas eux qui sont responsables des bâtiments abandonnés, c’est encore une fois les deux ministères, mais ils ont un rôle à jouer par rapport aux navires qui se trouvent dans leur port. Dans le cas des ports pour petits bateaux, il y a de petits navires qui pourraient couler et c’est la Garde côtière canadienne qui en est responsable.
La sénatrice Gagné : Merci.
Le sénateur Cormier : Merci, monsieur le ministre, d’être venu témoigner devant nous. J’ai une question qui touche aussi la gouvernance, mais d’abord, j’ai une demande de précision sur la question de la terminologie utilisée. Je fais référence aux articles 32 et 5.
Au paragraphe 32(2), au sujet des bâtiments abandonnés, on peut lire ceci :
Sauf preuve contraire, est présumé avoir abandonné un bâtiment le propriétaire de celui-ci qui le laisse sans surveillance pendant deux ans.
Il y a une précision au paragraphe 32(3) selon laquelle, et je cite :
[…] il n’est pas nécessaire que le propriétaire d’un bâtiment le laisse sans surveillance pendant deux ans pour qu’il y ait contravention […]
Comment définit-on un bâtiment abandonné? J’aimerais aussi mieux comprendre, au paragraphe 5(3), comment on détermine si bâtiment est patrimonial ou non.
Je vais aussi vous poser une question au sujet de la gouvernance. Elle va dans le même sens que celle de la sénatrice Gagné. Je suis de Caraquet, qui est un petit port de mer. Il y a une épave, admettons, par le passé...
[Traduction]
Le président : Je m’efforce de limiter les interventions à deux questions. Le ministre doit nous quitter à 20 h 45.
[Français]
Le sénateur Cormier : Je vais poser une question concernant la gouvernance. J’aimerais comprendre davantage le processus. Si, chez nous, il y a une épave, son propriétaire est en Floride et on n’arrive pas à le joindre, quel est le processus? Qui a la première responsabilité? Est-ce le port, la municipalité, la Garde côtière? Comment le processus est-il établi pour faire en sorte que l’épave soit enlevée?
M. Garneau : En ce moment ou avec la loi?
Le sénateur Cormier : Le processus au moment de la loi.
M. Garneau : Quand la loi sera en place, il s’agira de savoir qui est le propriétaire et c’est cette personne qui en aura la responsabilité. Il sera très clair qu’un propriétaire sera responsable dès l’achat de son navire jusqu’au moment où il s’en débarrassera. Il ne peut pas simplement le laisser là.
Si la Garde côtière canadienne est obligée de faire le nettoyage parce que cela représente un risque, à ce moment-là, le propriétaire sera responsable des coûts. Si cette personne refuse de payer, on peut prendre des mesures additionnelles, telles des pénalités, pour se débarrasser du navire.
Le sénateur Cormier : Est-ce que le port local est responsable financièrement?
M. Garneau : Non, c’est le propriétaire qui est responsable. Le port local, s’il fait son travail, il ne se met pas dans cette position, du moins nous l’espérons. C’est le propriétaire qui est responsable. C’est la responsabilité du propriétaire qui nous concerne le plus.
[Traduction]
Le sénateur Plett : Je vous remercie de votre présence, monsieur le ministre. Cela fait un moment que vous avez comparu devant nous, mais nous sommes heureux de vous revoir.
M. Garneau : C’est bon aussi de vous revoir, monsieur le sénateur.
Le sénateur Plett : Je me retrouve dans une position plutôt particulière et constructive en ce sens que j’appuie l’un des projets de loi que vous présentez, monsieur le ministre.
M. Garneau : Je savais que si j’occupais le poste de ministre des Transports suffisamment longtemps, ce moment arriverait tôt ou tard.
Le sénateur Plett : Nous nous trouvons dans cette position. Comme nous le savons, le projet de loi découle du projet de loi d’initiative parlementaire C-695, présenté par le député John Weston.
Je crois en effet qu’il s’agit d’un bon projet de loi, monsieur le ministre.
Ma question est liée à la Convention de Nairobi que vous avez mentionnée à quelques reprises au cours de votre déclaration préliminaire. Dans un document de travail publié par Transports Canada en avril 2010, le ministère a fait remarquer que le Canada avait trois options en ce qui concerne la Convention internationale de Nairobi sur l’enlèvement des épaves.
La première option est le statu quo, dans le cadre duquel le Canada s’abstiendrait de ratifier ou de signer la convention. La deuxième option consisterait à ratifier la convention sans l’étendre aux eaux intérieures et à la mer territoriale du Canada. La troisième option consisterait à ratifier la convention et à l’étendre aux eaux intérieures et à la mer territoriale du Canada. Le ministère recommandait la troisième option, c’est-à-dire qu’il suggérait que le Canada ratifie la convention et l’applique à ses eaux intérieures et sa mer territoriale.
Je présume, monsieur le ministre — et je ne devrais peut-être pas — que le gouvernement a choisi de mettre en œuvre la recommandation du ministère. Le projet de loi réglera-t-il les problèmes liés aux épaves ou aux bâtiments abandonnés dans les eaux intérieures ou la mer territoriale du Canada, outre ce qui est prescrit dans la Convention de Nairobi?
M. Garneau : Dans le cas d’une épave dans le lac Winnipeg, par exemple, la réponse est oui.
Le sénateur Plett : Merci. Vous m’avez donné votre réponse très rapidement. Voyez, monsieur le président, je pose des questions auxquelles on peut répondre rapidement.
En 2010, Transports Canada a publié un document de travail qui portait sur une partie du processus de consultation publique, et l’une des questions qui avaient été posées aux intervenants était la suivante : si le Canada signait la Convention de Nairobi, devrait-il l’appliquer à ses eaux intérieures et à sa mer territoriale?
Pouvez-vous me dire comment les intervenants ont répondu à cette question? La plupart d’entre eux étaient-ils en faveur de cette application? Étaient-ils catégoriques? Quels intervenants ont été consultés?
M. Garneau : Nous avons consulté un vaste éventail d’intervenants, y compris le secteur du transport maritime et les peuples autochtones, parce que bon nombre d’épaves se trouvent le long des côtes ou dans les eaux côtières qu’ils utilisent. Les collectivités sont touchées par les épaves parce que non seulement les épaves peuvent présenter des dangers pour l’environnement et la navigation, mais elles peuvent aussi constituer une pollution visuelle qui a des répercussions sur le tourisme ou qui dépare simplement le paysage.
Nous avons consulté tous les secteurs, car il est reconnu que c’est la chose responsable à faire. Il n’est pas juste d’imposer aux contribuables ces dépenses, car, si nous procédons au nettoyage, les contribuables devront déjà assumer les coûts de l’enlèvement de certaines épaves qui sont dans nos eaux depuis très longtemps.
Une fois que le projet de loi C-64 aura force de loi, la Convention de Nairobi sera appliquée automatiquement trois mois plus tard, et les intervenants sont favorables à cette application. À ma connaissance, personne n’a déclaré ne pas vouloir assumer la responsabilité de leurs propres bâtiments.
Le sénateur Dawson : Je suis heureux de constater que vous êtes heureux, sénateur Plett. Je tiens à dire que le mandat moyen des ministres des Transports du gouvernement précédent était inférieur à deux ans et, maintenant, nous avons le même ministre depuis trois ans. Il nous a fallu attendre trois ans, mais vous avez la satisfaction d’avoir posé votre question.
[Français]
Ma première question est au sujet de la clarification de la zone économique exclusive, et la deuxième, c’est vraiment une question...
[Traduction]
... la formulation employée ici ne m’est pas familière. Dans ses notes d’allocution, le ministre indique qu’il aimerait que nous apportions un amendement au projet de loi. Habituellement, lorsque nous tentons d’apporter des modifications, nous faisons face à de la résistance. Comment aimeriez-vous que nous procédions pour apporter une modification au projet de loi relativement aux sépultures militaires en mer? Que se passera-t-il lorsque nous renverrons le projet de loi à la Chambre des communes? Pensez-vous que vous obtiendrez l’appui des députés?
Dans le passé, il est arrivé que des amendements apportés par notre comité soient rejetés par l’autre endroit, et je ne voudrais pas vous mettre dans une situation où notre libellé serait interprété incorrectement en raison d’une formulation ambiguë. Il s’agit là d’une offre de coopération proposée dans le même esprit que celui du sénateur Plett.
M. Garneau : Cela s’applique à la zone économique du Canada et, en ce qui a trait à l’amendement, nous avons le sentiment qu’il serait bon de l’apporter au projet de loi. Nous ne craignons pas que l’un ou l’autre des partis s’élève contre cet amendement. Tous les partis appuient cette modification.
Vous avez raison, en ce sens que, lorsqu’un amendement est proposé, nous avons abordé le sénateur Campbell et nous lui avons demandé s’il pourrait le présenter.
Le sénateur Dawson : Larry?
M. Garneau : Oui.
Le président : Le sénateur Manning a déjà offert de le présenter, et il siège au sein de notre comité. Nous préférerions mettre l’amendement au point ici et nous assurer que le ministère et le comité emploient le même langage avant de renvoyer l’amendement au Sénat. Nous aimerions nous en occuper en comité.
M. Garneau : Nous pourrions nous accommoder de cette solution aussi et, oui, vous avez raison : si vous présentez cette modification, nous considérerons qu’il s’agit là d’un amendement favorable. Il faudrait qu’il soit renvoyé à la Chambre des communes, qui vous le renverrait par la suite, mais je peux vous assurer que l’amendement serait une simple formalité.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue, monsieur le ministre. J’ai quelques questions à vous poser.
Au paragraphe 74(1), vous faites référence à un agent de l’autorité qui peut entrer dans un bâtiment aux fins de vérifications, mais on ne précise pas s’il s’agit d’un agent de la paix. Cette définition n’est-elle pas trop large selon la Charte canadienne des droits et libertés?
Il y a toute une procédure à suivre lorsqu’on entre dans un lieu privé. Cet article ira-t-il au-delà du pouvoir d’un agent de la paix? En tant que propriétaire, cela violera-t-il mes droits selon la Charte canadienne des droits et libertés?
En tant que propriétaire d’un bâtiment, je contesterais une telle intrusion puisque les pouvoirs de l’agent, qui ne m’apparaît pas être un agent de la paix, ne sont pas établis.
[Traduction]
Michelle Sanders, directrice, Politique sur l’eau propre, Transports Canada : Pour pouvoir entrer dans un lieu privé, il faudrait que vous demandiez un mandat de perquisition, à moins que vous ayez des raisons de croire que la loi a été enfreinte. La plupart des lois sur le milieu marin confèrent des pouvoirs d’application de la loi standard à des agents d’application de la loi. Leurs pouvoirs ressemblent à ceux qu’exercent les agents de la paix, même s’ils ne sont pas considérés comme tels. Toutefois, ils jouissent de certains pouvoirs, comme celui de perquisition, d’entrée dans des lieux s’ils ont des raisons de le faire, s’il y a eu violation de la loi. Cependant, pour entrer dans un lieu privé, il faut qu’ils obtiennent un mandat de perquisition.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Donc, l’agent devra obtenir un mandat de perquisition avant d’entrer, si je comprends bien.
M. Garneau : À moins qu’il croie qu’il y a eu une violation de la loi.
Le sénateur Boisvenu : Le Code civil au Québec prévoit des règles en matière de responsabilité civile. Avez-vous consulté le Barreau du Québec ou le ministère des Transports par rapport à l’occupation d’un territoire où les règles sont déterminées par le Code civil du Québec?
M. Garneau : Avant d’en arriver à ce libellé, nous avons fait une vérification auprès du ministère de la Justice. Nous considérons que des vérifications sont faites selon ce qui arrive au Québec ou dans d’autres provinces. Il y a lieu de croire que cela a été vérifié et que c’est acceptable pour le Québec aussi.
Le sénateur Boisvenu : Toutefois, il n’y a pas eu de consultation officielle.
M. Garneau : Ce serait le ministère de la Justice qui la ferait.
[Traduction]
Le sénateur Manning : Je souhaite la bienvenue à nos invités. Je crois que c’est hier que le Sénat a adopté en troisième lecture la loi sur la gentillesse, et, déjà, les effets en sont déjà visibles ici. J’en suis ravi et j’ai sûrement hâte de proposer un amendement au projet de loi. Je vous remercie de l’accepter.
En 2001, deux navires lithuaniens sont entrés dans le port de Bay Roberts, à Terre-Neuve-et-Labrador, et il a fallu sept années pour les en sortir, parce que, comme vous l’avez dit, à part les craintes qu’on éprouvait pour l’environnement, la pollution visuelle, pour la qualifier aimablement, était particulièrement choquante. La loi accorde un délai de 60 jours. Après, comment entamer le processus pour déplacer ces navires? Et qu’arrive-t-il s’ils naviguent sous pavillon de complaisance, par exemple, en étant enregistrés dans un pays et appartenant à un ressortissant d’un autre pays? Le fonds pour s’occuper de cette situation sera-t-il en place, parce que vous risquez de ne pas retrouver les véritables propriétaires et vous adresser à eux? Je cherche à contrôler le processus.
M. Garneau : Il est sûr que nous voulons au moins connaître l’identité du propriétaire, parce que ce sera obligatoire. Et si le délai est écoulé, il s’agira ensuite de le prévenir qu’il doit déplacer son navire. S’il reste introuvable et si nous avons des raisons de croire que le navire présente un danger, nous devrons agir. Mais nous préférerions le retrouver et le mettre devant ses responsabilités, si le navire est manifestement abandonné. Le conduire à Bay Roberts pour l’y abandonner serait illégal.
Le sénateur Manning : La nouvelle loi permettrait d’agir en moins de sept ans?
M. Garneau : Absolument. C’est sa raison d’être. Nous ne voulons pas supporter ces horreurs pendant des années.
Le sénateur Manning : Le projet de loi vise les navires à partir de 300 tonneaux de jauge brute, soit, comme vous le savez, 3 p. 100 des bâtiments immatriculés au Canada. À Terre-Neuve-et-Labrador, il y en a beaucoup d’un tonnage inférieur, et je vous comprends de vouloir examiner les règlements qui s’y appliquent. Des règlements exigeront-ils d’assurer ces navires aussi, même si le projet de loi ne concerne que ceux d’au moins 300 tonneaux?
M. Garneau : Actuellement, la Convention de Nairobi vise les navires à partir de 300 tonneaux de jauge brute. Mais la disposition des nombreux petits navires incombera néanmoins à leurs propriétaires. S’ils veulent les assurer, tant mieux. Libre à à eux, mais ça ne les soustrait pas à leurs responsabilités. Au-dessus de 300 tonneaux, la disposition du navire commence à être très coûteuse, et nous tenons à ce qu’ils soient assurés. Mais les propriétaires des navires de moins de 300 tonneaux, même s’ils ne sont pas obligés d’être assurés, conservent des obligations pour la disposition.
Le sénateur Manning : Ils resteront responsables.
M. Garneau : Oui.
Le sénateur MacDonald : Ce projet de loi me plaît vraiment, et je tiens à vous aider à le renforcer. Pendant mes jeunes années, à Louisbourg, j’ai vu beaucoup d’épaves. Certaines ont même causé des pertes de vie. Mais j’ai aussi vu ces coques rouillées encombrer le littoral pendant des décennies sans qu’on ait tenté de les faire disparaître. Cette initiative est la bienvenue.
Vous vous souviendrez que, il y a un certain nombre d’années, le MVMiner s’est échoué sur l’île Scatarie, près de ma ville natale. Mon grand-père était le gardien du phare de l’île dans les années 1920, et j’ai visité l’endroit.
Cet accident a coûté environ 12 millions de dollars à la Nouvelle-Écosse. Si le projet de loi est adopté et que ces dispositions sont opérantes, protégeront-elles la province de la nécessité de payer ces frais elle-même?
M. Garneau : Nous ne voulons pas refiler la facture aux contribuables ou aux provinces, mais responsabiliser les propriétaires. Le Miner est un exemple, le Kathryn Spirit aussi. Ma collègue de la Nouvelle-Écosse, Bernadette Jordan, de St. Margarets, a joué un rôle important dans le projet de loi, par une motion visant les navires naufragés et abandonnés, et c’est grâce à ses efforts qu’on a débarrassé Shelburne du Farley Mowat.
L’objectif est de responsabiliser soit l’assureur, soit le propriétaire, pour l’enlèvement de l’épave. Puis-je vous dire que le projet de loi couvrira toutes les situations possibles, si le propriétaire disparaît sans laisser de trace et que le navire est totalement abandonné? Malheureusement, ça arrive. Actuellement, l’État fédéral aurait hérité de la responsabilité, mais c’est la raison pour laquelle nous créons ce fonds auquel chacun contribuera. Nous pourrons ainsi y puiser si nous nous trouvons dans ce genre de situation.
Le sénateur MacDonald : D’autres fonds se trouvent déjà sous le régime du Plan de protection des océans, qui est provisionné à hauteur de 1,5 milliard de dollars. Quels sont les critères d’affectation de ces sommes? Et comment déterminez-vous l’admissibilité des épaves à ce financement?
M. Garneau : Le Plan de protection des océans, provisionné à hauteur de 1,5 milliard, s’applique à une cinquantaine d’activités qui nous ont été confiées. Il ne vise pas précisément les navires naufragés ou abandonnés, mais il est destiné à améliorer la sécurité maritime, l’intervention en mer. Il sert à l’acquisition d’éléments d’actif pour la Garde côtière. Il englobe le concours des Premières Nations côtières. Actuellement, nous avons deux petits fonds. L’un, de Transports Canada, est le Programme des bateaux abandonnés; l’autre relève de la Garde côtière pour les ports pour petits bateaux, et il s’y trouve de l’argent. Nous avons déjà évalué ou fait disparaître un peu plus de 100 petites embarcations qui encombraient depuis des années certains ports. Mais ça ne suffira que pendant un certain nombre d’années. Après l’épuisement du fonds, nous espérons commencer à puiser dans le nouveau pour les embarcations qui subsisteront, les épaves qui traînent un peu partout depuis des décennies et dont nous avons hérité.
Le sénateur MacDonald : Merci.
Le président : J’ai des questions à ce sujet. Combien en coûtera-t-il pour se débarrasser des navires abandonnés et des épaves déjà connues de Transports Canada?
M. Garneau : Ça peut aller de 5 000 à 10 000 $ pour un petit bateau de plaisance coulé au fond du havre de Ladysmith, dans l’île de Vancouver, à des millions de dollars, pour le Kathryn Spirit et le Miner. Ça dépend de la taille du navire.
Le président : Avons-nous une estimation du coût total de l’élimination de toutes ces épaves ou est-il impossible de toutes les éliminer?
M. Garneau : Nous pourrons estimer le coût. Actuellement, la Garde côtière essaie de parachever l’inventaire des épaves connues du Canada. Notre pays possède la plus grande longueur de côtes dans le monde, et beaucoup d’eaux intérieures, et il faudra un certain temps pour dresser l’inventaire. Mais, quand nous l’aurons, nous pourrons, en théorie, estimer le coût de l’élimination de toutes les épaves. Notre méthode n’est pas d’y affecter d’un coup des milliards — je le suppose, des milliards ou des centaines de millions — pour débarrasser notre pays de toutes ses épaves.
En fin de compte, c’est un peu comme le financement fédéral du nettoyage des lieux d’enfouissement des déchets. Il y en a 4 000 dans notre pays, et nous y affectons un peu d’argent, chaque année, pour les dépolluer, par exemple les mines abandonnées et les lieux fédéraux d’enfouissement des déchets contaminés, héritage d’un passé peu soucieux des bonnes méthodes d’élimination. C’est un chantier permanent. Nous pourrions déterminer le montant, peut-être. Il me serait difficile de prédire ce qu’il pourrait être.
Le président : Est-ce que, concrètement, le fonds existe, et est-il destiné à grossir en tel endroit ou est-ce simplement une écriture comptable pour le Trésor?
M. Garneau : Non, ce sera un fonds qu’on appelle dédié. Il ne peut pas être versé dans le Trésor. Il a une destination réservée. Est-ce qu’il augmentera? Oui, au fil du temps, mais il sera également utilisé au fil du temps, parce qu’il subsiste encore un bon nombre d’épaves à éliminer.
Le sénateur Wetston : Mon nom est , et non Weston, mais, néanmoins, je persiste à croire que c’est un bon projet de loi.
Comme le sénateur MacDonald, j’ai grandi dans l’île du Cap-Breton, dans la grande ville de Sydney; lui, dans une petite communauté.
Le sénateur MacDonald : Un citadin sophistiqué.
Le sénateur Wetston : Et il me le rappelle. J’en parle non pour faire connaître ma biographie, mais pour exprimer ma fierté pour l’île du Cap-Breton, même si je suis un sénateur de l’Ontario. Je suis aussi très fier du Collège de la Garde côtière, que j’avais l’habitude de visiter de temps à autre. Ma question, monsieur le ministre, le concerne, mais indirectement.
Quel genre d’investissement faites-vous dans ce collège, pour le faire croître, dans son organisation, ses compétences, la formation, et cetera? Est-ce que ses diplômés participent au domaine d’activités dans lequel vous vous engagez?
C’est manifestement un domaine important. Comme d’autres sénateurs, j’appuie moi aussi cette initiative. J’ai vu certaines de ces épaves délabrées autour de l’île du Cap-Breton, dont nous voulons conserver toute la beauté.
Pouvez-vous nous renseigner sur ce domaine particulier d’activités dont vous êtes chargé?
M. Garneau : Comme vous le savez, la Garde côtière relève de mon collègue, Jonathan Wilkinson.
Le sénateur Wetston : Oh, de l’autre ministre. D’accord
M. Garneau : Il y a un certain nombre de décennies, ça relevait des Transports, mais il y a eu des chambardements.
Le sénateur Wetston : Je savais que j’arrivais trop tard, mais vous avez des représentants de la Garde côtière.
M. Garneau : Peut-être que mon collègue pourra en parler. Je ne connais pas très bien le dossier du collège, mais je suis convaincu que c’est un excellent établissement. Peut-être que Mme Gascon peut en parler.
Julie Gascon, directrice générale des opérations, Garde côtière canadienne, Pêches et Océans Canada : Merci, monsieur le sénateur. Je suis de la promotion de 1998 du collège et navigatrice de métier. Le collège poursuit sa croissance. Un directeur dynamique en tient le gouvernail. Ses programmes embrassent toutes sortes d’activités et de formations pour nos officiers. À l’obtention de leur diplôme, ils pourront participer à tous les programmes de la Garde côtière.
Ce nouveau programme est génial : nous avions la recherche et le sauvetage, que vous connaissez bien; nous avons les interventions pour l’environnement, que vous connaissez bien aussi; désormais nous bouclons la boucle, grâce à l’autorité et aux pouvoirs nouveaux qui nous seront confiés relativement à ces navires.
Le programme du collège sera bonifié pour assurer à ses élèves-officiers une bonne formation, qui permettra leur participation à ce programme. Il en sortira de nombreux diplômés qui viendront combler les départs à la retraite. Nous sommes fiers des progrès du collège. Cette année, nous avons recruté une classe de 80 élèves. Nous sommes donc très heureux des progrès réalisés par le collège. En plus de ses investissements importants, vous savez peut-être qu’il a accueilli les victimes d’inondations en Nouvelle-Écosse, beaucoup de familles que nous avons aidées jusqu’à ce qu’elles puissent retourner chez elles. Le collège est bien vivant.
Le sénateur Wetston : Merci beaucoup de votre réponse. J’espère que, monsieur le ministre, nous avons tous les deux appris quelque chose aujourd’hui.
Mon sujet suivant d’inquiétude découle des clauses de la Convention internationale de Nairobi et de l’importance de cette convention pour l’application de la loi qui résultera de l’adoption du projet de loi C-64. Vous pourrez peut-être me corriger si j’avais tort de m’inquiéter.
Pendant l’étude du projet de loi en comité, on y a remarqué l’absence des clauses de la convention touchant le droit du propriétaire de conclure un contrat avec l’entreprise de son choix pour enlever l’épave et de celles touchant la capacité du pays ou de l’État de formuler les conditions pour l’élimination de l’épave seulement dans la mesure nécessaire pour assurer la sécurité et la protection de l’environnement.
Le cas échéant, qu’est-ce qui justifie ce silence sur le droit du propriétaire?
Je serai heureux que vous me signaliez mon erreur.
Marc-Yves Bertin, directeur général, Politique maritime, Transports Canada : Pour commencer, vous n’avez pas tort, mais vous n’avez pas entièrement raison. Qu’en dites-vous?
Le sénateur Wetston : Un autre politicien.
M. Bertin : J’essaie.
Le projet de loi fusionne une loi qui porte sur la convention sur le sauvetage avec d’autres dispositions en un tout intégré et complet.
Cela dit, nous ne proposons pas de modification à la loi actuelle et à la convention, mais la convention prévoit exactement ce que vous dites.
Le sénateur Wetston : Merci.
[Français]
Le sénateur Cormier : Je reviens à ma question à propos du patrimoine. Le Canada a le grand défi de bien définir et surtout de préserver son patrimoine. J’aimerais savoir comment est menée la collaboration pour déterminer si un bâtiment est patrimonial. En ce sens, dans la définition de « bâtiment délabré », on indique « est incapable de naviguer en toute sécurité ». En ce qui a trait aux bateaux — on en voit beaucoup à l’extérieur de l’eau chez nous —, font-ils partie ou non de cette catégorie de bâtiment délabré?
M. Garneau : En dehors de l’eau? Non.
Le sénateur Cormier : Si vous allez à Shippagan, vous verrez une série de bateaux délabrés.
M. Garneau : Ce sont les bateaux dans l’eau ou sous l’eau qui nous concernent.
Pour ce qui est de la question du patrimoine, c’est Parcs Canada qui a le mandat de décider si un bâtiment est patrimonial.
Le sénateur Cormier : C’est parce que vous dites « à l’échelon fédéral-provincial » dans la description.
M. Garneau : Si c’est au large de la côte de la Colombie-Britannique, cela relève du gouvernement fédéral. C’est la même chose du côté de l’Atlantique. Si c’est dans un lac, au milieu du pays, cela se situe dans nos eaux intérieures. Donc, le gouvernement fédéral et Parcs Canada prendront la décision.
[Traduction]
Mme Sanders : De plus, c’est l’une des raisons pour lesquelles nous collaborons étroitement avec les provinces et les territoires, non seulement à la définition de leur rôle et de notre travail sur les navires abandonnés et naufragés, généralement dans l’eau, mais pour reconnaître que beaucoup de ces bâtiments ayant été ramenés à terre, ils relèvent de la province ou du territoire. Nous avons collaboré avec leurs fonctionnaires pour déterminer leur rôle, les modalités de notre collaboration pour rendre plus efficace notre travail pour augmenter nos pouvoirs et la sensibilisation au problème que posent ces navires, dans l’eau et à terre, en reconnaissant leurs compétences dans ce domaine.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : J’aimerais revenir sur la question des champs de compétence. En ce qui a trait aux eaux intérieures, certaines sont de compétence provinciale et d’autres de compétence partagée. Plus tôt, vous m’avez répondu que vous n’avez pas l’intention de déléguer vos opérations pour rescaper ou pour vous occuper d’une épave. Allez-vous consulter la province lorsque l’épave se trouvera dans des eaux intérieures de juridiction provinciale? La province participera-t-elle à l’opération? Y a-t-il déjà eu des consultations? Est-ce qu’ils vous ont dit : « Faites ce que vous voulez; nous fermons les yeux »? Cela m’étonnerait.
M. Garneau : Non, non. On va certainement travailler de concert avec les provinces, mais ce que j’étais en train de dire, c’est que le fardeau fiscal nous revient.
La sénatrice Miville-Dechêne : Cependant, en ce qui concerne l’opération elle-même, pouvez-vous déléguer ou non les opérations à la province dans certains cas, comme dans le cas des eaux intérieures provinciales?
M. Garneau : On me dit qu’on peut déléguer les opérations si on choisit de le faire. Cependant, si je prends l’exemple du cargo Kathryn Spirit, un contrat a été octroyé à une entreprise, et c’est le cas pour les petites épaves qu’on a retirées de l’eau. Il y a généralement un appel d’offres. Un sous-traitant est alors choisi et ce dernier fait le travail pour une somme d’argent donnée.
La sénatrice Miville-Dechêne : Lors de cette opération, y a-t-il une consultation avant ou au cas par cas avec les provinces?
[Traduction]
Mme Sanders : Nos pouvoirs s’adressent aux risques pour la navigation sur la côte Ouest selon Transports Canada. Nous collaborons étroitement, dans la région de Victoria, par exemple, avec les autorités régionales, à la détermination des risques et des possibilités de maximiser l’efficacité de leur expertise relative à l’éventuelle localisation du navire, en fonction du littoral, ainsi que de leur expertise ou de leur matériel permettant la récupération et l’élimination du navire. La collaboration est intense et étroite quand l’épave ou le navire abandonné ont été identifiés, et nous prévoyons qu’elle se poursuivra, sachant les connaissances et l’expertise locales qu’elles possèdent et dont nous pourrons profiter.
La sénatrice Miville-Dechêne : Les provinces ne voient aucun problème à ce que vous interveniez dans leurs eaux, alors?
Mme Sanders : Non.
Le sénateur Plett : Je vais faire suite en quelque sorte, monsieur le ministre, à ce dont le sénateur MacDonald a parlé. Je suis désolé si vous en avez fait mention quelque part, mais je ne m’en rappelle pas. En lisant vos notes, je ne le trouve pas.
Nous avons parlé d’un fonds. Vous dites clairement dans vos remarques que les navires dont le poids est inférieur à un seuil donné ne sont pas tenus d’avoir une assurance mais qu’il y aura un fonds.
Quelqu’un est propriétaire d’un navire de moins de 300 000 tonneaux de jauge brute mais n’a pas d’assurance. Est-ce qu’une personne qui est propriétaire d’un navire versera moins d’argent dans ce fonds? Est-ce un fonds que le gouvernement mettra en œuvre? Comment fonctionnera-t-il? Est-ce que les gens verseront de l’argent dans ce fonds pour que si une personne abandonne son navire et fait faillite, les contribuables ne paieront pas la note? Vous dites qu’il y a un fonds, mais si ce fonds n’est pas financé par les contribuables, comment sera-t-il financé?
M. Garneau : L’idée du fonds est qu’il sera payé par les propriétaires de navires.
Le sénateur Plett : Selon la taille de leur entreprise?
M. Garneau : Oui. Nous n’avons pas réglé tous les détails. Ce n’est pas dans la loi. C’est quelque chose que nous faisons en marge de la loi. Nous mettrons au point les détails. Ce serait probablement lié à la taille du navire, au risque potentiel associé au coût si une situation survient. Ces détails doivent être réglés. L’idée est d’avoir ce fonds que nous pouvons utiliser au lieu de faire payer les contribuables dans les cas où nous ne pouvons pas retrouver la personne, qu’elle n’a pas d’assurance et que nous n’avons aucune autre solution de rechange. Plutôt que le gouvernement fédéral ait à payer, nous pigerons dans ce fonds. C’est le but de ce fonds.
Le sénateur Plett : Et ce peut être fait par réglementation?
M. Garneau : Oui. Il n’est pas nécessaire que ce soit fait par voie législative.
Le sénateur Plett : Merci.
M. Garneau : Il y a un exemple semblable appelé la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, qui est un fonds auxquels les propriétaires de navires cotisent pour ce type de situation exactement.
Notre principe premier est celui du pollueur-payeur, mais si nous sommes dans une situation où les gens ne sont pas en mesure de payer — et soit dit en passant, il y a des sanctions administratives que nous pouvons imposer également dans cette loi. Une personne peut se retrouver en prison. Il y a des mesures. Nous voulons sérieusement décourager les gens de se soustraire de leurs responsabilités.
Le sénateur Plett : Ne pourriez-vous pas simplement obliger tout le monde à avoir une assurance? Cette option a-t-elle été envisagée, ou est-ce trop compliqué?
M. Garneau : Je ne sais pas si cette option a été envisagée.
M. Bertin : Cela faisait partie du processus de consultation. Ce que nous avons relevé durant les consultations, c’est que le marché pour les navires de plus petite taille n’avait pas fait ses preuves, si bien que les assureurs étaient réticents à offrir un tel produit. Il y a un certain nombre de répercussions.
Le sénateur Plett : Merci.
Le président : Je veux des précisions sur ces fonds, car les gouvernements ont toujours des méthodes comptables étranges. Vous avez mentionné la caisse...
M. Garneau : La Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires.
Le président : Est-ce un fonds distinct ou cet argent est-il dans un fonds consolidé?
M. Garneau : C’est un fonds distinct qui est administré par une personne nommée par moi.
Le président : D’accord.
M. Garneau : C’est un fonds distinct et indépendant.
Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre.
Nous allons suspendre la séance quelques minutes. Les fonctionnaires vont rester, car je sais que bon nombre d’entre vous ont des questions. Nous allons ensuite lever la séance. Si vous n’avez pas de questions, nous allons excuser les fonctionnaires, et si vous avez des questions, ce sera formidable.
Je ne suis pas certain si nous avons des questions, alors ce sera peut-être la réunion la plus courte à laquelle vous aurez assisté.
Le sénateur Cormier : Ma question sera courte.
[Français]
Si un bateau est accosté à un quai et que le propriétaire a disparu, qui prend la décision de l’enlever? Comment le processus se fait-il? Si c’est le gouvernement fédéral qui prend la décision et qui paie, le port ou la municipalité est-il redevable? Y a-t-il des frais? Comment cela se passe-t-il?
[Traduction]
Mme Sanders : Le processus est que si on sait qu’il y a une épave pouvant potentiellement présenter un danger, on commencerait par effectuer une évaluation des dangers pour déterminer le risque que le navire pose. Si c’est dans un port, c’est Transports Canada et la Garde côtière canadienne qui ont actuellement la responsabilité en vertu de la loi.
Nous avons le pouvoir de déléguer cette responsabilité, par exemple, à l’une des administrations portuaires si elles sont intéressées de le faire, et nous avons élaboré nos processus de manière à assurer une uniformité dans la façon dont la loi est mise en œuvre.
C’est un pouvoir que nous avons. Nous n’avons pas encore décidé comment et si nous déléguions cette responsabilité à diverses administrations, mais ce pouvoir existe.
Pour ce qui est du processus, une évaluation des dangers serait effectuée pour déterminer les dangers présents, puis nous déciderions de la méthode appropriée pour gérer la situation.
Par exemple, dans le cas d’un risque associé à la pollution, nous voulons évidemment contenir le risque et y remédier. Si la meilleure voie à suivre est de retirer le navire, nous déterminerions les étapes appropriées à suivre. Par ailleurs, le propriétaire du navire est responsable des coûts.
Le sénateur Cormier : Mais s’il est parti?
Mme Sanders : Si nous ne savons pas qui est le propriétaire du navire et n’arrivons pas à le retracer, ce fonds à long terme disposerait des ressources pour aider à retirer le navire et à assumer les coûts.
Le sénateur Cormier : Donc, le port local n’aura pas à payer?
Mme Sanders : Le port local ne serait pas responsable des coûts associés au retrait du navire.
Le sénateur Cormier : Merci. Je vais dormir sur mes deux oreilles ce soir.
Mme Sanders : La mesure législative vise à tenir les propriétaires de navires responsables.
La sénatrice Miville-Dechêne : Je vais revenir sur cette question. Avec ce projet de loi, avez-vous l’obligation de consulter les provinces ou avez-vous l’intention de le faire? Y a-t-il une obligation de consulter si une situation survient et que vous devez intervenir? Avez-vous l’obligation de consulter la province, plus particulièrement si nous sommes dans des eaux provinciales?
Mme Sanders : Nous avons la ferme intention de consulter les provinces. Mme Gascon m’a rappelé durant la pause un exemple avec le Kathryn Spirit, où il y a eu un effort concerté entre la municipalité et le gouvernement provincial, qui travaillaient en étroite collaboration pour déterminer la marche à suivre appropriée. Chaque intervenant a une spécialité et une expertise à apporter à la situation. Si c’est en territoire provincial, nous voudrions travailler en étroite collaboration avec la province pour nous entendre sur la marche à suivre et sur la façon de régler la situation.
Mme Gascon : Dans le cas du Kathryn Spirit, un groupe de travail s’est vu confier un mandat. C’était municipal, provincial et fédéral, et nous consultons toujours beaucoup le conseil de bande des Mohawks.
[Français]
Alors, cela été le fruit de nombreux efforts. Le groupe de travail s’est concerté et nous avons produit un rapport avec des recommandations très détaillées pour éclairer la suite des événements en ce qui a trait au Kathryn Spirit. Il s’agit d’un effort incroyable qui a mené au succès du démantèlement de ce cargo.
Qu’il s’agisse d’une opération de recherche et sauvetage, d’un cas de réponse environnementale ou d’un navire abandonné, la Garde côtière canadienne et Transports Canada consulteront la province, informeront les citoyens et s’assureront que les risques et les enjeux sont bien identifiés pour mettre cela en œuvre. Il faut consulter les gens de la faune et des ministères provinciaux. Ce sont des efforts concertés qu’on doit faire pour s’occuper de ces navires.
La sénatrice Miville-Dechêne : Merci pour ces précisions. Le ministre a parlé de se servir du processus d’enregistrement. J’imagine qu’au Québec, les bateaux doivent être enregistrés. Donc, souhaitez-vous qu’il y ait une taxe supplémentaire imposée aux propriétaires de bateaux de plaisance pour financer le problème éventuel d’épaves?
[Traduction]
Mme Sanders : À l’heure actuelle, toutes les embarcations de plaisance doivent avoir un permis. C’est un permis d’embarcation de plaisance. Ce que nous essayons de faire, c’est de nous assurer que les données que nous avons sont plus robustes et d’améliorer le système pour que lorsqu’un navire est abandonné ou a fait naufrage, nous pourrons retrouver le propriétaire et le tenir responsable des coûts pour régler la situation.
L’idée du fonds est qu’à l’heure actuelle, un permis pour une embarcation de plaisance est gratuit. Il y a un effort en cours, d’un point de vue du recouvrement des coûts, pour imposer un frais pour recevoir votre permis. Pour le fonds, nous envisageons d’imposer un droit additionnel. C’est un peu comme une motoneige : lorsque vous l’enregistrez, vous devez payer 15 $ dans certaines provinces, mais il y a des frais d’entretien des sentiers de 5 $ qui s’ajoutent. Cet argent est versé dans un fonds précis destiné à l’entretien des sentiers. Le montant de 15 $ couvre les frais de délivrance du permis et de l’administration du régime, mais le montant de 5 $ sert à l’entretien des sentiers, si bien que ce sont les utilisateurs de motoneiges qui paient pour l’entretien des sentiers, et non pas les contribuables en général.
C’est le même concept. Ce sont les propriétaires de bateaux qui paieraient un montant quelconque dans un fonds qui serait utilisé dans l’éventualité où nous ne sommes pas en mesure de trouver le propriétaire du navire.
Le sénateur MacDonald : J’ai quelques questions rapides sur ce dont nous avons discuté auparavant. Les exigences prévues à l’article 24 prévoient que les navires seraient de 300 tonneaux de jauge brute ou plus. Les données nous révèlent que seulement 3 p. 100 des navires dans la flotte du Canada sont de 300 tonnes ou plus. Je suppose que cette exigence existe pour nous avantager ou pour avantager les propriétaires de navires canadiens.
Combien de navires étrangers qui viennent au Canada sont de 300 tonneaux de jauge brute ou plus? Avons-nous un nombre?
M. Bertin : Environ 98 p. 100 des navires battant pavillon étranger qui font escale dans les ports canadiens sont de 300 tonneaux de jauge brute ou plus.
Le sénateur MacDonald : Savons-nous quel pourcentage de ces navires sont adéquatement assurés à l’heure actuelle?
M. Bertin : Je vais vérifier mes notes et statistiques. De façon générale, pour ces navires de plus grande taille, le marché de produits d’assurance existe. En fait, la majorité des navires commerciaux — environ 90 p. 100 du tonnage mondial — font partie d’associations que l’on appelle des clubs P et I. Ils s’unissent et se couvrent mutuellement.
Le sénateur MacDonald : Y a-t-il des complications quant aux activités de récupération de ce que les navires transportent? Je ne pense pas seulement au pétrole, qui est toujours un problème. Soit ils en transportent, soit ils en ont à bord pour naviguer le bateau.
Mais s’ils transportent certaines marchandises, y a-t-il des complications avec cette mesure législative qui auraient une incidence sur le repêchage d’un navire ou le sauvetage des marchandises à bord d’un navire? Ou le gouvernement devrait-il examiner la valeur du sauvetage du navire et l’incorporer à la formule d’une certaine manière? Je suis curieux de savoir si c’est un facteur qui a été pris en considération.
M. Bertin : Je ne suis pas certain de comprendre la question.
Le sénateur MacDonald : Nous avons vu des navires être récupérés. Cela a-t-il une incidence quelconque sur les droits de récupération d’un navire?
M. Bertin : Il est déjà prévu d’incorporer dans la législation canadienne la Convention canadienne sur l’assistance. C’est une convention qui est entrée en vigueur en 1996. Ce que nous faisons est principalement un exercice de gestion interne pour incorporer dans la loi existante cette convention afin de tout réunir dans un seul document.
Le sénateur MacDonald : Merci.
Mme Sanders : Je peux ajouter quelque chose à ces remarques. Outre le régime de récupération, il y a le receveur d’épaves. Le receveur d’épaves est un rôle fondé sur le droit de l’amirauté britannique pour protéger les droits du sauveteur de même que les droits du propriétaire du navire. Nous avons tout regroupé — y compris les dispositions relatives au receveur d’épaves de la Loi sur la marine marchande du Canada, la convention sur l’assistance — dans un régime pour que tout se tienne. Avant que quelqu’un puisse prendre possession d’un navire pour le récupérer, il doit en aviser le receveur d’épaves et attendre d’avoir reçu le feu vert. Dans le cadre de ce processus, le receveur d’épaves a un devoir. Nous avons renforcé ces devoirs dans ce projet de loi, et l’état du navire doit être évalué. S’il y a un risque associé à la récupération ou au contenu du navire, le receveur d’épaves peut déterminer s’il peut conférer ou non les droits de récupération à la personne et quel sera le processus.
Le sénateur MacDonald : C’est là où je voulais en venir.
Le sauveteur et le propriétaire ne sont pas forcément la même personne.
Mme Sanders : Exact.
Le président : S’il n’y a plus de questions, merci. Nous allons passer à huis clos dans cinq minutes.
(La séance se poursuit à huis clos.)