Aller au contenu
TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule nº 44 - Témoignages du 20 novembre 2018


OTTAWA, le mardi 20 novembre 2018

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd’hui, à 9 h 31, pour étudier la teneur des éléments des sections 22 et 23 de la partie 4 du projet de loi C-86, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures.

Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Ce matin, nous entamons l’étude de la teneur des éléments des sections 22 et 23 de la partie 4 du projet de loi C-86, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en œuvre d’autres mesures.

Nous avons le plaisir d’accueillir notre premier groupe de témoins de la journée, constitué de représentants de Transports Canada, c’est-à-dire Mme Natasha Rascanin. Si j’ai bien compris, vous livrez votre exposé au nom de Transports Canada et de la Garde côtière canadienne. Est-ce exact? Mme Rascanin est accompagnée de M. Marc-Yves Bertin, directeur général de la Politique maritime; de Mme Julie Gascon, directrice générale des opérations à la Garde côtière canadienne — soyez de nouveau la bienvenue —, de M. Marc Sanderson, directeur général par intérim des Stratégies nationales à la Garde côtière canadienne;et, enfin, de Mme Anne Legars, administratrice à la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution des hydrocarbures causée par les navires.

Madame Rascanin, vous avez la parole. Ensuite, ce sera Mme Legars.

Natasha Rascanin, sous-ministre adjointe, Transformation, Transports Canada : Je vous remercie de votre invitation. Je suis heureuse de présenter les modifications législatives qui découlent des engagements pris dans le cadre du Plan de protection des océans. Pour commencer, un peu de contexte.

Le système actuel d’intervention environnementale du Canada veille à ce que le transport maritime soit sûr et respectueux de l’environnement, mais, également, à ce qu’il offre aux Canadiens la possibilité d’envoyer et de recevoir des marchandises à destination ou en provenance des marchés mondiaux. Ce système a fait ses preuves. Cela étant dit, comme l’environnement et les technologies sont en constante évolution, le Canada doit s’ajuster et s’améliorer. Grâce à ces modifications, nous précisons et renforçons les règles dans certains secteurs tout en accordant une plus grande souplesse dans d’autres.

Ces dernières années, le gouvernement a mené de vastes consultations d’un bout à l’autre des côtes, en ce qui concerne les améliorations potentielles du système actuel. Les modifications proposées résultent de cette consultation et de cet engagement.

Comme vous le savez bien, pas besoin d’accident ou de déversement pour que les navires exercent des répercussions sur l’environnement. Parmi ces répercussions, mentionnons le bruit sous-marin, la collision avec les mammifères marins ou l’érosion des berges. Les modifications proposées amélioreront la capacité du gouvernement d’adopter des règlements, le cas échéant, en vue de protéger les écosystèmes fragiles, y compris les baleines en voie de disparition, contre les impacts quotidiens de la navigation et du transport maritime.

Ces règlements seraient élaborés en fonction des meilleurs renseignements disponibles et des processus établis de consultation. Tous les Canadiens contribueront à leur conception finale.

Pour être mieux en mesure de répondre avec souplesse aux changements du milieu marin et de comportement de la faune, les modifications proposées conféreraient au ministre des Transports le pouvoir d’adapter des aspects réglementaires au moyen d’un décret de modification. Nous nous assurerions ainsi de protéger continuellement la vie et les milieux marins et d’assurer la souplesse qui permettrait d’éviter à l’industrie du transport maritime des fardeaux inutiles.

Afin de répondre rapidement aux risques imminents qui pèsent sur le milieu marin et sur la sécurité maritime, des modifications sont proposées afin de permettre au ministre des Transports de prendre un arrêté d’urgence qui exigera la prise de mesures immédiates. Cette solution permettrait de recueillir d’autres renseignements pour déterminer si une solution à long terme est de mise. Si une telle solution se révèle nécessaire, elle sera élaborée en collaboration avec les groupes autochtones et les joueurs du secteur.

Bien que nous mettions tout en œuvre pour prévenir les accidents et les déversements, il est impossible d’éliminer tous les risques. Nous devons être prêts à intervenir rapidement et efficacement. En fin de compte, comme le veut le système, ce sont les propriétaires de navires et les exploitations d’installations de manutention des hydrocarbures qui sont responsables de prévenir les déversements d’hydrocarbures, de s’y préparer et d’intervenir. Cependant, si le pollueur n’est pas disposé à intervenir, n’est pas en mesure de le faire ou est introuvable, la Garde côtière canadienne a la capacité d’intervenir. Les modifications proposées préciseraient qu’elle peut intervenir plus tôt, lorsqu’un déversement provenant d’un navire est probable, sans attendre que la menace de déversement devienne grave et imminente. Intervenir plus tôt permettrait de prévenir des dommages environnementaux plus importants et des coûts de décontamination plus élevés.

Pour permettre une intervention plus rapide, les modifications proposées permettraient à la Garde côtière de circuler sur une propriété privée ou de passer par elle pour atteindre plus rapidement un lieu de déversement potentiel ou réel, afin de prévenir un déversement ou d’empêcher que la situation ne s’aggrave.

Pour favoriser une prise de décisions plus efficace en matière d’intervention, les modifications proposées permettraient à la Garde côtière d’accéder rapidement aux meilleurs renseignements en éliminant tout souci en matière de responsabilité pour les conseillers ou les intervenants qui fournissent une aide en cas d’urgence. Cela peut inclure l’accès aux connaissances et à l’expertise locales ou traditionnelles.

Nous modernisons aussi la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires. Dans le cadre du Plan de protection des océans, le gouvernement s’est engagé à renforcer le principe du pollueur-payeur en la modernisant.

Les modifications proposées à la Loi sur la responsabilité en matière maritime prévoient l’indemnisation illimitée des victimes et intervenants en cas de déversement d’hydrocarbures provenant de navires, sur présentation d’une demande admissible. Elles visent aussi à donner aux intervenants un accès plus rapide et plus facile aux fonds et à simplifier et accélérer le traitement des petites demandes d’indemnisation.

Les modifications proposées permettraient d’assurer un état de préparation opérationnelle en cas de déversement catastrophique d’hydrocarbures en assurant la disponibilité de l’indemnisation, par attribution au ministre des Finances des pouvoirs nécessaires pour consentir un prêt temporaire à la caisse et en veillant à ce que la caisse puisse être réapprovisionnée conformément aux principes du pollueur-payeur, grâce à l’établissement d’un mécanisme moderne de perception de redevances auprès des expéditeurs des réceptionnaires.

Enfin, des modifications sont proposées pour une meilleure dissuasion et une meilleure application de la loi et pour faire respecter la réglementation sur la sécurité maritime et la protection de l’environnement. Les modifications permettraient de faire passer le montant des sanctions administratives pécuniaires au maximum de 250 000 $ par infraction. Le plafond actuel de 25 000 $, établi en 2001, ne reflète plus le contexte économique actuel.

Ce maximum ne se veut pas une mesure punitive et ne vise pas à imposer une charge excessive aux petites entreprises. Ce sera plutôt une mesure de dissuasion efficace pour ceux qui ont des antécédents de non-conformité ou des comportements à risque ou, encore, pour certains des grands exploitants qui estiment que la sanction maximale actuelle n’est qu’un poste de plus dans leurs frais courants d’exploitation.

La fourchette précise des sanctions est établie dans les règlements, qui sont assortis d’un processus de consultation.

Certains joueurs de l’industrie maritime ont également dit que des obstacles réglementaires empêchaient de développer et d’adopter des technologies et des outils innovants qui risquent de relever la barre au chapitre de la sécurité maritime et de la protection de l’environnement. Les modifications proposées ont été adaptées pour permettre au ministre des Transports d’accorder des exemptions provisoires à l’application des exigences et normes réglementaires. Cette solution donnerait le temps d’effectuer des essais et d’évaluer des innovations en matière de technologies, de systèmes et de pratiques, qui aideront à l’établissement de futurs règlements et politiques du gouvernement. Des conditions pourraient être établies afin de veiller à préserver la sécurité maritime et la protection de l’environnement pendant la période d’essai.

Mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de m’adresser à vous. Nous sommes prêts à répondre à vos questions après l’exposé de Mme Legars.

Anne Legars, administratrice, Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires : Merci.

[Français]

Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, merci de m’avoir invitée à témoigner devant vous aujourd’hui. Je suis administratrice de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, mieux connue sous son nom anglais de Ship-source Oil Pollution Fund.

Je suis nommée par le gouverneur en conseil et mes rôles et responsabilités découlent de la partie 7 de la Loi sur la responsabilité en matière maritime. Je suis ainsi la seule personne à autoriser que de l’argent soit dépensé à partir du fonds de quelque 405 millions de dollars dont j’ai la responsabilité, mais cet argent ne peut être dépensé qu’aux fins prévues par la loi. Je suis, par ailleurs, totalement indépendante du gouvernement.

À ce jour, j’exerce essentiellement trois différents rôles ou fonctions. Le premier est d’évaluer les demandes d’indemnisation reçues et de payer la partie jugée raisonnable, ce qui est le rôle d’un tribunal administratif. Mon deuxième rôle est de recouvrer auprès du pollueur ou de son assureur la somme ainsi payée, ce qui est le rôle d’un assureur subrogé. Mon troisième rôle principal est d’assurer l’interface financière entre le Canada et les fonds internationaux d’indemnisation en récoltant et en transmettant l’information statistique qui permet de déterminer la quote-part du Canada dans le financement du régime international et en payant la contribution canadienne à même la caisse.

Le projet de loi C-86 a pour effet de modifier mes deux premiers rôles et de me confier un rôle additionnel, qui est celui de prêteur qui avance de l’argent à la Garde côtière canadienne pour financer ses opérations d’intervention environnementale lors de situations exceptionnelles.

Transports Canada m’a consultée à un haut niveau quant aux modifications au régime d’indemnisation que le gouvernement avait annoncées, il y a plus de deux ans, dans le cadre du Plan de protection des océans. Je n’ai cependant pris connaissance du détail des amendements proposés que lorsque le projet de loi C-86 a été déposé au Parlement.

Lorsque j’ai pris connaissance du projet de loi, mes deux préoccupations immédiates étaient les suivantes : est-ce que l’intention du législateur est claire à la lecture de ces amendements? Il est primordial pour moi que la loi soit aussi claire que possible puisque je dois opérationnaliser la volonté du législateur à travers mes décisions et mes actions quotidiennes. D’autre part, est-ce que je vais réussir à mettre en place les processus internes nécessaires à la mise en œuvre de ces amendements à temps pour leur entrée en vigueur?

Après avoir passé en revue les articles du projet de loi qui sont d’intérêt immédiat pour la Caisse d’indemnisation — ces amendements se retrouvent à la section 23 du projet de loi —, je crois pouvoir répondre oui à ces deux questions.

[Traduction]

Plus précisément, je ne trouve rien à redire aux modifications proposées puisqu’elles m’éclairent et m’orientent suffisamment pour que je puisse m’acquitter de mon mandat.

Je sais aussi que, prises dans leur ensemble, ces modifications clarifient les éléments du régime de responsabilité et d’indemnisation conformes aux régimes internationaux par rapport aux éléments destinés à n’être couverts que par le régime canadien, ce qui signifie la caisse. Ce sera utile.

Quant au délai de mise en œuvre de ces modifications, je remarque que celles qui touchent les demandes de remboursement exigeront des corrections immédiates de la part de mon bureau. Ce sont d’abord les modifications autorisant la Garde côtière à être indemnisée par la caisse pour les mesures anticipées prises quand il n’y avait pas de risque grave et imminent de déversement. Les experts maritimes qui m’aident à évaluer les demandes de remboursement des coûts de telles mesures préventives devront désormais faire une double évaluation quand je recevrai ces demandes. Est-ce que, d’abord, les mesures préventives étaient raisonnables, c’est-à-dire qu’elles engageaient la responsabilité de la caisse? Dans l’affirmative, le risque était-il quand même grave et imminent, c’est-à-dire que la caisse pouvait-elle être en mesure de recouvrer les fonds auprès de l’assureur? J’estime le délai de mise en œuvre à quelques semaines. Ça ne présente pas de problème.

Ensuite, en ce qui concerne les modifications qui simplifient et accélèrent le traitement des petites demandes de remboursement, mon bureau avait créé, pour ces demandes, des formulaires, à titre de projets pilotes, qui n’allaient pas aussi loin que les modifications, et je crois que la loi en vigueur ne les aurait pas autorisés. Cependant, nous pouvons les adapter assez rapidement pour répondre aux besoins de la loi modifiée.

Nous devrons mettre à niveau nos systèmes de gestion interne, y compris notre système de gestion de l’information. Effectivement, ça prendra un certain nombre de semaines, mais nous avons la certitude que la Garde côtière, notre principal demandeur de remboursements, s’abstiendra de nous submerger sous un tsunami de petites demandes dès le lendemain de la mise en œuvre du projet de loi C-86. Essentiellement, je suis sûre que nous pourrons répondre aussi à ses demandes dès que la loi entrera en vigueur.

Les modifications d’ordre financier n’exigeront pas d’adaptation immédiates de mon bureau, puisqu’elles couvrent des circonstances peu susceptibles de survenir dans un très proche avenir. Elles permettent à la caisse de recevoir des fonds temporaires du gouvernement fédéral, si elle est épuisée, et à fournir un financement d’urgence initial à la Garde côtière, en situation exceptionnelle.

C’est mon nouveau rôle de prêteuse, mais j’aurai peut-être le temps de m’y préparer.

Bref, je crois pouvoir m’adapter à ces modifications et à les mettre en œuvre rapidement. Cela étant dit, je serai heureuse de répondre à vos questions sur le fonctionnement de la caisse ou à vous communiquer tous les renseignements dont vous aurez besoin.

Merci.

Le président : Merci beaucoup. Madame Rascanin, vous avez parlé de vastes consultations et d’engagement sur les modifications proposées. Combien y a-t-il eu de réunions? Pourriez-vous nous en donner plus de détails? Qu’entendez-vous par engagement? Était-ce de la consultation? Ou est-ce deux choses différentes? J’ignore ce que vous voulez dire par « engagement ».

Mme Rascanin : Merci. Ces dernières années, dans l’élaboration et la soumission du Plan de protection des océans et ayant, depuis, collaboré avec des partenaires autochtones et divers joueurs, nous avons organisé de nombreuses réunions. L’engagement est une consultation sur des questions précises. Depuis un an, en général, nous sommes présents sur les trois côtes du Canada pour sensibiliser les parties prenantes au Plan de protection des océans et pour aussi discuter du cadre stratégique, des éventuelles modifications législatives et de leur orientation générale.

Avant le dépôt du projet de loi, 26 réunions plénières et séances d’engagement ont eu lieu avec les principaux partenaires et les joueurs du secteur sur seulement l’esprit des modifications législatives. En août dernier, nous avons publié un document de travail pour aussi connaître les réactions et les observations précises des intéressés et nous avons reçu un certain nombre d’observations à ce sujet.

Le président : Combien de réunions avez-vous eues avec les transporteurs?

Mme Rascanin : Je n’ai pas la ventilation de ces renseignements.

Le président : Je suis porté à croire qu’ils seraient le plus touchés par ce projet de loi.

Mme Rascanin : Je pense qu’un certain nombre de joueurs sont touchés, mais les transporteurs sont notre principal groupe de joueurs et nous les rencontrons régulièrement. Les discussions ont certainement été fréquentes. Je n’ai pas les détails.

Le président : Vous ne savez pas combien de fois vous les avez rencontrés?

Mesdames et messieurs les sénateurs, nous avons jusqu’à 10 h 30, heure à laquelle un groupe de la côte Ouest nous attend pour témoigner par vidéoconférence. Il faut respecter ce rendez-vous. Soyez donc aussi brefs que moi.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Bonjour. Je ne suis pas spécialiste de ces questions. Je vais me permettre de reprendre une critique faite par la Fédération maritime du Canada devant le comité de la Chambre des communes et qui a demandé à ce que les pouvoirs d’arrêtés d’urgence du ministre soient circonscrits. Si je comprends bien, il y a une crainte que, comme ces arrêtés d’urgence peuvent durer un an ou deux, ils puissent toucher des communautés entières en termes de paralysie. Y aurait-il lieu, de votre point de vue, de resserrer ces pouvoirs et de modifier les amendements? Bref, j’aimerais vous entendre à ce sujet.

[Traduction]

Mme Rascanin : Merci.

La durée maximale d’application de l’arrêté d’urgence visé dans le projet de loi est d’un an. Elle n’est pas nécessairement automatique, mais elle permet de s’adapter à une gamme de risques et d’intérêts dans des situations pas toujours prévisibles et qui, parfois, peuvent durer un certain nombre de mois, par exemple l’arrivée de baleines dans une région où elles n’étaient jamais venues, comme dans le Saint-Laurent, ces dernières années.

L’arrêté d’urgence permet de s’adapter aux circonstances avec souplesse sans prendre de règlement permanent. On peut trouver des ajustements et des moyens de s’adapter avec les joueurs de l’industrie, ce qui est aussi survenu pendant le séjour de baleines franches de l’Atlantique Nord dans le Saint-Laurent. On a fait des ajustements. On peut rassembler les faits pour décider, encore une fois en consultation, de la mise en place d’une solution plus permanente.

Un engagement et une consultation constants sont toujours employés dans ces circonstances.

La sénatrice Miville-Dechêne : Songez-vous à des amendements ou à des modifications de ce que vous proposez pour rendre ce pouvoir plus...

[Français]

... en français, on dirait dans le but de circonscrire ce pouvoir, donc de faire en sorte que le pouvoir du ministre soit un peu moins grand.

[Traduction]

Mme Rascanin : Nous croyons, par cette modification, donner au ministre la souplesse lui permettant de réagir à la gamme des éventuelles circonstances imprévues. Si on essayait de circonscrire toute cette gamme, cela risquerait de présenter une contrainte pour la sécurité de l’environnement ou la sécurité maritime. Pour nous, c’est donc le choix approprié.

[Français]

Le sénateur Cormier : Merci de vos présentations. Ma question s’adresse à Mme Legars. La Caisse d’indemnisation perçoit actuellement une redevance sur les mouvements d’hydrocarbure par voie ferrée.

Mme Legars : C’est une autre caisse.

Le sénateur Cormier : Une autre caisse?

Mme Legars : Je gère deux caisses parallèles en vertu de deux lois différentes. L’autre caisse est régie par la Loi sur les transports au Canada.

Le sénateur Cormier : À votre avis, quelles difficultés pourriez-vous rencontrer dans la perception des redevances auprès des navires à destination et en provenance du Canada? Avez-vous besoin, pour ce faire, de ressources supplémentaires? On comprend qu’il devrait maintenant y avoir un meilleur contrôle.

Mme Legars : Pour le moment, on n’a pas besoin de percevoir d’autres redevances. Je dispose quand même de 405 millions de dollars. Cette somme reste stable, et même, elle augmente. Avant d’avoir dépensé 405 millions de dollars, il peut se passer beaucoup de temps, que l’on mettra à profit, en particulier avec Transports Canada, pour se pencher sur un mécanisme éventuel et sur les opérations dans le but d’avoir à nouveau un jour un prélèvement ou un « levy ». Toutefois, on risque de ne pas en avoir besoin avant un bon moment. On devra se poser la question à savoir comment nous déploierons nos ressources pour le faire. Pour le moment, ce n’est pas une chose qui me préoccupe, car on a le luxe du temps pour mettre les points sur les i, si on peut dire, à ce sujet.

Le sénateur Cormier : J’ai une question concernant la procédure relative aux petites réclamations. Vous avez parlé des sommes fixées à 35 000 $ et 40 000 $ pour la procédure simplifiée. Sur quoi vous êtes-vous basés pour fixer ces sommes? Comment établit-on ces montants, et qu’en pensez-vous?

Mme Legars : Vous pourrez poser la question à Transports Canada, puisque c’est le ministère qui les a établis. D’un point de vue statistique, j’ai regardé nos 100 dernières réclamations, qui remontent à 2013-2014, et j’ai constaté que 56 réclamations étaient de 35 000 $ ou moins. Ce chiffre montre un peu la majeure partie de ce qu’on fait : on a quelques grosses réclamations, mais aussi beaucoup de petites réclamations. Dans notre projet pilote, on a fixé le seuil à 15 000 $, car c’est à partir de ce montant qu’on commence à devenir plus agressif en termes de démarches de recouvrement.

Le sénateur Cormier : De quel type d’actions ou de dommages parle-t-on?

Mme Legars : Ce sont surtout des coûts de dépollution ou des mesures préventives. Il pourrait y avoir des pertes de revenu pour les pêcheries ou pour l’industrie, mais ce n’est pas ce type de réclamation que nous recevons en général. Historiquement, nous avons reçu surtout des réclamations pour des frais de dépollution ou des mesures préventives. Près des trois quarts de nos réclamations viennent de la Garde côtière. Les autres viennent de municipalités ou d’administrations portuaires, et elles sont toujours pour des frais de dépollution ou de mesures préventives.

Marc-Yves Bertin, directeur général, Politique maritime, Transports Canada : Le seuil a été établi sur la base d’une analyse statistique, comme Mme Legars le signalait. Sur 100 réclamations, jusqu’à maintenant, on a estimé que celles de 35 000 $ représentaient environ 56 à 60 p. 100 des réclamations. En augmentant ce montant à 50 000 $, dans une situation exceptionnelle, on couvrirait environ 75 p. 100 des réclamations.

[Traduction]

Le sénateur Wetston : Merci d’être ici. J’ai une question, que ne je veux pas hypothétique. Vous savez ce qui se passe au large des bancs de Terre-Neuve, les déversements provenant des tours de forage. Je veux seulement comprendre vu que nous sommes à l’étude préliminaire. Si les modifications étaient toutes adoptées, intégrées dans ce cadre législatif et fonctionnelles, qu’est-ce qui différerait de la situation actuelle? Est-ce que les modifications s’appliqueraient? Comment? La réaction serait-elle différente? Je suppose que la Caisse d’indemnisation ne s’appliquerait pas ici, parce que cette pollution provient d’une tour de forage.

Mme Rascanin : Pour rester dans le concret et vous replacer dans le véritable contexte, cette situation particulière relève principalement de l’Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers. Les lois sont ainsi faites. La Garde côtière et le Centre national des urgences environnementales le savent et restent à sa disposition pour fournir leur appui, mais c’est l’office qui gère cette situation. Si c’était exactement la même situation, aucune des modifications ne s’appliquerait, parce que cela touche des compétences différentes.

Le sénateur Wetston : Je vois. Est-ce que ce problème devrait nous inquiéter?

Mme Rascanin : Je ne crois pas que ce soit un problème. Nous avons la certitude que l’office s’en occupe.

Le sénateur Wetston : Vous dites donc qu’il possède toute l’autorité, tous les pouvoirs et toute l’aptitude voulus pour répondre à une situation semblable et que ces modifications ne seraient d’aucune aide dans ces circonstances?

Mme Rascanin : Je ne connais pas tous les détails. Je l’affirme dans un sens très général.

Le sénateur Wetston : Vous avez beaucoup de pain sur la planche et je pense, relativement aux arrêtés d’urgence et aux ajustements qu’autorisent les règlements... En général, les arrêtés d’urgence ne sont pas pris par une partie en l’absence de l’autre. Comme vous le savez, on peut contester ces pouvoirs au moyen d’une révision judiciaire. Vous avez répondu que nous allions fournir des pouvoirs élargis au ministre pour qu’il puisse réagir aux circonstances comme nous le jugeons nécessaire.

Je n’ai pas compris comment vous alliez renseigner le ministre, consulter les parties prenantes, les transporteurs et les participants touchés avant la prise de l’arrêté. En définitive, ça ne peut pas être arbitraire. Comment éviterez-vous cet écueil?

Mme Rascanin : C’est vrai que ça ne peut pas être arbitraire, mais si des risques se posent pour la sécurité maritime ou pour celle de l’environnement, il faut parfois prendre des mesures très rapidement, en fonction de la nature des risques.

Si je reviens à l’exemple du Saint-Laurent, quand des ralentissements ont été mis en œuvre, nous avons collaboré très étroitement avec l’industrie. Chaque semaine, nous téléphonions à tous ses joueurs pour les informer, connaître leurs réactions et les aider à s’ajuster aux nouvelles mesures mises en place. On suivrait le même processus.

Le président : Auraient-ils pu le faire sans le gouvernement?

Mme Rascanin : Est-ce que l’industrie aurait pu le faire?

Le président : Auraient-ils évité d’être dangereux, sans le gouvernement?

Mme Rascanin : Si, volontairement, ils avaient réduit les vitesses...

Le président : Ils n’auraient pas voulu entrer en collision avec des baleines, n’est-ce pas?

Mme Rascanin : Non, mais c’est la raison pour laquelle leur collaboration a été absolue. Nous avons collaboré avec eux. Voilà pourquoi l’arrêté d’urgence a donné d’excellents résultats.

Le président : Merci.

Le sénateur MacDonald : Vous avez parlé du risque de rejet d’un polluant par un navire. Le projet de loi autorise le ministre à prendre des mesures pour prévenir, contrer, réparer ou réduire au minimum les dommages dus à la pollution s’il a des motifs raisonnables de croire qu’un navire a rejeté, rejette ou peut rejeter un polluant.

Comment déterminer si un navire peut rejeter un polluant? Quel critère appliquer à cette fin?

Julie Gascon, directrice générale des opérations, Garde côtière canadienne, Pêches et Océans Canada : Merci de la question. En cas d’incident maritime pour un navire en exploitation, il s’instaure une collaboration intense entre la Garde côtière canadienne, Transports Canada et le propriétaire du navire. Dans notre façon actuelle de faire, la menace doit être imminente. Avec les nouvelles modifications, la menace est une possibilité. L’intervenant n’a plus à se poser la question de la nécessité pour nous d’agir.

À l’échouement d’un navire, l’équipage évalue immédiatement la situation. Il examine les compartiments du navire. Le propriétaire et le capitaine sont en liaison constante avec la Garde côtière canadienne pour lui communiquer leur évaluation des dommages. La Garde côtière collabore aussi très étroitement avec Transports Canada pour évaluer la stabilité du navire et l’étendue des dommages.

D’après les comptes rendus qui proviennent du navire et l’évaluation de Transports Canada, la Garde côtière est en mesure de déterminer si le navire risque de rejeter un polluant. Elle peut ensuite prendre les mesures appropriées et agir selon les circonstances, puisqu’elle est le principal organisme fédéral compétent pour ce qui concerne la pollution par les hydrocarbures rejetés par les navires.

Dans un autre cas, par exemple, vous connaissez bien le Kathryn Spirit, à Beauharnois. J’étais commissaire adjointe à l’époque, à Montréal, et la question se posait constamment : La menace est-elle imminente ou non? Il s’agissait d’un navire immobilisé et récemment abandonné à proximité d’une source principale d’eau potable pour les Montréalais. Beaucoup de citoyens étaient inquiets.

Alors, ces nouveaux pouvoirs, cette capacité d’intervention, tout cela nous permettra de collaborer avec nos partenaires — municipaux, provinciaux et fédéraux — pour agir plus rapidement. Nous saluons donc ces modifications qui nous permettront de mieux intervenir pour les Canadiens.

Le sénateur MacDonald : Une modification de la Loi sur la responsabilité en matière maritime ajouterait un processus de traitement des demandes de remboursement de petits montants, moins de 35 000 $, dans le cas d’un déversement d’hydrocarbures, et de 50 000 $, dans le cas d’un déversement significatif d’hydrocarbures. Quels critères serviraient à déterminer l’importance du déversement? Comment ces montants — 35 000 et 50 000 $ — sont-ils établis?

M. Bertin : Pour la définition de « significatif », les modifications proposées se fondent sur l’échelle et la complexité de la situation. Nous parlons d’un événement significatif ou exceptionnel.

Les montants de 35 000 et de 50 000 $ se fondent sur l’analyse statistique des demandes de remboursement actuellement reçues par l’administrateur de la Caisse d’indemnisation. Essentiellement, nous sommes en mesure de déterminer qu’un seuil de 35 000 $ permettrait de diriger environ 50 à 60 p. 100 des demandes vers le traitement accéléré, tandis que celui de 50 000 $, dans le cas d’un incident significatif, dirigerait 75 p. 100 des demandes vers le processus simplifié.

Ça ne signifie pas qu’il ne faut pas faire diligence dans le processus simplifié. Comparez cela avec la déclaration de ses revenus sur Internet. D’un côté, vous pouvez prouver simplement certains liens et ainsi de suite, mais, en même temps, vous devez pouvoir démontrer que vous détenez les documents corroborants — la paperasse et ainsi de suite.

Le projet de loi permettrait à l’administrateur de continuer, après coup, à vérifier et à évaluer ces demandes et à s’assurer de la justesse des versements.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à nos invités. Je suis relativement inquiet au sujet de ce projet de loi, autant que je le suis par rapport au projet de loi C-69 sur les évaluations environnementales. Lorsqu’on élargit les pouvoirs des ministres, d’une part, l’arbitraire s’installe rapidement. D’autre part, l’empiétement sur les responsabilités des provinces peut entrer en jeu.

J’aimerais revenir à la problématique que la Gaspésie et la Côte-Nord ont connue cet été à la suite de l’annulation de 50 p. 100 du passage des bateaux de croisière. Cela a eu un impact économique négatif sur les petites municipalités qui, depuis des années, se mobilisent pour recevoir ces touristes. Elles mettent sur pied hébergement et offre touriste. Or, tout à coup, on prend une décision « arbitraire » quant à la vitesse des bateaux de croisière. Les impacts négatifs de cette décision se sont fait sentir tout le long du Saint-Laurent, de la Gaspésie et de la Côte-Nord.

Quand vous prenez ce genre de décision, en mesurez-vous les impacts économiques sur les petites municipalités qui vivent de ce type de commerce?

[Traduction]

Mme Rascanin : Il est évident que nous tenons compte des aspects économiques. Il s’agit d’examiner les répercussions sur l’environnement et l’économie et de déterminer comment agir pour trouver des solutions aux deux, dans la mesure du possible.

Ce n’est pas comme cela dans toutes les situations. Comme je l’ai dit plus tôt, dans ce cas précis, nous avons collaboré très étroitement avec l’industrie des navires de croisière pour obtenir son point de vue et déterminer comment apporter des ajustements et, dans la mesure du possible, corriger les répercussions.

Or, le nombre de baleines mortes était sans précédent et il fallait intervenir à cet égard.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Si vous avez consulté les municipalités, les expéditeurs et les commerces, pouvez-vous déposer auprès du comité tous les documents et les communications que vous avez eus avec les communautés pour démontrer, d’une part, qu’il y a eu consultation et, d’autre part, quelle a été la réaction de ces gens quant aux pertes de 50 p. 100 de leur chiffre d’affaires dans un laps de temps aussi court? La décision, je crois, a été prise au mois d’avril, alors que ces gens étaient déjà prêts pour l’été. Or, en quelques semaines, ils ont vu leur gagne-pain disparaître de 50 p. 100.

J’aimerais que vous déposiez devant ce comité tous les documents que vous avez en votre possession sur les communications que vous avez eues avec les communautés, sur la réaction de ces gens à savoir s’ils étaient d’accord ou pas, et sur quelle base scientifique vous avez pris la décision de réduire de 30 p. 100 la vitesse des bateaux sur le fleuve Saint-Laurent.

[Traduction]

Mme Rascanin : Concernant les discussions, il nous faudra vous revenir là-dessus. Je dirais que nous collaborons très étroitement avec, par exemple, l’agence environnementale des États-Unis, la NOAA, qui a mené beaucoup de travaux scientifiques concernant cette population de baleines. On a déterminé à partir de quelle vitesse les répercussions sur les baleines sont moins importantes.

Je soulignerais également que, près que la vitesse a été réduite, aucune autre baleine n’a été frappée mortellement par des navires.

Le sénateur Boisvenu : Ce qui me préoccupe surtout, c’est l’industrie locale, les gens qui, en peu de temps, ont été informés d’une décision qui allait avoir des répercussions sur leur économie locale. Voilà ce qui me préoccupe le plus.

[Français]

La sénatrice Galvez : Je vous remercie de votre présence, cette discussion est très intéressante.

Je m’inquiète également pour les gens, l’économie et l’environnement.

[Traduction]

Je crois qu’il est important que nous demeurions très flexibles. J’ai été étonnée que vous n’ayez rien dit sur ce que provoquent les changements climatiques. De nombreux accidents se sont produits dans le monde, aux États-Unis, ici, dans les ports et les océans et ont coûté des milliards de dollars. Je suis étonnée de vous entendre dire que 400 millions de dollars, c’est beaucoup d’argent. Pour une catastrophe, ce n’est presque rien. Cela peut disparaître rapidement.

Certes, il est important d’avoir une très bonne assurance si une catastrophe se produit, et je suis très heureuse que ces modifications changent les choses en ce sens. Toutefois, d’après ce que nous avons observé lors d’autres catastrophes, il y a maintenant de plus en plus d’avocats vautours — sauf mon très bon ami, le sénateur Wetston. Veuillez m’excuser.

Vous savez ce que je veux dire. C’est arrivé à Lac-Mégantic, au Québec. Les gens n’étaient pas protégés et des avocats sont venus les convaincre. Puis, au lieu d’obtenir des fonds pour se reconstruire une vie, ils ont été pénalisés deux fois. Je me demande si on a songé à cette question.

Je vais poser ma deuxième question. De nombreuses baleines ont été retrouvées mortes dans le golfe du Saint-Laurent. Ces modifications changeront-elles quelque chose quant aux mesures qu’on peut prendre pour trouver la cause de ces morts soudaines?

Mme Rascanin : Je vais demander à mon collègue de répondre à votre première question.

Le président : Les baleines, les avocats rapaces.

Mme Gascon : Nous couvrons tout.

M. Bertin : En plus des modifications dont j’ai parlé précédemment en répondant à la question du sénateur MacDonald, qui visent à fournir les fonds aux gens qui en ont besoin plus rapidement, un autre volet important du projet de loi proposé consiste à éliminer la limite de responsabilité. À l’heure actuelle, dans le cas d’un événement de pollution par les hydrocarbures, le montant maximal d’indemnisation pour un déversement d’hydrocarbures est d’environ 1,5 milliard de dollars. Ce montant provient de trois sources. La première, c’est le propriétaire du navire et son assurance. Le montant maximum d’indemnisation que versent les assureurs pour un déversement d’hydrocarbures est d’environ 180 millions de dollars.

La deuxième source — et Mme Legars en a parlé plus tôt —, ce sont les fonds internationaux. Ils représentent à peu près 1,1 milliard de dollars. Ensuite, les dispositions législatives actuelles prévoient que si un déversement se produit, le montant maximal provenant de la caisse que gère Mme Legars serait de près de 175 millions de dollars.

Le projet de loi éliminerait cette limite par événement, qui s’élève actuellement à environ 175 millions de dollars, ce qui veut dire que le gouvernement du Canada couvrirait tout montant au-delà du 1,5 milliard de dollars dans le cas d’un événement significatif.

C’est important parce que, au bout du compte, si un événement significatif dont les coûts dépassent 1,5 milliard de dollars devait se produire, cela veut dire que les victimes et les intervenants qui souhaitent être dédommagés ne verraient pas le montant calculé au prorata pour ensuite recevoir seulement une partie du montant d’indemnisation justifié.

Mme Rascanin : Pour ce qui est de votre question sur les travaux scientifiques et les baleines, la souplesse proposée dans les modifications contribuerait certainement à ce qu’on puisse réagir aux situations imprévues. Concernant les travaux scientifiques, dans le Saint-Laurent, pour toutes les baleines qui ont été retrouvées mortes, une autopsie a été effectuée — un examen vétérinaire visant à déterminer la cause de la mort — pour comprendre plus facilement la cause. De plus, on investit beaucoup dans divers domaines scientifiques pour mieux comprendre les répercussions qu’ont, par exemple, les collisions avec les navires et le bruit des navires, sur les baleines, dans le cadre d’initiatives du Plan de protection des océans et de l’Initiative de protection des baleines qui a été annoncée récemment.

Le président : De quoi sont-elles mortes?

Mme Rascanin : Je n’ai pas les données exactes. Certaines portaient des marques de traumatisme provoqué par un coup, ce qui correspond tout à fait aux situations où il y a une collision avec un navire.

Le président : Deux, trois, une?

Mme Rascanin : Quelqu’un a le nombre? Quatre.

Le président : Quatre.

Mme Rascanin : Dans d’autres cas, le décès est associé à l’enchevêtrement, et dans d’autres, la cause n’a pas été déterminée.

[Français]

La sénatrice Gagné : Je suis arrivée en retard, donc je ne sais pas si vous avez traité de cette question. Pourquoi les changements proposés dans ce projet de loi n’avaient-ils pas été inclus dans le projet de loi C-64? Il s’agit ici d’un projet de loi omnibus, alors pourquoi dans ce projet de loi plutôt que dans le projet de loi C-64?

[Traduction]

Mme Rascanin : Le projet de loi C-64 porte sur les bâtiments abandonnés, et la nature très précise de ces mesures et l’empressement à leur égard au moment où elles ont été déposées ont mené à la présentation de ces modifications. Toutes les modifications contenues dans ce projet de loi concernent les bâtiments abandonnés et délabrés — je ne me souviens pas de tous les adjectifs —, soit les divers types de bâtiments, et il s’agit donc d’une situation différente.

Le sénateur Manning : Je remercie nos témoins.

Encore une fois, dans le projet de loi, on augmente les amendes ou les contributions dans le cas d’un pollueur. Je m’interroge sur l’efficacité de ces amendes d’après l’expérience à Pêches et Océans Canada, à la Garde côtière ou à Transports Canada. On passe de 50 000 à 250 000 $, comme vous l’avez dit, je crois. Pour certaines grandes pétrolières, c’est de la petite monnaie. Je me demande à quel point l’imposition de contributions et d’amendes est un moyen efficace. Comme je le dis, l’augmentation de 50 000 à 250 000 $ semble importante. Quand on parle d’une industrie qui génère des milliards de dollars, quel effet les amendes ont-elles? Devons-nous trouver d’autres mesures que les contributions et les amendes à prendre à l’égard des pollueurs?

Mme Rascanin : Je dirais que la majorité des industries avec lesquelles nous collaborons respectent les règles. Je tiens à le préciser. De nombreuses organisations sont très respectueuses des règles et sont responsables.

Ce que nous avons constaté dans le cas du très petit nombre qui ne suit pas les règles, c’est que le régime actuel ne suffit pas. Le montant maximal de 250 000 $ constitue un bon moyen de dissuasion d’après ce que nous avons observé dans d’autres dispositions, mais il y a un ensemble d’amendes. Le montant de 250 000 $ ne serait utilisé que dans des situations extrêmes. Dans le cadre d’autres lois, d’après notre expérience, c’est un bon moyen de dissuasion.

Le sénateur Manning : Je suis d’accord avec vous. La plupart des gens suivent les règles et respectent la loi et nous sommes chanceux, puisque nous sommes un pays côtier.

Dans les cas où nous imposons des amendes aux pollueurs, quel est notre taux de perception?

Mme Rascanin : Je devrai vous revenir là-dessus.

M. Bertin : Si vous me le permettez, j’aimerais ajouter que, en ce qui concerne la Loi sur la responsabilité en matière maritime, nous parlons d’un régime de déclaration et de perception, si je puis dire.

Il ne s’agit pas de s’en prendre aux pollueurs. Il s’agit d’avoir un régime de déclaration dans lequel les importateurs et les exportateurs de produits pétroliers déclarent leurs activités commerciales pour ces produits, et alors, si la contribution est instituée — si c’est nécessaire parce que la caisse n’est plus à un niveau que nous jugeons suffisant —, alors une contribution est perçue.

À l’heure actuelle, cette contribution n’a pas été instituée depuis 1976. Elle a été créée, en fait, en 1972 et perçue seulement pendant quelques années. Après qu’un montant d’environ 36 millions de dollars a été atteint, si ma mémoire est bonne, nous avons cessé de la percevoir. Avec l’accumulation d’intérêts, ce montant s’élève maintenant à environ 405 ou 410 millions de dollars. Ce dont nous parlons concernant les infractions et les sanctions administrativespécuniaires dans le projet de loi proposé porte sur des cas où l’on n’a pas déclaré quelque chose ou l’on n’a pas de documents adéquats.

Les mesures législatives proposées qui modifient la Loi sur la responsabilité en matière maritime ne visent pas à s’attaquer à des cas de pollution comme tels. Ce serait couvert par une autre loi.

Mme Rascanin : Vous parliez du régime de sanctions administratives pécuniaires. Selon l’information que j’ai ici, au cours des trois dernières années, il y a eu environ 150 sanctions. Je n’ai pas la valeur en dollars.

Le sénateur Manning : C’est la proportion de gens.

Avons-nous un problème concernant les pavillons de complaisance?

Mme Rascanin : Pas de façon systématique, mais cela peut parfois être le cas.

[Français]

Le sénateur Dawson : J’aimerais revenir sur le sujet des avocats prédateurs. Ce qui est arrivé à Lac-Mégantic, c’est que des avocats sont arrivés sur-le-champ, ils ont fait signer des contrats et ils ont reçu des millions de dollars de la part des gouvernements et des compagnies d’assurance bien qu’ils n’aient rien fait.

[Traduction]

Je suis d’accord, vous n’êtes pas la seule personne qui n’est pas un prédateur. Je suis marié avec une avocate et je suis père d’un avocat. Je connais un grand nombre d’avocats. Ils ne sont pas des prédateurs. Vous n’êtes pas la seule exception.

Cela dit, madame Legars, dans ce cas-ci, votre fonds empêche-t-il les gens de faire cela? Si vous savez que des gens profitent d’une crise — et dans ce cas, il s’agissait de millions de dollars à Lac-Mégantic —, que nous recommanderiez-vous, afin que nous puissions vous fournir les outils qui vous permettraient d’empêcher ces gens de profiter de ces situations? La sénatrice Galvez a raison.

[Français]

Le nombre de crises de ce genre va augmenter, et le nombre de prédateurs va sans doute augmenter également. La seule chose qui diminue, ce sont les baleines.

J’aimerais pouvoir vous donner les outils afin d’empêcher que des gens se présentent dans des situations de crises environnementales, que ce soit dans votre domaine ou dans d’autres domaines, et demandent de l’argent; je veux que les fonds soient versés à ceux qui méritent d’en avoir et pas aux autres.

[Traduction]

Le président : Multipliez. Allez-y, madame.

Mme Legars : L’un de mes objectifs est de rendre l’utilisation aussi facile que possible. Je tente réellement d’accroître la convivialité autant que possible. Mon objectif, c’est qu’un demandeur n’ait pas besoin d’embaucher un avocat pour présenter une demande. Il faut que ce soit « assez simple pour les gens stupides » — et certaines personnes pourraient affirmer que je n’y suis pas encore arrivée, mais au moins, c’est mon objectif. J’écoute l’avis de tous ceux qui pensent que le processus est trop compliqué.

L’objectif des dispositions sur les petites créances est de rendre le processus assez simple pour les gens stupides. On remplit un formulaire et essentiellement, oui, il sera évalué dans un certain temps. En effet, je ne veux pas devenir une source de profits pour les personnes qui présentent de fausses demandes à répétition. Je dois donc faire mon travail.

C’est certainement l’objectif du régime, c’est-à-dire d’être aussi convivial que possible et d’éviter que les demandeurs doivent embaucher un avocat, afin qu’ils puissent conserver tout le montant de l’indemnisation.

[Français]

M. Bertin : Ce qui est intéressant avec les activités de Mme Legars, c’est qu’une personne peut se tourner soit vers le propriétaire et ses assureurs, soit vers le fonds, qui pourra la dédommager. Ensuite, ce fonds récupérera l’argent, ce qui simplifie les choses. Lorsqu’il y a un incident, les agents du fonds ainsi que les fonds internationaux font une intervention directe sur le terrain pour s’assurer que les gens connaissent leur existence et les services qu’ils peuvent offrir.

[Traduction]

Le président : Sénatrice Gagné, avez-vous une question complémentaire à poser?

La sénatrice Gagné : J’aimerais formuler un commentaire.

Le président : Allez-y.

La sénatrice Gagné : C’est un très bref commentaire.

[Français]

La sénatrice Gagné : J’aimerais faire une intervention. En ce qui concerne l’utilisation du terme « stupid simple », il faut vulgariser les choses et les rendre accessibles au public, mais il faut aussi veiller à ne pas traiter les Canadiens et les Canadiennes de cette façon. Peu importe, il est extrêmement important de pouvoir atteindre un objectif, de rejoindre le client et de prévoir un processus clair et simple. C’est mon commentaire.

[Traduction]

Le sénateur Wetston : Je ne m’engagerai pas dans le débat sur l’embauche d’avocats. Si seulement la société était moins complexe et que nous ne faisions pas face à un projet de loi omnibus de 850 pages.

À part cela, je souhaite poser une simple question sur la caisse d’indemnisation et les compagnies de chemin de fer qui transportent des hydrocarbures. Quelle a été votre expérience relativement au transport ferroviaire d’hydrocarbures? Avez-vous eu des expériences à cet égard? Le projet de loi et les modifications ont-ils un effet sur secteur?

Mme Legars : Comme on l’a mentionné, c’est une loi complètement différente. Toutefois, la législation sur la Caisse d’indemnisation ferroviaire a été en quelque sorte inspirée par la législation sur la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, c’est-à-dire la Loi sur la responsabilité en matière maritime. La Caisse d’indemnisation ferroviaire a été créée après l’incident de Lac-Mégantic, et je ne m’occupe donc pas du dossier de Lac-Mégantic. Depuis la mise en œuvre de la législation sur la Caisse d’indemnisation ferroviaire, je n’ai eu aucun incident, car il faudrait que ce soit un très gros incident. C’est seulement pour la responsabilité excédentaire.

C’est donc la différence entre les deux régimes. Dans le cas du régime ferroviaire, je m’occupe seulement de la responsabilité excédentaire, mais dans le cas de la responsabilité en matière maritime, je suis une option. Le demandeur peut choisir de poursuivre l’auteur du tort — la personne qui cause les dommages —, l’armateur ou l’assureur, car il a un droit d’action directe contre l’assureur ou il peut avoir recours à mes services.

Essentiellement, j’assume, comme l’a mentionné Transports Canada, le coût du litige. Je paie ces coûts et je vais ensuite me faire rembourser par l’armateur et l’assureur. Je percevais la redevance.

C’était avant l’existence de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires. Son prédécesseur avait un autre nom, et c’était au début des années 1970. Lorsque la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires a été mise en œuvre en 1989, elle a hérité de tout l’argent accumulé dans le fonds.

Donc, comme on l’a déjà mentionné, si une redevance était réactivée, oui, je la percevrais, mais je n’en ai pas besoin pour l’instant.

Le président : Sénateur Boisvenu?

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Vous avez dit tantôt que la décision que vous avez prise cette année par rapport à la Gaspésie l’a été à la suite de consultations auprès du monde maritime et des entreprises locales. Pouvez-vous nous fournir le bilan des pertes que vous avez estimées, compte tenu du fait que vous prenez une décision basée sur l’environnement et l’économie? Pouvez-vous fournir au comité l’estimation des pertes que ces entreprises ont annoncées avant que la décision ne se prenne?

[Traduction]

Mme Rascanin : Nous devrons fournir ce que nous pouvons séparément.

Le président : J’aimerais remercier les témoins.

La sénatrice Miville-Dechêne : J’ai une brève question. C’est un commentaire sur le libellé.

[Français]

Le sénateur Cormier : C’est tout simplement un commentaire en ce qui a trait à la rédaction française du projet de loi. Je ne comprends absolument pas ce qui est écrit quand je lis ce qui suit, et je cite :

(2) L’arrêté prend effet dès sa prise et cesse d’avoir effet à celui des moments ci-après qui est antérieur aux autres :

Vraiment, je crois qu’il y a un travail important à faire de révision du projet de loi en français, au paragraphe 10.1(2).

[Traduction]

Le président : Veuillez garder cela à l’esprit pour notre rapport au Comité des finances.

Pour la deuxième partie de notre réunion, nous sommes heureux d’accueillir M. Bruce Burrows, président de la Chambre de commerce maritime. De la Chamber of Shipping, nous accueillons Mme Bonnie Gee, vice-présidente, et Peter Swanson, partenaire, Bernard s.r.l.

Je vous remercie de participer à notre réunion. Nous entendrons d’abord Mme Gee, par vidéoconférence.

Bonnie Gee, vice-présidente, Chamber of Shipping : Je vous remercie de me donner l’occasion de présenter nos préoccupations liées aux sections 22 et 23 du projet de loi C-86, qui proposent des modifications à la Loi sur la marine marchande du Canada et à la Loi sur la responsabilité en matière maritime. Je suis accompagnée par un membre de notre conseil d’administration, Peter Swanson, associé principal à Bernard s.r.l. La Chamber of Shipping accueille favorablement les diverses initiatives dans le cadre du Plan de protection des océans, car l’industrie croit qu’il est nécessaire de moderniser le cadre législatif du transport maritime international, afin de mieux protéger nos océans et de diversifier davantage les échanges commerciaux du Canada à l’étranger.

Nos membres, c’est-à-dire les sociétés de transport maritime responsables de mettre en œuvre le programme commercial international du Canada, encouragent vivement l’élaboration d’une stratégie cohérente et holistique pour son système de transport maritime. Une telle stratégie doit reconnaître que les engagements du Canada envers la sécurité maritime et la protection de l’environnement sont atteints par l’entremise de son influence internationale au sein de l’Organisation maritime internationale, et que la compétitivité est maintenue par l’entremise de normes mondiales et de règles du jeu équitables dans le secteur du transport maritime international.

L’article 689 élargit expressément la portée de l’article 10 de la Loi sur la marine marchande du Canada pour autoriser l’administration et l’application de la loi à d’autres échelons de gouvernement, notamment les provinces et les groupes autochtones. Si on a l’intention de déléguer des pouvoirs à une province, par exemple, nous avons des doutes sur la capacité d’un pouvoir délégué de remplir un mandat aussi complexe et nous sommes préoccupés par le potentiel croissant de l’adoption d’une approche fragmentée pour l’administration des voies navigables du Canada, qui sont partagées avec les États-Unis dans la plupart des régions.

Les sociétés de transport maritime international transportent la majorité des importations et des exportations du Canada et c’est une industrie mondiale qui a réalisé des progrès importants dans le domaine de la protection et de la sécurité maritime par l’entremise de l’Organisation maritime internationale. Les armateurs ont besoin de prévisibilité et d’uniformité lorsqu’ils font des investissements et qu’ils choisissent des corridors commerciaux. L’article 690 permet au ministre de prendre des arrêtés d’urgence en vertu de l’article 10.1 de la Loi sur la marine marchande du Canada lorsqu’un risque direct ou indirect menace la sécurité du transport maritime ou le milieu marin. On comprend la nécessité d’une telle disposition. Toutefois, le processus qui consiste à imposer un arrêté d’urgence doit être appuyé par des données probantes et tenir compte de toutes les autres conséquences des mesures mises en œuvre.

Nous appuyons nos collègues lorsqu’ils recommandent de modifier cet article pour limiter la durée d’un arrêté d’urgence à 14 jours et après sa prise, à moins qu’il soit prolongé par le gouverneur en conseil pour une période maximale de deux ans. Cela correspondrait aux autres mesures législatives administrées par le ministre des Transports. J’inviterais maintenant M. Swanson à parler des modifications à la Loi sur la responsabilité en matière maritime.

Peter Swanson, associé, Bernard s.r.l., Chamber of Shipping : Si j’ai bien compris, monsieur le président, je n’étais pas l’intervenant suivant, mais je serai heureux de parler maintenant si vous le souhaitez.

Le président : Allez-y.

M. Swanson : Je parlerai un peu des modifications proposées à la Loi sur la responsabilité en matière maritime, et plus précisément de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires. Je me concentrerai surtout sur les articles 723 et 726 du projet de loi. Ces deux dispositions proposent d’élargir la portée de la responsabilité pour englober les demandes liées à un préjudice économique. Et j’aimerais aussi souligner au comité qu’il s’agit d’un élargissement assez important de la portée de la responsabilité pour la caisse d’indemnisation, et possiblement pour les armateurs, car la caisse pourrait potentiellement devoir poursuivre l’armateur par subrogation à la suite de ces demandes. Le libellé est général, car on dit: « pour tout type de frais, pertes ou dommages, réels ou prévus, dus à la pollution par les hydrocarbures — notamment le préjudice économique dû à la pollution par les hydrocarbures subi par des personnes dont les biens n’ont pas été pollués ».

Je remarque qu’il y a une faute de frappe dans notre mémoire.

Cela modifie grandement nos lois existantes. Au nom de la Chamber of Shipping, nous aimerions vous communiquer certaines préoccupations liées à l’élargissement de la portée de la responsabilité pour inclure les demandes d’indemnisation pour préjudice économique lorsque le bien n’a subi aucun dommage physique réel. La loi, dans sa forme actuelle, ne prévoit pas d’indemnisation pour ce type de préjudice, et ce, pour de très bonnes raisons stratégiques. Si l’élargissement de la portée de la responsabilité est intégré à la loi, cela créera une responsabilité indéterminée, c’est-à-dire qu’on pourrait faire une demande d’indemnisation pour presque tous les types de préjudices économiques. J’ai inclus quelques exemples dans le troisième paragraphe de notre mémoire.

Traditionnellement — et d’un point de vue juridique —, les préjudices économiques sont liés aux dommages réels subis par les biens. S’ils ne sont pas liés aux dommages subis par les biens, cela signifie que le régime de responsabilité pourrait être très étendu. Par exemple, s’il y a un déversement d’hydrocarbures dans une ville et que les propriétaires d’hôtels ont l’impression que leur nombre de clients diminue, ils pourraient utiliser cela comme fondement pour faire une demande d’indemnisation pour préjudice économique. Les organisateurs d’excursions et les propriétaires de magasins pourraient faire la même chose. Prenons l’exemple de personnes qui ne peuvent pas se rendre au travail parce qu’un pont a été temporairement fermé en raison d’un incident lié à la pollution. Cela signifie-t-il que ces travailleurs peuvent faire une demande d’indemnisation pour des coûts de déplacement plus élevés ou pour des pertes de temps de travail? C’est un très gros changement au régime de responsabilité. Il sera assujetti à l’imagination d’avocats inventifs et au bout du compte, il reviendra aux tribunaux de tenter de déterminer la portée de cette responsabilité.

Pour vous donner un peu de contexte, le régime de responsabilité civile est régi par la Loi sur la responsabilité en matière maritime. La Loi sur la responsabilité en matière maritime intègre deux conventions internationales importantes qui visent la pollution créée par les navires et les indemnisations pour les déversements d’hydrocarbures. La première est la Convention sur la responsabilité civile, qui vise les déversements d’hydrocarbures causés par des navires-citernes — autrement dit, les navires qui transportent des hydrocarbures comme marchandises. L’autre est la Convention sur les hydrocarbures de soute, qui vise les déversements de navires qui transportent des hydrocarbures qui servent de carburant. Ces deux régimes ont été expressément intégrés à la Loi sur la responsabilité en matière maritime.

Ils ne sont pas liés au régime réglementaire ou autrement dit, aux amendes qui pourraient être imposées à un armateur. Cela se trouve dans la Loi sur la marine marchande du Canada, la Loi sur les pêches, la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs et, dans la mesure où elle s’applique, la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. L’indemnisation civile pour la pollution causée par les navires est réglementée à l’échelle internationale et à l’échelle nationale. Le Canada est un intervenant très actif dans le régime international pour le développement de conventions internationales et a traditionnellement mis en œuvre ces conventions conformément aux obligations internationales. Les préjudices économiques ne sont pas reconnus comme étant indemnisables dans le cadre de ces conventions.

Selon moi, l’autre point dont il faut se rappeler concerne la pollution causée par les navires. En raison des conventions et de leur intégration dans la loi canadienne, il s’agit d’un régime de responsabilité stricte. En effet, les armateurs qui subissent un déversement d’hydrocarbures sont généralement strictement responsables. Les demandeurs ne sont pas tenus de prouver que l’armateur a fait preuve de négligence. Si des hydrocarbures sortent du navire, l’armateur est responsable au civil sans qu’il soit nécessaire de prouver qu’il y a eu négligence ou un autre acte ou une omission. Il y a très peu de défenses. J’ai établi les trois défenses possibles. L’armateur peut éviter d’être tenu responsable seulement en cas d’acte de guerre ou d’événements semblables ou d’un phénomène naturel de nature exceptionnelle, ou si le déversement a été causé par un acte ou une omission par une tierce partie avec l’intention de causer un préjudice, ou s’il y a eu négligence de la part du gouvernement relativement aux aides à la navigation ou à l’entretien des feux.

Le point de départ, c’est la responsabilité stricte. La responsabilité n’est pas illimitée. J’ai entendu des témoins précédents parler des limites de la responsabilité qui sont établies dans les conventions et dans la Loi sur la responsabilité en matière maritime. Pour un petit navire de moins de 5 000 tonnes, la responsabilité est limitée à environ 8,2 millions de dollars, selon le calcul utilisé. Pour les plus gros navires, selon les calculs que j’ai effectués hier, cette limite est d’environ 164 millions de dollars.

Il y a donc la notion selon laquelle la responsabilité n’est pas limitée, mais ce n’est pas seulement une question de montant; c’est également parce que les demandes qui ont traditionnellement pu être formulées sont liées aux dommages causés par la pollution. C’est ce que cette modification tente de cibler. Traditionnellement, dans les cas de demandes liées aux dommages causés par la pollution — des termes définis dans la Loi sur la responsabilité en matière maritime, la Convention sur la responsabilité civile et la Convention sur les hydrocarbures de soute —, le pollueur qui est strictement responsable voit sa responsabilité assujettie à certaines limites, car elle se limite aux dommages causés par la pollution. Autrement dit, les coûts liés au nettoyage. Si des navires ou d’autres installations sont couverts d’hydrocarbures, manifestement, les dépenses liées au nettoyage sont couvertes. Si le bien d’une personne est endommagé et que cette personne ne peut pas utiliser ce bien pendant une certaine période, elle serait en position — et elle l’est actuellement — de faire une demande pour perte de l’usage d’un bien. De plus, les dommages à l’environnement, s’il y a assainissement, sont déjà indemnisables. Ce qui n’est pas indemnisable actuellement, c’est l’idée que même si votre bien n’est pas endommagé par l’incident de pollution, vous pourriez quand même subir un type de préjudice économique, ce qui vous donnerait le droit de faire une demande d’indemnisation.

À mon avis, c’est le point important. Ce serait un gros changement dans notre système juridique actuel, non seulement en ce qui concerne les navires qui causent la pollution, mais également en ce qui concerne le droit de la responsabilité délictuelle en général. La jurisprudence canadienne — notamment la décision Jervis Crown de la Cour suprême du Canada, à laquelle nous faisons référence dans notre mémoire — reconnaît qu’on doit fixer certaines limites à ce qui peut faire l’objet d’une indemnisation. La possibilité d’être en mesure d’obtenir une indemnisation dans des circonstances où aucun dommage physique n’a été causé au bien est limitée par notre système juridique actuel dans tous les contextes, et pas seulement dans un contexte de pollution causée par un navire. Modifier cela pour créer, par voie législative, un fondement qui permet de demander une indemnisation pour préjudice économique lorsque le bien n’est pas endommagé représente un changement important à notre loi. Je ferais valoir que dans les circonstances, il faut réfléchir soigneusement à cette proposition.

Le libellé proposé dans le projet de loi ne précise aucune limite. Il ne fournit aucun contexte. Il ne donne au tribunal, ou à la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires, aucune directive ou limite à cet égard. Si on doit élargir la portée de cette responsabilité, je ferais valoir qu’il faut établir certaines limites, afin que tout un chacun ne puisse pas faire une demande d’indemnisation. Je soupçonne que si cette mesure est adoptée, la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires sera très occupée, même lors d’un petit déversement, car de nombreuses personnes affirmeront que leurs plans ont dû être modifiés et que même si elles n’ont subi aucun préjudice physique ou aucune blessure, leurs plans ont changé, ce qui leur permet de présenter une demande à la caisse d’indemnisation.

Cela modifierait grandement nos lois — pas seulement notre loi sur la pollution causée par les navires, mais aussi nos lois en général. Je comprends que cela s’appliquerait seulement dans un contexte de pollution causée par des navires, mais c’est un changement très important. À moins qu’il y ait des questions, c’est ce qui termine mon exposé.

Le président : Merci beaucoup.

[Français]

Bruce Burrows, président, Chambre de commerce maritime : Bonjour, honorables sénatrices et sénateurs.

[Traduction]

Monsieur le président, membres du comité, merci de l’invitation à comparaître.

Je suis heureux d’être ici pour présenter le point de vue de la Chambre de commerce maritime sur la mesure législative dont vous êtes saisis aujourd’hui, soit les sections 22 et 23 du projet de loi C-86, qui modifierait la Loi sur la marine marchande du Canada, la LLMC, et la Loi sur la responsabilité en matière maritime, la LRMM.

Le 8 novembre, la Chambre de commerce maritime a eu le plaisir de comparaître devant le Comité des transports de la Chambre des communes au sujet de ce projet de loi. Je souligne que mes commentaires d’aujourd’hui reflètent les préoccupations que nous avons soulevées lors de cette séance. En ce qui concerne les sections dont le comité est saisi, je souligne que Transports Canada a lancé de vastes consultations sur la LLMC et la LRMM à la mi-août seulement, consultations qui se sont terminées le 26 octobre. Nous avons été surpris de voir un projet de loi être déposé à la Chambre le 29 octobre. C’est incroyable ce qu’on peut faire en une fin de semaine.

Bien que nous entretenions de bonnes relations avec Transports Canada, je pense qu’il est déplacé de modifier la LLMC et la LRMM par l’intermédiaire d’un projet de loi omnibus d’exécution du budget.

Je tiens à préciser que le transport maritime est le mode de transport le plus sûr et le plus respectueux de l’environnement. Chaque année, plus de 230 millions de tonnes métriques de marchandises transitent par la voie maritime des Grands Lacs et du fleuve Saint-Laurent. La grande priorité de l’industrie du transport maritime est de veiller à ce que ces marchandises arrivent à destination en toute sécurité, en maximisant la protection de la population, de la propriété et de l’environnement.

Une surveillance exhaustive de la réglementation, des investissements dans les technologies de navigation de pointe et des pratiques de sécurité éprouvées ont permis à l’industrie d’avoir d’excellents résultats en matière de sécurité et de continuer à investir.

L’expérience nous a appris que, en matière de réglementation, de politiques et de lois, une approche collaborative est nécessaire pour bien cerner les enjeux prioritaires pour les Canadiens. Le transport maritime est présent dans de nombreuses régions du Canada particulièrement vulnérables sur le plan environnemental, mais les gens qui y habitent ont quand même besoin de services maritimes.

Par rapport aux modifications proposées à la Loi sur la marine marchande du Canada, nous avons présenté des observations sur trois éléments : l’introduction des arrêtés d’urgence, les nouveaux pouvoirs réglementaires en matière de protection des milieux marins et la possibilité de modifier certains règlements au moyen d’ordonnances.

Nous reconnaissons l’importance d’intervenir rapidement lors d’incidents de pollution en milieu marin et la raison d’être des arrêtés d’urgence, lorsqu’ils sont justifiés. Toutefois, au lieu d’apporter des modifications précises à ce moment-ci, et pour compléter la mesure législative, nous proposons que ce comité recommande la mise en place de politiques et de procédures rigoureuses pour le recours aux arrêtés d’urgence, afin qu’ils servent uniquement en cas d’urgence ou d’imprévu et que les autorités s’engagent à mener des consultations les plus exhaustives possible dans les circonstances.

Les politiques et procédures doivent empêcher que les arrêtés d’urgence servent à contourner le processus réglementaire ou à prendre des décisions non fondées, et pour ne pas miner l’esprit de collaboration qui règne actuellement entre le gouvernement et le secteur maritime. La prudence est de mise, comme l’a démontré notre récente expérience dans le dossier des limites de vitesse pour la protection de la baleine noire de l’Atlantique Nord.

Les mesures d’intervention rapide pourraient avoir des répercussions importantes et imprévues sur la planification des itinéraires, la sûreté, les horaires, les engagements contractuels, la planification de la flotte et sa compétitivité, ce qui se répercutera sur les villes et les entreprises qui dépendent du transport maritime pour prendre de l’expansion, et sur les emplois.

Même si ces arrêtés sont, par définition, de courte durée, nous croyons qu’il y aurait lieu de consulter adéquatement l’industrie maritime et les autres secteurs concernés. L’industrie maritime peut contribuer à la prise de décision en trouvant des solutions concrètes, en examinant des solutions de rechange et en évaluant leur incidence sur l’industrie.

Pour ce qui est des pouvoirs réglementaires en matière de protection des milieux marins, nous ne répéterons jamais assez que pour être efficaces, toutes les nouvelles mesures réglementaires doivent être fondées sur des données scientifiques et des faits. En outre, l’industrie a déjà adopté de nombreuses mesures volontaires pour la protection de l’environnement. Pour tout dire, ces mesures et lignes directrices volontaires, comme celles du programme Alliance verte, ont déjà fait leurs preuves dans divers secteurs du transport maritime. Ce programme a été très utile.

Lorsqu’elles reposent sur des faits et qu’elles sont élaborées en collaboration avec l’industrie, les mesures volontaires sont un outil efficace et offrent plus de latitude que la réglementation.

En résumé, nous avons des réserves au sujet des changements proposés, car il est essentiel que ces pouvoirs accrus soient circonscrits et s’accompagnent de contrepoids adéquats. Ils doivent aussi être exercés en collaboration avec l’industrie si l’on veut renforcer la sécurité et mieux protéger l’environnement.

Quant aux modifications à la Loi sur la responsabilité en matière maritime, nous considérons d’entrée de jeu qu’elles sont gérables, sous réserve d’une analyse plus poussée, malgré leur complexité et leur vaste portée.

C’est avec plaisir que je répondrai à vos questions. Merci.

Le président : Merci beaucoup. Je dois partir à 11 heures; le sénateur Dawson me remplacera à la présidence.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Ma question s’adresse un peu à vous trois, parce que vos présentations vont un peu dans le même sens. J’aimerais vous entendre sur la difficulté suivante. Je comprends ce que vous dites, à savoir qu’il faut des preuves avant d’intervenir; toutefois, je pense aux mammifères marins, au fait que, parfois, une intervention rapide est la seule façon de sauver des vies. Prenons par exemple les baleines, car vous avez mentionné que c’était un cas où on avait agi trop vite, justement. Pourtant, il me semble qu’il y a des vies en jeu et nous connaissons tous malheureusement certaines lenteurs bureaucratiques lorsqu’il s’agit d’avoir recours à certains règlements.

Comment faites-vous la part des choses? Je comprends que vous défendiez l’industrie, mais en même temps, ce projet de loi essaie de rétablir l’équilibre pour que nous puissions agir un peu plus rapidement, si nécessaire.

Je ne sais pas qui veut répondre.

M. Burrows : Si vous me le permettez, je vais répondre en anglais.

[Traduction]

Je peux commencer, et nos collègues de la côte Ouest voudront peut-être commenter aussi.

Le dossier de la baleine, dont on a parlé, est un exemple intéressant. Malheureusement, nous craignons que cela puisse être un exemple d’une intervention trop rapide. Nous convenons qu’il est important d’intervenir rapidement en cas de risque important, pourvu qu’il y ait des consultations.

Ce dossier est un exemplaire d’une absence de consultation efficace ou adéquate. Nous avions déjà réduit volontairement la vitesse dans le golfe du Saint-Laurent et l’arrêté d’urgence a été émis très rapidement. Le gouvernement a fait des contorsions dignes d’un gymnaste du Cirque du Soleil pour trouver un règlement justifiant cette mesure, mais le problème était que la mesure a eu des répercussions immédiates et très négatives sur le service entre les diverses communautés, particulièrement sur la rive nord.

Une bonne partie de cette communauté de la rive nord dépend beaucoup du transport maritime pour le transport des biens et des personnes. Adoptée sans avertissement, cette mesure a eu d’énormes répercussions, entraînant des pertes économiques dans les millions de dollars, notamment dans l’industrie des croisières.

En fin de compte, grâce aux consultations tenues tout au long de l’année, nous avons maintenant trouvé une solution dynamique, ce qui aurait pu être fait plus tôt, si le gouvernement nous avait consultés adéquatement. Cette année, nous réduisons notre vitesse à 10 nœuds lorsque nous avons la preuve de la présence des cétacés.

Le secteur maritime a mis en place diverses mesures volontaires pour surveiller l’activité des baleines. Le Groupe Desgagnés, un de nos membres, le Groupe CSL et d’autres ont offert à leurs équipages une formation sur le dépistage des baleines et la collecte de données. En fait, ces choses sont en place depuis deux ou trois ans. Nous avons beaucoup de succès dans la région de Restigouche et dans le fjord du Saguenay. Nous réduisons la vitesse sur une base volontaire dans les aires d’alimentation des baleines. En outre, nous évitons évidemment les zones sensibles très fréquentées par les troupeaux de bélugas.

Selon Parcs Canada, les baisses de vitesse entre 2013 et 2016 ont permis de réduire le risque de collision entre les navires et les baleines de près de 40 p. 100. Donc, les choses vont bien. Des consultations sont nécessaires; cela permettra d’éviter les arrêtés mal conçus.

La sénatrice Miville-Dechêne : Je comprends très bien vos préoccupations. Il s’agit toutefois d’une situation où la rapidité d’intervention ou la prise de décision rapide par le gouvernement est une question de vie ou de mort pour les animaux. Je me demandais si le gouvernement ne devrait pas avoir plus de marge de manœuvre pour intervenir, comme le prévoient ces modifications précises.

Le sénateur Dennis Dawson (vice-président) occupe le fauteuil.

Mme Gee : La situation sur la côte Est n’est pas la même que celle que nous connaissons sur la côte Ouest. Les collisions avec les navires ne représentent pas une menace pour l’espèce à risque de notre région, l’épaulard résident du sud. Les menaces pour l’espèce sont les perturbations acoustiques, le manque de proies et les contaminants présents dans l’eau.

Nous risquons d’être frappés d’un arrêté d’urgence depuis un certain temps déjà. Depuis trois ans, l’industrie collabore depuis trois ans avec le port de Vancouver pour la mise en œuvre de mesures volontaires. Dans une région précise du détroit de Haro, sur la côte Ouest, nous réduisons la vitesse des navires pendant les périodes à risque élevé. Ces mesures volontaires se sont montrées plus efficaces que si la réduction de la vitesse des navires avait été imposée par un arrêté d’urgence, car les navires naviguaient déjà à basse vitesse dans les eaux transfrontalières du détroit de Haro, tant du côté américain que du côté canadien.

Comme on l’a souligné plus tôt, les mesures volontaires sont parfois beaucoup plus efficaces que celles qui peuvent être imposées par l’intermédiaire d’une mesure provisoire.

Quant aux arrêtés d’urgence, nous considérons qu’ils sont pertinents lorsqu’il y a un risque imminent, comme dans le cas de la situation sur la côte Est. Il convient, toutefois, d’en réévaluer les conséquences après leur entrée en vigueur.

La sénatrice Galvez : Je suis consciente que nous parlons de deux industries distinctes, l’industrie des croisières et du tourisme et l’industrie du transport de marchandises qui, par exemple, transporte des marchandises qui risquent de se déverser ou d’entraîner une catastrophe maritime.

Parlons de l’industrie du tourisme et des croisières. Je n’ai jamais eu l’occasion de faire une croisière, mais beaucoup de mes amis l’ont fait. Ils tentent de nous convaincre de le faire, mais selon certains commentaires que j’ai entendus, cette industrie doit équilibrer quantité et qualité. Mes amis qui ont fait des croisières se plaignent souvent de la courte durée des escales. Ils ont quelques heures à terre pour faire du tourisme, puis ils retournent au navire. Ils font le plus d’escales possible au lieu d’en faire moins et de rester à quai plus longtemps pour profiter pleinement des avantages d’une croisière. Qu’en pensez-vous?

Ma deuxième question porte sur la responsabilité, dont vous avez beaucoup parlé tous les deux. Je comprends votre préoccupation sur la possibilité que vous receviez beaucoup de demandes pour le remboursement de petits montants. Les plaintes sont nombreuses en raison des impacts indirects. Toutefois, considérant les catastrophes importantes et les endroits touchés par la pollution, on ne peut que conclure que l’industrie sait pertinemment comment limiter sa responsabilité. Certaines catastrophes ont été associées à de petites entreprises, qui deviennent la seule responsable. Les grandes sociétés propriétaires, ailleurs dans le monde, ne sont jamais visées par les réclamations. Il est donc relativement facile pour une petite entreprise de déclarer faillite; la responsabilité s’arrête là.

Pourriez-vous donner votre avis sur ces deux enjeux? Merci.

M. Swanson : Avec plaisir.

Au Canada, le cadre juridique existant en vertu de la Loi sur la responsabilité en matière maritime comprend des exigences en matière d’assurance. À titre d’exemple, tout navire étranger naviguant en eaux canadiennes est tenu d’avoir un certificat de responsabilité financière pour les réclamations ou les dédommagements liés à la pollution. Concrètement, cela signifie qu’ils sont tenus d’être assurés pour le montant maximal recouvrable aux termes des lois canadiennes.

Il est important de souligner qu’il existe, du moins dans la Convention sur les hydrocarbures de soute, mais aussi dans la Convention sur la responsabilité civile, je pense, une disposition sur les actions directes contre les sociétés d’assurance. Donc, l’hypothèse selon laquelle l’assureur est dégagé de toute responsabilité si l’armateur déclare faillite ne correspond pas à la réalité. Cela ne fonctionne pas ainsi. Ce problème est déjà prévu et la Loi sur la responsabilité en matière maritime comprend déjà des dispositions à cet égard.

Quant à la différence entre les petites et les grandes entreprises, cela n’a pas vraiment d’importance, encore une fois, car elles sont toutes tenues d’être assurées. Plus important encore, c’est en partie pour cette raison que la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires a été créée. Les déversements d’hydrocarbures, généralement mineurs, sont parfois ce qu’on appelle des déversements d’origine inconnue. Autrement dit, nous n’en connaissons pas la source. La Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires sert à traiter les réclamations liées à ce type de déversement.

S’il est impossible d’intenter des recours contre l’armateur pour une raison quelconque, la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires se charge du règlement.

Concernant les petits demandeurs, Mme Legars a déjà parlé des fonctions de la Caisse d’indemnisation des dommages dus à la pollution par les hydrocarbures causée par les navires. Un mécanisme est déjà prévu. Les gens peuvent, soit poursuivre l’armateur soit s’adresser à la caisse, qui se charge alors de poursuivre l’armateur.

Donc, un système plutôt robuste est déjà en place. De façon générale, l’indemnisation ne dépend pas de la taille de l’entreprise ni du fait que l’entreprise n’est pas assurée adéquatement. La réalité, c’est que toute société, grande ou petite, qui a des navires en eaux canadiennes doit avoir des garanties financières et en avoir la preuve à bord des navires.

Le vice-président : Monsieur Burrows, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Burrows : Au début de son intervention, la sénatrice Galvez a souligné un point concernant la sécurité. J’aimerais y revenir, si vous me le permettez.

La diminution de l’ampleur et du nombre de déversements de pétrole est un indicateur clé qui témoigne de notre capacité de protéger l’environnement. En fait, il y en a 10 fois moins que dans les années 1970, tandis que le transport d’hydrocarbures a doublé. Cela résulte en partie de modifications à la conception des navires depuis les années 1990 et de la réglementation sur le transport d’hydrocarbures.

Une étude de Clear Seas menée sur la côte Ouest a révélé qu’il n’y a eu aucun déversement majeur provenant de pétroliers ou de navires dans les eaux canadiennes depuis le milieu des années 1990. De plus, comparativement aux pipelines et au transport ferroviaire, le secteur du transport par navire-citerne présente un taux d’accidents moins élevé par million de barils transportés.

Ici, dans l’est du pays, nous transportons des produits semblables et notre bilan de sécurité est formidable. Notre mode de transport est beaucoup plus sûr que les modes de transport terrestres. À titre d’exemple, le taux de blessures liées à des accidents pour la région des Grands Lacs est 17 fois inférieur au taux national des transporteurs ferroviaires canadiens.

Prenez Lac-Mégantic, par exemple. De plus, le taux est 70 fois plus faible que celui des transporteurs ferroviaires américains de cette catégorie. Leur bilan en matière de sécurité est moins bon, mais ils sont en concurrence avec nous pour le transport de marchandises dans la région des Grands Lacs et du Saint-Laurent.

Je tenais à préciser ces faits, qui sont parfois contraires à la perception générale.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Tout d’abord, bienvenue à nos invités.

Monsieur Burrows, nous nous souvenons tous de l’effondrement de la pêche à la morue dans le golfe du Saint-Laurent et à Terre-Neuve. Le gouvernement fédéral, à l’époque, avait reçu des dizaines de messages résultant d’études scientifiques qui démontraient un déclin constant de cette pêche. Aujourd’hui, nous nous trouvons face à une situation désastreuse sur le plan économique, qui a remis en question l’existence de beaucoup de petites collectivités qui vivaient de cette pêche.

Je regarde comment le gouvernement fédéral a géré, cette année, tout le transport maritime et l’impact sur les cétacés et sur l’industrie du tourisme. J’ai l’impression qu’on revit le même scénario qu’à l’époque. La situation périlleuse dans laquelle se trouvent aujourd’hui les baleines du golfe du Saint-Laurent était-elle déjà annoncée, ou bien sommes-nous face à une situation qui a surgi soudainement cette année ou l’automne dernier? J’essaie de comprendre l’urgence devant de telles situations qui mettent en péril l’économie locale lorsqu’on prend des décisions rapides sans préparer les gens à faire ce virage. Quelle est votre perception de la situation des cétacés dans le golfe du Saint-Laurent, entre autres?

[Traduction]

M. Burrows : Monsieur le sénateur, votre question porte sur la baleine noire de l’Atlantique Nord. Cette situation existait depuis plusieurs années plus au sud dans la baie de Fundy et au large des côtes du Massachusetts. Puis, soudainement l’été dernier, la situation s’est déplacée vers le golfe.

Nous avons acquis une grande expérience avec la situation dans la baie de Fundy et nous avons songé à d’autres solutions. Les données probantes donnent à penser que le déplacement des voies plutôt que le ralentissement des navires représente la solution, et c’est ce que nous avons fait. C’est pourquoi nous nous préoccupions de la décision irréfléchie qui avait été prise pour aborder la situation de la baleine noire au Canada, alors que soudainement, nous devions réduire notre vitesse à 10 nœuds. Cela nous a beaucoup dérangés.

Enfin, cette année, après de nombreuses consultations avec l’industrie — et cela revient au point que j’ai soulevé plus tôt —, la situation est beaucoup plus facile à gérer. La population de baleines a quelque peu diminué dans le golfe cette année, comparativement à l’année dernière. Il n’y a eu aucune collision. Je souligne que le problème a surtout trait à l’enchevêtrement dans les filets de pêche plutôt qu’aux collisions avec les navires. Nous avons toutefois réussi cette année. Il n’y a aucune trace de collision avec un navire. Il y a peut-être eu quelques cas d’enchevêtrement dans les filets de pêche, mais je crois qu’on gère assez bien la situation maintenant.

Il est difficile de prédire l’avenir, mais je suppose que la population dans le golfe sera moins importante l’année prochaine et que la migration se fera plus au sud. On ne peut pas le prévoir avec certitude. On verra.

Nous avons en place un accord dynamique et diverses voies à utiliser pour réduire la vitesse uniquement au besoin. Heureusement, le gouvernement a augmenté le nombre de ressources affectées à l’observation. Je crois donc que nous serons en meilleure position et que nous aurons un meilleur plan en place au printemps prochain.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Avez-vous une idée de la perte économique, aussi bien pour l’industrie maritime que pour les collectivités?

[Traduction]

M. Burrows : Je crois que la perte économique a été beaucoup plus importante dans le secteur des pêches que dans le secteur du transport maritime. Cela étant dit, je n’ai pas vu de bonne compilation des chiffres. L’industrie des croisières a probablement connu les plus grandes pertes économiques. Elle a dû annuler de nombreux voyages l’année dernière. Je crois qu’elle offrira moins de voyages cette année, en raison du ralentissement à 10 nœuds, ce qui — je tiens à le préciser — représente une réduction plus importante pour les porte-conteneurs et les navires de croisière. Les gros navires sont habituellement plus lents de toute façon. Ils ont une vitesse de croisière moyenne de 13 nœuds, environ. Donc, la réduction à 10 nœuds n’a pas une grande incidence sur la plupart des membres. Pour bon nombre d’entre eux, cette réduction a une incidence économique. Nous y travaillons.

Le sénateur Wetston : Merci beaucoup. Est-ce que les témoins pourraient me donner une idée de la part du PIB du Canada associée au commerce maritime? Cela comprend bien sûr la contribution économique réelle de l’industrie du transport maritime en plus des composantes d’importation et d’exportation associées au transport entrant et sortant du Canada. Pouvez-vous fournir ces chiffres au comité?

M. Burrows : C’est une très bonne question. Nous avons récemment examiné l’incidence économique détaillée dans la région des Grands Lacs et du Saint-Laurent. Il s’agit d’une économie de 6 billions de dollars. J’aimerais m’attarder à cela un moment. Si nous découpions cette région composée de huit États et de deux provinces, elle constituerait la troisième plus importante économie du monde.

Dans cette région, le secteur maritime apporte une contribution d’environ 60 milliards de dollars sur le plan des activités; 329 000 emplois dans la région sont associés à cette industrie. Nous nous déplaçons chaque année. Ce sont des chiffres annuels. Ce sont environ 320 millions de tonnes de marchandises d’une valeur d’environ 100 milliards de dollars chaque année. Cela vous donne une idée. Je n’ai pas de chiffres sur la situation générale.

Le sénateur Wetston : Avez-vous des données sur l’Ouest, à Vancouver?

Mme Gee : Je peux répondre à cette question. L’année dernière, le Centre de transport maritime responsable Clear Seas — qui témoignera devant vous demain, je crois — a réalisé une étude nationale. Selon ses estimations, l’incidence du transport maritime représente environ 1,8 p. 100 de l’économie canadienne, et environ 30 milliards de dollars. Nous pouvons vous transmettre le lien si cela vous intéresse.

Le sénateur Wetston : Si vous voulez bien le transmettre à notre greffière, il nous serait très utile.

Je trouve cela très intéressant. Les avocats se font malmener au comité aujourd’hui, vous l’avez entendu, mais je vais essayer de ne pas faire la même chose.

Votre femme aura quelques mots à vous dire lorsque vous rentrerez à la maison, monsieur le vice-président.

Votre point de vue au sujet de la perte économique ne me dérange pas du tout, monsieur Swanson, et je comprends vos commentaires. Or, dans votre mémoire, vous dites que dans le cadre de l’intégration à la loi, il faut faire très attention aux conditions et à la nature des demandes.

Où voulez-vous en venir? Est-ce que vous proposez que le gouvernement modifie le projet de loi en y intégrant des critères ou d’autres facteurs pour orienter l’application des pertes économiques dans ces circonstances?

M. Swanson : Oui. Je crains que le projet de loi ne soit trop vaste et qu’il n’y ait aucune limite. Comme je l’ai dit, la seule limite sera l’imagination des avocats qui songeront aux demandes à présenter et qui imposeront aux tribunaux l’obligation de déterminer si ces demandes sont légitimes ou non.

Au bout du compte, les tribunaux devront examiner la question, si c’est la voie que nous décidons d’emprunter, parce qu’il faut une certaine limite, que certaines demandes iront trop loin et qu’elles ne respecteront pas les paramètres. Il reviendra aux tribunaux de trancher, à mon avis.

D’une certaine façon, cela créera une grande incertitude, qui donnera lieu à de nombreux litiges. Les tribunaux peineront à tracer la ligne appropriée.

Le sénateur Wetston : Je serai très bref. Ma question s’adresse à M. Burrows, je crois, mais peut-être aussi à M. Swanson ou à Mme Gee.

Le pouvoir d’ordonnance intérimaire dérangerait les participants, bien sûr, parce qu’ils s’inquiéteraient de l’exercice de ce pouvoir et des circonstances connexes. J’ai posé la question aux responsables et c’est une question qui me préoccuperait constamment également.

Je comprends pourquoi vous insistez sur les normes volontaires, mais est-ce que vous vous préoccupez davantage d’avoir le pouvoir de délivrer ces ordonnances intérimaires ou de les utiliser? Vous vous préoccupez peut-être du recours excessif à ces ordonnances. Pouvez-vous m’expliquer votre vision de la disposition et de l’exercice de ce pouvoir par le ministre?

M. Burrows : Je vais commencer. Ce n’est pas le pouvoir ou l’ordonnance en soi. C’est la façon dont elle est utilisée et peut-être sa nature excessive.

Encore une fois, nous ne sommes pas contre le principe des ordonnances intérimaires. C’est pourquoi je recommande la mise en place de politiques robustes sur leur utilisation, de même que des lignes directrices claires de la part du ministère voulant que ces ordonnances ne soient délivrées qu’en cas de risque important. L’industrie est consultée rapidement et les ordonnances peuvent être délivrées.

C’est la façon d’utiliser ces ordonnances qui me préoccupe. Si le gouvernement mettait en place un bon ensemble de politiques et de lignes directrices après l’adoption de la mesure législative, le cas échéant, j’en serais heureux.

Le sénateur Wetston : Monsieur Swanson ou madame Gee, avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?

M. Swanson : Non, mais Mme Gee veut peut-être dire quelque chose.

Mme Gee : Je dirais que ce qui nous préoccupe, c’est la façon dont ce serait appliqué. Il faudrait discuter avec les personnes touchées, puisque les conséquences pourraient être vastes. Nous craignons que certaines décisions irréfléchies soient prises sans tenir compte de leurs conséquences sur la chaîne d’approvisionnement dans son ensemble, par exemple.

Comme vous le savez, les navires attendent longtemps avant de pouvoir recevoir la totalité de leur cargaison de grains. Les navires attendent aux postes de mouillage pendant de longues périodes et les ordonnances intérimaires qui entraîneraient des retards supplémentaires dans le mouvement des marchandises ne seraient pas bien reçues, non seulement par la communauté maritime, mais aussi par les expéditeurs en général.

Le sénateur Wetston : Merci à vous deux.

Le sénateur MacDonald : Nous sommes heureux de vous revoir, monsieur Burrows. Nous souhaitons la bienvenue à nos invités de Vancouver.

Vous avez parlé des consultations qui ont eu lieu l’année dernière lorsqu’on a commencé à retrouver des baleines noires mortes dans le golfe du Saint-Laurent. Vous sembliez dire que des consultations appropriées avaient été tenues.

En ce qui a trait au projet de loi et à son évolution au cours des derniers mois, quel est le niveau des consultations qui ont été tenues avec les membres de votre secteur? En êtes-vous satisfait? Croyez-vous qu’elles étaient adéquates? Selon un témoin ministériel que nous avons entendu plus tôt, les consultations ont été importantes. Êtes-vous d’accord avec cela ou êtes-vous d’un autre avis?

M. Burrows : J’ai dit plus tôt — et je vais être un peu plus clair — que les consultations avaient été insuffisantes au départ. Elles ont été organisées à la hâte, peut-être sans tenir compte des conséquences en matière de service et d’économie.

Cela étant dit, les consultations ont par la suite été adéquates. Nous avons tenu d’importantes consultations depuis. Nous avons une bonne collaboration avec le gouvernement et je crois que tout fonctionne bien maintenant. Nous avons créé un accord dynamique, qui est en place aujourd’hui. Il aurait pu l’être dès le départ si les consultations avaient été adéquates.

Le sénateur MacDonald : Je m’intéresse aux discussions que vous avez eues au sujet de la baleine noire. C’est un enjeu important. Il y a environ 400 baleines noires. Personne n’a réalisé qu’elles allaient quitter le golfe en empruntant la baie de Fundy. D’après vos discussions avec le gouvernement — et parce que je n’ai pas posé la question aux témoins aujourd’hui —, savez-vous combien de décès sont attribuables aux collisions avec les embarcations lourdes et les bateaux de pêche, et quel pourcentage des décès est associé à l’enchevêtrement? Personne ne nous l’a vraiment dit aujourd’hui. Avez-vous des données à ce sujet?

M. Burrows : La seule façon de le savoir serait de procéder à une autopsie approfondie. On en a fait quelques-unes l’année dernière. Il n’y a pas eu d’incident cette année. L’année dernière, comme je l’ai dit, la majorité des incidents — je crois qu’il y a eu 12 décès — avaient trait à l’enchevêtrement.

Comme je l’ai dit, grâce à l’accord dynamique que nous avons mis en place, nous avons obtenu de bien meilleurs résultats cette année.

Le sénateur MacDonald : Je crois que vous en avez déjà parlé, mais êtes-vous d’avis que l’emplacement est plus important que la vitesse des navires? La lente évolution des engins de pêche et le manque d’orientation du MPO et d’autres ministères comme Environnement et Changement climatique Canada en ce qui a trait à la mise à jour, à la modification ou à l’amélioration des engins de pêche utilisés représente l’un des problèmes les plus importants.

M. Burrows : Oui, je suis d’accord. Le lieu, comme vous le dites, est très important. En ce qui a trait au transport maritime, en tenant compte de l’expérience dans la baie de Fundy, la réponse semble être... Parce que nous pouvons changer notre trajectoire assez facilement. Nous avons diverses options, alors ce n’est pas un problème pour nous. Nous n’avons donc pas nécessairement besoin de ralentir, puisque nous n’empruntons pas la même voie que les baleines.

La clé, c’est de bien comprendre où se trouvent les baleines. C’est la priorité du MPO. Il mettra en place de nouvelles technologies au printemps, pour mieux suivre les baleines.

Pour ce qui est de la pêche, il faudrait parler aux représentants de l’industrie, mais elle s’engage activement à mettre en œuvre des changements technologiques pour régler le problème d’enchevêtrement dans les engins de pêche.

Le sénateur MacDonald : J’aimerais faire un commentaire. Il est important de souligner que si un pipeline se rendait sur la côte Est, nous pourrions retirer un demi-million de barils de pétrole des eaux du golfe du Saint-Laurent, de l’estuaire du Saint-Laurent et de la baie de Fundy... Nous pourrions éliminer ce risque.

Le vice-président : C’était une déclaration plutôt qu’une question. Il ne vous reste que trois minutes.

[Français]

Le sénateur Cormier : Ma question s’adresse à M. Burrows et concerne le processus de consultation. Souvent, nous entendons cette idée du manque de consultation de la part du gouvernement.

De façon pratico-pratique, si vous deviez établir un protocole afin de déterminer la marche à suivre pour mener une consultation, dans un cas où, par exemple, des baleines seraient menacées, pouvez-vous me dire quelles seraient ces étapes pour que je comprenne comment il serait possible, en situation d’urgence, de consulter le secteur de l’industrie?

Ma question s’adresse à M. Burrows, mais nos témoins de Vancouver peuvent aussi y répondre.

[Traduction]

M. Burrows : Si je peux répondre au nom de la chambre, nous avons en place un processus d’intervention rapide. Nous avons déjà créé un comité de travail avec la Fédération maritime du Canada, par exemple. Nous avons du personnel scientifique de qualité en place — des biologistes et des environnementalistes — qui connaît bien la région. Ces gens travaillent en étroite collaboration avec le gouvernement. Nous n’avons qu’à appeler le groupe de travail. Ce n’est pas long; il ne faut que 24 heures pour convoquer le groupe à une conférence téléphonique lorsque nous avons ciblé un problème en fonction de notre expérience avec la baleine noire de l’Atlantique Nord, par exemple, et déterminer les mesures à prendre. Nous pouvons répondre rapidement à l’appel du gouvernement à cet égard avant qu’une ordonnance intérimaire ne soit délivrée.

Il faut donc 24 à 48 heures au groupe de travail pour répondre au ministre des Pêches ou au ministre des Transports.

[Français]

Le sénateur Cormier : Dois-je comprendre qu’une telle expertise ne se retrouve pas au sein de l’appareil gouvernemental? C’est ce que vous semblez dire. N’est-ce pas?

[Traduction]

M. Burrows : J’essayais de vous répondre selon l’angle du transport maritime et selon notre expertise. Je ne dis pas que le gouvernement n’a pas cette expertise. Il connaît bien la situation des baleines.

Il s’améliore. Il nous reste encore beaucoup de travail à faire pour trouver les baleines. C’est la clé. Mais oui, le gouvernement a cette expertise.

Le groupe de travail est composé de scientifiques du gouvernement, de l’industrie et de l’Université Dalhousie, sur la côte Est, qui font aussi partie de ce protocole, si je puis dire.

Le vice-président : Merci, monsieur Burrows, monsieur Swanson et madame Gee, de vos témoignages.

(La séance est levée.)

Haut de page