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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule nº 56 - Témoignages du 4 juin 2019


OTTAWA, le mardi 4 juin 2019.

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd’hui, à 9 h 30, pour étudier la teneur des éléments des sections 11, 12, 13 et 14 de la partie 4, et de la sous-section I de la section 9 de la partie 4 du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures, puis, à huis clos, en vue d’étudier une ébauche de rapport (Instructions de rédaction).

Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je souhaite la bienvenue aux témoins et déclare la séance ouverte.

Le sénateur MacDonald : Monsieur le président, j’invoque le Règlement.

Le président : Allez-y.

Le sénateur MacDonald : Hier, à la Chambre, nous avons remis au Sénat le 17e rapport du Comité sénatorial permanent des transports et des communications. J’ai examiné la première page du rapport en question, et on semble ne pas avoir respecté les instructions que le comité a formulées relativement au rapport. J’ai certains documents que la greffière peut distribuer.

J’aimerais qu’elle les distribue, s’il vous plaît.

La sénatrice Galvez : Monsieur le sénateur MacDonald, pouvez-vous parler dans le micro? Je ne vous entends pas.

Le sénateur MacDonald : Oui, je le ferai. Dans sa version actuelle, le rapport indique :

Par un vote de 6 à 6, votre comité recommande que le Sénat ne poursuive pas davantage l’étude de ce projet de loi, et ce, pour les raisons formulées ci-après.

Cependant, le vote de 6 à 6 portait sur la question de savoir si nous allions adopter le dernier article du projet de loi.

Lorsqu’il a été question d’en informer le comité, c’était avec dissidence. Ce n’était pas un vote de 6 à 6, mais ce n’est pas ainsi que le rapport présente les choses.

J'ai donc demandé la transcription de la réunion de mercredi dernier et j’aimerais savoir de quelle façon nous voulons composer avec le rapport :

Le président : Nous reprenons la séance. Plaît-il au comité que l’ébauche du rapport soit adoptée?

La sénatrice Miville-Dechêne : Avec dissidence.

Le président : Tous ceux qui sont pour?

Le sénateur Plett : Avec dissidence.

Le président : Avec dissidence? D’accord. Donc, la motion est adoptée.

Est-il convenu que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale du rapport en tenant compte des discussions d’aujourd’hui et en y apportant tout changement jugé nécessaire, que ce soit au niveau de la forme, de la grammaire ou de la traduction?

Des voix : D’accord.

Le président : Est-il convenu que le président soit autorisé à déposer la version finale du rapport au Sénat?

Ce qui a été déposé au Sénat n’était pas ce qui avait été convenu par le comité. Le rapport ne respectait pas les instructions du comité, et je crois que nous devons le réviser ou le modifier. Quelqu’un veut en discuter?

Le président : J’ai certains commentaires à formuler. Quelqu’un veut en discuter?

Le sénateur Manning : Vous dites qu’il y a une différence entre ce qui a été rapporté et ce qui a été dit durant la réunion relativement au vote sur le projet de loi et au vote sur le rapport. Ma question, monsieur le président, est la suivante : pourquoi y aurait-il une différence? Qu’est-ce qui est arrivé? Vous l’avez présenté hier, c’est exact?

Le président : Ce qui est arrivé, c’est que, hier, j’ai présenté...

Le sénateur Manning : Attendez un instant. Vous l’avez présenté hier, alors j’imagine que la question est la suivante : le rapport semble différent de ce dont nous avions convenu ici, au comité. Pourquoi auriez-vous déposé quelque chose qui n’a pas été accepté par le comité?

Le président : Vendredi, j’ai téléphoné et dit qu’il y avait un problème relativement au rapport, et on m’a dit que c’est de cette façon que la Bibliothèque avait interprété ce qui avait été dit pendant la réunion. Cependant, ce n’est pas ainsi que j’avais interprété ce qui avait été dit durant la réunion. Par conséquent, j’ai dit que j’allais soulever la question durant la réunion du comité directeur, ce que j’ai fait, hier. J’ai essayé de le souligner, mais le comité directeur était déterminé à ce qu’aucun changement ne soit apporté au rapport. Puis, il y a eu une motion durant la réunion du comité directeur selon laquelle je devais déposer le projet de loi ou le rapport hier, ce que j’ai fait. C’est ce qui s’est produit. Je n’étais pas heureux de la tournure des événements, mais c’est ce qui s’est produit.

C’est ce qui est arrivé. Même si, pour ce qui est du rapport en tant que tel, procéder ainsi était mal. Il ne fait aucun doute que, durant notre réunion, lorsque nous avons parlé du rapport, le vote de 6 à 6 devait être mentionné parallèlement au fait qu’il était question de l’adoption du projet de loi, pas du rapport, ce dernier ayant été adopté avec dissidence.

Le libellé actuel du rapport n’est tout simplement pas correct, et ce n’est pas ce qui a été convenu par les sénateurs. Je ne sais pas de quelle façon on peut changer cela, mais je crois qu’un amendement à la Chambre serait probablement nécessaire. Je vous dis tout simplement ce qui est ressorti de la réunion du comité. C’est le comité directeur, et la majorité n’a pas permis qu’on apporte des changements.

La sénatrice Galvez : Monsieur le président, si mon souvenir est bon, nous avons donné le pouvoir au comité directeur de mettre la dernière main au rapport et, quelle qu’ait été votre décision, c’est la forme que tout cela a pris, et le rapport a été déposé. Si vous voulez qu’on apporte un amendement mineur au rapport, je crois que c’est votre droit. Cependant, nous avons des témoins, ici, et, encore une fois, nous chamboulons l’ordre du jour. Je crois que c’est impoli de faire tout cela devant nos témoins. Pourquoi ne pas en discuter après la réunion?

Le président : Je comprends ce que vous dites, sénatrice Galvez, mais il a invoqué le Règlement, et il a le droit de le faire. Je crois que c’est une intervention valide.

La sénatrice Simons : Je crains que le rapport soit exact. Je ne vois pas le même problème que certains de mes collègues, parce que, dans sa version actuelle, il indique : « Par un vote de 6 à 6, votre comité recommande que le Sénat ne poursuive pas davantage l’étude de ce projet de loi... » Le libellé concerne non pas le rapport, mais le projet de loi. Je me trompe? Nous avons décidé par un vote de 6 à 6 que l’étude du projet de loi ne devait pas se poursuivre. Nous avons approuvé le rapport avec dissidence, mais ne s’agit-il pas là d’une déclaration exacte de la décision que nous avons prise relativement au projet de loi?

Je suis d’accord pour dire que le rapport doit être exact lorsqu’il est déposé à la Chambre, mais je ne vois pas la différence. S’il était écrit : « Par un vote de 6 à 6, votre comité recommande que le rapport soit accepté », alors, ce serait erroné. Cependant, le rapport dit : « Par un vote de 6 à 6, votre comité recommande que le Sénat ne poursuive pas davantage l’étude de ce projet de loi... N’est-ce pas exact?

Le président : Non.

Le sénateur MacDonald : Si je jugeais le libellé exact, je ne soulèverais pas le problème.

Le président : Le vote de 6 à 6 ne concernait pas la poursuite de l’étude du projet de loi. Le vote de 6 à 6 concernait l’adoption du projet de loi, et le projet de loi a ensuite été rejeté. C’est ce qui est arrivé. Cela n’a rien à voir avec le rapport, et lorsqu’on a tranché relativement au rapport, on l’a fait avec dissidence.

La sénatrice Gagné : Je trouve la discussion problématique, parce que tout cela avait été fait à huis clos.

Le président : Pour ce qui est du rapport, ce n’était pas à huis clos. Le rapport est ici. Le rapport a été déposé hier.

La sénatrice Gagné : Je sais, mais l’explication des interventions a été donnée à huis clos, alors de quelle façon pouvons-nous revenir sur une discussion à huis clos, ici, en public?

Le président : Nous n’avons pas parlé de la discussion. Je n’ai pas mentionné quoi que ce soit que la sénatrice Miville-Dechêne ou que le sénateur Dawson a dit. Je n’ai rien dit. Tout ce que j’ai fait, c’est souligner...

Le sénateur Manning : Ma préoccupation, c’est l’exactitude, et, avec tout le respect que je vous dois, je tiens simplement à m’assurer, en tant que membre du comité, que nous présentons un rapport sur le projet de loi. Nous reconnaissons tous que le processus a parfois été litigieux, mais nous devons nous assurer que la façon dont nous communiquons notre rapport à la Chambre, c’est la façon dont nous communiquons au public et au pays. Même si certains d’entre nous ne le croient peut-être pas, il y a des gens qui regardent les procédures et suivent de très près le processus lié au projet de loi.

Monsieur le président, dans la version actuelle du rapport, et relativement au libellé proposé, qu’est-ce que les gens qui ont préparé tout cela, est-ce...

Le sénateur MacDonald : Dans quelle mesure est-il difficile de modifier le rapport?

Le sénateur Manning : Que doit-on faire maintenant si nous voulons apporter la correction? Est-ce que les responsables juridiques comprennent ce que nous essayons de faire et est-ce que c’est bon?

Le président : Je ne sais pas. Je ne sais pas ce qu’ils pensent. Nous sommes responsables de nous-mêmes, alors nous essayons de cerner la bonne chose à faire.

Le sénateur Dawson : À juste titre, nous sommes responsables de nous-mêmes. Le comité directeur, dont je suis membre, tout comme la sénatrice Miville-Dechêne, a décidé hier, selon les conseils du comité, qu’il aurait le dernier mot en ce qui a trait au dépôt du rapport. Nous avons estimé que le libellé était correct. Je ne crois pas que vous souleviez un enjeu qui soit important.

Vous vous souviendrez, parce que vous en avez tous convenu — les mêmes personnes que celles qui sont ici aujourd’hui — que nous allions passer à l’étude article par article au plus tard le 13 avril. Nous en sommes maintenant au mois de juin. Nous avons eu toutes ces bonnes idées d’amendements et de modifications pendant plus de six semaines.

On parle de quelques mots. Si vous n’êtes pas heureux à ce sujet, sénateur MacDonald, vous pouvez le dire haut et fort à la Chambre, c’est votre décision. Le rapport a été déposé. Je ne crois pas que nous avons le pouvoir en tant que comité de modifier un rapport déposé à la Chambre, s’il représente avec exactitude ce qui a été dit dans le cadre des travaux du comité. Si les membres veulent passer au vote relativement à votre amendement, j’espère qu’il sera rejeté, parce que le comité directeur a fait ce qu’il a fait à la lumière de votre orientation.

La sénatrice Miville-Dechêne : J’ajouterais que, dans les versions française et anglaise de ce paragraphe précis, je ne vois rien qui dit que le vote de 6 à 6 concernait le rapport. Le vote de 6 à 6 renvoie au fait que nous avons recommandé au Sénat de ne pas poursuivre davantage l’étude du projet de loi, ce qui est une conséquence directe... si vous me permettez de terminer...

Le président : Je n’ai rien dit. Je vous écoute, sénatrice Miville-Dechêne.

La sénatrice Miville-Dechêne : C’est une conséquence directe du rejet du projet de loi. Puisque le projet de loi a été rejeté par le comité, la conséquence directe, c’est que nous ne demanderons pas au Sénat de poursuivre l’étude du projet de loi. Il n’y a absolument aucune erreur là. Nous ne disons à aucun moment que le rapport a été approuvé par un vote de 6 à 6. Comme vous l’avez souligné à juste titre, le rapport a été adopté avec dissidence, ce qui est une tout autre affaire.

Je crois que c’est exact. Certains n’aiment peut-être pas la façon dont cela a été fait, mais c’est exact.

La sénatrice McCoy : Nous n’avons pas vraiment donné suite au point soulevé par la sénatrice Gagné. Je crois que le vote était à huis clos.

La sénatrice Gagné : La discussion.

La sénatrice McCoy : Le vote lié à l’étude article par article ne s’est pas fait à huis clos?

La sénatrice Gagné : Non.

La sénatrice McCoy : Alors, votre point a été pris en considération.

La sénatrice Gagné : Pardon?

La sénatrice McCoy : J’avais mal compris où vous voulez en venir.

La sénatrice Gagné : Là où je voulais en venir, c’est que la discussion sur les changements apportés au rapport relativement au vote a eu lieu à huis clos.

Le sénateur Dawson : Nous avons des témoins, ici, et je crois que le comité est prêt à passer au vote. Je propose de passer au vote quant à l’amendement du sénateur MacDonald.

Le sénateur MacDonald : Je n’ai pas proposé d’amendement.

Le président : Il a invoqué le Règlement, et j’estime que c’était valide. C’est ma décision.

Le sénateur Dawson : Quand je lis le libellé proposé — j’imagine que c’est le libellé proposé —, c’est un amendement. Sauf s’il y a quelque chose que je n’ai pas compris.

De toute façon, pourquoi ne pas clore le dossier par un vote, afin que nous puissions ensuite revenir à la question du jour, soit le projet de loi C-97.

Le président : Et sur quoi allons-nous voter?

Le sénateur Dawson : Sur le rejet de sa proposition. Il a proposé un libellé...

Le sénateur MacDonald : Je n’ai rien proposé.

Le sénateur Dawson : C’est écrit ici, sur le document qui est apparu spontanément ce matin et que vous nous avez fait parvenir.

Le président : Ce n’est pas spontané. Il a le droit de le faire, monsieur le sénateur Dawson.

Le sénateur Dawson : Je suis d’accord. Il a le droit de le proposer, et j’ai le droit de le rejeter.

Le président : Il a invoqué le Règlement, et j’accepte sa démarche. Par conséquent, je ne sais pas ce que ça signifie...

Le sénateur Dawson : Nous avons perdu 20 minutes. C’est à peu près tout.

Le président : Nous n’avons pas perdu de temps.

Le sénateur Dawson : Nous avons perdu six semaines jusqu’à présent.

Le sénateur MacDonald : J’ai invoqué le Règlement parce qu’il faut le faire dès qu’on se présente au comité. C’est la raison pour laquelle je l’ai fait maintenant. Ce n’est pas un amendement. J’ai invoqué le Règlement pour souligner la situation, parce qu’il s’agit selon moi d’une erreur. Je voulais le dire pour le compte rendu. Nous pouvons bien passer au vote si nous le voulons, mais ce n’est pas un amendement.

Le président : Si j’accepte le rappel au Règlement, alors j’en confirme la validité. En tant que président, j’accepte donc votre rappel au Règlement, et par conséquent, votre démarche est valide.

Le sénateur Dawson : En tant que membre du comité, je propose que nous rejetions votre décision à cet égard. Je sais que, en tant que membre, j’ai le droit de le faire.

Le président : Oui, vous pouvez le faire.

Le sénateur Dawson : Je propose que nous rejetions la décision.

Le président : On propose une motion pour rejeter la décision de la présidence. Tous ceux qui sont pour? Y a-t-il un débat?

Le sénateur Manning : Pouvez-vous simplement expliquer ce qu’on fait exactement? C’est nouveau pour moi. Je suis ici depuis plus de 10 ans et je ne sais pas exactement ce qui se passe en ce moment.

Le sénateur MacDonald a invoqué le Règlement relativement au rapport qui a été présenté hier à la Chambre. Il est en désaccord avec le libellé. Je veux tout simplement m’assurer de comprendre, alors corrigez-moi si j’ai tort.

Par conséquent, s’il voulait changer le libellé, y a-t-il un processus que nous pourrions proposer pour le faire? Le savez-vous?

Le président : Il faut le faire à la Chambre.

Le sénateur Manning : Peut-on proposer un amendement à un rapport?

Le président : Oui, on peut le faire, mais devant la Chambre.

Le sénateur Manning : Je l’ignorais. D’accord. Il a invoqué le Règlement, et vous avez tranché à cet égard.

Le président : Oui, je crois que le point soulevé était valide.

Le sénateur Manning : Et le sénateur Dawson n’est pas d’accord.

Le sénateur Dawson : Je dis que ce n’est pas valide. J’aimerais que le comité vote à ce sujet, rejette son avis et entende les témoins, dont certains sont venus de loin pour comparaître aujourd’hui, et ce, relativement à un sujet qui est aussi important que le libellé du sénateur MacDonald.

Le sénateur MacDonald : Ce n’est pas mon libellé; c’est inclus dans le rapport. Ce n’est pas mon libellé.

Le président : La décision du président est-elle maintenue? Tous ceux en faveur du maintien de la décision de la présidence... Cela signifie que tous ceux qui sont d’accord avec moi. Voulons-nous un vote par appel nominal?

Le sénateur Cormier : Puis-je poser une question? Je veux tout simplement comprendre ce que cela signifie. Vous avez invoqué le Règlement, et le président l’a accepté. Je veux tout simplement m’assurer de comprendre ce sur quoi porte le vote en ce moment.

Le président : Si nous maintenons ma décision relativement au rappel au Règlement, je vais ensuite proposer une motion — du moins c’est ce que je crois — devant la Chambre avec le soutien du comité. C’est ce que j’aimerais faire devant la Chambre pour modifier ce passage précis.

La sénatrice Gagné : Encore une fois, je répète qu’on a discuté des intentions concernant le libellé à huis clos, alors je ne peux même pas en discuter en public, parce que les intentions qui sous-tendent le libellé ont été discutées à huis clos.

Le président : Eh bien, vous connaissez les résultats, madame la sénatrice Gagné. Êtes-vous d’accord que c’est ce que le rapport dit? Les résultats reflètent-ils ce sur quoi on s’est entendu?

La sénatrice Gagné : Le libellé actuel?

Le président : Oui.

La sénatrice Gagné : Oui.

Le président : Vraiment? Nous pouvons retourner à... Nous allons demander si la décision de la présidence est maintenue. Voulez-vous un vote par appel nominal? Je crois que ce serait beaucoup plus simple. C’est bien? Procédons. Nous allons procéder à un vote par appel nominal. Veuillez procéder.

Bien sûr, je vote en faveur du maintien de la motion de la présidence.

Joëlle Nadeau, greffière du comité : Je veux tout simplement confirmer deux changements en ce qui concerne la composition du comité. Nous avons la sénatrice Busson, en remplacement de la sénatrice Dasko, et le sénateur Neufeld, en remplacement du sénateur Plett.

Monsieur le sénateur Tkachuk?

Le sénateur Tkachuk : Oui.

Mme Nadeau : Monsieur le sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Oui.

Mme Nadeau : Madame la sénatrice Busson?

La sénatrice Busson : Non.

Mme Nadeau : Monsieur le sénateur Cormier.

Le sénateur Cormier : Non.

Mme Nadeau : Monsieur le sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

Mme Nadeau : Madame la sénatrice Gagné.

La sénatrice Gagné : Non.

Mme Nadeau : Madame la sénatrice Galvez.

La sénatrice Galvez : Non.

Mme Nadeau : Monsieur le sénateur MacDonald?

Le sénateur MacDonald : Oui.

Mme Nadeau : Monsieur le sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

Mme Nadeau : Madame la sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

Mme Nadeau : Monsieur le sénateur Neufeld?

Le sénateur Neufeld : Oui.

Mme Nadeau : Madame la sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

Mme Nadeau : La motion est rejetée par 7 voix contre 5.

Le président : Donc, la décision n’est pas maintenue. Nous allons passer aux témoins.

Nous poursuivons ce matin notre étude de la teneur des éléments des sections 11, 12, 13 et 14 de la partie 4, et de la sous-section I de la section 9 de la partie 4 du projet de loi C-97, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 19 mars 2019 et mettant en œuvre d’autres mesures.

Je m’excuse aux témoins de cette attente de 20 minutes. Je crois que, lorsque je vous ai informés, je vous ai mentionné que nous allions peut-être avoir quelque chose à régler pendant une vingtaine de minutes. Je crois bien que j’avais vu juste.

Nous sommes heureux d’accueillir aujourd’hui Bruce Burrows, président de la Chambre de commerce maritime, Tristan K.-Laflamme, directeur général et avocat général de l’Association des pilotes maritimes du Canada, Alain Arseneault, président et pilote maritime de la Corporation des pilotes du St-Laurent central, Roy Haakonson, président et pilote breveté de British Columbia Coast Pilots Ltd., et enfin, par vidéoconférence, Michael Broad, président de la Fédération maritime du Canada. Bienvenue, et merci de votre patience.

Michael Broad, président, Fédération maritime du Canada : Bonjour. La Fédération maritime du Canada a été créée en 1903 en vertu d’une loi du Parlement pour représenter les intérêts des intervenants du transport maritime international au Canada. Nous sommes une association commerciale nationale comptant des bureaux à Montréal et à Vancouver, et nos membres sont les propriétaires, exploitants et agents des navires faisant du commerce entre les ports canadiens et étrangers. Leurs bâtiments naviguent dans les quatre zones d’administration de pilotage d’un océan à l’autre. Les navires exploités à l’échelle internationale assument, de loin, la majeure partie des coûts de pilotage au Canada.

La Loi sur le pilotage actuelle n’a à peu près pas changé depuis 1972, et ce, malgré des changements liés aux technologies de navigation, à la conception des navires et aux communications. Nous croyons fermement que le projet de loi C-97 constituera un fondement solide à partir duquel poursuivre le nécessaire travail de modernisation des services de pilotage au pays. Par conséquent, nous prions les membres du comité de s’assurer que ces amendements sont adoptés le plus rapidement possible.

Au Canada, les services de pilotage sont obligatoires et offerts en vertu d’un monopole qui est établi par la loi et assorti d’une composante de rentabilité. Plus précisément, en vertu de la Loi sur le pilotage actuel, les administrations de pilotage sont les uniques responsables de l’administration des services de pilotage, tandis que les pilotes sont responsables d’assurer la prestation des services, soit en tant qu’employés des administrations, soit en tant que sociétés à but lucratif œuvrant à forfait pour les administrations.

Avant d’aller plus loin, nous tenons à souligner que la loi actuelle a été un outil excellent pour assurer la navigation sécuritaire dans les eaux canadiennes et que les modifications proposées dans le projet de loi ne minent absolument pas cette valeur essentielle du système de pilotage. Malheureusement, le modèle actuel ne permet pas assez de responsabilisation, de transparence, de réceptivité à l’égard des besoins des utilisateurs, ne comporte pas de cadre d’amélioration continue et ne favorise pas la compétitivité sur le plan des coûts. Par conséquent, l’adoption des nouvelles technologies n’a pas été optimale, et le système n’a pas été en mesure de contrôler les coûts.

À la lumière de ces préoccupations, nous sommes heureux de voir que les modifications de la Loi sur le pilotage proposées en vertu du projet de loi C-97 fourniront un certain nombre d’outils importants pour composer avec les problèmes susmentionnés et moderniser la prestation des services de pilotage au Canada.

L’un des principaux outils fournis par le projet de loi C-97 concerne l’introduction d’une disposition explicite sur l’objet et les principes, ce qui permettra d’étayer directement la façon dont les services de pilotage sont offerts et la façon dont les pouvoirs législatifs, administratifs et judiciaires sont exercés. Vu le rôle important que jouera cette disposition quant à la façon dont les services sont offerts et les règles appliquées, nous avons proposé une poignée d’amendements, sous la forme de libellé supplémentaire, pour renforcer le cadre fourni par le projet de loi C-97. Vous trouverez ces amendements dans notre mémoire.

Pour renforcer davantage la mise en œuvre de la loi, nous demandons aussi respectueusement au comité d’envisager de formuler des commentaires pour s’assurer que Transports Canada poursuit ses efforts afin d’accroître la transparence et la responsabilisation des sociétés de pilotage, vu leur statut en tant que fournisseur de services dans un cadre monopolistique imposé par la loi.

Nous avons plusieurs autres demandes à formuler au comité. Elles ne sont pas dans un ordre précis. Premièrement, il faut garantir que le gouvernement du Canada fournit à Transports Canada les ressources voulues pour élaborer la réglementation qui relevait précédemment des administrations de pilotage et, deuxièmement, tandis que le cadre réglementaire est regroupé sous l’égide de Transports Canada, s’assurer que les administrations de pilotage bénéficient des outils de gestion nécessaires, particulièrement dans leur interaction avec les pilotes.

Enfin, il y a un élément dans la section 11 auquel nous nous opposons, soit le transfert de l’ensemble des coûts de l’administration de la loi de Transports Canada au secteur privé. Nous ne sommes au fait d’aucune autre loi liée précisément à une activité qui permettrait au ministre de transférer de tels coûts à l’industrie. De plus, il semblerait que toute initiative de recouvrement des coûts devrait être assujettie à la Loi sur les frais de service, qui est assortie de ses propres lignes directrices et normes. Cette proposition omet aussi de reconnaître la composante d’« intérêt public » liée à la législation des services de pilotage au Canada.

Permettez-moi de prendre une minute pour résumer nos demandes. Nous soutenons fortement le cadre de pilotage modifié proposé en vertu de la section 11 du projet de loi C-97, et nous prions le comité de s’assurer qu’il est inscrit dans une loi et adopté le plus rapidement possible. Par le fait même, nous vous demandons d’envisager un ensemble d’amendements très précis touchant la disposition sur l’objet et les principes, ce qui permettra de renforcer davantage le cadre du point de vue des utilisateurs sans nuire à son essence.

Enfin, nous demandons au comité d’envisager d’éliminer la disposition superflue relativement au transfert des coûts administratifs de Transports Canada, ce qui va bien au-delà du pilotage obligatoire et, selon nous, va à l’encontre des politiques pangouvernementales.

Nous remercions le comité de l’occasion de formuler des commentaires, et je serai heureux de répondre à vos questions.

Le président : Merci.

[Français]

Bruce Burrows, président, Chambre de commerce maritime : :

Bonjour, mesdames et messieurs les sénateurs.

[Traduction]

Merci, monsieur le président et honorables sénateurs, de m’avoir invité à comparaître devant le comité.

[Français]

Je suis Bruce Burrows, président de la nouvelle Chambre de commerce maritime, ou CCM.

[Traduction]

J’imagine que bon nombre d’entre vous connaissent la CCM, alors je ne perdrai pas trop de temps à vous expliquer qui nous sommes. Nous vous parlons aujourd’hui précisément au nom des membres de la Chambre, qui sont des propriétaires ou des usagers de navires canadiens. De façon plus générale, la Chambre est une coalition de plus de 130 intervenants du secteur maritime et inclut aussi des ports, des exploitants de terminaux et d’autres intervenants de la chaîne d’approvisionnement logistique des deux côtés de la frontière.

En ce qui concerne l’objet de la réunion d’aujourd’hui, je ne saurais trop insister sur l’importance fondamentale de ces réformes pour le système de pilotage canadien. La Loi sur le pilotage n’a pas fait l’objet d’une mise à jour majeure depuis les années 1970, et ça paraît. Après 45 ans, nous voyons enfin dans le projet de loi C-97 des changements qui établiront un cadre à même d’encourager une plus grande objectivité, une plus grande transparence, plus d’uniformité et, nous l’espérons, des processus décisionnels impartiaux. Toutes ces choses sont des éléments essentiels d’une bonne gouvernance, qui fait cruellement défaut au système de pilotage monopolistique.

La Loi sur le pilotage sera maintenant assortie d’un objet et de principes clairs pour encadrer les processus décisionnels et les services de pilotage, qui devront être fournis de façon efficiente et économique. L’utilisation des technologies en constante évolution et une saine gestion des risques sont également mises de l’avant.

De plus, il est important pour nous de souligner les changements cruciaux suivants : la séparation du pouvoir réglementaire de la prestation des services de pilotage; le transfert des responsabilités en matière de réglementation et de délivrance de certificats de pilotage de l’administration vers Transports Canada; le fait de confier à Transports Canada la responsabilité réglementaire des évaluations du risque et de l’établissement des zones de pilotage obligatoire; le fait de s’assurer que les contrats de louage de services ne peuvent être utilisés pour régler des questions réglementaires, en contournant les processus réglementaires; et enfin, le fait d’exiger que les contrats de louage de services soient rendus publics.

Ce sont toutes des mesures clés pour assurer l’objectivité de la prise de décisions et éviter les sujets de conflits possibles, ainsi que pour veiller à ce que les services soient fournis dans un esprit d’efficacité et de rentabilité.

Pour faire fond sur l’aspect de la rentabilité, nous sommes impatients de travailler avec Transports Canada à la mise au point d’un système de certification national qui encourage la formation à bord des navires et la certification des capitaines et des officiers d’une entreprise pour qu’ils puissent piloter leur propre navire — semblable à ce que nous avons dans les Grands Lacs, où le système fonctionne très bien. Le pilotage consiste à assurer la sécurité, et nous croyons que le fait de miser sur le système en place dans les Grands Lacs ne contribuera qu’à améliorer la sécurité de la navigation. Nos capitaines et officiers brevetés ont un excellent bilan de sécurité.

Même si ces changements sont positifs, nous remarquons qu’une question n’a pas été incluse comme réforme dans le projet de loi. Les administrations de pilotage n’auront toujours pas le plein contrôle dans la prestation de services. Elles n’ont pas la capacité de choisir le modèle de recrutement qui répond à leurs besoins, qui les enferme souvent dans des contrats coûteux avec des sociétés de pilotage détenant le monopole, plutôt que de leur permettre d’embaucher des pilotes employés ou de conclure des contrats avec des pilotes individuels.

Ce manque de flexibilité nuira à la capacité des administrations de pilotage de choisir le modèle de prestation de services qui est bon pour elles, entraînant une augmentation des frais pour leurs clients, sans leur apporter d’améliorations au chapitre des services.

Je sais que, si le projet de loi est adopté, on procédera à un examen décennal de la loi, et nous continuerons de rechercher cette réforme dans des examens futurs. Nous sommes modérément optimistes à ce moment-ci. Même si un formidable ensemble de réformes a été proposé conformément à cette section, l’adoption du projet de loi C-97 n’est que la moitié de la bataille pour réformer le système de pilotage du Canada. Le gros du travail pour réformer le système sera fait maintenant, nous l’espérons, dans la transition du cadre réglementaire visant à soutenir les politiques et les programmes des administrations de pilotage vers Transports Canada.

Le système modernisé doit suivre l’orientation claire fournie par le projet de loi et celle prévue par le rapport de l’Examen de la Loi sur le pilotage et l’appliquer en fonction du nouvel objectif et des nouveaux principes contenus dans cette loi.

Encore une fois, nous vous remercions de l’invitation à comparaître, et je serai plus qu’heureux de répondre à vos questions.

Tristan K.-Laflamme, directeur général et avocat général, Association des pilotes maritimes du Canada : Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs.

Notre association représente les pilotes brevetés du Canada, de St. John’s à Victoria.

Pour de nombreux Canadiens, le pilotage est un secret bien gardé. La population générale ignore que, à chaque heure du jour, chaque jour, des pilotes maritimes locaux montent à bord de navires commerciaux afin de les conduire en toute sécurité à travers des zones qui ont été désignées comme des zones de pilotage obligatoire. Ils le font en raison des risques liés à la navigation.

Les pilotes sont les marins les plus expérimentés de la planète. Ils possèdent généralement des années d’expérience en tant que capitaines de navire avant de commencer le processus pour devenir pilotes. Ce processus est rigoureux, et il faut généralement des années avant qu’un pilote soit autorisé à conduire les grands navires qui passent par les parties particulières du cours d’eau pour lequel il est breveté. Les pilotes détiennent un brevet du gouvernement fédéral et sont dépêchés en vertu du pouvoir du gouvernement de manière à ce qu’ils assurent, d’abord et avant tout, une navigation sécuritaire.

[Français]

Bien qu’il s’agisse d’une profession qui joue un rôle clé relativement au bien-être de tous les Canadiens, ceux-ci, comme je l’ai mentionné, ne sont souvent pas au courant de son existence. La raison est simple : les pilotes font bien leur travail. Environ 50 000 affectations de pilotage ont lieu chaque année au pays et, chaque année, le bilan de sécurité est supérieur à 99,9 p. 100.

[Traduction]

Le pilotage existe pour protéger l’intérêt public. Le meilleur moyen d’y parvenir, c’est de s’assurer que les pilotes fonctionnent dans un environnement qui leur permet d’exercer leur jugement professionnel sans subir de pressions externes indues et en ayant comme première considération la sécurité.

Le système de pilotage du Canada a été très efficace, car sa fondation est solide comme le roc. Je suis heureux de dire que les amendements proposés de la Loi sur le pilotage respectent cette solide fondation. Ces amendements sont le résultat d’un long processus de délibération, et, à notre avis, ils reflètent un excellent équilibre entre les intérêts de divers intervenants maritimes. Ils rendent compte des mesures d’adaptation prises par toutes les parties, où chaque partie est en mesure de voir que ses intérêts ont été pris en considération dans le résultat. Pour cette raison, nous ne suggérons pas de modifier la législation proposée. Nous croyons que d’autres parties devraient aussi respecter l’intégrité des amendements proposés.

Les amendements peuvent renforcer la sécurité et l’efficacité.

[Français]

Ils constituent un tout qui ne peut pas être aisément modifié sans également remettre en question l’équilibre qui a été atteint.

[Traduction]

Pour terminer, le résultat de l’Examen de la Loi sur le pilotage qui est le plus gratifiant, c’est la conclusion claire à laquelle sont parvenues les études indépendantes commandées par Transports Canada selon laquelle le système du Canada fonctionne de manière remarquable, pour ce qui est non seulement d’assurer une navigation sécuritaire, mais aussi de soutenir le commerce international du pays — par exemple, en apportant nos ressources naturelles vers les marchés d’une manière qui tient compte de la préoccupation des Canadiens à l’égard de pratiques soucieuses de l’environnement.

Merci.

[Français]

Alain Arseneault, président et pilote maritime, Corporation des pilotes du St-Laurent central : Sénateur Tkachuk, honorables membres du comité, la Corporation des pilotes du St-Laurent central regroupe les pilotes du Saint-Laurent entre Québec et Montréal, y compris le port de Montréal. Avec ses 112 pilotes, en plus de ses 14 apprentis pilotes qui suivent actuellement le programme rigoureux de formation de 24 mois dispensé par la corporation, il s’agit de l’un des groupes les plus importants au pays. Je suis moi-même pilote entre Trois-Rivières et Montréal, et également vice-président de l’Association des pilotes maritimes du Canada pour la région laurentienne. Je préside également son comité sur la recherche, l’innovation et les techniques de pilotage. Je vous invite donc plus particulièrement à me poser des questions sur ces sujets.

On a beaucoup parlé de coûts durant la révision de la loi et de la nécessité d’une modernisation du système de pilotage, qui contribue à la compétitivité économique du Canada. Regardons les faits.

Au cours des cinq dernières années, l’indice des prix à la consommation a augmenté de 12 p. 100. Pendant ce temps, sur le Saint-Laurent, les tarifs de pilotage n’ont augmenté que de 8 p. 100.

Au cours de la même période, le volume de marchandises au port de Montréal a, pour sa part, augmenté de 28 p. 100 pour atteindre 39 millions de tonnes en 2018. C’est une cinquième année record consécutive. Pendant ces cinq années, environ 110 000 affectations de pilotage se sont produites sur le Saint-Laurent sans incident notable, et 99,8 p. 100 des affectations ont été réalisées sans délai à cause des pilotes. En même temps, en toile de fond, la taille moyenne des navires ne cesse de croître. À titre d’exemple, la dimension des navires a augmenté de 45 p. 100 entre Québec et Montréal entre 2007 et 2017.

Le pilotage est un investissement judicieux et essentiel au Canada. Puisque les frais d’exploitation des armateurs sont refilés aux consommateurs, le pilotage coûte environ 6 $ par année aux consommateurs canadiens. Une analyse coût-avantage du pilotage a démontré que le retour sur cet investissement était d’environ 120 $ par année par Canadien.

Les pilotes du Saint-Laurent accueillent favorablement les modifications à la loi. Le régime de conformité mis de l’avant fait la promesse d’une plus grande impartialité dans les décisions qui sont prises et d’une application plus systématique de la loi.

Une autre question est fort intéressante, et c’est l’accent que l’on met sur la technologie, qui est déjà une des grandes forces du système. En effet, les pilotes canadiens sont reconnus à l’échelle internationale pour leurs qualités de chefs de file en navigation électronique et en technologie de pilotage innovante. Dans le cas du Saint-Laurent, nous avons joué un rôle clé dans la mise en place d’initiatives qui favorisent le transit sécuritaire de navires toujours plus volumineux, dans des situations qui n’étaient pas réalistes il y a encore quelques années à peine, comme le trafic bidirectionnel vers Montréal, la nuit, en hiver.

Ces réussites sont possibles grâce à l’expertise que nous acquérons lors d’études de risque rigoureuses, d’analyses comparatives, d’essais en simulateur et de consultation avec les instances gouvernementales et les usagers. Nous accueillons aussi favorablement le fait que la Loi sur le pilotage de 2019 reconnaît les préoccupations des Canadiens à l’égard de l’environnement.

Sur le Saint-Laurent, la complexité des enjeux locaux liés à la navigation hivernale, aux grandes marées, aux hauts-fonds omniprésents, à l’étroitesse de certains secteurs en relation avec la taille des navires, à la densité de la circulation et à la proximité des propriétés riveraines requiert des connaissances très élevées des eaux locales.

La loi maintient une approche rigoureuse qui assure que les personnes qui pilotent les navires commerciaux font preuve d’une grande compétence. Cela est vrai non seulement pour les pilotes, mais aussi pour les capitaines de navires canadiens qui veulent obtenir un certificat leur permettant de piloter leur propre navire.

Sur ce point, contrairement à ce que certains intervenants laissent entendre, un programme de certification existe déjà sur le Saint-Laurent, et celui-ci a fait l’objet de modifications au fil des ans afin de le rendre plus accessible. Il est toutefois important de se rappeler qu’il inclut une exigence quant à la maîtrise du français, puisque les communications sur le fleuve se font essentiellement en français. Cette exigence existe pour servir l’intérêt du public, et non celui des pilotes ou de l’industrie.

C’est notre raison d’être : nous sommes des experts indépendants chargés par le gouvernement d’assurer l’intérêt public sur les eaux de notre fleuve. La loi réaffirme cette responsabilité, et nous l’acceptons avec modestie.

Merci.

[Traduction]

Roy Haakonson, président (pilote breveté), British Columbia Coast Pilots Ltd. : Nous sommes honorés d’être ici aujourd’hui. Merci encore une fois de nous permettre de représenter British Columbia Coast Pilots Ltd.

L’association B.C. Coast Pilots protège nos côtes depuis le milieu des années 1800 en fournissant une expertise impartiale et indépendante au nom du gouvernement et de la population du Canada aux expéditeurs étrangers. La Colombie-Britannique abrite l’un des habitats maritimes les plus intacts et écologiquement vulnérables en Amérique du Nord, mais c’est aussi le plus grand portail économique du pays.

À mesure que le Canada s’oriente vers la modernisation de la Loi sur le pilotage, les pilotes appuient fortement l’introduction dans la loi d’un énoncé d’objet et de principes clairement défini. L’ajout proposé à la loi stipule que la sécurité de la navigation, de la population et de l’environnement doit toujours être la principale préoccupation et pas uniquement lorsqu’elle est pratique ou adéquate. Il n’y a aucun intérêt à mettre en place une politique économique très ferme si le public et les Premières Nations ne font pas confiance au gouvernement ou à l’industrie pour protéger leur héritage. Ce sont les principes de base en fonction desquels tous les Canadiens vivent.

La disposition énonçant l’objet proposé montrera clairement que le gouvernement reconnaît que le système de pilotage doit assurer les plus hautes normes en matière de protection du public et de l’environnement. C’est particulièrement important à un moment de grandes préoccupations publiques au sujet d’une navigation sécuritaire et de l’environnement maritime, tout spécialement avec les propositions visant à augmenter de manière importante la circulation des pétroliers sur la côte Ouest.

Le public a une aversion pour le risque de plus en plus grande. La Loi sur le pilotage a fait l’objet d’un examen étendu sur deux ans et demi. Toutefois, quelques acteurs continuent de demander la déréglementation et la réduction des coûts au-delà de la sécurité dans le cadre de déclarations qui ne reposent pas toujours sur des faits.

Pour terminer, dans le cadre du processus d’examen, les pilotes ont insisté sans relâche sur la nécessité de se reporter à des études indépendantes de Transports Canada qui énoncent ce qui suit :

En 2016, les coûts totaux de pilotage au port de Vancouver représentaient 0,018 p. 100 de la valeur de leur commerce maritime.

Le rapport indiquait clairement que le pilotage ne nuit pas à la compétitivité du Canada, et d’autres analyses des avantages du pilotage révèlent qu’il contribue à la compétitivité en aidant Vancouver et Prince Rupert à augmenter leur part du volume de conteneurs par rapport aux ports des États-Unis comme Seattle et Tacoma. Le bien-être économique du Canada dépend d’un pilotage fort, sûr et sécuritaire.

British Columbia Coast Pilots soutient les amendements, puisqu’ils défendent la sécurité et l’indépendance du pilotage. C’est essentiel pour assurer un corridor commercial occidental sécuritaire. Le bien-être économique des Canadiens exige un pilotage sûr, sécuritaire et responsable sur le plan environnemental. Il doit aussi être novateur, sur les plans tant social qu’économique.

Je suis heureux de dire que, en vertu de la loi modernisée, si elle est adoptée, les Canadiens pourront continuer de s’attendre à profiter exactement de ce type de système.

Merci, mesdames et messieurs.

Le président : Merci, monsieur Haakonson.

[Français]

La sénatrice Gagné : Ma question s’adresse à M. Burrows et à M. Laflamme. Je vais commencer par M. Burrows. Je vais poser la même question, mais j’aimerais que vous me fassiez vos commentaires. Monsieur Arseneault, si vous pouvez vous joindre à la discussion, ce serait bien apprécié.

La Chambre de commerce maritime a affirmé qu’un des changements les plus importants proposés dans le projet de loi C-97 est de permettre aux équipages canadiens, et je cite :

[…] qui possèdent des connaissances et une expérience comparable à celle des pilotes […] de piloter leur propre navire dans les zones de pilotage obligatoires.

J’aimerais avoir vos commentaires à ce sujet. Monsieur Burrows, quelles sont les répercussions sur l’industrie du transport maritime du fait d’autoriser des personnes qui possèdent des connaissances et une expérience comparable à celles des pilotes à piloter leur propre navire dans les zones de pilotage obligatoires?

M. Burrows : Si vous me le permettez, je vais répondre en anglais.

[Traduction]

Je vais passer en revue le système tel qu’il fonctionne aujourd’hui. Le pilotage est essentiellement obligatoire dans la presque totalité de la région du Saint-Laurent et des Grands Lacs. À cet égard, nous avons un système de certification très robuste dans les Grands Lacs. La majeure partie de notre « pilotage » est effectuée par des capitaines brevetés qui connaissent leurs navires et possèdent des années d’expérience et des connaissances locales. Les systèmes fonctionnent bien. Je veux être clair : les navires pilotés par des professionnels, particulièrement les navires internationaux, ont aussi un système sûr. Si vous examinez les statistiques du Bureau de la sécurité des transports, vous verrez que c’est un système tout aussi bon, voire encore plus sécuritaire avec les pilotes brevetés. Nous y tenons vraiment.

Comme le reconnaissent le rapport de Marc Grégoire et la législation proposée, nous tenons beaucoup à voir l’élargissement du système de certification, qui serait une très bonne chose. Cela permettrait de contenir davantage les coûts et d’assurer une plus grande rentabilité de notre système afin de permettre la concurrence continue.

[Français]

M. K.-Laflamme : Premièrement, le pilotage existe pour servir l’intérêt public, et non l’industrie ou les pilotes. La loi est flexible en ce qui concerne l’industrie canadienne pour permettre aux officiers œuvrant à bord des navires canadiens de travailler sans pilote — ce sont les termes utilisés dans la prochaine version du projet de loi s’il est adopté — si les officiers en question montrent qu’ils ont des connaissances similaires à celles d’un pilote. Le but est de donner un plus haut niveau d’assurance au public, soit que les gens qui conduisent des navires commerciaux sur les axes de transport canadiens sont dûment qualifiés et ont une connaissance appropriée des particularités locales. Il s’agit donc d’un point de référence. Ils doivent avoir une connaissance similaire des eaux locales.

Cela dit, un système de certification est en place dans les Grands Lacs et sur le Saint-Laurent. Comme M. Arseneault l’a mentionné, une exigence n’est pas toujours mise en vigueur par les représentants de l’industrie. Sur le Saint-Laurent, on doit démontrer sa connaissance du français. Ce n’est pas par velléité. C’est simplement parce que la réalité est que la circulation sur le Saint-Laurent se fait en français. Au même titre que ce serait étonnant d’avoir un unilingue francophone qui pilote des pétroliers dans le port de Vancouver, la maîtrise du français fait partie des connaissances locales sur le Saint-Laurent. Mon collègue de l’industrie n’a pas mentionné dans son mémoire que, lors de la révision de la loi, il a suggéré d’abolir cette exigence. De toute évidence, nous avons un point de vue différent.

La sénatrice Gagné : Merci. Monsieur Arseneault?

M. Arseneault : Je vous remercie de la question, sénatrice Gagné. En réalité, notre collègue, M. Burrows, oublie peut-être de dire que le système sur lequel les armateurs aimeraient voir se baser le système de certification — et qui serait leur dénominateur commun — a malheureusement été qualifié de « déficient » par le vérificateur général du Canada à deux reprises. C’est un système sur les Grands Lacs canadiens qui vient d’un système de « grand-périsation » ou d’exemption de pilotage, et non d’un système de certification.

Au cours des cinq dernières années, nous avons vu une dégradation importante pour ce qui est du nombre de certificats octroyés depuis que l’Administration de pilotage des Grands Lacs a dû relever son niveau d’examen des certificats. Malheureusement, nous serions extrêmement inquiets sur le Saint-Laurent de voir un système de certification remplacé par un système qui a été jugé « déficient » par le vérificateur général.

La sénatrice Gagné : Merci.

Le sénateur Cormier : Ma question fait suite à celle de la sénatrice Gagné. Vous avez répondu à la question sur l’utilisation de la langue française. Transports Canada doit respecter la Loi sur les langues officielles. Le ministère doit respecter ses obligations et le statut de la langue française sur le fleuve. Ma question s’adresse à M. Arseneault et porte sur la recherche, l’innovation et les techniques de pilotage. Quels sont les enjeux actuels pour assurer la mise à niveau des techniques de pilotage, compte tenu de l’innovation et des nouvelles technologies et du fait que vous avez actuellement 14 apprentis pilotes?

M. Arseneault : Merci de la question, sénateur Cormier. Effectivement, les nouvelles technologies, comme dans tous les moyens de transport — on l’a constaté dans le secteur aérien avec les problèmes de Boeing —, doivent être maîtrisées par les experts qui les exploitent et qui les utiliseront au meilleur escient. C’est ce qu’on fait sur le Saint-Laurent depuis plusieurs années. Bien entendu, toutes les tendances dans la navigation autonome, comme on le voit dans le secteur automobile et dans le secteur aérien, sont des outils qui aident à la prise de décisions. On pourrait croire que certains appareils pourraient remplacer la présence d’un humain à bord d’un navire, d’un avion ou d’une automobile dans un proche avenir. En tant qu’experts, nous devons nous assurer, quand on parle de la navigation sur le fleuve Saint-Laurent et au Canada, que ces nouvelles technologies sont utilisées pour améliorer non seulement l’efficacité des transits, mais également la sécurité ou, du moins, pour assurer un niveau de sécurité acceptable pour le public. À ce titre, les pilotes canadiens sont reconnus à l’échelle internationale pour leur esprit d’innovation, car ils ont notamment présenté de nouveaux appareils d’aide à la décision qui nous aident, au quotidien, à améliorer l’efficacité et l’efficience des transports et la fluidité des transits sur le fleuve Saint-Laurent. Je ne sais pas si j’ai bien répondu à votre question.

Le sénateur Cormier : La question linguistique est-elle un enjeu pour ce qui est de l’intégration des nouvelles technologies?

M. Arseneault : Plus ou moins; les nouvelles technologies et les logiciels qu’on peut exploiter peuvent être utilisés autant en français que dans la majorité des langues à l’échelle internationale. En ce moment, la question de la langue relativement à l’exploitation des nouvelles technologies n’est pas un enjeu.

Le sénateur Dawson : Je suis le dossier des pilotes du Saint-Laurent et du fleuve Saint-Laurent depuis longtemps. J’ai rarement vu —

[Traduction]

... si ce désaccord entre les deux parties ne s’amplifie pas, je suis convaincu que nous pourrons trouver un bon compromis. Comme vous pouvez le voir, nous avons parfois ici des débats acrimonieux qui ne sont pas aussi bien contenus.

Cela dit, il y a une chose pour laquelle j’aimerais obtenir les commentaires des « deux parties » : l’examen décennal. Étant donné les progrès de la technologie et les changements touchant la taille des navires, une période de 10 ans est-elle trop longue ou devrait-elle être plus courte? Ce n’est pas que nous changerons les choses, et je sais que vous avez négocié cela et qu’il vous a fallu beaucoup de temps pour parvenir à cette entente, mais pourquoi 10 ans?

M. K.-Laflamme : Je crois que les 10 ans permettent d’établir un juste équilibre par rapport à cette question particulière. D’abord, pour arriver où nous sommes aujourd’hui, si nous comptons le Comité d’examen de la Loi sur les transports au Canada, il nous a fallu environ quatre ans. Nous avons déjà tenu beaucoup de discussions au sujet du pilotage.

On a aussi beaucoup de travail à faire au cours des prochaines années pour ce qui est d’examiner les règlements partout au pays. On s’attend à ce que cela prenne au moins quelques années avant que nous soyons en mesure d’évaluer les répercussions de cette mise au point. Par conséquent, la perspective d’examiner la loi quelques années plus tard est logique.

M. Burrows : J’aimerais aussi rappeler les mêmes commentaires que ceux de Me Laflamme. Idéalement, un examen quinquennal semble une meilleure chose. Nous avions au départ préféré un examen quinquennal, mais, comme mon collègue le souligne à juste titre, le délai d’exécution requis et la quantité d’examens réglementaires que nous devons faire avant que le travail soit terminé — ou peut-être pas avant — dans cinq ans, il nous faudrait commencer un nouvel examen. Ce n’est pas très logique. Par la suite, cependant, après 10 ans, un autre examen au bout de cinq ans pourrait fonctionner, mais pour le moment, je serais en faveur d’un examen décennal.

La sénatrice Galvez : Je suis heureuse de recevoir le témoignage de nos témoins. Je crois que nous aurions dû vous entendre durant notre étude du projet de loi C-48. Je ne comprends pas pourquoi vous n’avez pas été invités durant ces audiences. Nous n’avons entendu que M. Burrows.

Il est extrêmement important que les pilotes connaissent les eaux, la géographie et le paysage. C’est d’une importance capitale.

Maître Laflamme, vous avez parlé de questions concernant les pétroliers et les navires qui deviennent de plus en plus grands. Y a-t-il une limite à la taille de ces pétroliers? Il ne faut pas oublier que nous avons des événements météorologiques extrêmes — les tempêtes. Nous sommes allés en Colombie-Britannique et à Terre-Neuve et nous avons entendu parler des icebergs qui se déplaçaient et des très fortes tempêtes. Je suis heureuse de voir ce nouvel accent mis sur l’environnement et la sécurité, mais j’aimerais entendre votre opinion, car vous êtes des pilotes. Quels sont les changements, les risques et les problèmes que vous entrevoyez par rapport aux changements que nous observons?

M. Haakonson : Une chose que nous devons gérer chaque jour dans l’Ouest, madame la sénatrice, c’est la taille des navires. Pour la plupart, les voies navigables demeurent relativement les mêmes, mais en ce qui concerne la taille des navires, nous voyons une explosion sur la côte Ouest.

La technologie représente une innovation quotidienne pour les pilotes, comme c’est le cas pour l’industrie de l’aviation. Grâce à la navigation technologique, nous faisons maintenant passer sous le pont Lions Gate de très grands navires de croisière qui excèdent les limites de tirant d’air. Nous voyons aussi maintenant des innovations pour ce qui est des vitesses d’accostage et des angles d’approche. Encore une fois, étant donné la taille des navires que nous voyons, il est impossible pour l’œil humain de juger la vitesse. Quand quelque chose se trouve à 300 mètres devant vous, vous ne pouvez pas savoir si vous naviguez à 5 ou à 10 mètres par seconde. Encore une fois, l’unité de pilotage portable du pilote sert au quotidien.

Une chose qu’on ne dit jamais, c’est que, depuis les 10 dernières années dans l’Ouest, les ports — américains, canadiens ou européens — essaient tant bien que mal de suivre le rythme des progrès relativement à la taille des navires. Les pilotes voient un trafic continu qui s’en va dans le port de Vancouver et celui de Prince Rupert au-delà de la capacité des terminaux de soutenir les chargements qu’on exige d’eux. En conséquence, la marge de manœuvre critique des ports essaie de suivre la cadence. Nous déplaçons maintenant de très grands navires porte-conteneurs de 366 mètres. Nous nous préparons à accueillir des navires de 400 mètres.

Les ports essaient toujours de suivre la cadence, mais les pilotes, grâce à la technologie et aux innovations, ont permis aux ports et au Canada de reprendre leur souffle et de commencer à se préparer en vue de cette explosion. La pratique avec les expéditions, c’est que nous recevons un préavis de six semaines au maximum nous indiquant que la taille d’un navire a doublé. Dans un port comme celui de Prince Rupert, même avec les nouveaux terminaux, nous parlons de navires de 366 à 400 mètres — deux navires qui entrent en même temps ou un qui sort.

Si vous parlez de technologie, c’est quelque chose qui touche les pilotes au quotidien. On aurait tort de penser que le pilote maritime est bien différent du pilote d’aviation.

M. Burrows : Juste pour reprendre ce que vous disiez, madame la sénatrice, du point de vue des Grands Lacs et du Saint-Laurent, il y a des restrictions naturelles en raison de la taille des écluses et ainsi de suite pour ce qui est du pétrole et des produits pétroliers qui sont déplacés jusque dans les lacs.

La diminution du nombre et de l’ampleur des déversements pétroliers est un signe incontestable de notre réussite pour ce qui est de protéger l’environnement. Le monde a été complètement bouleversé depuis les années 1970. Compte tenu des changements actuels et de la conception des navires — la double coque et toute une gamme de restrictions et de changements touchant le transport de pétrole — tout est régi par l’Organisation maritime internationale de Londres, qui est l’agence des Nations Unies. Même si le transport de pétrole a doublé, le nombre d’incidents est 10 fois moins important. De fait, une récente étude a confirmé que, par rapport aux pipelines et au transport ferroviaire, le transport pétrolier maritime entraîne le plus petit nombre d’accidents par million de barils de pétrole. C’est vraiment le mode de choix aujourd’hui pour le déplacement des produits pétroliers.

La sénatrice Busson : Ma question s’adresse au capitaine Haakonson. Sur la côte Ouest, on a parlé des zones de pilotage obligatoire. Est-ce toute la côte qui est visée par l’exigence relative aux zones de pilotage obligatoire?

M. Haakonson : Oui. Sur la côte Ouest, c’est un pilotage obligatoire depuis la frontière de l’État de Washington jusqu’à la frontière de l’État de l’Alaska. Vers la mer jusqu’à l’île de Vancouver et aux îles de la Reine-Charlotte ou Haida Gwaii, il n’y en a pas autant que ce que nous aimerions voir, mais elles se situent à distance de 5 à 19 kilomètres en mer. Les eaux intérieures sont toutes des zones de pilotage obligatoire.

La sénatrice Busson : Qui décide si un pilote ou un capitaine de bateau détient la classification ou la certification nécessaire pour piloter son propre navire? Qui décide et applique cette décision relative à la certification?

M. Haakonson : À l’heure actuelle, ce serait l’Administration de pilotage du Pacifique.

La sénatrice Busson : Elle est responsable de la surveillance portant sur le comment, le qui et le quand?

M. Haakonson : En Colombie-Britannique, je ne connais pas de navire qui entrerait dans des eaux de pilotage obligatoire sans avoir de pilote à bord.

La sénatrice McCoy : Merci d’être ici. C’est formidable de voir tout le monde appuyer un projet de loi.

J’éprouve encore des inquiétudes. J’ai suivi ce dossier, même si ce n’est pas depuis aussi longtemps que certains sénateurs. Tout le système de gestion maritime au Canada change rapidement, je suppose, juste à la dernière minute du mandat d’un gouvernement. On commence à prêter attention à ces questions pour voir comment tout cela fonctionne.

Une des choses qui vont se produire, selon ce que vous dites, c’est l’uniformité. Je me rappelle qu’une personne a dit que les pilotes dans la baie Placentia accompagnent en réalité les navires jusqu’à 23 kilomètres en mer. Vous dites que sur la côte Ouest, c’est 12 kilomètres.

M. Haakonson : Jusqu’à 12.

La sénatrice McCoy : Jusqu’à 12. Je suis sûre qu’il y a de très bonnes raisons liées à la gestion maritime pour le faire, qui reposent probablement sur les connaissances locales. Je m’inquiète du fait que si vous centralisez le pouvoir de réglementation — ce serait un règlement — allons-nous perpétuer cette tendance des décideurs à Ottawa de proposer une solution unique. Cela me semble inconcevable. Je ne peux pas vraiment comparer la baie Placentia, le Saint-Laurent et Prince Rupert.

Pourriez-vous expliquer pourquoi vous croyez qu’il y aura une uniformité?

M. Haakonson : Madame la sénatrice, par rapport au pilotage obligatoire au large des côtes, c’est une bonne question. Les pilotes ont actuellement des plateformes d’accostage sur la côte Ouest de Prince Rupert, la pointe de l’île de Vancouver à Port Hardy ou à Pine Island, sur la côte Ouest au large du cap Beale, au passage Port Alberni et aussi à Victoria.

Je crois que, dans le cadre de nos discussions avec l’administration concernant l’élargissement de la circonscription, on a parlé de la capacité de servir la circonscription. Notre circonscription est assez imposante; elle s’étend d’une frontière à l’autre et renferme des plateformes d’accostage désignées. Nous serions plus à l’aise avec l’adoption du transbordement par hélicoptère, ce que nous faisons sur la côte Nord. Nous avons discuté pour savoir si, vu l’adoption des transbordements des pilotes par hélicoptère, il était maintenant nécessaire d’envisager de repousser les circonscriptions de pilotage sur la côte de la Colombie-Britannique.

Il y a aussi une inquiétude associée aux Premières Nations, particulièrement la nation Haïda, par rapport à un certain type de zone d’exclusion sur la côte Ouest. Deux enjeux font actuellement l’objet de discussions actives.

Je crois que, pour les pilotes, si vous deviez élargir la circonscription obligatoire, il nous faudrait pouvoir accéder à la limite. Si nous disions que la limite se situe à 19 kilomètres au large de Haida Gwaii, il nous faudrait mettre en place un processus pour que nous puissions desservir ces 19 kilomètres.

La sénatrice McCoy : Vous dites donc que vous prendriez un plus petit bateau avec le navire ou que vous rencontreriez un navire?

M. Haakonson : C’est ce que nous faisons en ce moment.

La sénatrice McCoy : Et si vous alliez plus loin que les 19 kilomètres, il vous faudrait un plus grand navire?

M. Haakonson : Il vous faudrait ou bien un plus grand navire extracôtier ou un hélicoptère.

La sénatrice McCoy : Je vois. Je crois que j’ai raison de penser que, quand vous dites que les quatre administrations de pilotage deviendront une administration unique et qu’elles seront essentiellement gérées par le ministre, qui est une forme de politisation... et on présume qu’il déléguera quelqu’un dans son ministère. Comment cette personne, qui est maintenant responsable de tout le Canada, saura-t-elle que ce devrait être 12 kilomètres sur la côte Ouest et 23 à Placentia?

M. K.-Laflamme : Juste pour être clair, les quatre administrations de pilotage ne deviendront pas une seule administration. C’est vraiment juste la réglementation qui est centralisée à Ottawa.

J’ai quelques réflexions sur cette question. Vous avez raison, madame la sénatrice, le pilotage est de nature locale. Il ne peut y avoir une solution unique de la baie Placentia à Vancouver. Heureusement, le processus menant à des décisions repose sur une analyse du risque adaptée aux circonstances locales; c’est donc du cas par cas. En ce qui a trait à la suggestion de consolider le pouvoir de réglementation à Transports Canada, nous nous préoccupons du fait qu’il est nécessaire de maintenir à la table des voix régionales fortes, de sorte que les circonstances locales soient prises en considération. Je crois que les représentants de Transports Canada sont au courant de cela et qu’ils ont fait preuve de bonne foi jusqu’ici pour tenir compte de cette préoccupation dans l’avenir.

Peut-être que, comme dernière réflexion, je dirais qu’il y a déjà un plan directeur, et nous devrions nous en souvenir. Il existe un Règlement général sur le pilotage qui est déjà administré à partir de Transports Canada. Celui-ci établit un certain nombre d’exigences générales qui s’appliquent à toutes les régions, mais il offre aussi la souplesse de créer des chapitres régionaux qui mettent de l’avant des exigences locales adaptées aux exigences de chaque région.

M. Burrows : Juste pour rassurer la sénatrice sur ce point, Transports Canada possède une vaste expérience pour ce qui est d’administrer les règlements nationaux à l’échelon régional. Les pilotes ne le savent peut-être pas, mais la Loi sur la marine marchande du Canada, par exemple, prévoit plus de sept exemples de divers règlements qui sont normalisés à l’échelle nationale, mais tiennent tous compte de volets locaux. Cela peut être facilement géré. Je ne suis pas du tout préoccupé, bien franchement.

La sénatrice McCoy : Le président ne veut pas que je pose une seule question simple.

Le président : Est-ce une seule question simple? Allez-y, madame la sénatrice McCoy.

La sénatrice McCoy : J’ai lu récemment les rapports d’accident pour deux déversements sur la côte nord de la Colombie-Britannique. L’un d’eux concernait le traversier de la Colombie-Britannique, le Queen of the North, et l’autre était un remorqueur, le Nathan E. Stewart. Aucun d’entre eux n’avait de pilote à bord, et pourtant, c’est une zone de pilotage obligatoire.

M. Haakonson : C’est une bonne question. Le Nathan E. Stewart demeure un dossier d’actualité dans l’Ouest, madame la sénatrice. La nation Heiltsuk a beaucoup de questions auxquelles on n’a pas encore répondu. Vous avez raison, le Nathan E. Stewart n’était pas assujetti au pilotage obligatoire. C’est un remorqueur-chaland articulé américain qui a échoué et déversé du pétrole dans le détroit de Seaforth.

L’une des questions liées aux amendements concerne, je crois, les certificats et les dispenses, qui sont deux questions distinctes. Une dispense est accordée par l’administration à un équipage ou à un agent breveté pour exploiter le navire. Je crois que cela montre les faiblesses dans le système actuel. Avec les nouveaux amendements, les certificats et les dispenses se retrouvent de nouveau parmi les premières choses que l’on doit gérer. J’espère — et nous avons eu des garanties — que le système deviendra plus robuste.

Le système actuel en vertu duquel était exploité le Nathan E. Stewart remonte au début des années 1970. Ce qui était approprié durant ces années ne l’est certainement pas en 2019.

Le président : Sur ce, merci aux témoins. Merci, mesdames et messieurs les sénateurs.

Pour notre deuxième groupe de témoins ce matin, nous sommes heureux que comparaissent devant nous Massimo Bergamini, président et chef de la direction, du Conseil national des lignes aériennes du Canada; Daniel-Robert Gooch, président, du Conseil des aéroports du Canada; Doug Keller-Hobson, chef de la direction, de Vols d’espoir; John McKenna, président et chef de la direction, de l’Association du transport aérien du Canada; et Andrew Norgaard, vice-président, Communications, de NAV CANADA. Merci de votre présence.

Massimo Bergamini, président et chef de la direction, Conseil national des lignes aériennes du Canada : Bonjour, monsieur le président et membres du comité. Je m’appelle Massimo Bergamini et je suis président et chef de la direction du Conseil national des lignes aériennes du Canada. Je tiens à vous remercier de cette possibilité de m’adresser à vous au sujet du projet de loi C-97, en ce qui touche la Loi sur la commercialisation des services de contrôle de sûreté, qui permet le transfert du contrôle de la sûreté de l’ACSTA à une entité à but non lucratif indépendante.

[Français]

Le Conseil national des lignes aériennes du Canada représente les quatre plus grandes compagnies aériennes au pays, soit Air Canada, Air Transat, WestJet et Jazz Aviation. En évaluant ce projet de loi, il est important de se rappeler que, lors de sa création en 2002, l’ACSTA a remplacé une entité à but non lucratif indépendante, la Corporation de sécurité de transport aérien, elle-même créée à peine cinq ans plus tôt. À lui seul, cet aspect de la petite histoire du transport aérien au Canada devrait nous convaincre que ce serait verser dans la pensée magique que de croire que le transfert du contrôle de sûreté d’une société d’État à une société à but non lucratif serait suffisant pour régler les retards et les autres problèmes auxquels sont confrontés les voyageurs chaque jour. Or, la réalité est qu’il n’y a pas de solution miracle.

C’est pourquoi il est important d’examiner à fond tous les détails, d’éviter les échéanciers arbitraires et de bien faire les choses.

[Traduction]

Pourtant, nous voici, cinq mois avant les élections générales, alors que le gouvernement s’attend à ce que tout le processus soit signé, scellé et livré avant le 1er avril 2020. Ne nous y trompons pas : toute suggestion selon laquelle ce processus reflète le transfert efficace des fonctions de contrôle du trafic aérien à NAV CANADA en 1996 est fallacieuse, au mieux.

Il est peut-être vrai que la Loi sur la commercialisation des services de navigation aérienne civile qui a permis de créer NAV CANADA était également intégrée à la loi habilitante du budget de 1996, mais les similitudes s’arrêtent là. Le succès du modèle de NAV CANADA est le résultat de près de deux ans de négociations ardues avec des réunions presque toutes les semaines où tout était sur la table. La loi qui a permis le transfert du contrôle du trafic aérien à NAV CANADA a donné suite à ces négociations et les a intégrées.

Par contre, le projet de loi que nous avons devant nous aujourd’hui fixe les conditions du transfert des fonctions de contrôle de la sûreté des aéroports sans avoir fait l’objet de diligence raisonnable ou de négociations.

En 2017, lorsque Transports Canada a sondé les intervenants de l’industrie au sujet des options liées à la gouvernance et aux modèles d’affaires de l’ACSTA, l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, notre industrie a appuyé en principe le transfert de ses fonctions à une entité à but non lucratif. Nous l’avons fait avec un certain nombre de questions et de mises en garde qui demeurent encore valides aujourd’hui. Ces préoccupations ne sont pas de nature administrative parce qu’elles concernent des considérations budgétaires et le cadre financier du gouvernement, ce qui signifie que les réponses se trouveront à la table du Conseil des ministres et non à la table des négociations. C’est pourquoi nous sommes ici pour proposer d’apporter des amendements au projet de loi.

Nous reconnaissons qu’il serait irréaliste de nous attendre à ce que nous puissions régler toutes les questions en suspens de cette manière, mais nous croyons qu’il y a au moins deux aspects de cette problématique sur lesquels toutes les parties pourront s’entendre. Les deux visent à protéger le portefeuille des voyageurs aériens.

Le premier amendement abrogerait le Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien, le DSPTA, lorsque la nouvelle administration de contrôle sera fonctionnelle et en mesure d’établir ses redevances et de percevoir ses frais. Comme vous le savez, les compagnies aériennes perçoivent directement le DSPTA auprès des voyageurs aériens et remettent ces sommes au gouvernement du Canada, qui les affecte aux revenus généraux. Tandis que le DSPTA devait, en théorie, servir à financer le contrôle de sûreté dans les aéroports, il a généré, entre 2010 et 2017, des revenus exceptionnels de plusieurs centaines de millions de dollars pour le gouvernement du Canada. Le Canada est déjà un des pays où les coûts du transport aérien sont les plus élevés au monde. Nous ne voulons pas du DSPTA en tant que pièce de musée, caché derrière une vitre de verre avec la consigne : « Briser la vitre en cas de déficit budgétaire. » Les voyageurs aériens n’ont pas besoin d’une autre ingérence fédérale dans leur portefeuille.

Le deuxième amendement vise à indemniser la nouvelle administration de contrôle pour les coûts supplémentaires engagés en raison de directives ministérielles liées à la sécurité. Il est reconnu que les menaces réelles et potentielles à la sécurité peuvent mener à l’imposition de nouvelles exigences en matière de contrôle qui entraînent des coûts additionnels. L’ACSTA a été créée en réponse à une telle éventualité.

Cet amendement, qui reflète étroitement une disposition de la loi qui a permis le transfert des fonctions de contrôle du trafic aérien à NAV CANADA en 1996, protégerait les voyageurs et les autres utilisateurs du système en empêchant qu’ils aient à assumer à eux seuls le fardeau de la sécurité dans les aéroports.

Compte tenu de la nature du projet de loi, nous reconnaissons que pour être adopté, tout amendement devra être présenté par le gouvernement. C’est la raison pour laquelle nous avons écrit aux ministres Garneau et Morneau pour les exhorter à protéger les droits des voyageurs aériens en modifiant le projet de loi. C’est pourquoi nous vous exhortons à appuyer ces amendements dans votre rapport. Je vous remercie.

Daniel-Robert Gooch, président, Conseil des aéroports du Canada : Mesdames et messieurs, au nom du Conseil des aéroports du Canada et de ses 54 membres représentant 90 p. 100 du trafic de l’aviation commerciale au Canada, je vous remercie de me donner l’occasion de témoigner aujourd’hui à l’appui de la Loi sur la commercialisation des services de navigation aérienne civile contenue dans le projet de loi C-97, Loi no 1 d’exécution du budget de 2019.

Les aéroports canadiens sont satisfaits de l’orientation que le gouvernement a choisie pour le futur modèle de gouvernance des services de contrôle de sûreté de l’aviation au Canada. La prestation privée à but non lucratif de services aux passagers aériens fait partie du modèle canadien qui a fait ses preuves.

Avec ce transfert proposé des services de contrôle de sûreté du gouvernement vers une nouvelle entité privée à but non lucratif, Transports Canada continuerait à assumer ses responsabilités en matière de réglementation et de surveillance au chapitre de la sûreté aérienne au Canada. Cependant, la responsabilité opérationnelle de cet aspect essentiel de l’expérience des voyageurs aériens sera transférée à une nouvelle organisation dont le mandat sera le contrôle de sûreté aérienne réalisé de manière plus efficace et efficiente et respectant des normes de professionnalisme reconnues.

En 1996, Transports Canada a pris des mesures similaires pour commercialiser le contrôle du trafic aérien en mettant en place NAV CANADA. Aujourd’hui, NAV CANADA est un chef de file mondial respecté dans son domaine, et ses 23 années d’existence ont apporté un esprit d’entreprise et une plus grande vigueur opérationnelle au contrôle du trafic aérien, éliminant la responsabilité des contribuables de financer le système et, au bout du compte, réduisant les coûts pour les utilisateurs.

Le modèle proposé pour une nouvelle ACSTA reflète également le transfert de 21 des principaux aéroports du Canada à des sociétés locales, privées et sans capital-actions ayant pour mandat de servir les utilisateurs, y compris les voyageurs aériens, nos voyageurs partagés et d’autres intervenants du milieu. Comme pour le contrôle du trafic aérien, les aéroports sont indépendants, fonctionnent sans actionnaires et assument l’entière responsabilité des coûts d’exploitation et d’investissement en capital.

Le gouvernement propose un calendrier très serré pour le transfert de l’ACSTA à ce nouveau modèle, avec l’objectif déclaré de rendre la nouvelle organisation opérationnelle d’ici un an. En tant qu’exploitants d’aéroports, nous sommes prêts à collaborer avec nos transporteurs aériens partenaires et le gouvernement en vue d’atteindre cet objectif ambitieux, mais nous allons également prendre le temps de bien faire les choses. Nous mettons en place quelque chose d’important ici, trop important pour agir de façon précipitée. Nous ne couperons pas les coins ronds.

La nécessité d’un changement de modèle pour l’ACSTA n’est en aucun cas une critique de l’équipe de professionnels travaillant assidument au sein de l’administration. Cela tient plutôt au fait que la structure et le financement de l’organisme en tant que société d’État ne satisfont tout simplement pas aux exigences du secteur du transport aérien en forte croissance et des millions de voyageurs additionnels que nous accueillons chaque année dans les aéroports du Canada.

Le contrôle de sécurité à l’égard des passagers, des employés et de leurs biens est un service essentiel pour l’aviation commerciale aujourd’hui. Cependant, bien que les aéroports canadiens aient confiance dans la garantie de sûreté offerte par les contrôleurs et l’équipement de l’ACSTA, nous dépendons des crédits annuels pour financer un service que les voyageurs aériens payent déjà par l’entremise du Droit pour la sécurité des passagers du transport aérien. Cette pratique ne fonctionne tout simplement pas dans un secteur en forte croissance et à volume élevé axé sur le bien-être et le confort des êtres humains.

Qui plus est, ce modèle entrave considérablement la capacité de l’ACSTA de planifier à long terme et d’investir dans des innovations susceptibles d’améliorer à la fois les résultats en matière de sécurité et l’expérience des passagers. À ce titre, l’organisme n’a pas été en mesure de fournir des niveaux de service mondialement concurrentiels et acceptables à l’industrie et à nos voyageurs aériens et ne pense pas non plus pouvoir le faire, tant que la structure actuelle demeure la même.

Par conséquent, les voyageurs, l’industrie et le gouvernement ressentent de la frustration, et c’est la raison pour laquelle les aéroports du Canada collaborent depuis plusieurs années avec leurs transporteurs aériens partenaires par l’entremise d’un groupe de travail sur le contrôle de sûreté dirigé par l’industrie dans le but d’améliorer le service offert aux voyageurs.

Ce travail entre le Conseil des aéroports canadiens, le CAC, et les deux plus grands transporteurs aériens du Canada a abouti à une recommandation relative à la création et à la mise en place de normes de niveau de service concurrentielles à l’échelle internationale pour le contrôle de sûreté, selon lesquelles 95 p. 100 des passagers aux points de contrôle à volume élevé seraient traités en moins de 10 minutes et aucun passager n’attendrait plus de 20 minutes.

Après des années d’efforts pour convaincre le gouvernement de la nécessité de réformer l’ACSTA, les aéroports du Canada se sont réjouis des engagements énoncés dans le budget de 2019 visant à transformer l’ACSTA en une entité à but non lucratif fondée sur le modèle de société sans capital-actions conçu pour le transfert de NAV CANADA et les aéroports du Réseau national des aéroports, le RNA. C’est avec le souvenir de ces efforts antérieurs en matière de contrôle du trafic aérien et de gestion des aéroports, et la conviction commune que nous pouvons faire tellement mieux pour les voyageurs, que les aéroports du Canada cherchent à collaborer avec les transporteurs aériens et le gouvernement fédéral pour faire de l’ACSTA un nouvel organisme plus innovant, responsable et réactif, qui répond aux besoins des voyageurs grâce à une équipe motivée de professionnels qui comprennent que sécurité élevée et service professionnel ne s’excluent pas mutuellement; ils vont plutôt de pair.

Nous appuyons la Loi sur la commercialisation des services de contrôle de sûreté, mais nous aimerions voir plus de clarté à l’alinéa 26(1)d), qui est ainsi rédigé :

d) les redevances peuvent seulement servir à recouvrer le coût des services de contrôle de sûreté [...]

Le CAC et ses membres craignent que ce libellé soit trop restrictif et empêche peut-être la nouvelle administration de contrôle désignée de faire preuve d’innovation et d’esprit d’entrepreneuriat dans la réalisation de son mandat. Cela pourrait également empêcher la nouvelle entité d’avoir accès à des taux préférentiels pour mobiliser des capitaux sur les marchés financiers.

Nous ne pensons pas que la clarification de ce principe de facturation modifierait l’intention initiale de la loi. Au contraire, cela apporterait une plus grande certitude à cette nouvelle entité, aux organismes de réglementation et aux marchés financiers dans les années à venir.

Nous convenons également avec nos collègues du transport aérien de la nécessité d’un appui financier pour protéger l’administration de contrôle désignée contre les modifications de la réglementation qui créent des coûts soudains pour le système.

Merci de m’avoir consacré du temps ce matin. C’est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

Doug Keller-Hobson, chef de la direction, Vols d’espoir : Merci et bonjour. Je suis heureux d’avoir l’occasion de comparaître devant le comité aujourd’hui et de lui faire part de notre proposition de modification législative très précise qui améliorerait l’accès aux services de soins de santé pour les Canadiens à faible revenu.

Vols d’espoir est le seul organisme de bienfaisance enregistré au Canada à offrir des vols gratuits à ceux qui en ont besoin et qui doivent parcourir de longues distances pour avoir accès à des soins médicaux spécialisés. Vols d’espoir aide les Canadiens à faible revenu, de tous âges, qui souffrent d’un large éventail de maladies.

Vols d’espoir n’est pas une compagnie aérienne. Au contraire, nous sommes une bouée de sauvetage pour de nombreux concitoyens canadiens qui ont besoin d’accéder à la technologie médicale avancée et à des spécialistes qui ne sont généralement disponibles que dans les grands centres urbains du pays.

Depuis sa fondation en 1986, Vols d’espoir a organisé plus de 142 000 voyages gratuits pour les Canadiens à faible revenu, dont plus de 11 500 l’année dernière. Sans l’aide de ce service caritatif, de nombreux patients disent qu’ils devraient annuler ou retarder un traitement important.

Nous proposons de modifier le paragraphe 24(2) dans la nouvelle Loi sur la commercialisation des services de contrôle de sûreté contenue dans le projet de loi C-97. Notre amendement proposé prévoirait une exemption des frais liés aux nouveaux services de contrôle de sûreté si une personne s’est vu remettre un billet gratuit par un organisme de bienfaisance enregistré et qu’elle se rend à un rendez-vous médical autorisé par son programme de santé financé par la province.

Pourquoi cet amendement est-il nécessaire? Un objectif premier de la politique canadienne de la santé, énoncé dans la Loi canadienne sur la santé, est :

[...] de faciliter un accès satisfaisant aux services de santé, sans obstacles d’ordre financier ou autre.

Toutefois, dans un pays aussi vaste que le Canada, l’accès physique aux principaux services de soins de santé peut nécessiter de surmonter les obstacles liés à la distance et aux coûts de déplacement. Nos compatriotes canadiens ont d’énormes difficultés à accéder à des traitements de santé spécialisés à cause de leur lieu de résidence et de leur situation financière. Ils font souvent face à de longs trajets pour se rendre à leurs rendez-vous médicaux à leurs propres frais et risquent, en hiver, de faire de longs trajets dangereux.

Afin de jeter un pont entre le domicile et les soins de santé et, ultimement, de renforcer le système de soins de santé publique du Canada, le secteur des organismes de bienfaisance a parfois dû fournir à des Canadiens à faible revenu le déplacement gratuit pour se rendre à leurs rendez-vous médicaux, lorsque ces soins ne sont disponibles qu’à une distance éloignée de leur collectivité d’origine.

Les dispositions législatives relatives au DSPTA prévoient actuellement une exemption pour certains vols de charité à des fins médicales, notamment ceux donnés par les compagnies aériennes à Vols d’espoir, mais pas ceux que nous achetons directement.

Malheureusement, les nouvelles dispositions législatives contenues dans le projet de loi-C-97 n’incluent pas cette exemption. C’est la raison pour laquelle nous pensons qu’il est important, pour le moment, d’inclure une exemption pour les vols de charité dans la nouvelle structure de contrôle de sûreté. Il devrait s’agir d’une exemption totale des frais de contrôle de sûreté pour les vols donnés par des compagnies aériennes et ceux achetés par un organisme de bienfaisance.

Si l’exemption était accordée, à combien s’élèverait la perte éventuelle pour les frais de contrôle? Le coût annuel projeté des frais de contrôle perdus, selon les tarifs actuels du DSPTA, est d’environ 90 000 $. J’estime que ce montant représente un faible coût pour assurer aux Canadiens désavantagés sur le plan financier un accès égal aux soins de santé, peu importe où ils habitent au Canada.

En conclusion, je demande instamment que l’amendement proposé soit inclus dans le projet de loi C-97 afin d’aider des milliers de Canadiens en difficulté à accéder aux services de santé essentiels et d’améliorer la qualité de vie dans les collectivités rurales et isolées du pays.

Je vous remercie du temps que vous m’avez consacré aujourd’hui et de l’attention que vous portez à cette question importante.

John McKenna, président et chef de la direction, Association du transport aérien du Canada : L’ATAC célèbre cette année son 85e anniversaire à titre d’association représentant l’industrie canadienne du transport aérien commercial. Nous comptons environ 180 membres actifs à tous les niveaux de l’aviation commerciale, dans toutes les régions du pays.

Nous vous remercions de nous avoir invités à commenter le projet de loi C-97, plus précisément le volet sur la privatisation du contrôle de sûreté des passagers au Canada. Permettez-moi d’affirmer d’emblée que nous appuyons la transformation de l’ACSTA ou la création d’une nouvelle autorité de contrôle désignée, l’ACD, à la condition que lui soient fournis les outils nécessaires pour maximiser son efficience à court terme et lui permettre de suivre le rythme de croissance de notre industrie.

Nous mettons toutefois en garde ceux qui s’attendent à d’importants gains d’efficience au niveau opérationnel, car la privatisation offrira plutôt une plus grande autonomie pour l’ACD en matière de planification, de dotation en personnel et de financement.

[Français]

L’Association du transport aérien du Canada appuie les modifications présentées par le Conseil national des lignes aériennes du Canada ce matin concernant l’indemnisation des conséquences financières des directives ministérielles relatives à la sûreté et à la suppression du droit sur la sécurité des passagers du transport aérien.

Le gouvernement est impatient d’appliquer la solution qui a conduit à la privatisation des services de navigation aérienne et la création de NAV CANADA. Toutefois, un délai très court a été fixé, que certains qualifieraient même d’irréaliste si la commercialisation du contrôle de sûreté des aéroports doit produire un avantage net en termes de coûts et d’efficacité qui améliorera l’expérience des passagers.

[Traduction]

Un prix de plus de 500 millions de dollars est honteusement associé à cette privatisation afin que le gouvernement tire profit de la valeur comptable de l’ACSTA. C’est totalement inacceptable, car le public voyageur a déjà payé les immobilisations de l’autorité de contrôle existante. En fait, les passagers ont déjà payé deux fois ces éléments d’actif, car le DSPTA a généré bien plus de 500 millions de dollars d’excédents par rapport aux allocations budgétaires de l’ACSTA au cours des cinq dernières années seulement.

Transports Canada n’est pas clair sur la question du prix. Un jour, on nous dit que le prix fondé sur la valeur aux livres est non négociable, et le lendemain, on nous dit que tout est sur la table.

Permettez-moi de vous rappeler que chaque année, le gouvernement du Canada impose à notre industrie une taxe d’accise sur les carburants, percevant plus de 100 millions de dollars; le loyer des aéroports, correspondant à 350 millions de dollars; le DSPTA, s’élevant à plus de 700 millions de dollars; et maintenant, on ajoute la taxe sur le carbone.

[Français]

Le gouvernement perçoit donc plus d’un milliard de dollars chaque année sans même inclure les taxes à la consommation, l’impôt sur les sociétés et l’impôt sur le revenu, mais ne réinvestit rien dans l’aviation. L’infrastructure aéroportuaire est entièrement à la charge du passager, de même que la sécurité aéroportuaire. Les compagnies aériennes assument tous les coûts de la navigation aérienne au Canada.

En plus du fait qu’aucun autre mode de transport ne doit complètement financer ses infrastructures et ses opérations, le secteur du transport aérien a été transformé en une source de revenus importante pour le gouvernement du Canada. Cela a de graves répercussions sur notre compétitivité, tant sur le plan national par opposition aux autres modes de transport que face aux transporteurs internationaux.

[Traduction]

Nous estimons qu’un prix autre que le prix nominal de 1 $ pour les éléments d’actif de l’ACSTA est inacceptable et pourrait même compromettre le processus. Un précédent a clairement été créé lorsqu’un gouvernement libéral antérieur a cédé des centaines d’aéroports du Canada.

Une autre préoccupation est que, pour payer ce prix exorbitant, la nouvelle administration de contrôle désignée devra inclure le paiement de la dette lors de la fixation du nouveau tarif de contrôle des passagers. Dois-je rappeler aux membres du comité que le Canada applique déjà l’une des redevances de sûreté de l’aviation les plus élevées au monde?

Enfin, lorsqu’on lui a demandé, le gouvernement n’a pas nié qu’il chercherait probablement à obtenir une indemnisation pour le manque à gagner des centaines de millions de dollars générés par les excédents du DSPTA. C’est probablement pour cette raison que le projet de loi n’abolit pas le droit actuel. Si ce n’est pas par le droit actuel, comment la perte de ces revenus pour le gouvernement serait-elle compensée si ce n’était par des frais et charges supplémentaires pour nos passagers et nos transporteurs?

[Français]

Il est essentiel de ne pas augmenter les coûts pour le public voyageur afin de maintenir la compétitivité du Canada et de remédier aux fuites vers les marchés américains. Il incombe au gouvernement de veiller à ce que ses politiques soutiennent la compétitivité des services aériens offerts au Canada, au lieu de leur nuire. Des politiques qui ont pour effet de sacrifier davantage le secteur du transport aérien et ses passagers sont inacceptables et nuisent à la viabilité de notre industrie.

[Traduction]

Une fois définie, la nouvelle ACD sera en place pour les 10 à 20 prochaines années. Les Canadiens méritent que ce processus ne soit pas régi selon un échéancier électoral, que les coûts assumés par les voyageurs ne soient pas augmentés et que tous les intéressés prennent le temps nécessaire pour élaborer un modèle fort, efficace, autonome, transparent et bien régi. À ce stade, nous ne sommes pas du tout convaincus que ce soit le cas.

Andrew Norgaard, vice-président, Communications, NAV CANADA : Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci de m’avoir invité à vous faire part des éléments de ce que nous considérons comme une réussite en ce qui concerne la délocalisation d’une fonction opérationnelle essentielle du gouvernement. Je suis heureux de présenter au comité ce matin le contexte de la privatisation de NAV CANADA, mais je tiens à souligner que NAV CANADA occupe un poste lié à la privatisation de l’ACSTA.

Le 1er novembre 1996, NAV CANADA est devenu le propriétaire et l’exploitant des services de navigation aérienne civile canadiens, en achetant le système du gouvernement du Canada pour 1,5 milliard de dollars. Aujourd’hui, NAV CANADA demeure l’une des seules sociétés entièrement privées responsables du contrôle du trafic aérien et des services connexes typiques d’un fournisseur de SNA, les services de navigation aérienne. L’histoire a montré l’efficacité du modèle de NAV CANADA en tant que fondement organisationnel pour la gestion sûre et efficace des plus importants SNA du monde au chapitre des mouvements d’aéronefs.

Quel a été le moteur de la privatisation? En termes simples, dans les années 1980, les SNA du Canada n’étaient pas aussi efficaces qu’ils le devaient. Il existait certes des domaines d’excellence, comme ses effectifs opérationnels, mais l’infrastructure des SNA devait être renouvelée, et les grands projets de système prenaient du retard et entraînaient une hausse des coûts. Les retards du système augmentaient, et l’efficacité diminuait.

[Français]

Aucune partie prenante, y compris les compagnies aériennes, les employés et le gouvernement, n’était satisfaite; un changement s’imposait donc.

[Traduction]

Une analyse des problèmes a révélé un service composé de personnes hautement qualifiées et motivées, qui exerçaient leurs activités conformément aux règles et contraintes gouvernementales en vigueur et cherchaient à fournir un service essentiel en temps réel à un secteur vital et extrêmement concurrentiel de l’économie. Tout simplement, il ne pouvait pas suivre le mouvement. En toute justice, le gouvernement n’a pas non plus été conçu pour fournir ce type de service dans ces conditions.

À titre d’exemple, les SNA étaient assujettis au processus budgétaire de Transports Canada et du gouvernement fédéral. Ils devaient faire concurrence à des exigences financières à l’égard de toutes les autres exigences gouvernementales.

Au fil du temps, les SNA sont devenus chroniquement sous-financés, ce qui a entraîné une incapacité à gérer un système à la hauteur de ses besoins en tant qu’entreprise essentielle de haute technologie 24 heures sur 24, sept jours sur sept, 365 jours par année, un catalyseur essentiel pour le secteur du transport aérien et tous ceux qui en dépendaient.                  

[Français]

Les parties prenantes du Service de navigation aérienne se sont penchées sur les problèmes et ont tiré les conclusions suivantes :

[Traduction]

Des solutions symboliques ne fonctionneraient pas. Un changement fondamental de paradigme s’imposait. Les SNA étaient en fait un service commercial fourni aux clients, qui devrait être exploité et guidé selon des principes commerciaux et non pas gouvernementaux. Il n’y avait aucune raison pour que les SNA ne puissent pas fonctionner en toute sécurité selon une réglementation indépendante du gouvernement en matière de sécurité, à l’instar des compagnies aériennes. En séparant l’exploitant du système de l’organisme de réglementation, on pourrait éliminer un conflit d’intérêts inhérent entre ces fonctions distinctes. Enfin, les SNA devaient avoir la certitude d’un financement suffisant et la capacité de contrôler leurs coûts.

Tout le monde était d’avis que le changement devait se produire, et cela incluait non seulement les transporteurs commerciaux, mais également les contrôleurs aériens, les pilotes de ligne, l’aviation d’affaires, l’aviation générale et les agents négociateurs d’autres employés des SNA. Ces groupes ont été au cœur de la collaboration qui a conduit à la privatisation. Ensemble, ils ont pris des décisions fondamentales qui ont constitué la pierre angulaire du processus de commercialisation des SNA canadiens.

C’est ainsi que les SNA devaient être soustraits à la responsabilité du gouvernement. Les principaux intervenants devaient s’assurer que la nouvelle entité, quelle qu’elle soit, comprenne les problèmes liés à l’aviation, et tous les groupes devaient travailler ensemble afin d’atteindre l’objectif commun et de respecter les intérêts légitimes, mais parfois divergents de tous, en tout temps.

[Français]

Voilà ce qui constitue aujourd’hui la base de la structure de gouvernance de NAV CANADA.

[Traduction]

Cette structure de gouvernance fonctionne de concert avec deux autres éléments essentiels. Tout d’abord, la législation : la Loi sur la commercialisation des services de navigation aérienne civile, ou la LCSNAC, est entrée en vigueur au même moment, ce qui a facilité le transfert du système et établi les mécanismes de service et de tarification que nous utilisons aujourd’hui.

Le projet de loi que vous avez devant vous aujourd’hui ressemble beaucoup à la LCSNAC. Le dernier élément essentiel en complément de la gouvernance organisationnelle et du cadre législatif est le cadre réglementaire, et celui-ci est axé sur le rendement et les résultats, non pas sur la méthode de gestion du système et des activités.

Revenons au présent. NAV CANADA est unique au monde, comme je l’ai mentionné. Nous représentons le premier cas de séparation d’un exploitant de SNA d’un organisme de réglementation. Nous sommes une organisation privée sans capital-actions dont la gouvernance reflète les parties prenantes mêmes que nous servons. Notre modèle financier sûr et stable nous permet de mobiliser des fonds et de saisir les occasions en temps réel. Nous vendons notre technologie et nos données. Nous investissons dans des initiatives novatrices comme Aireon et Searidge Technologies et de façon permanente pour maintenir l’infrastructure de SNA du Canada à la pointe de la technologie.

NAV CANADA s’est bâti une réputation de chef de file mondial en matière de sécurité, d’innovation, de technologie et de personnel. Nous sommes reconnus comme l’un des meilleurs employeurs au Canada, et nos clients nous évaluent constamment en fonction de la valeur que nous fournissons.

Enfin, tandis que la structure que nous avons construite nous donne un objectif, une orientation et un système de freins et de contrepoids qui permet la réussite, je ne saurais trop insister sur le fait qu’au bout du compte, c’est vraiment notre personnel, qui a la possibilité d’exercer des fonctions, qui produit des résultats.

Monsieur le président, je répondrai aux questions du comité avec plaisir.

Le sénateur Dawson : Certains d’entre vous — je sais que c’est le cas pour le sénateur MacDonald et le sénateur Boisvenu — se rappelleront que nous avons publié un rapport sur les aéronefs et les compagnies aériennes intitulé L’avenir des déplacements aériens au Canada : poste de péage ou bougie d’allumage? Encore une fois, je considère qu’il s’agit d’un poste de péage. Le gouvernement tente de voir dans la création de la nouvelle ACSTA une occasion, selon M. McKenna, d’obtenir un prix en espèces de quelques centaines de millions de dollars; il l’a fait la dernière fois.

Je vois que, oui, nous aurons un conseil d’administration formé de représentants de l’aviation et des aéroports, mais qu’en est-il des consommateurs? Ils sont laissés de côté, et je crains qu’entre la disparition de l’ACSTA et l’apparition de l’autre entité, nous devons faire un acte de foi. Nous devons faire confiance aux personnes qui n’ont pas toujours respecté leur parole par le passé. Nous savons qu’il y a des fonds excédentaires à l’ACSTA. Nous ne savons pas à combien ils s’élèvent, car ce n’est pas transparent. Nous ne savons pas de quelle façon ces fonds sont utilisés, mais on nous dit qu’ils servent à autre chose d’important.

Je veux que vous abordiez tous les trois ce problème : comment pouvons-nous croire que, cette fois-ci, ce sera une approche servant de bougie d’allumage, qui stimulera les voyages aériens et non pas une source de revenu? Je pense que c’est le problème philosophique de Transports Canada. Les décisions ne sont pas prises par les responsables de Transports Canada.

J’aimerais que, tous les trois, vous commentiez cette situation et ce qu’il faudrait dire, selon vous, si nous devons mentionner quelque chose à ce sujet.

M. Bergamini : Merci beaucoup, monsieur le sénateur Dawson. Je pense que vous voyez juste. C’est précisément la raison pour laquelle nous avons présenté nos amendements, notamment celui relatif à l’abrogation du DSPTA. Nous estimons que le gouvernement du Canada montre clairement qu’il est important d’améliorer le transport aérien, de collaborer pour rendre le transport aérien au Canada plus abordable pour tous les Canadiens et qu’il ne s’agit pas d’un autre exercice inspiré par Finances Canada pour arrondir les fins de mois. Malheureusement, au cours des 20 dernières années, c’est ainsi que s’est écrite l’histoire de l’élaboration de la politique de l’aviation au Canada : le véritable processus décisionnel et pouvoir repose entre les mains non pas de Transports Canada, mais de Finances Canada. Ces amendements, ces changements, sont très importants de notre point de vue afin que nous puissions nous asseoir à la table avec la certitude que nous partageons les mêmes objectifs.

M. Gooch : Je n’irai pas jusqu’à dire que nous croyons que le profit est ce qui motive la décision. J’estime que, si le gouvernement souhaitait tirer profit d’autres actifs, il aurait pu le faire bien plus rapidement qu’il ne l’a fait. Cela dit, nous partageons les préoccupations de nos transporteurs aériens et voulons que cela soit fait correctement afin de ne pas imposer injustement ce fardeau aux passagers aériens à l’avenir. On ne sait pas exactement ce qui se passe. Il y a une certaine impatience par rapport à l’accès aux données sur la façon dont l’opération est organisée et aux chiffres définitifs que le gouvernement souhaite obtenir de la part de l’entité concernant la valeur comptable des actifs.

Nous faisons preuve d’un optimisme prudent. Nous partageons les préoccupations des transporteurs aériens, mais nous n’avons toujours pas discuté avec le gouvernement ni eu accès aux données qui nous permettent de déterminer la nature de cette affaire, à savoir ce qui est recueilli et ce qui est financé.

Je dirais que le plan n’a pas de date butoir. Il n’y a pas de date de transfert dans le projet de loi. Nous faisons donc preuve d’un optimisme prudent, car nous savons que les aéroports et les transporteurs aériens prennent part à la conversation pour aller de l’avant, et nous n’allons pas approuver quelque chose qui compromettrait la croissance de l’industrie à l’avenir ou qui imposerait injustement un fardeau aux voyageurs.

M. McKenna : J’appuie ce que mon collègue a dit, particulièrement ce que M. Bergamini a dit par rapport à l’attitude par le passé, et nous espérons voir que le ministre des Transports se fera le champion du secteur de l’aviation à cet égard et non pas le champion des finances du Canada. Merci.

Le président : À titre de précision, avez-vous dit qu’il s’agissait de 500 millions de dollars?

M. McKenna : Oui, il s’agit de 500 millions de dollars.

Le président : Était-ce sur une période de cinq ans? Quels seraient les profits liés à la sécurité dans les aéroports?

M. Bergamini : J’ai un document d’information qui porte là-dessus.

M. McKenna : Le DSPTA recueille entre 100 et 200 millions de dollars de plus que ce qui est alloué au budget de l’ACSTA annuellement.

Le président : Par année?

M. McKenna : Oui.

M. Bergamini : Il s’agit d’un facteur. Je mets en garde le comité contre une chose. Comme le sénateur Dawson l’a dit, un des problèmes, c’est qu’il ne s’agit pas d’un mécanisme transparent. Pour autant que nous sachions, le bénéfice, le degré du gain, l’écart entre le montant d’argent que le gouvernement du Canada recueille par l’entremise du DSPTA et les crédits parlementaires pour l’ACSTA est en fait à la baisse depuis les deux ou trois dernières années. N’oubliez pas que les droits pour la sécurité des passagers du transport aérien sont gelés depuis 2010. Si la tendance se maintient, le gouvernement du Canada devra subventionner les activités de l’ACSTA afin de maintenir le statu quo au chapitre du niveau de service. Nous estimons qu’il s’agit là de l’un des facteurs ayant entraîné la commercialisation des services de sécurité dans les aéroports.

M. McKenna : Je me permets d’ajouter, cependant, qu’il est vrai que les frais sont gelés depuis 2010. Toutefois, j’aimerais rappeler aux membres du comité que, en 2010, ils ont été augmentés de 52 p. 100 par rapport à 2009. Au Canada, les frais sont actuellement parmi les plus élevés, voire même les plus élevés, dans le monde.

Le président : Il y a deux problèmes. Le premier, c’est que le gouvernement n’a pas dit qu’il comptait se débarrasser de cette taxe lorsque la nouvelle entité imposera ses propres frais, il y a donc une possibilité qu’il y ait deux frais différents. Le deuxième, c’est que la nouvelle entité devra obligatoirement payer les ressources de sécurité que nous avons déjà payées. Je tenais à ce que ce soit clair.

M. McKenna : Oui.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci à tous ceux qui sont venus témoigner ce matin. Messieurs Bergamini et McKenna, vos témoignages ont confirmé certaines de mes inquiétudes. Ma question s’adresse à vous deux. J’ai suivi de très près ce qui s’est passé à Aéroports de Montréal récemment, quand on a décidé d’accorder des contrats de services en matière de sécurité à des sous-contractants. On a imposé aux employés une baisse de salaire de 33 p. 100. Dans le domaine de la sécurité, le salaire est un facteur primordial pour ce qui est de « l’honnêteté » des travailleurs. Cela leur permet de ne pas se retrouver dans des situations où ils chercheront un revenu d’appoint souvent à partir de leurs activités, parce que ces gens contrôlent l’entrée de la drogue au pays et surveillent les bagages et les aires de stationnement. À Dorval, il y a 15 ans, c’était l’endroit à Montréal où on volait le plus de véhicules. Une opération spéciale d’infiltration a été menée et a permis d’arrêter les malfaiteurs. Il y avait même des employés impliqués dans ce trafic. Ce qui me préoccupe, c’est que nous sommes en train de transférer aux usagers le coût de la sécurité.

M. McKenna : C’est déjà le cas.

Le sénateur Boisvenu : Oui, mais nous irons plus loin avec ce projet de loi. Premièrement, croyez-vous que ce projet de loi empirera la situation pour ce qui est de la qualité des services de sécurité? Deuxièmement, ce qu’on a vécu à ADM se produira-t-il également dans d’autres aéroports, où on décidera de confier ces services à des sous-traitants pour faire diminuer les coûts? Les aéroports canadiens, surtout ceux qui se trouvent dans la région de Montréal et au Québec, ont les coûts les plus élevés au Canada. On sait qu’il y a des fuites vers Plattsburgh et Burlington. Cela coûte moins cher d’aller à Boston ou à New York si on passe par Burlington plutôt que Montréal. Cela n’a aucun sens. Au Québec, il y a eu un changement majeur dans l’administration des aéroports. Des dirigeants ont été mis à pied. Les coûts administratifs sont énormes, et ce sont les usagers qui en paient le prix. Ce projet de loi représente-t-il un recul sur le plan de la sécurité et de la protection des emplois et des travailleurs, ou apporte-t-il des améliorations?

M. Bergamini : On ne devrait pas mettre en doute l’engagement de notre secteur vis-à-vis de la sécurité du transport aérien. C’est un engagement absolument blindé. Je n’ai pas d’inquiétudes de ce côté-là.

Cela dit, ce que vous dites est vrai et met en relief ce que nous avons souligné. Il n’y aura pas de grandes économies ni de nouveaux gains en efficacité qui se produiront par magie à la suite à ce délestage. En fin de compte, les usagers qui utilisent le système actuel seront contraints de payer ces frais, comme c’est le cas aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle, dans le cadre des négociations et par l’intermédiaire de ces amendements à la loi-cadre, nous devons nous assurer que cette nouvelle organisation ne soit pas alourdie par des charges. Par exemple, pour le transfert des biens de l’ACSTA, il faut dès maintenant s’assurer que le gouvernement fédéral ne...

[Traduction]

... n’impose pas à cette nouvelle organisation des coûts supplémentaires qui seront assumés par les voyageurs aériens au bout du compte.

[Français]

M. Gooch : Je ne peux pas vraiment parler d’une situation unique à Montréal, mais, en général, nos rapports indiquent qu’ils ont de la difficulté à trouver des employés dans la plupart des marchés. Ce sont souvent des employés de Tim Hortons qui vont travailler à l’ACSTA. Il ne s’agit pas vraiment d’un genre de nivellement par le bas dans le but de garantir un salaire sûr. Je suis tout à fait d’accord avec mon collègue pour dire que le travail réalisé pour assurer la sécurité des passagers est très bien fait.

[Traduction]

Quant à ce qu’il en coûte pour offrir le service aux voyageurs, nous estimons que le secteur privé peut offrir le service plus efficacement que le gouvernement, et cela apparaît clair lorsque nous nous penchons sur l’exemple des aéroports. Ces derniers comptent beaucoup moins d’employés et sont beaucoup plus efficaces comparativement à l’époque où ils étaient administrés par le gouvernement, il y a 20 ou 25 ans. Nous avons également pu voir une efficacité similaire chez NAV CANADA.

Cela dit, nous n’avons toujours pas accès aux données qui nous permettraient d’obtenir les chiffres exacts quant au coût des activités et des revenus tirés, et la valeur comptable exacte des actifs que le gouvernement souhaite obtenir de la nouvelle entité n’a pas été confirmée. Il s’agit en majeure partie d’hypothèses jusqu’à ce que nous obtenions l’information et que nous ayons une vue d’ensemble des activités du point de vue du revenu et des coûts, et cela ne s’est pas produit.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Le sénateur Dawson a fait allusion à l’étude que le comité a menée sur les aéroports, il y a quelques années. Le gouvernement américain a créé la grappe des aéroports régionaux, où l’on considère les aéroports régionaux comme des moteurs économiques dans une région. Le gouvernement américain investit massivement dans les infrastructures pour s’assurer que ces aéroports font davantage concurrence aux aéroports canadiens.

Le Canada ne fait-il pas fausse route en délestant à peu près tout… Je comprends que les marchés public et privé peuvent être plus efficaces, mais, en abandonnant complètement des infrastructures et en laissant ces aéroports à leur sort, ne fait-on pas fausse route par opposition aux Américains qui, eux, ont entrepris une démarche quelque peu contraire?

M. McKenna : Cela n’est pas incompatible. Le gouvernement peut tout de même jouer son rôle en s’assurant que la gouvernance reflète les intérêts du gouvernement et de la population canadienne. Il s’agit d’actifs qui appartiennent à la population canadienne. Je ne vois pas d’incompatibilité, mais je pense que le gouvernement doit assumer davantage son rôle de supervision et de gouvernance.

La sénatrice Simons : Lors de notre dernière séance, M. Bergamini m’a dit que je pouvais poser ma question en français. Je m’excuse. Je ne maîtrise pas parfaitement le français. Vous savez très bien que ce projet de loi porte sur les impôts et qu’il prévoit distribuer beaucoup d’argent. Ce n’est pas le rôle du Sénat de faire des commentaires à cet égard. Si vous avez eu des discussions avec les ministres Garneau et Morneau au sujet de cet amendement, quelle a été votre compréhension par rapport à ce que le gouvernement vous a dit? En effet, nous n’avons pas le pouvoir d’apporter cet amendement, même si vous avez raison.

M. Bergamini : Merci, madame la sénatrice. Nous sommes tout à fait conscients du contexte législatif dans lequel nous nous trouvons. Cela dit, je dois vous assurer que nous avons fait ces représentations sur ces mêmes sujets. Nous avons partagé les mêmes inquiétudes en 2017 et encore une fois en 2018 avec les ministres Garneau et Morneau d’une manière très précise. Nous avons demandé de nous asseoir avec les ministres et les fonctionnaires afin de trouver une solution aux préoccupations qui ont été soulevées. Je peux vous dire également que nos lettres sont restées sans réponse. Aujourd’hui, nous nous trouvons dans cette situation cinq mois avant l’élection, c’est-à-dire qu’un projet de loi ne peut pas être modifié par les comités qui l’étudient. Ce matin, nous avons écrit aux ministres. Nous leur avons soumis les deux amendements qui vous ont été remis et nous les avons exhortés à faire preuve de bonne foi par rapport à leur engagement vis-à-vis des voyageurs. Nous leur avons demandé de proposer ces amendements lorsque le projet de loi se trouvera devant le Comité des finances du Sénat. Cela dit, il serait politiquement préférable que ce comité puisse, dans son rapport, reconnaître le bien-fondé de ce point de vue que nous avançons depuis deux ans.

La sénatrice Simons : C’est la même chose pour M. Keller-Hobson. Nous n’avons pas le pouvoir de faire cela.

M. Bergamini : Oui.

[Traduction]

Le président : Comme vous le savez, nous sommes à l’étude préalable, et c’est pourquoi nous ne pouvons pas le faire, mais une fois que le comité des finances se penchera sur le projet de loi au Sénat, il pourra y apporter des amendements et les envoyer au gouvernement. Nous pouvons recommander au comité des finances de faire cela.

Le sénateur Neufeld : Vous avez tous insisté sur le fait que nous avons les frais les plus élevés en matière de sécurité au monde — du moins, c’est ce que j’ai cru comprendre. Pourriez-vous me dire pourquoi? Est-ce parce que notre sécurité est meilleure que celle des États-Unis ou des pays d’Europe? Pourquoi sommes-nous en tête de liste? Je passe par la sécurité souvent, et ce, dans différents endroits dans le monde et c’est différent partout, mais j’aimerais connaître votre point de vue à ce sujet.

M. Gooch : L’une des raisons, comme nous l’avons dit plus tôt, c’est que, au Canada, tous les coûts incombent aux utilisateurs, et même un peu plus encore. L’autre chose qu’il faut garder à l’esprit, c’est qu’il y a 89 points de contrôle désignés au Canada. Ils ne sont pas tous en service, mais nous avons une faible population par rapport au besoin.

Je crois que le service de sécurité est offert de façon efficace. Il y a probablement un contrôle de la qualité qui est fait pour que l’on s’assure que l’organisation intercepte les articles interdits qui figurent sur la liste des articles interdits. Toutefois, il s’agit en quelque sorte d’une approche unique pour tous les points de contrôle et la prestation du service dans les grandes villes comme les plus petites.

L’organisation n’a pas beaucoup de flexibilité quant à la façon dont elle effectue son travail et elle a tendance à s’éparpiller. Non seulement son financement est plutôt rigide et n’offre aucune capacité de planification ou d’innovation à long terme, mais ses activités sont restreintes. L’organisation reçoit à peine assez d’argent pour lui permettre de répondre à la demande pour son service.

M. McKenna : J’aimerais insister sur le fait que, dans la plupart des autres administrations importantes, le gouvernement assume la majorité des coûts. Aux États-Unis, par exemple, le consommateur paie moins de 25 p. 100 du total des coûts en matière de sécurité du transport aérien et des aéroports. Ce pourcentage varie selon les administrations, mais le Canada se distingue parce que c’est le passager qui finance entièrement ce service.

Le président : Je tiens à remercier les témoins. Nous vous sommes reconnaissants de votre présence ici.

Nous allons maintenant passer à une séance à huis clos afin de donner les instructions relatives à la rédaction du rapport.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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