Aller au contenu
NFFN - Comité permanent

Finances nationales

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Finances nationales

Fascicule 29 - Témoignages du 22 novembre 2012


OTTAWA, le jeudi 22 novembre 2012

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd'hui, à 14 heures pour examiner la teneur complète du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d'autres mesures, présenté à la Chambre des communes le 18 octobre 2012.

Le sénateur Joseph A. Day (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, soyez les bienvenus à notre septième réunion portant sur la teneur du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d'autres mesures.

[Français]

Mardi dernier, nous avons discuté avec des fonctionnaires au sujet des modifications proposées à la loi de 2001 sur la marine marchande du Canada, qu'on retrouve à la section 2 de la partie 4, à la page 193 du projet de loi.

Aujourd'hui, nous avons le plaisir de recevoir un représentant de la Lloyd's Register Canada Limited qui pourra nous expliquer ces modifications pour les travailleurs de l'industrie maritime.

[Traduction]

Nous sommes heureux d'accueillir Barry M. Shepherd, directeur du secteur maritime, Centre et Est du Canada : Grands Lacs, Québec et Canada atlantique, de Lloyd's Register Canada Limited.

Monsieur Shepherd, je vous remercie beaucoup d'être venu en dépit d'un très court préavis. Je crois que vous formulerez d'abord quelques observations au sujet de l'industrie, puis au sujet de ces amendements et de leurs effets éventuels sur l'industrie. Nous sommes impatients d'entendre vos observations.

Barry M. Shepherd, directeur du secteur maritime, Centre et Est du Canada : Grands Lacs, Québec et Canada atlantique, Lloyd's Register Canada Limited : Je vous remercie de m'avoir invité. J'ai pensé commencer par quelques observations sur la classification. J'ai lu le compte rendu de la réunion d'il y a quelques jours et j'ai l'impression qu'il y a beaucoup de discussions au sujet de la classification. Je vais parler du Lloyd's Register, bien entendu, mais les sociétés de classification sont présentes partout dans le monde. Il y a cinq sociétés de classification reconnues au Canada, dont vous avez parlé l'autre jour, je crois, soit Lloyd's Register, American Bureau of Shipping, Det Norske Veritas, Germanischer Lloyd et Bureau Veritas.

Lloyd's Register est la plus ancienne société de classification au monde. Elle a été fondée en 1760, à Londres. Elle est encore située à Londres. L'organisation a des bureaux partout dans le monde. Nous avons ouvert un premier bureau à l'extérieur du Royaume-Uni en 1852, au Canada. Ce bureau était au Québec; nous sommes donc au Canada depuis quelques années.

Lloyd's Register a commencé dans le domaine maritime. Aujourd'hui, nous sommes actifs dans quatre grands secteurs d'activités : le secteur maritime; l'énergie, ce qui comprend les secteurs pétrolier et gazier; les transports; et les systèmes d'assurance de la qualité. Pour ce qui est de la classification, c'est un peu un terme ancien, si l'on veut. C'est en fait l'évaluation des risques, et les sociétés de classification, fondamentalement, sont des spécialistes de l'évaluation des risques. Nos services sont axés sur les systèmes de qualité et les normes. Nous établissons les normes en ce qui concerne la construction des navires. Nous maintenons ces normes durant leur cycle de vie, et nous avons aussi des normes concernant la destruction des navires. Nous sommes présents à chaque étape de la vie du navire, de l'idée initiale jusqu'à son recyclage.

Lloyd's Register est une organisation sans répartition des profits. Nous avons le statut d'organisme de bienfaisance au Royaume-Uni. Nous n'avons ni actionnaires ni propriétaires. Nous sommes gérés par un comité depuis 252 ans. Nous avons réussi à survivre et nous espérons le faire encore pour les 250 prochaines années.

Même si nous sommes une organisation sans répartition de profits, cela ne veut pas dire que nous ne faisons pas de profits, au contraire. Ces profits sont nécessaires pour assurer la stabilité de notre organisation. Ils sont réinjectés dans l'industrie sous la forme de programmes de recherche et d'éducation.

Nous investissons au minimum 10 millions de livres sterling chaque année dans le Lloyd's Register Educational Trust. Nous investissons également dans les universités, les collèges et les établissements de recherche à l'échelle mondiale. Au Canada, nous travaillons actuellement avec Dalhousie, l'UBC et le Marine Institute de Terre-Neuve.

Le Lloyd's Register classe environ 7 000 navires dans le monde, des navires de croisière aux porte-avions, aux navires transporteurs, aux pétroliers et aux traversiers. Quel que soit le type de navires, nous les classons. L'organisation a établi des règles relatives aux différents types de navires. Ces règles sont maintenues conformément à nos procédures internes, et une bonne partie des règlements originaux de Transports Canada reposent sur les règles du Lloyd's Register depuis quelques années.

L'objectif de la classification des navires, c'est de vérifier la résistance et l'intégrité structurales du navire, de ses systèmes mécaniques, de ses systèmes électriques et de sa structure. À cette fin, lorsqu'un navire est classé par le Lloyd Register ou par toute autre société de classification, il est soumis à un programme d'inspection très strict.

Ce programme est semblable à celui auquel est soumis actuellement un navire accrédité par Transports Canada, mais c'est un programme très organisé. Cela dépend du type de navire dont il est question, mais tous les navires passent par un cycle de cinq ans, durant lequel il fait l'objet d'inspections et tous les aspects sont examinés. Quand je dis tous les aspects, je veux dire que la structure du navire est inspectée en détail. Le navire est en cale sèche. On examine l'arbre porte-hélice, les machines. Chaque année, on examine le navire pour s'assurer qu'il satisfait aux exigences de la société de classification et de l'État dont il bat pavillon.

Nous sommes une organisation reconnue par plus de 100 pays dans le monde. Vous avez sans doute déjà entendu le terme « pavillons de complaisance »; c'est un terme ancien, qui n'est plus vraiment pertinent de nos jours. Toutefois, beaucoup de pays fondent simplement leur propre réglementation sur les normes internationales, comme SOLAS et MARPOL, qui sont les deux principales normes que les navires respectent à l'échelle internationale.

Au Canada, nous respectons ces normes, et en tant qu'organisation reconnue au Canada, nous certifions le navire non seulement pour la classification, mais aussi pour veiller à ce qu'il respecte ces normes réglementaires externes, que nous appelons des normes d'origine législative.

Mis à part les conventions SOLAS et MARPOL dont le Canada est signataire, il y a un certain nombre de règlements qui sont exclusifs au pays. Ils sont prévus dans la Loi sur la marine marchande du Canada. En tant qu'organisme délégué au Canada, nous avons la responsabilité de veiller à ce que les navires respectent non seulement nos normes, c'est-à-dire les normes de classification de notre organisation, mais aussi les exigences réglementaires prévues dans la Loi sur la marine marchande du Canada, ainsi que la réglementation des conventions SOLAS et MARPOL, dans la mesure où elle s'applique à un navire donné.

Les expertises effectuées chaque année sont essentiellement des examens généraux du navire. Comme toujours, nous mettons l'accent sur l'équipement de sécurité. Par équipement de sécurité, j'entends l'équipement de lutte contre les incendies et de sauvetage, par exemple. Chaque année, une certaine partie du navire est examinée, que ce soit la coque ou les machines, pour qu'à la fin de la période de cinq ans, nous ayons examiné toutes les parties du bâtiment. Nous tenons des dossiers afin de nous assurer que c'est le cas.

Ces dossiers sont maintenant sur Internet, évidemment, et ce système d'enregistrement électronique, que nous appelons CD LIVE, est un système transparent auquel ont accès les propriétaires et l'État. Au Canada, par exemple, les autorités canadiennes y ont accès, de sorte qu'elles peuvent vérifier le statut du navire.

Bien que nous ayons la délégation en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada et que certains propriétaires nous aient délégué leurs responsabilités, un certain nombre d'entre eux ont choisi de demeurer avec Transports Canada, même si ces navires pourraient très bien être classés par le Lloyd's Register. Encore une fois, le programme de délégation est volontaire. Le Lloyd's Register peut ne pas se voir déléguer ces navires, mais c'est tout de même le Lloyd's Register qui les classifie. Transports Canada peut tout de même examiner les dossiers, car ces navires battent pavillon canadien.

Le processus d'expertise requiert le maintien de quelque 40 experts au Canada, dans les grands ports de Vancouver, Toronto, Montréal, Québec, Halifax, St. John's, à Terre-Neuve, et Saint John, au Nouveau-Brunswick.

Nous avons des experts de Chicago et de Toledo. Ils sont rattachés à notre bureau de Lloyd's Register North America; ils ne font donc pas partie de Lloyd's Register Canada, mais ce sont des experts exclusifs au Lloyd's Register.

Lorsque je parle d'experts exclusifs au Lloyd's Register, je veux dire qu'ils satisfont à nos normes de qualité. Ils sont embauchés par le Lloyd's Register et ne peuvent travailler que pour le Lloyd's Register. Afin de maintenir nos normes auprès de l'International Association of Classification Societies Ltd., ou IACS, nous devons former ces experts, et la qualité de leur formation doit être maintenue à un niveau très élevé.

Lorsque les experts entreprennent les visites, dans certains cas, il peut être nécessaire que deux autres experts ou plus y participent également. Je le souligne parce que j'ai remarqué qu'il y avait eu des questions au sujet de la réponse de l'industrie à la délégation de bâtiments de plus de 24 mètres. Si ma mémoire est bonne, il y a environ 1 000 navires susceptibles de faire l'objet d'une délégation ou d'être soumis à un programme de conformité. Grosso modo, cela fait 200 navires par année. Si on parle en moyenne de trois ou quatre jours par navire par année pour effectuer les visites, cela vous donne une idée du nombre d'experts requis.

Cela dit, nous avons adapté nos effectifs au Canada au nombre de navires dont nous nous occupons en vertu du programme de délégation. Dans le cadre de ce programme, le Lloyd's Register a actuellement environ 180 bâtiments qui sont classés par nous et qui nous ont été délégués.

Nous sommes tout à fait en mesure de nous occuper de ce nombre de navires avec notre personnel actuel. Si le nombre de navires augmente, comme nous le prévoyons avec le programme alternatif de la conformité pour les navires canadiens, alors nous prévoirons une approche progressive sur une période de trois à cinq ans, à mesure que ces petits navires feront l'objet d'une délégation. Nous nous attendons à ce que ces navires soient ramenés au moment de leur cale sèche quinquennale. C'est la meilleure occasion pour nous, en tant que société de classification, d'examiner ces bâtiments.

Je vais vous parler du processus par lequel un navire est classé. À cette étape, nous nous attendons à savoir si un navire nous est offert pour la délégation.

Les petits bâtiments n'ont généralement pas à être classés. La classification est en général requise pour les bâtiments commerciaux, mais elle ne l'est habituellement pas pour les petits bâtiments exploités au pays. Toutefois, si le programme de délégation est étendu à ces petits bâtiments qui n'ont peut-être pas été classés auparavant, en tant qu'organisation ayant des normes précises à respecter, nous devrons effectuer une série de contrôles pour nous assurer que ces navires se prêtent à la classification.

Cela ne veut pas dire que nous croyons que ces navires ne sont pas en bon état parce qu'ils relevaient de Transports Canada, mais c'est le processus que nous suivons. Lorsqu'un bâtiment doit passer d'une classe de l'un de nos collègues actuels à ABS à une classe du Lloyd's Register, le processus comprend la vérification des cartes et l'examen du bâtiment pendant qu'il est en cale sèche pour avoir une bonne idée de son état et comprendre la structure et l'état des machines, avant que nous soyons prêts à prendre le risque de classer ce bâtiment.

Une fois ces bâtiments classés, nous revenons à nos pratiques habituelles, mais il existe un processus en vertu duquel la classification d'un navire actuel intervient.

Je peux vous donner des exemples de situations qui se sont produites ces dernières années. Nous avons eu des navires non classés qui l'ont été en vertu du processus de classification. L'un d'eux est le Chi-Cheemaun, basé à Tobermory. C'est un traversier qui se rend à l'île Manitoulin. Ce bâtiment a été sous-classé il y a quelques années et depuis, nous en avons l'entière délégation.

Le processus est en place. Nous n'avons pas à l'inventer. Il est bien compris. Il s'agit simplement de mettre en place la main-d'œuvre nécessaire afin de pouvoir répondre aux besoins de l'industrie dans l'avenir.

Je me rends compte que je parle déjà depuis 15 minutes et que j'ai lu les notes durant 5 minutes, alors je vais vous laisser me poser des questions.

Le président : C'était très instructif, monsieur Shepherd. Je vous remercie de nous avoir donné ces informations. Nous avons entendu les responsables du gouvernement, mais il est toujours utile d'entendre quelqu'un de l'industrie.

Y a-t-il un lien entre le Lloyd's Register et le Lloyd's of London, les assureurs, et dans l'affirmative, quel est ce lien?

M. Shepherd : Pour répondre à cette question, il va me falloir remonter à 1760 et à un personnage nommé Edward Lloyd. C'est lui qui a ouvert un café sur la rue Fenchurch. À l'époque, les courtiers d'assurance prenaient le café — on dit que c'était du café, mais c'était probablement du gin — à cet endroit, et un groupe d'experts s'est réuni et a formé le Lloyd's Register. Il y a eu des liens à l'époque, mais il n'y a pas de lien entre la compagnie d'assurance Lloyd's et le Lloyd's Register. Ce sont des entités tout à fait distinctes.

Le président : Y a-t-il des sociétés de classification qui sont liées ou rattachées à l'assurance?

M. Shepherd : Non, pas à ma connaissance. Je dis bien pas à ma connaissance; je ne peux en être sûr, mais c'est très improbable.

Le sénateur Buth : Je vous remercie de la description que vous venez de faire, mais je suis un peu perdue.

J'ai besoin de précisions au sujet de la classification et des inspections continues, car je ne comprends pas vraiment. On classe quelque chose, puis on effectue l'inspection, mais la cote reste toujours la même?

M. Shepherd : Le processus de classification débute à l'étape de la conception du navire. Certaines personnes disent qu'il débute bien avant, en ce sens que les propriétaires présentent à la société de classification un avant-projet de navire dans le but de le faire construire quelque part dans un chantier naval.

En général, le chantier naval ne signe pas de contrat sans que les plans aient été examinés et approuvés par une société de classification.

Le sénateur Buth : Comme lorsqu'un ingénieur...

M. Shepherd : Il s'agit essentiellement de ce processus. C'est un processus global. Au Canada, ces dernières années, nous avons eu beaucoup d'exemples de cas où CDL et Algoma — deux grands exploitants au Canada — construisent des navires en Chine. Cependant, tout le travail d'approbation des plans et de conception a été fait au Canada, au bureau de Toronto, là où je travaille. Nous avons environ 24 ingénieurs à Burlington; nous disons Toronto parce que la plupart des gens ne trouveraient pas Burlington sur la carte.

À cette étape, les propriétaires se présentent au chantier naval avec les plans approuvés dotés du sceau du Lloyd's Register attestant que les plans de ce navire ont été conçus en conformité avec les règles du Lloyd's Register ou de l'une des quatre autres sociétés de classification, et qu'ils respectent nos normes. Les dirigeants du chantier sont alors prêts à signer et à s'entendre sur un prix pour le navire, puis ils commenceront la construction.

Je vais revenir un peu en arrière. C'est là où nous revenons à la délégation. Au Canada, jusqu'à la mise en place du programme de délégation, le propriétaire aurait normalement communiqué avec Transports Canada et indiqué que nous allions construire le vraquier en Chine. Le bâtiment serait construit selon la classification du Lloyd's Register, mais il battrait pavillon canadien. Transports Canada enverrait des inspecteurs en Chine en plus de tout le personnel que nous avons déjà là-bas. Nous avons environ 800 personnes en Chine qui inspectent les navires durant la construction. Je ne m'y rends pas souvent, mais nous avons des gens là-bas qui surveillent la construction.

Avant la délégation, Transports Canada aurait envoyé des inspecteurs. Maintenant, toute la supervision des travaux de construction relève de la société de classification, et il s'agit vraiment de supervision. Nos experts examinent toutes les structures, tous les modules et toutes les soudures.

Lorsque le navire est construit, on en fait la livraison. Simplement à titre d'information, le premier navire des Grands Lacs de la CSL construit en Chine arrivera à Montréal dans environ trois semaines. Il a été livré en Chine et a traversé le Pacifique. La traversée a duré près d'un mois et demi, mais c'est le premier navire des Grands Lacs à être construit depuis 1983; c'est donc un événement important pour nous.

Ce navire a été construit en vertu d'une délégation. Transports Canada n'a pas surveillé sa construction, mais a vérifié les plans. Étant donné que ces plans ont été approuvés par le Lloyd's Register, ils ont été envoyés au bureau de Québec de Transports Canada, où ils ont été examinés. Ils ont été envoyés là-bas parce que le port d'attache du navire est à Montréal. Le navire a été inspecté durant sa construction. Il a été livré et il arrivera sous peu.

Vous vous demandez peut-être quel type d'expertise sera effectué. D'abord, quand le navire arrivera au pays, Transports Canada procédera à un examen. C'est davantage pour s'assurer que nous avons fait notre travail que par nécessité. Néanmoins, le navire est livré avec toute une série de certificats, que je ne nommerai pas tous, mais il y a entre autres le certificat de classification, qui est à la base de tout, les certificats de sécurité du matériel, et divers autres certificats relatifs à la pollution par les hydrocarbures en vertu des règlements de la MARPOL. Un grand nombre de certificats viennent avec ce navire, tous délivrés par le Lloyd's Register.

Afin que ces certificats restent valides, après un an, nous remonterons à bord du navire pour effectuer toute une série d'inspections, examiner le navire de façon approfondie et vérifier l'équipement de sauvetage et de lutte contre les incendies.

Nous le faisons pour deux raisons : parce qu'en tant que société de classification, nous voulons veiller à ce que ce bâtiment demeure sécuritaire; et également parce qu'il bat pavillon canadien et que Transports Canada nous autorise à effectuer ces inspections.

En tant que société de classification, la vérification de l'équipement de lutte contre les incendies et de sauvetage ne relève pas vraiment de nous, mais nous le faisons lorsque le pays d'immatriculation du navire nous le demande. Quand cela arrive, nous indiquons sur le certificat « au nom du Canada » et nous le signons à titre de représentant autorisé. Par contre, sur le certificat de classification, nous indiquons « Ce navire est classé par Lloyd's Register ». Il y a deux séries de documents.

J'ai remarqué qu'il a été question du retrait des certificats lorsque les droits ne sont pas acquittés. Au lieu d'en arriver là, si nous avons des préoccupations au sujet de ce navire et que le propriétaire n'en tient pas compte, la plus grande menace que nous puissions brandir, c'est le retrait du certificat de classification. À strictement parler, nous ne pouvons pas retirer un certificat réglementaire, soit celui qui est délivré au nom du Canada, parce que ces certificats ne peuvent être retirés que par le ministre, en principe. Toutefois, nous pouvons retirer le certificat de classification, et si nous le faisons, tout s'effondre, car tout repose sur la classification du navire.

Chaque année, nous effectuons une visite durant laquelle nous procédons à ces inspections. Après deux ans et demi, il y a d'autres visites.

À mesure que le navire prend de l'âge, ces évaluations additionnelles deviennent de plus en plus coûteuses. Après cinq ans, le navire est mis en cale sèche, et une évaluation spéciale est effectuée, c'est-à-dire un examen approfondi de toutes les citernes et de tous les espaces sur ce navire — chaque section de la coque est examinée, et on procède à des mesures d'épaisseur. À mesure que le navire prend de l'âge — et tous les cinq ans, il atteint une nouvelle étape de sa durée de vie —, ces inspections deviennent de plus en plus lourdes.

Lorsque le navire a une vingtaine d'années, les inspections approfondies peuvent prendre plusieurs jours. Nous effectuons des mesures aux ultrasons. Nous en faisons à peu près 10 000 de toutes les parties de la coque afin de brosser un portrait de la structure. Lorsque le navire a commencé à naviguer dans l'eau salée, il peut y avoir une détérioration. Nous voulons voir où elle se situe. Nous voulons aussi avoir des détails objectifs, afin de pouvoir y revenir.

En tant qu'organisation déléguée, nous effectuons ces inspections en ayant deux rôles à jouer : celui de la classification et...

Le sénateur Buth : Vous avez donc le navire du début à la fin. Une fois qu'il est classé par le Lloyd's Register, il reste avec le Lloyd's Register.

M. Shepherd : C'est exact.

Le sénateur Buth : Quels sont les coûts?

M. Shepherd : Je serai prudent, car certaines informations peuvent être considérées comme confidentielles par le Lloyd's Register.

Les droits que nous exigeons sont fixés selon un barème fondé d'abord sur la taille du navire. Les droits sont calculés d'abord en fonction des dimensions globales du navire, soit sa longueur, sa largeur et sa profondeur. Nous vérifions ensuite sa jauge brute. Avec ces chiffres, nous pouvons établir les droits. Nous devons également tenir compte des coefficients. À mesure que les navires prennent de l'âge, ils sont davantage soumis à des évaluations.

Nous avons ensuite les coefficients qui définissent les divers types de bâtiments. Par exemple, un vieux transbordeur roulier d'une vingtaine d'années sera en assez bon état s'il a navigué dans les eaux côtières, ce que font la plupart des transbordeurs, ou même dans les eaux douces. Cependant, il y aura beaucoup plus de choses à vérifier pour un vraquier qui n'a pas eu la vie facile et a transporté toutes sortes de minerais sur les lacs durant 30 ans ou plus. Les coefficients ont été établis pour tenir compte de ces inspections élargies.

Je vais vous donner quelques chiffres approximatifs. Je m'attendais à cette question. Un navire de 24 mètres aurait un tonnage brut d'environ 62 tonnes brutes. Vous comprendrez que 24 mètres, ce n'est pas particulièrement gros. Nos droits annuels seront de 4 000 $.

Le sénateur Buth : Cela englobe tout ce qui doit être fait, n'est-ce pas?

M. Shepherd : Cela comprend les visites périodiques, soit celles que nous prévoyons.

S'il y a des dommages, ce sera en sus. Si le navire s'est échoué ou s'il y a eu une panne des machines, il faut qu'on nous appelle. Nous examinerons cela avec les ingénieurs ou les autres personnes présentes, comme le représentant du Bureau de la sécurité des transports du Canada. Cela s'ajoutera à ces droits.

Pour un plus gros bâtiment, disons un traversier de 60 mètres et d'environ 2 800 tonnes brutes, nous parlerions probablement de 16 000 $ par année, soit environ 80 000 $ sur cinq ans.

Je tiens à préciser que ces chiffres sont des moyennes. En général, les frais plus importants s'appliquent à la fin de la période de cinq ans lorsque nous effectuons la plupart des visites, mais nous disposons des mécanismes qui nous permettent de répartir les frais en versements égaux sur cinq ans, selon la préférence de l'armateur.

En ce qui concerne les grands navires, disons un vraquier des Grands Lacs, il faut envisager 150 000 $ sur cinq ans. Voilà un peu en quoi consiste le barème des frais.

Le sénateur Buth : Je suppose que vous êtes pour le changement.

M. Shepherd : Absolument.

Le sénateur Buth : Prévoyez-vous des problèmes possibles à la suite de tout changement?

M. Shepherd : Je vais parler maintenant du point de vue de l'industrie. Je peux m'attendre à ce que certains armateurs soient réticents parce qu'ils ne sont pas vraiment au courant de la façon dont la société de classification fonctionne, sans compter les frais qui pourraient fort bien constituer des obstacles. Je crois comprendre que Transports Canada tente d'examiner les frais actuels qu'il impose pour ce service. Assez curieusement, si on tient compte des frais que notre société impose aux petits navires par rapport à ceux exigés par Transports Canada, il n'y a pas une grande différence.

Je peux comprendre que les armateurs s'inquiètent du fait qu'il n'y a pas assez de ressources sur le terrain. J'ai dit que le Lloyd's Register compte une quarantaine d'experts au Canada, mais on peut probablement doubler ce chiffre si on tient compte des autres sociétés de classification. Le Lloyd's Register a toujours eu la plus grande présence au Canada, mais les autres sociétés de classification sont bien dotées en effectif, et si on double peut-être ce chiffre, on a une idée du nombre d'experts au Canada. Nous aurons tous à accroître nos effectifs — aucun doute là-dessus — si le programme entre en vigueur dans quelques années. Encore une fois, je pense que cette éventualité pourrait inquiéter l'industrie.

Le sénateur Buth : D'autres pays suivent-ils la même démarche que ce qui est proposé dans le projet de loi?

M. Shepherd : C'est un peu difficile à dire parce que beaucoup de pays ont tant de façons différentes de s'y prendre. Je peux vous parler de l'exemple du Royaume-Uni, qui dispose d'un programme semblable à celui du Canada. Toutefois, aussi surprenant que cela puisse paraître, le programme du Royaume-Uni est beaucoup plus contraignant; en effet, la MCA, c'est-à-dire la Maritime and Coastguard Agency, est plus restrictive que Transports Canada en ce qui concerne les types d'inspection qu'elle délègue aux sociétés de classification. Cependant, elle s'occupe surtout de grands navires qui transportent des passagers, comme des navires de croisière, qui battent le pavillon rouge.

Pour les petits navires, la MCA a des programmes semblables. En fait, un des modèles dont nous avons discuté avec Transports Canada était fondé sur un des modèles utilisés au Royaume-Uni.

Bien des pays permettent tout simplement aux sociétés de classification de diriger la plupart des inspections parce qu'ils n'ont pas le type d'infrastructure qu'on trouve au Canada, aux États-Unis ou au Royaume-Uni, où il y a une commission d'inspecteurs en résidence. Les principaux États du pavillon, comme le Panama, le Libéria et les îles Marshall, par exemple, ont de petits navires dans leur registre — ils ne sont pas tous des vraquiers. Au fond, tout est classé, et nous sommes autorisés à mener toutes les inspections imposées par la loi.

En gros, la réponse est oui. Les États du pavillon plus complexes — ceux qui ont de grandes flottes — ont tendance à instaurer plus de règles qui doivent être élaborées à l'extérieur de la Convention internationale pour la sauvegarde de la vie humaine en mer. C'est un des aspects que Transports Canada a étudiés pour essayer de remédier au fait que nous sommes assujettis à un certain nombre d'exigences, en plus de ce qui est requis en vertu des conventions internationales régulières. De nombreux pavillons européens sont, eux aussi, aux prises avec ces exigences supplémentaires.

Le sénateur Finley : Vous avez déjà répondu à une de mes questions. J'aimerais revenir à la question des assurances. Un des témoins que nous avons reçus l'autre jour — une femme qui est capitaine d'un navire, si je me souviens bien — a parlé de l'approche holistique qu'on a adoptée relativement à l'immatriculation des navires. Elle a bien précisé qu'il n'y a absolument aucun élément d'assurance dans le domaine. Quelle est la relation entre le Lloyd's Register et l'assurance maritime? On s'attendrait à ce que les sociétés d'assurances s'adressent à quelqu'un pour obtenir des données; elles doivent donc venir vous voir. Pourriez-vous nous expliquer cet aspect?

M. Shepherd : C'est vrai dans une certaine mesure. Il y a quelques années, le Lloyd's Register était propriétaire de Lloyd's Register - Fairplay, qui possédait une bonne partie des données concernant les navires. Toutefois, comme nous avons jugé qu'il y avait certains conflits, nous avons vendu ce volet de notre organisation. Ces données ne nous appartiennent plus; c'est une organisation appelée IHS Fairplay qui les détient maintenant.

Pour revenir à votre question sur les données et le lien entre l'assurance et la classification, il n'y a aucune relation officielle entre les organisations. Il n'y a aucun partage de propriété ni rien de la sorte. En général, dans le cas des navires hauturiers ou, disons, des navires assujettis à la convention, et des grands exploitants commerciaux, comme ceux des Grands Lacs, pour souscrire une assurance, les navires doivent normalement être classés, pas nécessairement par le Lloyd's Register, mais par une des organisations reconnues. D'habitude, il s'agit d'une des organisations reconnues par l'Association internationale des sociétés de classification.

Le sénateur Finley : On en compte cinq.

M. Shepherd : Au Canada.

Le sénateur Finley : Selon vous, combien y a-t-il d'organisations dans le monde entier qui font le travail que vous effectuez au Canada?

M. Shepherd : Il y en a une cinquantaine à l'échelle internationale, mais seule une douzaine d'entre elles appartiennent à l'IACS. Autrement dit, seules ces organisations remplissent les normes de qualité reconnues par la plupart des sociétés d'assurances.

Le sénateur Finley : On dirait bien que la gamme complète des navires commerciaux — des milliers de navires, selon toute vraisemblance, et de nombreux armateurs — doivent tous se fier à un groupe relativement petit de sociétés, ne serait-ce que pour souscrire une assurance. Je suppose qu'aucune société d'assurances n'assurera un navire qui n'est pas inscrit dans votre registre ou dans celui des autres sociétés.

M. Shepherd : La classification de l'IACS représente environ 90 p. 100 du tonnage mondial, c'est-à-dire 90 p. 100 de 46 000 navires. Ce que vous dites est vrai, d'une certaine façon, parce qu'une douzaine de sociétés certifient ou classifient les navires, tout comme nous. C'est grâce à cette classification que les sociétés pourront obtenir une assurance ou, chose certaine, entamer une partie du processus pour y avoir droit.

Le sénateur Finley : L'IACS fonctionne pratiquement comme un monopole parce qu'elle accepte des contrats qui lui permettent de surveiller la construction, l'entretien et la remise en état des navires. Même si je ne la qualifierais pas de monopole, c'est une situation très semblable. En effet, vous déterminez si une organisation peut être assurée.

M. Shepherd : Évidemment, nous ne dictons pas cela. Les sociétés d'assurances ont décidé qu'elles ont besoin d'un certain mécanisme leur permettant de mesurer la qualité du risque. En s'adressant à l'un des quelque 12 membres de l'IACS, elles savent que ces organisations ont mis en place les mesures et les normes en vertu desquelles ces navires sont certifiés ou classés.

Le sénateur Finley : Il y a un lien fonctionnel direct — et ce n'est pas un lien de propriété — entre les sociétés d'assurances et l'IACS.

M. Shepherd : De nos jours, le domaine du commerce maritime international est peut-être un peu plus complexe que cela. En plus du travail que nous effectuons, il y a de nombreuses sociétés de validation, qui ne font pas partie du Lloyd's Register et qui n'ont rien à avoir avec notre organisation ou avec toute autre société de classification. La plupart d'entre elles ont été créées par de grands exploitants miniers. En fait, les sociétés de validation attribuent une cote aux navires, et cette information est publiée afin de servir d'un autre mécanisme pour déterminer si elles sont disposées à assumer les risques liés à ces navires particuliers.

N'oubliez pas que les sociétés d'assurances pourraient assurer non seulement le navire, mais aussi la cargaison. Tout devient donc un peu plus entremêlé, mais un des mécanismes qu'elles utilisent pour évaluer le risque consiste à déterminer quelle société de classification s'occupe de classifier le navire. C'est un des aspects auxquels les sociétés de classification comme nous doivent faire attention parce qu'il y a des protocoles d'entente internationaux, comme ceux de Paris et de Tokyo, qui tiennent compte du rendement des sociétés de classification et qui les cotent. Si notre cote se met à baisser, cela peut nuire à la façon dont nous menons nos affaires. Évidemment, nos normes doivent être maintenues parce que si nous commençons à obtenir une mauvaise cote, il est possible qu'un armateur s'adresse à une société d'assurances pour déterminer si elle est disposée à assurer son navire. On lui posera quelques questions. Par exemple, auprès de quelle société de classification le navire est-il inscrit? Sous quel pavillon sera-t-il immatriculé? La société d'assurances commence alors à coter le navire, puis elle consulte les diverses bases de données du protocole d'entente, comme Equasis. Grâce à ces bases de données qui sont accessibles au public, la société d'assurances peut voir les antécédents du navire et attribuer une cote au navire pour ensuite déterminer si elle veut assumer le risque lié au navire en question.

Le sénateur Finley : Y a-t-il eu des problèmes de criminalité ou toute forme de conspiration ou de collusion entre la partie qui s'inscrit et une société d'assurances ou un armateur?

M. Shepherd : Je serais porté à dire non. Je n'ai connaissance d'aucun incident de ce genre. C'est tout ce que je peux dire. En tout cas, je ne suis au courant de rien de tel en ce qui concerne le Lloyd's Register et les principales sociétés de classification.

Le sénateur Finley : Ma dernière question porte sur le système CD LIVE; je crois que c'est ainsi que vous l'avez appelé.

M. Shepherd : ClassDirect LIVE, c'est notre base de données.

Le sénateur Finley : Vous avez dit que c'était accessible afin de fournir aux armateurs et aux pavillons un moyen de visualisation en direct ou un accès en ligne.

M. Shepherd : Oui.

Le sénateur Finley : Qu'en est-il des utilisateurs finaux, c'est-à-dire des gens qui veulent emprunter ou louer un navire et tout le reste? Supposons que je veuille consulter l'état du Royal Grand Princess ou peu importe, parce que je vais partir en croisière; puis-je accéder à cette base de données?

M. Shepherd : Non, mais si vous achetez le Royal Grand Princess, vous le pourrez.

Le sénateur Finley : Au prix que j'aurais payé, je crois que j'en aurais les moyens.

M. Shepherd : Si vous comptiez l'acheter, vous pourriez vous adresser à l'armateur du Princess. Ensuite, celui-ci nous dirait : « On aimerait que vous accordiez un accès au sénateur Finley pour qu'il puisse examiner le navire. ».Toutefois, ce n'est pas un forum public. Nous avons établi des accords de confidentialité stricts entre notre organisation et nos clients. Bien entendu, cela comprend l'État du pavillon, mais pas le grand public.

Le sénateur Callbeck : Merci, monsieur Shepherd, d'être ici. De toute évidence, il s'agit d'un domaine très complexe, et vous nous aidez à le comprendre.

Il y a cinq sociétés de classification au Canada, et je crois comprendre que votre organisation est la plus grande d'entre elles.

M. Shepherd : Oui.

Le sénateur Callbeck : Votre organisation est ici depuis très longtemps; je crois que vous avez dit que cela remonte à 1852. Par ailleurs, votre organisation est gérée par un comité. Il n'y a aucun actionnaire ni propriétaire. Les profits que vous réalisez sont réinvestis dans la recherche et l'éducation. Ce qui m'intéresse, c'est la structure. Comment votre organisation fonctionne-t-elle? Quelle est la composition du comité? Comment ses membres sont-ils remplacés, et cetera? Est-ce ainsi depuis 1852?

M. Shepherd : Le comité est composé de personnes venant de différents milieux : des armateurs, des assureurs maritimes, des États du pavillon, des gestionnaires et même des représentants du ministère de la Défense du Royaume-Uni. Il y a des comités. Je devrais peut-être commencer par le niveau local. Au Canada, nous avons un comité consultatif canadien, qui est composé d'un groupe de cadres supérieurs de l'industrie, principalement des PDG, de tous les coins du pays. Le directeur général de Transports Canada siège à ce comité, et il s'agit d'un groupe consultatif.

Le président de ce comité siège à notre comité général au Royaume-Uni. N'oubliez pas que nous représentons une centaine de pays. Nous n'avons pas de comités dans chaque pays; nous regroupons certains d'entre eux. Quoi qu'il en soit, il y a beaucoup de membres qui finissent par occuper les sièges du comité général à Londres; ensuite, nous avons un groupe de fiduciaires qui prennent la plupart des décisions en fonction de l'apport du PDG et du directeur maritime.

Si vous voulez savoir comment nous nous organisons dans le cadre de nos activités quotidiennes, c'est comme toute autre société. Au-dessus de moi, il y a un gestionnaire chargé des opérations au Canada. Ensuite, dans la division des Amériques, nous avons un président, comme ce serait le cas dans d'autres coins du monde. Nous avons des directeurs généraux, selon le titre qu'on choisit d'utiliser, et ceux-ci relèvent de nos divers directeurs maritimes rémunérés. En somme, ils sont guidés par le président et le groupe de fiduciaires.

Le sénateur Callbeck : Cette structure est-elle propre à votre société, ou les quatre autres sociétés au Canada sont- elles structurées de manière semblable?

M. Shepherd : Je n'en suis pas entièrement sûr, pour être honnête avec vous, mais nous sommes une des rares organisations qui sont entièrement indépendantes de tout propriétaire ou de toute relation avec le gouvernement. Je crois que la société allemande, Germanischer Lloyd, a un propriétaire basé à Hambourg. L'American Bureau of Shipping, ou ABS, est organisé de manière semblable à notre société. Je ne suis pas sûr du Bureau Veritas. Il s'agit là, sans conteste, de la société de classification la plus grande au monde, même si le commerce maritime ne constitue pas une grande partie de ses activités. Det Norske Veritas, l'organisation norvégienne, a conclu des ententes semblables aux nôtres.

Le sénateur Callbeck : Vous avez évoqué le comité consultatif canadien, qui est composé de PDG de partout au Canada. Qui détermine les membres de ce comité?

M. Shepherd : En tant que société de classification, nous faisons des recommandations, mais la décision quant à sa composition revient au président et au comité.

Le sénateur Nancy Ruth : J'ai quelques questions à vous poser afin d'obtenir des précisions. Je voulais d'abord vous interroger sur le concept du risque au sein de votre organisation. Vous avez dit que les petits navires ne sont pas nécessairement tenus d'être classés. Le cas échéant, Lloyd's doit les classer dans une catégorie et accepter le risque. En quoi consiste le risque?

M. Shepherd : S'il s'agit d'un navire qui a été conçu et construit selon les règles de Lloyd's, alors nous savons, dès le début, que les matériaux avec lesquels le navire a été construit provenaient de scieries approuvées. Nous savons que le métal lui-même a fait l'objet d'essais, au moyen de méthodes d'essai mécaniques et chimiques. Nous savons que les procédés de soudage utilisés pour assembler le navire sont approuvés par le Lloyd's Register et que l'intégrité des soudures a été vérifiée par rayons X et par d'autres mesures ultrasoniques.

Tout cela se passe durant la construction du navire. Par la suite, lorsque le navire entre en service, nous savons que, pendant toute sa durée de vie, il y aura toujours des experts exclusifs du Lloyd's Register qui l'examineront et qui en assureront l'entretien selon nos règles.

Si nous procédons à la classification d'un navire existant, nous ne connaissons pas ces renseignements. Si le navire est inscrit auprès d'un autre membre de l'IACS — disons qu'un armateur décide de transférer un navire d'ABS au Lloyd's Register —, alors nous considérerons le risque comme étant minimal, dans une certaine mesure, parce que nous connaissons le contexte des autres organisations et nous savons qu'ils ont des processus semblables aux nôtres. Ensuite, nous procéderions à la classification du navire, mais nous sommes quand même tenus d'examiner les dessins et de rendre des visites pour voir, de nos propres yeux, que le navire remplit nos exigences. Elles ne sont pas toujours acceptées, même par un autre membre de l'IACS.

Dans le cas d'un navire qui n'a jamais été classé, nous devons nous appuyer sur le fait que des processus équivalents à nos normes étaient mis en place durant la phase de construction.

En tant que société de classification, qui transige, disons, avec un navire susceptible d'avoir été certifié selon les règlements de Transports Canada, nous examinons évidemment Transports Canada à titre d'organisation qui a des normes et des processus. Nous évaluons ces navires d'une manière semblable. Du simple fait que le navire n'a jamais été classé et que les dessins n'ont jamais été approuvés par notre organisation, nous demandons à nos responsables de l'approbation des plans à Toronto ou à Burlington, par exemple, d'examiner les dessins originaux. Ces derniers verront que les dessins correspondent à nos normes. Nous nous rendrons également sur place pour effectuer des inspections détaillées du navire afin de déterminer s'il y a eu toute détérioration. Nous pouvons vérifier, entre autres, si l'épaisseur de l'acier est acceptable. A-t-on utilisé des soudures continues au moment de l'assemblage de la structure ou a-t-on utilisé de petites sections de soudure? Il y a beaucoup d'éléments que nous examinerons, puis nous déciderons si nous sommes satisfaits de l'état du navire.

Par la suite, bien entendu, nous tenons compte des antécédents. Si le navire est en service depuis 20 ans et que tout semble bien fonctionner, il va de soi que nous allons commencer à le voir d'un œil plus favorable. Vient ensuite la machinerie. Nous vérifions la façon dont les opérations se déroulent sur le plan de la machinerie.

Le sénateur Nancy Ruth : En somme, le risque est lié à votre réputation et à votre bon nom?

M. Shepherd : Cela en fait partie parce qu'au bout du compte, les sociétés de classification survivent grâce à leur réputation. Vous avez vu les images du navire Costa Cruise. Ce navire n'était pas classé par le Lloyd's Register, mais par RINA, la société de classification italienne, et celle-ci a perdu des clients à cause de cet incident. Quand une société de classification est associée à ce type de désastre généralisé, c'est de mauvais augure pour sa réputation.

Le sénateur Nancy Ruth : Dans un autre ordre d'idées, vous avez dit qu'au Canada, certains navires sont construits selon vos normes, alors que d'autres restent conformes à celles de Transports Canada. Pouvez-vous nous donner quelques exemples pour nous expliquer pourquoi un armateur viendrait vous voir et un autre resterait avec Transports Canada?

M. Shepherd : Étant donné que les armateurs ont le choix de s'adresser à l'une des quatre autres sociétés de classification, s'ils viennent nous voir, c'est, j'ose croire, parce que nous offrons le plus de services au Canada. J'entends par là que nous sommes la seule organisation au Canada qui a une division chargée de l'approbation des plans.

On pourrait se demander en quoi cela pourrait intéresser un client. Quand un navire est endommagé et a besoin de changements structurels ou des réparations, un expert sur site vérifie le dommage, mais il devra probablement en rendre compte au bureau et demander ce qu'on peut faire pour le réparer. Nous n'avons pas besoin d'aller à Londres ou ailleurs à l'étranger; nous pouvons nous en occuper ici, au Canada. À vrai dire, c'est la raison pour laquelle nous avons mis en place tant d'infrastructures. Notre organisation est ici depuis le plus longtemps et occupe la plus grande part du marché, et nous voulons nous assurons de maintenir notre position. Nous vendons notre service au Canada.

Le sénateur Nancy Ruth : Êtes-vous convaincu que Transports Canada peut offrir les mêmes services aux armateurs qui souhaitent faire construire leur navire par son entremise?

M. Shepherd : Je ne suis pas certain si Transports Canada maintiendra les services qu'il a offerts dans le passé, particulièrement dans le domaine de l'approbation des plans. Nous faisons déjà le gros du travail. Dans ce secteur, nous nous luttons tous pour le même bassin de gens. Malheureusement, il n'y a pas de source illimitée d'ingénieurs et d'architectes navals. À mesure que le programme national de construction navale ira de l'avant, il sera d'autant plus difficile de garder les gens dans ces rôles. Selon moi, Transports Canada aura de la difficulté à les maintenir en poste.

Le sénateur Nancy Ruth : Que faites-vous en ce qui concerne la mise au rebut des pavillons du Canada?

Mr. Shepherd : Nous avons un programme d'écologisation des navires. Pour chaque nouveau navire, on dresse maintenant le répertoire de toutes les substances qu'il contient, par exemple le type d'arraisonnement utilisé dans le matériau isolant. Bien entendu, l'amiante n'est plus utilisé, mais malheureusement, il y a toujours des navires qui ont des traces d'amiante, par exemple ceux construits en Turquie. Nous en sommes conscients et nous devons y faire face.

En somme, le programme d'écologisation des navires permet de faire l'inventaire du navire de sorte qu'au moment de le mettre au rebut — que ce soit au Canada ou en Inde, par exemple —, il y a au moins une documentation à cette fin. Hélas, une fois que le navire tombe entre les mains d'un parc à ferrailles dans un pays étranger, il n'y a pas grand- chose que nous puissions faire, si ce n'est de fournir la documentation et de donner des directives aux armateurs et aux parcs à ferrailles qui sont disposés à les suivre.

Si je me souviens bien, nous n'avons qu'un seul parc à ferrailles au Canada, et il se trouve à Port Colborne. Celui-ci dispose d'un système de qualité pour les normes environnementales en vue de s'occuper de la mise au rebut des navires. Au lieu des histoires d'horreur où des gens laissent des navires sur une plage en Inde et se mettent à détacher les pièces sans tenir compte des matériaux qui les composent, on trouve maintenant une documentation à bord du navire, qui montre quels matériaux ont été utilisés et d'où ils provenaient. N'empêche qu'au bout du compte, nous ne pouvons pas contrôler ce qui se passe dans un chantier étranger.

Le sénateur Nancy Ruth : Votre société fournit les renseignements; elle ne les envoie pas à un chantier naval ou à un pays particulier?

M. Shepherd : Nous fournissons les renseignements au propriétaire. Un certain nombre d'anciens cargos hors mer ont quitté le Canada il y a un an ou deux, et ils ont tous fait l'objet d'une inspection dans le cadre du programme d'écologisation des navires. Ils ont quitté le pays, et les propriétaires ont un document qu'ils peuvent remettre pour montrer l'état des matériaux à bord du navire.

Le sénateur L. Smith : Y a-t-il quelque chose qui manque dans le projet de loi en ce qui concerne votre domaine? Y a-t-il des améliorations ou des changements qu'on pourrait y apporter?

M. Shepherd : Pour vous dire franchement, nous sommes en pourparlers avec Transports Canada depuis une douzaine d'années, je dirais. Le premier navire a été délégué il y a environ 12 ans. C'était le Canadian Enterprise. À l'époque, le programme en était à ses premiers balbutiements, mais il a évolué depuis.

Nous tenons régulièrement des réunions avec Transports Canada, dans le cadre desquelles nous discutons des détails. Le système a tellement évolué que je serai surpris d'apprendre que quelque chose nous a échappé, parce que nous avons répété cet exercice, comme je l'ai dit, pour environ 180 navires, y compris les nouvelles constructions en Chine, au Chili et en Italie, dans l'intérêt des armateurs canadiens. Nous avons appris des leçons à cause de toutes les choses que nous avons vues là-bas.

Le programme se trouve actuellement à un stade beaucoup plus avancé. Maintenant que nous envisageons de nous charger des navires de plus de 24 mètres, je doute que nous ayons manqué quelque chose d'important, car pour l'essentiel, nous avons vérifié tout le reste au cours de nos douze années d'expérience avec le programme en vigueur.

Le sénateur L. Smith : Avez-vous éprouvé de la frustration ou vous êtes-vous heurtés à des obstacles comme la bureaucratie et les formalités administratives lorsque vous avez fait affaire avec les gouvernements, par exemple celui du Canada?

M. Shepherd : Je ne dirais pas que c'est le cas. Nous sommes une grande organisation et nous avons nos propres formalités administratives, alors nous comprenons très bien que Transports Canada ait des formalités administratives qui lui sont propres. Cela dit, nous n'avons eu que de bonnes expériences avec les fonctionnaires du Ministère. Les réunions régulières avec les organismes reconnus qui se tiennent deux fois l'an sont d'excellentes tribunes pour soulever des questions.

Nous croyons comprendre qu'il y a des problèmes côté documentation et que cela retarde nécessairement la publication. Il y a des questions de traduction et de droit à régler, mais nous avons les mêmes dans notre propre organisation. Je dirais que nous avons un système éprouvé.

Le sénateur L. Smith : Au fur et à mesure que nous donnons suite à notre plan économique pour transporter nos marchandises, l'expédition sera, de toute évidence, primordiale. Quel défi cela représentera-t-il pour vous? Vous avez mentionné quelques points plus tôt concernant le personnel, mais si cela se fait à l'échelle que nous pensons, quelle en sera l'incidence sur la Lloyd's?

M. Shepherd : Nous nous attendons à de la croissance dans l'Ouest canadien et dans l'Est canadien. Les navires de soutien interarmées, le Projet de brise-glace polaire et le projet de NPEA commencent tout juste à prendre forme, et nous ignorons si nous allons décrocher ces contrats. Nous ferons une soumission avec les quatre autres sociétés de classification, mais nous avons dressé des plans pour exécuter ces projets.

Si nous prenons les grands projets, comme le projet d'expansion minière potentielle à Baffinland ou celui de GNL à l'Île Melville, nous en parlons déjà avec les propriétaires. Nous songeons aux types de navires qui seront nécessaires. Nous examinons les dispositifs de ravitaillement de GNL. Vous savez probablement que la STQ est sur le point de construire un traversier de 100 mètres en Italie qui fonctionnera au gaz naturel liquéfié, qui assurera le service entre Matane et Tadoussac dans le St-Laurent. C'est un autre secteur dont nous nous attendons qu'il connaîtra un essor. Nous nous attendons à ce qu'il y ait un ravitaillement de LNG pour les bâtiments de mer dans les principaux ports de Vancouver, Montréal et Halifax.

Nous abordons tous ces secteurs dans une perspective mondiale. Nous sommes une grande organisation. Nous avons 7 000 employés dans le monde entier qui peuvent travailler à ces projets. Il faut tirer profit de toute cette énergie pour travailler tant au Canada que sur les navires qui desserviront probablement des secteurs comme ceux des oléoducs et de l'exploration gazière.

Le sénateur L. Smith : Nous espérons que grâce à cette occasion extraordinaire pour votre organisation, vous investirez les profits dans l'éducation comme vous l'avez mentionné tout à l'heure, et vous avez nommé les universités canadiennes qui sont...

M. Shepherd : Comme je l'ai mentionné, nous collaborons déjà avec trois universités au Canada. Nous nous attendons à accroître cette collaboration. En fait, nous avons déjà commencé à envisager des projets de GNL.

Le Registre de la Lloyd's est en train de mettre sur pied deux centres d'excellence universitaires dans le monde, l'un au Royaume-Uni et l'autre à Singapour. C'est à ces endroits que se trouveront la plupart de nos ingénieurs à l'échelle mondiale, et pas seulement du personnel maritime, mais aussi du personnel chargé du transport de l'énergie pour procéder à l'examen technique. Je ne parle pas des topomètres qui se trouveront un peu partout dans le monde. Cependant, au Canada, il y a plus d'activité sur la Côte Ouest avec l'UBC et plus sur la Côte Est avec les universités Memorial et Dalhousie.

Le sénateur Ringuette : Vous avez dit qu'au sein de votre conseil d'administration, vous avez des PDG et un directeur du ministère des Transports.

Est-ce que les conseils des quatre autres organes de classification sont ainsi constitués? Y a-t-il un représentant de Transports Canada qui siège aux quatre autres conseils?

M. Shepherd : Je ne saurais vous le dire. Ils sont constitués de façon semblable. Je crois que certaines organisations ont des comités formés de membres de partout en Amérique du Nord au lieu d'un comité pour le Canada et un autre pour les États-Unis. Je ne suis pas certain de leur composition.

J'imagine que l'ABS...

Le sénateur Ringuette : Je pense que vous êtes une société fermée au Canada. Vous n'êtes que cinq, alors vous savez certainement qui siège aux conseils des autres organes.

M. Shepherd : Non, je ne le sais vraiment pas.

Le sénateur Ringuette : Qui est le directeur de Transports Canada qui siège à votre conseil?

M. Shepherd : Il s'agit du directeur général Donald Roussel.

Le sénateur Ringuette : Je crois comprendre que vous gérez un organisme sans but lucratif.

M. Shepherd : Sans but lucratif.

Le sénateur Ringuette : Est-ce que les membres de votre conseil reçoivent des tarifs journaliers ou des droits annuels, ou s'agit-il entièrement de bénévolat?

M. Shepherd : Il s'agit entièrement de bénévolat.

Le sénateur Ringuette : Il n'y a pas le moindre avantage financier?

M. Shepherd : Non, aucun.

Le sénateur Ringuette : Qu'arriverait-il si un navire classé par l'un des 38 non-membres de l'IACS voulait porter le pavillon canadien? Qu'arriverait-il dans ces circonstances?

M. Shepherd : C'est arrivé. Ils doivent changer de classification pour appartenir à l'une des cinq sociétés de classification reconnues au Canada s'ils souhaitent porter le pavillon canadien.

Le sénateur Ringuette : Vous avez le monopole de la situation ici.

M. Shepherd : En ce sens, oui, mais je ne pense pas que Transports Canada ou le pavillon canadien impose de limite. Si vous êtes disposé à investir au Canada, à y ouvrir un bureau et à y affecter des employés, je ne pense pas que quelqu'un vous empêche de vous réunir.

Dans un sens, je peux comprendre votre point de vue, mais lorsque je repense au contenu de l'entente de délégation, certains critères devaient être respectés pour être considéré comme une organisation déléguée. Vous deviez, notamment, avoir des bureaux et du personnel exclusifs au Canada.

Le sénateur Ringuette : Vous avez mentionné tout à l'heure que vous occupiez une large part du marché canadien d'un côté et, de l'autre, que vous avez un directeur de Transports Canada qui siège à votre conseil d'administration. Je ne sais pas ce qui se passe au conseil et quelles décisions y sont prises. Cependant, de mon point de vue, il s'agit un peu d'un conflit d'intérêts —avec Transports Canada et le grand public canadien à cet égard — lorsque vous prenez les privilèges quelque peu exclusifs dont bénéficient votre groupe et les quatre autres groupes, mais en particulier le vôtre qui a la mainmise sur la majeure partie du marché canadien.

M. Shepherd : Eh bien, je dirais que le conseil est consultatif. Il n'y a pas...

Le sénateur Ringuette : Vous pourriez entretenir un lien particulier avec le directeur de Transports Canada qui siège à votre conseil.

M. Shepherd : Je peux certainement comprendre pourquoi vous dites cela. Parallèlement, nous rencontrons les fonctionnaires de Transports Canada et tous les autres organismes reconnus deux fois l'an, et j'ignore si les fonctionnaires de Transports Canada assistent à d'autres réunions de comité dans d'autres sociétés de classification. Je ne le sais vraiment pas.

Si vous demandiez si ce monopole est d'une quelconque utilité au Registre de la Lloyd's, je dirais que du point de vue des affaires, nous ne faisons pas d'affaires avec les membres du comité. Il s'agit purement d'un comité consultatif qui formule des conseils à la société de classification. Je ne crois pas que l'on empêche toute autre société de classification de s'établir au Canada. Notre entreprise est florissante parce que nous avons énormément investi au Canada. Nous avons investi dans les ressources humaines, nous avons investi dans la formation et nous embauchons des Canadiens. Si une autre société est disposée à investir autant que nous l'avons fait, peut-être qu'elle réussira aussi bien que nous.

Le sénateur Ringuette : J'espère vraiment que plus d'entreprises investiront et créeront des emplois au Canada. Cela dit, il y a une certaine concurrence, et s'il y a 50 organismes semblables dans le monde — dont 12 sont des constructeurs qui adhèrent aux normes internationales de l'IACS — qu'arrivera-t-il si un navire est classé par l'un des 38 autres membres? Nous parlons de 45 qui ne se trouvent pas au Canada, dont sept qui feraient partie du groupe de l'IACS. Qu'arriverait-il à un navire qui voudrait porter le pavillon canadien parmi les sept qui font partie du groupe de l'IACS, mais pas ici au Canada? Devrait-il quand même passer par l'un de vous cinq?

M. Shepherd : S'ils voulaient entrer dans le programme de délégation, il aurait à le faire.

Le sénateur Ringuette : Aucun d'entre vous ne reconnaissez les autres membres de l'IACS?

M. Shepherd : Nous les reconnaissons, mais nous n'avons pas notre mot à dire à cet égard. En tant que société de classification, nous serons là uniquement parce que nous sommes au Canada. Nous sommes autorisés au Canada. Nous ne sommes pas là pour empêcher quiconque de l'être. Cependant, si un propriétaire a un navire classé — encore une fois j'utilise l'une des autres sociétés de classification, comme le RINA — et il veut venir au Canada avec son navire, porter le pavillon canadien et faire partie d'une délégation, il devra choisir l'une des cinq sociétés de classification déjà autorisées, ou le RINA a la possibilité de demander l'autorisation lui-même.

Le sénateur Ringuette : Depuis combien de temps le directeur de Transports Canada siège-t-il à votre comité consultatif?

M. Shepherd : Je suis secrétaire du comité depuis une dizaine d'années. Cela remonte à très loin. C'est l'un de ces postes qui ont toujours été ouverts à un membre de l'État du pavillon. En règle générale, nous invitons toujours un État du pavillon au comité, et vous comprendrez que, de concert avec tous les autres membres du comité, il est là pour prodiguer des conseils au Registre de la Lloyd's. Nous n'avons pas à faire du démarchage.

Notre énoncé de mission n'est pas de permettre à quiconque de s'enrichir. Cela ne fait pas partie de notre mandat. Au fond, c'est ce qui nous distingue grandement des autres organisations. Au bout du compte, le Registre de la Lloyd's a pour mandat de rehausser la sûreté et les normes de la marine marchande dans le monde entier. C'est ce que nous préconisons.

Le sénateur Ringuette : Quelle part du revenu canadien net de votre organisation serait réinvestie dans la recherche et le développement au Canada?

M. Shepherd : Je ne saurais vous donner de montant exact.

Le sénateur Ringuette : Oh, voyons donc, vous siégez au comité depuis 10 ans.

M. Shepherd : Ce n'est pas le comité qui le dicte. C'est fait à l'extérieur du comité.

Le sénateur Ringuette : Je vais reformuler ma question. Quelle part des avantages ou profits nets seraient investis à l'extérieur du Canada? Les membres du comité consultatif seraient-ils en mesure de nous le dire, comme ce monsieur de Transports Canada? Qui peut nous le dire si vous n'êtes pas en mesure de le faire?

M. Shepherd : La réponse devrait venir de Londres.

Le sénateur Ringuette : De Londres?

M. Shepherd : Oui.

Le sénateur Ringuette : Je vois. J'ai une image très nette.

Le sénateur Runciman : Monsieur Shepherd, vous avez mentionné à quelques reprises qu'il y avait 180 navires.

M. Shepherd : Délégués.

Le sénateur Runciman : Est-ce la taille de l'industrie canadienne?

M. Shepherd : Non. Je pense qu'il y a environ 300 navires classés au Canada.

Le sénateur Runciman : Est-ce que la plupart d'entre eux font partie de la flotte des Grands Lacs?

M. Shepherd : C'est le cas pour une bonne partie d'entre eux, oui. Il y a un petit nombre de navires océaniques, de pétroliers et autres types du genre, portant le pavillon canadien. Nous avons environ 180 des 300 navires délégués.

Le sénateur Runciman : Vous avez mentionné tout à l'heure que la notion de pavillon de complaisance ne semble plus être la question qu'elle était. Pourriez-vous nous en dire plus là-dessus? Je pourrais me tromper, mais je crois avoir lu un article dans lequel on disait que la Société maritime CSL Inc. était enregistrée à la Barbade pour des raisons fiscales.

Je suis curieux de savoir pourquoi vous ne pensez pas que cela pose toujours problème. Il y a toujours la question fiscale, manifestement.

M. Shepherd : :roman; Pour ce qui est de la question fiscale, d'un point de vue financier, il est peut-être toujours avantageux d'immatriculer des navires à l'étranger. Cependant, s'agissant des normes de sécurité, ces pavillons internationaux comme les Îles Marshall, la Barbade et le Libéria sont tous signataires de la Convention SOLAS et de l'OMI. Au fond, leurs navires sont inspectés selon les mêmes normes.

Le sénateur Runciman : Vous pensez principalement en fonction des normes de sécurité.

Vous avez parlé d'inspections de conformité et de navires à plus haut risque. Je m'interroge au sujet de la flotte des Grands Lacs parce que je me souviens d'avoir lu que les navires avaient en moyenne une quarantaine d'années. Entrent-ils dans la catégorie des navires à plus haut risque? Pour ce qui est des répercussions financières que le sénateur Buth a mentionné tout à l'heure, s'agit-il des sociétés qui se disent préoccupées des répercussions financières qui y sont associées?

M. Shepherd : Non, toutes les sociétés des Grands Lacs, qui sont principalement CSL, Algoma et Lower Lakes, ont des navires qui font principalement partie du programme de toute façon, et ils ont été classés puisqu'il s'agit de nouvelles constructions.

Pour ce qui est de l'âge du navire, ma réponse est non. Comme je l'ai mentionné plus tôt, les exigences en matière d'inspection sont plus marquées au fur et à mesure qu'un navire vieillit puisqu'il est soumis à une inspection beaucoup plus minutieuse. J'ai parlé des mesures de l'épaisseur. Nous atténuons le risque en examinant ces navires avec plus de soin au fur et à mesure qu'ils vieillissent et nous travaillons avec les propriétaires à des programmes de réfection de la coque.

Le sénateur Runciman : Y a-t-il des répercussions financières associées à l'incorporation par renvoi dans les normes internationales? Je sais qu'il en est aussi question dans la loi.

M. Shepherd : J'ignore s'il y a des répercussions financières.

La procédure que nous suivons pourrait être améliorée. J'ai lu dans les notes concernant le supplément. En ce moment, pour utiliser l'exemple qu'a donné le sénateur d'un navire qui arrive au Canada, nous l'examinons. Gardez à l'esprit que ce navire, même si a été classé avec l'un des autres membres de l'IACS, répond toujours aux mêmes normes que nous avons à titre d'organisation mondiale.

Nous pourrions mener des enquêtes pour mesurer où il se situe par rapport à la Loi sur la marine marchande du Canada et en dériver, au fond, une analyse des lacunes. Il s'agit en fait d'un processus très long. Une fois que nous avons procédé à l'analyse des lacunes, nous pouvons formuler des recommandations concernant les réparations nécessaires pour emmener ce navire au Canada. Il pourrait s'agir d'isolation, d'une question structurelle ou de protection contre les incendies. Le supplément élimine une grande partie de ce travail, encore une fois, avec notre douzaine d'années d'expérience en la matière, nous savons où se trouveront les problèmes. De bien des façons, je pense que cela améliorera les choses.

Le sénateur Runciman : Peut-être que cela n'est pas directement lié, mais vous avez mentionné qu'Algoma et CSL construisent de nouveaux navires en Chine. N'avons-nous pas la capacité de le faire au Canada ou est-ce une question de capacité et de coûts ou une combinaison d'autres facteurs qui font que les entreprises canadiennes construisent des navires en Chine et pas ici?

M. Shepherd : C'est dommage. Le dernier bateau de croisière a été construit à Collingwood qui, bien entendu, n'a plus d'industrie de la construction navale à proprement parler. C'est la réalité. Les infrastructures tombent en désuétude et la main d'œuvre disparaît avec elles; l'un des grands défis en ce moment dans le contexte des programmes nationaux de construction navale est de rétablir cette main d'œuvre et cette infrastructure.

Le sénateur Runciman : Les modifications à la fiscalité prévues dans le budget de l'an dernier favorisent la reconstruction de la flotte.

M. Shepherd : Oui, pour ce qui est des grands navires de plus de 126 mètres.

Le président : Le sénateur Finley a une question supplémentaire.

Le sénateur Finley : Je n'arrive pas à me rappeler à quoi elle se rapportait.

Je n'ai pas assisté à tous les témoignages sur ce point, alors il est possible que je pose une question à laquelle on a déjà répondu. La raison pour laquelle j'y ai pensé est que vous avez fait allusion au bateau de croisière italien qui est allé se promener, je suppose, et dans cette approche globale que vous avez de la question maritime, qui supervise les consignes d'utilisation? Comment pilotent-ils le navire, comment l'opèrent-ils, quelles sont les exigences permanentes en matière d'entretien quand il est en mer et autres? Votre organisation s'en occupe-t-elle?

M. Shepherd : Nous pouvons le faire, mais c'est une question en trois parties.

Des organisations comme la nôtre vérifient le système de gestion de la sécurité de l'entreprise. Ce système contient les procédures dont vous parlez.

Le sénateur Finley : Qui les établit?

M. Shepherd : Le code même, le Code international de gestion de la sécurité, est défini par la Convention SOLAS, mais les procédures en tant que telles sont rédigées par les entreprises ou les entreprises de gestion de ces navires, et elles sont vérifiées par les sociétés de classification.

La sécurité de l'équipage est une question de pavillon. Le certificat international de sécurité de l'équipage est délivré par le pavillon, et il est plutôt mondial. Nous n'énonçons pas les qualités que le capitaine doit avoir. Au Canada, il y a un critère dans le Loi sur la marine marchande du Canada à cet effet.

Lorsque nous procédons à la vérification d'un navire, nous nous assurons qu'il a reçu le certificat approprié. Nous procéderions à une vérification pour nous assurer que l'équipage suit ses procédures, mais au bout du compte, il est impossible d'être là avec lui en permanence. C'est le processus de surveillance.

Côté classification, nous examinons le matériel, des parties du navire; côté procédure de vérification, nous examinons le système de gestion de la sécurité, et ensuite le pavillon se penche sur la question du certificat. Au bout du compte, la compagnie est responsable de veiller à ce que ces mesures soient prises.

Le sénateur Finley : Qu'entendez-vous par « la compagnie »?

M. Shepherd : La compagnie est le représentant autorisé propriétaire du navire.

Le sénateur Ringuette : Je deux petites questions de suivi. Premièrement, est-ce que le directeur de Transports Canada qui siège à votre comité consultatif est, de quelque façon que ce soit, impliqué dans la Loi sur la marine marchande au Canada? Deuxièmement, il y a des PDG qui siègent à votre comité? Combien de fois par année se réunit votre comité consultatif pour que le PDG qui y siège rencontre aussi le directeur de Transports Canada?

M. Shepherd : Une fois l'an.

Le sénateur Ringuette : Ma première question se rapporte à la Loi sur la marine marchande au Canada. Est-ce que le directeur de Transports Canada qui siège à votre comité est impliqué de quelque façon que ce soit? Je veux que cela soit clair. Je ne veux présumer de rien. Est-ce que cette personne a la moindre chose à voir avec la Loi sur la marine marchande du Canada que nous étudions en ce moment?

M. Shepherd : Je ne crois pas.

Le sénateur Ringuette : Vous ne croyez pas?

M. Shepherd : Je ne crois pas. Je crois que la Loi sur la marine marchande du Canada fait allusion au ministre.

Le sénateur Ringuette : J'ai demandé si son poste à Transports Canada avait quelque chose à voir avec cette loi.

M. Shepherd : Je ne comprends pas vraiment la question; désolé.

Le sénateur Ringuette : Existe-t-il un lien entre le membre de votre comité consultatif qui travaille à Transports Canada et la Loi sur la marine marchande du Canada que nous étudions? Existe-t-il un lien?

M. Shepherd : Je vais devoir dire que je ne sais vraiment pas. Lorsque vous parlez d'« implication »...

Le sénateur Ringuette : Implication. Monsieur, vous avez dit, en réponse à ma question de tout à l'heure, que le membre siégeait à votre comité depuis assez longtemps.

M. Shepherd : Le poste, pas la personne.

Le sénateur Ringuette : Certainement, monsieur, d'après les discussions qui ont eu lieu au fil des ans, vous savez quel est le poste de ce directeur à Transports Canada et ce que sont ses responsabilités. Les responsabilités de ce directeur de Transports Canada se rapportent-elles, de quelque façon que ce soit, à la Loi sur la marine marchande du Canada que nous étudions?

M. Shepherd : Peut-être que je peux répondre à cette question en disant que, à titre de société de classification, nous invitons des membres à se joindre au comité pour formuler des conseils. Il s'agit aussi d'une tribune où nous pouvons discuter de questions comme celle que j'ai soulevée tout à l'heure — nous parlions de ravitaillement en GNL et d'autres opérations au Canada et dans le monde entier.

J'essaie de répondre à votre question, mais je ne la comprends pas vraiment. À titre personnel, je suis un « utilisateur » de la Loi sur la marine marchande du Canada, si vous voulez; je m'en sers comme document de référence. Je ne comprends pas le terme « implication ». Si vous pouvez le comprendre de mon point de vue, à titre de société de classification...

Le sénateur Ringuette : Je vais employer un autre terme.

Le président : Nous devons terminer rapidement. Ce ne devait être qu'une ou deux questions brèves.

Le sénateur Ringuette : Le directeur de Transports Canada qui siège à votre comité a-t-il une responsabilité concernant la Loi sur la marine marchande du Canada?

M. Shepherd : Je ne connais pas ses responsabilités. Il est la personne à qui je m'adresse à Transports Canada. À titre de particulier, je ne peux vraiment pas parler des responsabilités d'une personne qui travaille à Transports Canada.

Le président : Merci. Monsieur Shepherd, j'aimerais avoir une précision : vous avez parlé de navires qui étaient construits pour Transports Canada et la Défense nationale. Avons-nous l'habitude de classer aussi ces navires?

M. Shepherd : Pas par le passé. Dans la plupart des marines du monde — en fait, je vais m'écarter du sujet pour un moment. La plupart des navires de la Garde côtière ont été construits selon la classification du Registre de la Lloyd's, mais la classification était, en général, abandonnée au moment de la livraison. En tant que navires gouvernementaux, ils n'étaient pas commerciaux et il n'était pas nécessaire de maintenir de classification. Dans un sens, ils nous ont utilisés comme système de qualité pendant la construction.

Il n'y a eu aucune classification des navires militaires au Canada par le passé. Si vous regardez à l'échelle mondiale aujourd'hui, la Marine royale au Royaume-Uni utilise le Registre de la Lloyd's pour faire l'assurance de la qualité.

Le président : Je pensais vous avoir entendu dire que votre société présenterait une soumission pour décrocher le contrat de construction des nouveaux navires.

M. Shepherd : Nous le ferons.

Le président : Vous aurez espoir de décrocher le contrat du gouvernement du Canada pour construire les nouveaux navires.

M. Shepherd : Oui.

Le président : Merci. Je tenais à clarifier cela.

Chers collègues, cela met fin à cette partie de la réunion. Au nom de tous les membres du comité, je tiens à remercier M. Shepherd, de la Lloyd's Register Canada Limited, de nous avoir aidés à comprendre beaucoup mieux cette industrie.

La prochaine partie de la réunion aura lieu par vidéoconférence. Madame Coshan, nous vous remercions d'avoir accepté de comparaître par vidéoconférence à si court préavis.

[Français]

Nous continuons notre étude de la teneur complète du projet de loi C-45, Loi no 2 portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en œuvre d'autres mesures, déposé à la Chambre des communes le 18 octobre 2012.

[Traduction]

Dans la deuxième partie de notre réunion cet après-midi, nous examinerons les modifications proposées à la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses. Les modifications se trouvent à la partie 4, section 13, du projet de loi, qui commence à la page 260. Hier, nous avons discuté de ces modifications avec les représentants de Santé Canada, et aujourd'hui, nous accueillons Rita Coshan, présidente, conseil des gouverneurs, Conseil de contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses. Elle se trouve à Regina, en Saskatchewan.

Madame Coshan, je crois savoir que vous avez un exposé pour nous aider à mieux comprendre le rôle du conseil que vous présidez. Nous vous écoutons.

Rita Coshan, présidente, conseil des gouverneurs, Conseil de contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses : Je vous remercie, monsieur le président, de m'avoir invitée à m'exprimer et à participer à cette discussion. Comme vous l'avez mentionné, je m'appelle Rita Coshan et je viens vous parler au nom du conseil des gouverneurs du Conseil de contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses, le CCRMD. Je reprends ici les mêmes propos que j'ai tenus devant le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes le 6 novembre dernier. Je préside ce conseil, qui est formé de représentants de fournisseurs, d'employeurs, d'organisations de travailleurs et d'instances gouvernementales responsables de santé et de sécurité au Canada.

Le conseil des gouverneurs conseille le ministre sur divers aspects de la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses, par exemple, les procédures utilisées par le CCRMD pour examiner les demandes touchant les renseignements commerciaux confidentiels. Je travaille dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail au niveau provincial depuis plus de 23 ans. J'ai été coordonnatrice du SIMDUT, toxicologue, et actuellement, en plus d'être présidente du conseil, je suis directrice des services de santé.

À titre de présidente du conseil des gouverneurs, je voudrais formuler quelques remarques générales au sujet de la série de modifications proposées à la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses dans le projet de loi C-45, en particulier l'article 274, qui prévoit la création d'un comité consultatif externe chargé de conseiller le ministre de la Santé sur les questions relatives à la loi et qui remplacerait le conseil des gouverneurs actuel.

Le conseil des gouverneurs reconnaît que ce projet de loi, qui prévoit la fusion du CCRMD et du Bureau national du SIMDUT au sein d'une même direction à Santé Canada, offre le potentiel d'améliorer la communication de l'information sur les dangers en milieu de travail et ainsi de mieux informer et protéger les travailleurs. La fusion de ces fonctions offre de nombreuses possibilités sur le plan du partage de l'expertise et des ressources techniques, stratégiques et exécutoires complémentaires, dans le but d'améliorer la synergie de la prestation des services. C'est une question particulièrement importante à l'heure actuelle en prévision de l'intégration sous peu du Système général harmonisé au SIMDUT, en phase avec les États-Unis, devrais-je ajouter.

L’amendement contenu dans l’article 274 remplace le conseil des gouverneurs actuel par un conseil consultatif ministériel qui accorde, à la base, dans la nouvelle loi la même représentation aux actionnaires que c’est le cas actuellement au sein du conseil. En réalité, le conseil consultatif ministériel joue un rôle plus important que celui du conseil actuel, dans la mesure où on lui a donné la responsabilité législative de conseiller le ministre en ce qui a trait à toutes les questions liées à la loi.

La fonction consultative du conseil des gouverneurs a prouvé son efficacité à maintes reprises par le passé. La modification législative visant à créer un conseil consultatif est en fait une recommandation du conseil des gouverneurs. Le conseil a aussi récemment donné son avis à la ministre en ce qui concerne les produits visés par la Loi sur les produits dangereux et ainsi assujettis aux dispositions de la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses. Nous nous attendons à ce que ces recommandations soient prises en compte dans les modifications à venir à la Loi sur les produits dangereux.

La nécessité d'un comité consultatif ministériel efficace découle du fait que la communication de l'information sur les dangers des produits chimiques en milieu de travail relève de la législation fédérale, provinciale et territoriale en matière de travail et de santé.

Nous pouvons constater les nombreux résultats de la législation touchant le SIMDUT et de la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses en milieu de travail. Les employés, les employeurs et l'organisme responsable de la santé et sécurité en milieu de travail, qui se trouvent aux premières loges, peuvent témoigner de l'efficacité de la communication de l'information sur les dangers des produits chimiques et de la protection des renseignements commerciaux confidentiels pour atteindre l'objectif visé, soit que les travailleurs soient informés et protégés. Je sais, par expérience, que c'est dans le cadre de santé et de sécurité en milieu de travail des ministères du Travail que les intervenants du milieu signalent avant tout leurs préoccupations et se transmettent le plus directement l'information.

En parallèle, le CCRMD et le Bureau national du SIMDUT ont profité de leur association avec Santé Canada — je parle d'expérience, car je travaillais dans le milieu avant que les activités du SIMDUT relèvent de Santé Canada — et ont profité d'un accès à l'expertise et à l'expérience du ministère dans le cadre d'un large éventail de programmes liés aux matières dangereuses et de programmes d'application de la loi.

Ce chevauchement du mandat de deux ministères et de plusieurs ordres de gouvernement signifie qu'une communication constante et que les partenariats sont essentiels à la réussite à long terme de ce programme en milieu de travail. Un autre élément clé est la situation de ce programme en tant que direction faisant partie du ministère de la Santé. Santé Canada est un ministère complexe, de grande taille, soumis à de nombreuses pressions concurrentes. Je tiens donc à terminer en déclarant que tous les intervenants devront continuer à collaborer avec diligence avec Santé Canada pour assurer le maintien de la popularité et de la réussite de cet important programme.

Je vous remercie encore, monsieur le président. Je serai heureuse de répondre aux questions des membres du comité.

Le président : Vous avez donc terminé votre exposé, et nous vous en remercions beaucoup. Avant d'entamer la période de questions avec les sénateurs, j'aimerais simplement clarifier un point dans votre exposé, à savoir que le conseil des gouverneurs disparaîtra vraisemblablement si ce projet de loi est adopté et qu'un nouveau comité consultatif auprès du ministre de la Santé sera créé. Passons-nous d'un conseil qui a quelque pouvoir pour ordonner ou exiger certaines choses à un groupe consultatif, ou passons-nous d'un groupe consultatif à un autre groupe consultatif?

Mme Coshan : À notre point de vue, il n'y aura pas de différence significative entre notre rôle actuel et le rôle que nous prévoyons assumer à l'avenir. J'ai souvent siégé à des comités du Bureau national du SIMDUT et du CCRMD, et les gens sont très réceptifs à nos conseils. Nous ne nous attendons pas à ce que cela change. Pour nous, le fait que notre mandat soit élargi dans le cadre de cette modification compense largement le fait que nous ayons moins de pouvoir pour établir des règles.

Le président : Auparavant, pouviez-vous autoriser des exemptions? Est-ce que vos examens et vos conseils avaient un caractère exécutoire? Est-ce qu'il s'agira maintenant seulement de conseil que le ministre aura le loisir de suivre ou non? Y a-t-il une différence à cet égard?

Mme Coshan : Notre rôle, au quotidien, a toujours été de nature consultative sur les grandes questions d'application. En ce qui a trait au processus d'appel, nous offrions des conseils, mais nous ne nous occupions pas des règles et procédures au quotidien, même si on mentionnait que cela faisait partie de notre rôle. Nous rôle en était plutôt un de nature stratégique. Nous examinions les programmes dans leur ensemble en présentant le point de vue des intervenants, et je ne pense pas que cela va changer.

Le président : Cette précision est utile.

Le sénateur Buth : J'aimerais revenir sur un de vos commentaires que nous avons aussi entendu de la bouche d'un représentant du ministère au sujet du Système général harmonisé et du fait qu'il faut assurer une bonne coordination et favoriser l'échange d'information au fur et à mesure que nous progressons dans la mise en œuvre de ce système. Pourriez-vous nous parler de ce système, de son importance et de ses objectifs?

Mme Coshan : Oui, bien sûr. Le Système général harmonisé est un système international d'information sur les matières dangereuses que de nombreux pays, développés et en développement, sont en train d'adopter. Les mots et les symboles utilisés sur les étiquettes seront les mêmes partout. Les fiches techniques contiendront les mêmes renseignements à propos des dangers et des contrôles liés à leur utilisation. Il s'agit d'un système harmonisé partout sur la planète. Cela veut dire que nous adoptons un nouveau système de classification des produits chimiques. Il faut donc revoir les étiquettes et les fiches techniques des produits. Il y a donc beaucoup de travail à faire du côté des lois fédérales ainsi que provinciales et territoriales.

En ce qui a trait aux produits en milieu de travail, il faut que ce soit harmonisé avec les exigences fédérales imposées aux fournisseurs et les exigences provinciales-territoriales imposées aux employeurs. Il faut donc revoir la législation en place aux divers ordres de gouvernement en coordonnant les efforts, et ce, dans un délai très court. Si je me souviens bien, c'est en décembre 2011 que le premier ministre Harper et le président Obama ont convenu que le nouveau système serait en place au plus tard en juin 2015. La portée des changements requis présente tout un défi. Nous devons cibler nos efforts et travailler de concert pour arriver à le faire dans un délai très court.

Le sénateur Buth : Vous considérez donc comme un avantage le regroupement du conseil et du Bureau national au sein d'une même direction à Santé Canada.

Mme Coshan : Oui. Je travaille avec les gens des deux organismes depuis un certain temps et je connais bien leurs compétences. Il sera avantageux d'avoir ces compétences au sein d'un même organisme pour assurer la coordination. À titre d'exemple, les employés du CCRMD savent comment préparer les fiches techniques et sont bien au fait de la classification toxicologique des produits et ils pourront ainsi aider les fournisseurs à classifier leurs produits dans le cadre d'un nouveau régime qui est complexe.

Le sénateur Callbeck : Dans votre exposé, vous avez parlé des aspects positifs des modifications proposées dans le projet de loi C-45. Avez-vous aussi des réserves? Y a-t-il des éléments qui vous inquiètent?

Mme Coshan : Dans mon exposé, j'ai parlé des éléments positifs, mais j'ai aussi mentionné que le fait d'avoir à traiter avec deux ordres de gouvernement, et des ministres qui ont des mandats légèrement différents, complique les choses. Les ministres du Travail ont souvent de la difficulté à faire entendre leur voix au sein du ministère fédéral de la Santé dont la taille est considérable. Nous devons nous faire entendre. J'y vois aussi des avantages, car l'harmonisation des communications à l'échelle mondiale sur les dangers s'applique à tous les types de produits, notamment les produits de consommation, les produits utilisés en milieu de travail, les pesticides et les produits transportés. Santé Canada a un rôle à jouer dans tous ces programmes, et c'est pourquoi il est avantageux que le SIMDUT relève de Santé Canada.

Le sénateur Callbeck : En d'autres mots, vous voyez les avantages, mais vous êtes aussi consciente des difficultés que cela présentera d'avoir à traiter avec différents gouvernements et deux ministres.

Mme Coshan : Oui.

[Français]

Le sénateur Bellemare : Je voulais vous entendre un peu sur la question fédéral-provincial parce que les matières dangereuses, la santé et la sécurité au travail, cela a une incidence très forte au niveau provincial. Il y a des champs de compétence provinciale qui sont là. Je voulais que vous développiez un petit peu pour nous dire comment le comité consultatif peut aider à l'amélioration de la communication avec les provinces, et s'il le peut, oui ou non.

Et j'aimerais vous entendre un peu sur votre façon de travailler, parce que c'est un aspect intéressant d'une collaboration sur une thématique qui touche tout le monde, dans un monde globale; et j'aimerais vous entendre un peu concernant le fonctionnement de votre comité dans ses relations avec les provinces.

[Traduction]

Mme Coshan : J'aimerais ajouter un élément. Les questions touchant à la santé et à la sécurité au travail relèvent généralement des provinces et des territoires. Dans chacun d'eux, nous désignons des inspecteurs fédéraux. Nous sommes aussi responsables de l'application des lois fédérales dans les provinces, ce qui nous permet de voir concrètement les effets de la Loi sur les produits dangereux et de la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses du point de vue des exigences fédérales et de nos propres exigences à l'égard des employeurs. Il ne faut pas oublier que la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses garantit tant la communication des renseignements sur les dangers dans le cadre du SIMDUT que la protection des renseignements commerciaux confidentiels. La Loi sur les produits dangereux précise les exigences liées à la communication des renseignements sur les produits dangereux, ainsi que les exigences liées aux fiches techniques et à la classification sur l'étiquette. Lorsqu'on parle des avantages du nouveau comité consultatif dans le cadre de cette loi, il ne faut pas oublier qu'il s'agit seulement d'une petite partie d'un grand processus, car il s'agit aussi des communications touchant la Loi sur les produits dangereux, qui dépassent le mandat du comité.

L'avantage de la représentation se situe plus, à mon avis, du côté des groupes que nous représentons : les fournisseurs, les employeurs et les représentants de l'organisme responsable de la SST. Je ne suis pas certaine de répondre à votre question.

[Français]

Le sénateur Bellemare : Dans votre comité consultatif, est-ce que ce sont des représentants provinciaux qui y siègent, des représentants des différentes commissions de santé et sécurité au travail ou des fonctionnaires d'autres ministères ou de bureaux fédéraux régionaux?

[Traduction]

Mme Coshan : La composition du conseil actuel et du futur comité consultatif ministériel est prévue dans la loi et comprend des représentants des travailleurs, des fournisseurs, des employeurs et des organismes de réglementation provinciaux en matière de SST. C'est donc précisé clairement dans la loi. On indique même le nombre de membres de chaque groupe.

Le président : Pourriez-vous nous dire que sont les organismes provinciaux de SST, aux fins du compte rendu? Que veut dire SST?

Mme Coshan : Cela veut dire santé et sécurité au travail.

Le président : D'accord. SST, cela sonne bien.

Mme Coshan : Oui.

Le sénateur Chaput : J'ai cru vous entendre dire que vous appliquiez la loi dans les provinces. Que voulez-vous dire par là? Parlez-vous des inspections? Des normes? Est-ce que cela se fait sur une base régulière? Qu'entendez-vous par là?

Mme Coshan : Nous portons deux chapeaux. Lorsque nous agissons en tant qu'inspecteurs fédéraux pour faire appliquer la Loi sur les produits dangereux et ses règlements, nous inspectons les produits qui se trouvent sur les lieux de travail pour nous assurer qu'ils sont bien classifiés et que les bons pictogrammes apparaissent sur les étiquettes. Nous vérifions si les renseignements nécessaires ont bien été divulgués : ingrédients, équipement de protection individuelle, exigences de ventilation, premiers soins. Nous vérifions la classification et la fiche technique fournie par le fournisseur à l'employeur. Si le fournisseur ne respecte pas les normes, nous avons recours à diverses mesures pour faire respecter la loi.

Le sénateur Chaput : À quelle fréquence le faites-vous?

Mme Coshan : Cela varie d'une province à l'autre. C'est plus fréquent dans les provinces manufacturières que dans les petites provinces, où on recourt davantage à des distributeurs qu'à des importateurs ou des fabricants primaires. Par exemple, il y a beaucoup plus d'inspections et de mesures d'application de la loi en Ontario qu'à l'Île-du-Prince- Édouard.

Le sénateur Chaput : Arrive-t-il parfois que les autorités provinciales ne soient pas d'accord avec l'étiquetage que vous exigez; si c'est le cas, que se passe-t-il alors?

Mme Coshan : Si l'inspecteur n'est pas d'accord avec le fournisseur, nous soumettons la question au Bureau national du Système d'information sur les matières dangereuses utilisées au travail, SIMDUT pour qu'elle l'examine, et sa décision sera exécutoire.

Le sénateur Chaput : Le fédéral fait respecter les normes applicables, et le fournisseur doit s'y conformer avant de mettre un produit sur le marché. Est-ce bien cela?

Mme Coshan : Il ne s'agit pas vraiment d'une condition préalable à la vente. Nous inspectons les produits d'un groupe représentatif de fournisseurs dont les produits sont déjà sur le marché, simplement pour nous assurer qu'ils ont la bonne classification. Cela ne relève pas du mandat du Conseil de contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses, mais c'est la coordination que nous assurons par l'entremise du Bureau national du SIMDUT.

Le sénateur Chaput : Si cela ne relève pas de votre mandat, qui s'occupe de veiller à ce qu'un produit ne se retrouve pas sur le marché s'il comporte un danger? Qui s'en occupe si cela ne fait pas partie de votre mandat?

Mme Coshan : Nous nous occupons aussi de cela; je tiens simplement à souligner que nous portons divers chapeaux. Je voulais attirer votre attention sur le fait que le projet de loi C-45 ne porte que sur la Loi sur le contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses, et que les activités d'application de la loi dont je vous parle relèvent de la Loi sur les produits dangereux.

Le président : Madame Coshan, vous avez mentionné travailler depuis longtemps au sein de cette organisation fédérale en santé et sécurité au travail. Depuis combien d'années siégez-vous au conseil des gouverneurs, et depuis combien d'années en êtes-vous la présidente?

Mme Coshan : Je suis entrée en poste en 2003, je crois, et je suis présidente depuis trois ans, je crois, mais je vous en prie, ne me citez pas.

Le président : Je vous promets de ne pas le faire.

Pourriez-vous nous donner des détails sur les liens entre le conseil des gouverneurs et le CCRMD? Le projet de loi que nous examinons parle d'abolir les deux, et vous nous avez donné le point de vue du conseil des gouverneurs seulement. Quels sont les liens de gouvernance entre le conseil des gouverneurs et le CCRMD?

Mme Coshan : Le CCRMD est un organisme autonome et très performant. Son personnel prépare des rapports pour nous, nous soumet des mesures ou des stratégies qu'il a élaborées pour que nous lui donnions notre avis. Nous avons d'excellents liens. Nous organisons des conférences téléphoniques à différents moments de l'année, et nous nous réunissions en personne habituellement une fois par année. Nous discutons beaucoup. Je ne pense pas que cela changera. J'ai examiné le projet de loi, et il prévoit assurément un mécanisme qui nous permettra de fonctionner de la même manière et sans doute de fournir des conseils sur une plus grande variété de sujets.

Le président : Je comprends vos commentaires à propos du fait que le conseil sera en mesure de conseiller le ministre sur une variété de sujets, comme il se doit. Ce qui me préoccupe, ce sont les autres activités du CCRMD auxquelles vous ne participez pas. Parlez-vous aujourd'hui, au nom du conseil et du CCRMD ou parlez-vous seulement au nom du conseil?

Mme Coshan : Je parle seulement au nom du conseil des gouverneurs.

Le président : Quelqu'un a-t-il des questions à poser à ce sujet?

Madame Coshan, nous avons terminé la période de questions. Je vous remercie sincèrement d'avoir accepté de comparaître par vidéoconférence à si bref préavis. Votre position est claire. Vous nous avez aidés à comprendre le rôle du Conseil de contrôle des renseignements relatifs aux matières dangereuses et du conseil des gouverneurs. Nous tenterons maintenant de nous acquitter au mieux de notre tâche en suivant vos bons conseils.

Mme Coshan : Merci de nous avoir invités à comparaître.

Le président : Cela met fin aux témoignages pour aujourd'hui, et nous terminons à l'heure pile. Je vous revois à notre prochaine réunion, mardi matin.

(La séance est levée.)


Haut de page