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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule 4 - Témoignages du 22 novembre 2011


OTTAWA, le mardi 22 novembre 2011

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd'hui, à 9 h 31, pour étudier le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la sécurité ferroviaire et la Loi sur les transports au Canada en conséquence.

Le sénateur Dennis Dawson (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Honorables sénateurs, je déclare cette séance du Comité sénatorial permanent des transports et des communications ouverte.

[Traduction]

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications continue son étude du projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la sécurité ferroviaire et la Loi sur les transports au Canada en conséquence. Les témoins qui comparaissent devant nous aujourd'hui sont Cliff MacKay, président-directeur général de l'Association des chemins de fer du Canada; John Orr, vice-président, chef, Sécurité et développement durable, du Canadien National; et Glen Wilson, vice-président, Sécurité, environnement et affaires réglementaires, du Canadien Pacifique.

[Français]

Soyez les bienvenus. Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir discuter avec nous de cet important projet de loi qui vise à améliorer la sécurité ferroviaire au Canada.

[Traduction]

Nous allons commencer avec vos exposés et ensuite passer aux questions des membres du comité.

[Français]

Monsieur MacKay, la parole est à vous.

[Traduction]

Cliff MacKay, président-directeur général, Association des chemins de fer du Canada : Avant de débuter, je demanderais votre indulgence. J'ai des problèmes avec mes jambes, alors je n'ai pas pu me lever pour dire bonjour aux sénateurs lorsqu'ils entraient. J'espère que vous comprendrez. Merci.

Monsieur le président et honorables membres du comité, je me réjouis de l'occasion qui m'est offerte de présenter le point de vue du secteur ferroviaire sur le projet de loi S-4, Loi modifiant la Loi sur la sécurité ferroviaire et la Loi sur les transports au Canada en conséquence. L'Association des chemins de fer du Canada représente plus de 50 chemins de fer marchandises, touristiques, de banlieue et intervilles au Canada. Cela représente environ 99 p. 100 des activités ferroviaires au pays.

Nous contribuons environ 12 milliards de dollars annuellement au PIB. Nous employons environ 35 000 personnes directement et 50 000 indirectement par l'entremise des fournisseurs et d'autres intervenants.

Le président a présenté mes collègues. Je ferai l'exposé et je dois présenter des excuses au nom de mes collègues des chemins de fer sur courte distance. Malheureusement, ils n'ont pas été en mesure de nous accompagner aujourd'hui, alors je vais essayer de répondre à vos questions sur ces chemins de fer. Deuxièmement, M. Tessier, de VIA Rail Canada, devait être ici ce matin. Il a attrapé une mauvaise grippe et a décidé qu'il était mieux pour lui de ne pas venir. Je pense que nous sommes tous d'accord avec cette décision.

Le but du projet de loi S-4 est d'améliorer la sécurité ferroviaire. D'entrée de jeu, je dois dire que la sécurité est la plus grande priorité de notre secteur et l'a toujours été. La sécurité n'est pas le fruit du hasard puisque les chemins de fer visent toujours à avoir le système le plus sécuritaire possible. Le secteur a été impressionné par le travail exhaustif réalisé par le Comité consultatif sur l'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire, qui a été constitué en décembre 2006 et a fait son travail pendant 2007. Le leadership dont a fait preuve ce comité, présidé par l'honorable Doug Lewis, a été exceptionnel. Le rapport Renforcer les liens : un engagement partagé pour la sécurité ferroviaire, qui contient 56 recommandations, est l'un des meilleurs que je n'aie jamais vu. Je dois vous dire, honorables sénateurs, que je suis à Ottawa depuis un certain temps. C'était un rapport très bien fait.

Depuis, les chemins de fer ont travaillé en étroite collaboration avec Transports Canada, les syndicats et d'autres parties intéressées pour élaborer les plans d'action et mettre en œuvre les recommandations découlant de ce rapport.

Je dirai d'abord que le secteur ferroviaire soutient ce projet de loi, en principe.

Cela étant dit, j'ajouterai que nous avons préparé un mémoire détaillé qui pourra vous en dire plus sur la sécurité que mon présent exposé. D'après nous, le rapport et le travail qui a été fait jusqu'à maintenant ont été excellents. Cependant, nous pouvons en faire plus pour améliorer la sécurité grâce aux amendements au projet de loi que vous avez devant vous. Voilà ce dont je vais parler maintenant.

Nous pensons que le Sénat canadien et le comité sont particulièrement bien placés pour améliorer ce projet de loi afin qu'il ait une incidence positive sur la sécurité des Canadiens, dans leur vie quotidienne et dans leurs interactions avec les activités ferroviaires. Le projet de loi traite principalement de la capacité de surveillance du gouvernement. Il augmente les pouvoirs et clarifie l'autorité et les responsabilités du ministre relativement aux questions ferroviaires. Bref, il traite de questions administratives liées à la sécurité ferroviaire. Il contient très peu d'améliorations véritablement tangibles qui contribueraient à rehausser la sécurité des Canadiens au quotidien. Le projet de loi sert surtout à renforcer les pouvoirs du ministre ou prévoit des exigences précises — pour certains employés ou les autorités du secteur ferroviaire — liées à un certain type de travail, comme les dispositions ayant trait aux responsabilités de la direction.

Nous sommes d'avis que vous pouvez corriger cette lacune. Nous croyons que les rédacteurs du projet de loi seraient d'accord, en particulier les rédacteurs du rapport d'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire, qui ont aussi recommandé ce que nous nous apprêtons à vous recommander.

Je suis fier de dire que la sécurité ferroviaire au Canada a continué de s'améliorer de 2006 à 2010. Les améliorations ont été particulièrement remarquables dans la catégorie des accidents graves, comme les déraillements en voie principale et les accidents aux passages à niveau. Je reviendrai sur les accidents aux passages à niveau dans un instant. Ces résultats sont impressionnants quand on pense qu'ils ont été atteints en dépit de l'augmentation rapide du trafic marchandise et voyageur. L'exposition à des sources potentielles d'accident découlant de l'étalement urbain et de la densification de la circulation routière était aussi en croissance.

Le voisinage croissant des activités ferroviaires et des activités quotidiennes dans diverses collectivités partout au pays est un facteur de risque qu'il faut gérer si on veut améliorer la sécurité ferroviaire et la sécurité des Canadiens. Nous pensons qu'il faut renforcer le projet de loi S-4 dans ce domaine.

Le voisinage concerne toutes les activités municipales, industrielles ou autres qui se font à proximité d'un chemin de fer. Si cela n'est pas bien géré, il pourrait y avoir des risques graves pour les Canadiens et les chemins de fer.

Au cœur des enjeux relatifs au voisinage des propriétés ferroviaires et des aménagements municipaux se trouve la vaste incohérence qui existe dans les divers territoires et provinces du Canada quant aux règlements visant la planification de l'affectation des terres. Selon la recommandation 34 du Comité consultatif sur l'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire, la LSF, la loi devrait être modifiée pour exiger des promoteurs et des municipalités qu'ils amorcent un processus de consultation avec les compagnies de chemin de fer avant de prendre une décision quant à des aménagements qui peuvent compromettre la sécurité ferroviaire. Malheureusement, le projet de loi S-4 reste complètement muet sur cet enjeu important.

Un des grands objectifs de la LSF, comme l'énonce l'alinéa 3c), est de reconnaître la responsabilité des compagnies de chemin de fer en ce qui a trait à la sécurité de leurs activités. Nous croyons que le meilleur moyen de permettre aux chemins de fer d'assumer pleinement cette responsabilité en ce qui concerne les nouvelles activités sur les terrains avoisinant leurs propriétés est de faire en sorte qu'ils participent au processus de consultation qui mène à toute activité d'aménagement.

Pour nous, la façon la plus efficace d'améliorer la sécurité ferroviaire dans ce domaine est de donner au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre des règlements pour que les chemins de fer soient avisés de tout projet local d'adoption ou de modification de plan de lotissement ou de zonage relativement à un terrain situé à proximité d'un chemin de fer.

Pour ce règlement, qui serait adopté une fois que le pouvoir de réglementation lui aurait été accordé, le ministre pourrait s'inspirer de ce qui a été fait en Ontario, où la distance qui déclenche le processus de notification est établie à 300 mètres. Du point de vue de la sécurité, un rayon de 300 mètres semble raisonnable.

Vous savez peut-être que de telles dispositions existent dans la Loi sur l'aéronautique au sujet des activités sur un terrain à proximité d'un aéroport, et nous croyons qu'une approche semblable pour le secteur ferroviaire améliorerait beaucoup la sécurité.

Monsieur le président, honorables sénateurs, cette mesure simple aurait un effet réducteur important sur les accidents et les incidents mettant en cause les chemins de fer et le grand public. Elle apporterait une amélioration tangible qui pourrait sauver des vies au Canada.

Dans sa recommandation 35, le comité consultatif propose aussi de limiter l'ouverture de nouveaux passages à niveau dans la mesure du possible — et le mot « possible » est très important. Le projet de loi S-4 ne dit rien sur cette question importante. Il est assez incroyable de penser que dans le processus réglementaire actuel, la sécurité n'est pas un élément à considérer dans la décision d'ouvrir un nouveau passage à niveau.

En vertu de la loi en vigueur, le seul critère dont l'Office des transports du Canada doit tenir compte au moment d'autoriser l'ouverture d'un passage à niveau est la jouissance de la terre par son propriétaire dans le cas d'un passage à niveau privé. Il n'y a rien qui touche à une amélioration de la sécurité. C'est pour cette raison que nous demandons au comité d'étudier la possibilité de modifier la Loi sur les transports au Canada pour que la construction de passages ne soit autorisée que s'il n'existe aucune solution de rechange raisonnable et que le ministre confirme que le passage ne présente pas de risques pour la sécurité des utilisateurs ou des activités ferroviaires.

Nous croyons que ces deux dispositions concernant les passages à niveau nous aideraient grandement à réduire les décès aux passages à niveau. Nous avons réussi à réduire ces décès de plus de 50 p. 100 au cours des 10 dernières années, mais il reste encore beaucoup de travail à faire. Jusqu'à 50 personnes meurent chaque année à des passages à niveau. C'est beaucoup trop.

Compte tenu du fait que les questions relatives au voisinage et aux passages à niveau mettent en relation les chemins de fer et le public, les chemins de fer soutiennent que le projet de loi S-4 n'arrivera pas à améliorer la sécurité ferroviaire à moins qu'on y ajoute les dispositions que nous avons formulées pour régler ces questions. J'espère que vous conviendrez que la sécurité ferroviaire ne pourra qu'être renforcée par l'inclusion de telles dispositions.

En terminant, je dirai que le projet de loi S-4 va au-delà de la recommandation 24 du comité consultatif en proposant la prise de règlements qui obligeraient les chemins de fer à mettre en œuvre — en réponse à une analyse de gestion de risque, à laquelle nous souscrivons totalement — une mesure corrective suffisante pour maintenir — et ce sont là les mots clés — « le niveau de sécurité le plus élevé ». Voilà la définition proposée pour la sécurité dans le projet de loi.

Bien que nous soyons totalement d'accord qu'il faille une bonne définition de la sécurité dans la loi, nous croyons que cette définition va trop loin et ne pourra être mise en pratique. On pourrait facilement se retrouver dans cette situation si on interprétait la phrase littéralement lors d'une poursuite.

Le plus haut niveau de sécurité ne peut être obtenu que d'une seule façon : arrêter les trains. Voilà comment on arrive au niveau de sécurité le plus élevé : on arrête les trains. Pour toutes sortes de raisons que je ne vais pas prendre le temps d'expliquer aujourd'hui mais qui sont assez évidentes, et qui ont trait à l'économie canadienne et à toutes sortes d'autres facteurs, on ne peut pas empêcher les trains de rouler. Nous avons besoin des trains, et les activités ferroviaires doivent avoir lieu à l'intérieur des meilleures limites de sécurité que l'on puisse imaginer.

Le seuil proposé crée une norme qui pourrait ne pas être atteignable en pratique, et cela pose un problème. En bref, elle pourrait limiter la capacité des chemins de fer de poursuivre leurs activités, un résultat qui pourrait avoir des conséquences graves non seulement pour nos membres, mais aussi pour l'économie canadienne.

Nous avons soulevé ce point lors de l'étude du projet de loi C-33. Le projet de loi S-4 essaie de le régler en incluant une définition du « plus haut niveau de sécurité », une définition qui aurait pu constituer une solution légitime s'il n'y avait pas eu de normes en la matière; or, il y en a bel et bien une. Elle existe dans le secteur aéronautique, ailleurs dans l'industrie ferroviaire, et dans d'autres pays comme les États-Unis et l'Australie, de même qu'au Canada dans la Loi sur les transports au Canada.

Nous avons une bonne norme. On se demande pourquoi avec cette disposition on essaie de réinventer la roue, alors que cette roue semble raisonnablement bien tourner actuellement.

La question du niveau approprié de sécurité a déjà fait l'objet de discussions antérieures, notamment lors de l'examen de la politique nationale en matière de transport, l'article 5 de la LTC. On avait alors fait preuve de sagesse et modifié le texte législatif pour y inclure les normes de sécurité « les plus élevées possible dans la pratique », le mot « pratique » pouvant être limité par certaines normes, pratiques et méthodes d'activités dans le cadre du système de gestion de la sécurité et d'autres systèmes, qui peuvent être mis en place par voie réglementaire ou autres. Les chemins de fer songent à une norme semblable pour la LSF, et nous recommandons que le mot « pratique » soit inscrit dans ce projet de loi, de même qu'une définition claire et applicable de la sécurité pour l'industrie.

Nous soulevons d'autres points moins importants dans le mémoire que nous vous avons remis. J'espère qu'il vous donnera à vous ainsi qu'à votre personnel un signe clair que la sécurité est une question importante pour les chemins de fer. Nous la prenons très au sérieux. Il y a d'autres petites améliorations qui pourraient être apportées, mais nous voulions attirer votre attention sur ces trois enjeux principaux. Je vais m'arrêter ici et remercier le président et le comité de nous avoir écoutés aujourd'hui et je vous redonne la parole, monsieur le président.

Le président : Merci, monsieur MacKay.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : D'abord, merci beaucoup d'être ici ce matin. J'ai deux questions de précision sur les documents reçus. J'aimerais ensuite engager une discussion avec vous sur le problème de l'aménagement. Vous proposez d'intégrer dans le projet de loi la problématique de l'aménagement pour un bon voisinage.

Vous parlez d'amélioration au niveau des accidents. Quelle est la cause principale de cette réduction des accidents cette année par rapport aux années précédentes?

[Traduction]

M. MacKay : Il y avait un programme, qui existe encore en partie aujourd'hui, qui s'appelait Opération Gareautrain, qui vise en particulier à sensibiliser les jeunes à la sécurité autour des chemins de fer, que ce soit près des passages à niveau, mais aussi en ce qui a trait aux intrusions illicites, qui peuvent être très dangereuses comme nous l'avons malheureusement constaté il n'y a pas si longtemps à Montréal, où trois jeunes sont morts. Ce genre d'événement tragique exige de nous que nous en fassions plus. Ce programme existe encore aujourd'hui.

Le sénateur Boisvenu : Dans les écoles?

M. MacKay : Il est présent dans les écoles et ailleurs, mais il vise surtout les jeunes.

De plus, nous avons travaillé avec le gouvernement sur un programme quinquennal qui vient de se terminer, et qui s'ajoutait à celui-là. Par exemple, par des affiches et d'autres moyens, nous avons amélioré grandement la sensibilisation. Ces deux programmes ont mené à une réduction notable des décès et des blessures aux passages à niveau, mais malheureusement moins pour les intrusions illicites. Cependant, il reste encore beaucoup à faire. Si vous examinez nos statistiques en détail, vous verrez qu'il reste un nombre important de blessures graves et de décès dans ces domaines.

Franchement, nous devons faire mieux et tout faire pour réduire le nombre de passages à niveau et améliorer la sécurité de ceux qui sont nécessaires. Bien sûr, nous avons besoin de passages à niveau. On ne peut pas avoir de viaducs partout, ils coûtent beaucoup trop cher. Nous devons agir et nous croyons qu'il est possible d'utiliser ce projet de loi pour y arriver. Il ne réglera pas tout, mais il nous amènera dans la bonne direction.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Lorsque vous parlez de problèmes d'intrusion, est-ce à ça que vous faites référence?

[Traduction]

M. MacKay : Oui.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Ce qui m'interpelle le plus concerne les problèmes d'aménagement et de bon voisinage. Vous dites que lorsqu'un chemin de fer veut faire des aménagements, il doit demander des autorisations. Tandis que si vous êtes dans une municipalité, par exemple, la municipalité n'a pas à demander des autorisations ou à consulter le gouvernement fédéral pour faire des aménagements. J'ai travaillé pendant près de 15 ans au ministère de l'Environnement du Québec. C'était un problème récurrent de voir que lorsqu'une entreprise s'établissait et qu'il y avait des projets domiciliaires qui se développaient tout autour, il y avait des problèmes de poussière, de bruit et qu'il fallait presque délocaliser l'entreprise à cause des pressions que les citoyens faisaient pour assurer leur qualité de vie.

Vous travaillez, dans votre cas, avec les trois paliers gouvernementaux, c'est-à-dire au niveau fédéral, au niveau provincial et même au niveau municipal en termes d'aménagement du territoire. Vous dites que le projet de loi devrait tenir compte de cette problématique.

Comment pourrait-on intégrer dans un projet de loi fédéral des responsabilités qui sont de compétence municipale et provinciale?

[Traduction]

M. MacKay : C'est un vrai problème. Nous songeons à une exigence de nous aviser. Il ne s'agit pas de forcer une municipalité ou une province à faire quelque chose qu'elle ne veut pas faire sur son territoire. Ça ressemble beaucoup à ce qui existe présentement dans la Loi sur l'aéronautique, si une municipalité pense à construire un gratte-ciel dans la trajectoire de vol d'un aéroport. En vertu de la loi fédérale, la municipalité doit aviser l'aéroport et d'autres intervenants de cette demande qu'elle examine et leur demander si la construction de cet édifice pose des problèmes sécuritaires. S'il y en a, c'est à l'aéroport ou à la ligne aérienne de le dire à la municipalité pour qu'elle ait ces renseignements afin de prendre la décision appropriée. Le processus pourrait être semblable pour les activités ferroviaires. Nous ne voulons pas empiéter sur les responsabilités provinciales. Vraiment pas. Nous travaillons en étroite collaboration avec la Fédération canadienne des municipalités et d'autres organisations. La Fédération canadienne des municipalités nous a fait part de cette préoccupation, et nous croyons qu'il serait mieux d'y avoir une seule approche pour l'ensemble du pays plutôt que 10, 12 ou 13. Présentement, il n'y a qu'en Ontario que de telles dispositions existent. Le Québec examine cette question assez sérieusement pour l'instant; nous les encourageons, ainsi que les autres provinces, à aller de l'avant. Malheureusement, comme vous le savez sûrement, lorsque l'on essaie de faire bouger neuf ou dix provinces dans la même direction en même temps, cela prend beaucoup de temps. Nous sommes impatients, évidemment, de faire tout ce qui nous est possible aussi rapidement que possible pour améliorer la sécurité.

Glen Wilson, vice-président, Sécurité, environnement et affaires réglementaires, Canadien Pacifique : Si vous examinez le rapport du Comité consultatif sur l'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire, il contient une description du voyage du comité de Calgary à Edmonton et d'un incident survenu alors que des enfants traversaient le chemin de fer. Je les accompagnais cette journée-là; c'était sur notre réseau. Tout au long de la journée, en traversant les villes d'Airdrie et d'Innisfail et d'autres le long de la route, l'honorable Doug Lewis a noté à plusieurs reprises qu'il ne s'agissait pas de lotissements résidentiels datant de la guerre, mais plutôt de nouveaux. Les écoles sont bâties d'un côté et les terrains de soccer et de baseball de l'autre, et les enfants doivent traverser le chemin de fer. Il vient d'y avoir un accident à l'ouest de Montréal où il y a eu un glissement de terrain à cause de l'utilisation des terrains près d'une pente. On avait mis de l'asphalte en haut de la pente juste au-dessus du chemin de fer. Un déraillement de 6,5 millions de dollars s'est produit à cause de cela, et certains de nos employés ont été blessés. Trente-cinq wagons ont déraillé, mais heureusement, il n'y a pas eu de problèmes en matière de sécurité publique. C'est surtout à cause de la chance plutôt que de la saine gestion. De tels accidents se produisent depuis un certain nombre d'années. Le comité consultatif l'avait noté, et ils continuent de se produire. Avec la croissance de la population et l'utilisation encore plus dense des terrains, cette utilisation des terrains avoisinant nos activités devient de plus en plus une préoccupation pour nous. Nous ne voulons pas avoir à confronter ces gens, à la suite de plaintes de bruits ou de vibrations. Comme M. McKay l'a mentionné, nous devrions utiliser le raisonnement de l'industrie aéronautique et d'ailleurs où tous acceptent qu'on ne peut bâtir un gratte-ciel au bout d'une piste de décollage. Nous avons certaines gares de triage où il faut contrôler le déplacement des oiseaux parce qu'elles sont situées au bout d'une piste d'atterrissage. Nous l'acceptons, et nous aimerions qu'une approche semblable soit adoptée pour l'industrie ferroviaire.

Le sénateur Eaton : Lorsque vous parlez de l'utilisation des terrains et de structures de béton près d'un chemin de fer qui cause un déraillement, est-ce que cela ne serait pas une responsabilité municipale?

M. MacKay : La réponse est oui, mais il manque un lien. La municipalité travaille d'un côté, les chemins de fer de l'autre, et il n'y a pas de lien.

Le sénateur Eaton : Est-ce une responsabilité du gouvernement fédéral?

M. MacKay : Non, nous ne croyons pas que cela devrait l'être. C'est la responsabilité des municipalités de nous aviser, et c'est pourquoi nous discutons avec les provinces. Cependant, dans ce cas, nous croyons qu'il y a une responsabilité prépondérante en matière de sécurité publique, et c'est pourquoi nous proposons cette mesure dans ce projet de loi.

Le sénateur Eaton : Combien d'amendements ont été proposés par le Comité permanent des communes? Il y avait un autre groupe spécial rassemblé par le ministre, et il y a eu environ 70 amendements au projet de loi.

M. MacKay : Oui, 56 du groupe Lewis. Puis le Comité permanent des transports et des communications de la Chambre des communes a également produit un rapport, suivi d'un autre. Je pense que tous les amendements ont été examinés, à l'exception de ceux dont nous discutons aujourd'hui.

Le sénateur Eaton : D'après vous, pourquoi n'ont-ils pas inclus ceux dont vous parlez aujourd'hui?

M. MacKay : Je ne peux qu'émettre des hypothèses. En ce qui concerne le voisinage, c'est peut-être à cause de l'enjeu que vous soulevez concernant les responsabilités des provinces ou la participation du gouvernement fédéral.

Comme vous le savez, nous croyons que la sécurité publique est plus importante que ces questions. D'après moi, ce n'est certainement pas un empiètement sur les responsabilités provinciales. Nous demandons seulement à être avisés.

Le sénateur Eaton : C'est une mauvaise semaine pour moi lorsque Toronto interdit les ballons dans les cours d'école. Nous sommes devenus allergiques au risque.

M. MacKay : Dans ce cas, vous pouvez tuer des gens.

Le sénateur Eaton : Oui, mais on tue des gens sur les routes. Je ne veux pas minimiser l'horreur des conducteurs de locomotive qui tuent un enfant ou une autre personne dans une auto. Par contre, il est vrai que lorsqu'il y a des feux clignotants et des barrières qui s'abaissent, une fois ou deux par année, une auto se retrouve prise entre les barrières, et quelqu'un est tué.

M. MacKay : Puis-je répondre à cela? Je vais demander à mes collègues de répondre également. Si c'était le problème, vous verriez des gens très heureux assis ici. Ce n'est pas ainsi que les gens sont tués. Les gens sont tués aux passages à niveau où il n'y a ni feux, ni rien.

Le sénateur Eaton : J'essaie simplement de démontrer que, quoi que l'on fasse, il y aura toujours quelqu'un qui ne voudra pas prendre le tunnel, qui ne voudra pas passer par le viaduc, et qui va simplement traverser.

M. MacKay : Vous avez raison. Nous ne pouvons pas totalement réglementer la nature humaine; elle est ce qu'elle est. Cependant, nous pouvons faire le meilleur travail possible selon le cadre législatif et de fonctionnement que nous avons pour essayer de réduire les risques. Voilà ce qu'est la gestion de la sécurité. On essaie de réduire le risque.

Le sénateur Eaton : Je vais vous demander d'émettre des hypothèses; croyez-vous que c'est parce que le gouvernement fédéral ne voulait pas franchir les limites municipales et provinciales?

M. MacKay : C'est ce que je pense. Aucun ministre ne m'a dit ça. Par contre, lorsque j'examine la question et le raisonnement, je me dis qu'il doit y avoir une explication logique. Quelle pourrait-elle être, autre que de préférer que ce soit les provinces qui s'en occupent plutôt que le gouvernement fédéral?

Le sénateur Eaton : Je vais poser une dernière question. Je suis convaincue que d'autres voudront poursuivre dans la même veine. La phrase « niveau de sécurité le plus élevé » vous fait tiquer.

M. MacKay : Oui.

Le Sénateur Eaton : J'en comprends que le chemin de fer doit faire de son mieux pour veiller à la sécurité du matériel et des rails, ainsi qu'à la formation du personnel. On vous demande de faire de votre mieux. Cela ne signifie pas qu'il faut laisser les trains dans les gares.

M. Wilson : Je dirais que ce que vous décrivez, c'est « le niveau de sécurité le plus élevé possible dans la pratique ». Le libellé du projet de loi risque d'être interprété par des avocats et par d'autres de différentes façons. À l'extrême, M. MacKay décrivait un cas où « le niveau de sécurité le plus élevé » signifierait « laisser le train en gare ».

M. MacKay : À tout le moins, pas dans ce cas particulier.

M. Wilson : En inspectant cette salle, je pourrais dire qu'elle n'a pas été construite selon le niveau de sécurité le plus élevé. Vous pourriez avoir des portes doubles, des allées plus larges, et cetera.

Le sénateur Eaton : Je pense qu'on doit reconnaître que nous ne sommes pas d'accord en principe.

M. Wilson : Si l'expression signifie ce que vous dites, alors notre préoccupation n'est pas fondée.

M. MacKay : Ce qui nous préoccupe, ce n'est pas l'interprétation que feront de cette définition les chemins de fer, les organismes de réglementation, les ministres et les personnes éclairées. Ce qui nous préoccupe, c'est que nous sommes souvent parties à des litiges auxquels sont mêlés des juges, des avocats et d'autres qui ne connaissent rien de notre secteur. Selon leur logique, on peut prétendre qu'il ne fallait pas exploiter tel chemin de fer à tel endroit, faute d'avoir le niveau de sécurité le plus élevé.

Le sénateur Eaton : À ce moment-là, on ne peut pas l'exploiter.

M. MacKay : C'est exactement ce qu'ils pourraient prétendre.

Le sénateur Eaton : Nous ne sommes pas du même avis. Je pense que c'est tiré par les cheveux.

M. MacKay : Peut-être.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J'aimerais terminer mon intervention précédente au sujet de la nuisance et de la cohabitation.

Existe-t-il des cas où une compagnie de chemin de fer a dû déplacer un tronçon pour répondre aux pressions du milieu? Y a-t-il des exemples au Canada où on a dû déplacer des tronçons de chemin de fer parce que la situation devenait intenable?

[Traduction]

John Orr, vice-président, chef, Sécurité et développement durable, Canadien National : Le principe de proximité est axé sur la sécurité publique et sur la possibilité de prendre de bonnes décisions de manière à éviter des conséquences inattendues.

On fait référence précisément à des demandes de déplacement d'infrastructure. C'est le cas pour l'une de nos propriétés aux États-Unis. Mais plus important encore, quand on considère les plaintes et les questions relatives à la proximité, on constate qu'il y a de vraies discussions et délibérations en cours. À Vancouver, par exemple, il y a eu une atténuation des effets. Des changements acceptables ont été faits, ainsi que l'instauration d'un nouveau régime de plaintes ou de discussions sur la sécurité. Nous le voyons en divers endroits. C'est une question bien réelle.

Vous avez posé la question : comment notre secteur s'est-il débrouillé au cours des cinq dernières années pour apporter des améliorations? M. MacKay a donné une bonne réponse, et j'ajouterais que la plupart des améliorations ont été obtenues grâce à l'inclusion des intervenants, des syndicats, des entités locales, des administrations municipales, des régions, des provinces et du fédéral. Il faut adopter une démarche holistique en considérant l'utilisation prévue, d'une part, et d'autre part, ce que les experts diraient dans leur examen, ce qui pourrait se produire, avant d'évaluer dans quelle mesure on peut atténuer les risques.

La réponse est à deux volets. Il y a des problèmes réels et des exemples qui occupent beaucoup nos tribunaux. Nos collectivités doivent composer avec cela. Il y a aussi les influences passées, et plus important encore, la possibilité de s'adapter à la croissance des collectivités. Ces discussions de base doivent avoir lieu précisément là où convergent la croissance commerciale ou industrielle et la croissance de la population. C'est un investissement important du point de vue du chemin de fer. Sa présence durera longtemps et doit être intégrée à l'aménagement du territoire.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Monsieur MacKay, vous avez indiqué plus tôt que aviez tenu des discussions avec, entre autres, la Fédération des municipalités et de grandes associations. Existe-t-il une table de concertation permanente pour discuter de ces sujets de façon continue, ou le faites-vous seulement lorsque survient des événements?

[Traduction]

M. MacKay : Non. Nous avons un protocole d'entente avec la Fédération canadienne des municipalités. Ce protocole existe déjà depuis quelques années. Il exige de nous diverses choses, et notamment que nous préparions des lignes directrices, des activités — pour améliorer les façons de faire, comme nous en parlons aujourd'hui. Cela peut être communiqué aux municipalités et à nos membres. Par exemple, quelles seraient de bonnes lignes directrices pour les avis à donner? Nous pensons que ce qui existe en Ontario, soit la limite de 300 mètres est raisonnable. Il y en a d'autres auxquelles il faut réfléchir. Ainsi, tout ce qui se passe à moins de 300 mètres du chemin de fer n'est pas nécessairement dangereux. Il faut des définitions plus claires.

Nous traitons avec la fédération de toutes sortes de questions de cette nature. Nous parlons, par exemple, de questions relatives aux avis et aux vibrations, de manière à faire un meilleur travail. Comme nous, les municipalités tiennent à la sécurité, tant pour les passages à niveau que pour les intrusions. Nous avons une très bonne relation de travail avec les municipalités. Nous avons un désaccord sur une question. Nous estimons que le processus de notification serait plus efficace s'il relevait d'une loi fédérale. Les municipalités pensent que cela devrait relever de lois provinciales que nous ferions adopter dans chaque province, par nos propres efforts.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : La Fédération des municipalités préférerait-elle avoir une législation fédérale ou provinciale?

[Traduction]

M. MacKay : C'est provincial. Dans le cas de l'Ontario, cela passe par les municipalités. Elles ont toutes compétences législatives pour mettre en place quelque chose de ce genre, dans le contexte municipal.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : La réglementation en matière de sécurité liée aux passages à niveau est-elle la même pour toutes les entreprises ferroviaires?

[Traduction]

M. MacKay : Non, c'est un processus complexe. Messieurs Wilson et Orr voudront peut-être répondre aussi. Nous faisons une analyse de sécurité aux passages à niveau, une analyse du risque pour déterminer ce qu'il en est et évaluer les distances et la configuration de la circulation. Par la suite, l'administration fédérale de la sécurité déterminera ce qui est nécessaire en termes de ponts, de notifications, de signalisations, ou si rien n'est nécessaire.

Dans bien des cas, franchement, si rien n'est nécessaire, c'est parce que c'est un passage à niveau privé et que même s'il peut être dangereux, rien n'est nécessaire. C'est que cela ne pose pas un danger pour beaucoup de gens. Voilà pour la question du risque.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Monsieur MacKay, il doit exister un minimum, comme par exemple des feux de signalisation?

[Traduction]

M. MacKay : Habituellement, ce n'est pas choisi au hasard. Un minimum est fixé après une analyse détaillée des risques associés à cet endroit précis. Cela peut varier d'un endroit à l'autre, selon ce qui est analysé. Peut-être que messieurs Wilson et Orr voudraient répondre aussi. C'est une question d'analyse et d'évaluation du risque.

M. Wilson : Je dirais qu'à notre avis, le point de départ, c'est d'éviter le passage à niveau, et songer à d'autres options. Aux États-Unis, le mandat est clair, il faut réduire le nombre de passages à niveau. On y a reconnu que la sécurité publique est supérieure quand on ne crée pas, dès la conception, des intersections entre la circulation ferroviaire et la circulation routière.

Ce n'est pas le cas au Canada. Nous avons deux organismes de réglementation distincts, dont l'un, l'Office des transports du Canada, a compétence pour permettre l'accès. La sécurité ne fait pas partie de ces critères. Or, c'est notre point de départ, c'est-à-dire qu'il faut d'abord songer à d'autres possibilités. S'il n'y a pas d'autres possibilités et qu'un passage à niveau doit être prévu, il faut veiller à atténuer les risques qui y sont associés.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Qu'est-ce que vous suggéreriez pour améliorer la sécurité à ce niveau?

[Traduction]

M. Orr : Pour les passages à niveau, une consultation doit être faite pour comprendre quel est le meilleur moyen d'éviter d'en avoir un. Y a-t-il d'autres passages à niveau dans le secteur? Y a-t-il des passages à niveau qui peuvent être rendus plus sûrs ou simplifiés? Quand tout va bien, on peut avoir un passage ouvert. Dans la création d'un passage à niveau, la sécurité doit primer, plutôt que la jouissance de la propriété, comme c'est le cas actuellement.

M. MacKay : Prenons un exemple, vécu à VIA Rail Canada, qui a fait beaucoup de travail dans ce domaine au cours des dernières années. Il s'agit d'une municipalité qui est sur leur tronçon entre Ottawa et Montréal. Avant de commencer, il y avait quelque 12 passages à niveau sur le territoire de cette petite municipalité. Rappelons qu'à pleine vitesse, les trains de VIA circulent à 120 kilomètres heure, parfois jusqu'à 140 kilomètres heure, et c'est le cas régulièrement, sur ce tronçon.

Pour ceux qui ont déjà pris ce train, vous vous souviendrez qu'il y a des moments où on a l'impression que le mécanicien klaxonne continuellement. C'est bien ce qu'il fait. Les passages à niveau se suivent les uns après les autres, et il fait ce qu'il faut pour respecter la réglementation en matière de sécurité, pour aviser les gens du voisinage de l'arrivée de son train, et de son arrivée à toute vitesse.

Ces dernières années, VIA Rail Canada a réussi à fermer une trentaine de ces passages à niveau. La plupart étaient sur des chemins privés. Il s'agissait simplement de négocier avec le propriétaire, de s'entendre, puis c'était réglé. C'est le genre de chose dont on parle, quand il s'agit simplement de négocier avec les intervenants. On peut en outre essayer de réduire le nombre de nouveaux passages à niveau, et on arrive alors à faire avancer concrètement les choses.

M. Orr : Il y a un autre endroit important, en Colombie-Britannique, où les communautés ont investi dans les lignes de visée et les protections pour éviter que le train siffle, et cela s'est fait avec l'appui de Transports Canada et des chemins de fer. En raison de la proximité, toutefois, il faut recourir au sifflet pour d'autres passages à niveau qui sont dans les limites du quart de mille, ce qui réduisait à néant les efforts investis par les communautés pour atténuer le risque.

M. MacKay : Parce qu'il y a une autre municipalité plus loin.

M. Orr : Il serait opportun d'envisager un programme de fermeture de passages à niveau aussi dynamique que celui des États-Unis, comme le disait M. Wilson. Il y a certainement au Canada la volonté nécessaire, et nous continuerons de travailler avec les organismes responsables. En même temps, il faut bien réfléchir à l'ouverture de passages à niveau et ne pas perdre de vue dans ces discussions la primauté de la sécurité.

Le sénateur Zimmer : Si vous me permettez cette analogie, il me semble que vous êtes pris entre les deux rails du chemin de fer alors que le train arrive. Monsieur MacKay, vous semblez vouloir revoir de nombreuses dispositions de la Loi sur les transports au Canada. Je comprends l'importance de traiter maintenant de ces questions de sécurité, mais ne faudrait-il pas d'abord y réfléchir davantage? Autrement, dans un an, vous nous direz qu'il faut encore un projet de loi pour répondre à d'autres préoccupations et on va encore se demander s'il faut agir tout de suite ou un peu plus tard?

M. MacKay : C'est une très bonne question, sénateur. D'après nous, ce qui crée une occasion, c'est qu'il y a eu tant de travail fait au cours des quatre ou cinq dernières années, à commencer par l'examen complet de la sécurité ferroviaire au Canada, le rapport de Doug Lewis, jusqu'au travail fait par le Comité des transports dans l'autre Chambre, en plus de tout le travail fait par les intervenants, y compris nous-mêmes, dans toute une série de groupes de travail, sur les sujets allant d'une meilleure gestion de la fatigue jusqu'à la prise de règlement dans le contexte de la structure existante et de la gestion par le ministère.

Il y a aussi eu d'autres discussions concernant les données et la collecte de données, comment nous la faisons et comment nous pouvons l'améliorer. Je pourrais m'étendre pendant des heures. Un volume énorme de travail a été fait au cours des trois ou quatre dernières années, par de très nombreuses personnes de l'industrie et du gouvernement.

Le projet de loi est un morceau important de ce casse-tête. C'est un morceau qui met de l'avant les recommandations du rapport Lewis qui exige des changements législatifs. Nous sommes généralement d'accord avec elles, comme le besoin de dire clairement qui est le gestionnaire responsable du chemin de fer X, Y ou Z, afin qu'il y ait une chaîne de responsabilités claires en matière de système de gestion de la sécurité. Certaines de ces choses sont absolument essentielles. Elles sont dans le projet de loi, et nous sommes complètement d'accord avec elles.

Malheureusement, ce qui ne se trouve pas dans le projet de loi, ce sont les trois points que je vous ai décrits plus tôt, sénateur. Nous croyons que ce projet de loi peut être amélioré en rajoutant ces trois points. Nous ne croyons pas que nous serons de retour dans un an ou deux, car tout ce travail dont je viens de vous parler nous a placés dans une bonne position, nous croyons, en matière de sécurité ferroviaire au Canada pour les cinq à dix prochaines années. Évidemment, il faudra revoir la loi, mais nous ne croyons pas que cela se fera dans un futur immédiat.

Le sénateur Zimmer : Une observation. Je sais que vous venez de Winnipeg. Nous venons du même endroit. Félicitations aux Bombers qui sont en finale de la Coupe Grey.

Le sénateur MacDonald : J'aimerais un éclaircissement sur certains des amendements que vous proposez. Vous voulez que le gouvernement fédéral en fasse plus en matière d'utilisation des terrains avoisinants. Si ce n'est pas une responsabilité fédérale, comment pensez-vous que le gouvernement fédéral et Transports Canada pourront faire respecter ces mesures? Avez-vous une solution? Comment pensez-vous le faire?

M. MacKay : Il est possible de procéder de la même façon que cela est fait présentement en vertu de la Loi sur l'aéronautique. Soyons francs, la plupart des municipalités sont très responsables et il n'est tout simplement pas nécessaire de veiller au respect de ces mesures.

Nous dirions aux municipalités que nous aimerions qu'elles avisent les entreprises ferroviaires locales des activités qui ont lieu dans leur voisinage immédiat, car ces activités pourraient non seulement causer des problèmes à ces entreprises mais également à la municipalité. Cependant, nous ne voyons pas ce genre de problème. Il n'existe pas en Ontario. Je ne me rappelle pas qu'il y ait eu un cas en Ontario où nous avons dû imposer l'exécution des mesures.

Le sénateur MacDonald : Lorsque vous présentez cette suggestion aux autorités municipales ou provinciales et en discutez avec elles, quelle est leur réponse?

M. MacKay : Généralement, la réaction est positive. Notre problème est le même que le vôtre, c'est-à-dire que le ministère des Affaires municipales de la Saskatchewan a, par exemple, une liste de 300 priorités. J'invente ce chiffre. On nous dit que ce que nous proposons est intéressant et utile, mais que les maires se plaignent déjà qu'il y a trop de règlements, ou trop de ceci ou cela. On propose alors de mettre en place ces mesures dans trois ou cinq ans. Voilà le type de discussions que nous avons. Voilà pourquoi nous croyons qu'il ne sera pas difficile de le faire ici. Nous ne croyons pas que cela aura des conséquences graves sur l'application de la loi, parce que ça n'a pas été le cas jusqu'à maintenant. Cela n'a pas été le cas en aéronautique, et là où ça existe dans le secteur ferroviaire.

Les gens sont assez responsables. Lorsqu'on leur demande quelque chose, ils le font.

Le sénateur MacDonald : Merci.

Le président : Monsieur MacKay, je veux vous remercier pour votre exposé et votre discussion très franche avec les membres du comité.

Comme vous le savez, notre étude se poursuit. Nous allons entendre d'autres témoins. Puis cela ira à l'autre endroit, comme vous l'avez dit. J'imagine que nous aurons encore l'occasion de discuter de certains points que vous avez présentés aujourd'hui.

Merci beaucoup.

(La séance est levée.)


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