Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule 7 - Témoignages du 10 avril 2014
OTTAWA, le jeudi 10 avril 2014
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 13 h 34, pour examiner la teneur du projet de loi C-23, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d'autres lois et modifiant certaines lois en conséquence; et, à huis clos, pour étudier un projet de rapport.
Le sénateur Bob Runciman (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. J'aimerais souhaiter la bienvenue à mes collègues, à nos invités et aux membres du public qui écoutent aujourd'hui les délibérations du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
Nous poursuivons notre étude préalable du projet de loi C-23, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d'autres lois et modifiant certaines lois en conséquence. Ce projet de loi propose des modifications à de nombreux aspects de la Loi électorale du Canada, ainsi que des modifications connexes à la Loi sur les télécommunications, à la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales et à la Loi sur le directeur des poursuites pénales, entre autres.
Le projet de loi fait actuellement l'objet d'une étude du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre des communes, qui a entendu quelques témoins concernant certains éléments du projet de loi. Notre comité a la tâche de tenir des audiences publiques sur la teneur du projet de loi, ce qui nous permettra de faire rapport sur certaines de nos constatations avant qu'il ne soit présenté au Sénat.
Notre dernier groupe de témoins de la semaine est composé de M. Ric Lim, représentant du Pirate Party of Canada, et de M. Michael Nicula, chef du Parti pour la responsabilisation, la compétence et la transparence.
Monsieur Lim, je vous invite à nous présenter votre déclaration préliminaire, après quoi nous donnerons la parole à M. Nicula.
Ric Lim, représentant, Pirate Party of Canada : Bonjour. Je représente le Pirate Party of Canada. Nous sommes un parti politique fédéral axé sur la réforme du droit de l'information et de la démocratie au XXIe siècle. L'un de nos principes fondateurs est celui d'un gouvernement ouvert. Il peut être facilement appliqué grâce à l'utilisation de solutions technologiques pratiques pour mettre en œuvre la divulgation automatique en ligne et en temps réel des dépenses et d'autres données.
Le président : Monsieur Lim, pourriez-vous ralentir? C'est un peu difficile pour les interprètes.
M. Lim : Elles sont essentielles à un gouvernement économe et honnête. Cela assurera la faisabilité d'un programme de revenu minimal garanti, ou Mincome. Nous croyons possible de faire du Canada le meilleur pays du monde. Nous offrons une alternative importante. Il est bon pour la démocratie qu'il y ait davantage de véritables choix. Il est difficile de concurrencer les partis établis et bien financés. Nous avons accepté de relever le défi parce que les Canadiens ne sont pas bien servis, et le projet de loi C-23 en est la preuve.
Le projet de loi C-23 est sur le point de rendre la concurrence plus forte. Il crée des échappatoires, ce qui permettra aux partis établis de dépenser des millions de dollars supplémentaires. Dans un environnement où les dépenses sont presque illimitées, les partis riches et les groupes d'intérêts spéciaux bien financés exercent une influence indue. Comme on l'a démontré au sud de la frontière et souligné dans un article de Tracy Jan, paru le 12 mai 2013 dans le Boston Globe, les membres du Congrès ont consacré deux fois plus de temps aux collectes de fonds qu'aux audiences des comités, aux votes ou aux rencontres avec les électeurs. En injectant davantage de fonds dans le système, nous risquons d'ajouter un niveau de distraction dont pourraient se passer nos législateurs.
De plus, les allégations concernant Dean Del Maestro, qu'elles soient fondées ou non, montrent comment l'interdiction des dons d'entreprise peut être facilement contournée. Le projet de loi C-23 ne règle pas ce problème, mais il en crée de nouveaux.
Il y a un autre point important dont on discute moins souvent, et c'est que le superviseur de centre de scrutin pourrait être une personne ayant fait l'objet d'une nomination partisane. Évidemment, il y a des scrutateurs qui préconisent le système de freins et contrepoids, mais faire d'un superviseur de centre de scrutin un partisan non objectif d'un parti gagnant, c'est comme choisir un juge dans l'équipe de la poursuite.
La différence entre une démocratie établie comme la nôtre et les pays où les gens luttent jusqu'à la mort pour la démocratie, c'est qu'ici, nous avons confiance en notre système électoral. Cette confiance est menacée lorsqu'on nomme une personne non impartiale au poste de superviseur de centre de scrutin. C'est le superviseur de centre de scrutin qui détermine la validité des bulletins de vote.
Un superviseur de centre de scrutin non impartial pourrait entraîner la contestation systématique des bulletins de vote, comme nous l'avons vu en Floride, ce qui fait perdre aux électeurs leur droit de vote. Il est désolant de voir l'intégrité de notre démocratie être anéantie de la sorte.
Les lois doivent être examinées et évaluées attentivement. Il faut du temps pour soulever tous les points possibles et pour faire témoigner des experts; autrement, il en résulte toujours une mauvaise loi.
Le Parti conservateur du Canada a déjà cru à ce principe. Beaucoup de spécialistes des élections ont clairement indiqué ne pas avoir été consultés au sujet du projet de loi C-23. Le projet de loi a été étudié à toute vapeur à la Chambre des communes; on a consacré peu de temps au débat. Il y a bien longtemps que le devoir de second examen objectif du Sénat n'a été aussi important. C'est un mauvais projet de loi, et le Sénat a le devoir de le renvoyer.
On a abondamment parlé du recours à un répondant. Nous voulons simplement dire qu'il n'y a pas de cas avéré de fraude électorale. Toutefois, aux dernières élections, de nombreuses plaintes concernant la suppression de votes ont été déposées. Pourquoi la Loi électorale est-elle muette à ce sujet, alors qu'elle met l'accent sur la fraude électorale qui reste encore à être prouvée? S'il y a eu fraude électorale, intentez des poursuites. Mais nous savons tous qu'il y a eu des cas indéniables de suppression de votes lors des dernières élections générales. Pourquoi présentons-nous des mesures qui priveront encore davantage d'électeurs de leur droit de vote, en particulier les jeunes et les Autochtones?
Il est inadmissible que l'on empêche Élections Canada d'encourager les gens à voter. Nous ne pouvons pas avoir un organisme électoral qui n'est pas en mesure d'assurer le bon déroulement d'une élection. Étant donné qu'à peine 60 p. 100 des Canadiens exercent leur droit de vote, il faut faire tous les efforts nécessaires pour améliorer la participation électorale. Il faut donner davantage de pouvoirs à Élections Canada pour enquêter sur la suppression de votes. Mais le projet de loi C-23 réduit plutôt ses pouvoirs.
On a dit que les experts, dont 160 professeurs en droit politique, ne comprennent pas la gestion du gouvernement. Ne devrions-nous pas prendre le temps de discuter des points soulevés par les experts? La raison d'être du gouvernement, c'est de servir la population. Il est notre serviteur, pas notre maître. Il ne devrait pas ignorer l'opinion des experts ni des citoyens ordinaires. Les gens ordinaires sont souvent plus au fait d'un problème que les dirigeants.
Nous exhortons tous les parlementaires à mettre la partisanerie de côté et à bloquer ce projet de loi. Cette réforme n'a rien d'urgent. On précipite l'étude du projet de loi même s'il est évident qu'il comporte des problèmes. Il doit faire l'objet d'un débat réfléchi et d'un examen beaucoup plus minutieux. De nombreux experts et Canadiens ordinaires ont affirmé que cette loi électorale est injuste et préjudiciable. Les Canadiens méritent mieux. Nous serions bien mieux sans elle.
Le président : Monsieur Nicula.
Michael Nicula, chef, Parti pour la Responsabilisation, la Compétence et la Transparence : Merci, monsieur le président. C'est un plaisir de comparaître aujourd'hui dans le cadre de l'étude préalable du projet de loi C-23.
Je m'appelle Michael Nicula et je suis le chef du Parti pour la responsabilisation, la compétence et la transparence, ou PRCT. Nous sommes le seul portail non partisan de démocratie participative en ligne au Canada. Notre site web permet à tous les électeurs canadiens inscrits, peu importe leur appartenance politique, de formuler des commentaires et de voter sur toute question d'intérêt, y compris les projets de loi parlementaires. Je peux prétendre parler littéralement au nom de tous les électeurs canadiens — du moins, ceux qui veulent avoir leur mot à dire et voter.
Nous avons récemment affiché le projet de loi C-23 sur notre site web et, aujourd'hui, je suis en mesure de vous dire que 96 p. 100 des personnes qui se sont prononcées jusqu'ici s'opposent carrément à ce projet de loi. Voici les trois principales raisons invoquées.
Il y a premièrement les tactiques de style américain visant à priver les électeurs de leur droit de vote. La plupart des Canadiens sont d'avis que cette disposition pourrait être anticonstitutionnelle. Les étudiants résidents, les aînés qui vivent dans une résidence pour personnes âgées ou même les sans-abris sont des Canadiens comme vous et moi et ils ont le droit de voter, même s'ils ne peuvent fournir d'adresse ou de pièce d'identité conforme.
Selon ce que j'ai observé, il n'y a aucune preuve à l'appui des préoccupations concernant la fraude électorale. En réalité, le Parti conservateur a récemment fait marche arrière à ce propos et, de toute évidence, il prend des mesures pour empêcher les étudiants de voter. C'est tellement évident.
Je conviens qu'idéalement, tous les électeurs devraient voter dans leur circonscription et que la technologie actuelle le permet, mais ce projet de loi est de la pure hypocrisie. Pour les conservateurs, il n'y a pas d'exigence de résidence lorsqu'ils parachutent des candidats à leur convenance dans des circonscriptions électorales clés. D'ailleurs, tous les principaux partis ont recours à cette pratique tout à fait injuste et non démocratique. Il y a tout juste quelques mois, Justin Trudeau a parachuté Chrystia Freeland dans la circonscription de Toronto-Centre pour les élections partielles, et il y a quelques semaines, il a menacé de bloquer une autre candidate locale dans la circonscription de Trinity—Spadina.
Monsieur le président, si les gros partis acceptent que les candidats se déplacent, alors ils devraient permettre aux électeurs de le faire également.
La deuxième raison pour laquelle les Canadiens rejettent ce projet de loi, c'est qu'il ouvre la porte à une influence encore plus grande des gros capitaux et qu'il crée une énorme échappatoire qui permettra aux riches donateurs d'injecter des fonds dans les campagnes électorales, et ce, sans restrictions.
Monsieur le président, lentement mais sûrement, le Parti conservateur, avec la complicité silencieuse du Parti libéral, est en train de pousser le Canada vers un système bipartite à l'américaine, les Rouges et les Bleus, un système où l'influence des gens riches et puissants est omniprésente. Les autres petits partis auront de moins en moins d'importance, et la démocratie canadienne s'en trouvera affaiblie.
La troisième raison, c'est le bâillonnement d'Élections Canada, l'organe de surveillance électoral qui a besoin, selon les Canadiens, de plus de pouvoir, et non moins, pour enquêter et pour punir sévèrement ceux qui commettent des infractions électorales. Permettez-moi de souligner que personne n'a été puni sévèrement dans le cadre du scandale des appels automatisés, du transfert illégal de fonds dans la circonscription de M. Flaherty, ni d'ailleurs dans le cadre du scandale des commandites qui a marqué le Parti libéral.
Il y a bien d'autres raisons pour lesquelles les Canadiens rejettent ce projet de loi, et j'en fournirai un résumé complet au comité après les délibérations.
Les Canadiens veulent des changements à la Loi électorale, mais ils ne voient nulle trace dans ce projet de loi des changements importants escomptés. Je l'ai examiné à maintes reprises. La plupart des Canadiens sont favorables à la représentation proportionnelle, mais M. Harper et M. Trudeau, qui contrôlent le programme du Parlement, s'y opposent. Quand il était dans l'opposition, M. Harper appuyait la représentation proportionnelle, et j'en ai la preuve. Chose encore plus étonnante, c'est que M. Trudeau manifeste des tendances dictatoriales qui cadrent bien avec son admiration pour la démocratie chinoise.
Monsieur le président, actuellement, nous avons un faux gouvernement majoritaire, car moins de 25 p. 100 des électeurs canadiens ont voté pour le Parti conservateur. Pendant ce temps, le Parti vert n'a qu'un siège à la Chambre, alors qu'en réalité, il devrait en avoir 12. C'est injuste et non démocratique; il n'est pas étonnant que les gros partis s'opposent à la représentation proportionnelle.
Monsieur le président, tous les chiens de garde de la démocratie canadienne aboient fortement aujourd'hui : la société civile, les petits partis, les organisations non gouvernementales, les experts. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour bloquer ce projet de loi injuste et non démocratique. Vous avez peut-être le pouvoir de le bloquer. La question est de savoir si vous le ferez.
Merci. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Le président : Merci. Nous avons effectivement des questions à vous poser, et nous allons commencer par le vice- président du comité, le sénateur Baker.
Le sénateur Baker : Je tiens à remercier les témoins de leur présence aujourd'hui. Je dois dire qu'ils sont de fins politiciens. Vous êtes vraiment impressionnants, et on a l'impression que vous avez déjà commencé vos campagnes électorales.
À l'intention du public, car la séance est télédiffusée partout au Canada, j'aimerais que chacun de vous nous dise si son parti est enregistré au Canada, si vous présentez des candidats, combien vous espérez en présenter aux prochaines élections, et de quelle façon cela désavantage votre parti politique.
M. Lim : Aux États-Unis, nous constatons qu'il faut beaucoup d'argent pour être en mesure de se présenter. Habituellement, durant une campagne, plus on a d'argent, plus on peut rejoindre les gens. La subvention par vote était une bonne façon de rendre les choses équitables, car on reçoit le montant qui correspond au nombre de votes obtenus, alors qu'en vertu du système proposé, le parti ayant le candidat le plus riche aurait le plus d'argent pour la campagne, et ses partisans pourraient également contribuer davantage.
Je pense qu'il n'est pas très démocratique que les gens riches — ou le parti ayant l'appui des gens riches — aient un avantage sur les gens moins riches.
Le sénateur Baker : Votre parti est-il enregistré et présenterez-vous des candidats aux prochaines élections?
M. Lim : Oui. Nous en avons déjà présenté et nous espérons en présenter davantage. Nous essaierons d'en avoir le plus possible.
M. Nicula : Le Parti pour la responsabilisation, la compétence et la transparence est un parti enregistré. Nous nous sommes enregistrés sous le nom de Parti canadien en ligne, mais nous avons changé de nom récemment.
Nous présentons des candidats. D'ailleurs, lors de la prochaine élection partielle dans Trinity—Spadina, la circonscription de Mme Olivia Chow, je vais me présenter. Nous nous sommes présentés dans Toronto-Centre contre Mme Chrystia Freeland en novembre, et nous espérons présenter 10 autres candidats dans l'ensemble du pays lors des prochaines élections générales, en 2015.
La raison pour laquelle nous croyons que les petits partis sont désavantagés, c'est l'aspect financier. C'est aussi simple que cela. Au Canada, la politique est une question d'argent. Vous devez être à notre place pour le comprendre. Les gros partis reçoivent de la publicité gratuite à la télévision. On peut voir M. Trudeau et M. Harper tous les jours à la télévision, mais nous, pas. En plus, ils ont accès aux deniers publics. Actuellement, M. Harper va chercher 100 millions de dollars dans les poches des contribuables pour le Plan d'action économique du Canada; de toute évidence, il s'agit d'une campagne publicitaire pour le Parti conservateur. Nous n'avons pas ce pouvoir financier. Il nous faudra des décennies pour amasser autant d'argent.
Le sénateur Baker : Mais comment cela vous désavantage-t-il? En quoi le projet de loi dont nous sommes saisis vous désavantagerait-il par rapport à la situation actuelle?
M. Nicula : C'est très simple. Au lieu d'uniformiser les règles du jeu pour tous les partis politiques, il creuse l'écart davantage.
Le sénateur Baker : Comment?
M. Nicula : En créant une échappatoire qui permet aux gros partis de dépenser davantage pour solliciter des dons, mais pas de dépenser davantage pour la campagne électorale. En somme, ils sont maintenant libres de dépenser des millions de dollars pour demander davantage de donateurs, et l'argent qu'ils dépensent pour le faire n'aura aucune incidence sur la limite des autres partis.
De toute évidence, les partis les plus riches peuvent solliciter davantage. L'écart entre les partis riches et les partis pauvres, ou les petits partis, va se creuser.
Le sénateur Baker : Pourquoi ne parlez-vous que des conservateurs et des libéraux? Vous ne mentionnez même pas le NPD. Selon vous, ce parti existe-t-il seulement?
M. Nicula : Le NPD n'a pas eu la chance de...
Le sénateur Baker : Les néo-démocrates sont l'opposition officielle.
M. Nicula : Je sais, mais ils n'ont jamais eu l'occasion d'exercer le pouvoir...
Le sénateur Baker : Vous ne les en croyez pas capables?
M. Nicula : Il se peut qu'ils y arrivent mais, croyez-moi, dès qu'ils auront goûté au pouvoir, ils deviendront aussi pires que les conservateurs.
Ce n'est pas de leur faute : c'est la nature humaine. Ils veulent le pouvoir et, quand ils l'obtiennent, ils en veulent plus. C'est le devoir de la société civile et le vôtre, si je puis me le permettre, de veiller à ce qu'il y ait un certain contrôle et un certain équilibre afin d'assurer que ces partis ne dépassent pas les bornes en tentant de s'arroger plus de pouvoir.
Je ne les blâme pas car, après tout, c'est bien pour cela qu'ils sont là, non? Ils veulent avoir plus de pouvoir afin de mieux faire avancer leur programme, mais ce ne devrait pas se passer comme ça.
La sénatrice Frum : Monsieur Lim, vous avez dit que vous aviez présenté des candidats aux élections de 2011.
M. Lim : Oui, c'est ce que nous avons fait.
La sénatrice Frum : Étant donné que vous dites appuyer la subvention versée en fonction du nombre de votes, avez- vous calculé combien d'argent vous obtiendriez en fonction de ce système?
M. Lim : À vrai dire nous sommes un nouveau parti, alors nous n'obtiendrons pas grand-chose de ce système pour l'instant.
La sénatrice Frum : Je comprends. Il semble que l'un des problèmes inhérents à ce nouveau système est qu'il sera plus difficile aux nouveaux partis d'obtenir du financement qu'aux termes du projet de loi C-23, qui bonifient la limite des contributions à 1 500 $ par personne.
M. Lim : Nous n'en sommes qu'à notre première élection, alors le pourcentage de vote est à son plus bas. Si nous poursuivons notre croissance comme nous le prévoyons, le nombre de votes augmentera — je peux vous brosser un portrait de notre situation financière actuelle : notre organisation ne fonctionne qu'avec des bénévoles. Nous n'avons pas les moyens d'embaucher qui que ce soit. Même si nous réussissons à obtenir un certain pourcentage des votes, sans la subvention versée en fonction du nombre de votes, nous nous retrouverons dans la même situation.
La sénatrice Frum : Je comprends à quel point il peut être difficile de lancer un nouveau parti, je le comprends très bien. Étant donné que vous êtes un nouveau parti — un parti pas encore tout à fait établi —, pourquoi croyez-vous que le système accordant une subvention en fonction du nombre de votes serait un meilleur moyen que les dons directs d'obtenir les fonds dont vous avez besoin?
M. Lim : Ce système est plus juste puisqu'il ne s'intéresse pas nécessairement à la façon dont ces fonds vont nous profiter dans l'immédiat. À plus long terme, le système est selon moi plus équitable, car si nous commençons à récolter l'appui d'une partie de la population canadienne, notre financement augmentera. Ça ne fait rien si nous n'avons pas de partisans fortunés, car la subvention est accordée en fonction du nombre de votes obtenus. Plus notre pourcentage augmentera, plus nous aurons d'argent.
La sénatrice Frum : Monsieur Nicula, je ne sais pas si vous avez suivi les témoignages présentés devant ce comité, mais nous avons entre autres reçu M. Kingsley, l'ancien directeur général des élections à Élections Canada. Je lui ai demandé ce qu'il pensait des dispositions financières du projet de loi C-23 et, notamment, du relèvement du plafond des dépenses à 1 500 $ par personne. Selon lui, le Canada est la meilleure administration au monde en ce qui concerne le financement des partis politiques. Voilà ce qu'il a dit :
Nous sommes le seul pays qui contrôle véritablement l'utilisation de l'argent dans le processus politique, dans le processus électoral. Bien sûr, nous pourrions faire mieux pour ce qui est de vérifier la comptabilité des partis, mais c'est une autre question. Pour ce qui est du contrôle des fonds, le fait est que seule une personne physique de nationalité canadienne peut donner de l'argent, le fait qu'il s'agit d'un montant dont on ne peut pas dire qu'il permet d'acheter un politicien ou un parti politique, qu'aucune personne morale ne peut donner de l'argent, qu'aucun syndicat ne peut en donner, qu'aucune association ne peut en donner, pas même les Scouts du Canada, tout cela montre que c'est un excellent système.
Je présume que vous ne voyez pas les choses de la même façon.
M. Nicula : Je suis complètement en désaccord.
La sénatrice Frum : Expliquez-vous.
M. Nicula : Je suis un comptable professionnel agréé.
Le sénateur Baker : Bravo!
M. Nicula : Je peux vous dire qu'il importe de jeter un coup d'œil aux chiffres. Ces chiffres sont insignifiants, ils ne comptent pas pour grand-chose comparativement à l'argent dont disposent les gros partis. Il est ici question de centaines de millions de dollars. Que je réussisse à recueillir 10 000 ou 15 000 $ ne fera absolument aucune différence. Et on ne parle même pas du fait que les gros partis sont vus à la télévision sur une base quotidienne. Je dois payer pour passer à la télévision, mais eux n'ont pas à le faire.
J'aimerais ajouter que le gouvernement du Canada est parmi les cinq premiers pour ce qui est des budgets consacrés à la publicité. L'argent qu'il dépense sur la publicité dépasse celui qu'y consacrent General Motors, Procter & Gamble et Coca-Cola. C'est tout à fait immoral. En fait, cette pratique devrait être illégale.
C'est quelque chose qui n'existe pas dans de nombreux pays. En Norvège — de qui nous devrions nous inspirer plutôt que des États-Unis —, tous les partis disposent du même temps d'antenne. Les Canadiens devraient être informés de ce que nous proposons. La plate-forme de mon parti est peut-être meilleure que celle du Parti conservateur. Mais qui le saura? Je n'ai pas le pouvoir financier pour entrer dans les maisons des Canadiens et retenir leur attention.
Essentiellement, le projet de loi s'intéresse à de la petite monnaie. Mais nous parlons des sommes colossales que les partis recueillent entre les élections, car il n'y a pas de limite. Ce matin, j'étais à Élections Canada et j'ai assisté à une séance d'information sur cette loi. J'ai demandé au directeur général des élections pourquoi il n'y avait pas de limite entre les élections.
Entre les élections, le Parti conservateur peut recueillir et dépenser 10 milliards de dollars. Il n'y a aucune limite. Je n'ai pas ce pouvoir.
Puisqu'il est ici question de chiffres, disons que le projet de loi s'attaque à moins de 0,1 p. 100 des problèmes en matière de finances.
Le sénateur Moore : Merci à vous deux d'être ici aujourd'hui. Ce projet de loi modifie ou limite le pouvoir du directeur général des élections et du commissaire aux élections fédérales. Avez-vous examiné ces aspects du projet de loi? Si c'est le cas, qu'avez-vous pensé de ces modifications et de ces restrictions?
M. Lim : Oui. J'essaie de retrouver l'article où il en est question.
Comme il y a suppression de votes, Élections Canada a demandé qu'on lui donne plus de pouvoir. Or, le projet de loi vise plutôt à diminuer les pouvoirs de l'organisme. Élections Canada est une entité impartiale qui supervise les élections.
Je crois qu'il devrait avoir le pouvoir d'enquêter sur les fraudes électorales et que cette tâche ne devrait pas être confiée à un procureur nommé par un gouvernement partisan.
Le sénateur Moore : Je veux m'assurer que vous comprenez que c'est l'aile du commissaire qui est chargé d'enquêter et non celle du directeur général des élections. Aux termes de ce projet de loi, le commissaire n'aurait pas le pouvoir de forcer les parties à se présenter devant lui et à témoigner au sujet des irrégularités présumées. Je veux m'assurer que vous comprenez cette dynamique.
Je ne sais pas si vous avez quelque observation à formuler concernant le pouvoir qui appartient au commissaire d'appeler des témoins et d'essayer d'aller au fond des choses en temps opportun, pour le bien du système, bien sûr, mais aussi pour le bien des parties en cause. Il s'agit habituellement de sujets très délicats, qui peuvent être tirés au clair plus rapidement si le commissaire a le droit de s'imposer et de mener ses recherches. Vos partis ont-ils réfléchi à cela?
M. Lim : Oui. Nous sommes tout à fait d'accord que le commissaire se voit confier des pouvoirs accrus. D'après ce que j'ai compris, le pouvoir sera donné au procureur, soit une personne partisane qui aura été nommée.
Le sénateur Moore : Monsieur Nicula?
M. Nicula : Je vous fais part d'observations laissées par de vrais électeurs sur notre site au sujet de ce projet de loi. On s'inquiète du fait que le projet de loi ne fait rien pour augmenter le pouvoir qu'a le commissaire d'Élections Canada de punir qui que ce soit. Nous ne sommes pas stupides à ce point. Les Canadiens ne sont pas stupides à ce point. Jamais personne au Canada n'a été puni sévèrement pour avoir commis un acte illégal en matière d'élections. Appels automatisés, scandale des commandites, transferts de fonds — jamais personne n'a été puni sérieusement. Il n'y a eu que des sentences légères.
Nous souhaitons qu'il y ait de vraies sentences. Ce projet de loi devrait en fait donner des dents au gardien des élections, lui donner le pouvoir de faire quelque chose, car le simple fait de parler des appels automatisés pendant cinq ans puis de balayer la question sous le tapis ne va pas régler le problème.
En ce qui concerne le directeur général des élections, disons que ce projet de loi viendra réduire sa marge de manœuvre, lui qui, auparavant, tentait d'encourager la participation des électeurs. Au Canada, le taux de participation aux élections est très bas. Je tiens ici à affirmer que le Parti canadien en ligne et, maintenant, le Parti pour la responsabilisation, la compétence et la transparence ont fait plus pour encourager les gens à aller voter que le gouvernement du Canada. Nous avons affiché les lois dans notre site web. Les gens peuvent voter sans quitter la maison. Nous les authentifions. Nous veillons à ce que tout électeur enregistré puisse voter, sans égard pour ses allégeances politiques. C'est ce que nous avons fait.
Nous voulons que le directeur général des élections ait plus de pouvoir. Je veux les voir recourir aux nouvelles technologies pour faire en sorte que les électeurs — surtout les jeunes, qui sont si peu intéressés par la politique — puissent voter plus facilement. Les jeunes ne veulent pas aller faire la file dans un sous-sol d'église alors qu'ils vivent à l'heure de Facebook, de Snapchat et de Tumblr sur Internet. De nos jours, il est possible de voter sur le Web. À l'émission « American Idol », ils votent pour le gagnant et, en quelques heures, ils sont capables de comptabiliser des millions de votes. Je ne dis pas qu'il faut adopter cette formule, mais la technologie actuelle permet l'authentification. Les banques le font. Je peux accéder à mon dossier à l'Agence du revenu du Canada. Ne venez pas me dire que ce n'est pas sécuritaire. Et je peux voter sur les projets de loi, sur des idées, sur n'importe quoi. La technologie de maintenant nous permet de le faire.
Je veux que le directeur général des élections soit effectivement en mesure de promouvoir...
Le président : Nous ne voulons pas de discours. Veuillez donner des réponses plus concises, afin que tous les membres aient la chance de poser des questions.
Le sénateur Moore : Vous avez dit que 96 p. 100 de ceux qui ont voté ont rejeté le projet de loi. J'aimerais savoir combien de personnes ont voté et si certains ont commenté la proposition du projet de loi d'éliminer le recours aux répondants. Alors, combien ont voté? Dites-moi ce que vous pensez du recours aux répondants.
M. Nicula : C'est un vote en ligne qui fonctionne en continu. Je n'ai pas les chiffres définitifs avec moi.
Le sénateur Moore : Quel est le chiffre le plus récent?
M. Nicula : Cinquante et une personnes ont voté.
Le sénateur Moore : Cinquante et une personnes ont voté. Depuis combien de temps la question est-elle en ligne?
M. Nicula : Deux jours.
Le sénateur Plett : Je ne crois pas que le fait que 51 personnes aient voté contre soit un vrai test pour le projet de loi.
M. Nicula : Ces chiffres corroborent les résultats des sondages nationaux.
Le sénateur Plett : Vous avez passé beaucoup de temps à nous dire ce qui cloche au Parti libéral et au Parti conservateur, mais vous ne nous avez pas dit grand-chose sur les torts du projet de loi.
La moyenne des dons faits au Parti conservateur du Canada est de 99 $. La moyenne des dons faits par une seule personne au cours d'une année est de 199 $. On ne peut pas vraiment y voir la contribution de gens riches.
Je crois que le Parti libéral — je ne voudrais pas parler pour lui — a adopté des méthodes similaires. Je sais que le NPD l'a fait. Alors, quand vous dites que ce ne sont que les riches qui contribuent à la caisse du parti à cause de nos méthodes de vote, je trouve cela risible.
Le fait est que c'est le Parti conservateur du Canada qui forme le gouvernement. Le parti a un plan d'action et c'est ce qu'il promeut. C'est ce que font les gouvernements. Si vous arrivez un jour à former le gouvernement ou même à vous faire élire comme député, il se peut très bien que vous ayez vous aussi l'occasion de faire quelque chose de ce genre.
Pour ce qui est de la représentation proportionnelle, je ne comprends pas très bien comment cela pourrait s'inscrire dans le projet de loi, mais lorsque nous en avons parlé, il y a quelques années de ça, le Parti conservateur du Canada n'avait que deux députés à la Chambre des communes. Or, le Parti conservateur — avec l'Alliance canadienne — forme maintenant le gouvernement. Cela a été possible parce que ses membres se sont retroussé les manches et qu'ils se sont mis au travail au lieu de se plaindre à propos de tout ce qui va de travers au pays.
Si vous avez des observations à faire au sujet des problèmes de ce projet de loi, j'aimerais les entendre, mais je ne veux pas que vous me parliez de ce qui cloche avec le gouvernement ou que vous remettiez en question le fait que certains d'entre nous ont relevé leurs manches et se sont mis au travail pour former le gouvernement actuel.
M. Lim : Vous avez indiqué que la moyenne des dons est de 100 $, mais si l'on tient compte du nombre de donateurs, on constate qu'ils sont beaucoup plus nombreux pour le Parti conservateur. Bien que tous les donateurs ne donnent pas le maximum permis, il se peut que certains passent par une société et donne un chèque à un employé pour qu'il en fasse don au parti, mais en son nom propre. Il devient alors très difficile de faire la preuve de la provenance réelle du don.
Certaines allégations ont été avancées en ce sens. Que ce soit vrai ou pas, c'est aux tribunaux à trancher, mais je crois que cela montre à quel point il est facile de contourner les règles.
Il se peut que la moyenne que vous indiquez pour des partis de la taille du Parti conservateur ou du Parti libéral soit plus basse, mais vous avez plus de donateurs que les partis plus modestes pour qui la moyenne des dons est inférieure. La base pour ces derniers correspond en fait aux membres du parti, lesquels ne donnent que ce qu'ils peuvent se permettre, ce qui n'est pas beaucoup.
Le sénateur Plett : Peu importe votre situation, vous pouvez enfreindre la loi. Je peux enfreindre la loi en payant quelqu'un pour qu'il fasse un don à ma place, mais cela reste une infraction. Je peux aller dévaliser une banque, mais j'enfreindrais la loi. Les lois ne nous permettent pas de faire cela. C'est ce gouvernement qui a mis en œuvre la politique proscrivant les dons des sociétés. C'est ce gouvernement qui a mis en œuvre la politique du plafond à 1 000 $ — maintenant le plafond à 1 200 $. On suggère maintenant de faire passer ce maximum à 1 500 $. Vous êtes le premier témoin qui nous dit que cela pourrait être un problème puisqu'il y a très peu de gens qui sont capables de se permettre ce maximum. Vous avez la même chance. Les 51 personnes qui vous appuient pourraient vous donner 1 500 $ chacune, et vous auriez au moins 60 000 $ pour entamer la prochaine campagne.
M. Nicula : Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, je crois que vous devez rester sur le plancher des vaches; 1 200 $ est une somme que peu de Canadiens moyens sont en mesure de consacrer à une cause politique. Je viens de la classe moyenne, et je vous avoue que j'y penserais deux fois avant de donner une telle somme. Ce n'est pas un petit montant.
Je m'excuse de vous le dire, mais je crois que certains ont l'impression — et je crois qu'il y a un fond de vérité — que les partisans du Parti conservateur sont mieux nantis que ceux du NPD. J'aimerais connaître la contribution moyenne des partisans du NPD. Dans le cas de mon parti, je peux vous dire que la majorité de nos membres nous répondent qu'ils n'ont pas d'argent à nous donner et qu'ils s'en excusent. Ceux qui font des contributions au PRCT nous donnent 20 ou 25 $. Donc, la moyenne pour mon parti est d'environ 5 $ par membre.
Le sénateur Plett : Je ne vous donnerais pas ce montant.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Je vous remercie de votre présence. Je partage entièrement la position de mon collègue, le sénateur Plett. Je crois que votre mémoire est davantage un réquisitoire contre le gouvernement. À l'intérieur de votre mémoire, il y a des choses carrément fausses.
Hier, on recevait un témoin qui fait beaucoup d'éducation dans les écoles. Lorsque vous affirmez que ce projet de loi ou ce gouvernement est là pour réduire la participation des jeunes aux élections, je crois que ce que vous affirmez est démagogue. L'expérience que ce groupe civique a faite était une simulation de vote auprès des jeunes, et ces jeunes auraient élu un gouvernement conservateur. Je me demande sur quoi vous affirmez un tel jugement, qui me paraît contraire à l'éthique lorsqu'on vient déposer un mémoire ici.
[Traduction]
M. Lim : Non. Je n'ai pas dit cela. En ce qui concerne l'attestation de l'identité par un répondant, je ne dis pas que c'est fait intentionnellement, mais j'ai dit que son élimination empêchera des électeurs de voter.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Mais vous comprenez que lorsque vous affirmez des choses qui sont fausses, cela enlève toute la crédibilité à votre mémoire. Êtes-vous d'accord avec cela?
[Traduction]
M. Nicula : Je m'excuse, mais je n'ai pas eu la chance de répondre.
Le président : Je suis désolé; allez-y.
M. Nicula : Des spécialistes ont affirmé que le présent projet de loi empêchera des électeurs de voter. En voici des exemples.
Le projet de loi vise les étudiants, parce que les conservateurs n'aiment pas les étudiants et que les étudiants ont tendance à voter pour le Parti libéral et le NPD.
Les étudiants vivent dans des résidences universitaires. Ils peuvent être six au même endroit. Ils viennent d'un peu partout au Canada, et ils n'ont peut-être pas pris le temps de faire changer leur adresse. Si ces étudiants apportent une facture d'électricité, Hydro Toronto n'envoie pas une facture à chacun d'entre eux; il n'y a qu'un nom sur la facture. Les cinq autres étudiants n'ont aucune autre possibilité. Ils n'ont pas d'autres choix. Ils ne peuvent pas prouver leur lieu de résidence.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Monsieur Nicula, lorsque vous citez de l'information de cette nature, citez la source. Vous avez fait une affirmation sans citer la source. Je vous conseillerais, dans vos mémoires, lorsque vous faites une affirmation et que vous dites que ce sont des experts qui l'ont affirmée, alors citez la source dans votre mémoire.
[Traduction]
M. Nicula : Oui. Sur notre site web, la section sur le projet de loi C-23 contient 10 ressources différentes, des liens, des articles et des opinions de spécialistes qui le disent. Je n'invente rien.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci à nos deux invités. Je vous ai écoutés et je dois vous dire que je suis un peu surpris. Je vous dis, et peut-être que mes collègues vont me trouver un peu redondant, que le projet de loi tend à vouloir moderniser la loi électorale. Vous le savez comme moi, il y a plusieurs années, il y avait dans les villes des voitures tirées par des chevaux; aujourd'hui il y a des chevaux dans les villes mais on a modifié la loi. Ceci étant dit, j'ai lu votre document.
J'aimerais vous parler de candidats parachutés. Vous êtes contre cette façon de faire même si ce sont des Canadiens? Le Canada est grand. J'aimerais que vous m'expliquiez un peu plus ce que vous entendez par là?
[Traduction]
M. Nicula : Je l'ai bien dit. Le présent projet de loi essaye en gros d'empêcher des gens qui n'ont pas une résidence permanente dans une circonscription d'y voter. Si mon adresse est à Guelph et que j'étudie à Toronto, je devrais retourner le jour du scrutin à Guelph pour voter, au lieu de le faire à Toronto, parce que je voterais alors dans une circonscription de Toronto.
La même règle ne s'applique pas aux candidats. Un chef de parti, comme moi, peut approuver ou bloquer la nomination d'un candidat. Il n'y a rien dans le présent projet de loi ou la loi électorale qui mentionne que le candidat doit habiter dans la circonscription.
Je vous ai donné l'exemple de Mme Chrystia Freeland. Elle avait encore son adresse à New York, aux États-Unis, lorsqu'elle s'est inscrite pour être candidate dans la circonscription de Toronto-Centre. M. Trudeau a préféré cette candidate, parce qu'elle avait de meilleures chances de l'emporter; il a en gros bloqué le candidat local qui avait été élu. Ce n'est pas une exception.
J'ai reçu l'appel d'un candidat du Parti conservateur à Mississauga qui était furieux, parce qu'il venait de remporter l'investiture dans sa circonscription et que M. Harper voulait quelqu'un d'autre. D'entrée de jeu, ce n'est pas juste.
Étant donné que rien n'oblige un candidat à habiter dans sa circonscription, c'est hypocrite de la part du gouvernement de dire que c'est acceptable qu'un candidat vienne d'une autre circonscription.
Le président : Il ne s'agit pas d'une tribune. Nous voulons que vous parliez du projet de loi. La parole est à la sénatrice Batters.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Quand vous êtes un candidat parachuté dans un comté et que vous n'habitez pas dans ce comté, vous pouvez demander au directeur général des élections qu'il vous permette de voter dans le comté où vous avez été parachuté. Je le sais. J'ai été un candidat parachuté, monsieur.
[Traduction]
La sénatrice Batters : Monsieur Nicula, en répondant à la question d'une autre sénatrice, vous avez dit qu'Élections Canada avait tenu une séance d'information sur le présent projet de loi ce matin. Y avait-il d'autres personnes présentes?
M. Nicula : Oui.
La sénatrice Batters : Qui d'autres étaient présents?
M. Nicula : Il y avait des représentants des 18 partis politiques enregistrés.
La sénatrice Batters : Quand avez-vous été invité à cette séance d'information? Était-ce après avoir été invité à comparaître devant notre comité?
M. Nicula : Non, avant.
La sénatrice Batters : Qui a donné la séance d'information?
M. Nicula : C'est l'ensemble de la direction d'Élections Canada.
La sénatrice Batters : Marc Mayrand?
M. Nicula : Oui, il était là.
La sénatrice Batters : Qui d'autre était présent?
M. Nicula : L'ensemble de la direction.
La sénatrice Batters : Que vous a-t-on dit lors de cette séance d'information? Vous a-t-on parlé des raisons pour lesquelles Élections Canada s'opposait au présent projet de loi?
M. Nicula : Il s'agissait d'une séance d'information technique. Les représentants n'ont fait aucun commentaire.
La sénatrice Batters : Ils ont fait des commentaires.
M. Nicula : Ils ont seulement expliqué les aspects techniques du projet de loi.
La sénatrice Batters : Ont-ils aussi expliqué les raisons pour lesquelles ils s'opposaient à diverses dispositions du présent projet de loi?
M. Nicula : Non, pas à moi, pas en public.
La sénatrice Batters : Quel type de renseignements vous ont-ils donnés?
M. Nicula : Les représentants d'Élections Canada nous ont expliqué les changements que le présent projet de loi apportera en ce qui concerne, par exemple, le financement des partis politiques et les limites. Les participants leur ont ensuite posé des questions sur des situations hypothétiques. Par exemple, que se passe-t-il si je donne tel montant à un candidat dans ma circonscription? Puis-je aussi faire une contribution ailleurs? Quelles pièces d'identité puis-je utiliser? La carte d'information de l'électeur sera-t-elle une pièce d'identité acceptée?
La sénatrice Batters : Vous ont-ils parlé de la carte d'information de l'électeur? Vous ont-ils dit qu'ils continueraient de l'envoyer par la poste, mais qu'elle ne pourrait tout simplement plus être utilisée comme pièce d'identité?
M. Nicula : Oui. Ce document ne serait plus une pièce d'identité acceptée.
La sénatrice Batters : C'est vrai. En vertu du présent projet de loi, la carte d'information de l'électeur ne peut pas être utilisée comme pièce d'identité. Par contre, les représentants d'Élections Canada ont-ils indiqué qu'ils continueraient d'envoyer par la poste les cartes d'information de l'électeur? La question leur a-t-elle été posée?
M. Nicula : Personne n'a posé cette question, mais ce serait un peu inutile de le faire, étant donné qu'elle ne peut pas être utilisée comme pièce d'identité.
La sénatrice Batters : Pas vraiment. Ce document contient des renseignements assez importants, y compris où et quand voter, les jours de vote par anticipation, les bulletins de vote spéciaux et diverses informations pour les gens qui veulent exercer leur droit de vote.
Merci beaucoup.
Le président : Merci, messieurs, d'avoir témoigné devant notre comité aujourd'hui et de nous avoir présenté vos points de vue.
Chers collègues, le comité suspendra ses travaux, et nous reprendrons à 15 heures pour vous donner l'occasion de siéger au Sénat. Nous reprendrons nos travaux et nous discuterons alors de notre rapport.
(La séance est suspendue.)
(La séance reprend.)
Le président : J'aurais besoin d'une motion en vue de poursuivre la séance à huis clos pour étudier le projet de rapport.
Le sénateur Moore : Je propose une motion en ce sens.
Le président : Le sénateur Moore a proposé une motion. Tous ceux qui sont pour.
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord. Puis-je avoir une motion en vue de permettre au personnel des sénateurs de demeurer dans la pièce? Le sénateur Plett propose une motion en ce sens. Êtes-vous d'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : D'accord.
(La séance se poursuit à huis clos.)