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SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie

 

Délibérations du comité sénatorial permanent des
Affaires sociales, des sciences et de la technologie

Fascicule 18 - Témoignages du 17 juin 2014


OTTAWA, le mardi 17 juin 2014

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd'hui, à 19 h 1, pour faire l'étude article par article du projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et d'autres lois en conséquence.

Le sénateur Kelvin Kenneth Ogilvie (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je vous souhaite la bienvenue au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

[Traduction]

Je m'appelle Kelvin Ogilvie, sénateur de la Nouvelle-Écosse et président du comité. J'invite mes collègues à se présenter.

Le sénateur Eggleton : Art Eggleton, sénateur de Toronto et vice-président du comité.

La sénatrice Cordy : Je m'appelle Jane Cordy, sénatrice de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Hubley : Elizabeth Hubley, sénatrice de l'Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Munson : Jim Munson, de l'Ontario.

Le sénateur Enverga : Tobias Enverga, de l'Ontario.

Le sénateur Demers : Jacques Demers, du Québec.

La sénatrice Seth : Asha Seth, de Toronto.

La sénatrice Nancy Ruth : Nancy Ruth, de l'Ontario.

La sénatrice Eaton : Nicky Eaton, de Toronto.

La sénatrice Stewart Olsen : Carolyn Stewart Olsen, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Seidman : Je m'appelle Judith Seidman, je suis de Montréal, au Québec.

Le président : Merci. Nous sommes ici, ce soir, pour étudier le document que le Sénat nous a renvoyé, c'est-à-dire le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et d'autres lois en conséquence.

Le programme de la réunion n'a qu'un seul point, soit l'étude article par article du projet de loi. J'informe les membres du comité que nous avons des fonctionnaires dans l'auditoire qui sont disposés à répondre à nos questions, pour peu qu'elles portent sur leur domaine de spécialité.

De Citoyenneté et Immigration Canada, nous accueillons Nicole Girard, directrice générale, Direction du programme de la Citoyenneté et du Multiculturalisme; Alexandra Hiles, directrice par intérim, Prestation du programme de la citoyenneté et promotion, et Mary-Ann Hubers, anciennement directrice intérimaire, Législation et politique du programme, Direction du programme de la Citoyenneté et du Multiculturalisme.

De Justice Canada, nous accueillons Karen Hamilton, avocate.

Mesdames les fonctionnaires, merci d'être ici ce soir et d'être prêtes à nous prêter main-forte si l'occasion se présente. Sans plus tarder, je vais m'attaquer au seul point à l'ordre du jour de notre réunion. Plaît-il au comité de procéder à l'étude article par article du projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi sur la citoyenneté et d'autres lois en conséquence?

Le sénateur Eggleton : Oui. À propos de cela, nous avons effectivement convenu de faire l'étude article par article ce soir, mais je crois que nous avons entendu beaucoup de témoins exposer les nombreuses difficultés du projet de loi. Même si le projet de loi est adopté, je crois qu'il n'ira nulle part, si ce n'est en Cour suprême. Nous savons déjà qu'il sera remis en question. Notre plus éminent constitutionnaliste, le sénateur Joyal, nous a parlé de cela pas plus tard qu'aujourd'hui. Je crois que ces mesures législatives sont très déroutantes pour les citoyens du pays et qu'elles nous font perdre beaucoup de temps.

Nous serions mieux avisés de nous attaquer aux modifications qui doivent être apportées à ce projet de loi pour qu'il fonctionne. Certaines dispositions méritent d'être gardées, et quelques modifications additionnelles pourraient le rendre tellement meilleur que ce qu'il est dans sa forme actuelle.

Je ne sais pas ce qui se passe. Je ne sais pas si c'est le gouvernement qui décide d'une orientation donnée ou si ce sont les fonctionnaires qui le mènent sur une voie douteuse avec leurs conseils, mais nous avons vu tellement de projets de loi aboutir en Cour suprême. Ce n'est pas une bonne chose pour le pays. Je préfèrerais que nous prenions plus de temps pour essayer de mettre de l'ordre là-dedans et de voir comment le projet de loi pourrait être amélioré.

J'ajouterais que les articles sur les révocations, les questions de langue, les droits et sur quelques autres aspects méritent plus d'attention. Je serai heureux d'entendre les suggestions d'autres membres du comité sur la façon de procéder en la matière.

Le président : Merci, sénateur. Vous avez fait une intervention très remarquée à ce sujet, en Chambre.

Sénatrice Eaton, plus tôt dans la journée, vous avez parlé de façon élogieuse et éloquente du projet de loi. Souhaitez- vous réagir aux propos du sénateur Eggleton?

La sénatrice Eaton : Je suis en désaccord avec mon honorable collègue. J'estime que ce projet de loi a été mûrement réfléchi. Je crois qu'il y a une marche à suivre pour chacun des aspects soulevés dans le projet de loi. Les fonctionnaires les ont très bien présentées. Toute personne dont la citoyenneté risque d'être révoquée peut recourir aux tribunaux. Je suis en complet désaccord avec vous.

Si le projet de loi est remis en question, soit. Je ne crois pas que cela se produise, car je pense que lorsque les gens le liront attentivement et sans parti pris — ce qui ne semblait pas être le cas de nombreux témoins qui y ont vu une menace à leurs intérêts commerciaux — les choses se passeront beaucoup plus en douceur que ce à quoi vous vous attendez, sénateur.

Je crois que nous devrions procéder à l'étude article par article. Si le projet de loi se retrouve néanmoins en Cour suprême, eh bien, ce sera aux juges de trancher.

Le président : Merci, madame.

La sénatrice Cordy : Il y a deux ans, il a été question d'arrêter de financer les soins de santé offerts aux réfugiés, et cela a été vanté comme une amélioration de taille. Mais ce que nous constatons maintenant, c'est que l'adoption de cette mesure — qui s'est faite à la valeur d'un projet de loi omnibus — s'est en fait traduite par une augmentation des coûts pour le système puisque les gens ne vont désormais plus qu'aux urgences faute de recevoir les soins de base. Je crains que nous soyons dans le même type de dynamique. C'est la première réforme en profondeur de la Loi sur la citoyenneté depuis de nombreuses années, et je crois que c'est une bonne chose que le projet de loi ait fait l'objet d'un examen.

C'est dommage qu'il n'y ait eu aucune consultation à propos de ce projet de loi, comme cela est arrivé auparavant à plus d'une reprise. Nous sommes devant un remaniement en profondeur. La citoyenneté et l'immigration sont des enjeux cruciaux pour notre pays, et j'estime que le ministère et le ministre avaient la responsabilité d'examiner quelles étaient les meilleures façons d'apporter ces modifications.

Ce projet de loi contient quelques bonnes mesures, et je crois que le sénateur Eggleton et la sénatrice Eaton en ont parlé aujourd'hui. Cette question des « Canadiens dépossédés de leur citoyenneté » et les temps d'attente moins longs sont des aspects très positifs de ce projet de loi.

Mais cette question de l'intention de résider me dérange. Je sais que le ministre a dit qu'il ne faut pas s'inquiéter. Je suis convaincu que, tant qu'il sera ministre, il acceptera que les citoyens ayant une double nationalité et les nouveaux citoyens puissent effectivement voyager, mais ce n'est pas ce que je comprends quand je lis le projet de loi, et c'est quelque chose qui me dérange.

Avec la révocation de la citoyenneté, nous nous retrouverons avec deux catégories de citoyens canadiens, une situation bouleversante, s'il en est. C'est un peu comme si nous allions nous retrouver avec deux groupes de Canadiens, soit un qui vit dans sa propre maison et un autre qui vit dans une maison louée. Ceux qui seront sur une propriété louée pourront se faire demander à tout moment de quitter le pays. Ce n'est pas ce que la citoyenneté canadienne devrait signifier pour les nouveaux Canadiens.

Ceux qui font des choses répréhensibles devraient être punis. Ils devraient avoir à passer par le système judiciaire et être punis comme tout le monde puisque ce sont des Canadiens.

Le président : Avez-vous d'autres commentaires à formuler?

Le sénateur Eggleton : Je vais donc tenter cela. Si personne n'a quoi que ce soit à ajouter, je propose que nous reportions l'étude article par article et que nous tenions d'autres audiences à travers le pays afin de recueillir les avis d'un plus grand nombre de Canadiens. C'est ce qui s'est fait en 1977. Nous avons effectivement traversé le pays et nous avons demandé aux Canadiens ce qu'ils pensaient des modifications proposées à la Loi sur la citoyenneté. Je crois que l'exercice nous avait permis à l'époque d'entendre des choses très intéressantes en la matière et d'apporter beaucoup de modifications, dont certaines sont maintenant renversées.

C'est pourquoi je propose un report et la tenue de nouvelles audiences.

Le président : Merci, sénateur. La motion est recevable, et je vais la mettre aux voix. Souhaitez-vous un vote par appel nominal?

Le sénateur Eggleton : Oui, je vous prie.

Le président : Ce sera donc un vote par appel nominal. Je vais demander à la greffière de sonder le comité.

Jessica Richardson, greffière du comité : L'honorable sénatrice Cordy?

La sénatrice Cordy : Je suis d'accord avec le sénateur. Je ne sais pas s'il vous est possible de lire la motion de nouveau? Je suis d'accord avec le sénateur Eggleton.

Le président : Je veux m'assurer que tout le monde comprend. Essentiellement, le sénateur a proposé une motion pour que le projet de loi soit reporté et que le comité continue à en étudier la teneur.

La sénatrice Cordy : Je suis d'accord pour que le projet de loi soit reporté.

Mme Richardson : Honorable sénateur Demers?

Le sénateur Demers : Non.

Mme Richardson : Honorable sénatrice Eaton?

La sénatrice Eaton : Non.

Mme Richardson : Honorable sénateur Eggleton?

Le sénateur Eggleton : Oui.

Mme Richardson : Honorable sénateur Enverga?

Le sénateur Enverga : Non.

Mme Richardson : Honorable sénatrice Hubley?

La sénatrice Hubley : Oui.

Mme Richardson : Honorable sénateur Munson?

Le sénateur Munson : De toute évidence, le projet de loi devrait être reporté, oui.

Mme Richardson : Honorable sénatrice Nancy Ruth?

La sénatrice Nancy Ruth : Non.

Mme Richardson : Honorable sénatrice Seidman?

La sénatrice Seidman : Non.

Mme Richardson : Honorable sénatrice Seth?

La sénatrice Seth : Non.

Mme Richardson : Honorable sénatrice Stewart Olsen?

La sénatrice Stewart Olsen : Non.

Mme Richardson : Pour : 4; contre : 7.

Le président : Je déclare la motion rejetée par sept voix contre quatre.

Nous allons maintenant procéder selon l'ordre normal.

L'étude du titre est-elle reportée?

Des voix : D'accord.

Le président : L'étude de l'article 1, qui contient le titre abrégé, est-elle reportée?

Des voix : D'accord.

Le président : L'article 2 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : C'est adopté.

L'article 3 est-il adopté?

Le sénateur Eggleton : J'ai trois amendements à proposer à l'article 3. Vous devriez les avoir sous les yeux. Le premier touchera à la page 11 et à la page 14 et il concerne les dispositions sur l'intention de résider. Je propose :

Que le projet de loi C-24, à l'article 3, soit modifié :

a) par suppression des lignes 11 à 26, page 11.

b) par suppression des lignes 26 et 27, page 14.

Ces amendements visent à supprimer les dispositions sur l'intention de résider. Comme je l'ai indiqué dans le débat en deuxième lecture qui s'est tenu aujourd'hui, dans un contexte de mondialisation, de nombreuses personnes peuvent être appelées à quitter leur pays pour occuper des emplois à l'étranger. Certains travaillent pour des entreprises qui les enverront dans une autre partie du monde, et il se peut que cela se produise assez souvent. Il arrive aussi très fréquemment que les gens vont étudier à l'étranger. Ce ne devrait pas être une raison pour leur enlever leur citoyenneté.

Bien entendu, je suis convaincu que le ministre et les autres diront...

La sénatrice Eaton : Qu'ils ne l'enlèveront pas.

Le sénateur Eggleton : Eh bien, non, cela concerne la disposition sur l'intention de résider. Ce n'est pas la même chose que la question des quatre ans sur six.

La sénatrice Eaton : Cela s'applique avant de recevoir la citoyenneté.

Le sénateur Eggleton : Non. La première des choses est que vous devez passer quatre ans sur six, ce qui ne me plaît pas beaucoup non plus. À l'heure actuelle, c'est trois ans, mais le projet de loi fera passer cela à quatre ans. Dorénavant, vous devrez passer quatre ans sur six au Canada, à raison d'au moins 183 jours par an pour chacune de ces quatre années.

Après cela, vous devez avoir l'intention « de continuer à résider au Canada », tel que cela est écrit en page 11. C'est de cela que je parle.

L'un de nos témoins, Lorne Waldman, a fait remarquer que le projet de loi créait deux catégories de citoyens : ceux qui sont nés ici et qui sont libres de voyager, d'accepter des emplois à l'étranger, d'étudier où bon leur semble, de rester à l'extérieur aussi longtemps qu'ils le souhaitent; et les autres, les citoyens naturalisés qui pourraient être accusés d'avoir présenté sous un faux jour leur intention de résider au pays et qui risquent de perdre leur citoyenneté à cause de cela.

Vous pourriez dire : « Eh bien, cela n'arrivera pas; la loi n'a aucune intention d'aller dans ce sens-là. » J'ai entendu le ministre affirmer que les gens qui n'ont pas l'intention de résider ici pourraient et devraient être mis de côté. Comment peut-on prouver cette intention? Lorsqu'une personne acquiert sa citoyenneté, il se peut qu'elle ait toutes les intentions du monde de résider au pays. Puis, tout à coup, une ou deux occasions d'emploi à l'étranger se présentent. Alors, la personne s'absente du pays pendant une certaine période, et un quelconque bureaucrate établit qu'elle a probablement présenté son intention de résider sous un faux jour. Ce genre de scénario est très plausible. Il y aura donc deux catégories de citoyens : une pour les citoyens naturalisés et une pour ceux qui sont nés ici et qui peuvent faire ce qui leur plaît, quand il leur plaît.

Ce n'est pas le genre d'égalité auquel nous avons été habitués en matière de citoyenneté, et je crois que cela crée un froid. Bien entendu, en attendant d'avoir un cas de jurisprudence qui vient établir le contraire, certains avocats vont conseiller à leurs clients d'être sur leurs gardes à cet égard. Alors les citoyens naturalisés se font dire d'être prudents, mais ceux qui sont nés ici ne sont pas inquiétés. Qu'allez-vous en retenir? Qu'il s'agit d'un système à deux vitesses. Et cela crée un froid.

Je crois que cette partie du projet de loi est tout à fait inutile. Je crois en outre qu'elle est inconstitutionnelle et qu'elle sera probablement remise en cause. M. Galati a dit qu'il allait la contester, et nous connaissons tous le succès qu'il a eu dans l'affaire Nadon, dont, de toute évidence, le gouvernement n'a rien retenu.

Je crois que cette partie sur l'intention de résider doit être retirée du projet de loi — pas la question des quatre ans sur six. Je ne suis pas particulièrement heureux de cette disposition, mais je n'y toucherai pas.

Voilà l'amendement que je propose.

Le président : Avant de laisser la parole à la sénatrice Eaton et par souci de clarté, je rappelle au comité que la motion proposée par le sénateur Eggleton vise à supprimer les deux passages sur l'intention de résider, comme cela est clairement expliqué dans la version écrite de sa motion, dont vous tenez copie.

La sénatrice Eaton : Chers collègues, je pense que le ministre et les fonctionnaires ont été très clairs à cet égard : lorsque vous remplissez votre demande pour devenir citoyen canadien, on vous demande si vous avez l'intention de résider au pays, qui est une question qui mérite d'être posée. « Si vous devenez citoyen canadien, avez-vous l'intention de résider au pays? »

Une fois que vous avez obtenu la citoyenneté, si vous décrochez dès le lendemain un emploi au Ghana, vous pouvez y aller. Vous êtes comme tout le monde.

Je m'excuse. Vous avez entendu le ministre et les fonctionnaires : « a l'intention, si elle obtient la citoyenneté », lorsque vous remplissez votre demande. Une fois que vous avez rempli ces conditions et que vous avez passé quatre ans sur six au pays, vous êtes aussi libre que n'importe quel Canadien de naissance; vous pouvez aller et venir comme bon vous semble. En fait, CIC n'a aucun moyen de suivre vos déplacements et ce n'est pas ce qu'il fait de toute façon. Une fois que vous devenez citoyen canadien, on ne vous suit plus. L'ARC peut essayer de vous retrouver aux fins d'impôt. Le ministère de la Santé de votre province peut vous poser des questions sur votre présence au pays pour les besoins de la carte d'assurance-maladie, mais CIC s'en fiche comme de l'an 40.

La sénatrice Cordy : Je reviens à ce que j'ai dit tantôt sur les deux catégories de citoyens...

La sénatrice Eaton : Nous ne faisons que répéter le même argument.

Le président : Sénatrice Eaton, je vous en prie.

La sénatrice Cordy : Merci, monsieur le président.

Je reviens à ce que j'ai dit au début : ce projet de loi crée deux catégories de citoyens. Je présume qu'il y aura ce que le ministre appellerait les « vrais Canadiens » et les autres, les nouveaux Canadiens ou ceux qui ont la double citoyenneté. Je trouve cela très préoccupant.

Je sais que le ministre a dit cette semaine que cela ne changeait rien à rien; qu'une fois citoyen, vous pouvez voyager où bon vous semble. Les citoyens canadiens ont le droit de se déplacer, et la présente génération se déplace plus que toute autre génération avant elle. Nous n'avons qu'à penser à nos enfants et aux enfants de nos amis qui voyagent partout dans le monde.

Ce n'est pas ce que dit le projet de loi. L'alinéa 5(1) proposé indique « c.1) a l'intention, si elle obtient la citoyenneté ». Il est ici question d'une condition préalable, ce qui signifie que la personne va obtenir sa citoyenneté et qu'elle devra « (i) (...) continuer de résider au Canada ».

Je sais ce que le ministre a dit, mais, dans 20 ans, quand un autre ministre jettera un coup d'œil à cette formulation, il verra qu'on y dit que vous devez continuer à résider au Canada si vous obtenez votre citoyenneté.

J'ai reçu des courriels — et je présume que tous les autres membres du comité en ont reçu des semblables — de cet ingénieur qui doit se déplacer en raison de son travail. Or, si le projet de loi est adopté, il craint qu'il ne puisse plus accepter de contrats à Londres, en Angleterre, où il fait une partie de ses affaires. Je n'invente rien. Un certain nombre de témoins nous ont dit que cette intention de résider allait créer deux catégories de citoyens.

J'aurais bien aimé que tous les témoins nous aient dit : « Ne vous inquiétez pas de cela; le ministre a dit que tout est merveilleux. » C'est comme le projet de loi sur les élections; le ministre avait dit que c'était formidable. Aucun projet de loi n'a besoin d'amendement. C'est formidable de voir qu'aucune mesure législative que nous étudions n'a besoin d'un second examen objectif.

L'article 3 du projet de loi stipule clairement que si une personne obtient la citoyenneté, elle doit continuer à résider au Canada.

La sénatrice Seidman : À mon avis, ce que le ministre a dit était très clair. J'ai la transcription de ses paroles sous les yeux, et je vais vous la lire pour vous rappeler ce qu'il a dit, si vous me le permettez. Il a clairement dit ce qui suit :

Il n'y a aucune obligation pour un citoyen du Canada de rester physiquement au Canada une fois qu'il a obtenu sa citoyenneté, alors il n'y a ici aucune question d'interprétation.

Si une personne obtient la citoyenneté, c'est qu'elle a résidé au Canada pendant quatre ans sur six. Voilà l'intention à laquelle on fait allusion.

Il a dit ceci :

La liberté de circulation garantie par la Charte canadienne des droits et libertés s'applique à chacun d'entre nous. L'obtention de la citoyenneté a toujours été assujettie à l'exigence de résidence, et ce que nous cherchons à faire est de demander aux gens de confirmer qu'ils ont l'intention de résider pour remplir ces conditions.

Le ministre a alors demandé à l'avocate du ministère de parler de la liberté de circulation prévue aux termes de la Charte des droits et libertés, ou pour y apporter des précisions, parce qu'il n'est pas avocat. Mme Girard l'avocate a dit ceci :

La seule chose que je pourrais ajouter à ce que le ministre a déjà dit — et je crois qu'il a été très clair à ce sujet —, c'est que le texte que vous lisez dans le projet de loi doit être compris dans la perspective plus large de ce que sont ces exigences.

Ella a dit « dans la perspective plus large » — donc au-delà du libellé du projet de loi.

Il est ici question des exigences pour devenir un citoyen du Canada. Ce sont des exigences qui s'appliquent jusqu'au moment où il est reconnu que vous les avez respectées et que vous devenez citoyen canadien. Aucune des modifications des exigences mises de l'avant dans le projet de loi ou des exigences de la loi ne s'applique une fois la citoyenneté obtenue, et je crois que le ministre a été très clair là-dessus.

Voilà ce que l'avocate du ministère a dit au sujet de la perspective plus large dans laquelle il faut comprendre ce projet de loi

Le président : Sénateur Eggleton, voulez-vous faire une dernière remarque?

Le sénateur Eggleton : Souvenez-vous que la citoyenneté peut être révoquée pour des raisons de fraude. À l'heure actuelle, il est possible de faire cela. Le fait de faire une fausse déclaration à son propre sujet pourrait constituer une fraude. Quelqu'un pourrait faire valoir qu'une personne a fait une fausse déclaration quand elle a convenu qu'elle avait l'intention de continuer à résider au Canada. C'est ce que dit la loi qui compte, pas ce que dit le ministre. Nous n'appliquons pas la loi en fonction de l'interprétation du ministre, mais bien en fonction de ce que dit la loi.

Comme la sénatrice Cordy l'a souligné, le projet de loi dit ceci : « si elle obtient la citoyenneté. » Cette intention concerne ce qui arrivera après l'obtention de la citoyenneté. Si ce que vous dites est vrai, et si nous suivons la logique du ministre, cela voudrait dire que ces personnes auront le droit de voyager. Par conséquent, autant retirer ces mots du projet de loi puisque cela concerne seulement l'intention de la personne après qu'elle obtiendra la citoyenneté. Cela ne concerne pas ce qui arrive pendant les quatre ans sur six. Éliminez donc cette phrase. Voilà ce que ma motion propose de faire. Pourquoi laisser ces mots dans le projet de loi s'il n'y a aucune intention de restreindre la liberté de circulation des gens?

La sénatrice Eaton : Nous tournons en rond.

Le président : Bon. Il est clair qu'il existe deux points de vue à ce sujet, qui ont été très bien présentés.

Est-ce que quelqu'un aimerait exprimer un autre point de vue? Sinon, je vais mettre la motion aux voix. Je présume que vous voulez procéder à un vote par appel nominal.

La question est mise aux voix. Madame la greffière, pourriez-vous prendre note des votes.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Cordy?

La sénatrice Cordy : Je suis en faveur de l'amendement.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Demers?

Le sénateur Demers : Pas en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Eaton?

La sénatrice Eaton : Pas en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Eggleton?

Le sénateur Eggleton : Je suis en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Enverga?

Le sénateur Enverga : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Hubley?

La sénatrice Hubley : Je suis en faveur de l'amendement.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Munson?

Le sénateur Munson : Dans l'intérêt de l'équité, je suis en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Nancy Ruth?

La sénatrice Nancy Ruth : Je m'y oppose.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seidman?

La sénatrice Seidman : Je m'y oppose.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seth?

La sénatrice Seth : Pas en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Stewart Olsen?

La sénatrice Stewart Olsen : Je m'y oppose.

Mme Richardson : Pour, 4; contre, 7.

Le président : Je déclare que la motion est rejetée par 7 voix contre 4.

Sénateur Eggleton, vous avez un autre amendement à présenter.

Le sénateur Eggleton : J'ai un deuxième amendement. Je propose :

Que le projet de loi C-24, à l'article 3, soit modifié :

a) par substitution, à la ligne 27, page 11, de ce qui suit :

« d) si elle a moins de 55 ans à la date de sa »

b) par substitution, à la ligne 30, page 11, de ce qui suit :

« e) si elle a moins de 55 ans à la date de sa »

Il est question ici des exigences linguistiques. J'aimerais revenir au statu quo pour les aînés. Je ne crois pas que cela soit nécessaire pour les personnes plus âgées. Je crois que nous connaissons tous des personnes qui ont immigré au pays plus tard dans la vie dans le cadre d'une réunification familiale, peut-être des parents ou des grands-parents. Elles ne viennent pas ici pour être des employés et participer nécessairement beaucoup à l'économie; elles viennent ici pour être réunies avec leurs familles.

Je me souviens que, quand j'étais conseiller municipal à Toronto et député, je représentais toujours des collectivités à très fortes populations ethnoculturelles. J'ai connu bien des gens qui sont devenus de bons citoyens au pays, mais qui éprouvaient un peu de difficulté avec la langue. Il était possible d'avoir une conversation avec eux, mais pas pendant très longtemps.

Beaucoup de ces personnes — et vous devez tous en connaître quelques-unes — auraient très peur de passer un examen écrit ou oral. Beaucoup d'entre elles ont de la peine à lire et à écrire dans leur propre langue. Je ne vois pas pourquoi cette modification devrait s'appliquer aux aînés.

Souvenez-vous de ce qu'une dame nous a dit — j'oublie son nom. Elle a dit ceci : « Beaucoup de femmes se remettent d'une situation où elles étaient vulnérables. Elles arrivent peut-être d'un camp de réfugiés. Elles ont peut-être été torturées. Quoi qu'il en soit, le Canada leur a offert sa protection. Or, on ne peut pas s'attendre à ce que ces personnes qui ne savent peut-être même pas comment lire et écrire dans leur langue maternelle apprennent une langue officielle et réussissent un examen écrit. Selon nous, c'est aussi inutile qu'injuste. » Je suis tout à fait d'accord avec elle. Ces personnes pourraient être de très bons citoyens même si elles sont incapables de réussir un examen NCLC de niveau 4. Je propose cet amendement en pensant à ces personnes.

Le président : Je tiens à m'assurer que tout le monde comprend qu'il s'agit d'une motion d'amendement visant à ramener à 55 ans le seuil au-dessous duquel une personne est tenue de passer un examen linguistique — comme c'est le cas actuellement — au lieu de hausser le seuil à 65 ans, comme le propose le projet de loi.

J'ai la sénatrice Cordy — en fait, je devrais poser la question à la sénatrice Eaton. Aimeriez-vous faire une remarque à ce sujet?

La sénatrice Eaton : J'aimerais simplement m'assurer que ceci figure au compte rendu et dire que, à mon avis, de nos jours, les personnes de 64 ou 65 ans sont parfaitement capables de faire ce que fait une personne de 55 ans. Selon moi, cet article vise tout particulièrement les femmes qui sont souvent laissées à la maison et qui ne travaillent pas, ne sont pas membres de groupes à l'extérieur du foyer et ne vont pas à l'école. Elles sont laissées à la maison sans être en mesure de communiquer. À mon avis, cette disposition encourage les personnes qui, à l'âge de 64 ans, sont parfaitement capables de faire ce que faisait une personne de 55 ans, en leur enseignant des éléments très rudimentaires de la langue.

La sénatrice Cordy : Madame la sénatrice Eaton, vos remarques me convainquent encore plus de l'utilité de cet amendement. À l'époque où j'étais enseignante, il m'arrivait d'avoir de nouveaux élèves qui ne parlaient ni l'anglais ni le français. Ces élèves apprenaient très rapidement parce qu'ils étaient jeunes. Dans bien des cas, les pères avaient un emploi et apprenaient la langue — c'était l'anglais, parce que nous étions en Nouvelle-Écosse. Ils apprenaient la langue très rapidement. Toutefois, ce sont les mères qui restaient à la maison qui avaient le moins de ressources pour apprendre une deuxième langue. Ce sont elles qui éprouvaient de la difficulté.

J'ai été très frappée par le témoignage de Loly Rico et de Janet Dench, du Conseil canadien pour les réfugiés, et de Debbie Douglas, qui est directrice exécutive de l'Ontario Council of Agencies Serving Immigrants. Elles ont parlé des problèmes qui seraient causés par le fait de hausser la limite d'âge, qui est maintenant à 55 ans. Après la réunion, j'ai parlé avec Debbie Douglas au sujet de ce problème préoccupant. Elle a dit qu'elle connaissait de nouvelles immigrantes qui avaient passé l'examen écrit — l'une d'entre elles l'a passé trois fois —, mais n'ont pas obtenu la note de passage. Cette femme en particulier disait ceci : « Ce n'est pas grave, j'ai presque 55 ans, ce qui veut dire que je pourrai bientôt présenter une demande de citoyenneté canadienne. » Or, maintenant elle ne pourra pas le faire. Elle va devoir attendre 10 ans de plus pour présenter sa demande de citoyenneté.

À mon avis, il est facile de dire que les capacités d'apprentissage d'une nouvelle langue ne diminuent pas avec l'âge; c'est peut-être vrai pour la plupart des gens. Les femmes réfugiées qui arrivent au Canada n'ont pas forcément le niveau de scolarité que nous, au comité, avons le privilège d'avoir, ni les capacités ou les occasions d'apprendre une deuxième langue et de s'instruire davantage. Désormais, ces femmes ne pourront pas obtenir la citoyenneté canadienne avant l'âge de 65 ans à moins d'apprendre l'une de nos langues officielles.

Dans une société utopique, ce serait merveilleux si tout le monde apprenait une langue seconde et apprenait l'anglais ou le français très rapidement, mais nous ne vivons pas dans une utopie; nous vivons dans la réalité. D'ailleurs, certaines de ces femmes — je dis « femmes », mais parlons de tous les immigrants et de tous les réfugiés — éprouvent certaines difficultés bien précises sur le plan de l'apprentissage de l'anglais ou du français.

Le président : Merci.

À mon avis, l'objet de cet amendement est bien compris. Il a été proposé que l'exigence liée à l'âge passe de 65 à 55 ans. Puisque je ne vois pas d'autres intervenants, je vais mettre l'amendement aux voix. Je vais demander à la greffière de prendre note des votes des membres du comité. Il vous suffira de dire si vous êtes en faveur de l'amendement ou si vous vous y opposez.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Cordy?

La sénatrice Cordy : Je suis en faveur de l'amendement.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Demers?

Le sénateur Demers : Je m'oppose à l'amendement.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Eaton?

La sénatrice Eaton : Je m'y oppose.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Eggleton?

Le sénateur Eggleton : Je suis en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Enverga?

Le sénateur Enverga : Je m'y oppose.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Hubley?

La sénatrice Hubley : Je suis en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Munson?

Le sénateur Munson : Je suis en faveur. L'amendement me paraît logique.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Nancy Ruth?

La sénatrice Nancy Ruth : Je m'y oppose.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seidman?

La sénatrice Seidman : Je m'y oppose.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seth?

La sénatrice Seth : Je ne suis pas en faveur.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Stewart Olsen?

La sénatrice Stewart Olsen : Je m'y oppose.

Mme Richardson : Pour, 4; contre, 7.

Le président : Je déclare que la motion d'amendement est rejetée par 7 voix contre 4.

Le sénateur Eggleton : J'aimerais présenter un autre amendement à l'article 3. Je propose :

Que le projet de loi C-24, à l'article 3, soit modifié par adjonction, après la ligne 4, page 12 de ce qui suit :

« (1.011) Pour l'application de l'alinéa (1)c), il est compté un demi-jour de présence effective au Canada pour chaque jour de résidence au Canada de la personne avant son admission à titre de résident permanent. »

Cet amendement sert à conserver une condition qui figure actuellement dans la loi, c'est-à-dire tenir compte de la présence effective au Canada avant l'admission à titre de résident permanent. Cette possibilité est offerte actuellement aux travailleurs temporaires, aux étudiants et à de nombreuses aides familiales. J'ai pris soin de mentionner les étudiants et les aides familiales. Les aides familiales sont des gens qui sont venus au Canada des Philippines, par exemple, et qui vivent souvent chez les familles. Ces personnes en apprennent beaucoup sur notre pays et s'adaptent très bien. Elles vivent dans une ambiance familiale en vue d'obtenir la citoyenneté.

Nous continuons à dire que nous voulons attirer la fine fleur des étudiants au Canada et que la concurrence est féroce. J'ai mentionné Jason Kenney, l'ancien ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, dans mon discours lors de la deuxième lecture du projet de loi aujourd'hui et je vous affirme que cette mesure s'avère fort utile pour attirer cette catégorie de personnes.

Nous allons maintenant enlever cette possibilité aux gens. Nous leur disons que la présence effective ne compte plus, et nous leur retirons cette possibilité en prétextant la nécessité d'appliquer les mêmes règles de jeu à tout le monde. Moi, je crois que nous voulons trouver des citoyens. Nous avons toujours fait notre possible pour aider les gens à devenir citoyens. Nous voulons qu'ils deviennent Canadiens. Nous ne devrions pas placer ces obstacles sur leur chemin comme le fait cette disposition.

Le marché mondial est fort concurrentiel pour ce qui est d'attirer la fine fleur des travailleurs et le fait d'offrir la possibilité de faire reconnaître la présence effective aiderait beaucoup. Je crois qu'il y a une période maximale d'un an reconnue par demi-journée de présence. On reconnaîtrait ainsi la valeur des études et du travail au Canada et encouragerait certainement les gens à devenir résidents permanents et ensuite citoyens. Nous devrions continuer à offrir cette possibilité et mon amendement vise à rétablir les conditions nécessaires.

Le président : Madame Stewart Olsen, souhaitez-vous obtenir un éclaircissement?

La sénatrice Stewart Olsen : Oui. Merci.

Pour ma propre gouverne, s'agit-il d'immigrants illégaux?

Le sénateur Eggleton : Non. Il s'agit de gens qui sont ici en vertu d'un permis ou d'un visa de travail.

Le président : Des visas d'étudiant.

Le sénateur Eggleton : Des visas d'étudiant, bien sûr. Il s'agit de gens qui sont ici au pays. Nous attirons des étudiants et nous voulons qu'ils restent et qu'ils deviennent citoyens. Pour les encourager, nous leur disons : « Nous allons reconnaître une partie de votre temps de résidence ici au pays, mais seulement une partie. » Pourquoi leur retirer cette possibilité si notre objectif consiste à encourager les gens à rester?

Le président : J'aimerais préciser que l'amendement vise à reconnaître le temps passé par certaines personnes qui sont au pays en vertu d'un permis spécial, et non les résidents permanents, est-ce bien compris?

Madame Cordy.

La sénatrice Cody : Je croyais que la sénatrice Eaton allait parler.

Le président : Je viens de la regarder et elle m'a fait signe que non.

La sénatrice Eaton : Non. Si vous voulez, je peux le préciser pour le procès-verbal. Nous pouvons continuer.

La sénatrice Cordy : Je suis d'accord avec le sénateur Eggleton. Il faudrait rétablir la reconnaissance de la présence effective. Nous savons que le Canada recherche la fine fleur du monde. Déjà, cette fine fleur vient étudier ici au Canada. Donnons-lui un coup de main pour lui permettre de rester.

Les aides familiales constituent une autre catégorie de personnes qui viennent au Canada. Bon nombre d'entre elles sont bien éduquées, et elles viennent au Canada au moyen d'un visa de travail pour devenir aide familiale. Pourquoi ne pas reconnaître leur présence effective en vertu de la Loi sur la citoyenneté? Je suis d'accord avec le sénateur Eggleton.

Le président : Qu'en dit le parrain du projet de loi?

La sénatrice Eaton : Je crois que le projet de loi cherche à établir que la citoyenneté canadienne a une valeur énorme et est très recherchée. Nous ne devrions pas tout simplement la vendre au moins offrant.

Nous n'en demandons pas plus que d'autres pays comparables, comme les États-Unis, l'Australie, la Nouvelle- Zélande et le Royaume-Uni. Je suis très satisfaite des dispositions actuelles et en fait, ces gens obtiendront leur citoyenneté plus rapidement si nous réussissons à faire adopter le projet de loi.

Le sénateur Eggleton : Un dernier point avant de conclure. Ces gens n'obtiendront pas la citoyenneté plus rapidement parce que désormais, ils devront passer quatre des six dernières années au Canada avant de présenter une demande.

La sénatrice Eaton : Oui, mais le temps de traitement des demandes sera plus court.

La sénatrice Cordy : Mais on ne reconnaîtra pas la présence effective.

Le sénateur Eggleton : C'est ça.

La sénatrice Eaton : Si, sénateur, lorsqu'il s'agit de gens qui souhaitent vraiment devenir Canadiens.

La sénatrice Cordy : Mais vous ne pouvez pas affirmer que le délai sera plus court.

Le président : Il est utile de discuter des points un à un, mais je crois que nous avons fait le tour de la question. Les gens ont pu se prononcer et je vous demande donc, chers collègues, de voter.

Afin d'être sûr que tout le monde comprenne, j'aimerais que tous ceux qui sont pour l'amendement disent « oui », et que tous ceux qui s'y opposent disent « non ». Je demanderai à la greffière de poser la question.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Cordy?

La sénatrice Cordy : Je suis pour l'amendement, donc oui.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Demers?

Le sénateur Demers : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Eaton?

La sénatrice Eaton : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Eggleton?

Le sénateur Eggleton : Oui.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Enverga?

Le sénateur Enverga : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Hubley?

La sénatrice Hubley : Oui.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Munson?

Le sénateur Munson : Un jour, ce serait formidable de pouvoir s'exprimer en tant que particuliers sur un autre amendement fondé sur le gros bon sens.

Oui.

La sénatrice Eaton : Oh là là, on fait la leçon aux autres.

Le président : Mesdames, messieurs?

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Ruth?

La sénatrice Ruth : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seidman?

La sénatrice Seidman : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seth?

La sénatrice Seith : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Stewart Olsen?

La sénatrice Stewart Olsen : Non.

La sénatrice Eaton : Puis-je consoler les sénateurs Eggleton et Cordy?

Mme Richardson : Quatre oui et sept non.

Le président : L'amendement est donc rejeté par 7 voix contre 4.

Sénatrice Eaton, souhaitez-vous intervenir?

La sénatrice Eaton : J'aimerais fournir un renseignement pour consoler mes deux collègues. Moins de 15 p. 100 des demandeurs actuels font référence à la présence active à titre de résident non permanent.

Le président : Merci.

Revenons à l'article 3. Les amendements ont été rejetés et il n'y a plus d'amendements. Je vous pose donc la question : l'article 3 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le président : Adopté.

Le sénateur Eggleton : Avec dissidence.

Le président : L'article 3 est adopté, avec dissidence.

Avec le consentement du vice-président, je vais présenter les prochains articles en bloc, soit les articles 4 à 7. Les articles 4 à 7 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

Le sénateur Eggleton : Avec dissidence.

Le président : Les articles sont adoptés, avec dissidence.

L'article 8 est-il adopté? Le sénateur Eggleton?

Le sénateur Eggleton : Je propose ce qui suit :

Que le projet de loi C-24, à l'article 8, soit modifié par adjonction, après la ligne 5, page 25, de ce qui suit :

« 10.61 Est susceptible d'appel devant la Cour fédérale la décision du ministre prise aux termes de l'article 10. »

L'amendement porte sur la capacité d'en appeler d'une décision de révocation. La disposition prévoit une procédure administrative effectuée par le ministre ou ses représentants. Un document est donc envoyé indiquant que la citoyenneté sera révoquée et que le destinataire a 30 jours pour répondre par écrit, sans garantie d'audience. Le ministre peut en prévoir une, mais il n'y a aucune garantie.

Je crois que l'on a tort de confier la décision au ministre et à ses représentants. Il faut prévoir une procédure d'appel en bonne et due forme. Comme la sénatrice Eaton l'a dit plus tôt lors de la deuxième lecture, il y a une disposition qui prévoit la possibilité d'un examen judiciaire, mais un examen judiciaire ne constitue pas un appel en bonne et due forme avec audience et la possibilité de présenter des témoignages. Tout d'abord, il faut demander le droit d'appel dans le cadre d'un examen judiciaire. Il s'agit d'une procédure juridique et il s'avère que le droit d'appel est seulement conféré dans 15 à 20 p. 100 des cas. Il n'y a aucune comparution physique. Tout se passe sur papier et aucune raison n'est fournie lorsque l'appel est rejeté. La demande est rejetée sans explication. Si le droit d'appel est accordé, ce sera pour un motif de plus grande portée que tout simplement les droits de la personne concernée. L'appelant ne peut présenter de nouvelles preuves dans le cadre d'un examen judiciaire. Il ne peut invoquer des motifs d'ordre humanitaire, et le juge ne peut pas prononcer de décision de son propre cru, mais doit plutôt renvoyer le dossier à une autre instance qui tranchera. Un examen judiciaire est insuffisant dans de tels cas. Il faut prévoir une pleine procédure d'appel qui permet à la personne de défendre sa cause.

On peut bien affirmer : « Nous criminalisons des choses comme l'espionnage, la trahison et ainsi de suite. Qui voudrait de ces gens? » Reste la difficulté des termes comme le « terrorisme » qui ne sont pas si bien définis. Il peut s'agir d'une personne trouvée coupable de terrorisme ayant purgé une peine de cinq ans, peut-être à l'étranger. J'en ai cité un cas aujourd'hui. Qu'arriverait-il si ce journaliste canado-égyptien, M. Fahmy, qui est actuellement détenu en Égypte, était trouvé coupable? Il se peut que le ministre dise : « Oui, mais je ne crois pas que le tribunal égyptien ait raison », mais qui sait.

Cela laisse donc beaucoup de discrétion au ministre sans garantie d'audience menée par une tierce partie, alors que c'est bien cela dont il nous faut. Nous avons besoin d'un système judiciaire qui s'inscrit dans notre tradition canadienne d'équité. Quels que soient les crimes commis par la personne, elle aura toujours ce droit.

De plus, comme l'a indiqué le sénateur Joyal aujourd'hui, il s'agit d'un couteau à double tranchant ou d'une deuxième punition, car la personne est punie aux termes du Code criminel tout d'abord et ensuite est frappée d'une punition encore plus sévère. Il s'agit d'une punition draconienne qui aura une incidence sur non seulement la personne, mais également sa famille.

Il me semble donc que si nous voulons faire les choses correctement, il faut prévoir un réel droit d'appel devant les tribunaux. Mon amendement prévoit non seulement le droit d'appel dans le cas d'une personne ayant un casier judiciaire, mais également en cas d'examen de l'intention de résidence. Si cette intention est remise en question et le ministre décide de retirer la citoyenneté à quelqu'un pour ce motif, mon amendement en tient compte. Il prévoit le droit d'appel devant la Cour fédérale en cas de révocation de la citoyenneté. Il me semble que nous pouvons tous nous entendre là-dessus.

Le président : D'accord, je crois que nous avons tous bien compris l'intention de l'amendement. Il vise à fournir un droit d'appel qui n'est pas prévu dans le projet de loi actuel.

La sénatrice Cordy?

La sénatrice Cordy : Merci beaucoup.

Pour moi, il s'agit de créer deux catégories ou deux classes de Canadiens. Je crois que tous les Canadiens, qu'ils soient nés au pays ou non, qu'ils aient la double nationalité ou non, s'ils sont citoyens canadiens ils devraient avoir droit à une procédure d'appel en bonne et due forme. C'est notre tradition.

Le président : Merci.

Personne ne souhaite intervenir. Je demande donc à la greffière de soumettre la question aux voix. Vous êtes ou bien pour ou contre l'amendement. La greffière vous posera la question.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Cordy?

La sénatrice Cordy : Je suis pour.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Demers?

Le sénateur Demers : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Eaton?

La sénatrice Eaton : Je suis contre.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Eggleton?

Le sénateur Eggleton : Je suis pour.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Enverga?

Le sénateur Enverga : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Hubley?

La sénatrice Hubley : Pour.

Mme Richardson : L'honorable sénateur Munson?

Le sénateur Munson : Pour. Nous dépassons l'heure prévue, ce qui fera plaisir à Jacques Demers.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Ruth?

La sénatrice Ruth : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seidman?

La sénatrice Seidman : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Seth?

La sénatrice Seth : Non.

Mme Richardson : L'honorable sénatrice Stewart Olsen?

La sénatrice Stewart Olsen : Non.

Le sénateur Munson : Allez, osez une fois.

Mme Richardson : Quatre oui et sept non.

Le président : L'amendement est rejeté par 7 voix contre 4.

Il n'y a plus d'amendement pour cet article et je vous pose donc la question suivante : l'article 8 est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le sénateur Eggleton : Avec dissidence.

Le président : L'article est adopté, avec dissidence.

J'ai consulté la liste des amendements qu'il nous reste. Je n'ai pas reçu d'autres motions concernant des amendements et j'ai consulté le vice-président. Êtes-vous d'accord pour que je regroupe les articles 9 à 26 inclusivement afin de vous poser une seule question?

Des voix : D'accord.

Le président : Les articles 9 à 26 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Eggleton : Avec dissidence.

Le président : Les articles 9 à 26 sont adoptés, avec dissidence.

Nous en sommes donc à l'article 27. Ai-je votre permission de regrouper les articles 27 à 46?

Des voix : D'accord.

Le président : Les articles 27 à 46 sont-ils adoptés?

Des voix : Oui.

Le sénateur Eggleton : Avec dissidence.

Le président : Les articles 27 à 46 sont adoptés, avec dissidence.

Je vous pose maintenant la question suivante : l'article 1 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La sénatrice Cordy : Avec dissidence.

Le président : L'article 1 est adopté, avec dissidence.

Le titre est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le président : Le titre est adopté.

Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le sénateur Eggleton : Avec dissidence.

Le président : Le projet de loi est adopté, avec dissidence.

Le comité souhaite-t-il inclure des observations en annexe au rapport?

Le sénateur Eggleton : Voici une observation. Vous pouvez vous sentir un peu plus libre, car vous ne modifierez pas le projet de loi que vous avez juré d'appuyer. Mon observation porte sur la question des droits. On en a beaucoup parlé dans les discussions, et le ministre a soulevé la question également. La question figure dans la documentation ministérielle, mais elle n'est pas abordée dans le projet de loi. Une modification avait déjà été apportée dans une version précédente et le règlement a été modifié plus tôt cette année de façon à doubler les droits.

Permettez-moi de vous faire un petit cours de mathématiques. Afin de présenter une demande de citoyenneté, il faut prévoir 300 $ pour un adulte, mais il y a également ce qu'on appelle le droit à la citoyenneté qui coûte 100 $. Cela fait donc 400 $ par adulte, soit le double. Pour un enfant, il faut prévoir 100 $ en plus de 100 $ pour le droit à la citoyenneté, ce qui fait 200 $. Pour une famille constituée de deux adultes et de trois enfants, il faut prévoir 400 $ pour chaque adulte, donc 800 $, en plus de 200 $ par enfant, ce qui fait 600 $ et un total de 1 400 $ pour la famille. Il coûte donc 1 400 $ pour présenter une simple demande de citoyenneté, et si la demande est rejetée, aucun argent n'est remboursé.

Il se peut que certaines gens puissent se le permettre, mais ce n'est pas le cas de nombreuses personnes, surtout quand il s'agit de réfugiés ou d'une famille nombreuse à revenu faible. Souvenez-vous que récemment, de nombreux immigrés ont des revenus plus modestes et ne gagnent pas leur vie aussi bien que les immigrants dans le passé. C'est tout de même une somme imposante, 1 400 $ pour une famille de cinq personnes.

À cela s'ajoute, puisque vous insistez maintenant que les gens jusqu'à l'âge de 64 ans passent des tests linguistiques, une formation qui peut coûter plus de 200 $.

La sénatrice Eaton : Non, les cours de langue sont gratuits.

Le président : Je vous en prie, permettez-lui de finir.

Le sénateur Eggleton : D'accord. Assurez-vous de le mentionner dans une des observations, le fait qu'il y ait des cours de langue gratuits.

Plus tôt aujourd'hui, la sénatrice Eaton a indiqué, tout comme le ministre, qu'en fait les droits exigés sont inférieurs à ceux imposés par d'autres pays. C'est vrai dans le cas des États-Unis. Nos frais sont plus bas, mais les États-Unis offrent une exemption aux personnes à faible revenu. Nous ne le faisons pas, d'où mon observation.

Mon observation est la suivante : puisque les droits de demande de citoyenneté peuvent coûter cher aux familles à faible revenu, le ministre devrait songer à prévoir une procédure pour réduire ou éliminer les droits dans le cas des résidents permanents à faible revenu qui présentent une demande de citoyenneté.

La sénatrice Eaton : Cela me va, sénateur Eggleton, tout à fait.

Le sénateur Eggleton : D'accord, merci.

Le président : Je vous pose donc la question.

Le comité est-il prêt à annexer l'observation énoncée par le sénateur Eggleton?

Des voix : D'accord.

Le président : Nous sommes d'accord.

Le président : S'il faudra modifier la traduction une fois que la greffière aura déposé le rapport, consentez-vous à ce que le comité directeur approuve ces changements?

Des voix : Oui.

Le président : Merci.

Puis-je donc faire rapport de notre décision au Sénat?

Des voix : D'accord.

Le sénateur Eggleton : Avec dissidence.

Le président : Avec dissidence, donc, et en incorporant l'observation approuvée?

Des voix : D'accord.

Le président : Entendu.

Merci, mesdames et messieurs. Nous avons épuisé l'ordre du jour.

(La séance est levée.)


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