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AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international

Fascicule no 24 - Témoignages du 10 mai 2017


OTTAWA, le mercredi 10 mai 2017

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, auquel a été renvoyé le projet de loi C-30, Loi portant mise en œuvre de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne et ses États membres et comportant d'autres mesures, se réunit aujourd'hui, à 16 h 16, pour procéder à l'étude article par article du projet de loi; et pour étudier le projet de loi C-31, Loi portant mise en œuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et l'Ukraine.

La sénatrice A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Honorables sénateurs, nous sommes ici pour terminer notre étude sur le projet de loi C-30, Loi portant mise en œuvre de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne et ses États membres et comportant d'autres mesures.

S'il le comité n'y voit pas d'objection, nous allons maintenant commencer l'examen article par article du projet de loi. Êtes-vous d'accord?

Des voix : Oui.

La présidente : À n'importe quel moment, si l'un de vous ne sait plus tout à fait où nous en sommes dans le processus, qu'il n'hésite pas à demander des précisions. Je veux m'assurer que tout le monde comprendra les mêmes choses en même temps du début à la fin.

Pour ce qui est des rouages du processus, je rappelle aux sénateurs que, lorsque plus d'un amendement est proposé dans un article, les amendements doivent être présentés selon l'ordre des lignes du texte à modifier.

Si un sénateur ou une sénatrice s'oppose à la totalité d'un article, qu'il ou elle sache que, en comité, la bonne manière de faire n'est pas de proposer une motion pour la suppression de tout l'article, mais, plutôt, de voter contre son adoption.

Je vous rappelle également que certains amendements qui sont proposés peuvent avoir des répercussions substantielles sur d'autres parties du projet de loi. Il serait donc très utile qu'un sénateur ou une sénatrice qui propose un amendement désigne au comité les autres articles du projet de loi sur lesquels son amendement pourrait avoir une incidence. Autrement, il pourrait être très difficile pour le comité de prendre des décisions cohérentes.

Si des membres ont une question concernant le processus ou le bien-fondé de quoi que ce soit, je leur demande d'invoquer le Règlement. La présidence écoutera les arguments, décidera quand nous aurons assez discuté de la question de procédure et rendra une décision.

Le comité est le maître de ses travaux dans les limites établies par le Sénat et il est possible d'interjeter appel d'une décision de la présidence devant le comité principal en demandant si la décision doit être maintenue.

À titre de présidente, je ferai de mon mieux pour m'assurer que tous les sénateurs qui souhaitent prendre la parole puissent le faire. Cependant, je vais devoir compter sur votre coopération et je vous demande à tous de penser aux autres sénateurs et de faire des interventions aussi brèves et concises que possible.

Enfin, je tiens à rappeler aux sénateurs que, s'ils ont le moindre doute concernant les résultats d'un vote par oui ou non ou d'un vote à main levée, la façon la plus harmonieuse d'intervenir, c'est de demander un vote par appel nominal, qui, bien entendu, aboutira à des résultats clairs.

Les sénateurs savent qu'en cas d'égalité des voix, la motion sera rejetée.

Nous allons entendre des déclarations liminaires qui pourront fournir un peu de contexte ou vous remettre en mémoire certains des enjeux sur lesquels nous devons nous prononcer.

S'il n'y a pas de questions, pouvons-nous commencer?

Des voix : Oui.

La présidente : Plaît-il au comité de procéder à l'étude article par article du projet de loi C-30, Loi portant mise en œuvre de l'Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne et ses États membres et comportant d'autres mesures?

Des voix : Oui.

La présidente : Avec votre permission, le comité peut-il regrouper les articles lorsque cela est à-propos?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'étude du titre est-elle réservée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'étude de l'article 1, le titre abrégé, est-elle réservée?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 2 à 10 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 11 à 20 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 21 à 30 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 31 à 40 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 41 à 50 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 51 à 60 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 61 à 70 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 71 à 80 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 81 à 90 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 91 à 100 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 101 à 110 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 111 à 120 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 121 à 130 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : Les articles 130 à 138 sont-ils adoptés?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'annexe 1 est-elle adoptée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'annexe 2 est-elle adoptée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'annexe 3 est-elle adoptée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'annexe 4 est-elle adoptée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'annexe 5 est-elle adoptée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'annexe 6 est-elle adoptée?

Des voix : D'accord.

La présidente : L'article 1, le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : Le titre du projet de loi est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D'accord.

La présidente : Le comité souhaite-t-il que le rapport soit accompagné d'observations?

Des voix : Oui.

La présidente : Les sénateurs nous ont fait part des observations qu'ils souhaitent adjoindre au projet de loi. À plusieurs occasions, un document regroupant les observations pressenties pas les sénateurs a été acheminé au comité directeur puis aux membres.

Nous pouvons discuter de ces observations à huis clos ou rester en discussion ouverte. C'est aux sénateurs de décider.

Des voix : Une discussion ouverte.

La présidente : Transparence et ouverture. Merci.

Les observations sont une compilation de toutes les propositions et recommandations que les sénateurs du comité ont formulées. Évidemment, nous avons raccourci certaines des plus longues, mais le document fait quand même état des observations que les sénateurs souhaitent voir intégrer au document.

Plaît-il aux membres du comité d'accepter telle quelle les observations dont ils ont pris connaissance?

La sénatrice Eaton : Je trouve dommage qu'on les ait toutes regroupées de cette façon. Remarquez que je n'ai peut- être vu qu'une version provisoire. Pour tous les gens des ministères qui liront cela, il serait bien de mettre certains points en évidence. Je changerais peut-être l'ordre des sujets. Vous avez mis le transport des marchandises à la toute fin, alors que cette question a été un sujet de préoccupation majeur. C'est un aspect de l'accord qui m'interpelle énormément.

Il y a aussi cette observation sur la Bulgarie et la Roumanie. Ce serait bien que certaines observations soient mises à l'avant-plan et que d'autres soient reléguées au second plan. C'est une opinion bien personnelle.

La présidente : Il y a deux écoles de pensée : faut-il mettre les sujets les plus percutants au début ou à la fin? Ici, ils sont à la fin. Je crois que celui-là a pris beaucoup de place, et c'est pourquoi il se retrouve là où il est.

Je sais que la question des visas en a préoccupé plus d'un et que c'est le sénateur Downe qui a mené la charge. Nous sommes passés par de nombreuses ébauches, par d'innombrables mots. Je tiens à remercier le sénateur Downe. Ses compétences rédactionnelles ont joué un rôle important dans cet exercice.

La sénatrice Eaton : Pourtant, la question a été parachutée à la fin du document. Ne croyez-vous pas que les gens commencent au début et que si la lecture s'avère ardue...

Le sénateur Downe : C'est une lecture captivante.

La sénatrice Eaton : Je n'arrêtais pas de me demander à quel moment j'allais arriver aux sujets vraiment importants.

La présidente : Dans le cadre de notre entente commerciale, ce qui compte pour nous, c'est que nous allons talonner les ministres à propos de ces questions. Alors, elles sont là, et les ministres seront sur un pied d'alerte.

J'informe les nouveaux membres que, lors de séances comme la présente, nous avons l'habitude de recevoir les représentants des ministères qui nous ont prêté main-forte avec le projet de loi, et je suis contente que ce soit le cas aujourd'hui. Ils sont là pour répondre à vos questions, le cas échéant. Je vous rappelle toutefois qu'ils entendent tout ce que vous dites au sujet des observations, et qu'ils vont en prendre connaissance dès que nous nous serons mis d'accord à leur égard.

Nous avons une stratégie : nous n'allons pas laisser aller ces enjeux qui ont été portés à notre attention et nous allons faire un suivi auprès des ministres pour qu'ils nous donnent des réponses.

Comme il s'agit à certains égards d'un projet de loi omnibus — attendu qu'il couvre une si grande partie de l'AECG —, il y a beaucoup de ministres à qui nous allons demander des réponses.

La sénatrice Eaton : Au moment de rédiger les règlements, les ministres vont-ils tenir compte de nos propositions?

La présidente : Je crois que nous allons leur demander de le faire.

La sénatrice Eaton : Merci.

La présidente : C'est le grand message. Je sais que vous avez dû vous absenter pendant un certain temps, mais nous avons dit aux représentants du gouvernement que, de plus en plus, on procède avec les lois dans un premier temps, puis avec les règlements. C'est quelque chose qui nous dérange. C'est pour cette raison que la responsabilisation ne doit pas concerner que les lois du Parlement, mais, de plus en plus, les règlements aussi. C'est aussi pour cette raison que nous avons ici ce que les parties concernées et d'autres, dont nous, doivent savoir à propos de ce qui se retrouvera dans les règlements, et ce, avant qu'il y ait publication dans la Gazette du Canada.

Le sénateur Gold : Je ne propose aucun changement. Permettez-moi cependant une ou deux observations. Je crois que le document est vraiment bien fait. J'ai une opinion légèrement différente sur ce qui est le plus important, mais je ne propose pas de changement pour autant.

Je crois que les observations les plus importantes sont celles qui sont les plus générales au sujet du processus : 1, 2, 3, 4 et, dans une certaine mesure, 5, 6 et 9. Il y a aussi des observations ou des allusions à la propriété intellectuelle, au transport de marchandises, comme vous l'avez dit, et aux visas.

Ce qui m'ennuie un peu, c'est que nous avons aussi entendu beaucoup d'exposés de nombreux autres secteurs — je pense à l'industrie fromagère, entre autres — ainsi que des préoccupations plus générales sur les répercussions de l'accord. Ces préoccupations sont évoquées indirectement lorsque nous parlons à juste titre de la nécessité de veiller à ce que les avantages et les répercussions soient répartis équitablement.

Je crains que nous puissions donner l'impression de ne pas avoir examiné tous les tenants et aboutissants de l'accord, ce qui n'est pas vrai.

Cela dit, pour les besoins du compte rendu, je souhaite expliquer à tous comment je comprends certains mots clés de ce document. Encore une fois, je ne suis pas en train de dire que nous devrions en remanier le libellé.

À l'observation 6, lorsque nous recommandons que le gouvernement du Canada évalue l'incidence de l'AECG et publie un rapport à ce sujet, je prends le mot incidence dans un sens très large. Je veux que l'on parle de l'incidence sur les régions, de l'incidence sur les femmes, et cetera. Nous avons en effet raison de craindre que certaines mesures aient une incidence disproportionnée sur les femmes. Quoi qu'il en soit, je comprends que l'incidence aura cette taille; je n'ai pas besoin qu'on me la décrive plus en détail, et c'est la même chose pour la distribution équitable des avantages.

Dans mon esprit, l'incidence comprend aussi certaines des conséquences indésirables — ce n'est peut-être pas le bon mot —, certaines des conséquences inévitables de la mise en œuvre de l'accord. En effet, certains secteurs ou certaines personnes pourraient en souffrir, et d'autres, en profiter.

Voilà les observations que je voulais faire. Maintenant, je serai heureux d'adopter ledit document.

La présidente : Vous avez tout à fait raison de condenser vos propos dans des observations, autrement, nous allons devoir reprendre les témoignages de tout le monde. Lorsque l'on formule des observations, tout doit être inclus de façon condensée. Lorsque nous aurons fait notre suivi et que nous aurons eu une réponse du ministre, il y aura des discussions pour nous assurer que tout a été couvert.

C'est au paragraphe 9 que nous disons que le gouvernement du Canada devrait continuer à mettre au point des mesures susceptibles d'améliorer le partage équitable des avantages que les accords de libre-échange procurent aux Canadiens. Il faut comprendre de façon implicite que cela couvre tous les points de notre témoignage. C'est comme cela que les choses fonctionnent habituellement.

Comme c'est vous qui en avez parlé ici, vous aurez l'obligation spéciale de me rappeler de souligner dans tous les échanges que nous aurons avec tous ceux qui ont quoi que ce soit à faire avec le projet de loi que ces questions sont des questions importantes, et d'éviter par conséquent de les banaliser.

Je crois que c'est important, mais en même temps, il y a tellement de choses importantes. En fait, les observations sont là pour demander au gouvernement de garder les yeux bien ouverts. L'accord commercial est une chose et nous ne pouvons pas nous mettre dans son chemin. Pour que l'accord fonctionne, le projet de loi C-30 doit être amendé, mais pour qu'il fonctionne vraiment, nous devons avoir une stratégie de mise en œuvre et écouter les personnes qui sont en mesure de le faire fonctionner. Ce sont les parties concernées, le public canadien et les parlementaires. Voilà donc l'objectif global de ces observations.

J'essaie de les mettre toutes en équilibre, et je défends tous les rédacteurs qui y ont travaillé. Le libellé ne m'appartient pas. Il est le fruit des contributions de toutes ces personnes. J'essaie de leur rendre justice. Je crois que nous sommes parvenus à synthétiser toutes les préoccupations. Elles n'ont peut-être pas toute la vigueur qu'on leur souhaiterait, mais elles sont là, et notre travail consiste désormais à faire le suivi qui s'impose.

La sénatrice Cordy : Je tiens à féliciter le comité directeur et les rédacteurs, car vos observations reprennent une bonne partie des choses dont nous avons discuté et l'essence des témoignages que nous avons entendus. En fait, vous avez été en mesure de tout comprimer sur deux pages, alors que le document aurait bien pu en avoir 20, j'en suis convaincue.

Après notre réunion de la semaine dernière, j'ai reçu une lettre de l'un des témoins que nous avons entendus. Il s'agit en fait de Marlene Usher, qui est chef de la direction de Société de développement du port de Sydney. Dans sa lettre, Mme Usher s'est dite très préoccupée du statut spécial accordé aux ports de Halifax et de Montréal concernant le service d'apport en aller simple. Elle croit que les ports plus modestes, comme celui de Sydney, seront désavantagés par cette reconnaissance particulière accordée à deux autres ports.

Je suis de Halifax, alors je ne m'en préoccupe pas outre mesure; je ne crie pas à l'« exclusion ». Tout ce que je dis, c'est qu'elle propose que le port de Sydney et les ports de plus petite taille soient inclus.

Elle a proposé un amendement au projet de loi C-30. Eh bien, cela n'est pas une possibilité. Nous avons adopté le projet de loi. Du reste, lorsque nous examinons un accord de libre-échange, c'est tout ou rien, car ce n'est pas nous qui l'avons rédigé.

Cela dit, je me demandais si sa suggestion pouvait être couverte par l'observation numéro 7, où il est question du transport de marchandises, ou si nous devrions plutôt regarder du côté de la Loi sur le cabotage, qui est abordée au paragraphe 92(2.4). En fait, nous pourrions peut-être demander au comité des transports d'examiner quelque chose du genre. J'aimerais pouvoir lui donner une réponse, car je sais qu'ils ont investi beaucoup d'argent dans le port de Sydney, et qu'ils aimeraient être considérés sur un pied d'égalité avec les autres en ce qui a trait au transport de marchandises.

La présidente : De mémoire, je peux vous répondre que nous avons couvert cette question. Des questions formulées par des députés de votre région du pays — si je ne m'abuse — cherchaient à savoir pourquoi certains ports étaient couverts et que d'autres ne l'étaient pas, et je crois que nous avons répondu à cela.

Une autre préoccupation bien présente portait sur l'obligation pour les navires européens qui viennent au Canada de se conformer aux mêmes normes que celles auxquelles les navires canadiens doivent se conformer. Il y a déjà des règles à cet égard, et elles ne concernent pas que les normes du travail, mais d'autres choses aussi. Pour certains témoins, une partie de cette crainte venait du fait qu'il y a tellement de ministères qui sont concernés par ces règles que leur application laisse parfois à désirer, à un point tel que c'est habituellement l'industrie ou le syndicat qui doit y voir.

Alors cette recommandation stipule que nous nous attendons à ce que les mêmes normes soient appliquées de part et d'autre. Nous faisons des recommandations sur la façon dont cela devrait se passer.

Le dialogue ne s'est pas limité au projet de loi C-30 et à l'AECG. Il a également été question de la Loi sur le cabotage. Je pense que c'est une chose qui n'a pas bien été étudiée. Or, le sénateur Dawson a mentionné que son comité est bien placé pour faire cette étude.

Je pense que tous les députés sont libres de se pencher là-dessus, ou que votre comité peut s'en occuper. Nous n'aimons pas dire à d'autres comités ce qu'ils devraient faire. C'est en suspens ici. Votre présidente est ici. La question nous préoccupe beaucoup, et ce n'est donc pas une chose qui sera mise de côté. Nous continuerons de faire le meilleur suivi possible et de travailler là-dessus, mais je pense que la question va un peu plus loin que la teneur du projet de loi C-30 et de l'AECG. Cela se rapporte à la Loi sur le cabotage.

J'ai reçu de nombreux courriels qui m'étaient personnellement adressés, pas au comité, et dans lesquels on soulevait le même genre de question, à savoir si le moment est venu de se pencher sur tout cela, sur le transport.

La sénatrice Cordy : Je pourrais peut-être en discuter après coup.

La présidente : Le sénateur Dawson a peut-être quelque chose à dire à ce sujet.

Le sénateur Dawson : J'ai deux observations. Premièrement, je pense que c'est très bien rédigé, que tout ce qui devait être inclus est inclus.

Rappelez-vous que j'ai demandé à quelques reprises ce que vous aimeriez pouvoir dire dans quelques années si cela ne fonctionne pas. Eh bien, les aspects pour lesquels vous diriez « je vous l'avais bien dit » se trouvent dans ce document.

En ce qui concerne la question du transport, je suis parfaitement d'accord avec vous quand vous dites que cela se rapporte beaucoup plus au transport, au ministre des Transports et aux administrations portuaires qu'à l'accord. J'ai déjà offert à certains témoins, notamment la semaine dernière, de me faire part de leurs recommandations pour moderniser certaines lois de Transports Canada. Je serais certainement disposé à les présenter à notre comité.

De plus, nous pouvons les présenter au Sénat ou les soumettre directement au bureau du ministre s'il s'agit d'une demande précise. En tant que membre du comité des transports et du comité des affaires étrangères, j'ai dit que nous verrions ce que nous pouvons faire à cet égard. C'est dans le compte rendu.

Je pense que le vice-président a très bien contrôlé le libellé, et je crois que nous devrions ajouter les observations.

La présidente : Merci.

La sénatrice Cordy : Je vais transmettre l'information au président du comité des transports. Merci beaucoup, et merci au nom du PDG du port de Sydney.

Le sénateur Pratte : Je ne suis pas membre du comité et je veux juste dire, pour le compte rendu, que toutes les observations sont bonnes, mais que le ton me semble très négatif en général. Cela n'a peut-être pas été ainsi pour l'ensemble des témoignages entendus par le comité. De nombreux témoins étaient très favorables à l'accord. Bien entendu, nous avons fini par voter pour l'accord étant donné qu'il nous convient.

Je veux attirer l'attention, pour le compte rendu, sur la dernière phrase des observations — qui explique selon moi le vote du comité et qui est très importante — dans laquelle le comité souligne que l'AECG est un modèle plus progressif d'accord de libre-échange et que son entrée en vigueur est un signal important de l'engagement du Canada à l'égard de l'ouverture, du commerce et de l'investissement. C'est la dernière phrase des deux pages, mais je crois que c'est extrêmement important.

La présidente : Je dois dire qu'après toutes les années que j'ai passées ici, j'ai rarement vu des observations qui vantent un projet de loi. Comme vous l'avez souligné, c'est ce que nous faisons en votant pour le projet de loi, mais les observations doivent signaler les difficultés qui doivent faire l'objet d'un suivi et auxquelles le gouvernement doit porter attention. Nous n'avions toutefois pas l'impression qu'un amendement était justifié ou disponible pour l'instant, et le gouvernement a donc un peu de temps pour y réfléchir.

Nous espérons que nos observations sont prises au sérieux. Autrement, je ne pense pas que nous voudrions procéder ainsi. Notre travail consiste à critiquer le projet de loi, à l'examiner et à signaler ses failles. Il n'est pas question de ce que nous pensons, mais plutôt de ce que les témoins viennent nous dire. C'est pour cette raison que nous en sommes saisis.

Cela revient un peu à ne pas se faire dire ce qui va bien, mais à toujours se faire dire ce qui ne va pas si bien. Je pense que c'est le même genre de chose.

Nous sommes saisis du projet de loi et nous l'aimons. Nous pensons qu'il est bon, mais il ne sera pas adopté si on ne prête pas attention aux choses que nous avons mises de l'avant. L'objectif est donc d'aider le gouvernement à mettre l'accent sur les préoccupations des gens qui sont venus nous voir.

Le sénateur Pratte : D'accord.

Le sénateur Downe : J'allais dire exactement la même chose. L'aspect positif est l'adoption du projet de loi; il s'agit ici des aspects négatifs, comme le sénateur Pratte et vous l'avez correctement indiqué. Je ne vais pas répéter ce que vous avez dit, madame la présidente, mais vous l'avez parfaitement bien illustré.

Pour donner suite au point du sénateur Dawson, je n'avais des observations que sur les deux ou trois questions qui me préoccupaient. C'est surtout la présidence et d'autres sénateurs qui se sont prononcés. Je ne veux pas m'attribuer inutilement le mérite.

La présidente : Je pense que le sénateur Dawson a assumé la présidence assez longtemps pour savoir que le rôle du vice-président est de surveiller la présidence. Vous avez donc bien fait votre travail.

Le sénateur Dawson : Ce qui me pose problème, c'est que nous avons eu 12 vice-présidents au cours des cinq dernières années. Ils sont devenus présidents d'autres comités et m'ont laissé tomber.

La présidente : Je peux dire que nous avons eu de la constance à notre comité.

Sommes-nous prêts à accepter les observations? Qui veut en proposer l'adoption? Le sénateur Downe.

Que tous ceux qui sont pour l'ajout des observations en pièce jointe se manifestent?

Des voix : D'accord.

La sénatrice Cools : Je signale pour le compte rendu que le vote était unanime.

La présidente : Le vote était unanime, bien.

Êtes-vous d'accord pour que je fasse rapport du projet de loi en y joignant les observations?

Des voix : D'accord.

La présidente : Je pense que nous avons fait notre devoir. Merci.

Je veux remercier les fonctionnaires d'être venus répondre à nos questions. Votre présence est importante, car les questions des sénateurs ont besoin de réponses, pour éviter d'immobiliser davantage le projet de loi. Je remercie les fonctionnaires de leur comparution.

Chers sénateurs, nous allons maintenant poursuivre à huis clos afin d'examiner les travaux futurs du comité. Nous reprendrons ensuite la séance publique pour entendre le deuxième groupe de témoins. J'invite tous ceux qui ne sont pas sénateurs ou membres du personnel d'un sénateur à maintenant quitter la salle.

(La séance se poursuit à huis clos.)

——————

(La séance publique reprend.)

La présidente : Chers sénateurs, nous allons maintenant entamer notre étude du projet de loi C-31, Loi portant mise en œuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et l'Ukraine.

Comme je l'ai mentionné aux sénateurs, nous commençons habituellement par le ministre, mais compte tenu des inondations dans sa circonscription, le ministre se trouve sur place, et nous le comprenons fort bien.

Étant donné que l'accord de libre-échange serait entre le Canada et Ukraine, nous avons pensé commencer par un représentant du gouvernement de l'Ukraine, et qui de mieux que l'ambassadeur Andrii Shevchenko, que beaucoup d'entre nous connaissent. Il est extrêmement actif sur la Colline et représente l'Ukraine à bien des égards. Je dois dire que c'est un ambassadeur dont la présence se fait sentir d'un bout à l'autre du Canada et qui comprend la complexité de notre pays.

Nous sommes heureux de vous avoir parmi nous, monsieur l'ambassadeur. Nous sommes chanceux qu'une délégation du Parlement de l'Ukraine soit actuellement au Canada. La délégation a rencontré le Président du Sénat, le Groupe d'amitié parlementaire Canada-Ukraine ainsi que de nombreuses autres entités politiques au Canada, notamment dans le cadre d'une séance du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international de la Chambre.

Je souhaite également la bienvenue au comité à Son Excellence Oksana Syroid, la vice-présidente du Parlement de l'Ukraine. Je mentionne qu'elle n'est pas étrangère au Canada, car elle a obtenu une maîtrise en droit de l'Université d'Ottawa. Et ce n'est pas tout. Nous sommes très heureux que vous compreniez le Canada et que vous soyez de passage au pays pour représenter l'Ukraine.

Son Excellence est accompagnée de Lehor Soboliev, qui est député et vice-président de la faction Samopomich — « faction » signifie parti — et de Ivan Miroshnichenko, un député de la même faction qui assument des responsabilités dans le domaine agraire. L'agriculture est très importante tant au Canada qu'en Ukraine.

Bienvenue à nos trois invités.

Je ne vais pas vous présenter la biographie de l'ambassadeur. Nous le connaissons très bien et ce serait une perte de temps. Je pense qu'il est plus important de s'attaquer au projet de loi C-31, Loi portant mise en œuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et l'Ukraine.

Votre Excellence, vous avez la parole. Nous passerons ensuite aux questions.

Son Excellence Andrii Shevchenko, ambassadeur, ambassade de l'Ukraine : Madame la présidente, mesdames et messieurs les sénateurs, merci.

Je m'attaque directement au vif du sujet : la valeur totale des échanges commerciaux entre l'Ukraine et le Canada était d'environ 500 millions de dollars canadiens l'année dernière. J'estime que ce n'est presque rien. C'est presque négligeable quand on pense à la puissante économie canadienne et au marché ukrainien de 45 millions de personnes. Par conséquent, je crois que le projet de loi que vous vous apprêtez à étudier nous aidera à remédier à la situation.

Premièrement, il sera bon pour les entreprises du Canada et de l'Ukraine. À l'heure actuelle, l'Ukraine est le quatrième importateur de fruits de mer et de poissons canadiens. De plus, en ce moment même, de grandes entreprises canadiennes impartissent leur production de logiciels à des entreprises ukrainiennes de technologie de l'information.

Ce projet de loi et l'accord proposé de libre-échange entre le Canada et l'Ukraine aideront à créer plus d'emplois et à offrir de meilleurs débouchés aux entreprises.

En ce qui a trait aux droits de douane, l'accord de libre-échange entre le Canada et l'Ukraine nous permettra d'abolir jusqu'à 98 p. 100 de ces droits au cours des sept prochaines années, 72 p. 100 juste après la ratification de l'accord et jusqu'à 98 p. 100 au cours des sept années suivantes.

Deuxièmement, cet accord autorisera les entreprises canadiennes à participer aux appels d'offres du gouvernement ukrainien. Nous sommes un pays qui conclut énormément de marchés publics. Chaque jour, environ 4 000 appels d'offres sont annoncés en Ukraine, et le budget prévu à cette fin est d'à peu près 15 milliards de dollars canadiens. Nous encourageons fortement les entreprises canadiennes à participer aux appels d'offres du gouvernement ukrainien. Leur participation est nécessaire étant donné qu'elle nous permettra d'avoir de bonnes technologies et de bonnes pratiques commerciales et qu'elle nous aidera à lutter contre la corruption.

Enfin, l'accord de libre-échange offre une grande protection en matière de commerce électronique et de droits intellectuels, et les technologies de l'information représentent l'un des principaux domaines de coopération entre l'Ukraine et le Canada. Ce secteur profitera beaucoup de cet accord.

À part cela, je dirais juste que pour mon pays, pour l'Ukraine, cet accord témoignera clairement de l'appui du Canada. Vous êtes bien au fait de la situation en Ukraine. Vous savez à quel point nous avons besoin de ce genre de soutien et de solidarité. Je pense que l'accord enverra un message très éloquent à nos autres partenaires occidentaux. Il indiquera clairement que l'Ukraine est un bon endroit pour faire des affaires, gagner de l'argent et créer des emplois, ainsi qu'un pays avec lequel on peut nouer un partenariat très solide pour l'avenir.

Cet accord est le fruit d'une collaboration bipartite de longue date. Il a été négocié auprès du gouvernement précédent et signé l'année dernière par le premier ministre Trudeau lors de sa visite en Ukraine. J'ai eu la chance de l'accompagner pendant sa visite en Ukraine, et j'ai donc vu de mes propres yeux à quel point l'idée même d'un accord de libre-échange entre l'Ukraine et le Canada inspirait de la reconnaissance et de l'enthousiasme à Kiev et ailleurs au pays.

Au nom de l'Ukraine, et en présence de la délégation du Parlement du pays, je vous encourage vivement à appuyer l'accord de libre-échange entre le Canada et Ukraine. Je crois que cet accord représentera pour nous notre contribution à la création d'un plus grand nombre de débouchés pour nos deux pays.

La présidente : Je pense qu'il convient de noter que votre président a signé l'accord de votre côté. Comme par hasard, je me trouvais en Ukraine à ce moment-là.

Vous êtes maintenant en mesure de travailler à sa mise en œuvre s'il est adopté ici, n'est-ce pas?

M. Shevchenko : Tout à fait.

Une fois de plus, en présence de la délégation du Parlement de l'Ukraine, j'aimerais remercier tous ceux qui ont contribué à toute la paperasse des deux côtés de l'océan. Le Parlement de l'Ukraine a terminé le processus de ratification de l'accord, et le président du pays l'a promulgué.

La présidente : Vous pourriez peut-être parler un peu plus d'agriculture. Nous sommes connus comme le grenier du monde, et je crois qu'on a déjà dit la même chose de vous. Quels seraient les avantages de l'accord dans le secteur agricole? Vous avez parlé des services de technologie de l'information. Je crois que c'est un aspect important. Vous pourriez peut-être nous parler un peu plus de la réforme agraire et de son incidence sur l'agriculture.

M. Shevchenko : Je vous encourage fortement à suivre deux grands processus qui seront en branle au cours des deux ou trois prochaines années en Ukraine. Il y a d'abord la privatisation. Nous nous apprêtons à assister à la dernière vague de privatisation. L'Ukraine a 4 500 entreprises gérées par l'État. C'est depuis longtemps une grande source de corruption au pays. Nous sommes pas mal certains qu'un processus adéquat de privatisation se traduira par l'arrivée de nouvelles technologies et de nouvelles connaissances au pays ainsi que par beaucoup de progrès.

La deuxième plus grande source de réformes est la libéralisation des terres agricoles en Ukraine. Je suis certain qu'une fois que nous irons de l'avant dans ce dossier, nous obtiendrons d'énormes débouchés pour les entreprises.

Nous avons besoin de nouvelles technologies et des connaissances que le Canada possède dans le secteur agricole. Nous avons besoin de vos spécialistes, qui pourraient nous aider à devenir plus efficaces dans le secteur agricole. Les résultats seraient vraiment extraordinaires. À l'heure actuelle, l'Ukraine est un pays de premier plan dans la production d'huile de tournesol, entre autres choses. Je pense que nous pouvons en faire beaucoup plus ensemble.

La présidente : J'ai remarqué récemment que vous avez beaucoup d'industries qui ont des liens avec la Russie, qu'une partie de vos produits, de votre machinerie et ainsi de suite provient de là. À la lumière de ce qui passe actuellement en Ukraine compte tenu de l'intervention de la Russie, vous êtes à la recherche d'autres avenues. Je me suis penchée sur le domaine de l'aéronautique où les ordinateurs dans, à vrai dire, le plus grand avion du monde — un avion-cargo de transport lourd —, qui se trouve en Ukraine, utilisent certaines technologies qui proviennent encore de la Russie, et vous en cherchez d'autres. J'ai cru comprendre que le Canada est peut-être une des options ayant été envisagées, n'est-ce pas?

M. Shevchenko : Tout d'abord, je crois que l'aérospatiale est déjà en train de devenir un exemple de réussite pour le Canada et l'Ukraine. L'année dernière, le premier appareil Antonov construit en Ukraine au moyen d'un moteur canadien de Pratt & Whitney a pris son envol, et nous espérons voir beaucoup d'autres réussites dans le genre. Je pense d'ailleurs que nos deux pays auront beaucoup de nouvelles possibilités de coopération dans le domaine de l'aérospatiale.

C'est pour nous une grande fierté de savoir que les plus grands avions-cargos de la planète sont entièrement conçus et fabriqués en Ukraine. C'est une chose qui nous tient vraiment à cœur, et nous pensons que c'est une chose dont le Canada, compte tenu de ses vastes territoires, surtout dans le Nord, peut vraiment tirer parti.

Je vais vous donner un seul exemple. Le modèle Antonov An-70 est un avion unique qui peut porter jusqu'à 20 tonnes de marchandises et qui peut se poser sur des pistes plutôt courtes. Il peut donc desservir les collectivités éloignées du Nord canadien. Nous avons beaucoup d'exemples semblables.

J'ai eu la chance de voyager partout au Canada. Chaque fois, j'essaie de trouver des débouchés pour les entreprises ukrainiennes et canadiennes, que ce soit en Saskatchewan ou en Colombie-Britannique. Je suis très surpris de voir à quel point ces débouchés sont diversifiés. L'année dernière, l'Ukraine a ouvert son marché au bœuf et au porc canadiens. Je pense qu'on peut maintenant trouver de bons produits triple A dans les épiceries ukrainiennes. Ce genre de mesure est sensé pour la majorité des Ukrainiens étant donné que nous nous considérons essentiellement comme un pays carnivore. C'est ainsi que la coopération et le XXIe siècle fonctionnent. Je me réjouis grandement de savoir que cet accord offrira des débouchés que nous ne voyons probablement même pas encore.

La sénatrice Eaton : Bienvenue, monsieur l'ambassadeur.

Vous parlez de marchés publics et de nombreux débouchés. Cela comprend-il des infrastructures pour du matériel militaire? Qu'est-ce que cela comprend au juste?

M. Shevchenko : Oui, en partie. En ce qui concerne la défense et les militaires, nous espérons en fait qu'une multitude de débouchés découleront de la mise en œuvre de l'accord de coopération de défense Canada-Ukraine signé récemment et de l'ajout de l'Ukraine à la Liste des pays désignés (armes automatiques).

Pour en revenir aux marchés publics, nous parlons des meilleurs débouchés qui soient. En Ukraine, les marchés publics ne sont pas négociés uniquement par le gouvernement fédéral et les gouvernements locaux; les entreprises d'État en concluent aussi. Pensez aux 4 500 entreprises d'État que nous dirigeons encore en Ukraine. Elles englobent des chemins de fer, des aéroports et des infrastructures de base, et elles engendrent donc une myriade de débouchés en matière de marchés publics.

La sénatrice Eaton : En 2016, la Banque mondiale a classé l'Ukraine au 80e rang sur 190 pays en ce qui concerne la facilité de faire des affaires, soit après le Belarus, la Russie, la Turquie et l'Afrique du Sud. Avez-vous des observations à formuler à ce sujet?

M. Shevchenko : Oui. J'aimerais que mon pays se classe beaucoup plus haut sur cette liste. Par contre, notre rang était beaucoup plus bas il y a à peine deux ou trois ans. J'estime que nous avons fait des progrès remarquables. J'ai l'impression que bon nombre de ces classements ne témoignent pas encore de ces progrès. Nous avons adopté des mesures législatives très importantes pour ouvrir et déréglementer notre marché, et j'espère voir ces classements progresser.

En outre, cela nous rappelle que nous avons encore beaucoup de travail à accomplir. Nous espérons que parmi les importantes retombées de l'accord de libre-échange, on retrouvera des réformes, une déréglementation des entreprises et une lutte contre la corruption.

Imaginez la situation qui surviendra quand une entreprise canadienne pourra participer à un appel d'offres à Kiev, à Odessa ou à Lviv. Cela entraînera de nouvelles pratiques d'affaires et une concurrence honnête. Nous verrons de nombreux aspects commerciaux changer simplement en raison de la présence d'entreprises canadiennes sur le terrain.

Le sénateur Woo : Bonjour, Votre Excellence; je vous souhaite la bienvenue, à vous et à vos collègues parlementaires.

Je souhaite vous interroger à propos de la privatisation de quelque 1 400 entreprises d'État. Certaines dispositions de l'accord proposé donnent-elles aux entreprises canadiennes des occasions privilégiées d'acquérir des entreprises d'État qui sont en voie d'être privatisées en Ukraine?

M. Shevchenko : Elles auront un accès à ces processus d'achat identique à celui des entreprises ukrainiennes. Nous nous enorgueillissons que l'Ukraine mette en œuvre le merveilleux système électronique ProZorro, qui est considéré comme l'un des meilleurs logiciels de la planète pour gérer des marchés publics.

Toutefois, nous travaillons encore à une réforme du système judiciaire, qui garantira que tous les intérêts des entreprises et les complications possibles seront réglés d'une façon fort équitable.

Pour répondre à votre question à propos de l'éventuel accès privilégié des entreprises canadiennes, je dirais qu'effectivement, elles en auront un, au même titre que les entreprises ukrainiennes.

Le sénateur Woo : Je comprends que les Ukrainiens bénéficient d'un traitement de faveur national qui les fait passer en premier, mais, en vertu de l'accord, les entreprises canadiennes auront-elles un accès privilégié aux entreprises d'État privatisées par rapport aux autres soumissionnaires étrangers?

M. Shevchenko : Oui, par rapport à de nombreux autres pays. Je crois que le traitement préférentiel ne sera pas réservé uniquement à vos entreprises, mais aussi aux entreprises européennes. Comme vous le savez, nous avons signé un accord global de libre-échange avec l'Union européenne, et j'espère que, très bientôt, le Canada et l'Union européenne mèneront à bien toutes les procédures de ratification liées à l'AECG, et je vous souhaite bonne chance à cet égard.

Je pense qu'en un certain sens, nous élargissons cette zone de saine concurrence, de bonnes affaires et de débouchés commerciaux. Oui, cet accord bénéficiera grandement aux entreprises canadiennes au chapitre des marchés publics, par rapport aux autres pays avec lesquels nous n'avons pas conclu des accords semblables. Il en va de même de notre accord avec l'Europe, et il nous faudra envisager de négocier d'autres traités.

Le sénateur Woo : Je ne veux pas tomber dans des considérations trop techniques, et je le comprendrai, si vous n'avez pas tous les détails en main, mais comment les traitements préférentiels sont-ils exprimés dans l'accord? À l'aide d'un seuil inférieur? Les pays avec lesquels vous n'avez pas conclu d'accords de libre-échange ont-ils un accès restreint aux processus d'achat de ces entreprises d'État? En ce sens, le Canada et les autres partenaires de libre-échange de l'Ukraine ont-ils un accès privilégié aux appels d'offres lancés dans le cadre de la privatisation des entreprises d'État?

M. Shevchenko : Je crois comprendre — et je devrai me renseigner davantage à cet égard — que le principal avantage prendra la forme de renseignements. Pour veiller à ce que les entreprises canadiennes intéressées les obtiennent tous très rapidement, l'Ukraine et le Canada créeront, dans les 60 jours qui suivront les procédures de ratification, une commission mixte qui étudiera précisément la façon de veiller à ce que les entreprises des deux côtés de l'océan puissent tirer parti de tous les avantages offerts par les nouveaux règlements.

Le sénateur Gold : Bienvenue, Votre Excellence. J'ai visité votre pays pour la première fois il y a 30 ans, pendant les dernières années de l'Union soviétique. Je me rappelle d'avoir participé, en compagnie d'un groupe d'avocats, à une séance d'information portant sur le plus récent plan quinquennal à mon arrivée à Kiev, à bord d'un train de nuit. J'ai visité l'Ukraine maintes fois depuis, bien que ces visites ne soient pas récentes. J'ai visité Kiev et la campagne à de nombreuses reprises au cours des années 2000. Ma question est, en un certain sens, éclairée par ces visites, et elle donne suite à un certain nombre de questions.

Compte tenu de tous les changements et de toutes les difficultés que votre pays a affrontés au cours des 30 dernières années, vous nous avez donné un aperçu des changements qui ont été apportés. Pourriez-vous nous fournir des renseignements supplémentaires sur les progrès réalisés et les problèmes toujours pas résolus au chapitre des normes du travail, des normes environnementales et, en particulier, de votre système judiciaire? Ces enjeux sont manifestement des sources d'inquiétudes pour vos citoyens, les Canadiens et les entreprises canadiennes. Pourriez-vous nous en dire davantage à propos de ce que vous avez en tête?

M. Shevchenko : Si je prenais l'avion pour voyager, disons, de Montréal à Odessa, je serais probablement étonné d'observer cette situation bien réelle. Si vous vous promeniez dans la rue, vous verriez une économie en pleine expansion. Vous assisteriez au lancement de petites et moyennes entreprises. Vous apercevriez des gens débordant d'énergie. C'est compréhensible parce que les Ukrainiens ont finalement l'impression d'avoir atteint le stade où ils peuvent choisir eux-mêmes leur propre destin.

Par contre, lorsque vous arrivez à la maison et que vous allumez la télévision, vous entendez d'horribles nouvelles en provenance de l'Est ou de la Crimée. Ces deux régions ont été converties en terres tribales et, manifestement, ce sont des sujets très douloureux pour tous les Ukrainiens.

Cela représente donc la période que nous traversons. Nous sentons que c'est le moment de tirer parti d'importantes perspectives d'avenir. En fait, nous assistons à un atelier d'édification du pays qui nous donne la chance de le façonner ce pays comme nous l'avons toujours souhaité. En revanche, nous sommes forcés de mener cette horrible guerre qui a été introduite sur notre territoire, et nous vous sommes reconnaissants de votre appui et de votre solidarité.

Si vous souhaitez imaginer à quoi ressemble l'Ukraine, pensez à sa population. C'est le pays européen ayant le taux d'alphabétisation le plus élevé. C'est un pays qui produit chaque année 14 000 spécialistes agréés en informatique et plus de 100 000 ingénieurs agréés. C'est un pays dont les citoyens pensent vraiment qu'ils entament un nouveau chapitre de leur histoire. Je crois que, si vous alliez là-bas maintenant, vous n'entendriez probablement plus parler beaucoup de ces plans quinquennaux, mais vous remarqueriez une nouvelle énergie et une nouvelle inspiration.

Enfin, c'est un pays qui a choisi très clairement le monde libre. Environ 80 p. 100 des citoyens appuient le choix européen, et plus de 60 p. 100 d'entre eux souhaiteraient voir l'Ukraine devenir membre de l'OTAN. C'est tellement différent de ce que nous avons toujours observé dans notre pays, un pays qui ne cessait de changer d'idées pendant de nombreuses années.

Je crois qu'à ce stade, nous sommes témoins de changements irréversibles, et j'espère que ces changements prépareront finalement de meilleurs lendemains pour notre pays.

Le sénateur Gold : Nous l'espérons également.

Si vous me permettez de donner suite à vos propos, pourriez-vous parler un peu plus longuement du travail qui, selon vous, reste à accomplir pour améliorer le système juridique et assurer ainsi la sécurité de vos citoyens et des investisseurs?

M. Shevchenko : Je vous remercie de vos indications. Si je devais choisir trois importants secteurs, ce serait premièrement notre système judiciaire et notre système d'application de la loi, qui requièrent de nombreux efforts.

La vice-présidente du Parlement ukrainien, Mme Syroid, participe personnellement à la réforme juridique et judiciaire en Ukraine. Nous aimerions observer en Ukraine beaucoup plus de progrès à cet égard. Nous nous employions à les réaliser.

La deuxième orientation est la lutte contre la corruption. Si nous résumons la corruption en des enjeux précis, nous constatons qu'il y a trois principales possibilités de corruption.

Premièrement, il y a le détournement direct d'une partie du budget de l'État; cela ne se produit plus.

Deuxièmement, il y a les marchés publics. Nous constatons des progrès considérables à cet égard en raison de nouvelles mesures législatives qui rendent publiques toutes les formalités administratives.

Troisièmement, il y a les entreprises d'État. Une fois que nous aurons terminé le nouveau processus de privatisation, je crois que nous observerons des progrès remarquables dans la lutte contre la corruption.

L'efficacité énergétique constitue une autre possibilité de réforme. Pour la première fois dans l'histoire de l'Ukraine, nous avons survécu pendant une année sans avoir eu accès au gaz naturel russe. Nous créons réellement de nouveaux débouchés dans le marché énergétique. C'est une autre raison pour laquelle nous aimerions que des Canadiens jouent un rôle dans ce secteur. C'est une toute nouvelle initiative.

Nous aimerions voir un plus grand nombre de projets d'efficacité énergétique, avoir accès à de nouvelles sources d'énergie et utiliser les meilleures technologies novatrices offertes sur le marché mondial.

La présidente : Y a-t-il d'autres questions?

Monsieur l'ambassadeur, vous nous avez présenté d'excellentes raisons pour lesquelles l'accord devrait aller de l'avant. Vous avez suscité parmi nous un certain enthousiasme à l'égard des changements positifs qui ont été apportés en Ukraine. Nous avons toujours été préoccupés par la question de savoir si les changements seraient maintenus. Toutefois, je crois que depuis les manifestations de Maidan et la création du nouveau Parlement, vous avez non seulement fait preuve d'une volonté réelle d'opérer des réformes démocratiques, mais aussi commencé en fait à les mettre en œuvre, et c'est ce qui importe.

Vous êtes un excellent représentant de votre pays.

Je tiens à saisir l'occasion de dire à Son Excellence et au reste de la délégation que vous avez eu une bonne occasion de voir notre Parlement à l'œuvre et d'assister à la première séance de notre étude du projet de loi C-31. Ainsi, vous pourrez communiquer à votre Parlement notre enthousiasme à l'égard de la conduite de cette étude sur le projet de loi. Nous pourrons, je l'espère, entamer un nouveau chapitre, et un chapitre supplémentaire sur le plan de l'aide que le Canada apporte à l'Ukraine, en général, et à sa population, en particulier, ainsi que sa collaboration avec votre nation.

Je souligne, bien entendu, qu'une partie de votre pays n'est pas libre; la Crimée et le Donbass sont des territoires occupés, et cela préoccupe les Canadiens. Je crois qu'ils en sont conscients.

Je me fais l'écho de nombreux politiciens de toutes allégeances qui ont déclaré qu'ils se tiendraient à vos côtés aussi longtemps qu'il faudra. Au nom de notre comité, veuillez transmettre ce message. Je vous remercie d'avoir amorcé notre étude aujourd'hui.

(La séance est levée.)

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