Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et
du commerce international
Fascicule no 61 - Témoignages du 10 avril 2019
OTTAWA, le mercredi 10 avril 2019
Le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international qui a été saisi du projet de loi C-85, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange Canada — Israël et apportant des modifications connexes à d’autres lois, se réunit aujourd’hui, à 16 h 16, pour étudier le projet de loi.
La sénatrice A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Aujourd’hui, nous étudions le projet de loi C-85, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange Canada — Israël et apportant des modifications connexes à d’autres lois.
Nous sommes heureux d’accueillir des représentants du gouvernement devant le comité. Nous savons que le ministre n’est pas disponible cette semaine. Toutefois, vous devez comprendre que le Sénat a une politique et qu’il l’applique : pas de ministre, pas de projet de loi. On m’a assuré que le ministre se rendra disponible le plus rapidement possible, car le temps nous est compté pour renvoyer le projet de loi au Sénat pour la troisième lecture. C’est une entente conclue entre les leaders. Nous la respecterons dans la mesure du possible, après la comparution du ministre.
Avant de présenter les représentants d’Affaires mondiales Canada, j’inviterais les sénateurs à se présenter.
La sénatrice Busson : Bev Busson, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l’Ontario.
La sénatrice Bovey : Patricia Bovey, du Manitoba.
[Français]
Le sénateur Cormier : René Cormier, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le sénateur Dean : Tony Dean, de l’Ontario.
Le sénateur Ngo : Thanh Hai Ngo, de l’Ontario.
La sénatrice Coyle : Mary Coyle, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Greene : Stephen Greene, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Housakos : Leo Housakos, du Québec.
La présidente : Je suis Raynell Andreychuk, de la Saskatchewan.
Nous avons parmi nous aujourd’hui, d’Affaires mondiales Canada, Troy Lulashnyk, qui est directeur général pour le Maghreb, l’Égypte, Israël, la Cisjordanie et Gaza. Il est accompagné de Mary-Catherine Speirs, directrice de la politique commerciale et des négociations pour l’Europe, le Moyen-Orient et l’Afrique, et de Stacy-Paul Healy, directeur adjoint à la Direction du droit de l’accès au marché et des recours commerciaux.
Bienvenue au comité.
Mary-Catherine Speirs, directrice, Politique commerciale et négociations (Europe, Moyen-Orient et Afrique), Affaires mondiales Canada : Je vais commencer par une déclaration d’ouverture. Je serai ensuite heureuse de répondre à vos questions.
[Français]
Bonjour. Je vous remercie de me donner l’occasion de prendre la parole aujourd’hui pour discuter du projet de loi C-85, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange Canada — Israël et apportant des modifications connexes à d’autres lois.
[Traduction]
Depuis l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange Canada — Israël, l’ALECI, il y a plus de deux décennies, les échanges bilatéraux avec Israël ont plus que triplé, totalisant 1,9 milliard de dollars en 2018.
L’ALECI initial couvrait les produits industriels. Un accès additionnel aux marchés a été négocié pour les exportations agricoles et agroalimentaires canadiennes en 2003. En 2014 et 2015, le Canada et Israël ont entamé des négociations pour mettre à jour et élargir cet accord. Quatre chapitres ont été modernisés, notamment l’accès au marché, les règles d’origine, le règlement des différends et les dispositions institutionnelles. Sept nouveaux chapitres ont été ajoutés pour aider à éliminer les obstacles non tarifaires, à faciliter le commerce, à le rendre plus prévisible et à réduire les formalités administratives et une partie des coûts des activités pour les entreprises.
Ces chapitres portent sur le commerce électronique, la propriété intellectuelle, le travail, l’environnement, les mesures sanitaires et phytosanitaires, les obstacles techniques au commerce et la facilitation des échanges. En 2017 et 2018, le Canada et Israël ont convenu d’ajouter d’autres éléments de commerce inclusifs qui visent à faire en sorte que les avantages et les possibilités découlant du commerce et des investissements soient plus largement partagés. Des chapitres sur le commerce et le genre et les petites et moyennes entreprises ainsi qu’un article sur la responsabilité sociale des entreprises ont été ajoutés.
[Français]
Une fois en vigueur, près de 100 p. 100 de toutes les exportations agricoles et agroalimentaires et des produits de la mer du Canada vers Israël bénéficieront d’une certaine forme de traitement tarifaire préférentiel, ce qui constitue une hausse par rapport au niveau actuel de 90 p. 100.
[Traduction]
Un accès important au marché pour les entreprises de transformation agricole et agroalimentaire du Canada est un des éléments clés des négociations, et les négociateurs ont réussi à obtenir un accès illimité en franchise de droits sur les canneberges sucrées et séchées, dont le tarif actuel est de 12 p. 100, sur les produits de boulangerie, dont les tarifs actuels peuvent atteindre 8 p. 100, et sur les aliments pour animaux domestiques, dont le tarif actuel est de 4 p. 100.
Dans le secteur du poisson et des fruits de mer, où le Canada est l’un des principaux fournisseurs d’Israël, 98 p. 100 des exportations actuelles entreront en franchise de droits en Israël en quantités illimitées en vertu de l’ALECI modernisé, comparativement au niveau actuel de 90 p. 100, rendant les produits canadiens du poisson et des fruits de mer plus compétitifs.
Les principaux produits canadiens de ce secteur qui pourraient bénéficier d’un accès en franchise de droits sont le crabe des neiges, le homard, la crevette, le pétoncle et la moule. Ces résultats importants sur les tarifs pour le secteur agricole et agroalimentaire placent le Canada sur un pied d’égalité avec les exportateurs des États-Unis et de l’Union européenne, principaux concurrents dans ce secteur. Ils donnent aussi aux Canadiens un avantage sur leurs concurrents d’autres pays qui n’ont pas d’accord de libre-échange avec Israël.
En échange, le Canada a accepté d’éliminer les droits de douane sur certaines importations agricoles et agroalimentaires israéliennes ciblées, comme certains poissons, certaines noix, certains fruits tropicaux et certaines huiles. L’accord de libre-échange modernisé entre le Canada et Israël, comme celui qui l’a précédé, respecte pleinement le système canadien de gestion de l’offre.
Le résultat négocié a l’appui des principaux intervenants agricoles canadiens, y compris Pulse Canada, le Conseil canadien du canola, l’Association des vignerons du Canada et les entreprises de transformation des pommes de terre, des canneberges, du soya et des aliments pour animaux de compagnie.
Un aspect important de l’ALECI modernisé qui vise à faire en sorte que ces possibilités soient plus largement partagées entre les Canadiens est son cadre prospectif qui comprend de nouveaux chapitres sur le commerce et le genre, les petites et moyennes entreprises, le travail et l’environnement. Plus précisément, le chapitre sur le commerce et le genre reconnaît l’importance d’intégrer une perspective sur l’égalité entre les sexes dans les questions économiques et commerciales. Il vise à éliminer les obstacles et à créer des possibilités pour les entreprises appartenant à des femmes de faire du commerce.
Le chapitre sur les petites et moyennes entreprises comprend des dispositions qui reconnaissent l’importance des PME pour les économies du Canada et d’Israël et facilite les activités de coopération et le partage d’information.
Les chapitres consacrés au travail et à l’environnement sont des premières pour Israël et sont conformes à d’autres accords récemment signés par le Canada. Le chapitre sur le travail garantit des normes de travail élevées en recourant à des mécanismes de règlement des différends exécutoires et propres au travail, dont le non-respect pourrait entraîner des sanctions pécuniaires.
Le chapitre sur l’environnement garantira le maintien de la protection de l’environnement grâce au recours à un processus de règlement des différends propre à chaque chapitre.
L’ALECI modernisé contient également une disposition sur la responsabilité sociale des entreprises qui affirme l’engagement d’Israël et du Canada d’encourager les entreprises à adopter des normes de responsabilité sociale reconnues à l’échelle internationale et à adopter une conduite responsable à l’étranger, en faisant expressément référence aux Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales, soutenus par le gouvernement. Ensemble, ces dispositions de l’ALECI modernisé contribuent à faire en sorte que les gains économiques soient non seulement plus importants, mais qu’ils soient plus durables et inclusifs.
Au-delà des avantages économiques de l’ALECI, la modernisation de celui-ci témoigne de l’engagement commun du Canada et d’Israël à maintenir une ouverture et une amitié et à élargir les liens que nous entretenons afin qu’un plus grand nombre de nos citoyens et de nos entreprises puissent en profiter.
[Français]
Une ratification rapide de l’ALECI modernisé établira un environnement commercial plus prévisible, renforcera nos relations bilatérales et élargira les possibilités commerciales qui peuvent contribuer à un développement économique durable pour nos deux pays.
[Traduction]
Ceci conclut ma déclaration d’ouverture. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions concernant l’ALECI modernisé.
La présidente : Vous avez dit que l’accord est calqué sur d’autres accords. Y a-t-il quelque chose dans cet accord qui ne se trouve pas dans l’AECG ou qui est semblable à l’AECG ou à nos négociations pour le nouvel ALENA? Dans quelle mesure est-ce un accord moderne? Nous avons récemment étudié l’accord avec le Chili. Y a-t-il quelque chose d’unique dans cet accord que nous devrions signaler?
Mme Speirs : Je crois que tous nos accords sont uniques à leur façon, mais cet accord est certainement comparable aux engagements que nous avons cherché à obtenir et que nous avons obtenus dans l’AECG, l’AEUMC et le PTPGP, en particulier dans les domaines du travail et de l’environnement, parce que ces chapitres sont devenus plus rigoureux et plus faciles à faire respecter avec un mécanisme de règlement des différends.
C’est la deuxième fois que nous avons négocié un chapitre sur le commerce et le genre dans un accord de libre-échange. La première fois, c’était dans l’accord modernisé avec le Chili, qui est entré en vigueur en février dernier. En fait, le chapitre sur le commerce et le genre dans l’accord modernisé entre le Canada et Israël va en fait un peu plus loin que ce qui se trouve dans notre accord avec le Chili, parce que nous avons des dispositions concernant un mécanisme de règlement des différends dans le chapitre sur le commerce et le genre dans notre accord avec Israël.
La présidente : Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il n’y a pas de chapitre sur les investissements ou un accord parallèle ou un accord distinct en la matière? Nous commençons normalement par un tel accord avant de passer à un accord commercial.
Mme Speirs : Je vais vérifier mes notes. En fait, il n’y a aucune disposition sur les services ou les investissements dans l’Accord de libre-échange Canada — Israël. De manière générale, cela reflète les intérêts des intervenants canadiens et la capacité de notre partenaire commercial de négocier des dispositions qui seraient dans l’intérêt du Canada ou qui respecteraient les normes habituelles de nos accords de libre-échange.
Le Canada et Israël ont entamé des pourparlers concernant les services dans le contexte de l’OMC et l’Accord général sur le commerce des services. Durant les travaux exploratoires, Israël a mentionné préférer poursuivre ces discussions dans un contexte multilatéral. À l’époque, nous avons mis de côté les discussions sur les services et nous avons convenu de reprendre les pourparlers dans le contexte de l’OMC.
Pour ce qui est des investissements, nos modèles sont considérablement différents en ce qui concerne la manière d’aborder des dispositions sur les investissements dans un accord de libre-échange ou un accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers. Ce n’est pas du tout ainsi qu’Israël aborde ces questions. Nous avons discuté avec Israël pour voir si nous nous entendions suffisamment sur certains points pour aller de l’avant avec des pourparlers concernant des dispositions sur les investissements, et nous avons déterminé que nous ne serions pas en mesure d’arriver à un chapitre de grande qualité qui respecterait nos normes habituelles concernant les investissements. Nous avons donc décidé de ne pas poursuivre les négociations à ce chapitre.
La présidente : Cela rend-il plus vulnérables nos entreprises lorsqu’elles font des affaires avec Israël, étant donné que nous n’avons pas une telle protection? C’est habituellement rassurant, ou c’est en fait nécessaire dans certains cas.
Mme Speirs : C’est vrai. Dans le cas présent, les intervenants n’ont pas soulevé de besoins précis dans nos consultations. Bref, nous n’avons pas entendu les intervenants canadiens manifester de préoccupations précises par rapport aux investissements en Israël. C’est donc positif.
Nous n’avons pas de dispositions précises dans le cadre de l’accord de libre-échange, mais il ne faut pas l’interpréter comme un message négatif qui avise nos investisseurs d’éviter de faire des affaires avec Israël. Je suis d’accord avec votre point de vue. Cela ne permet pas de donner la tranquillité d’esprit de plus que leur procure une disposition sur les investissements. D’un autre côté, si les intervenants du milieu ne nous ont pas fait part de problèmes, nous espérons que cela ne les empêchera pas d’investir en Israël.
La présidente : Je vais m’arrêter là.
Le sénateur Boehm : Merci de votre participation à nos travaux et merci de votre exposé. J’ai eu le plaisir de me rendre en Israël en janvier en compagnie de quelques collègues du Sénat. Il a neigé à Jérusalem, mais nous avons tout de même fait le tour du pays. Ce que nous avons constaté et ce que j’ai certainement constaté, c’était une sincère reconnaissance à l’égard de cet accord commercial. Les gens semblaient être au courant du dossier.
Durant nos déplacements à Tel-Aviv et ailleurs, je cherchais des oranges de Jaffa. Vous comprenez où je veux en venir au sujet de ce que signalent les indications ou les indicateurs géographiques de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle. À Jaffa, j’ai posé des questions au sujet des plantations et des endroits où sont cultivées les oranges, et on m’a répondu que c’était une référence historique, parce que la marque a été vendue à des Espagnols, si je ne m’abuse.
À l’article 10.3 de l’Accord de libre-échange Canada — Israël, il est question d’avoir des discussions sur des indications géographiques à un autre moment. N’y a-t-il tout simplement pas suffisamment d’indications ou d’indicateurs géographiques qui n’auraient pas été inclus dans les négociations initiales ou dans les négociations qui ont suivi? Quand ces discussions auront-elles lieu? Selon vous, quels produits pourraient être inclus, y compris les produits canadiens?
Mme Speirs : J’ai de l’information à ce sujet.
Le sénateur Boehm : Je sais que, dans l’AECG, c’était un enjeu par rapport au jambon serrano ou de Parme, au champagne et à tout le reste, mais je suis curieux d’en savoir plus à ce sujet.
Mme Speirs : Je peux vous donner un peu de contexte. En gros, en ce qui concerne actuellement le vin et les spiritueux, soit un secteur qui intéresse le Canada par rapport aux indications géographiques, je souligne qu’Israël n’a pas encore de système national d’enregistrement et qu’il ne pourrait donc pas s’engager à protéger nos indications géographiques.
Nous pouvons intenter des poursuites devant les tribunaux en Israël dans le cas d’une violation alléguée d’une indication géographique. Les Canadiens ont donc certains recours à cet égard. D’autres pays, fort probablement dans l’Union européenne, ont réussi à négocier des dispositions sur les indications géographiques avec Israël, mais même l’Union européenne n’a pas vraiment été en mesure de vraiment aller chercher la protection qu’elle souhaitait à ce chapitre. Ce sont bien souvent les demandeurs normalement en ce qui concerne les indications géographiques.
Du point de vue du Canada, je crois que nous avons considéré suffisant d’avoir obtenu l’engagement de nous réunir à nouveau dans l’avenir pour en discuter, d’autant plus que la majorité des indications géographiques qui intéressaient nos intervenants avaient trait au secteur des vins et des spiritueux. Toutefois, nous ne savons quand nous en discuterons à nouveau avec Israël.
Le sénateur Boehm : Je crois que le secteur des vins et des spiritueux sera un secteur très difficile, parce que les producteurs de vin en Israël, qui sont nombreux, ont tendance à être petits, et certains d’entre eux se trouvent dans des kibboutz. Il risque donc de s’écouler beaucoup de temps avant d’en arriver là.
Mme Speirs : Je crois que c’était probablement la raison pour laquelle les Israéliens n’étaient pas en mesure de prendre des engagements à ce stade-ci.
Le sénateur Boehm : Merci.
[Français]
Le sénateur Cormier : Je remplace le sénateur Massicotte aujourd’hui. Bienvenue.
Ma question concerne l’article 1.7 de l’ALECI modernisé. Dans la documentation que nous avons reçue, il est noté que, selon certains observateurs, tant la version originale que la version modernisée de l’ALECI semblent couvrir des produits provenant des territoires qu’occupe Israël depuis 1967, c’est-à-dire la Cisjordanie, le plateau du Golan, Gaza et Jérusalem-Est.
L’article 1.7 modernisé stipule que l’accord s’applique dans le territoire où s’applique la législation douanière d’Israël. Celle-ci s’applique donc actuellement aux territoires occupés depuis 1967. Toutefois, selon Affaires mondiales Canada, le Canada ne reconnaît pas le contrôle permanent exercé par Israël sur ces territoires. En revanche, aux termes de l’accord d’association de l’Union européenne avec Israël, aucun traitement commercial préférentiel ne s’applique aux produits qui proviennent des colonies israéliennes au-delà des frontières de 1967.
Ma question est la suivante : pourquoi l’article 1.7 de l’ALECI modernisé définit-il la portée territoriale de l’accord comme étant le territoire où s’applique la législation douanière d’Israël? En quoi cet article modernisé est-il conforme à la politique canadienne relativement au contrôle israélien des territoires occupés en 1967?
[Traduction]
Troy Lulashnyk, directeur général, Afrique du Nord, Israël et Territoires palestiniens, Affaires mondiales Canada : Merci beaucoup de votre question. Je vais y répondre.
Vous avez tout à fait raison. Vous avez bien défini la portée de l’Accord de libre-échange Canada — Israël modernisé, et cela correspond en effet à la portée qui existait avant l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange Canada — Israël de 1997. Cela couvre le territoire où est appliquée la législation douanière d’Israël, et cela remonte à une série d’accords. Nous pouvons même remonter jusqu’au processus de paix d’Oslo en 1994 où les Israéliens et les Palestiniens ont conclu un accord douanier.
Lorsque nous avons négocié notre accord initial, nous en avons aussi profité pour négocier un accord-cadre avec les Palestiniens avec des renvois à l’Accord de libre-échange Canada — Israël en vue de permettre la circulation des biens de ces territoires, y compris la Cisjordanie et la bande de Gaza. Nos renvois à notre accord avec Israël et son utilisation reflètent le précédent accord conclu entre Israël et les Palestiniens qui permet la circulation des biens et qui nous permet de faire du commerce avec les Palestiniens.
Grâce à cet accord et à notre accord-cadre qui a suivi, nous avons été en mesure d’utiliser notre accord avec Israël dans sa forme initiale et sa forme modernisée pour non seulement faire du commerce avec Israël, mais aussi faire du commerce avec les Palestiniens, et cela se poursuit.
Vous avez aussi souligné à juste titre que nous considérons les colonies de peuplement d’Israël comme illégales et contraires aux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. C’est l’approche énoncée, et nous avons soulevé à de nombreuses reprises la question, y compris aujourd’hui, pour reformuler nos politiques telles que mentionnées au Parlement.
Il s’agissait certainement de notre approche. Nous souhaitons que les deux parties se rencontrent et négocient une paix équitable et globale. C’est l’objectif que nous continuons de viser, et nous espérons y arriver dans un proche avenir.
La sénatrice Coyle : Je remercie nos invités aujourd’hui. En fait, le sénateur Cormier a posé les questions que j’avais l’intention de poser, mais je vais aller un peu plus loin.
À titre de sénateurs, bon nombre d’entre nous ont reçu pas mal de correspondance, pour le dire ainsi, de Canadiens très inquiets de la possibilité de moderniser notre accord de libre-échange équitable avec Israël. Personne ne prétend que nous ne devrions pas avoir un accord de libre-échange modernisé avec Israël. En fait, cet accord modernisé comprend d’excellents nouveaux aspects, et vous les avez soulignés.
Toutefois, le Comité central mennonite, l’Église unie du Canada, Amnistie internationale, un professeur de l'Université Western et les groupes de quakers au Canada s’inquiètent que les dispositions ayant trait aux territoires palestiniens occupés ne soient pas considérées comme il se doit dans l’accord. Ils s’inquiètent aussi qu’il existe d’autres normes pour ces genres d’accords de libre-échange qui prévoient un autre libellé qui permet de mieux encadrer cet enjeu. Je crois que ces intervenants parlent en particulier de ce qui se fait du côté de l’Union européenne. Ces groupes se demandent aussi pourquoi nous ne pouvons pas aller un peu plus loin concernant le libellé sur les droits de la personne dans l’accord, étant donné que le Canada l’a peut-être fait dans d’autres accords de libre-échange. Pouvez-vous entrer un peu plus dans les détails?
M. Lulashnyk : Merci beaucoup. Je peux répondre à la première partie, puis je laisserai mes collègues prendre la relève.
Je comprends très bien les préoccupations soulevées. À mon avis, ce qui a été décidé lorsqu’a été adopté l’accord initial, c’était que nous avions besoin d’un mécanisme qui permettrait et faciliterait les échanges commerciaux avec Israël et qui nous permettrait aussi, compte tenu de la situation politique sur le terrain, d’avoir un mécanisme pour faire du commerce avec les Palestiniens. Nous avons donc trouvé une manière d’y arriver grâce à nos mécanismes, soit non seulement notre accord bilatéral et exécutoire, mais aussi les accords Israël-Palestine et notre accord-cadre, pour faciliter le tout et nous permettre de faire du commerce avec Israël et les Palestiniens. Cela fonctionne encore aujourd’hui, et ce, depuis deux décennies.
Lorsque nous avons entamé les négociations pour moderniser l’accord, nous souhaitions nous assurer que la circulation des biens se poursuit. Il ne faut jamais perdre de vue que nous devons faire progresser positivement les choses tant sur le plan économique pour les deux parties que sur le plan politique pour en arriver à une solution permanente et équitable qui s’attaque à la question des colonies de peuplement que nous considérons comme illégales.
La sénatrice Coyle : Merci beaucoup de cette explication. En ce qui a trait à l’aspect diplomatique de la réponse — nous sommes tous conscients de l’importance de ce travail diplomatique continu —, pouvez-vous nous dire dans quelle mesure nous sommes optimistes à ce sujet compte tenu du contexte actuel avec certaines grandes puissances dans le monde et la façon dont ces États fonctionnent par rapport à leurs relations avec cette région du monde, ainsi que les récentes élections en Israël?
M. Lulashnyk : Avec plaisir. Les dernières véritables négociations entre les Israéliens et les Palestiniens remontent à plusieurs années, et les tentatives précédentes n’ont pas réussi à aboutir à une conclusion positive.
Bon nombre de gens sont très pessimistes par rapport aux possibilités et aux intentions du gouvernement israélien et aussi du gouvernement palestinien de collaborer pour en arriver à un accord de paix. Il y a beaucoup de perspectives négatives. Beaucoup a été dit au sujet du plan américain à venir, et nous croyons comprendre que ce plan sera bientôt dévoilé. Il y a beaucoup de spéculations et de pessimisme.
Ma réponse est que c’est utile d’essayer. C’est utile de nous asseoir pour discuter de la situation. Nous essayons de le faire depuis des années et nous n’avons pas réussi à le faire, mais nous devons persévérer. La majorité des acteurs sont conscients des principaux obstacles et enjeux. N’empêche que les Palestiniens et les Israéliens sont là, et nous devons trouver une manière de collaborer.
Il y a beaucoup de pessimisme et de politisation, mais nous devons continuer d’essayer et nous devons reconnaître que les décisions qui sont prises ont des conséquences réelles et concrètes dans la vie des gens. Nous devons donc trouver la motivation de faire tout notre possible pour améliorer la situation.
Mme Speirs : Je ne ferai pas de commentaires sur les aspects politiques, mais je peux en faire au sujet de l’approche concernant les droits de la personne. Vous avez raison de dire qu’il n’y a aucune mention des droits de la personne dans l’Accord de libre-échange Canada — Israël.
Le Canada a parfois fait référence aux droits de la personne dans certains de ses accords de libre-échange, mais ce n’est pas uniforme. Lorsque c’est le cas, cela se trouve dans le préambule, ce qui ne représente honnêtement pas un grand engagement dans l’accord de libre-échange.
Il n’y a pas de dispositions précises à cet égard. Toutefois, il y a certaines dispositions qui ont trait aux droits de la personne dans l’Accord de libre-échange Canada — Israël. Nous en avons notamment dans le chapitre sur le travail, et c’est un chapitre rigoureux et exécutoire. Nous avons des références et des dispositions qui portent sur les droits des travailleurs et les conditions de travail. Nous avons aussi un article sur la responsabilité sociale des entreprises et des dispositions pour lutter contre la corruption. Toutes ces dispositions contribuent de manière plus générale à la promotion des droits de la personne.
Nous avons aussi inclus des éléments pour un commerce inclusif en vue de nous assurer que les gains économiques ne se font pas aux dépens de valeurs et de priorités canadiennes importantes, comme la perspective de genre, les petites et moyennes entreprises et la protection de l’environnement et des travailleurs.
Nous avons aussi inclus l’établissement d’une commission mixte en vertu de l’Accord de libre-échange Canada — Israël qui est composée de représentants ayant rang ministériel ou de leurs délégataires. Cette commission pourra discuter du fonctionnement général de l’accord. Cela peut servir de tribune pour discuter et examiner des problèmes en vue de déterminer des manières d’améliorer encore plus les échanges. L’une ou l’autre des parties peut se servir de cette commission comme mécanisme pour soulever des questions ayant trait aux droits de la personne dans le domaine du travail.
En définitive, nos liens commerciaux et économiques sont forts, et nous pensons que cet accord de libre-échange peut contribuer à soutenir le dialogue et notre capacité à nous attaquer à d’autres priorités en matière de politique étrangère avec des partenaires comme Israël, comme celles liées aux droits de la personne. Nous dialoguons avec Israël sur des questions liées aux droits de la personne dans le cadre de discussions bilatérales et de déclarations ministérielles et diplomatiques prononcées devant des organismes comme l’Organisation internationale du travail, et grâce à d’autres mécanismes dans la sphère régionale et multilatérale, y compris le système des Nations Unies, qui a été mentionné par mon collègue.
Tous nos accords de libre-échange sont conformes à la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies et aux traités internationaux, y compris tous les traités internationaux sur les droits de la personne auxquels adhèrent le Canada et Israël, dont le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, et la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Le sénateur Dean : Merci de vous joindre à nous. Je veux répéter à quel point nous sommes toujours impressionnés par l’étendue de vos responsabilités géographiques, et par le niveau de détail que vous êtes en mesure de fournir dans tous les domaines.
Mes antécédents font que je connais un peu les mécanismes de règlement des différends, et j’ai remarqué qu’on en emploie ici quelques-uns. Concernant le commerce et le travail, il existe un mécanisme de règlement des différends aux décisions exécutoires qui constitue habituellement la deuxième partie. L’accès à ces mécanismes exécutoires est-il fondé sur le dépôt d’une plainte par l’une des parties uniquement? Il s’agit de la première question.
Nous disposons d’un modèle différent pour le chapitre sur le commerce et le genre, qui consiste à établir un consensus dès la première étape. Les deux parties doivent convenir d’entamer la procédure. La partie deux s’applique-t-elle au commerce et au genre? Vous comprenez la nature de la question.
Stacy-Paul Healy, directeur adjoint, Direction de l’accès aux marchés et Loi sur les recours commerciaux, Affaires mondiales Canada : Merci pour cette question. Pour ce qui est de votre première question, l’accès serait fondé sur le dépôt d’une plainte par l’une des parties. Il s’agit d’un mécanisme d’État à État. Celui-ci est modifié pour le contexte particulier du chapitre sur le travail et pour permettre l’imposition de compensations financières.
M. Healy : La nature du chapitre sur le commerce et le genre est assez différente. L’idée est que les deux parties doivent convenir de le soumettre à un groupe spécial de règlement des différends. Celui-ci se concentrerait sur l’interprétation du chapitre et sur la façon d’interpréter les engagements. L’idée est que les deux parties doivent convenir de le soumettre au groupe spécial sur le règlement des différends, et que l’on appliquerait ensuite les mêmes procédures que celles utilisées pour le règlement de différends entre États.
Mme Speirs : Mais la décision serait exécutoire.
Le sénateur Dean : La décision serait exécutoire. Ces renseignements sont très utiles. Merci.
La présidente : Je m’intéresse aux sections sur les PME. Elles sont nouvelles, du moins pour ce qui est de leur formulation et de la responsabilité sociale des entreprises. Il s’agit en quelque sorte d’aspirations ou d’inspirations, plutôt difficiles à cerner. Quel mécanisme de suivi utiliserez-vous si nous vous rappelons dans un an et vous demandons de nous parler des progrès réalisés dans la mise en œuvre du programme relatif aux petites et moyennes entreprises? Quels progrès ont été réalisés en matière de responsabilité sociale des entreprises? Il s’agit d’engagements, et vous devrez probablement créer des comités mixtes constitués de représentants d’Israël et du Canada. Parfois, ils essaient de faire du bon travail, mais leurs efforts n’aboutissent pas vraiment.
Comment assurez-vous la réussite de la mise en œuvre du programme relatif aux PME — qui sont tellement importantes pour le Canada et, j’imagine, pour Israël — et à la responsabilité sociale des entreprises, qui est une question à laquelle Israël et nous-mêmes travaillons en continu?
Il n’est pas rare que des pays soient confrontés à ce problème. Comment pouvons-nous l’évaluer? Comment savons-nous que ces progrès n’existent pas uniquement sur le papier et que quelque chose se produit réellement? Quels sont vos repères?
Mme Speirs : C’est une très bonne question. Je vais d’abord parler des PME, parce que nous avons aujourd’hui de l’expérience relativement aux chapitres sur les PME. Cela a commencé avec certains de nos travaux liés à l’AECG et, plus récemment, avec l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste, qui contenait pour la première fois un chapitre particulier sur les PME.
Nous avons également été en mesure de travailler avec les PME et de cerner certains de leurs besoins particuliers liés à nos accords de libre-échange. L’un de leurs besoins les plus simples et les plus pressants est d’obtenir de meilleurs renseignements. À cette fin, nous nous sommes engagés, dans le cadre de ces accords de libre-échange, y compris dans celui conclu avec Israël, à faciliter la transparence et l’échange de renseignements. Nous créerons des sites web spéciaux pour les PME, où elles pourront facilement accéder à des renseignements sur les accords de libre-échange et sur les dispositions particulières des accords de libre-échange qui revêtent un intérêt pour elles.
Par exemple, nous avons récemment lancé un site web Info-Tarif grâce auquel toute personne peut rechercher les tarifs appliqués à des marchandises particulières. Ce projet n’est pas propre à l’Accord de libre-échange Canada — Israël, mais il est un exemple de ce que nous pouvons mettre en œuvre pour que les PME puissent accéder plus facilement à ces renseignements.
Nous disposons également d’un comité sur les PME qui sera créé en vertu de l’accord de libre-échange. Il aura un rôle particulier, qui consistera à surveiller toutes les activités de coopération énumérées dans le chapitre, et à examiner la mise en œuvre.
Je ne sais pas si, dans un an, nous saurons si nous réalisons notre objectif commun, qui est de rendre l’accord plus accessible aux PME, mais nous serons certainement en mesure de faire le point chaque année, environ, lorsque le comité se réunira.
Les autres dispositions du chapitre comprennent le repérage des activités de coopération. Il pourrait s’agir de séminaires et d’ateliers visant à mieux informer les PME relativement à certains des débouchés que leur offre l’ALECI. Nous pourrions déployer des efforts pour les aider à développer leur capacité d’exportation, ainsi que des programmes d’aide et de formation pour qu’elles puissent répondre à la demande pour leurs produits et leurs exportations. D’autres projets de coopération pourraient également permettre de trouver des façons de venir en aide aux PME, afin qu’elles participent et qu’elles s’intègrent efficacement dans les chaînes de valeurs mondiales.
Le comité est tenu de se réunir au moins une fois par an. Il doit examiner et coordonner son programme de travail, et coordonner son programme de travail avec les travaux des autres comités réalisés dans le cadre de l’accord de libre-échange. Le chapitre sur les PME est vraiment conçu pour améliorer la capacité des entreprises à accéder à toute la gamme de dispositions des accords de libre-échange. Les représentants devront coopérer au sein du comité sur les PME pour s’assurer que les travaux des autres comités tiennent également compte des PME.
Le comité sur les PME aura également la capacité de faire appel à des experts qui collaboreront plus particulièrement avec les PME pour cerner les programmes et les activités qui pourraient être utiles, et peuvent formuler des recommandations à la commission dans son ensemble sur la mise en œuvre de l’accord de libre-échange, afin d’apporter des améliorations supplémentaires.
Il sera de nature coopérative, mais, étant donné que nous avons un comité et un examen annuel, nous avons bon espoir que cela nous aidera à assurer une mise en œuvre efficace. En réalité, cela va au-delà du chapitre sur les PME de l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste, et nous continuons donc de faire avancer les choses pour répondre aux besoins de nos PME canadiennes.
Pour ce qui est d’Israël, il s’agit du premier chapitre sur les PME négocié par ce pays dans le cadre d’un accord de libre-échange, mais la structure commerciale de nos deux nations est assez semblable, car la vaste majorité des entreprises israéliennes sont des PME; nous avons donc un intérêt commun dans la réalisation de ces objectifs.
Pour ce qui est de la responsabilité sociale des entreprises, il ne s’agit pas d’un chapitre, mais d’un article. Il n’est pas exécutoire et ne fait pas l’objet d’un règlement de différends. C’est un premier pas dans la bonne direction, mais la difficulté est qu’il n’existe pas de normes internationales établies en matière de responsabilité sociale des entreprises. L’article en question mentionne les lignes directrices de l’OCDE, dont Israël et le Canada sont tous deux membres, et les lignes directrices de l’OCDE sur les entreprises multinationales ont été approuvées par les gouvernements membres de cette organisation.
Elles sont jugées faire partie des normes internationales les plus rigoureuses auxquelles nous avons pu nous référer dans ce contexte. En indiquant qu’ils cherchent à respecter ces lignes directrices, le Canada et Israël se sont engagés à s’assurer que leurs entreprises respectent les normes les plus élevées.
Le sénateur Boehm : J’ai examiné les tendances relatives au volume global, et les choses vont plutôt bien depuis la conclusion, en 2017, du premier accord, d’une valeur d’environ 1,7 milliard de dollars. Le rapport était d’environ trois pour un en faveur d’Israël pour ce qui est de l’équilibre que nous pourrions souhaiter établir, et une importante baisse des exportations canadiennes, s’élevant à environ 100 millions de dollars, s’est produite en 2015. Lorsque vous atteignez un total de quelque 342 millions de dollars, comme l’indiquent les statistiques, il s’agit d’une baisse importante.
Que fait Affaires mondiales Canada, par l’entreprise de ses réseaux établis dans tout le pays, des bureaux régionaux et de notre mission à Tel Aviv, pour motiver les exportateurs canadiens? Je sais que la nouvelle version de l’accord permettra de le faire, mais fait-on du prosélytisme actif, organise-t-on des foires commerciales, et cetera? Pourriez-vous donner des exemples?
Mme Speirs : C’est une bonne question. Je peux parler de la promotion de nos accords commerciaux et des efforts plus généraux en cours et que nous prévoyons de déployer avec l’entrée en vigueur de l’ALECI modernisé.
Dans le cas de nos accords commerciaux les plus récents, nous avons clairement relevé la nécessité de nous assurer que les entreprises et les intervenants canadiens connaissent les accords et les possibilités qu’ils leur offrent, et qu’on leur transmet les renseignements relatifs aux outils et à la meilleure façon d’accéder à ces dispositions. Nous travaillons avec nos collègues qui s’efforcent de promouvoir le commerce, y compris nos bureaux régionaux dans tout le Canada, pour nous assurer que lorsque l’ALECI modernisé entrera en vigueur, nous serons en mesure de transmettre au mieux les renseignements sur l’accord aux entreprises et aux intervenants pertinents, pour qu’ils connaissent les nouvelles dispositions et les nouveaux avantages dont ils peuvent bénéficier grâce à l’accord.
Ce sera progressif. Comme vous le savez, cela fait un certain temps que nous disposons d’un accord de libre-échange avec Israël. Dans le cadre du premier ALECI, la grande majorité des tarifs applicables aux marchandises industrielles exportées avaient été éliminés. La différence qu’apportera l’accord modernisé en matière de tarif concerne principalement les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire, ainsi que du poisson et des fruits de mer. Les domaines dans lesquels nous pourrons le mieux conseiller les entreprises canadiennes sont ceux dans lesquels nous serons parvenus à nettement réduire les barrières non tarifaires dans l’accord modernisé, en particulier grâce à des mesures comme la facilitation du commerce. Ces mesures devraient faciliter davantage le flux de marchandises vers Israël.
Nous avons nommé des représentants du service des délégués commerciaux dans nos bureaux de Tel Aviv, qui travaillent en continu pour offrir des possibilités aux Canadiens et les promouvoir auprès de ces derniers. Nous disposons également d’un accord de coopération en S et T avec Israël, sur lequel ils peuvent s’appuyer pour essayer de promouvoir la collaboration et la mobilisation en matière de S et T, ainsi que la recherche sur la commercialisation. Ils sont en mesure de conjuguer la promotion du commerce et la collaboration en matière de recherche et de développement, dans le but de favoriser ces liens entre nos industries.
La présidente : Lorsque vous dites « S et T », vous voulez dire « sciences et technologie ».
Mme Speirs : Oui. Désolée d’avoir utilisé le sigle.
La sénatrice Coyle : J’aimerais obtenir quelques précisions pour mieux comprendre cette question. Comment une marchandise produite dans une colonie israélienne sur le territoire palestinien est-elle traitée dans le contexte de cet accord?
M. Lulashnyk : Toutes les marchandises produites en Israël, en Cisjordanie et à Gaza, y compris celles produites dans les colonies, sont couvertes par l’accord. Cela permet l’échange de marchandises et le commerce entre les Israéliens et le Canada, et entre les Palestiniens et le Canada. Tout est couvert, car la définition et l’application de l’accord correspondent à la zone d’application de la loi douanière d’Israël.
La présidente : À ce propos, si je consulte les notes de nos analystes, en 1999, l’Accord-cadre canado-palestinien de coopération économique et commerciale a été signé avec l’Organisation de libération de la Palestine au nom du gouvernement palestinien. Celui-ci fonctionne-t-il uniquement dans le cadre de l’accord de commerce dont nous parlons, ou pouvons-nous l’appliquer à d’autres méthodes de travail avec les Palestiniens?
M. Lulashnyk : Je pense que l’application de ce cadre est plus large que celle de l’ALECI, mais, comme je l’ai mentionné, il contient une référence qui facilite et permet l’utilisation de l’ALECI, afin que les Palestiniens puissent bénéficier des échanges préférentiels.
La présidente : Peuvent-ils bénéficier d’échanges préférentiels sans l’ALECI, dans certaines situations, ou cela n’est-il possible que par l’intermédiaire de l’ALECI?
M. Lulashnyk : L’aspect lié aux échanges n’est possible que par l’intermédiaire de l’ALECI, mais le cadre est plus large que la relation commerciale. Au sujet de la question du sénateur Boehm sur la promotion, j’ajouterais qu’un ministre israélien est venu ici organiser d’importants événements à Toronto pour promouvoir l’ALECI. Des délégations continuent de voyager entre nos pays pour favoriser les échanges entre entreprises. Récemment, le président israélien a réalisé une visite d’État au Canada, accompagné d’une délégation commerciale. Israël est ce que l’on appelle une nation d’entreprises en démarrage. Ce pays est très fort dans les domaines de la TI, de la gestion de l’information, de la cybertechnologie et de l’agriculture, bien évidemment. Nous établissons ces liens et ces ponts à mesure que notre économie et la leur évoluent. Je pense que nous avons tous bon espoir que ces efforts engendreront des possibilités supplémentaires des deux côtés. De même, nous travaillons avec les Palestiniens pour essayer de stimuler aussi notre relation commerciale avec eux grâce à ce mécanisme.
[Français]
Le sénateur Cormier : J’ai une question complémentaire pour mieux comprendre la situation en ce qui concerne le territoire palestinien.
Est-il possible, pour le Canada, d’évaluer comment les Palestiniens ont concrètement bénéficié de l’accord initial?
Vous avez peut-être déjà répondu à cette question, mais j’aimerais savoir comment ils ont bénéficié de cet accord et comment ils bénéficieront de l’accord modernisé également.
[Traduction]
M. Lulashnyk : Nous continuons de commercer avec les Palestiniens. Ils ont leurs statistiques à ce sujet, et nous avons les nôtres. Ces chiffres sont fondés sur des évaluations assez différentes, mais nous réalisons une évaluation tous les ans et nous continuons d’essayer de développer cette relation. Nous utilisons certaines statistiques, et nous sommes en mesure d’affirmer que nous avons une relation commerciale qui a bénéficié de l’ALECI depuis sa signature. À mesure que ce lien se développe et que l’ALECI est mis en œuvre, nous serons mieux en mesure de démontrer les bénéfices de l’ALECI modernisé, ou comment il a amélioré ou accéléré les échanges avec les Palestiniens.
Mme Speirs : Nous avons quelques projets liés au développement en Palestine, qui visent à stimuler la croissance économique et l’habilitation. Pendant sa visite en Israël et dans les territoires palestiniens, en septembre dernier, le ministre Carr a supervisé l’inauguration d’un conseil commercial canado-palestinien conçu pour renforcer les liens commerciaux entre les communautés palestiniennes au Canada. Nous avons également un projet conjoint avec le Bureau de promotion du commerce Canada, qui travaille en Cisjordanie et à Gaza pour aider les petites et moyennes entreprises de cette région à être mieux préparées pour le commerce. C’est là que l’aide au développement du Canada est utilisée pour favoriser la croissance du commerce ou la croissance économique des entreprises palestiniennes qui, si elles choisissent d’exporter leurs produits au Canada, pourraient bénéficier de l’ALECI.
La présidente : J’ai une dernière question que nous posons toujours au sujet des accords commerciaux. Le projet de loi C-85 exige que nous fassions appel à notre jugement, mais l’accord de libre-échange est conclu entre les deux pays, si bien que nous ne pouvons pas le modifier. J’imagine que nous pourrions dire oui ou non.
Les modifications que contient le projet de loi C-85 découlent-elles directement des changements apportés à l’accord de libre-échange?
M. Healy : Je peux répondre à cette question, et merci de l’avoir posée. C’est exact. La loi d’exécution est en réalité assez courte, parce que nous disposons déjà de la loi d’exécution originale. Les changements ne modifient cette première loi d’exécution que pour mettre en œuvre les modifications nécessaires découlant de l’accord modernisé, et il y en a peu. Il s’agit principalement des dispositions institutionnelles et de quelques autres dispositions de l’accord.
La présidente : Merci. Les sénateurs ont posé toutes leurs questions, et nous allons poursuivre notre étude. Nous avons hâte de nous réunir avec la ministre pour discuter des questions stratégiques dont nous avons commencé à parler, mais nous sommes conscients que les réponses que vous pouvez nous fournir sont limitées. Nous attendons que la ministre nous donne un aperçu des politiques, tant étrangères que commerciales, et nous nous réjouissons à la perspective de le recevoir.
Merci aux témoins.
(La séance est levée.)