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AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires étrangères et du commerce international

Fascicule no 62 - Témoignages du 1er mai 2019


OTTAWA, le mercredi 1er mai 2019

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international, auquel a été renvoyé le projet de loi C-85, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange Canada — Israël et apportant des modifications connexes à d’autres lois, se réunit aujourd’hui, à 16 h 15, pour étudier le projet de loi.

La sénatrice A. Raynell Andreychuk (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Bonjour et bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international. Nous sommes heureux d’accueillir le ministre de la Diversification du commerce international, le ministre Carr.

Avant de le présenter de manière plus appropriée et de lui céder la parole, je vais demander aux sénateurs de se présenter.

[Français]

Le sénateur Dawson : Dennis Dawson, du Québec. Bienvenue au Sénat du Canada, monsieur le ministre.

[Traduction]

Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l’Ontario.

La sénatrice Bovey : Patricia Bovey, du Manitoba. Bienvenue.

[Français]

La sénatrice Saint-Germain : Raymonde Saint-Germain, du Québec, De la Vallière.

[Traduction]

Le sénateur Wetston : Howard Wetston, de l’Ontario.

Le sénateur Dean : Tony Dean, de l’Ontario.

Le sénateur Ngo : Thanh Hai Ngo, de l’Ontario.

La sénatrice Coyle : Mary Coyle, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Paul J. Massicotte, de la belle province de Québec.

[Traduction]

Le sénateur Greene : Stephen Greene, de la Nouvelle-Écosse.

La présidente : Je m’appelle Raynell Andreychuk et je suis de la Saskatchewan. Nous avons un bon groupe de sénateurs ici.

Aujourd’hui, nous sommes ici pour poursuivre notre étude du projet de loi C-85, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord de libre-échange Canada — Israël et apportant des modifications connexes à d’autres lois. Nous voulons également obtenir des réponses aux questions que les sénateurs peuvent avoir sur votre mandat en général. Merci, monsieur le ministre, de venir discuter du projet de loi. Comme vous le savez, le Sénat a une politique qui le sert bien : lorsque nous sommes saisis d’un projet de loi du gouvernement, nous voulons que le ministre comparaisse. Nous avions convenu de terminer notre étude avant la relâche. Vous n’étiez pas libre à ce moment, mais vous vous êtes libéré aussitôt que possible par la suite. Nous vous en sommes reconnaissants, car nous pourrons ainsi terminer notre étude en temps opportun.

Monsieur le ministre, le comité vous connaît bien. Nous avons suivi les activités de votre portefeuille. Nous sommes très motivés. Comme vous le savez, nous avons examiné un certain nombre d’accords commerciaux, et nous avons également examiné, de manière plus générale, les retombées de ces accords, ce qui a fait l’objet d’un rapport publié récemment.

Aujourd’hui, j’aimerais que votre déclaration liminaire porte sur le projet de loi C-85 et que vous nous parliez de tout sujet qui touche votre mandat. Je vais ensuite céder la parole aux sénateurs pour qu’ils puissent vous poser des questions sur le projet de loi, après quoi nous aborderons des questions de nature plus générale.

Bienvenue au comité et bienvenue à vos collaborateurs.

L'honorable Jim Carr, c.p., député, ministre de la Diversification du commerce international : Merci, sénatrice. Merci à tous de votre invitation. J’entre pour la première fois dans cet édifice magnifique. Si ma mémoire est bonne, c’est ici qu’ont eu lieu, il y a de nombreuses années, de très importantes conférences constitutionnelles et le rapatriement même de la Constitution. C’est, en quelque sorte, un lieu sacré.

Chaque fois que je rencontre un comité sénatorial, je pense toujours à mon très cher ami, le regretté Duff Roblin, avec qui j’ai eu le plaisir de travailler à la rédaction de ses mémoires. Il avait, bien sûr, des opinions très arrêtées sur le rôle du Sénat — et j’en partage de nombreuses — et sur l’importance que le Sénat a joué et continue de jouer dans la gouvernance de notre pays.

Je suis honoré de me trouver parmi vous et je comprends l’importance de la reddition de comptes et de la reddition de comptes des ministres à l’égard des comités de la Chambre et du Sénat. Je vous remercie donc de me donner l’occasion de témoigner.

Je suis heureux également de pouvoir vous parler du projet de loi C-85 et de faire le point avec vous, puisque vous aurez probablement aussi des questions sur les autres accords commerciaux que nous avons signés dernièrement, notamment l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne, l’AECG, et l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste, le PTPGP, dont vous avez aussi la responsabilité. La prompte adoption par le Sénat du projet de loi sur la ratification du PTPGP a eu des retombées tangibles et mesurables pour le Canada. Nous pourrons sans doute en parler lors de la période des questions.

Comme vous le savez, mesdames et messieurs les sénateurs, le Canada et Israël sont unis par la force de leurs liens de peuple à peuple depuis longtemps, par leur engagement commun en faveur de la démocratie et par une amitié née il y a 70 ans lorsque Israël est devenu une nation. Ces liens continuent de se solidifier d’année en année.

Les premiers juifs sont arrivés au Canada en 1759, et aujourd’hui, notre communauté qui compte plus de 350 000 membres occupe toujours une place importante dans la mosaïque culturelle de notre pays.

Mes grands-parents paternels et maternels ont immigré au Canada en 1906 pour fuir les pogroms du tsar qui les ciblait pour une seule et unique raison: ils étaient juifs. Si je suis devant vous, c’est parce que le Canada a accueilli ma famille, tout comme il continue d’accueillir les familles qui fuient la persécution. Dans mon cas, il s’agissait de la persécution des juifs en 1905 dans la foulée des pogroms du tsar.

Je me suis rendu en Israël à maintes reprises, mais c’est en août dernier que j’y ai fait mon premier voyage à titre de ministre de la Diversification du commerce international. Les membres du comité n’auraient, bien sûr, aucune raison de savoir que je suis un des membres fondateurs du Arab Jewish Dialogue à Winnipeg, un groupe qui a pour mission de favoriser le dialogue, le respect et la coopération entre les Arabes et les juifs au Canada. Nous sommes un groupe d’hommes et de femmes et nous nous réunissons chaque mois dans nos maisons, et c’est le cas depuis plus d’une décennie, pour parler de l’histoire, de la culture, du racisme, de l’antisémitisme, de l’islamophobie, du conflit israélo-arabe, ainsi que d’autres grands enjeux qui touchent le Moyen-Orient et, en fait, le monde entier.

Lors de mon dernier voyage, j’ai eu l’occasion de me rendre à Ramallah pour inaugurer officiellement le Conseil commercial canado-palestinien, qui nous aidera à renforcer les liens commerciaux entre nos communautés. J’ai également été fier d’annoncer la contribution financière de 200 000 $ au Forum des femmes d’affaires palestiniennes qui vient en aide aux femmes entrepreneures.

Mon dernier voyage en Israël m’a également permis de constater à quel point le Canada et Israël ont bâti un partenariat qui ne cesse de s’intensifier et de grandir d’année en année. Le renforcement de nos liens appelle un renouveau constant, et c’est pourquoi le gouvernement a récemment actualisé l’Accord de libre-échange Canada — Israël, ou ALECI. Le nouvel accord ouvre la voie à l’établissement de nouveaux partenariats entre Canadiens et Israéliens dans les secteurs en pleine croissance que sont, dans nos marchés dynamiques, la science, la technologie et l’innovation. L’accord permettra à plus de gens de collaborer et de créer ainsi des emplois bien rémunérés pour les Canadiens.

Le projet de loi C-85 qui se trouve devant vous aujourd’hui témoigne de l’engagement qu’ont pris le Canada et Israël de continuer de faire preuve d’ouverture, de célébrer leur amitié et d’élargir leurs liens afin que plus de nos gens et de nos entreprises puissent en profiter.

Depuis l’entrée en vigueur du premier ALECI il y a, et c’est extraordinaire, plus de deux décennies, le commerce bidirectionnel entre le Canada et Israël a triplé pour atteindre plus de 1,9 milliard de dollars l’an dernier. Ce chiffre témoigne bien du fait que nos accords de libre-échange favorisent les échanges commerciaux et créent des emplois pour les Canadiens.

Jusqu’à maintenant, l’ALECI portait uniquement sur les marchandises. Le nouvel ALECI vient actualiser quatre des chapitres originaux, incluant celui sur le règlement des différends, afin qu’ils soient conformes aux normes de nos derniers accords de libre-échange. Il comprend également neuf nouveaux chapitres, dont un sur la propriété intellectuelle et un sur le commerce électronique.

Nous avons négocié des règles qui visent à remédier au problème des barrières non tarifaires, à faciliter les échanges et à réduire certains coûts que les entreprises doivent assumer pour faire des affaires. Nous avons également amélioré les modalités d’accès aux marchés pour les entreprises canadiennes. Une fois en vigueur, près de la totalité des exportations canadiennes des secteurs de l’agriculture, de l’agroalimentaire et des fruits de mer vers Israël bénéficieront d’un traitement tarifaire préférentiel, soit une augmentation par rapport aux 90 p. 100 actuels.

Ces importantes réductions des droits pour le secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire placeront le Canada sur un pied d’égalité avec les exportateurs des États-Unis et de l’Union européenne, de grands concurrents dans ce secteur. Il donne également aux entreprises canadiennes un avantage sur leurs concurrents dans d’autres pays qui n’ont pas d’accord de libre-échange avec Israël. En échange, le Canada a accepté d’éliminer les tarifs sur des importations agricoles et agroalimentaires israéliennes ciblées, comme certains types de poissons, de noix, de fruits tropicaux et d’huiles.

Nous sommes allés encore plus loin en innovant dans le domaine du droit international pour mettre un terme aux inégalités d’accès aux investissements et aux échanges commerciaux créateurs d’emplois. Cet accord moderne est un nouveau partenariat progressiste qui reflète qui nous sommes : des sociétés dynamiques, diversifiées, ouvertes et démocratiques. Les nouveaux chapitres sur le genre, l’environnement et le travail visent explicitement à resserrer nos liens commerciaux tout en facilitant l’accès aux marchés pour ceux qui avaient l’impression qu’on n’avait pas nécessairement tenu compte d’eux ou de leurs valeurs dans les accords précédents.

Mesdames et messieurs les sénateurs, il n’y a que trois accords commerciaux contenant un chapitre sur le genre, et cet accord est l’un des trois, et c’est une prise de position remarquable. C’est la première fois qu’Israël l’inclut dans un accord, et la deuxième fois pour le Canada. Il y a un potentiel économique énorme qui n’est pas exploité, car nous avons axé nos efforts sur la minorité plutôt que sur la majorité pendant trop longtemps. Nous allons changer les choses. Nous encourageons plus d’exportateurs potentiels à se lancer dans l’aventure et ces chapitres visent à montrer aux travailleurs et à leurs familles que le commerce peut leur être profitable.

Le nouveau chapitre sur les petites et moyennes entreprises crée un cadre pour que les parties puissent travailler ensemble à aider ces entreprises à tirer pleinement parti des débouchés que leur offre cet accord moderne. Le nouvel article sur la responsabilité sociale des entreprises confirme l’engagement du Canada et d’Israël à encourager les entreprises à utiliser des normes volontaires de responsabilité sociale des entreprises, et il fait précisément référence aux Principes directeurs pour les entreprises multinationales de l’OCDE qui ont l’appui des gouvernements et auxquels adhèrent Israël et le Canada.

Mesdames et messieurs les sénateurs, je vous encourage à appuyer un accord qui renforcera et améliorera les liens commerciaux existants dont nos deux pays ont grandement profité.

Je suis également très heureux de vous parler aujourd’hui de la mise en œuvre de l’AECG et du PTPGP. L’AECG est entré en vigueur en 2017, et les entreprises canadiennes ont déjà commencé à en profiter. En effet, au cours de la première année de l’accord, les exportations de marchandises en direction de l’Union européenne ont augmenté de 4,5 p. 100, et si on exclut les métaux et les pierres précieuses, elles ont crû de 12,9 p. 100 pendant cette période.

À titre d’exemple, PBSC Solutions urbaines, une entreprise de Montréal qui a déployé des systèmes de vélopartage dans des villes partout dans le monde, en a déjà profité. J’ai eu le plaisir de visiter leurs installations avec Mme Cecilia Malmström, la commissaire au commerce de l’Union européenne. On nous a raconté l’histoire de cette entreprise montréalaise qui a remporté un appel d’offres pour expédier 7 000 bicyclettes à Barcelone dans le cadre d’une entreprise commerciale de vélopartage. Elle n’aurait pas été en mesure de remporter ce contrat si l’AECG n’avait pas permis d’annuler les tarifs douaniers de 15 p. 100 et si le chapitre qu’il contient ne lui avait pas ouvert les portes de ce marché. Imaginez un instant, mesdames et messieurs les sénateurs, le marché international du vélopartage. Aujourd’hui, nous avons une entreprise de fabrication à Montréal qui a une longueur d’avance et un accès au marché grâce à cet accord de libre-échange. Ce n’est qu’un exemple. Parfois, les exemples et les histoires de ce genre sont la meilleure façon de convaincre les gens de l’importance de ces accords commerciaux.

Même si l’accord est relativement jeune, ces premiers succès sont encourageants. L’entrée en vigueur du PTPGP est encore plus récente, soit le 30 décembre dernier. Je tiens à vous remercier de la rapidité avec laquelle vous avez adopté le PTPGP. Des gens qui sont au Parlement depuis beaucoup plus longtemps que moi m’ont dit que la vitesse à laquelle l’accord avait franchi toutes les étapes à la Chambre des communes et au Sénat avait battu tous les records. C’était important que les choses se passent ainsi, car en faisant partie de la première tranche de six pays qui ont ratifié l’accord, nous pouvions profiter de deux réductions des tarifs, une le 30 décembre et une trois jours plus tard, ce qui nous donnait un avantage concurrentiel important. Tout cela n’a pu être accompli que grâce à la collaboration — et je peux sans doute dire que c’est une hérésie — du Parti conservateur à la Chambre des communes et des sénateurs, un élément tellement important pour notre statut de nation commerçante.

Mesdames et messieurs les sénateurs, savez-vous que nous sommes maintenant le seul pays du G7 à avoir des accords de libre-échange avec les six autres pays et que cela place le Canada dans une position très solide sur la scène internationale?

Il faudra un certain temps avant de bien comprendre les retombées de l’accord qui commencent à se matérialiser. Je peux toutefois vous dire que nous savons déjà que les exportations de marchandises passibles de droits de douane vers le Japon ont crû en janvier et février de 17 p. 100 par rapport à la même période en 2018.

Les exportations de bœuf, quant à elles, ont doublé pendant la même période.

Sénatrice, moi, en tant que Canadien de l’Ouest, de Manitobain, et vous, en tant que Saskatchewanaise, allons nous réjouir tout spécialement de l’ouverture de ces marchés pour nos producteurs. Nous pourrons parler du canola plus tard, mais il y aura aussi de très belles occasions à exploiter pour les producteurs de blé et de canola dans les régions de l’Asie-Pacifique. C’est extrêmement encourageant, et c’est grâce notamment au travail du comité.

Ces trois accords, l’AECG, le PTPGP et l’ALECI font partie d’une vaste stratégie de diversification de nos échanges commerciaux. Le gouvernement travaille avec diligence et activement pour aider les entreprises canadiennes à avoir accès à de nouveaux marchés, de nouveaux clients, et ainsi à créer des emplois. Le commerce fait partie de l’ADN des Canadiens. Nous représentons environ 0,5 p. 100 de la population mondiale, mais nos exportations de marchandises totalisent 2,3 p. 100 des échanges mondiaux, et 2 p. 100 du PIB mondial. Un emploi sur six est lié à l’exportation. Le commerce est essentiel à notre prospérité économique et au maintien de notre niveau de vie. Même si notre voisin du Sud est notre plus important partenaire commercial, le moment n’a jamais été aussi propice à la diversification.

Les nouveaux accords commerciaux du Canada lui offrent un accès sans précédent à certains des plus grands marchés du monde. Nos accords commerciaux couvrent 63 p. 100 du PIB mondial. Nous avons 14 accords commerciaux qui nous donnent un accès préférentiel aux marchés de 51 pays, soit environ 1,5 milliard de consommateurs et un PIB combiné de 50 billions de dollars américains.

Toutefois, même si l’ALECI, l’AECG et le PTPGP et d’autres accords commerciaux permettent d’établir des ponts économiques avec d’autres pays, les Canadiens ne peuvent en profiter pleinement que si nous réussissons à convaincre nos entreprises d’utiliser ces ponts. C’est pourquoi le gouvernement a annoncé un investissement de 290 millions de dollars sur cinq ans pour aider les entreprises canadiennes à exporter et à croître, pour renforcer le Service des délégués commerciaux et améliorer le soutien offert aux exportateurs canadiens. Cet investissement comprend un montant de 100 millions de dollars en nouveaux fonds destinés au programme CanExport, qui aidera les entreprises à créer de nouveaux débouchés d’exportation, en particulier dans les marchés émergents à forte croissance et les marchés bénéficiant d’accords de libre-échange.

Le ministère que je dirige a également mis sur pied un groupe de travail sur la promotion des accords de libre-échange qui est responsable d’un programme complet de liaison et de formation destiné au milieu des affaires. Ces efforts, ces accords et ces investissements aideront à générer de la richesse, à faire croître notre économie et à créer de nouveaux emplois pour les Canadiens.

Je tiens à vous remercier, madame la présidente, de m’avoir donné l’occasion de prendre la parole devant le comité. J’ai maintenant hâte de discuter avec vous et de répondre à vos questions.

La présidente : Merci, monsieur le ministre, de votre résumé et de vos explications au sujet de l’Accord de libre-échange Canada — Israël et de l’avoir situé dans le contexte des autres accords de libre-échange.

Avant de passer à la liste des sénateurs qui veulent poser des questions, je veux indiquer pour le compte rendu que nous avons eu une discussion très fructueuse avec les fonctionnaires qui sont venus nous rencontrer au début de notre étude du projet de loi C-85. Certaines des questions que nous aurions pu avoir à vous poser ont déjà trouvé réponse, ce qui vous simplifiera un peu la tâche.

Deuxièmement, je veux assurer le public, et vous-même, monsieur le ministre, que nous avons géré le PTPGP de manière très efficace, et ce, parce que nous avions étudié de nombreux aspects du commerce dans une étude générale, comme je l’ai souligné dans notre rapport en 2017, je crois. Nous étions déjà bien préparés et prêts à recevoir le produit final. Nous avions examiné le PTPGP, et de nombreux témoins, même si nous voulions discuter de concepts généraux, en sont venus rapidement au PTPGP. Je pense que nous le comprenions bien et avons donc cheminé rapidement. Je peux vous assurer que rien n’a été fait à la hâte; nous avons travaillé rapidement et efficacement parce que nous connaissions déjà le contexte et avions examiné bon nombre d’enjeux, et nous continuons de le faire. Je peux vous assurer que nous allons faire de même pour les présentes questions.

[Français]

La sénatrice Saint-Germain : Merci de votre présentation, monsieur le ministre. Je dois m’excuser à l’avance, car je devrai partir avant la fin de cette séance en raison d’une autre obligation sénatoriale. Ce n’est pas par manque d’intérêt, je tiens à vous le préciser.

Ma question porte le territoire couvert par l’accord de libre-échange et le projet de loi C-85, et plus précisément l’enjeu des territoires occupés depuis 1967. J’ai noté que, afin de se conformer à la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU — la Résolution 2334, signée en décembre 2016, qui appelle les États à faire la distinction, dans les échanges commerciaux et les transactions, entre le territoire israélien et les territoires occupés depuis 1967 —, l’Union européenne a exigé que tous les produits en provenance des territoires occupés depuis 1967 soient identifiés comme tels. Je note aussi qu’Affaires mondiales Canada ne reconnaît pas le contrôle permanent exercé par Israël sur ces territoires. Par ailleurs, le choix qu’a fait le Canada, lors de la négociation de cet accord de libre-échange, a été de ne pas imposer de mesure similaire à celle de l’Union européenne. Il y a sûrement une raison qui explique ce choix, et j’aimerais la comprendre.

Ma question est la suivante : pourquoi avons-nous choisi de ne pas imposer de mesure similaire à celle de l’Union européenne en ce qui concerne les territoires occupés depuis 1967?

[Traduction]

M. Carr : Merci, madame la sénatrice. Je vous remercie de la question.

Aux termes de l’ALÉCI, on définit le territoire d’Israël comme étant celui où ses lois douanières sont appliquées, ce qui comprend la Cisjordanie et la bande de Gaza. Voilà la raison.

Dans le cadre du processus de paix d’Oslo, en 1994, un accord douanier a été conclu entre Israël et l’Autorité palestinienne concernant les marchandises à destination et en provenance de Cisjordanie et de la bande de Gaza. Dans l’Accord-cadre canado-palestinien de coopération économique et commerciale conclu entre le Canada et l’Organisation de libération de la Palestine, le Canada et l’Autorité palestinienne font référence à l’arrangement douanier entre Israël et l’Autorité palestinienne et reconnaissent que l’ALECI s’applique aux marchandises en provenance ou à destination de la Cisjordanie et de la bande de Gaza.

La sénatrice Saint-Germain : Merci pour l’explication.

Le sénateur Greene : J’ai deux questions très différentes. Premièrement, au début de votre exposé, vous avez dit que le commerce faisait partie de notre ADN. Je pense que c’est probablement le cas, mais je me souviens d’un temps où ça ne l’était pas. Je crois que cela a commencé avec les élections de 1988, qui portaient sur le libre-échange et où les Canadiens ont voté pour la première fois à ce sujet. Notre gouvernement n’a pas eu peur de déclencher des élections à ce sujet. Depuis, tous les gouvernements canadiens sans exception ont appuyé le libre-échange.

Y a-t-il selon vous quelque chose dans l’avenir qui pourrait nous faire dévier de cette voie?

M. Carr : Si je pouvais prédire l’avenir, sénateur, je serais probablement dans un autre domaine, mais je peux examiner le passé. Je viens de finir de lire des choses fabuleuses, y compris des mini-biographies de tous les premiers ministres. Je me suis particulièrement concentré sur les dirigeants plus anciens. Je peux évoquer l’élection fédérale de 1911, qu’on dit de réciprocité, cette élection que sir Wilfrid Laurier a perdue parce qu’il proposait une union douanière et la réciprocité avec les États-Unis. Tout au long de l’histoire du Canada, il y a eu des poussées et des reculs protectionnistes. La politique nationale de Macdonald était enracinée dans les tarifs. Nous avons évolué depuis.

Vous avez tout à fait raison. Depuis l’élection de 1988, les principaux partis politiques du Canada croient que la libéralisation du commerce est dans l’intérêt du Canada. Nous pouvons le démontrer par la croissance économique. On n’a qu’à penser à ce qui s’est produit après l’accord avec les États-Unis et l’ALENA.

C’est pourquoi le gouvernement continue de soutenir les accords commerciaux qui ont été signés. Je parle ici de l’accord avec les Européens, le nouvel ALENA — que nous appelons l’ACEUM, parce que dans nos accords commerciaux canadiens, le Canada doit passer en premier — et l’Accord de Partenariat transpacifique global et progressiste, le PTPGP. Nous croyons que la libéralisation du commerce est dans l’intérêt du Canada, certes, mais il importe aussi de convaincre nos partenaires commerciaux que c’est aussi dans leur intérêt. Si nous ne pouvons pas être convaincants, nous ne serons jamais en mesure de signer des ententes. Si nous avons plus de temps, nous pourrons parler de l’initiative que notre pays a prise de réformer l’Organisation mondiale du commerce, qui était aussi enracinée dans notre croyance en un ordre commercial international fondé sur des règles et dont le fondement même est la conviction que la libéralisation du commerce est bonne pour le Canada et pour ses partenaires.

Le sénateur Greene : Merci beaucoup.

C’est une excellente réponse. Je suis en faveur de ce traité avec Israël. Je suis pour le libre-échange. Je pense que ce n’est pas seulement dans notre intérêt et dans celui de nos partenaires commerciaux, mais aussi dans celui de l’économie mondiale en général. L’une des choses que j’aime du traité israélien, c’est qu’il étend le libre-échange à un allié qui adhère à des valeurs qui nous tiennent à cœur.

Cet allié particulier se trouve dans une région qui n’est pas accueillante. Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour nous assurer qu’il continue d’exister. Dans la mer de Chine méridionale, il y a un autre endroit qui est un peu comme Israël, et c’est Taïwan.

Taïwan ne fait partie d’aucun accord commercial international à l’heure actuelle, bien qu’elle souhaite adhérer au PTPGP. Pourriez-vous nous dire où le Canada se situe en ce qui concerne l’adhésion de Taïwan au Partenariat transpacifique?

M. Carr : Taïwan est membre de l’OMC. C’est dans ce cadre que le Canada entretient des relations avec Taïwan.

Nous avons discuté du processus d’adhésion au PTPGP. Les ministres ont tenu leur première réunion à Tokyo en janvier après la ratification de la première phase de six plus un. Aucune décision n’a encore été prise. Le seul principe qui sous-tendra toute conversation en matière d’adhésion est que toute nation qui aspire à faire partie du PTPGP devra intégrer, adopter et embrasser ces normes très rigoureuses. C’est la première porte qu’elles doivent franchir.

Ensuite, les États membres se réuniront et décideront s’ils sont d’accord ou non avec l’adhésion. Il y a d’ailleurs eu quelques manifestations d’intérêt, mais il n’y a pas eu de réunion officielle pour discuter d’une éventuelle adhésion. Nous verrons quelles nations sont suffisamment intéressées pour présenter une demande et nous verrons ensuite si elles sont prêtes à respecter les normes rigoureuses de l’accord. Si c’est le cas, les États membres auront des décisions à prendre.

Le sénateur Housakos : Monsieur le ministre, bienvenue au comité. Nous sommes tous très favorables à cet accord et, de façon générale, nous avons appuyé tous les accords commerciaux. Tous ont été avantageux pour le Canada. Ces accords sont bons pour notre économie. Celui-ci nous rapprochera d’une économie très dynamique et d’une grande démocratie du Moyen-Orient. Nous sommes heureux que le gouvernement ait poursuivi cette initiative lancée par le gouvernement précédent. La raison pour laquelle l’AECG et ce projet de loi seront adoptés rapidement à la Chambre haute, c’est que ce sont deux excellents projets de loi.

Nous sommes heureux que le gouvernement ait adhéré à cette initiative. Je crois que cet accord est un symbole. Il témoigne de la relation politique et stratégique étroite que nous entretenons avec Israël. Que fait le gouvernement actuel pour renforcer les aspects stratégiques et politiques de notre relation avec Israël? Quels signaux envoyons-nous pour montrer que nous reconnaissons les intérêts politiques et de sécurité légitimes de ce pays? Le gouvernement actuel est-il prêt à reconnaître Jérusalem comme la capitale unie d’Israël? Également, monsieur le ministre, croyez-vous personnellement et le gouvernement croit-il que la ville de Jérusalem ne peut plus être divisée?

M. Carr : Je ne suis pas ministre des Affaires étrangères. Je ne parle pas au nom du gouvernement du Canada en matière de politique étrangère. Toutefois, je connais très bien la position du gouvernement canadien sur ces questions et je suis heureux d’en discuter avec vous.

En ce qui concerne la question de Jérusalem, nous pensons qu’il s’agit d’une question qui devrait être déterminée par une négociation dans le cadre d’une discussion de paix plus large entre le peuple palestinien et les Israéliens. Ce n’est pas aux Canadiens de prendre cette décision. C’est la position des gouvernements du Canada depuis très longtemps. Je ne crois pas que notre position changera tant que les parties elles-mêmes ne se seront pas assises à la table des négociations et n’auront pas déterminé, par la négociation, ce qu’elles estiment être le juste règlement en ce qui concerne Jérusalem.

Sur la question de l’appui politique, stratégique et diplomatique à Israël, nous avons été sans équivoque, tant dans nos habitudes de vote à l’ONU que dans les réunions bilatérales entre notre premier ministre et le premier ministre israélien. J’ai eu le plaisir, même au cours des dernières semaines, d’accueillir le premier ministre d’Israël au Canada. Nos rapports ont été très chaleureux. Il y a eu une rencontre bilatérale avec notre premier ministre, rencontre au cours de laquelle M. Trudeau a réitéré l’appui du Canada à l’État d’Israël, à la sécurité de l’État d’Israël et à une solution à deux États, qui est la politique que défendent depuis très longtemps les différents gouvernements canadiens qui se sont succédé.

Nous sommes absolument déterminés à assurer la sécurité de cet État. Nous sommes absolument déterminés à faire ce qu’il faudra pour permettre aux parties de s’asseoir à la table des négociations pour ce que nous croyons être une solution durable à la question.

Le sénateur Massicotte : Monsieur le ministre, merci de votre présence, elle est très appréciée. Si je peux poursuivre un peu sur la question des territoires occupés illégalement, vous avez expliqué pourquoi nous faisons ce que nous faisons en matière de douanes. Cela évite d’avoir à prendre une décision plus importante encore, une décision plutôt politique ou relative aux droits respectifs, comme cela s’est fait en Europe. En d’autres termes, sans égard pour la réponse technique que vous avez donnée, nous pourrions dire que nous devrions traiter les territoires occupés différemment étant donné qu’ils sont occupés illégalement et qu’ils ont par conséquent la même fonction commerciale, mais aussi faire passer notre point de vue sur ce que nous approuvons et désapprouvons dans ce territoire.

Pourriez-vous m’expliquer un peu plus en détail pourquoi nous ne nous aventurons pas dans ce genre de processus, comme l’Europe l’a fait?

M. Carr : Je ne suis pas tout à fait sûr de comprendre votre question, monsieur le sénateur. Vous avez dit que nous devrions entrer davantage dans les détails relativement à la nature des territoires occupés et de leurs...

Le sénateur Massicotte : Oui, mais vous n’êtes pas ministre des Affaires étrangères. Je parle essentiellement de commerce.

M. Carr : Je pense que la réponse que j’ai donnée à la première question expliquait pourquoi la réglementation douanière et la description géographique des territoires — en particulier la Cisjordanie et Gaza — sont à la base de la façon dont l’accord a été négocié. Je ne peux pas aller plus loin.

Si vous posez d’autres questions sur la nature de ces relations et sur la politique étrangère du Canada à l’égard de la Cisjordanie et de la bande de Gaza et sur notre position quant à la façon dont nous pensons qu’il pourrait y avoir un règlement négocié, c’est une autre paire de manches. C’est quelque chose qui relève des affaires étrangères. Ma réponse portait, de manière bien stricte, sur la façon dont nous définissons la géographie par rapport à l’union douanière.

Le sénateur Massicotte : Pourquoi n’irions-nous pas aussi loin que les Européens? Pourquoi n’adopterions-nous pas leur perspective qui consiste à définir d’où viennent les produits et à les traiter différemment selon leur provenance?

M. Carr : L’accord d’association UE-Israël est entré en vigueur en 2000, et il ne contient aucune disposition concernant l’étiquetage des marchandises provenant des colonies israéliennes. En 2015, l’Union européenne a publié une communication interprétative sur l’indication de l’origine des marchandises en provenance des territoires occupés par Israël depuis juin 1967.

Cette communication n’était pas une nouvelle mesure législative, mais visait à clarifier certains éléments d’interprétation et de mise en œuvre de la loi actuelle, qui stipule qu’une indication d’origine est obligatoire, le cas échéant.

On dirait que cela a été écrit par quelqu’un qui est formé pour écrire les choses de cette façon, mais c’en est la raison. La notice interprétative donne des indications sur la manière dont les produits provenant des territoires occupés devraient être étiquetés de manière à ne pas induire en erreur. L’application de ces exigences en matière d’étiquetage est une compétence des États membres de l’Union européenne qui n’avait pas été mise en œuvre. C’est le plus que je peux vous en dire à ce sujet, monsieur le sénateur.

Le sénateur Massicotte : Permettez-moi d’aborder la question du traité avec l’Europe.

Nous avons constaté une certaine augmentation des échanges commerciaux, une augmentation de l’ordre de 4 p. 100, et si vous incluez les autres secteurs, je pense que cela grimpe à 7 ou 8 p. 100, ce qui est bien. Certains articles ont été écrits plus récemment, mais je ne suis pas sûr qu’ils soient exacts. Si vous regardez, leurs échanges commerciaux ont augmenté plus que les nôtres, et certains disent que c’est parce que certaines barrières non tarifaires sont toujours très difficiles à cerner et à aplanir. Y a-t-il du vrai dans cet article ou dans cet argument qui veut nous faisons aussi bien que nous le pourrions, compte tenu du fait qu’ils ont des obstacles difficiles à surmonter qui freinent l’accroissement de nos échanges commerciaux?

M. Carr : Si nous devions faire une évaluation arithmétique de l’impact de l’AECG sur les exportations et les importations, disons que nous n’obtiendrions pas un équilibre parfait.

Il y a deux raisons à cela. La première, c’est qu’il faudra un certain temps aux entreprises canadiennes pour se familiariser avec le modèle européen et les exigences européennes. Ce sera le cas pour le bœuf et les autres produits d’exportation. Je pense que ce serait une erreur de juger du succès de l’accord strictement sur la base d’une comparaison des importations et des exportations au cours de la première année de sa mise en œuvre. Permettez-moi de donner un exemple particulier. Dites-moi si j’ai tort, mais je pense que j’ai raison. Grâce à cet accord, une nouvelle chocolaterie belge a ouvert ses portes en Ontario. Eh bien, il s’agit d’un investissement européen qui nourrit la fabrication de chocolat au Canada et qui crée des emplois ici. C’est l’accord commercial de l’AECG qui a permis cela. Cela va être comptabilisé au titre des exportations européennes vers le Canada, n’est-ce pas? Sauf que cela crée des emplois au Canada. Bien sûr, c’est un investissement européen au Canada. Ce sont des produits qui circulent.

Le sénateur Massicotte : C’est devenu une entreprise canadienne, avez-vous dit. Elle sera établie au Canada.

M. Carr : Je ne sais pas si c’est devenu une entreprise canadienne, mais, aux termes de l’accord commercial avec le Canada, elle a recours à des investissements pour créer des emplois pour les Canadiens au Canada. C’est positif. Nous devons évaluer l’impact de l’accord sur plus qu’une simple comparaison entre les exportations et les importations.

Cela dit, les chiffres sont bons. Il est question de 12,9 p. 100 pour cette période, ce qui équivaut, pour la même période, à l’augmentation des exportations vers certaines régions de l’Union européenne. C’est ce que nous obtenons si nous enlevons les pierres et les métaux précieux de l’équation. Si nous les excluons et que nous utilisons votre propre définition de l’équilibre — c’est-à-dire une évaluation qualitative de la façon dont vont les choses —, nous sommes à parité avec l’Union européenne.

Il est également vrai que le trafic dans nos ports a considérablement augmenté. Depuis la signature de cette entente, le trafic de conteneurs dans le port de Montréal a augmenté de 9 p. 100. D’autres chiffres montrent que ce genre d’activité commerciale accrue dans les deux sens crée une activité économique que nous n’aurions pas sans l’accord.

Selon les mesures que vous voulez utiliser, sénateur, vous pourriez faire valoir que les Européens étaient mieux préparés que les Canadiens à bondir et à bondir plus vite. Je pense qu’il y a probablement une autre raison. Cela pourrait s’inscrire dans notre conversation sur le service des délégués commerciaux et sur la zone de confort dont les entreprises canadiennes ont bénéficié en faisant affaire avec les États-Unis. Lorsque le marché des exportations s’ouvre, les petites et moyennes entreprises canadiennes se demandent ce que cela signifie pour elles. Nous mettons à leur disposition les services de délégués commerciaux. Nous augmentons considérablement nos investissements dans ces services, qui sont désormais présents dans 160 villes à l’échelle internationale. Soit dit en passant, j’ai eu le plaisir, sénatrice Bovey, de rouvrir le bureau du délégué commercial à Winnipeg, bureau qui avait été fermé par un gouvernement précédent. C’est un symbole du genre de service que nous voulons mettre à la disposition des exportateurs qui voient le marché européen s’ouvrir à eux, mais qui ne sont jamais allés là-bas et qui sont un peu nerveux à cet égard. Entre CanExport, les services commerciaux et ces investissements, nous pensons qu’avec le temps — et peu de temps, en fait —, les Canadiens en profiteront pleinement. Nous croyons que les chiffres de la première année étaient plutôt bons.

La sénatrice Bovey : Je suis heureuse de vous revoir, monsieur le ministre. Je vais modifier la trajectoire de la discussion. Je pense que le travail que vous réalisez relativement à l’Accord de libre-échange Canada — Israël donne suite à celui que vous avez accompli au fil des ans avec les conseils d’entreprises et au rôle que vous avez joué auprès de la communauté juive de Winnipeg et dans la compréhension interreligieuse à l’échelle nationale. Je vous remercie de ce travail et, à mon avis, le projet de loi est la prochaine étape.

Ma question portera sur le canola. En tant que concitoyens du Manitoba, nous comprenons tous les deux les conséquences que ce différend a pour les cultivateurs du Manitoba et de la Saskatchewan. D’après les rapports, nous savons que les agriculteurs du Manitoba planifient de cultiver moins de canola cette année en raison de l’impasse qui persiste, et cela constitue une adaptation rapide pour eux.

Je me réjouis des efforts qui sont en voie d’être déployés pour atténuer les répercussions du différend, c’est-à-dire le groupe de travail, les efforts diplomatiques et l’annonce que vous avez faite aujourd’hui pour appuyer les agriculteurs. Le fait est que nous entendons tous certaines personnes réclamer que des mesures de représailles soient prises contre les Chinois, alors que d’autres veulent que nous maintenions le cap en poursuivant le dialogue et en cherchant une solution scientifique. À quel moment pensez-vous que nous devrons durcir notre position et utiliser des mesures de représailles? De plus, des mesures de ce genre seraient-elles efficaces?

M. Carr : Ce que j’ai déclaré en point de presse ce matin, avant de commencer à lire la déclaration bien formulée qui avait été préparée, c’est qu’il s’agissait d’une journée importante pour le Canada pour deux raisons. La première raison est que, quand, dans ce vaste pays diversifié, un secteur, une industrie, une région est en difficulté, le reste du pays le comprend et lui vient en aide. En tant que Manitobain et Canadien de l’Ouest, le fait d’avoir vu le gouvernement et mes collègues comprendre que le gouvernement national a la responsabilité de répondre aux besoins des producteurs de l’Ouest canadien, qui sont dans cette situation pour des raisons qui échappent entièrement à leur contrôle, m’a présenté le meilleur exemple du fédéralisme canadien à l’œuvre, un fédéralisme qui est renforcé par la coopération des gouvernements du Manitoba et de la Saskatchewan.

J’ai personnellement rencontré les ministres du Commerce et de l’Agriculture du Manitoba et de la Saskatchewan, ainsi que le premier ministre de la Saskatchewan. Nous n’avons pas rencontré de politiciens de l’Alberta simplement parce qu’ils étaient au beau milieu d’une campagne électorale. Vous avez peut-être observé la réaction que M. Moe, le premier ministre de la Saskatchewan, a eue aujourd’hui. Nous avons travaillé avec l’entreprise Viterra, l’entreprise Richardson, les cultivateurs de canola et le Conseil canadien du canola. Nous nous sommes entendus pour dire que le meilleur moyen d’aborder maintenant le problème repose sur les preuves scientifiques que les Chinois peuvent nous présenter.

L’Agence canadienne d’inspection des aliments a procédé à deux inspections, une avant que cette récolte quitte le Canada et une après que les Chinois ont allégué qu’elle contenait des impuretés. Ces inspections n’ont rien révélé d’anormal. Nous avons invité les Chinois à nous présenter des preuves du contraire. Un certain nombre d’appels de téléconférence ont été passés. Nous avons demandé aux Chinois de nous inviter à nous rendre en Chine afin d’inspecter la récolte avec eux de manière à ce qu’ils puissent prouver que les résultats démontrent que la récolte est problématique.

Mesdames et messieurs les sénateurs, il y a deux choses dont vous devez vous souvenir. La première fois que l’entreprise Richardson a signé une entente avec les Chinois afin de leur vendre du blé remonte à 1910. Elle fait affaire avec les Chinois depuis ce temps. Je me hasarde à dire que l’entreprise continuera de faire affaire avec les Chinois pendant encore quelque temps. Ce n’est pas la première fois que nous avons un différend avec les Chinois à propos du canola. Vous vous souvenez peut-être du problème de la jambe noire en 2016 et du fait qu’en 2009, sous le gouvernement Harper, les Chinois avaient lancé des accusations à propos de la présence d’impuretés dans le canola. Nous avons alors été en mesure de nous employer à résoudre ces problèmes, et nous y sommes parvenus. C’est aussi ce que nous cherchons à faire cette fois-ci.

Notre stratégie, sénateur, repose sur trois piliers : premièrement, un dialogue avec les Chinois, que je vous ai décrit; deuxièmement, un mécanisme de soutien pour les producteurs, que j’ai annoncé ce matin — je serais heureux de parler de ses particularités, si cela intéresse les sénateurs —; troisièmement, la diversification des marchés.

Nous estimons que cette diversification est dans notre intérêt, même si je dois dire que, lorsque le premier ministre m’a confié le poste de ministre de la Diversification du commerce international, j’étais presque sûr que je passerais la plupart de mon temps à diversifier les marchés à l’extérieur des États-Unis. Maintenant, nous tentons une diversification légèrement différente. C’est la raison pour laquelle nous passons beaucoup de temps à appeler mes homologues dans des pays qui importent du canola canadien. Nous allons faire valoir qu’ils devraient importer plus de canola. Je peux nommer ces pays. Il s’agit du Pakistan, du Mexique, des Émirats arabes unis, de la Malaisie, et cetera. C’est aussi la raison pour laquelle nous avons annoncé ce matin que nous allions diriger des missions commerciales au Japon et en Corée. Je vais également profiter de mes déplacements internationaux de ce printemps — une réunion des ministres de l’APEC à Valparaiso, au Chili, puis une rencontre de l’OCDE à Paris — pour promouvoir la vente du canola canadien à l’échelle internationale en ces occasions. Nous mettrons sur pied des délégations, qui comprendront des représentants provinciaux, pour la portion japonaise et sud-coréenne de ce programme.

La réponse à votre question est que nous estimons que la ligne de conduite la plus sage consiste à nous appuyer sur ces trois piliers. Nous sommes conscients des autres options qui existent, et nous continuerons de les évaluer.

La sénatrice Bovey : Merci. Vous avez répondu à ma deuxième question avant que je la pose.

La sénatrice Coyle : Bienvenue à la séance du comité, monsieur le ministre.

M. Carr : Merci, madame la sénatrice.

La sénatrice Coyle : Pour en revenir à l’ALECI et aux territoires palestiniens, j’ai une brève question à vous poser pour conclure les questions que le sénateur Massicotte et la sénatrice Saint-Germain ont formulées à ce sujet.

Vous avez mentionné votre voyage à Ramallah, le Conseil commercial canado-palestinien et le Forum des femmes d’affaires palestiniennes. Je sais que ce sont de bons organismes et que nous obtenons une bonne collaboration là-bas.

Lorsque vous étiez avec eux, les avez-vous entendus exprimer des préoccupations quelconques à propos de l’ALECI?

M. Carr : Non, mais je les ai certainement entendus exprimer des préoccupations à propos de leur situation. Ce sont des inquiétudes que j’ai entendues auparavant. Ce n’était pas la première fois que je visitais les territoires. Lorsque j’étais journaliste, j’ai couvert les premières élections palestiniennes en Cisjordanie et à Gaza, et j’ai parcouru en profondeur l’ensemble des territoires. Je suis parfaitement au courant des faits sur le terrain et de la situation.

Mon voyage en Cisjordanie et à Ramallah visait à contribuer à la création du conseil, ce que nous avons accompli, et à offrir un soutien aux femmes d’affaires, ce que nous avons fait. D’autres mesures seront prises, et d’autres suivis seront assurés.

Oui, j’ai entendu une foule de commentaires à propos de la perception palestinienne de la situation, mais l’ALECI n’a pas été soulevé.

La sénatrice Coyle : D’accord. J’étais simplement curieuse à ce sujet. Je suis aussi consciente des barrières structurelles qui existent dans ce pays, même sur le plan géographique, et qui entravent le commerce, puisqu’il est nécessaire de quitter son véhicule. C’est une situation difficile pour eux du point de vue de l’économie, du commerce et de la circulation des biens et des personnes; nous avons cela.

Mon autre question est plus générale. Je suis fascinée par l’existence d’un ministre de la Diversification du commerce. Je pense que c’est une merveilleuse idée, et j’appuie les accords que vous avez mentionnés. Vous avez mentionné de nouveaux accords dont nous bénéficions maintenant, notamment certains accords qui en sont à leur tout début et d’autres accords qui ont été renouvelés, comme l’ALECI. Vous avez également mentionné des services de soutien qui sont offerts aux entreprises canadiennes, afin de les aider à mieux se préparer à développer leur capacité de comprendre ces marchés, à mieux interagir et à accroître leurs exportations. Je pense que toutes ces mesures sont excellentes. Nous avons parlé un peu du fait que les États-Unis sont notre priorité — bien sûr, cela ne va pas changer —, notre principal partenaire commercial, et nous avons abordé la question des difficultés que nous rencontrons dans nos échanges avec la Chine et aussi avec les États-Unis.

J’aimerais entendre parler de la grande stratégie du Canada en matière de diversification du commerce. Vous avez parlé de certains accords, mais j’aimerais savoir s’il y a une grande stratégie et, le cas échéant, quels sont ses principaux éléments.

M. Carr : Il pourrait y voir une grande stratégie, mais nous serions forcés de la modifier demain matin en raison d’événements géopolitiques imprévus.

La sénatrice Coyle : Je m’en rends compte.

M. Carr : Sénatrice, vous avez fait allusion à la lettre de mandat. Vous remarquerez que, dans cette lettre, le premier ministre a distingué la région de l’Asie-Pacifique comme étant la plus fructueuse pour la diversification canadienne. C’est effectivement le cas. C’est la raison pour laquelle nous consacrons autant de temps à entretenir une relation positive avec le Japon. Pas plus tard que le week-end dernier, nous avons accueilli le premier ministre Abe dans le cadre d’une réunion qui a été très fructueuse.

En janvier, après la ratification, je suis allé à Tokyo pour la réunion des ministres. Je retournerai au Japon en juin pour la réunion des ministres du Commerce des pays du G20. Nous serons aussi accompagnés d’une délégation pour parler du canola au Japon.

En raison de la montée de la classe moyenne dans ces pays, des centaines de millions de gens s’intéressent maintenant à ce que nous produisons — et s’y intéresseront encore davantage au cours de la prochaine génération. Nos produits ne se limitent pas aux ressources naturelles — bien que ces gens s’intéressent aussi à nos ressources naturelles. Je vais vous en donner un exemple — mais ils s’intéressent aussi à la propriété intellectuelle, à notre pouvoir mental et à notre brillance en matière de recherche et de développement novateurs à l’échelle internationale.

Les sénateurs sont au courant des 40 milliards de dollars investis par LNG Canada, un consortium qui est dirigé par Shell Canada, mais qui englobe des investisseurs du Japon, par l’intermédiaire de Mitsubishi, de la Chine et de la Malaisie, par l’intermédiaire de PETRONAS, qui possède 25 p. 100 des actions de LNG Canada, je crois.

Nous allons prendre du gaz naturel du Nord-Est de la Colombie-Britannique et le transporter par pipeline jusqu’à Kitimat. Là-bas, il sera liquéfié au moyen de processus propres et envoyé en Asie afin de remplacer le charbon dans la production d’électricité. C’est là une réalisation importante — dont, soit dit en passant, le mérite devrait être accordé en partie au Canada. Toutefois, il s’agit là d’une tout autre question.

Je pense que la région de l’Asie-Pacifique offre des possibilités en raison de sa démographie et de son accès, mais ce n’est pas la seule région qui présente un grand potentiel. Nous considérons que les négociations entre le Canada et le Mercosur avancent à bon train. Les pays du Mercosur sont l’Argentine, le Brésil, l’Uruguay et le Paraguay. De plus, nous continuons de négocier avec l’Alliance du Pacifique et avec l’ANASE, qui regroupe les États de l’Asie du Sud-Est. En outre, je m’intéresse personnellement à l’Afrique et au potentiel inexploité de la relation que nous entretenons avec elle. Je suis aussi certain que, dans votre question, vous entendez implicitement que nous ne pouvons pas être partout à la fois.

La sénatrice Coyle : C’est exact.

M. Carr : Quelle est notre priorité stratégique?

La sénatrice Coyle : Exactement.

M. Carr : Si vous m’obligez à choisir une région maintenant, je serai en terrain bien solide. Parce que cette région figure dans la lettre de mandat que le premier ministre m’a remise, je dirais que c’est la région de l’Asie-Pacifique.

Le sénateur Boehm : Je vous remercie, monsieur le ministre, de vous être joint à nous. J’ai deux questions à vous poser et, pour gagner du temps, je les poserai en même temps.

Au fil des ans, le Canada a conclu un grand nombre d’accords de libre-échange. Parfois, le suivi de ces accords est simple, parfois, il ne l’est pas. Vous nous avez fourni d’excellentes statistiques en ce qui concerne l’AECG et le PTPGP.

Nous avons signé un autre accord appelé l’ALECU, l’Accord de libre-échange entre le Canada et l’Ukraine. Il devient de plus en plus difficile pour les entreprises canadiennes d’obtenir du financement, une assurance contre les risques politiques ou une combinaison des deux, car il faut emprunter de l’argent pour exporter et faire de l’argent. Nous bénéficions d’une merveilleuse diaspora ukrainienne au Canada, et le gouvernement organisera une conférence sur les réformes en Ukraine en juillet.

Des initiatives sont-elles en voie possible d’être mises en œuvre afin de garantir qu’EDC peut s’avancer un peu plus en ce qui concerne un financement et la gestion potentielle du facteur de risque?

Vous avez partiellement répondu à ma deuxième question. Comme j’ai participé il y a 20 ans à l’initiative de négociation de l’accord sur la zone de libre-échange des Amériques, qui n’a mené à rien, j’aimerais savoir dans quelle mesure les négociations avec le Mercosur se déroulent bien.

M. Carr : Le négociateur en chef est ici. Par conséquent, nous pourrions obtenir une très bonne réponse, bien meilleure que celle que je pourrais vous donner. Pourrais-je m’exprimer pendant un moment, sénateur?

Le sénateur Boehm : Bien sûr.

M. Carr : J’ai une petite-fille ukrainienne qui illumine ma vie. Elle est la fille d’une femme née en Ukraine de l’Ouest, qui est arrivée au Canada complètement démunie, en compagnie de sa famille. C’est une merveilleuse histoire canadienne. À notre table, il y a beaucoup de discussions à propos de l’Ukraine et de sa situation. J’ai rencontré le ministre du Commerce de l’Ukraine, qui est venu au Canada l’été dernier, je crois. Je sais qu’ils aimeraient élargir l’accord commercial conclu avec le Canada afin d’y intégrer les services. Cette conversation nous intéresse, et nous l’aurons tôt ou tard.

Comme vous le savez, EDC est un organisme indépendant du gouvernement. Toutes les quelques années, nous examinons son mandat. Le dernier examen de son mandat a eu lieu assez récemment. Après avoir été informés — et c’est le mot juste — de leurs responsabilités, de leur rôle et de leur mandat pendant la prochaine courte période, les dirigeants d’EDC exercent leurs activités de façon indépendante, et il serait inapproprié que le ministre du Commerce international leur donne des instructions au sujet de dossiers particuliers.

Nous apportons continuellement une aide au développement de l’Ukraine. Fait intéressant, je vais mentionner un nom que vous connaissez bien, c’est-à-dire Lloyd Axworthy, qui était responsable du groupe canadien qui s’est assuré du bon déroulement des élections ukrainiennes au cours des dernières années.

Je pense qu’il est possible d’en faire davantage. Cela compte en raison de l’importance géopolitique et stratégique que l’Ukraine revêt dans la région et des liens très étroits que nous entretenons avec sa diaspora, y compris dans ma propre famille. Oui, l’Ukraine est assurément sur notre écran radar.

Les négociations avec le Mercosur se déroulent bien. Bruce Christie est notre négociateur en chef, et il est conseillé par Mme Hembroff. Comme vous le savez, le gouvernement du Brésil a changé. Nous avions très hâte de savoir quelle serait l’attitude du nouveau gouvernement à l’égard du Mercosur. Elle s’avère être très positive. En fait, je pense que les Brésiliens sont légèrement pressés.

Évidemment, il y a des limites à ce que nous pouvons faire pendant le temps qu’il nous reste, mais nous savons à quel point le marché sud-américain est important, en particulier dans ces quatre pays. Nous progressons aussi énergiquement que nous le pouvons.

Madame Hembroff, souhaitez-vous ajouter quelque chose à propos de l’état des négociations avec le Mercosur?

Kendall Hembroff, directrice générale, Politique commerciale et Négociations, Affaires mondiales Canada : Jusqu’à maintenant, nous avons eu cinq cycles de négociation. Les négociations semblent progresser sans heurts. Nous cherchons à négocier un accord global qui abordera évidemment des questions difficiles, des questions que nous devrons régler à un moment ou à un autre avant d’être en mesure de conclure cette initiative. Nous avons assurément distingué certains avantages clés pour des entreprises canadiennes qui exercent leurs activités dans un certain nombre de secteurs liés aux produits industriels et agricoles.

Pour le moment, les négociations portant sur l’accès aux marchés sont encore à un stade assez précoce. Nous avons eu seulement un échange d’offres concernant l’accès aux marchés. Il y a encore beaucoup plus de travail à faire. Un autre cycle aura lieu en juin, à Montevideo.

Le sénateur Boehm : Avant les élections en Argentine, qui pourraient prendre une autre direction?

M. Carr : Désolé, nous devons voter, mais nous avons un peu de temps.

La présidente : Oui, et c’est pourquoi j’ai demandé d’abréger les questions et les réponses. Pourriez-vous examiner les questions, puis y répondre ou assurer le suivi plus tard, si vous devez partir?

M. Carr : Bien sûr.

Le sénateur Wetston : Je vous remercie, monsieur le ministre. J’ai parrainé le projet de loi au Sénat. J’étais fier de le faire et de collaborer avec vos fonctionnaires.

M. Carr : Merci, sénateur.

Le sénateur Wetston : J’ai été à même de comprendre les avantages du projet de loi. Je poserai une question fort simple. Selon mes souvenirs — qui peuvent être erronés —, nous continuons d’afficher un déficit commercial avec Israël. Je pense que c’est exact. Est-ce le cas?

M. Carr : Nous obtiendrons les chiffres.

Le sénateur Wetston : La seule raison pour laquelle j’aborde la question, c’est parce que je pense que c’est le cas. J’appuie fortement le projet de loi, sinon, je ne l’aurais pas parrainé. Quels sont, selon vous, les débouchés économiques les plus intéressants qui s’offrent au Canada en vertu de l’Accord de libre-échange Canada — Israël?

M. Carr : Permettez-moi de vous obtenir les chiffres.

La présidente : Peut-être pouvons-nous avoir les chiffres et...

M. Carr : Nous vous les obtiendrons.

La présidente : Oui, et la sénatrice Cordy m’indique que notre document d’information contient quelques chiffres.

M. Carr : Si nous pouvons en faciliter la mise à jour, nous serions heureux de le faire. Ce sont des renseignements que nous pouvons vous transmettre aussi rapidement que possible.

Le sénateur Wetston : Merci.

Le sénateur Dean : Monsieur le ministre, je vous remercie de tout le travail que vous accomplissez. Je remercie également vos fonctionnaires.

J’ai une question à propos des lettres de mandat, pas tant sur le contenu de la vôtre que sur l’importance des lettres de mandat de façon générale. Nous savons que ces lettres sont importantes du point de vue de la transparence pour que tout le personnel du ministère, et pas seulement le ministre, connaisse les priorités. Elles sont également importantes sur le plan de la reddition de comptes.

M. Carr : Exactement.

Le sénateur Dean : Dans un monde où peu de dossiers relèvent maintenant d’un seul ministère, il faut assurer la transparence quand les dossiers sont gérés par deux ministères ou plus. Considérez-vous que les mécanismes de reddition de comptes de votre lettre de mandat aident à savoir qui fait quoi quand des dossiers relèvent de plusieurs ministères?

La présidente : Ce sont deux questions, et la sénatrice Cordy souhaite également intervenir. Vous pouvez utiliser tout le temps qui vous reste pour répondre aux trois questions.

M. Carr : Je suis entre les mains de ceux qui savent combien de temps il faut pour se rendre à l’édifice de l’Ouest.

La présidente : Je comprends que la logistique est plus complexe maintenant que dans le bon vieux temps.

La sénatrice Cordy : Je vous remercie, monsieur le ministre, de témoigner de nouveau devant le comité. Étant originaire de la Nouvelle-Écosse, je suis enchantée de voir que les produits de la mer sont un de nos plus importants produits d’exportation vers Israël. Je sais que 90 p. 100 de nos exportations sont exemptes de droits. Je me demande si vous pourriez m’indiquer si c’est le cas pour les produits de la mer que nous exportons en Israël.

Comme le sénateur Massicotte et d’autres intervenants l’ont fait remarquer, nous importons trois fois plus de produits que nous n’en exportons. Je me demande si vous pourriez traiter de la question. J’ai également été étonnée quand j’ai vu le genre de choses que nous importons et exportons, comme des diamants. Je me demande comment cela fonctionne.

Pour faire suite à ce que le sénateur Weston a dit sur ce que nous faisons pour promouvoir le commerce — et je sais que notre comité a réalisé une étude sur la diplomatie culturelle, comme vous l’avez peut-être deviné à partir des propos de la sénatrice Bovey —, recourons-nous à la diplomatie culturelle pour accroître les échanges commerciaux et les relations avec certaines de nos ambassades?

M. Carr : D’accord.

La présidente : Vous pouvez utiliser tout le temps dont vous disposez pour répondre.

M. Carr : Merci. Je voudrais disposer de temps illimité. La quantité de produits de la mer qui entrent au pays exempts de droit passera de 90 à 98 p. 100. En 2017, les exportations du Canada se sont chiffrées à 450 millions de dollars, alors que les importations étaient de 1,29 milliard de dollars. Au chapitre des services, les chiffes s’équivalaient en 2016; les exportations ont atteint 381 millions de dollars, alors que les importations ont totalisé 312 millions de dollars. Ce sont les chiffres.

La question sur la lettre de mandat est excellente. Ce n’est pas seulement ou même principalement pour une question de reddition de comptes au sein des ministères qu’il faut connaître la teneur de la lettre de mandat du ministre. Quiconque dispose d’un ordinateur dans le monde peut connaître mon mandat et me demander des comptes de diverses manières. Des gens me citent la lettre de mandat. Quand je voyage de par le monde, une personne se tenant à l’arrière de la salle dira : « Oui, mais votre lettre de mandat indique tel élément. Qu’avez-vous fait à ce sujet? » J’ai une foi immense en la reddition de comptes. Comme je suis issu du secteur privé, j’aime mesurer des choses et savoir ce qui se passera si je ne suis pas à la hauteur.

Nous tenons aussi des réunions de bilan avec le patron. Les lettres de mandat sont d’excellents outils. Vous aurez peut-être remarqué, sénateur, que de nombreux gouvernements provinciaux ont adopté la même approche. Je pense que c’est une très bonne idée.

Pour répondre à une autre de vos questions, ces lettres de mandat font explicitement mention d’autres ministères avec lesquels le ministre doit collaborer pour atteindre l’objectif qu’elles contiennent. Je suis certain que c’est le cas pour la mienne, qui indique que je suis mandaté pour travailler avec les ministres des Affaires étrangères, des Finances et de la Petite Entreprise et de la Promotion des exportations en particulier.

Oui, la reddition de comptes a été améliorée. Les relations entre les ministres ont été renforcées et rendues plus explicites, mais, comme l’affirme le premier ministre, il est toujours possible de faire mieux.

En ce qui concerne la diplomatie culturelle, sénatrice Bovey, je jouerai du hautbois n’importe où pour améliorer le commerce canadien. Je ne veux pas me montrer particulièrement désinvolte à ce sujet, car il est vrai que dans ce domaine, nous tendons à mettre l’accent sur les questions tangibles, comme l’argent, les échanges commerciaux, l’acier et l’aluminium. Nous perdons ainsi parfois de vue l’importance et la valeur de l’industrie culturelle et de la création, pas seulement dans un cadre diplomatique, mais aussi dans nos propres vies et dans les libertés dont nous jouissons au Canada.

Un de mes amis, qui se trouve être président d’université, recourt à la poésie dans chacun de ses discours, pour l’enrichissement de tous.

J’emploie des métaphores musicales dès que l’occasion s’y prête. Parfois, je vais jusqu’à utiliser l’intonation de ma voix pour amplifier un rythme ou une cadence.

Nous ne portons pas suffisamment d’attention à la culture.

La présidente : Merci, monsieur le ministre. Vous aurez de nos échos au sujet de la diplomatie culturelle.

M. Carr : Bien.

La présidente : Cela jettera un pont entre la diplomatie culturelle et les questions tangibles, que je considère comme une seule et même chose. Notre comité donnera amplement de matière à réflexion à vous, à la ministre des Affaires étrangères et, de façon générale, au gouvernement.

J’ai quantité de questions à vous poser, monsieur le ministre. Cela signifie que nous devrons en discuter ultérieurement. Je vous remercie d’avoir comparu. Je souligne que nous faisons le suivi avec Développement économique Canada, car c’est une question importante. Nous savons que l’examen décennal est déjà terminé et que, selon ce qu’on nous a indiqué, vous recevrez peut-être le rapport d’examen de Développement économique Canada en juin. Je pense que vous et le ministre des Finances en recevrez une copie.

La question nous intéresse grandement, car lorsque nous avons préparé notre rapport sur les outils de promotion du commerce, nous avons fait remarquer que ce n’est pas tant la signature d’accords commerciaux qui est importante que la manière dont ces accords sont mis en œuvre et facilités dans le milieu des affaires.

Nous sommes impatients de recevoir votre rapport, comme vous l’êtes de recevoir le nôtre.

Monsieur le ministre, merci d’être venu. Comme vous êtes un peu plus loin de la Chambre, je comprends que vous deviez partir maintenant. Je vous suis reconnaissante d’avoir comparu. Au nom du comité, je vous remercie.

(La séance est levée.)

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