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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 15 - Témoignages


OTTAWA, le vendredi 29 septembre 2016

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 5, afin d'étudier les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Le sénateur Ghislain Maltais (président) occupe le fauteuil.

Le président : Bonjour. Je m'appelle Ghislain Maltais et je suis un sénateur du Québec. Je préside le comité. J'aimerais commencer par demander aux sénateurs de se présenter.

Le sénateur Mercer : Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Tardif : Bonjour, je m'appelle Claudette Tardif, sénatrice de l'Alberta.

[Traduction]

La sénatrice Ataullahjan : Sénatrice Salma Ataullahjan, de Toronto, en Ontario.

Le sénateur Oh : Sénateur Oh, de Toronto.

La sénatrice Unger : Betty Unger, d'Edmonton, en Alberta.

[Français]

La sénatrice Gagné : Bonjour, je m'appelle Raymonde Gagné, sénatrice du Manitoba.

Le sénateur Pratte : Bonjour, je m'appelle André Pratte, sénateur du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Kenneth Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.

Le président : Le comité poursuit son étude sur les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.

Ce matin, nous avons l'immense honneur de recevoir l'honorable Lawrence MacAulay, ministre de l'Agriculture, qui est accompagné de MM. Doug Forsyth et Fred Gorrell.

[Français]

L'honorable Lawrence MacAulay, C.P., député, ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire : Je vous remercie, monsieur le président. Bonjour à tous.

[Traduction]

C'est un grand honneur d'être ici. J'ai eu le plaisir de participer à la période de questions au Sénat en juin. Comme je l'avais remarqué à ce moment-là, c'est l'aspiration de nombre de gens dans notre Chambre de se retrouver dans la vôtre. C'est la Chambre haute, et nous en sommes bien conscients.

Honorables sénateurs, je tiens à saluer le travail assidu du Comité dans le dossier des priorités qui concernent l'accès aux marchés internationaux. Je suis ravi de participer à votre étude. Vous avez travaillé longtemps et durement sur ce qui est certainement un sujet important pour l'industrie agricole canadienne. J'ai hâte de lire votre rapport lorsqu'il sera déposé.

Comme vous le savez, le premier ministre m'a confié le mandat de promouvoir à l'étranger les intérêts du secteur agricole du Canada et m'a demandé de veiller à ce que nos produits se rendent sur le marché.

Mesdames et messieurs, le secteur agricole canadien contribue plus de 100 milliards de dollars au PIB du Canada, génère des exportations se chiffrant à plus de 60 milliards de dollars et représente un emploi sur huit. Les transformateurs d'aliments du Canada emploient plus de Canadiens que toute autre industrie manufacturière au pays.

Ce matin, je me concentrerai sur trois éléments clés qui favorisent la croissance de nos échanges commerciaux dans le domaine de l'agriculture et de l'alimentation : l'importance du commerce pour le secteur; les possibilités d'exportation, plus particulièrement en Asie; et les investissements dans le développement des marchés.

Les agriculteurs et transformateurs alimentaires canadiens dépendent du commerce. Environ la moitié de la valeur de la production agricole du Canada est exportée. Nos agriculteurs dépendent du commerce pour vendre les deux tiers de leur production de porc, 85 p. 100 de leur production de canola, et 90 p. 100 de leur production de légumineuses.

Le Canada est le plus important exportateur de canola, de lin, de légumineuses et de bleuets sauvages au monde et l'un des trois principaux exportateurs de blé et de porc. L'an dernier, le commerce des produits agricoles et alimentaires canadiens a franchi le cap des 60 milliards de dollars, un nouveau record.

Le commerce aide à préserver des emplois, à favoriser la croissance et à offrir des possibilités aux Canadiens et un plus grand choix d'aliments de grande qualité aux consommateurs du monde entier. Le commerce est une priorité pour le gouvernement et une priorité pour notre ministère.

Notre gouvernement continue de travailler d'arrache-pied en vue d'ouvrir de nouveaux marchés pour nos agriculteurs et nos transformateurs d'aliments. La semaine dernière, nous avons eu une excellente nouvelle concernant le commerce lorsque le premier ministre Trudeau a annoncé des ententes avec la Chine pour élargir l'accès au marché afin d'inclure le bœuf non désossé congelé provenant d'animaux âgés de moins de 30 mois; assurer des exportations canadiennes stables et prévisibles de canola vers la Chine sans interruption jusqu'à 2020; et favoriser le commerce du porc, du matériel génétique bovin et de certains aliments transformés du Canada.

Les deux dirigeants ont également convenu d'entamer des discussions préliminaires en vue de conclure un possible accord de libre-échange entre le Canada et la Chine. Ils se sont fixé l'objectif de doubler le volume des échanges entre les deux pays d'ici 2025. Toutes ces initiatives sont d'excellentes nouvelles pour l'agriculture canadienne et le Canada. Elles sont également le fruit des efforts déployés à tous les échelons par le premier ministre, par nos fonctionnaires et par notre industrie. La Chine constitue un marché prioritaire pour le Canada, et ce pays est le deuxième partenaire commercial en importance du Canada dans le domaine de l'agriculture et de l'alimentation.

Tous les ans, la classe moyenne chinoise s'accroît à un rythme équivalant à la population du Canada. Je me suis rendu en Chine en juin à l'occasion de la réunion des ministres de l'Agriculture du G20. Le premier ministre était sur place plus tôt durant le mois. Il a fait la promotion du commerce électronique, un outil puissant qui permettra à l'industrie canadienne de développer des marchés en Chine et de promouvoir la marque Canada.

Les chaînes de supermarchés chinoises veulent effectuer des achats directement auprès des fournisseurs canadiens afin de répondre à la demande grandissante de leurs clients pour des produits sains et nutritifs de qualité supérieure.

Nous continuerons de tisser des liens entre le Canada et la Chine. Je prévois diriger une mission de l'industrie en Chine à la fin du mois prochain. Je crois savoir que votre comité se rendra également en Chine.

Avec votre aide, mesdames et messieurs, nous tâcherons ensemble de resserrer ces liens et d'ouvrir la voie aux exportateurs de produits agricoles et alimentaires.

Nous tendrons également la main à d'autres marchés clés de l'Asie. Avec plus de la moitié de la population mondiale, ces pays sont de vastes économies dont le revenu, l'urbanisation, la consommation et la population vont grandissant. L'an dernier, les exportations canadiennes de produits agroalimentaires en Asie se sont chiffrées à près de 17 milliards de dollars, soit presque le tiers de nos exportations totales.

Forts des résultats obtenus en Chine, nous avons regagné l'accès aux marchés de la Corée du Sud et de Taïwan pour le bœuf canadien. Nous avons ouvert les portes du marché de l'Inde pour le porc et les produits du porc canadiens, ce qui représente un autre marché prioritaire pour notre gouvernement.

À l'extérieur de l'Asie, nous travaillons étroitement avec le Mexique pour faire lever les dernières interdictions frappant les produits de bœuf canadiens, et je prévois être au Mexique dans la prochaine semaine pour mettre la dernière main, je l'espère, à cette entente.

Nous avons réussi à faire abroger la loi américaine sur la mention du pays d'origine sur l'étiquette, garantissant ainsi des règles du jeu équitables pour le commerce du bœuf et du porc canadiens entrant aux États-Unis. En ce qui concerne les nouveaux marchés, nous sommes déterminés à travailler sans relâche afin de ratifier l'Accord économique et commercial global avec l'Union européenne. Nous obtiendrons ainsi de nouveaux débouchés pour nos produits agroalimentaires canadiens de grande qualité.

Nous continuons également de consulter les Canadiens au sujet du Partenariat transpacifique.

Mesdames et messieurs, pour développer de nouveaux marchés, il faut d'abord avoir un produit de calibre mondial. C'est certainement ce que nous avons ici au Canada. Nous avons la meilleure nourriture au monde. Mais nous avons aussi besoin d'investissements et de ressources. C'est là où le gouvernement a un rôle à jouer pour ouvrir la voie à nos exportateurs de produits agroalimentaires. Les investissements permettent à tout un éventail d'industries de conquérir de nouveaux marchés mondiaux, qu'il s'agisse de bleuets ou de matériel génétique bovin.

J'étais à Vancouver, il y a quelques semaines, en compagnie de mon collègue le ministre Letnick de la Colombie- Britannique, pour annoncer le financement d'un catalogue d'exportation qui aidera les clients mondiaux du Canada à découvrir les produits agricoles et alimentaires de la Colombie-Britannique.

En plus des investissements, nous affectons des ressources clés au dossier du commerce. Notre Secrétariat de l'accès aux marchés travaille avec le secteur pour cibler les marchés prioritaires. Nos délégués commerciaux du secteur agricole travaillent d'arrache-pied sur le terrain afin de promouvoir et de développer le commerce canadien des produits agroalimentaires.

Nos investissements dans l'innovation sont également essentiels pour ouvrir des marchés et répondre à la demande mondiale. Il y a quelques semaines, j'étais à Swift Current pour annoncer un investissement fédéral supplémentaire de plus de 35 millions de dollars dans la modernisation de notre centre de recherche à cet endroit. Cet investissement contribuera au programme de sélection du blé et à d'autres recherches sur les fourrages et les céréales, ce qui aidera à maintenir le Canada en tant que principal producteur et exportateur de grains de qualité supérieure.

Honorables sénateurs, au cours des prochains mois, je travaillerai avec mes collègues et avec le secteur à l'élaboration du prochain cadre stratégique pour l'agriculture, qui entrera en vigueur en 2018. En juillet, j'ai rencontré les ministres provinciaux et territoriaux à Calgary, et nous avons établi l'orientation du prochain cadre. Nous avons défini des domaines prioritaires pour le prochain cadre, qui comprennent les marchés et le commerce, la recherche et l'innovation, la gestion des risques, la durabilité environnementale et les changements climatiques, la valeur ajoutée et la confiance du public. Ensemble, nous préparerons un plan qui permettra d'accroître nos exportations de produits agricoles et alimentaires, de créer des emplois pour le secteur — y compris la classe moyenne — et de développer l'économie du Canada.

En terminant, je suis optimiste pour l'avenir des entreprises de l'industrie de l'alimentation. Il y a des débouchés incroyables dans cette industrie. Les exportations canadiennes de produits agroalimentaires battent des records chaque année. Le secteur agroalimentaire canadien demeure en bonne position financière, avec des recettes et une valeur nette atteignant des niveaux records.

La réputation du Canada pour des produits agricoles et agroalimentaires innovateurs, durables et de grande qualité donnera au secteur un avantage concurrentiel sur les marchés mondiaux. Au cours des trente prochaines années, la demande mondiale d'aliments devrait augmenter de 60 p. 100. Quelqu'un répondra à cette demande, et je veux que ce soit l'agriculteur et le transformateur alimentaire du Canada.

En travaillant ensemble, nous pouvons aider à rendre l'agriculture canadienne plus sécuritaire, plus forte et plus novatrice. Merci beaucoup.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Avant de passer à la première série de questions, souhaitons la bienvenue à la sénatrice Yonah Martin, de la Colombie-Britannique.

Le sénateur Mercer : Bienvenue à vous, monsieur le ministre. Nous sommes heureux que vous soyez ici. Je sais que nous avons essayé de vous avoir ici avant, et vous avez été très occupé, ce qui est une bonne nouvelle. Mais vous êtes ici.

Vous avez parlé de nouveaux marchés, et c'est exactement ce dont nous parlons. Comme vous avez répondu à diverses questions ce matin, vous pouvez mentionner toute nouvelle réussite que vous avez connue. Mais je voulais vous demander précisément... Nous avons presque terminé notre étude ici, et nous avons hâte de présenter notre étude de même que les conclusions que nous aurons tirées à la Chambre après notre voyage en Chine. Nous vous cuisinerons au sujet de ces conclusions lorsque nous les aurons présentées. Il est difficile pour nous de faire cela maintenant, puisque nous n'avons pas tiré de conclusions. Toutefois, nous nous préparons — en fait aujourd'hui — à commencer à parler de nos prochaines études.

Je voulais avoir votre opinion sur deux choses. Premièrement, on nous a suggéré d'étudier la propriété étrangère de terres agricoles au Canada. Deuxièmement, il a été suggérer d'examiner la possibilité de suivre l'exemple américain d'avoir une loi agricole qui serait réexaminée périodiquement et qui couvrirait tous les aspects de l'agriculture, de la soupe jusqu'aux canards, pour ainsi dire.

J'aimerais avoir votre opinion à cet égard. Observez-vous un besoin urgent pour ces deux études, sur la propriété étrangère ou sur l'idée d'une loi agricole similaire à celle des États-Unis, qui est revue périodiquement?

M. MacAulay : Merci, monsieur le sénateur. Je crois qu'il est vital, bien sûr, que nous possédions nos terres. Mon opinion est qu'une étude sur ce sujet serait intéressante, ne serait-ce que pour voir exactement quelle est la situation. C'est ce que vous voulez essayer de faire, faire le point sur la situation et voir ce qui peut être fait. Nous ne sommes certainement pas opposés aux investissements étrangers, mais il doit y avoir un équilibre. Ce serait certainement une étude intéressante et précieuse, comme la plupart des études du Sénat. C'est fort utile dans le contexte actuel. J'apprécie le travail que fait le Sénat. Au cours de mes années passées au Parlement, peu importe la situation, lorsqu'on venait au Sénat, on trouvait un groupe de personnes bien informées qui s'intéressaient à ce qui se passait au pays, et j'ai toujours trouvé cela très utile. Je crois que des études comme celle-là seraient très précieuses, selon moi.

Quant à la loi agricole, il serait intéressant de voir ce qui se passerait. Vous auriez à évaluer, bien sûr — et je suppose que vous évalueriez — la teneur de la politique américaine et de l'ensemble de la loi agricole américaine, puis songeriez aux recommandations que vous pourriez présenter à cet égard. Je suppose que c'est ce que vous feriez, et ce serait certainement utile.

Le sénateur Mercer : Voici ma prochaine question : j'ai remarqué que vous avez mentionné dans votre exposé que vous étiez en Colombie-Britannique il y a quelques semaines et avez annoncé du financement pour un catalogue d'exportation pour aider les clients mondiaux du Canada à découvrir les produits agricoles et alimentaires de la Colombie-Britannique. Est-ce quelque chose que vous espérez reproduire dans d'autres provinces, pour que celles-ci puissent profiter de ce type de projet?

M. MacAulay : Merci beaucoup, monsieur le sénateur. Bien sûr, pour tous ces aspects, comme j'ai mentionné, nous en sommes maintenant aux dernières étapes de notre cadre stratégique. À ce chapitre, comme vous le savez très bien, c'est 60 p. 100 fédéral et 40 p. 100 provincial. Ce sont parfois les différentes provinces qui décident comment elles désirent dépenser leur argent.

En Colombie-Britannique, je connais très bien le ministre Letnick, et c'était une priorité pour lui. J'ai vu le catalogue. C'est certainement un document très informatif. Il est en ligne. Mais, encore une fois, la façon de faire cela serait laissée à la discrétion des différentes provinces.

Cela me fait penser au guichet unique. Pendant mes nombreuses années dans ce domaine, j'ai entendu des gouvernements parler de services à guichet unique pour l'information gouvernementale. Je ne sais pas à quel point nous avons réussi cela. Ce catalogue est un pas dans cette direction, du côté des exportations, et c'est un outil précieux.

Le sénateur Ogilvie : Bienvenue, monsieur le ministre. Il est agréable d'avoir un ministre de l'Agriculture provenant d'une autre de nos grandes provinces agricoles. Il est très difficile de circuler dans votre province sans passer près d'activités agricoles.

Monsieur le ministre, il est important pour nous non seulement de cerner de nouveaux marchés et de conclure des accords commerciaux, mais aussi de protéger nos producteurs de l'utilisation abusive des dispositions d'accords commerciaux existants. Je veux vous poser une question sur une affaire en particulier, à savoir le cas des volailles de réforme, catégorie avec laquelle nous éprouvons un problème important à l'égard de l'importation frauduleuse de produits de poulet, laquelle a un impact négatif énorme sur notre propre marché.

Plus précisément, pour bien l'expliquer à notre public, les poules pondeuses qui atteignent la fin de leur vie active sont appelées de la « volaille de réforme », et généralement, lorsque celle-ci entre au pays, elle est soumise à des droits de douane plus bas ou nuls, alors que les produits à valeur ajoutée dans la chaîne alimentaire, comme les poulets à griller, sont visés par des droits et des limites.

Nous avons eu une situation où des millions de kilogrammes de poulets à griller étaient étiquetés comme de la volaille de réforme entraient annuellement au pays, ce qui a fait un tort immense à nos producteurs. On estime à 2 000 la perte annuelle d'emplois canadiens; on estime à 37 millions de kilogrammes la quantité de poulet importé illégalement au cours d'une année récente.

Ma première question est la suivante : qu'est-ce que votre ministère et vous-même faites — de manière très proactive, je l'espère — pour éliminer cette importation frauduleuse de produits, presque exclusivement des États- Unis?

M. MacAulay : Merci beaucoup, monsieur. C'est une question à laquelle j'ai dû répondre de nombreuses fois; je vous remercie de la poser ici, et je comprends votre préoccupation.

Vous avez tout à fait raison, et je sais que vous êtes parfaitement conscient que les chiffres indiquent que nous importons plus de volaille de réforme des États-Unis qu'il n'y a de celle-ci aux États-Unis; alors il y a un problème, c'est certain.

Les chiffres que j'ai — de 2009 jusqu'à 2015 — indiquent que l'importation a augmenté d'environ 55 p. 100, mais nous avons pris des mesures. Je crois que cinq entreprises ont perdu leur certificat d'importation pour une période en raison de problèmes à la frontière.

Il est raisonnable de dire, après avoir rencontré les producteurs de poulet partout au pays... Et je ne sais pas s'ils étaient ici. Ils ont comparu devant le comité du commerce de la Chambre des communes, je crois, il y a environ une semaine, et ils étaient quelque peu satisfaits de la direction prise par l'Agence des services frontaliers du Canada. Il y a eu une réduction importante à la suite des accusations.

Mes fonctionnaires travaillent avec ceux des États-Unis pour créer un programme de certification. Comme vous le savez, lorsque la viande arrive à la frontière, vous ne pouvez pas l'envoyer au laboratoire et attendre la réponse de celui-ci. Les choses doivent bouger. C'est un des gros problèmes.

Ce que nous tentons de faire est de mettre en place un programme de certification pour que nous sachions, lorsque la viande arrive, qu'elle est certifiée par nos homologues des États-Unis. Cela nous aiderait beaucoup.

L'industrie préconiserait un programme de certification de l'ADN. Nous examinons cela, mais l'aspect crucial est le temps que cela prendrait. On doit s'assurer que le produit bouge assez rapidement, vous comprenez, lorsqu'il arrive à la frontière.

Cela dit, nous sommes pleinement conscients du fait que le problème perdure depuis de nombreuses années. Nous avons connu un certain succès, mais nous en avons besoin d'en faire plus, et nous travaillons là-dessus.

Sur le sujet de la gestion de l'offre, j'apprécie vos remarques flatteuses concernant l'Île-du-Prince-Édouard. Chacun est fier d'où il vient, et je suis certainement fier de l'Île-du-Prince-Édouard, où j'ai trait des vaches et cultivé des pommes de terre. C'est un scénario intéressant pour moi. Je voulais que le gouvernement ne se mêle pas de l'industrie de la pomme de terre et s'occupe pleinement du secteur laitier. C'était en quelque sorte ma vision des choses : j'étais partagé.

Mais en venant ici, comme ministre de l'Agriculture, le moins qu'on puisse dire, c'est que je suis un fervent partisan du système de gestion de l'offre, car je comprends sa valeur.

Le sénateur Ogilvie : Nous sommes certainement conscients de l'énorme capacité entrepreneuriale et créative de nos agriculteurs en ce qui concerne les règlements et d'autres possibilités de faire concurrence dans le contexte actuel au pays.

Je veux revenir à un élément dont vous avez parlé. D'abord, je tiens à dire que la certification, c'est très bien. Je suis encouragé de savoir qu'il s'agit d'une initiative conjointe entre les deux pays pour régler ce problème. Les tests d'ADN, toutefois, offrent potentiellement une vérification très rapide du contenu réel.

Je crois savoir que des chercheurs de l'Université Trent, entre autres, ont conçu un test d'ADN permettant de faire la différence entre de la volaille de réforme, du poulet à griller et d'autres types de poulet. En général, un test d'ADN peut être converti en test rapide — dont les résultats correspondraient à un code de couleurs — qui donnerait une indication à l'agent à la frontière. Même si nous avons la certification, nous devrons assurer une surveillance parce que — je l'ai déjà dit — les gens sont très créatifs dans tous les aspects du commerce.

J'ai cru comprendre que le gouvernement travaille avec l'Université Trent à cet égard, et je vous encourage fortement à poursuivre, premièrement, vos efforts touchant la question de la certification de l'autre côté de la frontière, et, deuxièmement, le travail de développement avec nos chercheurs au Canada. Nous avons une expertise de pointe au Canada dans le domaine de l'ADN, et j'espère que vous travailleriez avec eux pour créer un test rapide pouvant être utilisé à la frontière pour protéger cette activité économique extrêmement importante pour le pays.

M. MacAulay : Sénateur, je suis en tous points d'accord avec ce que vous avez dit. Pour tout dire, si j'ai semblé minimiser l'idée du test d'ADN, je n'avais pas l'intention de le faire. Utilisons ce qui est efficace. Nous ne voulons pas de produits qui traversent la frontière illégalement. Il y en avait beaucoup trop qui passait, assurément, nous voulons nous assurer de mettre un système en place qui sera efficace. Je ne sais pas si M. Gorrell aimerait ajouter quelque chose à ce sujet, mais nous travaillons beaucoup dans ce domaine et comprenons qu'il s'agit d'un gros problème.

Fred Gorrell, sous-ministre adjoint, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Mesdames et messieurs, oui, le ministre a raison de dire que nous travaillons avec l'Université Trent, comme vous l'avez dit. Nous envisageons une série de mesures — pas juste une — pour nous assurer que le produit qui arrive au pays est vérifié par nos collègues de l'ASFC et qu'il y a un programme de vérification au département de l'Agriculture des États-Unis, de même qu'un test d'ADN pour veiller à ce que tout le monde comprenne très bien le programme et l'importance d'en assurer l'intégrité.

La sénatrice Tardif : Bienvenue, monsieur le ministre. Vous dites que vous êtes très inquiet à propos des produits qui franchissent la frontière illégalement. J'aimerais vous parler du lait diafiltré. Nous sommes au courant de l'importation croissante de lait diafiltré américain, qui réussit à échapper aux droits écrasants que nous imposons normalement aux produits laitiers qui viennent de l'étranger. De fait, les producteurs canadiens disent qu'ils ont perdu — je crois — jusqu'à 231 millions de dollars en raison de produits laitiers moins chers qui entrent au pays pour les transformateurs d'aliments qui produisent du fromage, par exemple.

Monsieur le ministre, quelle mesure votre ministère et vous-même allez-vous prendre pour vous assurer qu'on surveille et qu'on stoppe les importations de lait diafiltré?

M. MacAulay : Merci beaucoup, madame, j'apprécie votre question. Comme je l'ai dit auparavant, étant un producteur laitier, je ne suis certainement pas très heureux de voir cette situation. Comme vous le savez très bien, j'ai hérité de cette situation, et elle s'est détériorée au fil des ans. J'ai indiqué plus tôt cette année que nous allions nous pencher sur la question, et c'est ce qu'a fait également le ministre du Commerce. Nous avons tenu des consultations avec les industries de la production laitière et de la transformation d'ici, et certes, c'est un problème. Dans l'ensemble du système de gestion de l'offre, ce que nous devons faire est de nous assurer que, peu importe ce que nous faisons, ce soit à long terme et durable, et c'est exactement ce que nous ferons avec ces industries. Avec l'industrie laitière, il est raisonnable de dire que d'autres facteurs ont joué. Le prix plus élevé de la poudre de lait écrémé a aidé à faire baisser les prix pour les producteurs laitiers.

Mais nous devons nous assurer que ce que nous mettrons en place sera viable c'est à long terme. Lorsque nous avons rencontré des agriculteurs de partout au pays et de jeunes producteurs laitiers au Québec, ils m'ont certainement fait savoir qu'ils ne voulaient pas une solution rapide et irréfléchie. Ils veulent une solution à long terme qui leur permettra d'être en mesure de traire leurs vaches encore longtemps, parce qu'ils veulent des investissements dans l'industrie, et je crois — si vous examinez ma lettre de mandat et notre programme électoral — que nous avons montré que nous étions très forts dans le domaine de l'innovation dans le secteur agricole. Nous voulons veiller à ce que cette innovation se produise.

Toutefois, nous ne pouvons pas empêcher tout le lait diafiltré d'entrer au pays — puisqu'une partie de celui-ci est importée légalement —, mais ce qui entre illégalement est un gros problème. Je peux vous assurer que nous nous en occupons, mais ce n'est pas quelque chose qu'on peut résoudre rapidement.

La sénatrice Tardif : J'ai deux questions : vous avez dit que ce n'est pas rapide, mais avez-vous établi un échéancier? Et quel travail faites-vous avec vos homologues américains? Je crois savoir que certains sénateurs américains sont très inquiets relativement à la façon de réagir aux changements récents dans l'industrie laitière canadienne.

M. MacAulay : Il y a toujours des préoccupations et toujours quelqu'un qui veut profiter de ce qui se passe. C'est pourquoi nous devons nous assurer que tout ce que nous faisons est durable, et vous comprenez exactement, lorsque vous avez affaire à la communauté internationale, que cela doit être fait correctement. C'est ce que nous tentons de faire.

Comme je l'ai dit plus tôt, c'est ce qu'on m'a demandé de faire. Il y a des agriculteurs qui aimeraient seulement obtenir une rentrée d'argent, mais pour la plupart dans l'industrie laitière, je dirais qu'ils veulent voir à ce que nous mettions en place une solution durable à long terme qui résistera au passage du temps et à tout ce qui peut se produire.

Comme vous le savez, dans notre secteur soumis à la gestion de l'offre, je suis ici depuis de nombreuses années. Chaque fois qu'on va quelque part, quelqu'un semble vouloir s'en prendre à notre système de gestion de l'offre. Nous devons voir à sa protection. Je peux vous assurer que j'ai la ferme intention d'assurer la pérennité de notre industrie laitière. J'ai travaillé dans le système de gestion de l'offre presque toute ma vie, et, en tant que producteur laitier, je peux vous assurer qu'il s'agit d'une grande priorité pour moi et mon gouvernement. Et c'est ce que nous ferons.

La sénatrice Tardif : Merci, monsieur le ministre.

M. MacAulay : Merci d'avoir posé la question.

Le sénateur Pratte : J'ai d'autres questions relativement aux questions de ma collègue, la sénatrice Tardif, et elles concernent également beaucoup de producteurs du Québec.

[Français]

Je n'ai pas consulté autant de producteurs que vous l'avez fait, mais je sais que cela engendre énormément d'inquiétudes et de frustrations dans plusieurs provinces, notamment au Québec et aussi chez les producteurs laitiers. Depuis le printemps dernier, ils ont l'impression d'obtenir toujours la même réponse, soit que vous envisagez une solution à long terme. Mais ils ont du mal à comprendre quel est le problème exactement, c'est-à-dire qu'est-ce qui fait obstacle à trouver une solution à ce problème. Ils obtiennent toujours la même réponse, comme celle que vous nous donnez aujourd'hui. Vous êtes à la recherche d'une solution à long terme, mais nous avons du mal à comprendre ce qui pose problème et ce qui vous empêche de trouver une solution. Pouvez-vous nous donner davantage d'explications à ce sujet?

[Traduction]

M. MacAulay : Merci beaucoup pour votre question, monsieur le sénateur, et comme je l'ai dit auparavant, je suis arrivé ici il y a quelques mois. J'ai hérité de cette situation, et tous ces problèmes — comme le lait diafiltré, entre autres — dans ce secteur assujetti à la gestion de l'offre. Ce que j'ai dit, lorsque j'ai été nommé ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et interrogé sur ce problème, c'est que nous allions travailler avec l'industrie et les agriculteurs pour nous assurer de trouver ensemble une solution viable à long terme. J'ai été des deux côtés de la table relativement à ces enjeux. J'ai été agriculteur, et je me trouve maintenant à être le ministre de l'Agriculture.

Vous avez aussi parlé à des agriculteurs, mais ce que j'entends d'eux, c'est qu'ils veulent une solution : une solution qui durera, une solution qui est viable. J'ai rencontré de jeunes producteurs laitiers de votre province. Ils veulent s'assurer que nous n'allons pas proposer une solution irréfléchie. Ce problème entre les États-Unis et le Canada dure depuis un certain nombre d'années. Nous devons nous assurer de le régler d'une manière très appropriée, avec toute l'information dont nous disposons, et je suis désolé si vous n'êtes pas satisfait de ma réponse. Mais c'est exactement la réponse que j'ai : nous devons nous assurer, au terme de ce travail, d'avoir au pays un système de gestion de l'offre des produits laitiers viable à long terme, et je peux vous dire que j'ai l'intention de veiller à ce que cela se concrétise.

Le sénateur Pratte : Maintenant, monsieur, l'été dernier, un accord dont nous savons peu de choses a été conclu, mais il y a eu un accord entre les transformateurs et les producteurs canadiens qui semble avoir eu un impact sur les importations de lait diafiltré et suscité le mécontentement des producteurs aux États-Unis. Je me demande si cela semble avoir résolu une partie du problème, à vos yeux. Est-ce que la réaction des producteurs américains vous inquiète? Est-ce que, par exemple, nous prêtons le flanc à la prise de mesures par les producteurs américains relativement à nos obligations commerciales?

M. MacAulay : Merci beaucoup, monsieur le sénateur. Comme je l'ai dit, je me suis intéressé à cette question dès mon arrivée. Je n'étais ici que depuis quelques mois lorsque j'ai assisté aux réunions du GATT, et j'ai certainement compris ce que c'est d'être un délégué commercial. Ce n'est pas une tâche facile. Sur la catégorie de lait dont vous parlez, l'accord est intervenu, comme vous le savez très bien, entre les transformateurs et les agriculteurs. Très honnêtement, c'est une décision d'affaires qui a été prise par ces deux groupes ici au pays, et elle aurait sans doute quelque chose à voir avec la situation actuelle au pays. À savoir si cette décision va aider à résoudre le problème, je crois qu'elle le peut très bien, mais c'est une des choses qui peuvent se produire. Est-ce la solution? Non. Il y a d'autres choses qui doivent se produire, mais c'est pourquoi nous devons nous assurer que tout ce qui peut se produire pour en arriver à une solution à long terme durable avec les transformateurs et les agriculteurs se produise. C'est une chose qui s'est produite.

Vous avez parlé d'autres pays qui étaient préoccupés, qui écrivent des lettres ou qui font des menaces, mais je n'ai jamais accordé trop d'importance aux menaces dans ma vie. Je ne suis qu'une partie du gouvernement, mais je fais partie d'un gouvernement. Je ne crains aucunement les lettres ni quoi que ce soit d'autre. Je crois qu'il est merveilleux que les transformateurs et les producteurs laitiers se parlent et tentent de résoudre une partie du problème.

Nous participons tous à l'effort, et je les remercie de leur travail acharné. Ce n'est pas facile, mais est-ce que d'autres pays observent ce que nous faisons? Bien sûr qu'ils le font. Suis-je inquiet? Non. Tout au début de la séance, on m'a demandé ce qui pourrait se produire. J'ai répondu qu'il s'agissait d'une question hypothétique parce que nous allons résoudre les problèmes. Comme vous le savez très bien, nous faisons face à de nombreux problèmes dans l'immédiat. Alors ce qui peut ou ne peut pas se produire me préoccupe très peu, je peux vous en assurer, mais je comprends ce que vous dites. Toutes les parties touchées apportent leur aide. Toute participation à la discussion est utile.

La sénatrice Unger : Merci, monsieur le ministre, d'être ici aujourd'hui. Ma question porte sur une approche différente, mais en tant que ministre, vous auriez voix au chapitre.

En tant que sénatrice de l'Alberta, je suis très préoccupée par les répercussions des taxes sur le carbone sur le secteur agricole. La société Western Feedlots a récemment annoncé son intention de ralentir ses activités en Alberta en raison, en partie, de l'imposition de taxes sur le carbone. Cela m'interpelle énormément.

La Fédération canadienne de l'agriculture fait valoir depuis longtemps qu'une taxe sur le carbone nuira sérieusement aux agriculteurs. Je cite son site web :

Une taxe sur le carbone augmentera substantiellement les coûts d'exploitation des agriculteurs. En tant que preneurs de prix, les agriculteurs ne peuvent pas transmettre le coût supplémentaire d'une taxe sur le carbone aux consommateurs ou au marché international. [...] Une taxe sur le carbone créera un désavantage concurrentiel pour les agriculteurs canadiens.

Partagez-vous ces préoccupations? Quelles étapes devraient être suivies pour atténuer l'impact d'une taxe sur le carbone sur l'agriculture, particulièrement compte tenu de l'état chancelant de l'économie de l'Alberta?

M. MacAulay : Je comprends ce que vous dites. Je veux m'assurer que nous ne faisons rien qui nuirait à l'agriculture. Je suis ici pour représenter l'agriculture et faire valoir ces enjeux auprès du Cabinet, et c'est ce que j'ai l'intention de faire.

Je sais qu'une taxe sur le carbone a été mentionnée par certaines personnes comme étant un des problèmes, mais nous n'avons qu'une seule planète et devons nous assurer de prendre les mesures pour lutter contre les changements climatiques. C'est un enjeu dont s'occupent le gouvernement du Canada et les provinces. Il y aura sans aucun doute beaucoup de discussions sur la façon de gérer ces enjeux, mais au bout du compte, si nous voulons vivre ici, nous devons nous assurer d'avoir un endroit où vivre.

Je déploierai tous les efforts possibles pour protéger et aider les agriculteurs.

La sénatrice Unger : Je sais qu'ils sont inquiets, et je le suis aussi. Il semble que notre économie ait ralenti. Vous êtes au courant des taux importants de chômage que nous affichons, et l'imposition d'une succession de taxes a vraiment un effet dévastateur. Je vous remercie pour votre commentaire.

Il semble que la ratification de l'AECG liant le Canada et l'Union européenne est imminente. Toutefois, selon l'Association canadienne des éleveurs de bétail, l'élimination des tarifs qu'entraînerait l'éventuelle ratification de cet accord commercial ne créerait pas un cadre favorisant l'exportation de bœuf canadien, en raison des mesures sanitaires imposées par l'UE relativement au traitement des carcasses de bœuf dans les installations de transformation du bœuf. La question de ces mesures doit toujours être résolue pour que le secteur du bœuf puisse profiter pleinement de l'accès aux marchés de l'UE.

Que fera le gouvernement fédéral pour harmoniser les mesures sanitaires du Canada et de l'UE?

M. MacAulay : Je connais très bien le commissaire Hogan de l'UE, et nous avons discuté de ce problème un certain nombre de fois, mais est-il entièrement réglé actuellement? Non, il ne l'est pas.

Bien sûr, il y aura toujours un certain nombre de problèmes, mais je vais laisser mon collaborateur vous parler plus en détail des mesures qui sont mises en place. C'est vraiment une préoccupation.

M. Gorrell : Nous comprenons bien votre point, et le ministre et les fonctionnaires ont rencontré — pas plus tard que cette semaine — des gens de l'industrie du bœuf. Ceux-ci ont dit clairement qu'ils ont besoin d'un commerce viable.

Monsieur le sénateur, vous avez parlé du lavage des carcasses. C'est la façon dont les animaux sont lavés et désinfectés au Canada. Il y a deux types de traitements qui doivent être approuvés par l'UE pour permettre ce commerce. Nous avons un groupe de travail interministériel qui travaille avec l'UE et l'industrie pour veiller à ce que ces traitements soient approuvés dans l'UE. Nous avons déjà deux traitements approuvés. Il s'agit d'un processus graduel, mais il est entendu que ces traitements supplémentaires doivent être approuvés pour que l'accord soit fructueux pour l'industrie du bœuf. Le gouvernement et l'industrie travaillent très dur et diligemment ensemble pour faire en sorte que l'UE comprenne cela et que nous obtenions ces approbations dès que possible.

La sénatrice Gagné : Bonjour et bienvenue. Merci d'être ici ce matin.

En juin dernier, les membres du comité ont entendu des témoignages sur les défis liés au transport du grain vers les marchés d'exportation; comme je viens des Prairies, je sais que les producteurs de grain ont du mal à acheminer le grain vers les ports pour qu'il soit transporté.

Je sais que nombre d'intervenants demandent qu'on apporte des changements à la Loi sur les transports au Canada, et je me demande si vous pourrez formuler des commentaires sur les mesures que le gouvernement fédéral a l'intention de prendre pour surmonter ces obstacles au transport du grain des Prairies vers les ports pour que nous puissions accéder aux marchés.

M. MacAulay : Merci, madame la sénatrice, de votre excellente question. Je crois que nous avons appris une leçon — il y a deux ou trois ans — lorsque le grain s'accumulait dans les Prairies et n'était pas acheminé vers le marché. Je ne suis pas ministre des Transports, mais je contribue certainement à cet égard.

La sénatrice Gagné : Oui.

M. MacAulay : Les transporteurs ferroviaires ont affirmé qu'ils sont prêts. Un certain nombre de choses se sont produites. Le ministre des Transports réagira au rapport Emerson, et c'est à lui qu'il revient de faire cela.

J'ai affirmé clairement que la chaîne de manœuvre interréseaux est précieuse. Il paraît qu'on n'utilise pas beaucoup la manœuvre interréseaux, mais la menace de ce qu'elle peut faire pourrait être un bon atout pour s'assurer du déplacement du produit. C'est une des choses que nous avons entendues un certain nombre de fois, et il y a aussi les sanctions réciproques. C'est une autre chose qui est mentionnée. Je ne dis pas que cela fera partie de la réaction, mais c'est ce que j'ai entendu très clairement. Ils exerçaient de fortes pressions à cet égard, et je peux également comprendre cela.

J'ai visité le port de Vancouver et fait le tour de ses installations. J'ai visité le site du G3 Terminal Vancouver et constaté les investissements qu'ils y effectuent. C'est vraiment extraordinaire pour quiconque n'a jamais été sur place d'observer ce qui s'y passe et de penser aux milliards de dollars de marchandises qui passent par cet endroit.

Une de mes responsabilités est de m'assurer que les agriculteurs obtiennent une excellente récolte. Quant au gouvernement, sa responsabilité est de s'assurer que la récolte se rend jusqu'au point d'exportation. Est-ce une préoccupation pour moi? Certainement. Je crois que nous réglons le problème aussi rapidement que nous le pouvons. Mais, encore une fois, il serait inapproprié pour moi de répondre aux questions sur ce que nous allons faire, car il revient au ministre des Transports de régler ce problème, et il le fera. Mais je veux que vous compreniez parfaitement ce que j'entends.

Nous avons eu d'excellentes discussions partout au pays. Dans les Prairies, nous avons rencontré les ministres provinciaux, et ceux-ci ont assisté à des tables rondes avec moi. Il s'agissait assurément d'une expérience d'apprentissage, mais j'espère également que cela nous aidera à nous assurer de mettre en place un mécanisme adéquat. Comme je l'ai toujours dit, nous devons nous assurer que le système et les mesures mis en place ne le sont pas seulement pour cette année ou l'an prochain.

Les grains que nous produisons maintenant et ce que nous produirons dans un certain nombre d'années seront entièrement différents, car un autre volet de mon mandat est la recherche, et les finances et la recherche sont très importantes pour moi. Un exemple est le canola. Nous l'avons conçu ici. Il y a des milliards de dollars qui entrent au pays en raison de cela. Mais nous développons aussi des graines et des semences qui utilisent moins d'eau pour produire de meilleures récoltes, ce qui signifie que c'est un problème plus important pour les chemins de fer que pour le gouvernement. Mais nous devons nous assurer de comprendre que ces choses se produisent, et nous devons avoir en place le système de transport voulu pour s'occuper de cela. Les agriculteurs peuvent certainement le faire. Nous avons du travail à faire, et j'ose espérer que nous le ferons. Nous connaissons le problème, ce qui est un excellent point de départ pour régler tout problème, et nous allons le régler.

[Français]

Le président : Je vais demander aux sénateurs de raccourcir un peu leurs questions, et à monsieur le ministre de donner des réponses un peu plus courtes également, afin de permettre à tous les sénateurs de poser des questions.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Bienvenue au comité, monsieur le ministre. Certes, je suis heureux d'entendre que vous allez en Chine dans le but de vendre des produits agricoles pour une deuxième fois cette année. J'ai deux questions pour vous. Tout d'abord, j'ai été approché par l'association chinoise de la culture du riz au sujet de possibles investissements au Canada qui permettraient la création de rizières ici au pays à des fins d'exportation sur le marché asiatique. Vous savez que nos conditions climatiques sont très semblables à celles qui favorisent la culture du riz en Chine. Le riz est toujours un produit d'exportation très important. Je crois qu'il pourrait arriver au second rang, juste après le canola, pour ce qui est des exportations vers la Chine et le marché asiatique.

Disposons-nous d'une politique particulière pour accueillir favorablement ce type d'investissement dans des coentreprises de façon à transférer ce genre de technologie à nos agriculteurs?

M. MacAulay : Merci, monsieur le sénateur Oh. Je suis heureux d'avoir de vos nouvelles. Vous m'avez beaucoup aidé.

Le sénateur Oh : Merci.

M. MacAulay : Et j'en suis reconnaissant. Vous m'avez beaucoup aidé au sujet de la question de la Chine, et cela est grandement apprécié.

Sans aucun doute, si quelqu'un est intéressé — et particulièrement la Chine — et que nous pouvons produire du riz, nous sommes partants. Je crois que vous et moi nous connaissons assez bien pour nous asseoir ensemble et voir en détail ce dont vous parlez. Vous connaissant, je soupçonne que vous aurez quelques autres questions à soulever, et c'est une bonne chose. C'est ce que nous voulons. Il ne fait aucun doute que si nous pouvons en arriver à quelque chose qui profitera autant au pays que le canola, nous sommes tout ouïe et voulons le faire. Je pense qu'il est juste de dire que nous avons une meilleure relation avec la Chine, et c'est un marché énorme. Le marché asiatique est immense. Nous voulons avoir une part de ce marché, et, s'il s'agit d'une des questions sur lesquelles nous pouvons nous pencher, c'est exactement ce que nous allons faire. Je ne veux pas que cela prenne trop de temps, mais nous devons certainement entendre parler de cette question. Nous voulons que vous nous fournissiez les détails. Nous ferons tout ce qui est possible pour contribuer au projet. Merci.

Le sénateur Oh : Monsieur le ministre, j'ai une autre question.

M. MacAulay : Oui, monsieur le sénateur.

Le sénateur Oh : Plus tôt cette année, un protocole d'entente a été signé entre Canada Équestre et l'association chinoise de chevaux à Beijing concernant l'exportation de chevaux canadiens en Chine. Nos chevaux sont exportés aux États-Unis depuis de nombreuses années. Les États-Unis les exportent en Chine, puis ils deviennent des chevaux américains. La valeur marchande est transférée aux États-Unis dans le cadre de leurs exportations. Puisque vous allez en Chine à la fin du mois prochain, vous devriez demander comment nous pourrions exporter nos chevaux directement en Chine. Ce serait une bonne question à poser.

M. MacAulay : Merci, monsieur le sénateur Oh. Je ne veux pas que nos chevaux canadiens deviennent des chevaux américains avant de devenir des chevaux chinois. Je peux vous l'assurer. Vous l'avez dit lorsque je suis entré dans la pièce. Je dois dire que j'entretiens une très bonne relation avec le sénateur Oh, et il sait très bien que nous allons nous asseoir et discuter de ces questions. S'il y a quoi que ce soit que nous puissions faire pour faciliter les choses, je suis tout ouïe, parce que nous voulons aborder la question. Plus particulièrement, nous ne voulons pas que nos chevaux canadiens deviennent américains avant d'arriver en Chine.

La sénatrice Ataullahjan : Je ne siège pas régulièrement au comité, mais je voulais attirer votre attention sur un point. Quand on voyage au Moyen-Orient, on peut constater qu'il y a un immense marché pour la nourriture halal, que l'Australie et la Nouvelle-Zélande ont complètement accaparé. Je pense que le Canada a beaucoup de potentiel sur ce marché, donc je demandais s'il y avait une possibilité que vous vous penchiez sur la question.

M. MacAulay : Merci beaucoup. J'apprécie certes votre question et je comprends ce que vous dites. Je l'ai vu. Bien sûr, ils sont un peu plus près que nous, et c'est donc plus facile pour l'Australie et certaines autres régions. Mais nous voulons assurément une partie de ce marché. C'est pourquoi je pense qu'il est très important que nous nous introduisions non seulement en Chine, mais aussi au Vietnam et dans d'autres régions du monde. Je pense que la population du Vietnam est de 70 millions de personnes, et de plus en plus de gens font partie de la classe moyenne. Est- ce que cela m'intéresse? Absolument. Ce que vous dites est entièrement vrai. Nous avons la main-d'œuvre. Nous avons les agriculteurs qui peuvent fournir le produit. Je sais que d'autres pays, y compris les États-Unis, commencent à pénétrer le marché dans ces régions, et je veux m'assurer que nous perçons le marché dans ces régions aussi rapidement que possible. En toute honnêteté, nous avons réussi à accéder à un certain nombre de pays, comme la Corée du Nord et Taïwan. Dans quelques jours, je vais au Mexique dans l'espoir de conclure l'entente au sujet du bœuf.

Écoutez, c'est bien de se vanter et de dire que nous faisons ces choses, mais il n'y a aucune limite à ce que vous pouvez faire ni aucune limite à ce que je veux faire. Avec l'aide de tous les sénateurs et députés, en coopérant avec l'industrie, nous pouvons réaliser de grandes choses. Votre question est juste. Cette question mérite d'être abordée, et nous essayons de le faire.

Le sénateur Enverga : Merci, monsieur le ministre, d'être ici aujourd'hui. Je sais que les États-Unis sont un important partenaire commercial pour nous. Il n'y a aucun doute. Mais, apparemment, dans les bulletins d'information, les candidats présidentiels nous ont dit des choses plutôt défavorables au sujet de l'ALENA, au sujet du commerce.

Croyez-vous que notre industrie agricole en souffrira? Avez-vous des plans d'urgence, juste au cas où quelque chose se produirait?

M. MacAulay : Bien sûr. Merci beaucoup, monsieur le sénateur. Je dois admettre que ce dont vous parlez a captivé le monde et suscité son intérêt. Je n'ai pas l'intention de formuler de commentaires à ce sujet ni à propos de ce qui se produira, mais nous devrons faire affaire avec quiconque gagnera l'élection. Une fois l'élection terminée, nous nous attaquerons aux questions soulevées. Parfois, certaines choses se disent avant les élections. Cela ne reflète pas nécessairement la réalité une fois les élections terminées. Je comprends pleinement votre préoccupation, nous en entendons parler aussi, c'est certain, tout comme vous. Mais, en toute honnêteté, nous avons assez de questions à régler sans nous pencher sur ce qui viendra peut-être plus tard. La situation pourrait être quelque peu différente une fois l'élection terminée. Je ne sais pas. Mais, encore une fois, c'est très important. Nous savons parfaitement que les États- Unis sont notre plus important partenaire commercial et que nous devons absolument — et souhaitons — faire affaire avec eux, et ce, peu importe qui remporte les élections.

Le sénateur Enverga : Êtes-vous prêt à le faire, monsieur le ministre?

M. MacAulay : Je dirais : « Prêt à quoi? » Encore une fois, je veux simplement être prudent; je ne veux pas réagir par rapport à une perception et à ce que quelqu'un pourrait faire. C'est comme les lettres écrites par les pays; ce n'est pas réellement un problème juridique. Laissons de côté ce qui s'est produit durant la campagne et voyons ce qui se passera après. Attendons de voir qui gagnera l'élection. Je pense que nous avons toujours eu des relations très convenables avec les États-Unis d'Amérique. Nous devons entretenir une bonne relation avec les États-Unis, et je suis convaincu que nous y arriverons.

La sénatrice Martin : Bonjour, monsieur le ministre. Veuillez m'excuser de mon retard. Moi non plus je ne siège pas de façon régulière au comité, mais je sais que lors de sa comparution devant le comité durant l'étude, M. Glen Lucas, directeur général de la B.C. Fruit Growers Association, a déclaré que les cultivateurs doivent composer avec la perception que se font les consommateurs des fruits et légumes génétiquement modifiés, parce que les renseignements qui leur sont communiqués à ce sujet ne sont pas adéquats. J'ai une question à poser par souci d'éducation des consommateurs canadiens et du public. Je veux simplement informer les gens et m'assurer que le public connaît les faits et ne s'arrête pas à certaines perceptions ou perceptions erronées des renseignements véhiculés dans les systèmes d'éducation, qui sont régis par les provinces.

Il y a un programme d'étude, et certains enseignants ont recours à des films ou à des ressources qui ne donnent qu'un seul point de vue. Cela peut arriver. J'ai déjà vu cela. Seulement, je m'interroge au sujet de l'approche adoptée par votre gouvernement pour éduquer et soutenir notre industrie agroalimentaire, nos entreprises et nos concitoyens de manière à ce que les Canadiens soient bien informés. Je cherche aussi à savoir de quelle manière vous surmontez ces difficultés.

M. MacAulay : Merci beaucoup. Comme vous le savez, c'est un problème. Tout aliment consommé au pays est propre à la consommation. Nous devons nous assurer que les gens comprennent que tout cela est fondé sur des données scientifiques. Ce n'est pas une question d'opinion. Dans notre pays, l'ensemble de notre réglementation est fondé sur des données scientifiques.

En ce qui a trait à votre question au sujet de notre façon d'éduquer la société, les gouvernements font d'importantes annonces, et si vous posez la question à 10 personnes, il y en aura peut-être 3 ou 4 qui sauront de quoi il s'agit. Il est toujours difficile de s'assurer que les gens comprennent pleinement, qu'ils comprennent tout simplement quels sont ces enjeux.

Je pense qu'un certain nombre d'aspects sont très utiles et peuvent aider énormément. Le programme des 4-H — un programme très important — entre en vigueur dans les régions urbaines du pays. C'est d'une importance capitale. Agriculture en classe est un programme que nous soutenons. Je pense que c'est un facteur qui peut être très utile à ces endroits.

Encore une fois, nous devons faire face à la réalité, et nous devons nous assurer, du mieux que nous pouvons, que les gens comprennent de quelle manière les règlements sanitaires sont régis dans le pays et savent qu'ils sont fondés sur des données scientifiques. Je crois que ces deux aspects, et d'autres, ont leur importance. Les médias peuvent beaucoup nous aider. Mais nous devons nous assurer que les gens comprennent que, si un aliment est certifié comme étant propre à la consommation au pays, c'est qu'il respecte une réglementation fondée sur des données scientifiques. Nous avons bon espoir de recevoir de l'aide de la part de ces secteurs en particulier et, espérons-le, d'autres secteurs, ce qui nous permettrait de nous assurer que la société comprend que certaines choses dites ne sont que des paroles qui ne s'appuient sur aucune donnée scientifique. C'est très important.

Je pense que c'est très important pour notre pays, qui essaie de dire au monde entier qu'il faut utiliser une réglementation fondée sur des données scientifiques, et, parfois, dans notre propre pays les gens disent : « Ce n'est pas sécuritaire », mais on ne sait pas pourquoi. Si un aliment porte une certification disant qu'il peut être utilisé et consommé au pays, c'est qu'il est sécuritaire. Mais voilà certains des programmes que nous utilisons. Nous pourrions sans doute trouver d'autres manières d'y arriver, mais il y a une limite à la publicité. Parfois, la publicité a un effet limité.

Nous devons dire que si l'aliment est certifié comme étant propre à la consommation, c'est qu'il est sécuritaire. Ce sont les recherches qui déterminent s'il est propre à la consommation ou non.

La sénatrice Martin : En outre, une perception croissante commence à se faire jour. Je me demandais simplement si vous aviez entendu les agriculteurs parler de leurs préoccupations, de leur crainte de ne pas être capable d'exporter leurs produits. Mais je comprends.

M. MacAulay : Oui. Vous parlez du marché de l'exportation?

La sénatrice Martin : Je parle de la perception croissante... par conséquent, les agriculteurs au Canada se demandent ce qu'ils produisent en réalité et craignent de ne pas pouvoir exporter leurs produits. S'il y a une crainte à l'égard des produits génétiquement modifiés...

M. MacAulay : Il y a une crainte à l'égard des aliments génétiquement modifiés. Mais, si vous avez déjeuné ce matin, vous en avez probablement mangé un peu.

La sénatrice Martin : Personnellement, cela ne m'effraie pas, mais je me questionnais au sujet des agriculteurs.

M. MacAulay : Je sais que cela ne vous inquiète pas, mais je comprends exactement ce que vous dites. Je ne suis toujours pas certain s'il est question de l'exportation ou du pays. Il y a des problèmes à ces deux égards. Il y a des problèmes au pays parce que des renseignements qui ne sont pas exacts scientifiquement circulent toujours. C'est parfois difficile de lutter contre cela. Ce que nous essayons de faire, c'est de nous assurer que les jeunes comprennent, et que les programmes financés par le gouvernement du Canada transmettent ces renseignements aux jeunes, pour faire en sorte qu'ils comprennent pleinement que nous procédons de façon appropriée.

Sur la scène mondiale, c'est une bataille.

Le sénateur Mercer : Merci, monsieur le ministre. Je tiens à vous remercier. J'ai un commentaire et une question.

Je vais commencer par mon commentaire. Vous nous avez dit, en réponse à une question au sujet de la volaille de réforme posée par mon collègue le sénateur Ogilvie, que cinq entreprises avaient perdu leur certification en raison d'événements survenus à la frontière. Vous devez le faire savoir. Comme nous en avons discuté avec certains témoins qui ont comparu devant le comité alors que nous parlions de la volaille de réforme, nous devons nous faire entendre davantage afin que les gens de l'industrie comprennent que certains ont perdu leur capacité d'importer à cause de la question de la volaille de réforme. C'est une remarque. Je vous encourage à le faire.

Toutefois, ma question concerne la déclaration que vous avez faite lors de votre exposé. Vous avez dit que, il y a quelques semaines, vous étiez à Swift Current pour annoncer un investissement fédéral supplémentaire de plus de 35 millions de dollars visant la modernisation de notre centre de recherche là-bas. C'est une excellente nouvelle, monsieur le ministre, mais je veux savoir si cela vaut uniquement pour le centre de Swift Current, parce qu'il y a des centres de recherche à l'échelle du pays. Je ne les ai pas tous visités, mais j'en ai visité un bon nombre, et je siège au comité depuis plus de 10 ans maintenant. J'ai visité nombre de ces centres qui ont besoin d'un apport financier pour moderniser les installations, mais également pour attirer plus de chercheurs.

Je me rappelle avoir visité une installation en Colombie-Britannique, où de nombreux bureaux étaient vides parce que l'installation n'avait pas les fonds nécessaires pour soutenir la recherche.

Le sénateur Ogilvie et moi-même représentons la Nouvelle-Écosse, où il y a un centre de renommée mondiale à Kentville. Bien sûr, comme vous êtes originaire de l'Île-du-Prince-Édouard, vous seriez intéressé par l'excellent travail de recherche accompli sur les pommes de terre à Fredericton.

Investissez-vous plus d'argent dans les autres centres de recherche, outre celui de Swift Current?

M. MacAulay : Merci beaucoup, monsieur le sénateur.

Depuis le jour où je suis arrivé, j'ai certainement contribué à la recherche. Nous avons injecté 38 millions de dollars supplémentaires dans le budget de recherche, juste après l'assermentation du gouvernement. J'ai pour mandat de m'assurer que nous pouvons obtenir autant d'argent que possible pour investir dans la recherche. Est-ce dans une seule région du pays? Non. C'est à l'échelle du pays.

Lorsque j'ai visité le centre de recherche de Charlottetown, on m'a montré le travail qui s'y faisait relativement à l'industrie de la pomme de terre. C'est fascinant de visiter ces centres de recherche. Ces ont un dévouement sans borne, c'est absolument formidable. Il fait chaud au cœur de visiter ces centres de recherche et voir ce qui s'y fait. Les gens y mettent vraiment du cœur. Je pense qu'ils dorment dans le bâtiment. C'est fascinant. Ce n'est pas toujours évident, monsieur le sénateur, de s'assurer qu'il y a suffisamment d'argent, mais lorsqu'on regarde ce qui s'est fait au fil des ans — j'utilise toujours le canola —, lorsqu'on regarde les nouvelles semences produites, les meilleures cultures que nous produisons grâce à l'investissement dans la recherche, les possibilités sont infinies.

Nous devons également nous rappeler que d'autres personnes dans le monde font le même travail. Et si nous ne demeurons pas à la fine pointe de la technologie dans ce domaine, nous ne sommes plus dans la course. Nous devons nous assurer de faire les investissements appropriés. J'ai l'intention de faire tout mon possible pour m'assurer que nous faisons les investissements appropriés.

Le sénateur Mercer : Merci, monsieur le ministre. Nous vous en sommes reconnaissants.

[Français]

Le président : Monsieur le ministre, vous avez pu constater l'intérêt que les sénateurs ont manifesté pour le Comité de l'agriculture et des forêts ainsi qu'à l'égard de votre présence ici. Ce fut un grand plaisir pour les membres du comité d'échanger avec vous ce matin sur des sujets aussi importants. Cela a été très utile, et nous vous en sommes tous reconnaissants.

Le sénateur Mercer, le sénateur Ogilvie et moi sommes membres de longue date du Comité de l'agriculture, et nous côtoyons des agriculteurs dans le cadre de nos voyages. Nous constatons que le transfert des fermes agricoles demeure un problème qui revient constamment. Cela inquiète beaucoup les agriculteurs qui ont atteint un âge raisonnable.

Cela mérite réflexion, parce qu'en ne réglant pas le problème, nous nous apercevrons que les fermes traditionnelles passeront aux mains des grosses entreprises et nous perdrons cette expertise traditionnelle qui fait du Canada un des pays agricoles les plus en vue dans le monde. Je vous laisse ceci comme réflexion, car cela inquiète beaucoup de producteurs et les jeunes également. En effet, ces derniers ont de la difficulté à acquérir des fermes, ce qui les désintéresse du monde agricole, pourtant si nécessaire.

Enfin, nous vous ferons parvenir notre rapport dans les plus brefs délais dès notre retour de Chine.

[Traduction]

M. MacAulay : Ce que vous avez dit, je l'ai entendu de nombreuses fois. Bien sûr, vous comprenez également que, lorsque des agriculteurs travaillent toute leur vie et tout ce qu'ils possèdent a été investi dans leurs actifs, ce n'est pas une situation facile.

Pour répondre à la question du sénateur Mercer, je ne veux pas avoir d'ennui avec le gouvernement. Je crois avoir parlé de 38 millions de dollars. Je pense que nous avons investi environ 70 millions de dollars dans le secteur de l'agriculture et de l'agroalimentaire, mais il nous faut tout de même plus de ressources. En ce qui concerne la succession, c'est un gros problème, parce qu'on ne peut pas donner des fermes aux gens. Je comprends ce que vous avez dit, et nous étudions certainement la question. Je ne sais pas ce que nous pouvons faire. Au chapitre des questions fiscales, cela peut aider un peu. Je comprends absolument ce que vous dites.

Je suis toujours heureux d'être ici au Sénat, merci beaucoup.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre.

[Français]

Je souhaite la bienvenue à nos témoins du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, M. Doug Forsyth, directeur exécutif, Division de la politique commerciale stratégique, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, M. Fred Gorrell, sous-ministre adjoint, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés. De l'Agence canadienne d'inspection des aliments, nous accueillons Mme Barbara Jordan, vice-présidente associée, Politiques et programmes. Ils seront avec nous pour la prochaine heure.

Les sénateurs vous poseront des questions en lien avec la rencontre que nous avons eue avec le ministre. Nous essaierons d'avoir des questions et des réponses courtes pour donner la chance à tous les sénateurs de poser leurs questions, et nous pourrons ainsi faire deux tours de table.

[Traduction]

Le sénateur Mercer : Encore une fois, nous avons beaucoup apprécié l'exposé. Comme vous le savez, nous avons essayé de le faire venir ici auparavant, mais il était en déplacement, et c'est toujours une bonne nouvelle lorsqu'il se déplace pour discuter de divers sujets.

Comme vous le savez, nous nous rendrons en Chine au début du mois de novembre et nous visiterons Beijing et Shanghai. Nous ne voulons pas compliquer les choses, donc je vous saurais gré si nous pouvions obtenir un compte rendu du Ministère afin de savoir à quoi nous en tenir une fois là-bas. N'allez pas croire que nous recevons des ordres du Ministère, soyons clairs. Mais nous aimerions savoir à quoi nous en tenir avant d'arriver, et être au fait des choses que nous devrions savoir, selon vous.

J'aimerais poursuivre en abordant quelques questions qui ont été soulevées lors de la discussion avec le ministre. L'une d'elles concernait la volaille de réforme et la façon dont nous allons faire savoir que nous avons déjà pris des mesures aux frontières. Je ne savais pas que cinq entreprises avaient vu leur certification suspendue. Je n'en avais jamais entendu parler auparavant dans toutes mes discussions avec les gens de l'industrie. Ce sont d'excellentes nouvelles, mais il faut le faire savoir d'une manière ou d'une autre à l'échelle de l'industrie, parce que, comme je l'ai toujours dit, il suffit en fait de le dire réellement à une ou deux personnes, et, si tout le monde est au courant, tous ceux de l'autre côté qui souhaitent expédier de la volaille de réforme illégale au Canada y réfléchiront à deux fois, à tout le moins.

J'ai une question concrète à poser : pourquoi n'y a-t-il pas de test d'ADN dans le cadre du processus?

M. Gorrell : Merci de votre question.

Avant tout, je souhaite répondre à la question au sujet de la Chine. Le ministère serait très heureux de fournir des renseignements au comité, et nous nous assurons qu'une approche coordonnée est en place pour votre séjour en Chine. Certains ministres provinciaux de l'Agriculture feront également partie du voyage, donc nous fournirons tous les renseignements nécessaires et nous assurerons qu'une approche intégrée est adoptée afin que tout le monde profite au maximum du voyage. Cela viendra.

En ce qui concerne votre question au sujet de la volaille de réforme, nous effectuons les tests d'ADN avec l'Université Trent, comme l'a mentionné le sénateur, et ce sera fait. Mais en ce qui concerne la validation du processus, la validation réelle, puisqu'il est question de viande de volaille — je ne suis pas un expert en la matière —, on se penche sur la question. Il faudra un certain temps. Le test d'ADN qui a été mis de l'avant par les Producteurs de poulet du Canada est bel et bien valable, et l'association examine la vitesse à laquelle nous pouvons le faire, encore une fois, comme j'ai répondu pour le ministre, en parallèle avec la validation du programme du département de l'Agriculture américain, et d'autres programmes. Donc il est question du programme d'ADN. Il fait l'objet d'un examen, et nous espérons qu'il pourra faire partie du processus.

Le sénateur Mercer : Lorsque nous aurons terminé de nous entretenir avec vous, nous allons parler de certaines nouvelles études auxquelles nous voulons peut-être prendre part. L'un des sujets est la propriété étrangère. Vous m'avez entendu mentionner plus tôt la possibilité d'élaborer une loi agricole. J'emploie ces termes, mais nous l'appellerons peut-être autrement à la fin. En ce qui concerne notre mandat, c'est en quelque sorte notre orientation.

J'ai fait part de la question de la propriété étrangère au ministre alors qu'il était ici. C'est dans la province de l'Île- du-Prince-Édouard que les restrictions sont les plus sévères en matière de propriété foncière; si vous n'êtes pas un lieu de villégiature, certaines restrictions s'appliquent en matière de propriété. Une étude sur la propriété étrangère serait- elle d'une quelconque valeur pour la planification effectuée par le ministère, mais également au moment de répondre à bon nombre des plaintes que vous avez entendues?

M. Gorrell : Merci, monsieur le sénateur. Comme l'a dit le ministre, je crois que cela vaut la peine. Cette question est très intéressante.

En ce qui concerne la propriété étrangère, comme vous le savez, la propriété foncière est de compétence provinciale, et les manières de procéder à cet égard sont disparates à l'échelle du pays. Je pense qu'il y a beaucoup de questions à ce sujet dans les médias, les gens qui achètent des terres ou n'en achètent pas.

Je pense que la réalisation d'une étude qui décrirait les règles au Canada, dans diverses administrations, serait définitivement utile pour tous.

Au sujet de l'autre question, j'aimerais seulement commenter l'allusion que vous avez faite à la loi agricole. En réalité, le Canada a sa propre loi agricole. Actuellement, on l'appelle Cultivons l'avenir 1 et Cultivons l'avenir 2. C'est ce qu'on appelle le prochain cadre stratégique. Nous travaillons à l'élaboration d'un cadre stratégique quinquennal à Agriculture et Agroalimentaire Canada. Il entrera en vigueur en 2018. Actuellement, le ministère consulte les diverses provinces. Le cadre relève de plusieurs administrations et englobe divers intervenants.

Nous appelons le prochain cadre stratégique. Nous avons un cadre stratégique quinquennal, qui est semblable à la loi agricole des États-Unis, monsieur.

Le sénateur Mercer : Ce n'est pas tout le monde autour de la table qui s'entendrait pour dire que Cultivons l'avenir 1 et Cultivons l'avenir 2 sont l'équivalent d'une loi agricole. Toutefois, c'est peut-être une question de sémantique. Nous y reviendrons.

J'apprécie votre réponse, et j'aimerais vous entendre au sujet de l'autre question.

Sénateur Ogilvie : J'ai deux questions qui concernent les enjeux commerciaux en général. La première porte sur ce que j'appellerais les obstacles non tarifaires au commerce international. Cela existe depuis un certain temps, mais il semble y avoir et une utilisation accrue et sélective d'un régime de tolérance zéro pour des entités en particulier à l'égard de produits qui entrent dans certains pays.

Je dois reconnaître que, dans certains cas, la tolérance zéro peut être absolument essentielle. Pour les organismes vivants, par exemple, nous voulons nous rapprocher le plus possible de la tolérance zéro dans ce domaine.

Je fais davantage allusion à l'utilisation apparemment délibérée de la tolérance zéro dans des domaines qui ne sont pas les mêmes que celui des organismes vivants, parce que nous savons qu'avec le matériel de détection des substances que nous avons aujourd'hui, nous pouvons détecter une concentration correspondant à des parties par billion de composés chimiques, entre autres. Si le seuil prévoit une tolérance zéro et que vous produisez une déclaration conforme sur le plan éthique et déclarez qu'il y a tant de parties par billion, c'est supérieur à zéro. Une telle façon de faire crée un obstacle.

Pouvez-vous nous donner une idée de l'ampleur de ce problème, ou nous dire si le problème est grandement exagéré pour les producteurs canadiens?

M. Gorrell : En vérité, c'est une très bonne question, et je pense que vous l'avez illustrée parfaitement.

Comme vous l'avez mentionné, avec les avancées technologiques, nous sommes en mesure de détecter de plus petites concentrations — on parle ici de parties par billion et par milliard. On arrive vraiment à détecter de toutes petites concentrations. En ce qui concerne la tolérance zéro, évidemment, une réglementation est mise en place pour protéger contre les concentrations de résidus, du point de vue de la salubrité des aliments. Avec l'arrivée d'accords de commerce, les tarifs sont à la baisse, donc, comme vous l'avez correctement mentionné, des barrières non tarifaires ont été introduites. La tolérance zéro est souvent une valeur par défaut. C'est pourquoi nous travaillons avec les organismes internationaux d'établissement de normes qui relèvent de l'OMC. De tels organismes existent pour la protection des végétaux et la santé animale, de même que pour la salubrité alimentaire. Ils établissent des normes, et il serait question de parties par million, ou de quelque chose du genre, quelque chose qu'on peut mesurer.

Si un pays veut adopter des mesures protectionnistes et que, par exemple, il n'existe aucune norme pour un certain produit, les responsables peuvent appliquer la tolérance zéro. Ils ont les moyens de déceler de très petites quantités. Ainsi, dans les faits, ce dont vous parlez constitue un réel problème, non seulement pour le Canada, mais, selon moi, pour tous les principaux pays exportateurs.

Donc, nous concentrons nos efforts sur la collaboration avec les organismes internationaux qui établissent des normes en vue de fixer des niveaux afin de créer un système fondé sur des règles et une certaine prévisibilité. Pour répondre à votre question, il s'agit d'un enjeu véritable, et cela m'a probablement donné quelques cheveux gris, monsieur le sénateur. Beaucoup de personnes se penchent sur cette question. Elle se pose dans tous les domaines, ce qui en fait une question pertinente. C'est un enjeu sérieux, mais nous travaillons vraiment à l'établissement d'un mécanisme, en collaboration avec d'autres pays, afin d'instaurer un système fondé sur des règles à l'échelle internationale.

Le sénateur Ogilvie : Merci beaucoup. Je ne vais pas aller plus loin, mais je suis conscient que l'utilisation de ces barrières constitue un problème grave.

Ma deuxième question porte sur les produits génétiquement modifiés. J'aimerais connaître vos observations concernant la situation au sein de l'Union européenne. De ce que j'en comprends, l'Union européenne a une approche très intéressante, que je qualifierais d'approche à deux volets, à l'égard des OGM qui entrent sur son territoire, en particulier en ce qui concerne les grains destinés à l'alimentation des animaux. Je crois, peut-être à tort — et je souhaite que vous m'éclairiez — qu'ils ont une approche beaucoup plus souple à l'endroit des aliments génétiquement modifiés pour animaux qui entrent sur leur territoire, qu'à l'endroit de produits génétiquement modifiés destinés à une consommation humaine directe, pour ainsi dire. Pourriez-vous nous donner quelques précisions sur cette situation?

M. Gorrell : Vous avez très bien fait vos recherches, monsieur le sénateur, parce que vous avez, encore une fois, bien saisi la situation. Il est clair qu'il y a une dynamique propre à l'UE, compte tenu de la façon dont est constituée l'Union, des pays membres qui la forment et du consensus de 25 ou de 27 membres qui est exigé. C'est un fait bien connu que le Canada possède des techniques de modification génétique. Nous les appuyons. Comme il a été mentionné en réponse à une question d'un autre sénateur, nous appuyons toutes ces techniques, qu'il s'agisse de produits biologiques ou d'OGM; nous examinons les produits, quels qu'ils soient. C'est ce que nous analysons. En ce qui concerne l'UE, actuellement, nous pourrions affirmer que les responsables ont une approche plus compréhensive ou tolérante à l'égard des produits génétiquement modifiés utilisés dans les aliments pour animaux, qu'à l'égard de ceux destinés à l'alimentation humaine. Et cela fait partie du processus d'enregistrement. Nous sommes d'avis qu'il est beaucoup plus difficile d'enregistrer des produits destinés à l'alimentation humaine que des produits destinés à des animaux. Au Canada, il existe le même type de processus d'approbation en ce qui concerne l'environnement, l'alimentation humaine et les aliments pour animaux. Comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, il apparaît que les responsables appliquent une approche à deux volets, mais ils semblent être plus diligents quand ils appliquent un volet que quand ils appliquent l'autre, soit probablement la façon appropriée d'examiner ces produits.

Le sénateur Ogilvie : Vous avez répondu de façon très prudente, mais je vous remercie; je comprends très bien votre réponse.

Avez-vous senti un changement important quant à la volonté de se pencher sur ces produits en Europe, ou y a-t-il un autre endroit dans le monde qui ressort comme ayant un point de vue de plus en plus réaliste à l'égard de la situation touchant les OGM?

M. Gorrell : C'est une bonne question, parce que, au bout du compte, les Européens auront besoin de produits provenant d'ailleurs dans le monde. Ces produits devront être importés. Les producteurs européens exportent beaucoup de denrées. Certains pays membres sont très agressifs dans la façon dont ils s'opposent aux OGM. Évidemment, les choses peuvent être compliquées en démocratie, en particulier quand les membres sont des États. Cependant, je crois qu'ils comprennent que, à long terme, ils devront accepter dans l'ensemble les innovations en matière d'OGM afin que l'on puisse nourrir la population à l'échelle planétaire. Donc, je crois que nous verrons certains assouplissements dans certains domaines, mais, très franchement, compte tenu des médias sociaux, de la façon dont l'information circule partout dans le monde parfois et du fait que certains groupes ont des positions très campées, je suis d'avis que le débat se poursuivra. Je n'aimerais pas parler de bataille, monsieur le sénateur, mais il faudrait déployer un effort continu pour s'assurer que les avantages et la sûreté que procurent la biotechnologie et les produits qui en sont issus sont ici pour de bon et que nous devons vraiment nous en servir pour trouver le moyen de nourrir les populations du monde entier, ainsi que les Européens.

Le sénateur Ogilvie : Merci beaucoup.

Le sénateur Pratte : Je souhaite revenir à la question du lait diafiltré. Il semble exister une solution très simple à ce problème, et, quand on parle aux personnes concernées, il est évident qu'il est impossible d'appliquer cette solution simple. Donc, laissez-moi vous poser une question très idiote. Je suis particulièrement bon en la matière.

Qu'arriverait-il si le gouvernement du Canada mettait fin tout simplement aux importations de lait diafiltré en imposant, par exemple, un tarif très élevé sur ce produit ou en utilisant un autre moyen — ce qui serait une solution simple pour stopper les importations, ce qui est actuellement réclamé par les partis d'opposition et les producteurs laitiers?

M. Gorrell : Vous savez qu'il est risqué de répondre à une question hypothétique, monsieur le sénateur, mais je vais faire de mon mieux pour répondre de façon claire.

Tout d'abord, comme nous l'avons tous appris, il n'y a aucune question idiote.

Le sénateur Pratte : Vous êtes très aimable; merci.

M. Gorrell : C'est une question très précise. Le ministre a mentionné qu'il est légal d'importer du lait diafiltré au Canada. Un tarif est imposé sur ce produit. C'est légal. C'est le résultat de négociations. Une partie du problème réside dans la façon dont ce produit est utilisé au Canada.

Donc, pour répondre à votre question, je dirais que nous n'adopterions pas cette solution parce que nous avons conclu des accords commerciaux dans lesquels nous avons permis l'importation du lait diafiltré au Canada selon une ligne tarifaire, et ainsi de suite. Le problème touche à la fois l'utilisation de ce produit et la mise en place d'une solution complète permettant de protéger les Canadiens et d'assurer une gestion viable et à long terme de l'approvisionnement.

Le sénateur Pratte : Donc, puisque la solution simple proposée n'existe pas, contrairement à ce que de nombreuses personnes affirment, voici la question, qui n'est pas si idiote que ça, que je pose à beaucoup de personnes et à laquelle je ne réussis pas à obtenir de réponse : Pouvez-vous expliquer, en plus de 30 secondes, mais en moins de 2 minutes, quel est le problème? Pourquoi est-il si compliqué d'arriver à une solution à long terme? Quels sont les obstacles?

M. Gorrell : Je vais laisser mon collègue, qui possède davantage d'expertise à ce sujet, répondre à la question.

Doug Forsyth, directeur exécutif, Division de la politique commerciale stratégique, Direction générale des services à l'industrie et aux marchés, Agriculture et Agroalimentaire Canada : Merci, monsieur le sénateur. Comme vous l'avez souligné avec justesse, et comme l'a mentionné le ministre, il s'agit d'un problème qui existe depuis longtemps. Il y a des enjeux qui compliquent les choses, tant à l'échelle internationale qu'à l'échelle du pays. Comme l'a dit Fred, il est possible d'importer le produit au Canada en franchise de droits, et il s'agit d'un intrant économique que les transformateurs au Canada ont choisi d'utiliser au lieu du lait. En toute franchise, c'est là une partie du problème. Le coût est faible, et il peut être utilisé dans la fabrication du produit final, sans modifier le processus de fabrication ni le goût des fromages et des yogourts.

De toute évidence, il existe des problèmes à la fois du côté des transformateurs et du côté des producteurs quant à la façon de régler la situation. Une partie de la solution que nous avons abordée plus tôt concernant une stratégie nationale des ingrédients aidera à régler certains problèmes. Comme l'a dit le ministre, il a rencontré des producteurs laitiers et des transformateurs de produits laitiers au cours du printemps afin de connaître leurs préoccupations et les solutions qu'ils proposent, et, comme il l'a mentionné, il a entendu ce qu'ils avaient à dire et il prendra une décision quand il sera prêt à le faire.

Le sénateur Pratte : L'entente entre les transformateurs et les producteurs est une entente entièrement privée, et le gouvernement n'est pas partie à cette entente.

M. Forsyth : C'est exact.

Le sénateur Pratte : Est-ce que le fait qu'il s'agisse d'une entente privée protège le Canada de tout recours que pourraient entreprendre des gouvernements ou des pays étrangers?

M. Forsyth : Est-ce que l'entente protège le Canada? Je ne dirais pas qu'il en est forcément ainsi. Vous soulignez avec justesse qu'il s'agit d'une entente conclue entre les producteurs et les transformateurs. Nous ne l'avons pas analysée. Je souligne au passage que je crois qu'on visait le 1er novembre, mais, à ce que je sache, il y a encore des détails à régler. Nous n'avons pas reçu l'entente définitive entre les deux parties.

Est-ce que cela protégera le Canada contre un recours? Je crois qu'il appartient aux autres pays de décider si c'est le cas. C'est possible. Nous ne pouvons l'affirmer.

Le sénateur Pratte : Je n'ai pas lu les lettres des producteurs laitiers étrangers. Cela poserait-il un problème au regard de l'OMC, de l'ALENA, ou des deux?

M. Forsyth : Certainement, les lettres que nous avons lues provenant des producteurs laitiers de différents pays, de l'UE, des États-Unis, de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et du Mexique...

Le sénateur Pratte : Donc il s'agirait de l'OMC.

M. Forsyth : S'ils choisissent d'entreprendre des recours, ils s'adresseront vraisemblablement à l'OMC.

[Français]

Le président : Si vous le permettez, j'aurais une question additionnelle concernant le lait diafiltré. On retrouve du lait diafiltré qui entre de façon légale au Canada. Ce produit ne pose pas problème, il est inspecté et on a le dossier de traçabilité qui s'applique. Cependant, pour ce qui est du lait diafiltré qui entre de façon illégale, quel est le contrôle qu'on peut faire, ou qu'on ne fait pas, sur la qualité et la traçabilité de ce produit, qui entre au Canada par l'intermédiaire de différents produits, comme des produits laitiers ou du yaourt, comme vous avez dit? Qu'est-ce qui peut donner la certitude aux Canadiens que ces produits sont bons pour leur santé?

M. Gorrell : Tout d'abord, c'est la responsabilité de l'Agence des services frontaliers du Canada.

[Traduction]

Oui, les responsables effectuent des vérifications sur les produits importés. Ils les examinent et ils suivent aussi les directives de nos collègues de l'Agence canadienne d'inspection des aliments qui en sont responsables. Ainsi, la vérification de la qualité du produit sur le plan de la salubrité et les vérifications visant à déterminer si le produit importé est réellement celui qui est déclaré relèvent de l'Agence des services frontaliers du Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, et ces deux organisations sont dotées de programmes de surveillance régulière.

Je ne sais pas si ma collègue de l'ACIA aimerait ajouter quelque chose.

Barbara Jordan, vice-présidente associée, Politiques et programmes, Agence canadienne d'inspection des aliments : Merci Fred. Comme mon collègue l'a souligné, il y a assurément une surveillance à la frontière sur le plan de la salubrité et de la qualité. Nous collaborons avec l'Agence des services frontaliers du Canada pour nous en assurer. Selon nos observations à la frontière, les produits importés ne sont pas illégaux. Le produit qui est importé — le lait diafiltré — est jugé être un produit alimentaire sûr qui respecte les normes en vigueur au Canada.

[Français]

Le président : J'ai une toute dernière question à vous poser, monsieur Gorrell. Au cours des derniers mois, le géant Bayer a acheté la puissante entreprise Monsanto. Cette dernière a comparu à plusieurs reprises devant notre comité et la majorité des sénateurs n'avait pas que des félicitations à leur transmettre.

Quel contrôle exercera le gouvernement canadien sur Bayer, qui est une multinationale dont le siège social est en Allemagne? Et quelles seront les répercussions sur les producteurs qui devront sans doute acheter leurs semences chez Monsanto? Comment envisagez-vous ce problème? Je suis persuadé que vous n'avez pas de solution ce matin. Mais j'aimerais vous poser la question pour que vous puissiez nous donner des explications précises afin de rassurer les producteurs, les agriculteurs et la population. Il ne faut pas oublier que Monsanto été mise à la porte dans plusieurs États américains, parce qu'elle ne respectait pas les normes exigées par le ministère de l'Agriculture de ces États. Monsanto n'est pas un fleuron du Canada. Comment le gouvernement se prépare-t-il à réagir? Lorsqu'il s'agit d'une entreprise internationale, il est encore plus difficile d'exercer un contrôle que dans le cas d'une entreprise établie en Amérique du Nord.

M. Gorrell : Oui, en effet, il s'agit d'une question importante.

[Traduction]

Cette question renvoie, dans le fond, à la vérification des produits : il faut s'assurer que les produits achetés qui entrent au pays sont bien ce qu'ils doivent être. Je crois, si je comprends bien, monsieur, que la question porte vraiment sur la façon dont nous nous assurons que les produits importés au Canada correspondent à leur description et sur la façon dont nous protégeons nos producteurs, est-ce exact? La question touche les mesures multidisciplinaires et coordonnées de l'Agence des services frontaliers du Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, et peut-être d'autres organisations aussi, je présume. Nous serions heureux de vous fournir des détails, mais j'aimerais demander à Barbara si elle souhaite ajouter quelque chose.

Mme Jordan : Pour ce qui est des importations, peu importe leur provenance, les produits doivent respecter les lois du Canada concernant la salubrité et la qualité. Peu importe le pays d'origine, il est exigé que tous les produits importés respectent les dispositions législatives et la réglementation.

De ce point de vue, il n'y aura pas de problème concernant la vente et l'achat de Monsanto. Les mesures législatives demeurent, et les mêmes exigences s'appliquent dans le cas des importations.

Je ne suis pas certaine si cela répond à votre question, mais, si elle concerne les importations et la question de savoir si les semences importées respecteront nos exigences, les exigences demeurent les mêmes, peu importe la provenance.

[Français]

Le président : C'est une situation délicate que d'obliger les agriculteurs à acheter leurs semences chez Monsanto. Cela pose problème, particulièrement dans l'Ouest canadien, en Ontario et au Québec. S'ils n'achètent pas les semences traitées, et cetera, les agriculteurs sont pris dans un étau, ce qui n'est pas sain. Au cours des dernières années, Monsanto a prouvé qu'elle ne respectait d'aucune façon les agriculteurs, l'environnement et les consommateurs. À mon avis, le gouvernement du Canada, au cours des prochaines années ou des mois à venir, devrait s'assurer que les agriculteurs ne seront pas pris dans un cercle vicieux, à savoir que s'ils ne respectent pas certaines conditions, ils ne pourront pas produire. Les consommateurs doivent avoir la certitude que les produits de Monsanto ne sont pas nocifs pour la santé de la population du Canada et des autres pays vers lesquels le Canada exporte ses produits. Voilà le fond de ma question.

M. Gorrell : Comme je l'ai mentionné plus tôt, c'est une grande question et cette responsabilité incombe à plusieurs personnes. Si vous nous le permettez, nous pourrions en discuter avec les autres agences pour ensuite informer les sénateurs.

Le président : Ce serait très apprécié, monsieur Gorrell. Au cours des prochains mois, auriez-vous l'obligeance de consulter les ministères concernés? Il est sans doute plus facile pour vous d'obtenir les renseignements que vous pourriez ensuite transmettre au greffier du comité. Non seulement les membres du comité vous en seraient très reconnaissants, mais aussi les Canadiens et Canadiennes.

Sur ce, je vous remercie infiniment de votre présence. Votre exposé était fort intéressant. Nous aurons sûrement l'occasion de nous revoir au cours de la prochaine année dans le cadre de nos travaux. Et nous attendrons vos documents avec impatience.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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