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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 16 - Témoignages du 4 octobre 2016


OTTAWA, le mardi 4 octobre 2016

Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 17 heures, pour examiner la réponse du gouvernement au neuvième rapport du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts, intitulé L'importance de la santé des abeilles pour une production alimentaire durable au Canada, déposé et adopté au Sénat le 27 mai 2015.

Le sénateur Terry M. Mercer (vice-président) occupe le fauteuil.

Le vice-président : Bonsoir, mesdames et messieurs. Je suis le sénateur Terry Mercer, vice-président du Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Je vous souhaite la bienvenue à notre réunion.

J'aimerais tout d'abord demander à mes collègues de se présenter, en commençant par la sénatrice Beyak.

La sénatrice Beyak : Sénatrice Lynn Beyak, de l'Ontario. Bienvenue.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Sénateur Jean-Guy Dagenais, de la province de Québec. Bienvenue au comité.

[Traduction]

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, Nouvelle-Écosse.

Le vice-président : Le comité reçoit aujourd'hui des intervenants qui donneront leur point de vue sur la réponse du gouvernement à notre étude sur la santé des abeilles déposée et adoptée au Sénat le 28 mai 2015.

Notre premier témoin préside le Conseil canadien du miel. Il s'agit de M. Kevin Nixon. Je vous invite à faire votre exposé et à vous en tenir à cinq ou sept minutes, s'il vous plaît. Par la suite, nous vous poserons des questions. Les sénateurs auront chacun cinq minutes environ pour vous poser des questions avant que la présidence donne la parole à un autre sénateur. Il y aura autant de séries de questions que le temps le permet, et les sénateurs n'ont donc pas à se sentir obligés de poser toutes leurs questions d'un coup. Je demande aux sénateurs d'être brefs et précis lorsqu'ils poseront leurs questions et à M. Nixon de fournir des réponses brèves et précises également.

Kevin Nixon, président, Conseil canadien du miel : Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous encore une fois. Au nom du Conseil canadien du miel, je vous remercie du temps que vous avez consacré à votre étude sur la santé des abeilles au Canada. Au moment où nous continuons d'en apprendre sur notre industrie et sur les moyens de mieux nous occuper de nos abeilles, je suis sûr que bon nombre d'entre vous en ont appris beaucoup sur les abeilles et notre industrie, plus que ce qu'ils ne l'auraient probablement jamais souhaité.

Le Conseil canadien du miel remercie le comité de ses recommandations qui serviront de tremplin pour améliorer la santé des abeilles au Canada. Je vais prendre quelques minutes pour faire quelques observations sur chacune des recommandations.

La première recommandation est divisée en deux points. Il y a tout d'abord l'idée de permettre l'importation de paquets d'abeilles provenant des États-Unis. À ce moment-ci, le conseil n'a pas adopté de position précise à cet égard. Je suis certain qu'au cours de votre étude, vous avez constaté que les avis diffèrent au Canada. Certains de nos organismes membres appuient fortement l'idée, d'autres ne l'appuient pas.

Toutefois, le conseil reconnaît que la situation actuelle concernant les sources de l'industrie apicole n'est pas idéale, puisque nous mettons bien des œufs dans un ou deux paniers. Compte tenu des demandes croissantes du secteur de la pollinisation, nous devons vraiment nous demander si nos sources actuelles permettront à l'industrie de combler ces besoins de façon viable sur le plan économique.

En ce qui concerne le deuxième point de la première recommandation, le projet de surveillance de la santé des abeilles, le Conseil canadien du miel est conscient de l'importance de cette étude. Le projet en est à la fin de sa troisième année, et il reste un an au projet actuel. Je crois qu'en ce moment, on recueille des échantillons presque partout au pays, et une seule province ne participe pas encore à ces efforts.

Une telle étude constituera un outil important au chapitre de la surveillance des maladies et ravageurs émergents et actuels. Elle peut également jouer un rôle important sur le plan du commerce international, de l'évaluation des stocks de nos pays fournisseurs, et nous permettre également d'envoyer nos stocks dans d'autres pays. Si aucun laboratoire indépendant ne fait la collecte et l'analyse de données dans le cadre d'un protocole établi, il y a peu de chances que nous fassions des progrès.

Le Centre national de diagnostic des abeilles a joué un rôle crucial dans le projet et continuera à le faire.

La deuxième recommandation porte sur la norme nationale de biosécurité à la ferme pour l'industrie apicole. Notre organisme a intégré la norme de biosécurité et le programme de salubrité des aliments à la ferme de l'industrie — qui s'appelle le programme CSQSIA — dans un manuel convivial destiné aux producteurs. Il a été présenté aux producteurs au cours de la dernière année parce qu'il y avait des éléments communs sur le plan de la salubrité alimentaire et de la biosécurité, et il semble que certains producteurs trouvaient très pénible de devoir consulter ces manuels page par page, et il était donc logique de le faire.

Jusqu'à maintenant, il n'y a pas eu un grand intérêt. Je pense que quelques raisons expliquent cette situation. À l'heure actuelle, les apiculteurs ont l'impression qu'ils ne seront plus payés pour leur produit, peu importe si certaines de ces pratiques sont adoptées ou non. Nous sommes présentement confrontés à une faiblesse extrême du marché dans lequel nous rivalisons avec des pays qui exportent du miel chez nous et qui n'ont aucune norme. Voilà pourquoi les apiculteurs se posent des questions.

De plus, certains secteurs n'ont pas eu accès au financement de Cultivons l'avenir 2, ou on s'est retrouvé à court de fonds concernant certains programmes visant à aider les producteurs à adopter certains de ces changements et à atténuer une partie des coûts.

Le Conseil canadien du miel continuera à encourager l'utilisation des normes de biosécurité comme moyen pour les apiculteurs d'améliorer la santé des abeilles.

Selon la troisième recommandation, l'ARLA devrait accélérer son processus d'homologation conditionnelle. Notre organisme comprend qu'il y a un temps où il faut utiliser les homologations conditionnelles. Dans certains cas, il semble qu'une homologation conditionnelle a duré plus longtemps qu'elle ne l'aurait dû. Nous croyons que l'ARLA met les bouchées doubles quant aux réévaluations de certains néonicotinoïdes pour l'homologation complète.

Puisque la quatrième recommandation visait l'ARLA, le Conseil canadien du miel n'avait pas vraiment d'observation à faire à cet égard.

Selon la cinquième recommandation, il faudrait que l'ARLA prenne les mesures nécessaires afin d'accélérer le processus d'homologation de produits visant à protéger la santé des abeilles. À titre de membre de la Table ronde nationale sur la santé des abeilles, le Conseil canadien du miel a constaté que l'ARLA a la volonté de le faire. À l'heure actuelle, on a déterminé qu'il fallait accélérer le processus dans le cas d'un nouveau produit afin que les apiculteurs puissent l'utiliser le plus vite possible.

Le vrai problème qui se pose présentement, c'est qu'à court terme, il n'y a pas beaucoup de produits visant à contrôler les acariens qui pourraient être candidats à l'homologation, à part celui que j'ai mentionné.

Dans sa sixième recommandation, le comité proposait que l'ARLA continue de surveiller la mortalité au cours du printemps 2015. Le Conseil canadien du miel remercie l'ARLA de l'engagement qu'elle a pris ces dernières années de consacrer autant de temps et de ressources à la collecte et à l'analyse de données pour évaluer la mortalité des abeilles domestiques. Selon le rapport de l'ACAP sur l'hivernage, il semble que les régions dans lesquelles il y avait eu des pertes importantes attribuables à l'utilisation de pesticides ont vu une réduction importante de leurs pertes. On ignore si les mesures de protection qui ont été adoptées ont eu beaucoup à voir avec les changements observés sur la mortalité des abeilles. J'ai joint aux documents que je vous ai fournis le rapport sur l'hivernage.

Le président : Chers collègues, les documents sont ici, mais ils n'ont été rédigés que dans une langue. Vous pouvez les consulter si vous le voulez, mais nous ne faisons habituellement pas circuler de documents s'ils ne sont pas fournis dans les deux langues. Nous pouvons faire circuler la page en question, si vous le voulez.

M. Nixon : Concernant la deuxième partie de la sixième recommandation, le comité propose que l'ARLA termine sa réévaluation des néonicotinoïdes.

Encore une fois, à titre de membre de la Table ronde nationale sur la santé des abeilles, le Conseil canadien du miel a constaté que l'ARLA s'est engagée à terminer les évaluations. On nous a informés que les travaux se poursuivaient, et nous sommes impatients d'en connaître les résultats. Nous nous attendons à voir le premier rapport en décembre prochain et les deux autres au mois de décembre des deux années suivantes, respectivement.

La septième recommandation porte sur le financement accordé à la recherche. Le Conseil canadien du miel remercie le comité et le gouvernement pour leur appui à cet égard.

La création de la Table ronde nationale sur la santé des abeilles a joué un rôle de premier plan dans le regroupement des intervenants et nous a fourni une tribune nous permettant de collaborer pour déterminer les priorités et cerner les lacunes sur lesquelles nous devons vraiment axer nos efforts.

Bien que bon nombre d'excellents travaux sur la santé des abeilles se déroulent au Canada, je crois qu'il nous reste beaucoup à apprendre, et nous avons besoin de l'appui indéfectible du gouvernement pour assurer la viabilité à long terme.

Concernant la huitième recommandation, le comité suggère l'adoption de pratiques exemplaires de gestion. Encore une fois, la Table ronde nationale sur la santé des abeilles a constitué une tribune très utile sur le sujet. En regroupant les intervenants, nous sommes en mesure de mieux comprendre les besoins de chacun. Nous sommes alors capables de travailler ensemble pour réduire l'exposition des abeilles aux pesticides, ainsi que de créer un manuel sur les pratiques exemplaires de gestion destiné aux apiculteurs de partout au pays.

J'ai vu une épreuve du manuel récemment, et je crois que ce sera un très bon outil, surtout pour les nouveaux apiculteurs et les apiculteurs amateurs. Les apiculteurs commerciaux qui sont dans l'industrie depuis longtemps pourraient même l'utiliser comme outil de formation pour leurs employés.

La neuvième recommandation porte sur les habitats des pollinisateurs. Ces dernières années, la santé des abeilles a suscité une plus grande attention de la population, et nous remarquons un intérêt accru à l'égard de la création de nouveaux habitats pour les pollinisateurs. Des travaux ont été menés dans le cadre de la Table ronde nationale sur la santé des abeilles pour que cette recommandation soit mise en œuvre, et je crois que nous en verrons les résultats très bientôt.

Comme je l'ai déjà dit, le Conseil canadien du miel remercie le comité pour le temps qu'il a consacré à la réalisation de cette étude. Nous vous remercions des recommandations que vous avez formulées et nous sommes ravis de l'appui qu'elles reçoivent du gouvernement.

Tous les secteurs font face à des difficultés, et le secteur apicole canadien ne fait pas exception. Le Conseil canadien du miel est déterminé à collaborer avec d'autres intervenants de l'industrie, ainsi qu'avec le gouvernement, afin de favoriser la viabilité et la croissance de l'industrie.

Merci.

Le vice-président : Merci beaucoup, monsieur Nixon. Nous vous remercions de votre exposé.

Je voulais parler d'un sujet que vous avez soulevé, soit celui d'un nouveau produit. Je ne sais pas si je connais le nom de ce produit, mais vous pourriez nous en parler un peu. À cette étape préliminaire, considère-t-on qu'il est un peu plus sécuritaire que les néonicotinoïdes qui sont offerts actuellement sur le marché?

M. Nixon : Le nouveau produit dont je parlais, pour lequel l'ARLA accélère le processus afin qu'on puisse l'utiliser, sera utilisé par les apiculteurs dans la lutte contre les acariens. Il ne remplace pas les néonicotinoïdes employés comme pesticides en agriculture.

L'un de nos plus grands défis et, d'après des enquêtes menées partout au pays, l'une des plus graves menaces pour les abeilles domestiques, c'est un acarien. Il semble que tous les cinq à sept ans, il acquiert une résistance à nos traitements. Nous nous trouvons alors dans un engrenage infernal où il faut obtenir une homologation d'urgence pour un nouveau produit, et nous n'avons pas de plan de rechange.

C'est un nouveau produit destiné à combattre ce type d'acariens, et il semble qu'il devrait entrer dans le marché bientôt, à temps pour la prochaine saison, si tout va bien.

Le vice-président : Où l'a-t-on mis à l'essai?

M. Nixon : Des études ont déjà été menées sur le terrain au Canada.

Le vice-président : Quel pays a créé le produit?

M. Nixon : Il provient des États-Unis.

Le vice-président : Des évaluations ont-elles été menées là-bas?

M. Nixon : Oui.

Le vice-président : Et quels en ont été les résultats?

M. Nixon : Ils ont été bons. On utilise le produit aux États-Unis depuis un certain temps. Bien entendu, des ajustements doivent être apportés en raison de notre climat. Il est étonnant de constater que les abeilles peuvent réagir différemment à certaines choses selon les conditions météorologiques et qu'un produit puisse s'évaporer et sécher dans des conditions différentes.

On a utilisé le produit ici, et certains ajustements ont été apportés pour l'adapter au climat canadien, et nous espérons qu'il sera offert sur le marché bientôt.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Nixon, pour votre présentation. Une des causes de la mortalité des abeilles est l'utilisation des néonicotinoïdes. Selon un rapport publié récemment, il y aurait eu, en 2015, une baisse du taux de mortalité des abeilles. Est-ce attribuable à la réduction de l'utilisation de ces pesticides?

En tant qu'apiculteur, avez-vous remarqué une tendance similaire dans certaines provinces ou est-ce généralisé au Canada? Vous avez également parlé de l'utilisation d'un autre pesticide. Avez-vous remarqué une baisse du taux de mortalité des abeilles? Il y a peut-être d'autres facteurs qui font que le taux de mortalité peut varier d'une année à l'autre.

[Traduction]

M. Nixon : Nous avons assurément observé une amélioration de la situation des abeilles au pays ces dernières années.

À mon avis, il est peut-être trop tôt pour déterminer si ces changements dans l'utilisation des néonicotinoïdes ont eu une influence là-dessus. L'apiculture est confrontée à bon nombre de difficultés. On s'est beaucoup concentré sur l'utilisation de pesticides et sur un certain groupe de pesticides, mais nous avons été témoins de pertes importantes, et nous avons vu le taux des pertes diminuer en très peu de temps. En Ontario, le taux des pertes était de 60 p. 100 en 2014, de 40 p. 100 en 2015, et de 18 p. 100 l'an dernier.

L'Ontario a adopté des règlements pour réduire l'utilisation des néonicotinoïdes, qui sont entrés en vigueur le printemps passé. Ils n'ont pas été mis en place depuis assez longtemps pour que nous puissions dire qu'ils ont eu des répercussions sur la santé des abeilles.

Cela montre que tellement de facteurs peuvent avoir des répercussions sur la santé des abeilles, dont les pesticides. Nous devons en être conscients. Nous avons élaboré des pratiques exemplaires de gestion. D'autres intervenants de l'industrie en ont élaboré pour les producteurs concernant la pulvérisation de pesticides sur leurs cultures, et je pense que bon nombre d'entre eux se sont montrés réceptifs et ont adopté certaines de ces pratiques.

Les acariens dont j'ai parlé, et les traitements, constituent un facteur important. Les conditions météorologiques sont un énorme facteur, et il y a toutes ces pressions et leur façon d'interagir; il nous reste beaucoup à apprendre. Il est probablement un peu tôt pour dire que les changements dans l'utilisation des néonicotinoïdes ont eu une incidence sur l'amélioration de la santé des abeilles.

[Français]

Le sénateur Dagenais : En ce qui concerne la réglementation des pesticides, vous avez dit que le gouvernement de l'Ontario a restreint l'utilisation des néonicotinoïdes, ce qui a tout de même permis une diminution du taux de mortalité des abeilles. Les restrictions que l'on applique en Ontario devraient-elles être étendues aux autres provinces et à l'ensemble du pays, selon une réglementation similaire?

[Traduction]

M. Nixon : D'après ce que nous observons, on utilise exactement le même produit pour le canola, et il y a 21 millions d'acres de canola dans l'Ouest canadien. La majorité des exploitations apicoles commerciales se trouvent dans l'Ouest canadien, dans ces champs de canola. Nous n'observons aucune répercussion découlant du fait que des abeilles se trouvent dans les champs de canola qui ont été traités aux néonicotinoïdes.

Est-ce que je pense que ce type de règlements devrait être adopté partout au pays? Absolument pas.

Le vice-président : Concernant l'interdiction des néonicotinoïdes ou les restrictions sur leur utilisation en Ontario, prévoyez-vous mener une étude spéciale après l'hiver prochain, puisqu'un cycle complet se sera terminé à l'arrivée du printemps, pour déterminer s'il y aura eu une amélioration au chapitre de la survie des abeilles?

M. Nixon : Le Conseil canadien du miel aura certainement cette situation à l'œil. Nous nous appuyons sur les données recueillies par l'Association canadienne des apiculteurs professionnels. Celle-ci mène une étude pancanadienne pour recueillir les données provinciales quant aux pertes hivernales. Elle compile les statistiques que je vous ai fournies et demande aux apiculteurs quelles sont, selon eux, les raisons potentielles pour expliquer leurs pertes. Ces informations nous donnent une bonne idée. Il s'agit du point de vue des apiculteurs eux-mêmes sur les raisons des pertes. Je crois donc que la province de l'Ontario suivra de près cette industrie et nous étudierons les résultats de son analyse.

Le sénateur Pratte : Vous me pardonnerez mon ignorance, mais je ne siégeais pas au comité au moment de cette étude.

Vous dites que les apiculteurs n'étaient pas très enclins à adopter des mesures en matière de salubrité alimentaire et de biosécurité. Pourriez-vous nous donner plus de détails à ce sujet? Je ne suis pas certain de bien comprendre pourquoi ils hésitent à adopter de telles mesures.

M. Nixon : Pour la plupart, les apiculteurs sont enregistrés auprès de l'ACIA en tant qu'établissements agréés. Les apiculteurs respectent les directives fournies dans un manuel du miel et leurs installations sont inspectées selon les critères établis dans ce manuel pour s'assurer qu'ils produisent des aliments salubres grâce à des moyens sécuritaires et sains. Le certificat de l'ACIA permet aussi aux producteurs d'exporter leur produit. C'est donc un bon document à posséder.

Concernant l'adoption de mesures supplémentaires en matière de biosécurité et de salubrité alimentaire, je crois qu'il faut éduquer davantage les apiculteurs, car la plupart des producteurs commerciaux respectent déjà en grande partie les directives que l'on retrouve dans le manuel. Je crois qu'ils craignent le manuel. Je l'ai moi-même consulté et il peut être intimidant à première vue; les producteurs s'imaginent qu'ils devront en faire beaucoup plus sans toucher davantage pour leur produit. Nous devons mieux les éduquer sur ce que cela signifie pour eux. Je crois qu'ils finiront par comprendre qu'ils respectent déjà la plupart des directives contenues dans ce manuel.

Nous avons des fermes apicoles ultramodernes au pays. J'ai visité beaucoup de fermes apicoles et d'apiculteurs dans le monde, et les produits canadiens respectent des normes très élevées. Nous sommes fiers de nos fermes et des investissements que nous y faisons, et nous souhaitons produire des aliments salubres de haute qualité. Ce sont des choses pour lesquelles nous sommes reconnus dans le marché et les producteurs veulent maintenir cette réputation. Nous devons continuer d'éduquer un peu mieux nos producteurs.

Le sénateur Pratte : Dans le même paragraphe, vous parlez de la situation du marché — celui-ci est très déprimé — et du fait que vous devez concurrencer des producteurs de miel d'autres pays qui ne respectent aucune norme.

Notre comité s'est également penché sur l'accès aux marchés pour les produits agricoles et le commerce international.

Le fait que nos producteurs doivent concurrencer des producteurs d'autres pays où il n'y a, semble-t-il, aucune norme est-il problématique? Le gouvernement pourrait-il intervenir d'une façon quelconque?

M. Nixon : Absolument. Je vous remercie pour cette question.

C'est un peu décourageant. Au cours des 18 derniers mois, le prix du miel a chuté de 50 p. 100, ce qui est énorme.

Selon les données de Statistique Canada sur les importations de miel, le miel importé provient de la Turquie, de la Thaïlande, de Taïwan, de l'Ukraine et du Vietnam. Autre fois, les producteurs de miel de ces pays n'étaient pas des fournisseurs importants. Tout à coup, au cours des quatre dernières années, ils se sont mis à tester le marché avec de petites quantités de miel, puis le volume a augmenté avant de redescendre un peu.

Les États-Unis sont notre principal client et ils doivent composer avec le même problème que nous, mais à plus grande échelle. Nous devons concurrencer ces producteurs sur le marché américain, mais aussi sur le marché canadien et je crois que nous devons en être conscients.

Nous avons eu des discussions récemment avec des responsables d'Agriculture et Agroalimentaire Canada pour les sensibiliser à la situation. Nous aurons besoin de l'aide de l'ACIA et de l'Agence des services frontaliers du Canada, car nous ne pouvons pas trouver les bouteilles de miel de la Turquie, de la Thaïlande et de Taïwan sur les étagères des épiceries. Alors, où va ce miel? Je crois qu'il est destiné aux entreprises. Le miel arrive par conteneur dans un port et est transporté dans un entrepôt.

L'ACIA et l'ASFC sont les seules à avoir accès à ces produits. Nous n'avons aucune capacité en Amérique du Nord pour tester ces produits afin de voir s'ils ont été frelatés. La majeure partie du miel aux États-Unis venant de ces pays est frelatée avec un autre édulcorant. Le sirop de riz est souvent utilisé. C'est du miel frelaté avec du sirop de riz et c'est illégal.

Nous devons concurrencer ces producteurs sur le marché et c'est très difficile, voire impossible. Au Canada, nous avons des normes à respecter en matière de salubrité alimentaire, de travail, d'entreposage et de production. Pourtant, nous devons concurrencer les producteurs de miel de ces pays. Cela ne peut pas fonctionner.

Après un certain temps, il devient illogique de vendre son produit à bas prix à des fins de production.

Le sénateur Pratte : Que vous disent les représentants du gouvernement? Vous écoutent-ils?

M. Nixon : Les représentants du ministère que nous avons rencontrés se sont montrés très ouverts et réceptifs. Toutefois, le temps est un facteur essentiel ici, car le marché s'est rapidement contracté et, aujourd'hui, il stagne. Selon les gens de l'industrie que nous avons consultés, il faudra attendre quelques années avant que le marché progresse, mais quelques années, c'est très long pour les fermes familiales qui reculent. Ces importations se font sournoisement. Les gens derrière ces productions sont intelligents. Les documents peuvent sembler en règle, mais nous croyons que ces documents peuvent être tout aussi frauduleux que le produit.

Il faudra ouvrir les portes des conteneurs, ouvrir les barils de miel et prendre des échantillons. Nous n'avons aucune installation d'analyse en Amérique du Nord, ce qui signifie qu'il faut acheminer les échantillons à un laboratoire en Europe pour voir si le produit a été frelaté. C'est un autre problème. Il serait utile pour notre industrie de pouvoir faire analyser ici même les produits importés. Nous pourrions avoir les résultats plus rapidement.

Le vice-président : Vous dites qu'on ne peut mener aucun test aux sites d'inspection. Est-ce que quelqu'un travaille à une solution à ce problème?

C'est la deuxième fois que nous entendons parler d'un produit pour lequel il serait utile de faire des tests à la frontière. Vous parlez du miel frelaté, mais il y a aussi la volaille de réforme; nos voisins du sud exportent plus de volaille de réforme qu'ils arrivent à en produire, un truc intéressant pour qui sait comment s'y prendre. Il existe un test pour la volaille de réforme, mais il ne peut pas être utilisé à la frontière.

Est-ce que quelqu'un travaille à l'élaboration d'un test plus efficace?

M. Nixon : Je crois que les tests sont élaborés en fonction de la prochaine brèche.

À ma connaissance, il n'y a rien en cours d'élaboration en Amérique du Nord. Il existe quelques laboratoires en Europe; j'en connais un en Allemagne et je crois savoir qu'il y en a un autre en France. Auparavant, on pouvait analyser un produit pour y trouver la présence de sucres de catégorie 3 et 4, mais les producteurs de miel des pays mentionnés plus tôt semblent avoir trouvé une façon de dissimuler la présence de ces sucres. Donc, en Europe, on utilise une nouvelle technologie pour effectuer ces tests, soit la résistance magnétique nucléaire. À ma connaissance, aucun laboratoire en Amérique du Nord n'est en mesure d'effectuer un test de RMN.

Le vice-président : Dans quel beau monde nous vivons : on dope les athlètes et on frelate le miel.

Le sénateur Ogilvie : En fait, il existe, au Canada, toutes sortes de centres de résonance magnétique nucléaire au Canada. Il y en a beaucoup dans le milieu universitaire. Nous disposons d'excellents centres.

Ce que vous vouliez dire, à mon avis, c'est que les agents aux frontières n'ont pas accès à cette technologie, mais cela ne signifie pas que nous n'avons pas cette technologie au pays. Elle est très présente. Il serait très simple de remettre un échantillon à un laboratoire universitaire pour chercher la présence des particules d'hydrogène ou de carbone précises associées à un sucre en particulier pour confirmer si un produit a été frelaté.

M. Nixon : C'est bon à savoir. Je me fiais aux renseignements fournis par l'ACAP.

Le sénateur Ogilvie : Ce que dit l'ACAP, c'est qu'elle n'a pas, elle-même, un test qu'elle peut utiliser à la frontière. Mais, le Canada possède une technologie de RMN très avancée et les Américains sont des chefs de file dans ce domaine.

Le vice-président : C'est une excellente suggestion, sénateur Ogilvie. Il est malheureux que nous n'ayons pas eu cette discussion avant de rédiger notre rapport.

Compte tenu du nombre de centres de RMN dont nous disposons au pays, le ministère pourrait se joindre à quelques universités pour créer — il n'est pas nécessaire de tout analyser. Il suffit de faire quelques tests pour que les gens sachent que les produits sont analysés. Les producteurs des produits frelatés seront un peu nerveux et disparaîtront.

La sénatrice Beyak : Merci beaucoup.

Les petites entreprises nous disent souvent que la surréglementation est un des principaux problèmes auxquels elles sont confrontées, alors je peux comprendre ce que vous dites au sujet des gros manuels. Tout ce que veulent les producteurs, c'est élever leurs abeilles et produire du miel. Ils ne veulent pas lire des manuels.

Vous dites que les représentants d'Agriculture et Agroalimentaire Canada se sont montrés très coopératifs et réceptifs. Vous ont-ils offert des solutions ou parlé de modèles utilisés ailleurs et qui pourraient fonctionner ici?

M. Nixon : Non, nous n'avons pas encore parlé de solutions. Nous avons également entrepris des discussions avec l'ACIA et l'ASFC, par l'entremise de personnes-ressources au ministère, et je crois que les prochaines étapes devraient s'amorcer très bientôt.

Le vice-président : Merci. Au début de votre intervention, vous avez parlé de la diversité des abeilles au pays. Je savais que nous, les Canadiens, étions diversifiés, mais j'ignorais que notre population d'abeilles l'était également. À quoi faites-vous référence lorsque vous parlez de diversité? Parlez-vous de différentes espèces d'abeilles domestiques?

M. Nixon : Pour la plupart, les apiculteurs utilisent la même espèce d'abeilles, soit l'abeille domestique européenne, mais il y a quelques espèces différentes qui demandent des comportements hygiéniques différents.

Ce à quoi je faisais référence dans ma première recommandation sur la diversité au pays est l'accessibilité aux abeilles des États-Unis. Pour l'heure, nous avons accès aux abeilles de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et du Chili, et nous pouvons obtenir des reines d'Hawaï et des États continentaux des États-Unis, pourvu que ces autres pays qui fournissent des paquets d'abeilles...

Certains de nos membres aimeraient avoir accès aux abeilles ouvrières des États-Unis, comme c'était le cas dans les années 1980. Pour des raisons phytosanitaires, cet accès a été interdit, mais certains de nos membres soutiennent qu'il faudrait explorer cette source d'abeilles pour notre industrie.

À certains moments, des régions du pays ont connu de grosses pertes. Lorsque l'on considère le prix élevé à payer pour importer des abeilles de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, on se questionne sur la logique de cette pratique, alors que notre voisin pourrait nous fournir en abeilles. Par ailleurs, certains de nos membres s'opposent farouchement à cette idée et prétendent qu'il y a encore de bonnes raisons pour ne pas rouvrir l'accès à ce marché.

Le sénateur Ogilvie : Monsieur Nixon, en réponse à une des questions du sénateur Pratte, vous avez dit que le frelatage du miel préoccupe de plus en plus au pays. Il s'agit aussi d'un risque pour la santé humaine. Vous êtes en Alberta, c'est exact? Vous êtes près de quelle ville?

M. Nixon : De Calgary.

Le sénateur Ogilvie : L'Université de Calgary dispose d'un excellent centre. D'ailleurs, toutes les universités de la province — l'Université de Calgary et l'Université de l'Alberta — disposent d'un centre de renommée mondiale. On retrouve aussi un centre à Lethbridge. Je vous encourage à discuter avec des représentants de ces établissements au sujet de la résonnance magnétique nucléaire et à transmettre les résultats de ces discussions au gouvernement. Il n'y a aucune raison pour laquelle l'analyse d'un simple échantillon de miel potentiellement frelaté importé au pays prenne deux ans. Nous utilisons la technologie de RMN pour dépister des maladies chez l'humain. Il s'agit d'une technologie très avancée pour laquelle nous avons une expertise simplement incroyable et deux des meilleures universités au pays dans le domaine se trouvent dans votre province.

Donc, je vous encourage à entreprendre ces démarches dès que possible. J'ignorais que l'industrie était en attente d'un test pour régler ce problème qui fait les manchettes depuis un certain temps. C'est essentiel, non seulement pour l'industrie en raison de la chute libre des prix, comme vous l'avez souligné — je suis personnellement ce dossier —, mais aussi en raison des risques que posent les produits frelatés pour la santé humaine. Ces produits proviennent de pays où le frelatage ne se limite peut-être pas à l'utilisation du sirop de riz. Je vous encourage fortement à amorcer ces discussions dès que possible. Je vous assure que c'est simple. Les tests doivent être faits par des experts, mais ceux-ci ne sont pas difficiles à trouver.

M. Nixon : Je vous remercie de cette information. Nous allons certainement en tenir compte. Toutefois, nous aurons tout de même besoin de l'aide des ministères pour mettre la main sur ces produits, car nous n'y avons pas accès.

Le sénateur Ogilvie : Oui, mais si vous avez l'aide d'une université pour faire ces tests, vous pourrez alors discuter de la question avec les représentants du gouvernement. Ils n'auront aucune raison de se traîner les pieds dans ce dossier si important.

M. Nixon : Merci.

Le vice-président : Si vous entreprenez ces démarches, revenez nous voir pour nous dire comment vont les choses. Peut-être trouverez-vous un étudiant au postdoctorat qui accepterait de se charger de ce projet.

Vous avez également parlé de l'importation des abeilles et d'où elles viennent. Si j'ai bien compris, le seul endroit au pays où les abeilles sont relativement isolées, c'est à Terre-Neuve. Puisque l'isolation est un des facteurs associés au développement des abeilles dans cette province, a-t-on songé à exporter ces abeilles ailleurs au pays?

M. Nixon : Je sais que les abeilles à Terre-Neuve ont été bien protégées au fil des ans.

Le vice-président : Tout comme la province elle-même.

M. Nixon : Les producteurs ont réussi à préserver la santé de leurs abeilles domestiques. Malheureusement, la quantité d'abeilles disponible à Terre-Neuve est très petite. Leur nombre est grandement insuffisant pour la commercialisation.

Le vice-président : Mais, si le marché était là, si l'on se mettait à importer des abeilles? Comme on dit : « Construisez- la, et ils viendront. » Les Terre-Neuviens sont des gens travaillants.

M. Nixon : Il y a une raison pour laquelle la population d'abeilles est si petite à Terre-Neuve. Je ne crois pas que ce soit un bon endroit où importer et élever des abeilles à des fins de reproduction pour les producteurs canadiens. Il est très difficile dans ce climat d'élever des abeilles. C'est la raison pour laquelle, selon moi, on ne retrouve aucune exploitation apicole commerciale à Terre-Neuve.

Le vice-président : Monsieur Nixon, merci beaucoup de votre exposé. Je tenais à souligner une annonce qui a été faite — et je ne sais pas si c'était dans tout le pays, car je vis en Nouvelle-Écosse, mais j'en ai eu vent, et sans doute le sénateur Ogilvie aussi. On a annoncé il y a environ une semaine en Nouvelle-Écosse l'octroi de fonds du gouvernement fédéral pour contribuer à augmenter le nombre d'abeilles dans la province. Je pense que le comité s'en attribue le mérite, que ce soit grâce à nos travaux ou non.

Nous aimerions vous remercier du travail que vous faites au Conseil canadien du miel et nous vous souhaitons beaucoup de succès dans le cadre de vos activités.

Chers collègues, je veux vous rappeler qu'à la fin de la deuxième partie de la réunion, nous devrons passer à huis clos pendant quelques instants. Je pense que ce sera très bref. Nous devons seulement approuver quelques petits points pour que je puisse faire un exposé à la Chambre demain, ce que nous n'avons pas fait la dernière fois que nous avons discuté de notre prochaine étude. Nous devons donc clarifier quelques points, puis nous pourrons lever la séance.

Honorables sénateurs, nous entendrons maintenant les déclarations de nos prochains témoins : de l'Association canadienne du commerce des semences, nous accueillons M. Todd Hyra, le deuxième vice-président, et M. Dave Carey, gestionnaire, Affaires gouvernementales et politiques; de CropLife, nous recevons M. Dennis Prouse, vice-président, Affaires gouvernementales, et M. Pierre Petelle, vice-président (Chimie), qui aidera à répondre aux questions; et des Producteurs de grains de l'Ontario, nous avons parmi nous M. Marcus Haerle, vice-président.

Merci d'avoir accepté notre invitation à comparaître. J'invite les témoins à faire leur déclaration. Je leur rappelle également que la durée de leur exposé doit être de cinq à sept minutes maximum, s'il vous plaît.

Après les déclarations, chaque sénateur posera des questions aux témoins. Nous leur accorderons à chacun cinq minutes pour poser leurs questions avant que la présidence cède la parole à un autre sénateur. Il y aura autant de séries d'interventions que le temps le permettra, alors les sénateurs ne devraient pas se sentir obligés de poser toutes leurs questions à la fois. Durant la période des questions, je demande à tout le monde d'être bref.

Avant de débuter la séance, j'aimerais présenter mes collègues, en commençant à ma gauche, avec la sénatrice Petitclerc.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Bonjour, mon nom est Chantal Petitclerc, sénatrice.

[Traduction]

Je suis une ancienne athlète paralympique et une nouvelle sénatrice. Je suis très heureuse d'être ici.

La sénatrice Beyak : Sénatrice Lynn Beyak, de l'Ontario. Bienvenue.

[Français]

Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Unger : Sénatrice Betty Unger, d'Edmonton, en Alberta.

Le sénateur Plett : Don Plett. Je suis du Manitoba.

Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, de la Nouvelle-Écosse.

Le vice-président : Je suis le sénateur Terry Mercer, également de la Nouvelle-Écosse, et je suis le vice-président du comité.

Qui prendra la parole en premier? Monsieur Hyra?

Todd Hyra, deuxième vice-président, Association canadienne du commerce des semences : Monsieur le président, et mesdames et messieurs les membres du comité, bonsoir. Au nom de l'Association canadienne du commerce des semences, ou l'ACCS, j'aimerais remercier le comité de son invitation à discuter de notre position quant à l'importance de la santé des abeilles pour favoriser une production alimentaire durable au Canada.

Je suis Todd Hyra. Je suis le deuxième vice-président du conseil d'administration de l'Association canadienne du commerce des semences. Je travaille également pour SeCan, une entreprise membre de l'ACCS, en tant que directeur administratif pour l'Ouest du Canada. Je vais partager mon temps de parole aujourd'hui avec Dave Carey, gestionnaire des Affaires gouvernementales et politiques à l'ACCS.

L'ACCS est le porte-parole national de l'industrie des semences au Canada. Nous sommes une association non partisane et sans but lucratif regroupant 128 entreprises membres qui participent à tous les aspects de l'industrie des semences, que ce soit à la recherche, au développement, à la sélection végétale, à la production et au marketing, ou aux ventes, tant au Canada qu'à l'étranger.

Nos membres utilisent plus de 50 variétés de semences et répondent aux besoins de leurs clients en élaborant et en fournissant des semences produites par diverses méthodes, que ce soit des méthodes biologiques, conventionnelles ou biotechnologiques. Nous comptons à la fois des fermes familiales et de grandes entreprises multinationales parmi nos membres. Les retombées économiques de l'industrie des semences s'élèvent à 5,61 milliards de dollars par année. L'industrie emploie plus de 57 000 Canadiens et génère plus de 450 millions de dollars en exportations.

Les membres de l'ACCS sont fiers d'apporter une contribution vitale à l'économie nationale et à la santé et au bien- être des consommateurs canadiens et étrangers. Nos membres appuient collectivement l'énoncé de mission de l'ACCS : encourager l'innovation et le commerce dans l'industrie des semences. Les semences représentent une première étape essentielle dans la production alimentaire et sont le point de départ dans la chaîne de valeur agricole. Neuf bouchées de nourriture sur dix dans le monde débutent par la mise en terre d'une semence.

L'industrie des semences et l'ACCS comprennent pleinement l'importance des pollinisateurs et sont reconnaissants au Comité de l'examen approfondi qu'il effectue et du rapport qu'il produira pour évaluer toutes les répercussions de la santé des pollinisateurs. Les agriculteurs dans le monde entier sont confrontés au défi de nourrir, de vêtir et d'approvisionner en carburants la population mondiale sans cesse grandissante. Grâce à son climat propice, à la diversité de ses terres et à ses agriculteurs innovateurs, le Canada est bien placé pour faire figure de chef de file mondial dans le cadre des efforts déployés pour relever ces défis.

L'industrie des semences au Canada est prête à offrir des variétés de cultures qui sont plus productives, à faire une meilleure utilisation de l'eau et des éléments nutritifs, à assurer la santé et le bien-être des gens, et à non seulement réussir dans des conditions environnementales défavorables, mais à également contribuer à protéger et à améliorer l'environnement.

L'ACCS s'est engagée à continuer de collaborer avec les agriculteurs, l'industrie, les apiculteurs, les décideurs et les organismes de réglementation à l'élaboration et à la mise en œuvre de mesures qui continueront à fournir aux agriculteurs les outils dont ils ont besoin tout en protégeant nos pollinisateurs.

Merci. Je vais céder le reste de mon temps à Dave Carey.

Dave Carey, gestionnaire, Affaires gouvernementales et politiques, Association canadienne du commerce des semences : Merci, Todd, et merci encore une fois à vous, mesdames et messieurs les membres du comité, non seulement de nous avoir invités à être ici aujourd'hui, mais aussi du travail considérable que vous faites dans cet important dossier.

Le conseil d'administration de l'ACCS et nos entreprises membres accordent énormément d'importance à la santé des abeilles et au bien-être des pollinisateurs. L'industrie des semences reconnaît que les pollinisateurs et les produits de protection des cultures sont des éléments complémentaires et essentiels d'un système d'agriculture viable et que nous devons assumer un rôle d'intendance en tant qu'entreprises de semences.

Par conséquent, l'ACCS participe à plusieurs activités et initiatives pour appuyer et promouvoir la santé des pollinisateurs, ce qui comprend, comme l'a mentionné plus tôt le Conseil canadien du miel, la Table ronde sur la santé des abeilles d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. En septembre 2013, l'ACCS a écrit une lettre au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire à l'appui de la proposition de créer une table ronde sur la chaîne de valeur nationale pour discuter de la santé des abeilles de façon holistique. Depuis la mise sur pied de la table ronde, l'ACCS a participé en tant que membre du comité directeur, du groupe de travail sur les communications et du Groupe de travail sur le contrôle des pesticides.

L'ACCS croit fermement que la santé des abeilles doit être abordée à l'échelle nationale. Précieuses abeilles est une initiative dirigée par l'industrie qui a pour but d'éduquer les Canadiens sur l'importance des abeilles domestiques et sur les nombreux facteurs qui nuisent à la santé de ces abeilles. Une partie du projet est une initiative intitulée Jardins bourdonnants, qui offre aux Canadiens la possibilité de recevoir des semences gratuites pour planter leur propre jardin pour pollinisateurs. L'ACCS est fière d'être partenaire de ce programme puisque nos entreprises membres fournissent les semences.

Afin de respecter l'engagement du secteur des semences envers la santé, la sécurité et l'environnement, l'ACCS et l'Association canadienne des producteurs de semences se sont associées pour créer le Guide d'intendance des semences traitées, qui comprend des pratiques exemplaires en matière de manipulation, d'entreposage, de transport, d'utilisation et d'élimination des semences traitées. Le guide aidera ceux qui travaillent avec des semences traitées à élaborer et à mettre en œuvre leur propre plan d'intendance, à respecter la réglementation provinciale et territoriale et à maintenir des activités respectueuses de l'environnement.

La dernière initiative que je vais mentionner aujourd'hui est AgriRÉCUP. C'est un organisme de gérance de l'industrie sans but lucratif qui attache une grande importance à la responsabilité environnementale en assurant une gestion adéquate des déchets agricoles. L'ACCS, en collaboration avec AgriRÉCUP et l'industrie, a contribué à créer le programme de collecte des contenants de pesticides et de fertilisants, qui fournit aux agriculteurs un moyen sécuritaire et responsable de se défaire des sacs de semences et des sacs utilisés dans les projets de protection des semences. Il y a encore du travail à faire, mais nous sommes sur la bonne voie. Nous observons des résultats positifs.

En janvier 2016, l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada a rendu public un rapport provisoire qui a conclu que l'utilisation de produits de traitement des semences ne présente pas de risque potentiel pour les abeilles. En février 2016, Statistique Canada a publié des données qui ont révélé que le nombre de colonies d'abeilles au Canada avait augmenté de 73 000 entre 2010 et 2014. Enfin, en juillet 2016, l'Association canadienne des professionnels de l'apiculture, ou l'ACPA, a publié sa déclaration sur les pertes hivernales d'abeilles domestiques pour 2015, dans laquelle elle fait état que le pourcentage national de pertes hivernales de colonies était de 16,4 p. 100, ce qui est l'une des pertes les plus faibles depuis l'année 2006-2007 et représente une baisse de 34,4 p. 100 par rapport à l'année 2013-2014.

Nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions. Nous appuyons votre rapport et le travail que vous avez fait. Merci.

Le vice-président : Merci beaucoup. Le prochain témoin est M. Prouse.

Dennis Prouse, vice-président, Affaires gouvernementales, CropLife Canada : Merci, monsieur le président. Comme vous l'avez mentionné plus tôt, je suis accompagné de mon collègue, Pierre Petelle, qui est notre vice-président de la division de la chimie. Nous sommes ravis de discuter aujourd'hui de la réponse du gouvernement au rapport du comité, du rapport en soi et, de façon plus générale, de l'état de santé des pollinisateurs au Canada à l'heure actuelle.

CropLife Canada est l'association commerciale qui représente les manufacturiers, les concepteurs et les distributeurs des technologies de la phytologie, y compris les produits de protection des cultures et ceux de la biotechnologie végétale utilisés en agriculture, dans les milieux urbains et à des fins de santé publique. Certains seront peut-être surpris d'apprendre que nos membres conçoivent des produits à utiliser dans les ruches pour les protéger contre des organismes nuisibles tels que les acariens varroa et divers insectes prédateurs.

Nous nous efforçons de nous assurer que les bénéfices des innovations en phytologie profitent à la fois aux agriculteurs et aux consommateurs. L'organisme CropLife Canada encourage les pratiques agricoles durables et s'est engagé à protéger la santé humaine et l'environnement.

Nous travaillons très étroitement avec de nombreux groupes d'intervenants, dont certains sont à mes côtés aujourd'hui. Nous sommes fiers du fait que tous les grands groupes de producteurs du Canada font partie de notre partenariat GrowCanada.

Dans l'ensemble, nous sommes ravis que le comité ait eu la sagesse de produire un rapport approfondi sur la santé des abeilles l'an dernier. Le rapport du comité reconnaît clairement que la santé des pollinisateurs est un enjeu complexe et que les défis auxquels sont confrontés les pollinisateurs comportent de nombreux facteurs. Les recommandations qui ont été présentées au gouvernement étaient réfléchies et tenaient compte du vaste éventail d'intervenants en cause.

Par ailleurs, nous sommes ravis de l'approche que le gouvernement du Canada a prise en ce qui concerne la santé des pollinisateurs. Agriculture et Agroalimentaire Canada a pris des mesures concrètes, dont la mise sur pied d'une table ronde nationale sur la santé des abeilles et la création de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada, et a continué d'adopter une approche axée sur la collaboration et sur la science à l'égard de la réglementation des pesticides, tant pour le traitement contre les acariens varroa dans les ruches que pour les pesticides à base de néonicotinoïdes qui sont essentiels à l'agriculture moderne. L'ARLA continue de collaborer avec l'Environmental Protection Agency des États-Unis et, plus tôt cette année, elle a annoncé la décision de procéder à une réévaluation préliminaire de l'un des trois pesticides agricoles à base de néonicotinoïdes les plus couramment utilisés. L'ARLA a conclu que ce produit est sécuritaire lorsqu'il est utilisé conformément aux indications et ne présente pas un risque indu pour les populations d'abeilles.

Nous jugeons utile d'examiner quelques-unes des percées qui ont été effectuées en matière de santé des pollinisateurs au Canada depuis la dernière fois que le comité a étudié la question. Nous savons qu'en 2016, les rapports d'incidents présentés à l'ARLA de mortalité chez les abeilles sont en baisse, ce qui maintient la tendance des nombres moins élevés d'incidents enregistrés en 2014 et en 2015 au moment de la plantation; c'est en fait une réduction de 85 p. 100 par rapport aux niveaux de 2013. Nous nous attendons à ce que l'ARLA publie un rapport sommaire plus tard cette année.

Nous savons également qu'en 2015-2016, les pertes hivernales étaient très faibles : 16,8 p. 100 au total pour le Canada et 17,9 p. 100 pour l'Ontario. Il convient également de souligner que les pesticides n'ont pas été mentionnés par les apiculteurs comme étant un facteur qui contribue grandement aux pertes hivernales partout au Canada.

Le nombre de colonies d'abeilles gérées au Canada est passé à plus de 700 000 pour la première fois depuis les années 1980. Ce n'est pas un hasard si c'était juste avant l'arrivée du varroa au Canada et l'interdiction frappant l'importation de reines en provenance des États-Unis. Le nombre de colonies d'abeilles domestiques qui sont gérées en Ontario et au Québec est passé à plus de 100 000 en Ontario et à plus de 50 000 au Québec. Ces chiffres augmentent de façon constante depuis le début des années 2000, lorsque les premières semences traitées aux néonicotinoïdes ont commencé à être utilisées dans ces provinces.

Dans l'ensemble de l'industrie, on a enregistré une collaboration sans précédent au sein de la chaîne des valeurs pour les initiatives pour la santé des abeilles domestiques. Des pratiques de gestion exemplaires ont été élaborées pour les agriculteurs, des efforts de sensibilisation et d'éducation ont été déployés, le texte des étiquettes sur les sacs de semences a été changé, de nouveaux lubrifiants pour les boîtes de semences et du nouvel équipement de semis ont été adoptés et des recherches sur les polymères sont en cours. Les progrès accomplis en si peu de temps par le secteur agricole pour répondre aux préoccupations concernant l'incidence de l'ensemencement sur les pollinisateurs sont remarquables. Les chiffres globaux le démontrent.

Nous sommes également extrêmement fiers de deux autres initiatives : notre application BeeConnected et notre initiative Précieuses abeilles. L'application BeeConnected a été élaborée conjointement avec le Conseil canadien du miel pour améliorer les communications entre les apiculteurs et ceux qui épandent des pesticides, tant les agriculteurs que les applicateurs professionnels. Les apiculteurs peuvent découvrir où et quand des pesticides seront utilisés, et ceux qui utilisent les produits peuvent localiser les ruches, et les deux parties peuvent communiquer ensemble. Elle s'inspire d'une application semblable qui a porté fruit en Australie, que l'on a adaptée pour le Canada. Les apiculteurs et les utilisateurs de pesticides la trouvent très utile, et nous espérons que sa popularité continuera d'augmenter.

Notre initiative Précieuses abeilles est une campagne d'éducation du public qui a été lancée par CropLife Canada et qui est appuyée par un certain nombre de nos entreprises membres et de groupes de producteurs, tels que nos amis de l'organisation Grain Farmers of Ontario. En plus de mieux informer les Canadiens sur les faits importants au sujet des pollinisateurs, l'initiative Précieuses abeilles a distribué plus de 65 000 sachets de semences de fleurs sauvages sans danger pour les pollinisateurs à des Canadiens qui fournissent des habitats précieux aux abeilles. Pour faciliter la distribution de ces semences, nous avons commandité la campagne Collectivités en fleurs à l'échelle nationale et avons établi un partenariat avec elle.

Enfin, nous sommes très fiers de notre partenariat avec Conservation de la nature Canada. Notre partenariat a permis à Conservation de la nature de ramener à son état naturel une petite parcelle de terre dans le comté de Norfolk, en Ontario, en mettant l'accent sur un habitat sans danger pour les pollinisateurs. Il a permis à Conservation de la nature Canada d'étudier les habitats les plus efficaces pour la préservation et la culture des végétaux sans danger pour les pollinisateurs sauvages.

La santé des abeilles est une question complexe et continuera de jouer un rôle important pour les agriculteurs et les apiculteurs. La situation actuelle au Canada est bonne, et nous sommes fiers de faire notre part.

La situation est bonne malgré les restrictions punitives inutiles qui sont imposées aux producteurs de l'Ontario concernant l'utilisation de semences traitées. Nous nous réjouissons qu'à l'échelle fédérale à tout le moins, la science l'emporte sur les politiques dans ce dossier.

Pour terminer, nous sommes ravis de voir que le rapport du comité et la réponse du gouvernement ont examiné la question d'un point de vue global fondé sur des données scientifiques. Nous continuons de travailler avec l'ARLA de Santé Canada et Agriculture et Agroalimentaire Canada sur un vaste éventail de questions associées à la santé des pollinisateurs. Nous croyons que les pollinisateurs et l'agriculture moderne ont besoin l'un de l'autre et peuvent s'épanouir ensemble, et nous croyons que nos actions et nos réalisations jusqu'à présent avec nos intervenants partenaires sont la preuve de cet engagement.

Merci de l'invitation. Nous avons hâte de répondre à vos questions.

Markus Haerle, vice-président, Producteurs de grains de l'Ontario : Au nom de nos 28 000 membres, je vous remercie de l'occasion que vous nous offrez de présenter notre point de vue sur le secteur des céréales et des oléagineux en Ontario.

Nous sommes heureux de la publication du rapport du gouvernement sur le rapport de votre comité sur l'importance de la santé des abeilles pour une production alimentaire durable. Les problèmes de santé des abeilles ont été une priorité de notre organisation et de nos membres.

Nous avons participé activement à la Table ronde du gouvernement sur la santé des abeilles, et nos membres ont modifié leurs pratiques agricoles pour protéger la santé des abeilles.

Beaucoup d'activités soulignées dans le rapport du gouvernement découlent du travail réalisé pendant la table ronde, et nous sommes heureux des progrès dont fait état le rapport.

Les Producteurs de grains de l'Ontario reconnaissent l'importance des abeilles dans notre environnement naturel et leur importance pour la pollinisation de nombreuses cultures. Tout en comprenant qu'il faudra du temps pour digérer les données sur la santé des abeilles, nous comprenons aussi que leur santé s'améliore; on signale notamment moins de mortalité due à l'exposition aux pesticides.

Non seulement notre organisation a-t-elle contribué à la table ronde, mais elle a aussi consacré d'importants efforts pour mieux montrer l'importance de la santé des abeilles à ses membres et collaborer avec les organismes de réglementation. Nos membres ont pris des mesures pour réduire l'exposition aux pesticides néonicotinoïdes, ils ont contribué à la qualité de l'habitat des abeilles sur leurs exploitations agricoles et ils ont adopté de meilleures pratiques culturales en modifiant leurs méthodes d'ensemencement, en ayant à l'esprit la santé des abeilles.

Les agriculteurs ontariens reconnaissent la nécessité de traitements insecticides des semences de maïs pour protéger les semences, les semis et les plantes. Dans l'année du lancement d'un lubrifiant qui permettait de réduire l'exposition des abeilles aux poussières de pesticides néonicotinoïdes pendant l'ensemencement du maïs et du soja, plus de 90 p. 100 de nos membres l'ont adopté, ce qui a entraîné une baisse immédiate de la mortalité des abeilles.

Non seulement le traitement des semences a-t-il réduit le risque d'exposition des pollinisateurs, mais il a aussi aidé les agriculteurs en améliorant la santé, la résilience et le rendement de leurs cultures. Les restrictions imposées aux produits de traitement obligent les agriculteurs ontariens à employer d'autres formes de lutte antiparasitaire, notamment les pulvérisations foliaires qui pourraient augmenter le risque d'exposition des organismes non visés comme les abeilles, ou des produits moins efficaces qui leur coûtent quatre fois plus cher.

Les pesticides sont indispensables à nos producteurs pour nourrir une population mondiale croissante tout en respectant l'environnement. Sans eux, le monde perdrait au moins 40 p. 100 de son approvisionnement alimentaire. Pour certaines cultures, les pertes pourraient atteindre 80 p. 100. Ce serait simplement une catastrophe mondiale.

Dommage que le gouvernement de l'Ontario, avant d'imposer une interdiction presque absolue des néonicotinoïdes dans la province, n'ait pas attendu de voir que les mesures appliquées par les agriculteurs et le gouvernement fédéral ont amélioré la santé des abeilles. Nos membres ne peuvent pas concurrencer les autres producteurs canadiens dans une cacophonie de règlements sur les intrants agricoles. Nous avons besoin de l'uniformité nationale des règlements sur le traitement des semences aux néonicotinoïdes. Nous avons l'espoir qu'on lèvera l'interdiction dans un proche avenir et que tous, gouvernements et joueurs, tireront les leçons de cette expérience.

Nous sommes heureux de poursuivre notre engagement à l'égard de la santé des abeilles. En agriculture aussi l'union fait la force. La valeur des productions céréalières de l'Ontario, qui dépasse les 9 millions de dollars, devrait continuer à augmenter. Nous voudrions que notre industrie soit une priorité des gouvernements et des décideurs. Beaucoup de défis nous attendent, et c'est ensemble que nous pourrons mieux les relever.

Je vous remercie de m'avoir accordé la parole.

Le vice-président : Merci. Je pense que vous avez encore contribué à notre édification à tous, nous les membres du comité et nos téléspectateurs. Le processus que nous avons suivi et l'étude de l'emploi de pesticides agricoles qui influent sur la santé des abeilles ont été fascinants pour les membres du comité. J'en suis membre depuis 12 ans et je peux l'affirmer, le processus a soulevé beaucoup d'intérêt et d'attention. Nous espérons que cela aura été utile.

Passons aux questions.

[Français]

Le sénateur Dagenais : L'Ontario et le Québec ont adopté des mesures pour réduire l'utilisation des semences traitées aux néonicotinoïdes. À moins que vous ne pensiez le contraire, il s'est avéré que ces pesticides ont nui aux abeilles et à leur reproduction. En passant, la réduction du taux de mortalité des abeilles en Ontario est assez importante.

Quant aux semences non traitées, y en a-t-il suffisamment pour effectuer un virage national dans le domaine de la production et éviter ainsi la mortalité précoce des abeilles? J'ai cru comprendre, monsieur Haerle, que vous étiez plus ou moins d'accord, car, même si on utilise des semences sans néonicotinoïdes, il faut tout de même produire le grain.

J'aimerais entendre votre opinion à ce sujet. L'Ontario et le Québec ont été des précurseurs de l'utilisation de semences avec moins de néonicotinoïdes. Seriez-vous prêts à ce qu'on adopte la même méthode dans d'autres provinces?

M. Haerle : Pour ma part, en tant qu'agriculteur, je le vis quand je fais les semences. La réduction est à deux niveaux. Présentement, nous avons des produits qui ne sont pas basés sur les néonicotinoïdes, ce qui signifie que nous avons des choix. De plus, selon la réglementation de l'Ontario, nous devons justifier le besoin pour l'utilisation d'un produit. Cela veut dire qu'un agriculteur doit faire une étude sur son terrain. Si les tests démontrent la présence d'insectes, cela justifie le besoin.

Mais le besoin est aussi de protéger notre investissement, qui est très important. Nous ne pouvons nous permettre une perte de rendement qui serait liée à l'inaccessibilité du produit dont nous avons besoin. C'est un problème en Ontario spécifiquement, et je crois que, au Québec, on est en train de prendre le même chemin. Nous ne serons plus compétitifs vis-à-vis de nos partenaires dans notre propre pays.

Nous sommes désavantagés, et c'est le fermier qui en pâtit, car ce n'est pas seulement l'industrie qui va absorber les pertes. Notre organisation a travaillé très fort avec les producteurs que nous représentons pour réduire le besoin de recourir à ces produits-là. Nous allons continuer à travailler dans ce dossier, tout comme mes collègues et partenaires ici présents aujourd'hui, qui collaborent avec les compagnies pour présenter des produits qui sont moins nuisibles aux abeilles, dans le but d'améliorer la situation. Nous reconnaissons qu'il peut y avoir un effet, mais ce n'est pas la seule cause de la mortalité des abeilles.

[Traduction]

Pierre Petelle, vice-président (Chimie), Croplife Canada : Je dois seulement préciser que le règlement ontarien s'appliquera graduellement. La réduction de l'importante mortalité hivernale a précédé la prise d'effet des restrictions en Ontario. Ce n'est pas comme si ces restrictions avaient amélioré la survie hivernale des abeilles ontariennes. Les deux phénomènes sont complètement indépendants. Je voulais le faire observer.

Ensuite, un néonicotinoïde employé pour traiter des semences ou tout autre pesticide, particulièrement insecticide, qui entre en contact avec un insecte comme une abeille, le tuera ou lui sera nocif, c'est évident et incontestable.

Mais nous maîtrisons le degré de toxicité. Nous essayons de trouver des produits moins toxiques pour les organismes non visés. Nous cherchons aussi, de concert avec l'organisme de réglementation, à réduire l'exposition. Quand on a trouvé les traitements de semences aux néonicotinoïdes, on a appliqué très peu de produits à une semence qu'on a déposée directement dans le sol, plutôt que d'employer un pulvérisateur sur l'ensemble du champ pour traiter toute la culture.

L'innovation dans l'application de ce produit est très évoluée et elle vise à réduire l'exposition des insectes non visés. Mais il se profère beaucoup de faussetés, parfois, sur cette technologie.

Enfin, pour compléter ce que disait M. Haerle sur la compétitivité de ses producteurs, nous avons examiné le marché canadien du maïs, qui, essentiellement, est ontarien et, dans une certaine mesure, québécois. La superficie ensemencée annuellement varie entre 3 et 4 millions d'acres, contre 100 millions, habituellement, dans le Midwest américain. Là- bas, les producteurs disposent notamment de ces outils. Les agriculteurs canadiens sont donc bien désavantagés sur le plan de la concurrence.

La sénatrice Unger : Le sénateur Dagenais a posé la question avant moi. Je vais donc me rabattre sur un terrain qui ne me semble pas sûr. Il s'agit de la recommandation de réduire le nombre d'homologations conditionnelles accordées aux substances néonicotinoïdes. Santé Canada a publié un avis selon lequel ce ministère cesserait d'en accorder.

Quelle est votre réaction à cette décision?

M. Petelle : Je pense qu'un certain nombre de témoins a essayé de clarifier la notion d'homologation conditionnelle et je sais que l'ARLA a très bien expliqué ce dont il s'agissait et ce à quoi elle était utile. Malgré tous ces renseignements, y compris ceux que nous avons fournis, le procédé reste incompris. La perception est que la décision qui y conduit est prise sans tenir compte de toute l'information disponible, ce qui n'est pas vraiment le cas.

Pour accorder l'homologation conditionnelle, il faut être convaincu de l'absence absolue de risque inacceptable. En règle générale, l'homologation conditionnelle équivaut à demander des données corroborantes qu'on ne peut obtenir qu'après que le produit a effectivement été utilisé sur le terrain. Pour l'homologuer, nous faisons certaines études, mais dans un but de recherche.

L'ARLA peut se poser des questions pendant l'évaluation, pour confirmer certaines réponses par des données obtenues à une plus grande échelle, après l'homologation du produit. En un mot, elles viennent de là.

Quant à la décision de cesser d'accorder ces homologations, nous l'acceptons tout en ayant l'impression qu'elles étaient utiles. Si, comme je l'espère, cela aide les Canadiens à mieux comprendre le système de réglementation, cela aura eu un effet positif.

Sur le plan pratique, pour nos producteurs, nous espérons que cette décision ne retardera pas les homologations et que les agriculteurs continueront de pouvoir utiliser les technologies en même temps que leurs concurrents des États- Unis, par exemple. Nous verrons bien.

La sénatrice Unger : Est-ce que ces mesures aideront à protéger la santé des abeilles?

M. Petelle : Encore une fois, une partie du problème concernant l'homologation conditionnelle de cette catégorie de composés, les néonicotinoïdes, vient d'une incompréhension, en premier lieu, de ce en quoi consiste cette homologation. Donc, cette décision, en elle-même, n'aidera en rien à la protéger. Actuellement, on fait une réévaluation exhaustive de tous les produits néonicotinoïdes. Mon collègue a mentionné que l'un d'entre eux a été l'objet d'une décision préliminaire tout à fait favorable à l'égard de son innocuité pour les abeilles.

On évalue encore deux matières actives plus importantes, en partenariat avec l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis et le service californien chargé de la réglementation des pesticides. Trois des plus importants organismes de réglementation dans le monde examinent donc le corpus des connaissances sur ces produits. L'examen sera exhaustif, comptez là-dessus.

M. Prouse : De plus, il y a les produits contre le varroa. Quand il est question d'homologations conditionnelles et de l'homologation des pesticides, certains pensent immédiatement à des produits agricoles généraux comme les néonicotinoïdes. Il est aussi question de l'autorisation de produits pour traiter les nuisibles des ruches. Il faut donc se montrer très prudent. Comme le dit le vieil adage : Attention à ne pas souhaiter n'importe quoi, vous pourriez l'obtenir.

M. Carey : Nous avons appris, du Conseil canadien du miel, qu'il avait profité de la possibilité d'une intervention rapide, ayant vu l'avantage du nouveau varroacide. Nous devons éviter les généralisations telles que les insecticides sont impossibles à améliorer de manière rapide et efficace, mais nous voulons des varroacides qui, essentiellement, sont identiques, mais qui servent dans des applications différentes. Si le Conseil canadien du miel n'en disposait pas, il serait privé d'un outil contre l'un de ses plus gros problèmes. Il est optimiste relativement à son emploi et il tient à être traité comme les autres, même si, pour le public, les insecticides ont été diabolisés, mais celui-là ne l'a pas été.

La sénatrice Unger : Et, pendant tout ce temps, nos apiculteurs doivent concurrencer ceux des États-Unis qui disposent de tous ces moyens. Cela ne me semble pas équitable.

M. Prouse : Je pense que cela montre la nécessité d'une collaboration entre l'ARLA et l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis, ce qui, heureusement, a lieu. Les deux doivent mettre en commun les données et les renseignements et harmoniser dans une certaine mesure leurs décisions. Sinon, les apiculteurs et les producteurs agricoles, en général, n'auront pas accès aux moyens dont ils ont besoin. C'est le genre de collaboration dont nous avons toujours parlé. J'espère que le Conseil canado-américain de coopération en matière de réglementation y travaille.

Heureusement, nous observons une collaboration à un certain niveau. C'est essentiel. Il peut arriver que nos agriculteurs n'ont pas accès aux outils à la disposition des agriculteurs américains. C'est un enjeu important.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Merci beaucoup de votre présentation. J'ai une question qui, je l'espère, n'est pas trop pointue. Pardonnez-moi à l'avance, mais c'est la première fois que je siège à ce comité.

J'aimerais que vous précisiez quels sont ces défis spécifiques que suscite la production biologique. Comment cela se présente-t-il dans cette problématique dynamique? Peut-être qu'il s'agit d'un trop petit marché, mais je suis curieuse de connaître les défis propres à cette culture.

M. Haerle : Je peux répondre à votre question.

[Traduction]

Le bio a sa place dans les marchés de la production d'aliments, mais une place limitée en raison des problèmes que posent d'abord l'approbation des produits qu'il peut employer et les investissements dans les infrastructures pour, par exemple, la manutention du produit fini, disons le maïs ou le soja.

Quant aux producteurs, leur difficulté est d'affronter des nuisibles contre lesquels ils sont démunis.

La germination des semis doit parfois être protégée contre la fraîcheur de notre climat. Des produits comme les néonicotinoïdes ou les agents de traitement des semences en général nous aident à protéger cet aspect de notre investissement.

La production bio occupe surtout des marchés créneaux. Encore une fois, cela dépend de leurs débouchés. Le Canada seulement ou l'exportation? Encore une fois, il y a des limites à ce qu'on peut faire, et les volumes déterminent habituellement ce qui est accepté par une production à plus grande échelle, parce que nous affrontons des défis.

M. Petelle : Il est bon d'entendre un agriculteur parler de son expérience, mais nos membres produisent aussi des pesticides approuvés pour le bio. Je tiens à mettre cela au clair.

L'autre chose que je tiens à mettre au clair, le bio doit aussi, comme l'agriculture traditionnelle, affronter les mêmes difficultés causées par les nuisibles et il doit employer des moyens et des pesticides, qui sont simplement différents, mais beaucoup seraient aussi toxiques pour les abeilles si ces insectes y étaient exposés.

Les difficultés sont semblables. Il faut dans tous les cas s'assurer de ne pas exposer accidentellement les organismes non visés, et il y a aussi la contrainte de l'absence de certains moyens qui n'existent pas.

Pour le moment, c'est un créneau. Nous estimons que l'agriculture traditionnelle, si vous tenez à l'appeler ainsi — nous préférons la qualifier de moderne —, est très soutenable, et certains des outils qu'on propose, que ce soit en génétique ou même pour la protection des cultures, continuent d'évoluer et de s'améliorer.

Le sénateur Pratt : Comme je l'ai dit, je n'ai pas participé au début de l'étude. Il me manque donc peut-être des connaissances essentielles.

Vous avez dit, en semblant insister là-dessus, que la réduction de la mortalité des abeilles, ces dernières années, n'était pas attribuable à des modifications dans l'utilisation des pesticides, certainement pas en Ontario où le nouveau règlement n'était pas encore entré en vigueur. D'après vous, quelle serait la cause de cet heureux retournement?

M. Petelle : Nous parlons ici de la mortalité hivernale. Depuis le plus loin qu'on peut reculer — et je pense que c'est en 2004 qu'on commence à obtenir de bonnes statistiques —, elle fluctue beaucoup annuellement, très en fonction de la rigueur de l'hiver.

En 2012, l'hiver a été doux en Ontario, et le taux de mortalité n'a été que de 12 p. 100. Ensuite, pendant quelques hivers assez rigoureux, il a été de 35 et de 50 p. 100. Le dernier hiver a été assez doux, et, encore une fois, les statistiques ont encore été réjouissantes.

Je simplifie trop, parce que beaucoup de facteurs influent sur la mortalité hivernale, et je suis sûr qu'un Kevin Nixon en aurait long à dire à ce sujet. Mais, très simplement, les taux de mortalité sont étroitement corrélés aux rigueurs de l'hiver, du moins dans l'Est du Canada.

En ce qui concerne les incidents signalés, une partie de la réduction s'explique par les nouveaux agents de réduction du dégagement de poussières et les pratiques améliorées de gestion que les agriculteurs ont adoptés. Une combinaison de facteurs a permis d'atténuer les taux maximaux de mortalité.

M. Carey : Dans le même ordre d'idées, je pense que Pierre l'a bien dit et que Kevin en a aussi parlé ce matin, c'est-à- dire que cela fluctue. Après le doux hiver de 2012, dont Pierre a parlé, les abeilles sont sorties plus tôt qu'à l'accoutumée, pendant l'ensemencement du maïs et du soja. Comme Markus peut en témoigner mieux que moi, elles en ont souffert.

L'industrie a réagi et a collaboré avec l'ARLA, comme je l'ai mentionné. CropLife a introduit de nouvelles exigences en matière d'étiquetage et lancé un agent de fluence qui a permis de réduire le dégagement de poussières renfermant de la matière active et produites par un effet d'abrasion pendant l'ensemencement du maïs ou du soja.

Dans l'industrie, chez les semenciers, chez les agriculteurs aussi, on est plus conscient de l'importance des communications avec les apiculteurs. Je pense que l'application BeeConnected dont CropLife a parlé a été la mesure subséquente, qui allait un pas plus loin que le simple fait de parler à son voisin. Elle met le téléphone intelligent à contribution.

Comme je l'ai dit, le phénomène fluctue, mais 2012 a en quelque sorte marqué un maximum, et l'industrie a réagi sans tarder, en collaborant avec le Conseil canadien du miel, en participant à la Table ronde nationale sur la santé des abeilles et en entrant en relation avec nos autres collègues.

Le vice-président : Je vous remercie, messieurs, de vos exposés. Je tiens à vous remercier tous d'avoir été ici. La séance a été très instructive. Ne nous oubliez pas : si vous avez vent de nouveaux renseignements, tenez-nous informés en envoyant une note à notre greffier.

Nous avons hâte de voir les effets, au printemps, particulièrement en Ontario, de l'hiver sur la population d'abeilles. Bien sûr, cela dépendra de ses rigueurs. Nous, les Canadiens, nous hivernons tous de manière différente. Merci.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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