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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule nº 50 - Témoignages du 25 octobre 2018


OTTAWA, le jeudi 25 octobre 2018

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 8 h 1, pour étudier de nouvelles questions concernant son mandat.

La sénatrice Rosa Galvez (présidente) occupe le fauteuil.

[Français]

La présidente : Bonjour à tous. Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je m’appelle Rosa Galvez, je suis une sénatrice indépendante représentant le Québec et je suis présidente de ce comité. Je demanderai maintenant aux sénateurs autour de la table de se présenter, en commençant à ma droite par le vice-président.

[Traduction]

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Richards : David Richards, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice McCallum : Mary Jane McCallum, du Manitoba.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Paul Massicotte, du Québec.

Le sénateur Mockler : Percy Mockler, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld, de la Colombie-Britannique.

[Français]

La présidente : Je voudrais aussi vous présenter, à ma droite, Sam Banks, analyste parlementaire, et la greffière du comité, Maxime Fortin.

[Traduction]

Chers collègues, notre réunion d’aujourd’hui mettra l’accent sur les rapports de la commissaire à l’environnement et au développement durable publiés cet automne.

Pour la première partie de la séance, nous accueillons la commissaire et ses collaborateurs qui présenteront les quatre rapports parus plus tôt cet automne.

Pour la deuxième partie, nous allons entendre les réponses des représentants de quatre ministères fédéraux au sujet des rapports de la commissaire.

Je suis heureuse de souhaiter la bienvenue à Julie Gelfand, commissaire à l’environnement et au développement durable, à Heather Miller, directrice principale, à James McKenzie, directeur principal, ainsi qu’à Elsa DaCosta, directrice.

Merci beaucoup de vous être joints à nous. Madame Gelfand, je vous invite à faire votre déclaration.

[Français]

Julie Gelfand, commissaire à l’environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada : Madame la présidente, je suis très heureuse d’être ici aujourd’hui pour parler de nos rapports de l’automne 2018 qui ont été présentés au Parlement le 2 octobre. Je suis accompagnée de Heather Miller, directrice principale qui a travaillé sur le rapport sur les études des effets environnementaux stratégiques, de James McKenzie, qui a travaillé sur le rapport sur les substances toxiques et d’Elsa DaCosta, qui a dirigé le chapitre sur les mammifères marins. Ce sont les experts qui sont avec moi.

Le premier de nos audits portait sur la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, laquelle établit la responsabilité du gouvernement fédéral de protéger les Canadiens et les Canadiennes des risques liés aux substances toxiques telles que le mercure, le plomb et les BPC. Cet audit est notre cinquième sur ce sujet depuis 1999, et nous continuons de relever des faiblesses inquiétantes.

[Traduction]

Le gouvernement a recensé 138 substances toxiques, comme le mercure, le plomb et les BPC, qui doivent être contrôlées avec des règlements, des plans de prévention de la pollution, des codes de pratique ou d’autres moyens.

Nous avons constaté que Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada n’avaient pas évalué si leurs plans d’action atteignaient leurs objectifs généraux ministériels. Le gouvernement ne sait donc pas dans quelle mesure il atteint son objectif de protéger les Canadiennes et les Canadiens des risques liés aux substances toxiques.

Le gouvernement a adopté 39 règlements pour contrôler ces risques. Environnement et Changement climatique Canada a fait environ 10 000 inspections en trois ans, mais plusieurs règlements, portant par exemple sur des substances comme les produits ignifuges, ont fait l’objet de peu d’inspections, ou encore d’aucune.

[Français]

Environ un cinquième des inspections a ciblé une seule substance utilisée par les nettoyeurs à sec, sans que rien n’indique que cette substance pose un risque accru pour la santé humaine ou l’environnement.

En ce qui concerne la communication avec les Canadiens, Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada ont tous deux un à rôle à jouer pour informer la population canadienne des risques liés aux substances toxiques. Nous avons constaté que la plupart de l’information versée dans leurs sites Internet était souvent difficile à trouver et très technique. Le contenu n’était pas présenté de façon à permettre à un citoyen ordinaire de trouver facilement de l’information sur les risques liés aux substances toxiques. Ces faiblesses compliquent la tâche des Canadiens et des Canadiennes qui cherchent des renseignements pour prendre des décisions informées.

[Traduction]

Passons maintenant à notre deuxième audit, qui a porté sur ce que le gouvernement a fait pour protéger les mammifères marins des menaces posées par la navigation et la pêche commerciale. On compte au Canada plus d’une quarantaine d’espèces de mammifères marins comme les baleines, les dauphins et les phoques. Quatorze populations sont inscrites sur la liste des espèces en péril.

Nous avons constaté que Pêches et Océans Canada, en collaboration avec Parcs Canada, Transports Canada, et Environnement et Changement climatique Canada, avait été très lent à prendre des mesures pour réduire les menaces qui pèsent sur les mammifères marins. Ces ministères ont à leur disposition plusieurs outils pour les protéger. Par exemple, ils peuvent créer des aires protégées, imposer des limites de vitesse aux navires, fermer ou limiter certaines pêcheries et fixer des distances sécuritaires pour l’observation des baleines.

Nous avons constaté que pour la plupart, ces outils n’ont pas été utilisés avant que la situation ne devienne critique. En 2017, 12 baleines noires de l’Atlantique Nord — chiffre qui correspond à 3 p. 100 de la population mondiale de cette espèce en péril — sont mortes dans le golfe du Saint-Laurent. C’est à ce moment-là que les ministères ont pris des mesures pour protéger quelques espèces de baleines, par exemple en fermant certaines pêcheries et en limitant la vitesse des navires dans certaines zones.

[Français]

Nous avons aussi constaté que Pêches et Océans Canada manquait de ressources et de directives pour intervenir efficacement lorsque des mammifères marins sont en détresse. Chaque année, il y a environ 900 cas de mammifères marins en détresse et il y a très peu de gens qui ont la formation nécessaire pour leur venir en aide.

Les mesures qui ont été prises récemment sont réactives, limitées et tardives. Elles viennent peut-être trop tard pour certaines espèces, comme les épaulards résidents du sud de la côte Ouest du pays, qui figurent depuis 15 ans sur la liste des espèces en péril et dont la population se chiffre maintenant à 74 individus. Les ministères doivent mener des actions soutenues pour gérer les menaces qui pèsent sur tous les mammifères marins.

[Traduction]

Je veux maintenant attirer votre attention sur les résultats de notre troisième audit. Dans cet audit, nous avons vérifié si les organismes fédéraux prenaient les mesures nécessaires pour que les considérations environnementales soient intégrées à l’information qui est fournie aux décideurs.

Cela fait cinq ans que nous auditons cette question. En 2012, notre bureau a entrepris un programme sur plusieurs années afin d’auditer les 26 organismes gouvernementaux qui sont tenus d’évaluer les répercussions environnementales positives et négatives des politiques, plans et programmes qu’ils proposent. À vrai dire, James McKenzie a mis en œuvre ce plan, et Heather Miller nous a aidés à l’achever.

En 2015, nous avons constaté que les organismes vérifiés avaient évalué moins de la moitié de leurs projets. La situation était encore pire en 2016 et en 2017.

[Français]

Cette année, étant donné la performance des années précédentes, nous avons décidé d’évaluer de nouveau les 26 organismes. Nous avons été heureux de constater qu’ils avaient évalué les impacts environnementaux de plus de 90 p. 100 des politiques, plans et programmes soumis à l’approbation du Cabinet. Ce résultat est une nette amélioration par rapport aux années précédentes.

Pour terminer, passons aux pétitions en matière d’environnement. Ces pétitions sont un outil important mis en place par le Parlement pour permettre aux Canadiens et Canadiennes de recevoir des réponses à leurs questions sur l’environnement et le développement durable de la part de ministres du gouvernement fédéral. Nous avons reçu 10 pétitions de citoyens et d’organisations pendant la dernière année. Elles abordaient entre autres le Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies et la gestion et l’élimination des déchets nucléaires. Des études de cas relatives à d’anciennes pétitions en matière d’environnement y sont aussi présentées et portent sur la responsabilité des exploitants de centrales nucléaires, les aires marines protégées, le nettoyage de déversement d’hydrocarbures provenant d’épaves et le Programme 2030.

[Traduction]

Nous avons aussi demandé aux pétitionnaires de participer à un sondage sur leur expérience. La majorité d’entre eux se sont dits déçus par les réponses des ministères, mais ils étaient disposés à se servir de nouveau du processus.

Pour récapituler, le gouvernement a encore du travail à faire du côté des substances toxiques et des mammifères marins, mais nous avons noté des progrès en ce qui concerne l’intégration des considérations environnementales aux décisions du gouvernement.

Madame la présidente, je termine ainsi ma déclaration liminaire. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

[Français]

La présidente : Merci de votre allocution. Votre bureau joue un rôle très important en matière d’audits et nous sommes très heureux de vous recevoir lorsque vous publiez ces rapports. Nous allons maintenant passer à la séance des questions et réponses.

Le sénateur Massicotte : Merci à vous tous d’être venus ici ce matin. Je m’intéresse à la question des baleines. Dans votre rapport, vous mentionnez que nous avons pris des mesures très tardivement.

L’été dernier, il y a eu de nombreuses couvertures médiatiques à cet égard et c’est ce qui se passe depuis un an ou deux. Toutefois, pourquoi n’avions-nous pas ce même défi il y a 20 ans ou 30 ans? Il y avait autant de bateaux, autant de baleines par le passé. Pourquoi aborder cette question maintenant?

Mme Gelfand : C’est une très bonne question. Il est clair que les Canadiens considèrent les mammifères marins, surtout les baleines et les dauphins, comme des espèces iconiques. On en a toujours parlé, mais maintenant, certaines espèces sont vraiment en voie d’extinction. Douze mammifères marins sont morts dans le golfe du Saint-Laurent. Donc, 3 p. 100 de la population de ces mammifères est morte. Sur la côte Ouest, il reste 74 individus d’une sous-population d’épaulards. Les gens sont inquiets. On n’a pas fait l’objet d’un audit. Pourquoi? On en entend souvent parler aux nouvelles. En tant que Canadiens, cette question nous tient à cœur. Lorsqu’on trouve une baleine morte, tout le monde se rend à la plage. Lorsqu’on trouve des dauphins entourés de glace, comme cela est arrivé récemment, les Canadiens se rendent à la plage pour offrir leur aide.

Le sénateur Massicotte : On a toujours eu autant de décès de baleines? C’est davantage médiatisé maintenant?

Mme Gelfand : Je ne peux pas vous répondre, parce qu’on n’a pas fait l’objet d’un audit.

Le sénateur Massicotte : S’ils sont moins nombreux et s’ils sont plus menacés, il devrait y avoir moins d’accidents. J’essaie de comprendre.

Mme Gelfand : On sait qu’il y a 14 populations de mammifères marins qui sont sur la liste des espèces menacées.

Le sénateur Massicotte : Quelle était la situation il y a 20 ans?

Mme Gelfand : Ils étaient encore sur la liste même avant l’adoption d’une loi sur les espèces menacées. Certaines espèces de baleines sont sur la liste des espèces menacées depuis longtemps. À une certaine époque, il y avait des baleines partout. On les chassait, on les utilisait. Au Groenland, au Japon, au Canada, on continuait à les utiliser. Certains stocks ont baissé considérablement. Il y a certaines espèces qui sont sur la liste depuis des décennies. Un comité du nom de COSEPAC se penche sur l’état des espèces menacées. Ce comité travaille depuis des décennies sur ce dossier et y travaillait même avant l’adoption de la loi sur les espèces menacées.

Le sénateur Massicotte : Vous avez mené une étude portant sur les impacts sur les espèces menacées. L’été dernier, on a eu l’impression que le gouvernement a pris des mesures extraordinaires qu’on n’avait jamais vues auparavant. Les pêcheurs se plaignent énormément parce qu’ils disent que ces mesures les affectent de manière importante. Est-ce exact?

Mme Gelfand : Vous me demandez si les pêcheurs sont touchés par ces mesures?

Le sénateur Massicotte : Oui.

Mme Gelfand : La fermeture de la pêche et la réduction de la vitesse des bateaux ont des répercussions sur l’économie à l’échelle locale. Donc, il faut trouver un équilibre entre la vie des baleines et l’économie locale des pêcheurs ou l’économie des navires.

J’ai mentionné dans mon introduction qu’il faut atteindre un équilibre et favoriser une intégration. Le dossier des baleines a parfois été considéré comme une priorité, mais cela fait des années qu’il n’a pas été décrété prioritaire.

Le sénateur Massicotte : Vous parlez des conséquences sur les baleines, notamment l’augmentation du nombre de décès, et de l’impact économique et social, mais est-ce qu’on en est à un point d’équilibre, selon vous?

Mme Gelfand : Je suis une vérificatrice. Cette décision vous appartient en tant que décideurs. Le ministère a pris des actions très tardives alors que la situation était déjà critique. Il n’y avait pas de plan de rétablissement des espèces menacées. Les plans d’action ont été mis de l’avant sur le tard. Le ministère a décidé d’agir seulement lorsque la situation est devenue très préoccupante.

Le sénateur Massicotte : Selon des articles parus dans la presse, les États-Unis ont fait pression sur le Canada pour qu’il respecte ses ententes avec eux et l’inciter à prendre ces mesures, mais non pas en raison de ses préoccupations envers les baleines. Est-ce le cas?

Mme Gelfand : Les Américains ont une loi pour protéger les mammifères marins. Le Canada n’a pas de loi. Les États-Unis ont indiqué clairement que le Canada doit être au même niveau que les États-Unis en matière de protection des mammifères marins afin que son industrie de la pêche ait accès aux marchés.

Le sénateur Massicotte : S’agit-il d’une loi canadienne ou d’une entente?

Mme Gelfand : Les Américains ont une loi visant la protection des baleines.

Le sénateur Massicotte : Exact.

Mme Gelfand : Les Américains ont dit au Canada que nous avons jusqu’en 2022 pour appliquer leurs normes en matière de protection des mammifères marins, sinon...

Le sénateur Massicotte : Sous quel prétexte peuvent-ils nous imposer cela? Est-ce dans le cadre du nouvel Accord États-Unis—Mexique—Canada?

Mme Gelfand : Il faudrait le demander au ministère. Je ne connais pas tous les détails.

Elsa DaCosta, directrice, Bureau du vérificateur général du Canada : La Loi sur les mammifères marins aux États-Unis pose des conditions sur les prises accessoires et l’empiétement des mammifères marins dans leurs pêcheries. Ils vont imposer ces mêmes conditions à tous les produits qu’ils importent des autres pays. C’est comme cela qu’ils peuvent imposer ces conditions sur nos pêches, et le Canada a jusqu’en 2022 pour satisfaire à ces conditions.

Le sénateur Massicotte : Merci.

Mme Gelfand : C’est en raison de cet enjeu que nous avons pesé nos mots dans notre rapport.

[Traduction]

La présidente : À ce sujet, j’aimerais poser une question.

Quelle est la référence canadienne pour définir une population saine? Je sais qu’après la catastrophe de l’Exxon Valdez en Alaska, on avait les chiffres sur la population d’épaulards. On pouvait faire une comparaison. On avait les chiffres de la population saine, qui a ensuite diminué. On a fait depuis un suivi annuel et on sait donc dans quelle mesure la population a récupéré. Après 50 ans, elle n’a pas récupéré.

Avons-nous une situation similaire au Canada? Oui ou non, et pourquoi?

Mme Gelfand : Je ne sais pas. Savez-vous si nous avons des données à ce sujet?

Mme DaCosta : Nous avons un seuil.

Mme Gelfand : Vous devrez poser la question au ministère.

Mme DaCosta : Les scientifiques au ministère des Pêches seraient probablement en mesure de répondre.

Mme Gelfand : Ou les scientifiques qui se sont penchés sur le plan d’action, le plan de réhabilitation ou le plan de rétablissement des espèces en péril. Espérons que l’information s’y trouve.

La présidente : Nous allons garder la question pour plus tard.

La sénatrice Seidman : J’aimerais vous poser des questions sur le rapport de l’automne 2018 sur les substances toxiques.

Dans votre exposé d’aujourd’hui, le point 5 porte sur la communication avec les Canadiens et le fait que, comme vous le dites, Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada ont un rôle à jouer pour informer la population menacée par des substances toxiques. Pourtant, vous avez constaté que la majorité de l’information versée dans leurs sites Web était difficile à trouver et très technique.

Quand on regarde le rapport complet, sous « Communication au public », il est écrit qu’il y a de graves problèmes de communication. Dans ce rapport, on arrive à la conclusion qu’Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada ont encore beaucoup de travail à faire dans certains domaines pour maîtriser efficacement les risques liés aux substances toxiques. Ils doivent également développer leurs sites Web et leur capacité à sensibiliser la population canadienne.

Tout d’abord, que se passe-t-il exactement ici? C’est assez grave, à mon avis, si nous ne pouvons pas informer correctement les Canadiens sur les substances toxiques auxquelles ils sont exposés. Quelles seraient les répercussions sur l’environnement et la santé des Canadiens?

Mme Gelfand : Nous nous sommes penchés sur le problème de la communication avec les Canadiens. Tout d’abord, Santé Canada offre des guides sur les risques que les substances toxiques présentent pour la santé. Je ne veux pas donner l’impression que rien ne s’est fait.

Ce sont des guides sur les risques pour la santé. Il y a aussi des campagnes à la radio et sur les médias sociaux. Des ateliers sont organisés. Des guides sont également préparés pour des destinataires précis, comme les parents. Il y en a un sur les effets des substances toxiques à la maison. Il existe aussi des récapitulatifs sur trois produits chimiques. Si je peux les comprendre, j’imagine que la plupart des gens le peuvent.

Il est question de 3 substances toxiques sur 138. Nous avons constaté que la plupart des documents d’information à ce sujet manquent de clarté. Ils ont souvent été produits pour l’industrie ou pour des ONG et ils sont donc très techniques. Ils n’ont pas été faciles à trouver. À vrai dire, nous avons dû tenter de les trouver nous-mêmes.

Il y avait également des lacunes dans l’information. Une grande partie des renseignements que nous avons trouvés et que nous pouvions comprendre parlaient des effets sur la santé humaine, mais il n’y en avait pratiquement pas sur les répercussions environnementales.

Nous avons formulé des recommandations visant l’amélioration des communications des ministères. Ils les ont acceptées. Nous devrions voir une amélioration, espérons-le. Vous pouvez leur demander ce qu’ils prévoient faire à cet égard.

La sénatrice Seidman : Ils ont mis un plan en place.

Mme Gelfand : Vous devrez leur demander. Ils ont accepté nos recommandations. Je n’ai pas sous les yeux leur réponse officielle.

Monsieur McKenzie, voulez-vous nous faire part de ce qu’ils ont dit dans leurs recommandations? Élaborent-ils un plan?

James McKenzie, directeur principal, Bureau du vérificateur général du Canada : Oui. Sauf erreur, le ministère, pour ajouter aux propos de la commissaire, a aussi effectué une recherche sur l’opinion publique pour l’aider à comprendre le point de vue de la population quant à la facilité d’accès aux renseignements sur les substances toxiques et à la mesure dans laquelle ils étaient faciles à comprendre.

On s’est servi des résultats de ce sondage. Fait intéressant, selon le sondage et la recherche, le gouvernement fédéral, et plus particulièrement Santé Canada, était perçu comme une importante source d’information, notamment à cause de la grande quantité de renseignements contradictoires disponibles.

D’après ce que j’ai compris, on se sert de cette information pour mettre au point une stratégie en matière de médias sociaux et de marketing pour donner suite à certaines des constatations provenant de la recherche sur l’opinion publique et pour améliorer la façon de communiquer avec la population de manière à ce que l’information soit plus facile à utiliser.

La sénatrice Seidman : Je suppose que votre bureau fera un suivi.

Mme Gelfand : À vrai dire, ce sont techniquement les parlementaires qui font un suivi auprès des ministères en leur demandant un plan d’action. En principe, le Parlement dit au gouvernement ce qu’il doit faire.

Comme ma nièce me l’a dit : « Tu es une commère. » Je suppose que c’est le cas. Nous nous rendons sur place, nous faisons un audit et nous vous disons ce qu’il en est. Ensuite, en théorie, vous êtes censés vous assurer que c’est fait. Nous faisons des suivis, et il se peut donc qu’il y en ait un qui porte là-dessus à l’avenir, oui.

La présidente : À propos des substances toxiques, nous savons qu’il y a des milliers de produits et de substances. Le très petit chiffre de 138 substances a-t-il augmenté au fil du temps?

Mme Gelfand : Je ne sais pas. Le ministère examine actuellement 4 300 substances. Je crois qu’il a jusqu’à 2020 pour terminer l’examen. Il avait achevé 3 331 évaluations au moment de notre audit. Je ne sais pas pourquoi je me rappelle de ce chiffre, mais c’est le cas.

Nous ne nous sommes pas penchés sur cette question pour voir à quel point le ministère s’en sortait bien, car il semblait maîtriser la situation. Il progressait et évaluait ces substances. Il est probable que la liste s’allonge.

Je crois d’ailleurs que c’est le cas depuis notre audit. À mesure qu’il procède aux évaluations, un nombre croissant de substances figurent sur ce que nous appelons la liste des substances toxiques de la LCPE. La liste s’est allongée et continuera probablement de s’allonger.

M. McKenzie m’a dit que c’est un processus perpétuel. Les ingénieurs biochimistes et les autres chimistes créent toujours de nouvelles substances dont la toxicité doit être évaluée.

La présidente : Cette liste fournit-elle les données écotoxicologiques et toxicologiques de ces 138 substances pour que nous sachions ce qui est cancérigène et ce qui ne l’est pas dans le but d’établir les priorités? Savez-vous si ces études ont été menées en parallèle?

Mme Gelfand : J’ai cru comprendre que ce sont ces études qui aident les évaluateurs à Environnement et Changement climatique Canada et à Santé Canada à déterminer si une substance est toxique, mais je vais demander à M. McKenzie s’il a de plus amples renseignements.

M. McKenzie : Dans le processus d’évaluation des risques entrepris pour déterminer si une substance est toxique, Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada évaluent les répercussions possibles sur l’environnement et la santé humaine.

Ce genre d’information est recueilli au moyen du processus d’évaluation des risques, et il sert ensuite à déterminer si une substance doit être ajoutée à l’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement.

Le sénateur Richards : Sur la terre ferme ou en mer, cela fonctionne un peu différemment. Quand on a restreint la pêche au homard l’année dernière, le détroit de Northumberland et le golf du Saint-Laurent furent tous les deux concernés. En général, la baleine noire circule dans le Saint-Laurent, et les pêcheurs du détroit de Northumberland ont dû payer le prix d’une diminution de la population même si leur zone de pêche n’était pas concernée. En anglais, cette baleine s’appelle la « right whale », c’est-à-dire la « bonne baleine », parce qu’elle flotte après avoir été harponnée.

Le ministère des Pêches et d’autres personnes font constamment fausse route en tentant de remédier à une situation que la présente génération n’a pas créée. Je sais que ces mesures sont prises avec les meilleures intentions, mais ce sont parfois les membres de cette génération qui en souffrent pour cette raison.

Avez-vous de l’information sur la façon dont ces décisions sont prises? Par exemple, nous avons un million de bars d’Amérique dans la rivière Miramichi, et notre population de saumons diminue. Le bar d’Amérique est protégé, mais pas le saumon. Nous ne pourrons plus pêcher le saumon dans la rivière. Nous allons perdre des générations de personnes qui viennent de partout dans le monde pour pêcher le saumon. Ils ne viendront plus parce que le bar d’Amérique est protégé. Pourtant, nous en avons des milliers dans nos eaux.

À quel moment ces décisions sont-elles prises? À quel moment décide-t-on de prendre ces mesures?

Mme Gelfand : Ce sont toutes d’excellentes questions à poser au ministère. Une fois qu’une loi ou un règlement est en place, nous vérifions si c’est mis en œuvre comme il se doit. Nous ne prenons pas ces décisions. Ce sont des décisions des responsables des ministères, et ce sont les meilleures personnes à qui s’adresser.

Il y a manifestement des répercussions. Quand nous ralentissons la vitesse des navires, c’est l’économie que nous ralentissons. Les navires doivent se rendre du point A au point B dans un délai précis, et nous les obligeons soudainement à ralentir. Chaque fois que nous fermons une zone de pêche, il y a des répercussions sur certaines personnes.

Cela renvoie à la question de l’équilibre et de l’intégration entre tous les facteurs, mais les décisions proprement dites sont prises par le ministère.

Le sénateur Richards : Je sais que ces décisions sont difficiles et qu’elles causent des problèmes. Ce que je veux, c’est que les bonnes décisions soient prises pour les bonnes personnes. Une espèce ne peut pas être protégée et choyée lorsqu’il y en a des millions dans nos eaux.

Tout ce que je dis, c’est que ces décisions doivent être plus circonscrites.

La sénatrice McCallum : Je voulais parler des problèmes d’application de la loi qui semblent omniprésents dans tous les ministères. Les ministères n’appliquent pas intégralement les politiques et les outils qui existent pour être proactifs. À mon avis, nous ne sommes plus à l’étape proactive, car nous sommes en train de réagir.

J’ai l’impression que les ministères contribuent maintenant aux changements climatiques. Ils mettent en danger la vie des gens. Cela semble aller à l’encontre de votre mandat.

Comment peut-on demander des comptes aux ministères par rapport à ce qui se produit? Comprenez-vous ma question?

Mme Gelfand : Oui, c’est une question très vaste.

Quand je repense à tous les audits que nous avons faits, en général, nous avons presque toujours trouvé des problèmes d’application de la loi. Il n’y a pas assez d’agents, et ils ont trop de règlements à faire respecter. Ils ne sont pas assez bien formés et ils n’ont pas accès aux données à temps, ce qui signifie qu’ils ne savent pas exactement qui doit respecter les règlements. On adopte sans cesse de nouvelles lois, mais il n’y a pas nécessairement plus de ressources.

La question de l’application de la loi pourrait en soi faire l’objet d’un audit d’ordre général. Dans presque tous les audits où nous nous sommes penchés sur la question, nous avons trouvé des problèmes.

Quant à la façon de demander des comptes aux ministères, à ma connaissance, c’est le sous-ministre qui est responsable des mesures prises par l’ensemble d’un ministère. Le sous-ministre rend des comptes au greffier du Conseil privé et est nommé à titre amovible par le greffier, et probablement le premier ministre.

Tout compte fait, la personne responsable du travail fait par un ministère est le sous-ministre, et c’est vraiment le greffier du Conseil privé qui assume la responsabilité pour l’ensemble du gouvernement.

Pour ce qui est de vos questions concernant ce que font les ministères, je dois dire que je ne crois pas que les fonctionnaires se réveillent chaque jour en réfléchissant à ce qu’ils peuvent faire pour compliquer la vie des baleines et répandre des produits toxiques partout dans l’environnement.

Je crois qu’ils se réveillent en pensant à ce qu’ils font pour servir de la meilleure façon possible les intérêts de la population canadienne. Ils le font conformément à la législation et à la réglementation ainsi qu’au contexte politique dans lequel ils travaillent.

Même s’ils ne prennent pas toujours les meilleures décisions, je crois que la majorité des fonctionnaires que j’ai rencontrés sont là pour les bonnes raisons et qu’ils travaillent aussi fort qu’ils le peuvent dans l’intérêt des Canadiens. Je crois aussi que leur travail est extrêmement difficile. J’ai personnellement constaté à quel point il peut être difficile de prendre une petite décision.

Quand j’ai travaillé dans la fonction publique au début des années 1980, j’ai vu une de mes collègues s’occuper d’un dossier dans lequel le gouvernement devait prendre une toute petite décision : devrions-nous permettre aux Jeux olympiques de 1984 de prendre place dans le parc national au lac Louise? Le nombre de groupes qui exerçaient des pressions sur cette jeune agente de la politique était ahurissant. Je me suis contentée de regarder alors que toutes ces personnes l’appelaient et exerçaient des pressions pour qu’elle dise oui ou non.

Pour être franche, juste parce que j’ai vu comment une toute petite décision était prise, je n’arrive pas à comprendre comment nous pouvons y parvenir lorsqu’il s’agit de grandes décisions.

Je crois que les fonctionnaires travaillent dans des conditions difficiles et subissent des pressions de toutes parts, mais je crois personnellement que la plupart d’entre eux sont là pour les bonnes raisons et font de leur possible.

La sénatrice McCallum : Je suis d’accord avec vous, mais diriez-vous que cette situation ne fera qu’empirer si nous ne faisons rien?

Mme Gelfand : En général, sur le plan environnemental, quand il est question des problèmes environnementaux dont vous avez parlé qui mettent la vie des gens en danger et qui contribuent aux changements climatiques, la question des changements climatiques est assez évidente selon les scientifiques.

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a publié son dernier rapport. Il semble que la plupart des scientifiques soient d’accord pour dire que nous devons en faire davantage et que nous en payerons le prix si nous ne le faisons pas.

Nous avons fait des audits qui portent là-dessus. Le Canada est-il prêt à s’adapter aux changements climatiques? Nous avons effectué un audit collaboratif avec tous les vérificateurs généraux du pays pour déterminer si le Canada et les provinces étaient prêts à s’adapter aux changements climatiques. Dans l’ensemble, nous avons constaté qu’ils ne sont pas prêts. Il y a certainement des risques, sans aucun doute.

Le sénateur Patterson : Dans votre audit sur l’amélioration du taux de conformité des ministères, il est indiqué que vous n’avez pas examiné la qualité de l’analyse comprise dans chaque évaluation.

Je suppose que je suis curieux de savoir pourquoi. Est-ce que cela changera à l’avenir? Pour être franc, je me demande si votre examen de l’application de la directive du Cabinet n’est qu’un exercice de cases à cocher, une formalité.

Mme Gelfand : Vous avez raison de dire que nous n’avons pas examiné la qualité. Pour faire cet audit, nous n’avions qu’une petite équipe qui s’est penchée sur 26 ministères. C’était une tâche herculéenne. David, qui est là-bas, a dirigé l’ensemble de l’audit. Compte tenu de la méthodologie stricte employée, il a fallu déployer d’énormes efforts pour examiner 26 ministères en une seule année.

Il est évident que l’outil est utilisé davantage lorsque des questions sont présentées au Parlement. Nous savons au moins maintenant que les ministères tiennent compte de ces questions et qu’ils les mettent de l’avant, car nous avions auparavant un taux de conformité de 40 p. 100. Cela signifie que 60 p. 100 des documents présentés au Parlement n’étaient pas évalués. Personne n’avait même pensé regarder les conséquences environnementales positives ou négatives de ce qui était proposé au Cabinet.

Nous savons maintenant que 90 p. 100 des documents contiennent ces renseignements. Nous ne nous sommes toujours pas penchés sur la qualité de ces documents, mais nous savons au moins que l’outil est utilisé.

Il a été mis en place en 1990. Nous sommes maintenant en 2018, et ce n’est que la première année où nous pouvons vous donner un taux de conformité de 90 p. 100. Il est vrai que nous n’avons toujours pas examiné la qualité. Nous cherchions à déterminer si l’outil était utilisé, et nous pouvons maintenant examiner la qualité.

Nous nous sommes rendu compte, un moment donné, que dans 60 p. 100 des cas, l’outil n’était même pas utilisé, si bien qu’il n’y aurait rien eu à évaluer. Nous ne nous attendions pas à un taux de conformité de 90 p. 100. En fait, nous en avons été assez contents.

Cela dit, vous avez tout à fait raison de dire que nous ne nous sommes pas questionnés sur la qualité de l’outil. Ce serait la prochaine étape.

Le sénateur Patterson : Ce sera ou ce serait la prochaine étape?

Mme Gelfand : Ce serait.

Le sénateur Patterson : Ce ne le sera pas nécessairement.

Mme Gelfand : Ce pourrait l’être. Si je me rends compte que cette évaluation suscite beaucoup d’intérêt, notamment au Parlement, ce pourrait être l’objet d’un futur audit, oui.

Le sénateur Patterson : Vous pourriez même faire seulement un échantillonnage.

Mme Gelfand : Absolument.

Le sénateur Patterson : Quand j’ai lu dans votre rapport qu’environ le cinquième des inspections ciblait une même substance utilisée par les nettoyeurs à sec, sans que rien n’indique que cette substance pose un risque accru pour la santé humaine ou l’environnement, je me suis rappelé la crise que nous avons connu dans le Nord il y a quelques années.

Nous avons appris qu’Environnement et Changement climatique Canada travaillait activement à interdire un additif ajouté au lave-glace pour l’empêcher de geler dans le froid. Nous avons réussi à l’éviter il y a quelques années.

Ma question porte sur le liquide pour le nettoyage à sec. Savez-vous si cette substance, sur laquelle on a tellement mis l’accent, présentait un risque pour la santé humaine?

Mme Gelfand : Si elle figure à la liste de l’annexe 1 de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, c’est qu’elle pose effectivement un risque. Les 138 substances qui y sont inscrites présentent un risque. Nous disons, en fait, n’avoir aucune preuve que cette substance présentait un risque supérieur aux autres. Pourtant, 20 p. 100 des inspections ciblaient cette substance.

Le sénateur Patterson : Pouvez-vous déduire pourquoi?

Mme Gelfand : Les fonctionnaires nous ont dit qu’ils procédaient ainsi pour mesurer les taux de conformité et voir s’ils augmenteraient en multipliant les inspections. Ils ont commencé cette expérience il y a presque sept ans, et c’était même en réponse à l’une de nos recommandations. Nous pensions que même quelques années, c’est déjà long, donc c’est la raison pour laquelle nous avions fait cette observation.

Monsieur McKenzie, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. McKenzie : Oui. Nous avons été rassurés par la réponse du ministère à notre recommandation, dans laquelle il indiquait essentiellement qu’il se doterait d’un cadre de gestion du risque. Dans cette optique, il évaluerait les divers règlements en place pour évaluer le risque relatif de non-conformité. Il utiliserait ensuite cet outil pour établir l’ordre de priorité de ses mesures d’application de la loi.

J’ajouterai donc à la réponse de la commissaire que nous avons été encouragés. Vous voudrez peut-être confirmer le tout avec les gens du ministère, mais je pense qu’ils se donnent jusqu’en 2020 pour mettre en place un processus robuste afin de mieux veiller à ce que leurs interventions ciblent les plus grands risques.

Le sénateur Patterson : Vous rappelez-vous le nom de la substance particulière présente dans ce liquide?

Mme Gelfand : Le tétrachloroéthène. Je ne suis pas chimiste, donc je suis bien contente quand je me rappelle le nom d’un composé.

La présidente : Plus il y a le chlore dans un composé, plus il est toxique.

[Français]

Le sénateur Mockler : Je voudrais parler un peu de vos rôles et responsabilités. Je veux vous féliciter, car il est sûr que vous allez dans la bonne direction. Je prends en considération votre présentation. Je veux parler du saumon dans l’Est du Canada, qui est menacé par des prédateurs tels que le bar rayé et même le phoque. Quand je regarde vos responsabilités vis-à-vis de la population canadienne et au sein du Bureau du vérificateur général du Canada, est-ce que vous croyez que votre mandat vous permettrait d’examiner une telle situation, parce que, comme le dit si bien le sénateur Richards, c’est une culture...

[Traduction]

C’est un mode de vie menacé, qui est appelé à disparaître. Je crois, madame Gelfand, que vous avez un rôle à jouer dans le développement durable. Pouvez-vous vous exprimer à ce propos ou nous faire une recommandation selon ce que vous entrevoyez pour l’avenir?

La sénatrice McCallum a mentionné des éléments très importants. Les rivières Miramichi et Restigouche sont les plus intactes au monde, et la qualité du saumon atlantique en fait le roi des poissons. Il semble que le gouvernement commence à peine à se pencher sur la question. Il ne semble pas vouloir mettre de programme en place pour préserver la qualité et le mode de vie des personnes qui en vivent. Je pense aux Premières Nations, aux Acadiens, aux francophones comme aux anglophones.

Il semble que nous devrons avoir de bonnes discussions avec les fonctionnaires. Vous avez dit à maintes reprises qu’il faudra interroger les fonctionnaires. C’est plus que cela. Vous avez un rôle à jouer.

[Français]

Mme Gelfand : Absolument. Il est malheureux que mes experts sur les pêches ne soient pas avec moi, mais je peux vous parler de ce qu’on a déjà fait dans ce domaine. Je vous assure qu’on pourrait faire un audit. Je crois qu’il existe une politique sur le saumon sauvage qui est une politique du gouvernement fédéral. Je pourrais faire un audit sur l’application de cette politique. Ce serait le mécanisme par lequel on pourrait répondre à vos inquiétudes sur le saumon. Je pense à une autre façon d’effectuer un audit, et ce serait d’en faire un sur les recommandations de la commission Cohen. En effet, le ministère nous a indiqué publiquement qu’il a mis en œuvre 100 p. 100 des recommandations de la commission Cohen sur les populations de saumon. C’est un peu ce qui circule dans nos projets.

On a déjà effectué un audit sur les pêches en général. Il y a environ 170 stocks de poissons, et nous sommes allés voir si le gouvernement gérait bien toute la question des pêches en général. Au niveau global, nous avons récemment produit un chapitre. On pourrait vous le faire parvenir. Ce serait un peu le chapitre global. Sous ce chapitre, on a commencé à étudier des éléments spécifiques. Nous faisons un audit sur les espèces aquatiques invasives.

Comme je vous ai entendu dire que le saumon est important, on pourrait accorder plus de priorité à l’audit sur le saumon. Je crois que nous avons décidé sur quoi porteraient nos audits en 2020, mais nous n’avons pas encore décidé pour ceux de 2021.

Le sénateur Mockler : Vous touchez un sujet très important. On parle de l’économie de toute une région. Lorsque je parle de la région, ce n’est pas juste le Nouveau-Brunswick, c’est aussi le Québec, la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador et l’Île-du-Prince-Édouard. Une interpellation a été présentée au Sénat du Canada par le sénateur Richards. J’aimerais que vous puissiez en prendre connaissance, madame la présidente.

J’aimerais savoir quel rôle vous pourriez jouer dans l’immédiat. Nous constatons la disparition totale d’une culture et d’une économie que nous ne pourrons jamais recréer sans contrôler ces prédateurs.

Mme Gelfand : Me demandez-vous quel rôle je peux jouer dans les médias?

Le sénateur Mockler : Non, dans l’immédiat.

Mme Gelfand : Cela prend de 12 à 18 mois pour terminer un audit. Nos audits de 2020 sont déjà en cours, mais lorsqu’un comité sénatorial ou de la Chambre des communes nous envoie une lettre indiquant que ce serait une très bonne idée que le commissaire fasse un audit, cela se retrouvera en haut de la pile des idées dans notre système de planification. Est-ce que je m’exprime bien?

[Traduction]

Grosso modo, je vous conseille de nous envoyer une lettre.

La présidente : Je note que vous avez mentionné quatre possibilités.

Mme Gelfand : Il y en a une en jeu ici. Nous sommes déjà en train de réaliser un audit sur les espèces aquatiques envahissantes. Nous avons déjà examiné l’effet de la gestion intégrée du poisson sur les pêches. Nous avons étudié la salmoniculture, donc vous serez peut-être intéressé par cet audit.

Ce sont les trois qui sont pertinents ici. Le prochain qui nous vient à l’esprit est celui sur les recommandations de la commission Cohen. Nous pourrions cependant mener cet audit et celui visant la politique sur le saumon sauvage en même temps.

La présidente : Vous avez également mentionné que vous pourriez effectuer un audit sur l’application de la loi.

Mme Gelfand : Je pourrais en faire beaucoup, mais j’aurais besoin de plus de ressources pour en faire plus.

La présidente : Exactement. Je pense que nous discuterons des priorités. Nous pourrions vous envoyer une lettre pour vous mentionner nos priorités, et vous pourrez les comparer à vos propres priorités.

Mme Gelfand : J’en serais ravie.

Le sénateur MacDonald : J’aimerais revenir aux points 6 et 7, où vous mentionnez 40 espèces de mammifères marins : des baleines, des dauphins et des phoques. Il y a 14 populations qui figurent à la liste des espèces en voie de disparition.

Nous sommes parfaitement au courant du fait que la baleine noire en fait partie. Nous savons aussi que le phoque gris et le phoque commun n’en font certainement pas partie. Quelles autres espèces de mammifères y figurent, et vous êtes-vous penchés sur leur situation?

Mme Gelfand : Oui. Je n’ai pas ma liste sous les yeux, donc je céderai la parole à Elsa DaCosta.

Mme DaCosta : Nous nous sommes penchés sur les espèces menacées ou en voie de disparition.

Les espèces suivantes sont considérées en voie de disparition : le béluga, depuis 2017; le rorqual bleu dans l’Atlantique et le Pacifique; le phoque commun dans les lacs des Loups Marins, un endroit très localisé, au Québec; l’épaulard résident du sud; la baleine à bec commune; la baleine noire; la baleine noire du Pacifique Nord et le rorqual boréal.

Les espèces menacées sont le béluga, dans la baie Cumberland; le rorqual commun, dans le Pacifique; l’épaulard résident du nord; l’épaulard au large et l’épaulard migrateur.

Le sénateur MacDonald : Les mammifères marins sont pratiquement tous des baleines ou des cétacés.

Mme DaCosta : Oui, ils sont considérés comme des espèces en voie de disparition. La plupart sont des baleines ou des cétacés.

Le sénateur MacDonald : Avez-vous recommandé des mesures dans votre audit sur ces baleines?

Mme DaCosta : Oui, absolument. Nous devons nous doter de plans d’action et de programmes de rétablissement pour toutes ces baleines. Toutes les mesures nécessaires sont détaillées dans les documents préparés par le ministère. Notre principale recommandation est que le ministère mette en œuvre certaines des mesures qui figurent dans les plans d’action et les programmes de rétablissement.

Le sénateur MacDonald : Qu’en est-il des autres espèces qui ne sont pas des mammifères? Je pense au thon rouge et au requin-taupe commun. Le corégone de l’Atlantique est déjà presque disparu. Il ne se trouve plus que dans la rivière Tusket, en Nouvelle-Écosse.

Je me demande si tout cela a été évalué.

Mme Gelfand : Pêches et Océans Canada est le ministère responsable d’examiner la situation des autres espèces en voie de disparition qui ne sont pas des mammifères marins. Vous feriez donc mieux de poser ces questions aux fonctionnaires du ministère.

Le COSEPAC, soit le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, est le groupe chargé de présenter des recommandations au ministre pour déterminer si une espèce est en péril ou non. Une fois une espèce inscrite à la liste des espèces en péril, toute une série de mesures s’enclenche. Il faut établir un programme de rétablissement, comme Elsa DaCosta l’a expliqué, puis un plan d’action.

S’il s’agit effectivement d’espèces menacées ou en voie de disparition, il doit y avoir une stratégie de rétablissement et un plan d’action. Nous nous sommes rendu compte que de manière générale, beaucoup de programmes de rétablissement et de plans d’action sont établis en retard, mais je crois que la plupart des programmes de rétablissement sont désormais établis.

Le sénateur Woo : J’aimerais en savoir plus sur la façon dont vous évaluez les risques pour faire votre choix d’audits, qui dépend aussi du cadre d’évaluation du risque que le ministère utilise pour choisir sur quelles espèces se concentrer.

Beaucoup de questions nous permettent d’établir une longue liste d’espèces qui mériteraient notre attention. Nous faisons des choix selon un cadre, qui détermine l’importance relative des espèces et leur probabilité de survie.

Vous connaissez peut-être le nouveau modèle de gestion des menaces jugées prioritaires, qui émerge. Ce modèle a été conçu par des chercheurs de l’UBC et d’autres universités. Il est quelque peu controversé, parce qu’il établit essentiellement que certaines espèces ne pourront pas être sauvées et que mieux vaut ne pas perdre notre temps, pour ainsi dire.

Il y a une chose qui ressort très clairement de votre exposé. Implicitement, vous dites que le ministère a des ressources extrêmement limitées et qu’il ne lui est pas possible d’intervenir partout. De même, vous ne pouvez pas mener des audits sur tous les aspects de son travail.

J’essaie de mieux comprendre comment nous prenons ce genre de décisions. Il ne suffit pas que quelqu’un affirme qu’une espèce est importante ou qu’un groupe de lobbyistes soit particulièrement bruyant. Quels sont les outils scientifiques utilisés, outre la gestion des menaces jugées prioritaires, un modèle mathématique utilisé pour établir la hiérarchie des espèces que nous avons le plus de chance de sauver, compte tenu de diverses données.

Mme Gelfand : Si vous voulez savoir comment nous décidons quels audits nous effectuerons, je peux vous dire que c’est un processus très intense et approfondi. Les idées fusent de partout : elles nous viennent de notre personnel, des spécialistes de partout au pays et des parlementaires. Elles sont toutes évaluées en fonction d’une série de critères, qui sont pondérés.

Est-ce important pour le Canada? La situation présente-t-elle un risque élevé? Est-ce une question importante pour les parlementaires? Toute une série de facteurs sont pris en considération. C’est un modèle mathématique, qui nous permet d’établir une liste. À la fin, je fais des choix à partir d’une courte liste, en ma qualité de commissaire. C’est ma responsabilité, mais j’ai, à la base, une bonne sélection de sujets très importants qui présentent des risques élevés. C’est notre façon de faire.

Pour ce qui est de déterminer comment on peut sauver les espèces, je dois malheureusement vous recommander de demander aux fonctionnaires comment ils procèdent, puisque c’est leur travail. Dès que le ministère a une loi, une politique ou un règlement à faire respecter, c’est mon travail de vous dire s’il l’applique correctement. Il peut s’agir d’une mauvaise politique, auquel cas je peux vous dire s’il applique correctement cette mauvaise politique. C’est mon rôle d’auditrice.

Il revient au ministère d’élaborer les politiques. Il lui revient de déterminer s’il souhaite ou pas utiliser ce nouveau cadre que vous mentionnez sur les espèces. La décision lui revient. C’est donc lui qui décidera s’il souhaite utiliser ce cadre. Pour ma part, j’évaluerai ensuite s’il réussit à le respecter. C’est mon rôle.

Le sénateur Woo : Je comprends, mais ne serait-il pas utile que vous le conseilliez sur la façon d’établir ses priorités à l’aide d’outils qui pourraient vraiment l’aider à établir l’ordre d’importance des différentes espèces?

Je ne dis pas que c’est le meilleur outil qui existe, mais que c’est un outil qui peut nous aider à comprendre qu’il vaut mieux ne pas perdre notre temps à essayer de sauver telle ou telle espèce, parce que cela nous coûtera une fortune, pour échouer.

N’est-ce pas aussi le rôle de la commissaire d’aider les fonctionnaires à trouver des façons de mieux évaluer ses priorités?

Mme Gelfand : Oui, je le crois. Quand nous ciblons un sujet donné, les auditeurs qui font partie de nos bureaux deviennent des experts de la mise en œuvre de la politique publique. Ils voient comment chacun l’applique. Ils peuvent faire connaître les pratiques exemplaires d’un ministère à un autre, et c’est ce qui se passe dans leurs interactions avec le personnel.

Bref, nous pouvons effectivement leur fournir des conseils, mais nous ne pouvons fonder notre audit que sur les objectifs établis par le ministère.

Le sénateur Woo : Pour terminer, je vous dirais qu’il ne me semble pas si clair que les parlementaires soient nécessairement les meilleures sources d’information du ministère pour choisir quelles espèces cibler. Nous avons tous nos espèces favorites dans nos coins de pays, mais nous avons sûrement besoin d’une approche scientifique plus robuste pour comprendre la situation des diverses espèces, leurs chances de survie et la meilleure façon de déployer nos ressources.

La présidente : Nous aurons ensuite la discussion sur l’environnement.

Avant de poursuivre avec les personnes inscrites à la liste, j’aimerais revenir un peu à la question des substances toxiques. Le gouvernement fédéral est responsable de nombreux sites fédéraux contaminés. Vous avez demandé à vos inspecteurs s’ils les avaient analysés, s’ils avaient fait des inspections et combien.

Vous êtes-vous penchés sur les mesures de décontamination entreprises et leur avancement? Il ne suffit pas de déterminer qu’un problème existe et de faire une inspection, il faut savoir quelles mesures de décontamination sont prises.

Mme Gelfand : Nous ne l’avons pas fait dans le cadre de cet audit. Nous avons examiné les sites contaminés lors d’audits réalisés avant que je devienne commissaire. Je regarde James McKenzie. Il s’en souvient peut-être. Nous en avons déjà fait, mais pas récemment.

La présidente : Croyez-vous qu’il faudrait en faire un à ce sujet?

Mme Gelfand : Comme le sénateur l’a indiqué, la liste est longue.

La sénatrice Cordy : Je viens de me rendre compte, en regardant autour de la table, qu’il y a beaucoup de Canadiens de l’Atlantique qui siègent à ce comité. Pour revenir aux observations des sénateurs Richards et Mockler sur le saumon, je vis moi-même au bord d’un lac. J’habite à Dartmouth, la ville des lacs, où tout le monde tremble à l’idée que le bar rayé fasse son entrée dans nos lacs, parce qu’ensuite, tout le reste disparaît.

J’aimerais aussi vous interroger sur la répartition et le nombre des agents d’application de la loi chargés d’appuyer Environnement Canada. Comment travaillent-ils?

Compte tenu du nombre de ministères auprès desquels Environnement Canada intervient, lorsqu’il y a un audit ou de manière générale, il y a beaucoup de domaines de compétence à connaître pour examiner les différents ministères. Comment cela fonctionne-t-il?

Les agents d’application de la loi ont-ils des domaines de spécialité ou ne font-ils qu’examiner l’audit réalisé? Y a-t-il des agents d’application de la loi dans chaque ministère? Comment est-ce que cela fonctionne?

Mme Gelfand : Il y a ici des représentants du ministère, donc j’espère qu’ils pourront vous répondre. Je crois qu’il y a un responsable de l’application de la loi à Environnement Canada. C’est sa direction qui aurait la responsabilité de mettre en application tous les règlements d’Environnement Canada, mais aussi quelques règlements de Pêches et Océans, parfois.

Il y a toute une réglementation. J’espère ne pas me tromper, mais je crois qu’il y a aussi des agents d’application de la loi à Pêches et Océans Canada. Ce ne sont pas nécessairement les mêmes personnes.

C’est vraiment le genre de questions que vous feriez mieux de poser aux fonctionnaires. Je ne suis pas la référence sur le sujet. Ils sont là, donc j’espère qu’ils pourront vous répondre.

La sénatrice McCallum : Quand on parle de développement durable, il faut trouver l’équilibre entre les humains et les animaux, d’une part, et entre l’économie et les animaux, d’autre part.

Y a-t-il des études qui se font sur le rôle des mammifères en voie de disparition dans la grande toile de la vie et leur contribution à la vie telle qu’elle existe actuellement? Il y a un équilibre complexe que les Canadiens devront comprendre, et il y a des décisions à prendre. Ce sont les humains qui ont la voix la plus forte.

Quand l’exploitation atteint-elle ses limites et comment fait-on pour ne pas gaspiller les aliments? Il faut un équilibre entre l’exploitation durable et les affaires. Quand je pense à ma vie de personne autochtone, nous étions nomades. Nous ne consommions que le nécessaire et en vivions.

Dans les années 1960, des trains sont arrivés par la route d’hiver, et on s’est mis à pêcher des quantités astronomiques de poissons, à les sortir des eaux. Cela semble toujours être le cas. Avez-vous des observations à faire à ce sujet?

Mme Gelfand : Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’il y a une définition assez vaste du développement durable dans la loi qui crée cette fonction. Je peux vous la montrer. Il y est question des besoins des générations futures, mais également de choses comme l’équité, la santé et la protection des écosystèmes. Elle est assez vaste.

Je vous dirais aussi que les nouveaux objectifs de développement durable dont l’ONU s’est dotée pour 2030, que le Canada a adoptés, viennent répondre à ces questions. Vous posez la question essentielle de l’intégration et de l’équilibre entre nos besoins d’aujourd’hui, nos besoins futurs, les besoins des écosystèmes et les besoins des espèces. Nous devons trouver un équilibre dans tout cela.

Ce sont des enjeux complexes. Comme nous l’avons déjà indiqué, quand on favorise une espèce, il peut y avoir des incidences sur un groupe de personnes. Sur quoi fondons-nous nos décisions? Prenons-nous les bonnes décisions au bon moment? C’est le genre de questions difficiles qui se posent en matière de développement durable.

Le sénateur Richards : J’allais faire une observation. Les problèmes qui touchent le saumon et le bar commun sont totalement attribuables à l’homme. On a multiplié les efforts pour sauver le bar commun et ses frayères dans le nord-ouest de la rivière Miramichi. Cela a créé l’effondrement du saumon atlantique. C’est totalement causé par l’homme.

Il y a là un problème de viabilité, qui vient des plus hautes instances d’Ottawa. J’ai cru bon de le mentionner.

La présidente : Je vous remercie de votre témoignage et de cette conversation très intéressante et importante.

Nous accueillons maintenant les représentants d’Environnement et Changement climatique Canada : Michael Enns, directeur exécutif de la Direction de l’application de la loi en environnement, Gwen Goodier, directrice exécutive de la Division de la gestion des substances chimiques, et Roger Roberge, directeur général par intérim de la Direction de la politique en matière de durabilité. Nous accueillons également Sylvie Lapointe, sous-ministre adjointe à la Gestion des pêches et des ports chez Pêches et Océans Canada; David Morin, directeur général de la Direction de la sécurité des milieux, à la Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs de Santé Canada; et,enfin, Michelle Sanders, directrice de la Politique sur l’eau propre chez Transports Canada.

Je vous remercie infiniment de vous joindre à nous.

[Français]

David Morin, directeur général, Direction de la sécurité des milieux, Direction générale de la santé environnementale et de la sécurité des consommateurs, Santé Canada : J’aimerais commencer par vous remercier de m’avoir invité ici aujourd’hui pour vous parler du rapport de la commissaire sur les substances toxiques et de l’application de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. J’aimerais également remercier la commissaire de son rapport. Santé Canada accepte les recommandations qu’elle a formulées et s’efforce d’y donner suite.

[Traduction]

Cette vérification portait sur les mesures que le fédéral a prises en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, appelée également la LCPE, afin de limiter et faire connaître les risques attribuables aux substances toxiques.

Les produits chimiques font partie de notre vie quotidienne et ils jouent un rôle essentiel dans notre économie, nos collectivités et nos foyers. Même s’ils nous procurent de nombreux avantages, ils peuvent également produire des effets nocifs si on ne les gère pas convenablement. Je suis fier de dire que le Canada utilise une approche de calibre mondial en matière de gestion des produits chimiques et que plusieurs pays voient dans cette approche une pratique exemplaire.

Le Plan de gestion des produits chimiques, ou PGPC, du gouvernement du Canada consiste à réduire les risques que posent les produits chimiques pour les Canadiens et leur environnement. De manière plus précise, nous collaborons avec nos collègues d’Environnement et Changement climatique Canada afin d’identifier les substances qui peuvent être nocives pour la santé humaine, l’environnement, ou les deux, et nous mettons en place des mesures afin de gérer ces risques.

La nature de ces mesures varie en fonction des risques identifiés; il peut s’agir, entre autres, d’élaborer de nouveaux règlements, d’exiger la mise en place de plans de prévention de la pollution ou d’informer les Canadiens dans les cas où ils peuvent eux-mêmes agir pour réduire les risques.

Depuis la mise en œuvre du PGPC en 2006, nous avons travaillé avec Environnement et Changement climatique Canada à l’évaluation de plus de 3 500 substances déjà utilisées au Canada pour déterminer si elles posent un risque pour les Canadiens ou leur environnement. Notre objectif est d’avoir évalué 4 300 substances que nous jugeons prioritaires d’ici 2020. Nous avons déjà évalué environ 80 p. 100 de ces substances.

Nous avons constaté que plus de 450 des substances évaluées dans le cadre du PGPC sont toxiques pour la santé humaine, pour l’environnement, ou les deux. Par conséquent, de concert avec nos collègues d’Environnement et Changement climatique Canada, nous avons mis en place plus de 90 mesures pour contrer les risques que posent ces substances.

[Français]

Nous avons également pris des mesures relativement aux nouvelles substances dans le cadre du Plan de gestion des produits chimiques. L’industrie est tenue de nous aviser de son intention d’introduire de nouvelles substances au Canada. Il nous sera ainsi possible d’évaluer ces substances de manière proactive et d’établir si elles posent un risque pour la santé humaine ou l’environnement. Depuis 2006, nous avons évalué presque 6 000 nouvelles substances et mis en place près de 300 mesures afin de contrer les risques que nous avons constatés.

[Traduction]

Les recommandations de la commissaire visaient l’amélioration du système de mesure du rendement de Santé Canada, ainsi que la façon dont nous communiquons avec les Canadiens.

En ce qui concerne la mesure du rendement, nous faisons présentement appel à différentes méthodes pour évaluer l’efficacité des gestes que nous posons afin de contrôler les substances toxiques. Une de ces méthodes est la biosurveillance, qui mesure la teneur des différents produits chimiques chez les Canadiens.

Par exemple, les résultats de la biosurveillance nous apprennent que les concentrations de BPC sont généralement en baisse au Canada. Sur les 20 dernières années, on a constaté une baisse de la concentration de plomb dans le sang des Canadiens pouvant atteindre 50 p. 100. De plus, la concentration de plomb dans le sang des Canadiens a diminué de plus de 70 p. 100 depuis la fin des années 1970 grâce aux mesures fédérales comme la restriction des quantités de plomb dans l’essence et dans la peinture.

Cependant, je conviens avec la commissaire que nous devons adopter une approche plus systématique en matière de mesure du rendement. Nous sommes sur le point de terminer trois évaluations approfondies du rendement concernant le bisphénol A, le mercure et le plomb afin de calculer l’efficacité de nos mesures de contrôle de ces substances toxiques. À cette fin, nous travaillons également avec nos collègues d’Environnement et Changement climatique Canada à l’élaboration d’une approche systématique à plus long terme.

[Français]

En ce qui a trait à nos communications avec le public, nous sommes d’accord avec la commissaire pour dire que les Canadiens désirent en connaître davantage sur les substances toxiques et sur la façon dont ils peuvent se protéger et protéger leurs familles. Nous avons récemment mené une recherche sur l’opinion publique pour nous aider à mieux comprendre le type d’information que recherchent les Canadiens et pour cerner les secteurs que nous devons améliorer.

En parlant des résultats de cette recherche, nous avons élaboré une stratégie de communication ciblée que nous lancerons au cours des prochains mois. Cette stratégie comprend des conseils dans un langage simple qui sont destinés aux Canadiens pour les aider à se protéger des produits chimiques et les polluants nocifs à l’intérieur de leur foyer.

[Traduction]

En conclusion, nous sommes reconnaissants à la commissaire de l’examen qu’elle a réalisé et de ses recommandations, car nous pourrons nous en inspirer pour l’amélioration continue de la gestion des produits chimiques au Canada. Je vous remercie.

La présidente : Merci.

[Français]

Gwen Goodier, directrice exécutive, Division de la gestion des substances chimiques, Environnement et Changement climatique Canada : Je m’appelle Gwen Goodier, et je suis directrice exécutive de la Division de la gestion des substances chimiques. Merci de m’avoir invitée à comparaître aujourd’hui devant le comité afin de parler de l’audit des substances toxiques.

[Traduction]

Les substances toxiques sont définies et gérées dans le cadre du Plan de gestion des produits chimiques du gouvernement du Canada, un programme géré conjointement par Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada.

Nous sommes fiers de ce que nous avons réalisé à ce jour grâce au PGPC. Depuis 2006, comme l’a indiqué David Morin, nous avons évalué plus de 3 500 substances, soit environ 80 p. 100 des 4 300 substances considérées comme prioritaires. Nous sommes en voie de terminer l’évaluation de toutes les substances d’ici 2020.

Nous avons constaté que plus de 450 substances chimiques sont nocives pour l’environnement ou pour la santé humaine, ou les deux. Nous avons publié des méthodes de gestion des risques, ou plans d’action, pour l’ensemble de ces 450 substances toxiques. Nous avons mis en place environ 90 instruments de gestion des risques visant ces substances.

Nous prenons aussi des mesures pour nous assurer que les nouvelles substances qui font leur entrée sur le marché sont sécuritaires pour lesCanadiens.Depuis le début du programme, nous avons reçu près de 6 000 notifications de substances nouvelles. Ces notifications ont été évaluées et ont entraîné des mesures de gestion des risques supplémentaires au besoin.

Bien que nous croyions que le Plan de gestion des produits chimiques repose sur des assises solides, nous convenons que des améliorations doivent être apportées dans les trois secteurs signalés par l’audit, soit la mesure du rendement, l’application de la loi et les communications.

En ce qui concerne la mesure du rendement, notre ministère travaillera avec Santé Canada à la mise en place d’une démarche à long terme visant à évaluer systématiquement l’efficacité de nos mesures de contrôle des substances toxiques.Entre-temps, et pour orienter cette méthode, Environnement et Changement climatique Canada et Santé Canada termineront les évaluations en cours pour déterminer si les objectifs de protection de la santé humaine et de l’environnement ont été atteints pour quatre substances précises, soit le mercure, le bisphénol A, le plomb et les PBDE, un composé ignifuge.

Le rapport d’audit porte également sur notre façon d’appliquer les règlements visant les substances toxiques et la manière dont nous communiquons les risques que posent ces substances aux Canadiens.

David Morin a déjà parlé de nos plans relatifs aux communications. Je vais maintenant demander à mon collègue Michael Enns, de notre direction de l’application de la loi, de nous parler de l’application de la loi.

[Français]

Michael Enns, directeur exécutif, Direction de l’application de la loi en environnement, Environnement et Changement climatique Canada : Merci de me recevoir aujourd’hui. Je suis Michael Enns, directeur exécutif, Direction de l’application de la loi en environnement à Environnement et Changement climatique Canada.

[Traduction]

J’aimerais utiliser le temps qui m’est accordé pour vous faire quelques commentaires généraux au nom de la Direction de l’application de la loi d’ECCC. Nous avons quelque 200 agents désignés pour appliquer la LCPE, et il y a près de 60 règlements s’appliquant partout au pays. Ces mêmes agents ont aussi la responsabilité d’appliquer les dispositions sur la prévention de la pollution de la Loi sur les pêches.

Notre organisation est très fière du travail de ces agents. Ils mènent des milliers d’inspections et des centaines d’enquêtes chaque année. Plus que jamais, leur travail se traduit par des sanctions importantes qui visent à dissuader ceux qui choisiraient d’enfreindre les lois et les règlements d’ECCC.

Au cours des cinq dernières années, par exemple, le montant des amendes liées aux infractions à la LCPE a augmenté pour passer de quelques centaines de dollars en 2012 à plus de 3 millions de dollars en 2016-2017. Le montant des amendes imposées à l’issue de poursuites, y compris les amendes relatives à des infractions à la Loi sur les pêches, s’est élevé à un total de plus de 10 millions de dollars, l’année passée. La majorité de ces amendes sont versées au Fonds pour dommages à l’environnement, lequel sert à financer des projets qui améliorent la qualité de l’environnement.

Nous avons réalisé de grands progrès dans notre capacité d’enquête et avons recommandé des poursuites importantes, mais nous améliorons aussi notre capacité de cerner les cas où le non-respect peut poser les plus grands risques pour l’environnement et la santé humaine. À cette fin, en 2017, notre direction a lancé un processus complet d’évaluation des risques dont l’objectif est d’avoir terminé l’analyse comparative de tous les règlements relevant de la LCPE d’ici le printemps 2020.

Nous croyons que ce travail répondra aux recommandations de l’audit actuel, de même que des audits antérieurs sur le même sujet. Cela fait partie des efforts que nous déployons continuellement pour mieux cibler les cas de non-respect des lois d’ECCC présentant les plus grands risques, de manière à garantir le plus haut degré de protection de l’environnement.

[Français]

Nous sommes reconnaissants de l’attention portée par la commissaire à ce travail important.

[Traduction]

Nous serons ravis de répondre à vos questions.

Sylvie Lapointe, sous-ministre adjointe, Gestion des pêches et des ports, Pêches et Océans Canada : J’aimerais profiter de l’occasion pour parler du chapitre du rapport de l’automne 2018 de la commissaire à l’environnement et au développement durable qui traite des mammifères marins.

Nous accueillons favorablement le rapport de la commissaire, ainsi que ses recommandations qui soulignent notamment la nécessité de mettre en œuvre les mesures de rétablissement prévues dans la Loi sur les espèces en péril afin de réduire les menaces posées par la pêche commerciale et la navigation maritime, la nécessité de tenir compte de la protection des mammifères marins dans la planification des zones de protection marine, et la nécessité d’élaborer une approche nationale d’intervention auprès des mammifères marins en détresse.

Le ministère accepte les recommandations formulées dans le rapport et prendra les mesures nécessaires pour s’assurer que chacune d’elles fait l’objet d’un suivi. Cependant, l’audit n’a pas évalué officiellement bon nombre des mesures les plus récentes et les plus importantes de notre gouvernement pour la protection des mammifères marins. Notre ministère va poursuivre son travail visant à atténuer les menaces qui pèsent sur les mammifères marins et à intervenir auprès de ceux qui sont en détresse.

[Français]

Certes, les mesures récentes témoignent des progrès réalisés, mais nous reconnaissons qu’il y a encore du travail à faire et que les recommandations de l’audit éclaireront nos futures interventions dans le dossier de la protection des mammifères marins du Canada.

Les mammifères marins sont importants pour le Canada, pas seulement d’un point de vue culturel, mais aussi pour la santé de nos écosystèmes aquatiques. Pêches et Océans Canada est résolu à protéger ces espèces.

[Traduction]

Comme l’indique le rapport, le gouvernement du Canada a réalisé d’importants investissements au cours des deux dernières années pour protéger les mammifères marins en voie de disparition et en péril, et pour soutenir leur rétablissement. Depuis 2016, le gouvernement a investi 1,5 milliard de dollars dans le Plan de protection des océans du Canada et 167,4 millions de dollars dans l’Initiative de protection des baleines qui a été lancée récemment.

Grâce à ces investissements, le gouvernement a pris et continuera de prendre des mesures importantes pour contribuer à protéger les mammifères marins des menaces liées à la pêche commerciale et au trafic maritime sur les trois côtes, en particulier les épaulards résidents du Sud et les baleines noires de l’Atlantique Nord.

Plusieurs mesures ont déjà été adoptées pour protéger l’épaulard résident du Sud, par exemple la réduction de la pêche du saumon quinnat pour accroître la disponibilité des proies, la nouvelle obligation de maintenir une distance sécuritaire de 200 mètres en tout temps, l’ajout d’agents des pêches chargés de vérifier la conformité, et l’établissement d’un partenariat avec l’Administration portuaire de Vancouver visant un ralentissement volontaire des navires dans le détroit de Haro.

[Français]

Nous sommes également heureux que d’autres nouvelles mesures, dont des restrictions de vitesse pour les navires et des mesures de gestion des pêches dans le golfe du Saint-Laurent, aient permis de réduire avec succès les risques pour la population de baleines noires de l’Atlantique Nord en voie de disparition.

[Traduction]

En fait, grâce à l’extraordinaire collaboration des secteurs de la pêche et du transport à la mise en œuvre des mesures en 2018, aucune baleine noire de l’Atlantique Nord n’est morte dans les eaux canadiennes cette année.

Nous allons collaborer avec tous les intéressés aux fins de l’examen des mesures prises en 2018 et nous les améliorerons pour 2019 en nous fondant sur les commentaires recueillis et les importants nouveaux avis scientifiques que nous attendons à la fin de l’année.

D’ailleurs, au début de la semaine, le ministre Wilkinson et le personnel du MPO ont rencontré des représentants de l’industrie de la pêche et des groupes autochtones du Canada atlantique pour discuter des répercussions des mesures de gestion des pêches de 2018 et obtenir des commentaires qui aideront à éclairer les décisions de gestion pour 2019.

Je tiens également à souligner que le gouvernement a fait d’importants investissements dans notre Programme d’intervention auprès des mammifères marins en fournissant 1 million de dollars par an aux groupes d’intervenants tiers de classe mondiale qui sont le pilier de ce programme.

Grâce à cet investissement, le gouvernement s’assure que nous avons les capacités d’intervenir lors d’incidents impliquant des mammifères marins, y compris les empêtrements de baleines, s’il y a lieu.

[Français]

Nous continuerons de travailler avec ces groupes pour donner suite aux constatations tirées de l’audit. Plus tôt cette semaine, nous avons tenu une autre réunion nationale pour examiner les protocoles en place pour 2018 et apporter les améliorations nécessaires. Bon nombre des nouvelles mesures actuellement en place répondent directement aux recommandations figurant dans le rapport. Le gouvernement du Canada continuera de protéger la faune et la biodiversité du pays, y compris les espèces en voie de disparition au Canada. La mise en œuvre de nombreuses mesures de rétablissement d’espèces en péril est déjà en cours, et ce travail se poursuivra.

[Traduction]

À cette fin, le ministre Wilkinson a récemment lancé un appel aux Canadiens pour connaître leurs points de vue sur les modifications proposées au Programme de rétablissement des épaulards. Nous proposons de protéger deux nouvelles zones d’habitat essentiel sur la cote du Pacifique pour favoriser le rétablissement de ces baleines.

Le gouvernement du Canada est résolu à conserver et à protéger les océans du Canada, y compris les mammifères marins qu’ils abritent. En 2015, le gouvernement a promis de protéger 5 p. 100 des océans du Canada d’ici 2017, et il a tenu parole. Ce sont maintenant 7,9 p. 100 de nos zones marines et côtières qui sont protégées alors que c’était environ 1 p. 100 il y a trois ans, et le gouvernement va continuer dans cette direction afin d’en arriver à la conservation de 10 p. 100 de nos milieux marins d’ici 2020.

On recommande au MPO, dans l’audit, de tenir compte de la protection des mammifères marins dans la désignation des zones de protection marine, ou ZPM. Si des mammifères marins ou leurs habitats sont identifiés dans les objectifs de conservation d’une ZPM proposée, ils seront pris en compte au moment de déterminer les restrictions à appliquer dans la zone. Notre ministère va poursuivre sa collaboration avec ses nombreux partenaires et tenir compte de la protection des mammifères marins dans la mise en place des zones de protection marine.

Nous allons continuer de travailler en étroite collaboration avec nos partenaires provinciaux et territoriaux, les peuples autochtones et une multitude de parties intéressées, d’un océan à l’autre, y compris Transports Canada et Environnement et Changement climatique Canada, afin d’examiner des mesures visant à contrer les menaces auxquelles font face les mammifères marins, puis de les évaluer et d’en recommander la mise en œuvre.

Nous sommes résolus à pleinement mettre en œuvre les réponses aux recommandations. Nous pensons qu’une telle démarche contribuera grandement à assurer la protection des mammifères marins contre les menaces que posent les navires et les activités de pêche commerciale. Merci.

Roger Roberge, directeur général par intérim, Direction de la politique en matière de durabilité, Environnement et Changement climatique Canada : Merci de nous avoir invités à discuter du rapport de la commissaire sur les progrès réalisés par les ministères dans la mise en œuvre des stratégies de développement durable.

Avant de discuter des progrès importants décrits par les résultats de l’audit, j’aimerais consacrer un peu de temps à vous donner un aperçu de la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes.J’expliquerai ensuite le lien entre la Stratégie fédérale de développement durable du gouvernement fédéral et cet audit sur les évaluations environnementales stratégiques ou EES, puis je discuterai de certaines des mesures prises par Environnement et Changement climatique Canada pour appuyer la prise de décisions en matière de développement durable.

En résumé, la Directive du Cabinet a été élaborée en 1990 et exige que les organisations fédérales soumettent une proposition de politique, un plan ou un programme à une EES lorsque deux conditions sont remplies : quand les propositions sont soumises à l’approbation d’un ministre ou du Cabinet, et quand la mise en œuvre de la proposition peut avoir des effets environnementaux importants, qu’ils soient positifs ou négatifs.

En 2010, la Directive du Cabinet a été modifiée de manière à inclure l’obligation de lier les EES à la Stratégie fédérale de développement durable, ou SFDD, compte tenu des effets des propositions sur la réalisation des objectifs de la SFDD. Elle exigeait aussi que les 26 ministères et organismes contribuant à la SFDD incluent les résultats de leurs EES dans leurs stratégies ministérielles de développement durable, ou SMDD.

Étant donné que les décisions qui ont une incidence sur le développement durable se prennent partout au sein du gouvernement, ces stratégies ministérielles comprennent des mesures visant à garantir que les décideurs sont capables de prendre en compte les facteurs environnementaux parallèlement aux facteurs économiques et sociaux, notamment la portée et la nature des effets environnementaux potentiels; le besoin de mesures d’atténuation pour réduire ou éliminer les effets négatifs ou les possibilités d’accroître les effets positifs; et la nécessite de faire un suivi.

Pour soutenir l’élaboration d’EES complètes, l’Agence canadienne d’évaluation environnementale aide toutes les organisations fédérales en faisant la promotion des EES et en fournissant des conseils et de la formation. En plus des obligations qui lui incombent en vertu de la Directive, ECCC est chargé de fournir aux ministères et aux agences, sur demande, des avis d’experts d’ordre politique, technique et scientifique sur le développement durable et les effets potentiels des initiatives sur l’environnement.

La commissaire à l’environnement et au développement durable joue un rôle important en surveillant la mesure dans laquelle les ministères ont contribué à l’atteinte des cibles et des objectifs de la SFDD et ont mis en œuvre les plans énoncés dans leurs propres stratégies de développement durable.

Au cours des cinq dernières années, les audits de la commissaire ont permis de déterminer la manière dont chaque ministère et organisme appliquent la Directive du Cabinet. Ce dernier rapport fournit une vue d’ensemble de la façon dont les 26 organisations couvertes par la Loi fédérale sur le développement durable ont appliqué la Directive et montre si elles ont respecté leurs engagements de renforcer les pratiques d’EES. D’après le rapport de la commissaire, les 26 organisations fédérales contrôlées ont appliqué la Directive du Cabinet à 93 p. 100 des propositions soumises à l’approbation du Cabinet en 2017. Cette constatation représente une augmentation significative par rapport aux audits précédents, qui avaient un taux de conformité compris entre 23 p. 100 et 44 p. 100.

De plus, 17 des 26 ministères vérifiés affichent un taux de conformité de 100 p. 100, y compris Environnement et Changement climatique Canada. Sept autres organisations avaient des taux de conformité élevés, et deux organisations n’avaient rien soumis en 2017.

À Environnement et Changement climatique Canada, nous nous sommes engagés à effectuer une EES détaillée pour chaque proposition de politique, de plan et de programme soumise au Cabinet ou au Conseil du Trésor pour approbation, y compris les propositions dirigées par d’autres ministères ou agences et signées par la ministre de l’Environnement et du Changement climatique. Cela va au-delà des exigences de la Directive du Cabinet, qui permet que certaines propositions fassent l’objet d’analyses préliminaires plutôt que d’EES complètes, notamment parce qu’on ne s’attend pas à ce qu’elles aient des effets importants sur l’environnement.

Nous reconnaissons que les EES doivent être de haute qualité pour aider les décideurs. Ainsi, Environnement et Changement climatique Canada s’est muni d’une unité qui se consacre à fournir des conseils et à examiner les EES du ministère. Cette unité offre également de la formation en ligne et en classe garantissant que les employés sont capables de réaliser des évaluations approfondies.

L’unité veille également à ce que les déclarations publiques soient disponibles en ligne et en temps opportun, afin que le public soit informé de la façon dont l’environnement a été pris en compte dans le processus décisionnel. Ces déclarations incluent aussi une description de la manière dont les propositions d’ECCC pourraient affecter la réalisation des objectifs et cibles de la SFDD.

En conclusion, les constatations de la commissaire illustrent ces mesures, parmi d’autres, prises par les divers ministères et agences et soulignent que les EES sont un outil important pour faire progresser le développement durable et mettre en œuvre la SFDD.

La présidente : Avant que nous passions aux questions, et au cas où nous manquerions de temps, j’offre à mes collègues qui auraient des questions supplémentaires de les soumettre par écrit à notre greffière, afin qu’elle les distribue à nos témoins. Ainsi, nous pourrons recevoir leurs réponses ultérieurement.

La sénatrice Seidman : Je voudrais adresser mes questions aux représentants de Santé Canada et d’Environnement et Changement climatique Canada, qui ont fait l’objet de l’audit. Nous avons en main le rapport de la commissaire sur les substances toxiques pour l’automne 2018. Dans le rapport, la commissaire affirme que, vu l’importance que revêt la maîtrise des substances toxiques, ce sujet a dû être évalué sur une très longue période. Elle évoque les rapports de 1999, 2002, 2009 et 2011 avant d’en venir au rapport de 2018. Il semble y avoir un problème récurrent en ce qui concerne l’application de la loi et la surveillance des risques.

Par exemple, la commissaire signale qu’en 1999, les ministères n’avaient pas de plans d’action à l’égard des substances toxiques. Le suivi exercé n’était pas suffisant pour évaluer si les mesures prises avaient permis de réduire les risques associés aux substances toxiques. En 2002, malgré les progrès réalisés, la capacité du ministère à détecter et à réduire les risques présentés par les substances toxiques restait limitée. En 2009, les ministères n’avaient pas évalué si les objectifs de réduction des risques associés aux substances toxiques avaient été atteints. Environnement et Changement climatique Canada n’avait pas activement fait respecter tous les règlements. Peu d’Information sur les activités d’application de la loi avait été publiée. Environnement et Changement climatique Canada n’avait pas publié de rapports annuels au moment voulu. En 2011, Environnement et Changement climatique Canada n’avait pas suffisamment de renseignements sur ses collectivités d’entreprises réglementées. On trouvait des lacunes dans sa capacité à faire appliquer les règlements aux termes de la loi, et le ministère n’avait pas toujours fait de suivi auprès des contrevenants. Vous comprenez le message ici.

Aujourd’hui, en 2018, la commissaire dit très clairement que cet audit est important parce que la population canadienne compte sur le gouvernement fédéral pour réduire les risques que posent les substances toxiques pour la santé humaine et l’environnement, et pour communiquer des renseignements à ce sujet. Le rapport que nous avons reçu en 2018 met l’accent sur des enjeux très semblables qui remontent, de toute évidence, jusqu’en 1999.

Je m’adresse donc à M. Morin et aux représentants d’ECCC. Vous avez tous dit que vous êtes satisfaits du rapport de la commissaire et que vous faites tout ce qui s’impose pour y donner suite. Pourquoi devrions-nous vous croire maintenant, sachant qu’en 1999, les mêmes questions avaient été clairement soulevées et qu’elles ne sont toujours pas réglées? J’aimerais savoir ce que vous en pensez.

La présidente : Puis-je proposer que nous demandions à Michael Enns de répondre à cette question? Je suis entièrement d’accord avec vous là-dessus.

M. Enns : Je vais répondre à la question dans le contexte de l’application de la loi, et je suppose que certains éléments de votre question seront abordés par d’autres témoins.

Ce que vous avez dit au sujet de l’audit est tout à fait juste. Je ferai remarquer aux sénateurs ici présents que d’importants progrès ont été accomplis depuis 2009 et même avant cette date, dans la foulée du premier audit. Je vais souligner un certain nombre de domaines où il y a eu des améliorations, mais je ne veux certainement pas donner l’impression que nous n’avons pas besoin d’en faire plus. Je parlerai également de nos projets d’avenir, pour votre gouverne.

L’audit fait mention d’un projet que nous avons mené sur les taux de conformité concernant le PERC. J’ai choisi d’utiliser l’acronyme, car quelqu’un d’autre a très bien prononcé le nom au complet tout à l’heure. Je lui laisserai donc le soin de le redire au long. Cette substance est utilisé dans les produits de nettoyage à sec. Nous avons effectué un très vaste projet dans le cadre duquel nous avons examiné un échantillon aléatoire d’entreprises réglementées sur le plan de l’application de la loi, puis nous avons fait un suivi auprès des mêmes entreprises réglementées pour mesurer l’impact de nos comportements. En l’occurrence, nous avons réduit la non-conformité, mais nous avons augmenté le taux de conformité d’au moins 12 p. 100.

Dans son rapport, la vérificatrice a signalé que c’était satisfaisant, mais qu’il a fallu beaucoup de temps pour en arriver là. J’accepte cette constatation, mais je tiens à préciser qu’il s’agissait de notre premier projet sur les taux de conformité. Nous nous en sommes inspirés pour élaborer une méthodologie qui sera appliquée aux travaux futurs dont je parlerai dans un instant.

La sénatrice Seidman : Nous n’avons pas beaucoup de temps. Je voudrais simplement m’attarder sur l’audit précis que vous utilisez comme exemple.

La commissaire affirme que, dans la plupart des cas, vos priorités en matière d’application de la loi n’étaient pas fondées sur les risques pour la santé humaine et l’environnement. Quels éléments de preuve utilisez-vous? Pourquoi avez-vous choisi ce produit de nettoyage en particulier? Y avait-il des preuves? Y avait-il un ensemble de données probantes? La commissaire affirme que vous ne tenez pas compte des preuves.

M. Enns : Je peux en parler directement, et je vous remercie de la question.

L’ensemble des lois et des règlements mis en place par Environnement et Changement climatique Canada ont permis d’établir un seuil de risque pour l’environnement et la santé humaine. En tant que responsable en la matière au sein de la direction de l’application de la loi, je suis chargé de régler les problèmes de non-conformité que je relève, en m’appuyant sur la série complète de lois et de règlements que mon ministère a choisi de mettre en place. C’est ce que nous avons fait, et nous avons obtenu des résultats efficaces dans divers domaines.

Nous avons reconnu, dans l’audit, que nous pouvions faire mieux pour évaluer, aux termes d’autres règlements, les risques pour l’environnement et la santé humaine. Nous disposons d’un plan à cette fin, et nous comptons terminer ce travail d’ici 2020.

En ce qui concerne le PERC, nous l’avons choisi en raison de son mérite pour l’élaboration d’une méthodologie qui servira à évaluer un ensemble plus vaste de substances. On trouve des nettoyeurs à sec un peu partout. Nous savons où ils sont situés. Nous savons où les trouver. Nous savons qu’ils seront au même endroit lorsque nous aurons à vérifier nos résultats pour en assurer l’intégrité scientifique. Voilà pourquoi nous les avons choisis. C’était en raison de leur valeur méthodologique. Le projet a porté ses fruits puisque nous avons créé un modèle que nous pouvons utiliser maintenant pour toute la série de règlements afin d’évaluer nos progrès, et c’est ce que nous sommes en train de faire.

Le sénateur MacDonald : J’aimerais parler des zones de protection maritime établies. Nous sommes passés de 1 à 7,9 p. 100, et nous espérons atteindre un objectif de 10 p. 100 d’ici 2020. Il s’agit d’une question de plus en plus controversée au Canada atlantique.

Quels sont les critères utilisés pour déterminer les zones côtières qui devraient être protégées? Pourquoi établissons-nous des objectifs fondés sur des pourcentages? Pourquoi n’évaluons-nous pas ces choses de façon ponctuelle, en fonction des demandes et de la nécessité?

M. Roberge : C’est une très bonne question. Je vais céder la parole à ma collègue du MPO.

Mme Lapointe : Les pourcentages reposent sur les engagements internationaux qui ont été pris dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique que nous avons signée et que nous mettrons en œuvre d’ici 2020. C’est de là que viennent les objectifs de 5 p. 100 et de 10 p. 100.

Nous avons un certain nombre d’outils à notre disposition pour être en mesure d’atteindre ces objectifs. L’établissement de zones de protection maritime est un des moyens, mais il y a également ce que nous appelons d’autres mesures efficaces, notamment l’interruption des activités de pêche, ce qui est tout aussi important pour protéger l’écosystème.

Nous collaborons avec les provinces et les territoires, les peuples autochtones et toutes les industries pour pouvoir déterminer, à la lumière des preuves scientifiques dont nous disposons, à quoi ressemblent ces zones fermées et où elles sont situées.

Le sénateur MacDonald : Pour moi, l’objectif de 10 p. 100 semble être arbitraire. J’essaie d’établir un chiffre. Ce total de 10 p. 100 des océans le long des côtes du Canada représente une vaste superficie. Notre pays est entouré de grands océans. Celui de la côte Est est immense. Qu’en est-il des répercussions sur les pêches locales et les gens qui en tirent leur subsistance? Comment évalue-t-on ces aspects?

Je pose de nouveau la question : pourquoi ne procède-t-on pas au cas par cas, au lieu d’établir un chiffre artificiel de 10 p. 100 en raison d’une directive fixée par un organisme externe? Je ne comprends tout simplement pas la logique.

Mme Lapointe : Je dirais que nous établissons les zones fermées en nous appuyant sur les données scientifiques dont nous disposons et qui révèlent qu’il s’agit de zones importantes qui doivent être protégées pour maintenir la santé de nos écosystèmes. C’est sur quoi reposent les décisions.

Je vous renvoie aussi à un rapport publié récemment par un comité ministériel sur la question de savoir quelles normes devraient dicter la mise en place de telles zones fermées. Ce document nous fournira des instructions supplémentaires dans le cadre de notre travail.

Le sénateur MacDonald : Une fois que nous aurons atteint l’objectif de 10 p. 100, chercherons-nous à passer à 20 p. 100? Qu’allons-nous viser? Quel est le plan à long terme?

Mme Lapointe : Notre but immédiat est d’atteindre le taux de 10 p. 100. Comme vous l’avez laissé entendre, c’est très compliqué et c’est beaucoup de travail; il faut mener de nombreuses consultations et recueillir beaucoup de commentaires auprès des Canadiens. Je n’émettrai pas d’hypothèses sur ce que nous ferons par la suite. Je sais que des discussions sont en cours au sein de diverses tribunes internationales sur la possibilité d’établir un objectif supérieur à 10 p. 100, mais aucune décision n’a été prise à cet égard.

Le sénateur MacDonald : Quelle a été la réaction des pêcheurs, disons, sur la côte Est du Canada?

Mme Lapointe : Nous avons reçu de nombreux commentaires des représentants de l’industrie de la pêche. Ils se disent très préoccupés, tout comme vous, à propos de la fermeture de zones qui revêtent une importance pour leurs activités de pêche. Lorsque nous le pouvons, et à la lumière de leurs commentaires, nous essayons de protéger la zone sans leur imposer un fardeau économique inutile. Dans certains cas, ils participent très activement aux conversations sur le choix des zones qui doivent être protégées.

Le sénateur MacDonald : Est-ce qu’on les écoute, ou est-ce qu’on prête plutôt l’oreille aux tribunaux internationaux? Qui mène la barque?

Mme Lapointe : Nous prenons au sérieux les commentaires que nous recevons de l’industrie de la pêche. Lorsque c’est possible, nous n’hésitons pas à les intégrer dans les décisions que nous prenons.

La sénatrice Cordy : Monsieur Enns, j’aimerais parler de l’application des lois environnementales. Vous avez dit que vous avez 200 agents. Pourriez-vous nous dire où ils sont situés? S’ils s’occupent de la Loi sur les pêches, je suppose qu’ils travaillent sur les deux côtes. Qui décide quels règlements seront soumis à un examen? Il y en a beaucoup. Vous ne pouvez pas les passer tous en revue chaque année, alors qui détermine les priorités quant aux règlements à surveiller?

M. Enns : Il y a deux questions. Je vais commencer par l’emplacement de nos agents d’application de la loi. Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, nous en avons environ 200. Ils sont situés dans quelque 25 bureaux régionaux partout au pays. Environnement et Changement climatique Canada compte cinq régions. Nous avons des agents d’application de la loi dans chacune de ces cinq régions pour un total, je le répète, de 25 bureaux.

Il y a effectivement des bureaux sur les deux côtes. On en trouve un à Vancouver et un autre, de petite taille, à Nanaimo, sur l’île. Sur la côte de l’Atlantique, nous avons des bureaux à Dartmouth et à Moncton. Ce sont nos principaux bureaux dans la région de l’Atlantique.

Pour ce qui est de savoir comment nous prenons des décisions sur les priorités, nous utilisons un processus annuel. Il s’agit, pour ainsi dire, d’un appel lancé à l’échelle du ministère pour solliciter des projets dans le cadre du plan national d’application de la loi. Nous faisons appel aux scientifiques et à d’autres experts au sein de notre ministère pour demander leur avis sur les derniers enjeux en ce qui concerne les règlements et les domaines scientifiques dont ils s’occupent. Ces questions sont examinées par un comité qui est situé centralement à Ottawa, mais qui est composé de représentants de tout le pays. Nous établissons des priorités selon ce que nous jugeons le plus risqué, en nous appuyant sur les renseignements que nous possédons, sur les observations de nos scientifiques et d’autres experts au sein du ministère, et sur l’efficacité opérationnelle. Dans certains cas, nous partageons la responsabilité avec les provinces, ce qui est pris en compte afin de déterminer les secteurs où nous pouvons avoir le plus grand impact.

Il y a aussi des questions comme celle de savoir si nous avons une formation et un soutien adéquats. Ces aspects sont également pris en considération. Nous établissons ensuite une série de priorités qui sont alors reproduites dans chaque région, en tenant compte de la souplesse requise, selon les circonstances particulières.

La sénatrice Cordy : Monsieur Morin, je suis très heureux que votre ministère tienne compte de la communication. J’ai déjà été enseignante et, avant chaque rencontre avec les parents, on nous disait toujours d’éviter le jargon pédagogique dans nos entretiens avec les parents. Il est important que la communication soit conçue pour les Canadiens, et pas seulement pour les scientifiques et les entreprises.

Examiner une question comme l’interdiction d’une substance peut parfois provoquer beaucoup d’émotions. Dans la déclaration que vous nous avez faite aujourd’hui, vous avez parlé des taux de réussite, comme une baisse considérable de la concentration du plomb dans le sang des Canadiens, une diminution de 80 p. 100 des concentrations de BPC dans la région de l’Arctique et une diminution de 50 p. 100 dans le taux sanguin des Canadiens.

Parlez-vous de ce genre de résultats pour que les gens comprennent pourquoi vous prenez de telles mesures?

M. Morin : Nous avons mis en place des programmes de biosurveillance à Santé Canada. Il y a l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé, dans le cadre de laquelle nous prélevons des échantillons de sang et d’urine auprès d’environ 6 000 Canadiens. Ce travail a débuté en 2007, et nous sommes sur le point de lancer notre sixième cycle. C’est, en gros, un modèle de réussite, et les résultats sont déjà disponibles.

Cela dit, pour en revenir à votre remarque, nous pourrions probablement mieux communiquer aux Canadiens les réussites liées à certains des résultats que nous avons observés, et ce, dans un langage généralement simple. Dans le cas de certaines substances que nous avons évaluées, nous avons fait un suivi pour nous assurer de l’exactitude de nos observations. J’ai parlé du mercure, des BPC et du plomb. Nous prenons des mesures à l’interne pour voir ce qui a été fait, pour consigner l’information et pour vérifier que tout se passe bien. Je suis d’avis que nous pourrions déployer plus d’efforts pour communiquer les résultats globaux à la population canadienne.

Un autre point que nous n’avons pas perdu de vue dans le cadre de notre recherche sur l’opinion publique, c’est la capacité de communiquer en langage clair et simple. En tant que scientifiques, nous nous débrouillons bien quand vient le temps de communiquer avec d’autres scientifiques ou avec des intervenants intéressés et avertis, du point de vue des ONG ou de l’industrie, mais il y a lieu d’en faire un peu plus.

Nous nous sommes déjà employés à joindre les Canadiens ordinaires. Nous acceptons les observations formulées par la commissaire. À cet égard, nous avons lancé un plan qui prévoyait notamment une recherche sur l’opinion publique. Comment les Canadiens recueillent-ils les renseignements dont ils ont besoin? Quel type de renseignements souhaitent-ils obtenir? Nous visons à communiquer avec eux de façon plus conviviale.

La sénatrice McCallum : Je ne peux pas imaginer la quantité de travail qu’il faut abattre pour s’occuper de problèmes nouveaux et émergents et pour essayer de régler ceux qui perdurent depuis longtemps.

Ma question porte sur les matières toxiques. Vous avez dit être sur le point de terminer une évaluation approfondie du rendement concernant le bisphénol A et le mercure, deux substances qui sont présentes dans les produits dentaires et qui finissent dans la bouche des patients. Une autre source de mercure est attribuable aux réservoirs hydroélectriques et à l’inondation qui est survenue. Pour une raison quelconque, le mercure s’est libéré du sol et, maintenant, les poissons sont en danger. J’ai travaillé dans le Nord du Manitoba, où les gens doivent aller pêcher dans les eaux intérieures parce qu’ils ne peuvent plus manger de poisson; cela peut endommager leur foie.

Les secteurs de la dentisterie et de l’hydroélectricité représentent deux groupes de lobbyistes puissants. Pourriez-vous nous parler des deux et nous dire si des progrès ont été réalisés à cet égard? Y a-t-il un processus pour atténuer les effets de ces matières toxiques?

M. Morin : Je vais parler du bisphénol A ou BPA et du mercure séparément.

Nous disposons de données de biosurveillance concernant le bisphénol A, bien qu’elles se rapportent aux Canadiens de plus de trois ans. La mesure prise concernant cette substance en application de la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation visait les contenants métalliques des préparations pour nourrissons et les biberons. Nous avons réalisé des études de suivi dans lesquelles nous avons échantillonné et analysé des biberons ainsi que des contenants de métal et de plastique qui sont utilisés.

Dans la première série, nous en avons recueilli environ 24. Nous avons relevé quelques secteurs de non-conformité. Cette série a été suivie d’une autre série d’études qui n’ont révélé aucune non-conformité à l’égard de ces produits. C’est un indicateur de la réussite que nous avons eue sur ce plan. Nous espérons que la réduction à l’exposition que nous observons se traduira essentiellement par des niveaux réduits de bisphénol A chez les nourrissons canadiens. Malheureusement, nous ne disposons pas de données de biosurveillance pour des Canadiens si jeunes. Nos programmes ne s’appliquent pas à eux.

Comme vous l’avez mentionné, depuis les années 1970, nous avons fait beaucoup de travail au Canada en ce qui concerne le mercure. Les niveaux ont diminué considérablement chez les Canadiens, comme en témoignent nos données de biosurveillance. La majeure partie du mercure au Canada provient maintenant de produits importés, du mouvement transfrontalier ou du transport sur de grandes distances du mercure qui entre au pays. Vous avez tout à fait raison. Nous observons qu’un des domaines d’exposition concerne le poisson et la consommation de poisson, comme vous l’avez fait remarquer, ainsi que l’inondation des réservoirs et la formation de méthylmercure qui y est associée.

Nos travaux sont régis par la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale; nous sommes secondés dans nos efforts par Santé Canada, en sa qualité de ministère expert. Nous procédons à l’examen des évaluations du risque pour la santé humaine présentés par les promoteurs de projets et de réalisations. Nous procéderons à un examen pour nous assurer que les approches privilégiées concernant l’évaluation de ces risques sont appropriées et réfléchies, et qu’on a pris un certain nombre de précautions pour assurer la protection de la population.

Nous allons aussi parler des mesures d’atténuation suggérées par les promoteurs pour composer avec les problèmes associés au mercure. Dans le cas du poisson, par exemple, nous allons nous pencher sur les recommandations concernant les avis aux consommateurs de poisson. Nous verrons si elles sont ou non appropriées et sensées. Nous travaillerons aussi, à l’occasion, avec des provinces et des territoires, au besoin, pour les aider à élaborer une partie des avis aux consommateurs. Nous travaillerons avec les autres administrations à ces égards.

La sénatrice McCallum : Avec l’hydro, on continuera donc, et vous vous pencherez seulement sur la consommation.

M. Morin : Côté hydro, l’inondation de nouveaux réservoirs entraînera la formation de méthylmercure. Manifestement, dans ces cas, nous devons avoir une idée à l’avance de ce que cela signifie. Quelle population dépend de ce réservoir ou de cette région pour s’alimenter? Nous examinerons les évaluations des risques qui en découlent. Nous nous pencherons aussi sur les mesures d’atténuation proposées pour voir si elles sont ou non suffisantes.

Vous avez parfaitement raison. Quand un nouveau réservoir est inondé, nous nous attendons à ce qu’il y ait des problèmes associés au mercure. Voilà pourquoi Santé Canada participe activement au dossier comme ministère expert.

La sénatrice McCallum : Vous n’avez rien dit au sujet de la dentisterie.

Mme Goodier : Je peux parler de l’amalgame dentaire contenant du mercure.

La sénatrice McCallum : Je pensais plutôt au bisphénol A utilisé dans la résine.

M. Morin : À ce chapitre, il est intéressant de mentionner que dans nos travaux de biosurveillance, nous sommes capables de déceler les tendances dans la population canadienne associées à toutes les sources d’exposition. Nous prélevons des échantillons auprès des gens qui font partie de la population visées par l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé et nous avons des renseignements sur les tendances concernant le bisphénol A dans la population canadienne.

Vous avez tout à fait raison lorsque vous m’avez rappelé que dans ma première réponse, j’ai parlé du bisphénol A chez les nourrissons qui provient des biberons et des contenants de métal. Lorsque nous prélevons un échantillon de données de biosurveillance chez les adultes, il couvre l’exposition à toutes les sources de cette substance, pas seulement aux amalgames dentaires, mais à toutes les autres sources de bisphénol A auxquelles les Canadiens pourraient être exposés. La biosurveillance est la norme par excellence, car elle vous dit ce à quoi les Canadiens sont exposés et à quels niveaux, et elle vous donne des sources collectives plutôt qu’une source unique.

Le sénateur Patterson : J’aimerais poser une question à la représentante du MPO concernant l’aire marine protégée.

On est en train de former une énorme aire marine protégée dans l’Arctique dans ce qu’on connaît comme étant le détroit de Lancaster. Pourriez-vous me dire dans quelle mesure cet instrument est flexible pour mettre en balance les débouchés économiques, y compris en ce qui touche la navigation sécuritaire et la protection de l’environnement? L’aire marine protégée sera-t-elle un outil flexible qui permettra de mener une gamme variée d’activités?

Mme Lapointe : Une aire marine protégée ou une zone fermée n’est pas nécessairement fermée à toute activité économique. Tout dépend de ce qu’on essaie de protéger et de l’incidence de ces activités sur l’habitat ou l’aire marine.

Pour répondre à votre question sur la flexibilité, on possède la latitude voulue pour réussir à protéger et à conserver l’écosystème tout en menant des activités économiques.

Le sénateur Patterson : Les Inuits auront-ils la possibilité de participer à la gestion de l’aire marine protégée qu’on prévoit créer dans une zone assez importante de ce qu’on connaît comme le détroit de Lancaster?

Mme Lapointe : Oui, ils participent déjà pleinement au développement de cette aire. Ils seront bien engagés dans la gestion et la protection de cette aire ainsi que des mesures d’application prises pour la faire respecter.

Le sénateur Patterson : Quel est l’échéancier pour mener à bien ces travaux?

Mme Lapointe : Je devrai vous revenir sur les échéanciers précis. Je ne les ai pas avec moi.

La présidente : Pourriez-vous le faire, s’il vous plaît?

Mme Lapointe : Oui.

Le sénateur Patterson : Ma prochaine question s’adresse au représentant de Santé Canada. Elle concerne les 138 substances toxiques. Votre ministère a reçu du financement pour informer le public des risques qu’elles représentent pour la santé. Je pense qu’une somme de 1,3 million de dollars y a été consacrée entre 2014-2015 et 2017-2018.

Je me demande comment ce financement a été utilisé. Je dirais qu’une bonne partie de l’information fournie sur votre site web cible un auditoire du domaine technique. On a élaboré des résumés pour les non-spécialistes dans le cas de trois des 138 substances toxiques. Travaillez-vous à permettre aux Canadiens ordinaires qui ne comprennent pas des termes comme tétrachloroéthylène de pouvoir prendre des décisions plus éclairées concernant ces substances?

M. Morin : Il est clair que nous prenons des mesures supplémentaires pour informer les Canadiens des travaux que nous menons sur les substances toxiques. Comme vous l’avez indiqué, notre site web contient énormément de renseignements techniques. Nous avons, par exemple, plus de 350 fiches sur les substances chimiques. Cela dit, je suis d’accord avec votre commentaire selon lequel elles visent probablement plus un auditoire du domaine technique.

Vous avez parlé des trois résumés que nous avons pour les non-spécialistes. J’aimerais aussi faire remarquer que nous sommes en train de mettre la dernière main à 12 autres résumés semblables. Nous espérons qu’ils seront prêts bientôt. Nous en avons 12 autres en cours d’élaboration.

Nous avons entendu le commentaire. Nous vous en savons gré. Même avant d’entendre ce commentaire de la commissaire, nous avons entendu ceux de nombre de nos intervenants qui disaient que tout le monde ne comprenait pas l’information affichée sur notre site web. C’est à ce moment-là que nous avons commencé, je suppose que c’était il y a environ un an et demi lorsque nous avons mené notre recherche sur l’opinion publique, afin d’avoir une idée de ce que les Canadiens veulent savoir, comment ils veulent en entendre parler et où ils trouvent ces renseignements.

Nous voyons cela comme quelque chose de très important à pouvoir communiquer aux Canadiens. Cela leur donne la possibilité de se protéger, au besoin, contre des substances chimiques dans leur vie de tous les jours.

La présidente : Merci beaucoup pour vos témoignages. Nous vous en savons gré.

(La séance est levée.)

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