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ENEV - Comité permanent

Énergie, environnement et ressources naturelles

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Énergie, de l'environnement et des ressources naturelles

Fascicule nº 57 - Témoignages du 19 mars 2019


OTTAWA, le mardi 19 mars 2019

Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C-69, Loi édictant la Loi sur l’évaluation d’impact et la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie, modifiant la Loi sur la protection de la navigation et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois, se réunit aujourd’hui à 17 heures pour examiner le projet de loi et un budget provisoire.

La sénatrice Rosa Galvez (présidente) occupe le fauteuil.

La présidente : Bonjour, et bienvenue à cette séance du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.

Je m’appelle Rosa Galvez. Je représente la province de Québec au Sénat et je préside le comité.

J’invite maintenant les sénateurs à se présenter.

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Mockler : Percy Mockler du Nouveau-Brunswick.

Le sénateur Patterson : Dennis Patterson, Nunavut.

Le sénateur Neufeld : Richard Neufeld de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Simons : Paula Simons de l’Alberta, territoire du Traité no 6.

Le sénateur Mitchell : Grant Mitchell de l’Alberta, territoire du Traité no 6.

La sénatrice McCallum : Mary Jane McCallum du Manitoba, territoire du Traité no 10.

[Français]

Le sénateur Pratte : André Pratte, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur D. Black : Doug Black de l’Alberta.

[Français]

Le sénateur Massicotte : Paul Massicotte, du Québec.

[Traduction]

La présidente : Je tiens à remercier le greffier du comité, Maxime Fortin, et les analystes de la Bibliothèque du Parlement, Jesse Good et Sam Banks.

Collègues, ce soir, nous continuons notre étude du projet de loi C-69, Loi édictant la Loi sur l’évaluation d’impact et la Loi sur la Régie canadienne d’énergie, modifiant la Loi sur la protection de la navigation et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.

Aujourd’hui, nous recevons, par vidéoconférence d’Iqaluit et représentant le gouvernement du Nunavut, l’honorable David Akeeagok, député, vice-premier ministre du Nunavut et Bernard MacIsaac, sous-ministre adjoint, Développement économique.

Merci de vous joindre à nous. Je vous invite à faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passons aux questions et réponses.

L’honorable David Akeeagok, député, vice-premier ministre, gouvernement du Nunavut :  

[Note de la rédaction : Le témoin s’exprime en inuktitut.]

Je vous remercie de cette occasion qui m’est offerte de prendre la parole devant le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles concernant l’analyse que fait le Nunavut du projet de loi C-69.

Le gouvernement du Nunavut suit attentivement l’évolution du projet de loi depuis 2017. Il remarque qu’en vertu de ce projet de loi, le Canada propose de remplacer l’actuelle Loi canadienne sur l’évaluation environnementale par le projet de loi sur l’évaluation d’impact; de remplacer l’actuelle Loi sur l’Office national de l’énergie par le projet de loi sur la Régie canadienne de l’énergie et de modifier la Loi sur la protection de la navigation, notamment en la rebaptisant Loi sur la protection des eaux navigables.

Premièrement, le gouvernement du Nunavut remarque que le territoire, et notamment le territoire infracôtier dans son intégralité, est couvert par une loi distincte sur l’évaluation des impacts, la Loi sur l’aménagement du territoire et l’évaluation des projets au Nunavut. L’article 7 de la loi fédérale stipule que :

La Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012) ne s’applique pas à la région désignée.

Puisque le projet de loi C-69 propose d’abroger la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale de 2012 et de la remplacer par le projet de loi sur l’évaluation de l’impact, le gouvernement du Nunavut maintient que la Loi sur l’aménagement du territoire et l’évaluation des projets au Nunavut continue d’avoir préséance sur toute autre mesure législative fédérale sur l’évaluation d’impact dans l’ensemble de la région du Nunavut.

De la même façon, le gouvernement du Nunavut comprend que le projet de loi sur la Régie canadienne de l’énergie n’aura pas préséance sur les lois sur l’évaluation environnementale en vigueur dans l’ensemble de la région du Nunavut.

Toute interaction potentielle entre la loi sur l’évaluation d’impact, la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie et le Nunavut se limitera aux évaluations menées dans la zone extracôtière fédérale, qui est adjacente, mais totalement extérieure à la région du Nunavut.

Toutefois, le gouvernement du Nunavut remarque que les ressources pétrolières et gazières extracôtières présentent un intérêt dans les négociations entourant le transfert des responsabilités du gouvernement du Canada au gouvernement du Nunavut. En dépit de la répartition des compétences, les Nunavummiuts sont touchés par le développement ou l’absence de développement de la zone extracôtière adjacente.

Aux fins d’examen par le comité, le gouvernement du Nunavut fait les commentaires suivants concernant le régime prévu par la loi en matière d’évaluations menées dans la zone extracôtière.

Premièrement, le gouvernement du Nunavut appuie l’intention d’améliorer les consultations concernant le développement de ressources critiques, les infrastructures et les projets énergétiques. L’entière participation des communautés éventuellement touchées contribue à garantir que les droits des Canadiens sont défendus à toutes les étapes du processus de développement. Le fait que cette participation s’inscrive dans le processus réglementaire pourrait aussi renforcer la confiance des investisseurs dans le Canada et le Nunavut en proposant un processus davantage prévisible.

Deuxièmement, le retrait du critère de la « personne directement touchée » appliqué en vertu de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012) est une mesure significative pour éliminer les barrières à la participation au processus d’évaluation des impacts. Cela est particulièrement important pour les organismes régionaux et communautaires. Le gouvernement du Nunavut recherchera la participation aux évaluations fédérales de projets adjacents à la région du Nunavut et appuiera les organismes régionaux et communautaires du territoire qui souhaitent cette participation lorsque cela est pertinent et nécessaire.

Le gouvernement du Nunavut appuie les exigences relatives aux évaluations stratégiques et régionales à intégrer dans le processus de décision pour les évaluations d’impact relatives à des projets particuliers. Le gouvernement du Nunavut se félicite des nouvelles exigences consistant à inclure le savoir autochtone traditionnel et local dans le processus de décision.

Le gouvernement du Nunavut remarque l’incertitude considérable entourant les projets de loi. Il remarque en particulier que le projet de loi d’évaluation d’impact et la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie comportent trois facteurs susceptibles de présenter des complications : les exigences de consultations supplémentaires, la nécessité de tenir compte des enjeux relatifs à l’égalité des sexes et aux changements climatiques. Ces exigences supplémentaires pourraient rendre les processus flous ou les rallonger, et risquer ainsi de saper la confiance des investisseurs dans le Canada et le Nunavut. Si l’on ressent cette incertitude, la réduction s’exprimera surtout dans les premiers jours d’entrée en vigueur du nouveau régime, avant que des précédents ne viennent préciser clairement la façon dont on entend intégrer ces facteurs.

Voilà les raisons pour lesquelles le gouvernement du Nunavut continuera de suivre de près le dossier du projet de loi C-69, y compris les bons résultats et les difficultés qui découleront des lois proposées.

Enfin, le gouvernement du Nunavut sera parmi les intervenants clés chaque fois qu’une étude d’impact concernera la zone extracôtière de la région du Nunavut pour veiller à ce que les autorités fédérales chargées de ces études soient bien conscientes des droits et des intérêts des Nunavummiuts

Qujannamiik. Merci. Quana

La présidente : Merci beaucoup, monsieur. Nous passons aux questions, mais chacun aura seulement trois minutes. Je demanderais aux sénateurs d’être brefs dans leur préambule.

Le sénateur MacDonald m’a demandé de céder son tour au sénateur Patterson.

Le sénateur Patterson : Je voudrais remercier le vice-premier ministre Akeeagok et le sous-ministre adjoint MacIsaac d’être présents aujourd’hui et d’être allés également donner leur avis à un autre comité, au sujet du projet de loi C-55. Messieurs, l’aide que vous apportez au Sénat est la bienvenue.

Nous avons un cadre réglementaire fait sur mesure au Nunavut. Je pense que nous devons nous compter heureux de ne pas avoir à nous soucier ni du projet de loi C-69, ni même de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. Les Autochtones composent 85 p. 100 de la population du Nunavut et ils participent activement aux évaluations menées selon notre cadre réglementaire. Les trois ordres de gouvernement sont appelés à faire ensemble de la cogestion. Les organismes de réglementation du Nunavut sont présidés par des Inuits, et il serait difficile de prétendre que les Inuits n’ont pas une grande influence sur les mécanismes de réglementation et sur la délivrance de permis au Nunavut.

Premièrement, j’aimerais vous demander ce qui suit : quatre mines sont exploitées actuellement au Nunavut, et une cinquième le sera bientôt. Cette exploitation est complexe et elle se fait dans un environnement fragile. Après une vingtaine d’années d’existence, comment se porte le cadre réglementaire du Nunavut? Que pense votre gouvernement de l’efficacité de ce cadre?

M. Akeeagok : Merci, monsieur le sénateur Patterson. Merci de dialoguer constamment avec notre gouvernement concernant certains projets de loi, les projets de loi C-55 et C-69. Vous et moi avons eu personnellement des discussions à ce sujet. Je vous remercie de faire constamment ce travail et de défendre les intérêts du Nunavut. Je tiens à souligner ce que vous faites.

Nous fêtons le 20e anniversaire de notre territoire. Nos évaluations environnementales sont le fruit des revendications territoriales et elles ont vu le jour bien avant la Loi sur l’aménagement du territoire et l’évaluation des projets au Nunavut. Les organismes de gestion conjointe existaient, eux aussi, longtemps avant l’adoption de cette loi, notamment la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions et l’Office des eaux du Nunavut. Le gouvernement et les Inuits nomment conjointement les membres de ces deux organismes indépendants, qui étudient et évaluent les projets très complexes qui leur sont soumis.

Nous sommes fiers d’avoir pu établir ainsi un bon climat de travail. Il me semble qu’on devrait s’en inspirer dans le projet de loi C-69. Au cours de mon allocution liminaire, c’est un aspect dont j’ai parlé un peu. Je dirais que notre cadre réglementaire fonctionne très bien. La commission et l’office nous permettent de tout examiner sans rien oublier. Toute l’information et tous les points de vue sont recueillis, puis le ministre fédéral prend les décisions.

Le sénateur Patterson : Merci. Nous pouvons être très fiers du cadre réglementaire du Nunavut.

La différence entre ce cadre et ce qui est prévu dans le projet de loi C-69, c’est qu’au Nunavut, chaque projet est soumis une seule fois à une évaluation, ce qui n’est pas le cas dans le projet de loi C-69. Soit dit en passant, le comité a entendu le témoignage de la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions. C’est le même organisme de réglementation qui est chargé de l’étude d’impact, de la délivrance des permis et de la surveillance du cycle de vie. Cette solution a d’énormes avantages, et elle fonctionne manifestement très bien au Nunavut.

Croyez-vous que c’est une bonne chose d’avoir recours à un seul organisme de réglementation pour faire les études d’impact, pour délivrer les permis, pour établir les conditions — plus de 200 conditions ont été imposées à Baffinland Iron Mines Corporation pour l’exploitation de sa mine dans l’Extrême-Arctique — et pour surveiller l’application des conditions? Autrement dit, croyez-vous qu’il est avantageux qu’un seul organisme de réglementation s’occupe des trois fonctions que sont les études d’impact, la délivrance des permis et la surveillance du cycle de vie?

M. Akeeagok : Oui. Je suis d’accord pour dire que c’est une façon de faire qui fonctionne bien, et nous sommes fiers de ce qui a pu être accompli dans notre territoire.

Serait-il possible d’employer le même modèle à d’autres endroits au pays? Je pense que oui. Dans notre cadre réglementaire, les revendications territoriales ont permis aux Inuits et au gouvernement d’être conjointement responsables des deux organismes, ce qui fait que leur indépendance est solidement garantie. Nous nous intéressons au projet de loi C-69 parce qu’on pourrait vouloir réaliser des projets en partie au Nunavut et en partie sur un territoire voisin. Nous voudrions alors que le même modèle s’applique hors de la région du Nunavut.

Le sénateur Patterson : Pour terminer, madame la présidente, je dirais que le projet de loi C-69 aurait pour effet de confier à des organismes différents les évaluations, la délivrance des permis et la surveillance du cycle de vie. Ce n’est pas un modèle efficace, et il ne permet aucunement de limiter le nombre d’évaluations à une seule par projet. Le Nunavut est un précurseur, et j’aurais voulu que le gouvernement fédéral suive son exemple. Merci.

Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup. C’est bien que vous soyez avec nous par vidéoconférence. J’aurais aimé que vous soyez présents en personne, mais c’est tout de même formidable que vous soyez là.

Je m’intéresse à ce que vous avez dit dans votre allocution liminaire au sujet de l’utilité du projet de loi C-69 pour faciliter votre travail d’amélioration des consultations au sujet des projets majeurs dans la zone extracôtière. Vous avez dit ceci :

Le fait que cette participation s’inscrive dans le processus réglementaire pourrait aussi renforcer la confiance des investisseurs dans le Canada et le Nunavut en proposant un processus davantage prévisible.

Pourriez-vous expliciter votre pensée et nous dire pourquoi vous croyez que la participation des communautés éventuellement touchées pourrait renforcer la confiance des investisseurs et accroître la prévisibilité? C’est une observation importante.

M. Akeeagok : Merci pour votre question. Nous suivons le même cadre réglementaire depuis 20 ans, et 4 projets majeurs se sont concrétisés. C’est un cadre à caractère public qui engendre la confiance et rassure les gens. On nous dit aussi que nos évaluations doivent avoir lieu de manière bien définie pour assurer le degré de prévisibilité nécessaire.

Dans mon allocution liminaire, j’ai essayé de montrer que nous assurons la participation des populations locales, de l’industrie et de tout l’éventail des acteurs. S’il faut qu’il y ait des changements et qu’un projet d’exploitation des ressources soit réalisé dans un secteur adjacent à notre territoire, nous voulons que les mêmes assurances puissent être données.

Merci.

Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup. Je ne me souviens plus exactement de l’expression employée par le sénateur Patterson, mais il nous dit que, par souci d’efficacité, il faudrait que ce soient les mêmes personnes qui soient chargées de toutes les fonctions.

Le sénateur Patterson : Une seule évaluation par projet.

Le sénateur Mitchell : C’était avant cela parce que je ne parle pas de l’idée que chaque projet doit fait l’objet d’une seule évaluation, mais plutôt du recours au même organisme pour établir les conditions au départ, puis veiller à leur application au cours des 50 ou 60 années subséquentes. C’est plus efficace, mais il y a une autre manière d’arriver au même résultat. En Alberta, le cadre réglementaire des projets du secteur de l’énergie sépare les deux fonctions. L’évaluation, la décision d’autoriser ou non le projet et l’établissement des conditions constituent la première fonction. La deuxième consiste à veiller au respect des conditions. Certains diront qu’il y a un conflit direct si ce sont les mêmes qui jugent un projet et qui, par la suite, surveillent sa réalisation. On peut presque dire que c’est un principe juridique de plus en plus accepté, si je peux me permettre de m’exprimer ainsi.

Pensez-vous que c’est un argument valable de dire qu’il y a un risque inhérent de conflit si ce sont les mêmes qui autorisent la réalisation d’un projet et fixent les conditions, puisque si ces gens ont fait une erreur au départ, ils sont susceptibles de ne pas être très prompts à l’admettre par la suite et à vouloir la corriger?

M. Akeeagok : À notre avis, et compte tenu de ce que j’ai l’habitude de voir, une étude d’impact est réalisée, des conditions sont imposées, le ministre fédéral donne son autorisation, puis on veille au respect des conditions. Je pense que cette façon de procéder est bonne parce que, dès le départ, l’organisme de réglementation veille à ce que des ressources suffisantes soient affectées et à ce que ce soit le bon organisme de réglementation qui se penche sur le projet.

Je ne vois pas de problème dans l’idée de séparer les fonctions. Je ne connais pas tellement la façon de faire dans le Sud. Toutefois, je peux vous dire que depuis 20 ans, au Nunavut, les Inuits et le gouvernement collaborent pour déterminer quel organisme de réglementation doit examiner tel ou tel projet. Je crois que nous avons pu obtenir de bons résultats grâce à ce degré de collaboration et en définissant le cadre réglementaire dans la législation fédérale et territoriale.

Merci.

La présidente : Pourriez-vous faire moins de bruit avec vos cellulaires? Merci.

Le sénateur Neufeld : Merci d’être présents aujourd’hui.

Comment permettez-vous au public de participer à vos études d’impact? Est-ce que ce sont uniquement les Inuits du Nunavut qui sont invités à le faire ou si vous consultez une population plus vaste?

M. Akeeagok : Merci. Toutes les études d’impact sont publiques. Dès qu’un projet est proposé, l’Office des eaux du Nunavut ou la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions diffuse une invitation à participer. N’importe quel organisme peut présenter un mémoire à l’office ou à la commission pendant l’étude d’impact.

Le sénateur Neufeld : Alors, il peut s’agir d’un organisme venant de n’importe où, comme la Colombie-Britannique, par exemple. Vous ai-je bien compris? Sinon, la consultation se fait-elle davantage sur votre territoire ou parmi les gens qui peuvent être touchés par le projet?

M. Akeeagok : Les organismes qui sont actifs un peu partout dans le monde, comme le Fonds mondial pour la nature, participent beaucoup aux audiences publiques. Ils ont leur place dans les études d’impact, tout comme les Inuits. Le gouvernement du Nunavut permet à tout le monde de participer. Ce sont typiquement des organismes comme des associations de chasseurs et de trappeurs qui souhaitent prendre la parole, en particulier lorsque des populations locales habitent à proximité du lieu de réalisation du projet. Des municipalités et des particuliers viennent aussi donner leur point de vue. Il y a une variété de personnes qui s’expriment.

Pour ce qui est des ministères fédéraux, quel que soit celui qui est directement concerné, c’est l’équipe chargée d’évaluer les grands projets qui se présente aux audiences. Le gouvernement du Nunavut fait de même. Nous emmenons nos équipes spécialisées aux audiences pour y présenter notre perspective.

Merci.

Le sénateur Neufeld : Merci.

La présidente : Monsieur le ministre, vous avez indiqué que vous aviez l’intention d’observer les résultats de l’application du projet de loi C-69. Vous dites être favorables à certaines dispositions nouvelles, comme celles qui prévoient l’analyse comparative entre les sexes, la prise en compte des changements climatiques et probablement des effets cumulatifs ainsi que l’élimination du critère d’admissibilité limitant la participation aux personnes directement touchées par le projet.

Pensez-vous qu’à l’avenir, vous pourriez ajouter ces dispositions à votre loi?

M. Akeeagok : Comme je l’ai indiqué, nous suivrons de près l’évolution du projet de loi. Actuellement, comme nous sommes en pleine négociation de transfert des responsabilités, c’est la loi fédérale qui s’applique. La Loi sur l’aménagement du territoire et l’évaluation des projets au Nunavut est une loi fédérale qui s’applique à nos évaluations. C’est sous cet angle que nous continuons de surveiller l’évolution du projet de loi.

Comme vous le savez, nous sommes un territoire tout nouveau. Nous cherchons toujours les pratiques exemplaires, donc, s’il y a des pratiques que nous devons améliorer, nous essayons de le faire.

Merci.

Le sénateur Mitchell : Vous avez dit dans votre présentation qu’il y aura une certaine mesure d’incertitude dans les lois proposées. En même temps, vous avez dit qu’il y aura certains avantages dans le projet de loi qui permettront de créer un plus grand degré de certitude. Il me semble donc qu’il y a un certain compromis.

J’aimerais aborder un autre élément que vous avez souligné, notamment l’exigence de tenir compte des changements climatiques dans les prévisions relatives aux répercussions. Il est vrai que les changements climatiques sont les plus prononcés dans le Nord, où vous habitez. Ils ont déjà des incidences sur la culture, la subsistance, l’économie et la viabilité de la grande partie de votre région; certainement, les répercussions deviennent plus prononcées.

Êtes-vous conscient que ce projet de loi n’exigera aucune évaluation des émissions de gaz à effet de serre en aval et que, dans la mesure qu’une évaluation des répercussions sur les changements climatiques serait exigée, le projet de loi mentionne seulement les émissions en amont, et cela touche surtout les oléoducs? Avez-vous réfléchi à ce que cela signifie et au fait que cela retarderait l’examen des projets?

M. Akeeagok : Merci. Je ne l’ai pas examiné sous cet angle. Comme je l’ai dit, nous suivrons l’évolution du projet de loi, notamment en ce qui a trait aux changements climatiques. Cela ne fait pas partie de nos lois, mais c’est un aspect que nous continuons de surveiller. D’ailleurs, je vous remercie d’avoir reconnu le fait que nous subissons les répercussions des changements climatiques. Nous devons composer chaque jour avec celles-ci. Ce que j’ai dit est que nous allons certainement surveiller l’application de la loi si elle est adoptée. S’il y a des éléments qui fonctionnent, je pense qu’il vaudrait mieux examiner nos propres lois à la lumière des lois fédérales qui nous touchent.

En ce moment, je n’ai pas évalué les répercussions à ce niveau-là. Merci.

Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup. Il y a aussi l’exigence de tenir compte de l’égalité entre les sexes. C’est une exigence qui est prise en compte de manière proactive et volontaire par bon nombre de promoteurs. Cela ne nous surprend pas. Ce sont de bonnes entreprises et de bonnes gens qui tiennent déjà compte de l’égalité entre les sexes.

Cela vous préoccupe-t-il que l’égalité entre les sexes et les obligations liées à l’exigence n’aient pas encore été clairement définies? Est-ce possible qu’elles soient définies dans les règlements, les évaluations stratégiques ou un autre processus semblable? Cela éliminerait-il vos préoccupations à cet égard?

M. Akeeagok : Oui. Nous menons actuellement une évaluation environnementale stratégique. Mon sous-ministre adjoint a fait une présentation à la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions ce matin à ce sujet. Dans ces évaluations environnementales stratégiques, nous pourrons commencer à définir clairement les notions et les exigences. Une chose que j’ai remarquée est que lorsqu’il y a un manque de confiance de la part des investisseurs, nous sommes touchés plus rapidement parce que nos projets sont très coûteux et ils sont réalisés dans un environnement bien différent de celui du Sud. Lorsque le manque de confiance des investisseurs a des répercussions dans le Sud, cela a d’énormes conséquences pour nous. C’est un aspect que j’essaie toujours de communiquer.

L’incertitude engendre l’incertitude. C’est le message que je veux transmettre au comité. Merci.

La sénatrice McCoy : Je m’excuse auprès des témoins. Je suis désolée d’arriver en retard. J’étais prise au Sénat.

J’ai une question, ou plutôt une observation que j’aimerais clarifier, et une question pour nos témoins. Merci beaucoup d’avoir comparu.

Tout d’abord, une clarification. Sénateur Mitchel, vous venez de dire que le projet de loi stipule que seules les émissions en amont — les émissions de gaz à effet de serre — seront prises en compte. Pourriez-vous indiquer l’article du projet de loi où cette exigence est clairement énoncée?

Le sénateur Mitchell : Vous me le demandez à moi?

La sénatrice McCoy : Oui. Vous avez dit que le projet de loi s’applique seulement aux émissions de gaz à effet de serre en amont...

Le sénateur Mitchell : Je ne sais pas si je suis un témoin, mais je suis heureux de répondre. Le projet de loi ne mentionne nulle part les émissions en aval ou en amont.

La sénatrice McCoy : Merci beaucoup. Ce n’est pas comme cela que vous l’aviez dit. C’est la clarification dont j’avais besoin.

Le sénateur Mitchell : Le seul endroit où l’on en fait mention est dans le livret sur les évaluations régionales...

La sénatrice McCoy : Je voulais juste m’assurer...

La présidente : Sénatrice McCoy, veuillez s’il vous plaît poser vos questions au témoin.

La sénatrice McCoy : Il y a quelques semaines, nous avons eu l’occasion de recevoir des représentants de la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions. Nous sommes très impressionnés par le bilan de la Commission et la manière dont elle traite les diverses approbations des grands projets. Un des thèmes qui est ressorti des témoignages est qu’au Nunavut, vous avez réussi à arriver à un consensus entre tous vos résidants, de tous les âges et dans toutes les collectivités sur un avenir durable qui comprend le développement d’un côté et la préservation de la culture, de la religion et de la tradition, de l’autre.

Pour notre gouverne, pourriez-vous nous en dire davantage?

M. Akeeagok : Merci, madame la sénatrice, et merci de me permettre de dire quelques mots au sujet de la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions et l’Office des eaux du Nunavut. Je pense que les gens qui ont négocié l’Entente sur les revendications territoriales du Nunavut ont eu la clairvoyance de viser l’équilibre, sachant qu’il y aurait un gouvernement et que les Inuits continueraient d’y vivre. Je crois que dans le cadre de ces négociations collectives, ils ont choisi de créer des conseils à représentation égale, nommés à moitié par les Inuits, à moitié par le gouvernement — et par « gouvernement », je veux dire le fédéral et le territorial. C’est ainsi que les conseils ont vu le jour et ont reçu l’autonomie en tant qu’institutions publiques. Grâce à cela, à leur rigueur et à la surveillance, ainsi qu’à l’ouverture du processus, tous ceux qui veulent apporter leurs commentaires peuvent le faire. Les autres examens sont publics; les gens peuvent contribuer et les conseils tentent de trouver le juste équilibre, comme vous l’avez dit. Moi-même, en tant qu’Inuk, je crois fermement que nous devons protéger l’environnement tout en ayant des projets de développement. Nous essayons d’établir l’équilibre entre ces deux éléments. Selon moi, grâce à la participation des collectivités et des individus au gouvernement territorial, nous avons établi un bon équilibre. Je félicite la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions et je suis heureux que vous, les sénateurs, ayez eu l’occasion de l’entendre.

Le sénateur Patterson : La Loi concernant l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut crée la Commission du Nunavut chargée de l’examen des répercussions avec un mandat très clair, simple et de grande portée, contrairement au projet de loi C-69, qui établit plus de 20 critères pour l’examen des projets, dont la plupart n’ont pas encore été définis, ce qui ouvre la voie au risque de litiges.

Dans votre mémoire, vous dites que vous vous préoccupez de ce que vous nommez une grande incertitude dans le projet de loi, et vous faites mention de trois facteurs qui viennent compliquer les choses : les exigences supplémentaires en matière de consultation, l’exigence de tenir compte de l’égalité entre les sexes et l’exigence de tenir compte des changements climatiques dans les prévisions des incidences environnementales. Selon vous, ces exigences risquent d’embrouiller ou de prolonger le processus.

En vertu de l’article 12.2.2 de l’Accord sur les revendications territoriales, la Commission a le simple mandat d’examiner les répercussions écosystémiques et socioéconomiques des projets proposés au Nunavut. C’est énoncé en moins de 10 mots, au lieu de 400 pages et plus de 20 conditions prescriptives.

Je me demande simplement si vous croyez que la confiance des investisseurs et... Tout d’abord, croyez-vous que les répercussions écosystémiques et socioéconomiques des propositions de projets traiteront de tous les facteurs que la Commission voudrait examiner en évaluant un projet, notamment l’égalité entre les sexes et les changements climatiques? De plus, votre préoccupation concernant l’incertitude des investisseurs serait-elle apaisée s’il y avait une définition simple des critères — comme dans la Loi concernant l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut —, en ce qui a trait aux répercussions écosystémiques et socioéconomiques des propositions de projets?

M. Akeeagok : Qujannamiik, sénateur Patterson, et merci de cette occasion de m’exprimer. En ce qui a trait aux éléments socioéconomiques de l’Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, cela fonctionne bien pour nous. L’accord a fait l’objet de travaux et de discussions dans le cadre des processus prévus et avec la participation du public, du gouvernement et les industries, et cela fonctionne. La preuve en est que nous avons réalisé des projets. Je tiens aussi à affirmer que certains projets n’ont pas pu aller de l’avant parce que les collectivités avaient des préoccupations. C’est grâce au côté socioéconomique que les collectivités peuvent examiner les projets et formuler des suggestions et des recommandations à la commission, que celle-ci écoute et inclut dans ses conditions.

En ce qui a trait à la confiance des investisseurs, je tiens de nouveau à souligner les trois facteurs que j’ai mentionnés. D’après ce que j’entends de la part des industries, si l’évaluation soulève des incertitudes, cela devient plus difficile pour eux d’investir. Ils vont plutôt investir ailleurs; c’est ce qui nous préoccupe. Ce que nous voulons accomplir dans le cadre socioéconomique est que des entreprises socialement responsables viennent développer notre territoire et qu’elles permettent aux Canadiens de ce magnifique territoire de mieux contribuer au reste du Canada. Merci.

Le sénateur Patterson : Bravo. Bien dit.

La présidente : J’ai une question. Je me demandais si vous pouviez m’expliquer les étapes d’un projet minier typique dans le Nord, au Nunavut. Je suis persuadée qu’il y a des mines d’or. Je sais que les projets miniers entraînent une énorme production de résidus. Par exemple, l’exploitation des mines d’or nécessite l’utilisation de cyanures, mais le traitement de ces cyanures dans les régions du Sud requiert des quantités énormes de peroxyde. Je me demande comment vous, les dirigeants des régions nordiques, vous y prenez pour atténuer les répercussions réelles des procédés métallurgiques et de la production de résidus. Je me demande aussi s’il y a assez de personnes qui surveillent ces répercussions et qui veillent à ce que les mesures d’atténuation soient efficaces, ce que l’entreprise a dit qu’elle ferait.

M. Akeeagok : Oui. Merci beaucoup. Le processus est long entre l’exploration minière et l’exploitation minière. Une personne de ma région, au Nunavut, revendique un certain territoire et prend actuellement part à des discussions avec les dirigeants d’une mine d’or afin de leur permettre d’exploiter les ressources qui se trouvent sur les terres en question. Alors nous commençons à voir des situations comme celle-là se produire de plus en plus. Avant, les exploitants du Sud décidaient tout — ils arrivaient et entamaient tout de suite les travaux d’exploration. Je pense que cela arrive encore souvent, mais les règlements qui régissent le processus public permettent à tous les ministères, qu’ils soient fédéraux ou territoriaux, de participer au processus d’évaluation. Il est également important de cerner les répercussions sur les collectivités.

Je pense que les particuliers ou les entreprises qui exploitent les terres procèdent à d’excellentes évaluations environnementales. Grâce à ces évaluations, il y a déjà des données qui existent au sujet de ce territoire. Ainsi, s’il y a un gros troupeau de caribous qui s’installe dans la région en question, il y a tout de suite un avertissement. Je peux vous assurer que s’il y a beaucoup de caribous à cet endroit, le processus permettra aux chasseurs, aux trappeurs et aux Inuit de nos collectivités de réclamer un certain niveau de protection.

Comme le sénateur Patterson l’a indiqué, ce qui ressort de la situation relative aux mines de minerai de fer de Baffinland, c’est que l’entreprise doit actuellement respecter 200 conditions. Une fois que l’entreprise les a révisées, c’est en collaboration avec les Inuits qu’elle accepte ou non de procéder au projet. Si ce dernier se trouve sur des terres appartenant à des Inuits, l’entente assortie d’avantages avec le peuple inuit exige effectivement une surveillance à cet endroit. S’il se trouve sur des terres publiques, le gouvernement interviendrait et serait tenu de respecter ses propres conditions et d’assurer une surveillance conjointe du projet.

Selon moi, il y a énormément de surveillance bilatérale, et les intervenants de l’industrie, les peuples inuits et les membres de la collectivité doivent tous faire preuve d’une grande ouverture d’esprit. Tout le monde doit collaborer dans ce processus rigoureux. L’industrie sait qu’il s’agit d’un long processus, mais une fois qu’elle décide de s’engager, les travaux de construction ne tardent pas à suivre.

Je pense que plus de 1 milliard de dollars ont servi à créer l’infrastructure de la nouvelle mine d’or qui vient d’ouvrir. Cela comprend des fonds destinés à la surveillance et à la formation. Une fois que la confiance est bien établie, l’industrie s’installe sur les terres et tout le monde respecte le processus. Merci de m’avoir permis de parler davantage de cette question, madame la présidente.

Le sénateur Mitchell : Vous avez dit que vous êtes favorables aux nouvelles exigences voulant que le processus de prise de décisions doit tenir compte de connaissances traditionnelles et locales plus vastes. De nombreux groupes autochtones m’ont dit qu’il s’agit d’un élément très puissant et important du projet de loi. Je suis donc très heureux que vous l’appuyiez autant.

Pourriez-vous nous expliquer les raisons pour lesquelles vous estimez que c’est aussi important, et la façon dont le processus d’évaluation est intégré à un régime fondé sur des données probantes? Peut-être pourriez-vous nous parler de votre propre processus d’évaluation afin que nous ayons une idée de comment cela fonctionne?

M. Akeeagok : Merci. Les connaissances traditionnelles des peuples autochtones font partie intégrante des évaluations et des examens de nos projets au Nunavut. Nous savons et acceptons que les Inuits sont ici depuis longtemps et possèdent énormément de connaissances. Grâce aux processus d’évaluation environnementale et aux accords sur les revendications territoriales, nous avons fait énormément de progrès pour ce qui est d’accepter les connaissances des Autochtones et de les marier aux données scientifiques. Ces régimes de cogestion permettent aux deux instances de se faire entendre, et permettent d’établir un certain équilibre. En se fondant uniquement sur l’un ou l’autre de ces bassins de connaissances, l’équilibre est perdu. Nos évaluations sont très équilibrées, ce qui nous permet de combler tous les écarts. Ainsi, tout le monde sait qu’il y aura un impact environnemental. Tout projet de développement en entraîne. Nous devons alors nous pencher sur toutes les répercussions environnementales et faire participer les Inuits, ou les Autochtones, dans le cas du Sud, afin d’atteindre cet équilibre. C’est ce qui se produit ici, et je pense que cela témoigne des progrès que nous réalisons. Merci.

Le sénateur Mitchell : Le sénateur Patterson vous a posé une question intéressante. Il a indiqué que les critères qui semblent être pris en compte dans votre processus sont définis comme étant écosystémiques et socioéconomiques. Cela me semble infiniment vaste. On peut comparer cela à l’article 22 du projet de loi C-69, qui comporte 20 critères précis, qui peuvent être précisés davantage et qui feront l’objet de lignes directrices adaptées, et ainsi de suite, dans le cadre des travaux relativement au projet de loi C-69.

Dans votre processus, suivez-vous des étapes qui tiennent compte de cet éventail infiniment vaste d’éléments possibles et potentiels — je ne le sais pas, supposons — qui sont affinés davantage pour le promoteur du projet avant qu’il n’entame son processus d’évaluation des impacts?

M. Akeeagok : Oui. Merci de votre question. C’est exactement ce que nous faisons. Lorsqu’un projet nous est présenté, nous en évaluons la portée et dressons des lignes directrices en fonction du projet proposé et de l’endroit où il sera réalisé. Nous établissons un plan afin que tout le monde soit sur la même longueur d’onde. Nos échéances sont donc plus faciles à suivre et le processus devient plus pertinent. Chaque projet de développement entraîne des répercussions différentes. Ainsi, même si les critères dont nous tenons compte dans le cadre de nos évaluations sont vastes, nous sommes en mesure de les circonscrire grâce à la collaboration. Merci.

Le sénateur Mitchell : Alors, cette évaluation de la portée d’un projet ne crée pas plus d’incertitude. Au contraire, elle crée de la certitude, et c’est ce qui arrivera avec le projet de loi C-69.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur le premier ministre du Nunavut, pour votre témoignage et vos réponses à nos questions. Merci beaucoup à vous, chers collègues, pour vos questions.

Nous accueillons maintenant, de Stantec, Ward Prystay, premier vice-président des Services environnementaux, et, de Golder, Wayne Speller, spécialiste principal de la Réglementation et de l’Évaluation des répercussions, et Jill Baker, spécialiste principale de l’Évaluation environnementale et sociale.

Je vous remercie de vous être joints à nous. J’invite M. Prystay à prononcer son allocution d’ouverture.

Ward Prystay, premier vice-président, Services environnementaux, Stantec : Merci. Avant de commencer, j’aimerais souligner que nous sommes sur le territoire traditionnel du peuple algonquin anishinabe. Notre entreprise de services environnementaux à l’échelle du pays compte environ 1 400 employés. Nous réalisons des évaluations environnementales dans toutes les provinces et tous les territoires au Canada, tant pour des clients de la fonction publique que du secteur privé.

Je travaille dans le domaine de l’environnement depuis 24 ans. Le plus gros de ma carrière a été consacré aux évaluations fédérales et environnementales. Stantec est une entreprise multidisciplinaire qui offre des services de planification, d’environnement, d’ingénierie et d’architecture partout dans le monde.

Au cours des sept dernières années, Stantec a participé à plus du quart des projets assujettis à la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale de 2012. Nous effectuons une gamme d’activités, allant de la gestion et de la préparation d’évaluations environnementales complètes à l’examen par les pairs de travaux réalisés par d’autres entreprises.

Nos praticiens ont également créé du matériel de formation et des documents d’orientation au nom d’organismes gouvernementaux, notamment l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, et l’un de mes collègues siège actuellement au comité consultatif multilatéral sur le processus de modernisation de l’évaluation environnementale.

En tant que praticiens de l’évaluation professionnels, nous offrons des services de consultation indépendants et de tierce partie pour recueillir, analyser et présenter de l’information environnementale et socioéconomique dont les organismes gouvernementaux ont besoin pour prendre des décisions justes et pesées. Une grande partie de ce travail est effectuée par des collègues qui travaillent conformément au code de déontologie d’organisations professionnelles. Personnellement, je suis un biologiste professionnel au College of Applied Biology de la Colombie-Britannique.

Nous avons suivi le débat public sur les évaluations environnementales de grande envergure au Canada et nous avons pris connaissance des changements proposés aux processus fédéraux d’évaluation environnementale. En 2016 et 2017, nous avons présenté des mémoires officiels à l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, à Ressources naturelles Canada et au Comité d’experts sur l’examen des processus d’évaluation environnementale. Les observations que nous présentons aujourd’hui reflètent nos opinions en tant que praticiens professionnels de l’évaluation environnementale.

En ce qui concerne le projet de loi C-69, dans un premier temps, j’aimerais parler des changements positifs qu’il apportera. Premièrement, on disposera de plus de temps au début du processus pour bien établir la portée de l’évaluation et le contenu de l’énoncé des incidences environnementales du promoteur. Cela devrait être bénéfique pour tous les participants puisqu’il y aura un plus grand degré de certitude quant aux exigences et, espérons-le, aux délais des évaluations.

Deuxièmement, il favorisera la participation des Autochtones. Si les communautés autochtones touchées sont en mesure de participer à l’établissement de la portée et au processus d’examen, il y aura une plus grande transparence et une plus grande confiance dans les décisions d’évaluation.

Pour ce qui est des points à améliorer, les praticiens de Stantec ont exprimé des préoccupations générales et précises à l’égard du projet de loi C-69. Parmi ces préoccupations, mentionnons l’allongement du processus de réglementation et l’incertitude quant aux délais en raison des prolongations discrétionnaires et des nouveaux facteurs dont le gouvernement doit tenir compte; une plus grande incertitude entourant les méthodes utilisées et l’interprétation des évaluations défendables de certains effets, particulièrement la durabilité, les changements climatiques et l’interaction du sexe et du genre; des coûts supplémentaires pour tous les participants au processus d’évaluation en raison des plus longs délais et des nouveaux éléments à prendre en compte dans le cadre de l’évaluation; et la nécessité de clarifier certaines définitions dans la nouvelle loi sur l’évaluation d’impact.

J’ai quelques recommandations précises à l’intention du comité. Au sujet de la loi sur l’évaluation d’impact, les détails comptent. L’article 7 proposé interdit aux promoteurs d’entreprendre des travaux ou des activités susceptibles d’entraîner des effets environnementaux sur le territoire domanial ou des effets relevant d’un domaine de compétence fédérale à moins qu’une décision soit prise à cet égard. Selon l’interprétation qu’on en fait, cette disposition pourrait faire obstacle aux activités nécessaires à l’étape préparatoire d’un projet, par exemple, l’aménagement de routes d’accès à de nouveaux sites, la réalisation d’études techniques approfondies comme le forage géotechnique ou les programmes d’essais sur des pieux, ou encore la réalisation d’études de référence sur l’habitat du poisson à l’aide d’équipement comme des filets à larges mailles ou des appareils de pêche à l’électricité. Ces activités, ainsi que d’autres activités semblables, pourraient avoir un effet interdit.

Stantec recommande que l’article 7 proposé soit modifié de manière à ce que l’interdiction vise précisément les travaux de construction et non pas la planification, les études approfondies ou les activités nécessaires à l’avancement des processus de conception ou de réglementation.

La loi établit également des délais à l’égard des diverses étapes du processus d’évaluation. En ce qui concerne les délais accordés aux promoteurs, la loi prévoit une seule prolongation; toutefois, pour les délais du gouvernement, il y a des dispositions prévoyant un nombre indéterminé de prolongations, ce qui nous amène à nous demander si les délais prévus par la loi vont réellement permettre d’accroître la certitude et l’efficacité.

La Canada West Foundation a publié une étude qui montrait qu’une évaluation environnementale prenait en moyenne trois ans et demi, avec certains processus qui s’échelonnaient sur plus de 10 ans. Si on s’en tient aux délais prévus pour l’évaluation d’impact sans qu’il y ait de prolongation, les aspects gouvernementaux vont allonger le processus d’environ deux mois et demi. Même si ce n’est pas beaucoup, la possibilité d’accorder plusieurs prolongations va en quelque sorte à l’encontre d’un processus réglementaire efficace ou efficient.

Stantec recommande que le nombre de prolongations pour les tâches gouvernementales soit limité, comme c’est le cas pour les responsabilités des promoteurs, ou que chaque prolongation soit assortie d’un processus rigoureux d’approbation par la haute direction. Cela donnera aux participants une plus grande certitude dans le processus.

En ce qui concerne les évaluations environnementales prévues dans la nouvelle loi sur la Régie canadienne de l’énergie, la loi prévoit des dispositions qui pourraient donner lieu à trois niveaux d’évaluation, à savoir les évaluations réalisées à l’appui des ordonnances en vertu de l’article 215 et des certificats au titre de l’article 183 et les examens, menés par une commission, des projets respectant les seuils fixés par la Loi sur l’évaluation d’impact.

L’exigence selon laquelle tout projet réglementé par la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie qui est également assujetti à la Loi sur l’évaluation d’impact doit être examiné par une commission donne lieu à deux catégories d’industries au Canada : l’industrie énergétique et toutes les autres industries. Pour la plupart des déclencheurs actuels de l’application de la LCEE de 2012, d’après l’expérience de Stantec, une commission d’examen impliquerait des coûts élevés et des efforts accrus pour tous les participants au processus. Stantec recommande que le nouvel article 185 soit revu, de sorte qu’un projet ne soit renvoyé à une commission que s’il existe un risque sérieux d’effets environnementaux ou socioéconomiques négatifs importants.

En terminant, nous aimerions vous remercier de nous donner l’occasion de témoigner aujourd’hui. Nous sommes fiers de notre contribution à l’avancement des pratiques en matière d’évaluation environnementale au Canada et nous espérons que notre témoignage vous sera utile. Même si nous parlons aujourd’hui d’une mesure législative concernant les évaluations environnementales au Canada, nous sommes d’avis que les politiques et les documents d’orientation connexes seront tout aussi importants si on veut avoir un processus défendable et efficace. Nous espérons avoir accès à ces documents avant que la loi entre en vigueur pour que tout soit clair pour tous les participants. Je vous remercie.

Wayne Speller, directeur et spécialiste principal en réglementation et en évaluation d’impact, Golder : Merci, madame la présidente, et mesdames et messieurs les sénateurs. C’est un privilège d’être parmi vous aujourd’hui pour vous faire part de nos réflexions, en tant que praticiens de l’évaluation d’impact, sur le projet de loi C-69, et plus particulièrement sur la Loi sur l’évaluation d’impact proposée.

Je tiens tout d’abord à souligner que nous nous trouvons aujourd’hui sur le territoire traditionnel des Algonquins anishinabes.

Jill et moi représentons une importante communauté de scientifiques, de planificateurs et d’ingénieurs au sein de Golder, une société d’experts-conseils en environnement qui compte plus de 2 700 employés canadiens et 6 500 employés à l’échelle mondiale. Golder mène depuis longtemps des évaluations d’impact au Canada et à l’étranger pour des projets dans les secteurs du pétrole et du gaz, des mines, des infrastructures et de l’électricité. Nous sommes ici aujourd’hui pour vous donner notre avis sur le projet de loi C-69 en tant que professionnels indépendants et non pour parler du point de vue de nos clients ou de leurs projets.

Dans l’ensemble, nous considérons que le projet de loi C-69 est une amélioration par rapport à la LCEE de 2012, en ce qui a trait au processus d’évaluation d’impact, mais nous sommes d’avis qu’il présente les mêmes problèmes liés à l’incertitude et à l’imprévisibilité.

Nous aimerions tout d’abord parler de deux aspects positifs du projet de loi, puis conclure en présentant deux points à améliorer.

Tout d’abord, l’étape préparatoire pourrait donner lieu à un environnement plus transparent et plus attrayant. L’ajout d’une étape préparatoire est conforme aux meilleures pratiques en matière d’évaluation d’impact et comporte trois principaux avantages. Premièrement, la participation de toutes les parties intéressées dès le début va renforcer la crédibilité et la confiance envers le processus et augmentera la probabilité qu’on puisse établir une portée détaillée pour une évaluation qui ne nécessitera pas de modifications ultérieures. Deuxièmement, la mobilisation des groupes autochtones tôt dans le processus permettra d’intégrer les connaissances autochtones à l’évaluation; troisièmement, les cinq résultats attendus de l’étape préparatoire peuvent accroître la certitude et la prévisibilité en établissant une feuille de route claire pour toutes les parties intéressées.

Une mise en œuvre efficace sera indispensable. Si la mise en œuvre est réussie et que tout le monde y participe de bonne foi, on pourra en tirer les avantages dont je viens de parler. Autrement, cela ne fera qu’allonger le processus. Pour ce qui est de l’agence d’évaluation d’impact proposée, il sera essentiel de concilier les divergences d’opinions au cours de ce processus, et il sera important de le faire tout au long du processus d’évaluation d’impact.

Deuxièmement, l’inclusion explicite des facteurs sociaux, sanitaires et économiques est une autre amélioration qui correspond à ce que les territoires du Nord et certaines provinces prennent déjà en considération. Depuis des années, bon nombre d’évaluations d’impact fédérales prennent en compte ces facteurs, dans une certaine mesure. En fait, le gouvernement fédéral s’aligne ni plus ni moins sur les normes environnementales et sociales internationales bien connues des institutions financières du monde entier. En tant que praticiens dans le domaine, nous parlons aux gens des collectivités qui pourraient être touchées par un projet de développement et nous estimons que ce changement favorisera un dialogue plus ouvert et plus transparent.

Nous aimerions maintenant mettre en évidence deux points à améliorer.

Premièrement, il faut savoir comment déterminer la durabilité d’un projet. Nous évaluons déjà les facteurs environnementaux, sociaux, sanitaires et économiques, ainsi que leur interrelation, dans le cadre de projets réalisés partout dans le monde. Il peut être difficile d’en arriver à une seule conclusion lorsqu’il s’agit de la durabilité d’un projet, tout comme il peut être difficile de comprendre quel niveau d’impact amènerait un décideur à décider qu’un projet n’est pas « durable ». Si nous, les praticiens, devons bien renseigner les décideurs sur la durabilité des projets, il faudra qu’on nous donne des directives claires et qu’on nous dise exactement quelle est la meilleure façon de s’y prendre. Nous croyons savoir que des règlements et des directives seront publiés sous peu et que nous devrions avoir l’occasion de nous exprimer à ce sujet.

Deuxièmement, il faut plus de certitude et de prévisibilité en ce qui a trait aux délais. Aux termes de la LCEE de 2012, il y a de nombreux problèmes à ce sujet : le glissement de la portée de l’évaluation, des années de demandes de renseignements supplémentaires, l’approche visant à interrompre temporairement le processus fédéral, les mises à jour sur la conception du projet et la possibilité de suspendre ou de prolonger les délais fédéraux. Certaines de ces questions sont traitées à l’étape préparatoire, si elle est bien mise en œuvre; toutefois, ce sont des questions qui doivent être réglées pour accroître la certitude et la prévisibilité quant aux délais, et nous savons qu’elles seront probablement prises en compte dans les règlements et les documents d’orientation. Comme nous l’avons déjà dit, il sera essentiel que l’agence proposée concilie les points de vue divergents.

En terminant, nous aimerions réitérer nos sincères remerciements pour l’occasion qui nous est donnée de comparaître devant vous aujourd’hui et nous serons heureux de répondre à vos questions. Nous avions prévu de vous fournir nos commentaires écrits sur les règlements et les documents d’orientation lorsqu’ils seront publiés et nous n’avons pas rédigé de mémoire écrit pour votre comité. Madame la présidente, si c’est quelque chose que le comité juge utile, nous serions heureux de le faire.

La présidente : Je vous invite à le faire. Merci.

Le sénateur MacDonald : Merci à tous les témoins d’être ici aujourd’hui.

Monsieur Prystay, je m’adresse d’abord à vous. Nous croyons savoir que les délais prévus pour certains volets du processus d’évaluation d’impact sont plus courts que ce qui est prévu actuellement dans la loi de 2012. Cependant, des dizaines d’entreprises nous disent que, dans l’ensemble, le processus sera beaucoup plus long dans le cadre du projet de loi C-69. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les entreprises nous disent que les délais seront plus longs au final?

M. Prystay : Lorsqu’on compare les délais énoncés dans la nouvelle loi sur l’évaluation d’impact avec ceux prévus dans la loi actuelle, il suffit d’additionner les éléments qui relèvent de la compétence fédérale et les responsabilités.

Le sénateur MacDonald : En ce qui a trait aux prolongements des pipelines de courte longueur, est-il possible que le projet de loi C-69 exige qu’une commission procède à des examens? Si le projet est renvoyé devant la commission, combien de temps environ faudra-t-il prévoir pour l’examen au titre du projet de loi C-69 ?

M. Prystay : Je vais confirmer les articles. Les ordonnances en vertu de l’article 215 visent les pipelines ne dépassant pas 40 kilomètres, et les certificats en vertu de l’article 183 visent les pipelines dépassant 40 kilomètres. Actuellement, la limite actuelle dans la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale (2012) est de 40 kilomètres. Cela dépendrait donc vraiment de la façon dont les règlements sur l’évaluation d’impact définissent un projet pouvant faire l’objet d’un examen afin de déterminer à quel moment un pipeline de courte longueur doit être examiné par une commission.

Le sénateur MacDonald : Pensez-vous que ces propositions sont raisonnables, réalisables?

M. Prystay : Je pense qu’une évaluation qui est assujettie à un examen par une commission doit être fondée non pas sur une longueur ou une taille arbitraire de pipeline, mais sur le risque que le projet représente en termes d’effets environnementaux ou socioéconomiques importants.

Le sénateur Woo : Tout d’abord, puis-je obtenir des précisions sur l’un des points de données dont M. Prystay nous a fait part? Il s’agit de l’étude de la Canada West Foundation sur la durée moyenne des évaluations environnementales. Vous l’avez probablement tiré directement du rapport.

M. Prystay : Oui, c’est exact.

Le sénateur Woo : Vous avez fait une comparaison avec le projet de loi C-69 pour suggérer que le délai pourrait durer quelques mois de plus. Vous n’avez pas à répondre à cette question, car vous n’avez pas les renseignements devant les yeux, mais l’étude menée par l’Institut C.D. Howe dit en fait que la durée moyenne est plutôt de quatre ans, les grands projets pouvant durer jusqu’à six ans. Il y a donc un écart entre les données de la Canada West Foundation sur la durée moyenne de l’évaluation d’un projet et celles des autres études.

Si vous avez un commentaire à faire à ce sujet, je serais heureux de l’entendre, mais je le mentionnais davantage pour souligner qu’il y a des écarts de données.

Je souhaite vous parler à tous les deux de la planification précoce, que vous appuyez, je crois. Nous avons entendu des commentaires mitigés de la part d’autres témoins. Si l’on met de côté les témoins qui s’opposent totalement à une planification précoce, ceux qui admettent qu’elle a une certaine valeur se préoccupent surtout de ce qui se passe à la fin du processus de planification précoce. En d’autres termes, quel type de directives sont données à la fin de la planification précoce dans les soi-disant lignes directrices adaptées? Fournissent-elles suffisamment de renseignements pour que le promoteur puisse ensuite effectuer une étude qui est véritablement adaptée?

Avez-vous des préoccupations au sujet de la version actuelle du projet de loi? Vous avez déjà passé par le processus de planification précoce. Diriez-vous que la version actuelle du projet de loi fournit suffisamment de précisions au promoteur pour que ce dernier puisse effectuer le travail d’une manière qui, à son avis, satisfait toutes les exigences requises? Comprenez-vous ma question? Avez-vous des commentaires à faire à cet égard?

M. Speller : Je vous remercie de la question. D’après ce que je comprends, le projet de loi ne contient pas beaucoup de détails sur ce qui figurera dans les lignes directrices adaptées relatives à l’étude d’impact. À mon avis, plus elles sont détaillées, mieux c’est. Il devrait s’agir de documents de 30, 40 ou 50 pages avec des détails précis sur ce qui devrait être inclus dans l’évaluation.

Comme vous pouvez l’imaginer, il y a une différence entre une directive exigeant une évaluation de la qualité de l’air et une autre qui dit de s’intéresser au dioxyde de soufre, au dioxyde d’azote, à tous ces éléments, d’utiliser ce modèle, et d’inclure les collectivités. Plus il y a de détails au début du processus, moins il est probable qu’il y aura des ajouts plus tard pour élargir la portée, ou d’autres facteurs à prendre en considération. C’est ce que je pense.

Le sénateur Woo : Parlez-vous du projet de loi ou à la publication des lignes directrices?

M. Speller : Dans le processus en tant que tel, à la fin du processus de planification précoce, les lignes directrices adaptées devraient être très adaptées et détaillées. Actuellement, le projet de loi dit qu’il devrait y avoir des lignes directrices, mais c’est tout ce qu’il dit pour le moment. Sans les règlements, je n’ai donc aucune idée de quoi cela aura l’air.

M. Prystay : Je suis d’accord avec Wayne. La majorité de mon travail se fait en Colombie-Britannique, où nous avons un processus détaillé relatif au cadre de référence. C’est ce que nous appelons les « exigences en matière de renseignements pour les demandes », et il s’agit d’une portée négociée de l’évaluation. Tous les organismes de réglementation fédéraux et provinciaux intéressés, les municipalités locales et les Premières Nations susceptibles d’être touchées y participent. Nous avons constaté que, lorsque tout le monde participe à l’élaboration des lignes directrices, le processus est plus clair et moins long. Cependant, cela dépend vraiment de la participation active de tous les organismes à l’élaboration de ces lignes directrices.

Le sénateur Mitchell : Merci beaucoup. C’est bon de vous avoir ici et de vous entendre parler des aspects positifs du projet de loi, car je suis le parrain, alors je suis heureux de l’entendre.

Vous avez tous deux fait allusion — et vous avez tout à fait raison — à la préoccupation que vous auriez au sujet du caractère discrétionnaire, certains diraient peut-être arbitraire, des prolongations, des délais. Toutefois, aucun d’entre vous ne conteste le fait que, à quelques jours près, chaque délai prévu par la loi est plus court ou beaucoup plus court que tous ceux que nous avons actuellement. C’est donc un début plutôt bon.

J’aimerais en venir au fait que vous pensiez qu’il y aurait des délais arbitraires et prolongés. Je regarde le document de travail du gouvernement sur les exigences en matière de renseignements et de gestion des échéanciers, et on y énumère quatre points clairs, des critères, la justification pour laquelle l’agence, le gouvernement, qui que ce soit, pourrait suspendre les délais d’un projet. Premièrement, le promoteur en ferait la demande. Deuxièmement, le promoteur apporterait un changement de conception suffisamment important. Ce serait raisonnable. Troisièmement, il manquerait des renseignements essentiels. L’agence s’adresserait donc au promoteur pour les obtenir. C’est à elle de s’en occuper. Quatrièmement, le promoteur n’aurait pas payé des activités de recouvrement des coûts. Ces quatre critères sont axés sur le promoteur.

Ne s’agirait-il pas d’une amélioration importante, notamment par rapport aux critères actuels qui sont certainement arbitraires ou discrétionnaires? Ce serait assez clair. Que pouvez-vous ajouter à cet égard?

M. Speller : Ce qui me préoccupe, c’est ce que j’appellerais les voies de contournement pour suspendre les délais fédéraux. Je crois comprendre qu’il en existe quatre. D’après notre expérience, ce genre de phases peuvent être utilisées pour suspendre les délais au besoin. Je vais utiliser l’exemple des renseignements essentiels.

Dans le cadre du processus d’évaluation d’impact, après la présentation et l’examen, il y a un processus de demande de renseignements, un processus de demande de renseignements supplémentaires. Le processus de demande de renseignements supplémentaires est un processus minuté aux délais précis. Lorsque l’agence fédérale pose les questions au promoteur, la minuterie s’arrête. Le point que vous avez décrit au sujet des exigences en matière de renseignements essentiels n’est peut-être pas la même chose. Nous n’en sommes pas sûrs. Toutefois, si c’est la même chose, c’est l’un des domaines critiques où le délai de 365 jours qui est réduit à 300 jours finit par se prolonger pour atteindre jusqu’à 2 ou 3 ans. En effet, selon l’étendue des questions reçues, le promoteur pourrait remettre ses réponses dans un délai de neuf mois à un an. C’est là que le processus de planification précoce peut être utile, car des lignes directrices détaillées et une clarté au début du processus signifient, espérons-le, que tous les renseignements requis se trouvent dans l’étude d’impact, ce qui réduira plus tard le temps d’attente lié à la demande de renseignements supplémentaires. C’est un point positif. C’est un exemple où il pourrait y avoir des suspensions — je ne sais pas si je les qualifierais d’arbitraires — des délais qui font que ces projets prennent plus de temps.

La sénatrice Simons : Je dois dire, parce que je viens d’Edmonton, que Stantec vient d’Edmonton. Une société mondiale basée à Edmonton. Golder est également une société mondiale. Beaucoup de témoins ont souligné que l’un des dangers du projet de loi C-69 est que ce dernier rendra le Canada non concurrentiel, non concurrentiel pour les projets, non concurrentiel pour les investissements en capital. En tant que Canadien, je pense que nous nous demandons souvent si d’autres font la bonne chose — que nous ne faisons pas.

Compte tenu de votre expertise mondiale, pouvez-vous nous dire s’il y a des aspects du projet de loi qui nous mettent dans une situation non concurrentielle par rapport à des gens qui réalisent des projets de nature parallèle dans leur propre pays ou s’il y a des éléments qui nous donnent un avantage concurrentiel?

M. Prystay : Notre expérience de travail à l’échelle mondiale nous a permis de constater que les fondements des pratiques d’évaluation environnementale sont généralement les mêmes partout dans le monde. Les grandes sociétés mondiales ont habituellement des normes qui leur permettent de satisfaire la norme mondiale qui ressemble d’ailleurs beaucoup à celle du Canada, et ce, dans toutes les évaluations qu’elles effectuent, peu importe le pays où elles se trouvent.

Je pense que ce qui préoccupe le plus l’industrie est la certitude du processus et les délais. Aucun de nos clients n’a jamais dit qu’il ne voulait pas entreprendre une évaluation environnementale appropriée et approfondie. Les commentaires concernent généralement l’incertitude du processus et des délais pour effectuer une évaluation environnementale appropriée.

La sénatrice Simons : Diraient-ils qu’il y a plus d’incertitude ici que, disons, aux États-Unis, en Australie ou un autre pays semblable?

M. Prystay : Malheureusement, je n’ai pas posé cette question précise aux clients.

La sénatrice Simons : Monsieur Speller, madame Baker, pouvez-vous nous en parler?

Jill Baker, spécialiste principale de l’évaluation environnementale et sociale : Je peux tenter de répondre à la question. Je n’ai pas fait une analyse de pays comparables. Je peux toutefois schématiser et dire qu’il existe des normes qui sont bien connues par les praticiens quant à ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Je crois que le projet de loi dont vous êtes saisis, comme vous l’avez dit, s’il est bien mis en œuvre, permettra que le processus de planification soit efficace.

Il ne faut pas oublier que le processus d’évaluation des répercussions environnementales est un processus de planification qui s’inscrit dans un processus de développement de projet plus large. Ce n’est pas qu’une étape administrative à passer pour qu’un projet soit approuvé.

D’autres pays, et je ne peux pas en nommer un en particulier, qui savent bien le faire reconnaissent qu’il s’agit d’un processus de planification. Quelles sont les caractéristiques d’un bon processus de planification? On pourrait en parler pendant des jours, mais je crois qu’il faut qu’il soit inclusif, invitant, ouvert et transparent. À mon avis, c’est que le projet de loi tente de faire par différents moyens. Tout cela pour vous dire que le Canada est probablement bien placé quant au respect des normes mondiales. Je crois que des analyses existent qui montrent que les processus adoptés par le Canada sont parmi les meilleures. Toutefois, il faudrait que je fasse ce genre d’analyse pour en être certaine. Je crois que certains en ont fait.

Le défi est qu’on ne peut pas dire que c’est vrai mondialement parce qu’on ne peut pas comparer les pays en développement qui ont de faibles régimes réglementaires au Canada qui a un régime réglementaire solide.

La sénatrice Simons : Je tiens à dire que je partage votre frustration quant à la liste manquante de projets et à l’absence d’un cadre réglementaire. Nous avons demandé une liste des projets. Nous l’avons officiellement demandé, mais nous ne l’avons toujours pas.

Le sénateur Tkachuk : Je vous souhaite la bienvenue, et je vous remercie.

Qui sont vos clients? La question s’adresse à vous deux. Qui sont-ils? Sont-ils des sociétés pétrolières? Le gouvernement? Quelle est votre clientèle?

M. Speller : Nous travaillons bien souvent sur de grandes évaluations d’impact. Ce sont des clients de l’industrie pétrolière et gazière, de l’industrie des pipelines, de l’industrie des infrastructures et du secteur minier. Nous travaillons dans certaines provinces pour des organismes réglementaires et pour des groupes autochtones. Toutefois, nous travaillons surtout sur de grands projets. Nous avons donc tendance à représenter des promoteurs de grands projets.

M. Prystay : Pour ce qui est de Stantec, notre clientèle comprend le gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux, des organismes, des entreprises privées...

Le sénateur Tkachuk : De l’industrie pétrolière et gazière?

M. Prystay : Oui, de l’industrie pétrolière et gazière, de l’industrie minière et du secteur énergétique. Nous sommes là pour appuyer à peu près toute industrie qui pourrait déclencher une évaluation des répercussions environnementales. Nous sommes là pour cela.

Le sénateur Tkachuk : Pourquoi y a-t-il une telle divergence d’opinions entre vous et vos clients concernant le projet de loi C-69? L’industrie des pipelines dit qu’il va l’empêcher de pouvoir obtenir de projets et aller de l’avant dans un projet. Les producteurs pétroliers s’opposent totalement au projet de loi C-69. Ils veulent que d’importantes modifications y soient apportées. Les sociétés qui produisent de l’uranium, comme Cameco, veulent que deux ou trois modifications considérables soient apportées. Ils semblent tous trouver le projet de loi problématique. Je sais que vous voulez aussi que nous apportions des modifications, mais cela semble moins urgent pour vous que pour eux.

M. Prystay : Nous sommes une entreprise indépendante. Nous offrons un point de vue de tiers sur les répercussions environnementales, sociales et économiques possibles d’un projet. Nous ne défendons pas de projets. Nous sommes là pour fournir l’information dont les organismes gouvernementaux ont besoin pour prendre des décisions éclairées.

Le sénateur Tkachuk : Pour les organismes gouvernementaux, oui, mais qu’en est-il de vos clients privés?

M. Prystay : Je crois que nos clients privés utilisent l’information qu’on leur donne pour raffiner leurs projets et les rendre plus durables sur le plan environnemental et social. Elle contribue à la définition et à la construction d’un projet. Nous ne jouons pas le rôle de promoteurs. Nous sommes une entreprise indépendante qui appuie le processus.

Le sénateur Tkachuk : Monsieur Speller?

M. Speller : C’est semblable. En tant que praticiens indépendants, le point de vue que nous présentons aujourd’hui est fondé sur ce qui est selon nous un bon processus d’évaluations des répercussions. Nous avons identifié les difficultés liées à la certitude et à la prévisibilité de ce processus, ce qui est, selon moi, un thème de préoccupations très commun concernant la loi actuelle et le projet de loi proposé.

Le sénateur Tkachuk : Comme vous avez de l’expérience dans ce domaine, combien de gens croyez-vous qu’il faut nommer à l’Office d’examen des répercussions environnementales pour gérer ce processus et combien de temps croyez-vous que cela va prendre pour que le gouvernement établisse tout cela?

M. Speller : Il faudra des centaines de personnes.

Le sénateur Tkachuk : Mille personnes? Cinq cents personnes?

M. Speller : Je ne pourrai pas vous donner de chiffre exact. L’Agence canadienne d’évaluation environnementale compte entre 200 et 300 personnes. J’imagine qu’il faudra 400 ou 500 personnes. C’est ce que je crois. Je gère beaucoup de grands projets et de ressources. C’est le sentiment que j’ai.

Le sénateur Tkachuk : Comme vous connaissez bien le gouvernement, combien de temps pensez-vous que cela va prendre?

M. Speller : Je ne dis pas connaître bien le gouvernement.

La présidente : Je tiens à intervenir dans la discussion. Vous avez dit qu’il faudra y avoir beaucoup de détails dans le projet de loi. Vous avez même dit qu’il faudrait environ 30 pages de détails. Je fais partie des praticiens et je me souviens, il y a 30 ans, qu’il n’existait rien de la sorte et que nous avions eu à élaborer les méthodes. Les méthodes que nous avons mises sur pied à l’origine veillaient surtout à la sécurité. Maintenant, nous nous penchons plus sur la santé et l’écosystème. Les choses changent.

Croyez-vous que vous jouez un rôle sur les questions qui semblent vagues en ce moment, comme les effets cumulatifs, les changements climatiques et la durabilité? Selon votre expérience et l’expérience de vos entreprises, ne diriez-vous pas que vous adopterez des méthodes et que vous utiliserez vos connaissances pour développer vos propres outils?

M. Speller : Je vous remercie de votre question. Je crois que oui. L’importance fondamentale des lignes directrices détaillées d’évaluation des répercussions est liée au fait que plus tard dans le processus, si quelqu’un tente de soulever une autre question à évaluer, en théorie, on pourra s’y référer.

La présidente : D’accord.

M. Speller : Si quelqu’un soulève, deux ou trois ans après le début d’un projet, un nouvel enjeu de préoccupations, nous pourrons consulter les lignes directrices et décider s’il aurait fallu en tenir compte ou pas. Dans ce cas-là, nous pouvons apporter de la certitude dans le processus en décidant que si quelqu’un soulève un enjeu qui n’est pas couvert dans les lignes directrices l’agence peut décider de ne pas en tenir compte.

Ce serait très utile. Je crois qu’elles doivent être détaillées et qu’il doit y avoir de nombreuses pages, car plus il y aura de détails, moins il y aura d’incertitudes plus tard dans le processus s’il faut décider d’inclure ou pas un nouvel enjeu à l’évaluation. Je crois qu’il est important de couvrir tous les enjeux importants possibles.

L’une des choses qui nous causent des ennuis quant aux échéanciers et à la prévisibilité est les problèmes soulevés une fois le projet lancé et qui ouvrent toute une série de questions qui peuvent mettre jusqu’à six mois à se résoudre. Parfois, cela se produit plusieurs fois dans le cadre d’un même projet. Le glissement de portée, comme je l’ai dit plus tôt, au fil du temps est l’une des raisons pour lesquelles la réalisation de certains projets peut prendre parfois autant de temps.

La présidente : D’accord. Je comprends.

M. Prystay : L’expérience du Canada en matière d’évaluation des répercussions environnementales est exceptionnelle. En tant qu’entreprise internationale, nous nous sommes penchés sur les répercussions possibles des industries minières, pétrolières, gazières, du transport et de l’énergie. Nous avons évalué pratiquement toutes les sortes de projets possibles. Nous avons évalué ces projets au moyen des processus d’évaluation des répercussions environnementales anciens et actuels. Je crois qu’il y aurait très peu de projets pour lesquels le personnel de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale, avec l’appui de l’industrie, ne serait pas en mesure d’identifier les grands enjeux environnementaux, les voies par lesquelles les répercussions pourraient se concrétiser ainsi que les effets qu’il faudrait étudier pour déterminer s’il y aura des répercussions considérables sur le plan économique, social, environnemental ou de la santé.

Nous avons les compétences nécessaires pour établir un cadre de référence clair, un énoncé des répercussions et des lignes directrices pour ces projets. Si nous pouvons les élaborer tôt, cela nous permettra de gérer de façon beaucoup plus claire le processus.

Nous reconnaissons que certains problèmes auxquels les gens n’avaient pas pensé plus tôt peuvent survenir et qu’il faut avoir une marge de manœuvre pour apporter des changements ou y remédier dans le processus. Les lignes directrices et les échéanciers le permettent, mais ils doivent être utilisés de façon très judicieuse.

[Français]

Le sénateur Carignan : Ma question s’adresse aux gens de l’entreprise Golder. Je regardais vos projets et je suis tombé sur le gazoduc transanatolien en Europe, qui traverse quatre pays, une vingtaine de provinces et une mer. Ce gazoduc s’étendra sur 1 800 kilomètres. Il traverse la Méditerranée jusqu’en Italie. Vous semblez avoir réalisé ce projet en deux ans et demi ou trois ans. Quelle est la recette pour construire un projet de cette envergure dans des délais serrés tout en respectant l’environnement? Le Canada pourrait-il tirer des leçons de l’Europe pour ce qui est de ce projet? Ce sont les gens de Golder qui devraient répondre à ma question, parce que c’est vous qui faites la promotion de ce projet sur votre site.

[Traduction]

M. Speller : Je n’ai pas d’expérience directe avec ce pipeline, mais je sais que nous avons travaillé sur ce dossier. J’ai travaillé en Afrique et en Europe. Les processus réglementaires y sont beaucoup plus efficaces. La communication de l’information entre le promoteur et l’organisme réglementaire est plus rapide. Toutefois, les intervenants ont moins souvent la possibilité d’intervenir. Il y a un compromis entre les délais plus courts et la participation.

Mme Baker : Je ne connais rien à ce projet. Je suis désolée, mais je ne peux pas intervenir.

Le sénateur Pratte : Nous étudions un projet de loi et ne savons pas quels seront les règlements ou les lignes directrices. Vous dites que tout dépend de la mise en œuvre. Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez voir dans le projet de loi pour vous assurer qu’il n’y aura pas d’usage abusif de l’arrêt de l’horloge ou de la prolongation des délais? Y a-t-il quelque chose que vous vous attendiez à voir dans le projet de loi ou que vous aimeriez y voir et qui en est absent, comparativement à ce qui existe dans la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale de 2012?

M. Speller : Je vous remercie de la question. Une chose que j’ai toujours considérée comme un processus solide est ce que fait l’Office d’examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie. C’est une chose qui pourrait d’une certaine façon être ajoutée au projet de loi. Lorsque l’Office d’examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie amorce l’équivalent du processus d’évaluation de l’impact, il fournit un calendrier des audiences et de tout le reste. Cela ne règle pas nécessairement la question de la suspension ou de la prolongation des délais, mais cela gère les attentes de l’ensemble du groupe de parties intéressées participantes; « à quoi ressemblera le processus selon nous » et « voici les étapes pour lesquelles nous aurons besoin de votre participation ».

Je crois que le décompte fédéral est une très bonne idée et une bonne mesure. La difficulté, c’est qu’il ne s’agit pas d’un plan. Un décompte de 300 jours n’indique pas quand se fera quelle partie du processus au cours des 300 jours. Donc, si l’on pouvait inscrire dans la loi que, lorsque avis de commencement est donné, l’un des documents rendus publics est un calendrier pour les demandes de renseignements complémentaires précisant quand les promoteurs doivent les produire, donnant une idée des rondes et de la date où pourrait se tenir l’audience, cela serait utile. C’est un détail administratif, mais je crois que cela serait très utile.

Le sénateur Pratte : Simplement pour clarifier, est-ce que cette exigence de produire un calendrier pourrait, par exemple, faire partie des lignes directrices adaptées?

M. Speller : Je pense que oui.

Le sénateur Pratte : Monsieur Prystay, qu’en pensez-vous?

M. Prystay : Je crois qu’il est difficile d’inscrire dans la loi plus qu’un cadre décrivant le processus et comment celui-ci peut être suspendu. En Colombie-Britannique, où le délai d’examen prévu par la loi est de 180 jours, nous avons constaté qu’une politique solide et un engagement résolu envers cette politique permettent à de nombreux projets d’accomplir l’examen à l’intérieur du délai de 180 jours. Toutefois, pour respecter ce délai, il faut beaucoup de dévouement et de travail de la part de toutes les parties.

Le sénateur Pratte : Est-ce que la loi de la Colombie-Britannique contient des dispositions concernant la prolongation du délai ou l’interruption du décompte?

M. Prystay : Oui.

Le sénateur Pratte : D’accord.

Le sénateur Massicotte : Merci beaucoup d’être ici avec nous.

Je crois que je partage votre opinion. Je reviens peut-être sur la discussion que vous avez eue avec le sénateur Woo. C’est comme la préparation d’une transaction d’affaires. Quand on définit une lettre non contraignante, on définit quels sont les objectifs. C’est extrêmement bien, et je crois que vous en convenez. Le problème est toujours dans l’exécution.

Vous n’avez probablement pas eu la chance d’examiner le compte rendu des réunions précédentes, mais dans l’une des premières séances que nous avons tenues dans le cadre de l’étude de ce projet de loi, nous avons accueilli tous les sous-ministres, accompagnés de leur avocat-conseil, et ils ont également indiqué clairement que leur intention est d’utiliser l’étape préparatoire pour définir les besoins et la portée de ces derniers, ce qui représente un gros problème à l’heure actuelle.

Le sénateur Tkachuk a posé une question. Devrions-nous avoir confiance? L’intention des sous-ministres est claire. Toutefois, d’après votre expérience avec Environnement et Changement climatique Canada et les autres, êtes-vous convaincus, malgré leur intention, qu’ils vont livrer la marchandise et atteindre leurs objectifs comme ils l’ont exprimé verbalement dans nos discussions avec eux?

M. Prystay : Cela dépend de la manière dont ils s’y prennent. Encore une fois, en Colombie-Britannique, le Bureau des évaluations environnementales tire avantage de l’équipe de consultation du promoteur pour aider avec une partie des tâches plus difficiles. La première ébauche des exigences de renseignements pour les demandes est confiée à l’équipe du promoteur, qui la rédige conformément à un ensemble très clair de lignes directrices définissant la structure et le contenu. Ensuite, des révisions sont effectuées jusqu’à ce que le Bureau des évaluations environnementales soit satisfait. Puis, le document est publié à titre de document provincial public.

Ainsi, le Bureau des évaluations environnementales est libéré d’une partie du travail qui est confiée à l’équipe du promoteur.

Le sénateur Massicotte : Est-ce que quelqu’un veut ajouter un commentaire? C’est un aspect important. Si c’est bien fait, nous avons réalisé une immense amélioration.

La deuxième chose que j’observe, c’est que lorsque des retards se produisent, lorsqu’on fait affaire avec un ministère, n’importe qui peut poser une question au promoteur n’importe quand. Il peut s’agir de n’importe quoi. Un nouvel employé a une question, cela arrête automatiquement le processus, et des questions vous sont sans cesse posées.

Le projet de loi propose qu’il y ait un ministère responsable ainsi qu’une personne chargée de filtrer les questions avant qu’elles vous parviennent, de manière à éviter un autre retard d’un an. S’agit-il d’une amélioration importante du processus?

Mme Baker : Je crois que cela pourrait se faire. Il serait possible qu’une personne qui comprend bien le processus, les connaissances et les questions posées puisse filtrer efficacement les questions, car cela se fait de manière informelle au sein des ministères. Donc, oui, cela pourrait se faire.

Le sénateur Massicotte : Maintenant, c’est la loi; si le projet de loi C-69 est adopté, il s’agira d’une obligation et ce sera intégré dans la structure.

Mme Baker : Je crois que ce sera fait si la loi le prévoit.

Le sénateur Massicotte : Monsieur Speller, avez-vous un commentaire?

M. Speller : Je n’ai pas de commentaires.

Le sénateur Massicotte : Je ne suis pas en conflit d’intérêts, mais Golder était notre locataire pendant de nombreuses années. Je considère qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts parce que le loyer était si peu élevé qu’il ne comptait même pas. Cela dit, j’ai vendu cet intérêt il y a 10 ans, alors je n’ai pas de conflit d’intérêts.

Le sénateur Neufeld : Merci d’être ici. Nous avons beaucoup entendu de la part de l’industrie qu’elle aimerait voir quels projets sont réellement faisables — quelle envergure. De quoi parle-t-on? Parle-t-on de tout, depuis une petite usine jusqu’à un énorme barrage? Croyez-vous tous que cela aiderait à améliorer les choses et à atténuer les craintes de l’industrie concernant ce qui pourrait arriver et ce qui pourrait ne pas arriver?

M. Speller : Je ne peux pas parler au nom de l’industrie, mais je sais que c’est la question qui revient le plus souvent à mon bureau, par courriel ou par téléphone : y a-t-il des rumeurs à savoir quand la liste des projets sera publiée? Car c’est là que l’on passe à l’action dans bien des cas. C’est un aspect important.

M. Prystay : On nous adresse fréquemment le même genre de questions. Savoir si un projet est approuvé ou rejeté est important pour nos clients, mais je crois que comprendre le processus, et avoir une certaine confiance et une certaine assurance par rapport aux délais est tout aussi important.

Le sénateur Neufeld : Il est également beaucoup question du désir de voir les règlements avant que le projet de loi ne soit adopté. J’ignore où on en est dans la rédaction des règlements. Nous ne le savons pas. Le gouvernement dit : « Faites-nous confiance. Nous allons nous occuper de tout cela dans les règlements. » Cela rend les gens un peu nerveux.

Quels sont les projets qui devront faire l’objet d’un examen? Devrait-on préciser cela dans les règlements ou dans la loi? À quoi ce processus s’appliquera-t-il? Quelle est la meilleure solution?

M. Speller : Je crains que vous posiez à trois scientifiques ou ingénieurs une question concernant la loi.

Le sénateur Neufeld : C’est ce que je fais.

M. Speller : Personnellement, je n’ai malheureusement pas d’idée de ce qu’il convient davantage d’inscrire dans la loi ou dans les règlements.

Le sénateur Neufeld : Avez-vous une idée, monsieur?

M. Prystay : D’après mon expérience, à ce jour, c’est prévu dans les règlements, mais je n’ai pas idée de ce qui convient le mieux. Je ne suis pas législateur. Je n’ai pas d’opinion à cet égard.

Mme Baker : Il en va de même pour moi.

Le sénateur Neufeld : D’accord.

Donc, vous convenez tous que la loi ou les règlements doivent préciser quels sont les projets devant faire l’objet d’un examen, puisque c’est une question que l’on pose fréquemment à vos bureaux. Toutefois, vous n’êtes pas vraiment certains si cette information devrait se trouver dans la loi ou dans les règlements ou n’êtes pas suffisamment à l’aise pour vous prononcer à ce sujet. Je comprends cela. C’est intéressant d’entendre cela.

Viennent ensuite les délais. Vous avez tous parlé des délais. J’étais en Colombie-Britannique lorsque nous avons fixé le délai à 180 jours. Pouvez-vous nous dire comment on pourrait fixer les délais dans le projet de loi C-69 de manière à éliminer les craintes que vous avez soulevées à cet égard? Doit-on préciser le nombre de jours? Quelle est la solution?

Si vous le souhaitez, vous pouvez y réfléchir et fournir votre réponse dans une lettre. Cela me convient aussi. Cela dit, j’aimerais entendre votre opinion à titre d’ingénieurs. Nous avons celle de la présidente, qui est ingénieure, alors je pose la question à d’autres ingénieurs.

La présidente : Souhaitez-vous répondre à la question?

M. Speller : Nous avons offert de fournir par écrit certains de nos points de vue à ce sujet. Nous serions heureux d’ajouter cela à la liste.

Le sénateur Neufeld : Cela me convient tout à fait. Vous devrez adresser votre lettre à la greffière.

La sénatrice McCallum : Merci. Excusez-moi de mon retard, mais j’avais un discours à prononcer.

Venant du secteur de la santé, je suis surtout préoccupée par l’impact sanitaire et social de l’extraction des ressources dans des territoires occupés par des peuples autochtones. Je me réjouis de voir que vous envisagez une approche plus équilibrée prenant en compte l’éthique.

Je me suis renseignée au sujet des déterminants sociaux de la santé utilisés dans l’étude sur l’extraction des ressources menée par la Colombie-Britannique dans le Nord du Canada et des résultats enregistrés, et l’idée est d’essayer de trouver un équilibre.

Quand vous planifiez comme ça, cela ressemble à ce qui se passe dans le secteur de la santé. C’est un peu comme quand on interagit avec des patients. Quand on a vécu ça, on voit les choses d’un autre œil et on essaie de contrer les effets néfastes avant qu’ils ne surviennent.

Vous parlez d’incertitude accrue en raison de l’interprétation et des méthodes pour l’évaluation défendable de certains effets, principalement la durabilité, les changements climatiques et le télescopage du sexe et du genre avec d’autres facteurs d’identité. Pourriez-vous expliquer cela? Où est l’incertitude?

M. Prystay : Il y a des méthodes rigoureuses clairement définies pour examiner les changements socioéconomiques qui se produisent dans différents secteurs de la société, et notamment des analyses comparatives entre les sexes. En outre, on comprend de mieux en mieux que les effets sur la santé sont différents, selon qu’on est un homme ou une femme. L’évaluation des répercussions environnementales sur une population dispersée constitue un nouveau domaine de recherches universitaires.

Il faudrait vraiment comprendre la portée de ce facteur et les méthodologies disponibles. La loi ne dit pas que les évaluations sexospécifiques doivent se concentrer sur le volet socioéconomique. En ce qui concerne les effets environnementaux et leur évaluation, il n’y a pas encore de modalité claire en la matière.

La sénatrice McCallum : Vous avez dit qu’il y a plus de possibilités pour les Autochtones de participer. Quel est le niveau de participation des communautés autochtones aujourd’hui?

M. Prystay : Cela varie beaucoup d’une région à l’autre du pays et c’est l’un des avantages de ce changement législatif. J’ai travaillé en Colombie-Britannique où, en vertu de la loi britanno-colombienne sur les évaluations environnementales, les groupes autochtones sont invités à se joindre aux négociations aux côtés de toutes les autres agences gouvernementales afin de définir la portée de l’évaluation environnementale, de décider des études qui doivent être effectuées et aussi de participer au processus d’examen. Nous croyons que c’est une pratique exemplaire et nous pensons que c’est une bonne chose pour toutes les communautés autochtones au Canada.

La sénatrice McCallum : Je suis d’accord avec vous. La semaine dernière, je me suis rendue à l’École secondaire Sisler — cela représente 300 à 400 élèves — pour parler de mon expérience. Ces élèves m’ont parlé de leurs inquiétudes concernant l’environnement. Ils m’ont expliqué que partout dans les villes, les universités et bientôt partout au Canada, les élèves et étudiants s’inquiètent à ce sujet. Il y aura d’ailleurs un important rassemblement à ce sujet, au Canada, le 22 avril. Ces élèves et étudiants ont peur pour leur avenir. Il est bon que les jeunes s’expriment pour qu’on essaie de trouver un juste équilibre entre l’exploitation des ressources et les retombées négatives dont on ne s’est pas préoccupé, mais qu’il y a toujours dans les régions habitées par des Premières Nations. Je suis heureuse d’entendre cela.

Le sénateur Mockler : Stantec a conçu un des plus grands ponts qui existent en Amérique du Nord, entre le Nouveau-Brunswick et l’Île-du-Prince-Édouard. Vous avez participé à ce projet?

M. Prystay : Nous avons participé à son évaluation environnementale. Pour ce qui est de sa conception, je ne sais pas trop.

Le sénateur Massicotte : Il tient bon?

Le sénateur Mockler : Il tient bon.

M. Speller : Je voudrais souligner le fait que Golder a participé aussi à ce projet.

Le sénateur Mockler : C’est bon. Cela va m’aider pour ma question. À la différence de l’Office national de l’énergie qu’elle remplacerait en vertu de la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie, la régie ne serait pas responsable des examens des projets désignés. C’est ainsi. Mais, la régie aura son mot à dire sur le processus d’évaluation de l’impact dans le cas des projets désignés. Son rôle principal conformément au projet de loi C-69 est la réglementation des projets pendant leur cycle de vie et non l’évaluation de nouveaux projets.

La régie continuera d’effectuer des évaluations des projets non désignés. Êtes-vous d’accord avec cette répartition des responsabilités? Et pourquoi?

M. Prystay : Je pense qu’il est important que tous les grands projets d’immobilisations susceptibles d’avoir des effets néfastes fassent l’objet d’une évaluation environnementale. C’est une bonne politique publique. Quant à savoir qui gère le processus de réglementation, en tant que praticien, je n’ai pas d’opinion là-dessus. Mais, la question est plus de savoir si le processus d’évaluation est rigoureux, défendable et fondé sur des pratiques exemplaires. C’est notre principale préoccupation.

Le sénateur Mockler : C’est votre philosophie.

M. Speller : Nous avons à peu près le même point de vue. Nous sommes indépendants des régulateurs et des décideurs. Ce que nous souhaitons, c’est un processus rigoureux d’évaluation des impacts.

La présidente : Merci beaucoup pour cette intéressante conversation.

Nous allons passer à la troisième partie de cette réunion du Comité sénatorial permanent de l’Énergie, de l’Environnement et des Ressources naturelles, dans le cadre de notre étude du projet de loi C-69. Nous accueillons maintenant de Victoria, en Colombie-Britannique, par vidéoconférence, représentant le gouvernement de Colombie-Britannique, M. Kevin Jardine, qui est le sous-ministre associé du Bureau des évaluations environnementales.

Merci beaucoup d’être ici, M. Jardine. Je vous propose de faire votre déclaration liminaire. Nous passerons ensuite à une période de questions et de réponses.

Kevin Jardine, sous-ministre associé, Bureau des évaluations environnementales, gouvernement de Colombie-Britannique : Permettez-moi d’abord de remercier le comité de m’avoir invité ici, aujourd’hui et de me donner l’occasion de vous parler du projet de loi C-69.

La Colombie-Britannique est très favorable à la loi sur l’évaluation d’impact environnemental qui est proposée et à ses objectifs. De fait, les principes et les processus proposés dans le cadre respectivement de la loi sur l’évaluation d’impact environnemental et de la nouvelle loi sur l’évaluation d’impact environnemental britanno-colombienne — qui vient juste de recevoir la sanction royale en novembre 2018 — sont très similaires. Ces mesures législatives prouvent que le Canada et la Colombie-Britannique ont les mêmes objectifs en matière d’évaluations environnementales, ce qui devrait rendre plus facile et efficace le travail en collaboration entre le Canada et la Colombie-Britannique en ce qui concerne le déroulement des évaluations environnementales.

Il est particulièrement important pour la Colombie-Britannique d’avoir la possibilité d’avoir recours à un processus fédéral, et non provincial, et de garder aussi des processus décisionnels distincts.

Comme vous le savez peut-être, la Colombie-Britannique a une entente avec l’Agence canadienne d’évaluation environnementale en ce moment, signée en 2013, qui prévoit la mise en œuvre d’évaluations environnementales de remplacement. À ce jour, il y en a eu trois en Colombie-Britannique et la Colombie-Britannique est la première province et, à ma connaissance, la seule au Canada qui a signé une telle entente.

Et nous avons des objectifs communs. La nouvelle loi sur l’évaluation d’impact environnemental de Colombie-Britannique a été développée autour de trois principes : d’abord, favoriser la réconciliation avec les peuples autochtones; ensuite, accroître la confiance du public envers le processus d’évaluation et enfin, s’assurer que les bons projets vont de l’avant en temps utile, sans effets néfastes sur l’environnement.

Nous sommes donc heureux de constater que ces principes se reflètent grandement dans la Loi sur l’évaluation d’impact — qui reprend les critères en place dans la nouvelle loi et la loi actuelle en Colombie-Britannique — ainsi que dans la prise en compte impérieuse des droits et savoirs des Autochtones, dans la multiplication des occasions pour le public d’être véritablement consulté et de participer, dans la plus grande transparence du processus et la portée élargie de l’évaluation.

Cette plus grande harmonisation entre les lois provinciales et fédérales pourrait contribuer à améliorer la mise en œuvre du principe « un projet-une évaluation » et donc contribuer à simplifier, remplacer ou coordonner les commissions d’évaluation.

D’après notre expérience, les bénéfices qu’on peut retirer de ce principe d’un « projet-une évaluation » sont multiples : la possibilité de réduire les redondances pour toutes les parties, notamment les agences gouvernementales, les promoteurs, les peuples autochtones, les intervenants, les collectivités et le public; d’avoir un processus plus transparent et prévisible et plus dans les temps généralement; un ensemble plus commun et plus transparent de données probantes et une meilleure compréhension des répercussions possibles du projet.Cela veut dire un engagement des Autochtones plus significatif par l’intermédiaire d’un seul mécanisme relevant de la Couronne et aussi un canal unique pour l’engagement du public, soit un investissement plus dynamique et permanent.

Un processus d’évaluation environnementale avec une phase de planification précoce, comme l’envisagent la nouvelle loi d’évaluation environnementale ici, en Colombie-Britannique, et la loi sur l’évaluation d’impact qui est proposée pourrait résulter en une meilleure évaluation avec moins de retards, surtout grâce à une prise de conscience anticipée des problèmes et une participation proactive et non réactive des Autochtones.

Mais, il y a des problèmes, en particulier en ce qui concerne les délais. En l’absence d’un calendrier harmonisé tout au long du processus, il y aura des problèmes pour ce qui est de la coopération et de l’application du principe « un projet-une évaluation ». Il ne faut pas de délais serrés dans la phase de planification si l’on veut une coopération efficace.

Les délais établis dans la nouvelle loi d’évaluation environnementale de la Colombie-Britannique et la loi d’évaluation d’impact proposée sont généralement très en phase. Il y a une exception notable, et c’est la phase critique de planification précoce.

Il est possible de régler ce léger problème de délai avec un amendement mineur du projet de loi sur l’évaluation d’impact, ce qui permettrait à la régie d’établir des délais différents pour les dépôts des avis d’évaluation et de coopérer avec un autre intervenant.

L’approche qui est proposée reprend les mécanismes existant déjà dans le projet de loi sur l’évaluation d’impact afin d’établir des lignes directrices distinctes pour faciliter la coopération pendant la phase d’évaluation d’impact. Si on applique ce changement à tout le processus d’évaluation environnementale, on aura un système d’ajustement propice des délais à la coopération entre le Canada, la Colombie-Britannique et tout autre palier ou intervenant, et ce, dans un but de coordination ou d’ajustement plus tard.

Par ailleurs, la Colombie-Britannique encouragerait le Canada à déléguer à la régie les décisions relatives à l’ajustement des délais, pendant les phases de planification et d’évaluation d’impact. Cela soulignerait la nature procédurale de ces décisions, contribuerait à l’objectif déclaré qui est d’améliorer la prévisibilité du processus pour les promoteurs de projets et limiterait aussi le pouvoir discrétionnaire du ministre.

L’adhésion au principe « un projet-une évaluation » dans le cadre de la nouvelle loi d’évaluation d’impact sera l’occasion pour le Canada et les provinces de travailler ensemble. Des conservations avec le Canada sont en cours ici, en Colombie-Britannique, pour élaborer une nouvelle entente de collaboration pour remplacer celle de 2013. La nouvelle entente donnerait lieu à une nouvelle approche en matière d’engagement précoce, résultant en une diminution des redondances grâce à la mise en place d’exigences communes relativement à la documentation initiale des promoteurs; à une période précoce de commentaires du public; à une prise de décision coordonnée et précoce en ce qui concerne les évaluations environnementales; et à une meilleure approche de principe en matière d’évaluations, qu’elles soient de remplacement, coordonnées ou peut-être même qu’il s’agisse d’une commission.

Elle devrait aussi améliorer la force de l’engagement des Autochtones grâce à une meilleure coordination et favoriser la réconciliation des peuples autochtones grâce à un engagement plus important; être marquée par le désir de consensus; et garantir un engagement commun en vue d’établir des ententes trilatérales dans les cas où les Premières Nations se montrent intéressées et en ont la capacité.

Enfin, nous tenons aussi à la collaboration afin qu’il y ait une plus grande cohérence entre les évaluations et les processus de réglementation et d’autorisation ultérieurs, ce qu’on appelle le continuum réglementaire. Plus précisément, nous voulons diminuer les redondances et améliorer les délais en alignant les exigences en matière de rapports et d’avis, la terminologie et les définitions sur les différents délais propres aux processus et régimes réglementaires et en étudiant aussi les données et les exigences en matière d’information — elles sont élaborées au cours de l’évaluation environnementale — de manière à ce qu’elles puissent s’intégrer aux processus d’autorisation subséquents.

C’est ainsi que se terminent les remarques que j’avais préparées, madame la présidente, et je serais heureux, maintenant, de répondre aux questions du comité.

La présidente : Merci beaucoup.

Le sénateur MacDonald : Merci, monsieur, de votre témoignage. Selon l’association des entrepreneurs et des gens d’affaires indépendants de Colombie-Britannique, l’objectif visé par ceux qui ont préparé ce projet de loi devait être de rendre les investissements au Canada encore plus difficiles et de confiner les projets de construction et d’infrastructure audacieux et visionnaires et d’édification nationale aux livres d’histoire canadienne. Ce groupe représente plus de 2 000 entreprises et plus de 50 000 employés en Colombie-Britannique. Devraient-ils s’inquiéter de ce que le gouvernement soit si opposé à ce projet de loi? Qu’est-ce que le gouvernement a à dire à ces 50 000 travailleurs britanno-colombiens?

M. Jardine : Par rapport au projet de loi C-69?

Le sénateur MacDonald : Ils sont opposés au projet de loi et sont très inquiets pour leur emploi.

M. Jardine : J’aimerais faire quelques observations. En ce qui concerne les effets du projet de loi C-69 sur les projets en Colombie-Britannique, nous croyons que cette province est dans une situation différente par rapport à bien d’autres endroits, pour plusieurs raisons. Premièrement, nous avons un bureau des évaluations environnementales et une loi qui fonctionnent indépendamment du gouvernement. C’est ce qui nous a permis de conclure des ententes avec le Canada au titre de la loi actuelle, soit la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale de 2012, notamment pour substituer le processus provincial au processus fédéral. En Colombie-Britannique, il y a actuellement 13 projets qui sont soumis au processus de substitution.

En raison de son emplacement géographique particulier, des diverses nations autochtones qui y vivent et de ses antécédents dans ce domaine, la Colombie-Britannique est dotée de processus très évolués qui lui permettent de remplir bon nombre de ses obligations — constitutionnelles ou autres —, y compris en matière d’évaluation environnementale. Par conséquent, nous ne voyons pas grand-chose dans le projet de loi C-69 qui diffère de ce que fait déjà la Colombie-Britannique.

Cependant, comme le projet de loi définit de façon plus détaillée certaines exigences, le processus peut sembler intimidant. Or, comme je l’ai dit d’entrée de jeu, nous sommes d’avis que cela représente plutôt une bonne occasion d’atteindre certains objectifs que la Colombie-Britannique s’est fixés dans le cadre de sa nouvelle loi sur l’évaluation environnementale, des objectifs qui, selon ce que je comprends de la nouvelle loi sur l’évaluation d’impact, sont aussi ceux du gouvernement fédéral.

Par conséquent, même si je comprends les craintes, je pense qu’on pourra répondre à nombre de ces préoccupations très particulières lors des efforts de mise en œuvre et de développement des relations.

Le sénateur MacDonald : Je ne suis pas sûr que cela répond à ma question, mais je vous remercie. J’ai une brève question complémentaire. Sur la côte Est du pays, nous traitons plus de 288 millions de tonnes métriques de pétrole lourd par année. Vous en traitez 6 millions de tonnes métriques. Croyez-vous qu’il est juste qu’une région côtière du pays doive assumer tous ces risques et traiter tout ce pétrole, étant donné que ce pétrole est importé et payé par les Canadiens, tandis que, sur la côte Ouest, on essaie d’exporter du pétrole canadien afin de générer des revenus pour le pays? Croyez-vous que c’est juste pour la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Québec et Terre-Neuve d’assumer tous ces risques pour le Canada, alors que la Colombie-Britannique en assume très peu?

M. Jardine : Je crains de ne pas pouvoir faire de commentaires à ce sujet. En tant que haut fonctionnaire du Bureau des évaluations environnementales, je me concentre sur les évaluations environnementales.

Le sénateur MacDonald : Vous n’avez donc aucun avis sur cette question.

M. Jardine : Non, je n’ai aucun avis professionnel à donner là-dessus.

Le sénateur Woo : Merci de votre témoignage. Je voulais revenir tout de suite aux changements que vous avez recommandés. Je comprends un peu mieux les écarts concernant l’étape préparatoire et l’intervention que vous recommandez. Est-ce à dire que, une fois l’étape préparatoire lancée, la substitution n’est plus possible?

Vous parlez d’harmoniser les échéances à l’étape préparatoire. Pourriez-vous nous en dire plus pour nous aider à déterminer s’il y aurait lieu d’apporter une légère modification au projet de loi?

M. Jardine : Merci, sénateur. J’en serais ravi. Je vais d’abord expliquer la différence entre la substitution et ce que j’ai appelé la coordination. La coordination consiste à mener en parallèle deux processus d’évaluation environnementale visant le même projet. Ainsi, le gouvernement fédéral, par l’entremise de la nouvelle agence, ou dans le cadre des dispositions actuelles de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale, mènerait son évaluation environnementale selon la loi et les exigences applicables, et la province soumettrait le même projet à son propre processus en même temps.

Dans la mesure où les deux gouvernements partagent un intérêt pour un projet donné, un principe d’évaluation et tous les avantages qui en découlent, il faut coordonner les efforts en harmonisant adéquatement les échéanciers, les processus et, idéalement, les exigences, de sorte que les intervenants — y compris les Autochtones, le grand public et le promoteur — aient pratiquement l’impression de ne participer qu’à un seul processus.

Le processus de substitution va encore plus loin. Dans ce cas, tout le processus est mené par une seule entité, en l’occurrence le Bureau des évaluations environnementales de la Colombie-Britannique. Dans ce cas, les deux décideurs, soit le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial, se prononcent également. Il y a donc un processus, mais deux décisions.

Ma recommandation concernant la coordination porte plus particulièrement sur le paragraphe 18(3) de la Loi sur l’évaluation d’impact, c’est-à-dire sur l’exigence d’un délai de 180 jours.

Notre nouveau processus provincial est quelque peu différent. Nos échéances et celles du processus sont mal coordonnées. Ainsi, dans les circonstances actuelles, le gouvernement fédéral élaborerait plus rapidement ce que nous appelons le plan de projet. Aux termes de notre nouvelle loi, nous essayons de profiter de tous les avantages de la consultation préalable, dont vous avez sans doute entendu parler; j’en ai déjà parlé et j’ai entendu d’autres intervenants en parler également. Par conséquent, il nous faut beaucoup plus de temps pour consulter le grand public et les nations autochtones, et il faut donner plus de temps au promoteur, tout le temps dont il a besoin — d’ailleurs, il n’y a pas d’échéancier prévu à cet égard — pour élaborer un plan de projet plus détaillé qui tient compte des résultats de ces consultations.

Par conséquent, si on veut profiter des avantages de la consultation préalable, du moins en Colombie-Britannique, le gouvernement fédéral doit accorder plus de marge de manœuvre au début du processus. Or, selon la disposition dont j’ai parlé, soit le paragraphe 18(3), le ministre peut prolonger le délai une fois pour un maximum de 90 jours, mais ensuite, le dossier est confié au gouverneur en conseil, c’est-à-dire au Cabinet. Il me semble que cela donne une dimension politique à la mise en œuvre du processus d’évaluation environnementale.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup. Je suis ravie de vous entendre parler de substitution, car j’estime que ce concept est un peu nébuleux dans le texte de la loi. Je sais que nous nous sommes déjà rencontrés en compagnie des premiers ministres de Terre-Neuve-et-Labrador et de l’Alberta, qui ont tous deux exprimé de vives inquiétudes à l’idée que ce projet de loi permette au gouvernement fédéral d’exercer des pouvoirs dans un domaine qui relève habituellement des provinces.

Le premier ministre de Terre-Neuve est particulièrement préoccupé, car la substitution ne semble même pas être une possibilité pour l’Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers. Selon ce qui est proposé à l’article 31, cette option est expressément exclue. La première ministre de l’Alberta a présenté une liste d’amendements qui visent à exclure du projet de loi toutes sortes de projets, plus particulièrement les projets d’énergie solaire, d’énergie éolienne, de gaz naturel et de gaz naturel liquéfié. Le gouvernement de l’Alberta nous demande d’exclure du projet de loi ces types de projets en particulier.

Je suis curieuse de savoir pourquoi vous insistez à ce point sur la substitution, alors que d’autres provinces y voient des inconvénients, car, selon le projet de loi C-69, un ministre pourrait établir des exigences dans un domaine qui relève habituellement des provinces afin d’imposer une évaluation d’impact fédérale.

M. Jardine : En Colombie-Britannique...

La sénatrice Simons : Que pensez-vous de la recommandation de la première ministre Notley d’exclure plus particulièrement les projets d’énergie éolienne, d’énergie solaire et de gaz naturel?

M. Jardine : Évidemment, je ne peux pas parler à la place de la première ministre Notley. Je peux dire cependant que, en Colombie-Britannique, environ les deux tiers des projets qui, selon la loi provinciale, doivent être soumis à une évaluation environnementale — ce sont généralement ou presque exclusivement de très grands projets qui sont visés dans cette province — doivent aussi faire l’objet d’une évaluation au titre de la loi fédérale en vigueur.

Selon nous, pour les projets qui nous ont permis de l’appliquer, le processus de substitution s’est avéré fort avantageux en ce qui concerne notamment les échéances, la mise en œuvre et la clarté du processus.

Nous avons pu appliquer le processus de substitution à trois projets. Par exemple, le projet de LNG Canada, qui représente le plus grand investissement de l’histoire du pays, est le premier projet auquel nous avons appliqué le processus de substitution. Le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral ont annoncé leur décision le même jour.

Le plus récent projet est le projet de la mine Kemess Underground, dans le Nord-Ouest de la Colombie-Britannique. Dans ce cas également, les deux gouvernements ont pu annoncer leur décision le même jour, nous avons pu obtenir le consentement des nations autochtones qui ont participé au processus, et nous avons pu le faire dans le délai de 180 jours prévu pour l’évaluation de la demande.

Ainsi, en Colombie-Britannique, le processus de substitution a été très utile non seulement pour réaliser des projets en temps opportun, mais aussi pour atteindre tous les objectifs.

La sénatrice Simons : Que se passe-t-il si les deux décisions sont différentes?

La présidente : Je suis désolée, nous allons laisser le témoin terminer son intervention. Veuillez continuer, monsieur Jardine.

M. Jardine : D’accord. Je vais évidemment répondre à votre question. Cette approche a très bien fonctionné pour nous, non seulement sur le plan du processus, mais aussi — et ceci répondra peut-être à votre deuxième question — pour ce qui est de coordonner les exigences en matière d’information et de se baser sur les mêmes données, notamment en ce qui concerne les préoccupations et les difficultés ainsi que la façon de remédier à ces problèmes et de consulter les Autochtones tout au long du processus.

Cela a permis de répondre à toutes les questions de façon cohérente en vue de prendre une décision éclairée.

Il y a deux aspects. Premièrement, cela a permis aux responsables fédéraux et provinciaux d’arriver aux mêmes conclusions quant aux recommandations susceptibles d’être soumises à leur décideur respectif. Il y a eu des cas, dont le plus récemment s’est produit il y a quelques années, où les décideurs fédéral et provincial ont refusé de fournir un certificat pour un projet en Colombie-Britannique.

Par ailleurs, il y a un peu moins d’une dizaine d’années, il y a eu un cas où la décision du gouvernement provincial a été suivie d’une décision différente du gouvernement fédéral. Cependant, le processus était plutôt désorganisé. Il n’était pas coordonné, du moins, pas autant que je l’ai recommandé et qu’il l’a été depuis nombre d’années.

De plus, la coordination et la substitution ont notamment comme avantage de réduire considérablement le risque d’arriver à des conclusions différentes.

Le sénateur Tkachuk : Je crois comprendre que vous ne pouvez pas parler au nom du gouvernement, mais vous pouvez parler des faits. Je crois que le gouvernement de la Colombie-Britannique appuie le projet de loi C-48, qui porte sur le moratoire relatif aux pétroliers.

M. Jardine : C’est ce que je crois comprendre également.

Le sénateur Tkachuk : Je crois également qu’il est contre le projet d’oléoduc de Kinder Morgan.

M. Jardine : C’est ce que je crois aussi.

Le sénateur Tkachuk : Les projets dont vous parlez ne sont pas des projets d’exploitation pétrolière.

M. Jardine : Cela dépend des situations.

Le sénateur Tkachuk : Comment l’Alberta peut-elle exporter son pétrole?

M. Jardine : Il pourrait très bien s’agir de projets d’exploitation pétrolière.

Le sénateur Tkachuk : Que va-t-on en faire?

M. Jardine : La Colombie-Britannique exige que les projets réalisés dans cette province soient soumis à une évaluation environnementale. Certains projets qui doivent faire l’objet d’une évaluation environnementale peuvent concerner plusieurs gouvernements. Par exemple, dans le cas du projet Trans Mountain, l’évaluation environnementale a été coordonnée dans une certaine mesure. Le processus de substitution a été réalisé en sens inverse, en quelque sorte, parce que nous avons utilisé le rapport de l’ONE comme rapport d’évaluation et que nous avons ensuite mené de façon indépendante, mais en coordination avec Ressources naturelles Canada, des consultations auprès de 90 nations autochtones de la Colombie-Britannique qui vivent le long du tracé de l’oléoduc.

Le dossier a ensuite été renvoyé au décideur provincial, qui a alors décidé de délivrer un certificat provincial d’évaluation environnementale assorti de plusieurs conditions.

Le sénateur Tkachuk : Est-ce donc dire que votre groupe d’évaluation des effets environnementaux se pencherait sur les projets d’hydroélectricité et de gaz naturel ainsi que d’autres sortes de projets?

M. Jardine : Oui, ces projets sont aussi visés, en effet. Les oléoducs et les grands projets linéaires comme les projets hydroélectriques en sont des exemples, tout comme les projets de mine et les projets d’usine de gaz naturel liquéfié.

Le sénateur Tkachuk : D’accord. Savez-vous si le gouvernement provincial est favorable au projet de loi C-68? Je crois qu’il l’est.

M. Jardine : Non, désolé, je ne le sais pas.

Le sénateur Tkachuk : Très bien. Merci.

Le sénateur Massicotte : Merci d’être des nôtres. Si je comprends bien, actuellement, le projet de loi C-69 permet seulement la substitution. On abandonne les autres mécanismes qui étaient utilisés. J’aimerais revenir sur les observations de la sénatrice Simons. Si je comprends bien, la Colombie-Britannique est actuellement la seule province qui substitue son processus au processus fédéral, et aucune autre province n’a employé ce mécanisme. Est-ce exact?

M. Jardine : Oui, sénateur, vous avez raison. La Colombie-Britannique est la seule à recourir à la substitution. L’autre processus dont j’ai parlé, la coordination, n’est pas un mécanisme qui doit être imposé par voie législative ou même réglementaire. C’est davantage une politique sur la façon de collaborer avec le gouvernement fédéral et d’appliquer la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. L’amendement dont j’ai parlé permettrait de maintenir cette politique, donc d’appliquer l’approche voulant qu’il y ait un processus d’évaluation par projet.

Le sénateur Massicotte : La question a été posée. Vous présentez toutes sortes de raisons pour expliquer pourquoi votre situation est exceptionnelle et vous êtes en mesure de conclure des accords de substitution avec le gouvernement fédéral. Or, est-ce vraiment une solution miracle? Pourquoi personne d’autre n’adopte la même approche? Cela semble bien fonctionner. Y a-t-il un détail qui nous échappe?

M. Jardine : Évidemment, je ne peux pas parler au nom de bien des gouvernements, mais je peux vous assurer qu’il n’y a probablement rien de miraculeux à cela. Cela découle plutôt du fait que les responsabilités de notre bureau sont de nature législative. Je crois qu’il y a aussi un lien avec les coûts-avantages associés aux efforts administratifs qui sont déployés dans le cadre de ce processus, car, comparativement à d’autres provinces, la Colombie-Britannique est touchée de façon démesurée par des projets qui donnent lieu à une évaluation fédérale.

Le sénateur Massicotte : Ai-je raison de dire que, selon le processus de substitution, vous vous engagez auprès du gouvernement fédéral à faire le travail concret et l’évaluation, mais chaque partie demeure complètement libre d’accepter ou de rejeter le projet? Est-ce exact?

M. Jardine : En effet, vous avez raison. Par ailleurs, les deux parties peuvent imposer — et elles le font — leurs propres conditions juridiquement contraignantes.

Le sénateur Massicotte : Est-il possible qu’aucune autre province n’ait opté pour la coordination parce que cela exige beaucoup d’efforts de planification de la part des deux gouvernements, que les contraintes de l’actuelle loi de 2012 font en sorte que les échéances sont très serrées, et que la plupart des provinces n’ont donc probablement pas le temps de conclure un accord de coordination avec le gouvernement fédéral? Est-ce possible?

M. Jardine : Je pense que la plupart des gouvernements — du moins ceux que je connais — collaborent très étroitement avec l’Agence canadienne d’évaluation environnementale et coordonnent les étapes de l’évaluation environnementale. Je crois que notre province est simplement la seule qui s’est prévalue de la possibilité offerte par la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale de 2012, et elle l’a fait rapidement, puisque la province a conclu son protocole d’entente au titre de cette loi en 2013.

Le sénateur Massicotte : Cela dit, j’aurais une brève question à poser. Il est évident que la loi que votre province a mise en place le mois dernier ou le mois précédent ressemble beaucoup au projet de loi C-69. Idéalement, y aurait-il des leçons à tirer de votre expérience en vue de rendre le projet de loi encore meilleur?

M. Jardine : À part ce que j’ai déjà recommandé? J’hésite certainement à m’immiscer dans les affaires législatives de mes homologues fédéraux. Nous sommes ravis de constater que nombre d’aspects généraux des objectifs de la nouvelle loi fédérale reflètent ce que la Colombie-Britannique tente aussi de faire. Même si je crois qu’il n’est peut-être guère surprenant que nous ayons pu choisir un moyen différent — notre nouvelle loi confirme que nous avons fait un tel choix — pour atteindre en partie les mêmes objectifs, la substitution et la coordination sont des moyens qui nous permettent d’atteindre conjointement nos objectifs dans le cadre d’un processus mieux adapté à la Colombie-Britannique, c’est-à-dire son processus provincial.

Le sénateur Massicotte : Merci.

Le sénateur Mitchell : Monsieur Jardine, de toute évidence, vous n’êtes pas particulièrement inquiet quant au risque d’ingérence du gouvernement fédéral dans un champ de compétence provincial. Il semble que vous travaillez bien ensemble et que cela ne vous pose aucun problème.

M. Jardine : Dans le contexte précis de l’évaluation environnementale, je dirais que c’est exact.

Le sénateur Mitchell : J’aimerais revenir sur les comparaisons entre votre loi et le projet de loi C-69, car vous vous êtes penché sur le débat et sur les questions que le projet de loi suscite. Avez-vous fait l’objet de critiques concernant le risque de reporter sans cesse l’échéance? Comment avez-vous réagi?

M. Jardine : Oui, c’est arrivé. Le processus prévu dans notre loi actuelle compte notamment des dispositions réglementaires clairement établies concernant les échéances. Cela a permis au moins de donner aux promoteurs et aux investisseurs une certaine assurance qu’il y a des limites au processus. Nous avons fait beaucoup d’efforts pour que notre nouvelle loi conserve un grand nombre de ces contraintes tout en accordant au promoteur la marge de manœuvre dont il a besoin pour qu’il puisse prendre autant de temps qu’il le veut pendant le processus.

C’est particulièrement vrai dans le cas des premières étapes de l’évaluation, car, d’après notre expérience, plus on prend de temps au début de l’évaluation, alors que la pression et les dépenses sont généralement moins élevées, plus les bienfaits sont importants à la fin du processus, sur le plan tant de la rapidité du processus que des finances.

Cela ne nous a pas empêchés d’essuyer des critiques et de subir des pressions constantes pour que les échéances soient bien définies.

Le sénateur Mitchell : Merci. En ce qui concerne votre relation avec les peuples autochtones dans le cadre de ce processus, je crois comprendre que vous avez étudié la notion de consentement et cherché des façons de l’appliquer. Pourriez-vous nous donner une idée de ce que vous avez fait pour résoudre cette question épineuse, en quelque sorte?

M. Jardine : Certainement. Comme vous le savez probablement, le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique s’est engagé à promouvoir la réconciliation. Cet engagement implique notamment d’adopter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, de répondre aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation et de suivre la jurisprudence, notamment celle établie dans la récente affaire Tsilhqot’in. Je crois qu’il est juste de dire que tout cela indique que les aspects controversés de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, y compris le principe du consentement libre et préalable, doivent être inscrits dans la loi.

Nous l’avons fait de deux façons. Nous avons inscrit dans notre loi l’obligation d’obtenir le consentement préalable des Autochtones, donné librement et en connaissance de cause. Il y a probablement une dizaine de domaines dans lesquels le Bureau des évaluations environnementales — dont je fais partie — doit faire en sorte que les décisions qui sont prises tout au long du processus s’appuient sur un consensus au sein des nations autochtones participantes. Voilà pour le premier aspect.

Il y a deux étapes très précises de notre processus décisionnel qui permettent aux nations autochtones participantes d’accorder ou non leur consentement. Premièrement, au début du processus, on détermine ce qu’on appelle l’état de préparation. C’est à cette étape qu’on détermine si le projet sera soumis à une évaluation environnementale, rejeté ou exempté du processus.

La deuxième décision est prise par deux ministres et porte sur l’octroi d’un certificat d’évaluation environnementale. Cette décision peut aussi en être une de consentement. Dans notre cas, lorsqu’une forme de consentement est donnée, les ministres doivent en tenir compte conformément à la loi et expliquer comment ils l’ont prise en considération lorsque les raisons de leur décision sont rendues publiques.

Lorsque les ministres s’apprêtent à rendre une décision contraire au consentement des nations autochtones, ils doivent aussi offrir aux nations autochtones concernées de les rencontrer dans le but d’arriver à un consensus.

Le sénateur Mitchell : Merci.

Le sénateur Neufeld : Je vous remercie de vous rendre disponible pour répondre à nos questions.

J’aimerais obtenir quelques précisions. Je vais revenir 10 ans en arrière, parce que 10 ans se sont écoulés depuis mon départ, comme vous le savez sans doute. En Colombie-Britannique, la coordination des processus d’évaluation environnementale avec le gouvernement fédéral demandait beaucoup d’efforts, en raison des coûts associés au fait d’avoir deux processus, comme on l’a mentionné. La façon de faire était ridicule. Les choses ne se produisaient pas du jour au lendemain. On ne pouvait pas avoir une idée le vendredi et signer une entente le lundi. Il a fallu que la province et le gouvernement fédéral travaillent une dizaine d’années probablement pour conclure les accords de coordination et l’autre accord. Voilà qui apporte peut-être un peu de contexte.

Je veux poser une question concernant les modifications que vous avez apportées — la consultation publique. Comment vous y prenez-vous? Est-ce à l’échelle mondiale ou seulement auprès des personnes touchées? Lorsque d’autres questions surviennent, comment les réglez-vous?

M. Jardine : Oui, nous avons trois mécanismes en quelque sorte. Premièrement, il est exigé dans la loi qu’on fasse une annonce publique pour inviter le public à étudier les informations fournies ou les décisions prises par le bureau à différentes étapes et à soumettre des commentaires. Le public est donc invité à étudier la proposition et à soumettre des commentaires en ligne.

En général, dans ces situations, nous exigeons également que les promoteurs répondent directement aux commentaires qu’ils reçoivent aux différentes étapes du processus.

J’ajouterai que les consultations en ligne ne sont soumises à aucune restriction géographique. Une grande proportion des participants font partie des personnes concernées, ou sont des gens de la Colombie-Britannique, mais il est possible pour des répondants d’ailleurs de participer. Nous sommes en mesure de le savoir lorsque c’est le cas.

Deuxièmement, il y a les consultations en personne et les événements portes ouvertes, qui sont organisés dans les régions où ont lieu les projets et à divers stades du processus d’évaluation environnementale. Dans la nouvelle loi, nous avons prévu au moins une consultation obligatoire additionnelle.

Ce sont là les principales façons dont nous tenons des consultations publiques.

Le sénateur Neufeld : Merci. Une dernière chose, à propos des projets pouvant faire l’objet d’un examen : existe-t-il des critères écrits pour établir ce qui distingue un projet qui doit faire l’objet d’un examen, ou est-ce que tous les projets sont soumis à un examen environnemental rapide? C’était possible dans mon temps. Par exemple, tout projet d’électricité de moins de 50 mégawatts n’avait pas à faire l’objet d’une évaluation environnementale complète, mais pouvait être soumis à un processus renforcé. Est-ce toujours le cas?

M. Jardine : Nous avons un règlement sur les projets pouvant faire l’objet d’un examen, qui établit le seuil au-delà duquel un projet doit être soumis à une évaluation environnementale.

Comme vous le savez, sénateur, notre régime réglementaire d’octroi des permis est assez rigoureux. Les autres projets doivent donc faire l’objet d’une certaine forme d’évaluation environnementale, comme vous l’évoquez.

Le sénateur Neufeld : Merci.

La sénatrice Seidman : Je vous remercie de tout cœur d’avoir témoigné ce soir. J’aimerais revenir sur le continuum réglementaire que vous avez évoqué. Vous parlez de quatre éléments qui, selon vous, doivent être alignés pour réduire les chevauchements et les retards. L’un de ces facteurs concerne la terminologie et les définitions.

Je me demande ce que vous voulez dire exactement. Il a été question de l’article 22 du projet de loi C-69 et des divers critères d’évaluation. Est-ce de cela qu’il s’agit? Je voudrais entendre vos explications à cet égard.

M. Jardine : Nous avons constaté que, dans nos régimes d’octroi de permis et parfois dans nos évaluations environnementales, nous utilisons des termes ou des processus différents. Par exemple, un promoteur peut avoir un certificat provincial d’évaluation environnementale et une décision fédérale, chacun assorti de conditions. Ainsi, on pourrait demander entre autres un plan de gestion de construction pour l’un et, pour l’autre, imposer d’autres exigences que l’on désigne différemment, mais qui servent le même dessein.

L’objectif consiste non seulement à demander la même chose, mais aussi à la désigner de la même façon. Encore une fois, il s’agit d’appliquer au processus d’octroi des permis les avantages de la substitution ou de la coordination dont j’ai parlé.

La sénatrice Seidman : Vos tentatives pour harmoniser la terminologie et les définitions ont-elles été fructueuses?

M. Jardine : Pardon, je n’ai pas entendu la première partie de la question.

La sénatrice Seidman : J’ai demandé si vos tentatives pour harmoniser la terminologie et les définitions avaient été fructueuses.

M. Jardine : Nous venons d’entamer des discussions avec le gouvernement fédéral et divers organismes. Les deux partis estiment que, si nous y arrivons, il sera possible d’améliorer considérablement les choses du point de vue de la compétitivité, des coûts, de l’efficacité et de la durée des prochains processus, notamment en ce qui concerne les informations et les données. Voilà qui est très encourageant, selon moi.

Je suis assurément très heureux et rassuré par le fait que les deux partis soient intéressés. Je peux affirmer que les entreprises, l’industrie et les promoteurs estiment eux aussi que cela pourrait leur être véritablement profitable.

La sénatrice Seidman : Merci.

La sénatrice McCallum : Je vous remercie de votre présentation. J’aimerais revenir sur votre entente trilatérale, qui est très particulière. Je sais qu’un accord trilatéral sur la santé a été conclu avec les Premières Nations de la Colombie-Britannique, ce qui veut dire que vous avez des obligations et des responsabilités communes.

A-t-il été difficile d’en arriver là? Il a sans doute fallu déployer des efforts considérables pour amener la province à renoncer à du financement et certains pouvoirs. Les liens étroits que vous entretenez avec la communauté autochtone atténuent-ils les risques de litiges?

M. Jardine : Dans le contexte d’une évaluation environnementale, il est très rare qu’on négocie une entente trilatérale officielle. Toutefois, nous avons travaillé sur de nombreux projets avec les nations autochtones et l’organisme fédéral, d’une manière qui s’apparenterait au contenu d’une entente trilatérale.

Dans les deux lois, c’est-à-dire dans la loi provinciale et la nouvelle Loi sur l’évaluation d’impact, on prévoit la possibilité de conclure des accords officiels. Nous avons donc entamé des discussions sur la forme que prendraient les rapports avec les nations autochtones dans le cadre d’un accord officiel dont la portée pourrait s’étendre au-delà d’un projet en particulier ou même d’un accord conclu en l’absence d’un projet. Malheureusement, je ne peux pas en dire long sur notre expérience dans le cadre d’un accord officiel, mais je peux dire que nous avons constaté des avantages jusqu’à présent et que, pour cette raison, il s’agit d’une avenue que nous souhaitons continuer à explorer.

La sénatrice McCallum : Merci.

La présidente : Nous allons permettre au sénateur Carignan de poser une dernière question. Il vous faudra demeurer en ligne, car nous avons deux choses à régler. Merci.

[Français]

Le sénateur Carignan : Rapidement, je voyais qu’il y avait... Est-ce que la traduction fonctionne bien?

M. Jardine : Oui.

Le sénateur Carignan : J’ai vu qu’il y avait une lettre ouverte de 180 scientifiques rédigée au mois de novembre 2018 et qui concerne des critiques sur votre loi, particulièrement sur le processus du recueil d’information. Ils semblaient dire que la méthode qui était utilisée dans votre projet de loi manquait d’indépendance, de transparence et de rigueur scientifique. Pourriez-vous élaborer un peu sur les critiques de ces 180 scientifiques, et quelle est votre réponse à ces critiques?

[Traduction]

M. Jardine : Certainement, sénatrice. Merci.

La présidente : Avant que vous ne répondiez, je veux signaler aux sénateurs qu’il y aura un vote, probablement dans une heure.

La sénatrice McCallum : Je dois quitter la réunion pour aller terminer mon allocution.

La présidente : Pardon, monsieur Jardine, veuillez poursuivre votre réponse.

M. Jardine : Je vous en prie. Merci de soulever ce point. Les principales critiques tiennent au fait que le promoteur ou l’entreprise doit mener et financer lui-même la collecte des informations nécessaires pour une demande d’évaluation environnementale. On a fait valoir que, par conséquent — et malgré le fait que ce travail est effectué par des personnes appartenant à des professions réglementées —, les données et les conclusions seraient biaisées. On s’appuie ainsi sur le vieil adage selon lequel celui qui paie les violons choisit la musique.

Nous nous attaquons à ce problème de trois façons. Premièrement, l’entreprise n’a plus à déterminer dans sa demande d’évaluation environnementale l’importance des répercussions négatives que pourrait avoir n’importe quel aspect de son projet sur l’environnement. Cela sera établi par une entité indépendante.

Deuxièmement, il y a un comité consultatif technique ou un comité d’examen technique. Le comité pourrait être constitué de professionnels appartenant aux différents organismes gouvernementaux provinciaux et à des organisations comme le ministère des Pêches et des Océans, par exemple dans le cas où le gouvernement fédéral serait concerné. Il pourrait aussi y avoir des scientifiques indépendants de sorte que, quels que soient les données recueillies ou les modèles utilisés, elles seraient examinées par ce comité consultatif technique afin que leur validité soit confirmée.

Troisièmement, et c’est en amont que ça se passe, en fait. Notre processus de planification précoce nécessite qu’il y ait consensus avec les peuples autochtones. Nous travaillerons avec elles dans le cadre de ce processus afin de déterminer quels renseignements il faut donner dans la demande, mais aussi comment ces renseignements seront collectés et éventuellement par qui. Par conséquent, les discussions sur la validité des modèles, par exemple, ou sur la méthodologie utilisée ont lieu au début, avant la collecte des données afin que toutes les parties — les populations autochtones, le public, l’entreprise et l’organisme de réglementation — puissent se fier aux données recueillies.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur Jardine. Nous allons poursuivre la séance, pendant 10 minutes seulement, parce que nous devons être au Sénat à 20 heures. Merci beaucoup.

J’ai deux choses à dire, chers collègues.

Le sénateur Massicotte : Est-ce qu’on siège à huis clos maintenant?

La présidente : Non, c’est une séance publique. On va juste poursuivre. Des problèmes?

Le sénateur Neufeld : Sommes-nous toujours connectés?

La présidente : Non.

D’accord. J’ai juste deux choses à dire.

Maxime Fortin, greffier du Comité : Nous sommes déconnectés.

La présidente : Deux choses. D’abord, nous devons adopter le budget. Vous avez reçu hier le budget pour les deux parties du voyage : nous devons donc l’adopter.

Le sénateur MacDonald : Je propose qu’on adopte le budget.

La présidente : Il y a unanimité? Quelqu’un s’y oppose?

Le sénateur Mitchell : À combien cela se monte? À 492 000 $, et huit personnes feront tout le voyage. Il n’y aura même pas sept sénateurs pendant tout le voyage, et ce, pour 492 000 $. Et nous allons en Alberta cinq à six jours avant des élections. C’est juste histoire de dire.

Le sénateur Tkachuk : C’est environ 25 p. 100 de ce que nous coûte le nouveau Sénat indépendant de plus. Ce n’est pas un mauvais investissement. Nous allons rencontrer des Canadiens.

Le sénateur Mitchell : C’est juste une information.

Le sénateur Neufeld : Huit sénateurs seulement seront de la partie. Cela ne coûtera pas autant. On aura le budget pour les 14.

Le sénateur Mitchell : Huit sénateurs faisant l’allée et retour, alors ils seront jusqu’à 11. Mais, il y a aussi les membres du personnel.

La présidente : Demandez à intervenir dans l’ordre. Vous voulez que je dise le coût? Le coût est de 492 092 $. Maintenant, j’ai une motion qui a été proposée.

Le sénateur Massicotte : Pourrais-je proposer un amendement à la motion? Si on adopte le budget, les dates ont-elles été choisies pour chacun des voyages?

La présidente : Non.

Le sénateur Massicotte : Entendu. Je propose la motion.

La présidente : Vous proposez la motion?

Le sénateur Massicotte : J’appuie la motion.

La présidente : Devons-nous voter ou y a-t-il unanimité? Merci.

Nous avons décidé, pendant le comité directeur, de siéger les lundis. Je demande donc la permission pour que nous puissions siéger le 1er avril, le 29 avril et le 6 mai. Entendu? Vous pouvez le noter dans vos agendas.

Le sénateur Neufeld : À quelle heure?

La présidente : De 18 h 30 à 20 h 30. Merci beaucoup.

Le sénateur Massicotte : J’ai une question. Je m’inquiète de ce que notre déplacement en Alberta soit prévu pendant une campagne électorale. Nous évitons cela, en général. Avez-vous penser à substituer la semaine dans l’Est par celle dans l’Ouest pour éviter ce problème?

La présidente : Nous en avons parlé. Après mûre réflexion, nous avons décidé que nous irions quand même parce que nous ne nous rendons pas nécessairement dans de grandes villes. Nous allons dans des petites villes.

Le sénateur MacDonald : Un des problèmes était que le voyage dans l’Est suit le week-end du dimanche et du lundi de Pâques. On devrait voyager le dimanche de Pâques et travailler le lundi de Pâques, et beaucoup de gens pensent que cela ne se fait pas.

Le sénateur Woo : Je suis d’accord avec le sénateur Massicotte. Nous ne devrions pas inviter de politiciens à comparaître et même, on devrait faire en sorte qu’ils se trouvent aussi loin que possible de nos salles d’audience. Nous devrions faire nôtre cette politique et l’appliquer de manière stricte.

La présidente : D’accord.

Le sénateur Woo : Merci. Je suis sûr que vous y avez déjà pensé.

La sénatrice Simons : Quand peut-on rendre publics les dates et les lieux? Il y a beaucoup de gens qui voudraient connaître les dates.

Le sénateur MacDonald : Demain, une fois que le budget sera adopté.

La présidente : Nous en reparlerons demain et très bientôt...

Le sénateur Tkachuk : Il va au Comité de la régie interne puis au Sénat. Il sera déposé jeudi après-midi au Sénat. Vous pourrez alors rendre tout cela public.

La sénatrice McCoy : Excusez-moi, mais pouvez-vous nous redire quand ont lieu les trois séances du lundi à 18 h 30?

La présidente : Le 1er avril, le 29 avril et le 6 mai. Mais, vous recevrez un courriel.

Merci beaucoup.

(La séance est levée.)

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