Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule no 30 - Témoignages du 31 mai 2017
OTTAWA, le mercredi 31 mai 2017
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd'hui, à 16 h 16, pour examiner la teneur des éléments des sections 10 et 11 de la partie 4 du projet de loi C-44, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 mars 2017 et mettant en œuvre d'autres mesures (sujet : section 17 de la partie 4 du projet de loi C-44).
Le sénateur Bob Runciman (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Chers collègues, chers invités et chers membres du grand public qui suivez aujourd'hui les travaux du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, bonjour et bienvenue.
Aujourd'hui, nous poursuivons l'étude de la teneur des éléments des sections 10 et 17 de la partie 4 du projet de loi C-44, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 22 mars 2017 et mettant en œuvre d'autres mesures.
Nous poursuivons l'étude de la section 17, qui modifie certains articles du Code canadien du travail.
Le premier groupe de témoins que nous accueillons représente Emploi et Développement social Canada. Il s'agit du sous-ministre adjoint, Programme du travail, M. Gary Robertson; du directeur principal, du Milieu de travail, du même programme, M. Eric Advokaat; enfin, du gestionnaire par intérim, aux Normes du travail et Programme de protection des salariés, également du Programme du travail, M. Charles Philippe Rochon.
Si j'ai bien compris, monsieur Robertson, vous commencez. Vous disposez de cinq minutes. Vous avez la parole.
[Français]
Gary Robertson, sous-ministre adjoint, Programme du travail, Emploi et Développement social Canada : Merci de m'avoir invité à discuter de la section 17 de la partie 4 de la Loi d'exécution du budget. J'ai à mes côtés Eric Advokaat et Charles Philippe Rochon.
[Traduction]
La section 17 vise à améliorer la conformité aux exigences des parties II et III du Code canadien du travail, que j'appellerai tout simplement le code à partir de maintenant.
Comme vous le savez peut-être, la partie II établit des règles relatives à la santé et à la sécurité au travail pour prévenir les blessures au travail et les maladies professionnelles, tandis que la partie III établit les conditions de travail de base, comme les heures maximales de travail, les heures supplémentaires, les vacances et les jours fériés.
Les deux parties s'appliquent aux quelque 900 000 employés sous réglementation fédérale, ce qui comprend les sociétés d'État. C'est approximativement 6 p. 100 de tous les employés au Canada. La partie II s'applique aussi à la fonction publique fédérale, 2 p. 100 de plus, ce qui fait, en tout, 8 p. 100 de tous les employés canadiens.
[Français]
En mettant à jour les outils en fonction de l'application du code, cette loi fera en sorte que les travailleurs subissent moins d'accidents et moins de blessures au travail, et qu'ils reçoivent la rémunération et les avantages auxquels ils ont droit. Nous prévoyons également rationaliser le processus en regroupant les diverses fonctions décisionnelles qui existent actuellement aux termes du code.
Passons aux modifications spécifiques proposées en commençant par trois changements importants qui viseront à la fois les parties II et III du code.
[Traduction]
Premièrement, la loi créera une partie IV dans le code, qui jette les bases d'un régime de sanctions administratives pécuniaires pour promouvoir la conformité aux exigences en matière de santé et sécurité au travail et de normes du travail. Cela permettra l'adoption de règlements pour désigner les violations et déterminer les pénalités connexes qui, dans le cas extrême, pourraient atteindre 250 000 $.
Les dispositions de la partie IV énoncent aussi des processus pour la délivrance, l'examen et l'appel de telles pénalités et des procès-verbaux de violation connexes.
Deuxièmement, de nouvelles dispositions en vertu des parties II et III autoriseront la publication du nom des employeurs reconnus coupables d'une infraction. Une disposition semblable viserait ceux à qui un procès-verbal de violation a été signifié aux termes de la nouvelle partie IV, une fois tous les appels épuisés. Outre le nom de l'employeur, des renseignements sur la nature de la violation ou de l'infraction et la sanction connexe pourraient être publiés.
Troisièmement, toutes les attributions actuelles des agents d'appel aux termes de la partie II, des arbitres en matière de salaire et en cas de congédiement injuste aux termes de la partie III et des arbitres aux termes de la Loi sur le Programme de protection des salariés seront transférées au Conseil canadien des relations industrielles, dont les pouvoirs, fonctions et attributions seront modifiés en conséquence. Ces mesures visent à simplifier les processus d'appel, à miser sur l'expertise existante du conseil, à uniformiser les décisions et à favoriser une résolution rapide des problèmes.
[Français]
Plusieurs autres modifications s'appliqueraient plus spécifiquement à la partie III du code de sorte que les employés obtiennent les avantages et la protection en matière de normes du travail auxquels ils ont droit, y compris un recouvrement efficace des salaires non versés. Plus précisément, ces modifications permettraient aux employés faisant l'objet de représailles de la part de l'employeur pour avoir tenté d'exercer un droit prévu dans les normes du travail de déposer une plainte écrite auprès du Conseil canadien des relations industrielles, qui se verrait accorder de vastes pouvoirs de redressement.
[Traduction]
Ces modifications de la partie III permettraient au ministre de l'Emploi, du Développement de la main-d'œuvre et du Travail ou à un fonctionnaire délégué d'ordonner à l'employeur de mener une vérification interne et de faire rapport sur sa conformité aux exigences de la partie III et sur les mesures prises pour régler les problèmes de conformité; elles donneraient aux inspecteurs le pouvoir d'ordonner aux employeurs de mettre fin à une violation des normes du travail et de prendre des mesures pour s'assurer qu'elle ne se reproduira pas; elles clarifieraient des aspects du recouvrement des salaires et confirmeraient que les inspecteurs ont le pouvoir de déterminer les salaires dus, y compris dans les situations où aucun registre de paye n'a été conservé ou fourni par l'employeur; elles prolongeraient d'un an la période pouvant être visée par l'ordre de paiement pour permettre le recouvrement des salaires non versés et d'autres indemnités dues jusqu'à deux ans avant le jour où, selon le cas, la plainte a été déposée, l'emploi a cessé ou l'inspection a débuté; elles fourniraient un processus clair pour interjeter appel de la détermination des salaires dus par l'inspecteur, si l'employeur effectue volontairement le paiement, mais que l'employé croit que des montants lui sont toujours dus; elles permettraient le recouvrement des salaires non versés et autres indemnités indiquées dans l'ordre de paiement donné à l'administrateur d'une personne morale en ordonnant aux débiteurs de cette personne de verser les sommes dues directement au Programme du travail au nom des employés touchés; elles imposeraient des frais administratifs de 200 $ ou si elle est plus élevée, la somme équivalant à 15 p. 100 des sommes à verser au titre d'un ordre de paiement donné à l'employeur, si cet ordre n'est pas par la suite annulé à l'issue d'une révision ou d'un appel; elles accorderaient une plus grande marge de manœuvre à l'employeur ou à l'administrateur d'une personne morale, sous réserve de l'approbation du ministre, pour donner une garantie, comme une obligation, au lieu de verser une somme lorsqu'il demande la révision d'un ordre de paiement.
[Français]
Tous les outils de conformité et d'application de la loi proposés existent déjà dans d'autres administrations canadiennes. D'autres ministères et organismes fédéraux, comme la Commission canadienne de sûreté nucléaire et Transports Canada, utilisent aussi des régimes de sanctions administratives pécuniaires. Nous sommes d'avis que les mesures proposées sont équilibrées et fondées sur des pratiques exemplaires.
[Traduction]
En terminant, je précise que les modifications proposées entreront en vigueur par décret, certaines plus rapidement que d'autres. Nous nous attendons à ce que tout le processus aboutisse dans les trois ans suivant la date à laquelle le projet de loi C-44 aura reçu la sanction royale.
Cela nous donnera le temps de consulter les acteurs sur les changements réglementaires, tout comme nous l'avons fait pour les modifications contenues dans cette loi, et cela permettra au Programme du travail, au Conseil canadien des relations industrielles et au Service canadien d'appui aux tribunaux administratifs d'adapter leurs processus administratifs, de former le personnel et d'informer les employeurs et les employés.
Merci.
Le président : Nous disposons d'à peu près 45 minutes pour les questions. Le premier intervenant est le vice- président du comité, le sénateur Baker.
Le sénateur Baker : Je remercie les témoins et celui qui a fait l'exposé.
Pourriez-vous préciser, pour le comité, de quel tribunal il s'agit pour les appels, particulièrement ceux de l'employeur et de l'employé, concernant les frais administratifs à imposer et une révision ou un appel ultérieur?
M. Robertson : L'appel serait adressé au Conseil canadien des relations industrielles.
Le sénateur Baker : Ensuite?
M. Robertson : Ça s'arrête essentiellement là. Le ministre peut revoir certaines activités relevant de la partie III, dans le cas de données erronées fournies au programme et à corriger, mais, la plupart du temps, c'est le Conseil canadien des relations industrielles. On a voulu une refonte pour simplifier le processus pour tous les acteurs, quant à sa nature, à l'autorité qui décide et à l'entité professionnelle qu'elle forme.
Le sénateur Baker : L'appel s'adresse à qui? À qui interjette-t-on appel, l'employeur et les employés, pendant tout...
Charles Philippe Rochon, gestionnaire par intérim, Normes du travail et Programme de protection des salariés, Programme du travail, Emploi et Développement social Canada : La personne à qui les sanctions pécuniaires administratives ont été imposées pourra d'abord, comme il a été dit, faire examiner le dossier par le ministre et, à la faveur de cette révision, il pourrait y avoir correction des montants ou réévaluation quant à la commission de l'infraction.
Après la révision, un autre appel est possible au Conseil canadien des relations industrielles, lequel aura les pleins pouvoirs, alors, pour confirmer, annuler ou même modifier le montant officiel de la sanction.
Ensuite, manifestement, il existe toujours une certaine possibilité de révision judiciaire de la décision des tribunaux administratifs, mais la loi comporte une disposition d'inattaquabilité pour limiter les appels ultérieurs.
Le sénateur Baker : Quand il est interjeté appel d'une sanction qui, théoriquement, pourrait se chiffrer à 250 000 $, ce dont pourrait être saisi un tribunal judiciaire, peut-on supposer que ce serait la Cour fédérale?
M. Rochon : Essentiellement, pour que ce soit clair, l'appel, comme il est prévu dans la loi, serait adressé au Conseil canadien des relations industrielles, compétent en la matière.
Manifestement, une révision judiciaire serait toujours possible, et, effectivement, ce serait devant un tribunal fédéral.
Le sénateur Baker : Ensuite, en ce qui concerne l'objet de l'appel, vous avez dit que le Conseil canadien des relations industrielles pouvait renverser la décision.
M. Rochon : Oui.
Le sénateur Baker : La révision judiciaire ne peut pas renverser la décision prise dans une affaire administrative. Elle serait renvoyée, pour révision, à celui qui a pris la décision.
M. Rochon : Oui. En supposant que...
Le sénateur Baker : Est-ce que ce sera prévu par cette loi? Aucune modification n'y montre la possibilité de saisir un tribunal judiciaire d'un deuxième appel qui serait ensuite renvoyé pour réévaluation?
M. Rochon : La loi instaure un processus en deux étapes. Encore une fois, c'est la révision ministérielle suivie d'un appel au Conseil canadien des relations industrielles. Elle ne prévoit rien pour les révisions judiciaires, si ce n'est une disposition d'inattaquabilité pour en limiter le nombre éventuel de cas. Encore une fois, nous croyons comprendre que les tribunaux, s'ils constatent la déraison d'une décision, pourront la renvoyer pour réévaluation.
Le sénateur Baker : Non pas la renverser, mais la renvoyer.
M. Rochon : Oui.
Le sénateur McIntyre : Je vous remercie de votre exposé.
Je crois comprendre qu'il y aura refonte des fonctions des agents d'appel aux termes de la partie II et des arbitres saisis d'affaires relatives aux salaires et aux congédiements injustes aux termes de la partie III ainsi que des fonctions d'arbitre aux termes de la Loi sur le Programme de protection des salariés.
M. Robertson : Oui.
Le sénateur McIntyre : Cela étant dit, pourriez-vous donner une estimation des coûts annuels entraînés par cette opération?
M. Robertson : Pour le moment, c'est impossible. Nous pouvons dire que nous avons entamé un processus pour déterminer ces coûts et que nous discutons avec les titulaires à venir de ces fonctions. Nous comprenons donc qu'il existe actuellement des coûts à l'intérieur, surtout, du programme et dans d'autres parties du système et que nous allons les gérer après l'adoption du projet de loi.
Le sénateur McIntyre : Pour faire suite à une question du sénateur Baker, les fonctions et tâches de la ministre seraient-elles touchées par les nouvelles exigences proposées pour les appels?
M. Robertson : Pas pour les appels, mais il faut dire qu'on préviendra officiellement le ministre quand un appel sera interjeté, ce qui n'arrive pas dans le système actuel. Il lui sera alors loisible de présenter des observations, ce qui est une nouveauté de la loi.
La sénatrice Lankin : En général, pourriez-vous décrire les problèmes à l'origine, à ce que je sache, de ces modifications, que ce soit pour le respect de la loi, la santé et la sécurité au travail, les conditions générales de travail, les avantages sociaux, et cetera. Qu'étaient-ils? Qu'avez-vous observé?
M. Robertson : Nous avons examiné la période de 2013 à 2016 et nous avons analysé le nombre de violations commises. Cette analyse nous a permis de conclure que dans le domaine de la santé et sécurité au travail, environ 35 p. 100 du nombre total de violations étaient commises par des récidivistes. Il ne s'agissait pas de gens qui n'avaient pas compris leurs obligations et qui avaient seulement besoin d'un rappel ou de conseils. Il s'agissait plutôt de gens qui savaient ce qu'ils devaient faire, mais qui continuaient de passer outre à leurs obligations. Cela nous a beaucoup préoccupés.
Lorsque nous avons examiné les données liées aux normes du travail pour la même période, nous avons constaté que cette proportion était moins élevée, c'est-à-dire que 23 p. 100 des gens étaient des récidivistes. Toutefois, dans ce cas-ci, il est intéressant de noter que ces gens représentaient près de 40 p. 100 du nombre total d'employés, car un employeur peut avoir plusieurs employés qui ne sont pas payés.
Dans les deux cas, étant donné que le pourcentage de couverture ultime était de 30 p. 100 à 40 p. 100 pour les cas de récidive — si je peux utiliser ce mot dans ce contexte —, cela justifie la mise en œuvre d'un régime de conformité et d'exécution de la loi plus sévère et, dans notre contexte, l'adoption d'un outil plus performant, à savoir les sanctions administratives pécuniaires.
La sénatrice Lankin : La Commission canadienne des normes du travail obtiendra des pouvoirs de réparation plus étendus. Pourriez-vous décrire les pouvoirs qu'elle détient actuellement et comment ils seraient modifiés?
M. Rochon : Aux fins d'éclaircissements, les pouvoirs de réparation concernent les plaintes en cas de représailles. Actuellement, la partie III du code ne prévoit aucune disposition directement liée aux représailles. Par exemple, si un employeur suspendait, rétrogradait ou menaçait d'une façon quelconque un employé qui a tenté d'exercer un droit tel que prendre un congé prévu dans le code ou déposer une plainte ou offrir du soutien à un inspecteur ou des renseignements au ministre, actuellement, le code prévoit seulement la possibilité d'intenter des poursuites judiciaires pour protéger l'employé. C'est pourquoi on ajouterait essentiellement un nouveau recours qui permettrait à l'employé, en cas de représailles, de présenter une plainte au Conseil canadien des relations industrielles en vue de tenter d'obtenir réparation.
Manifestement, le conseil aura l'occasion d'examiner ces cas et de tenter de déterminer les faits. Si les membres du conseil présument que des représailles ont été exercées, ils auront le pouvoir d'ordonner la réintégration de l'employé en cas de congédiement et d'ordonner le dédommagement du salaire perdu de l'employé et de toute pénalité financière imposée à l'employé par l'employeur, mais ils auront également le pouvoir de faire le nécessaire pour compenser ou corriger les effets des représailles.
Le libellé est assez général. Il est très semblable aux dispositions sur le congédiement injuste déjà prévues dans le code, sauf que leur application sera plus générale. Cela visera non seulement les congédiements, mais également d'autres formes de représailles. Cela visera aussi tous les employés, alors que les dispositions actuelles sur le congédiement injuste ne visent pas les employés qui ont moins de 12 mois de service continu et ne visent pas les gestionnaires ou les employés couverts dans le cadre d'une convention collective, et cetera. L'objectif, dans ce cas-ci, est de veiller à ce que les employés profitent d'une protection complète et qu'ils aient accès à des recours en cas de violation de leurs droits.
La sénatrice Lankin : Je ne peux pas trouver le paragraphe où se trouve cette citation, mais je crois que vous avez dit que dans une situation où on exige un remboursement, on peut envoyer une ordonnance à cet égard à un directeur. J'aimerais comprendre les conséquences de cette mesure. S'agit-il de lever le voile corporatif — c'est-à-dire que c'est la responsabilité du directeur — ou est-ce la responsabilité de la société?
M. Robertson : C'est très semblable aux exigences d'Industrie Canada qui rendent les membres du conseil responsables du salaire ou de la rémunération pour une période de six mois. De la même façon, si nous avons de la difficulté à obtenir le paiement de l'organisme ou de ses gestionnaires au nom de l'employé, cette mesure nous permet de cibler les directeurs. Oui, dans de nombreux cas, si cela se produit, nous nous attendons à ce qu'ils utilisent leur assurance responsabilité pour effectuer les paiements. Nous ne pouvons pas prévoir que cela se produirait dans tous les cas, mais c'est la disposition. Elle nous donne une capacité supplémentaire en vue d'obtenir les paiements pour l'employé.
Le président : Vous serez sur la liste pour la deuxième série de questions.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue, messieurs. J'ai deux questions à vous poser. Monsieur Robertson, à la page 3 de votre mémoire, vous proposez de transférer au Conseil canadien des relations industrielles les pouvoirs des arbitres en matière de salaire et de congédiement. Y a-t-il une raison particulière qui motive ce transfert?
M. Rochon : Merci de votre question. En fait, ce sont des objectifs multiples. D'une part, la consolidation de toutes les fonctions décisionnelles au sein du conseil permettra d'assurer plus d'uniformité et de rapidité dans les décisions. Actuellement, en ce qui concerne les arbitres, c'est un processus dans lequel la ministre ou un fonctionnaire délégué doit nommer un arbitre, qui étudiera la question, et cetera. Donc, c'est une structure qui n'est pas permanente, tandis que le Conseil canadien des relations industrielles a une structure bien établie. Il sera donc probablement plus rapide d'obtenir des décisions. Comme je l'ai déjà mentionné, pour ce qui est de l'uniformité des décisions, une seule entité sera responsable. Différentes personnes rendront des décisions, mais on ne se retrouvera pas avec un système dans lequel on ne sait jamais ou avec des décisions qui pourraient varier selon la personne qui est nommée. Cela nous permettra aussi de nous appuyer sur l'expertise qui existe déjà.
C'est un phénomène qu'on a vu dans la plupart des provinces, où les fonctions ont tendance à être centralisées au sein d'une seule entité, ce qui favorise cette capacité d'apprentissage et permet de profiter de l'expérience passée, de la jurisprudence, et cetera. En fin de compte, le système sera plus efficace et plus rapide, autant pour les employeurs qui interjettent appel que pour les employés, qui obtiendront une décision plus rapidement. Ce dispositif favorisera aussi une plus grande indépendance, car les fonctions décisionnelles seront séparées du rôle de la ministre. Ce ne sera plus la ministre ou un fonctionnaire délégué qui nommera la personne qui sera chargée du dossier, ce sera le Conseil canadien des relations industrielles.
Le sénateur Boisvenu : J'imagine les Canadiens qui nous écoutent... Je suis surpris de voir que vous avez des responsabilités en matière de santé et de sécurité au travail, alors que chaque province a des commissions qui s'occupent de la santé. S'agit-il d'un chevauchement ou sont-ce vraiment des responsabilités distinctes?
M. Robertson : Les deux systèmes existent en parallèle. Nous sommes responsables de près de 8 p. 100 de la population dans le domaine des communications, des télécommunications, des transports, et cetera. Donc, nous sommes responsables d'un certain nombre de secteurs, et les provinces s'occupent d'autres secteurs, comme la construction, entre autres.
Le sénateur Boisvenu : Cela signifie qu'il y a un régime de santé et de sécurité au travail pour les entreprises qui relèvent du code canadien et un autre régime de santé et de sécurité au travail dans les mêmes provinces pour les entreprises qui relèvent du code du travail provincial.
M. Robertson : Oui. En fait, chaque province a son propre système pour les secteurs qui relèvent de son champ de compétence. Nous avons la même chose pour les secteurs qui relèvent de la compétence fédérale. Comme les commissions des accidents du travail provinciales, nous avons un système pour les employés fédéraux nommé GECA, en vertu de la Loi concernant l'indemnisation des agents de l'État.
[Traduction]
Le sénateur Joyal : Bienvenue, messieurs.
Ma première question est de nature plutôt générale. Ces changements ont-ils été demandés par des représentants syndicaux? L'objectif découle-t-il d'une représentation générale menée par un syndicat, par exemple pour optimiser le système ou pour faciliter la consultation de la décision, et cetera? Ou l'administration est-elle parvenue à la conclusion, à l'interne, qu'il serait préférable d'adopter la proposition que nous étudions aujourd'hui pour répondre à certains objectifs de nature administrative?
M. Robertson : Je dirais qu'il s'agit d'un mélange des deux. Le régime de travail offre un processus de consultation tripartite unique qui nous permet de continuer d'entretenir des relations permanentes avec les représentants des employés et les représentants des employeurs. Nous menons continuellement des discussions, et nous le faisons depuis des années.
Toutefois, je ferais valoir que les détails de cette proposition découlent surtout d'une analyse que nous avons menée, à l'interne, sur la mesure dans laquelle les employeurs respectaient le code. Encore une fois, en ce qui concerne les pourcentages dont j'ai parlé plus tôt, un grand nombre d'employeurs du pays sous réglementation fédérale sont des récidivistes. Cela signifie qu'il y a des gens qui travaillent dans des conditions non sécuritaires ou qui n'ont pas été rémunérés pour le travail qu'ils ont effectué.
Nous étions d'avis qu'il n'était pas approprié de permettre à cette situation de durer, et nous avons donc lancé certaines consultations ciblées en 2016. Donc, en 2016, dans le cadre de nos consultations en matière d'horaires de travail flexibles, nous avons rencontré les groupes d'intervenants auxquels vous avez parlé et quelques autres. Nous avons eu l'occasion de parler à environ 1 000 Canadiens dans le cadre de ce processus, et nous avons constaté que le système jouissait d'un vaste soutien, tant et aussi longtemps qu'il était bien structuré et bien établi.
Encore une fois, c'est la raison pour laquelle nous voulons prendre de deux à trois ans pour examiner le processus de réglementation, afin de veiller à ce que le système mis en œuvre soit bien équilibré et qu'il réponde aux besoins.
Le sénateur Joyal : Il ne serait donc pas exagéré d'affirmer que vous avez l'appui général des représentants syndicaux dans la présentation de ces changements au Parlement.
M. Robertson : Pendant les consultations, nous n'avons cerné aucune préoccupation au sein des groupes d'intervenants. Je laisserai aux représentants syndicaux qui comparaîtront après moi le soin de parler pour eux-mêmes. Je ne connais pas personnellement les préoccupations des représentants syndicaux à l'égard de la proposition. D'après ce que je comprends, les préoccupations des employeurs visent plutôt à veiller à ce que ces mesures soient mises en œuvre, qu'elles soient équilibrées et qu'elles ne fonctionnent pas indépendamment de tous les autres outils existants. Notre approche traditionnelle consiste à veiller à ce que les gens connaissent leurs responsabilités, et si ce n'est pas le cas, nous intervenons de façon informelle avant d'avoir recours à des moyens plus formels.
Le sénateur Joyal : Mon autre question concerne un appel interjeté devant la Cour fédérale. J'ai entendu M. Rochon en parler, mais il pourra peut-être nous donner d'autres explications. En ce qui concerne un appel interjeté devant la Cour fédérale ou, d'après ce que je comprends, même devant une certaine Cour supérieure, le projet de loi maintient-il le statu quo relativement aux motifs des appels interjetés, ou cet aspect est-il rendu plus restrictif ou — j'hésite à utiliser ce mot — plus libéral?
Le sénateur Baker : C'est dispendieux.
Le sénateur Joyal : C'est plus dispendieux. Ce sont des mesures correctives. Ou cela ouvre-t-il davantage la porte à d'autres points ou à d'autres raisonnements qui se trouvaient dans la loi actuelle? Et vous pourriez peut-être nous indiquer quels articles du projet de loi C-44 seront visés dans votre réponse.
M. Rochon : D'accord. Il me faudra quelques secondes pour vous indiquer tous les articles concernés. Je répondrai ensuite.
Toutefois, je tiens à préciser qu'on ne modifiera pas la façon d'aborder les examens judiciaires que contient la loi actuelle. Le Code canadien du travail, dans sa forme actuelle et sans les modifications, contient des dispositions privatives qui visent essentiellement à assurer le caractère définitif des décisions rendues par le Tribunal de santé et sécurité au travail, des décisions relatives à la partie II rendues par les agents d'appel ou des décisions rendues par les arbitres en matière de congédiement injuste et de recouvrement du salaire. Ces dispositions privatives seront maintenues lors du transfert de toutes les responsabilités des agents d'appel et des arbitres au Conseil canadien des relations industrielles. Nous n'apportons donc aucune modification aux dispositions privatives ou au caractère définitif des décisions prises.
Manifestement, en raison de ce transfert au Conseil canadien des relations industrielles, nous avons dû veiller, dans le cadre de la rédaction, à ce que les dispositions existantes demeurent valides et continuent de s'appliquer. Aux fins d'éclaircissements, nous ne changeons rien au rôle des tribunaux et nous ne changeons rien à l'approche de longue date utilisée à l'égard des décisions prises en vertu du Code canadien du travail. L'objectif stratégique a toujours été de tenter d'obtenir une décision rapide et finale en se fondant sur le principe selon lequel justice différée est déni de justice. Nous tenons à le préciser.
Nous reconnaissons que nous ne pouvons pas empêcher les tribunaux d'entreprendre un examen judiciaire. Cela fait partie de leurs compétences, et cela a été reconnu par la Cour suprême. Toutefois, les dispositions privatives servent à signaler fermement aux tribunaux que s'ils entreprennent un examen, ils doivent le faire en fonction de la norme de la décision raisonnable plutôt qu'en fonction de la norme de la décision correcte. Cette disposition n'a pas changé et nous n'avons pas l'intention de la modifier.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Merci à nos invités. Évidemment, ces changements n'ont pas été écrits sur un coin de table, mais pourriez-vous nous dire quels sont les principaux intervenants qui ont été consultés avant la rédaction de ce projet? Aussi, quelle a été leur réaction et quelles ont été leurs préoccupations?
M. Robertson : Comme je l'ai dit, nous avons tenu une longue consultation en 2016 avec nombre d'intervenants, tels que l'Association des banquiers canadiens, l'ETCOF, le CTC et nombre d'organisations comme celles-là, mais également avec les citoyens canadiens. Comme je l'ai dit plus tôt, pour la plupart, les représentants des employés étaient à l'aise avec les propositions.
Les représentants des employeurs étaient relativement à l'aise aussi, mais ils avaient deux ou trois préoccupations. Celles-ci étaient, notamment, de s'assurer que la réglementation serait développée en consultation, et de s'assurer que tous les autres outils des programmes seraient utilisés également par le programme à l'avenir, comme l'éducation, la coordination informelle au début d'une plainte, et cetera. Ils voulaient s'assurer aussi que les employeurs qui ont de bonnes intentions, mais qui manquent d'information auront l'occasion de régler la situation avant le lancement d'un processus formel.
Le sénateur Dagenais : Par contre, dans votre intervention, j'ai cru comprendre que, si les parties ne s'entendent pas, elles auront toujours recours au processus d'arbitrage entre employés et employeurs.
M. Robertson : Oui. Ils auront toujours l'occasion de faire appel. Nous avons maintenant un processus de discussion informelle entre les parties et, souvent, nous pouvons obtenir le résultat désiré et négocier avec les deux parties. Si la situation devient plus formelle, oui, bien sûr, le processus se poursuit et devient plus difficile pour tous les intervenants.
Le sénateur Dagenais : Je comprends que le fait d'éviter un processus d'arbitrage évite des coûts additionnels. J'imagine que c'est un peu le but visé, n'est-ce pas?
M. Rochon : Pour clarifier, en fin de compte, il y aura quand même un certain nombre de fonctions décisionnelles de type arbitrage. Ce qui va se passer, en revanche, c'est que, au lieu de laisser la responsabilité à des arbitres désignés au cas par cas, ou de laisser la responsabilité aux agents d'appel que nous avons actuellement et qui sont responsables de l'application de la partie II du code, ces responsabilités seront transférées au Conseil canadien des relations industrielles.
Il y aura donc encore un rôle, une fonction décisionnelle. L'objectif n'est pas d'économiser de l'argent en tant que tel. Évidemment, s'il y avait des économies, tout le monde serait heureux, mais, en fin de compte, l'objectif est plutôt d'améliorer l'efficacité et le fonctionnement des processus, et de faire en sorte que les parties puissent rendre des décisions justes et plus rapidement.
Le sénateur Dagenais : Ce sera une sorte de rôle de médiation, en somme.
M. Rochon : Ce qu'il faut comprendre, c'est que, dans certains cas, il y a un rôle de médiation pour les inspecteurs, dans certains types de plaintes. Le conseil peut également tenter de régler certains litiges, certaines disputes, mais dans quelques cas, si les parties ne peuvent s'entendre, il faut parfois trancher, et c'est dans ces cas que le rôle de décision est transféré au Conseil canadien des relations industrielles.
La sénatrice Dupuis : Ma question concerne votre explication de l'article 333 du projet de loi qui traite de l'impossibilité d'obtenir une révision par un tribunal. Dans le cas où la décision est définitive, si je comprends bien, cet article existe déjà, et vous le maintenez tel quel, mais en ajoutant ce qui est souligné dans le projet de loi, pour le rendre conforme à ce qu'on ajoute ici?
M. Rochon : C'est bien cela.
La sénatrice Dupuis : Puisqu'on garde les alinéas a), b) et e) des motifs de recours en contrôle judiciaire, vous excluez donc les alinéas c), d) et f). Est-ce qu'à l'heure actuelle, la demande de contrôle judiciaire peut être faite en vertu de tous les paragraphes de l'article 18 ou cela figure-t-il déjà dans la version existante?
M. Rochon : En fait, cette disposition existe actuellement dans cette forme. La seule chose qui change, essentiellement, c'est une légère modification qu'on apporte ici. Il y a plusieurs éléments dans la partie I du code qui traitent des relations industrielles, et c'est la partie qui traite réellement du Conseil canadien des relations industrielles, de son mandat, de ses pouvoirs et de ses fonctions.
Or, comme plusieurs de ces fonctions vont s'étendre au-delà de la partie I, pour couvrir les parties II, III et la nouvelle partie IV du code, il a fallu apporter des modifications pour indiquer, dans certains cas, que certaines dispositions ne s'appliquent qu'à la partie I. Dans certains cas, des dispositions vont s'appliquer à l'ensemble du code actuel et, dans d'autres, cela ne s'appliquera qu'à la partie actuelle. Pour cette disposition-ci, on parle ici uniquement des décisions rendues sous le régime de la partie I du code. C'est pour cela qu'on a ajouté les mots « rendues en vertu de la présente partie ».
La sénatrice Dupuis : D'accord, merci.
M. Rochon : On ajoute des mots pour faire en sorte que la disposition ne change pas.
Le sénateur Joyal : Et sous la partie II?
M. Rochon : Les parties II, III et la nouvelle partie IV auront leurs propres dispositions similaires. C'est pour cette raison qu'on veut s'assurer qu'il n'y a pas de confusion de part et d'autre.
La sénatrice Dupuis : J'ai une question complémentaire. Si je comprends bien, vous avez consulté ce que vous avez appelé le « triangle actuel » en matière de relations de travail. Ce qui m'intéresse, c'est le passage au Conseil canadien des relations industrielles. Vous dites que cela va accroître l'uniformité des décisions et la résolution rapide des cas.
Dans votre échéancier de trois ans, pouvez-vous nous dire où s'insère le transfert au conseil? Je n'irai pas jusqu'à vous demander si ces gens sont heureux d'avoir un nouveau mandat et s'ils ont à accepter ou non le transfert, mais je me demandais où cela s'insérait dans votre échéancier de transfert, parce qu'on sait que ce n'est pas quelque chose qui est nécessairement évident dans une machine qui existe depuis longtemps.
M. Robertson : Le projet de loi prévoit plusieurs périodes de transition, mais cet élément est presque en fin de processus. Nous devons nous assurer d'avoir toutes les informations nécessaires pour prendre une bonne décision et être en mesure d'effectuer un transfert fluide vers l'organisation.
La sénatrice Dupuis : Merci.
M. Rochon : Je peux ajouter qu'il y a aussi un certain nombre de dispositions dans le projet de loi qui prévoient des mesures de transition. Évidemment, certains dossiers seront entamés avant même le transfert. Nous veillons à ce que les dossiers puissent être clos par l'arbitre ou les personnes responsables afin qu'il n'y ait pas de dossiers qui nous échappent.
[Traduction]
Le président : Mesdames et messieurs, nous vous remercions d'avoir comparu et d'avoir aidé les membres du comité dans leurs délibérations.
Nous accueillons maintenant les témoins de notre deuxième groupe. Nous entendrons Ginette Brazeau, présidente du Conseil canadien des relations industrielles. Nous vous remercions d'être ici aujourd'hui. Vous pouvez livrer votre exposé.
[Français]
Ginette Brazeau, présidente, Conseil canadien des relations industrielles : Merci, monsieur le président, honorables sénateurs, de m'avoir invitée à partager avec vous quelques réflexions dans le cadre de votre étude du projet de loi C- 44.
Le Conseil canadien des relations industrielles est le tribunal responsable d'interpréter et d'appliquer la partie I du Code canadien du travail et traite des demandes et des plaintes en relations du travail touchant le secteur privé fédéral. Nous avons également une compétence très circonscrite en vertu de la partie II du code en ce qui concerne les plaintes alléguant des représailles pour avoir exercé un droit en vertu du régime de santé et de sécurité.
[Traduction]
Le Conseil canadien des relations industrielles est un conseil de représentation. Il est actuellement composé de 11 personnes. Je suis la présidente, il y a quatre vice-présidents neutres et six membres qui représentent les employeurs, les syndicats et les employés, et qui sont nommés après consultation des parties intéressées par le ministre. Habituellement, nous entendons des affaires et nous rendons des décisions sous la forme d'un groupe de trois membres composé de la présidente ou d'un vice-président et de deux membres représentatifs.
Nous avons également des agents des relations industrielles désignés dans les bureaux régionaux; ils mènent des enquêtes et assurent la médiation dans le cas des plaintes et des demandes. Ils aident aussi les membres du conseil à régler les affaires dont ils sont saisis ou ils précisent et établissent un cadre pour les cas qui doivent être traités par un groupe formé de membres du conseil.
Le projet de loi C-44 transfère des responsabilités supplémentaires aux membres du conseil. Plus précisément, on envisage les mesures suivantes dans le projet de loi — je ne les énumérerai pas toutes, car des témoins précédents vous ont décrit en détail les différents éléments qui sont transférés au conseil. Il suffit de préciser que nous serons responsables de trancher les appels relatifs à la partie II du code, c'est-à-dire ceux liés à la santé et à la sécurité, d'arbitrer les cas de congédiement injuste, de recouvrement de salaire et de représailles en vertu de la partie III du code, qui concerne les normes du travail, et nous aurons également de nouvelles responsabilités relatives à l'examen des sanctions administratives pécuniaires, ainsi qu'à l'examen des décisions rendues en vertu de la Loi sur le Programme de protection des salariés.
Ces modifications confient essentiellement la plupart des mécanismes — ou tous les mécanismes — de recours relatifs aux différends en milieu de travail à un seul organisme, à savoir notre conseil. Je suis d'avis que cette approche correspond à ce qui se fait dans différentes provinces canadiennes, ainsi qu'à l'échelle mondiale — notamment en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Irlande et au Royaume-Uni. Elle crée un guichet unique pour obtenir l'aide d'un organisme qui possède une expertise dans le domaine des relations de travail et des droits en milieu de travail dans les cas de règlement de plaintes ou de différends. Cela pourrait contribuer à éviter le chevauchement des processus dans certains cas et à offrir une approche cohérente en matière d'arbitrage et de règlement des différends en milieu de travail.
À titre de présidente du conseil, je me sens très heureuse et honorée de recevoir ce nouveau mandat et d'avoir l'occasion de travailler avec nos intervenants en vue de déterminer la façon dont ces nouveaux services seront fournis par le conseil. À cet égard, j'ai l'intention de consulter nos intervenants pour obtenir l'avis des personnes qui participent à ces processus, afin de concevoir et de mettre en œuvre des structures qui tiennent compte de leurs points de vue et de leurs besoins et qui correspondent à leur réalité.
Il est toutefois important de souligner que ces nouvelles responsabilités doubleront probablement notre charge de travail. Je dois donc m'assurer, à l'avenir, que le conseil dispose de ressources suffisantes pour exécuter son mandat de façon appropriée. D'après ce que je comprends, le gouvernement a l'intention de transférer au conseil des ressources actuellement affectées à ces diverses fonctions. Cela comprend les ressources existantes et les employés affectés au Tribunal de santé et sécurité au travail Canada. Cela comprend également les ressources qui sont actuellement utilisées par le ministère pour l'arbitrage de plaintes relatives au congédiement injuste et au recouvrement de salaire.
Comme les sénateurs le savent peut-être, depuis 2014, le conseil n'a pas de personnel et de budget attitrés. Un organisme distinct appelé le Service canadien d'appui aux tribunaux administratifs a été créé en vertu d'une loi et a entraîné le regroupement de tout le personnel et des ressources financières de 11 tribunaux, y compris notre conseil. Cet organisme, le SCATA, a maintenant autorité sur les budgets et sur l'ensemble du personnel de nos tribunaux.
En ma qualité de présidente du conseil, je n'ai aucune autorité sur le personnel, y compris nos agents des relations industrielles qui fournissent directement nos services à nos parties intéressées par l'entremise de la médiation ou d'autres processus au nom du conseil. Pourtant, je suis ultimement responsable du mandat confié au conseil en vertu du code.
Même si le regroupement des ressources, surtout en ce qui concerne les services administratifs, peut contribuer à améliorer l'efficacité, je crois que la structure législative qu'on a créée va beaucoup plus loin. À mon avis, elle remet grandement en question la durabilité de notre expertise institutionnelle et compromet la capacité du conseil de définir les priorités de façon indépendante et de fixer l'orientation future de l'organisme dans le cadre de ce nouveau mandat élargi.
Le SCDATA est l'organisme qui recevra les ressources supplémentaires destinées au nouveau mandat, et je travaillerai en étroite collaboration avec cet organisme pour faire en sorte qu'un niveau de financement adéquat, y compris pour ce qui est des fonds transférés, est affecté au travail du conseil pour lui permettre de remplir ce mandat. Je m'engage à ce que la transition se fasse sans heurt et à ce que les services d'arbitrage et de médiation des conflits en milieu de travail soient offerts de façon aussi efficiente et efficace que possible.
[Français]
Je serai heureuse de répondre à vos questions maintenant. Merci.
[Traduction]
Le sénateur Baker : Je remercie la témoin de comparaître encore une fois devant notre comité. Elle a beaucoup aidé le comité à prendre des décisions.
J'ai remarqué dernièrement, en regardant la jurisprudence, que les décisions de votre conseil font très souvent l'objet d'un appel devant la Cour fédérale et ensuite devant la Cour d'appel fédérale. Il est du ressort du tribunal de soumettre les décisions à un nouvel arbitrage.
Cette nouvelle responsabilité que vous allez maintenant assumer comprend l'imposition d'amendes pouvant atteindre un quart de million de dollars, comme l'ont dit d'autres témoins, et on pourrait s'attendre à ce que cette nouvelle responsabilité et ces nouvelles sanctions se traduisent en fait par un plus grand nombre d'appels de décision de votre conseil.
Je vais poser deux questions d'un seul coup. Comment pourrez-vous gérer toutes ces réévaluations si les tribunaux vous ordonnent dans certains cas de vous prononcer de nouveau, et que dites-vous du fait ou comment voulez-vous que nous tenions compte du fait qu'il pourrait y avoir un conflit en ce qui concerne votre indépendance, d'après ce que j'ai compris de votre déclaration? Qu'espérez-vous que notre comité soit peut-être en mesure de faire pour recommander les modifications nécessaires?
Mme Brazeau : Tout d'abord, les décisions du conseil font directement l'objet d'un contrôle judiciaire par la Cour d'appel fédérale. Elles ne passent pas par la Cour fédérale. C'est la Cour d'appel fédérale qui en est saisie.
D'après ce que j'ai compris en examinant la loi proposée, de façon similaire, le nouveau mandat, c'est-à-dire les décisions que nous prendrons conformément aux nouvelles dispositions, fera également l'objet d'une révision judiciaire de la Cour d'appel fédérale.
Comme vous l'avez mentionné, la Cour d'appel fédérale reçoit plusieurs demandes de révision judiciaire. Cependant, très peu de décisions sont annulées.
Le sénateur Baker : C'est bon pour vous.
Mme Brazeau : Je crois que cela témoigne de l'expertise du conseil et de l'attention que nous accordons à nos décisions.
Pour cette raison, je ne pense pas que les demandes de révision judiciaire auront une incidence négative sur le conseil au point où nous ne serons plus en mesure de gérer les dossiers qui nous sont renvoyés. Il est possible qu'il soit d'abord plus fréquent qu'on demande une révision judiciaire parce que c'est un nouveau domaine et un nouveau mandat pour le conseil. Il pourrait effectivement y avoir une période pendant laquelle les partis mettront à l'épreuve ce nouveau mandat. C'est normal lorsque de nouvelles dispositions sont adoptées.
Pour répondre à la question, je pense que nous allons traiter les demandes de révision judiciaire comme nous le faisons maintenant. Si la cour nous indique que nous avons pris une mauvaise décision, nous allons alors rajuster le tir et examiner la question.
À propos du deuxième volet de votre question concernant les préoccupations que j'ai exprimées, à mon avis, il y a des options à considérer pour permettre au conseil d'agir de façon indépendante ou pour éviter que l'expertise du conseil ne soit atténuée d'une certaine façon par la création de ce grand ensemble de tribunaux administratifs. On pourrait soit modifier la Loi sur le SCDATA et retirer toute mention du conseil dans l'annexe, ou encore accorder à la présidence du conseil certains pouvoirs à l'égard d'une partie des décisions rendues par le SCDATA. Je pense qu'il faudrait réfléchir un peu plus à la rédaction d'une modification à la loi. Je ne sais pas si vous voulez que j'en dise davantage à ce sujet, mais c'est une amorce de réflexion.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue, madame Brazeau. J'aurais quelques questions de clarification à vous soumettre. Dans le projet de loi, à l'article 246.1, on fait en sorte que la partie qui nie les représailles doive prouver le contraire; on renverse le fardeau de la preuve. J'aimerais savoir quels types de représailles peuvent être visés par ce projet de loi. Le fait qu'on renverse le fardeau de la preuve vers celui qui dénonce ne risque-t-il pas de provoquer les conséquences que nous connaissons déjà au sein de notre système de justice, soit des délais exagérés ou tout simplement des abus en termes de procédure?
Mme Brazeau : Merci pour votre question. En ce qui concerne la nouvelle disposition qui donne le droit de faire une plainte liée à des représailles pour avoir exercé un droit en vertu de la partie III, c'est-à-dire les normes du travail, je crois que le témoin précédent a donné des exemples de plaintes qui pourraient être présentées. Entre autres, il a donné l'exemple d'une personne qui a participé à un processus d'enquête en fournissant de l'information à un enquêteur et qui, tout à coup, subit une mesure disciplinaire, alors qu'il fait un lien entre les deux; cette personne pourrait faire ce type de plainte auprès du conseil.
Si quelqu'un dépose une plainte liée à un manque à gagner dans ses congés annuels, avec ce genre de plainte, il ou elle peut faire un lien avec une mesure disciplinaire qu'il aurait reçue. À ce moment-là, il peut présenter une plainte au conseil, et l'on devra déterminer si oui ou non il y a un lien et si, en fait, la mesure disciplinaire est liée à la mesure prise par l'employeur.
Le sénateur Boisvenu : Je reviens à ma question de base. Ce sera, dans la majorité des cas, l'employeur qui devra faire la démonstration du fait qu'il n'y a pas eu de représailles.
Mme Brazeau : Lorsqu'il y a un renversement du fardeau de la preuve, cela veut habituellement dire que, lorsqu'on fait la plainte, c'est une plainte prima facie; donc, c'est à l'employeur de démontrer.
Le sénateur Boisvenu : Est-ce que, dans d'autres circonstances, il y a ce type de renversement, ou est-ce un cas unique?
Mme Brazeau : Présentement, nous avons un mécanisme de traitement des plaintes semblable à celui qui est prévu dans la partie II du code pour un employé qui exerce ses droits en vertu du régime de santé et de sécurité. Il y a un fardeau de la preuve, mais seulement pour un certain type de plainte. S'il exerce un droit de refus de travail, parce qu'il pense qu'il y a un danger, s'il dépose une plainte pour des mesures de représailles parce qu'il aurait exercé ce droit de refus, il y a un renversement du fardeau de la preuve dans ces cas.
Le sénateur Boisvenu : Vous ne craignez pas qu'il y ait des abus ou des procédures.
Mme Brazeau : Nous devrons évaluer ces cas au fur et à mesure qu'ils se présentent, mais je pense que c'est le genre de dossier que nous sommes capables de gérer en fonction de nos procédures habituelles.
Le sénateur Boisvenu : J'ai une dernière question. Vous avez fixé la pénalité à 250 000 $ dans les cas de violation. Est- ce que ce montant a été tiré de nulle part ou vous êtes-vous inspirés d'autres lois pour le fixer?
Mme Brazeau : Je n'ai pas été impliquée dans ces décisions de politique, qui relèvent davantage du ministère. On m'a demandé, quant à ces mandats de révision de ces décisions, si nous étions prêts, habiles et capables de le faire, ce que j'ai accepté.
Le sénateur Boisvenu : Et cela vous paraît raisonnable?
Mme Brazeau : Ce sera au ministère de répondre à ces questions. Nous allons appliquer la loi qui sera adoptée.
Le sénateur McIntyre : Merci, madame Brazeau, pour votre présentation. Chose certaine, le projet de loi C-44 apporterait plusieurs modifications au Code canadien du travail en transférant au Conseil canadien des relations industrielles l'attribution des agents d'appel et des arbitres. Cela étant dit, et en gardant tout cela à l'esprit, pourquoi a- t-on proposé de nouvelles dispositions relativement à la nomination des arbitres externes? D'un côté, on se débarrasse des arbitres et, de l'autre, on nomme des arbitres externes. Alors, qui peut bénéficier des nouveaux pouvoirs de décision accordés à ces personnes?
Mme Brazeau : Ce que je peux en dire, c'est que, à l'heure actuelle, il existe, pour les demandes en vertu de la partie II et de la partie III, des listes d'arbitres utilisés pour traiter ces demandes. Maintenant, comme je l'ai indiqué dans mes remarques, on juge que le travail qui nous sera transféré va doubler le nombre de dossiers d'affaires que nous aurons à traiter. Je pense que c'est une mesure qui est raisonnable pour permettre au conseil d'aller chercher de l'aide, au besoin, et d'aller chercher une expertise particulière également. Par exemple, pour les appels du domaine de la santé et de la sécurité, il y a parfois des dossiers assez techniques qui exigent des personnes qui ont une connaissance et une expertise très pointues, très particulières. Ces mesures vont nous permettre d'aller chercher cette expertise pour juger et trancher ces dossiers.
Le sénateur McIntyre : Je comprends qu'en ce moment le président ou le vice-président du conseil peut trancher à lui seul des questions. La modification proposée dans le projet de loi autoriserait un membre nommé du conseil, qui n'est ni président ni vice-président, à trancher seul une question. Ma question est la suivante : quels avantages les parties ou le conseil pourraient-ils en tirer?
Mme Brazeau : Je vais répondre à cette question dans le même sens que la question précédente. Je pense que cette disposition figurait déjà au code pour permettre de nommer des membres autres que les vice-présidents et des membres représentatifs, justement pour aller chercher une expertise particulière ou aller chercher des membres additionnels qui pourraient traiter un type de plainte précis qui relèverait logiquement du conseil. Cette disposition n'a pas changé. Je crois donc que le conseil aura cette possibilité. Le ministre aura la possibilité de nommer des membres particuliers pour traiter des questions en vertu des parties II et III et de la nouvelle partie IV du code, ou bien la présidente du conseil aura la possibilité d'aller chercher une expertise particulière à l'aide d'un arbitre externe au besoin. Je pense que le conseil aura les outils nécessaires pour faire le travail.
Le sénateur Dagenais : Je m'interroge, parce qu'on parle du Conseil canadien des relations industrielles et, plus tôt, il y avait aussi d'autres présentations où l'on parlait de procédure extrême pouvant aller à l'arbitrage. J'imagine que les employés qui font une dénonciation et qui ont des mesures de représailles sont représentés par des syndicats. Il y a des procédures de grief, s'ils ne sont pas satisfaits. Si le grief ne se règle pas, il y a une procédure d'arbitrage. Corrigez-moi si je me trompe, mais j'ai l'impression que vous vous substituez aux procédures d'arbitrage ou de grief, en tentant de régler ces dossiers au sein du Conseil canadien des relations industrielles. De cette façon, on éviterait des procédures de grief et d'arbitrage, et les coûts diminueraient, évidemment, parce que les procédures d'arbitrage coûtent très cher. C'est peut-être mon ancien côté syndical qui ressort. J'aimerais que vous m'expliquiez cela comme il faut.
Mme Brazeau : Merci de la question. La partie III du code et cette nouvelle responsabilité qui sera transférée au conseil traitent des normes de travail pour les gens non représentés et non syndiqués. Il s'agirait d'un employé non représenté qui ferait une plainte contre son employeur, essentiellement. À l'heure actuelle, ces plaintes sont traitées dans un premier temps par les inspecteurs du ministère, et si ce n'est pas résolu à cette étape, le dossier est transmis à un arbitre externe. Ce qui est proposé ici, c'est qu'au lieu de renvoyer le dossier à un arbitre externe, il sera confié au conseil pour que ce dernier puisse trancher la question. Ainsi, comme je l'ai indiqué précédemment, nous aurons a possibilité de nommer un arbitre externe ou d'utiliser nos propres ressources internes pour trancher la question. C'est différent de la procédure de grief, qui est une procédure prévue aux conventions collectives lorsque les employés sont syndiqués et représentés par un syndicat. C'est là où est la distinction.
Le sénateur Dagenais : Si j'ai bien compris, cela s'adresse aux secteurs, aux industries où les employés ne sont pas syndiqués.
Mme Brazeau : Pour ce qui est des mesures en vertu de la partie III du code, effectivement. Pour ce qui est du régime de santé et de sécurité, certains employés sont syndiqués, certains ne le sont pas. Dans ces cas, lorsqu'un employé est syndiqué, souvent, le syndicat va comparaître comme une partie au dossier.
[Traduction]
Le sénateur Joyal : Je vais vous poser la même question que j'ai posée aux témoins qui vous ont précédée aujourd'hui. Avez-vous consulté les représentants syndicaux pendant les discussions que vous avez eues avec le ministère au sujet de ces modifications?
Mme Brazeau : Le conseil a un comité de consultation des clients, et je rencontre les membres de ce comité trois fois par année. J'ai demandé si les modifications proposées étaient les bienvenues pour les gens de la communauté. La réponse a été très positive, car ils les voient comme une façon de regrouper les fonctions dans un guichet unique, de stabiliser et d'uniformiser le processus, ainsi que d'assurer une cohésion dans la prise de décisions. Je pense que la communauté voit d'un bon œil le regroupement des fonctions dans un seul organisme.
Le sénateur Joyal : Ce regroupement s'appuie-t-il sur une liste d'anciens dossiers qui vous a permis de voir des divergences en matière d'approches et d'interprétation qui devaient être rationalisées afin que ce soit plus équitable pour les employés, ou s'agit-il d'une initiative prise à des fins administratives, après avoir jugé que ce sera plus efficace et plus facile ainsi? Autrement dit, qui profitera de cette approche?
Mme Brazeau : Je ne peux pas parler au nom du ministère des décisions ministérielles qui ont mené à ces modifications. En tant que présidente du tribunal qui assumera ces nouvelles responsabilités, je pense que c'est un bon changement pour les utilisateurs du système étant donné que les plaignants n'auront essentiellement affaire qu'à une seule entité lorsqu'ils soumettront leurs dossiers à l'arbitrage. À mon avis, ils en profiteront parce que le processus sera similaire. Le processus se déroulera plus rapidement. Je pense que les témoins précédents ont mentionné que lorsqu'il y a des arbitres spéciaux, il est difficile d'assurer la cohésion du processus et de l'approche. C'est avantageux pour tout le monde.
Le président : Y a-t-il d'autres questions pour Mme Brazeau? Comme il n'y en a pas, je vous remercie beaucoup de votre comparution. Nous vous sommes reconnaissants de votre témoignage.
Dans notre troisième groupe de témoins, nous avons Hassan Yussuff et Mike Luff, qui sont respectivement président et chercheur principal au Congrès du travail du Canada, ainsi que Derrick Hynes, directeur général d'Employeurs des transports et communications de régie fédérale. Messieurs, je vous souhaite la bienvenue.
Derrick Hynes, directeur général, ETCOF : Merci, monsieur le président. Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole au sujet du projet de loi C-44.
Je représente ETCOF, un front commun d'employeurs regroupant des sociétés fédérales du secteur du transport et des communications. Notre association existe depuis plus de 30 ans. Nos membres emploient plus de la moitié des travailleurs du secteur fédéral privé. ETCOF compte parmi ses membres des entreprises bien connues. Vous trouverez une liste de nos membres en annexe du document que je vous ai remis aujourd'hui.
ETCOF jouit d'une excellente réputation en tant que participant efficace dans le cadre du modèle tripartite en matière de relations de travail fédérales sous le régime du Code canadien du travail. Ce modèle tripartite fait intervenir Emploi et Développement social Canada, ou EDSC, en tant que porte-parole du gouvernement; le Congrès du travail du Canada, en qualité de porte-parole des travailleurs; et ETCOF, à titre de porte-parole des employeurs.
Les modifications proposées à cette partie du projet de loi renvoient surtout à la volonté du gouvernement, en tant que responsable de la réglementation, de mieux faire appliquer certaines dispositions du Code canadien du travail. Ces modifications visent plus précisément les employeurs que l'on estime être des récidivistes en matière de non-respect du code. J'estime que les membres d'ETCOF ne constituent pas le groupe que les modifications proposées devraient cibler. Ces modifications sont toutefois susceptibles de nous toucher, et je suis donc heureux de pouvoir me prononcer à ce sujet.
Le temps qui m'est accordé aujourd'hui ne me permet pas de passer en revue une par une les modifications budgétaires proposées. Comme je vous l'ai indiqué, je vais vous laisser un exemplaire de notre mémoire officiel dans lequel vous trouverez les observations d'ETCOF sur chacune des modifications proposées. Je m'en tiendrai aujourd'hui à des points essentiels.
Tout d'abord, il est important de signaler que les membres d'ETCOF sont inquiets des modifications proposées au Code canadien du travail dans le projet de loi budgétaire. Certaines de ces modifications nous ont pris par surprise. Comme la plupart d'entre elles ne se rapportent pas à des questions d'argent, nous espérons qu'elles feront partie du processus tripartite habituel qui est suivi pour modifier les lois du travail dans le secteur fédéral. Prévoir de telles modifications dans un projet de loi budgétaire ne respecte pas l'esprit de cette approche.
Nous croyons que la consultation donne lieu à de meilleures lois. Nous nous attendons donc — et on l'a mentionné plus tôt — à ce que toute autre modification réglementaire au Code canadien du travail qui découle du projet de loi C- 44 suive cette approche tripartite. C'est ainsi que nous procédons dans le secteur fédéral depuis des dizaines d'années. Les représentants du patronat et des syndicats devraient continuer de contribuer de manière productive à la recherche de solutions dans ce domaine.
Cela dit, le deuxième point essentiel, c'est que nous vous sommes reconnaissants de nous avoir invités à présenter nos observations sur ces modifications. En résumé, ETCOF n'a pas d'objections de principe importantes par rapport aux propositions énoncées dans cette partie du projet de loi budgétaire. Nous appuyons le rôle d'EDSC en ce qui a trait à l'application du Code canadien du travail et de ses règlements connexes. Nous faisons tout en notre pouvoir pour nous y conformer, et nous réagissons en conséquence lorsque des violations involontaires se produisent.
Enfin, il convient d'envisager avec prudence la possibilité d'accorder de nouveaux pouvoirs à EDSC et à ses représentants pour s'assurer que ces nouveaux pouvoirs contribuent à favoriser l'atteinte de l'objectif, en l'occurrence, faire en sorte que les récidivistes respectent davantage le Code canadien du travail. Les modifications ne devraient en aucun cas être interprétées comme un substitut à la conformité volontaire prévue par le code. Nous ne devrions pas tenter de régler un problème qui n'existe pas.
Bien que les modifications proposées à la présente partie soient nombreuses, je souhaite consacrer le temps qu'il me reste à la question des sanctions administratives pécuniaires. Nous croyons que tout nouveau régime portant sur l'inobservation du code devrait viser les personnes qui ont des antécédents en matière de non-conformité. Lors de consultations préalables sur cette question, ETCOF a déjà suggéré un certain nombre de principes directeurs à suivre pour l'élaboration d'un cadre en la matière. Le temps limité dont je dispose ne me permet pas de les exposer en détail. Je vais donc me contenter de présenter brièvement certains points essentiels du mémoire.
Les nouvelles sanctions ne devraient pas devenir un substitut à la conformité volontaire prévue par le code. L'inspecteur ne devrait pas escamoter les premières étapes du processus — le recours à une promesse d'observation volontaire ou à des instructions — pour passer directement à l'imposition de sanctions.
On devrait éviter d'accorder un pouvoir discrétionnaire subjectif aux inspecteurs. Pour ce faire, il convient de définir clairement le processus. Les mêmes règles devraient s'appliquer à toutes les organisations.
Les pénalités devraient avoir pour objectif d'améliorer la conformité par le changement des comportements et non par la répression. Elles devraient viser les récidivistes et n'être appliquées qu'une fois que les mesures de conformité volontaire se sont avérées sans effet.
Tout nouveau processus devrait prévoir un mécanisme d'appel clairement défini, et on devrait tenir compte de la responsabilité collective et individuelle lorsqu'on envisage la possibilité d'infliger des sanctions.
Je vous remercie du temps et du privilège que vous m'avez accordé en me permettant de vous adresser la parole aujourd'hui. Je serai heureux de répondre à vos questions sur les articles du projet de loi. Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous avons commenté chacune des modifications proposées.
Hassan Yussuff, président, Congrès du travail du Canada : Bonjour, monsieur le président. Je vous remercie au nom des 3,3 millions de membres du Congrès du travail du Canada de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue sur la partie 17 du projet de loi C-44.
Le gouvernement actuel a été élu après s'être engagé à moderniser nos normes d'emploi à la lumière de la nature changeante de la main-d'œuvre, du marché du travail et de l'économie. Nous sommes heureux que vous donniez suite à certains aspects de cet engagement.
Le projet de loi C-44 vise à mettre à jour et à renforcer les mécanismes d'application du Code canadien du travail. Cette mesure législative tombe à point compte tenu, bien entendu, de la proposition du gouvernement de prolonger le congé parental et d'accorder aux travailleurs le droit de demander des conditions de travail souples.
J'aimerais faire quatre observations générales sur le projet de loi C-44. Premièrement, le budget devrait prévoir de nouveaux fonds pour l'embauche d'un plus grand nombre d'inspecteurs dans le domaine de la santé et de la sécurité et dans le domaine des normes d'emploi.
Le président : Je vous prie de ralentir un peu pour la traduction.
M. Yussuff : Le projet de loi C-44 rationalise le processus d'appel et de plainte du Conseil canadien des relations industrielles, mais ce système d'application axé sur les plaintes est réactif et, à lui seul, il ne permettra pas d'atteindre les résultats escomptés. Le gouvernement devrait accorder de plus amples ressources pour l'adoption d'une solide approche proactive qui consisterait à augmenter le nombre d'inspecteurs et de violations constatées.
Deuxièmement, le projet de loi C-44 transfère au CCRI les obligations des agents d'appel prévues dans la partie II et les obligations des arbitres prévues à la partie III en ce qui a trait aux congédiements injustifiés. Cette réforme pourrait se traduire par un processus plus efficace, mais seulement si le gouvernement donne au conseil assez de ressources pour gérer ces nouvelles fonctions. Si c'est le cas, bien entendu, cette réforme pourrait alors mener à de meilleurs délais et à un processus plus équitable, mais, si la principale motivation de la réforme est de réduire les coûts, elle créera de plus longs délais et nuira aux droits des travailleurs à une équité procédurale et à la justice.
C'est ce qui s'est produit lorsque le gouvernement précédent a rationalisé les procédures d'appel du Tribunal de la sécurité sociale relativement à l'assurance-emploi et au Régime de pensions du Canada. Le Tribunal de la sécurité sociale était clairement motivé par la réduction des coûts, et les conséquences ont été désastreuses. C'est un système complexe et aliénant. Les délais de traitement des appels ont augmenté en flèche. Les audiences en personne ont presque été éliminées, et on a abusé du rejet sommaire.
Il est également important de signaler que les membres du CCRI ont l'expertise nécessaire pour régler les questions de relations de travail. Le projet de loi C-44 prévoit que le conseil embauche des spécialistes qui peuvent composer avec la complexité des questions liées aux normes de santé et de sécurité et aux normes d'emploi. Il y a également la question cruciale de l'impartialité pour ce qui est de ces nouvelles modalités d'appel. Si un travailleur fait une demande d'appel en vertu de la partie II ou de la partie III du code, cette demande sera-t-elle examinée par un employeur ou par un membre non désigné du conseil? Tout cela pour dire que le gouvernement doit fournir au conseil assez de ressources pour qu'il possède les niveaux de dotation et d'expertise nécessaires à la gestion de ces nouvelles fonctions et pour faire en sorte que le processus est juste, souple et rapide pour les travailleurs.
Troisièmement, le projet de loi C-44 prévoit des sanctions administratives pécuniaires et le pouvoir de publier le nom des employeurs qui enfreignent les dispositions du Code canadien du travail. Nous sommes favorables à cela, mais, une fois de plus, ces outils sont réactifs, et ils sont inutiles s'il n'y a pas assez d'inspecteurs. Si un employeur risque peu de se faire prendre, ces sanctions n'auront pas d'effets dissuasifs. Elles ont été ajoutées au Programme des travailleurs étrangers temporaires, mais la liste publique d'employeurs non conformes ne totalise généralement que sept mauvais employeurs. L'amende maximale qui est imposée à l'heure actuelle est de 1 250 $. Malheureusement, le mauvais traitement réservé à des travailleurs migrants se poursuit.
Quatrièmement, le projet de loi C-4 transfère au CCRI les obligations des arbitres aux termes du Programme de protection des salariés. Le programme nous préoccupe depuis longtemps. Ces préoccupations comprennent le plafond trop bas des paiements, un processus de demande qui enlise les travailleurs dans la paperasse, et la difficulté pour les travailleurs de trouver leur chemin tant dans le système d'assurance-emploi que dans le processus du PPS alors qu'ils ont très peu de soutien et peu d'options réalistes s'ils s'opposent au montant des salaires impayés établi par un fiduciaire ou un receveur. Un petit remaniement du projet de loi C-44 réglerait l'éventail de problèmes auxquels les travailleurs font face dans le PPS pour recouvrer le salaire que leur doit une entreprise qui fait faillite. J'ai apporté des exemplaires de l'examen quinquennal du programme qui a été déposé, et j'exhorte le gouvernement à donner suite à ces recommandations.
Une fois de plus, je tiens à remercier votre comité de me donner l'occasion de témoigner. Je serai heureux de répondre à vos questions.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à nos invités. Mes questions s'adressent à M. Hynes. La première question concerne l'article 246.1 qui introduit un renversement du fardeau de la preuve dans les cas de représailles. Selon vous, cette nouvelle procédure va-t-elle occasionner des délais ou des abus? Y a-t-il d'autres procédures qui auraient dû être employées, par exemple un arbitrage obligatoire, plutôt que cette approche qui fait retomber le fardeau sur l'employeur?
[Traduction]
M. Hynes : Je vous remercie de votre question. Je dois sincèrement vous dire que je n'ai pas vraiment de réponse à vous donner. Nous n'avons pas vraiment pu approfondir suffisamment notre étude de cet article dans le temps alloué depuis que nous avons eu vent de ces changements, de sorte que je n'ai pas vraiment de réponse à vous donner pour le moment.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Vous avez dit d'entrée de jeu que vous avez été surpris par certaines dispositions du projet de loi. Il y avait une culture au gouvernement fédéral de consultation tripartite. Comment évaluez-vous la qualité de la consultation quant aux modifications qui seront apportées? Vous avez déjà affirmé que vous étiez surpris de certaines recommandations contenues dans le projet de loi.
[Traduction]
M. Hynes : C'est une bonne question. Je peux dire sans risque de me tromper — et je pense que mes collègues à ma droite seront d'accord — que nous avons des relations très productives avec le ministère dans le cadre de cette consultation tripartite. Au cours des dernières décennies, nous avons participé activement à un certain nombre d'enjeux dans l'administration fédérale qui relèvent du Code canadien du travail. Au cours de la dernière année seulement, il y a eu un grand nombre de questions sur l'assouplissement des régimes de travail, l'équité salariale, l'accessibilité et le projet de loi C-4, dont nous avons discuté il y a quelques mois.
Certains des changements nous ont pris par surprise. Nous avons eu des discussions axées sur les sanctions administratives pécuniaires. Pour ce qui est des autres changements qui ont été décrits dans le projet de loi budgétaire, je dirais que ces domaines n'avaient pas fait l'objet de consultations, de sorte que nous devons en quelque sorte rattraper notre retard pour essayer d'en comprendre l'incidence. À première vue, elles semblent être plutôt raisonnables, mais nous avons hâte de poursuivre nos consultations au fur et à mesure du processus et de l'élaboration des règlements connexes qui découleront de cette modification législative.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : D'une part, vous dites que la consultation ne semble pas avoir été idéale. D'autre part, vous dites que vous n'avez pas eu suffisamment de temps pour vous imprégner de ce projet de loi. Avez-vous déposé au comité des modifications au projet de loi qui répondraient à vos attentes?
[Traduction]
M. Hynes : Nous n'avons proposé aucun amendement précis. Dans l'annexe de notre mémoire, nous avons toutefois soumis au comité un certain nombre de principes directeurs qui, selon nous, devraient s'appliquer à chaque changement proposé. Ainsi, dans le cadre du processus de réglementation, les préoccupations soulevées par les employeurs recevront l'attention qu'elles méritent, ce qui nous assure que nos inquiétudes soient entendues. Je crois dans une mesure raisonnable que cela se produira. Nous pouvons bien sûr nous inspirer de notre expérience antérieure à cet égard. Notre relation avec le ministère et le Congrès du travail du Canada est très positive, et nous estimons pouvoir résoudre certains de ces enjeux. Je vous ai donc bel et bien soumis des commentaires à cet égard.
La sénatrice Lankin : Ma question s'adresse aux représentants du Congrès du travail du Canada. Monsieur Yussuff, le document qui a été distribué est l'examen de 2014 du Programme de protection des salariés, ou PPS. Je me demande si nous recevrons des copies de votre exposé; je vous en serais reconnaissante. Je souhaite examiner certaines des préoccupations qui ont été soulevées, et des choses que j'ai lues dans les notes du ministère à propos des changements.
Il semble que ces modifications peuvent augmenter certaines choses, comme l'ampleur du remboursement ou le montant. Je n'ai toutefois rien vu à propos de vos préoccupations concernant les sociétés dont le siège social est à l'extérieur du Canada et qui font faillite, et les inquiétudes des travailleurs qui tentent de récupérer les salaires perdus ou impayés dans une telle situation. Pourriez-vous nous expliquer brièvement quels amendements proposés dans le cadre du projet de loi améliorent réellement la situation? Aussi, quelles grandes préoccupations demeurent sans réponse?
M. Yussuff : Je souhaite appuyer ce qui a été dit tout à l'heure. D'abord et avant tout, pour ce qui est du transfert des pouvoirs au Conseil canadien des relations industrielles, ou CCRI, nous faisons tout à fait confiance à cette institution qui assure l'indépendance de l'arbitrage à la fois pour les employeurs et les employés. Nous avons certainement confiance, ce qui se reflète dans les nouvelles fonctions du CCRI. Mais essentiellement, le conseil doit recevoir les ressources dont il a besoin pour mener à bien ses tâches. Ce sera essentiel, bien sûr, à défaut de quoi il ne serait pas juste de donner ces pouvoirs au CCRI sans nouvelles ressources.
Le Programme de protection des salariés, ou PPS, existe depuis un certain temps. Sa création a fait suite à une série de faillites et de travailleurs qui ont dû composer avec ces difficultés dans les années 1980 et à la fin des années 1990. C'est un programme novateur national qui est offert d'un bout à l'autre du pays. Peu importe si vous travaillez pour une instance fédérale ou provinciale, vous pouvez faire une demande. Le dédommagement est toutefois limité. Mais en réalité, nous l'avons longtemps demandé, et une amélioration a fini par être apportée au PPS après sa création. Dans le budget de 2011, le montant pouvant être réclamé dans le cadre du PPS a été légèrement augmenté, mais nous pensons que c'est insuffisant pour les travailleurs.
Ce que nous avons recommandé au ministère dans le cadre de l'examen — et nous attendons de voir ce que le gouvernement va faire —, c'est de prendre les expériences que nous avons exposées dans l'espoir d'améliorer grandement le PPS. La majeure partie de l'argent en jeu dans le PPS peut être récupéré grâce aux actifs de la faillite de l'entreprise, lorsque le gouvernement est en mesure d'en faire la réclamation. Nous croyons qu'une option s'offre au gouvernement, qui peut examiner nos recommandations et propositions. Nous pensons que le moment est opportun et que c'est nécessaire après cinq ans. Je crois que nous avons acquis une expérience suffisante.
Surtout, je pense que nous devons déployer beaucoup plus d'efforts pour faire la promotion du PPS. Le plus souvent, les travailleurs ne connaissent même pas le programme, et savent encore moins qu'ils peuvent faire une réclamation. Le programme est trop complexe à bien des égards lorsque les personnes doivent composer avec des formalités administratives pour soumettre une réclamation. C'est malheureux parce que lorsque vous perdez votre emploi et que la société fait faillite, comme vous le savez, il ne vous reste plus beaucoup de solutions. Votre indemnité de congé et de départ, ainsi que toutes ces sommes sont incluses dans la petite réclamation que vous pouvez soumettre, mais qui ne correspond en rien aux normes minimales du pays, qu'il s'agisse d'une compétence provinciale ou fédérale, bien sûr.
La sénatrice Lankin : Dans ce cas, veuillez m'aider s'il vous plaît. J'ai peut-être mal lu ou mal compris ce que j'ai entendu plus tôt. L'augmentation des montants et des plafonds de remboursement ne concerne pas le PPS. Il s'agit plutôt des dispositions générales relatives aux normes du travail prévues à la partie III. Je comprends cela. Par conséquent, vous estimez que ces problèmes ne sont toujours pas réglés. Vous les portez à notre attention, mais ils ne sont pas vraiment abordés dans le projet de loi budgétaire.
M. Yussuff : Le projet de loi budgétaire ne fait que transférer l'arbitrage d'une réclamation au ministère.
La sénatrice Lankin : Non, d'autres changements mineurs sont apportés.
M. Yussuff : Oui, mais il n'y a rien de majeur à propos du PPS en soi. Le programme fait l'objet d'un examen distinct.
Le montant du plafond n'est même pas dans la partie III du Code canadien du travail. En fait, il a été établi lors de la création du PPS. Nous espérons que l'examen entraînera une certaine amélioration. Nous attendons de connaître la réponse du gouvernement.
La sénatrice Lankin : Merci. Cela m'aide beaucoup.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s'adresse à M. Hynes. Je partage votre opinion quand vous dites que vous êtes un peu surpris de retrouver ces éléments dans le projet de loi C-44, qui est un genre de projet omnibus. Souvent, on dit qu'il peut y avoir anguille sous roche, et je partage un peu votre surprise.
Selon vous, quels seraient les secteurs ou les industries qui pourraient être les plus exposés aux sanctions administratives pécuniaires contenues dans ce projet de loi? Pourquoi ces industries ou ces secteurs pourraient-ils être les plus exposés?
[Traduction]
M. Hynes : Je pense que le ministère serait probablement mieux placé que moi pour répondre à la question. Les représentants du ministère qui étaient ici plus tôt ont parlé d'une analyse qu'ils ont réalisée. Elle portait sur le traitement des récidivistes en vertu du code, et sur la structure de pénalité qui pourrait être imposée pour s'assurer d'un meilleur respect des dispositions du code.
Je peux vous assurer que les employeurs que je représente déploient tous les efforts nécessaires pour être totalement conformes au code et, dans le cas contraire, nous faisons tout en notre pouvoir pour qu'ils s'y conforment pleinement. J'ignore quels secteurs précis seront touchés par le projet de loi. Il y a probablement des récidivistes, aux termes du Code canadien du travail, qui ont besoin d'être incités à se conformer, mais je n'ai pas les données sous la main.
[Français]
Le sénateur Dagenais : J'ai une question aussi pour M. Yussuf. Monsieur Yussuff, vous avez mentionné à plusieurs reprises qu'il serait important d'ajouter des effectifs et des moyens pour accélérer la prise de décision. Quels sont les délais actuels et quels seraient les délais futurs avec l'ajout d'effectifs? Est-ce que les délais seraient modifiés? Vous parlez de délais d'exécution plus courts; êtes-vous en mesure de nous donner un ordre de grandeur?
[Traduction]
M. Yussuff : Je pense que le CCRI doit maintenant gérer les plaintes sans ressources additionnelles pour embaucher du personnel, ce qui lui permettrait d'y répondre plus vite. Le conseil d'administration sait très bien ce qu'est la rapidité lorsqu'une plainte lui est soumise. Nous nous attendons à ce que le plaignant obtienne une réponse dans un délai raisonnable et que son dossier soit réglé, si tout va bien. Il ne devrait pas attendre plus de quelques mois pour obtenir une réponse. Par conséquent, les gens devront faire preuve de diligence raisonnable pour s'assurer que la réponse, quelle qu'elle soit, corresponde bien à la plainte.
De même, nous faisons valoir qu'il est préférable de dissuader les gens et de prévenir les plaintes. Nous soutenons que le ministère devrait avoir plus d'inspecteurs pour examiner les lieux de travail et, bien sûr, aider les employeurs à s'acquitter de leurs responsabilités, s'ils ne le font pas déjà. Trop souvent, les travailleurs qui doivent se plaindre de quelque chose sont trop éloignés, et les inspecteurs devraient en premier lieu essayer de dissuader les employeurs d'agir ainsi.
Le sénateur Joyal : Monsieur Yussuff, je suis heureux de vous voir aujourd'hui, et vous aussi, messieurs Luff et Hynes. Ma première question est plutôt générale.
Comme vous le savez, un des principaux éléments qui permettent de déterminer si un environnement de travail est paisible est l'équilibre entre les droits de l'administration ou de l'employeur et ceux des employés. Voyez-vous quelque chose dans le projet de loi qui, à moyen ou à long terme, modifiera l'équilibre actuel? J'en comprends que vous en êtes satisfait.
M. Yussuff : Non. Je ne vois rien dans les changements proposés qui puisse rompre cet équilibre. Je pense que le projet de loi ne fait que transférer le pouvoir actuel au CCRI. Nous sommes bien sûr persuadés que le CCRI instaurera un régime d'arbitrage juste et équilibré au sein du gouvernement fédéral. Nous sommes très confiants. Nous avons multiplié les efforts pour renforcer le CCRI, de sorte qu'il s'acquitte bien sûr de ses responsabilités, que nous appuyons toujours.
Le sénateur Joyal : Je vois que M. Hynes hoche la tête. Pourriez-vous expliquer la situation à la lumière de votre expérience?
M. Hynes : Je ne suis pas en désaccord avec les propos de Hassan. Même si nous étions surpris du contenu précis de certains changements, ils semblent à première vue être tout à fait raisonnables.
Je ne peux pas vous dire que les employeurs cherchent des façons de se soustraire au code. Nous rencontrons régulièrement des représentants du gouvernement. Nous voulons que nos organisations respectent la loi. Celles que je représente déploient tous les efforts nécessaires pour se conformer au Code canadien du travail. Il existe des milliers de dispositions dans le code et dans ses règlements connexes.
Il semble, à première vue du moins, que nous essayons ici d'améliorer l'efficacité administrative pour nous assurer que les règlements sont appliqués efficacement.
Le sénateur Joyal : Dans le même contexte général, j'aimerais connaître votre interprétation du projet de loi à propos de votre responsabilité à l'égard de vos membres, que vous devez accompagner, soutenir dans le cadre de la procédure, et faire prendre conscience du résultat et de la façon dont la question a été traitée par la suite. Est-ce que cette responsabilité a été changée ou modifiée par le projet de loi d'une façon quelconque?
M. Yussuff : Non, vraiment pas. Tout le soutien que nous fournissons actuellement à nos membres sera encore offert dans la nouvelle structure du CCRI. Nous sommes convaincus que nous ne modifierons pas notre approche à l'égard du CCRI. Le conseil peut engager un processus très officiel, si c'est ce que vous souhaitez, ou informel. Tout dépend de la participation des parties à cet égard. Je suis persuadé qu'il n'y a aucun changement important dans la façon d'obtenir une réparation, que ce soit par le CCRI ou par le programme relatif au travail que nous avons actuellement.
M. Hynes : Je ne suis pas en désaccord. En théorie, le processus pourrait être plus efficace, comme Mme Brazeau l'a indiqué plus tôt. Nous pourrions nous retrouver avec une sorte de guichet unique pour nous y retrouver dans les procédures d'appels et les jugements, ce qui semble à première vue être une bonne idée. Je trouve tout à fait raisonnable aussi de retirer la procédure d'appel du mandat du ministre et d'établir cette distinction. Je ne prévois donc aucune complication attribuable à ces changements.
J'ai fait des remarques tout à l'heure à propos du processus de réglementation, et du fait qu'il faut veiller à ce que les intervenants soient consultés abondamment de façon à trouver une solution qui convient à chacun. C'est assurément une chose dont il faut toujours être conscients.
Lorsque nous abordons des sujets comme les sanctions, nous voulons nous assurer que celles-ci correspondent à la gravité du crime et atteignent vraiment leur objectif. Si l'objectif est réellement de mettre la main au collet d'une poignée d'organisations qui violent le code à répétition, cela semble donc être raisonnable. Or, nous ne voudrions certainement pas nous retrouver dans une situation où les inspecteurs ont nouvellement le pouvoir d'imposer directement des sanctions. Notre objectif consiste donc à trouver un juste équilibre dans le processus de réglementation qui fonctionne pour toutes les parties intéressées.
Le sénateur Joyal : Nous croyons savoir que les règlements qui découlent de ces articles du projet de loi seront élaborés en collaboration avec vous, ainsi que d'autres représentants qui participeront à la formulation des règlements proposés. Est-ce ainsi que les choses se déroulent au quotidien au sein de votre organisation?
M. Hynes : Oui. À la lumière de mes conversations avec le ministère, j'imagine que nous aurons les trois prochaines années pour mener des consultations et élaborer des règlements qui soient logiques pour toutes les parties. Il est vrai que c'est ce que nous faisons pratiquement tous les jours. Nous entretenons un dialogue constant avec le ministère au cours du processus de réglementation.
Certains des documents sont énormes. Le Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail comporte beaucoup de dispositions. Dans une relation tripartite, nous essayons de parcourir les changements apportés à ces règlements selon les besoins. Nous travaillons en consultation avec le Congrès du travail du Canada de même qu'avec les représentants du ministère.
M. Yussuff : C'est pas mal la même chose. Nous essayons toujours de privilégier la collaboration pour nous assurer que nos connaissances actuelles du régime d'application ne sont pas perdues au moment du transfert des pouvoirs au CCRI. Lors de la rédaction d'un règlement, le défi consiste à faire les choses correctement sans rien oublier qui doit être corrigé ultérieurement. Le CCRI se fiera énormément au mandat en matière de réglementation dans l'exercice de ses fonctions. Nous ne voulons pas qu'il y ait d'écart entre ce que nous savons actuellement et le nouveau régime à venir.
Le CCRI a un très bon bilan pour ce qui est des révisions judiciaires. Une faible proportion seulement des nombreuses décisions qu'il doit rendre à l'égard de nos intérêts communs font en effet l'objet de telles révisions. Cela montre bien à quel point le conseil est déterminé à assumer ses responsabilités en veillant à prendre des décisions qui sont conformes au mandat qui lui a été confié en vertu des parties I, II et III ainsi que, dorénavant, des nouvelles dispositions du code.
Le sénateur McIntyre : Messieurs, je vous remercie pour vos exposés. Votre contribution nous est très utile pour l'examen des amendements proposés à ce projet de loi. Il est bon que nous puissions ainsi entendre les points de vue du gouvernement, des travailleurs et, bien évidemment, des employeurs.
Monsieur Hynes, la section 17 du projet de loi propose de nouvelles exigences relatives à la vérification interne et au rapport y afférant. Dans quelle mesure les employeurs vont-ils être affectés par ce changement?
M. Hynes : Comme nous l'avons déjà mentionné, le changement affectera sans doute davantage les employeurs que l'on estime être des récidivistes en matière de non-respect du code. Nous avons un principe directeur à l'égard de modifications semblables. Pour autant que de telles mesures ne soient pas considérées comme un substitut à la conformité volontaire, une formule qui fonctionne bien dans la plupart des cas, il nous apparaît tout à fait raisonnable de procéder à une vérification interne lorsqu'il est impossible d'obtenir une réponse positive d'un employeur à l'égard d'un enjeu particulier.
Le sénateur McIntyre : Quelles seraient les répercussions financières, le cas échéant, de l'imposition de frais administratifs aux employeurs faisant l'objet d'un ordre de paiement et de sanctions administratives pécuniaires pour des infractions à certaines dispositions du Code canadien du travail?
M. Hynes : Eh bien, les répercussions pourraient être énormes. C'est une situation qui nous préoccupe beaucoup. Je ne suis pas ici aujourd'hui pour vous dire que les employeurs trouvent que les sanctions administratives pécuniaires sont une chose formidable. Nous disons simplement que si ces sanctions visent à s'attaquer aux causes profondes du non-respect du code, alors elles nous semblent être une solution raisonnable. Cependant, comme je l'ai indiqué dans le mémoire que je vous ai remis, nous estimons que l'on devrait s'en servir avec prudence. On devrait uniquement cibler ceux qui contreviennent au code à répétition. La peine devrait être proportionnelle au crime commis. Il faut avoir recours à ces sanctions de manière à favoriser une conformité accrue, plutôt que dans le but de punir les employeurs.
Comme je l'indiquais en réponse à une question précédente, nous ne nous opposons pas vraiment en principe à l'utilisation de sanctions administratives pécuniaires. D'autres gouvernements y ont recours; d'autres ministères également. Nous sommes d'avis qu'il faut procéder avec précaution en misant sur une approche de consultation pour l'élaboration des dispositions réglementaires à cet effet.
Le sénateur McIntyre : J'ai une question pour le Congrès du travail du Canada concernant les modifications proposées à la Loi sur le programme de protection des salariés. Pour les appels interjetés à l'égard des décisions de la ministre, quelles raisons motivent la proposition de transférer les attributions des arbitres au Conseil canadien des relations industrielles?
M. Yussuff : De notre point de vue, je peux seulement présumer qu'il s'agit d'une façon d'accélérer les choses. En outre, le regroupement des outils d'application du code permettra aux employeurs de savoir plus facilement où s'adresser, et aux responsables de développer progressivement une plus grande expertise dans la gestion de ces questions. Les choses seront également plus claires pour nous comme pour les travailleurs lorsqu'un recours est nécessaire.
Le conseil a toujours misé sur une démarche cohérente pour exercer la surveillance requise et assurer l'application des règlements et des lois qui relèvent de sa compétence. Nous espérons donc voir ainsi les dossiers se régler plus rapidement. Tout cela ne sera toutefois possible que si le CCRI obtient les ressources nécessaires pour pouvoir se doter de l'expertise requise afin d'assumer pleinement les responsabilités qui lui incombent.
Le sénateur McIntyre : Il ne fait aucun doute qu'il y aura désormais une forte concentration des pouvoirs entre les mains du conseil. En effet, la ministre perd en quelque sorte une partie de ses attributions pour ce qui est des décisions portées en appel. Est-ce que l'on a discuté directement de la question avec la ministre?
M. Yussuff : À la lumière de mon expérience, je dirais que les ministres ne devraient jamais avoir de pouvoirs décisionnels relativement aux questions juridiques. Il vaut mieux confier ces questions à des instances comme le CCRI qui peuvent analyser la situation et rendre des décisions sans avoir à se préoccuper de considérations politiques, comme les éventuelles pressions de la part de l'employeur ou du syndicat relativement à la décision prise. Il serait nettement préférable que le CCRI dispose de ces pouvoirs.
Trop souvent, les ministres traitent ces dossiers en ayant à l'esprit les différentes répercussions politiques. Ils peuvent se dire par exemple qu'ils risquent d'être exposés à du lobbying s'ils rendent telle ou telle décision. Il arrive également, comme nous avons pu le constater avec les changements apportés au droit de refus, que le processus nous apparaisse beaucoup trop politique, vu que la ministre constitue la dernière instance d'appel. Ainsi, c'est le personnel de la ministre qui prenait les décisions au départ et elle devait indiquer par la suite si elle était d'accord. Il semble y avoir tout lieu de se demander si l'on ne remet pas ainsi en cause l'objectivité des ministres.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Monsieur Hynes, tout d'abord, je vous remercie pour le document que vous nous avez envoyé. À la page 5 de ce document, on retrouve trois paragraphes qui mentionnent « the high objectively-assessed degree of gravity ».
Dans le projet de loi, à l'article 270, dans les règlements que le gouvernement va pouvoir adopter, les alinéas c) et d) semblent avoir été rédigés à la suite de discussions sur la base de votre document, c'est-à-dire qu'on prévoit déjà que le gouvernement pourra établir des critères de minoration de la pénalité. Donc, on réduirait la pénalité. Dans l'alinéa d), il s'agit de déterminer un montant inférieur à la pénalité infligée, selon des modalités réglementaires.
Je me demandais si vous aviez eu des discussions sur cette portion particulière de l'article du projet de loi.
[Traduction]
M. Hynes : Non, pas précisément. Le ministère a tenu une réunion de consultation préalable portant sur le concept des sanctions administratives pécuniaires. Les recommandations que vous trouvez dans le document que je vous ai remis aujourd'hui correspondent presque mot pour mot à celles que nous avons présentées au ministère. Nous avons alors profité de l'occasion pour exprimer quelques-unes de nos préoccupations à l'égard de l'éventuelle imposition de sanctions administratives pécuniaires.
Le président : Nous avons le temps pour un très bref second tour. Il y a deux sénateurs qui souhaitent poser des questions. Nous espérons pouvoir leur donner l'occasion de le faire dans le temps qu'il nous reste. Je rappelle aux sénateurs que nous devons nous réunir à huis clos à la fin de cette séance. Nous saurions également gré à nos témoins de bien vouloir s'en tenir à des réponses concises.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Ma question s'adresse à M. Hynes. J'aimerais savoir si vous êtes à l'aise avec le fait qu'on propose l'immunité en matière civile et criminelle pour les membres du conseil.
De plus, le projet de loi va rendre public le nom des contrevenants. Êtes-vous à l'aise avec cela également?
[Traduction]
M. Hynes : Je vais répondre d'abord à votre seconde question. Je vous dirais que les employeurs ne sont généralement pas à l'aise avec l'idée de rendre public le nom des contrevenants, ce qui ne devrait surprendre personne.
Nous comprenons bien l'objectif fondamental. Je rappelle que le système fonctionne actuellement suivant une formule de conformité volontaire. Dans le continuum qui va de la conformité volontaire jusqu'aux poursuites criminelles, le ministère ne dispose actuellement que de très peu de moyens d'action. Il ne peut qu'émettre des directives en espérant que les employeurs s'y conforment volontairement. En principe, nous pouvons comprendre les raisons qui incitent le ministère à vouloir combler le vide qui existe. Je dirais toutefois que les employeurs ne seraient généralement pas d'accord pour que l'on aille jusqu'à publier des noms.
Je ne suis pas certain d'avoir bien compris votre première question concernant l'immunité.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Le projet de loi propose l'immunité en matière civile et criminelle pour les membres du conseil en ce qui a trait aux actes d'omission faits de bonne foi. Cette immunité dans le projet de loi vous convient-elle ou vous met-elle mal à l'aise?
[Traduction]
M. Hynes : Je ne peux pas me prononcer à ce sujet, car nous n'avons pas analysé cette portion du projet de loi.
Le sénateur Joyal : J'ai deux très brèves questions. Monsieur Yussuff, vous avez indiqué que très peu de décisions du conseil sont portées en appel. Avez-vous une idée approximative de la proportion que cela représente? Est-ce 10 p. 100, 5 p. 100? C'est simplement pour avoir un aperçu de la répartition.
M. Yussuff : Je dirais qu'il y en a encore moins.
Le sénateur Joyal : Ma dernière question porte sur les récidivistes. Tous les témoins que nous avons entendus aujourd'hui nous en ont parlé. Je me suis d'abord demandé de qui il s'agissait exactement. Je ne voulais pas de noms, bien évidemment. J'ai ensuite reformulé mentalement ma question : y a-t-il des secteurs d'activité où l'on retrouve davantage de récidivistes ou est-ce simplement attribuable au fait que certains individus peuvent être plus portés que d'autres à enfreindre les règles? Est-ce à cause de cela ou en raison de la nature de certaines activités qui sont plus propices aux infractions?
M. Hynes : Je ne peux pas vous répondre à ce sujet. Les gens du ministère pourraient le faire mieux que moi. Comme je l'ai indiqué précédemment, je peux affirmer sans crainte de me tromper que je représente un groupe d'employeurs qui ne font pas partie de cette catégorie. Est-ce qu'il y a effectivement certains récidivistes? Je présume que c'est le cas, car c'est ce que les représentants du ministère nous ont dit. Je ne sais pas de quels employeurs il peut s'agir ni de quels secteurs ils peuvent faire partie.
M. Yussuff : Lorsque le ministère a procédé à un examen de la partie III du Code du travail du Canada il y a 13 ou 14 ans, il est ressorti très clairement que, dans certains secteurs particuliers, on pouvait dresser une liste de récidivistes à l'égard d'infractions dont le ministère était parfaitement au fait. Je ne sais pas si ces données ont été mises à jour depuis, mais le ministère ne se ferait certes pas prier pour vous transmettre le tout.
Le sénateur Joyal : Merci beaucoup pour cette réponse.
Le président : Messieurs, merci de votre présence aujourd'hui. Vos témoignages nous ont été très utiles et nous vous en sommes reconnaissants.
Sénateurs, nous allons nous interrompre quelques instants, question de vous permettre de vous dégourdir les jambes. Nous allons ensuite poursuivre à huis clos pour donner à nos analystes nos directives en vue de la rédaction de notre rapport sur la section 17.
(La séance se poursuit à huis clos.)