Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Affaires juridiques et constitutionnelles
Fascicule no 57 - Témoignages du 21 mars 2019
OTTAWA, le jeudi 21 mars 2019.
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, auquel a été renvoyé le projet de loi C-58, Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur la protection des renseignements personnels et d’autres lois en conséquence, se réunit aujourd’hui, à 10 h 32, pour étudier le projet de loi; puis à huis clos, pour étudier une ébauche de rapport.
Le sénateur Serge Joyal (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bienvenue. Nous allons poursuivre notre étude article par article du projet de loi C-58, Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur la protection des renseignements personnels et d’autres lois en conséquence.
Lorsque nous avons levé la séance hier soir, nous en étions à l’article 19 du projet de loi. Je vais suivre la procédure habituelle, bien sûr. Je vais nommer les articles dans l’ordre et nommer les divers amendements qui ont été déposés auprès de la greffière du comité. Je peux vous transmettre une copie des amendements au besoin. Je vais les nommer, afin que vous puissiez savoir facilement où nous en sommes.
[Français]
Nous en sommes à l’article 19 du projet de loi. Selon mon rapport, il y a un premier amendement déposé par l’honorable sénateur Pratte.
Sénateur Pratte, la parole est à vous pour présenter l’amendement.
Le sénateur Pratte : Il s’agit d’un amendement corrélatif à l’amendement que je propose par la suite, soit que la révision judiciaire ne soit pas de novo comme ce qui est prévu, mais plutôt une révision judiciaire de l’ordonnance comme telle et non pas de tous les faits de l’enquête.
Cela nécessite de modifier la procédure prévue à l’article 19, soit la dernière phrase : « peut [...] exercer devant la Cour un recours en révision des questions qui font l’objet de sa plainte ». Or, quand la révision n’est pas de novo, ce ne sont pas les questions qui font l’objet d’une révision, mais simplement l’ordonnance du commissaire.
L’amendement prévu à la page AP6 vise à modifier et à supprimer les questions qui font l’objet de plaintes pour un recours en révision de toute conclusion ou ordonnance contenue dans le compte rendu. On précise simplement que la révision judiciaire porte sur l’ordonnance ou le rapport du commissaire, et non sur les autres questions.
Le président : Avez-vous des questions ou des commentaires?
La sénatrice Ringuette : Je dois avouer que je m’y oppose. Depuis 1983, la Loi sur l’accès à l’information est en place. Lorsque le Bureau du commissaire à l’information ou une institution fédérale présentait un dossier devant la cour, on utilisait toujours le système de novo. Ce système permet à la commissaire à l’information de représenter la personne qui a porté plainte, ce qui n’est pas nécessairement le cas dans le processus d’un système judiciaire comme l’a indiqué le sénateur Pratte.
Allons-nous changer un processus qui est en place depuis plus de 25 ans? Est-ce que le système est prêt à cela? Je ne crois pas. Est-ce que cela sera utile à la commissaire? Selon son témoignage, cela ne serait pas nécessairement utile. Au cours des dernières années, si je ne me trompe pas, huit décisions ont été appelées devant les tribunaux, mais le processus de novo a toujours été efficace pour le commissaire appelé à témoigner devant la Cour fédérale. Alors, je vois d’un mauvais œil le fait que nous décidions que le système de novo, qui est en place depuis six longtemps, ne soit plus efficace.
Je m’oppose vraiment à ce changement de système. Avec les nouveaux pouvoirs d’ordonnance qu’on donnera à la commissaire, peut-être qu’elle changera d’avis. J’en doute, mais, pour le moment, la commissaire a clairement indiqué que le système de novo répond aux besoins. Étant donné que le projet de loi C-58 conférera des pouvoirs additionnels à la commissaire, c’est-à-dire des pouvoirs d’ordonnance, je ne vois pas pourquoi on changerait le processus judiciaire qui, jusqu’à présent, a bien fonctionné.
[Traduction]
Le sénateur Gold : J’ai une question sur la procédure, et non sur le fond. Si nous adoptons l’amendement, mais que nous rejetons l’amendement subséquent qui en découle, quel sera l’effet sur l’amendement adopté?
Le président : Voilà pourquoi je laisse la discussion de principe ouverte, au sujet de la modification du système, comme l’a fait valoir la sénatrice Ringuette. À la suite de la discussion, vous serez en mesure de prendre une décision en tant que législateurs. Je déciderai ensuite du sort de l’amendement en conséquence.
En toute logique, nous aurions dû commencer par le principe de la décision, mais je crois que l’explication du sénateur Pratte et la réponse de la sénatrice Ringuette suffisent.
Je vais écouter ce que vous avez à dire puis je proposerai une approche à adopter pour régler la question.
Le sénateur Gold : Merci, monsieur le président. Je vais moi aussi écouter ce que les autres ont à dire.
Le président : Avez-vous des commentaires à faire sur la substance de la discussion?
Le sénateur Gold : Pour l’instant, j’aimerais entendre ce que mes collègues ont à dire.
[Français]
Le sénateur McIntyre : Je félicite le sénateur Pratte pour son amendement. La raison pour laquelle je le précise, c’est que le 27 février 2019, Nancy Othmer, sous-ministre adjointe du Secteur du droit public et des services législatifs au ministère de la Justice, a témoigné devant notre comité. Elle a mentionné que le système de novo n’est pas nouveau, mais une continuation. Ce qui est nouveau, c’est que la commissaire peut prendre des ordonnances. Par contre, le 17 octobre 2018, la commissaire, Mme Maynard, a mentionné ce qui suit, et je cite :
Une révision de novo signifie que ce n’est plus ma décision qui fait l’objet d’une révision, c’est la décision de l’institution qui continue d’être révisée, mais pour une deuxième fois.
Je me souviens aussi du témoignage de Ron Kruzeniski, commissaire à l’information de la Saskatchewan, qui avait mentionné que, d’après ses observations, le procès de novo semble ralentir le processus.
Pour ces raisons, je suis d’accord avec l’amendement du sénateur Pratte.
Le président : J’allais justement demander au sénateur Pratte, pour éclairer les honorables sénateurs, de nous résumer les témoignages que nous avons entendus globalement.
Je n’essaie pas de vous embarrasser en vous le proposant.
Le sénateur Pratte : Je ne les ai pas ici.
Le président : Je crois que le sénateur McIntyre a bien cerné la source de la proposition. Si vous désirez ajouter quelque chose à cet aspect, je vous invite à le faire.
Le sénateur Pratte : Tout cela s’inscrit dans la logique du fait que, comme la sénatrice Ringuette l’a dit, on donne maintenant le pouvoir au commissaire d’émettre des ordonnances. Un amendement plus loin autorisera la commissaire à faire certifier ces ordonnances en Cour fédérale. On s’inscrit donc dans un processus qui ressemble à celui d’un tribunal administratif. Le critère, à ce moment-là, lorsqu’on se présente en Cour fédérale, ne rassemble pas tous les faits, mais, comme le disait le sénateur McIntyre, c’est la décision de la commissaire qui est en révision et non pas toute l’affaire. Pour moi, la logique veut que si on donne un pouvoir d’ordonnance, on élimine l’audience de novo et ce doit être l’ordonnance qui est la cible de la révision.
[Traduction]
La sénatrice McCoy : J’appuie aussi l’amendement en fonction des bases du droit administratif et de l’indépendance de la commissaire à l’information. Nous créons ces postes d’agents du Parlement — ou appelez-les comme vous le voudrez — afin qu’ils assument leurs rôles et nous nous attendons à ce qu’ils développent une expertise pour ensuite la mettre en œuvre. Ce que nous voulons d’abord, c’est lui donner le pouvoir de rendre des ordonnances. Ensuite, il ne faut pas encourager un système qui permet à un tribunal ou à des ministères d’ignorer l’exercice de son processus judiciaire et décisionnel; il faut plutôt respecter ce processus. Il s’agit d’une pratique de longue date. J’ai été admise au barreau en 1970; ce principe est en place depuis beaucoup plus longtemps que le droit administratif. Ainsi, nous avons habituellement recours aux audiences de novo lorsqu’il n’y a aucun processus décisionnel fiable en place.
Incidemment, et en fonction de mon expérience en droit administratif, que j’ai pratiqué avant d’être élue, j’appuie l’amendement.
Ensuite, j’aimerais revenir à ce qui a été dit au cours des témoignages, mais peut-être pas de façon aussi directe. Je ne pourrais pas vous dire quand exactement, mais c’était lorsque nous parlions à des gens qui travaillent dans ce domaine et qui utilisent la loi tous les jours. Il est arrivé à certains d’entre eux de se présenter à la cour et de voir que le ministère avait préparé un tout nouveau dossier sans les avertir. Le principe du droit, qui est appliqué de manière rigoureuse, veut qu’on ne prenne pas l’autre partie par surprise. Or, la façon de préparer et de tenir les audiences de novo a créé un environnement propice à cette pratique, que nous appelons tactique dilatoire, et qui est déconseillée.
Pour ces motifs, j’appuie le principe et donc l’amendement qui fait partie de la documentation.
[Français]
La sénatrice Ringuette : Je ne peux pas baser mon argument sur mon expérience dans le système judiciaire. Par contre, je crois que ce que propose le sénateur Pratte éliminerait la comparution essentiellement de la commissaire. Si vous permettez, monsieur le président, j’aimerais demander à notre experte de venir nous parler des deux systèmes. Pourrait-elle nous dire quelle serait, en réalité, la participation de la commissaire dans l’un ou l’autre de ces systèmes avant que nous prenions notre décision?
Le président : Je reçois la demande de la sénatrice Ringuette.
[Traduction]
Le président : Madame Naylor, bonjour.
Ruth Naylor, directrice exécutive, Division des politiques de l’information et de la protection des renseignements personnels, Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada : Bonjour. Ma collègue, Sarah Geh, travaille au ministère de la Justice. J’ai pensé que sa présence nous serait utile afin de discuter de certaines questions relatives au droit administratif d’intérêt pour le comité.
Le président : Bienvenue, madame Geh. Avez-vous entendu la question de la sénatrice Ringuette, ou voulez-vous qu’elle la répète afin que vous puissiez bien y répondre?
Sarah Geh, directrice et avocate générale, ministère de la Justice Canada : Si j’ai bien compris, elle voulait que nous parlions des divers rôles de la commissaire à l’information dans le processus de novo afin que le comité puisse discuter de toutes les questions pertinentes qui y sont associées.
La sénatrice Ringuette : J’aimerais aussi que vous les compariez à ce que propose le sénateur Pratte dans un contrôle judiciaire.
Mme Geh : Depuis l’adoption de la loi, la commissaire à l’information joue de nombreux rôles dans le cadre du processus de novo, dès le moment où une personne dépose une plainte. Ainsi, la commissaire à l’information joue le rôle d’ombudsman, comme vous le savez, et émet des directives en matière de conformité. Elle exerce le plein contrôle sur ces procédures, ce qui signifie qu’elle joue un rôle de nature inquisitoire en cas de plainte. Elle est donc enquêteuse.
Il s’agit d’une enquête privée, ce qui signifie que les diverses parties — le plaignant, les institutions gouvernementales et les tiers — font leurs observations ou leurs représentations, mais qu’ils ne voient pas celles de l’autre partie dans le cadre du processus de novo. C’est une enquête entièrement privée. Ensuite, elle publie un rapport, qui contient des recommandations pour le moment, mais qui pourrait aussi prévoir une ordonnance, comme nous l’avons fait valoir. De plus, dans le cadre du processus de novo, elle peut parler au nom du plaignant devant la Cour fédérale. Je crois que c’est ce qu’elle a fait valoir lors de son témoignage devant le comité.
Les règles de la Cour fédérale prévoient un calendrier pour l’échange d’observations avant la tenue de l’audience de novo, qui peuvent comprendre de nouveaux arguments au nom de l’institution fédérale ou de la commissaire à l’information.
Dans le contexte d’une révision judiciaire, c’est un aspect assez complexe qui, fondamentalement, a une incidence sur tous les aspects du spectre, du dépôt d’une plainte jusqu’à l’étape de la Cour fédérale. Je ne suis pas certaine de pouvoir expliquer adéquatement les complexités de l’amendement du sénateur Pratte. Toutefois, dans le cadre d’une révision judiciaire conventionnelle, il existe peut-être, au Commissariat à l’information, une distinction plus officielle entre le groupe qui enquête et le groupe qui prend la décision. Les deux sont donc distincts. Le processus d’enquête et le processus de décision sont distincts.
De plus, toujours dans le cadre d’une révision judiciaire plus conventionnelle, les mémoires de toutes les parties seraient fournis à toutes les parties en cause, avant la prise de décision, pour que tous aient l’occasion de prendre connaissance du dossier avant que la commissaire ne rende une décision. Ensuite, lorsqu’un tribunal serait saisi de l’affaire dans le cadre d’une révision judiciaire conventionnelle, la question faisant l’objet d’une révision serait axée sur la décision de la commissaire à l’information, comme on l’a indiqué. Habituellement, cependant, la personne qui prend la décision ne comparaît pas en cour, et surtout pas à titre de défenseur de l’une des parties, comme le plaignant, par exemple.
Le président : Je pense que vous avez clairement résumé la différence entre une procédure de novo et ce qui est proposé. La Cour fédérale ne se penche pas sur la décision de la commissaire; il s’agit plutôt d’un nouveau processus dans le cadre duquel elle prend position, comme vous l’avez indiqué, habituellement en faveur du plaignant. Cependant, dans une proposition, comme celle du sénateur Pratte, la décision relève du commissaire. Par conséquent, ce qui fait l’objet d’une révision est la façon dont le ou la commissaire a exercé son autorité. Voilà la distinction fondamentale entre les deux processus.
Je ne veux pas commencer à donner un cours de droit administratif — j’ai aussi un diplôme dans ce domaine; je voulais simplement vous expliquer en termes très simples la distinction entre les deux approches. C’était pour vous aider à comprendre.
Le sénateur Dalphond : J’allais faire des commentaires sur la révision judiciaire et la procédure de novo pour expliquer la différence. J’ai été juge administratif et j’ai aussi donné des cours de droit administratif aux juges. Je connais donc la différence.
J’ai trouvé très importantes les questions de la sénatrice Ringuette. Dans ces deux scénarios, quel sera le rôle devant la Cour fédérale? D’après ce que je comprends, selon mon expérience, si nous optons pour le système de novo, l’affaire opposerait le ministère et la commissaire. Voilà quelles seraient les parties en cause, peu importe... Corrigez-moi si je me trompe, mais ce que je comprends de vos propos, c’est que dans bien des cas, la personne qui a demandé un document n’est pas celle qui se retrouvera dans le processus de novo. Ce serait plutôt la commissaire qui représenterait la personne qui a demandé le document.
[Français]
Ce serait le procureur de facto du parti.
[Traduction]
De plus, s’il s’agit du processus de novo, c’est normal, puisqu’on commence par la décision du ministère ou de l’organisme et non par celle de la commissaire, comme vous l’avez indiqué.
Dans le cas d’une révision judiciaire, le principe est que la personne qui a joué le rôle de tribunal administratif quasi judiciaire a un rôle limité. C’est accepté par les tribunaux et c’est à peu près tout. Après cela, la neutralité est de mise, car elle ne peut être à la fois juge et partie.
Le fardeau incombe donc à la personne qui a fait la demande d’accès à l’information. Pour les associations et les entreprises, ce serait facile, car elles ont des avocats, qui seront présents. Si c’est un particulier... Je pense que c’est de là que viennent ma réticence, mon hésitation et mes préoccupations. Je me demande qui représentera la personne qui a simplement payé les frais de 5 $ pour avoir accès au document.
Voilà pourquoi je suis perplexe et pourquoi je veux avoir votre avis, en fonction de votre expérience. Je crois comprendre, par rapport à la révision judiciaire, que la Cour suprême a dit que ce sont des droits quasi constitutionnels, ce qui est susceptible de mener à une norme de contrôle plutôt qu’à une norme relative au caractère raisonnable, de sorte que cela signifie que pour les questions juridiques, et même la révision judiciaire, la Cour fédérale sera tentée de donner sa propre interprétation de la loi. Toutefois, elle sera prise avec les constatations de fait, car rien ne pourra y être ajouté. Elle devra composer avec cela. En passant, c’est ce qui est indiqué dans l’article 44.1 que vous proposez. C’est ce que je comprends.
J’aimerais savoir, d’après votre expérience, combien de personnes défendent leur cause elles-mêmes, ou si c’est toujours la commissaire qui s’en charge. Je parle des gens dont la demande d’accès à l’information a été refusée ou encore acceptée, mais contestée par le ministère ou l’organisme par l’intermédiaire d’un processus de novo .
[Français]
Le sénateur Carignan : En complément à la question, je suis heureux d’entendre le sénateur Dalphond. Je voulais connaître sa position.
Le sénateur Dalphond : Je n’en ai pas encore.
Le sénateur Carignan : Non, mais vous avez les mêmes questions.
Dans sa question, le sénateur Dalphond tient pour acquis que la commission donnera raison à la partie à l’encontre du ministère. Toutefois, que se passera-t-il si la commission rejette la plainte de l’individu? Dans le recours au gouvernement fédéral, quelle sera la position de la commission? Est-ce qu’elle défendra sa décision? Comment va-t-elle participer à ce moment-là?
La sénatrice Dupuis : J’aimerais avoir des précisions quant à la question qui a été posée par le sénateur Dalphond, avant que vous répondiez, maître Geh.
Le président : S’il s’agit du même sujet.
La sénatrice Dupuis : C’est le même paragraphe. Je ne sais pas si c’est le même sujet, mais c’est le même paragraphe.
Le sénateur Dalphond : Pourvu que cela ressemble à ma question.
La sénatrice Dupuis : J’aimerais avoir des précisions sur ce qui est prévu dans le projet de loi C-58 comme modification au système actuel. Il faut voir comment l’amendement du sénateur Pratte modifiera non pas la situation actuelle, mais ce qui est prévu par le projet de loi C-58. Merci.
[Traduction]
Le président : Nous parlons maintenant des ordonnances, et non seulement des enquêtes. Comme la sénatrice Dupuis l’a indiqué, la loi confère un pouvoir supplémentaire au commissaire à l’information, soit celui de rendre des ordonnances. À quelle étape du processus administratif cela intervient-il?
Je pense que le sénateur Dalphond, la sénatrice McCoy et tous les avocats qui sont autour de la table comprendront que le statut du commissaire, quant à son rôle administratif, a été modifié dans la loi.
Mme Geh : Je vais essayer de répondre aux questions plus ou moins dans l’ordre.
En ce qui concerne la question du sénateur Dalphond au sujet du rôle du plaignant, ce qui pourrait être partiellement lié à la question du sénateur Carignan, il faut savoir que dans le régime de novo, la commissaire à l’information peut agir au nom du plaignant, mais seulement avec son consentement. Il peut arriver que le plaignant ne souhaite pas qu’elle intervienne.
La loi actuelle et le projet de loi C-58 comportent des dispositions autorisant la commissaire à l’information à comparaître comme partie à l’instance à la Cour fédérale. Selon les dispositions actuelles, elle y est autorisée au titre de ses droits dans le cadre de litiges visant l’article 41. Quant à l’article 44, qui porte sur la procédure de mise en cause, elle peut demander l’autorisation du tribunal pour intervenir, mais les normes à cet égard sont plus faciles à satisfaire que les règles de la Cour fédérale relatives à d’autres procédures.
La sénatrice Pate : Je me demande combien de fois cela s’est produit. Je ne suis pas certaine que nous ayons des données sur le nombre d’occurrences, et je ne sais pas si cela s’est produit dans un cas comme dans l’autre.
Mme Geh : Je dirais que nous avons des données pour les cinq dernières années, selon les rapports de la commissaire à l’information et l’examen des cas de la Cour fédérale. Au cours des cinq dernières années, la commissaire à l’information a fait huit demandes à la Cour fédérale.
Le président : Sénatrice Pate, ces cas sont mentionnés dans la lettre que le ministre Lametti a fournie, et cela a été ajouté au compte rendu des délibérations d’hier, comme nous en avons convenu.
La sénatrice Pate : Je suis désolée, cela m’a échappé.
Le président : Il n’y a pas de souci. Je voulais simplement vous donner ce renseignement supplémentaire.
Mme Geh : Cela n’inclut pas les cas où la commissaire à l’information est intervenue dans une procédure entreprise par un tiers. C’est à ce moment-là qu’elle est appelée à comparaître. Quant aux huit cas, je ne sais pas si certains plaignants ont comparu eux-mêmes.
En ce qui concerne la question du sénateur Dalphond sur la norme de contrôle, lorsqu’on pense à la façon dont cela fonctionnait dans d’autres systèmes, on peut s’attendre à ce que la norme de contrôle soit liée au caractère raisonnable. Nous pensons que c’est ainsi que cela fonctionnait à l’échelle provinciale, et nous sommes d’avis que dans cette situation précise, la cour pourrait aller en ce sens plutôt que d’appliquer un critère d’exactitude.
Pour ce qui est du rôle du plaignant, pour examiner le projet de loi C-58 et faire un rapprochement avec les amendements du sénateur Pratte, je pense que le problème est lié au processus de novo et à son fonctionnement. En effet, cela a une incidence profonde sur l’ensemble du processus, du rôle de la commissaire à l’information aux premières étapes de la communication avec le plaignant et les parties, jusqu’à son examen des ordonnances de la Cour fédérale. C’est une question très complexe dont il est difficile de saisir pleinement les répercussions.
Je peux vous dire que d’après ce que je comprends, l’amendement du sénateur Pratte modifierait l’article 41, qui autorise la Cour fédérale à procéder à une révision. On passe ainsi d’une révision de la question de fond à la révision d’une décision ou d’une ordonnance énoncée dans le compte rendu. Si le plaignant s’adresse à la Cour fédérale, seuls l’organisme gouvernemental, le tiers ou le commissaire à la protection de la vie privée peuvent comparaître.
Cela entraîne en outre le retrait du paragraphe 41(5), qui porte sur le défendeur désigné dans le cadre d’une révision judiciaire. En raison du retrait de ces dispositions, les règles existantes de la Cour fédérale entrent en jeu. Il s’agit des règles sur les personnes qui peuvent être désignées à titre de défendeurs, la durée du service et d’autres choses de ce genre. Il y a donc une interaction entre les dispositions du projet de loi actuel et les situations où elles se substituent ou non aux règles de la Cour fédérale. C’est aussi un aspect complexe.
J’aimerais aussi souligner que, si j’ai bien compris, l’amendement du sénateur Pratte entraînerait l’élimination de l’article 42 du projet de loi C-58, qui porte sur la comparution du commissaire à l’information à la cour au nom du plaignant, ou comme partie à une instance engagée au titre de l’article 41 et, avec l’autorisation de la cour, comme partie à une instance engagée au titre de l’article 44.
Dans le cadre d’une révision judiciaire conventionnelle, comme je l’ai indiqué précédemment, le décideur ne comparaît pas à titre de défendeur d’une partie. Toutefois, il y a alors des conséquences pour le plaignant en ce qui concerne la charge de la preuve. Dans une situation de novo, cela permet au commissaire à l’information de jouer divers rôles et d’agir à titre de défendeur du plaignant, si nécessaire.
Je pense que ma collègue pourrait donner des précisions supplémentaires sur les politiques relatives au rôle du plaignant.
Le sénateur Dalphond : Si j’ai bien compris ce que vous avez dit, le mécanisme repose entièrement sur le processus de novo et, si nous le modifions pour en faire une révision judiciaire, nous ne devrons pas seulement modifier les articles dont nous sommes saisis, mais beaucoup d’autres.
Mme Geh : C’est exact.
Le président : Parce que nous modifions un aspect fondamental.
Le sénateur Dalphond : Je voulais seulement préciser que ce sera compliqué.
Le président : Cela ne fait aucun doute, car nous donnerons à la commissaire à l’information un rôle équivalent à celui d’un tribunal administratif. Il faudra évidemment modifier le reste de la mesure législative en conséquence. Cela ne fait aucun doute.
La sénatrice Ringuette : J’ajouterais seulement, concernant le point soulevé par le sénateur Dalphond, que j’espère que vous avez bien compris les commentaires qui ont été faits plus tôt. Nous ne modifierons pas seulement le processus de novo, mais aussi le déroulement des activités de la commissaire, notamment les enquêtes. Nous modifierons également les pratiques adoptées par la commissaire et le Commissariat à l’information depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur l’accès à l’information.
Le président : Je pense que c’est très présent à l’esprit de tous, considérant l’enjeu dont nous sommes saisis. Cela dit, Mme Naylor voulait ajouter quelque chose.
Mme Naylor : J’ai pensé que le comité aimerait savoir que la capacité de la commissaire à l’information de continuer à représenter les plaignants à l’avenir par l’intermédiaire d’un processus unique n’est pas le propre de la Loi sur l’accès à l’information. Une mesure semblable applicable au commissaire à la protection de la vie privée existe dans la Loi sur la protection des renseignements personnels. Cela a joué un rôle important pour certains intervenants. À titre d’exemple, les directeurs nationaux de la recherche sur les revendications, l’Union des chefs autochtones de la Colombie-Britannique et l’APN en ont souligné l’importance lors de nos discussions. Ils voulaient que nous leur donnions l’assurance que cette capacité serait préservée dans le projet de loi C-58.
Voilà une des raisons pour lesquelles cette procédure unique a été créée. Elle est inspirée de certaines approches que l’on voit dans la loi terre-neuvienne, mais c’était une importante considération dans l’élaboration des amendements.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Pour poursuivre avec ce que vous venez de dire, madame Naylor ou maître Geh, l’idée n’est-elle pas de maintenir un système où le commissaire peut prendre fait et cause pour le plaignant, comme on le voit dans d’autres instances, par exemple en matière de droits de la personne?
[Traduction]
Mme Geh : L’idée du recours au processus de novo vise à donner l’accès aux plaignants en autorisant la commissaire à l’information à agir en leur nom, comme vous l’avez dit. Dans le contexte des droits de la personne, il y a une légère distinction, comme vous le savez sûrement. D’une part, il y a la commission, qui peut agir au nom d’une partie. D’autre part, le tribunal rend une décision. Voilà comment ont été réglées les questions de droit administratif qui nous posent problème aujourd’hui.
La sénatrice Dupuis : Merci.
La sénatrice Ringuette : Puisque je suis originaire de la seule province bilingue au pays, le Nouveau-Brunswick, et que ceci est un tribunal quasi constitutionnel, qu’en est-il des droits linguistiques? Vous venez d’établir une comparaison avec les droits de la personne. Qu’en est-il des droits linguistiques? Quelle comparaison peut-on faire avec ce système?
Mme Geh : J’avoue que je ne connais pas les pouvoirs du commissaire aux langues officielles. Je ne pense pas qu’il ait le pouvoir de rendre des ordonnances contraignantes.
La sénatrice Ringuette : Très bien.
Le président : Le commissaire aux langues officielles est essentiellement un ombudsman et, comme vous le savez, la Loi sur les langues officielles fait l’objet d’un examen en raison de plaintes évidentes, car plusieurs enjeux demeurent en suspens — pour être diplomate — 50 ans après son entrée en vigueur. Cela fait évidemment l’objet d'un débat dans un autre comité sénatorial.
La sénatrice McCoy : Entre autres choses, il ne faut pas oublier que le régime a changé radicalement par rapport à ce qui se faisait pendant les premières années. C’est entré en vigueur en 1983, ce qui fait, disons, 35 ans pour arrondir. C’est la première fois que le commissaire à l’information a le pouvoir de rendre une ordonnance. Il est donc question maintenant du caractère exécutoire de son ordonnance.
Pendant ces 35 années, il pouvait faire des recommandations, mais on finissait par les oublier. Pour qu’on y donne suite, le commissaire avait un moyen de contourner le problème qui consistait à s’adresser aux tribunaux pour leur dire que sa recommandation était bonne et qu’il veut contraindre le ministère à faire comme il le dit.
Ce n’est toutefois plus nécessaire, car la commissaire a dorénavant le pouvoir de rendre des ordonnances. Nous lui avons donné ce pouvoir. Nous avons fait du commissariat un tribunal quasi judiciaire, essentiellement. Nous voulons maintenant dire qu’elle ne peut pas encore voler de ses propres ailes, et nous laissons donc la Cour fédérale recommencer à zéro. On peut dire que c’est juste un manque de respect, je crois, et cela montre que cela va coûter plus cher.
Si l’ordonnance est contestée devant la cour, elle peut l’être par toutes personnes intéressées. Je ne connais pas le système de la Cour fédérale aussi bien que beaucoup de personnes présentes, mais je peux vous dire que lorsque j’étais conseillère juridique principale pour la commission des services publics à Edmonton, nous obtenions régulièrement un statut devant la Cour d’appel de l’Alberta et devant la Cour suprême du Canada pour la commission des services publics, pas tant à titre de défenseurs que d’amis de la cour. Nous étions là pour répondre aux questions, au besoin, et pour faire valoir le point de vue de notre administration, dans la plupart des cas.
Cela serait probablement encore ainsi. Les tribunaux peuvent donner une autorisation à se défendre, mais le fait est qu’il reviendra — si, par exemple, les peuples autochtones reçoivent de la part de la commissaire à l’information une ordonnance qui leur est favorable, ils n’auront plus besoin de se tourner vers les tribunaux... Ce sera une ordonnance de tribunal. Si quelqu’un s’y oppose, c’est à ses frais qu’il interjettera appel. Après cela, si c’est une question de ressources, je ne pense pas que nous devrions entraver un tribunal expert quasi judiciaire, que nous avons créé, en réalité, à cause de ressources nécessaires ailleurs.
Ce que nous devrions faire encore une fois — et c’est une observation qui pourrait être ajoutée au rapport —, c’est examiner les ressources qui doivent être investies dans notre système d’accès à l’information. Ce n’est pas tant une aide juridique qu’une aide destinée aux gens qui ont besoin d’une sorte de soutien financier pour retenir les services d’un avocat.
Le président : À titre informatif, chers collègues, j’ai vérifié auprès de la bibliothèque hier et, dans le budget actuel, le gouvernement a ajouté 3 millions de dollars pour le Commissariat à l’information. Tout le monde peut consulter ce document.
La sénatrice McCoy : C’est excellent. Espérons qu’il recevra l’argent avant le mois d’octobre de l’année prochaine, ce qui a été la pratique jusqu’à maintenant.
Le président : Cela remonte au début de l’année, si je me souviens bien.
La sénatrice McCoy : Espérons-le.
Le président : Mais ce n’est pas la question à l’étude ce matin.
[Français]
Le sénateur Pratte : En ce qui a trait à la question du rôle du commissaire —
[Traduction]
— et cela en deviendra peut-être une. Pour souligner le point soulevé par la sénatrice McCoy, ce qui change le rôle de la commissaire n’est pas l’adoption de l’éventuelle modification, mais plutôt le fait qu’elle peut dorénavant rendre des ordonnances. Son rôle a donc radicalement changé pour cette raison, n’est-ce pas?
Mme Geh : Je conviens que son rôle a changé parce qu’elle peut rendre des ordonnances. Je pense que la façon dont le processus est conçu dans le projet de loi C-58 ne vise toutefois pas à changer son rôle à d’autres étapes du processus à cause d’une révision de novo.
C’est peut-être là qu’il y a une petite distinction entre la question du caractère exécutoire des ordonnances et de la certification par rapport à la question de la révision de novo dont nous parlons maintenant. Le système tel qu’il existe, même s’il y a dorénavant des ordonnances juridiquement contraignantes, repose encore essentiellement sur un système de novo. Pour ce qui est des droits du plaignant, le droit des différentes parties de voir des soumissions avant que la commissaire à l’information prenne sa décision, et de la capacité de la Cour fédérale de prendre de bonnes mesures correctives, tous ces aspects systémiques reposent encore sur un système de novo.
Le sénateur Gold : Si je comprends bien notre discussion, la modification proposée par le sénateur Pratte aurait une incidence sur les processus internes. Elle occasionnerait aussi des changements à la loi qui sont plus vastes que ce qui est nécessairement envisagé dans l’ensemble de modifications.
Le pouvoir de rendre des ordonnances est nouveau. C’est une des nouvelles dispositions.
Un examen annuel approche, ce qui me fait penser à une possibilité. Je suppose qu’une des raisons justifiant la modification, que j’appuie, est la réduction des délais. Les délais sont un problème endémique et systémique que ce projet de loi tente de régler et qui nous préoccupe.
Je me demande si, vu le nombre de nouvelles choses dans le projet de loi C-58 et l’examen qui approche, nous ne pourrions pas utiliser l’année ou du moins l’examen annuel pour analyser l’incidence des retards, de manière générale, et pour déterminer si les audiences de novo allongent sensiblement les délais. Une période d’un an pourrait être insuffisante pour examiner cela, et aussi pour déterminer à nouveau si nous devrions passer d’un système de novo à une révision judiciaire.
J’hésite un peu à apporter le changement au moment même où nous instaurons le pouvoir de rendre des ordonnances, si c’est la conséquence à l’interne et de façon corrélative, sans savoir davantage comment il pourrait être touché. Les délais me préoccupent. Nous pourrions peut-être prendre l’année pour étudier la question, voire commencer le travail avant, de sorte que dans un an, les comités sénatoriaux auront fait un certain travail de préparation en vue d’une évaluation convenable.
C’est une idée que j’avance.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Je n’ai pas beaucoup de choses à ajouter. Le sénateur Gold a mieux expliqué les préoccupations que je n'aurais pu le faire. La prudence reste de mise. Je n’interviendrais pas à ce moment-ci. Je suis assez sensible aux éléments factuels qui ont été mentionnés, notamment que, en l’espace de cinq ans, il y a eu huit dossiers de novo. Peut-être qu’on peut multiplier par deux, ce qui donnera 15 dossiers de novo sur cinq ans. Cela ne m’apparaît pas être un problème systémique, loin de là. Cela m’apparaît assez ponctuel. Dans ce cadre, je n’interviendrais pas au détriment des huit personnes qui avaient fait des demandes d’accès, qui ont été refusées, et que le commissaire a prises à son compte pour faire valoir une cause qui est parfois très complexe et difficile. Sans cela, il n’y aurait probablement pas eu de jugement ou la cause aurait été abandonnée. Selon moi, on ne devrait pas changer la proposition qui est devant nous. Elle est trop structurelle et elle va trop loin. Dans un an, on pourrait l’examiner en y posant un autre regard. Entre-temps, dans le cadre de notre rapport, nous pourrions inviter le ministère à étudier la possibilité de passer d’un système de novo à un système de contrôle judiciaire.
[Traduction]
La sénatrice McCoy : Je voulais soulever de nouveau la question des ordonnances de mandamus dans ce contexte, car cela cadre avec la discussion. Comme vous le dites, il y a un échiquier, ce qui arrive au début et ce qui arrive à la fin. Les ordonnances de mandamus représentent la solution des tribunaux que le ministère de la Justice a jusqu’à maintenant désignée comme une bonne chose. Nous avons demandé à la commissaire à l’information d’analyser la différence entre cette solution ou les privilèges d’application de ses ordonnances qui correspondraient à des ordonnances de la Cour fédérale. Si ma mémoire est bonne, le ministère préférait l’application au moyen d’ordonnances de la cour.
L’une des raisons à cela est que la Cour fédérale est très stricte à propos du recours aux ordonnances de mandamus. L’une des conditions préalables pour en rendre une est que le pouvoir accordé au fonctionnaire — le terme « mandamus » signifie qu’il faut donner suite à l’ordonnance, et cela repose sur le pouvoir qu’un fonctionnaire va exercer.
Ce que la Cour fédérale dit, c’est que nous allons seulement vous dire d’y donner suite si vous êtes dans l’obligation d’exercer ce pouvoir. Dans les faits, nous faisons du commissariat un tribunal quasi judiciaire. La commissaire n’est pas tenue d’exercer ce pouvoir. Elle a le pouvoir discrétionnaire de rendre une ordonnance. Par conséquent, la probabilité de pouvoir recourir à une ordonnance de mandamus comme solution est nulle.
Le président : C’est théorique.
La sénatrice McCoy : Permettez-moi de revenir en arrière. Je voulais soulever un point. Vous avez tout à fait raison : il y a de nombreuses facettes qui créent une toute nouvelle mosaïque. Cependant, il y a aussi beaucoup de considérations qui expliquent pourquoi la situation a maintenant changé au point où le gouvernement a jugé bon dans le projet de loi C-58 de donner à la commissaire à l’information le pouvoir de rendre des ordonnances. À ce stade-ci, on se demande pourquoi avoir fait cela sans toutefois lui donner le respect d’un tribunal quasi judiciaire. Cela ne sera plus son rôle, après avoir rendu une ordonnance, et défendu le plaignant devant les tribunaux.
Une fois qu’elle aura rendu une ordonnance, même à la suite d’une révision de novo, elle devra défendre son propre raisonnement, pas ce qui pourrait être favorable à quiconque est concerné. Et ce ne sera pas un moyen de contourner le problème; ce sera parce qu’elle défend sa propre ordonnance.
Quoi qu’il en soit, je ne peux pas en dire beaucoup à ce sujet. J’apprécie toutefois que les sénateurs Dalphond et Gold nous incitent à faire preuve de prudence. Je signale aussi que la seule raison pour laquelle huit demandes ont été présentées par la commissaire au cours des cinq dernières années est que c’était la seule façon pour elle de faire appliquer sa recommandation, ce qu’elle n’aura plus besoin de faire. Le fait est que je ne pense pas qu’elle adressera ne serait-ce qu’une demande à la Cour fédérale.
[Français]
Le sénateur Carignan : J’essaie de comprendre, parce qu’on s’oriente vers le choix entre un processus de novo ou une révision judiciaire. La loi actuelle utilise le mot « révision », et ce terme a été interprété comme étant un appel de novo ou une révision de novo.
Les modifications que propose le sénateur Pratte apportent-elles vraiment un changement par rapport à la norme de contrôle? En fait-on vraiment un exercice de contrôle judiciaire? Ou ne s’agit-il pas plutôt d’encadrer et de laisser la place à une forme d’appel des questions identifiées en litige au lieu d’une question de révision judiciaire au sens du contrôle judiciaire? Peut-être que vous pourriez en parler, sénateur Dalphond? Nous sommes à la page 14.
[Traduction]
Le président : Dans une procédure de novo, il n’y a pas de contrôle judiciaire. On recommence à zéro. Il n’y a pas d’examen de l’application régulière ou d’une décision. C’est de novo; c’est une nouvelle procédure. La commissaire doit s’adresser à la cour, faire valoir ses arguments, et les parties se présentent. Il n’y a donc pas de contrôle dans une procédure de novo.
[Français]
Le sénateur Carignan : Exactement. Vous attirez mon attention sur le paragraphe 44(1). Il me semble que l’intention, sénateur Pratte, est d’adopter une forme d’appel, et non une forme de contrôle judiciaire.
Le sénateur Pratte : Je ne saisis pas la distinction que vous faites.
Le sénateur Carignan : La retenue ne sera pas la même en Cour fédérale si c’est un simple appel par rapport à un contrôle judiciaire. La différence sera beaucoup plus grande si c’est un contrôle judiciaire qu’une forme d’appel.
Le sénateur Pratte : Exact. Toutefois, l’intention était que ce soit un contrôle judiciaire.
Le sénateur Carignan : Donc, vous proposiez le contrôle judiciaire.
Le sénateur Pratte : Oui, avec la norme de « raisonnabilité ».
Le président : Absolument.
[Traduction]
C’est la distinction fondamentale de la décision à prendre. Je vais peut-être l’expliquer de nouveau, pour être sûr que tout le monde comprenne.
Dans une procédure de novo comme celle que nous avons maintenant et que le projet de loi maintient, il n’y a pas de contrôle judiciaire de ce que la commissaire a fait pour enquêter et de la conclusion à laquelle elle est parvenue. C’est de novo. On recommence à zéro. C’est comme si rien n’avait été fait avant. C’est le système actuel.
Ce que le sénateur Pratte propose, c’est que la commissaire fasse l’enquête, comme le prévoit la loi, et rende une ordonnance, comme le prévoit le projet de loi C-58. Le sénateur Pratte ajoute aussi la certification qui donne à la décision de la commissaire un effet contraignant sur l’administration pour faire respecter l’ordonnance. Pour contester la décision de la commissaire, la cour va revoir la procédure qu’elle a suivie pour parvenir à la décision. C’est le contrôle judiciaire pour des motifs raisonnables.
Une administration qui s’oppose encore à la décision de la commissaire peut s’adresser à la cour pour obtenir une ordonnance qui annule l’ordonnance certifiée de la commissaire. C’est le système que propose le sénateur Pratte.
Ce que le projet de loi propose mène plus ou moins la commissaire à la porte de la cour, mais ne va pas plus loin en maintenant la procédure de novo. La procédure de novo n’est pas un contrôle, bien entendu, de la décision ou de l’ordonnance de la commissaire. On recommence à zéro. C’est le choix que notre discussion et les témoignages entendus nous amènent à faire.
La sénatrice Ringuette : Sauf erreur, d’après ce qu’on a dit et ce que vous venez tout juste de mentionner, le processus de novo actuellement en place laisse la commissaire à la porte. Ce n’est pas ainsi que je comprends la chose.
Le président : Non, ce n’est pas ce que j’ai dit. Je parlais du projet de loi dans sa forme actuelle qui propose de donner à la commissaire le pouvoir de rendre des ordonnances. Autrement dit, elle mène une enquête et parvient à une conclusion. Cette conclusion, conformément au projet de loi, correspond à une ordonnance. Cependant, la partie lésée, l’administration, ne peut pas s’adresser aux tribunaux pour dire ou prouver que la commissaire a commis une erreur dans son enquête et sa conclusion. Ce serait un contrôle judiciaire, si c’est ce que propose le sénateur Pratte.
Ce que propose le projet de loi, c’est qu’il y ait une ordonnance, mais que cette ordonnance ne puisse pas faire l’objet d’un contrôle judiciaire. Pour contester la décision de la commissaire, c’est une procédure de novo, ce qui signifie qu’on recommence à zéro, comme si rien n’avait été fait. Tout le monde se rend à la cour, et nous commençons à examiner la preuve, les allégations, les documents, le caractère raisonnable, ce qui explique la décision. C’est à la cour de décider.
J’essaie de résumer cela le plus clairement possible pour tous les sénateurs afin de prendre une décision à ce stade-ci de notre discussion.
[Français]
La sénatrice Dupuis : J’aimerais remercier les gens du ministère de la Justice et ceux du Secrétariat du Conseil du Trésor d’avoir clarifié la question pour nous. Je crois que la situation est suffisamment claire et que nous comprenons maintenant. Nous serions peut-être prêts à voter sur la proposition d’amendement.
[Traduction]
Le sénateur Gold : Je comprends la logique de l’amendement. C’est vraiment une suite logique au pouvoir de rendre des ordonnances, et je comprends le point soulevé par la sénatrice McCoy à propos du respect et peut-être du besoin de ce que vous appelez le moyen de contourner le problème.
La loi à laquelle nous sommes confrontés dans le projet de loi C-58 est un compromis. On pourrait peut-être dire qu’elle n’est pas parfaitement logique. Cela dit, je pense, et je serai très bref, qu’il pourrait être préférable de prendre l’année pour y réfléchir un peu plus. Il se peut fort bien que la logique du pouvoir de rendre des ordonnances nous fasse pencher vers une révision judiciaire. Je le vois clairement, mais je pense que nous avons besoin de temps pour régler les détails internes et peut-être faire revenir la commissaire et d’autres personnes pour qu’elles nous expliquent comment cela fonctionnerait dans le contexte des procédures d’enquête et de la relation avec les intervenants pendant le déroulement du processus.
Sans suggérer que nous nous engagions à poursuivre l’étude de l’accès à l’information au cours de la prochaine année, je pense, tout compte fait, même si l’amendement est logique, que je suis porté à voter contre.
[Français]
Le sénateur Pratte : Je suis d’accord pour que l’on passe au vote, mais j’aurais une question à poser auparavant.
[Traduction]
Un autre amendement que nous étudierons plus tard permet à la commissaire de s’adresser à la Cour fédérale pour y faire certifier ses ordonnances. L’idée qui sous-tend cette modification est que nous ne sommes pas certains que la procédure de mandamus est satisfaisante et assez efficace.
Si l’amendement est rejeté, tout le concept d’une révision judiciaire le sera aussi. Quel est l’effet sur l’autre amendement proposé pour certifier les ordonnances à la Cour fédérale.
Mme Geh : La certification des ordonnances consiste à déterminer les conséquences lorsque l’ordonnance est rendue par la commissaire à l’information et que l’institution gouvernementale ne suit pas la démarche indiquée dans le projet de loi pour la contester devant les tribunaux. Je crois que c’est indépendant de la discussion que vous avez actuellement sur le processus de novo par rapport à la révision judiciaire. On pourrait en discuter séparément.
Le sénateur Pratte : Merci.
[Français]
Le sénateur Carignan : J’aime l’idée d’enlever le processus de novo et de ne pas aller nécessairement en révision judiciaire. L’idée de refaire tout le processus m’embête. Il faudrait trouver un juste milieu. Si on optait pour une forme d’appel plutôt qu’une forme de révision de novo?
Le sénateur Pratte : À ce moment-là, on parle de tout réécrire.
Le sénateur Carignan : Oui, mais on a du temps. On est là pour ça. Qu’en pensez-vous, sénateur Dalphond?
Le sénateur Dalphond : Il y a trois options. Peut-être que la sagesse nous indiquerait de fonctionner pendant un an avec la recommandation proposée et de voir plus tard. Un appel serait peut-être la bonne réponse, ou une révision judiciaire. L’appel serait plus limité que de novo. La révision judiciaire est encore plus limitée qu’un appel.
La sénatrice Dupuis : Il y a une hiérarchie.
Le président : Sénateur Carignan, souhaitez-vous prendre la parole, ou dois-je reconnaître d’abord le sénateur Pratte?
Le sénateur Carignan : J’allais dire que je suis en faveur de l’amendement. De toute façon, le projet de loi est déjà amendé à plusieurs endroits. Le fait d’indiquer que l’on souhaite un changement du système de novo lancera un message beaucoup plus fort à l’autre endroit si on procède avec un amendement. La Chambre des communes aura, de toute façon, le loisir de refuser l’amendement ou de l’accepter. Si elle l’accepte, tant mieux. Si elle le refuse, au moins le message sera plus puissant avec un amendement qu’avec une simple observation annexée au rapport du comité.
Le sénateur Pratte : C’est un peu étrange. J’allais proposer plutôt de retirer l’amendement, et ce, pour la raison suivante. Je suis assez sensible à tous les arguments qui ont été faits selon lesquels on se lance dans une opération plus complexe que celle que j’avais envisagée. Je reste personnellement convaincu que c’est la voie à suivre. En même temps, je veux qu’on fasse bien les choses. Comme il y aura une révision de la loi d’ici un an, je retirerais l’amendement en faveur d’une observation éloquente pour que le gouvernement étudie cette question et que nous continuions de l’étudier.
Le sénateur Boisvenu : J’ai écouté les arguments des deux côtés. J’ai retenu des témoignages à quel point il est difficile pour beaucoup de Canadiens d’avoir aisément accès à l’information. Je partage le point de vue de mon collègue, le sénateur Carignan. Je crois qu’il faut lancer un message clair au gouvernement pour lui indiquer qu’il faut changer la philosophie avec laquelle cette loi est mise en pratique, pour donner d’abord un avantage aux citoyens plutôt qu’à l’organisation bureaucratique. Par conséquent, j’appuierai l’amendement si le sénateur le maintient.
La sénatrice Dupuis : J’appuie la motion du sénateur Pratte de retirer son amendement. Je crois que l’exercice auquel nous nous sommes prêtés ce matin a eu pour effet de clarifier le régime actuel, ce que le projet de loi C-58 essaie de faire, et ce que l’amendement introduisait en compromettant l’intégrité du système actuel. En ce sens, je crois que ce n’est pas à nous nécessairement de nous improviser rédacteurs d’une loi parce que nous croyons que des changements doivent être apportés. Nous pouvons transmettre très clairement nos propos dans le contexte d’une observation sur le projet de loi.
La sénatrice Ringuette : Je vais certainement appuyer la décision du sénateur Pratte. D’ailleurs, on n’a pas à voter en faveur ou contre cette motion. L’amendement dont nous sommes saisis est une proposition du sénateur Pratte et qu’il a décidé de retirer. Il n’est pas question de voter. Il retire son amendement. Cependant, pour le bien de tous, je crois qu’il devrait y avoir une remarque dans notre rapport à cet effet et qui demande que, dans la période de 12 mois qui suivra la révision, il y ait une étude pour déterminer si le système proposé par le sénateur Pratte serait préférable. À mon avis, le fait de retirer à la commissaire la possibilité de représenter des plaignants me dérange. Dans bien des cas, on fait appel à des individus, à des entités qui, financièrement, ne peuvent pas se payer des avocats pour défendre leur cause. Bref, le sénateur Pratte a décidé de retirer son amendement en faveur d’une recommandation annexée au rapport, et je suis tout à fait d’accord. Il n’est pas question de voter, c’est son amendement.
[Traduction]
Le président : Le comité est maintenant saisi de l’amendement, et il lui revient de décider si les amendements sont adoptés ou non. Bien entendu, au comité, nous sommes assujettis aux mêmes règles qu’au Sénat. Comme vous le savez, une fois que l’amendement est proposé, c’est le comité qui décide. J’ai besoin du consentement unanime pour permettre au sénateur Pratte de retirer son amendement, car nous devons autrement le mettre aux voix. C’est la règle.
Cependant, avant de vous proposer une approche à considérer, je veux entendre la sénatrice Batters et le sénateur McIntyre.
La sénatrice Batters : Merci beaucoup. Comme j’appuyais cet amendement du sénateur Pratte, je m’intéresse à ce que le sénateur Joyal peut avoir à dire concernant son éventuel retrait. J’ai été également heureuse d’entendre à mon retour dans la salle que le sénateur Carignan allait proposer le même amendement si jamais celui-ci était retiré d’une manière ou d’une autre. Quant au dernier commentaire de la sénatrice Dupuis, je dirais simplement que nous formons le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et que c’est à nous qu’il incombe de modifier les lois lorsque cela est nécessaire, comme nous avons pu établir que c’était le cas pour cette portion du projet de loi à la suite d’une discussion longue et fructueuse.
Nous sommes là pour procéder à un second examen objectif et c’est exactement ce que nous faisons à l’égard de cette importante mesure, ce qui nous a permis de soulever certaines préoccupations cruciales. J’estime qu’il faut donner suite à l’amendement qui est proposé, et non pas se contenter d’une simple observation, pour envoyer un message fort au gouvernement concernant ce sujet particulier.
[Français]
Le sénateur McIntyre : C’est l’amendement du sénateur Pratte. S’il décide de le retirer, je vais respecter sa décision. Cependant, je maintiens mon point de vue, à savoir que la décision de la commissaire doit être finale, sinon, on la remplace par un processus selon lequel la décision relèvera de la Cour fédérale.
Cependant, je pense aux citoyens ou aux institutions qui demandent de l’information au gouvernement du Canada et, selon moi, le processus de novo risque de retarder la divulgation de l’information. De mon point de vue, le processus de novo est un pas en arrière.
[Traduction]
Le président : Il n’y a plus de sénateurs sur ma liste. J’ai pu réfléchir pendant que vous débattiez de la question ce matin, et voici ce que je vous suggérerais. Pour répondre à toutes les interrogations et préoccupations des sénateurs concernant cet aspect fondamental du projet de loi, il faudrait que nous puissions connaître le point de vue de la commissaire elle-même.
Notre greffière m’a indiqué qu’il y avait quelqu’un du commissariat dans la salle, mais que cette personne n’est pas en mesure de répondre à des questions au nom de la commissaire concernant ce sujet particulier. Étant donné l’importance de cet enjeu, je vous suggérerais — et je rappelle que je ne fais pas de propositions — qu’il pourrait être bon que nous entendions ce que la commissaire a à dire à ce propos dans le contexte des échanges que nous avons eus ce matin, maintenant que nous avons considéré tous les éléments d’information disponibles par ailleurs.
Je vous suggère donc que nous remettions à plus tard l’étude de cette question et que nous invitions à comparaître la commissaire ou un de ses représentants, comme nous avons pu le faire ce matin avec le ministère de la Justice et le Conseil du Trésor. Si le comité croit pouvoir prendre une décision dès maintenant, je vais devoir m’en remettre à sa volonté. Reste quand même qu’il y a certaines questions au titre desquelles nous obtiendrions des réponses plus précises ou plus complètes en nous adressant directement à la commissaire ou à sa conseillère juridique. C’est ce que je suggérerais.
Toutefois, si le comité s’estime prêt à voter dès maintenant sur cette motion d’amendement du sénateur Pratte, je vais la mettre aux voix sans plus tarder. J’en déduirai alors, si cette motion est adoptée, que nous pourrons poursuivre avec les autres amendements corrélatifs. Si par contre la motion est défaite, je comprendrai que nous pourrons traiter des autres éléments liés au principe d’une révision de novo de préférence à un examen judiciaire d’une ordonnance certifiée de la commissaire.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Voulez-vous qu’on débatte de votre proposition?
Le président : J’ai fait une suggestion.
Le sénateur Boisvenu : Voulez-vous avoir l’opinion des deux côtés de la table? Vous avez lancé une idée, est-ce qu’on la tue dans l’œuf ou est-ce qu’on en discute?
[Traduction]
Le président : Pendant que vous vous concertiez à l’intérieur de vos caucus respectifs, je me concertais de mon côté. Comme c’est mon rôle à titre de président, je m’interrogeais sur les moyens à prendre pour faire progresser notre réflexion de manière à en arriver à un résultat. En outre, il ne faut pas seulement que ce résultat soit raisonnable, il faut aussi que nous puissions le défendre à titre de législateurs en faisant valoir qu’il est issu de l’analyse objective de tous les aspects pertinents. Le seul point de vue que nous n’ayons pas pu entendre ce matin est celui de la commissaire elle-même ou de sa conseillère juridique.
[Français]
Le sénateur Pratte : La proposition du président a une valeur certaine, d’autant plus que je n’ai pas revu les témoignages de la commissaire lors de sa comparution. Cependant, on a reçu deux interprétations différentes de ses propos sur cette question. Il ne serait pas mauvais de la réentendre uniquement sur cette question. On ne passera pas notre temps à revenir en arrière et prendre trois heures pour en discuter. Le sénateur Carignan voudrait consacrer encore trois heures à cette question.
Le sénateur Carignan : Non, pas du tout. Vous connaissez mon besoin d’efficacité.
[Traduction]
Le président : Si nous envisageons les choses dans une perspective à long terme, et c’est ce que fait toujours notre institution, nous allons sans doute souhaiter joindre des observations à ce sujet si nous décidons de ne pas donner suite à la proposition du sénateur Pratte.
Dans ce contexte, j’estime qu’il serait bon d’intégrer à nos observations le point de vue de la commissaire. Ce serait bénéfique pour la suite de nos travaux compte tenu des discussions que nous avons eues ce matin. C’est la raison pour laquelle je fais cette suggestion. Il ne s’agit pas du tout de retarder quoi que ce soit. En fait, je ne suis pas certain que nous comprenions bien ce qui est proposé ici et les répercussions possibles sur le fonctionnement du système.
[Français]
Le sénateur Carignan : Ma réflexion, lorsque le sénateur Pratte me regardait et qu’il voyait que j’avais un point d’interrogation au-dessus de la tête, se déclinait en deux points : est-ce que nous réinvitons la commissaire, ou lui demande-t-on une observation écrite? En l’invitant à comparaître, nous avons l’avantage de favoriser les échanges, de poser des questions et d’obtenir des compléments d’information. Il serait plus efficace de l’inviter.
[Traduction]
Le président : J’allais suggérer que nous invitions la commissaire en même temps que sa conseillère juridique. Comme nous allons discuter d’éléments qui sont vraiment de nature juridique, il faudrait en effet que la commissaire soit accompagnée de sa conseillère juridique pour que tous les sénateurs puissent obtenir des réponses précises à leurs questions.
La sénatrice Ringuette : Compte tenu de votre suggestion et du temps que nous consacrons à chaque amendement — ce qui n’est pas problématique, car le Sénat est saisi de la question depuis un an et demi — et étant donné que vous souhaiteriez que nous recevions la commissaire, je proposerais que notre comité dépose une motion à la chambre du Sénat pour que nous puissions tenir des séances en même temps que le Sénat siège.
[Français]
Sinon, on picoche dans le projet de loi et la discussion s’étend. Je n’ai pas de problème avec ça, mais il y a des délais à respecter en ce qui a trait au temps qui est consacré à la discussion pendant qu’on plonge dans le projet de loi et qu’on examine les amendements qui sont proposés et qui font en sorte qu’on semble toujours revenir sur certaines choses. Alors, j’aimerais bien qu’on poursuive le travail de façon engagée pour obtenir les résultats souhaités. Pour ce faire, il faudrait se rencontrer plus souvent que deux fois par semaine.
[Traduction]
Le président : Concernant cette dernière proposition, sénateur Gold?
Le sénateur Gold : Oui, je serais plutôt d’accord avec cette proposition. Ce n’est pas vraiment le temps que nous consacrons à ce projet de loi-ci qui m’inquiète. Tous les projets de loi ont leur importance. Nous en avons ici un qui est important, mais il y en a d’autres qui sont en attente et il ne nous reste qu’un nombre limité de jours de séance. Le comité devra se pencher sur d’autres projets de loi tout aussi importants dont il n’a pas encore été saisi. Nous voulons tous éviter de devoir travailler à la hâte ou de donner l’impression de nous presser à la fin de la session, si bien que j’encouragerais la présidence à explorer les moyens à notre disposition pour augmenter dans la mesure du raisonnable le nombre de nos heures de séance.
Le président : Merci de vos observations. J’aurais moi-même des commentaires à ce sujet. Sénateur Carignan, nous vous écoutons.
[Français]
Le sénateur Carignan : On peut en exprimer le souhait, mais je pense que ce n’est pas à notre niveau que cela va se décider. Hier, j’ai participé à plusieurs sous-comités qui siégeaient en même temps que le Sénat. Le comité qui étudie le projet de loi C-69, et auquel je siège également, s’est réuni en dehors des heures de séance. Je ne sais pas comment les whips pourront régler ça.
[Traduction]
Le président : La procédure habituelle est simple et je tiens à la rappeler à mes honorables collègues. Le comité directeur se réunit pour examiner le déroulement de nos travaux. Tout cela se fait de façon amicale et avec le maximum d’efficacité possible. Si le comité directeur en arrive à la conclusion que nous devons nous réunir pendant que le Sénat siège, comme ce fut le cas la semaine dernière lorsque nous avons convenu de tenir une séance hier à 16 heures, nous demandons l’autorisation de le faire. Grâce à l’aimable concours de la sénatrice Dupuis et du sénateur Carignan, une motion en ce sens a été déposée au Sénat en mon absence. Il y a donc coopération pour que les choses puissent aller de l’avant. Nous ne sommes pas les seuls à pouvoir en décider. Les whips doivent accepter que nous siégions à des moments autres que ceux déjà prévus. Si c’est en même temps qu’une séance du Sénat, nous devons demander l’autorisation.
Nous savons donc exactement où nous nous en allons. Je suis tout aussi désireux que vous de faire progresser les choses. Nous avons déjà consacré de nombreuses heures à ce projet de loi.
Par ailleurs, nous avons aussi passé bien des heures à essayer de comprendre exactement quels sont les enjeux. Sans vouloir vous faire un discours, je vous rappelle que la Loi sur l’accès à l’information n’a pas été révisée depuis 35 ans. Je pense que l’importance d’une question aussi fondamentale que celle-ci justifie pleinement que nous consacrions deux heures de plus à cette étude. Je sais bien que le gouvernement a exprimé son intention de procéder à un nouvel examen de ces mesures dans un an ou dans cinq ans d’ici, mais je pourrais vous fournir une liste de lois qui n’ont jamais fait l’objet d’un examen quinquennal même si cela était prévu au départ.
À la lumière de mon expérience personnelle, je vous dirais qu’il est nettement préférable de bien faire les choses dès maintenant.
Cependant, comme je le dis toujours, je ne serai pas ici lorsque vous allez entreprendre ces examens. Je comprends bien que nous puissions être préoccupés et j’ai pris bonne note du point de vue du sénateur Carignan et des inquiétudes de la sénatrice Ringuette. Nous allons revoir le tout lors de la réunion du comité directeur la semaine prochaine, et nous verrons ce qu’il convient de faire dans le contexte de nos responsabilités partagées à l’égard des travaux de ce comité.
S’il n’y a pas d’autres questions relativement à cet aspect particulier, j’aimerais que nous revenions à l’objet principal de la discussion.
[Français]
La sénatrice Dupuis : J’aimerais vous accompagner et revenir au sujet principal, c’est-à-dire à votre suggestion. Est-ce possible à ce moment-ci? Oui?
[Traduction]
Le président : Sénatrice Batters, sur le même sujet.
La sénatrice Batters : Nous parlions de la possibilité de nous réunir en même temps que le Sénat siège. Je voulais souligner brièvement, comme bon nombre d’entre vous le savent sans doute déjà, qu’il y a plusieurs autres comités du Sénat qui se réunissent actuellement en même temps que les séances du Sénat. Il n’y a pas seulement le Comité de l’énergie dont fait partie le sénateur Carignan, car je sais aussi qu’il est même devenu difficile de tenir des séances de sous-comités comme ceux de la régie interne, dont je suis vice-présidente, du fait qu’il y a déjà un grand nombre de comités qui tiennent des réunions pendant les heures de séance du Sénat. Il est donc possible que cela soit compliqué pour nous également. Merci.
[Français]
La sénatrice Dupuis : J’aimerais revenir à la question principale. À mon avis, ce n’est pas nécessairement une question de trois heures ou de six heures, parce que trois heures, ce n’est peut-être pas suffisamment long. Toutefois, est-ce qu’on peut demander à la commissaire à l’information de se rendre disponible pendant le reste de nos travaux, afin qu’on évite d’avoir toujours à le lui demander?
[Traduction]
Le président : Voilà une excellente suggestion. Je ne voudrais pas que l’on me blâme si elle ne peut pas comparaître devant nous. Il y a quelqu’un de son commissariat ici présent, mais nous aimerions qu’elle soit accessible en tout temps pour notre étude article par article et même pour nos observations, car nous pourrions avoir des questions à ce moment-là. Il ne faut pas nécessairement que ce soit la commissaire elle-même qui soit disponible en tout temps. Pour les discussions au sujet de la question qui nous intéresse aujourd’hui, je dirais qu’elle devrait comparaître accompagnée de sa conseillère juridique, mais il faudrait par ailleurs que nous ayons accès à un représentant de son bureau capable de répondre à nos questions, comme ce fut le cas avec le Conseil du Trésor et le ministère de la Justice.
[Français]
La sénatrice Dupuis : On devrait peut-être lui faire part des amendements sur lesquels on aimerait entendre ses commentaires. J’aimerais revenir à ma demande d’hier, soit d’avoir les amendements du sénateur Carignan pour qu’on puisse au moins l’aviser. Je sais que je vous force la main avec ma demande. On parlait de l’importance d’être efficace. Si on pouvait au moins lui faire savoir qu’on est en train de réformer le système d’appel par rapport au système actuel, ce ne serait pas une mauvaise idée de la mettre au parfum, afin qu’elle puisse se préparer en conséquence.
Le sénateur Carignan : Le deuxième point que je voulais soulever est lié aux propos de la sénatrice Dupuis concernant la disponibilité de la commissaire. L’autre jour, à la suite des amendements proposés par la sénatrice Ringuette, de nombreuses questions ont été soulevées. Si on pouvait bénéficier de sa présence pour le reste de l’étude, ce serait l'idéal.
[Traduction]
Le président : Je pourrai certes me faire votre porte-parole en m’assurant que la commissaire ait la possibilité de prendre connaissance du compte rendu de nos délibérations de ce matin et des échanges que nous avons eus relativement à d’autres amendements. Il ne s’agit pas de revenir sur ces questions, mais de permettre à la commissaire de savoir où nous en sommes rendus. Il faudra aussi s’assurer qu’elle-même ou un de ses représentants pouvant répondre à des questions d’ordre juridique ou liées aux responsabilités de la commissaire puisse être disponible pour chacune de nos prochaines séances. Nous pourrons ainsi progresser en obtenant immédiatement réponse à nos questions, un grand avantage dont nous avons pu bénéficier grâce au concours du Conseil du Trésor et du ministère de la Justice. C’est donc ce que je vais faire.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Quand vous dites que votre deuxième point allait dans le sens de mon intervention, est-ce que cela signifie que vous êtes en mesure de donner une réponse? Pouvez-vous nous faire part des amendements pour qu’elle ait la chance de se préparer adéquatement?
Le sénateur Carignan : Le but n’est pas simplement de se préparer adéquatement. Les sujets sur lesquels nous avons des préoccupations sont assez connus. Pour ce qui est de la rédaction, il est difficile de s’engager parce que les choses évoluent. Si le sénateur Pratte décidait de retirer son amendement, je le ferais moi aussi. Donc, il y a des choses qui bougent. C’est donc difficile de dire d’avance ce qui sera proposé. De toute façon, je ne suis pas le seul ici non plus. D'autres sénateurs ont des amendements aussi.
[Traduction]
Le président : Êtes-vous d’accord, honorables sénateurs, pour que nous reportions l’examen de l’amendement proposé par le sénateur Pratte en attendant le témoignage de la commissaire à l’information et de sa conseillère juridique dès notre prochaine séance?
Des voix : D’accord.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Seulement en ce qui concerne les amendements du sénateur Pratte?
[Traduction]
Le président : On reviendrait à la question soulevée ce matin, à savoir les répercussions juridiques des propositions du sénateur Pratte sur le fonctionnement du commissariat à l’information et, bien évidemment, tous les autres arguments mis de l’avant relativement au régime de révision de novo que le projet de loi propose de maintenir. Êtes-vous d’accord, honorables sénateurs?
Des voix : D’accord.
Le président : Merci.
Nous passons donc à l’article 19. Nous avons un amendement du gouvernement relativement à cet article. Je pense, sénatrice Ringuette, que vous avez le texte de cet amendement. C’est le PR10.
La sénatrice Ringuette : C’est l’amendement PR10 qui vise à corriger une erreur de rédaction dans la version française. Il s’agit d’ajouter « de » avant « l’institution ».
[Français]
Le sénateur McIntyre : Vous êtes à PR9?
La sénatrice Ringuette : Non, je suis à PR10.
Le sénateur McIntyre : J’ai un PR9 et un PR10.
La sénatrice Ringuette : C’est le PR10 qui a été distribué ce matin. Je vais en faire la lecture, sénateur McIntyre, pour que vous soyez fixé. Il se lit comme suit :
Que le projet de loi C-58, à l’article 19, soit modifié par substitution, dans la version française, à la ligne 27, page 13, de ce qui suit :
prévu à l’article 41, il signifie au responsable de l’institution
[Traduction]
Le président : Est-ce que tous les sénateurs ont une copie de cet amendement? Nous allons nous en assurer. Nous vous en distribuons une dès maintenant.
[Français]
Vous l’avez?
[Traduction]
La sénatrice Ringuette : C’est pour corriger une erreur de rédaction dans la version française.
[Français]
On ajoute les mots « de l’institution ».
[Traduction]
Le président : C’est l’amendement PR10; l’anglais et le français sont sur la même page.
[Français]
Madame la sénatrice Ringuette a fait la lecture de l’amendement et elle l’a proposé.
[Traduction]
Est-ce que les honorables sénateurs sont prêts à se prononcer concernant cette proposition qui vise essentiellement à corriger une omission?
Des voix : D’accord.
Le président : C’est d’accord.
Nous passons donc à l’article 20, pour lequel il n’y a pas d’amendement.
La sénatrice Ringuette : Je veux souligner que nous avons sauté l’amendement PR9. Alors, si nous pouvions...
Le président : Cet amendement est corrélatif à l’amendement PR5 concernant l’article 16, dont nous avons reporté l’étude.
La sénatrice Ringuette : Alors, vous voulez reporter l’étude de celui-ci également?
Le président : Oui, ce serait préférable selon moi de faire la même chose avec celui-ci. J’en ai pris note, si bien que, lorsque nous en arriverons à l’amendement en question, je vous poserai la question concernant les amendements corrélatifs.
La sénatrice Ringuette : D’accord.
Le président : Je reviens donc à l’article 20. Il n’y a pas d’amendement au sujet de cet article à ce moment-ci. À moins que quelqu’un ne souhaite nous en soumettre un, je serais prêt à mettre aux voix l’article 20.
L’article 20 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Une voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence. Merci.
Nous en sommes à l’article 21. J’ai un amendement du sénateur Pratte concernant cet article, mais je crois que si nous avons reporté l’étude du précédent, nous allons en faire de même avec celui-ci. Je ne vous répéterai pas ce que j’ai dit à ce propos à la sénatrice Ringuette tout à l’heure.
Nous avons ensuite la sénatrice Ringuette avec un amendement relativement à... Je vous demande d’abord si l’article 21 est adopté? Non? Nous allons aussi en reporter l’étude, compte tenu de l’amendement y ayant trait qui a été réservé.
Nous passons donc aux amendements au sujet de l’article 22. Nous avons un amendement du gouvernement pour cet article, et c’est le PR11.
Je vous pose encore une fois la même question. Est-ce que tous les sénateurs ont une copie de l’amendement PR11? Comme personne ne se manifeste, je présume que tout le monde en a une copie. Sénatrice Ringuette, voulez-vous présenter cet amendement? Si j’ai bien compris, il porte sur l’article 22, à la page 14.
La sénatrice Ringuette : Oui. L’amendement se lit comme suit :
Que le projet de loi C-58, à l’article 22, soit modifié par substitution, aux lignes 23 à 34, page 14, de ce qui suit :
22 L’article 46 de la même loi est remplacé par ce qui suit :
Cette motion vise donc à remplacer l’article 22 en supprimant la double option pour le nouvel article 46.
Le président : Y a-t-il des questions concernant cet amendement?
[Français]
Le sénateur Carignan : Je ne comprends pas l’amendement.
[Traduction]
Le président : Madame Naylor, pouvez-vous vous joindre à nous, s’il vous plaît?
Le président : Pouvez-vous nous expliquer les raisons pour lesquelles le Conseil du Trésor souhaite que cet amendement soit apporté?
Mme Naylor : Merci. Je veux préciser d’entrée de jeu que cet amendement est corrélatif à un autre qui sera examiné ultérieurement et qui vise à modifier l’article 63. Ce dernier amendement concernant l’article 63 a pour but de changer la date d’entrée en vigueur du pouvoir d’ordonnance de la commissaire à l’information. La modification proposée ici tient compte de ce changement qui ferait en sorte que le pouvoir d’ordonnance de la commissaire entrerait en vigueur dès l’octroi de la sanction royale, plutôt qu’une année après, comme le propose actuellement le projet de loi C-58.
Le président : Nous sommes au fait de l’engagement de la ministre à cet égard.
Mme Naylor : Ce serait le résultat d’un autre amendement, mais, si ce changement est effectivement apporté, la double option actuellement prévue dans le projet de loi C-58 ne serait plus nécessaire. L’une de ces options visait à couvrir la période d’un an entre la sanction royale et l’entrée en vigueur du pouvoir d’ordonnance.
Le président : Oui, c’est indiqué très clairement dans la lettre que nous avons reçue de la ministre et qui est jointe à notre documentation.
La sénatrice Batters : Je suis désolée, mais est-ce que vous pourriez reprendre votre explication? Je peine à comprendre ce que vous essayez de nous dire et les raisons pour lesquelles cela arrive aussi tard dans le processus. Je suis désolée de vous demander cela, mais c’est une longue réunion et il y a beaucoup de détails.
Mme Naylor : Laissez-moi retrouver l’article en question. Au bas de la page 14 et au haut de la page 15, vous pouvez voir qu’il y a deux articles 46. Cela s’explique du fait que le projet de loi propose actuellement que le pouvoir d’ordonnance entre en vigueur une année après la sanction royale. Il y a donc ici deux options, l’une pour une disposition portant sur le pouvoir d’ordonnance à venir et l’autre concernant les pouvoirs actuels de la commissaire à l’information auxquels elle devrait s’en remettre pendant cette période d’un an. Si le pouvoir d’ordonnance devait entrer en vigueur au moment de l’octroi de la sanction royale, l’option supplémentaire ne serait plus nécessaire du fait que les pouvoirs de la présidence vont changer dès ce moment-là.
L’amendement proposé vise donc à supprimer la première option proposée pour l’article 46 parce que l’on aura uniquement besoin de la seconde.
Le sénateur McIntyre : Autrement dit, vous supprimez l’un des paragraphes?
Mme Naylor : C’est exact.
La sénatrice Batters : Je me demande simplement comment il se fait que le gouvernement du Canada ne se soit pas rendu compte avant aujourd’hui de la nécessité d’apporter un tel changement alors que nous avons déjà beaucoup progressé dans l’étude de ce projet de loi.
Le président : Si j’ai bien compris, c’est une décision ministérielle. Si mes souvenirs sont exacts, et Mme Naylor pourra me corriger...
La sénatrice Batters : Vous parlez du ministre Lametti?
Le président : Non, c’est le Conseil du Trésor. Dans la dernière lettre que nous avons reçue de la présidente du Conseil du Trésor, Mme Philpott — et vous la trouverez dans la documentation —, elle critiquait le fait que le pouvoir d’ordonnance de la commissaire n’allait entrer en vigueur qu’une année après la sanction royale. D’après ce que je peux comprendre, le Conseil du Trésor a revu ses positions à ce sujet et est maintenant prêt à proposer que le pouvoir d’ordonnance de la commissaire entre en vigueur à la date de la sanction royale. C’est essentiellement ce que vise cet amendement. C’est ce que j’ai pu comprendre à la lecture de la lettre de la ministre.
La sénatrice Batters : Je comprends. Si je croyais qu’il s’agissait du ministre Lametti, c’est parce qu’il est beaucoup question dans cet article du secret professionnel de l’avocat et que je pensais que cela pouvait relever du ministre de la Justice...
Le président : Non, c’est essentiellement une décision stratégique du Conseil du Trésor. Est-ce bien cela?
Mme Naylor : C’est exact. Les travaux sur le projet de loi sont en cours depuis un certain temps. Au départ, on croyait que le Commissariat à l’information aurait besoin de temps pour se préparer à l’entrée en vigueur des dispositions sur le pouvoir de rendre des ordonnances. Dans la lettre qu’elle a envoyée au président — je crois que le comité en a une copie —, la nouvelle commissaire a indiqué qu’elle souhaitait leur entrée en vigueur; elle n’a pas besoin de cette période.
Le président : Nous lui avions posé une question à ce sujet lors de sa comparution.
La sénatrice Batters : La ministre Philpott n’a jamais comparu, mais vous parliez de la commissaire, n’est-ce pas?
Le président : Oui. J’ai mentionné la commissaire.
La sénatrice Batters : Oui, merci.
[Français]
Le sénateur Carignan : Je comprends qu’il y a une répétition et je comprends la question du chevauchement et pourquoi on en enlève un et qu’on laisse celui de la page 15. Cependant, sur le fond même de l’amendement, on dit ceci : « malgré toute autre loi fédérale ». Or, il y a tout de même des questions liées à la Charte : le droit à l’avocat et le secret du Cabinet ne sont pas négligeables. Est-ce que je comprends que cet amendement au projet de loi donnerait à l’organisme un accès aux éléments de secret du Cabinet et même à des éléments qui tiendraient du secret professionnel de l’avocat, lequel est garanti? Est-ce la Cour fédérale qui jouirait de cet accès ou bien la commission? Seulement la Cour fédérale?
[Traduction]
Mme Naylor : Il me faudra vérifier cela également. Cela concerne les pouvoirs de la Cour fédérale lorsqu’elle exerce ses fonctions au titre de la loi.
[Français]
Le sénateur Carignan : Cela n’amène donc pas la commissaire à l’information à avoir accès au contenu d’éléments couverts par le secret professionnel ou par le secret du Cabinet.
Le sénateur Dalphond : J’aimerais faire un rappel au Règlement, monsieur le président.
Le témoin est là pour nous expliquer pourquoi on devrait supprimer la répétition, parce que la mesure transitoire n’est plus nécessaire. Or, je pense qu’on est en train de lui demander de témoigner sur des questions de fond que le sénateur Carignan avait posées à des représentants précédents sur l’étendue du secret professionnel et sur ce qui est en jeu ici, si mon souvenir est exact. On n’en est pas là, on doit seulement décider si on élimine la répétition qui est nécessaire, parce qu’il y a une période transitoire au regard de l’application de la loi.
Le sénateur Carignan : Si vous vous souvenez de la question, vous vous souvenez peut-être de la réponse; pouvez-vous me la rappeler?
Le sénateur Dalphond : On en avait discuté, et l’une des réponses était que ce dont il est question ici, le secret professionnel qui peut être protégé, serait celui du gouvernement, celui de l’agence. Si le gouvernement rend des documents publics, il renonce forcément à une partie du secret professionnel, dans la mesure où il rend publics ces documents.
Le sénateur Carignan : Je ne pense pas que l’on vise uniquement le secret professionnel lié à l’institution.
Le sénateur Dalphond : Il faudrait que je vérifie les transcriptions, mais il me semble que c’était la nature de ce qu’on s’était dit à l’époque.
Le sénateur Carignan : Ça me semblait beaucoup plus large que ça.
[Traduction]
Le président : Comprenez-vous la question du sénateur Carignan?
Mme Naylor : Je crois que oui. Vous vous demandez si cela a l’incidence dont il a été question précédemment. D’autres dispositions contenues dans le projet de loi C-58 ont trait au secret professionnel de l’avocat. Celle-ci ne porte pas directement là-dessus. Il en est question ailleurs dans le projet de loi. Il est question ici des pouvoirs de la Cour fédérale lorsqu’elle exerce ses fonctions au titre de la Loi sur l’accès à l’information. D’autres dispositions portent sur le privilège de l’avocat et l’accès qu’a la commissaire à l’information à ces documents.
La sénatrice Batters : J’ai deux ou trois questions au sujet de la partie qui est censée être conservée si l’amendement du gouvernement est adopté. L’article 46 figure au début de la page 15. Je remarque qu’il y a une petite différence entre cet article et l’article précédent qu’on propose de supprimer. À la ligne 4, il manque l’article 42 alors qu’on le mentionne dans l’autre page. Est-ce que c’est voulu ou s’agit-il d’une erreur?
Mme Naylor : Merci. En fait, il s’agit du changement important entre les deux. La raison en est qu’une fois que les dispositions sur le pouvoir de rendre des ordonnances entreront en vigueur, la commissaire à l’information n’aura plus les pouvoirs accordés à l’article 42 parce que ce ne sera plus nécessaire. C’est quelque chose dont elle aurait besoin. Il s’agit d’un pouvoir de lancer le processus de révision en Cour fédérale. Ainsi, une fois qu’elle aura le pouvoir de rendre des ordonnances, le mécanisme changera et il appartiendra alors à l’institution fédérale de lancer un processus de révision.
Voilà le changement. C’est l’élément qui serait touché entre les deux articles.
La sénatrice Batters : D’accord. J’ai une autre question et elle porte sur la grammaire. Parfois, lorsque nous ne voyons qu’une partie d’une chose, elle ne nous semble pas logique d’un point de vue grammatical, mais elle l’est peut-être si on l’examine dans l’ensemble. À la ligne 5 de la version anglaise du même article, on dit ce qui suit: « [...] in the course of any proceedings before it arising from an application [...] ».
Je me demande si le mot « arising » est correct d’un point de vue grammatical. Ne devrait-il pas plutôt s'écrire « arises », avec « es » à la fin? Je ne sais pas, mais je me demande s’il y a une erreur de grammaire ici. C’est la même chose dans les deux articles, mais cela ne semble pas logique. La disposition...
Le président : C’est à la ligne 5...
La sénatrice Batters : C’est à la fin de la page 14, mais la disposition proposée qui figure au début de la page 15 contient ce qui est possiblement la même erreur grammaticale.
Mme Naylor : Peut-être pourrais-je vous aider en lisant ce passage d’une manière qui rendrait les choses un peu plus claires?
Le président : Allez-y.
Mme Naylor : « [...] the Court may, in the course of any proceedings before it arising from an application under section 41 or 44[...] »
La sénatrice Batters : Je comprends ce que vous voulez dire. Il s’agit de la cour. Ce n’est pas une partie de « before it arising ». D’accord. Je vois. C’est logique.
Le président : C’est lié à la partie précédente de la phrase et cela n’équivaut pas à « it arises ».
La sénatrice Batters : C’est à cet endroit qu’on fait une pause dans la phrase.
Le président : Oui, il y a une pause pour que ce soit clair.
La sénatrice Batters : Oui, il manque une virgule.
Le président : D’autres questions? J’aimerais savoir si l’amendement que propose la sénatrice Ringuette à l’article 22 est adopté. Je vais vous le lire.
Que le projet de loi C-58, à l’article 22, soit modifié par substitution, aux lignes 23 à 34, page 14, de ce qui suit :
22 L’article 46 de la même loi est remplacé par ce qui suit :
Des voix : D’accord.
Le président : D’accord.
L’article 22 modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
Une voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
Nous passons à l’article 23. J’ai bien dit « avec dissidence ».
[Français]
Le sénateur Boisvenu : On m’a demandé de vous avertir à 12 h 30, parce que des gens ont des réunions.
[Traduction]
Le président : Absolument. Aucun amendement n’est proposé au prochain article. Nous quitterons donc sur une bonne note, sénateur Boisvenu.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Parfait, je remplis mon rôle.
[Traduction]
Le président : L’article 22 est-il adopté?
Des voix : Oui.
Une voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
Nous passons à l’article 23. L’article 23 est-il adopté?
Des voix : Oui.
La sénatrice Batters : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence.
Nous en sommes maintenant à l’article 24, mais, puisqu’il s’agit ici d’un amendement corrélatif, je vais le réserver.
Nous passons maintenant aux articles 25 à 30. Aucun amendement n’est proposé.
Les articles 25 à 30 sont-ils adoptés?
Des voix : Oui.
Le président : À moins que vous n'ayez un amendement à proposer, sénateur.
[Français]
Le sénateur Carignan : Je me demande s’il ne pourrait pas y avoir des amendements corrélatifs à la discussion qu’on aura, parce qu’on parle des ordonnances de la cour. Je n’ai pas eu le temps de constater si on se dirigeait vers un processus de révision judiciaire par opposition à un...
[Traduction]
Le président : Ni la greffière ni moi n’avons reçu d’amendement corrélatif à la proposition du sénateur Pratte.
[Français]
Le sénateur Carignan : Je sais, mais je ne sais pas si... Selon le choix qu’on fait, est-ce que ça peut toucher cette partie?
Le sénateur Pratte : On ne l’avait pas repéré dans l’amendement original, mais on a décidé d’entendre la commissaire et de voir s’il y a lieu d’adopter une solution ou l’autre. Peut-être serait-il plus prudent...
Le sénateur Carignan : Ou une solution mitoyenne.
Le sénateur Pratte : Oui. Je ne sais pas.
[Traduction]
Le président : Puisqu’il n’y a pas d’amendement et que le sénateur Pratte n’a pas estimé qu’il était nécessaire de présenter un amendement pour ce groupe d’articles, nous pourrions toujours y revenir s’il y a un amendement corrélatif. En fait, j’ai l’intention de demander au comité l’autorisation d’y revenir si jamais un amendement corrélatif est proposé ou rejeté, car il y a des conséquences à notre décision. Voilà pourquoi je n’hésite pas à vous demander si les articles 25 à 30 sont adoptés.
Les articles 25 à 30 sont-ils adoptés?
Des voix : Oui.
Une voix : Avec dissidence.
[Français]
Le sénateur Carignan : Si vous êtes à l’aise, c’est bon.
[Traduction]
Le président : Si j’ai bien compris, le vice-président du comité, le sénateur Boisvenu, m’a rappelé à l’ordre.
À la prochaine réunion, nous en serons à l’article 30. Je crois comprendre que le sénateur Carignan propose un amendement. Il ne vous a pas encore été fourni. Vous le recevrez à ce moment-là.
Je vous remercie, honorables sénateurs. Je vous rappelle que la commissaire à l’information et son avocate-conseil comparaîtront à la prochaine réunion .
(La séance est levée.)