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MDRN - Comité spécial

Modernisation du Sénat (spécial)

 

Délibérations du Comité sénatorial spécial
sur la Modernisation du Sénat

Fascicule n° 10 - Témoignages du 8 mars 2017


OTTAWA, le mercredi 8 mars 2017

Le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat, auquel a été renvoyé le projet de loi S-213, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 et la Loi sur le Parlement du Canada, (présidence du Sénat), se réunit aujourd'hui, à 12 h 5, pour effectuer l'étude article par article du projet de loi.

Le sénateur Serge Joyal (vice-président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le vice-président : Honorables sénateurs, c'est avec grand plaisir que j'ouvre la séance de cet après-midi. Bien sûr, le président du comité est le sénateur McInnis, qui est absent aujourd'hui. À titre de vice-président, j'ai la responsabilité d'aider le comité à s'acquitter de ses fonctions.

Comme vous l'avez vu à l'ordre du jour, nous effectuerons aujourd'hui l'étude article par article du projet de loi S-213, Loi modifiant la Loi constitutionnelle de 1867 et la Loi sur le Parlement du Canada, (présidence du Sénat).

[Français]

Nous allons procéder à l'étude article par article du projet de loi S-213.

[Traduction]

Avant de demander aux honorables sénateurs s'ils souhaitent que nous siégions en séance publique ou à huis clos puisque nous sommes ici pour l'étude d'un rapport, j'aimerais présenter les diverses options qui se présentent aux membres du comité.

Le projet de loi S-213, qui a été déposé par le sénateur Mercer, a été renvoyé au comité pour étude. L'ordre de renvoi du Sénat prévoit que nous en fassions l'étude afin d'en faire rapport au Sénat. La question suivante se pose donc : quelles sont nos diverses options en vue de la rédaction de notre rapport sur le projet de loi S-213?

Honorables sénateurs, il y a trois options possibles à l'égard de ce projet de loi. La première consisterait à en faire rapport sans amendement; la seconde, à faire rapport du projet de loi modifié au Sénat et la troisième, à recommander que le projet de loi soit rejeté.

Je tiens à rappeler aux honorables sénateurs que la troisième option s'offre quand un projet de loi soulève des questions constitutionnelles. Il y a eu des précédents au Comité des affaires juridiques et constitutionnelles. Je regarde particulièrement le sénateur McIntyre, ainsi que le sénateur Tkachuk, quand je dis que le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles a dû se pencher sur le projet de loi S-4, celui qui modifiait le fonctionnement du Sénat, de manière à ce que les sénateurs soient élus et à réduire la durée de leur mandat. Le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles a étudié ce projet de loi en profondeur, a entendu de nombreux témoins et constitutionnalistes, puis en est venu à la conclusion qu'il y avait suffisamment de doutes de nature constitutionnelle pour rejeter le projet de loi. C'est la principale conclusion de son rapport, que j'ai ici sous la main et que je porte à l'attention des sénateurs.

Avant d'entreprendre l'étude article par article de ce projet de loi, j'aimerais demander aux honorables sénateurs présents autour de la table de nous faire part de leurs positions et de leurs observations sur ces trois options.

Je souhaite rappeler aux honorables sénateurs que le Comité sur la modernisation a adopté son sixième rapport, qui contient la recommandation suivante à l'intention du Sénat :

Que le Sénat donne instruction au Comité du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement d'élaborer un processus, dans le cadre du Règlement du Sénat, qui permettrait aux sénateurs d'exprimer leur préférence quant au choix du Président en désignant jusqu'à cinq sénateurs dont la candidature sera soumise au premier ministre, qui fera sa recommandation au gouverneur général;

Que ce processus se déroule au début de chaque législature.

C'était l'essence du sixième rapport, d'où la décision du Sénat de renvoyer le projet de loi S-213 à notre comité puisqu'il concerne la présidence et qu'il aura essentiellement pour effet de modifier la Loi constitutionnelle de 1867, afin que les sénateurs élisent directement le Président.

Je prends donc votre pouls, honorables sénateurs, afin de déterminer comment vous vous positionnez à l'égard de ces trois options, compte tenu du nombre de témoins que nous avons entendus relativement à la constitutionnalité du projet de loi, et quel consensus se dégage des discussions du comité à l'égard du projet de loi S-213.

Les honorables sénateurs souhaitent-ils que nous restions en séance publique ou que nous passions à huis clos à ce stade-ci, conformément à ce que prévoit le Règlement du Sénat?

La sénatrice Stewart Olsen : Je propose que nous restions en séance publique.

Le vice-président : Merci, honorables sénateurs. Nous continuerons notre discussion publiquement.

Le sénateur Greene : Corrigez-moi si je me trompe, mais je pense que l'intention de notre comité est que le Sénat joue un rôle dans le choix de la présidence. Je crois que c'est essentiellement la position du comité.

Le vice-président : C'est l'essence du sixième rapport.

Le sénateur Greene : C'en est l'essence.

Le vice-président : Je viens de le lire en rappel pour les sénateurs.

Le sénateur Greene : C'est assurément ce que je souhaite aussi.

Si nous adoptons ce rapport — et je ne m'y oppose pas — je souhaiterais qu'on y annexe une observation afin de porter notre sixième rapport à l'attention du Sénat et d'indiquer que nous préférerions cette option au projet de loi.

Notre intention, qui est bien exposée dans le sixième rapport, soulève moins de problèmes que le projet de loi. Nous pourrions la réaliser beaucoup plus vite que si nous adoptons ce projet de loi.

Le sénateur Tkachuk : J'ai quelques éléments à souligner. Il y a d'abord le fait que ce projet de loi visant à modifier le Sénat n'a pas été soumis au débat au Sénat. Je ne faisais pas partie de ce comité à l'époque. Je n'aurais pas appuyé cette décision, que je jugeais antidémocratique, puisqu'elle ne visait qu'à occulter le débat. En gros, c'est ce qui a causé la mort du projet de loi.

Concernant ce projet de loi-ci, la question est dans l'air depuis longtemps. D'aussi loin que je me souvienne, on parle d'un Sénat élu. Or, non seulement je n'appuie pas ce projet de loi, mais je n'appuie même pas le rapport sur la modernisation du Sénat, puisque j'ai exprimé ma position minoritaire quand il a été adopté.

J'estime toutefois important que ce projet de loi soit soumis au Sénat. Ce serait l'occasion de le soumettre à l'ensemble des sénateurs, comme je crois que tous auraient dû participer à l'examen de cet autre projet de loi qui a été enterré par le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles. Il aurait dû être battu pleinement au Sénat, qu'il soit constitutionnel ou non. C'est un principe très important. Il faudrait que tous les sénateurs participent à ce débat, il ne doit pas se limiter qu'à nous.

Je suis donc très favorable à l'idée que ce projet de loi soit débattu au Sénat, même si je ne l'appuie pas. Il doit faire l'objet d'une discussion au Sénat, c'est important.

Le vice-président : Je tiens à ajouter que même si nous recommandons dans notre rapport que le projet de loi ne soit pas adopté, notre rapport sera soumis au Sénat, ce qui ouvrira la porte à un débat sur le projet de loi et le rapport.

Le sénateur Tkachuk : Les gens pourraient vouloir y apporter des amendements.

Le vice-président : Bien sûr. Nous pouvons également le modifier ici.

Si nous recommandons que le projet de loi soit rejeté pour des raisons constitutionnelles, ce sera l'objet de notre rapport au Sénat. Le Sénat pourra ensuite juger de ce rapport comme bon lui semblera. Cela n'empêche en rien les sénateurs de s'exprimer sur le projet de loi.

Le sénateur Tkachuk : Je comprends cela.

Le vice-président : ... sur son objectivité et son inutilité. Le Sénat sera libre de refuser le rapport du comité et d'adopter le projet de loi. Même si nous recommandions dans notre rapport de ne pas adopter ce projet de loi pour des raisons constitutionnelles, rien n'empêcherait le Sénat d'en décider autrement.

On a déjà vu des rapports balayés du revers de la main au Sénat par un vote majoritaire et le Sénat adopter d'autres orientations. C'est déjà arrivé. Je pourrais vous citer des précédents.

La sénatrice Tardif : Je souhaite féliciter mon collègue, le sénateur Mercer, d'avoir pris l'initiative de proposer ce projet de loi. J'appuie à 100 p. 100 l'idée que le Sénat participe plus activement au choix de sa présidence. Je crois que le Sénat a son rôle à jouer dans ce processus, puisque nous sommes en train de moderniser le Sénat.

Cependant, je conviens du sérieux des questions constitutionnelles que certains témoins ont soulevées. Nous avons entendu des témoins nous dire que ce projet de loi éliminerait le rôle du gouverneur général et par conséquent, le rôle de l'exécutif dans le choix ou la destitution de la présidence. De même, ce projet de loi modifierait les caractéristiques constitutionnelles de la fonction présidentielle elle-même.

À la lumière des témoignages de très grands spécialistes de la question, j'ai des doutes constitutionnels à l'égard de ce projet de loi. Je sens donc que je ne peux pas l'appuyer. Je considère toutefois la discussion bienvenue et je crois que le sixième rapport produit par le comité permettrait cette discussion.

Comme le sénateur Joyal l'a indiqué, si le comité devait recommander au Sénat de ne pas adopter ce projet de loi, il serait tout de même soumis au Sénat pour discussion.

[Français]

La sénatrice Bellemare : Je vais reprendre à peu près les mêmes arguments qui ont été avancés jusqu'à maintenant, en particulier ceux de la sénatrice Tardif. Des témoins experts ont comparu et nous ont dit que le projet de loi comportait des considérations constitutionnelles importantes. Malgré tout, je remercie le sénateur Mercer d'avoir présenté ce projet de loi et de nous permettre de débattre quand même de l'importance de la position du Président du Sénat.

Le sixième rapport, tel que vous en avez fait état, pourrait justement permettre le débat sur cette question en comité plénier. Il serait bon pour tout le monde de savoir pourquoi le Comité spécial sur la modernisation du Sénat a agi ainsi, et nous pourrions expliquer davantage les problèmes constitutionnels que ce projet de loi soulève.

[Traduction]

Le sénateur McIntyre : Monsieur le président, comme vous le savez, j'ai perdu la voix. J'ai pris la parole sur votre motion hier soir, sur le Musée du portrait du Canada.

Le vice-président : C'était trop touchant.

Le sénateur McIntyre : J'étais tellement emballé que j'en ai perdu la voix. Je serai donc bref.

Il y a le sixième rapport et il y a le projet de loi S-213. Nous devrions saisir le Sénat de cette question pour qu'elle soit débattue en profondeur. J'ai l'intention de participer à ce débat.

La sénatrice Stewart Olsen : Je ne suis pas une constitutionnaliste, et j'apprécie le rôle que chacun joue dans tout cela, mais j'aime ce projet de loi et j'aimerais qu'il soit soumis au Sénat, parce que si l'on n'essaie rien, on n'arrivera à rien. Nous n'arriverons jamais à changer quoi que ce soit si nous restons dans les tranchées et que nous avons peur de faire quoi que ce soit parce que ce pourrait être non constitutionnel. Nous avons entendu des témoins défendre les deux positions.

Je crois donc que nous devrions laisser ce projet de loi suivre son cours. Je ne crois pas que nous devrions essayer d'influencer le débat sur le parquet. Je pense que le rapport et le projet de loi devraient faire l'objet d'un débat à part entière, question de montrer que nous essayons vraiment de modifier cette institution.

[Français]

La sénatrice Ringuette : Même si je ne suis pas membre permanente de ce comité, soyez assurés que je lis avec beaucoup d'intérêt toutes les délibérations qui sont envoyées à mon bureau par le greffier.

En premier lieu, j'aimerais souligner que, n'eût été du sénateur Mercer et de sa persévérance quant à l'élection du Président du Sénat, je doute que le Comité spécial sur la modernisation du Sénat ait porté attention à cet élément. Je tiens à féliciter le sénateur Mercer pour sa persévérance à inclure l'élection de notre Président dans le processus de modernisation de notre institution. Je suis tout à fait d'accord avec ceux qui appuient l'idée que l'ensemble des sénateurs doivent avoir l'occasion de débattre des deux propositions et de voter sur celles-ci dans une Chambre tout à fait démocratique.

Je crois que, d'ici peu, les vœux du sénateur Mercer quant à l'élection de notre présidence seront exaucés. Il y a aussi la voie intérimaire, comme le suggère le sixième rapport du Comité spécial sur la modernisation du Sénat, concernant l'élection de cinq noms à inscrire sur une liste destinée à être envoyée au premier ministre qui, en consultation avec le gouverneur général, fera ses devoirs. Je maintiens que nous devrions envoyer, pour débat et vote, le projet de loi que nous avons devant nous sans amendement.

La sénatrice Dupuis : Je suis tout à fait d'accord à ce qu'on renvoie, pour discussion, les deux options, soit le rapport du comité et le projet de loi qui est devant nous. Je suis consciente que nous avons reçu l'avis d'experts constitutionnels. Toutefois, une chose m'a frappée. Dans les délibérations auxquelles j'ai assisté depuis que j'ai été nommée membre du comité, il n'y a pas eu de grandes discussions sur l'article 2 du projet de loi, qui traite du mécanisme du vote au Sénat qui changerait radicalement. En ce sens, je crois que tout le monde devrait avoir l'occasion de participer au débat en Chambre.

Le sénateur Forest : Il est clair que la lettre et l'esprit des objectifs que nous visons sont inclus dans le cadre de cette proposition législative. J'adhère à l'idée d'avoir au Sénat une autonomie plus grande quant à la participation ou à l'élection du Président de la Chambre. Je ne suis pas constitutionnaliste, mais si on tient un vote article par article, je dois vous avouer que l'article 1 me pose un sérieux problème. Je serais d'accord à ce qu'on soumette les deux scénarios à la Chambre, soit la proposition incluse dans le sixième rapport du Comité spécial sur la modernisation du Sénat et la proposition du projet de loi S-213. Ce faisant, nous poursuivons notre objectif que ce soit la Chambre dans son ensemble qui procède à l'élection, ou sous une forme de recommandation. Il serait donc cohérent de procéder ainsi.

Ce qui m'inquiète un peu, depuis que je suis ici, c'est l'habitude que nous avons de reporter les articles à l'ordre du jour. Si on veut arriver à une certaine modernisation et faire avancer les choses, il faudra un jour prendre des décisions et statuer sur des positions. Paris ne s'est pas bâtie en un jour, mais à un moment donné, il faut faire un pas. Si on choisit l'option de présenter à l'ensemble des collègues en Chambre l'un des deux scénarios, soit celui du projet de loi S-213 ou ce qui est recommandé dans le sixième rapport, éventuellement, on finira par statuer sur cette question. Cependant, peut-être n'ai-je pas acquis suffisamment de patience, étant donné ma jeunesse en cette institution, mais je trouve qu'on reporte allègrement beaucoup de décisions.

La sénatrice Gagné : Je fais écho aux propos des autres sénateurs quant au mérite du projet de loi. Je parle de mérite, parce qu'il est important de se poser la question sous différentes perspectives. Cela nous permet d'élargir le débat autour d'une question d'importance, soit celle de se doter d'une capacité à choisir notre Président.

Ayant participé au débat, lors de la présentation des témoins, je me rends compte que le projet de loi devrait être amélioré, ou bien on devrait s'y prendre d'une autre façon pour participer à la nomination d'un Président. Je souscris aux propos du sénateur Tkachuk selon lesquels il est important que ce débat se tienne au Sénat.

J'aimerais ajouter un autre élément. Comment pouvons-nous organiser le débat autour de ce projet de loi et du rapport, de sorte que nous soyons en mesure de trouver un fil conducteur quant à la question du Président du Sénat. C'est une question que je pose.

[Traduction]

Le vice-président : Y a-t-il d'autres sénateurs qui souhaitent intervenir?

Je vous fais un résumé. Il y a trois options. La première est de faire rapport du projet de loi sans amendements. La seconde est de faire rapport du projet de loi modifié. La troisième est de recommander que le projet de loi ne soit pas adopté pour des raisons constitutionnelles, mais cela n'empêcherait en rien le Sénat de discuter du projet de loi et des considérations constitutionnelles. Le Sénat pourra prendre la décision qu'il veut sur le rapport du comité, compte tenu qu'il a déjà la motion proposant le sixième rapport du comité, qui porte évidemment sur la recommandation faite précédemment par le comité.

[Français]

La sénatrice Dupuis : J'ai une question de clarification sur chacune des options. Je veux être certaine de bien comprendre. Si on fait rapport sans amendement, fait-on rapport du fait qu'on ne s'est pas prononcé en faveur du projet de loi, mais qu'on fait rapport sans l'avoir amendé?

Le vice-président : Si nous faisons rapport du projet de loi sans amendement, je dois soumettre le projet de loi au vote article par article. Par conséquent, si le projet de loi est adopté dans ce contexte, il est référé au Sénat comme ayant été adopté par le comité. À ce moment-là, évidemment, le projet de loi est présenté à l'étape de la troisième lecture au Sénat.

[Traduction]

La sénatrice McCoy : Je m'excuse, mais je suis un peu confuse.

Je dirai d'emblée que je crois que ce projet de loi devrait être renvoyé au Sénat pour qu'il en débatte. Je ne sais pas si quelqu'un a un amendement à proposer ici. Le cas échéant, je serais contente que nous l'examinions, que nous nous prononcions par vote, puis que nous renvoyions le projet de loi modifié au Sénat, mais quoi qu'il en soit, je crois que le comité devrait faire rapport au Sénat du projet de loi avec ou sans amendements, parce que je suis d'accord avec ceux et celles qui ont dit que tous les sénateurs devraient avoir l'occasion de se prononcer sur ce projet de loi.

Cela dit, pour que vous ayez une idée de ma position, je crois que pour ce faire, nous devons procéder à l'étude article par article du projet de loi. Comment pouvons-nous la commencer? Je suis un peu confuse quant à l'ordre du jour d'aujourd'hui.

Le vice-président : Je suis désolé que vous n'étiez pas là pendant mon mot d'introduction.

La sénatrice McCoy : Je vous écoutais de l'autre côté de la porte.

Le vice-président : J'ai rappelé aux honorables sénateurs qu'il y a trois options qui se présentent au comité. La première consisterait à faire rapport du projet de loi sans amendement. Si c'est ce que nous choisissons de faire, nous devrons adopter le projet de loi lors de l'étude article par article.

La deuxième option serait d'apporter des amendements au projet de loi, puis de l'adopter. Le président soumettrait alors chaque article du projet de loi au comité, et les honorables sénateurs qui ont des amendements à proposer pourraient le faire, après quoi nous nous prononcerions par vote. Nous voterions ensuite sur chaque article, puis le président serait instruit de faire rapport du projet de loi modifié au Sénat.

La troisième option serait de recommander, sur la base des témoignages que nous avons recueillis d'experts qui ont soulevé des doutes constitutionnels inhérents au projet de loi, de ne pas adopter ce projet de loi pour des raisons constitutionnelles.

La sénatrice McCoy : Est-ce la question que vous nous soumettez, monsieur le président?

Le vice-président : Non, ce n'est pas la question que je vous soumets. Nous avons fait un tour de table pour avoir une idée du consensus qui se dégagerait avant que je ne vous soumette le projet de loi et son premier article. Cet échange de points de vue visait à essayer de trouver un consensus. C'est ce que la présidence a fait jusqu'ici.

Est-ce que cela répond à votre question, sénatrice?

La sénatrice McCoy : Quelle est la prochaine étape, monsieur le président?

Le vice-président : La prochaine étape consiste à faire un tour de table pour essayer de parvenir à un consensus concernant les trois options que je vous ai exposées.

Le sénateur Greene : Je serais en faveur de la première option, mais j'y annexerais des observations, et celles-ci porteraient sur les enjeux constitutionnels qui soulèvent des doutes.

J'aimerais également que nous ajoutions quelque chose pour rappeler l'intention du comité, qui est présentée essentiellement dans le rapport numéro six sur la modernisation.

Avec ce genre d'observations, je préférerais la première option.

Le vice-président : C'est une position très claire.

La sénatrice Ringuette : Le sénateur Greene vient d'exprimer ce que je souhaite, c'est-à-dire que si nous effectuons l'étude article par article, le comité pourrait inclure des observations à son rapport. Je pense que cela viendrait clarifier la position actuelle du comité.

Le vice-président : Merci.

Y a-t-il d'autres observations?

[Français]

La sénatrice Dupuis : Merci de m'aider à comprendre le processus à suivre lors des séances des comités du Sénat. J'aimerais obtenir un autre éclaircissement, si vous me le permettez.

La troisième option vise-t-elle à faire rapport du fait que le projet de loi ne devrait pas être étudié au Sénat?

Le vice-président : Non, pas du tout.

La sénatrice Dupuis : Est-ce qu'on veut dire alors, dans la troisième option, que nous avons décidé de ne pas procéder à l'étude article par article du projet de loi au sein du comité pour diverses raisons, telles les observations du sénateur Greene et d'autres raisons qui concernent la constitutionnalité du projet de loi; s'agit-il bien là de la troisième option?

Le vice-président : Exactement.

La sénatrice Dupuis : C'est parfait, alors mon choix s'arrête sur la troisième option.

[Traduction]

Le vice-président : Les honorables sénateurs ont-ils d'autres observations à faire?

[Français]

Le sénateur Forest : Il nous faut faire preuve d'une certaine cohérence en ce qui a trait à notre démarche. Pour faire preuve de cohérence, selon moi, si l'étude article par article du projet de loi S-213 est à l'ordre du jour du comité et que nous désirons porter le débat entourant ce projet de loi à l'attention de l'ensemble du Sénat, il nous faut l'adopter tel quel, article par article, parce qu'il faut le faire selon nos règles.

Il faut se rappeler — c'est une question de cohérence — que l'ensemble du Comité spécial sur la modernisation a tout de même adopté le sixième rapport qui faisait état d'une autre avenue pour cheminer vers une plus grande autonomie quant à la nomination du Président du Sénat.

En somme, si nous ne voulons pas être incohérents, le comité devrait procéder à l'adoption article par article du projet de loi comme tel et en faire rapport au Sénat. C'est pertinent, selon certains commentaires qui ont été émis quant à certaines préoccupations, et il ne faut pas oublier que nous avons procédé, au préalable, à l'analyse, à la discussion et à l'adoption du sixième rapport qui, lui, privilégiait une autre voie.

Selon moi, il faut interpeller nos collègues de l'ensemble du Sénat en faisant valoir que l'objectif ultime est d'obtenir une plus grande autonomie quant à la nomination du Président du Sénat. Dans cet esprit, nous disposons du sixième rapport du Comité spécial sur la modernisation d'un côté, et nous disposons, de l'autre côté, du projet de loi S-213 qu'a proposé un éminent collègue. Nous disposons donc de ces deux choix.

La sénatrice Bellemare : Je commence à être un peu mélangée parmi nos options. Après avoir entendu les arguments énoncés aujourd'hui, je tiens à remercier le sénateur Mercer pour tout le travail qu'il a effectué sur cette question.

Cela dit, nous avons au préalable accompli des travaux au sein du comité et nous avons produit un sixième rapport. Ces travaux se sont effectués — il faut bien le dire — sous la contrainte que nos recommandations ne devaient pas soulever de changements constitutionnels. C'était là le mandat de notre comité, et nous nous sommes même demandé pourquoi cette étude avait été renvoyée au comité, puisque nous sommes censés faire notre réflexion en fonction du contexte constitutionnel actuel.

Je suis très favorable au projet de loi S-213, mais en même temps, je me sens mal à l'aise de procéder à son étude article par article pour ensuite le présenter au Sénat afin d'en débattre. Je me sens mal à l'aise de faire cela. Il faut trouver une façon de présenter le projet de loi à l'ensemble du Sénat, en soulignant tout le travail qui a été fait par le sénateur Mercer, et en disant qu'on en appuie généralement les grands principes, mais que, dans le détail de l'étude article par article, nous avons fait des travaux qui ont abouti au sixième rapport du comité.

Dans ce contexte, nous renvoyons le projet de loi à l'ensemble de la Chambre et nous faisons rapport de ce que nous avons entendu de la part des experts qui sont venus se prononcer. Ce serait donc plutôt la troisième option que je privilégierais.

[Traduction]

La sénatrice McCoy : Je suis à peu près du même avis, sauf que je n'en tire pas la même conclusion. Techniquement, voici ce qui se passe. Le Sénat du Canada, soit l'ensemble des sénateurs, a adopté un ordre de renvoi afin de créer ce comité spécial et nous a donné le mandat de lui faire des recommandations pour moderniser le Sénat sans modifier la Loi constitutionnelle. Nous avons respecté ce mandat et publié notre premier rapport.

Le comité a ensuite reçu un ordre de renvoi totalement séparé concernant l'étude du projet de loi S-213. C'est ce que nous faisons aujourd'hui. Techniquement, il n'y a pas d'incohérence dans ce que nous faisons.

Qui sait ce que nous aurions pu dire dans notre premier rapport sur la présidence si nous n'avions pas été contraints par l'ordre de renvoi adopté par le Sénat de respecter la Loi constitutionnelle existante, et c'est ce que nous avons fait, en exerçant la plus grande prudence. Je ne vois donc pas de conflit là. Ce sont deux voies différentes.

Il est rare qu'un comité tue un projet de loi. Je crois que cette question suscite suffisamment d'intérêt pour que les 100 sénateurs — il y a cinq postes vacants en ce moment — aient la chance d'entendre la discussion générale sur le sujet. Pour cela, nous devons effectuer l'étude article par article du projet de loi, n'y apporter aucun amendement, en faire rapport au Sénat, puis en arriver à l'étape de la troisième lecture, qui permettrait un débat en profondeur à la chambre.

[Français]

Le sénateur Cormier : D'abord, j'aimerais vous remercier de votre accueil. Je remplace le sénateur Dean aujourd'hui. J'aimerais savoir comment se dérouleront les débats en Chambre si on adopte le projet de loi article par article ou si on renvoie le projet de loi sans en faire l'étude article par article. Comment cela se traduira-t-il en Chambre sur le plan du débat?

Le vice-président : Le débat est ouvert à tous les sénateurs qui souhaitent débattre de l'ensemble du projet de loi ou d'un aspect ou de l'autre du projet de loi. Les sénateurs, individuellement, peuvent proposer un amendement si une disposition ne leur convient pas. Ils peuvent également ajouter une précision au projet de loi pour en faciliter la compréhension. Le débat n'a pas de limite.

Une fois que le comité a fait rapport, le Sénat procède comme il l'entend. Par conséquent, l'objet du rapport, soit le projet de loi S-213, est également présenté au Sénat. Les sénateurs doivent donc intervenir selon ce qui leur est à propos. Il n'y a pas lieu, de quelque manière que ce soit, d'imposer aux sénateurs de ne plus débattre du texte de loi S-213 si le comité souligne dans son rapport qu'il ne peut pas l'adopter en raison de questions constitutionnelles. Le Sénat peut tout à fait prendre une autre décision majoritaire.

Le sénateur Cormier : Merci de ces précisions, monsieur le vice-président.

La sénatrice Bellemare : J'ai une question liée à ce que je viens d'entendre quant à l'expression « tuer le projet de loi ». Ce sont là de grands mots. Personne n'a l'intention de « tuer le projet de loi ». S'il faut l'examiner article par article pour ne pas le « tuer », on le fera, mais s'il y a une autre avenue, comme celle de le soumettre à l'ensemble de la Chambre pour qu'il fasse l'objet d'un débat...moi, c'est ainsi que je l'ai compris.

Le sénateur Cormier : C'est pour cela que je le proposais.

La sénatrice Bellemare : Ce que je comprends, c'est qu'on aimerait en débattre en Chambre, sans toutefois le rejeter ni le voter. C'est un peu cela. Cependant, on ne veut pas le « tuer ».

Le vice-président : Non, je crois qu'il n'y a aucune intention d'empêcher la Chambre de débattre du projet de loi sur la base du rapport du comité. Le Sénat peut disposer, en toute liberté, du rapport du comité et rouvrir le débat à tous les niveaux. Il n'y a aucun doute là-dessus.

[Traduction]

Le sénateur Tkachuk : J'opterais pour qu'on en fasse l'étude article par article, qu'on fasse des observations, puis qu'on laisse la discussion se poursuivre.

Le vice-président : Il est proposé par le sénateur Tkachuk que le comité procède à l'étude article par article du projet de loi S-213.

Est-ce convenu, honorables sénateurs?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : Êtes-vous d'accord pour suspendre l'adoption du titre?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : L'article 1 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : L'article 2 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : L'article 3 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : L'article 4 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : L'article 5 est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : Le titre est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D'accord.

Des voix : Avec dissidence.

Le vice-président : Avec dissidence.

Je tiens à ce que mon vote soit consigné au compte rendu. J'aimerais qu'il soit inscrit que je m'y oppose, personnellement. Honorables sénateurs, je l'ai dit après que vous ayez tous voté.

Le sénateur Tkachuk : Vous exprimez votre dissidence?

Le vice-président : Oui.

Une voix : J'ai moi aussi exprimé ma dissidence.

Le vice-président : Est-ce que le comité veut annexer des observations au rapport?

Des voix : Oui.

Le vice-président : J'attends vos propositions pour ces observations.

Le sénateur Greene : J'en ai deux. J'aimerais d'abord que nous exprimions notre intérêt et nos doutes quant à la constitutionnalité du projet de loi — et je n'en proposerai pas le libellé exact. La deuxième viserait à rappeler au Sénat l'existence de notre sixième rapport sur la modernisation, qui expose notre intention que les sénateurs participent au choix de la présidence.

Le sénateur Tkachuk : J'aimerais ajouter une troisième observation.

Le vice-président : Je dois vous donner la parole, sénateur Tkachuk, pour le compte rendu du comité, afin que votre intervention apparaisse sous votre nom.

Oui, sénateur Tkachuk?

Le sénateur Tkachuk : Nous devrions souligner que nous sommes tous d'accord pour dire que cette question devrait faire l'objet d'un débat au Sénat en assemblée plénière et que notre appui ne signifie pas que nous approuvons nécessairement l'idée que ce projet de loi soit adopté à la majorité au Sénat, mais que nous croyons qu'il doit faire l'objet d'un débat au Sénat.

Le vice-président : Ce sera souligné. M. Spano, de la Bibliothèque du Parlement, a pris note de vos observations, sénateur Tkachuk.

La sénatrice Ringuette : J'aimerais appuyer les trois observations qui ont été faites.

Le vice-président : J'en comprends qu'il y a consensus autour de la table sur ces observations.

[Français]

La sénatrice Dupuis : J'aimerais qu'on répète la troisième option. Si le texte de loi doit être débattu au Sénat, ce n'est pas une indication que les gens sont d'accord avec le contenu du projet de loi.

[Traduction]

Le sénateur Tkachuk : Exactement.

Le vice-président : C'est essentiellement ce que disait le sénateur Tkachuk.

Le sénateur Mercer : Je tiens à vous remercier pour votre participation au débat.

Le vice-président : Je n'ai pas encore été autorisé à faire rapport du projet de loi, alors il vaudrait mieux attendre que je pose la question au comité, sénateur Mercer.

Mais tout d'abord, y a-t-il d'autres observations?

[Français]

La sénatrice Gagné : Peut-on ajouter une observation sur l'organisation du débat entourant la nomination? Pour reprendre les propos du sénateur Greene, on a une observation par rapport au projet de loi et au sixième rapport. Comment peut-on organiser le débat autour du même sujet?

[Traduction]

Le vice-président : Comme on le dit dans le langage juridique, cela pourrait être ultra petita, ce qui signifie que cela dépasserait la portée de notre mandat.

Une fois que le Sénat est saisi du projet de loi, il peut en faire ce qu'il veut, et n'importe quel sénateur peut se lever et proposer une façon d'organiser les débats. On pourra donc procéder différemment dans le cas de ce projet de loi. Pour l'instant, je pense que cela irait au-delà de notre mandat de recommander la façon dont se déroulera le débat au Sénat.

Y a-t-il d'autres observations?

Puis-je avoir une motion visant à demander au comité directeur de rédiger les observations à la lumière des trois points proposés par les sénateurs, de sorte que le président puisse en faire rapport?

Le sénateur McIntyre en fait la proposition, appuyé par le sénateur Forest.

Êtes-vous d'accord pour que je fasse rapport de ce projet de loi au Sénat?

Des voix : D'accord.

Le vice-président : Merci, honorables sénateurs.

Je cède maintenant la parole au sénateur Mercer.

Le sénateur Mercer : Chers collègues, j'aimerais tous vous remercier de votre participation au débat. Je suis impatient de tenir ce débat au Sénat.

Il s'agit d'un projet de loi important. Je suis sûr que les médias parleront de « cuisine interne », parce qu'il est question de nous-mêmes. La restriction imposée au comité par le Sénat sur le fait d'exclure de nos délibérations les questions de constitutionnalité, selon moi, est une occasion pour nous de contourner ce problème. Je n'aurai pas cette discussion de nouveau lorsque le projet de loi sera renvoyé au Sénat.

J'apprécie énormément la sincérité des opinions exprimées durant ce débat, et je m'attends à une discussion encore plus animée à l'étape de la troisième lecture.

Le vice-président : Le greffier vient de me signaler quelque chose. On veut que le rapport soit déposé le plus rapidement possible, et compte tenu de l'absence du sénateur McInnis et du fait qu'il n'aura pas participé aux échanges de ce matin, pourrais-je demander aux sénateurs conservateurs de nous dire quel sénateur pourrait siéger temporairement au comité directeur qui examinera les observations qui seront annexées au rapport? Je regarde le sénateur Greene, mais je ne voudrais pas désigner de sénateurs conservateurs.

Le sénateur Greene : J'en serais ravi.

La sénatrice McCoy : Nous pourrions également transmettre l'ébauche au sénateur Tkachuk une fois qu'elle sera rédigée, pour nous assurer d'avoir bien saisi l'essentiel de ses propos.

Le vice-président : Je n'y vois pas d'inconvénient.

Je vous remercie, honorables sénateurs, pour vos suggestions et votre accord.

(La séance est levée.)

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