Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Pêches et des océans
Fascicule nº 45 - Témoignages du 9 mai 2019
OTTAWA, le jeudi 9 mai 2019
Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, auquel est renvoyé le projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence, se réunit aujourd’hui, à 8 h 4, pour étudier le projet de loi.
Le sénateur Fabian Manning (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour. Je m’appelle Fabian Manning, et je suis un sénateur de Terre-Neuve-et-Labrador. Je suis heureux de présider le comité. Avant de céder la parole à nos témoins, j’aimerais inviter les sénateurs du comité à se présenter.
Le sénateur McInnis : Thomas McInnis, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Wells : David Wells, de Terre-Neuve-et-Labrabor.
[Français]
La sénatrice Poirier : Rose-May Poirier, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le sénateur Christmas : Dan Christmas, de la Nouvelle-Écosse.
Le sénateur Francis : Brian Francis, de l’Île-du-Prince-Édouard.
La sénatrice Busson : Bev Busson, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Gold : Marc Gold, du Québec.
Le président : Merci.
Ce matin, le comité poursuit son étude du projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence. Nous sommes heureux d’accueillir notre groupe de témoins ce matin. Je demanderais aux témoins de se présenter.
Melanie Sonnenberg, présidente, Fédération des pêcheurs indépendants du Canada : Bonjour. Je vis sur l’île Grand Manan dans la baie de Fundy. C’est une petite collectivité de pêche au Nouveau-Brunswick.
Ian MacPherson, directeur exécutif, P.E.I. Fishermen’s Association Ltd, Fédération des pêcheurs indépendants du Canada : Bonjour. Je suis ici pour aider Melanie ce matin.
Paul Lansbergen, président, Conseil canadien des pêches : Bonjour. Mon organisation est établie à Ottawa.
Le président : Je tiens à vous remercier tous de vous joindre à nous ce matin. Je vous prie de présenter votre déclaration liminaire, madame Sonnenberg.
Mme Sonnenberg : Merci de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui au nom de la Fédération des pêcheurs indépendants du Canada. Nos organisations membres représentent plus de 14 000 entreprises de propriétaires-exploitants indépendants qui pêchent la plupart des homards, des crabes, des saumons sauvages, des crevettes et des poissons de fond du Canada. Ensemble, nous produisons plus de 3 milliards de dollars de la valeur au débarquement, générant plus de 5 millions de dollars d’exportations. Fortes de 30 000 travailleurs d’équipage, les flottilles de propriétaires-exploitants indépendants forment la plus importante source d’emplois du secteur privé dans de nombreuses régions côtières.
Une liste des organisations membres de notre fédération est annexée au document que nous avons distribué plus tôt.
Le président : Excusez-moi, madame Sonnenberg. Les interprètes vous demandent de ralentir un peu. Cela m’arrive à moi aussi.
Mme Sonnenberg : Je savais que cela allait arriver. Je suis toujours pressée d’en arriver aux questions.
La pêche a toujours été synonyme de dur labeur dans un environnement difficile, et les pêcheurs n’ont pas toujours bien gagné leur vie. Toutefois, au fil des ans, les organisations de pêcheurs ont travaillé consciencieusement afin de conserver et de protéger nos stocks de poisson, d’améliorer la sécurité et d’instaurer un système de cogestion qui donne aux pêcheurs une voix forte dans le processus décisionnel et une participation dans le succès global de notre industrie.
Dans la région de l’Atlantique, le contrôle sur les droits de pêche de stocks de poisson contigus demeure en grande partie entre les mains de petites entreprises communautaires indépendantes, avec comme résultat une hausse, depuis une dizaine d’années, de la demande mondiale pour nos produits de la mer, ce qui a permis d’assurer de bons revenus dignes de la classe moyenne et un nouveau vent d’optimisme dans nos collectivités. Il nous reste toujours des défis à relever pour gérer nos pêches de façon durable et renouveler une main-d’œuvre vieillissante, mais nous le faisons en sachant que l’avenir de notre industrie est maintenant prometteur.
En Colombie-Britannique, les politiques de délivrance des permis du MPO permettent à une forte proportion de pêcheurs retraités, d’entreprises de transformation du poisson et d’investisseurs étrangers de détenir des droits d’accès à la pêche. Ce marché ouvert non réglementé a fait grimper le prix des permis et des quotas de pêche, les rendant inabordables pour les pêcheurs actifs. Simplement pour rester en affaires, de nombreux propriétaires d’entreprise paient maintenant jusqu’à 80 p. 100 de leurs revenus bruts provenant de la pêche pour louer des permis et des quotas.
La fédération a été fondée en 2012 pour faire pression en faveur de politiques qui protègent les pêcheurs indépendants dans les collectivités côtières de toutes les régions de pêche du Canada. Pour le Canada atlantique, on s’est employé à défendre et à renforcer trois politiques qui ont été essentielles à la durabilité des entreprises de propriétaires-exploitants indépendants.
Premièrement, la politique de séparation de la flottille, en place depuis 1979, interdit aux usines de transformation du poisson et à d’autres intérêts qui ne font pas partie de l’industrie des pêches de détenir ou de contrôler des permis de pêche dans les flottilles côtières et semi-hauturières.
Deuxièmement, la politique du propriétaire-exploitant de 1989 oblige les titulaires de permis de ces flottes à se trouver à bord des navires qui pêchent leurs quotas.
Troisièmement, la préservation de l’indépendance de la flottille de pêche côtière dans l’Atlantique canadien, une politique souvent désignée sous le nom de PIFPCAC, est entrée en vigueur en 2007 précisément pour éliminer les violations des politiques du propriétaire-exploitant et de séparation de la flottille.
Ces trois politiques ont été l’objet d’attaques constantes. Le secteur des entreprises a exercé des pressions vigoureuses pour que l’on apporte des changements aux politiques qui permettent une plus grande intégration verticale, et des entreprises et d’autres investisseurs ont utilisé des ententes de contrôle pour prendre possession des permis et des quotas. Les entreprises ont aussi mené des poursuites devant les tribunaux relativement au pouvoir du ministre de faire appliquer les politiques du propriétaire-exploitant et de séparation de la flottille.
Pour enchâsser davantage ces politiques et éliminer toute ambiguïté juridique, la fédération a pressé les ministres fédéraux successifs du MPO de les intégrer dans la Loi sur les pêches du Canada et son règlement.
Par conséquent, nous appuyons fermement le projet de loi C-68 et remercions le ministre LeBlanc et le ministre Wilkinson d’avoir répondu aux préoccupations et aux aspirations de l’industrie. Le projet de loi C-68 comporte de nombreux éléments que nos membres soutiennent, mais nous nous concentrerons sur l’article 2.5 proposé du projet de loi, qui donne au ministre le pouvoir clair de prendre en considération les facteurs sociaux, économiques et culturels, et la préservation ou la promotion de l’indépendance des titulaires de licences ou de permis dans le cadre des pêches côtières commerciales dans les décisions relatives à la gestion des pêches. Nous accueillons très favorablement ce libellé, en plus du paragraphe 43(1) de la loi, qui affirme le pouvoir du ministre de prendre des règlements concernant la gestion et la surveillance judicieuses des pêches en eaux côtières et internes, notamment à des fins sociales, économiques et culturelles.
Une fois le projet de loi C-68 adopté, ces dispositions établiront clairement dans la loi le pouvoir du ministre de faire appliquer les politiques du propriétaire-exploitant et de séparation de la flottille et d’élaborer des protections parallèles pour les flottilles de la région du Pacifique, de sorte que les collectivités côtières et autochtones de la Colombie-Britannique puissent profiter des retombées des ressources océaniques que nous voyons de plus en plus dans le Canada atlantique.
En ce qui a trait à la dernière question, nous savons que le comité a entendu des arguments du secteur des entreprises selon lesquelles le système de délivrance des permis en Colombie-Britannique est trop enchâssé et complexe pour être changé, qu’il n’est pas possible de revenir en arrière. Nous n’admettons pas ce point de vue. Des mesures justes et pratiques doivent être prises pour reconstruire les flottilles de propriétaires-exploitants. Prenez par exemple le témoignage suivant fourni au comité de la Chambre des communes par Jonathan Hunter, un pêcheur prospère de la Colombie-Britannique : nous devons revenir à une méthode de pêche axée davantage sur le propriétaire-exploitant ou, comme notre homologue en Alaska le dit, sur les gens qui travaillent sur les bateaux.
Comment instituons-nous ce changement de méthode? Je propose quelques choses. D’abord, empêchez tout nouveau pêcheur de salon d’acquérir de nouveaux quotas. Ensuite, si un pêcheur n’a pas participé activement à l’avenir de la pêche au bout de trois ans, et on pourrait débattre de ce chiffre, il commencera à perdre un pourcentage de ce quota chaque année, et celui-ci sera remis au total autorisé des captures qui sera partagé entre les pêcheurs actifs. L’Alaska peut appliquer le droit d’accès aux gens qui travaillent sur les bateaux, et il n’y a aucune raison pour laquelle le Canada ne peut pas faire la même chose. Ce n’est qu’une parmi plusieurs approches réalisables que les pêcheurs ont recensées.
Nous sommes ravis de voir que ce point de vue est reflété dans le rapport du Comité permanent des pêches et des océans « Les pêches sur la côte Ouest : Partager les risques et les retombées » déposé plus tôt cette semaine. Nous sommes convaincus que le ministre et les intervenants de l’industrie chercheront ensemble à élaborer des stratégies justes et applicables pour reconstruire les flottilles des propriétaires-exploitants et renverser les tendances socioéconomiques très négatives que nous constatons maintenant dans les pêches de la Colombie-Britannique.
Nous pressons le comité sénatorial d’envoyer un message fort et clair au ministre du MPO selon lequel des mesures immédiates devraient être prises, avec l’entière collaboration des intervenants de l’industrie, pour mettre en œuvre les recommandations du rapport produit par le Comité permanent des pêches et des océans. Ces recommandations procureront des protections appropriées, au chapitre du propriétaire-exploitant et de la séparation des flottilles, aux flottilles de pêche de la région du Pacifique.
Enfin, le temps presse. La présente législature manquera bientôt de temps pour achever son programme législatif, et le projet de loi C-68 pourrait mourir au Feuilleton. Après avoir lutté pendant de nombreuses années pour faire inscrire les politiques du propriétaire-exploitant et de la séparation des flottilles dans la loi et le règlement, nous estimons que cela représenterait un recul énorme et un dur coup pour la durabilité de notre industrie communautaire indépendante. Je vous remercie de nouveau de m’avoir donné l’occasion de comparaître aujourd’hui.
Le président : Merci, madame Sonnenberg.
M. Lansbergen : Merci de m’avoir invité à témoigner aujourd’hui. Je m’excuse de ne pas être là. Comme je l’ai dit au début, je suis établi à Ottawa, mais je suis cette semaine à Bruxelles pour l’exposition mondiale des produits de la mer.
Le projet de loi C-68 représente une modification importante de la Loi sur les pêches et il aura des répercussions durables pour le secteur et la santé de nos océans et de nos ressources halieutiques. Avant de présenter mes commentaires précis, j’aimerais prendre quelques minutes pour donner un peu le contexte du conseil, du secteur et de la réalité politique de notre fonctionnement actuel. Comme vous vous souviendrez peut-être de mon témoignage devant le comité en février sur le projet de loi C-55, le Conseil canadien des pêches est le porte-parole national des pêches commerciales au Canada. Nos entreprises membres, des usines de transformation, sont de petites, moyennes et grandes entreprises, de même que des entreprises autochtones qui récoltent le poisson dans les trois océans du Canada.
Il convient aussi de souligner que la plus grande partie de notre industrie exerce des activités dans des collectivités côtières rurales et éloignées et que les pêches sont le cœur économique de ces collectivités. La loi et le règlement touchant les pêches doivent lancer un signal politique clair qui soutient la conservation, mais aussi les investissements dans les collectivités dont l’économie repose sur les pêches. C’est ce qui permettra d’établir les conditions qui favoriseront la prospérité des collectivités éloignées.
Avant de passer à mes autres observations, j’aimerais souligner que le Canada est un chef de file mondial dans la gestion durable des pêches. Les deux tiers de notre production de fruits de mer sauvages sont certifiés par le Marine Stewardship Council. C’est un énorme contraste avec les 14 p. 100 à peine des pêches mondiales qui sont certifiées. Nous soutenons 80 000 emplois directs, principalement dans les collectivités côtières et rurales, et cela représente 7 milliards de dollars d’exportations dans plus de 130 pays. Les plus grands marchés d’exportation sont les États-Unis, la Chine, l’Europe et le Japon. Le conseil cherche à tirer des avantages créés par les récents accords de libre-échange, comme l’AECG, et à entretenir ses fortes relations avec ses consommateurs de partout dans le monde, ce qui est essentiel à son succès.
L’augmentation de la demande mondiale de protéines, y compris de poissons et de fruits de mer, signale l’augmentation de la croissance dans les marchés asiatiques et ailleurs. En plus des débouchés commerciaux, nous avons des possibilités d’obtenir une plus grande valeur de ce que nous pêchons aujourd’hui. Une étude de 2017 a révélé que le secteur perd annuellement 600 millions de dollars de revenus supplémentaires. Et ces possibilités de croissance représentent un contexte important pour mes commentaires d’aujourd’hui. La question de politique la plus importante à laquelle le secteur fait face est une préoccupation d’accès stable aux ressources de pêche. Le retrait de permis et de quotas de longue date ne respecte pas les investissements passés, a érodé la confiance du secteur envers les investissements et pourrait miner les efforts de conservation. Ce n’est pas une question qui touche une seule partie du secteur, et ce, pour deux raisons. La préoccupation est répandue, et la chaîne d’approvisionnement est très interdépendante. Par exemple, les pêcheurs comptent sur leur usine de transformation locale pour acheter leurs prises afin d’apporter leurs produits sur le marché.
Comme je l’ai mentionné il y a un instant, nous devons profiter des possibilités de croissance pour accélérer les investissements afin d’extraire une valeur accrue de ce que nous pêchons et traitons. Une bonne partie de tout cela ne sera réalisable qu’au moyen d’investissements dans les nouvelles technologies et pratiques. Cette possibilité et d’autres possibilités de croissance ne pourront être atteintes en l’absence d’un cadre stratégique clair et stable. Malheureusement, cela fait actuellement défaut dans l’industrie de la pêche canadienne. Cette préoccupation crée aussi une lentille à travers laquelle nous examinons le projet de loi C-68 et la réglementation attendue en fonction de quoi le nouveau pouvoir est prévu par le projet de loi. Et compte tenu de la nature habilitante du projet de loi, le conseil se garde de juger le projet de loi dans l’attente de l’élaboration de quelque 15 règlements qui sont autorisés par le projet de loi. Il faudra jusqu’à trois ans ou plus pour les achever.
J’aimerais mettre en évidence trois messages clés. Notre mémoire traite en détail des dispositions réglementaires et fournit un commentaire sur celles-ci. J’espère que vous l’avez reçu.
Le CCP voudrait que, sous la rubrique de l’objet de la loi, au nouvel article 2.1, on traite plus clairement de l’utilisation des pêches. Lors des consultations de 2017, nous avons soumis ce qui suit :
La notion d’« utilisation durable » est le principe implicite principal de la Loi sur les pêches depuis le tout début, et cette primauté doit être maintenue et renforcée dans toute loi révisée; il faut prendre soin de ne pas affaiblir cette primauté dans l’introduction ou le libellé d’autres principes ou objets, par exemple.
Il n’est pas évident que le projet de loi C-68 a atteint cet objectif. Le premier élément de l’objet, à l’alinéa 2.1a), « la gestion et la surveillance judicieuses des pêches », est très général. La jurisprudence indique clairement que le ministre peut prendre des décisions en fonction d’un large éventail de facteurs. Le libellé actuel du projet de loi ne parle pas de l’utilisation des pêches.
Le CCP propose un amendement à la disposition sur l’objet de la loi. Il ferait de l’utilisation durable des pêches le but premier de la loi; voici le libellé :
Remplacer l’article 2.1, à l’article 3, par ce qui suit :
Objet de la loi
2.1 L’objet de la loi est :
a) d’assurer l’utilisation durable des pêches;
b) de fournir un cadre pour;
(i) la gestion et la surveillance judicieuses des pêches;
(ii) la conservation et la protection de l’habitation, notamment par la prévention de la pollution.
Ce texte se trouve dans notre mémoire. Essentiellement, nous avons inséré un nouvel alinéa a) et nous avons déplacé le reste.
Maintenant, en ce qui concerne la participation des Autochtones et la cogestion, le projet de loi C-68 prévoit de nouveaux pouvoirs importants en matière de participation autochtone et de cogestion des pêches. Les accords de cogestion sont autorisés par le nouvel article 4.1 si les dispositions sont réputées avoir « un effet équivalent » à celles de la loi.
Toutefois, il n’existe actuellement aucun critère juridique portant sur l’équivalence dans ce contexte. De plus, ni la loi ni projet de loi ne précisent les facteurs dont le ministre ou le gouverneur en conseil doivent ou peuvent tenir compte pour déterminer si l’effet est équivalent. Cela s’applique en ce qui concerne l’équivalence de la disposition et son administration ou son application.
Ce qui est particulièrement préoccupant, c’est la possibilité que différents régimes de gestion s’appliquent à différentes pêches, ce qui pourrait nuire à la durabilité des ressources halieutiques. Dans l’affaire Ahousaht et al, en Colombie-Britannique, les négociations bilatérales sur ce que signifie en pratique le droit de pêche sont inacceptables. Le MPO ne représente pas les intérêts des autres participants du secteur, comme les pêches commerciales ou de loisir, et ces intérêts doivent être pris en compte.
Le CCP estime qu’il doit y avoir un processus clair qui encadre la participation d’autres intervenants touchés par les négociations de cogestion et un processus en place pour éviter une approche disparate de la gestion d’une ressource qui minerait la durabilité globale.
Dans la même affaire, le ministère public a affirmé dans son témoignage qu’il est disposé à recourir au programme de transfert des allocations et à l’Initiative des pêches commerciales intégrées du Pacifique pour accroître la participation des Autochtones aux pêches. De plus, la juge Humphries a déclaré :
Le Canada est d’avis que l’accès en vertu de l’IPCIP et du PTA est pertinent par rapport à l’accès accordé en vertu de ce droit, en particulier parce que la conciliation se fait par la renonciation volontaire à des permis par les pêcheurs commerciaux. Il n’est ni nécessaire ni utile pour les principes de réconciliation de passer à la renonciation involontaire à des permis par le secteur commercial.
Malheureusement, ce n’est pas l’approche qui a été adoptée pour la pêche à la mactre de Stimpson. L’absence de critères et de politiques clairs a créé un climat d’incertitude et d’instabilité dans la gestion des pêches. Le CCP croit fermement que le gouvernement doit adhérer à une politique de vente de gré à gré, comme il l’a toujours fait.
Mon troisième message concerne les nombreux règlements autorisés par le projet de loi. Les consultations ouvertes et transparentes sont essentielles à la réussite de l’exercice d’élaboration réglementaire. Des consultations sur trois instruments réglementaires en vertu du projet de loi ont été tenues jusqu’à maintenant, et on en attend plus d’une douzaine d’autres. Le CCP essaie de voir comment ces dispositions réglementaires peuvent contribuer à une plus grande stabilité de l’accès et, par conséquent, inspirer confiance pour investir et appuyer la conservation.
En même temps, le CCP fait des mises en garde quant à la capacité du gouvernement de prévoir l’évolution du secteur au fil du temps. Très franchement, je ne sais pas si quelqu’un peut le faire. La réglementation intelligente offrira la souplesse nécessaire pour tenir compte de l’évolution du secteur. Le CCP espère que ce projet de loi et les règlements qui en découleront fourniront un cadre stratégique clair et stable qui assurera au secteur des pêches une prospérité durable. Nous avons hâte de poursuivre le dialogue avec le gouvernement et les parlementaires sur les détails du projet de loi et des règlements qui suivront.
Sur ce, je suis prêt à répondre à vos questions.
Le président : Merci, monsieur Lansbergen, de votre déclaration liminaire. Nous allons maintenant passer à nos premières questions, à commencer par notre vice-président.
Le sénateur Gold : Je remercie les témoins d’être ici. J’ai deux questions : une pour Mme Sonnenberg, et une pour M. Lansbergen.
Madame Sonnenberg, vous avez exprimé dans le passé et ici aujourd’hui l’importance d’inscrire dans la loi, pas simplement dans les politiques, les politiques du propriétaire-exploitant et de séparation de la flottille. Un témoin du gouvernement nous a dit que ces politiques seront insérées dans les réglementations dans le cadre du processus. Nous avons reçu le mois dernier un certain nombre de témoins de l’industrie qui, à tout le moins, ont fait savoir qu’ils étaient à l’aise avec cette orientation et avec le fait que le gouvernement nous a fourni l’assurance que celles-ci seraient insérées dans les règlements. Ils ont fait remarquer qu’il y a du financement. Tout se joue dans les détails pour ce qui est de la mise en œuvre.
Je me demande si vous pourriez donner votre opinion sur le sujet. Êtes-vous satisfaite de l’orientation que prend le projet de loi pour intégrer ces politiques dans les règlements?
Mme Sonnenberg : Je travaille dans l’industrie de la pêche, pour mon association locale, depuis 1981. C’est une préoccupation pour l’industrie depuis que j’ai commencé à un très jeune âge, et les choses ont maintenant changé au fil du temps. Depuis mes débuts, c’est quelque chose que nous avons recherché.
Pour nous, c’est une énorme réalisation d’être arrivés jusqu’ici. C’est assez historique. Si le projet de loi est adopté, l’industrie sera extrêmement reconnaissante à quiconque a participé à son adoption, parce que nous en avons besoin. Nous avons besoin de ce mordant de plus dans la législation qui nous fournit la capacité de renforcer la position des propriétaires-exploitants.
C’est très clair pour nous. La fédération s’est rassemblée par rapport à ce point. C’est la seule chose que fait le groupe. Nous voulons nous assurer que c’est inscrit dans la loi et que nous pouvons compter sur un avenir pour nos propriétaires-exploitants indépendants.
J’espère que cela répond à la question.
Le sénateur Gold : Assurément. Merci beaucoup.
Monsieur Lansbergen, je suis heureux de vous revoir. Vous avez dit à quel point il est important que le secteur bénéficie d’un accès stable aux ressources de pêche et avez parlé de l’importance d’assurer une souplesse dans la législation pour que l’industrie puisse s’adapter aux circonstances changeantes, dont bon nombre sont très positives pour ce qui est de la croissance de la demande. Ma question comporte deux volets. D’abord, pouvez-vous juste nous dire de manière générale si vous croyez que le projet de loi C-68 est un pas dans la bonne direction sur ces questions? Ensuite, vous avez fait état de l’importance des règlements et vous restez sur le qui-vive jusqu’à ce que vous les voyiez. Même si c’est en dehors de la portée de notre travail ici, avez-vous des commentaires sur l’orientation que devrait prendre la réglementation à votre avis? Cela nous aidera à comprendre vos points de vue, et pourrait même finir par devenir une observation dans notre rapport. J’aimerais vous entendre sur ces questions.
M. Lansbergen : Ce qu’il y a de bon à propos du projet de loi, c’est qu’il est habilitant, et pas prescriptif. Et c’est aussi son mauvais côté. Toutes les règles figureront dans les règlements. Nous ne les connaissons pas encore. C’est difficile de dire si le projet de loi est bon ou mauvais. C’est en quelque sorte neutre.
Je vais vous donner un exemple : l’indépendance des pêcheurs côtiers. Dans le cadre des consultations, le MPO demeurait très fidèle et constant par rapport à la politique existante...
Le président : Un instant, s’il vous plaît, monsieur MacPherson. En raison de la qualité, l’interprète a du mal à suivre le rythme. Vous recevez peut-être l’interprétation un peu tardivement ou bien n’en recevez pas du tout. Nous avons un problème technique, monsieur MacPherson, mais poursuivez. Aux interprètes, faites de votre mieux et ne stressez pas par rapport à cela.
M. Lansbergen : Pour ce qui est des pêcheurs côtiers, le MPO reste fidèle à la politique existante. C’est une chose positive. Ma grande mise en garde, comme je l’ai dit dans mes remarques, c’est que le gouvernement, ou qui que ce soit, d’ailleurs, ne sait peut-être pas comment le secteur va évoluer au fil du temps. Une chose que nous savons, c’est que nous avons un problème de main-d’œuvre et un effectif vieillissant, donc la transférabilité des permis d’une génération à l’autre ou l’autofractionnement sont des éléments très importants à prendre en considération pour le gouvernement lorsqu’il élaborera ces nouveaux règlements.
Lorsque vous insérez quelque chose comme cela dans un règlement, si vous ne le faites pas bien, c’est long à corriger. Plutôt qu’une politique qui pourrait être changée dans une année peut-être, il faudrait peut-être de trois à cinq ans, voire plus, pour changer le règlement. Je sais que le MPO travaille actuellement sur un certain nombre d’amendements réglementaires. Ils sont en cours d’élaboration depuis 7 ou 10 ans. Que se passe-t-il s’il commet une erreur ou ne prévoit pas bien les choses?
Le sénateur Gold : Habituellement, j’essaie de ne pas établir de contradiction qui pourrait ou non exister entre les témoins.
À la lumière de l’importance que vous attachez aux dispositions réglementaires, puis-je vous inviter à vous exprimer sur ce dernier point? Partagez-vous les mêmes préoccupations? Y a-t-il une petite partie de désaccord ou est-ce que j’ai mal interprété les deux témoignages?
Mme Sonnenberg : Je vais revenir au commentaire au sujet du fait que le ministère reste fidèle à la politique existante. Cela a été très difficile pour lui. J’ai travaillé avec lui pendant des dizaines d’années, au fur et à mesure de l’évolution de la politique. Ça a été difficile pour lui de la faire appliquer. Il nous l’a constamment répété, en tant qu’industrie. Le besoin d’une réforme et des règlements sera une bonne chose. Mais cela complète le projet de loi C-68. C’est ainsi que nous voyons les choses. Si le projet de loi est adopté tel quel, et les règlements — le ministère comprend les besoins. Aucun règlement n’est parfait. Je suis sûre que M. Lansbergen serait d’accord avec cela. Il y a toujours des conséquences imprévues. Le ministère travaille très fort pour essayer de trouver le juste milieu avec les intervenants.
Pour nous, cela continue d’être une priorité. Nous sommes ici aujourd’hui pour insister là-dessus.
Le sénateur Wells : Je remercie nos invités d’être ici.
Monsieur Lansbergen, j’ai une question pour vous concernant l’inclusion dans le projet de loi C-68 des fins sociales, économiques et culturelles. Une des choses qui me donnent de l’espoir, c’est que les décisions au sein de l’industrie de la pêche reposent sur des données scientifiques. Je vois que l’ingénierie sociale gagne du terrain — et nous le voyons peut-être depuis de nombreuses années — dans les décisions liées à l’attribution de quotas et de permis.
Quels sont vos malaises par rapport au fait que le projet de loi C-68 renforce un aspect de l’ingénierie sociale de l’industrie de la pêche?
M. Lansbergen : C’est assurément une possibilité. Le projet de loi autorise le ministre à rédiger des règlements, mais il ne lui force pas nécessairement la main quant à la façon d’examiner ou d’interpréter ces fins sociales, économiques et cérémoniales. La possibilité existe. Je partage votre préoccupation. Nous voulons vraiment que la gestion des pêches repose sur des données scientifiques, car cela nous permettra d’avoir des pêches durables pour l’éternité. Si nous échouons, nous allons seulement mettre en péril notre viabilité et prospérité futures.
Le sénateur Wells : Merci. Mon autre commentaire concerne les allocations. Il existe une politique concernant l’attachement historique et la contiguïté au moment de fournir des allocations. Vous vous souviendrez peut-être d’une grande controverse survenue il y a environ 15 ans, quand on a accordé à l’Île-du-Prince-Édouard un quota de pêche hauturière à la crevette. Il n’y avait pas d’attachement historique ni de contiguïté dans cette décision. Qu’avez-vous à dire au sujet des allocations et de cet aspect de l’ingénierie sociale?
M. Lansbergen : C’est difficile pour moi de me prononcer précisément sur les allocations de pêches individuelles. Cela a habituellement pour effet de dresser mes membres les uns contre les autres. Comme Mme Sonnenberg le comprend probablement, tout le monde dans le secteur veut une plus grande partie de la tarte. J’ai tendance à me focaliser sur la croissance de la tarte et à laisser tout le monde s’inquiéter au sujet de la taille de leur propre morceau.
Le sénateur Wells : C’est une excellente réponse. Vous devriez être diplomate. Merci beaucoup.
J’ai une question pour Mme Sonnenberg, et peut-être pour M. MacPherson.
Par rapport à la PIFPCAC et aux éléments clés de cette politique qui sont la séparation de la flottille et le propriétaire-exploitant, nous savons que cela se retrouve dans la politique. Le sénateur Gold nous l’a mentionné. Cette politique procure une stabilité et des avantages pour les pêcheurs, mais moins pour les usines de transformation. Pourquoi est-il important que cela soit inscrit dans la loi, plutôt que de faire l’objet d’une politique qui semble fonctionner?
Mme Sonnenberg : C’est important, parce que cela ne fonctionne pas. Je viens d’une collectivité dans la baie de Fundy, et la politique s’est révélée inefficace. Il y a des gens qui, sous le prétexte de pêcher... utilisent leurs permis de pêche, prétendent qu’ils les possèdent. Ce sont des gens en coulisse qui les possèdent. C’est tout à fait contraire à la politique. La politique ne fonctionne pas.
Nous avons vu une augmentation de ce type de comportement au sein de l’industrie. Cela a pour résultat un changement dans l’économie des collectivités. Tant que cela dure, cela nous met dans une situation désespérée, et il ne semble pas y avoir de freins et de contrepoids. Cela affaiblit nos collectivités, et nous pouvons le voir. Nous n’avons qu’à aller en Colombie-Britannique pour examiner les résultats lorsque tout cela sera regroupé entre les mains de quelques personnes, plutôt que de voir la richesse répartie entre de nombreuses personnes.
Cela change la dynamique dans nos petites collectivités côtières. L’essentiel, c’est la façon dont les collectivités survivent avec cet argent. Si on change la façon de faire, les choses seront interrompues. C’est le cas de ma propre collectivité. Je peux le voir facilement. J’ai une entreprise distincte du domaine de la pêche. Si la pêche va bien, je vais bien. Si la pêche ne va pas bien, je ne vais pas bien. Si l’argent n’est pas remis dans la collectivité, il se trouve entre les mains de sociétés, et pas du tout dans notre collectivité.
Le sénateur Wells : Monsieur MacPherson, aviez-vous quelque chose à ajouter?
M. MacPherson : Non, j’ajouterai quelque chose plus tard.
Le sénateur Wells : Voyez-vous pourquoi les usines de transformation investissent dans les mises à niveau de navires, d’équipement, et soutiennent les pêcheurs, voyez-vous leur obligation d’obtenir quelque chose en retour, et que la stabilité des matières premières qui... dans notre langage, dans les pêches, constitue une participation majoritaire? Voyez-vous l’avantage de cela?
Mme Sonnenberg : Depuis la nuit des temps dans l’industrie de la pêche, les transformateurs et les acheteurs ont offert des possibilités d’emprunter de l’argent. Tant et aussi longtemps qu’on emprunte de l’argent, c’est bon. Il y a une certaine entente lorsque vous devez de l’argent à quelqu’un : vous allez lui apporter votre produit, c’est entendu dans l’industrie. Ce qui n’est pas acceptable, c’est qu’il y a une façade à cela, lorsque vous mettez quelqu’un dans une position où il exploite des navires qui ne lui appartiennent pas vraiment, mais où on prétend que c’est le cas.
C’est un réseau complexe. L’enjeu, pour nous, c’est que les gens qui se disent titulaires de permis ne le sont pas. Et les gens qui possèdent et exploitent vraiment les navires en coulisse ont le plein contrôle sur ces personnes. Cela n’a jamais été l’intention de la politique du propriétaire-exploitant.
M. Lansbergen : Je suis d’accord avec Mme Sonnenberg. Ce que je disais au MPO dans les consultations, c’est qu’il devrait établir une distinction entre les accords positifs qui peuvent survenir entre des transformateurs et des pêcheurs, comme vous l’avez mentionné dans le premier scénario décrit par Mme Sonnenberg, et les moins bons arguments qui pourraient exister, soit le dernier scénario dont Mme Sonnenberg a parlé.
Je vais faire l’analogie suivante : vous avez un contrat agricole, où une entreprise va soutenir un agriculteur en échange de la fourniture d’un produit, mais elle ne contrôle pas ce que fait l’agriculteur avec son exploitation agricole. Tout accord en vertu duquel on veut contrôler ce qu’un pêcheur fait avec son permis va contre la politique existante et, on le présume, contre les règlements à venir. Ce n’est pas la même chose que de juste fournir un certain soutien financier, pour que la chaîne d’approvisionnement fonctionne bien, parce que nous ne faisons pas cela assez souvent au départ.
M. MacPherson : J’aimerais juste dire une chose. Nous avons entendu plusieurs fois ce matin le mot « stabilité ». Je crois qu’il est vraiment important de comprendre que les deux côtés de la chaîne d’approvisionnement ont besoin de cette stabilité. Nous commençons à voir des investissements record en provenance du secteur des pêches. Les investissements effectués par les secteurs de la transformation ont probablement été un peu plus soutenus. Les ateliers maritimes s’appuient sur des commandes pour les trois à cinq prochaines années.
Beaucoup de ces navires valent un demi-million de dollars et plus.
Je crois que c’est une période historique, où les deux côtés de l’industrie réalisent des investissements record. Ils veulent de la stabilité. Nous voulons un avenir. Nous voulons travailler ensemble dans l’avenir. Il y a un intérêt réel des deux côtés du secteur pour faire en sorte que nous obtenions des règlements qui fonctionnent pour l’industrie, mais aussi pour soutenir les choses que nous défendons ici aujourd’hui.
Le sénateur Wells : J’ai une dernière question qui porte sur la séparation de la flottille, une politique qui dit essentiellement que les transformateurs ne devraient pas détenir de permis.
Qu’en est-il des circonstances où des pêcheurs possèdent des installations de traitement, comme des coopératives? Je sais que nous détenons des coopératives à Terre-Neuve, ainsi que dans d’autres régions du pays. Voyez-vous une iniquité inhérente à cette situation?
Mme Sonnenberg : Vous posez toutes les questions difficiles. C’est quelque chose dont nous devons parler davantage. Nous venons juste de lancer ce dialogue. Cela donne aux pêcheurs une souplesse au fil du temps. Les gens qui se trouvent du côté de M. MacPherson ont réagi avec étonnement par rapport à cela. Je crois que l’on doit se présenter à la table pour préciser les choses et décider comment aller de l’avant avec cela, mais cela a soulevé quelques questions.
C’est une bonne question. Je n’ai vraiment pas de bonne réponse pour vous aujourd’hui, parce que nous commençons à peine à examiner cette question nous-mêmes, pour savoir où cela nous place comme industrie. Je crois que, pour les pêcheurs qui n’ont peut-être pas reçu un traitement juste au quai lorsqu’ils apportent leurs produits, cela leur a fourni un débouché où ils pouvaient obtenir un meilleur rendement sur leur investissement.
Cela dit, je crois que nous avons du pain sur la planche.
Le sénateur Wells : Merci.
Le sénateur Francis : Monsieur MacPherson, pourriez-vous donner au comité une idée de l’importance du projet de loi C-68 pour l’industrie de la pêche de l’Île-du-Prince-Édouard?
M. MacPherson : Beaucoup de personnes l’ignorent, mais la contribution de l’industrie de la pêche au PIB de l’Île-du-Prince-Édouard est la plus élevée au Canada. Nous parlons d’une industrie capitale. Avec une population de 140 000 personnes, dont uniquement 40 000 se retrouvent dans ce que vous appelleriez un centre urbain, tout ce qui nous intéresse, ce sont les collectivités côtières. Les pêches sont absolument essentielles au secteur de la transformation, et les navires qui approvisionnent les usines sont essentiels. Ils fournissent des emplois. Ils permettent à de nombreux étudiants de fréquenter l’université dans certaines des collectivités. C’est important. Et c’est ce qui assure leur survie.
Une chose que je remarque vraiment, maintenant que nous passons en revue ce changement générationnel, c’est que les gens veulent pêcher. Ils ne veulent pas sortir de la province pour trouver d’autres emplois. Il y a un intérêt réel chez les jeunes de faire carrière dans l’industrie de la pêche. C’est ce qu’ils aiment; c’est ce qu’ils veulent faire. Par leur bénévolat ou quoi que ce soit d’autre, et en restant dans ces collectivités, ils représentent une valeur énorme pour celles-ci. Nous devons continuer de favoriser cela.
Je connais une histoire de réussite particulière. Nous avons une très bonne relation fonctionnelle avec nos Premières Nations, et c’est une industrie en pleine croissance là-bas. Nous voyons beaucoup de réussites.
Je ne peux insister assez sur l’importance de l’industrie de la pêche pour l’Île-du-Prince-Édouard.
Le sénateur Francis : Merci.
La sénatrice Poirier : Merci à vous tous d’être ici. On a déjà répondu à beaucoup de mes questions, dans une certaine mesure. Je vais juste ajouter quelques éléments supplémentaires à chacune d’elles.
D’abord, je vais revenir à la discussion que nous venons d’avoir il y a quelques minutes sur une des questions que mon collègue, le sénateur Wells, a posées : le problème selon lequel il semble que certaines personnes détiennent un permis, mais en réalité, ce n’est pas le cas; quelqu’un d’autre le détient. Pourriez‑vous s’il vous plaît préciser, en ce qui vous concerne, si le projet de loi C-68 va permettre de régler cela?
Mme Sonnenberg : C’est l’intention.
La sénatrice Poirier : Excellent. C’est ce que je voulais entendre.
Ensuite, vous avez beaucoup parlé de la politique de la PIFPCAC sur la côte Ouest et des questions sous-jacentes. À votre avis, en fonction du libellé actuel du projet de loi C-68, pouvons-nous renverser la situation pour la côte Ouest? En même temps, en faisons-nous assez pour protéger les collectivités côtières du Canada atlantique?
Mme Sonnenberg : Je vais d’abord répondre à la question sur la Colombie-Britannique.
La sénatrice Poirier : D’accord.
Mme Sonnenberg : C’est un énorme problème là-bas. Il faudra du temps. Il faudra que l’industrie se réunisse et trouve des solutions qui sont une réponse propre à la Colombie-Britannique à ce qui se passe et pour renverser une partie de l’érosion de la possession de cette pêche. Je ne crois pas que ce soit impossible. Je pense en fait que ce mot n’existe même pas. Je pense que tout est possible si vous mettez les bonnes personnes à la table et faites le travail. Il y a beaucoup de joueurs qui devront venir à la table et trouver des solutions.
Certaines solutions positives pourraient être utilisées. J’ai une grande foi dans l’industrie de la Colombie-Britannique : elle pourra trouver ces solutions, mais il faudra du temps. Cela ne fait aucun doute.
En ce qui concerne la situation de l’Atlantique, si le projet de loi devait être adopté, cela nous permettrait de renforcer la politique, la position de nos pêcheurs, et de nous assurer que nos collectivités côtières, ce dont il est question pour nous tous, sont protégées — de sorte que les gens puissent y vivre et y travailler — et fournissent une source durable de fruits de mer.
Une des choses dont nous ne parlons pas assez, c’est la sécurité entourant les produits de fruits de mer que nous apportons : le Canada a un produit de très grande valeur. Nous savons que les gens apportent ces produits au quai, et nous pouvons voir cela comme quelque chose que nous voulons... au fil du temps, nous verrons un plus grand nombre de problèmes liés à la sécurité alimentaire. Une chose que nous devons vraiment faire ressortir davantage, nous tous dans l’industrie, c’est que nous possédons ce produit et que nous pouvons tirer parti de cette source de produits pour nous-mêmes, au besoin. C’est sécuritaire, et nous savons exactement qui a manipulé le produit et d’où il vient.
La sénatrice Poirier : Merci.
Pour ma prochaine question, j’aimerais avoir l’opinion de deux de nos témoins, M. Lansbergen et Mme Sonnenberg. Cela porte un peu sur les questions qui ont été posées plus tôt concernant les règlements. J’ai reçu des questions du ministre il y a un certain temps. Ses réponses ne m’ont pas exactement éclairée.
Vos associations ont-elles été consultées quant au libellé utilisé concernant la délivrance de permis dans le projet de loi? Pourriez-vous vous prononcer sur vos attentes à l’égard des règlements — qu’est-ce que vous aimeriez voir? Je pose la question à nos deux témoins.
Mme Sonnenberg : Nous avons été consultés. Cela a d’abord été une consultation publique étendue. La fédération en a fait partie l’été dernier et à l’automne, et nous avons poursuivi le dialogue avec le ministère sur la formation de la consultation.
Compte tenu de la nature des règlements, nous ne pouvons pas voir le libellé, bien sûr, jusqu’à ce qu’il soit publié dans la Gazette; d’un point de vue global, nous avons présenté au ministère des observations par rapport à ce que nous espérions voir ainsi qu’une certaine clarté entourant certaines situations, comme la possession des permis et la façon dont ils sont délivrés, et ainsi de suite.
Oui, le ministère nous a tendu l’oreille, et nous a permis de nous prononcer au fur et à mesure. On jugera toujours l’arbre à ses fruits, lorsque ce sera publié dans la Gazette, et nous serons en mesure de voir ce que les rédacteurs ont réellement interprété par rapport à ce qu’ils ont entendu de la part des divers intervenants qui se sont prononcés lorsque ces consultations se sont tenues publiquement.
La sénatrice Poirier : Il semble que l’échéancier ne soit pas clair dans les règlements. Le ministère vous a-t-il fourni une indication de l’échéancier?
Mme Sonnenberg : Selon ce que j’ai compris, dans le cas d’une réunion cette semaine, les règlements pourraient se retrouver dans la Gazette d’ici la mi-juin ou la fin juin.
La sénatrice Poirier : Notre témoin de l’Île-du-Prince-Édouard pourrait-il répondre?
M. Lansbergen : Oui. Mes points de vue sur les règlements et les consultations ressemblent beaucoup à ceux de Mme Sonnenberg. Le MPO a tenu des consultations préalables, où il a présenté des documents de consultation et de discussion. Il a tendu la main aux intervenants en vue de ces discussions. Nous sommes heureux que celles-ci se tiennent. Cela nous aide, parce que lorsqu’ils se manifestent en début de processus, cela nous donne des indications quant à l’endroit où ils souhaitent aller et nous aide à nous préparer en vue de la publication dans la partie I de la Gazette du Canada, qui est la première étape des projets de règlement, où nous voyons le libellé réel.
Il est important pour nous d’être en mesure de fournir quelques commentaires à ce sujet.
Le processus où l’on passe d’un document de consultation ou de discussion, qui prend généralement la forme d’un exposé, à un texte réglementaire en bonne et due forme peut se révéler compliqué. Il pourrait être nécessaire d’examiner fortement quelques nuances.
C’est une étape importante. Mais tout le processus est important, tout comme le fait de tenir des consultations ouvertes et transparentes. Nous sommes heureux de ce que nous avons vu pour l’essentiel jusqu’à maintenant et espérons que cela continuera. Nous participerons à l’ensemble du processus.
La sénatrice Poirier : Merci. J’aimerais dire quelque chose pour terminer, si vous me le permettez, monsieur le président.
Je suis tout à fait d’accord avec les commentaires que vous avez formulés au sujet des changements qui dépendent de l’industrie de la pêche là-bas et des aspects économiques dans votre collectivité. Je viens d’une région côtière du Nouveau-Brunswick, où la pêche compte pour une bonne partie du développement économique de nos régions. C’est un commentaire que j’entends souvent. Je voulais juste le dire aux fins du compte rendu.
La sénatrice Busson : Comme je viens de la Colombie-Britannique et que j’entends parler de la dichotomie négative par rapport à la situation des pêches dans cette province, il y a un très grand nombre d’effets négatifs par rapport au déroulement des pêches sur la côte Est. J’ai trouvé intéressante votre citation de Jonathan Hunter, un pêcheur de la Colombie-Britannique, au sujet du fait qu’il croit que vous pouvez revenir en arrière.
Vous avez formulé certains commentaires en réponse à une autre question. Je me demande, puisque vous êtes sur le terrain, vivez vous-même la situation et faites partie de cette industrie globale, du point de vue de la côte Est, croyez-vous qu’il est possible de renverser cette tendance en Colombie-Britannique? Parce qu’il me semble qu’il y a deux enjeux. Le premier, vous voulez freiner la progression de cette marche vers cette pêche sur la côte Est; et le deuxième, vous voulez revenir en arrière ou mettre davantage l’accent sur la séparation des flottilles sur la côte de la Colombie-Britannique. Je me demande si vous pensez que c’est une possibilité et combien de temps cela pourrait prendre si les quotas des gens étaient définis.
Comme deuxième partie de cette question, je me demande si c’est autant une question d’application de la loi que de politique.
Mme Sonnenberg : Pour répondre à la question qui porte sur le fait de revenir en arrière, si vous le voulez, c’est difficile de défaire ce qui a été fait, mais vous pouvez toujours mettre un frein. Je crois que c’est la première chose à faire.
J’ai eu le privilège de travailler avec des gens en Colombie-Britannique, depuis que j’ai accepté ce rôle de présidente de la fédération. Cela a été un privilège. Ils m’ont permis d’entrer dans leur vie pour voir les difficultés auxquelles ils font face et les problèmes qui surviennent chaque jour là-bas, ce qui me fait apprécier la pêche de la côte Est. J’ai de plus en plus reconnu l’importance de notre mode de fonctionnement et de la nécessité de le conserver.
Je ne serais pas ici si je ne croyais pas que ces gens ne pouvaient pas changer leur avenir. Ce sont des personnes dévouées et travaillantes qui ont une passion pour leur industrie, tout comme les gens sur la côte Est. Je pense qu’il leur reste à trouver des solutions, ils le feront, avec l’aide de tous.
Je ne serais pas ici si je ne croyais pas que cela ne pourrait pas arriver. Je n’aurais pas présenté ces commentaires aujourd’hui. En tant que fédération, nous nous sommes investis pour essayer d’attirer l’attention sur la côte de la Colombie-Britannique. Je crois que nous avons joué un petit rôle dans cet aspect, et j’espère que nous pourrons continuer de les soutenir dès qu’ils amorceront ce processus.
Pouvez-vous me rappeler la deuxième partie de votre question?
La sénatrice Busson : Vous avez dit que c’était presque courant, mais il y a des titulaires de permis qui ne sont pas des titulaires de permis. Vous avez dit que c’était chose courante.
Mme Sonnenberg : Ça l’est de plus en plus.
La sénatrice Busson : Est-ce une question d’application de la loi ou est-ce plus compliqué que cela?
Mme Sonnenberg : C’est compliqué. Il y a eu une érosion de la politique dans certaines régions, et je dois le dire clairement. Ce n’est pas dans chaque région dans l’Est. Dans certaines régions, c’est arrivé plus souvent que dans d’autres, et cela tient en partie à l’application de la loi. Les gens vous diront que vous ne pouvez pas appliquer une politique, mais vous pouvez insister pour qu’ils se conforment, et ce n’est peut-être pas arrivé. C’est le nœud de la question avec la politique sur la PIFPCAC, plutôt qu’une législation qui comprend un certain libellé réglementaire qui l’appuie et clarifie l’intention.
Je pense que cela change les règles du jeu pour nous dans l’industrie et qu’il y a plus de clarté pour les gens au ministère, en ce qui concerne la façon de revenir en arrière et de s’assurer que nous respectons l’intention.
La sénatrice Busson : Excellent, merci beaucoup.
M. Lansbergen : J’aimerais dire quelques choses concernant l’approche de la Colombie-Britannique à l’égard de la délivrance de permis et le rapport du comité de la Chambre qui vient de paraître. Je suis assez préoccupé par rapport à l’hypothèse ou à la conclusion selon laquelle les problèmes sur la côte de la Colombie-Britannique et touchant les pêches de cette province seront réglés si on change la structure industrielle de l’industrie. Je crois que c’est beaucoup plus compliqué que le fait de savoir qui possède quels permis et qui pêche réellement.
Le secteur de la transformation... Nous vivons dans les mêmes collectivités que les pêcheurs. Nous investissons, nous contribuons à l’économie. Ce n’est pas comme si l’un en faisait plus que l’autre. C’est une relation symbiotique. Je crois que certaines des difficultés sur la côte de la Colombie-Britannique ont trait à la taille des pêches et à certaines des restrictions imposées là-bas. La tarte n’est peut-être pas assez grande pour rassasier tout le monde.
Je crois que, dans le cadre de l’étude, le comité de la Chambre a peut-être passé outre à quelques-uns de ces éléments. Je serais heureux de communiquer un très bon mémoire technique de la B.C. Seafood Alliance qui couvrait certaines des vraies réalités économiques de l’industrie de ce côté du pays. Je crois que ce serait très utile.
Le sénateur Christmas : Je vous remercie de comparaître.
Monsieur Lansbergen, dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que l’une des plus grandes préoccupations du conseil était la stabilité de l’accès. Puis, vous avez mentionné ce chiffre de 600 millions de dollars et dit qu’il y avait eu une certaine perte de l’accès, un retrait de l’accès. Pourriez-vous expliquer ce que vous entendiez par là?
M. Lansbergen : La première est la perte de l’accès. Avec l’industrie de la pêche à la mactre de Stimpson, le gouvernement a pris un quota de 25 p. 100 et n’a pas indemnisé le titulaire. L’entreprise titulaire venait juste d’investir 150 millions de dollars pour remettre à neuf une usine de transformation et un navire et pour acheter un nouveau navire. Sans ce quota, ces trois éléments constituaient partiellement une capacité excédentaire. Que faites-vous en tant qu’entreprise? Elle était passablement préoccupée par rapport à ce qu’elle devait faire avec ces investissements. Tout le monde dans le secteur se demandait qui allait être le suivant. Quelle est la prochaine pêche à laquelle on retirera le permis ou le quota sans indemnisation et devrait-on effectuer ce nouvel investissement?
Ce quota de la mactre de Stimpson a depuis été renversé et redonné au titulaire pour deux ans. Un nouveau processus est censé suivre, mais nous ne savons pas exactement à quel moment. Le gouvernement n’a pas donné d’indication selon laquelle il passera à un modèle axé sur un acheteur ou un vendeur consentant ou à quelque autre type d’indemnisation du titulaire. C’est la plus grande question.
Nous avons des entreprises autochtones qui ne veulent voir personne perdre l’accès sans indemnisation. C’est une croyance principale et un principe auxquels je pense que tout le monde devrait adhérer.
Désolé, quelle était la deuxième partie de votre question?
Le sénateur Christmas : Cela cadre très bien avec votre réponse. Ma deuxième question concernait la participation des Autochtones à l’industrie de la pêche, particulièrement sur la côte atlantique. Je crois que vous faites allusion à votre préoccupation pour ce qui est de passer d’une adhésion volontaire des industries autochtones et à une adhésion involontaire. Comme vous le savez bien, sur la côte atlantique, au cours des 20 dernières années, en raison de l’entrée de la pêche autochtone, on s’est fondé sur ce modèle de l’acheteur consentant et du vendeur consentant. La valeur des permis de pêche sur la côte Est a augmenté de façon draconienne en raison de ce modèle.
Une partie de la frustration tient maintenant au fait que vous avez des petits propriétaires qui ont du mal à acheter des permis et à pénétrer dans l’industrie. Bien sûr, l’autre frustration dont je suis très au courant, c’est que nous avons des communautés micmaques partout sur la côte atlantique qui participent à l’industrie de la pêche depuis les 20 dernières années. Et en raison de leur entrée dans le secteur de la pêche, elles ont maintenant du mal à acheter des permis et des quotas.
J’ai remarqué que, parmi vos membres, il y a des entreprises non autochtones et autochtones. Ma question est la suivante : si nous nous écartons du modèle de l’acheteur ou du vendeur consentant, cela donnerait-il aux petits propriétaires et aux collectivités autochtones un meilleur accès aux pêches?
M. Lansbergen : Le prix ou la valeur du permis et du quota forment une partie très importante de la question. Je crois que c’est ce qui a motivé l’approche du gouvernement concernant la mactre de Stimpson. Nous devons trouver une façon de régler ce problème et le moyen le plus efficace pour accroître la participation des Autochtones, peu importe le coût. Mais le seul fait de dire : « Eh bien, je ne veux pas payer trop cher », sans indemniser le titulaire, n’est pas la bonne réponse.
Je n’ai pas de solution simple ni de recommandation sur cet aspect, mais nous devons nous entendre pour chercher une solution. Je crois que le modèle de l’acheteur ou du vendeur consentant offre des moyens de le faire, et le gouvernement a une expérience de longue date.
Je viens de me rappeler votre autre question. Dans ma déclaration liminaire, j’ai mentionné qu’il y avait une étude selon laquelle il nous manquait 600 millions de dollars de recettes annuelles. Cela concerne la maximisation de la valeur de ce que nous pêchons actuellement. Transformons-nous les produits afin d’obtenir la meilleure marge? Utilisons-nous le poisson à sa pleine capacité?
Ici, à Bruxelles, j’ai rencontré quelques entreprises islandaises. L’Islande est généralement considérée comme un pays qui a bien réussi à faire avancer de nouvelles technologies afin d’utiliser la totalité du poisson, que ce soit la peau comme pansements pour les patients brûlés, l’huile de poisson pour les suppléments de santé ou la coupe des longes et du reste du poisson pour en maximiser la valeur. Nous devons mieux faire les choses à cet égard. Ce ne sera pas possible si nous n’investissons pas dans de nouvelles technologies. Il nous faut un cadre stable et clair pour pouvoir le faire.
Le sénateur Christmas : Juste pour revenir à la pêche à la mactre de Stimpson, comme vous le savez, les partenaires autochtones dans l’accord prochain sur la mactre de Stimpson englobent toutes les 13 Premières Nations de la Nouvelle-Écosse, et une Première Nation de Terre-Neuve. Si nous continuions d’exercer nos activités en fonction du modèle de l’acheteur ou du vendeur consentant, je ne crois pas que ces 14 Premières Nations obtiendraient l’accès à cette pêche à la mactre de Stimpson. Êtes-vous d’accord?
M. Lansbergen : Depuis ce moment, le titulaire a annoncé qu’il était parvenu à une entente avec un certain nombre de Premières Nations, comme vous venez de le décrire. Vouloir, c’est pouvoir.
Notre plus grande difficulté, et le grand principe que nous avons préconisé, c’est que, quoiqu’il se passe, la renonciation involontaire ne fonctionne pas. Le gouvernement l’a dit devant les tribunaux. Vous devez indemniser le titulaire et trouver un moyen d’en faire une renonciation volontaire. Pour ce qui est du reste des détails, il nous faudra les régler.
Le sénateur Christmas : Merci.
J’ai une question pour Mme Sonnenberg. D’abord, je tiens à vous remercier de votre très fort appui à la politique de séparation de la flottille, au propriétaire-exploitant et à la PIFPCAC. On a pris note de vos commentaires sur cette question. Nous vous remercions de cet appui.
Je sais que le sénateur Wells et que la sénatrice Poirier vous ont posé des questions à ce sujet, mais j’aimerais en parler une dernière fois. Comme vous le savez, le projet de loi C-68 tente de combler les lacunes des politiques ou de trouver des solutions de rechange en inscrivant dans la loi ces politiques dans le cadre d’un nouvel ensemble de règlements. Dans votre exposé, vous avez mentionné qu’un des problèmes du projet de loi, c’est de tenter de tenir compte de la réalité des accords de contrôle. Aux fins du compte rendu, pourriez-vous décrire ce problème? Comment cela nuit-il à ces politiques et comment le projet de loi C-68 pourrait-il, à tout le moins je l’espère, combler cette lacune?
Mme Sonnenberg : Une des réponses très rapides, c’est que le coût d’un permis, en raison de la personne qui est en mesure de l’acheter — l’acheteur ou le vendeur consentant —, une des préoccupations de la fédération, c’est la possibilité pour des jeunes d’entrer dans le domaine des pêches. Les données démographiques concernant la possession en ce moment révèlent qu’il y a beaucoup de personnes aux cheveux gris dans l’industrie. Au cours des derniers temps, nous avons vu des améliorations à ce chapitre, mais étant donné le coût des permis, s’il y a des gens qui viennent du milieu des entreprises, ils peuvent surenchérir sur notre offre chaque fois — absolument chaque fois. Un obstacle s’est dressé devant les jeunes qui essaient d’entrer dans le secteur. Ils ne peuvent pas faire concurrence. C’est un des problèmes très difficiles que nous devons surmonter. Cela permettrait de stabiliser la situation, en mettant fin aux activités en coulisse touchant les accords de contrôle.
L’idée selon laquelle la richesse sur le navire est partagée et si on a un vrai propriétaire qui exploite le navire et que l’équipage est rémunéré est très différente de ce qui se passe si vous avez le représentant d’une société, puis votre magasin là‑bas, et que tout le monde sur le navire touche un salaire. C’est de ça qu’il s’agit. La distribution de la richesse semble différente. Puis, à partir de cette distribution, c’est de nouveau différent par rapport à la façon dont cela s’en va dans la collectivité, si vous avez un vrai propriétaire-exploitant qui, à sa façon, soutient sa collectivité.
Toutes ces choses, en les inscrivant dans la loi... et je tiens à vous remercier de l’avoir parrainée ici. Nous sommes extrêmement reconnaissants d’avoir eu l’occasion de venir aujourd’hui et de dire à quel point c’est important pour nous. Mais c’est ce dont nous avons toujours eu besoin. Depuis que Roméo LeBlanc a introduit les principes du propriétaire-exploitant et de la séparation de la flottille, on a commencé à respecter la politique. Puis, à mesure que l’érosion a commencé — et cela a commencé assez rapidement — il est devenu clair que quelque chose devait être fait.
Cela devrait aider la situation sur le terrain.
Le sénateur Christmas : Merci.
M. MacPherson : Merci. Je voulais ajouter quelque chose rapidement. Nous avons été assez chanceux de tomber l’autre jour sur la conférence de presse où le rapport de la côte Est a été publié. Un commentaire très troublant a été formulé, et j’oublie par quel député. Il se disait préoccupé par le fait que, dans certains cas, on avait posé des questions au sujet de la propriété des permis, et il était très difficile d’obtenir cette information. C’est une grande préoccupation pour nous tous, en tant que Canadiens. C’est une question de sécurité alimentaire. Madame la sénatrice Busson, vous avez raison : il pourrait s’agir d’une question d’application de la loi.
Si ce n’est pas si clair, nous avons travaillé avec le MPO au cours des dernières années pour présenter des suggestions sur la façon dont il pourrait peut-être découvrir qui profite du système. C’est mieux que c’était, mais il demeure encore beaucoup de choses à faire. C’était une grande préoccupation pour nous. Je suis sûr que ce l’est pour tout le monde dans la salle.
Le sénateur McInnis : La plupart des sujets dont je voulais parler ont été abordés. J’aimerais connaître la réponse à cette question, mais j’aimerais que vous clarifiiez les choses pour moi. Le transfert d’un permis doit être approuvé par le MPO. On présume qu’il détient un registre de qui possède quoi. S’il souhaitait appliquer la politique, alors il censurerait un transfert. C’est une chose relativement simple à faire pour lui, n’est-ce pas?
Mme Sonnenberg : Ça pourrait l’être.
Le sénateur McInnis : Ça devrait l’être. Si c’est un bien... la plupart des provinces détiennent des registres. Si elles ont un registre et qu’un permis est transféré d’un pêcheur individuel dans une certaine collectivité rurale à une entité sociale, il peut simplement y mettre fin.
Mme Sonnenberg : Je crois que le terme que nous recherchons ici est « examen minutieux ». Je ne peux pas parler au nom du ministère. Je vais vous dire que, récemment, j’ai aidé un de mes amis à faire un transfert. Il était en phase terminale. Ce n’est pas quelque chose à quoi je participe beaucoup dans le cadre de mes fonctions, mais cela m’a donné l’occasion d’en faire l’expérience de façon directe.
C’était un transfert légitime. Je savais qu’il serait cédé à un jeune pêcheur, un propriétaire-exploitant indépendant. Je pouvais voir à quel point il serait facile pour le ministère, s’il ne faisait pas de réelle enquête sérieuse sur le transfert, d’être berné. C’est ce que nous avons réclamé pendant tout ce temps, en tant qu’industrie, et ce qui nous amène ici aujourd’hui. Il y a quelques obstacles pour lui, et cela a été difficile.
S’il y avait un système plus robuste au sein du ministère, une partie de cela pourrait être arrêtée — pas toutes les activités, mais certainement une partie. Le terme est « examen minutieux »; il doit y en avoir davantage, et il n’y en a pas.
Le sénateur McInnis : D’accord. Dans votre exposé, vous parlez des gens qui travaillent sur les bateaux et du fait d’empêcher tout nouveau pêcheur de salon d’acquérir des permis. Je vais vous donner un exemple et j’aimerais votre avis à ce sujet.
Un témoin qui est venu ici nous a dit que ses fils et lui possèdent une entreprise familiale, avaient fait construire un navire, détenaient un permis et ainsi de suite. Le père est maintenant ce que vous appelleriez un pêcheur de salon; c’est le monsieur qui observe, trace, suit et oriente le bateau, mais il demeure chez lui. Les six ou sept membres de la famille sont sur le navire. Bien sûr, en vertu de cette nouvelle politique, il devrait être à bord du bateau. Cela va enlever une personne du bateau.
Le transfert du titre de ce navire, bien sûr, est coûteux, parce qu’il doit payer des taxes et ainsi de suite, ou bien les fils doivent le faire. Que dites-vous dans une situation comme celle-là? Cela devrait-il être permis. Devrait-il être autorisé à acquérir les fournitures, à gérer le navire, tous ces types de choses, de chez lui?
Mme Sonnenberg : Je pense que c’est assez ambitieux de ma part d’être la personne qui doit se prononcer sur cette question, mais je comprends que, dans ce cas particulier, ce qu’il fait s’inscrit dans les politiques existantes aujourd’hui. Ce serait considéré comme en règle. Je crois que ce sont des choses où nous devons reconnaître, en tant qu’industrie, la valeur de la famille et que ce qui a permis à nos collectivités de se maintenir, c’est ce transfert intergénérationnel.
Quand un père décide de transférer son permis à son fils, cela se produit au moment où il est à l’aise. Nous avons entendu beaucoup de nos propres membres parler du moment où ils se rendent compte qu’un fils ou une fille peut monter sur la passerelle, être cette personne et assumer la responsabilité de ce permis, mais cela doit se produire à un certain moment. Je pense que c’est la question fondamentale que l’on doit régler.
Le projet de loi lui-même renforce le propriétaire-exploitant; il n’y a aucun doute à ce sujet. Je ne connais pas la situation de ce monsieur, je ne sais pas pourquoi il n’est pas sur le bateau, mais il y a des possibilités dans le cadre de politiques de santé et ainsi de suite dont on peut tenir compte, pendant qu’ils règlent les accords financiers pour faire en sorte que tout le monde puisse faire le transfert de façon acceptable sur le plan fiscal. À mesure que la valeur augmente, une question légitime de l’industrie tient à la façon de se protéger contre cela.
Le sénateur McInnis : C’est très coûteux pour les enfants de reprendre l’entreprise. À l’époque, la valeur était probablement de 1 million de dollars. Maintenant, c’est plutôt de l’ordre de 5 ou 6 millions de dollars. Je suis d’accord; c’est le gagne-pain de nombreuses collectivités rurales, et nous devons le protéger.
Mme Sonnenberg : Nous avons travaillé avec des comptables pour découvrir comment effectuer une planification de la relève réussie dans l’industrie, à mesure que la valeur augmente. Nous avons entendu beaucoup de comptables au cours des 6 à 10 derniers mois au sujet de cette même question. Il y a assurément des moyens de le faire qui peuvent réduire le fardeau fiscal et aider les gens à le faire de façon efficace.
Le sénateur McInnis : Merci.
Le sénateur Wells : J’aimerais revenir à la question que le sénateur McInnis a mentionnée au sujet de la personne qui gérait essentiellement, depuis la rive, les activités qui englobaient sa famille et qui font partie de ce que j’appelle un transfert responsable à la prochaine génération. Plutôt que d’essayer de traiter cette situation de façon ponctuelle en vertu d’une politique, cela viendrait clarifier les règles s’il y avait dans la législation quelque chose qui pourrait corriger le problème, comme celui lié au statut d’un capitaine à terre ou quelque chose du genre.
Mme Sonnenberg : Je crois que si nous entamons cette discussion aujourd’hui au sujet du projet de loi particulier, cela va devenir tellement compliqué, compte tenu de nos échéanciers, que cela risque de faire dérailler le projet de loi. Je vais être très honnête à ce sujet, monsieur le sénateur Wells. C’est une discussion qui pourrait retarder ce qui se passe ici aujourd’hui jusqu’à la fin de la session parlementaire. Ce serait ma préoccupation à cet égard.
Je crois qu’il y a des moyens de le faire. Les gens le font tout le temps. J’ai eu l’occasion et le privilège de parler à beaucoup des personnes qui se trouvent exactement dans cette position. Elles trouvent des solutions. Il y a des comptables beaucoup plus avertis que moi qui aident des gens à faire cette transition. Et le fait de garder cette famille est capital aux fins de la discussion. Comment ces familles exercent-elles leurs activités? Je n’aimerais pas que nous nous embourbions dans ce dossier aujourd’hui. Je crois qu’il existe des solutions à ces problèmes pour l’avenir. On peut en aborder une partie dans le règlement, lorsqu’il paraîtra dans la partie I de la Gazette.
Le sénateur Wells : Merci.
Le président : Je remercie nos témoins. Vous êtes les derniers d’une longue liste de témoins qui ont comparu devant nous relativement au projet de loi C-68. Nous espérons commencer notre étude article par article la semaine prochaine. Nous vous remercions de votre intérêt, mais aussi de votre expérience et de vos excellents commentaires sur les questions qui ont été posées par nos sénateurs.
Mesdames et messieurs, nous allons passer à huis clos et discuter des prochaines étapes.
(La séance se poursuit à huis clos.)