Aller au contenu
RPRD - Comité permanent

Règlement, procédure et droits du Parlement

 

Délibérations du Comité permanent du
Règlement, de la procédure et des droits du Parlement

Fascicule no 16 - Témoignages du 4 décembre 2018


OTTAWA, le mardi 4 décembre 2018

Le Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement se réunit aujourd’hui, à 9 h 31, pour examiner la possibilité de modifier le Règlement du Sénat afin de donner expressément au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration la discrétion nécessaire pour se réunir à huis clos au besoin.

Le sénateur Leo Housakos (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bonjour, chers collègues, et bienvenue à tous, ainsi qu’aux membres du grand public qui assistent aujourd’hui, sur place ou en ligne, aux délibérations du Comité permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement. J’aimerais demander aux sénateurs de bien vouloir se présenter, en commençant par ma gauche.

[Traduction]

Le sénateur Sinclair : Murray Sinclair, du Manitoba.

Le sénateur Greene : Stephen Greene, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

Le sénateur Gold : Marc Gold, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Joyal : Serge Joyal, du Québec.

Le sénateur Wells : David Wells, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Woo : Yen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice McCoy : Elaine McCoy, de l’Alberta.

[Français]

Le sénateur Maltais : Ghislain Maltais, du Québec.

[Traduction]

Le président : Je suis Leo Housakos, du Québec, et je suis président du comité.

Nous sommes réunis en raison de l’adoption, par le Sénat, le jeudi 4 octobre 2018, du vingt-neuvième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration, plus simplement de la régie interne ou CIBA.

C’est notre première séance sur la question visée par cet ordre de renvoi. Conformément au rapport, notre comité est censé examiner la possibilité de modifier le Règlement du Sénat pour donner expressément au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration la discrétion nécessaire pour se réunir à huis clos au besoin.

Pour nous fournir les explications nécessaires, nous accueillons le sénateur Marwah, président du Comité de la régie interne. Il est accompagné de Mme Pascale Legault, dirigeante principale des services corporatifs.

Je rappelle à mes collègues, pour les inciter à bien se conduire, que la séance est diffusée. Je cède la parole au sénateur Marwah pour sa déclaration préliminaire.

L'honorable Sabi Marwah, président, Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration : Chers collègues, je vous remercie de votre invitation à venir discuter du vingt-neuvième rapport du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration, qui porte sur le pouvoir de ce comité de se réunir à huis clos pour examiner des questions délicates. Ce rapport a été adopté par le même comité le 21 juin 2018 et présenté au Sénat le 18 septembre, qui l’a adopté le 4 octobre.

Jusqu’ici, ce Comité de la régie interne a presque toujours siégé à huis clos. Aucune règle particulière ne l’autorisait à le faire. Il le faisait plutôt pour suivre une coutume du Sénat.

Cependant, la coutume a changé. Ces dernières années, dans le cadre de l’engagement de l’institution à l’égard de la transparence et de la reddition de comptes, le comité a décidé d’ouvrir ses séances au public. Aujourd’hui, la plus grande partie de ses travaux se fait en public. Toutefois, de temps à autre, quand son mandat l’amène à examiner des questions délicates, il choisit de siéger à huis clos.

Le Règlement du Sénat est limpide. Selon l'article 12-16(1), un comité est autorisé à siéger à huis clos seulement pour discuter des sujets suivants :

a) la rémunération et les autres avantages sociaux offerts au personnel;

b) les contrats et les négociations contractuelles;

c) les relations de travail et le personnel;

d) un ordre du jour ou un rapport provisoire.

Ce paragraphe, qui s’applique aussi à la plupart des autres comités sénatoriaux, n’énonce pas explicitement toutes les situations qui autoriseraient le Comité de la régie interne à siéger à huis clos. Par exemple, ce comité a récemment discuté de sécurité, de litiges, de la vision à long terme et du plan de la Cité parlementaire, entre autres choses.

Il en a discuté dans la partie à huis clos de ses séances, pour assurer une franche discussion et la protection de la nature délicate des renseignements.

Dans son libellé actuel, l'article 12-16(1) limite beaucoup les situations dans lesquelles les comités sont autorisés à siéger à huis clos, particulièrement le Comité de la régie interne.

Comme vous le savez, ce comité discute d’une large gamme de questions. En conséquence, il veut obtenir la discrétion nécessaire pour se réunir à huis clos, au besoin, et ne pas être limité aux questions énumérées dans l'article 12-16(1).

Dans son vingt-neuvième rapport, ce comité a adopté une recommandation demandant au Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement d’examiner la possibilité de modifier le Règlement du Sénat pour y ajouter des critères qui s’appliqueraient particulièrement à lui.

Chers collègues, cette recommandation ne réduit en rien la détermination du Comité de la régie interne d’être transparent et responsable. Elle vise plutôt à concilier la discussion de sujets délicats et confidentiels à huis clos et les normes les plus rigoureuses de transparence et de reddition de comptes.

Je vous remercie du temps que vous m’accordez. C’est avec plaisir que je répondrai à vos questions.

Le sénateur Sinclair : Par curiosité, je vous demande pour quoi d’autre que la sécurité et les litiges le Comité de la régie interne aurait-il besoin, d’après vous, de pouvoir siéger à huis clos?

Le sénateur Marwah : C’est difficile à prévoir, mais ce pourrait être des sujets de discussion ou des décisions que le conseiller sénatorial en éthique lui soumettrait. La possibilité a été évoquée, mais elle ne s’est pas encore matérialisée. Ce pourrait être la vision à long terme et la planification de la Cité parlementaire et des déménagements, que nous ne voulons pas nécessairement faire connaître d’avance du public.

C’est très difficile à prévoir, vu que ce comité touche à toutes les questions touchant le Sénat. Il est très difficile de prévoir la nature de chaque éventuelle demande.

Le sénateur Sinclair : Le caractère non limitatif de la demande m’embarrasse.

Le sénateur Marwah : Je m’en remet à votre jugement, si vous voulez en limiter la portée, mais il est très difficile de prévoir toutes les circonstances dans lesquelles ce comité sera saisi de certaines questions.

Le sénateur Housakos a déjà présidé ce comité, et beaucoup d’entre vous possèdent l’expérience des questions dont il est saisi. Nous nous en remettons donc à votre appréciation.

Le sénateur Joyal : D’après mon interprétation de l'article 12-16 du Règlement du Sénat, le comité, en principe, siège en public et n’est autorisé à siéger à huis clos que pour des motifs exceptionnels.

Le sénateur Marwah : C’est juste.

Le sénateur Joyal : Par suite de ce qu’a dit le sénateur Sinclair, si nous autorisions le comité à siéger à huis clos pour une raison quelconque, nous serions en contradiction avec l'article 12-16.

Le sénateur Marwah : Ce n’est pas pour une raison quelconque. Nous avons mentionné trois cas où nous avons siégé à huis clos. Il nous est toujours possible de le faire, mais nous ne voulons pas que quelqu’un invoque le Règlement sous prétexte que nous avons quatre raisons pour siéger à huis clos. Ensuite, nous siégeons à huis clos avec les responsables de la sécurité, pour discuter de cybersécurité, d’informatique, de faiblesses et de remèdes qui sont appliqués. Nous ne voulons pas que ces discussions de nature confidentielle aient lieu en public.

Nous ne voulons pas non plus enfreindre le Règlement. Nous pourrions dresser une liste interminable de questions qui pourraient comprendre la sécurité, les litiges, la vision à long terme et la planification. Nous pourrions l’allonger à volonté, mais nous avons pensé nous en remettre à votre jugement pour trouver mieux qu’une liste interminable des questions dont le Comité de la régie interne est saisi.

Le sénateur Joyal : Vous comprenez comment nous percevons l’esprit et la lettre du Règlement du Sénat pour maintenir le principe des séances en public.

Le sénateur Marwah : Je comprends parfaitement le dilemme. Si vous préférez une liste, à votre gré. Vous connaissez la gamme des dossiers que traite le Comité de la régie interne. Nous pourrions, si vous le préférez, en dresser une liste détaillée.

Le sénateur Joyal : Au lieu d’énumérer tous les détails de la cybersécurité, de la sécurité sur la Colline du Parlement ou la sécurité personnelle des sénateurs, nous pourrions nous contenter de la notion générale de sécurité.

Il pourrait être utile que vous communiquiez à notre comité les sujets qui, d’après vous, conviendraient à des séances à huis clos du Comité de la régie interne. Nous pourrions ensuite essayer de trouver des notions très générales et nous vous laisserions en décider.

Le sénateur Marwah : Les questions dont nous avons été saisis, pendant mon court mandat de président, ont touché à la sécurité, notamment la cybersécurité et les vulnérabilités à ce chapitre, les remèdes à appliquer, les litiges ou la vision et la planification à long terme ainsi que le déménagement au Centre de conférences du gouvernement.

Voilà les trois questions qui se sont posées pendant mon mandat et qui me viennent à l’esprit.

Le sénateur Joyal : Nous voulons vous aider tout en respectant l’esprit du Règlement, non pas pour vous entraver, mais pour adopter des notions utiles.

Le sénateur Marwah : Si vous préférez, nous pourrions vous faire parvenir un projet de libellé et nous en remettre à votre jugement pour le réviser. Cela me convient.

Le sénateur Joyal : Cela pourrait être utile.

Le sénateur Marwah : C’est ce que j’ai demandé, ce matin, à notre dirigeante principale des services corporatifs, et elle m’a répondu que ses services et elle avaient compris que nous préférions ne pas être normatifs.

Si vous voulez, je vous communiquerai volontiers des recommandations.

Le président : J’ai quelques questions avant que nous ne parcourions la liste, pour faire suite aux questions des sénateurs Joyal et Sinclair.

Chaque comité a le droit de siéger à huis clos toutes les fois que la majorité de ses membres le juge nécessaire. D’après mon expérience, et je pense d’après la plus grande partie de notre expérience au Comité de la régie interne, je ne me rappelle pas qu’une majorité de membres ait voté contre le huis clos.

Plus précisément, et vous les avez mentionnés tout à fait convenablement, quatre sujets nous ont toujours amenés à siéger à huis clos : la sécurité, les litiges, les relations de travail et l’approvisionnement.

Vous avez rapidement évoqué le conseiller sénatorial en éthique. D’abord, il ne se présenterait jamais devant le Comité de la régie interne, parce que, nous le savons tous, en raison de notre code d’éthique, c’est un haut fonctionnaire du Parlement sans lien de dépendance avec aucun des comités. Le seul comité devant lequel il comparaîtrait serait celui de l’éthique. S’il demandait des documents, ce serait par le comité directeur de la régie interne, et non par le Comité de la régie interne.

À part les quatre sujets évidents pour siéger à huis clos, avez-vous jamais eu connaissance, par hasard, du dirigeant ou la dirigeante principale des services corporatifs ou du président? Jamais, pendant les deux années et demie de mon mandat, ai-je été saisi d’une autre question que ces quatre-là pour siéger à huis clos.

Le sénateur Marwah : Comme je l’ai dit, les deux qui se sont posées pendant mon court mandat de président ont été la sécurité et les litiges. Bien que j’aie entendu parler de demandes de renvoi formulées par le conseiller en éthique, elles sont arrivées au comité directeur. Vous avez raison.

Le sénateur Gold : En plus de vos recommandations particulières que vous communiqueriez, je me demande si vous pourriez y ajouter le ou les principes qui, selon vous, soulignent le paragraphe en vigueur et les ajouts que vous recommanderiez.

Nous pourrions notamment organiser la décision de se retirer à huis clos d’après des exemples précis ou en fonction d’un principe, protection de la vie privée ou tout autre principe. Cela pourrait nous aider à trouver la formulation qui vous serait utile.

Le sénateur Marwah : Quand nous vous communiquerons les catégories supplémentaires, si vous me passez le terme, nous les justifierons aussi.

[Français]

Le sénateur Maltais : Je vais laisser la question de la sécurité aux experts en sécurité, mais je vais soulever un autre point. Le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration représente le Sénat; nous sommes d’accord là-dessus? Le Sénat est composé de sénateurs. On s’entend là-dessus? Lorsqu’un sénateur a un litige avec le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration — et je ne conteste absolument pas l’idée que ses délibérations peuvent se tenir à huis clos —, comment se fait-il que la décision que vous prenez à huis clos soit rendue publique et que le sénateur concerné ne puisse pas recevoir le procès-verbal de ces décisions?

[Traduction]

Le sénateur Marwah : Je pense que c’est une question d’équilibre entre le besoin de protéger la vie privée et celui d’être transparent. À ma connaissance, nous avons parfois publié nos rapports, même si les discussions avaient eu lieu à huis clos; mais ces rapports traitaient plutôt de questions générales que particulières.

[Français]

Le sénateur Maltais : Soit, mais dans l’esprit de la justice, si la personne veut en appeler de la décision, elle n’a pas de bases pour le faire, parce qu’on ne peut pas recevoir le procès-verbal des délibérations. Dans une cour, on peut recevoir les délibérations des juges et la preuve apportée par les procureurs. Dans ce cas-ci, on ne peut pas recevoir le procès-verbal. Je ne demande pas de le rendre public, mais je dis que la personne concernée devrait avoir le droit de recevoir ce procès-verbal si jamais elle désire appeller de la décision.

[Traduction]

Le sénateur Marwah : Je considérerai ce que vous venez de dire avec grand soin. Je ne vois aucune raison. Votre question semble simple en principe.

[Français]

Le sénateur Maltais : Ce n’est pas très simple.

[Traduction]

Le sénateur Marwah : Je ne voulais pas dire « simple ». Je suis désolé.

[Français]

Le sénateur Maltais : Écoutez-moi, ce n’est pas très simple. Personnellement, j’ai fait une demande à cinq reprises et on me réfère d’un article à l’autre, de fonctionnaire en fonctionnaire. Je veux un procès-verbal d’une décision qui a été rendue dans un cas précis qui me concerne, mais je ne peux pas l’obtenir. Vous représentez les sénateurs, prenez les mesures nécessaires pour que cela ne se reproduise pas et qu’on fournisse les preuves. Merci.

[Traduction]

Le sénateur Marwah : Je regrette ce choix malheureux. Je voulais dire que votre demande semblait appropriée. C’est ce que je voulais dire. La demande semble raisonnable, et je l’examinerai.

Le sénateur Wells : Deux ou trois choses me viennent à l’esprit. À part la sécurité, les relations de travail, l’approvisionnement et les litiges, d’autres motifs font siéger un comité à huis clos. Peut-être pas le Comité de la régie interne, qui ne produit pas beaucoup de ce type de rapports. L’un des motifs serait l’examen de l’ébauche d’un rapport qui fait la navette. C’est un peu plus à la bonne franquette, mais pas nécessairement confidentiel.

Je vous incite à vous méfier de la composition d’une liste, nécessairement limitative. Elle diminuerait la souplesse que nous aimons tous posséder, au comité directeur, à la présidence d’un comité ou par l’avis professionnel d’un greffier. Il ne faut pas que les décisions de siéger à huis clos se limitent nécessairement aux questions de sécurité, de relations de travail, d’approvisionnement, de litige ou à un élément d’une liste, alors que nous avons toujours pu discuter par l’entremise d’un comité directeur ou grâce à l’avis d’un greffier.

Un autre cas me vient à l’esprit. Ce n’est pas précis, mais, très souvent, particulièrement quand j’étais membre du Comité de la régie interne, il était demandé que ce soit pour les sénateurs seulement. Visiblement, c’est à huis clos et ça peut être étranger à tout ce qui figurerait sur une liste abrégée.

Pour le compte rendu, je recommanderais de conserver la souplesse dont nous disposons normalement quand nous envisageons de siéger à huis clos pendant une partie de la séance.

Il y a sept ou huit ans, dans mes discussions avec le sénateur Tkachuk, quand j’examinais la structure d’un autre comité proposé, et peut-être aussi un pour corriger le compte rendu, il a fait siéger en public le Comité de la régie interne, qu’il présidait. C’est passé inaperçu: ce n’était pas télévisé; les journalistes, en général, ne se sont pas montrés, mais je sais que c’est lui qui a inauguré cette pratique.

La sénatrice McCoy : La question mérite une bonne réflexion. Permettez-moi d’abord de dire que, dans mon esprit, le mot « litige » a un sens trop général. Il faudrait être un peu plus précis. Un litige est public. Alors pourquoi en discuter à huis clos?

Je suppose que ce qui ressemble aux conversations entre un avocat et son client devrait rester confidentiel. C’est l’analogie que j’établirais.

Si nous discutons de la position du Sénat sur une affaire à laquelle nous sommes mêlés et si nous sommes accompagnés d’un conseiller juridique, je pense que ce devrait être confidentiel, parce que c’est la nature du lien entre l’avocat et son client. Affirmer qu’un litige n’est évoqué qu’à huis clos, c’est, d’après moi, trop général.

Je favorise la souplesse, mais je penche davantage du côté du sénateur Maltais. Je pense que c’est un des gros problèmes dont personne ne veut parler, mais qui s’incruste. C’est l’un des défauts structurels que nous avons négligés. Je continue d’espérer que le Sénat moderne examinera en profondeur comment se prennent les décisions qui touchent chaque sénateur en ce qui concerne les dépenses, l’éthique et les conflits d’intérêts.

Il existe un processus particulier. Il est excellent. Il n’est pas parfait. Je pense que la confidentialité imposée à ce processus est peut-être excessive aussi, parce que ça conduit à la méfiance de la part du public. Le public se méfie de tout ce qui se fait en secret. Alors, chers collègues, il faut y réfléchir.

Toutefois, en ce qui concerne les dépenses, dans le Règlement administratif du Sénat, aucun processus de ce genre n’est prévu. Nous avons été réputés pour prendre sur les sénateurs des décisions de façon arbitraire et dans l’ignorance, certaines de ces décisions à huis clos et dans l’ignorance et beaucoup d’entre elles de façon arbitraire. Je l’ai constaté l’année dernière, par exemple.

Cela précède les dernières élections. J’ai vu tous les sénateurs y participer, peu importe la date de leur nomination. C’est visiblement un problème structurel et l’une des priorités que nous devrions régler pour moderniser le Sénat. Cela exige une réflexion fouillée, parce que, encore une fois, il y a conflit d’intérêts, des intérêts privés et institutionnels.

Je vous laisse ces sujets de réflexion, parce que, d’après moi, nous devrons faire des choix. Il serait très utile que vous nous communiquiez des idées de processus pour prendre ces décisions. Si vous consultiez le sénateur Joyal, la sénatrice Andreychuk et moi-même, d’ailleurs, nous avons une ou deux idées en réserve, parce que nous essayons depuis un certain temps de persuader les sénateurs d’examiner sérieusement ce problème.

Depuis combien de temps essayez-vous, sénateur Joyal? Depuis huit ou neuf ans? La sénatrice Andreychuk a également essayé.

Je commencerais par un principe, le plus grand principe de tous, c’est-à-dire l’intérêt du public, et non notre intérêt ou même l’intérêt de l’institution. Ce n’est certainement pas l’intérêt d’un sénateur. L’intérêt du public devrait toujours être le principe phare. Même si les éléments relatifs aux réunions à huis clos contenus dans l’article 12-16 du Règlement ont peut-être besoin de peaufinage, je crois qu’ils ont été rédigés il y a de nombreuses années. Ils n’ont pas été modifiés depuis très longtemps. En 2018, l’intérêt du public exige plus de transparence et les affaires doivent être menées en public beaucoup plus souvent qu’en 1991, lorsque ces règles ont été révisées en profondeur pour la dernière fois.

Le sénateur Marwah : Sénatrice McCoy, si vous me le permettez, j’aimerais répondre brièvement à ce commentaire. Il est juste de dire que la décision de se réunir à huis clos n’est jamais prise à la légère. La question est souvent traitée par le comité de direction et le comité, mais nous le faisons seulement pour équilibrer les besoins entre la transparence, la reddition de comptes et l’intérêt du public, comme vous l’avez souligné. En effet, il y a des enjeux de nature délicate et confidentielle sur lesquels nous devons prendre une décision. C’est la réalité des travaux du CIBA. Nous tentons continuellement d’atteindre un équilibre entre ces besoins contradictoires.

Je comprends qu’il y a des occasions où nous prenons une décision à huis clos et un rapport sur cette décision est rendu public lorsque c’est possible. Puisque nous voulons accroître la transparence, nous le faisons chaque fois que c’est possible. Toutefois, CIBA traite des enjeux confidentiels et délicats, et nous avons donc besoin d’une certaine souplesse à cet égard.

[Français]

La sénatrice Dupuis : Bonjour, sénateur Marwah et madame Legault. Il me semble que la question des réunions à huis clos du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration n’est pas une question isolée en soi. Le Comité de la régie interne intervient avec un mandat très précis et une certaine autorité, et d’autres comités fonctionnent avec leur mandat et leur autorité.

À l’heure actuelle, il me semble que ce n’est pas cohérent d’un comité à l’autre pour ce qui est des questions qui se recoupent et qui peuvent amener autant le Comité sur l’éthique que le Comité de la régie interne à se pencher sur une question. Comment harmoniser le tout, qu’il s’agisse des processus, des discussions ou des séances tenues à huis clos ou en public?

Il y a deux minutes, le sénateur Wells disait que le sénateur Tkachuk... Il y a l’ère Tkachuk, l’ère Marwah, dans le sens de l’époque. Si les principes ne sont pas clairs, il y a un problème de transparence et d’application de la règle en ce qui a trait aux séances à huis clos.

Il y a un principe qui m’apparaît très élevé dans la hiérarchie, et c’est l’imputabilité. Le Comité de la régie interne prend des décisions sur des ressources qui sont publiques, et les gens n’acceptent plus que ces décisions soient prises derrière des portes closes. Que représente pour le Comité de la régie interne l’imputabilité et qu’est-ce qu’elle a comme effet, au-delà de l’intérêt public et de l’équilibre entre les droits d’un sénateur ou d’une sénatrice qui est concerné par une décision ou une délibération et son droit à la primauté? Il me semble que ces principes doivent être examinés du point de vue de l’institution et des sénateurs, et pas seulement du point de vue des sénateurs. Le Comité permanent de la régie interne est un comité du Sénat. Donc, la question de l’imputabilité du comité est aussi une question d’imputabilité du Sénat. Il y a une relation avec le privilège parlementaire. Il faut déterminer jusqu’où on pense que cela nous autorise à aller, dans un sens ou dans un autre, en ce qui a trait aux séances à huis clos.

La situation actuelle m’apparaît délétère, parce qu’on entend souvent à l’interne des commentaires extrêmement négatifs sur le Comité permanent de la régie interne. J’ai siégé un an au comité, et je ne pense pas qu’on ait pris de décisions qui n’avaient aucune allure, mais je crois que les gens doivent bien comprendre les principes et les règles, et les raisons pour lesquelles on se donne ces règles-là, en sachant qu’il y a quelque chose de plus cohérent avec les autres processus qui existent en dehors du Comité permanent de la régie interne. Merci.

[Traduction]

Le sénateur Woo : Merci, sénateur Marwah. Chaque fois que nous abordons la question d’une liste détaillée des enjeux pour lesquels il est permis de se réunir à huis clos ou d’un pouvoir plus général vous donnant un degré de discrétion plus élevé, il reviendra au comité saisi des enjeux en question de décider s’il se réunira à huis clos ou non. Nous ne devrions pas oublier que cela doit faire l’objet d’une décision majoritaire au sein du comité, ce qui représente une façon importante de prévenir tout recours abusif à la possibilité de se réunir à huis clos.

C’est-à-dire que d’une certaine façon, nous devons faire confiance à nos collègues du CIBA. C’est un comité qui compte plusieurs membres, et ils adhèrent également aux principes que nous avons énoncés sur la nécessité d’assurer la transparence et la reddition de comptes. Ils devront prendre une décision à un moment donné dans le cadre d’une discussion sur les circonstances auxquelles ils font face, et nous ne pouvons pas prévoir maintenant quelles seront ces circonstances.

Pour cette raison, puisque je fais confiance à la capacité de mes collègues membres de ce comité de respecter les principes qui sous-tendent cette discussion, nous devrions être assez permissifs sur les réunions à huis clos. Autrement dit, nous devrions leur accorder un certain pouvoir discrétionnaire à cet égard.

Même si nous énumérons six enjeux pour lesquels nous considérons que les membres peuvent se réunir à huis clos, en réalité, à un certain moment, les membres devront déterminer, par exemple dans le cas d’un litige, la nature de ce litige. Il reviendra aux membres du comité de décider, à ce moment-là, s’il convient de se réunir à huis clos ou non. Ainsi, cela donne une fausse impression de sécurité, et c’est pourquoi j’aurais tendance à favoriser une règle décisionnelle relativement permissive à cet égard.

Le sénateur Marwah : Si vous me le permettez, sénateur Woo, j’aimerais répondre à ce commentaire. Je ne crois pas que nous nous sommes déjà réunis à huis clos sans avoir le soutien de tout le comité.

La sénatrice Batters : J’aimerais répondre à un point soulevé par la sénatrice Dupuis. Il ne fait aucun doute, pour la plupart d’entre nous qui avons été membres du CIBA au cours des dernières années, que la transparence et la reddition de comptes envers la population canadienne ont toujours été nos priorités. Nous avons mis l’accent là-dessus après les problèmes qui ont émergé il y a quelques années. Nous avons fait tout ce que nous pouvons et nous continuons de faire tout ce que nous pouvons pour apporter des changements à l’ensemble du Sénat et pour veiller à ce que les enjeux traités par le CIBA soient transparents et qu’ils fassent l’objet d’une reddition de comptes.

La grande partie des réunions et des délibérations du CIBA sont publiques depuis plusieurs années, comme l’a indiqué le sénateur Wells, et cela remonte à l’époque où le sénateur Tkachuk et le sénateur Housakos étaient présidents. De plus, nos réunions sont télévisées. La grande partie des délibérations du CIBA ne se font plus dans le cadre de réunions privées à huis clos. Même si les médias continuent parfois de véhiculer cette image, ce n’est plus le cas.

Il y a certaines circonstances restreintes. Nous tentons de faire de notre mieux pour les définir, mais la transparence et la reddition de comptes sont à l’avant-plan de ce comité.

Le président : Je vais entamer la deuxième série de questions en précisant le contexte, afin de réitérer ce qu’ont dit le sénateur Wells et la sénatrice Batters. Notre priorité a toujours été la transparence et la reddition de comptes. Nous avons fait des pieds et des mains pour le prouver.

Le sénateur Wells a absolument raison lorsqu’il dit qu’il y a de nombreuses années, le sénateur Tkachuk avait fait les premières démarches pour rendre publiques les délibérations du Comité de la régie interne. Nous avons même été plus loin en tenant des réunions complètes en public. Nous ne nous sommes pas arrêtés aux réunions publiques, car nous avons également diffusé nos délibérations pour la première fois il y a quelques années.

Cela a établi un tel précédent, chers collègues, qu’aujourd’hui, si le Bureau de régie interne de la Chambre mène une partie de ses réunions en public, c’est en grande partie parce que le Sénat a ouvert la voie. Je suis fier de dire que nous étions le premier Comité de la régie interne du Commonwealth à diffuser ses délibérations. C’est un fait important à souligner.

Nous devrons continuer de suivre ce principe. Nous devrons toujours résister à la tentation de faire les choses à huis clos à moins que ce soit absolument nécessaire. Actuellement, selon ce que je comprends, le Règlement prévoit que les questions relatives à la main-d’œuvre et aux litiges soient traitées à huis clos. Je crois qu’il serait aussi logique d’ajouter les questions d’approvisionnement et de sécurité. À l’exception de ces quatre éléments, je suis loin d’être convaincu que d’autres éléments devraient automatiquement faire l’objet d’une réunion à huis clos.

Je tenais donc à formuler ces quelques commentaires. La deuxième série de questions sera entamée par notre vice-président, le sénateur Sinclair.

Le sénateur Sinclair : Mon opinion diffère un peu de celle du président. Il y a probablement de nombreuses raisons pour lesquelles il sera nécessaire de mener des délibérations à huis clos. J’ai travaillé dans le milieu judiciaire et je sais que les délibérations à huis clos sont nécessaires dans de nombreuses circonstances dans ce contexte. Habituellement, ces circonstances et leurs processus sont bien définis dans la loi. Dans l’ensemble, on reconnaît que certaines questions judiciaires doivent faire l’objet de délibérations à huis clos.

Le Comité de la régie interne est l’un des rares comités qui ont des pouvoirs différents des pouvoirs habituels des autres comités sénatoriaux, car le paragraphe 19.1(1) de la Loi sur le Parlement du Canada stipule que ce comité est visé par la disposition suivante :

Dans l’exercice des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la présente loi, le Comité a la capacité d’une personne physique et peut [...]

b) faire tout ce qui est nécessaire ou accessoire à l’exercice de ses pouvoirs ou à l’exercice de ses fonctions.

C’est peut-être un pouvoir de se réunir à huis clos, mais il faudrait mener des recherches juridiques pour s’en assurer. Vous devriez peut-être approfondir la question.

L'article 19.5(1) permet au comité d’établir des règlements en ces termes:

Le Comité peut prendre des règlements [...]

c) régir tout ce qui est nécessaire ou accessoire à l’exercice de ses pouvoirs et à l’exercice de ses fonctions.

Encore une fois, il se peut que cela donne au comité le pouvoir de prendre des règlements liés aux délibérations à huis clos et dans ce cas, nous n’aurons peut-être même pas besoin de modifier le Règlement. Vous devriez peut-être en parler au conseiller juridique du comité.

Ce qui me préoccupe, c’est que si nous modifions le Règlement comme vous le demandez, il ne sera pas modifié seulement pour vous. En effet, il sera également modifié pour tous les autres comités. À moins que nous rédigions une règle qui vise expressément le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration, il s’agira d’une règle ou d’une modification globale qui visera tous les comités.

Enfin, j’aimerais préciser que personnellement, je n’ai aucun problème à allonger la liste pour inclure des enjeux liés à la sécurité et aux litiges si ces éléments sont définis de façon appropriée. Il devrait s’agir de litiges qui touchent le comité ou les sénateurs et le comité ou les sénateurs et le Sénat. Je veux que vous sachiez que ces enjeux ne m’inquiètent pas beaucoup, mais il pourrait y avoir d’autres enjeux sur lesquels vous souhaitez avoir des pouvoirs.

Votre comité a-t-il examiné ces deux articles de la Loi sur le Parlement du Canada?

Le sénateur Marwah : Pour être honnête, sénateur Sinclair, cela n’a pas été porté à mon attention. Je ne les ai pas personnellement examinés. Encore une fois, il serait préférable de définir exactement les raisons pour lesquelles nous pourrions nous réunir à huis clos, plutôt que d’être visés par un autre ensemble de règles qui s’appliqueraient seulement au CIBA. Pour des raisons de transparence, il serait toujours préférable de redéfinir cela ici.

Pour répondre à votre deuxième question sur la question de modifier le Règlement pour tous les comités, je ne crois pas que ce serait le cas. Nous espérions que cela s’appliquerait seulement au CIBA, puisque ce comité se penche sur des questions relatives à la sécurité et aux litiges, mais pas les autres comités. Ce changement n’est pas censé viser tous les comités.

Le président : Vous avez absolument raison. Le Comité permanent de la régie interne a le mandat précis de traiter ces enjeux, et les autres comités sénatoriaux ne s’occupent pas des enjeux liés à la sécurité, aux litiges ou aux questions administratives.

[Français]

La sénatrice Dupuis : C’est ce que je voulais dire plus tôt lorsque je parlais de la cohérence entre les différents textes réglementaires régissant le Sénat. Il y a l’article 19.2, mais aussi l’article 19.1 de la Loi sur le Parlement du Canada qui indique ceci :

Dans l’exercice de ses pouvoirs et fonctions en vertu de la présente loi, le comité est placé sous l’autorité du Sénat et est assujetti à ses règles.

Il y a la question technique du canal par lequel cela doit passer si l’on veut que le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration puisse se réunir à huis clos. C’est l’occasion de le faire à ce moment-ci.

Quand je parle d’imputabilité, je suis d’avis — je le précise — qu’on ne doit pas laisser l’entière responsabilité aux individus qui sont membres du comité. Nous présumons la bonne foi; tout le monde est de bonne foi et tout le monde l’a été par le passé. Ma position, c’est qu’il y a une réalité institutionnelle en cause qui n’est pas prise en charge si on la laisse reposer sur les épaules de sénateurs qui y siègent. Ce n’est pas pour rien que j’ai mentionné le fait que j’y siégeais. Il y a une responsabilité.

Je vais vous donner un exemple très précis : demain matin, nous voulons prendre une décision à CIBA. Nous faisons revenir le vérificateur général pour examiner les dépenses. Opération numéro 2 : qui va décider si la délibération et la décision seront à huis clos ou en public? Nous avons un exemple très précis et récent sous les yeux. Ma préoccupation n’est pas de dire que cela se passait mal auparavant. Des choses se sont faites ici et peuvent continuer de se faire, mais on ne doit pas faire reposer la responsabilité institutionnelle sur les individus qui composent un comité à une époque donnée.

[Traduction]

Le sénateur Marwah : Sénatrice Dupuis, c’est une question stratégique très intéressante. Je ne sais pas. Si cela se produisait, je crois que nous consulterions tous les membres. En effet, une telle situation affecte tout le monde. J’espère que tous les membres du Sénat participeraient à la prise de cette décision, et pas seulement les membres du CIBA.

Cette question ne concerne pas seulement le CIBA. Je présume que cela serait fait de concert avec tous nos conseillers, nos avocats et nos autres intervenants. À mon avis, cette décision ne serait pas prise par le CIBA, mais par l’ensemble du Sénat.

Le président : Si vous me le permettez, j’aimerais ajouter que je confirme la réponse du président du Comité de la régie interne, le sénateur Marwah. À titre de contexte, j’aimerais rappeler aux nouveaux sénateurs qui sont ici depuis moins longtemps que le reste d’entre nous que le CIBA ne prend aucune décision en vase clos. En effet, chaque décision prise par le CIBA, chaque décision prise par ce comité, est renvoyée au Sénat du Canada, où les délibérations se poursuivent.

Si le Sénat du Canada n’approuve pas la décision, le CIBA n’a aucun pouvoir exclusif de faire venir un auditeur général. Il n’a pas le pouvoir d’accorder un contrat de 2 000 $. Il n’a pas le pouvoir d’accorder un contrat de 200 $ sans approbation.

Chaque rapport qui franchit les étapes jusqu’au Sénat est approuvé par chacun d’entre nous, et c’est le cas dans chaque comité. Comme le président l’a souligné à juste titre, les décisions ne sont pas prises en vase clos.

Malgré les pouvoirs très limitatifs que confère la Loi sur le Parlement du Canada au CIBA, ce processus existe réellement. Nous pouvons demander au conseiller juridique et au greffier du Parlement de nous donner une séance d’information à cet égard, mais ce pouvoir limitatif est accordé à l’ajournement du Sénat, au déclenchement d’une campagne électorale ou en période de relâche parlementaire. Le Comité de la régie interne a donc le pouvoir de poursuivre les activités administratives du Sénat. Je tenais à le préciser.

[Français]

Le sénateur Dalphond : J’irai dans le même sens que vous et la sénatrice Dupuis pour faire remarquer que le Comité de la régie interne est un comité du Sénat. La disposition de la Loi sur le Parlement du Canada n’est pas d’en faire une identité séparée du Sénat, mais de préciser, comme vous l’avez si bien dit que, lorsqu’il y a prorogation, tous les comités sont dissous, sauf le Comité de la régie interne, parce qu’il faut continuer de gérer la maison d’un point de vue administratif.

Deuxièmement, l’article 1-1(1) du Règlement du Sénat prévoit ce qui suit :

Le Règlement du Sénat régit les travaux du Sénat et de ses comités; les dispositions du Règlement l’emportent sur ses annexes et les pratiques.

Donc, notre Règlement doit être le principe qui guide tous les comités dans leurs travaux, y compris les membres des comités lorsqu’ils votent sur certaines questions de procédure.

Troisièmement, il m’apparaît que le principe de la transparence est celui qui doit nous guider. Il est dans l’intérêt public que la transparence soit pratiquée au plus haut degré dans une institution comme le Parlement et ses Chambres, comme le Sénat et ses comités. Comme au tribunal, il est d’intérêt public de siéger en public. Ce n’est qu’exceptionnellement que le tribunal siège à huis clos.

Il m’apparaît que la même règle doit s’appliquer ici. L’intérêt public commande que le maximum de nos délibérations soient publiques et que nous ne puissions qu’exceptionnellement, pour des circonstances que l’on peut justifier dans l’intérêt public et en convaincre le public, siéger à huis clos. Il faut que notre Règlement soit précis et mentionne les exceptions de façon claire. Si ce n’est pas mentionné comme étant un cas exceptionnel, le comité doit, par principe, siéger en public et n’a pas le pouvoir de déroger à cela.

Quant aux exceptions prévues à l’article 12-16 du Règlement, on parle de contrats et de négociations contractuelles. Cela couvre sans doute une partie des préoccupations mentionnées plus tôt. La liste est peut-être aussi un peu redondante. On pourrait la repenser. Peut-être que « les relations de travail et le personnel » et « la rémunération et les autres avantages offerts au personnel » pourraient être regroupés dans un seul alinéa, puisqu’il s’agit de la même idée. C’est toujours le personnel et ses conditions de travail. On devrait peut-être ajouter une considération en matière de sécurité, mais je serais contre un pouvoir trop large dévolu au comité de siéger à huis clos comme bon lui semble. Cela serait contraire aux principes qui doivent nous guider, c’est-à-dire la transparence et la reddition de comptes au public des fonds que nous gérons.

Le sénateur Maltais : Je suis tout à fait d’accord avec le sénateur Dalphond et, en principe, avec ce qu’a dit le sénateur Sinclair. Le Règlement actuel le permet. La question de la sécurité est très importante. Elle n’était pas primordiale il y a cinq, six ou sept ans. Il a fallu un attentat ici au Parlement — bon nombre d’entre nous l'ont vécu — pour que la sécurité se resserre. Cela est devenu un point important pour le comité, qui s’occupe de la gestion de la sécurité.

C’est la même chose dans tous les parlements. J’étais à l’Assemblée nationale le 8 mai 1984. Par la suite, ils ont mis en place un système de sécurité et ne l’ont pas rendu public pour des raisons de sécurité. Les gardiens ont été armés.

Sur ce point, vous avez parfaitement raison, sénateur Marwah, que la sécurité doit demeurer confidentielle. Lorsqu’on élabore un plan de sécurité, que ce soit dans un Palais de justice ou dans un édifice privé, on ne le publie pas dans le journal le lendemain matin. On garde cela confidentiel, à moins de raisons exceptionnelles, comme lorsqu’il s’agit de fournir des renseignements au Président de la Chambre.

Dans le cas de la gestion des contrats, c’est la même chose, parce que cela relève de la responsabilité du sénateur. Nous sommes 105 au Sénat. Nous ne gérons pas tous cette responsabilité contractuelle de la même façon. Cela dépend de nos besoins. Vous avez raison que cela doit demeurer confidentiel, mais à l’intérieur du Règlement actuel, rien ne vous interdit de le faire.

Si on doit faire une exception pour le CIBA, on devra également le faire pour le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense, car ce comité traite de questions très importantes. Allons-nous lui demander de siéger à huis clos? Il y a également le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international qui discute de sujets forts importants. Allons-nous lui demander de siéger à huis clos pour débattre de certains points? Ne devrait-on pas scruter, comme le suggère le sénateur Sinclair, le Règlement actuel et y apporter des amendements à certains articles plutôt que d’élaborer un règlement spécifique pour le Comité de la régie interne? C’est la question à laquelle on doit répondre, je crois.

[Traduction]

Le sénateur Joyal : J’aimerais revenir au point où le sénateur Sinclair a proposé une façon d’éviter la responsabilité de rédiger des règles et de les renvoyer au CIBA afin qu’il rédige des règles pour lui-même.

Je propose un raisonnement qui pourrait mener à une conclusion différente. Comme la sénatrice Dupuis l’a mentionné, l'article 19.1(4) énonce ce qui suit :

Dans l’exercice de ses pouvoirs et fonctions en vertu de la présente loi, le comité est placé sous l’autorité du Sénat et est assujetti à ses règles.

Il ne fait aucun doute que la Loi sur le Parlement du Canada reconnaît que le CIBA a le pouvoir de prendre des règlements pour s’acquitter de ses tâches. Ses tâches sont très bien décrites à l’article 19.5:

(1) Le comité peut, par règlement :

a) régir l’utilisation, par les sénateurs, des fonds, biens, services et locaux mis à leur disposition dans le cadre de leurs fonctions parlementaires;

b) prévoir les conditions — applicables aux sénateurs — de gestion et de comptabilisation des fonds visés à l’alinéa a);

À mon avis, il ne fait aucun doute que le CIBA a le pouvoir de prendre des règlements relatifs à ces deux mandats et pouvoirs. Lorsque le CIBA exerce ce pouvoir, il est assujetti au Règlement du Sénat. En effet, l’article 4 énonce ce qui suit :

Dans l’exercice de ses pouvoirs et fonctions en vertu de la présente loi, le comité est placé sous l’autorité du Sénat et est assujetti à ses règles.

Comme je l’ai dit, le Règlement du Sénat prévoit, à l’article 12-16, les circonstances très précises dans lesquelles le CIBA peut siéger à huis clos, comme tout autre comité. Vous êtes parvenus à la bonne conclusion en revenant au Sénat, puis en nous renvoyant la question, pour adopter des règles qui vous donneraient une plus grande marge de manœuvre pour déterminer si vous pouvez siéger à huis clos.

Je ne serais pas tenté de vous renvoyer la question. À mon avis, vous avez fait ce qu’il fallait en interprétant ces articles comme indiquant que vous deviez vous adresser au Sénat, qui nous renverrait ensuite la question.

Le sénateur Marwah : J’aimerais formuler un commentaire. Après vous avoir entendu et après avoir entendu le sénateur Dalphond, même si on pouvait s’en remettre aux règlements qui régissent le CIBA, il me semble que cela serait un délit d’initiés. J’aimerais beaucoup mieux que le Règlement du Sénat approuve expressément ce que nous pouvons ou ne pouvons pas faire, compte tenu du vaste mandat du CIBA, plutôt que d’être régis par un autre ensemble de règles, pour être honnête. N’oubliez pas que la transparence est primordiale pour nous.

Le président : Chers collègues, s’il n’y a pas d’autres questions, nous allons terminer.

Nous remercions le Comité de la régie interne d’avoir attiré notre attention sur cette question intéressante. Je crois qu’il s’agit d’une solution à la recherche d’un problème. Je crois également qu’il est impératif que le Règlement permette au Comité de la régie interne de fonctionner de façon appropriée et que nous n’enlevions jamais aux sénateurs leurs droits et leurs privilèges de s’exprimer au Sénat et au sein d’un comité.

Nous vous reviendrons sur cette question rapidement.

Le sénateur Sinclair : Ils nous reviendront sur la question.

Le président : Ils nous fourniront quelques renseignements, sénateur. Nous leur reviendrons également sur la question, car je demanderai au greffier et aux analystes de distribuer des renseignements aux sénateurs au cours des prochaines semaines, afin que nous puissions lire, pendant les vacances, des documents intéressants sur les règlements qui s’appliquent au Comité de la régie interne.

[Français]

La sénatrice Dupuis : J’aimerais poser une question qui est liée à ce que vous venez de dire. Serait-il possible de faire comparaître ce greffier au comité?

Le président : Absolument. Nous allons commencer par distribuer l’information à tous les membres. Ensuite, dès le début de la nouvelle année, nous inviterons des témoins à comparaître.

[Traduction]

À ce propos, la réunion de la semaine prochaine sera remise à l’année prochaine, car c’est le sprint final et nous avons de nombreuses questions législatives au programme.

Merci, chers collègues.

(La séance est levée.)

Haut de page