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Sous-comité du budget des dépenses du Sénat et des budgets de comités

 

Comité permanent de la Régie interne, des budgets et de l'administration

Délibérations du Sous-comité du budget des dépenses du Sénat

Fascicule no 1 - Témoignages du 5 mai 2016


OTTAWA, le jeudi 5 mai 2016

Conformément à l'article 12-7(1) du Règlement, le Sous-comité sur le budget du Sénat du Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration se réunit aujourd'hui, à 12 h 49, pour étudier des questions financières et administratives.

Le sénateur David M. Wells (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : J'aimerais vous souhaiter la bienvenue à la quatrième réunion du Sous-comité sur le budget du Sénat. J'aimerais également souhaiter la bienvenue à notre témoin, la sénatrice McCoy, à cette réunion du sous-comité, ainsi qu'à la sénatrice Omidvar et au sénateur Pratte. Il s'agit de votre première visite à notre sous-comité. Bienvenue. Nous n'attendrons pas la sénatrice Jaffer, la vice-présidente du sous-comité, mais je suis sûr qu'elle se joindra à nous dès qu'elle le pourra.

Sénatrice McCoy, comme vous le savez, on a demandé au sous-comité d'examiner la structure du budget du bureau du leader du gouvernement, ainsi que l'ensemble des crédits budgétaires des agents politiques. Jusqu'ici, nous avons entendu les témoignages des sénateurs Cowan, Carignan et Harder, ainsi que de Charles Robert, qui a comparu hier soir et qui nous a donné un excellent aperçu de l'histoire de notre système parlementaire composé d'un gouvernement et d'une opposition, un système qui permet d'atteindre un équilibre législatif. Je vous encourage tous à lire la transcription de cette réunion. C'était un excellent aperçu, et je crois que nous avons tous appris quelque chose.

Comme vous êtes facilitatrice du groupe de travail indépendant et non partisan, nous souhaitons entendre votre avis sur la question à l'étude. Nous aurons tous des questions à vous poser, j'en suis sûr, mais je vais d'abord vous donner la parole si vous souhaitez livrer un exposé.

L'honorable Elaine McCoy : Je vous remercie de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui. J'ai lu les transcriptions de toutes les réunions qui se sont déroulées jusqu'ici, y compris la transcription de la réunion d'hier soir. Je me suis rendu compte que les différentes descriptions du sujet à l'étude créaient beaucoup de confusion, et c'est pourquoi j'ai décidé de rédiger mon résumé personnel des faits. J'aimerais donc vous le distribuer.

Le président : Souhaitez-vous déposer ce document?

La sénatrice McCoy : Oui.

Le président : Est-il bilingue?

La sénatrice McCoy : Non.

Le sénateur Downe : Il ne peut pas être déposé. Tous les documents déposés doivent l'être dans les deux langues officielles.

Le sénateur Tannas : Nous pouvons convenir de les déposer.

Le sénateur Downe : Je ne suis pas d'accord. Si j'étais francophone unilingue et que des documents en anglais étaient déposés, même si je pouvais me débrouiller en anglais, je serais mal à l'aise. C'est inapproprié. Nous avons une politique à cet égard.

La sénatrice McCoy : Dans ce cas, je vais présenter une motion pour les déposer en français et en anglais, et je fournirai la version française plus tard.

Le sénateur Campbell : Ce serait parfait.

La sénatrice McCoy : Il est beaucoup plus facile de voir ce dont nous parlons lorsque les faits sont étalés devant nous. C'était mon premier commentaire.

Mon deuxième commentaire, c'est qu'après avoir lu certaines des transcriptions et des descriptions des membres indépendants de la Chambre des lords, j'aimerais faire une observation, et c'est que tous les pairs vont et viennent, si je peux m'exprimer ainsi. Un grand nombre d'entre vous ont regardé, par exemple, la série Downton Abbey, qui a duré six ans, et vous connaissez le personnage de Lord Grantham. Au cours des six années qu'a duré la série, on ne voit jamais ce personnage se présenter à la Chambre des lords. C'est une situation normale pour les pairs en Angleterre, et c'est la raison pour laquelle ils ne reçoivent pas de salaire. Ils sont payés selon leur présence quotidienne, et ce processus est assez récent.

Comme j'aime le répéter, la Chambre des lords est un excellent endroit pour trouver l'inspiration, mais ce n'est pas un précédent exact, et cela ne l'a jamais été. Lorsque nous avons créé le Sénat du Canada en 1867, nous l'avons décrit nous-mêmes. Les Canadiens l'ont ensuite envoyé de l'autre côté de l'Atlantique, ont rédigé la loi et l'ont présentée par l'entremise de Lord Carnarvon qui, comme je l'ai dit à la Chambre l'autre jour, était le parrain de la première Acte de 1867 sur l'Amérique du Nord britannique. Il avait le siège de Highclere Castle, un autre lien qu'on peut établir avec la série Downton Abbey.

Le président : J'aurais aimé avoir regardé cette série afin de comprendre votre référence.

La sénatrice McCoy : Ce qui est également comique au sujet de Lord Carnarvon, c'est que son surnom était Twitters; dans l'ensemble, c'était donc un homme assez moderne.

Nous sommes une institution unique. Je fais partie du Sénat depuis le 24 mars 2005. C'était évidemment le 100e anniversaire de l'entrée de l'Alberta dans la Confédération, et cela a donc toujours été une date très importante pour moi. On m'a dit que je pouvais représenter le parti de mon choix. J'ai littéralement été initiée à la vie politique par Peter Lougheed. C'était mon mentor. J'ai tout appris de lui. C'était un progressiste-conservateur. Je me suis donc jointe au Parti progressiste-conservateur de l'Alberta, et je me considère donc une progressiste-conservatrice. Manifestement, lorsque je suis arrivée à Ottawa, il n'y avait plus de Parti progressiste-conservateur au Canada, et je suis donc techniquement indépendante depuis mon arrivée. J'offre donc cette perspective au sous-comité, et plusieurs autres sénateurs indépendants se sont récemment joints à moi.

Dans les conversations que j'ai lues et qui se sont tenues dans vos réunions jusqu'ici, on n'établit pas toujours la distinction selon laquelle nous sommes également non partisans. Aucun d'entre nous n'est affilié à un parti politique. C'est la distinction établie dans les groupes que nous formons. Vous avez fait référence à notre groupe de travail indépendant et non partisan. Si cela avait été possible, je crois que nous l'aurions appelé groupe du travail en cours, car nous savions que c'était une évolution. Nous savions également que le Règlement du Sénat ne prévoit rien d'autre, en ce moment, qu'un caucus politique ou un parti enregistré, ce qui est un parti politique.

Puisque nous ne correspondions à aucune des catégories créées en 1990 pour le Sénat du Canada, nous avons jugé qu'il était préférable d'éviter toute affiliation, surtout en prévision du 10 mars et des mois suivants, car nous savions que d'autres sénateurs se joindraient à nous. Nous étions d'avis que la structure organisationnelle que nous prendrions devait faire l'objet d'une décision collective.

J'aimerais mentionner que les règles de procédure en vertu desquelles nous menons nos activités ont d'abord été adoptées en 1990. Elles ont été présentées par le sénateur Lowell Murray qui, à l'époque, était leader du gouvernement au Sénat, du gouvernement progressiste-conservateur; Mulroney était premier ministre. Le Sénat venait tout juste de terminer une série de débats animés, notamment sur la TPS et la mesure extraordinaire, sur le plan historique, consistant à ajouter huit sénateurs pour débloquer l'impasse. Après ces évènements, on a décidé qu'il était souhaitable d'établir des règlements qui permettaient au gouvernement de faire passer ses travaux par le Sénat. On a donc pris des règlements pour veiller à ce que le gouvernement envoie rapidement ses projets de loi au Sénat. Jusqu'à ce moment-là, il n'existait aucune disposition à cet égard.

À l'époque, les gens savaient que la lutte s'était déroulée entre Lowell Murray, le sénateur conservateur, et Alex McEachern, le sénateur libéral; et les règlements ont donc été élaborés dans ce cadre. C'est à ce moment-là qu'a commencé la bipartisanerie. Aucun précédent n'existe dans un système de gouvernement britannique pour prévenir l'existence de plus de deux caucus. En effet, il n'est pas nécessaire que tous les caucus soient affiliés à un parti politique.

Comme je l'ai dit dans mon discours au Sénat, je n'ai aucun problème avec la présence des partis politiques, que ce soit ici ou dans une autre Chambre haute. Par contre, j'ai un problème lorsqu'un groupe peut dominer tous les autres groupes, car c'est un abus de pouvoir. À mon avis, il faut résoudre ce problème. L'une des façons d'y arriver, c'est de créer un troisième caucus, surtout un troisième caucus qui n'a aucune affiliation politique. Au fil du temps, il servira à équilibrer le pouvoir, si vous voulez. Il favorisera également les conversations entre les sénateurs.

On encourage tous les sénateurs, qu'ils appartiennent à un caucus politique ou non, à être indépendants. C'est la Cour suprême du Canada qui l'a affirmé. En fait, la Cour suprême du Canada a dit que nous étions une partie essentielle de l'architecture de notre Constitution, et nous sommes nommés dans le but d'agir de façon indépendante. L'indépendance ne dépend pas de l'affiliation politique ou de l'absence d'affiliation.

Toutefois, la partisanerie, si je peux m'exprimer ainsi, consiste, comme l'un de nos sénateurs l'a déjà décrite, à faire passer la loyauté au parti avant les principes, et je crois que cette façon de faire doit être découragée.

Nous nous sommes réunis. Les sénateurs indépendants et non partisans se réunissent environ une fois par semaine depuis l'arrivée, il y a trois semaines, de nos membres les plus récents, parfois en personne ou, comme pendant la semaine de pause, par téléconférence.

Comme vous le savez, nous avons été invités, par l'entremise des médias et de lettres personnelles, à choisir des tâches pour le comité, et nous nous sommes réunis pour le faire efficacement tout en nous fondant sur des principes, et cette lettre est livrée aujourd'hui.

Nous avons adopté les principes que vous connaissez évidemment, le premier étant l'équité, c'est-à-dire que nous sommes tous prêts à faire notre juste part du travail. Le deuxième, l'égalité, c'est-à-dire que tous les sénateurs sont traités également. Le troisième, évidemment, est la proportionnalité. Notre quatrième principe renforce et soutient notre indépendance et, surtout, il fait profiter l'institution de cet élément, ainsi que de l'impartialité.

Nous avons hâte de travailler ensemble, au sein de l'institution, sur deux enjeux. Le premier concerne la logistique et l'administration. Il s'agit simplement de faire les choses de façon méthodique. Nous pouvons appliquer une méthode aux travaux menés au Sénat, dans les comités et dans le cadre des quatre autres rôles joués par les sénateurs, à savoir représenter les régions, protéger les minorités, exercer la diplomatie parlementaire et, manifestement, défendre les bonnes causes publiques. Dans tous ces rôles — vos fonctions parlementaires —, il est important d'agir de façon méthodique et efficace. Il faut évidemment effectuer des tâches administratives pour y arriver, et nous pouvons nous appuyer les uns les autres sur ce plan pour gagner en efficacité.

C'est donc le premier enjeu. Le deuxième engagement que nous avons pris concerne évidemment la modernisation du Sénat, à l'égard de laquelle nous sommes tous très dévoués, afin de créer le Sénat du XXIe siècle.

Nous ne parlerons pas tous d'une seule voix en ce qui concerne les problèmes, les lois, les études, et cetera. Nous serons très indépendants à cet égard. Nous serons ce qu'a dit Lord Hope l'autre jour — c'est le facilitateur des membres indépendants de la Chambre des lords. Il a dit qu'ils étaient tous des penseurs farouchement libres, et nous le serons sûrement aussi entre nous.

Je crois qu'on a fait référence, de temps en temps, à la possibilité d'avoir 105 sénateurs indépendants, ou sénateurs non partisans, et que cela serait impossible. Nous ne devons pas oublier que cela ne se produira pas avant au moins 10 ans. Si vous tenez compte du moment où les gens prendront probablement leur retraite — et honnêtement, je ne suis pas certaine que personne ne voudra, dans un avenir rapproché, se joindre à l'un ou l'autre des caucus politiques, ou peut-être à un troisième. Après tout, cinq partis sont représentés dans la Chambre des communes; pourquoi donc n'y en aurait-il pas davantage ici?

En ce moment, je ne prévois pas que nous aurons 105 sénateurs indépendants. Ce n'est tout simplement pas réaliste, peu importe la façon dont on envisage les choses. Toutefois, j'aimerais mentionner les sections 5 et 6 du Règlement administratif du Sénat avec lesquelles vous traitez, car il me semble qu'il faut réfléchir davantage à la façon dont cela est structuré. J'aimerais ajouter que le sujet a été abordé au sein du Comité de modernisation, et je suis heureuse que ce soit le cas, car je crois qu'il faut traiter la question dans le contexte approprié.

Je fais partie du comité de direction du Comité de modernisation, et le sénateur Tannas est manifestement aussi membre de ce comité. Nous examinons la question dans un contexte plus large, je crois, et nous l'examinons également de façon réfléchie et délibérée, et je pense que c'est un très bon endroit pour le faire.

J'encourage donc les membres du Comité permanent de la régie interne des budgets et de l'administration à écouter vos bons conseils, mais également à attendre les conseils des membres du Comité de modernisation avant de reformuler l'ensemble de la section, mais je crois que ces sections devront être examinées.

En ce qui concerne l'argent investi dans la recherche, en ce moment, comme vous le savez, le soi-disant « autre caucus » obtient un million de dollars s'il compte plus de 20 personnes. Et il n'y a aucune indication sur l'utilisation de cet argent. Il s'agit seulement de sommes investies dans la recherche. Cela fait donc 50 000 $ par sénateur, par personne, au minimum. Même si cet autre caucus compte seulement de 5 à 10 personnes, c'est 60 000 $ par personne, et ces fonds sont mis en commun.

J'ai lu une conversation où vous dites qu'un sénateur indépendant obtenait 7 000 $ supplémentaires pour des recherches. Permettez-moi de vous dire qu'à titre de sénatrice indépendante depuis des années, j'ai dû mener pratiquement toutes mes propres recherches. En effet, je dispose d'un budget très limité pour embaucher de l'aide. J'écris mes propres discours. J'ai réussi à augmenter les ressources dans mon bureau notamment en recrutant des jeunes bénévoles. Nous avons fait preuve de créativité dans la gestion de nos ressources.

En ce qui concerne ces 7 000 $, si on considère qu'un salaire à plein temps est de 70 000 $, ce n'est pas une bonne comparaison lorsqu'on tente d'obtenir l'égalité dans les fonds de recherche.

Le président : Sénatrice, je dois vous interrompre pour vous rappeler que le temps est limité et que nous devons aborder l'étude menée par notre sous-comité. Nous avons quelques questions à vous poser, si vous êtes prête à y répondre. J'aimerais d'abord donner la parole au sénateur Tannas.

Le sénateur Tannas : Merci, monsieur le président. J'aimerais également remercier la sénatrice d'être ici.

La sénatrice McCoy : Je vous en prie.

Le sénateur Tannas : Sénatrice McCoy, vous avez mentionné quelques points sur lesquels j'aimerais obtenir des éclaircissements. Au début de votre exposé, vous avez mentionné des « groupes » que vous formiez; il s'agit donc de plus d'un groupe. Et j'aimerais seulement savoir si selon vous, dans le cadre de votre réflexion sur les multiples groupes, des sénateurs pourraient appartenir à plus d'un groupe. C'est ma première question.

Ensuite, vous avez mentionné un troisième caucus, et je crois qu'il y a certainement eu beaucoup de discussions au sein du Comité de modernisation sur les problèmes que nous avons eus avec les caucus et la définition de caucus dans le Règlement administratif du Sénat, et le parti politique, et cetera. Et je crois aussi que les membres du Comité de modernisation en ont beaucoup parlé. Nous devons probablement étendre la portée de cette définition aux groupes.

Mais j'aimerais également ajouter que je crois certainement — et probablement d'autres membres du Comité de modernisation aussi — que vous pouvez faire partie d'un groupe, mais pas de deux ou trois groupes, mais peut-être que oui. J'aimerais donc avoir votre avis à cet égard, ou mieux, j'aimerais savoir si le groupe élargi a abordé la question.

La sénatrice McCoy : Jusqu'ici, nous avons eu trois semaines et nous n'avons donc pas réussi à traiter tous ces enjeux de façon aussi approfondie que, selon moi, nous le ferons plus tard. Je ne prétends pas parler au nom des autres sénateurs indépendants ou non partisans à cet égard. Toutefois, je crois qu'on ne devrait pas porter plus d'un titre à la fois. Ce n'est pas possible. Je crois qu'il faut établir certains paramètres liés au bon sens en ce qui concerne ces groupes.

Soit dit en passant, « groupe » est le terme employé au Sénat français. Mon français n'est pas très bon, mais en France on désigne par « groupes politiques » — est-ce que c'est bien ça? — les caucus politiques et par « groupes non affiliés », il me semble, les groupes qui n'ont pas d'allégeance politique. Bien sûr, le Parlement européen utilise lui aussi la même terminologie, ce qui établit donc un précédent.

Dans notre cas tout particulièrement, où les sénateurs feraient partie de ce groupe afin d'obtenir un soutien administratif collectif, je pense qu'un sénateur ne devrait pas pouvoir s'adresser aussi au caucus conservateur pour obtenir son soutien administratif politique. Selon moi, cela ne serait pas juste.

Le sénateur Tannas : Par conséquent, lorsque vous parlez de groupes, vous estimez qu'on devrait permettre la formation de plusieurs groupes, au lieu d'un seul, ayant chacun leur opinion, à des fins administratives ainsi que pour tous les aspects que nous avons mentionnés, groupes qui auraient un rôle d'organisateur? Ce rôle d'organisateur a évolué et ce dernier dessert maintenant tout le monde. L'organisateur a déclaré que certaines personnes sont farouchement indépendantes, qu'elles ne cherchent pas à s'organiser ni à communiquer avec qui que ce soit, mais que dans l'ensemble, il y a un seul organisateur pour tous les indépendants...

La sénatrice McCoy : Parlez-vous de la Chambre des lords?

Le sénateur Tannas : Je parle des indépendants. Sur les 800 qui sont en place, il y en a une poignée qui...

La sénatrice McCoy : Il y a 178 indépendants.

Le sénateur Tannas : C'est exact, mais il y en a une poignée qui ne sont ni indépendants ni affiliés à un caucus politique. Il y a donc essentiellement un organisateur pour pratiquement tous les indépendants.

Si je saisis bien ce que vous dites — je veux seulement comprendre —, c'est que nous devrions autoriser la formation de plusieurs groupes, mis à part les caucus, qui se regrouperaient à des fins administratives, pour étudier des dossiers ensemble, ainsi qu'à des fins de communication et de coordination à certains égards. Est-ce exact?

La sénatrice McCoy : Ce que je dis, c'est que le Sénat du Canada devrait être composé d'au moins trois caucus ou groupes afin d'équilibrer les pouvoirs. Selon moi, cela contribuerait à éviter l'abus de pouvoir et la tyrannie de la majorité.

Je pense aussi que la formation de ces caucus ou groupes devrait être soumise à certaines contraintes élémentaires.

Le sénateur Tannas : Ils devraient aussi être financés, évidemment.

La sénatrice McCoy : Oui, il faudrait aussi les financer. J'aimerais ici revenir aux principes auxquels le Sénat du Canada souscrit et qu'il a choisi d'accepter, depuis très longtemps d'ailleurs, notamment celui de l'égalité des sénateurs. Il y a aussi la proportionnalité et le partage équitable du travail.

Le sénateur Tannas : Je vous remercie.

Le sénateur Downe : Merci. Sénatrice McCoy, je voudrais revenir sur les questions du sénateur Tannas.

Vous dites que les sénateurs indépendants ont tenu des réunions pendant trois semaines. Est-ce que les sénateurs nommés récemment ont assisté à ces réunions eux aussi?

La sénatrice McCoy : Oui.

Le sénateur Downe : Le sénateur Harder cherche ici à obtenir de l'argent pour financer ses activités. J'avais compris qu'il travaillerait avec les nouveaux sénateurs et que vous alliez œuvrer auprès des sénateurs indépendants qui étaient déjà en poste.

Le sénateur Harder a présenté une demande pour obtenir des fonds. Je suppose que vous en avez une vous aussi puisque vous êtes plus nombreux. Il est le leader du gouvernement au Sénat et il y a trois sénateurs avec lui, je pensais qu'il y en aurait plus, mais les autres font partie de votre groupe. J'imagine que vous allez présenter une demande pour obtenir des fonds vous aussi.

Puisque la séance est publique, j'aimerais seulement profiter du fait que j'ai la parole pour rectifier les faits. La sénatrice McCoy n'a jamais fait partie d'un caucus, c'est sans doute pour cela qu'elle fait erreur quand elle présume que les libéraux au Sénat roulent sur l'or et que l'argent est distribué aux sénateurs.

Dans la réalité, il s'agit d'un fonds de recherche alloué aux libéraux et les sénateurs doivent présenter une demande de financement pour des projets spécifiques qui sont le prolongement de leur travail au Sénat. À titre d'exemple, je siège au Sénat depuis 10 ans, mais je n'ai jamais reçu d'argent de ce fonds. Je suis donc loin des 7 500 $ ou 7 800 $ que les sénateurs indépendants reçoivent chaque année. Comme je ne me suis jamais prévalu de ce fonds, je n'ai pas touché les 75 000 $ qu'un sénateur indépendant aurait reçus.

En outre, si vous vérifiez le montant du fonds, vous constaterez qu'il n'est pas souvent utilisé en entier. Il s'agit d'un outil de recherche supplémentaire. Je m'intéresse toutefois particulièrement à votre réponse à ma première question, sénatrice McCoy.

La sénatrice McCoy : J'étais au courant de ce que vous venez d'expliquer parce que j'ai lu le compte rendu et je pense que c'est ainsi que le sénateur Cowan a décrit le fonctionnement de votre caucus. Ce que j'ai dit c'est que, à ma connaissance, vos fonds sont mis en commun, et que les indépendants reçoivent 7 000 $ chacun.

J'ai réalisé des projets que j'ai financés sans rien d'autre que cette somme et je ne pouvais pas recourir à un fonds commun pour les projets. Vous m'avez demandé quelque chose, mais j'ai oublié quelle était votre question.

Le sénateur Downe : Ma question faisait suite à celles du sénateur Tannas. Je vous ai demandé si ces groupes se chevauchent. Autrement dit, si nous accédons à la demande du sénateur Harder, qui réclame 850 000 $ si je me souviens bien, recevrons-nous une demande de la part de votre groupe, ce qui serait légitime, et de certains sénateurs qui font partie des deux groupes?

La sénatrice McCoy : Non.

Le sénateur Pratte : Non.

La sénatrice McCoy : Non, non. Aucun sénateur ne fait partie des deux groupes.

Le sénateur Downe : La sénatrice Bellemare n'assiste pas aux réunions de notre caucus.

La sénatrice McCoy : Les sénateurs Bellemare, Mitchell et Harder ne sont identifiés à aucun parti politique.

Le sénateur Downe : La sénatrice Bellemare n'a pas participé à vos conférences téléphoniques?

La sénatrice McCoy : Elle n'y a pas pris part depuis qu'elle a assumé ses nouvelles fonctions cette semaine.

Le sénateur Downe : Merci.

Le président : Sénatrice, prévoyez-vous qu'une de ces trois personnes participera à vos conférences téléphoniques ou à vos réunions?

La sénatrice McCoy : Non.

Le président : Ils en seront donc expressément exclus, comme je le serais?

La sénatrice McCoy : Oui, parce que vous n'êtes pas non partisan.

Le président : D'accord, il faut donc être non partisan pour y participer.

La sénatrice Jaffer : J'aimerais demander une précision. J'essaie de bien formuler ma question.

Si je comprends bien, les sénateurs Harder, Bellemare et Mitchell avaient notamment pour rôle de gérer le caucus indépendant et — veuillez ne pas prendre ce que je dis au pied de la lettre — d'assurer la liaison avec le caucus indépendant. C'est ce que j'avais cru comprendre. Je pourrais avoir tort sur toute la ligne, ce qui est manifestement le cas maintenant. Chose certaine, ils ne géreront pas les sénateurs libéraux. Par conséquent, ce que vous dites, c'est que ces trois sénateurs ont un statut différent. Les autres sont-ils tous ensemble?

La sénatrice McCoy : Oui et je voulais faire remarquer ceci. La sénatrice Cools se plaît à parler de terminologie propre à la situation, et ce que nous faisons est de portée historique. Puisque le Sénat du Canada n'a jamais eu l'occasion d'évoluer dans la direction que nous prenons actuellement, le vocabulaire qui se rattache à cette évolution est lui aussi en train de se dessiner.

Je pense qu'il serait juste de dire qu'aucun d'entre nous n'accepterait que ceux qui nous dirigent aient une quelconque affiliation politique ou ne soient pas non partisan.

Le président : J'ai une question pour vous, sénatrice. Combien de sénateurs votre groupe de travail compte-t-il maintenant?

La sénatrice McCoy : Nous ne nous sommes pas donné d'appellation collective, mais nous sommes à peu près 17 ou 18.

Le président : Pensez-vous mettre en commun la somme de 7 000 $ accordée à chaque sénateur dans l'intérêt général ou pour répondre aux besoins en matière de recherche, d'administration ou d'organisation?

La sénatrice McCoy : Je ne peux pas le dire pour le moment.

Nous ne cessons d'évoluer et nous prenons le temps de parler de ce que nous faisons. Nous nous penchons sur les résultats que nous souhaitons obtenir. Ce que nous cherchons vraiment à déterminer, ce sont les principes qui nous guideront. Nous examinons quel style de gestion non hiérarchique nous convient. Nous étudions toutes ces questions et je ne peux pas prédire en quoi consisteront les décisions qui seront prises collectivement.

Je tiens à ajouter une chose. Nous ne sommes pas ici pour demander de l'argent parce que le Règlement ne nous le permet pas et que nous ne voulons enfreindre aucune règle.

Le président : Je comprends, sénatrice McCoy.

Le sénateur Tkachuk : J'ai quelques questions à poser. Si les sénateurs Mitchell, Bellemare et Harder ne sont pas non partisans, que sont-ils? Êtes-vous aussi perplexe que moi?

La sénatrice McCoy : Vous êtes ici depuis plus longtemps que moi, sénateur. Je vous laisse le soin de le comprendre.

Le sénateur Tkachuk : Je veux vous poser une question au sujet des recherches. Si nous disposons d'une cagnotte pour les recherches, je ne suis pas au courant. Je dispose d'un budget de 180 000 $, comme tous les autres sénateurs. De cette somme, je paie les salaires d'une adjointe administrative et d'un spécialiste des politiques à temps plein qui fait des recherches pour moi. Il assiste justement à la réunion aujourd'hui. Tout le monde dispose du même budget.

J'ai aussi accès à la Bibliothèque du Parlement. C'est une ressource des plus précieuses, si vous n'y avez jamais eu recours. Son personnel effectue gratuitement toutes sortes de recherches et il fait de l'excellent travail.

Sénatrice McCoy, j'ignore quelle est votre expérience en la matière, je vous parle seulement de la mienne. Tout ce que je dis c'est que, de cette somme de 180 000 $, beaucoup d'argent est utilisé pour faire des recherches parce que c'est à cela qu'il doit servir. Cet argent n'est vraiment destiné à rien d'autre qu'aux recherches et à l'administration.

La sénatrice McCoy : Sénateur Tkachuk, la somme de 500 000 $ a été accordée au leader de votre caucus aux termes de l'article 6 du chapitre 5 :04 et de l'article 1 du chapitre 6 :01 du Règlement administratif du Sénat qui a été adopté au mois de janvier.

Le sénateur Tkachuk : Oui.

La sénatrice McCoy : Si vous n'en avez pas entendu parler, je vous suggère d'en discuter avec le sénateur Carignan.

Le sénateur Tkachuk : Il ne faut pas oublier que le sénateur Carignan a du personnel administratif et des représentants des communications à son service. Nous sommes un parti politique et nous formons l'opposition officielle. Nous sommes la loyale opposition de Sa Majesté. Au regard de la loi et du Règlement du Sénat, notre rôle consiste à nous opposer au gouvernement. C'est notre travail et nous recevons de l'argent pour l'accomplir. Par ailleurs, ce rôle est soutenu par un leader et par des fonctionnaires.

C'est ce qui justifie le budget que nous recevons. S'ils le voulaient, les sénateurs du parti au pouvoir pourraient recevoir la même chose, mais ils n'ont pas l'air de le vouloir. Ils veulent l'argent de quelqu'un d'autre.

La sénatrice McCoy : Pour moi, mon rôle n'a jamais consisté à être pour ou contre le gouvernement ou quelque mesure législative que ce soit. J'estime que mon rôle consiste à avoir l'esprit ouvert, à tenir compte des faits, à former mon opinion sur la mesure législative étudiée et à faire part de cette opinion au gouvernement. Je ne pense pas que nos rôles soient différents.

Le sénateur Tkachuk : Non, je pense que votre rôle est le même que le mien.

La sénatrice McCoy : En effet.

Le président : Merci de vos questions, sénateur Tkachuk, et de vos réponses, sénatrice McCoy.

À quelques reprises, vous avez fait allusion à l'abus de pouvoir qui peut être associé à la majorité. Quand je suis arrivé au Sénat, les conservateurs détenaient la majorité et je ne me souviens pas avoir abusé de ce pouvoir ni avoir agi exclusivement en fonction de mon allégeance politique. Pensez-vous qu'un jour, une majorité de sénateurs indépendants pourraient se regrouper en un groupe de travail et abuser de leur pouvoir?

La sénatrice McCoy : Bien sûr.

Le président : Je m'en doutais.

La sénatrice McCoy : Bien sûr, et c'est le cas pour tous ceux qui détiennent une majorité absolue. Si un jour la situation dont vous parlez devient réalité, même si plusieurs années passeront avant qu'il y ait plus de 53 sénateurs se voulant indépendants, comme vous le dites, j'espère que le premier ministre qui sera alors au pouvoir en tiendra compte quand il présentera au gouverneur général ses recommandations pour la nomination des sénateurs.

Le président : J'aimerais inviter Pascale à nous expliquer brièvement certains chiffres dont nous avons discuté et qui figurent dans le budget.

Pascale Legault, dirigeante principale des finances, Direction des finances et de l'approvisionnement, Sénat du Canada : Oui. Je pense que les chiffres ont été cités à quelques reprises, mais les sénateurs indépendants reçoivent 7 000 $ par année. Avant janvier 2016, ils recevaient 5 100 $ par année. Cette somme est indépendante du montant de 185 400 $ auquel ont droit tous les sénateurs.

Le président : Pascale, ce montant est-il calculé au prorata pour la partie visée de l'année?

Mme Legault : Oui, il est calculé au prorata en fonction de la date à laquelle un sénateur devient indépendant. Si un sénateur est nommé au milieu de l'année ou s'il change d'affiliation à ce moment-là, il recevra la moitié de 7 000 $.

La sénatrice Omidvar : J'ai une question. Cette somme de 7 000 $ fait-elle partie des 185 000 $?

Mme Legault : C'est un supplément.

La sénatrice Omidvar : Je voulais seulement savoir.

Le président : S'il n'y a pas d'autres questions ni d'autres remarques, je vous remercie tous d'avoir assisté à la séance.

Je vous remercie, sénatrice McCoy, de votre présentation et de vos réponses.

La sénatrice McCoy : Il n'y a pas de quoi. C'est un dossier difficile, et j'espère sincèrement que vous permettrez au Comité sur la modernisation du Sénat de vous faire part de son avis avant de couler quoi que ce soit dans le béton.

Le président : Merci.

(Le comité s'ajourne.)

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