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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent des
Transports et des communications

Fascicule nº 47 - Témoignages du 27 février 2019


OTTAWA, le mercredi 27 février 2019

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, auquel a été renvoyé le projet de loi C-48, Loi concernant la réglementation des bâtiments transportant du pétrole brut ou des hydrocarbures persistants à destination ou en provenance des ports ou des installations maritimes situés le long de la côte nord de la Colombie-Britannique, se réunit aujourd’hui, à 18 h 47, pour étudier le projet de loi.

Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, dans le cadre de cette réunion du Comité sénatorial permanent des transports et des communications, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-48, Loi concernant la réglementation des bâtiments transportant du pétrole brut ou des hydrocarbures persistants à destination ou en provenance des ports ou des installations maritimes situés le long de la côte nord de la Colombie-Britannique, aussi connue sous le nom de Loi sur le moratoire relatif aux pétroliers.

Je m’appelle David Tkachuk. Je suis un sénateur de la Saskatchewan, et je demanderais aux sénateurs de se présenter.

La sénatrice Jaffer : Mobina Jaffer, de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Dasko : Donna Dasko, de l’Ontario.

La sénatrice Simons : Paula Simons, de l’Alberta.

La sénatrice Gagné : Raymonde Gagné, du Manitoba.

La sénatrice Miville-Dechêne : Julie Miville-Dechêne, du Québec.

Le sénateur Dawson : Dennis Dawson, du Québec.

La sénatrice McCoy : Elaine McCoy, de l’Alberta.

La sénatrice Griffin : Diane Griffin, de l’Île-du-Prince-Édouard.

Le sénateur Oh : Victor Oh, de l’Ontario.

Le sénateur Smith : Larry Smith, du Québec.

Le sénateur D. Black : Doug Black, de l’Alberta.

Le président : Merci.

Nous entendrons maintenant notre premier groupe de témoins. Nous sommes heureux de les accueillir ce soir.

De la Western Canada Marine Response Corporation, nous accueillons M. Michael Lowry, gestionnaire des Communications, qui comparaît par vidéoconférence. Nous accueillons également, de Whitecap Resources Inc., M. Grant Fagerheim, président et chef de la direction, également par vidéoconférence.

Est-ce la prononciation exacte?

Grant Fagerheim, président et chef de la direction, Whitecap Resources Inc. : Oui.

Le président : De plus, de l’Independent Contractors and Businesses Association of British Columbia, nous accueillons M. Tim McEwan, vice-président principal.

Nous vous remercions de participer à notre réunion. Nous entendrons d’abord nos témoins par vidéoconférence. Monsieur Lowry, vous avez la parole; vous serez suivi de M. Fagerheim et de M. McEwan.

Michael Lowry, gestionnaire, Communications, Western Canada Marine Response Corporation : Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de m’avoir invité à vous parler aujourd’hui.

Tout d’abord, un peu de contexte. Le mandat de la WCMRC, en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, est d’être prête à intervenir en cas de déversement de pétrole sur la côte Ouest du Canada, peu importe l’endroit où ce déversement se produit. Au besoin, nous sommes prêts à intervenir en cas de déversement n’importe où le long de la côte de la Colombie-Britannique.

Même si nous ne sommes ni pour ni contre le projet de loi C-48, l’intervention en cas de déversement et notre capacité à intervenir en cas de déversement jouent un rôle essentiel dans la conversation sur les exportations d’énergie, l’accès au marché et les volumes d’expédition.

J’aimerais d’abord fournir au comité un aperçu de notre organisme et parler un peu de l’intervention en cas de déversement au Canada pour ceux qui ne savent pas exactement comment cela fonctionne, et ensuite, j’aimerais présenter au comité des exemples récents des activités de la WCMRC qui découlent de l’intensification de la circulation maritime le long de la côte Ouest.

La Western Canada Marine Response Corporation est le seul organisme d’intervention marine certifié par Transports Canada sur la côte Ouest du Canada. En moyenne, nous intervenons dans 20 petits déversements typiques chaque année. La WCMRC intervient efficacement dans les déversements de pétrole depuis plus de 40 ans. Nous avons commencé nos activités en 1976 sous le nom de Burrard Clean Operations et en 1995, nous sommes devenus le premier organisme d’intervention certifié du Canada en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada modifiée. Nous avons actuellement des bases à Vancouver, à Nanaimo, à Victoria et à Prince Rupert. Nous avons aussi des dépôts d’équipement tout le long de la côte, notamment à Kitimat et à Haida Gwaii.

Le mandat que nous confère la Loi sur la marine marchande du Canada consiste à veiller à ce qu’un état de préparation soit en œuvre lorsqu’un déversement maritime se produit et à atténuer ses impacts sur la côte de la Colombie-Britannique. Cela comprend la protection des espèces sauvages, l’hypersensibilité économique et environnementale et la sécurité des intervenants et du public. Notre mandat vise 27 000 kilomètres de côtes de la Colombie-Britannique jusqu’à 200 milles marins des côtes, ce qui signifie que notre travail est souvent très éloigné.

Comme je l’ai mentionné, nous sommes certifiés par Transports Canada à titre d’organisme d’intervention en vertu du Régime de préparation et d’intervention en cas de déversement d’hydrocarbures en milieu marin au Canada. Transports Canada établit les normes d’intervention en cas de déversement, et la WCMRC doit démontrer qu’elle respecte ces normes pour obtenir sa certification. La WCMRC dépasse constamment les normes en matière d’intervention recommandées par Transports Canada et, actuellement, Transports Canada envisage de mettre à jour les normes de planification des organismes d’intervention pour l’ensemble du Canada.

Le Canada a adopté le modèle du pollueur-payeur pour l’intervention en cas de déversement et, par conséquent, la WCMRC est financée par l’industrie. Notre organisme compte plus de 2 300 membres. L’adhésion est obligatoire pour les navires de plus d’une certaine taille faisant escale dans les ports canadiens, ainsi que pour les installations de manutention d’hydrocarbures qui reçoivent ou expédient du pétrole sur leurs quais. Les membres sont tenus de payer des frais de préparation annuels pour s’assurer qu’ils recevront nos services d’intervention, y compris l’équipement et les fournitures nécessaires en cas de pollution.

Ces honoraires couvrent nos frais d’exploitation annuels. Ils ne couvrent pas les coûts que nous engageons lorsque nous intervenons dans un déversement, car en vertu de la Loi sur la responsabilité en matière maritime du Canada, ces coûts doivent être payés par le pollueur. Les profits réalisés par la WCMRC à la suite d’un déversement sont soit réinvestis dans l’organisme, soit utilisés pour compenser les coûts de fonctionnement futurs et réduire les cotisations des membres.

J’aimerais maintenant parler du modèle fondé sur le risque qui est actuellement en œuvre et que nous sommes en train d’élaborer pour la côte.

Transports Canada et la Garde côtière canadienne dirigent l’élaboration de plans d’intervention régionaux fondés sur l’évaluation des risques régionaux. En Colombie-Britannique, cette initiative se concentre surtout sur la côte nord. Les projets profitent notamment de la participation d’Environnement et Changement climatique Canada, du ministère des Pêches et des Océans, du ministère de l’Environnement de la Colombie-Britannique et des Premières Nations côtières.

Pour aider à planifier et à préparer l’intervention en cas de déversement sur la côte Ouest, la WCMRC a élaboré un programme de cartographie côtière qui recueille les données existantes, afin d’identifier l’hypersensibilité côtière, notamment dans les ressources écologiques, culturelles et économiques. Les équipes de terrain de la WCMRC vérifient ensuite les données sur le terrain et élaborent des stratégies de protection pour ces ressources à risque. Ces stratégies, appelées stratégies d’intervention géographique, permettent le déploiement le plus efficace des ressources d’intervention, car elles optimisent la protection des côtes, elles réduisent les délais d’intervention et elles minimisent les risques. La WCMRC a élaboré plus de 500 stratégies d’intervention géographique pour la côte Ouest, dont certaines pour Kitimat Channel et Prince Rupert. Nous croyons fermement que la planification et la préparation des interventions devraient être fondées sur une approche scientifique qui commence par une évaluation des risques dans la région.

J’aimerais vous donner quelques exemples de projets sur lesquels nous avons travaillé, en commençant avec le projet d’agrandissement du réseau de Trans Mountain. Il s’agit d’un exemple récent de projet qui accroîtra la circulation maritime sur la côte Ouest. En raison de ce risque accru, la WCMRC et Trans Mountain ont collaboré à l’élaboration de normes améliorées en matière de planification des routes maritimes autour de l’île de Vancouver. Ces normes de planification améliorées liées à l’intervention en cas de déversement dans la mer des Salish permettront de réduire le délai d’intervention, qui passera d’un maximum de 6 heures à 2 heures pour le port de Vancouver et de 18 heures à 6 heures pour le reste de la route maritime du sud. Ce régime permettra de livrer 20 000 tonnes de capacité dans un délai de 36 heures à partir de ressources spécialisées le long de la mer des Salish. Cela représente une capacité de réponse doublée et un délai de livraison qui correspond à la moitié des normes de planification existantes.

On estime que les coûts en capital de ces améliorations seront d’environ 150 millions de dollars, et ces améliorations permettront d’ajouter plus de 120 nouveaux employés, 44 nouveaux navires et six nouvelles bases d’intervention en cas de déversement le long de la route maritime. Nous avons des bases proposées qui seront ouvertes 24 heures sur 24, notamment celles du port de Vancouver, de Victoria et de Sydney.

Lorsque Northern Gateway était encore à l’étape de projet, on nous a demandé d’améliorer son système d’intervention en cas de déversement sur la côte nord. J’aimerais vous expliquer à quoi auraient ressemblé ces améliorations.

Pendant la phase de planification de Northern Gateway, la WCMRC a élaboré des plans fondés sur l’équipement, le personnel et l’intervention pour appuyer une intervention en cas de déversement de 32 000 tonnes. Ce projet aurait nécessité plus de 130 000 $ en équipement et a été planifié avec 120 intervenants attitrés qui appuieraient quatre bases d’intervention dans le Nord. Ces plans étaient fondés sur les pires scénarios de déversement crédibles et des plans d’intervention solides étaient en place pour appuyer le projet Northern Gateway, ainsi que d’autres utilisateurs maritimes de la côte nord.

Une approche semblable pourrait être mise au point pour tout autre projet potentiel le long de la côte nord.

En terminant, j’aimerais préciser que la WCMRC croit que les décisions doivent être prises sur des fondements scientifiques. Le gouvernement du Canada, par l’entremise de Transports Canada et de la Garde côtière canadienne, est en mesure d’améliorer ses normes de planification des interventions afin de mieux tenir compte des risques. Enfin, j’aimerais ajouter qu’il est possible de se préparer pour des déversements n’importe où le long de la côte Ouest, et la WCMRC est prête à travailler avec le gouvernement ou les intervenants de l’industrie pour s’assurer que le niveau d’intervention approprié est en place pour faire face à toute augmentation du risque.

Je vous remercie de votre temps.

Le président : Merci.

Monsieur Fagerheim, vous avez la parole.

M. Fagerheim : Bonsoir et merci, honorable président et membres du comité, de me permettre de vous parler aujourd’hui.

Whitecap a été fondée à titre de société privée en 2009, avec huit employés et elle est aujourd’hui une société pétrolière et gazière canadienne cotée en bourse qui emploie 433 personnes et qui produit environ 75 000 barils équivalent pétrole par jour, surtout du pétrole léger de la Colombie-Britannique, de l’Alberta et de la Saskatchewan.

Whitecap n’est pas une société d’exploitation des sables bitumineux. En effet, nous produisons du pétrole à partir de gisements classiques grâce à des techniques de récupération secondaire et tertiaire de pointe, par exemple le projet de récupération assistée des hydrocarbures avec CO2 à Weyburn, en Saskatchewan, qui est le plus important projet de récupération de CO2 au monde. Nos activités à Weyburn séquestrent environ 2 millions de tonnes de CO2 par année, ce qui nous permet de stocker les émissions pour les capter.

Whitecap est différente des sociétés pétrolières intégrées qui ont leurs propres activités de raffinage qui consomment du pétrole brut pour produire de l’essence et d’autres produits raffinés. Nous sommes un producteur pur qui vend ses produits bruts aux prix du marché, et nous avons connu récemment des écarts de prix extrêmes attribuables au manque d’accès au marché en raison d’un manque d’accroissement de la capacité pipelinière.

Comme d’autres producteurs purs qui ne possèdent pas d’infrastructure de raffinage, nous comptons entièrement sur la capacité d’exportation du Canada, qui est principalement constituée de pipelines, pour monnayer nos produits pétroliers bruts. Le produit de nos ventes est ensuite réinvesti dans l’économie canadienne, afin d’employer des gens directement et indirectement par l’achat de biens et de services partout au Canada.

Comme presque toutes les sociétés intégrées productrices du Canada, Whitecap affiche un solide bilan en matière de sécurité, d’excellence opérationnelle et de gérance environnementale. Nous sommes très fiers des résultats que nous avons obtenus jusqu’ici dans le cadre de ces programmes.

Aujourd’hui, j’aimerais vous parler de nos préoccupations liées au projet de loi C-48, c’est-à-dire le moratoire proposé relatif aux pétroliers.

Notre pays est reconnu pour ses abondantes ressources naturelles, notamment nos actifs pétroliers et gaziers, qui comptent parmi les plus importantes ressources au monde. Nous sommes également très fiers de tous les paysages naturels, des espèces sauvages et des côtes du Canada, y compris la magnifique côte ouest de la Colombie-Britannique, et nous protégeons tout cela.

Malheureusement, même si nos normes réglementaires et nos pratiques environnementales sont parmi les plus rigoureuses au monde, on ne croit pas que le gouvernement du Canada ait pris des règlements uniformes qui permettent aux Canadiens d’obtenir des prix équitables pour le pétrole et le gaz naturel qu’ils produisent, et le pays a donc perdu beaucoup d’investissements américains, asiatiques, européens et même canadiens. En effet, les investisseurs étrangers investissent leur capital dans des sociétés qui sont en mesure d’offrir le meilleur rendement à leurs actionnaires. C’est pourquoi nous devons avoir accès à des marchés étrangers autres que les États-Unis d’Amérique pour monnayer nos produits, ce qui signifie que nous devons avoir accès aux eaux côtières. La côte Ouest du Canada est la plus proche et la plus pratique, et donc le choix le plus logique.

Si le moratoire relatif aux pétroliers est mis en œuvre, en tant que producteurs canadiens, nous subirons d’autres atteintes à notre réputation à titre de pays et d’autres pertes en investissements.

Le Canada a une main-d’œuvre avancée sur le plan technique et s’est imposé comme un chef de file mondial dans l’extraction des hydrocarbures. Nous devrions célébrer les contributions que le secteur de l’énergie apporte à l’économie canadienne, aux citoyens du Canada et à l’ensemble du pays. Tous les Canadiens, y compris la classe moyenne et les collectivités des Premières Nations, en tireront profit afin d’améliorer leur mode de vie et définir leur propre destin.

La promotion de la prospérité pour tous les Canadiens devrait être un objectif pour chacun d’entre nous, y compris chacun d’entre vous ici aujourd’hui.

Je crois que vous savez tous que la demande mondiale de pétrole continue d’augmenter, car 86 p. 100 de l’énergie est aujourd’hui composée de combustibles fossiles, soit un peu plus de 100 millions de barils par jour, et que cette demande est comblée par des pays dont les normes environnementales et sociales sont beaucoup moins élevées que celles auxquelles nous, les producteurs canadiens, adhérons.

Nous savons également que la transition énergétique vers les énergies renouvelables abordables que nous nous efforçons tous de réaliser nécessitera une longue période de temps et d’importants investissements en capital. Nous devrions envisager d’accélérer la commercialisation de notre pétrole brut sur les marchés mondiaux, d’obtenir le prix le plus élevé possible pour nos produits et de réinvestir les profits dans la technologie, les soins de santé, l’éducation et les programmes sociaux pour nos moins fortunés.

Pour y arriver, nous avons besoin d’un environnement réglementaire stable et cohérent qui encourage les investissements du monde entier et qui démontre que les Canadiens sont ouverts aux affaires, et qu’ils sont des chefs de file en matière d’innovation, de gérance de l’environnement et de protection de leurs concitoyens. Le monde a besoin de plus d’énergie canadienne, et non de moins.

Le fait de ne pas acheminer notre pétrole brut sur les marchés mondiaux a des répercussions sur tous les Canadiens, car ils ne profitent pas de prix élevés pour leurs ressources, ni en redevances, ni en recettes fiscales. Nous croyons fermement qu’un moratoire relatif aux pétroliers sur la côte Ouest du Canada nuira au Canada, à ses citoyens et à l’économie canadienne.

Nous comprenons qu’il est nécessaire d’atteindre un équilibre entre la protection de l’environnement et la promotion de la création d’emplois et de notre économie pour les enfants et les générations futures. De plus, nous n’avons jamais laissé entendre que les pétroliers devraient être autorisés dans nos eaux sans que des mesures adéquates en matière de protection de l’environnement, de sauvetage et de sécurité soient en œuvre. Toutefois, cela ne signifie pas que le Canada ne devrait jamais être autorisé à utiliser ses eaux côtières pour obtenir la juste valeur marchande de ses ressources.

Pour terminer, j’espère que vous et d’autres Canadiens comprendrez que ce projet de loi nuit à l’énergie canadienne et à la réputation du Canada à titre de pays doté d’une réglementation solide et favorable à l’industrie énergétique et à notre économie.

Je vous remercie de votre temps.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Fagerheim.

Monsieur McEwan, vous avez la parole.

Tim McEwan, vice-président principal, Independent Contractors and Businesses Association of British Columbia : Merci beaucoup, monsieur le président et membres du comité, de m’avoir invité à comparaître aujourd’hui. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir la chance de vous communiquer notre point de vue sur le moratoire relatif aux pétroliers que le gouvernement propose de mettre en œuvre sur la côte nord de la Colombie-Britannique.

À titre de contexte, l’Independent Contractors and Businesses Association, ou l’ICBA, est la principale voix de l’industrie de la construction de la Colombie-Britannique depuis 43 ans, et notre organisme représente plus de 2 100 membres et clients qui emploient collectivement plus de 50 000 Britanno-Colombiens.

L’ICBA défend les intérêts de ses membres pour une industrie de la construction dynamique, une exploitation responsable des ressources et une économie en croissance au profit de tous les Britanno-Colombiens.

Les possibilités naissantes d’exportations d’hydrocarbures potentielles vers les vastes marchés de l’Asie pacifique sont importantes pour nos membres qui fournissent des services à l’industrie de l’énergie. En effet, pendant beaucoup trop longtemps, les Canadiens, surtout en Alberta, mais aussi en Colombie-Britannique et en Saskatchewan, ont été captifs du marché américain comme seul marché d’exportation pour les produits énergétiques. Ainsi, nos ressources pétrolières de calibre mondial continuent d’être négociées à gros rabais par rapport aux prix qui prévalent sur le marché international. Selon certaines estimations, ces écarts auraient coûté à l’économie canadienne plus de 20 milliards de dollars entre 2013 et 2017.

Bien que les difficultés présentées par les investissements, le fardeau réglementaire et l’escompte du prix soient importantes et s’aggravent, d’énormes possibilités existent pour qui saura les saisir. On s’attend, par exemple, à ce que la demande mondiale augmente de 10 p. 100 d’ici 2040 par rapport à ce qu’elle était en 2017. À raison de 28 p. 100, la demande mondiale fera encore du pétrole la principale source d’énergie dans le monde en 2040, par rapport à 25 p. 100 pour le gaz naturel et à 22 p. 100 pour le charbon.

Cela signifie qu’il existe des possibilités considérables de mieux tirer profit des chaînes de services et d’approvisionnement existant déjà dans l’Ouest du Canada, à l’extérieur de l’Alberta. Par exemple, 738 entreprises, constituant 22 p. 100 des fournisseurs de biens et services de l’extérieur de l’Alberta pour l’exploitation des sables bitumineux, provenaient de la Colombie-Britannique en 2014-2015, alors que 462, ou 14 p. 100, provenaient de la Saskatchewan. C’est la dernière année sur laquelle nous disposons de données. Simultanément, la participation autochtone au sein de la chaîne d’approvisionnement de l’Alberta comptait, en 2015-2016, 399 entreprises sises dans 65 collectivités.

L’accès des ressources pétrolières canadiennes au marché asiatique via la côte nord de la Colombie-Britannique améliorerait les perspectives des collectivités et des Premières Nations de l’Ouest du Canada.

Nous avons aussi été témoins l’an dernier des difficultés posées par le processus d’approbation et de délivrance des permis de l’oléoduc Trans Mountain. Dans les faits, le Canada a besoin que cet oléoduc soit construit et d’augmenter sa capacité s’il veut obtenir la pleine valeur de ses ressources pétrolières sur le marché. Nous aurons indéniablement besoin d’une plus grande infrastructure pour cela sur la côte nord de la Colombie-Britannique.

Le projet de loi C-48 soulève un certain nombre de questions urgentes que nous mentionnons dans notre mémoire. Je vous en résume quelques-unes.

Aujourd’hui et au cours de la dernière année, 1 400 pétroliers chargés de pétrole extrait en Alaska passent chaque année par les eaux côtières de la Colombie-Britannique pour se rendre aux raffineries d’Anacortes et de Cherry Point, à 50 kilomètres au sud de là où je vis, à Tsawwassen, en Colombie-Britannique. Qu’accomplit donc le moratoire sur les pétroliers dans ce contexte? Pourquoi empêcher les ports stratégiquement situés de Kitimat et de Prince Rupert, ainsi que d’autres ports maritimes se trouvant à proximité, et les promoteurs privés de collaborer avec les producteurs d’énergie afin d’ouvrir de nouveaux marchés et de constituer de nouvelles chaînes d’approvisionnement pour les exportations d’énergie?

Aucun moratoire sur les pétroliers n’est proposé dans une autre région côtière du Canada, y compris les littoraux de l’Arctique, de l’Atlantique et de la vallée du fleuve Saint-Laurent. Pourquoi n’imposer de moratoire que sur la côte ouest de la Colombie-Britannique? À notre avis, c’est là une application profondément injuste de la loi fédérale.

Un certain nombre de Premières Nations s’opposent au projet de loi C-48 parce qu’elles jugent que cette loi entrave leur recherche d’autonomie économique. Pourquoi est-il approprié d’éliminer des possibilités de développement économique pour les groupes autochtones et les autres promoteurs? Pourquoi le gouvernement fédéral ne permet-il pas aux promoteurs de se prévaloir d’un processus réglementaire indépendant afin d’établir si un projet de terminal pétrolier possède des mérites environnementaux, scientifiques et techniques? C’est une question clé.

L’engagement professé par le gouvernement fédéral à l’égard de l’expansion du commerce dans la région de l’Asie-Pacifique est louable, mais le moratoire sur les pétroliers proposé contredit directement cet objectif de politique publique dont l’importance est cruciale.

L’ICBA invite le Comité sénatorial permanent à examiner le moratoire sur les pétroliers, dans le cadre de son étude du projet de loi C-48, dans le contexte de l’intérêt national à long terme. Nous croyons que cet intérêt couvre l’engagement d’en arriver à une approbation responsable des grands projets énergétiques au moyen de processus d’examen réglementaire indépendants et rigoureux.

Le projet de loi C-48 restreint inutilement les possibilités au moment où le secteur de l’énergie a le plus besoin d’aide afin d’acheminer nos ressources pétrolières nationales vers les marchés asiatiques.

À titre d’association majeure de l’industrie en Colombie-Britannique, nous comprenons le rôle national important de notre province dans cette entreprise. Les côtes de la Colombie-Britannique sont le littoral du Canada; elles appartiennent à l’Alberta et aux autres provinces tout autant qu’aux résidants de la Colombie-Britannique.

En conclusion, la ministre de l’Énergie de l’Alberta a résumé, à l’intention du ministre fédéral des Transports, le problème fondamental posé par le projet de loi C-48 de la manière suivante :

Le moratoire proposé, tel que rédigé, interdit toute installation d’exportation du pétrole brut et de produits de condensation dans la région (le Nord de la Colombie-Britannique), ce qui nuira à plusieurs projets futurs ayant le potentiel d’ouvrir de nouveaux marchés de grande valeur en Asie. L’interdiction des expéditions, à partir de ports en eau profonde le long de la côte nord de la Colombie-Britannique qui jouiraient d’un avantage d’une journée entière sur les autres ports du Pacifique, aura des conséquences économiques profondes et durables pour l’ensemble du pays.

Pour conclure, je crois que le Comité sénatorial permanent des transports et des communications devrait recommander le retrait intégral du projet de loi C-48. Sinon, le comité permanent pourrait recommander que le projet de loi soit modifié afin de prévoir un corridor énergétique maritime passant par l’entrée Dixon, afin de faciliter l’accès aux ports déjà en activité ou futurs dans le Nord de la Colombie-Britannique.

Nous vous remercions d’avoir pu faire un exposé aujourd’hui; j’aurai plaisir à répondre à vos questions.

Le président : Merci infiniment.

Les sénateurs membres du comité et les sénateurs en visite au comité s’intéressent beaucoup à ce projet de loi. Je suivrai la même procédure que d’habitude. Je donnerai d’abord la parole aux membres du comité, après quoi je la donnerai aux autres sénateurs, puis ce sera la même chose au tour suivant.

La sénatrice Miville-Dechêne : Ma question s’adresse à Michael Lowry. J’aimerais que vous nous parliez un peu plus de la possibilité d’un déversement de pétrole dans le Nord de la Colombie-Britannique.

J’ai lu et on nous a dit que parce que les eaux y sont très agitées, en raison des forts courants marins, de la mer elle-même, il est beaucoup plus difficile de nettoyer les eaux après un déversement en Colombie-Britannique qu’ailleurs. Pouvez-vous me dire comment vous voyez la chose? Vous l’avez probablement étudiée en préparation du projet d’oléoduc Northern Gateway.

M. Lowry : Je vous remercie de cette question. Il faut comprendre que les mesures d’intervention en cas de déversement ressemblent beaucoup aux mesures prises lorsqu’il y a un feu de forêt. Il y a des facteurs que les répondants peuvent maîtriser et d’autres, qui sont hors de notre contrôle.

Comme vous l’avez mentionné, les conditions météorologiques influenceront beaucoup notre intervention. Le matériel utilisé, comme les barrages flottants et les récupérateurs, commence à perdre de son efficacité quand les conditions météorologiques dépassent quatre selon la notation de Beaufort. Cela s’applique partout sur la côte.

Il est vrai que les conditions météorologiques sont difficiles sur la côte britanno-colombienne. C’est vrai dans le Nord, mais aussi dans le Sud et à l’ouest de l’île de Vancouver. La météo joue un grand rôle dans le choix des techniques utilisées.

Comme vous le savez sans doute, nous avons dû intervenir après un déversement au centre de la côte il y a quelques années. Notre intervention a duré 40 jours. Pendant ces 40 jours, il y en a 11 où nous n’avons rien pu faire à cause de la météo.

La météo a donc une incidence, mais cela s’applique partout le long de la côte de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Miville-Dechêne : Est-ce que cela s’applique aussi au port de Vancouver? J’aimerais savoir si le risque est plus grand dans le Nord de la Colombie-Britannique que dans le Sud.

M. Lowry : Je ne dirais pas qu’il y est plus grand. Les conditions météorologiques sont différentes dans certaines régions. L’emplacement du port de Vancouver a été choisi par ce qu’il est très à l’abri. Les vagues sont vraiment moins fortes au port de Vancouver.

Le président : Cela ne vaut-il pas pour presque toutes les côtes du monde?

M. Lowry : Effectivement. Les conditions météorologiques sont un facteur sur toutes les côtes.

La sénatrice Miville-Dechêne : J’ai lu que, en raison de la nature particulière de la mer, dans le Nord de la Colombie-Britannique, il y était presque impossible de nettoyer l’océan après un déversement de pétrole. Êtes-vous en train de me dire que ce n’est pas vrai?

M. Lowry : Je vous dis que les conditions météorologiques influencent les mesures d’intervention en cas de déversement. Partout, en Colombie-Britannique, il y a des secteurs touchés par les conditions météorologiques difficiles.

Dans le Nord, le détroit d’Hécate est très souvent le théâtre de conditions difficiles. C’est la même chose dans le Sud, dans le détroit de Juan de Fuca, de même qu’au large de la côte ouest de l’île de Vancouver.

Je vous dis surtout que la météo est un facteur à prendre en considération partout le long de la côte de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci.

La sénatrice Griffin : Je ne sais trop à qui adresser ma question. Plus d’un témoin pourrait probablement y répondre.

Si le projet de loi C-48 est adopté dans sa forme actuelle et qu’il n’y a pas de corridor énergétique maritime passant par l’entrée Dixon, quelle serait la zone côtière la plus proche propice à l’installation d’un terminal si l’on construit un oléoduc dans le Nord?

M. McEwan : Je peux répondre à cette question. Il y a deux ou trois endroits dans le Nord où ce serait possible, mais ils sont tous liés à l’entrée Dixon. Il y a Kitimat, Prince Rupert et quelques autres endroits vers la vallée de la Nass ou l’inlet Portland.

Sinon, l’autre port le plus proche est celui du Grand Vancouver, qui est de plus en plus contraint. Il y a des plans d’agrandissement à ce port, mais si l’on construit de nouveaux oléoducs pour le pétrole, il faudrait plutôt viser le Nord de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Griffin : Et l’Alaska?

M. McEwan : On pourrait certainement en construire un en Alaska, mais je ne vois pas quel serait l’avantage pour le Canada d’expédier son pétrole par un port de l’Alaska.

La sénatrice Griffin : C’est la raison pour laquelle je vous pose la question.

Le sénateur Oh : Ma question s’adresse aux trois témoins.

Nous vendons du pétrole brut aux États-Unis pour 38 $ ou moins le baril. Le prix mondial se situe plus près de 70 $ le baril. Quand on regarde le projet de loi C-48, il semble plus conçu à l’avantage des États-Unis qu’à l’avantage économique du Canada.

Pouvez-vous nous décrire les répercussions économiques qu’aura ce projet de loi sur le Canada s’il est adopté? À quel point nuira-t-il à la croissance économique du Canada?

M. Fagerheim : C’est une vraie farce qu’il y ait une telle différence dans le prix que nous recevons. Premièrement, en comparaison, le prix international du pétrole brut Brent oscille entre 70 $ et 75 $ le baril. Le prix du WTI tourne autour de 58 $ et comme la valeur du dollar canadien est basse, cela équivaut à environ 30 $ de moins. Nous perdons entre 80 et 90 millions de dollars de revenus par jour à la faveur de nos homologues américains.

Toutefois, ce qui nous préoccupe encore plus, et qui devrait préoccuper tous les Canadiens, c’est que jusqu’à il y a trois ans, les Américains ont toujours eu besoin de notre pétrole brut et que les producteurs américains, compte tenu de la croissance qu’ils connaissent depuis quelques années, ont commencé à exporter leurs produits de pétrole brut vers les marchés mondiaux. Ils exportent donc leurs produits au Canada par l’Ontario.

Viendra-t-il un temps où les Américains nous diront : « Nous n’avons plus besoin de votre pétrole du tout »? Ils sont nos seuls clients. Nous n’avons qu’un client dans le monde, et ce sont les États-Unis d’Amérique. C’est une situation très, très difficile pour le Canada.

M. McEwan : J’aimerais ajouter quelque chose. Il y a 30 ans, le premier accord de libre-échange a été conclu. L’une des grandes prémisses à cet accord était que les États-Unis auraient probablement besoin de nos ressources énergétiques dans un lointain avenir. Toutefois, comme le témoin avant moi l’a dit, la dynamique a profondément changé. Aujourd’hui, les États-Unis sont un exportateur net de pétrole. C’est aussi un exportateur net de gaz naturel.

Si nous ne pouvons pas transporter nos ressources par voie maritime, si le projet Trans Mountain ne se réalise pas, si le projet LNG Canada ne voit pas le jour — et nous le saurons tous bientôt, puisque la décision d’investissement finale est imminente, après quelques petits ratés, récemment —, si nous n’agissons pas, si nous ne nous rendons pas compte que nous aurons besoin d’un autre marché où écouler nos ressources pétrolières d’ici 10 à 20 ans, nous rendons peut-être un bien mauvais service à notre pays.

Nous avons une ressource de calibre mondial. Nos réserves pétrolières sont les troisièmes plus grandes au monde. L’Asie en a besoin. Les gens continueront de prendre l’avion. En fait, le transport aérien est en hausse dans le monde.

Il est très déconcertant pour notre association que ce genre de politique publique vienne bloquer tout développement futur. Comme nous l’affirmons dans notre mémoire, tous les projets doivent répondre aux normes scientifiques, environnementales et techniques les plus rigoureuses, mais ils ne devraient pas être bloqués comme les bloque ce projet de loi.

Le président : Les Américains achètent-ils notre pétrole pour leur propre utilisation ou le vendent-ils au prix mondial? Est-ce ce qui se passe?

M. Fagerheim : C’est ce qui se passe. Si je peux revenir à cela, ils achètent le pétrole canadien au rabais, puis peuvent s’exposer aux marchés étrangers. Il ne faut pas oublier que les marchés étrangers attirent une prime d’environ 10 $ le baril au WTI en ce moment. Les États-Unis peuvent donc acheter notre pétrole très au rabais, puis vendre le leur au prix mondial supérieur de Brent.

Le président : C’est la raison pour laquelle à Green Bay, au Wisconsin, on peut acheter un gallon d’essence pour 2 $.

Veuillez continuer. Je trouve toujours cela intéressant.

Le sénateur Oh : Il ne faut pas faire de compromis sur les questions environnementales pour des raisons économiques. Je suis sûr qu’aujourd’hui, grâce à la technologie moderne et à tous les systèmes d’aide à la navigation par satellite, un pétrolier à double coque devrait pouvoir se déplacer en toute sécurité le long de notre côte. Même Transports Canada affirme que le Canada a l’un des systèmes les plus sûrs au monde pour le transport maritime par pétrolier. Pouvez-vous nous en toucher quelques mots, s’il vous plaît?

M. Lowry : Avec plaisir. Depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation, en 1995, le bilan du Canada sur la côte est fantastique. En fait, nos organisations n’ont jamais eu à réagir au déversement d’une seule goutte de pétrole d’un pétrolier sur la côte Ouest. Je pense donc que le bilan de sécurité de l’industrie du transport maritime au Canada, sur la côte Ouest, parle de lui-même. Il est impeccable.

La sénatrice Galvez : J’ai trois petites questions à vous poser, une à l’intention de M. Lowry et les autres à l’intention des représentants de Whitecap et des entrepreneurs indépendants.

Monsieur Lowry, pouvez-vous décrire le comportement de ces trois types de pétrole brut : le pétrole texan, le pétrole de Bakken, comme celui qui a brûlé à Lac-Mégantic, et le bitume dilué? Pouvez-vous nous en expliquer les différences?

Je suis l’économie chinoise pour diverses raisons. J’ai eu beaucoup d’étudiants chinois, aux études supérieures, qui sont ensuite retournés en Chine travailler dans le domaine de l’environnement. C’est très étrange, parce que quand je leur parle et que je leur demande s’ils connaissent le pétrole canadien, ils me répondent qu’ils ne le connaissent pas. Ils affirment que la Chine achète son pétrole de la Russie et de l’Iran, et qu’il y a des oléoducs très importants qui y sont actuellement en construction. J’aimerais savoir combien de pétrole exactement nous voudrions vendre à la Chine.

De même, un port pétrolier extracôtier a été construit en Louisiane. Il s’agit du LOOP, un énorme port louisianais qui influence la logistique du faible coût du pétrole brut. Ne perturbe-t-il la façon dont le pétrole est transporté en Amérique du Nord?

M. Lowry : Je répondrai d’abord à la question sur les produits expédiés de la côte.

Quand WCMRC évalue un risque potentiel, il doit tenir compte des produits transportés dans les navires. De manière générale, ce sont davantage des produits de pétrole lourd que de pétrole léger. Parmi les produits lourds, on trouve le pétrole brut, le bitume dilué et le mazout C. Le mazout C sert à alimenter les navires océaniques. Ce sont tous des produits lourds. Les produits légers sont davantage des produits comme le diesel marin.

Nous avons du matériel adapté aux deux types de produits. Pour les produits lourds, même si l’on dit qu’il s’agit de pétrole lourd, il a une densité plus faible que l’eau. Ces produits flottent, même le bitume dilué. Nous savons que nous pouvons récupérer ces produits parce que nous en avons l’expérience. Nous sommes la seule organisation au monde à avoir déjà mené une opération de nettoyage après un déversement de bitume dilué dans l’océan. Nous avons constaté que nos récupérateurs à brosses sont très efficaces pour retirer ce produit de l’eau.

Pour un combustible plus léger comme le diesel marin, nous utilisons d’autres systèmes de récupération. Nous utilisons des récupérateurs à disques. Notre organisation garde en stock du matériel pour récupérer n’importe quel produit déversé le long de la côte. Nous pouvons donc les récupérer, qu’il s’agisse de produits lourds ou de produits légers.

En fait, il est même plus facile pour nous de procéder au nettoyage après un déversement de produits lourds, parce qu’il est plus facile de les endiguer à l’aide de nos systèmes de barrage pour ensuite les récupérer avec nos récupérateurs.

La sénatrice Galvez : Utilisez-vous les mêmes agents dispersants que ceux qui ont été utilisés après le déversement de la plateforme Deepwater Horizon? Quels types de dispersants utilisez-vous?

M. Lowry : Il y a trois principaux moyens de contenir un déversement de pétrole. Le premier est ce qu’on appelle la récupération mécanique, à l’aide de barrages pour endiguer le pétrole et de récupérateurs pour l’extraire de l’eau. Le deuxième consiste à utiliser des agents dispersants, des substances chimiques, pour que le pétrole se disperse dans l’océan, puis se biodégrade. Il y a finalement la technique de la combustion sur place, qui consiste essentiellement à y mettre le feu pour le brûler.

Au Canada, nous prévoyons faire de la récupération mécanique. Nous ne prévoyons pas utiliser d’agents dispersants ni la technique de la combustion sur place, principalement parce que nous devons au préalable obtenir l’approbation d’Environnement Canada. Ce n’est pas notre premier choix. Notre premier choix est celui de la récupération mécanique.

Le président : Vous pouvez répondre aux deux autres questions qui ont été posées. Allez-y. Qui veut y répondre? Les avons-nous oubliées?

M. McEwan : Est-ce que vous pouvez les répéter?

La sénatrice Galvez : Ma deuxième question concerne le fait que la Chine achète son pétrole d’autres sources, comme l’Iran et la Russie. Il y a là-bas des oléoducs en construction pendant que nous nous parlons.

Ma troisième question portait sur le LOOP, soit le port pétrolier extracôtier de la Louisiane, qui est situé dans le golfe du Mexique et qui accueille des pétroliers post-panamax qui peuvent y charger et y décharger du pétrole à une vitesse de tant de tonnes l’heure. Tout est en train de changer avec l’existence de ce nouveau port, dont personne ne semble vouloir parler.

M. Fagerheim : Je répondrai à votre deuxième question. On parle de l’importation de produits de pétrole brut de la Russie et de l’Iran, mais il faut aussi parler des autres pays du Moyen-Orient qui exportent désormais leurs produits en Chine, de même que des États-Unis d’Amérique.

La quantité de pétrole que nous pourrons y exporter nous-mêmes dépendra... On ne parle même pas de nos produits dans ce contexte, parce que nous n’avons pas accès au transport maritime. Si l’on prend la production canadienne aujourd’hui, nous produisons un peu plus de 4 à 4,4 millions de barils par jour, mais combien pourrions-nous en expédier outre-mer? Nous en utilisons environ 600 000 barils par jour nous-mêmes, donc nous avons beaucoup de ressources à exporter à l’étranger.

Nous pouvons faire le calcul assez vite. Prenons un million de barils par jour, à un prix de 65 à 70 $ le baril, c’est ce qu’on perd en revenus. Nous pouvons en tenir compte.

Il y a d’autres pays du monde... Il faut bien le comprendre. Le Canada est tellement fiable, il a un bilan environnemental presque impeccable, mais nous ne pouvons pas exporter nos produits vers les marchés étrangers. C’est une vraie blague.

La sénatrice Simons : Merci. Je crois que mes questions s’adressent surtout à M. Lowry. Vous avez parlé du détroit d’Hécate. On nous a informés que c’est l’une des voies de navigation les plus dangereuses au monde, soit la quatrième étendue d’eau la plus dangereuse au monde, surtout en raison de sa faible profondeur et des vents qui y soufflent.

S’il ne devait pas y avoir de moratoire complet, y a-t-il des zones sur la côte que vous qualifieriez de zones maritimes particulièrement vulnérables?

M. Lowry : Je ne crois pas que la Western Canada Marine Response Corporation soit en mesure de répondre à cette question. Je dirais qu’il y a des mécanismes dans ce nouveau volet d’évaluation des risques dont s’occupent le gouvernement fédéral, Transports Canada et la Garde côtière canadienne, des organismes mieux en mesure d’évaluer les risques le long de la côte et de déterminer quelles zones sont sûres pour la navigation. Les pilotes du Pacifique en particulier peuvent se pencher là-dessus. Notre travail consiste à être prêt à intervenir en cas de déversement le long de la côte de la Colombie-Britannique.

La sénatrice Simons : J’avais une question sur le bitume dilué, car j’ai vu des informations contradictoires à ce sujet. Est-il plus facile de récupérer du bitume dilué que du pétrole brut?

M. Lowry : C’est très comparable. Les deux produits ont une densité semblable et donc, comme je l’ai déjà mentionné, ils flottent. La principale différence — selon des études d’Environnement Canada et de Ressources naturelles Canada —, c’est que le bitume dilué devient visqueux plus rapidement, ce qui signifie qui si l’on devait utiliser des dispersants, on dispose de beaucoup moins de temps pour intervenir. Voilà l’une des principales différences entre le pétrole brut et le bitume dilué sur le plan de l’intervention.

La sénatrice Simons : Quelqu’un m’a dit que des petites boules flottantes se forment.

M. Lowry : Tous les produits lourds peuvent former des boules de goudron. Cela se produit pour tout l’éventail des hydrocarbures.

La sénatrice Simons : C’est M. McEwan qui a proposé l’idée de prévoir un corridor, et je voulais savoir, puisque votre organisme est responsable des opérations de sauvetage, si vous avez des endroits précis en tête? C’est-à-dire qu’il a mentionné une zone particulière. Je sais que cela ne relève pas directement de votre expertise, mais dans quelle mesure un corridor vous serait utile dans vos interventions d’urgence? Un corridor vous faciliterait-il la tâche?

M. Lowry : Si vous me permettez de reformuler la question un peu, nous demanderions l’établissement de routes imposées pour les navires qui circulent le long de la côte nord. Dans le cas du projet d’Enbridge pour lequel nous nous étions préparés, nous savions quel serait l’itinéraire et nous proposions de placer l’équipement à des endroits appropriés le long de cet itinéraire. C’est essentiel pour les activités d’intervention parce qu’un facteur sur lequel nous pouvons agir... Évidemment, nous ne pouvons rien changer à l’étendue d’un déversement ni au temps qu’il fait, mais nous pouvons changer la vitesse à laquelle nous nous rendons sur place. Si nous connaissons la route suivie par un navire, nous pouvons placer notre équipement à des endroits stratégiques le long de cette route et nous assurer de pouvoir intervenir rapidement.

C’est exactement ce qui a été mis en place pour les routes maritimes du sud autour de l’île de Vancouver. Pour le projet Trans Mountain, notre équipement sera placé à des endroits stratégiques dans ces zones, de sorte que nous puissions intervenir rapidement le long de cette voie.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup.

La sénatrice Gagné : Je pense que nous connaissons tous très bien les préoccupations qu’ont exprimées des Premières Nations côtières en Colombie-Britannique et d’autres intervenants. Dans quelle mesure le projet de loi répond-il à leurs préoccupations?

M. McEwan : Certaines Premières Nations n’appuient pas le projet de loi C-48 et d’autres l’appuient.

Mon opinion dans tout cela, c’est qu’on ne devrait pas adopter une mesure législative qui empêche de fait un promoteur de projet de se prévaloir d’un processus d’examen réglementaire indépendant et rigoureux — point à la ligne. C’est pratiquement ce que le projet de loi propose. Il exclut nos ports pour ce qui est des cargaisons de plus de 12 500 tonnes métriques. Ainsi, on limite la capacité — pour revenir à la question de la sénatrice Galvez — d’acheminer les ressources de façon responsable vers le marché asiatique.

J’ai participé à de nombreuses activités de commercialisation en Asie dans le cadre de grands projets lorsque j’étais fonctionnaire en Colombie-Britannique. Nous faisions la promotion des pipelines qui étaient soumis à des processus réglementaires. Un projet s’annonce; un autre a été approuvé pour être ensuite annulé. Le projet de loi C-48 envoie un mauvais signal à ces marchés. Je crois que nous devons réfléchir à ce que nous faisons sur ce plan.

Pour revenir au point soulevé par l’un des autres témoins, nous avons au Canada des politiques de réglementation très rigoureuses qui font l’envie du monde entier, mais c’est un peu trop lourd. C’est un autre projet de loi dont est saisi un autre comité, le projet de loi C-69, qui pose d’autres défis.

La sénatrice Simons : Vous ne dites pas?

La sénatrice Gagné : Dans votre exposé, vous avez mentionné que, si nous devions apporter des amendements, nous pourrions envisager l’idée de prévoir un corridor. Vous avez parlé des routes imposées.

La sénatrice Simons : Je crois qu’il a parlé de routes maritimes imposées.

La sénatrice Gagné : Cela dit, comment pourrions-nous répondre aux préoccupations des Premières Nations ou d’autres intervenants si nous présentions un amendement comme celui-là?

M. McEwan : Dans tout projet linéaire ou portuaire, on a l’obligation de consulter les Premières Nations et de tenir compte de leurs intérêts. Il faut laisser les consultations se dérouler dans le cadre d’un processus d’examen réglementaire par projet.

La sénatrice Gagné : Quelqu’un d’autre veut intervenir?

Le président : Vouliez-vous intervenir?

M. Fagerheim : Quant à ce qui peut être proposé, si nous devions chercher un compromis ou apporter un amendement plutôt que de rejeter le projet de loi C-48, nous proposerions, à l’article 4 du projet de loi, de remplacer l’imposition d’interdictions catégoriques par une interdiction conditionnelle. Il s’agirait de faire un ajout à la fin des paragraphes 4(1) et 4(3), que j’ai fourni à tout le monde par écrit.

À moins qu’au moment visé, il existe dans un rayon prescrit, i) des capacités d’intervention en cas de déversement en milieu marin suffisantes; et ii) au moins [x] remorqueurs qui génèrent une puissance de [y] permettant une capacité de remorquage de [z].

Nous aurions donc un compromis ou un amendement permettant l’acheminement de nos produits et les interventions d’urgence, et nous avancerions dans le monde modernisé des interventions d’urgence et du rétablissement.

La sénatrice Dasko : Merci à tous.

Je crois que tout le monde est bien au courant de l’écart de prix et de ce qui se passe dans l’industrie. La question a été soulevée à maintes reprises devant notre comité et d’autres comités, ainsi qu’à la Chambre. Je pense que tout le monde comprend à quel point la situation est difficile pour les producteurs.

Monsieur McEwan, vous êtes la personne idéale pour répondre à ma question. Vous dites que vous employez 50 000 personnes en Colombie-Britannique.

M. McEwan : Nos membres le font.

La sénatrice Dasko : J’aimerais vraiment savoir comment le gouvernement britanno-colombien réagit à la situation. J’aimerais que vous me disiez tout ce que vous pouvez me dire sur sa position à cet égard et me dire s’il soutient votre organisme et s’il s’oppose au projet de loi. Puisque, comme vous l’avez dit, vous êtes un ancien employé du gouvernement, vous avez peut-être une meilleure idée de ce qui se passe en Colombie-Britannique à l’heure actuelle.

M. McEwan : Comme le comité le sait sans doute, l’ancien gouvernement a mis en place cinq conditions concernant les oléoducs, et on peut débattre de leur bien-fondé.

À mon avis, le gouvernement britanno-colombien actuel pratique l’obstruction lorsqu’il s’agit de Trans Mountain. En fait, notre organisme est un intervenant dans une cause entendue par la Cour suprême de la province. Elle porte sur la réglementation visant à restreindre le transport de bitume dilué en Colombie-Britannique, et il s’agit d’une cause constitutionnelle. Je dirais que le gouvernement provincial s’oppose aux pipelines.

La sénatrice Dasko : Appuie-t-il le projet de loi? Connaissez-vous sa position au sujet du projet de loi?

M. McEwan : Je ne peux répondre à cette question.

La sénatrice Dasko : Êtes-vous au courant de choses qu’il aurait dites au sujet du projet de loi?

M. McEwan : Pour être honnête, non, mais j’imagine qu’il appuie l’interdiction.

La sénatrice Dasko : D’accord.

Monsieur Fagerheim, puis-je tout d’abord vous demander où vous êtes?

M. Fagerheim : Je suis à Calgary, en Alberta.

La sénatrice Dasko : Vous avez dit que vous produisiez dans trois provinces. Comment transportez-vous vos ressources jusqu’à la côte de la Colombie-Britannique? Vous ne le faites pas?

M. Fagerheim : Nous ne les acheminons pas jusqu’aux côtes. Voilà le problème.

La sénatrice Dasko : D’accord. Alors où est acheminé votre produit en ce moment? Seulement vers le sud?

M. Fagerheim : Oui. Nous en vendons sur le marché canadien, soit à Fort Saskatchewan, dans une raffinerie, et dans le Midwest américain.

La sénatrice Dasko : Donc, si le projet de loi n’est pas adopté, quelles seront les perspectives d’avenir pour votre entreprise, à votre avis? Que ferez-vous différemment?

M. Fagerheim : Si le projet de loi est adopté ou s’il ne l’est pas?

La sénatrice Dasko : S’il n’est pas adopté. Si le projet de loi meurt.

M. Fagerheim : Si le projet de loi meurt? Je suis désolé, je veux seulement m’assurer que je...

La sénatrice Dasko : Oui, s’il meurt.

M. Fagerheim : S’il n’est pas adopté, nous aurons une occasion d’acheminer nos produits vers des marchés étrangers et d’obtenir un prix plus élevé. Nous pourrions accélérer le développement de nos actifs avec des flux financiers plus importants, des flux de trésorerie, et des investisseurs étrangers réinvestiraient dans notre pays.

La sénatrice Dasko : Si le projet de loi n’est pas adopté, pensez-vous que les possibilités d’ajouter un autre pipeline qui se rendrait jusqu’aux côtes seraient bonnes?

M. Fagerheim : Oui.

La sénatrice Dasko : Parlons-nous d’un autre pipeline?

M. Fagerheim : De notre point de vue, concernant le pétrole brut, nous souhaitons que le projet Trans Mountain soit approuvé. Je ne crois pas que cela devrait empêcher la construction d’autres pipelines. Pour les producteurs de gaz naturel, comme on vous l’a dit plus tôt aujourd’hui, je crois que la construction d’une installation de GNL qui permettrait d’acheminer nos produits de gaz naturel vers les marchés étrangers est aussi importante. Ils ne s’excluent pas mutuellement.

Si nous y pensons bien, il s’agit de nos ressources. Elles seront produites et vendues. Lorsqu’elles seront vendues, quel prix obtiendrons-nous dans l’intérêt de tous les Canadiens? Ce n’est pas dans l’intérêt de Whitecap Resources, mais bien dans celui de tous les Canadiens; il s’agit de leur offrir les meilleurs soins de santé, le meilleur système scolaire, les meilleurs centres de technologie et d’avancement et des programmes sociaux partout au pays.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je vais poser ma question en français à nos invités. Tout d’abord, je tiens à remercier l’ensemble des invités qui sont ici ce soir, car j’apprécie leurs présentations.

Monsieur Fagerheim, vous entendez bien l’interprétation?

[Traduction]

M. Fagerheim : Oui. Merci.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci beaucoup. Évidemment, pour un pays comme le Canada, qui est très grand et qui regorge de ressources naturelles, sa capacité intérieure de les développer lui-même est assez limitée. Il doit donc faire appel à des investissements extérieurs. On l’a appris cette semaine avec d’autres invités qui nous mentionnaient à quel point les investissements étrangers ont chuté au Canada au cours des quatre dernières années, surtout dans le domaine des ressources naturelles.

Je n’ai qu’une seule question. Monsieur Fagerheim, je sais que vous travaillez beaucoup sur la scène internationale et nationale dans le domaine des investissements. Lorsque vous parlez à ces investisseurs du projet de loi C-48 et du projet de loi C-69, qui auront un impact énorme sur l’exploitation des ressources naturelles au Canada, du moins, sur l’exploitation destinée à l’exportation, quelle perception ont les investisseurs de ces deux projets de loi qui risquent de limiter l’exploitation des ressources naturelles au Canada?

[Traduction]

M. Fagerheim : Je vous remercie de la question. Qu’il s’agisse des efforts de commercialisation en Asie — ce qui inclut l’Australie, Singapour, Taipei, Tokyo et la Chine — que nous avons déployés au cours de l’automne, ou en Europe, en janvier et février, les questions qu’on nous pose constamment ne portent pas précisément sur les projets de loi C-48 et C-69, car pour les investisseurs étrangers, ce ne sont que des chiffres.

Ce qu’il veulent connaître, ce sont les processus réglementaires. Ils nous demandent pourquoi si notre pays est aussi riche en ressources, on ne nous permet pas d’acheminer nos produits vers les marchés étrangers et, par conséquent, d’obtenir le meilleur prix possible? Ils nous disent que les organismes de réglementation, les affaires réglementaires et les organismes gouvernementaux et les politiques de notre pays limitent notre capacité de financement. Par conséquent, à ce moment-ci, je peux vous dire que sur les 24 rencontres que nous avons tenues en Asie, 20 comprenaient d’anciens actionnaires de Whitecap Resources, mais parce que nous ne sommes pas capables d’acheminer des produits vers les marchés — et ils examinent les importants écarts, les prix —, Whitecap Resources n’a aucun actionnaire asiatique à l’heure actuelle. C’est une situation fort différente de celle d’il y a deux ans et demi. Ce sont là des questions difficiles auxquelles nous n’avons pas de réponse, au-delà de dire que nous y travaillons.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci.

[Traduction]

Le sénateur MacDonald : Je remercie les témoins de leur présence.

Sur la côte Est du Canada, nous connaissons très bien le transport de pétrole. Mon père et trois de mes frères ont navigué, et ma famille compte des capitaines de garde côtière depuis des générations, et je connais très bien ces activités.

Il est intéressant d’examiner les chiffres. Sur la côte Est du Canada, la côte atlantique, nous transportons 192 millions de tonnes métriques de pétrole par année. Sur le réseau des Grands Lacs, la Voie maritime du Saint-Laurent, c’est 24 millions de tonnes métriques, et sur l’estuaire du Saint-Laurent dans le golfe, on parle de 67 millions de tonnes métriques, ce qui fait qu’au total, nous manutentionnons de façon sécuritaire 283 millions de tonnes métriques de pétrole sur la côte Est du Canada. On parle de six sources différentes. Les raffineries de Québec et de Montréal, la raffinerie de Come By Chance — les puits extracôtiers de Terre-Neuve, d’où on en exporte directement —, Point Tupper et Port Hawkesbury, la plus grande installation de manutention des hydrocarbures au pays, et la raffinerie de pétrole Irving à Saint John, au Nouveau-Brunswick.

Le seul endroit sur la côte Ouest où nous en faisons la manutention c’est dans le port de Vancouver, et on parle de 6 millions de tonnes métriques par année. Toutes proportions gardées, ce n’est rien. En fait, 37 millions de tonnes métriques de pétrole américain sont transportées dans nos eaux sur la côte Ouest. Je ne peux pas croire que le gouvernement du Canada est en train de faire cela. Pourtant, nous voici en train de prendre une décision arbitraire de bloquer cette partie importante du littoral, qui nous permettrait de régler un si grand nombre de problèmes dans notre pays sur le plan de l’acheminement de ses produits vers le marché.

Des rapports existent. En 1978, le ministère de l’Environnement et des Pêches en a produit un. Il avait évalué 27 ports de la côte Ouest pour l’exportation pétrolière. En tête de liste, il y avait Port Simpson et la région de Prince Rupert. La région de Vancouver occupait la dernière position. Selon vous, pour quelle raison rationnelle le gouvernement du Canada encouragerait plus de pétrole dans la région de Vancouver, où il y a non seulement toute la pression des pétroliers, mais aussi toutes les activités, et étant donné qu’il y a si peu de pression dans la région de Prince Rupert et Port Simpson où se trouve le port de la côte Ouest qui donne le meilleur accès à l’océan?

M. McEwan : Je me mêle à la conversation. Il n’y en a pas. L’adoption, encore une fois, de ce genre de loi, sans autoriser les promoteurs à faire des propositions qui, valables ou non, seraient quand même examinées et jugées au moyen d’un processus réglementaire indépendant et approfondi me déconcerte.

Un argument favorable au pipeline Trans Mountain est, je suppose, qu’il double un tracé qui existe déjà. En plus des navires-citernes qui entrent dans le port de Vancouver et qui en sortent en toute sécurité, toutes sortes de navires et de bateaux circulent en tous sens immédiatement au sud du district régional du Grand Vancouver, comme je l’ai fait remarquer dans ma déclaration, jusqu’à Anacortes et à la pointe Cherry. C’est bel et bien à 50 kilomètres au sud de chez moi.

Le projet de loi C-48 est une absurdité du point de vue de la politique publique. En tout respect, on devrait le mettre au rebut.

Le sénateur MacDonald : Monsieur Fagerheim, voulez-vous répondre?

M. Fagerheim : Je suis d’accord avec M. McEwan. Le gaz naturel et le pétrole brut sont des produits canadiens, et nous devons y réfléchir dans ce contexte. La nécessité de l’interdiction est, d’après moi, une illusion. Nous avons besoin de ces produits pour le bien de tous les Canadiens.

Notre manque de respect pour le secteur énergétique, ses règles et l’innovation et l’instruction que nous pourrions prodiguer à ces jeunes esprits brillants que nous n’autorisons pas à participer aux retombées financières découlant de la vente de nos produits aux prix mondiaux me désole.

Le sénateur MacDonald : Je fais partie du comité depuis 10 ans. J’ai eu l’occasion de le présider pour une étude des pipelines et j’ai discuté avec tous les experts du transport du pétrole dans les deux régions côtières.

Personne ne minimise l’importance de la sécurité. Tous en comprennent l’importance et celle de gérer les risques. Je ne crois pas qu’on puisse s’en inquiéter. Dans l’Est, nous pouvons compter sur l’Eastern Canadian Marine Response Corps, les Point Tupper Marine Services, l’Atlantic Environmental Response Team, tous les trois très expérimentés dans la gestion de toutes ces ressources et dans le transport de ce pétrole.

Tous connaissent l’Exxon Valdez. Deux marées noires importantes sont survenues dans l’Est. Comme j’ai passé ma jeunesse dans la région de l’île du Cap-Breton, je m’en souviens. En 1970, l’Arrow s’est échoué immédiatement à l’ouest de la levée de Canso. En 1979, le Kurdistan, à destination des raffineries du Québec, s’est séparé en deux dans le détroit de Cabot, entre l’île du Cap-Breton et Terre-Neuve.

Il ne faut pas croire un instant que l’accident, s’il était survenu dans l’estuaire du Saint-Laurent, au milieu de l’hiver, sur la glace, aurait eu des conséquences moins graves qu’une marée noire sur la côte Ouest du Canada. Si l’Arrow, affrété par Irving, avait causé une grosse marée noire dans la baie de Fundy, plutôt que dans la baie Chebucto, il aurait causé un incident international. Le déversement aurait touché le Maine en 24 heures, Boston en 48 heures et New York en 72 heures, en raison de la grande force des marées dans cette région.

Pourtant, le gouvernement du Canada choisit cette petite région parce qu’il s’agit, et je pense que vous serez d’accord, de bloquer les projets de pipelines. Il n’existe aucun motif raisonnable d’empêcher la livraison de pétrole au reste du monde à partir de cette côte, n’est-ce pas?

M. McEwan : Je serais d’accord, et je suppose que cela ne vous étonne pas.

Je pense que nous cédons à des intérêts étrangers qui veulent que nous fermions boutique. Ne nous laissons pas faire. Nous avons nos intérêts nationaux, nous avons des programmes sociaux à financer.

Un autre facteur qui ne figure pas dans notre mémoire — mais j’ai songé à en parler — est que, entre 2005 et 2015, il s’est investi 226,8 milliards de dollars dans les sables pétrolifères de l’Alberta, étant entendu que les investisseurs internationaux pourraient fournir les marchés en notre pétrole. Notre problème est de faire parvenir un oléoduc de quelque 10 milliards de dollars jusqu’au port du Grand Vancouver. Plus tard, nous aurons besoin de construire un autre pipeline sur la côte nord, mais ce projet de loi l’empêche.

Le président : Tout d’abord, monsieur Fagerheim, je dois vous remercier. Je suis de la Saskatchewan. Je vous remercie de brasser des affaires dans notre province et de contribuer à son économie. Je souhaite que nous puissions résoudre ce problème de transport de nos ressources naturelles jusqu’à la côte Ouest.

La consultation a beaucoup fait parler d’elle. C’est à vous trois que je pose la question, parce qu’elle aurait compris l’examen de notre capacité d’intervention contre une marée noire. L’administration fédérale vous a-t-elle consultés sur ce projet de loi?

M. McEwan : À ma connaissance, notre association ne l’a pas été, bien que j’en fasse partie depuis 18 mois. Je n’en ai pas entendu parler.

Le président : Votre prédécesseur vous aurait prévenu...

M. McEwan : Oui.

Le président : ... si la consultation avait été sérieuse.

M. Fagerheim : Indéniablement, Whitecap Resources n’a été ni consulté ni prévenu.

Le président : Monsieur Lowry, a-t-on parlé à votre organisation de la possibilité d’un déversement de pétrole et de l’efficacité de votre intervention?

M. Lowry : Non. Pas à ma connaissance.

La sénatrice Jaffer : Monsieur Fagerheim, veuillez m’éclairer. Vous avez parlé de gaz naturel du Nord. C’est une erreur, n’est-ce pas, parce que ça ne fait pas partie des hydrocarbures persistants ou du pétrole brut. Vous vous êtes mal exprimé. On pourra continuer de transporter du gaz liquéfié et du gaz naturel, même après l’adoption du projet de loi, n’est-ce pas?

M. Fagerheim : Je pense que oui.

La sénatrice Jaffer : Merci.

M. Fagerheim : Il ne vise que le brut.

La sénatrice Jaffer : Je vous remercie. Je pense que vous vous êtes mal exprimé.

Monsieur Lowry, où êtes-vous basé? Où se trouvent vos bureaux ou votre entreprise?

M. Lowry : Nous avons des bases d’intervention à Vancouver, à Nanaimo, dans l’île de Vancouver, à Victoria et à Prince Rupert. Nous en avons une à Prince Rupert et nous avons disséminé des dépôts de matériel le long de la côte de la province.

La sénatrice Jaffer : Je n’essaie pas de vous faire dire ce que vous n’avez pas dit, mais n’est-ce pas qu’il serait plus facile de se rendre dans un endroit où les conditions météorologiques ne sont pas extrêmes comme en celui que, vous avez dit, la météo a rendu inaccessible pendant 11 jours?

M. Lowry : Non, ce n’est pas ce que je disais. Partout le long de la côte, partout où un déversement pourrait survenir, la météo pourrait également gêner l’intervention. Il n’y a pas que sur la côte nord où la météo est extrême. Toute la côte de la Colombie-Britannique connaît des extrêmes météorologiques.

La sénatrice Jaffer : Mais pas à Vancouver.

M. Lowry : Il y a des tempêtes à Vancouver, mais le choix de l’emplacement du port de Vancouver s’explique, effectivement.

La sénatrice Jaffer : Monsieur McEwan, heureuse de vous voir. Nos familles se connaissent depuis longtemps.

Vous avez dit représenter des intérêts commerciaux, mais, comme vous le savez — et vous avez été un grand stratège du gouvernement de la Colombie-Britannique —, les peuples autochtones ont aussi dans le Nord des intérêts commerciaux. Et ils ne veulent pas de pipeline, parce qu’ils craignent les conséquences d’un déversement. Les communautés côtières craignent pour leurs pêcheries. Elles ne veulent pas courir ce risque. Vous ne représentez peut-être pas les intérêts commerciaux dans le Nord, n’est-ce pas?

M. McEwan : Oui, nous possédons effectivement des intérêts commerciaux dans le Nord. Nous avons un vice-président à Prince George.

La sénatrice Jaffer : Parmi les nations de la côte?

M. McEwan : Des membres de notre organisation fournissent des services et approvisionnent beaucoup d’industries en rayonnant vers la côte ouest de la Colombie-Britannique et vers Prince Rupert.

La sénatrice Jaffer : J’en suis heureuse. Vous devez avoir entendu parler de la grande inquiétude des nations côtières. Deux, les Nisga’a et les Lax Kw’alaams, ne veulent pas du projet de loi, mais toutes les autres le réclament pour protéger leurs intérêts commerciaux. Je suis sûre que vous en avez entendu parler.

M. McEwan : J’ai entendu deux choses. Il importe de reconnaître que certaines sont contre et d’autres pour. Le projet Eagle Spirit d’un pipeline de 16 milliards de dollars, entre l’Alberta et la pointe Grassy, dans l’entrée Dixon bénéficie de l’appui de 35 nations. Les Nisga’a aussi appuient le développement industriel et ont accès aux eaux soumises à la marée...

La sénatrice Jaffer : Désolée de vous interrompre, mais les 35 nations dont vous parlez, autant que je m’en souvienne, n’habitent pas la côte. Où sont-elles situées?

M. McEwan : Les Lax Kw’alaams habitent la côte, tout comme les Nisga’a, qui ont accès à des eaux soumises à la marée.

Le président : Laissez-le terminer avant de lui poser une autre question. Ne l’interrompez-pas.

Allez-y.

M. McEwan : Ça va; j’ai terminé.

La sénatrice Jaffer : Je voulais dire que les Nisga’a et les Lax Kw’alaams sont des nations côtières, mais pas les 35 autres.

M. McEwan : D’accord, mais elles sont canadiennes comme le reste d’entre nous, et elles ont droit à un processus réglementaire indépendant pour déterminer s’il est viable d’exporter du pétrole à partir de la côte de la Colombie-Britannique.

Comme je l’ai dit, les Nisga’a sont sur la côte, tout comme les Lax Kw’alaams.

Le sénateur D. Black : Merci à vous tous d’être ici.

Monsieur Lowry, je vérifiais mes notes et je voudrais que vous confirmiez si, effectivement, vous estimez qu’on ne devrait pas interdire les navires-citernes le long de la côte nord de la Colombie-Britannique, que votre organisation, actuellement, appuyée au besoin, pourrait intervenir convenablement après un déversement pétrolier et qu’elle pourrait répondre à la situation. Est-ce que mes notes sont fidèles?

M. Lowry : Oui. Nous collaborerions avec le promoteur pour nous doter de la capacité convenable de réponse d’après le risque accru posé par la circulation maritime découlant de la réalisation de ce projet. Nous nous sommes pris exactement de la même manière pour nous préparer au projet Trans Mountain ou, avant son annulation, au projet Northern Gateway.

Le sénateur D. Black : Merci.

La sénatrice McCoy : Mes questions, je les pose à vous tous. J’ai, sous les yeux, une publication de Transports Canada, qui présente des statistiques sur le transport maritime dans la région où seraient interdits les navires-citernes. On y lit que, en 2003 et de 2005 à 2008, tous navires confondus, entre 1 000 et 2 000 sont allés à Prince Rupert.

Nous avons aussi entendu parler de trois, peut-être quatre déversements dans cette région, tous par des bateaux et des navires plus petits que ceux qui seraient touchés par ce soi-disant moratoire. Il y a le transbordeur entre ce port et l’Alaska et un chaland. Je sais aussi qu’un navire militaire américain coulé en 1946 a commencé à laisser s’échapper de l’huile et a fait l’objet d’une intervention combinée. J’ignore si vous y avez participé, monsieur Lowry, mais la Garde côtière a dirigé, avec la participation des Premières Nations, une intervention intégrée pour colmater définitivement la fuite.

Le projet de loi C-48, l’interdiction, n’y changeront rien. D’après moi, ça ne répond pas aux risques auxquels les communautés côtières sont exposées. Que faudrait-il pour protéger les intérêts légitimes des communautés de la Colombie-Britannique contre les divers risques auxquels elles sont exposées?

Peut-être, monsieur Lowry, pourriez-vous répondre, mais les autres, n’hésitez pas, s’il vous plaît.

M. Lowry : Très juste! Le moratoire sur les navires-citernes ne supprime pas le risque de déversement sur la côte nord. Toute la circulation maritime présente un risque. Comme je l’ai dit, les navires de haute mer transportent du bunker C, toxique. Visiblement, tous les autres navires transportent du combustible susceptible de causer un déversement.

Dans l’examen des risques, notre organisme d’intervention prend en considération la totalité de la circulation côtière en Colombie-Britannique, pas seulement celle des navires-citernes. Tous les navires présentent des risques. Nous disons souvent que les navires-citernes ne nous empêchent pas de dormir, à cause de toutes les précautions prises pour éviter des accidents, notamment des remorqueurs escorteurs et des pilotes et ainsi de suite.

Toutes les améliorations réalisées pour le projet Trans Mountain ne sont pas seulement destinées à ce projet; elles le sont aussi à toute la communauté maritime de la côte. C’est certainement vrai aussi de toutes les améliorations que nous pourrions concrétiser pour d’éventuels projets pour la côte nord. On pourrait y faire appel, quelle que soit la nature du déversement, sur cette côte ou ailleurs en Colombie-Britannique.

La sénatrice McCoy : Nous devrions viser plus haut.

Monsieur Fagerheim, j’ai vu un titre, dans une publication de Bloomberg, il y a une semaine ou deux, selon lequel les exportations énergétiques des États-Unis sont désormais considérées comme l’élément central de l’économie de ce pays. Vous l’avez expliqué en partie, mais est-ce que TMX, l’expansion de Trans Mountain, est assez ambitieuse et vise-t-elle l’Asie pour vous aider, vous et d’autres producteurs? Est-ce une diversification suffisante des marchés pour assurer l’avenir de l’industrie énergétique?

M. Fagerheim : Pour répondre directement, non. En guise de coussin de sécurité énergétique du Canada, nous devrions chercher à ajouter encore 375 000 à 380 000 barils par jour de capacité au port de Burnaby. Une partie du produit pourra aboutir en Asie où on verse le prix fort ou sur des marchés où les prix sont très élevés. Surtout, il nous reste encore 3,5 millions de barils qui continueront d’être offerts à prix réduit.

La sénatrice Galvez : Parlons-en de cette différence de prix, parce que je sais qu’il existe des marques standard, par exemple le pétrole du Texas, celui de l’Ouest canadien, le bitume dilué et le bitume. À ce que je sache, la différence de prix ne provient pas seulement de la capacité du pipeline. La distance, la matière transportée, le condensat, le diluant du bitume et la difficulté de raffinage jouent également. Les facteurs sont nombreux.

Dans la fourchette, aujourd’hui, on trouve l’intermédiaire de l’ouest du Texas à 56 $; le Brent du Royaume-Uni à 66 $; le sélect de l’Ouest canadien, notre pétrole, à 45 $. La différence n’est que de 11 $. Parfois, nous exagérons certains chiffres pour amplifier nos pertes journalières.

Pouvez-vous, s’il vous plaît, en dire un peu plus sur la façon exacte de calculer ces différences de prix?

M. Fagerheim : Le prix du Brent que vous avez cité est réduit. Nous avons réduit l’écart, parce que l’Alberta a dû réduire sa production mise sur le marché. On n’a jamais entendu dire que les organismes canadiens de réglementation aient été obligés de réglementer la production, essentiellement, je ne dirais pas pour manipuler le prix, mais parce qu’il fallait le faire pour rétrécir la fourchette.

La réduction plus grande ne permet pas aux Albertains et aux Canadiens de vendre à leur pleine valeur leurs produits en Alberta, en Colombie-Britannique et en Saskatchewan. C’est les produits qu’ils vendent sur le marché. À cause de la réduction plus grande de prix, ils prélèvent moins de redevances et de taxes.

J’ai parlé des calculs un peu plus tôt. Quand nous étions à 38 $, et nous sommes à 45 $ maintenant, ça ne dure pas, parce que nous n’arrivons pas à placer nos produits sur le marché, ce qui pose un problème.

La sénatrice Jaffer : J’ai une dernière question pour vous, monsieur McEwan. Vous avez parlé de 35 Premières Nations. Ce sont des Canadiens. Les gens des communautés côtières qui sont venus ici ont indiqué qu’ils ne veulent pas mettre les pêcheries des régions côtières à risque. Ils habitent sur la côte; leurs familles y sont établies depuis des centaines d’années. Pensez-vous que nous devrions aller à l’encontre de leur volonté?

M. McEwan : À mon avis, sénatrice, toute proposition de projet devrait faire l’objet d’un processus d’examen réglementaire équitable, indépendant et très rigoureux.

Aux termes de la loi, ce processus comprend l’obligation de consulter et d’accommoder les nations autochtones. Dans le cadre de ces consultations, nous devrions chercher des accommodements qui répondent à leurs préoccupations. Je pense que c’est ainsi qu’il faut procéder, au lieu d’adopter un projet de loi qui empêche la création de retombées économiques énormes au profit de tous les Canadiens, y compris les Premières Nations côtières.

Le président : Je remercie les témoins.

Après le deuxième groupe de témoins, nous consacrerons quelques minutes à nos plans de voyage. Le comité directeur s’est réuni. Je pense que nous avons réussi à nous organiser.

Il y avait deux personnes de Friends of Wild Salmon sur notre liste de témoins, mais nous n’avons pu établir la connexion. Nous en sommes désolés. Je ne sais pourquoi, mais cela ne fonctionne pas.

Par vidéoconférence, nous avons Mme Karen G. Wristen, directrice générale de la Living Oceans Society. Merci de comparaître. La parole est à vous.

Karen G. Wristen, directrice générale, Living Oceans Society : Merci, sénateur. Je suis directrice générale de la Living Oceans Society, et non de Friends of Wild Salmon. J’aimerais d’abord faire un portrait de notre organisme.

Living Oceans est une société constituée en vertu des lois de la Colombie-Britannique à Sointula, un village de pêcheurs dans la partie centrale de la côte de la Colombie-Britannique, près de l’extrémité nord de l’île de Vancouver. Notre organisme, fondé il y a 20 ans, a deux bureaux, soit à Sointula et à Vancouver Ouest.

Notre mandat est la conservation du milieu marin, mais toujours dans l’optique de le préserver pour l’usage et le bénéfice de la population. Par conséquent, notre but est de veiller à ce que les communautés côtières puissent faire entendre leur point de vue dans les décisions qui touchent l’océan, et nous essayons de faciliter leur participation dans le processus de décision.

Au fil des ans, nous avons mené des recherches, en accordant une attention particulière à l’interprétation des résultats de recherche pour le public, à l’aide de cartes et de rapports rédigés en langage clair. Nous avons tendance à collaborer directement avec les gouvernements, l’industrie et les communautés côtières pour trouver des solutions utiles à tous.

Au fil des ans, nous avons travaillé avec acharnement pour permettre à la population de participer au processus décisionnel. Plus particulièrement, nous travaillons depuis 15 ans à obtenir l’interdiction législative de la circulation des pétroliers le long de la côte nord et de la côte centrale. Les raisons pour lesquelles nous sommes favorables à cette interdiction sont simples. Ces eaux sont beaucoup trop périlleuses pour le transport de marchandises dangereuses, et les conditions météorologiques et l’état de la mer empêcheraient toute véritable intervention en cas de déversement d’hydrocarbures pendant une bonne partie de l’année.

La deuxième raison est, manifestement, que la vie marine de la région est beaucoup trop précaire pour risquer les effets néfastes connus à long terme d’un déversement d’hydrocarbures ni, d’ailleurs, les effets néfastes immédiats liés à la circulation de pétroliers.

Je vais d’abord parler des dangers uniques que présentent les eaux de la région. Le détroit d’Hécate est le quatrième plan d’eau le plus dangereux au monde, principalement en raison de la vitesse à laquelle le vent et l’état de la mer peuvent changer. Dans le détroit d’Hécate, l’entrée Dixon et le bassin de la Reine-Charlotte, il n’est pas rare en hiver d’observer des vents de tempête soufflant entre 80 et 100 kilomètres à l’heure et des vagues d’une hauteur de 8 à 10 mètres. Des rafales atteignant 90 nœuds — 167 kilomètres à l’heure — ont été observées dans le bassin de la Reine-Charlotte.

Comme ses eaux sont peu profondes, le détroit d’Hécate est bien connu pour ses conditions de navigation difficiles. Des vagues extrêmement élevées peuvent se former à intervalles rapprochés. La hauteur maximale significative des vagues enregistrée par le ministère des Pêches et des Océans varie de 9 mètres à plus de 18 mètres. La vague la plus haute enregistrée dans le détroit d’Hécate avait une hauteur équivalant à celle d’un édifice de 10 étages. Imaginez une telle vague s’abîmant sur le pont d’un navire.

Actuellement, la navigation est difficile dans la région et on s’attend à ce que cela empire. On prévoit qu’avec les changements climatiques, les tempêtes de plus en plus violentes déclencheront des vagues encore plus fortes. Nous l’avons d’ailleurs déjà constaté.

Depuis 1990, la hauteur maximale des vagues enregistrée sur une période de 100 ans a été dépassée quatre fois. Il semble donc que les prévisions concernant l’augmentation de la hauteur des vagues se concrétisent.

De telles conditions de vents et de vagues rendent la navigation extrêmement difficile et peuvent même abîmer de grands bâtiments comme les pétroliers — en particulier les pétroliers modernes à double coque —, dont l’intégrité structurelle dépend de l’intégrité de milliers de joints soudés. L’effet cumulé de hautes vagues à intervalles courts peut exercer une force contraignante sur ces joints et entraîner des dommages structuraux.

Lorsqu’on ajoute à ces conditions la visibilité réduite qui peut survenir à tout moment de l’année en raison de la neige ou du brouillard, la côte nord et la côte centrale sont des endroits où la navigation est particulièrement périlleuse.

J’ai uniquement parlé des zones d’eau libre de la côte nord et la côte centrale. Si Kitimat était de nouveau envisagé comme lieu d’aménagement d’un terminal pétrolier, il faudrait aussi tenir compte des conditions dans le chenal extrêmement étroit qui y mène au port de Kitimat. Les pétroliers devraient naviguer dans un chenal très étroit sur une distance de 150 milles marins. C’est important, et ce, pour deux raisons.

Premièrement, il faut savoir que dans ce secteur, les manœuvres nécessaires comprennent deux virages très serrés qui peuvent dépasser les capacités d’un pétrolier, en particulier à basse vitesse, alors que ce sont des navires difficiles à manœuvrer. À cet égard, les résultats d’essais de transits de pétroliers dans le chenal Douglas qui ont été déposés lors de l’audience sur le projet Northern Gateway n’étaient que des résultats préliminaires. Ces résultats ont montré que, même dans les conditions grossièrement modélisées utilisées par le simulateur, certaines simulations nécessitaient 100 p. 100 de la puissance de deux remorqueurs amarrés au pétrolier pour éviter une collision ou un échouement. Cela signifie qu’il n’y a absolument aucune marge d’erreur. Donc, en contexte réel, tout écart par rapport aux conditions de la modélisation signifierait que le navire s’échouerait.

Le caractère particulièrement dangereux de ces eaux commande à lui seul un moratoire général. Il y a certainement des zones dangereuses sur toutes les côtes du Canada, mais aucune ne se compare à la gravité et à la soudaineté des conditions météorologiques de cette région ni aux difficultés de la navigation dans ces chenaux étroits. Un pétrolier quittant un port par beau temps peut se retrouver au cœur de tempêtes qui se déchaînent avec une intensité explosive. Avec peu de lieux de refuge et des côtes rocheuses et inhospitalières, les navires confrontés à pareilles conditions météorologiques mettent des vies, des cargaisons et des navires en danger.

Il n’est tout simplement pas sage d’autoriser le transport de marchandises intrinsèquement dangereuses dans de telles eaux. Certains navigateurs prendront des risques qu’ils ne devraient jamais prendre en raison d’obligations contractuelles liées aux calendriers de livraison des cargaisons de pétrole aux raffineries de destination. Vous connaissez peut-être le vieil adage qui dit que les pilotes peuvent être âgés ou audacieux, mais jamais « âgés et audacieux ». Je dirais que cela vaut aussi pour les navigateurs. Nous ne voulons pas encourager une mesure qui mettrait des vies, des cargaisons et des navires en danger.

Je passe maintenant à la capacité d’intervention en cas de déversement. En tant qu’intervenante lors de l’évaluation du projet de pipeline Northern Gateway par la Commission d’examen conjoint, Living Oceans a effectué une analyse des lacunes en matière d’intervention. C’était essentiellement une étude sur les périodes de l’année où l’état de la mer empêcherait toute intervention en cas de déversement en raison de conditions dépassant les capacités de l’équipement d’intervention. Comme on peut s’y attendre, notre analyse a révélé des écarts saisonniers marqués, la saison hivernale présentant des conditions qui nuiraient aux interventions en cas de déversement d’hydrocarbures ou l’empêcheraient dans 60 à 98 p. 100 des cas. Cet écart s’explique évidemment par les différentes hauteurs de vagues enregistrées par les bouées. Au cours des mois d’été, les mesures de récupération seraient entravées ou impossibles entre 18 et 65 p. 100 du temps.

Notre analyse des lacunes en matière d’intervention ne portait que sur l’état de la mer. Si l’on ajoute des facteurs tels que la température, le vent et la visibilité, il y a fort à parier que ces pourcentages seraient plus élevés, ce qui signifierait que le matériel d’intervention en cas de déversement ne pourrait être mobilisé ou utilisé efficacement pendant la plus grande partie de l’année dans la région.

En raison de ces lacunes en matière d’intervention, on peut s’attendre à ce que les hydrocarbures qui seraient déversés dans les eaux côtières du nord et du centre s’échouent sur les plages et polluent les estuaires. Cela aurait certainement des effets sur la faune de la région. En outre, le nettoyage des hydrocarbures échoués nécessite la mobilisation d’importants effectifs, une grande quantité d’eau chaude et de matériaux absorbants, ainsi qu’un endroit pour stocker et assainir les eaux usées et les absorbants produits par l’équipe de nettoyage. Or, on n’a accès à aucun de ces services nulle part dans la région. Nous ne sommes tout simplement pas prêts à intervenir.

Cela m’amène à parler de la menace que cela représente pour la riche diversité de la vie marine. Les eaux froides et riches en nutriments de la côte nord et la côte centrale en font une zone exceptionnellement productive pour la vie marine. Un déversement de pétrole pourrait dévaster les populations de diverses espèces, où qu’elles vivent, du fond marin et dans l’ensemble de la colonne d’eau, jusqu’à la surface de la mer et même l’air au-dessus de l’océan, parce que le pétrole finit par se mélanger à l’eau, particulièrement dans les eaux tumultueuses comme celle-ci, de sorte qu’il peut descendre jusqu’au fond marin. Donc, il nuit à la vie dans toute la colonne d’eau, ce qui s’ajoute aux effets évidents et attendus à la surface.

Même l’exploitation ordinaire des pétroliers pose des risques déjà connus pour certaines espèces, comme les baleines qui reviennent dans ces zones année après année. Les baleines, en particulier les baleineaux, sont particulièrement à risque d’être heurtées par de grands navires et de subir des blessures ou même de mourir. Il n’existe actuellement aucun moyen connu d’éviter les collisions avec les navires, bien que de nombreuses méthodes aient déjà été mises à l’essai. On sait que les collisions avec les navires sont l’un des facteurs les plus importants dans les plans de reconstitution des populations d’espèces considérées comme étant en danger ou menacées en vertu de la Loi sur les espèces en péril : rorqual à bosse, rorqual bleu, rorqual commun, rorqual boréal, épaulards résidents et migrateurs.

Le problème n’a pas été quantifié scientifiquement, puisqu’il est impossible de collecter des données. De nos jours, les collisions entre un navire et une baleine passent souvent inaperçues en raison de la taille considérable des navires. De plus, la collecte de données n’est pas centralisée. Nous savons toutefois que les espèces sont en difficulté, car nous avons trouvé des carcasses et même des animaux vivants portant des marques de collision avec un navire. Nous savons qu’il faut régler ce problème, et la seule façon d’y arriver consiste à éviter que des navires se trouvent à proximité des aires connues d’alimentation et d’élevage des baleines, comme la côte nord et la côte centrale.

Le bruit sous-marin et les perturbations physiques causés par la navigation sont également un facteur identifié dans de nombreux plans de reconstitution des populations des baleines. Les baleines comme le rorqual à bosse sont d’une fidélité exceptionnelle et fréquentent les mêmes aires d’alimentation année après année. Lorsqu’elles sont obligées d’aller ailleurs en raison du bruit ou de la présence de navires, l’alimentation et l’éducation des baleineaux en souffrent et, avec le temps, cela peut nuire à la santé des populations de baleines.

Nous avons l’avantage d’avoir accès aux données scientifiques les plus remarquables sur les conséquences d’un déversement de pétrole lourd en mer, à la suite des travaux réalisés à la suite du déversement de l’Exxon Valdez. Trente ans après ce déversement, les dépôts de pétrole visqueux sont toujours apparents sur les plages du détroit de Prince William, en Alaska, et ils sont aussi toxiques aujourd’hui qu’ils l’étaient à l’époque du déversement.

Le président : Désolé de vous interrompre. Votre déclaration est-elle bien longue? En avez-vous encore pour longtemps?

Mme Wristen : Il me reste deux pages, sénateur.

Le président : Très bien. Merci.

Mme Wristen : Je disais donc que, 30 ans après l’accident de l’Exxon Valdez, les plages du détroit de Prince William, en Alaska, continuent de porter la trace des dépôts de pétrole visqueux, et ils sont toujours aussi toxiques aujourd’hui qu’à l’époque du déversement. Ils montrent peu ou pas de signes de dégradation naturelle.

Le bilan à ce jour nous fournit des renseignements importants sur ce que nous mettrions en péril et sur la durée des conséquences si nous autorisions le transport de pétrole dans la zone visée par le moratoire.

Sur le plan social et économique, les pertes subies ont été catastrophiques. Le déversement et les opérations de nettoyage ont entraîné de nombreux problèmes de santé à long terme chez l’humain, la perte de biens endommagés par le pétrole, et des pertes de revenus pour les Premières Nations, les pêcheurs, les exploitants de l’industrie touristique et toutes les entreprises qui en dépendent. Il y a également eu une perte de ressources de subsistance pour les Premières Nations et pour d’autres collectivités locales. Ces pertes sont encore ressenties à ce jour.

Les indemnités pour les pertes en question n’ont pas été versées en temps opportun, ou n’ont pas été versées du tout, ce qui a empiré les souffrances humaines et économiques liées à ce déversement.

Le régime actuel d’intervention en cas de déversement de pétrole au Canada prévoit l’indemnisation des pertes personnelles, mais on ne sait pas vraiment à quelle vitesse et par quel processus l’indemnisation pour pertes personnelles et blessures pourrait être offerte.

En ce qui a trait aux risques pour les espèces autres que l’humain et leur habitat, le cas d’Exxon Valdez est très instructif. Il y a eu des conséquences immédiates de même que des conséquences à moyen et à long terme. Sur le coup, certains oiseaux de mer et de rivage, certaines loutres de mer et de rivière, des baleines, des aigles, des mollusques, des harengs et des saumons sont morts par asphyxie, hypothermie et empoisonnement. D’importantes populations de microorganismes côtiers comme le plancton, qui sont essentiels à la chaîne alimentaire, ont été détruites par les efforts de nettoyage et non par le déversement en soi.

À moyen terme, soit au cours des 1 à 20 années suivantes, nous avons constaté une baisse de la population de baleines, de loutres, de hareng, de saumon et de mollusques, et certaines de ces espèces sont menacées de disparition. D’autres populations sont devenues plus vulnérables puisque la chaîne alimentaire a été perturbée. Les hydrocarbures toxiques ont affecté l’environnement côtier tout au long de cette période et nous avons commencé à désigner les conséquences génétiques à long terme sur les populations de poisson, dont la capacité de reproduction a diminué.

À long terme — et le déversement a eu lieu il y a plus de 30 ans maintenant —, nous avons constaté la disparition de petites populations — la disparition d’un troupeau de baleines et peut-être d’un deuxième —, l’incapacité des populations de hareng ou d’oiseaux de mer de se rétablir et les conséquences connexes sur la population de saumon. Les hydrocarbures toxiques affectent toujours l’environnement côtier. Le rétablissement à long terme des populations de poisson, qui sont importantes pour l’exploitation commerciale, demeure incertain.

En ce qui a trait au projet de loi C-48 et à la protection de la côte nord, nous accueillons favorablement les dispositions du projet de loi parce qu’elles éliminent des incertitudes qui demeuraient quant à la situation relative au moratoire en place depuis 1972. Au départ, les pétroliers américains respectaient certains accords relatifs aux itinéraires de façon volontaire; ces accords ont plus tard été officialisés à titre de zone d’exclusion des pétroliers, qui se situe au large des côtes de l’extrême ouest.

Nous aimerions que le projet de loi soit renforcé à deux égards : premièrement, en ce qui a trait à la discrétion du ministre d’exempter certains navires des dispositions de la loi. L’article 6 permet au ministre de le faire sans aucun avis public ni consultation de la population, et ce, si l’exemption est « essentielle au réapprovisionnement communautaire ou industriel ou est autrement dans l’intérêt public ». À notre avis, ce pouvoir discrétionnaire est trop vaste; il manque de transparence et la reddition de comptes est insuffisante. De plus, nous ne comprenons pas pourquoi des opérations de réapprovisionnement devraient être permises alors qu’elles mettraient en danger tout ce que le projet de loi est censé protéger.

Nous recommandons de retirer cette exemption du projet de loi. Autrement, nous recommandons d’intégrer un processus d’avis public et de consultation afin d’assurer la transparence, et d’établir un ensemble de critères bien définis en vue de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministre. Il est difficile d’interpréter une exemption qui serait faite « dans l’intérêt du public » dans le contexte du projet de loi, parce qu’à notre avis, l’intérêt du public réside dans la protection de cette zone contre les impacts du trafic de pétroliers.

Pour modifier cette disposition, on pourrait restreindre le pouvoir discrétionnaire du ministre à des cas d’urgence et prévoir une date d’expiration pour toute ordonnance d’exemption. Ces deux mesures ont été proposées par West Coast Environmental Law dans un mémoire présenté au comité permanent de la Chambre; nous appuyons ces modifications.

Ce qui nous préoccupe également, c’est que le projet de loi ne vise que le pétrole brut et les hydrocarbures persistants. D’un point de vue strictement scientifique, rien ne justifie l’application du projet de loi aux pétroliers qui transportent ces types d’hydrocarbures uniquement. Les produits raffinés sont aussi toxiques pour la faune marine et les conditions qui s’appliquent aux interventions en cas de déversement d’hydrocarbures bruts et persistants s’appliquent également aux interventions en cas de déversement de produits raffinés. Dans le meilleur des cas lorsqu’on intervient à la suite d’un déversement de produits raffinés, on récupère uniquement environ 15 p. 100 des produits, ce qui signifie qu’ils se retrouveront sur les plages, qu’ils se mêleront à la colonne d’eau et qu’ils mettront en danger la faune marine et les collectivités côtières qui dépendent d’un océan propre et en santé.

Sur le plan pratique, le projet de loi prévoit déjà une exemption en vue du réapprovisionnement communautaire et industriel en permettant aux navires de transporter jusqu’à 12 500 tonnes d’hydrocarbures de toutes sortes en vue d’un déchargement dans les installations portuaires situées à l’intérieur de la zone visée par le moratoire. Nous croyons que cette exemption vise à atteindre un équilibre entre l’approvisionnement en hydrocarbures et la protection de l’environnement. Bien qu’à notre avis, le volume choisi ne soit pas appuyé par des données probantes puisque les volumes de réapprovisionnement actuels ne dépassent pas les 3 200 tonnes, il est évident que cette exemption est plus que suffisante pour répondre aux besoins actuels et futurs des collectivités en matière de produits raffinés.

En permettant aux pétroliers qui transportent plus de 12 500 tonnes de produits raffinés de passer par la zone visée par le moratoire, on risque un déversement qu’on ne pourra pas nettoyer et qui pourrait endommager la faune marine au même titre que le déversement d’hydrocarbures bruts ou persistants.

Pour conclure, j’aimerais parler d’une question qui a été abordée dans les médias et devant le comité avant-hier : selon certains, la loi sur le moratoire entrerait en conflit avec nos obligations en vertu de la Convention sur le droit de la mer, et la meilleure approche pour légiférer une interdiction dans cette zone consisterait peut-être à demander à l’Organisation maritime internationale de créer une « zone maritime particulièrement vulnérable ». À notre avis, ce n’est pas une approche appropriée dans cette zone. On peut établir une zone maritime particulièrement vulnérable pour contrôler le trafic maritime, mais les outils applicables sont seulement ceux dont dispose l’OMI en vertu des traités internationaux. La réglementation relative aux couloirs de navigation, les restrictions antidumping et la création de zones à éviter sont les principaux outils disponibles. Ce sont des outils qui visent la réglementation du trafic de pétroliers qui naviguent dans ces eaux. Ce que nous voulons, c’est un outil qui élimine complètement ce risque, et non un outil de gestion du risque. Le moratoire national visant à restreindre le recours aux ports pétroliers et installations maritimes du pays représente une mesure appropriée qui ne contrevient pas à nos obligations en vertu de la Convention sur le droit de la mer.

L’approche adoptée en vertu de la loi sur le moratoire préserve le droit de libre passage à tous les navires de la zone. À notre avis, elle respecte pleinement nos responsabilités en vertu de la charte du droit de la mer. Il faudrait utiliser la désignation internationale « zone à éviter » pour ces eaux. Elle serait tout à fait appropriée. Il faudrait adopter une loi internationale en vue de mettre en œuvre une telle désignation. Nous devrions exercer notre compétence souveraine sur les eaux du Canada et imposer un moratoire pour les protéger alors que nous devrons attendre cinq à sept ans avant la création d’une zone à éviter par l’entremise de l’Organisation maritime internationale.

Voilà pour mes commentaires. Je vous remercie de votre indulgence.

Le président : Merci.

Le sénateur MacDonald : Merci, madame Wristen, de votre témoignage. Ma première question est la suivante : quelle est votre formation? Êtes-vous biologiste de la vie marine ou ingénieure? Qu’est-ce qui vous amène à ce sujet?

Mme Wristen : J’ai une formation en droit, en fait.

Le sénateur MacDonald : Vous êtes avocate?

Mme Wristen : Oui, je l’étais. Je ne pratique pas.

Le sénateur MacDonald : D’accord.

Bien sûr, nous avons trois grandes côtes au pays, mais la majorité du pétrole transite par la côte Est et tout ce que vous avez soulevé s’y passe aussi. Vous avez parlé des eaux peu profondes. Les Grands Bancs sont des eaux peu profondes et aussi les plus grandes zones de pêche au monde. Non seulement expédions-nous un demi-million de barils de pétrole à partir de cette région tous les jours, mais nous y extrayons un demi-million de barils chaque jour. Si nous écoutions vos conseils, nous éliminerions l’industrie des pêches et l’industrie du pétrole des Grands Bancs, et je ne crois pas que les habitants de Terre-Neuve ou de la côte Est seraient d’accord avec cela.

Vous avez parlé des conditions météorologiques : de la neige, du brouillard, de la pluie verglaçante, des vagues déferlantes. Je peux vous assurer que nous ne manquons pas de tout cela dans l’Atlantique Nord. Nos eaux sont parmi les plus tumultueuses du monde.

Vous avez parlé de l’alimentation des baleines. La baleine noire — la plus rare au monde — se trouve dans la baie de Fundy : c’est là qu’elle donne naissance à ses petits. Le rorqual à bosse du nord s’y nourrit quatre mois par année. Or, la raffinerie Irving s’y trouve et manipule entre 200 000 et 300 000 barils de carburant non traité et raffiné par jour.

Je ne crois pas que la diversité de la faune marine soit un problème dans cette région. Le microécosystème marin le plus diversifié se trouve dans la baie de Fundy. Tous les scientifiques vous le diront.

Je comprends les préoccupations relatives aux collisions avec les navires, mais les pétroliers ne sont pas les seuls à pouvoir frapper les mammifères marins dans l’eau. La grande majorité des navires de la côte Ouest ne sont pas des pétroliers. Ce sont des porte-conteneurs et d’autres types de navires. Ils sont bruyants. Sur la côte Ouest, les pétroliers sont beaucoup moins susceptibles de frapper un mammifère marin que les porte-conteneurs et autres navires.

Vous avez parlé de la capacité d’intervention. Sur la côte Est, trois organisations pourraient vous expliquer de quelle façon elles interviennent en cas de déversement. Nous avons parlé à la Western Canadian Marine Response Corporation et elle n’est pas d’accord avec votre évaluation en matière d’intervention. Selon ses représentants, l’organisation est capable d’intervenir en cas de déversement.

Je comprends que vous avez une cause à défendre, mais toutes les préoccupations auxquelles vous faites référence sont gérées de manière très efficace sur la côte Est, bien honnêtement.

Le saumon de l’Atlantique est la population de saumon la plus menacée au pays. Cette population subit d’énormes pressions. Or, je crois que la plupart des gens vous diront que le transport maritime n’est pas en cause.

Donc, tout ce que vous dites peut s’appliquer à la côte Est du Canada et rien de ce que vous dites ne pourrait convaincre les décideurs de la côte Est de faire les choses autrement. Je me demande pourquoi je devrais être en désaccord avec tout le monde sur la côte Est et être d’accord avec vous.

Mme Wristen : Monsieur le sénateur, mes conseils ne s’appliquent aucunement à la côte Est du Canada et je ne crois pas qu’il soit logique d’abandonner la côte nord et la côte centrale du Pacifique simplement parce que d’autres zones du Canada sont déjà détruites. La côte Est du Canada souffre de l’intervention humaine depuis plus de 1 000 ans. La structure socioéconomique des industries maritimes est différente de celle de la côte Ouest. Les décisions relatives aux ressources à protéger et aux ressources à compromettre pour le bien de l’économie se fondent en partie sur la structure socioéconomique de la région.

La population de la côte Nord et de la côte centrale du Canada s’est prononcée très clairement en faveur des activités de pêche et de tourisme actuelles, qui sont bonnes pour l’économie. Une écrasante majorité de la population a voté contre le trafic de pétroliers sur la côte à de nombreuses reprises et en réponse aux divers sondages réalisés sur l’exploitation des ressources pétrolières et gazières. Elle n’en veut tout simplement pas.

Mes conseils ne visent aucunement la côte Est, mais je souligne que vos baleines sont en danger et qu’elles se font frapper par des navires.

Le sénateur MacDonald : Je connais bien la situation parce que je viens de la côte Est du Canada.

Le président : Je suis désolé, sénateur MacDonald. Il nous faut conclure. Très rapidement, s’il vous plaît.

Le sénateur MacDonald : Je vais passer mon tour. Vous pouvez passer à la prochaine question.

La sénatrice Miville-Dechêne : Nous vous remercions de votre présence. Nous avons reçu tout juste avant vous un représentant de la Western Canada Marine Response Corporation et il était catégorique : selon lui, les conditions météorologiques sont exactement les mêmes sur toute la côte Ouest du Canada; il n’est pas plus difficile de nettoyer un déversement de pétrole au nord qu’au sud. Donc, nous sommes faces à des témoignages contradictoires. Les sénateurs veulent avoir l’heure juste.

Pouvez-vous nous parler plus en détail des études scientifiques ou des données probantes qui vous permettent de dire que les conditions météorologiques sont plus difficiles au nord, que les déversements sont plus difficiles à nettoyer?

Mme Wristen : Je pourrais le faire, mais je n’ai probablement pas le temps aujourd’hui. Est-ce que je pourrais vous transmettre les liens vers les données probantes que nous avons fournies dans le cadre de l’audience sur Northern Gateway? Je suis troublée d’apprendre que la Western Canada Marine Response Corporation ne sait pas que l’état de la mer dans le détroit d’Hécate est pire que celui du détroit de Géorgie.

La sénatrice Miville-Dechêne : Comment expliquez-vous cela?

Mme Wristen : Je ne vais pas tenter de l’expliquer. Je ne sais pas qui était votre témoin et je n’ai pas entendu son témoignage.

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci beaucoup.

Le président : À titre informatif, il s’agissait de M. Michael Lowry, qui est gestionnaire de la Western Canada Marine Response Corporation. C’est lui qui a témoigné avant vous. Vous pourrez en tenir compte lorsque vous nous transmettrez vos documents.

La sénatrice Simons : Je vous remercie pour votre témoignage. Je dois avouer que, de tous les témoins que nous avons entendus, vous êtes la première à défendre avec ardeur la loi sur le moratoire. Même les représentants de Transports Canada n’ont pas présenté un dossier aussi solide que le vôtre.

J’aimerais vous poser quelques questions. Est-ce qu’on ne risque pas, si tout le pétrole est expédié à partir de Burnaby et du port de Vancouver, de créer un risque environnemental accru dans cette région, puisque toutes les exportations seront faites à partir du même endroit?

Mme Wristen : Je ne crois pas qu’il soit question de concentrer toutes les exportations. Nous ne pouvons pas nous attendre à ce que les deux ports pétroliers puissent vraisemblablement être construits et exploités avec le volume de pétrole provenant des sables bitumineux dans un proche avenir. Les investissements sont en déclin, et nous pouvons même dire que l’exploitation de nouveaux gisements de pétrole est au point mort. Vous avez entendu les faits. J’ai lu les témoignages, et je sais que vous avez entendu les témoins. Vous avez entendu que des sociétés abandonnent l’exploitation des sables bitumineux.

La sénatrice Simons : Je suis de l’Alberta. Lorsque vous utilisez l’expression « sables bitumineux », c’est une expression qui a une signification particulière en Alberta.

Je crois comprendre qu’il n’y a actuellement aucune infrastructure permanente en place pour nettoyer les déversements, parce qu’il y a déjà une zone d’exclusion volontaire. Il n’y avait donc pas de motivation ou de raison d’embaucher le personnel nécessaire, pour ainsi dire. Ce n’était pas nécessaire. Cependant, si nous mettions en place un corridor entre des zones d’exclusion, je présume que nous serions en mesure de fournir l’infrastructure à laquelle vous avez fait référence, dans le cas où nous saurions qu’il y aurait à cet endroit une route maritime consacrée à cette fin.

Entrevoyez-vous la possibilité de trouver un compromis qui permettrait d’avoir une route maritime précise pour laquelle nous aurions des mesures de protection et de préparation en cas de déversement? Est-ce vraiment nécessaire de stériliser le développement de cette nature le long de cette côte?

Mme Wristen : Premièrement, j’aimerais faire valoir que cela ne vise pas à stériliser le développement. Le moratoire ne touche aucunement le développement sur cette côte...

La sénatrice Simons : Je dirai simplement que ce n’est pas seulement un moratoire sur les pétroliers; c’est un moratoire sur les oléoducs pour l’ensemble de ce territoire.

Mme Wristen : Ce moratoire pourrait bien avoir un tel effet dans l’avenir. Je vous le concède.

L’idée d’établir un corridor où pourraient circuler des navires et d’essayer d’adopter des mécanismes d’intervention, c’est la raison pour laquelle j’ai fait allusion à l’analyse des lacunes en matière d’intervention. En un mot, non. Ce n’est pas possible. Indépendamment de ce que peut avoir dit le représentant de la Western Canada Marine Response Corporation, il n’en demeure pas moins que l’équipement d’intervention qu’il possède actuellement ou qui est commandé a certains paramètres de fonctionnement. Les conditions météorologiques et les états de la mer excèdent ces paramètres jusqu’à 98 p. 100 du temps en hiver et jusqu’à 60 p. 100 du temps en été.

Voilà pourquoi j’ai dit que ce n’est pas possible d’intervenir efficacement en cas de déversement. Même si c’était possible, où pourriez-vous mobiliser des centaines de travailleurs par jour pour nettoyer des plages? Où pourriez-vous concrètement traiter les eaux usées et les déchets qui en découleraient? Il n’y a rien de tel en place. Pour la majorité des régions du nord et du centre de la côte, ce serait extrêmement difficile à créer. Vous n’avez qu’une poignée de grands centres où vous pourriez installer ces ressources.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup.

La sénatrice Galvez : Merci beaucoup de votre témoignage. Vous avez dit que le détroit d’Hécate est considéré comme la quatrième étendue d’eau la plus dangereuse au monde. Qui a établi ce classement? Quels critères ont été utilisés? Quel est l’organisme qui s’occupe de cette classification? Le cas échéant, pourquoi certains essaient-ils de proposer d’établir un port et d’avoir du trafic de marchandises à cet endroit si c’est très dangereux?

Mme Wristen : La citation qui se trouve dans mes notes provient d’Environnement Canada. Je crois que le ministère citait une publication de l’OMI. J’ai essayé de vous trouver l’information pour vous donner la citation d’origine exacte, mais je ne l’ai pas trouvée. Nous devrons donc dire que c’est Environnement Canada qui a ainsi qualifié ce détroit.

Je crois que certains s’imaginent que nous pouvons arriver à tout faire grâce à la technologie, et c’est la raison pour laquelle des gens souhaitent faire passer une route maritime par ce détroit. Je suis d’avis que c’est dame Nature qui a le dernier mot.

Le président : Croyez-vous que le pétrole est une ressource et que les Canadiens ont le droit de l’exploiter?

Mme Wristen : Oui.

Le président : Comment pensez-vous que nous serons en mesure d’acheminer le pétrole de l’Alberta et de la Saskatchewan vers les marchés?

Mme Wristen : Probablement par l’entremise de l’oléoduc Trans Mountain.

Le président : Cet oléoduc n’est pas encore construit, mais vous voulez dire que ce sera le seul oléoduc. Est-ce exact?

Mme Wristen : Monsieur le président, je préférerais être une historienne plutôt qu’une prophétesse à ce chapitre. Je crois que l’industrie pétrolière trouvera les moyens d’acheminer son pétrole vers les marchés en ayant recours au transport ferroviaire et au transport par pipeline pour les années à venir.

Le président : Combien de personnes travaillent au sein de votre organisation? Combien d’entre eux sont des scientifiques?

Mme Wristen : Il y a six personnes qui travaillent au sein de mon organisation, et deux d’entre eux ont des diplômes en sciences.

Le président : Deux scientifiques et six personnes. D’où votre financement provient-il?

Mme Wristen : De gens comme vous.

Le président : Recevez-vous du financement provenant de l’étranger?

Mme Wristen : Pas cette année, mais nous en avons reçu par le passé.

Le président : Dites-vous que vous en avez reçu par le passé?

Mme Wristen : Oui. C’est du domaine public que notre financement provient de fondations américaines et canadiennes et de simples citoyens.

Le président : Quel type de fondations américaines?

Mme Wristen : Je n’étais pas au courant qu’il y avait des types différents.

Le président : Quels sont les noms des fondations américaines?

Mme Wristen : Ces renseignements sont du domaine public, monsieur le sénateur. Il y a...

Le président : Vous souvenez-vous des noms?

Mme Wristen : Oh, bien sûr que oui.

Le président : Je vous invite à nous les donner.

Mme Wristen : Je peux le faire, si c’est ce que vous souhaitez.

Le président : Oui. C’est ce que je souhaite.

Mme Wristen : Tides U.S., la Gordon and Betty Moore Foundation et la fondation Oak sont les organisations dont je me souviens qui ont financé des travaux ayant trait aux risques du transport de pétrole dans le milieu marin.

Le président : Vous avez dit ne pas avoir reçu de financement cette année. En avez-vous reçu l’année dernière pour 2018?

Mme Wristen : Oui.

Le président : Vous avez donc reçu de l’argent l’année dernière. Vous attendez-vous à en recevoir cette année?

Mme Wristen : Pas d’une source américaine. Non.

La sénatrice Jaffer : Hier, nous avons entendu un représentant de l’Association canadienne des producteurs pétroliers nous parler de la sécurité des pétroliers à double coque. Il a affirmé que la sécurité des pétroliers à double coque est des années-lumière en avance par rapport à ce qu’il en était il y a quelques années.

Je sais que vous avez publié un rapport sur les pétroliers à double coque et les préoccupations liées à la sécurité qui les rend inadaptés à la prévention des déversements de pétrole. Que pensez-vous de la sécurité des pétroliers à double coque?

Mme Wristen : Les pétroliers à double coque réussissent efficacement à réduire le volume d’un déversement de pétrole, mais ils n’empêchent aucunement un déversement de pétrole de se produire. Dans les faits, il y a certains enjeux liés à la structure et à l’inspection de ces pétroliers qui peuvent même accroître le risque d’un déversement. Ces pétroliers sont notamment construits à partir d’acier plus mince que les pétroliers à coque simple. Bref, une collision à basse vitesse peut être suffisante pour percer les deux coques.

J’ai mentionné plus tôt les milliers de joints soudés. Bon nombre de ces joints se trouvent à des endroits difficiles à inspecter. Lorsqu’un navire circule de manière répétée dans une mer agitée, en particulier lorsqu’il y a des vagues à front raide à de courts intervalles, le navire subit de la tension de toutes les directions, et cela peut faire céder ces soudures.

Il y a aussi un enjeu concernant l’enduit anticorrosion de ces pétroliers, et c’est particulièrement pertinent si nous parlons du transport d’hydrocarbures provenant de sables bitumineux qui ont tendance à être très acides et à favoriser la corrosion. Si les inspections ne sont pas faites de manière régulière, le carburant corrosif stocké dans les réservoirs peut venir gruger le métal, et cela entraîne un plus grand risque de bris causés par la tension.

La sénatrice Jaffer : Combien a-t-il fallu de temps pour intervenir lorsque le Nathan E. Stewart s’est échoué dans votre région?

Mme Wristen : Pour être honnête, je n’ai pas la réponse exacte. Je me rappelle que la bande des Heiltsuks a considéré que cela a pris beaucoup trop de temps. Toutefois, je n’ai pas de réponse. Je ne peux pas vous dire le nombre d’heures.

La sénatrice Jaffer : Cela a pris beaucoup de temps. Est-ce exact?

Mme Wristen : Cela a pris plus d’une journée et possiblement plus de deux jours.

La sénatrice Jaffer : Pourriez-vous nous trouver cette information, si vous l’avez, et l’envoyer à la greffière pour que nous ayons l’information?

Mme Wristen : Je le ferai.

Le président : Merci beaucoup, madame Wristen.

Sur ce, nous allons examiner des motions concernant nos déplacements. Je ne crois pas que nous avons besoin de suspendre nos travaux. Nous poursuivrons tout simplement nos travaux et nous le ferons ainsi.

Comme vous vous en souvenez peut-être, nous avons eu une longue discussion sur nos déplacements lors de la dernière réunion. Le comité directeur s’est réuni aujourd’hui, et il a pris une décision unanime au sujet des déplacements.

Je vous demande d’adopter la motion. L’option 1 est Prince Rupert et Terrace, en Colombie-Britannique. Tous les membres du comité directeur ont convenu que nous devrions nous rendre à ces endroits. L’option 2 est Prince Rupert et Fort St. John, en Colombie-Britannique, et nous n’étions pas d’accord avec cette option.

Nous aimerions demander au comité d’approuver la décision du comité directeur et le budget de déplacement proposé. Vous avez une copie de la première option. Je crois que le sous-total s’élevait à 109 000 $ et que le total était de 136 640 $.

Si vous adoptez la motion, nous préparerons le budget. Nous ne serons en fait pas en mesure de le présenter au Comité de la régie interne avant la semaine où nous sommes de retour en mars. Voici ce que nous essaierons de faire. Nous ferons approuver le budget par le sous-comité, puis nous le présenterons au Comité de la régie interne. Je vous demande votre autorisation pour aller de l’avant cet après-midi pour en fait commencer les préparatifs, parce que la greffière ne peut pas commencer le travail avant que le comité adopte le budget.

Les semaines que nous avons choisies sont les deux dernières d’avril, et ce ne sont pas des semaines de séance. Le problème, c’est qu’il y aura deux comités en déplacement : le nôtre et le Comité de l’énergie. Nous allons laisser les greffiers démêler le tout. Ils sont au courant qu’il y a des gens qui siègent aux deux comités, sénatrice Galvez, et les greffiers s’assureront d’éviter les conflits d’horaires.

Quand envisagez-vous de le faire, de votre côté?

La sénatrice Galvez : La deuxième semaine de séance d’avril.

Le président : Oui.

La sénatrice Galvez : Et avant la dernière semaine de relâche en avril.

Le président : Donc, la dernière semaine d’avril, n’est-ce pas?

Joëlle Nadeau, greffière du comité : La dernière semaine de relâche d’avril. Donc, la semaine du 22 avril.

La sénatrice Galvez : La semaine du 18 avril. Ensuite, il y a une semaine de pause, puis une autre. C’est lors de la deuxième semaine de pause que nous serons en déplacement.

Le président : Vous partez le 22 avril? Il y a deux semaines de suite, ici.

La sénatrice Galvez : Il y a deux semaines de séance et deux semaines de relâche.

Le président : Oui.

La sénatrice Galvez : La deuxième semaine de séance.

Le président : Cela ne nuit pas à nos travaux.

La sénatrice Galvez : Et la deuxième semaine de relâche.

Le président : Celle du 15 avril.

La sénatrice Simons : Je tiens à rappeler au président que le Sénat n’a pas encore autorisé le comité à se déplacer.

Vous avez proposé la motion aujourd’hui.

Le président : J’ai proposé la motion. Ce ne sera pas un problème. Je sais ce que je fais.

La sénatrice Simons : Je vous laisse aux commandes du F-150.

Le président : Je vous prie simplement de ne pas faire ce que vous avez fait aujourd’hui.

La sénatrice Simons : Exprimer mon appui?

Le président : Parce que je ne m’opposerai pas à la motion. Je l’appuierai sans réserve.

La sénatrice Galvez : Je ne me suis pas opposée à la motion. Je tiens à préciser que je n’ai jamais...

Le président : Essayez de voir les choses avec un peu d’humour, sénatrice Galvez.

La sénatrice Gagné : Avez-vous besoin qu’une personne propose la motion?

Le président : Oui, sénatrice Gagné.

La sénatrice Gagné : Je propose la motion.

Le président : Plaît-il au comité d’adopter l’option 1 du budget de déplacement proposé, assujetti à un examen par l’Administration du Sénat?

Est-ce la motion que vous souhaitez proposer?

La sénatrice Gagné : Tout à fait. Merci.

Le président : Je vous remercie énormément, sénatrice Gagné. Avons-nous besoin d’autre chose?

Êtes-vous tous d’accord?

La sénatrice Dasko : Puis-je seulement poser une question?

Le président : Certainement.

La sénatrice Dasko : J’aimerais avoir une petite précision au sujet des dates. Vous dites que votre comité sera en déplacement les semaines du 8 avril et du 22 avril. Est-ce exact?

Le président : Oui.

La sénatrice Dasko : Bref, cela nous laisse la semaine du 15 avril comme possibilité, n’est-ce pas?

Le président : Nous pourrions y aller soit la semaine du 15 avril ou nous pourrions y aller en mai, mais cette option pose un problème, parce que nous avons convenu de terminer le tout d’ici le 30 avril. En réalité, nous sommes pratiquement limités à cette semaine. Avec un peu de chance, au moins la majorité des membres du comité pourront y aller, et nous aurons une représentation égale des deux côtés. C’est ce que nous espérons.

La sénatrice Dasko : Merci.

Le président : Sénatrice Miville-Dechêne, souhaitez-vous ajouter quelque chose?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non, c’est exactement ce que je voulais tirer au clair. C’est bien la troisième semaine, non?

Le président : Je vais faire un tour de table. Le sénateur Oh et le sénateur Smith sont ici en remplacement d’autres sénateurs qui sont absents, alors je vais sonder mon propre groupe. Demandons leur avis aux sénateurs indépendants.

Madame la sénatrice Miville-Dechêne, cela vous convient-il?

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui.

Le président : Madame la sénatrice Gagné?

La sénatrice Gagné : Je pense que oui.

Le président : Madame la sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Pour peu que le chevauchement soit coordonné.

Le président : Je vais faire appel à vous, madame la sénatrice Miville-Dechêne, ainsi qu’à Dennis, parce que je crois que le sénateur Mercer fait aussi partie de ce comité.

Mme Nadeau : Plus maintenant.

Le président : D’accord. Je prends note de ce changement.

Les personnes qui ne font pas partie du comité... Nous allons inviter tous les sénateurs de la Colombie-Britannique qui souhaitent se joindre à nous, et ceux de l’Alberta, s’ils peuvent se rendre sur place. Il faudra cependant qu’ils le fassent à leurs frais.

La sénatrice Simons : La sénatrice Busson voudra peut-être prendre part à cela.

Le président : Nous allons tous les inviter, et tous ceux qui voudront venir seront les bienvenus.

La sénatrice Gagné : Je propose que la greffière envoie un courriel à tous les membres afin de sonder leur intérêt et leur disponibilité pour les dates qui seront confirmées. Cela nous donnera un point de départ.

La sénatrice Simons : Devrions-nous d’abord procéder à la mise aux voix de la motion?

Le président : Oui. Êtes-vous tous en faveur de la motion? Tout le monde est d’accord.

La sénatrice Simons : J’essaie d’apprendre.

Le sénateur Smith : Combien y aura-t-il de gens qui vont y aller?

Le sénateur Oh : Mettez mon nom sur la liste.

Le sénateur Smith : Lorsque vous préparez vos budgets, mettez-vous tous...

Le président : Nous tenons compte de tous les membres du comité. Cela dit, il est rare que nous ayons un compte complet.

Le sénateur Smith : Je vois.

Est-ce que tout le monde comprend cela? Est-ce que tout le monde comprend comment se fait l’examen?

Le président : Le budget inclut tout le monde, parce que tous les membres du comité ont le droit d’y aller. Le budget sera conforme à ce que j’ai dit, mais il se peut que cela coûte moins cher parce que c’est rare que tout le monde soit du voyage.

Le sénateur Smith : Bon nombre d’entre nous ont siégé au Sous-comité des budgets. Pour vous situer, sachez que la moyenne historique est de 50 à 55 p. 100 des coûts planifiés pour l’ensemble des membres. Par conséquent, si vous prévoyez 130 000 $, vous pouvez vous attendre à ce que les dépenses réelles représentent quelque chose comme 55 à 60 p. 100 de ce montant.

Sachez que tous ces chiffres que l’on entend à propos des dépenses font l’objet d’un suivi très serré. Une fois que les budgets ont été examinés par le sous-comité, ils reviennent ici aux fins de réaffirmation par l’ensemble du comité.

La sénatrice Miville-Dechêne : Je vois qu’il y a pas mal de gens qui ne sont pas sénateurs qui font partie du voyage. Je présume que c’est pour les besoins de la traduction?

Le président : Oui. Lorsque nous nous déplaçons, nous devons le faire avec un service de traduction. Il faut se déplacer avec tout ce que cela exige.

La sénatrice Miville-Dechêne : Treize personnes pour la traduction, c’est bien cela?

Le président : Non, il n’y a pas qu’eux. Il y a la greffière, les analystes, un agent de communications, les interprètes.

La sénatrice Simons : Nous n’emmenons pas notre personnel?

Le président : Je crois que — je ne sais pas — le président et le vice-président ont droit à un membre de leur personnel.

La sénatrice Simons : Ma question n’est pas mal intentionnée. Comme c’est mon premier voyage, je ne sais pas comment cela fonctionne. C’est ce que j’avais présumé. Tout cela est parfaitement sensé.

Le président : Avant, le personnel n’était jamais inclus, mais depuis que les libéraux sont là, tout le monde a le droit d’y aller, et voilà tout.

Le sénateur Smith : Lorsque j’étais au Comité des finances, nous n’emmenions jamais le personnel. Le nombre de personnes était limité, car ce sont les membres du groupe qui faisaient le travail. Nous avons eu de bons résultats parce que nous avions créé un groupe homogène et que les gens travaillaient en étroite collaboration les uns avec les autres.

La sénatrice Simons : Je dois vous dire, monsieur le sénateur Smith, que, en tant que très nouvelle membre, la vue de ces chiffres m’a presque rendue malade. J’ai pensé : « Comment diable vais-je expliquer cela au public? » Sauf que vous m’affirmez qu’il s’agit du maximum que cela pourrait coûter.

Le sénateur Smith : Habituellement, nous dépensions entre 1,7 et 2 millions de dollars par année pour les déplacements, mais nous avons toujours pris soin de garder un coussin dans notre budget. Je ne sais pas exactement comment les choses fonctionnent maintenant, mais il s’agit d’un précédent historique que les sénateurs ont perpétué. L’une des choses qui comptent, c’est que vous puissiez apprendre et que vous vous sentiez à l’aise de poser toutes les questions qu’il faudra pour vous mettre rapidement au fait des procédures et gagner en assurance à cet égard.

Tous ceux d’entre nous qui ont une certaine expérience avec les comités seront on ne peut plus ravis de répondre à toutes vos questions, parce que nous voulons vous voir réussir.

La sénatrice Simons : J’ai aimé répondre aux questions du sénateur Plett, tout à l’heure.

Le président : Le sénateur Smith était président du sous-comité.

Ceci n’est pas un montant élevé. Il y a eu des montants qui étaient beaucoup plus élevés que cela. Il y a un budget annuel pour les déplacements, et nous le respectons presque toujours.

La sénatrice Simons : Merci. Je comprends ce que vous me dites.

Le président : De plus, habituellement, nous dépensons moins que ce qui est prévu au budget.

Est-ce que nous avons fait tout ce que nous avions à faire? La séance est levée.

(La séance est levée.)

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