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TRCM - Comité permanent

Transports et communications

 

LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES COMMUNICATIONS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 9 avril 2019

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications, auquel a été déféré le projet de loi C-48, Loi concernant la réglementation des bâtiments transportant du pétrole brut ou des hydrocarbures persistants à destination ou en provenance des ports ou des installations maritimes situés le long de la côte Nord de la Colombie-Britannique, se réunit aujourd’hui à 9 heures pour l’étude du projet de loi.

Le sénateur David Tkachuk (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Avant de présenter le projet de loi en tant que tel que nous étudions, le projet de loi C-48, et d’accueillir les témoins, j’aimerais préciser qu’une lettre nous a été envoyée. L’autre jour, j’ai demandé à un des témoins, Wim Veldman, combien de pétroliers se déplaçaient à tout moment dans le monde. Un jour donné, il semble que 7 500 pétroliers sont en déplacement. C’est une statistique surprenante, et ils transportent 1 milliard de barils de pétrole brut par jour.

Je tiens aussi à vous dire, aujourd’hui, que les représentants de Global se sont renseignés parce qu’ils voulaient filmer la salle avant la réunion. Ils voulaient filmer les préparatifs de la première ministre Notley. Ils voulaient filmer non pas durant son témoignage, mais avant. Le bureau de la première ministre était préoccupé par le fait que nous n’ayons pas permis une telle chose. J’ai tout simplement expliqué à M. Aiken que ce n’est pas vrai. Si des gens veulent venir avant la réunion, ils sont tout à fait les bienvenus. Cependant, une fois la réunion commencée, il ne doit plus y avoir de caméra. C’est à la première ministre Notley de décider si elle veut que Global soit là dans le cadre de cette réunion. Je voulais que vous le sachiez.

De plus, un budget a été distribué relativement aux déplacements dont nous avons parlé l’autre jour. L’avez-vous tous devant les yeux? Des visites à Edmonton, Regina et Estevan sont prévues. J’ai besoin d’une motion pour approuver le budget. Sénateur Manning. Quelqu’un veut en discuter?

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui. J’aimerais maintenant présenter un amendement. C’est le suivant :

Que le budget soit modifié pour n’inclure que des audiences publiques à Edmonton et à Regina;

Et que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale du budget.

J’estime que cet amendement est raisonnable, puisque nous nous rendons à une ville de l’Alberta, Edmonton. Du point de vue de l’équilibre, du compromis et de la raison, je crois que nous devrions aller à Regina, en Saskatchewan. Selon moi, nous pourrons entendre beaucoup de témoins à Regina parce que nous serons là pour une audience d’une journée complète. Si des témoins de l’industrie, des travailleurs en particulier, veulent comparaître, nous voulons évidemment entendre ce qu’ils ont à dire.

J’estime cet amendement raisonnable parce qu’il permet d’aller écouter les préoccupations des Albertains et des Saskatchewanais de façon équilibrée.

Le sénateur Plett : Monsieur le président, j’imagine que le budget demandé a été établi en fonction du travail du comité directeur qui s’est réuni pour adopter le budget. Encore une fois, je trouve très frustrant que des sénateurs essaient de limiter les discussions plutôt que de les ouvrir.

Hier, monsieur le président, durant une réunion d’un comité, un sénateur a voulu formuler une observation à la fin de la réunion, disant que l’opposition officielle n’était pas aimable parce qu’elle ne voulait pas soutenir un projet de loi du gouvernement. Et ici, encore une fois, il y a des gens qui soutiennent le projet de loi, qui veulent qu’on l’adopte à la hâte sans réaliser des consultations appropriées, qui ont rappelé constamment le fait que nous ne devrions pas nous déplacer, que nous devrions tout simplement demander aux gens de venir nous voir, que nous devrions permettre aux gens de participer par vidéoconférence et que nous ne devrions pas nous donner la peine d’aller visiter les endroits les plus dévastés.

Monsieur le président, il est essentiel d’inclure des endroits comme Estevan, et d’autres, aussi. Je ne vais pas modifier le projet de loi ou demander un amendement, mais j’aimerais qu’on ratisse plus large. On détruit les entreprises des gens en raison du projet de loi. Nous dévastons une région de notre pays en raison de ce projet de loi. Nous devrions faire de notre mieux. Lorsque nous disons être là pour réaliser un second examen objectif, nous devrions faire tout ce que nous pouvons pour voir en quoi tout ça mine notre économie et notre pays plutôt que d’essayer constamment de limiter ce que nous faisons.

Le comité directeur a donné son aval. La sénatrice Miville-Dechêne et le sénateur Dawson — et je ne devrais même pas mentionner le sénateur Dawson lorsqu’il n’est pas dans la salle, mais il est membre du comité directeur — se sont disputés et sont plaints à ce sujet, soit que le comité directeur ne s’était pas réuni. Et là, le comité directeur se réunit et approuve un budget, et nous tentons de le modifier durant une réunion de tout le comité. Heureusement que nous tenons une audience publique. Encore une fois, j’espère que tous les Canadiens nous écoutent tandis que des membres du comité essaient de réduire et limiter nos déplacements plutôt que les encourager.

Le président : Par souci de clarté, le comité directeur a approuvé le fait qu’on se rende en Alberta et en Saskatchewan — mais pas en Colombie-Britannique —, mais nous n’avons pas choisi les villes précises. C’est une décision qui a été laissée à la sénatrice Miville-Dechêne et à moi. Nous avons choisi ces trois villes tout de suite après la réunion durant laquelle le comité a décidé d’approuver la motion du comité directeur de se rendre en Alberta et en Saskatchewan. Alors nous n’avons pas précisément...

Le sénateur Plett : La sénatrice Miville-Dechêne a accepté.

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui. J’ai accepté. Nous avons tous les deux accepté le mercredi soir en question. J’ai ensuite parlé au sénateur Dawson et j’ai regardé la carte, j’ai vu Estevan, j’ai vu la situation dans son ensemble et je me suis dit que, par souci d’équilibre — parce que nous ne faisions qu’un arrêt en Alberta, qui, comme vous le savez, est très touchée par le projet de loi C-48 —, et c’est aussi parce que ça me semblait plus raisonnable. J’étais d’avis, comme l’était aussi le sénateur Dawson, qu’il devrait y avoir deux arrêts. Cependant, il ne s’agissait pas d’une réunion officielle du comité directeur. C’est la raison pour laquelle on le fait durant une réunion de tout le comité. Évidemment, c’est mon avis.

Je tiens aussi à m’inscrire en faux, monsieur le sénateur Plett, contre ce que vous avez dit au sujet des gens — et je crois que vous parliez de moi — qui sont favorables au projet de loi C-48 et qui veulent limiter le débat. Je n’ai rien fait de tel. Nous avons entendu bon nombre de témoins de l’Alberta. Durant l’audience aujourd’hui nous allons entendre la première ministre Notley. Nous allons aussi rencontrer un ministre de la Saskatchewan. Nous avons rencontré beaucoup de témoins qui sont contre le projet de loi. Par conséquent, le débat a eu lieu, contrairement à ce que vous dites. Ma décision n’est pas prise relativement au projet de loi C-48. J’écoute et j’essaie de comprendre tout le débat. Je m’oppose donc à ce que vous venez de dire.

La sénatrice Stewart Olsen : Je ne suis pas membre du comité. Je remplace un autre membre. Je vais vous raconter quelques faits historiques sur le Sénat, si vous n’y voyez pas d’inconvénient.

Personne n’est aussi méticuleux que moi lorsqu’il est question de dépenses. Je dois vous le dire tout de suite. Lorsque je suis arrivée au Sénat, les comités sénatoriaux ne se déplaçaient à peu près pas du tout. Lorsqu’ils le faisaient, ils allaient dans des endroits plus exotiques. Nous n’étions pas bien connus des Canadiens. L’un de mes objectifs personnels est l’une des choses que j’essaie le plus de promouvoir, c’est que nous devons être mieux connus des Canadiens. C’est extrêmement important, qu’on soit pour ou contre le projet de loi, que le Sénat soit considéré comme une organisation qui est prête à écouter les gens et qui veut le faire. On ne peut pas le faire à Ottawa.

Si vous voulez limiter... J’irais probablement à deux endroits en Alberta, ou j’irais sur la côte Est voir là où passent les pétroliers. Je crois qu’éliminer une réunion auprès des Canadiens n’est pas positif pour le Sénat ou les sénateurs. Merci de m’avoir écoutée.

La sénatrice Dasko : Eh bien, je suis membre du comité, et l’une des choses que nous avons apprises, c’est que les comités se déplacent rarement dans le cadre de l’étude de projets de loi. C’est ce qu’on nous a dit : très rarement. Le comité prend donc une mesure importante en se déplaçant dans le cadre de l’étude du projet de loi qui nous occupe.

Contrairement à ce que laissent croire les commentaires qui ont été formulés, nous n’avons rien limité. Au départ, nous ne pensions pas voyager, puis nous avons approuvé un déplacement en Colombie-Britannique, puis un autre en Alberta, et maintenant un autre en Saskatchewan.

Le président : L’Alberta et la Saskatchewan ont été décidés en même temps.

La sénatrice Dasko : Oui. Nous sommes passés d’aucun déplacement à des déplacements dans trois provinces. Donc, en fait, nous sommes allés précisément dans la direction opposée de ce qu’affirme le sénateur Plett. Nous sommes passés d’aucun déplacement à d’importants déplacements pour entendre les points de vue des Canadiens. Je crois que nous traitons actuellement d’un amendement très raisonnable, et je vais l’appuyer.

Je veux aussi souligner le fait qu’il y a eu de très importantes consultations sur le projet de loi, et que nous allons poursuivre ces consultations après notre retour et avant de conclure le processus. Merci.

Le sénateur Boisvenu : C’est un autre sujet. Je vais régler ça, puis je parlerai du deuxième sujet.

Le président : Monsieur le sénateur Plett, vous avez déjà parlé.

Le sénateur Plett : Je vais attendre jusqu’à la fin. Pas de problème.

Le président : La sénatrice Moncion ne s’est pas encore exprimée.

La sénatrice Moncion : J’ai une question : combien de témoins allez-vous rencontrer à Estevan? Le savez-vous?

Le président : Nous ne le savons pas tant que nous ne décidons pas d’aller là-bas. Aujourd’hui, c’était la journée du budget. Une fois le budget approuvé, alors nous saurons exactement là où nous irons.

La sénatrice Moncion : La raison pour laquelle je le demande, c’est qu’il y a 201 kilomètres entre Regina et Estevan. Il serait probablement facile de faire venir les témoins à Regina et de passer une journée complète à Regina, plutôt que de passer une journée complète dans une ville, et une autre journée complète dans une autre ville. C’est une question de temps et de coût.

Le président : Le plan, c’était deux jours. Si vous regardez le budget, c’est une journée à Regina, une demi-journée à Estevan et une journée complète à Edmonton.

La sénatrice Moncion : De toute façon, mon commentaire, c’est que, si on passe seulement une demi-journée à Estevan, on pourrait probablement faire venir ces personnes à Regina et passer la journée complète là-bas; on éliminerait donc le besoin de se rendre à Estevan, qui n’est pas très loin. Pour les gens en Saskatchewan, même pour nous dans le Nord de l’Ontario, c’est normal de se déplacer pendant trois ou quatre heures pour se rendre à destination. Cela fait partie de là où nous vivons.

Le président : C’est normal pour eux, pas pour nous.

[Français]

La sénatrice Gagné : Je vais aussi appuyer l’amendement. Il n’est pas question de ne pas aller en Saskatchewan. On propose d’aller en Saskatchewan. L’idée, c’est de pouvoir centraliser nos audiences publiques à un endroit, et ce n’est certainement pas dans le but de limiter le débat au sujet du projet de loi C-48. Je crois que l’amendement est raisonnable.

Le sénateur Cormier : En fait, je vais aussi voter en faveur de l’amendement. Le sénateur Plett a fait référence à une séance de comité qui s’est tenue hier et à des commentaires qui ont été faits hier devant un autre comité, et il semble nous associer à ces commentaires-là. Je ne sais pas de quel comité il s’agit et qui a fait des commentaires, mais j’aimerais bien qu’on concentre nos observations sur ce qui se passe ici. Dans ma vision des choses, il n’est absolument pas question ici d’empêcher les Canadiens de faire entendre leur opinion. Je crois qu’il est raisonnable également de les entendre à Regina. Donc, je vais voter en faveur de cet amendement. Je vous remercie.

[Traduction]

Le sénateur Plett : Eh bien, pour revenir sur ce que le sénateur Cormier vient de dire quant au fait que je renvoie à un autre comité, la sénatrice Dasko a parlé de ce qui est normal et de ce qui ne l’est pas. Je ne veux pas lui faire dire quoi que ce soit, mais elle a dit que les comités se déplacent « rarement ». Elle parle donc elle aussi d’autres comités. Je m’exprimais de façon générale pour parler de ce que nous faisons ici. Pour ce qui est de ce que la sénatrice Dasko a dit sur le fait que les déplacements sont rares, notre comité s’est déjà déplacé dans le cadre de l’étude de projets de loi dans le passé. Le Comité des finances se déplace partout au pays lorsqu’il étudie des projets de loi. Il est donc clair qu’il y a des précédents.

La sénatrice Moncion dit que c’est seulement deux heures. Eh bien, c’est seulement deux heures, peu importe qui se déplace. Si on se déplace de Regina à Estevan, c’est aussi deux heures, et un autobus pour se rendre à Estevan, ça n’a rien de déraisonnable. Cependant, ce qu’on suggère, ici, c’est que les gens d’Estevan ne sont pas assez importants pour qu’on leur rende visite et qu’ils peuvent venir nous voir, l’argument même que nous avons utilisé contre le fait que les gens viennent à Ottawa.

Il y a une raison pour laquelle Estevan a été choisie comme destination à visiter, et la sénatrice Miville-Dechêne a accepté que ce soit le cas. Qu’elle ait obtenu l’approbation ou l’accord du sénateur Dawson, il reste qu’elle a accepté, et nous voici encore ici à essayer de limiter tout cela. Chers collègues, nous avons déjà tenu ce débat et nous avons fait le tour pour finalement convenir que nous allions faire quelque chose de façon collégiale, et là, nous voulons à nouveau empêcher les gens de procéder de cette façon.

Je suis d’accord avec ce que la sénatrice Stewart Olsen a dit. Nous devrions aller sur la côte Est pour voir de quelle façon ils font les choses là-bas. Le président nous a dit combien il y a de pétroliers qui se déplacent dans le monde un jour donné, et nous nous arrêtons dans une région où trois provinces sont dévastées. Nous arrêtons le passage des pétroliers, ce qui, très franchement, n’est pas aussi dangereux qu’on tente bien de le faire croire. Nous ne voulons pas aller voir les gens pour entendre ce qu’ils ont à dire, et pourtant nous disons être la chambre du second examen objectif.

Nous limitons le débat. La semaine dernière, le leader du gouvernement a présenté une motion de programmation qui aurait eu pour effet d’arrêter tous les débats. Heureusement, nous avons réussi à l’éviter, mais on tente de limiter le débat lorsqu’on procède de cette façon, et c’est ce qu’on fait ici.

Par conséquent, à la lumière ce qu’ont dit les intervenants, monsieur le président, je crois que l’amendement sera adopté, mais j’espère tout simplement que les gens d’Estevan nous écoutent et qu’ils sont très attentifs à ces personnes qui ne veulent pas aller les voir.

La sénatrice Stewart Olsen : N’oubliez pas que les provinces de l’Ouest n’ont pas autant de sénateurs et ils n’ont pas autant de députés élus. Ils n’ont pas la même représentation que l’Ontario, le Québec et beaucoup d’autres provinces. Je crois que nous devrions faire de notre mieux pour les écouter au sein du gouvernement. Selon moi, pour une demi-journée, c’est un drôle d’argument. Ce qu’il faudra probablement faire si on veut écouter tout le monde, c’est probablement prolonger les audiences de Regina à une journée et demie. Si vous ne voulez pas vous rendre à Estevan, et vous déplacer pendant deux heures, alors vous devrez peut-être prolonger votre journée à Regina. Par conséquent, je ne suis pas sûre de comprendre l’amendement. Je ne comprends pas.

Il y a une nouvelle aujourd’hui selon laquelle l’Alberta va perdre je ne sais plus trop bien combien d’emplois de plus. L’Ouest est dévasté; c’est une réalité à laquelle il faudra faire face, et il faut écouter les gens. Je ne veux pas que les gens croient que ce qui se passe dans l’Ouest nous est égal. Le canola... tout va mal dans l’Ouest actuellement. Je crois vraiment qu’on leur nuit si on n’essaie pas au moins de maximiser nos déplacements et de parler au plus grand nombre de gens possible.

La sénatrice Gagné : Je tiens à répéter que nous allons en Saskatchewan et en Alberta. Il faut faire en sorte que les gens d’Estevan se rendent à Regina. Je crois que c’est raisonnable. Je crois qu’on est aussi conscient des coûts. Je viens de l’Ouest, du Manitoba. J’ai une bonne idée de ce qui se passe dans ma province, surtout. Je crois que l’amendement proposé est raisonnable.

[Français]

La sénatrice Moncion : Je voudrais faire un commentaire au sujet de quelque chose que le sénateur Plett a mentionné. Le Comité sénatorial permanent des finances nationales a voyagé pour un projet de loi, et les déplacements ont eu lieu à l’étape de l’étude préalable. Pour ce qui est de l’Ouest, qui ne va pas bien —

[Traduction]

Le président : ... sur un projet de loi.

La sénatrice Moncion : C’était sur un projet de loi, mais il y a eu une étude préliminaire de six mois...

Le président : Je sais, mais c’était sur un projet de loi.

La sénatrice Moncion : Je suis d’accord. Mais il y avait eu une étude préliminaire, alors on en revient à ce commentaire.

L’autre chose, c’est que je comprends le commentaire de la sénatrice Stewart Olsen sur la dévastation dans les industries du pétrole, du gaz et du canola. Nous comprenons qu’il y a des problèmes dans les provinces de l’Ouest, et c’est un problème très important du point de vue économique. Le même genre de problème s’est produit partout au Canada dans l’industrie du bois d’œuvre en 2008-2009, lorsque l’industrie s’est effondrée dans quasiment toutes les provinces. Et ce qui est arrivé à tous ceux qui occupaient ces emplois, que ce soient des camionneurs ou les travailleurs, eh bien, ils ont trouvé d’autres emplois. Alors je ne dis pas que ce n’est pas important, je dis que ce sont des situations cycliques.

Pour revenir à la question des déplacements du comité, comme je l’ai déjà dit, Estevan n’est pas très loin. Puis, comme vous l’avez mentionné, on pourrait allonger la journée et rencontrer toutes ces personnes, mais elles viendraient rencontrer le comité plutôt que l’inverse.

Le sénateur Cormier : Monsieur le président, a-t-on confirmé que nous allons rencontrer M. Jeremy Harrison, ministre du Commerce et du Développement des exportations aujourd’hui?

Le président : Oui, nous allons le rencontrer.

Le sénateur Cormier : Il vient de la Saskatchewan. Il représente la population et il a été élu par le...

Le sénateur Plett : Bonne idée. Demandons-lui ce qu’il pense.

Le sénateur Cormier : Nous pouvons lui demander ce qu’il pense. C’est ce que je voulais souligner.

Le sénateur Manning : Selon moi, l’important, c’est qu’on écoute les gens de la Saskatchewan. Et pour ce qui est du commentaire de la sénatrice Stewart Olsen, au besoin, nous devrions peut-être envisager de prolonger les audiences à Regina d’une demi-journée s’il y a trop de témoins pour que nous puissions tous les entendre en une journée. L’important, c’est d’entendre les témoins. Et puisque je vois qu’il y en a deux devant nous, nous devrions peut-être leur parler.

Le président : Nous allons mettre la question aux voix.

Le sénateur Plett : J’aimerais présenter un sous-amendement.

Le président : Avant de passer au vote, je veux que ce soit clair : il y a eu des substitutions aujourd’hui. Avant de passer au vote, donc, je veux confirmer certaines choses. Sénatrice Stewart Olsen qui remplacez-vous?

La sénatrice Stewart Olsen : Le sénateur MacDonald.

Le président : Sénatrice Moncion, qui remplacez-vous?

La sénatrice Moncion : La sénatrice Simons.

Le président : Quelqu’un d’autre remplace un sénateur?

[Français]

La sénatrice Mégie : Je remplace la sénatrice Galvez.

[Traduction]

Le président : D’accord.

Et le sous-amendement?

Le sénateur Plett : Pour commencer, permettez-moi de commencer par dire que, au bout du compte, je vais voter contre l’amendement, mais je veux proposer un sous-amendement pour que nous prolongions les audiences à Regina d’une journée afin d’entendre les gens d’Estevan après leur avoir demandé de venir à Regina.

Le président : Y a-t-il un débat?

La sénatrice Miville-Dechêne : Pour être franche, je crois que nous devrions attendre de voir combien de témoins viendront. Et j’estime que nous sommes assez sérieux et responsables pour...

Le sénateur Plett : De toute évidence, nous ne le sommes pas.

La sénatrice Miville-Dechêne : Eh bien, je crois que nous le sommes. Vous pouvez parler pour vous, sénateur Plett.

Le sénateur Plett : C’est ce que je fais.

La sénatrice Miville-Dechêne : Je crois que nous devrions regarder qui veut venir à Regina, et, à partir de là...

Le sénateur Plett : Alors où place-t-on la barre? Cinq? Dix? Quinze?

La sénatrice Miville-Dechêne : Nous pouvons soumettre votre sous-amendement aux voix. C’est tout simplement que nous avons des témoins, et il est 9 h 25. Je crois que le débat est très clair. Nous avons dit que nous voulons aller en Alberta, nous voulons aller en Saskatchewan, entendre les gens des provinces de l’Ouest et connaître leurs préoccupations. Vous voulez aller à Terre-Neuve, ou peu importe, vous voulez traverser le Canada d’un endroit à l’autre.

Le sénateur Plett : Monsieur le président, ce n’est pas ce que j’ai demandé.

Le président : Sénateurs, nous avons des invités.

Que tous ceux qui sont en faveur du sous-amendement du sénateur Plett lèvent la main. D’accord. Vous êtes cinq. Tous ceux qui sont opposés? Six. D’accord. Revenons à l’amendement.

Nous allons donc mettre la question aux voix par oui ou non. Voulez-vous procéder à la mise aux voix? Tous ceux en faveur de l’amendement selon lequel nous éliminons Estevan?

La sénatrice Miville-Dechêne : Pourriez-vous s’il vous plaît lire l’amendement?

La sénatrice Gagné : Monsieur le président, par respect, pouvez-vous lire l’amendement?

Le président : Veuillez le lire pour le compte rendu, alors, sénatrice Miville-Dechêne.

La sénatrice Miville-Dechêne : Évidemment, je m’oppose à la façon dont vous décrivez mon amendement. Je ne crois pas que c’était équitable.

Le président : D’accord. Formulons-le dans un langage plus fin, alors, sénatrice Miville-Dechêne.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Je propose que le budget soit modifié pour n’inclure que des audiences publiques à Edmonton et Regina, et que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale du budget.

[Traduction]

Le sénateur Manning : Je sais qu’il y a une traduction, mais pouvez-vous lire la version anglaise aussi?

La sénatrice Miville-Dechêne : Bien sûr. Je peux vous la lire.

Le sénateur Manning : Merci.

La sénatrice Miville-Dechêne : Je propose :

Que le budget soit modifié pour n’inclure que des audiences publiques à Edmonton et à Regina;

Et que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale du budget.

Joëlle Nadeau, greffière du comité : L’honorable sénateur Tkachuk?

Le sénateur Tkachuk : Je suis contre.

Mme Nadeau : L’honorable sénateur Boisvenu?

Le sénateur Boisvenu : Contre.

Mme Nadeau : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Pour.

Mme Nadeau : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Pour.

Mme Nadeau : L’honorable sénatrice Gagné?

La sénatrice Gagné : Pour.

Mme Nadeau : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Contre.

Mme Nadeau : L’honorable sénatrice Mégie?

La sénatrice Mégie : Pour.

Mme Nadeau : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Pour.

Mme Nadeau : L’honorable sénatrice Moncion?

La sénatrice Moncion : Pour.

Mme Nadeau : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Non.

Mme Nadeau : L’honorable sénatrice Stewart Olsen?

La sénatrice Stewart Olsen : Contre.

Mme Nadeau : Six pour et 5 contre.

Le président : Nous voilà revenus à la motion principale, le budget.

Le sénateur Manning : Puis-je présenter une motion selon laquelle, si la liste des témoins fait en sorte que c’est nécessaire, les audiences à Regina pourraient être prolongées d’une demi-journée ou d’une journée, selon ce qui est nécessaire?

Le président : D’accord.

Un débat? Tous ceux qui sont pour la motion?

Des voix : D’accord.

Le président : Sommes-nous tous d’accord?

Donc tout est beau pour le budget, parce que la version finale doit être approuvée par... Ne faut-il pas adopter le budget?

Mme Nadeau : La motion donne le pouvoir au comité directeur d’approuver le budget.

Le président : D’accord. Je ne sais pas comment on procédera maintenant, parce qu’il faudra ajouter quelque chose si nous devons passer une nuitée de plus.

Mme Nadeau : C’est déjà inclus.

Le président : En raison d’Estevan?

Le sénateur Manning : Le financement ne pose pas problème.

Le président : Nous avons autant d’argent.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Monsieur le président, je ne voyage pas souvent avec les comités; c’est arrivé peut-être une ou deux fois en 10 ans. Je me questionne sur le nombre d’employés qui voyagent par rapport au nombre de sénateurs.

Je trouve que le nombre d’employés est élevé. Je ne veux pas du tout dénigrer leur travail, mais le nombre d’employés par rapport au nombre de sénateurs est très élevé. J’ai déjà voyagé alors que nous étions 12 sénateurs et 5 employés et le travail était bien fait. De plus, je suis convaincu qu’il n’y aura pas 12 sénateurs qui feront le voyage, mais plutôt 7 ou 8 sénateurs, puisque certains ont dit qu’ils ne participeraient pas au voyage. Je pense donc que la proportion des employés par rapport aux sénateurs est un peu déplacée.

[Traduction]

Le président : Sénateur Boisvenu, pouvons-nous reporter la discussion jusqu’à ce que nous ayons terminé aujourd’hui? Nous avons des témoins ici qui attendent déjà depuis 30 minutes. Nous allons entendre les témoins, et lorsqu’on aura terminé avec la première ministre, à 11 h 30, nous pourrons tenir une courte discussion sur le personnel.

Nous poursuivons aujourd’hui notre étude du projet de loi C-48, Loi concernant la réglementation des bâtiments transportant du pétrole brut ou des hydrocarbures persistants à destination ou en provenance des ports ou des installations maritimes situés le long de la côte nord de la Colombie-Britannique.

Avant de commencer, je tiens à m’excuser, mais nous avions quelques petites choses à régler. J’espère que vous avez trouvé tout cela au moins un peu intéressant. Nous accueillons aujourd’hui Gavin Smith, avocat interne de la West Coast Environmental Law Association, et Sonia Simard, directrice des Affaires législatives et environnementales de la Fédération maritime du Canada. Elle remplace M. Broad, qui ne se sent pas bien aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle elle est parmi nous. Merci d’être là.

Gavin Smith, avocat interne, West Coast Environmental Law Association : Merci de me donner l’occasion de comparaître et de parler en faveur du projet de loi C-48. Vu le temps qui m’est accordé, je vais m’en tenir à vous décrire le contexte historique du moratoire concernant les pétroliers sur la côte nord de la Colombie-Britannique qui remonte aux années 1970. Je procède ainsi parce que le projet de loi C-48 vise à protéger un endroit éloigné et important du point de vue écologique contre un risque qui n’existe pas là-bas en ce moment, c’est-à-dire le passage de pétroliers contenant du pétrole brut. Cependant, l’absence de pétroliers contenant du pétrole brut là-bas ne s’explique pas par le manque de propositions ou les possibilités de développement dans la région de la côte nord au cours des 50 dernières années.

Pour très bien comprendre ce qui motive le projet de loi C-48, il est important de comprendre l’histoire unique de la côte nord de la Colombie-Britannique et les efforts continus des gens pour s’assurer qu’aucun pétrolier contenant du pétrole brut ne passe par là.

Je vais commencer par parler du système de l’oléoduc Trans-Alaska proposé à la fin des années 1960 à la suite de la découverte de pétrole à Prudhoe Bay, en Alaska. Les trajets proposés des pétroliers contenant du pétrole brut sont devenus un enjeu extrêmement préoccupant au Canada à l’échelon tant provincial que national.

Par exemple, en 1970, la Chambre des communes a chargé un comité spécial de se pencher sur l’enjeu de la circulation de pétroliers contenant du pétrole brut et, en 1971, après avoir tenu des audiences, ce comité spécial a recommandé que le Canada s’oppose au passage des pétroliers contenant du pétrole brut dans la région en raison des risques environnementaux connexes. La même année, l’Assemblée législative de la Colombie-Britannique a adopté à l’unanimité une motion pour s’opposer au passage de pétroliers contenant du pétrole brut dans la région.

Le gouvernement fédéral a ensuite fait des annonces de moratoire stratégique non officiel dans la région. En 1972, la Chambre des communes a adopté à l’unanimité une motion selon laquelle une telle circulation de pétroliers de brut serait contraire aux intérêts du Canada et exhortait le gouvernement fédéral à porter cette question à l’attention des États-Unis. Bien sûr, l’oléoduc Trans-Alaska a été approuvé par les États-Unis après cette date et bâti. Le Canada s’est efforcé de faire en sorte que ces pétroliers soient aussi éloignés que possible de la côte de la Colombie-Britannique afin de protéger la région.

En 1977, lorsque ces pétroliers ont commencé à se déplacer depuis Valdez, la garde côtière américaine a mis en place un système d’organisation du trafic. Des fonctionnaires fédéraux ont officiellement déclaré que ce système, qui devait garder les pétroliers à plus de 100 milles à l’ouest de Haida Gwaii, résultait d’un accord entre les gouvernements américain et canadien.

Ces itinéraires étaient très impopulaires auprès de l’industrie des pétroliers en raison des coûts inhérents. En 1982, ils ont été abandonnés par la garde côtière américaine, ce qui a de nouveau obligé le Canada à entamer des négociations par l’entremise de la Garde côtière canadienne afin de tenter de maintenir les pétroliers à une distance sécuritaire de la région, ce qui a finalement abouti à la création de la zone d’exclusion volontaire des pétroliers, qui est actuellement en place.

Toutefois, le projet Trans-Alaska n’était pas le seul projet de pétroliers de brut proposé dans la région de la côte Nord de la Colombie-Britannique à l’époque. En 1976, Kitimat Oil Pipe Line Limited a proposé un port pétrolier en haute mer à Kitimat dans le but d’importer du pétrole des États-Unis, ainsi que de l’Indonésie et d’ailleurs dans le monde. Le gouvernement fédéral a réagi en lançant une enquête fédérale en vertu de la Loi sur les enquêtes fédérales; des audiences ont été tenues en Colombie-Britannique, et un exposé des procédures a été publié en 1978. Je vais en citer un bref extrait, car je pense que cela reflète ce qui se passait à l’époque. Le commissaire Andrew Thompson a déclaré :

Même si je connais bien cette histoire d’opposition déterminée au trafic de pétroliers, j’ai été étonné de constater sa dimension universelle. Au cours de mes réunions préliminaires dans toute la province ainsi que des audiences officielles et communautaires tenues à ce jour dans le cadre de l’enquête, les propositions relatives aux ports pétroliers ont inspiré peu de défenseurs autres que les sociétés promotrices.

À la suite de la publication de l’exposé des procédures, le gouvernement fédéral a réagi en annonçant qu’il ne permettrait pas le projet de port pétrolier de Kitimat.

L’autre élément de l’histoire que je voulais faire ressortir est le moratoire sur l’exploration et l’exploitation du pétrole extracôtier en Colombie-Britannique. En 1972, l’année même où la Chambre des communes a présenté sa motion contre la circulation de pétroliers, le gouvernement fédéral a instauré un moratoire sur l’exploration et l’exploitation du pétrole dans la région de la côte Nord de la Colombie-Britannique, initialement au moyen de décrets qui ont suspendu les permis d’exploration existants dans la région; puis à la date ultérieure de leur expiration, le moratoire a été maintenu par une politique depuis.

À deux occasions, le Canada a envisagé de lever ce moratoire relatif à l’exploitation pétrolière au large des côtes. La première fois, c’était dans les années 1980, lorsque le Canada et la Colombie-Britannique étaient en négociation pour un accord du Pacifique sur l’exploitation extracôtière des réserves de pétrole, semblable à celui des provinces de l’Atlantique à l’époque. Deux déversements de pétrole hautement médiatisés ont touché la côte Ouest à cette époque, à savoir le déversement mettant en cause la barge pétrolière Nestucca dont le rejet de mazout de type Bunker C a touché la côte de la Colombie-Britannique ainsi que, bien sûr, l’Exxon Valdez. En réponse aux répercussions de ces déversements et aux préoccupations du public, le gouvernement de la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral ont choisi de maintenir le moratoire sur l’exploitation extracôtière.

Au début des années 2000, un nouveau gouvernement provincial a demandé que le gouvernement fédéral envisage de lever ce moratoire sur l’exploitation. Au terme d’un processus de réflexion, le gouvernement fédéral a finalement décidé de maintenir le moratoire sur l’exploitation pétrolière au large des côtes de la Colombie-Britannique. Il convient de souligner que l’une des choses que le Canada a faites dans le cadre de son processus a été d’établir un comité d’examen public fédéral, lequel a tenu des audience en Colombie-Britannique et a conclu dans son rapport en 2004 que 75 p. 100 des Britanno-Colombiens souhaitaient maintenir le moratoire relatif à l’exploitation extracôtière des réserves de pétrole.

L’étape suivante dans l’histoire est le projet Northern Gateway d’Enbridge, sur lequel je ne m’étendrai pas, car je soupçonne qu’elle est mieux connue des sénateurs, si ce n’est pour souligner que les efforts pour légiférer sur le moratoire visant les pétroliers de brut sur la côte Nord ont vraiment pris de l’ampleur au cours de cette période en réponse à Northern Gateway. Notamment, six projets de loi d’initiative parlementaire ont été présentés entre 2008 et 2014 pour interdire les pétroliers sur la côte Nord, tout comme une motion adoptée à la majorité par la Chambre des communes en 2010 pour réclamer une telle loi.

Ce contexte historique est important, car il montre que le gouvernement fédéral a maintes fois pris et confirmé des décisions de principe visant à maintenir les pétroliers transportant du brut hors de la région, quelle que soit l’origine du pétrole, et à interdire la mise en valeur des ressources pétrolières extracôtières de la Colombie-Britannique afin de protéger ces mêmes eaux. Cela fait suite au travail soutenu des résidants de la côte Nord et d’autres Britanno-Colombiens et Canadiens, soulignant leur point de vue selon lequel les enjeux sont trop élevés pour justifier le risque. Nous estimons que le projet de loi C-48 reflète l’histoire unique de la côte Nord de la Colombie-Britannique, et nous appuyons sa promulgation.

Le président : Merci.

Sonia Simard, directrice, Affaires législatives et environnementales, Fédération maritime du Canada : Bonjour, mesdames et messieurs. Je m’appelle Sonia Simard et je suis ici aujourd’hui au nom de la Fédération maritime du Canada, qui représente les propriétaires, exploitants et agents de navires océaniques qui transportent les importations et les exportations du Canada.

Les navires représentés par nos membres chargent et déchargent toutes sortes de cargaisons, y compris des hydrocarbures, dans différents ports du pays : sur la côte Ouest, l’Atlantique, le fleuve Saint-Laurent et les Grands Lacs. Notre association a pour mandat de contribuer aux discussions stratégiques sur le transport sécuritaire et efficace des marchandises dans les eaux canadiennes.

Compte tenu de ce qui précède, nous voudrions porter à l’attention du comité une évaluation technique antérieure de Transports Canada, notamment le processus d’examen TERMPOL visant le projet Northern Gateway.

Au cours de cette analyse technique, Transports Canada et la Garde côtière canadienne ont évalué la sécurité des routes de navigation dans le détroit d’Hecate, en tenant compte de la taille des navires-citernes, de la densité du trafic et des facteurs environnementaux. Le résultat de cette étude a amené Transports Canada à dire :

[...] les routes proposées pour la navigation sont appropriées pour les navires-citernes qui chargeraient et déchargeraient au terminal proposé [...]

[...] les routes proposées prévoient les espaces libres et les marges de manœuvre nécessaires pour assurer la bonne manœuvrabilité des navires [...]

Ainsi que les marges de manœuvre pour la sécurité de la navigation des très gros transporteurs de brut.

En d’autres termes, la propre évaluation de Transports Canada a indiqué que le régime réglementaire en vigueur, combiné à la mise en œuvre de mesures de sécurité renforcées, favoriseraient le transport sûr du pétrole sur la côte Nord de la Colombie-Britannique.

De notre côté, nous ne sommes au courant d’aucune nouvelle évaluation des risques fondée sur des faits qui ait amené Transports Canada à modifier son évaluation antérieure de la sécurité. Cela dit, nous aimerions bien préciser que nous ne sommes pas ici aujourd’hui devant le comité pour appuyer un projet pétrolier spécifique ou un autre. Nous voudrions exhorter le comité à faire en sorte que toute discussion sur l’interdiction d’exploitation de navires-citernes le long de la côte Nord de la Colombie-Britannique soit fondée sur des faits.

Les navires-citernes ont un dossier de sécurité solide. Soixante pour cent du pétrole brut mondial est transporté par des pétroliers. À l’échelle internationale, le nombre de grands déversements n’a cessé de diminuer au cours des 50 dernières années. Plus de 2,8 milliards de tonnes de pétrole sont acheminées chaque année, et 93 p. 100 de cette quantité parvient à destination en toute sécurité.

Au Canada, plus de 280 millions de tonnes de pétrole et de produits pétroliers transitent par des ports sur la côte Est : Come by Chance, Port Hawkesbury, Saint John, Montréal et Québec. Il y a des problèmes de navigation dans l’Atlantique et le fleuve Saint-Laurent. Par exemple, il y a les fortes marées dans la baie de Fundy et la navigation dans les glaces dans le golfe et le fleuve Saint-Laurent pendant plusieurs mois de l’année. Pourtant, il existe un cadre en place qui favorise le transport sans danger du pétrole dans ces voies navigables canadiennes.

Nous reconnaissons qu’aucune activité industrielle n’est sans risque et que la détermination de niveaux de risque acceptables est une décision de politique publique. Cependant, nous pensons que cette décision doit s’appuyer sur des données probantes complètes et détaillées concernant la sécurité de la navigation. À notre avis, cette partie manque pour le moment.

Transports Canada a également déclaré que la capacité d’intervention en cas de déversement qui existe actuellement sur la côte Nord de la Colombie-Britannique n’est pas aussi forte que dans d’autres régions du Canada et que, par conséquent, nous devrions instaurer un moratoire. De notre point de vue, nous nous attendions à ce que les initiatives en cours de Transports Canada et de la Western Canada Marine Response Corporation, appelée la WCRMC, visant à élaborer ce que l’on appelle des plans d’intervention localisée pour la côte Nord régleraient ce problème. En fait, il y a quelques semaines, le comité a entendu un représentant de la WCRMC qui a déclaré qu’il était possible de déployer une capacité d’intervention supplémentaire le long de la côte Nord de la Colombie-Britannique.

Outre les problèmes évoqués ci-dessus, la mise en œuvre d’un moratoire visant les pétroliers a soulevé des questions de droit international. Nous croyons que le gouvernement a tenté de contourner le conflit possible avec la liberté de navigation prévue par le droit international en définissant son moratoire comme une interdiction de chargement, de déchargement ou d’ancrage, plutôt que d’interdire le passage des pétroliers en soi. Cela, à notre humble avis, équivaut à utiliser la porte arrière pour faire ce qu’il est impossible de faire par la porte principale.

À cet égard, nous notons que le droit international permet aux États côtiers de désigner des zones maritimes particulièrement sensibles dans lesquelles un pays peut appliquer des mesures plus strictes, comme des exigences relatives au routage, après avoir mené à bien un processus éclairé d’évaluation des risques. À notre avis, toute discussion sur l’imposition de conditions aux mouvements de pétroliers sur la côte Nord devrait avoir lieu dans ce contexte, y compris la prise en compte de couloirs de navigation spécifiques. Nous vous remercions de nous avoir permis de commenter le projet de loi C-48.

Le président : Merci, madame Simard. Je demanderai au ministre de la Saskatchewan s’il accepterait de prendre la parole à partir de 10 heures, peut-être. Cela nous donnera 50 minutes avec lui avant que nous n’entendions la première ministre. Nous aurons un peu plus de temps.

Sénateurs, si vous pouviez garder vos questions succinctes et éviter un long préambule, ce serait formidable.

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci à vous deux de votre témoignage.

Monsieur Smith, il est toujours difficile d’évaluer si les citoyens sont pour ou contre un projet particulier. Y a-t-il eu un référendum ou un plébiscite organisé dans le Nord de la Colombie-Britannique qui pourrait nous donner des indications?

Vous suivez ce dossier depuis des années. Des efforts ont-ils été déployés pour désigner cette côte vierge, sur la scène internationale, comme un endroit que nous ne devrions pas exploiter?

M. Smith : En réponse à la première question concernant un plébiscite, la Ville de Kitimat, lors de la proposition relative à Northern Gateway, a organisé un référendum pour ses citoyens. Environ 58 ou 59 p. 100 des habitants de Kitimat ont déclaré qu’ils ne voulaient pas du projet de pétrolier de brut dans cette ville. La plupart des administrations locales de la région ont envoyé des lettres, notamment la Ville de Prince Rupert, Terrace, Smithers et des districts régionaux comme le district régional de Skeena-Queen Charlotte, afin de s’opposer au trafic de pétroliers dans la région et/ou de soutenir le projet de loi C-48.

À propos de votre deuxième question, je ferais remarquer qu’une importante initiative de planification marine a eu lieu dans la région, initialement dans la zone de gestion intégrée de la côte Nord du Pacifique, ou la ZGICNP, appelée Partenariat de planification marine pour la côte Nord du Pacifique, ou le MaPP. C’est un partenariat avec le gouvernement de la Colombie-Britannique et les nations autochtones. À un moment donné, cela n’incluait pas le gouvernement fédéral, mais des efforts ont été déployés pour planifier les activités maritimes sur la côte afin de protéger ces valeurs uniques.

La sénatrice Miville-Dechêne : Y a-t-il autre chose à ajouter? L’UNESCO a des programmes formidables pour ce qui est de la protection des sites.

M. Smith : Je ne suis pas certain, de prime abord, que cela ait été désigné site du patrimoine de l’UNESCO.

La sénatrice Stewart Olsen : Je viens du Nouveau-Brunswick. Je pense que la baie de Fundy est une ressource que nous chérissons tous sur notre côte, et pourtant nous autorisons la circulation des pétroliers. Nous avons la réserve de biosphère de Fundy, et nous autorisons la circulation des pétroliers. En ce qui concerne le Québec, j’ai vécu à Sept-Îles, je sais donc que les pétroliers circulent le long du fleuve Saint-Laurent, qui est un trésor pour tout le pays.

Je ne sais pas pourquoi une partie du pays est considérée comme plus précieuse qu’une autre, monsieur Smith. Pourquoi est-ce plus important là-bas que là où j’habite, qu’au Québec ou qu’aux Grands Lacs? Nous faisons partie du gouvernement fédéral et il s’agit d’une initiative nationale. Pourquoi est-ce plus important?

M. Smith : Pour commencer, selon moi, le projet de loi C-48 ne vise pas à dire que la côte Nord est plus importante que les autres régions du Canada, qui sont tout aussi importantes.

J’aimerais relever deux ou trois choses. En raison de l’histoire unique de cette région, actuellement, il n’y a pas de transporteurs de brut dans la région. Il s’agit donc de prévenir l’introduction d’un risque qui n’existe pas actuellement.

De plus, j’aimerais souligner que le Canada a d’abord imposé une interdiction de circulation des pétroliers sur la côte Est, une interdiction plus limitée, à Head Harbour au Nouveau-Brunswick, en réponse à une proposition de construction d’une raffinerie dans le Maine à l’époque. C’est en 1982, je crois, que le Règlement sur les restrictions au transport d’hydrocarbures a été adopté en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada, et il a finalement été abrogé après l’abandon de cette proposition. Il y a donc eu des efforts pour faire cela sur la côte Est également.

La sénatrice Gagné : J’avais deux questions, et M. Smith a répondu à l’une d’entre elles. Ma deuxième question s’adresse à Mme Simard.

[Français]

Mme Simard, un témoin qui a comparu la semaine dernière et dont le nom m’échappe, nous disait que, à toutes fins utiles, il serait plus sécuritaire pour la région si on permettait aux pétroliers d’avoir accès à un port, surtout dans la région de Prince Rupert, parce que la distance entre la côte et l’océan est assez limitée, soit d’environ 30 kilomètres.

On a mentionné que, tout en permettant le passage de pétroliers, on pourrait prévoir une évaluation du risque pour traiter des incidents possibles. Une telle évaluation du risque pourrait sécuriser la région pour toutes sortes de vaisseaux différents qui y circulent. Seriez-vous en mesure de faire des commentaires à ce sujet, puisque vous avez fait référence à la possibilité d’un corridor?

Mme Simard : Qu’il s’agisse de ce corridor ou d’un autre, il est important d’effectuer cette évaluation du risque et une évaluation des mesures de réduction du risque. On parle de distances par rapport à la côte, mais il existe d’autres mesures possibles de réduction du risque, avec l’aide du Système d’information maritime (SIM) utilisé au Canada en ce qui a trait notamment au pilotage et à l’escorte. Différentes mesures existent en plus de celles qui sont liées aux distances physiques de la côte, et ce, afin de permettre un transport sécuritaire. Nous croyons qu’il est important de tenir compte de cela dans le cadre de l’étude du projet de loi C-48.

La sénatrice Gagné : Merci.

[Traduction]

Le sénateur Plett : J’ai trois brèves questions à vous poser et, si vous pouviez me donner des réponses tout aussi brèves, je pourrais toutes vous les poser.

Quelle est la taille moyenne d’un pétrolier qui emprunte cette route? L’interdiction s’applique aux pétroliers de 12 500 tonnes et plus. Quelle est la taille moyenne des pétroliers en question? Est-ce que l’un de vous a la réponse à cette question?

Mme Simard : Je ne connais pas la taille moyenne exacte, mais en fait, il n’y a pas de navires-citernes de haute mer actuellement. Il s’agit de remorqueurs-chalands; nous parlons bien de la circulation dans le détroit d’Hecate?

Le sénateur Plett : Je suppose que, si les navires passent par là en transportant 12 450 tonnes, ils seraient légalement autorisés à passer. Je me demande dans quelle mesure cela serait une restriction.

Mme Simard : Je comprends votre question. Je devrai revenir là-dessus, car il s’agirait de pétroliers intérieurs. Nous n’avons pas cette information. Nous représentons les navires de haute mer, et il ne s’agit pas de cela. Les navires de plus petit tonnage qui naviguent actuellement le long de la côte servent le marché intérieur. Je vais devoir vous revenir là-dessus.

Le sénateur Plett : Si vous le pouviez, je vous en serais reconnaissant.

Mme Simard : Je le ferai.

Le sénateur Plett : L’un de vous pourrait-il me dire quelle est actuellement la route la plus dangereuse pour le transport de pétrole au Canada? Ce n’est certainement pas cette route-là? Quelle est actuellement la route la plus dangereuse pour le transport de pétrole au Canada?

Mme Simard : Je ne suis pas marin, je n’ai donc pas la réponse pour ce qui est de la route la plus dangereuse. Chaque année, 280 millions de tonnes de pétrole sont transportées en toute sécurité. Je n’ai aucune évaluation en ce qui concerne la route la plus dangereuse au Canada.

Le sénateur Plett : Il serait probablement plus difficile de transporter du pétrole près de Terre-Neuve-et-Labrador qu’en Colombie-Britannique?

Mme Simard : Peut-être que chaque route présentera des difficultés différentes, comme les marées et la glace.

Le sénateur Plett : Je crois qu’on a soulevé la question de l’Exxon Valdez ce matin, et je m’excuse si ce n’est pas le cas. Il a été mentionné à quelques reprises comme étant un motif. Le ministre l’a présenté comme un exemple de grand danger, et pourtant l’Alaska n’a réduit aucun de ses transports pétroliers à cause de cela. L’Alaska a plutôt réglé les problèmes et a davantage renforcé la sécurité. Avez-vous des commentaires à cet égard? Pourquoi utilisons-nous constamment l’Exxon Valdez comme motif pour interdire les pétroliers? Ce n’est peut-être pas à vous de répondre à la question, mais j’aimerais avoir un commentaire.

M. Smith : Je peux faire un bref commentaire. C’est important pour ce qui est de démontrer les répercussions de ce type de déversements et tout ce qui pourrait être menacé dans la région de la côte Nord.

Le sénateur Plett : Mais pas le danger?

M. Smith : Je ne suis pas certain de comprendre la question.

Le sénateur Plett : Vous avez parlé des répercussions d’un déversement, mais pas du danger d’un déversement. Une fois encore, je pense que cela pourrait être plus dangereux d’envoyer des pétroliers là-bas qu’ici.

M. Smith : Je ne suis pas certain d’être qualifié pour parler des dangers particuliers aux deux endroits, mais je pense que la mention de l’Exxon Valdez est justifiée en raison de l’importance des répercussions qu’il a eu sur les écosystèmes.

Le sénateur Plett : Merci.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Monsieur Smith, pouvez-vous nous parler du financement de votre organisation?

[Traduction]

M. Smith : De rien. Je suis ravi d’avoir l’occasion de parler de cette question. J’ai deux ou trois réponses à donner. Pour répondre directement à la question, la Law Foundation of British Columbia est le partenaire financier de West Coast Environmental Law Association depuis 1974. Nous demandons et recevons des fonds d’autres sources, y compris des dons privés et des legs des particuliers, nous avons des ententes de services payants avec les clients et ainsi de suite.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Recevez-vous du financement de la part de la fondation Bullitt de Seattle, de la fondation Gordon and Betty Moore de la Californie, ainsi que de la fondation Oak des États-Unis, dont l’action politique consiste à s’opposer à toute construction de pipeline?

[Traduction]

M. Smith : La West Coast Environmental Law Association — j’allais y arriver — accepte et demande également des fonds des fondations, qu’elles soient des fondations américaines ou canadiennes.

Le deuxième commentaire que j’aimerais formuler, en particulier en tant que personne qui est née et qui a grandi en Colombie-Britannique et qui s’occupe de ce dossier par réel souci pour les terres et les eaux de cette région, c’est que je suis quelque peu troublé par les questions sur le financement...

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je comprends, mais ma question n’a pas trait à cela; ma question porte sur votre financement.

Étant donné que vous recevez beaucoup de financement de la part des Américains, dont la Fondation Oak, je crois, qui s’objecte à toute construction de pipeline, ne croyez-vous pas que, en vous objectant de manière absolue à toute construction de pipeline vers l’Ouest canadien, vous faites le travail des Américains, qui ne veulent absolument pas que le pétrole canadien soit acheminé vers l’Asie? En acheminant le pétrole vers l’Asie, on obtiendrait 30 p. 100 de plus en termes de revenus et, à ce moment-là, les Américains seraient obligés de payer le prix mondial du pétrole plutôt que de le payer 30 p. 100 moins cher. En vous opposant comme vous le faites, ne faites-vous pas aussi le travail des Américains, qui s’opposent à ce que le pétrole canadien soit vendu ailleurs qu’aux États-Unis?

[Traduction]

M. Smith : Non, je ne fais absolument pas ce travail pour le compte d’organisations américaines. Je travaille pour la West Coast Environmental Law Association, dont l’objectif est de renforcer et de faire appliquer les lois canadiennes sur l’environnement, et de fournir de l’information juridique et des ressources aux citoyens.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Toutefois, votre organisme est financé par des organisations américaines. Je comprends que vous faites votre travail, mais, puisque votre organisme est financé par des organisations américaines, vous devez tenir compte de leurs orientations en matière environnementale, n’est-ce pas?

[Traduction]

M. Smith : Pour répondre à cette question, ce que je trouve troublant également, c’est que les organismes du secteur qui comparaissent devant le Sénat reçoivent également des fonds. D’après les comptes rendus que j’ai examinés, il n’y a pas de question au sujet de leur financement.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Ma question n’est pas là. Merci beaucoup.

[Traduction]

M. Smith : Si vous me permettez de terminer, je n’ai entendu personne leur poser des questions au sujet de leur financement. Dans un marché mondial, le financement des organismes de l’industrie provient également de sources internationales. Ce n’est en aucun cas un manque de respect. C’est la nature du monde dans lequel nous vivons. Les écosystèmes ne respectent pas eux non plus les frontières. Je pense que les gens dans le monde entier se préoccupent à juste titre des écosystèmes et des espèces uniques qui existent au Canada.

Je travaille pour la West Coast Environmental Law Association et je cherche à réaliser les objectifs de cet organisme. Comme je l’ai dit, la Law Foundation of British Columbia est notre partenaire financier depuis 1974.

Le président : Qu’est ce que la West Coast Environmental Law Association? Qui en fait partie?

M. Smith : La West Coast Environmental Law Association est un groupe d’avocats et a été fondée en 1974 par un groupe d’étudiants en droit de l’Université de la Colombie-Britannique. Le conseiller juridique de l’association a comparu dans le cadre de l’Enquête en 1977 sur les ports pétroliers de la côte Ouest, et depuis, nous nous occupons de la promotion du renforcement et de l’application des lois sur l’environnement.

Le président : Combien d’avocats en font partie?

M. Smith : Je crois qu’ils sont10.

Le président : Combien d’employés comptez-vous?

M. Smith : Je dirais une vingtaine, mais je ne sais pas.

Le président : Vous avez donc 20 employés et 10 membres?

M. Smith : Non, nous avons 20 employés, dont 10 avocats.

Le président : Combien de membres font partie de la West Coast Environmental Law Association? Combien de membres comptez-vous dans votre association?

M. Smith : Je comprends. Nous effectuons généralement un travail axé sur les clients pour les Premières Nations ou d’autres groupes. Nous ne sommes pas un organisme axé sur les membres, en ce sens. Nous travaillons pour des clients qui cherchent à protéger les terres et les eaux qui leur tiennent à cœur, et nous travaillons également pour défendre l’environnement dans...

Le président : Donc, vous êtes en réalité un cabinet d’avocats.

M. Smith : En un sens, oui.

Le président : Vous n’êtes pas une simple association environnementale de la côte Ouest; vous êtes un cabinet d’avocats et vous travaillez pour des groupes de défense de l’environnement?

M. Smith : Oui, nous sommes une organisation juridique et nous cherchons à renforcer et à faire appliquer les lois sur l’environnement du Canada.

Le président : Je vais simplement poser une autre question liée à la question du sénateur Boisvenu. Quel est le pourcentage des fonds que vous recevez des groupes étrangers? Quel pourcentage de votre budget total est constitué de dons étrangers?

M. Smith : Je ne peux pas répondre à cette question spontanément.

Le président : Pourriez-vous nous transmettre la réponse?

M. Smith : Je sais que nous publions les informations relatives au financement dans nos rapports annuels, et je me ferai un plaisir de vous les transmettre.

Le président : Vous travaillez-là? Êtes-vous avocat?

M. Smith : Je suis avocat pour la West Coast Environmental Law.

La sénatrice Stewart Olsen : J’aimerais avoir une simple précision, bien que le sénateur Tkachuk a bien expliqué les choses selon moi.

Ne considérez-vous pas cela comme un conflit d’intérêts? Le droit de l’environnement, c’est le rêve des avocats plaidants. Donc, des avocats se réunissent, forment une association et se font appeler une association environnementale pour le droit environnemental. J’ai du mal à comprendre. Je pense qu’il y a un conflit d’intérêts quand vous venez témoigner contre certaines choses. C’est juste que je ne comprends pas.

M. Smith : L’objectif de notre travail est de préconiser le renforcement des lois en matière d’environnement. C’est pourquoi, dans ce contexte, je comparais devant votre comité pour appuyer le projet de loi C-48. Je ne vois pas cela comme un conflit d’intérêts.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci.

Le sénateur Manning : Très rapidement, j’ai la réponse à la question du sénateur Plett. En 1990, le rapport Brander-Smith, qui a été publié en réaction au désastre de l’Exxon Valdez, a reconnu que la baie de Plaisance à Terre-Neuve-et-Labrador, était l’endroit le plus propice aux déversements de pétrole au Canada. Il y a 365 îles dans la baie de Plaisance, et je les connais très bien parce que j’y habite. En moyenne, nous avons 200 jours de brouillard par an. Nous avons l’installation de stockage de pétrole de Whiffen Head, la gare maritime de Marine Atlantic, des installations de traitement du poisson, 1 000 navires de pêche, une usine de transformation du nickel, alimentée par des pétroliers et, comme je l’ai dit, nous sommes connus pour être l’endroit le plus brumeux au Canada. Pour ce qui est des passages ou de la circulation des pétroliers, j’ai demandé il y a quelques semaines aux membres du comité de se rendre à Terre-Neuve pour se renseigner; car je m’assois tous les jours pour observer les allées et les venues des pétroliers.

Monsieur Smith, vous avez dit rapidement que vous vous souciez de la terre et de l’eau. Étant originaire de Terre-Neuve-et-Labrador, une région entourée d’eau, je partage vos préoccupations en ce qui concerne la terre et l’eau, mais je suis également préoccupé par l’économie du Canada.

Si je comprends bien — je peux me tromper, et c’est pourquoi je pose la question —, il y a déjà des navires qui arrivent de l’Alaska et qui passent dans cette région. Est-ce le cas? On ne peut pas empêcher un autre pays de faire cela, d’après ce que j’ai compris. Mais ce que je comprends, c’est qu’il y a déjà beaucoup de circulation dans cette région. Est-ce le cas?

M. Smith : Parlons des transporteurs de brut; ceux qui partent de Valdez, en Alaska, respectent la zone volontaire d’exclusion des pétroliers, qui avait été négociée à titre provisoire, initialement, en 1985, puis mise en œuvre officiellement en 1988.

Le sénateur Manning : Il y a un corridor pour les pétroliers dans la baie de Plaisance. Un bateau pilote amène les pétroliers à un certain endroit, puis, près de l’installation de stockage de pétrole, un bateau remorqueur les prend en charge.

D’après les discussions que vous avez eues avec les groupes de votre région, serait-il possible d’établir un corridor où les pétroliers pourraient circuler et être escortés et qui permettrait de protéger, en priorité, l’environnement et l’eau, au lieu d’interdire carrément la circulation? Il y a beaucoup d’endroits au monde — je suis sûr que c’est le cas au large du Nouveau-Brunswick et de la baie de Fundy — où les pétroliers ne peuvent pas circuler n’importe où comme le ferait une simple voiture. Ils doivent rester dans leur corridor. Selon moi, il s’agit d’un compromis acceptable qui nous permettrait de mener les activités économiques dont nous avons besoin. Votre association serait-elle prête à étudier cette possibilité?

M. Smith : À mon avis, l’objectif du projet de loi C-48 est d’empêcher l’introduction de tout risque dans la région. Je sais que des mémoires ont été présentés au comité de la Chambre des communes, même si je ne sais pas s’ils ont été fournis à votre comité sénatorial. Par exemple, celui de la Raincoast Conservation Foundation portait sur l’interdépendance entre les eaux et les terres de la région, et cetera. Je crois que tout risque potentiel que l’on pourrait introduire dans ce corridor pourrait avoir un impact sur le reste de la région, et c’est pourquoi je ne pense pas qu’un corridor soit approprié.

Le sénateur Manning : Encore une fois, j’essayais seulement de trouver un terrain d’entente. Dès qu’un pétrolier circule quelque part dans le monde ou près du Canada, il y a un risque, non? Les pétroliers posent des risques, n’est-ce pas? Nous prenons tous des risques. Je prends un vol demain soir pour me rendre à Terre-Neuve; c’est aussi un risque. Nous prenons des risques tous les jours. Cela aussi pose des risques, non? Je n’arrive pas à croire que nous ne pouvons pas trouver de terrain d’entente.

M. Smith : Je suis d’accord, bien sûr, pour dire qu’il y a un risque, mais je crois que la décision de politique publique reflétée dans le projet de loi C-48 s’appuie sur le fait que les risques, dans cette région donnée, compte tenu de ce qui est menacé, ne sont pas appropriés, et nous sommes du même avis.

Le président : Nous allons devoir conclure là-dessus. Merci beaucoup, monsieur Smith et madame Simard, de vos témoignages.

Voici notre deuxième groupe de témoins d’aujourd’hui. Nous accueillons avec plaisir M. Jeremy Harrison, ministre du Commerce et du Développement des exportations du gouvernement de la Saskatchewan. M. Harrison a été député fédéral de la Saskatchewan de 2004 à 2006, et il représente aujourd’hui la merveilleuse circonscription de Meadow Lake, en Saskatchewan. Merci d’être parmi nous.

L’hon. Jeremy Harrison, ministre du Commerce et du Développement des exportations, Gouvernement de la Saskatchewan : Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous en suis reconnaissant. Merci au comité de m’avoir invité ici aujourd’hui. Il y a autour de la table beaucoup de gens avec qui j’ai eu la chance de travailler dans différents contextes au cours des 20 années que j’ai passées au gouvernement jusqu’ici. C’est presque effrayant d’y penser. Je suis très heureux d’être ici pour témoigner dans le cadre de votre étude. C’est une étude très importante, et c’est un honneur pour moi de représenter devant vous le premier ministre Scott Moe et le gouvernement de la Saskatchewan.

Je vais prendre quelques instants pour vous exposer notre point de vue sur le projet de loi C-48, les conséquences potentielles du projet de loi et ses retombées sur notre province et notre nation.

Soyez assuré que la discussion sur le projet de loi C-48 a énormément d’importance pour la Saskatchewan, et j’encourage les membres du comité à visiter la Saskatchewan. Je suis en mesure d’offrir le soutien et l’aide de notre gouvernement afin d’organiser des visites guidées pour que vous puissiez recueillir les commentaires de diverses collectivités de la province, par exemple à Weyburn, à Kindersley, à Estevan ou à Lloydminster. Il y a plusieurs collectivités que vous pourriez visiter aux fins de vos délibérations.

Nous accordons énormément d’importance à ce qui se passe présentement, parce que le projet de loi C-48, s’il est adopté, aura de graves répercussions négatives sur notre province.

Même si la Saskatchewan représente seulement 3 p. 100 environ de la population canadienne, elle produit 36 p. 100 de l’énergie primaire du pays. Les principales industries dans le secteur des ressources de notre province sont les exploitations minière, pétrolière et gazière. Ensemble, ces industries ont contribué, en 2017, 13 milliards de dollars au PIB réel par industrie, soit 21 p. 100 du PIB réel par industrie, en Saskatchewan, en 2017.

Il est évident que les secteurs des ressources sont une composante fondamentale de notre base économique, mais l’industrie pétrolière et gazière est le plus important moteur économique de notre province. Elle attire des investissements représentant des milliards de dollars et est l’un des principaux facteurs de notre prospérité économique globale et de notre grande qualité de vie par rapport à d’autres pays.

À elle seule, la production pétrolière et gazière compte pour 15 p. 100 du PIB de la Saskatchewan, selon les estimations. Nous avons produit près de 500 000 barils de pétrole par jour en 2018, ce qui fait de la Saskatchewan le sixième producteur de pétrole à terre au Canada et aux États-Unis. Nous produisons environ 12 p. 100 du pétrole brut du Canada.

Ces chiffres s’expliquent par le fait que la Saskatchewan est une province de choix pour les investissements dans l’industrie. Selon ce que répètent les gens de l’industrie, la Saskatchewan a un environnement extrêmement propice aux investissements. Certaines des meilleures et des plus efficientes possibilités d’exploitation du pétrole et du gaz se trouvent dans notre province. À dire vrai, lorsque les investisseurs des quatre coins du monde s’intéressent à la Saskatchewan, c’est habituellement dans un contexte d’exploitation pétrolière et gazière.

Le projet de loi C-48 menace tout cela de plusieurs façons. Premièrement, en matière de sécurité, le projet de loi C-48 ne prévoit pas de processus décisionnel axé sur des données probantes. Il fait fi des capacités et des résultats impressionnants de la réglementation maritime du Canada et de son régime d’intervention en cas de déversement de pétrole. C’est un véritable atout pour le Canada, et nous devrions en être fiers.

Compte tenu des antécédents exemplaires du Canada en ce qui a trait à la sécurité des navires pétroliers, rien ne justifie de les interdire. Environ 20 000 pétroliers circulent chaque année dans les eaux canadiennes, et, depuis près de 20 ans, il n’y a eu aucun cas de déversement accidentel majeur, c’est-à-dire un déversement de 7 000 tonnes ou plus. Le dernier accident est survenu en 2000.

En réalité, les statistiques canadiennes et mondiales montrent toutes deux qu’il y a une tendance à la baisse du volume et de la fréquence des déversements accidentels de pétrole par des pétroliers. Nos politiques doivent être non pas fondées sur de fausses données ou faites en l’absence de données, mais prises en fonction des données réelles, comme celles que je viens de mentionner.

Deuxièmement, l’interdiction des pétroliers prévue dans le projet de loi C-48 empêcherait injustement les producteurs de pétrole de l’Ouest canadien d’accéder aux côtes. Notre situation est déjà difficile et le projet de loi C-48 ne ferait qu’empirer les choses. Notre industrie pétrolière a urgemment besoin d’un accès accru au marché. Sans cela, les conséquences économiques et les risques environnementaux sont inévitables. Par exemple, la demande de transport de pétrole par rail a atteint un nouveau sommet, et très bientôt, 300 000 barils de pétrole circuleront par rail chaque jour. Par voie de conséquence, il y aura une augmentation du nombre de défis logistiques et des coûts pour les producteurs de pétrole de l’Ouest canadien, mais aussi pour toutes les autres industries qui dépendent des chemins de fer, comme l’industrie minière et l’industrie agricole.

Il s’agit d’un déficit infrastructurel, et nous nous l’infligeons nous-mêmes. Nous allons étouffer une industrie essentielle à l’économie de notre province et de notre pays. Le Canada va perdre plus de 15 milliards de dollars annuellement en recettes pétrolières, et nous serons à la merci des écarts de prix qui ne cessent de fluctuer dans le marché mondial, des écarts qui, il n’y a pas si longtemps, étaient très prononcés. Nous allons perdre notre capacité d’investir dans les autres priorités provinciales. Nous ne pouvons pas permettre cela.

Troisièmement, à l’échelle mondiale, le projet de loi va nous empêcher de répondre aux besoins énergétiques grandissants, même si notre pétrole est l’un de ceux qui est produit de la manière la plus responsable au monde. Le Canada se classe parmi les premiers pays au monde pour ce qui est de l’éthique et des bonnes pratiques de l’industrie pétrolière. La gérance de l’environnement, la transparence, la reddition de comptes, la sécurité de l’approvisionnement, la sûreté et les droits de la personne font partie de nos valeurs. Dans le marché mondial d’aujourd’hui, nous croyons que cela peut avoir et a effectivement de la valeur.

À l’échelle mondiale, seulement près d’un quart du pétrole est produit par des pays qui ont adopté le genre de pratiques exemplaires que l’industrie met en œuvre au Canada. L’ironie, donc, c’est que ce sont des pays comme le nôtre, qui se classent premiers en matière de compétitivité dans le marché libre et qui ont la meilleure réglementation au monde, qui déploient le plus d’efforts pour paralyser l’industrie. Le projet de loi C-48 en est un excellent exemple.

Le gouvernement fédéral aurait pu choisir, au lieu de proposer le projet de loi C-48, de s’attaquer aux risques de déversements pétroliers en renforçant la réglementation et les pratiques d’intervention existantes, lesquelles sont déjà très efficaces. Il y a, par exemple, l’inspection obligatoire de tous les pétroliers afin de s’assurer qu’ils sont dotés d’une coque double. Les pétroliers doivent également faire appel, conformément à la loi, à des bateaux pilotes pour entrer dans les ports canadiens et en sortir, et ils doivent être remorqués par des remorqueurs dans les zones où il y a peu de place. Une surveillance aérienne constante est assurée, afin de repérer les déversements, et nous avons des systèmes de préparation aux situations d’urgence et d’intervention qui tiennent compte de la main-d’œuvre, des bateaux et des outils dont nous disposons pour contenir les déversements. Je crois qu’il serait bien plus utile de consacrer notre temps et nos efforts au renforcement des services et de l’expertise dans ce domaine.

Quatrièmement, rien ne justifie vraiment d’interdire les pétroliers, comme cela est prévu dans le projet de loi C-48. Il y a plus de 243 000 kilomètres de côtes au Canada, et les pétroliers transportent régulièrement près de 80 millions de tonnes de pétrole par année dans nos eaux côtières.

Les gens qui soutiennent l’interdiction disent que le pétrole et les produits pétroliers sont les principaux produits manutentionnés aux ports canadiens, en fonction du volume, à raison de 80 000 tonnes par année ou 20 p. 100 du tonnage total. Malgré tout, les pétroliers représentent une toute petite partie de la circulation maritime, moins de 1 p. 100 des navires en provenance ou à destination des ports de la côte Ouest. Pour être précis, on parle de 1 487 pétroliers sur 200 000 bateaux par année.

Une telle interdiction des pétroliers, c’est du jamais vu au Canada. Nous n’avons jamais même songé à imposer une interdiction similaire sur les autres côtes canadiennes, que ce soit la Voie maritime du Saint-Laurent ou au Nouveau-Brunswick, à Terre-Neuve-et-Labrador ou à Vancouver, même s’il s’agit de régions, dans l’ensemble, où des pétroliers circulent souvent de nos jours.

Cinquièmement, le projet de loi C-48 porte un nouveau coup aux investissements stratégiques clés censés appuyer la croissance économique nationale et régionale du Canada. Pour vous donner un exemple d’investissements, il y a le projet d’oléoduc « Eagle Spirit Energy corridor », qui est soutenu par des dizaines de Premières Nations situées le long du parcours, sur la côte Nord de la Colombie-Britannique. Il s’agit d’un oléoduc de 16 milliards de dollars qui parcourt 1 500 kilomètres pour transporter du brut moyen et du brut lourd de Fort McMurray, en Alberta, vers le port de Grassy Point, près de Prince Rupert, en Colombie-Britannique.

Le projet Eagle Spirit est censé être une solution de rechange au projet Northern Gateway qui a été annulé par le gouvernement fédéral et au projet d’agrandissement du réseau Trans Mountain qui est en suspens depuis très longtemps. Nous avons désespérément besoin de cette solution de rechange, qui permettra à l’industrie pétrolière canadienne de composer avec des obstacles commerciaux uniques, des obstacles qui ont parfois été délibérément imposés. Le projet de loi C-48 va sonner le glas de ce projet et éliminer indûment une occasion majeure de développement économique autochtone.

Sixièmement, en conclusion, le projet de loi va à l’encontre des efforts déployés par la Saskatchewan pour encourager et favoriser la croissance responsable, durable et à long terme de notre industrie pétrolière.

Notre province a un potentiel et une capacité de croissance considérables. On estime que le pétrole initial classique en place en Saskatchewan pourrait remplir 56 milliards de barils et, grâce à la technologie actuelle, nous sommes en mesure d’en récupérer 12 p. 100 à des fins commerciales. Cela veut dire que nous devons élaborer de nouveaux processus de récupération du reste. Nous avons réalisé de grands progrès grâce aux nouvelles technologies de forage et de complétion ainsi que grâce aux travaux de recherche sur la récupération assistée du pétrole. Dans cette optique, nous accordons la priorité à l’innovation en matière de récupération du pétrole restant.

En Saskatchewan, nous ne voulons pas utiliser de vieilles idées pour trouver de nouvelles ressources pétrolières. Nous préférons accéder aux vieilles ressources pétrolières grâce à de nouvelles idées. C’est de cette façon que nous pourrons véritablement saisir les occasions qui s’offrent à nous. Grâce aux nouvelles technologies, nous pouvons accéder de plus en plus aux richesses énergétiques souterraines de notre province.

Le gouvernement de la Saskatchewan est fier d’être reconnu comme étant l’un des chefs de file mondial en matière de captage, de stockage et d’utilisation du carbone. Nous avons stocké plus de 30 millions de tonnes de dioxyde de carbone dans les formations géologiques profondes et les champs pétrolifères de notre province. Cela nous permet, entre autres choses, d’utiliser continuellement nos combustibles fossiles tout en respectant nos objectifs en matière d’émissions et de sécurité énergétique.

Récemment, nous avons annoncé un plan de réduction du méthane visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre attribuables aux rejets et au brûlage de gaz par l’industrie pétrolière et gazière en amont. Nous visons une réduction de 4,5 millions de tonnes par année d’ici 2025. Nous avons fixé les objectifs en consultation avec l’industrie. Ce plan nous aidera à remplir nos objectifs relativement aux changements climatiques tout en laissant à l’industrie la flexibilité nécessaire pour mettre en œuvre les mesures de réduction de façon efficiente et durable sur le plan commercial.

Chaque année, notre province génère des milliards de dollars de recettes et de redevances grâce aux activités et aux exportations de l’industrie des ressources.

L’exploitation des ressources, en particulier l’exploitation pétrolière et gazière, occupera toujours une place importante dans l’avenir économique de la Saskatchewan et, par extension, du monde. En ce moment même, nous sommes en train de tracer la voie de l’avenir grâce à des politiques conçues pour favoriser la croissance économique. Nos entreprises d’exploitation des ressources sont novatrices et compétitives, et de nombreuses collectivités dépendent d’elles. Elles sont dans une excellente position pour répondre aux besoins futurs.

Il y a peu d’entreprises au monde qui soient aussi robustes et dynamiques. Notre rôle, comme gouvernement, est donc de prendre toutes les mesures possibles pour assurer la continuité de leurs activités, et nous le faisons en maintenant et en renforçant un régime de redevances stable en Saskatchewan et en adoptant des politiques connexes responsables et claires. Nous accordons la priorité à la collaboration avec les autres intervenants de notre province. Fait plus important encore, nous reconnaissons la valeur de la contribution de l’industrie pétrolière et gazière pour notre qualité de vie et les possibilités qu’elle offre à notre génération et aux générations futures. Nous lui en sommes reconnaissants.

Récemment, près de 2 000 personnes se sont rassemblées à Regina pour former le plus long convoi de camions de l’histoire, long de plus de 700 camions. Cette industrie s’adapte et évolue continuellement afin de surmonter les problèmes d’aujourd’hui et de se préparer à ceux de demain.

Nous faisons de notre mieux pour soutenir l’industrie dans notre province, et nous comptons bien continuer. À de nombreux égards, l’important est d’être à l’écoute de nos partenaires et des intervenants et de collaborer avec eux. Nous devons comprendre précisément et clairement l’interdépendance et la nature intégrée de l’industrie énergétique. Elle nous concerne tous, et notre avenir collectif en dépend.

Le Canada est le seul pays au monde qui ne peut pas exporter son pétrole dans d’autres continents. Très concrètement, nous limitons nous-mêmes notre capacité à réaliser pleinement notre potentiel économique de construire le pays que les Canadiens attendent et méritent.

Tous les ordres de gouvernement ont des comptes à rendre aux Canadiens et doivent prendre des décisions responsables qui permettront au Canada d’atteindre son plein potentiel et de combler ces attentes. Pour toutes ces raisons, le projet de loi C-48 ne peut pas et ne doit tout simplement pas être adopté.

Merci beaucoup.

Le président : Merci, monsieur le ministre.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le ministre, d’être parmi nous.

En Saskatchewan, c’est bien vu de former un convoi de 2 000 camions. À Ottawa, les manifestants seraient traités de racistes. C’est vraiment dommage.

J’ai promis au sénateur Cormier que j’allais vous poser une question, alors je vais commencer par cela. Je crois que vous étiez dans la tribune lorsque je l’ai proposé.

Monsieur le ministre, beaucoup parmi nous aimeraient visiter les régions les plus susceptibles d’être dévastées par cet affreux projet de loi. Il est clair que la Saskatchewan en entier sera dévastée, ainsi que toute l’Alberta et possiblement l’ensemble de la Colombie-Britannique et, à dire vrai, le Canada au grand complet. Certains — mais pas tous — aimeraient visiter Estevan. Pouvez-vous nous dire pourquoi nous devrions visiter cette ville et ce que vous pourriez faire pour nous?

M. Harrison : Je vous remercie de la question. Nous encourageons vivement le comité à se rendre dans la ville d’Estevan. Nous vous encourageons à visiter non seulement Estevan, mais également les autres collectivités de la province afin que vous puissiez constater de vos propres yeux les retombées des politiques du gouvernement national, qui ont eu un effet négatif très important sur le secteur énergétique. Ce projet de loi et le projet de loi C-69 auront de très grandes conséquences négatives, comme je l’ai déjà expliqué dans ma déclaration préliminaire.

Les politiques du gouvernement fédéral ont des conséquences dans le vrai monde pour de vraies personnes qui vivent des moments très difficiles. J’encourage de tout cœur les députés et les sénateurs à aller voir ces personnes et à leur parler. Ce sont des gens très aimables qui travaillent dur. Il y a eu une manifestation à Regina, la semaine dernière, et certains participants, les personnes dont je parle, ont été visées par le même genre d’accusations. Ce sont de bonnes personnes qui travaillent dur, et je vous encourage à aller les voir et à leur parler.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le ministre. Ma prochaine question porte sur le transport ferroviaire. Vous avez effleuré la question, plus tôt. En ce qui a trait au transport du pétrole, la situation n’est pas la même au Manitoba qu’en Saskatchewan ou en Alberta, même si nous avons bel et bien du pétrole.

Nous sommes tous autant désavantagés lorsque le CP ou le CN refusent de transporter notre grain. Comme vous le savez, monsieur le ministre, nous avons réagi il y a quelques années en adoptant la Loi sur la sécurité ferroviaire et d’autres mesures législatives, et le CN et le CP refusent d’admettre qu’ils ont décidé de transporter du pétrole même si cela cause des préjudices aux agriculteurs, alors que c’est une évidence.

Pouvez-vous, brièvement, nous parler de la situation que cela crée dans votre province, en Alberta et dans la province du Manitoba? Le CP et le CN transportent du pétrole par chemin de fer — la méthode la plus dangereuse — et, par conséquent, ne sont pas en mesure de transporter les grains vers les ports, alors que nous avons un besoin criant d’expédier nos grains. Quelles sont les conséquences pour l’industrie pétrolière et aussi pour l’industrie agricole?

M. Harrison : C’est une très bonne question. Vous avez absolument raison. Nous avons effectivement observé que le volume de pétrole transporté par chemin de fer a augmenté de manière phénoménale au cours des 10 ou 15 dernières années. Une cause directe est le fait qu’il est impossible de faire construire des pipelines au Canada. Voilà la raison. Voilà la conséquence directe.

Le pétrole va devoir être transporté d’une façon ou d’une autre. Présentement, il est transporté par chemin de fer. Au bout du compte, quelque 300 000 barils de pétrole circuleront sur les voies ferrées tous les jours, au détriment des autres marchandises qui, autrement, auraient été transportées par chemin de fer en quantités équivalentes. Cela a des retombées très graves sur l’agriculture, comme nous l’avons constaté il y a un certain nombre d’années. Nous avons été très reconnaissants au gouvernement fédéral, qui avait alors décidé de prendre des mesures positives et dynamiques relativement au volume des marchandises agricoles transportées. Nous avons été très contents de cela.

Les sociétés ferroviaires canadiennes ont tout de même, c’est tout à leur honneur, effectué des investissements en vue d’accroître leur capacité et de désengorger certaines parties du système, ce qui leur a permis d’accroître le volume global de marchandises transportées par rail. Il est clair que le volume de pétrole transporté par chemin de fer a une incidence sur le secteur agricole, le secteur de la potasse et le secteur forestier également, qui est tout aussi importante dans ma province. Tous ces problèmes sont causés directement par l’impossibilité de construire des pipelines au Canada.

Il y a deux ou trois semaines, j’ai eu l’honneur de représenter ma province à Singapour et ailleurs en Asie. Les ministres des autres pays sont toujours très étonnés; ils n’arrivent pas à comprendre pourquoi le Canada, qui est si riche en ressources, n’arrive pas à acheminer ses marchandises jusqu’aux marchés. Pour eux, c’est incompréhensible. Ils comprennent encore moins lorsque nous essayons de leur expliquer pourquoi nous n’y arrivons pas.

Notre province et ses habitants éprouvent une énorme frustration à ce sujet, et nous avons dit explicitement que nous voulons qu’un pipeline soit construit. Northern Gateway, Keystone XL et Energy East, j’ai soutenu tous ces projets. Le Canada doit se doter de pipelines, parce que c’est de loin la façon la plus sécuritaire de transporter l’énergie, comme vous l’avez mentionné, monsieur le sénateur, dans votre question.

Le transport par rail est probablement le mode de transport le plus difficile et le plus risqué qui soit. Les pipelines sont beaucoup plus sécuritaires, mais, à cause des décisions stratégiques du gouvernement du Canada, nous sommes incapables de transporter l’énergie par pipeline.

[Français]

Le sénateur Cormier : Bienvenue au Sénat du Canada, monsieur le ministre. Vous savez que la très bonne nouvelle, c’est que le comité se rendra en Saskatchewan très bientôt, et nous serons heureux d’entendre les gens d’Estevan lorsqu’ils se rendront à Regina. Nous avons pris une résolution très intéressante à ce sujet. Donc, nous souhaitons entendre les gens de la Saskatchewan.

Vous connaissez certainement les deux propositions d’amendements que le gouvernement de l’Alberta a présentées dans son mémoire. Je vous les lis rapidement, et je cite :

Modifier la Loi sur le moratoire relatif aux pétroliers de manière à exiger une évaluation scientifique pour l’établissement de la liste proposée des substances.

Modifier la Loi sur le moratoire relatif aux pétroliers afin de redéfinir la zone protégée en fonction de critères scientifiques et socioéconomiques qui seront soumis à des examens périodiques.

Quelle est la position du gouvernement de la Saskatchewan sur ces propositions d’amendements? Votre gouvernement accepterait-il un projet de loi C-48 qui comprendrait certains compromis, comme ceux que propose le gouvernement de l’Alberta?

[Traduction]

M. Harrison : Je n’ai pas eu l’occasion d’examiner les modifications proposées par le gouvernement albertain, mais nous sommes d’avis que le projet de loi C-48 n’a pas de raison d’être. Nous nous opposons à ce projet de loi, même s’il était modifié. Cependant, nous n’avons pas encore examiné les détails de la proposition du gouvernement de l’Alberta.

[Français]

Le sénateur Cormier : Merci, monsieur.

Le sénateur Boisvenu : Bienvenue, monsieur le ministre Harrison. Ma première question est de nature statistique. Quel est le pourcentage de votre pétrole qui est vendu aux Américains par rapport à celui qui est vendu aux Canadiens?

[Traduction]

M. Harrison : Je n’ai pas cette statistique en particulier sous la main, mais je dirais qu’une grande proportion de notre pétrole est vendu au marché américain. Il y a une foule de raisons à cela, mais, étant donné la forme de l’infrastructure énergétique, une grande proportion de notre pétrole est acheminée vers le chapelet des raffineries des États-Unis. Cela a des conséquences considérables, notamment un écart de prix. J’ai effleuré le sujet, mais je ne veux pas entrer dans les détails. Je veux dire, cependant, que, jusqu’à il y a quelques mois, les prix étaient manifestement inférieurs à cause de la capacité globale de l’infrastructure.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Votre province est aussi handicapée par le prix du pétrole. Les Américains achètent le pétrole 30 p. 100 moins cher que le marché, mais, une fois le pétrole raffiné, ils le revendent au prix du marché international. Donc, les Américains exploitent votre province.

[Traduction]

M. Harrison : C’est tout à fait vrai.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : En ce qui a trait à ce projet de loi, le gouvernement fédéral de M. Trudeau a-t-il été en contact avec votre province? Votre province a-t-elle fait part de ses préoccupations? Avez-vous avez été écoutés?

[Traduction]

M. Harrison : Les ministres n’ont pas été consultés. Je n’ai pas personnellement été consulté, mais je sais qu’un de mes homologues avait entendu dire que quelque chose se préparait. Peut-être y a-t-il eu, pour la forme, des communications entre les fonctionnaires, mais je ne pourrais pas vous le confirmer. Donc, pour répondre à votre question, notre gouvernement n’a pas été consulté. C’est un fait.

Je crois avoir exposé assez clairement notre position quant aux conséquences de ce projet de loi et des problèmes qu’il va causer à notre province. Nous avons pris position publiquement et officiellement et nous avons communiqué directement avec nos homologues. Encore une fois, le gouvernement fédéral a choisi de présenter une politique sans réfléchir aux conséquences qu’elle aurait sur certaines régions du pays, comme cela a été le cas avec le projet de loi C-69. Nous éprouvons de sérieuses réserves par rapport à ce projet de loi également. Je crois qu’un de mes collègues a témoigné très récemment à ce sujet devant un comité de la Chambre des communes.

Les effets des mesures similaires prises par le gouvernement fédéral s’accumulent. Par exemple, il y a la taxe sur le carbone et des choses comme la Norme sur les combustibles propres. Le gouvernement fédéral impose au secteur énergétique des normes réglementaires très strictes et, en conséquence, il est très difficile pour notre industrie d’être compétitive sur les marchés mondiaux. Cela nous préoccupe énormément.

La sénatrice Gagné : Merci de votre témoignage. Je crois qu’il y a des risques, non seulement pour la Saskatchewan et l’Alberta, mais également pour le reste du Canada, si nous sommes incapables de transporter le pétrole vers les marchés. J’en suis conscient. Toutes les collectivités de l’Ouest canadien risquent de perdre leur moyen de subsistance.

Certains groupes croient que les déversements de pétrole sont inévitables plutôt que simplement possibles. Selon vous, quel est le niveau de risque adéquat quand il est question de transporter du pétrole par voie maritime?

M. Harrison : L’observation que j’offrirais, c’est que la façon la plus sécuritaire de transporter du pétrole et des produits énergétiques, c’est par pipeline. Il y a eu un certain nombre de déraillements au cours de la dernière année dans notre province. Ce n’est pas quelque chose qui est propre à la Saskatchewan. Cela se produit avec le transport ferroviaire parce que c’est une façon beaucoup moins fiable et sécuritaire de transporter de l’énergie. Nos collectivités sont mises en danger parce que nous ne pouvons pas transporter de l’énergie par pipeline jusqu’à la côte.

Quant au fait d’établir le degré de risque approprié concernant le transport maritime de produits énergétiques — je crois que j’en ai parlé en détail dans mon exposé —, nous sommes évidemment une province enclavée. Nous n’avons pas de côte. Nous ne possédons pas de ministères responsables de la protection des côtes. À notre avis, le degré de risque qui existe à l’heure actuelle — et qui existe depuis longtemps — est acceptable. Aucun déversement de pétrole important ne s’est produit depuis un certain temps.

Je ne minimise pas le fait qu’il y a un risque. Toute activité comporte un risque. Je crois que le sénateur Manning en a parlé au cours de la dernière série de questions. Des risques sont associés à tout. Ce que nous disons, c’est que le degré de risque associé au transport maritime est acceptable.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci de votre présence parmi nous aujourd’hui. Pour donner suite à la question du sénateur Boisvenu sur les consultations, j’aimerais vous dire quelque chose. L’autre jour, pendant la période des questions, la ministre McKenna — la ministre de l’Environnement et du Changement climatique — a fait une déclaration qui dénigrait beaucoup les premiers ministres conservateurs. J’étais un peu choquée parce que, en tant que ministre fédérale, elle a l’obligation de travailler avec les provinces, peu importe les gouvernements, qu’ils soient néo-démocrates ou conservateurs.

Pourriez-vous nous en parler un peu plus? Je viens du Nouveau-Brunswick. C’est une province pauvre. J’ai toujours admiré la Saskatchewan. Elle a été démunie pendant nombre d’années, mais elle s’est tirée d’affaire grâce à ses ressources naturelles.

Je suis un peu déconcertée par le fait que le gouvernement ne semble pas comprendre qu’une interdiction des pétroliers ou que la mise en œuvre de ce projet de loi en Colombie-Britannique nuirait à nombre de provinces du reste du Canada. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Je ne comprends pas qu’on n’a pas tenu de consultations.

M. Harrison : Eh bien, nous y sommes habitués. Je serai franc. C’est notre avis, et nous l’avons déjà dit publiquement. Nous sommes très préoccupés par l’orientation qu’a choisie ce gouvernement concernant les politiques énergétiques, pratiquement sans prendre en considération les intérêts des Canadiens de l’Ouest.

Je ne l’ai pas vérifié ce matin, mais avec le prix mondial du pétrole qui se situe à un niveau relativement sain d’un point de vue historique, le secteur énergétique de l’Ouest du Canada à l’heure actuelle devrait créer des milliers d’emplois. C’est ce qu’il devrait faire. Nous avons été assez chanceux en Saskatchewan, parce que nous avons maintenu la croissance de l’emploi pendant cette période, malgré les obstacles à l’échelon fédéral.

L’Alberta, notre voisine, qui dépend un peu plus du secteur énergétique, du point de vue de la proportion de sa population qui travaille dans ce domaine, a perdu 130 000 ou 140 000 emplois au cours des dernières années en raison des politiques fédérales.

Les politiques sont vraiment importantes. Le fait que, à un moment donné, nous obtenions moins de 11 $ le baril de pétrole produit signifie littéralement que vous pouviez aller à Hardisty, en Alberta, et donner 5 $ à quelqu’un pour qu’il vous débarrasse de ce baril de pétrole. On ne faisait même pas de profit sur ce pétrole. On devait même payer pour le mettre sur le marché. C’est un résultat direct des décisions et des politiques fédérales qui ont eu des conséquences catastrophiques. Si on ajoute les projets de loi C-48 et C-69, on ne réalisera jamais d’autres projets d’infrastructure énergétique importants au pays.

Tout cela s’ajoute à une campagne concertée visant à isoler les ressources de l’Ouest du Canada, avec l’aide et l’aval du gouvernement du Canada. Il y a une raison pour laquelle 2 000 personnes participent à des manifestations à Regina avec des convois de 700 camions conduits par des gens qui n’ont jamais pris part à une manifestation de leur vie auparavant. Ce n’est pas sans raison que cela se produit.

Je ne crois pas que la ministre McKenna et le premier ministre comprennent cela. À mon avis, le Cabinet fédéral n’a pas conscience des conséquences qu’ont ces politiques sur les gens de l’Ouest du Canada qui veulent seulement travailler. Je suis ici en partie pour vous en faire part.

La sénatrice Stewart Olsen : Merci, monsieur.

La sénatrice Dasko : Merci, monsieur le ministre, d’être ici aujourd’hui. J’aimerais que vous me donniez deux ou trois précisions sur les commentaires que vous avez faits. Était-il prévu que des ressources de la Saskatchewan soient transportées dans le cadre du projet Northern Gateway?

M. Harrison : Peut-être une quantité minime. Le problème, cependant, est non pas la ressource transportée par le pipeline, mais la capacité du système qui réduit l’écart de prix. Voilà le problème. Nous comblerions presque l’écart de prix pour atteindre le prix mondial si nous acquérions cette capacité supplémentaire...

La sénatrice Dasko : Je vous comprends. Excusez-moi...

Le président : Laissez-le terminer sa réponse, et vous pourrez ensuite lui poser une autre question.

La sénatrice Dasko : Ma question est la même. Le projet Northern Gateway prévoyait-il le transport de ressources de la Saskatchewan?

M. Harrison : Une certaine quantité, oui.

La sénatrice Dasko : Qu’en est-il d’Eagle Spirit? Ce projet prévoyait-il le transport de ressources de la Saskatchewan?

M. Harrison : Cela dépend de toute une série de facteurs, ainsi que de la journée. La façon dont cela fonctionne, c’est qu’il y a un nombre élevé de décisions d’entreprise qui auraient une incidence sur les contrats de transport.

La sénatrice Dasko : Le projet Trans Mountain prévoyait-il le transport de ressources de la Saskatchewan?

M. Harrison : Il y en aurait eu, oui.

La sénatrice Dasko : Vous attribuez au projet de loi C-48 en particulier une très grande partie des problèmes de l’industrie. Pouvez-vous nommer un projet précis, du point de vue des ressources de la Saskatchewan, qui devait être lancé avec le terminal sur cette côte en particulier et qui est touché par le projet de loi C-48?

M. Harrison : L’enjeu — et j’ai essayé de l’expliquer dans ma déclaration liminaire et avec certaines de mes réponses —, c’est que le projet de loi C-48 fait partie d’un problème beaucoup plus important ici...

La sénatrice Dasko : Oui, je le sais. Je vous parle précisément du projet de loi C-48...

M. Harrison : Et le projet de loi C-48 est un enjeu important parce que...

La sénatrice Dasko : Excusez-moi, monsieur le ministre, je vous parle précisément du projet de loi C-48. Vous avez fait nombre de déclarations ici concernant des enjeux généraux. Je parle précisément de ce projet de loi.

Le président : Madame la sénatrice Dasko, laissez-le répondre à la question et vous pourrez ensuite lui en poser une autre.

La sénatrice Dasko : Monsieur le président, il n’y répond pas réellement.

Le président : C’est aux sénateurs dans la salle d’en juger.

Monsieur Harrison, répondez simplement à la question, et la sénatrice Dasko pourra ensuite vous en poser une autre.

La sénatrice Miville-Dechêne : Le sénateur Boisvenu mettait aussi de la pression sur un témoin, donc cela arrive. Je crois qu’elle essaie d’obtenir une réponse précise.

La sénatrice Stewart Olsen : Vous pouvez lui mettre de la pression, mais laissez-le répondre.

Le président : Je suis désolé, monsieur le ministre Harrison. Vous connaissez ce genre de situation, alors allez-y.

M. Harrison : Je suis un des rares ministres qui aiment la période des questions. Je l’aimais lorsque j’étais ici dans l’opposition et j’adore répondre aux questions dans ma circonscription. La réalité, c’est que nous avons plusieurs couches de mesures fédérales qui ont eu une incidence très importante sur le secteur énergétique.

Je ne crois pas que ce soit contesté. J’espère que personne ne remet cela en question, parce que des centaines de milliers de personnes n’ont pas de travail à cause de ces mesures. C’est la réalité.

Le projet de loi C-48 fait partie de l’enjeu général qui est l’isolement de nos ressources énergétiques pour lesquelles nous obtenions 11 $ le baril il n’y a que quelques mois en raison d’un certain nombre de facteurs. L’avenir pose également son lot de difficultés, lesquelles feront en sorte que nous ne serons jamais en mesure d’amener notre ressource vers le marché. Le projet de loi C-48 est une grande partie de ce problème, tout comme le projet de loi C-69. Les mesures ajoutées à une réglementation fédérale très normative forment une partie importante de l’enjeu immédiat. L’établissement d’une taxe sur le carbone est également un facteur. Lorsqu’on additionne tout cela, cela signifie 300 millions de dollars par année pour le trésor de notre province. Pour l’Alberta, il s’agit de milliards de dollars.

La sénatrice Dasko : Monsieur le ministre, excusez-moi...

M. Harrison : Cela veut dire que nous ne pouvons pas investir dans les soins de santé et l’éducation; malgré cela, nous avons réussi à équilibrer notre budget.

La sénatrice Dasko : Je vous demande de nommer un projet précis qui transporterait la ressource de la Saskatchewan jusqu’à un terminal situé précisément dans la région de cette côte. C’est tout ce que je vous demande. Je comprends que vous voyez cela comme faisant partie d’un contexte plus général. Nous sommes ici pour parler du projet de loi C-48.

M. Harrison : Que voulez-vous dire par « projet précis »? Comme un puits distinct qu’on est en train de forer? Le secteur énergétique ne fonctionne pas ainsi.

La sénatrice Dasko : Vous êtes celui qui a mentionné le nom de projets précis. Je parle du nom d’un projet particulier. Y a-t-il un projet qui prévoit le transport des ressources de la Saskatchewan vers une côte donnée et qui sera bloqué par ce projet de loi?

M. Harrison : Me demandez-vous s’il y a des puits qui ne sont pas forés et qui le seraient si notre position concurrentielle...

La sénatrice Dasko : Non, je vous parle d’un projet précis.

M. Harrison : Que voulez-vous dire par là? S’agit-il d’un seul puits?

La sénatrice Dasko : Vous avez nommé des projets précis, et je vous demande le nom d’autres projets.

M. Harrison : J’ai nommé des projets de pipeline.

La sénatrice Dasko : Oui.

M. Harrison : Nous avons dit que nous aimerions qu’ils soient tous construits, parce que, si c’est le cas, nous aurions des investissements nettement plus importants dans le secteur énergétique; beaucoup plus de puits seraient forés, et bien plus de gens auraient un emploi en Saskatchewan.

La sénatrice Dasko : Vous avez dit que vos réserves ne peuvent pas se rendre à la côte. Qu’en est-il de la côte Sud?

M. Harrison : Une grande partie de nos réserves se rendent actuellement à la côte Sud. M. le sénateur a soulevé un bon point lorsqu’il a dit que nous subissons une énorme réduction pour cette ressource parce que la capacité du système ne permet pas d’atteindre le prix mondial. Voilà exactement le problème. Nous subissons une réduction supérieure à 30 $, et c’est essentiellement des profits récoltés par les entreprises de raffinage américaines.

La sénatrice Dasko : Alors, les ressources de la Saskatchewan sont transportées vers la côte Sud à l’heure actuelle?

M. Harrison : C’est le cas pour une partie des ressources. Une autre partie va ailleurs. Je peux vous dire où elles ne rendent pas : l’Est du Canada. Rien ne se rend là parce qu’on n’a pas pu construire l’oléoduc Énergie Est.

La sénatrice Dasko : Mais nous parlons du projet de loi C-48 ici. Merci beaucoup.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Monsieur le ministre, je vais poser ma question en français, si vous me le permettez.

Je vous ai écouté attentivement tout en essayant de bien comprendre. Actuellement, aucun pétrolier ne circule dans le Nord de la Colombie-Britannique. Il y a quand même un assez large consensus social dans cette région pour qu’il n’y en ait pas.

Le dossier concerne 60 p. 100 de la côte de la Colombie-Britannique. Le reste, soit 40 p. 100 de la côte de la Colombie-Britannique, est une région habitée, où les pétroliers peuvent circuler. Cette région n’a pas les caractéristiques environnementales du Nord de la Colombie-Britannique, où il n’y a pas encore eu de développement, et qui est l’un des rares endroits où l’environnement est demeuré intact.

Je comprends très bien que vous vous sentez coincé, prisonnier, parce que vous n’avez pas de côte. Cependant, malgré les problèmes au sud de la Colombie-Britannique et les problèmes liés à Trans Mountain, pourquoi ne pas miser sur le sud de la province pour sortir votre pétrole?

Finalement, pourquoi vouloir rompre ou ne pas tenir compte de ce consensus social assez fort dans le Nord de la Colombie-Britannique, qui suppose de garder l’environnement tel qu’il est?

[Traduction]

M. Harrison : Je comprends la question. Je vous en remercie. Vous savez, vous avez fait référence au transport du pétrole par le Sud de la Colombie-Britannique dans votre question, et j’aimerais que nous puissions le faire. Je souhaiterais que ce soit possible. Je crois comprendre que la première ministre Notley témoignera après moi et je pense qu’elle aura également des choses à dire à ce sujet. On a réalisé peu de progrès avec Trans Mountain. Il faudrait qu’on me convainque qu’il y a une volonté et un désir réels de la part du gouvernement fédéral actuel d’aller de l’avant avec ce projet, malgré ce qu’il a dit publiquement. Nous avons vu peu d’exemples de cela.

La sénatrice Miville-Dechêne : Pourquoi ne pas concentrer vos efforts dans le Sud de la Colombie-Britannique? Vous comprenez qu’il y a une différence qualitative entre le Nord, qui n’est pas exploité et où il n’y a pas de pétroliers, et le Sud, où il y a déjà une telle circulation. Je me demande pourquoi vous n’en tenez pas compte dans vos observations.

M. Harrison : Notre position, et je le répète, c’est que nous avons adopté une approche qui englobe toutes ces réponses pour transporter l’énergie. Northern Gateway, Trans Mountain, Énergie Est, Keystone XL — nous avons privilégié cette approche pour appuyer ces projets énergétiques.

Il y a également un intérêt national dans tous ces projets. Nous avons encouragé le gouvernement fédéral à examiner cet aspect. Nous croyons que l’intérêt national est mieux servi si nous sommes en mesure de transporter notre énergie à partir d’un certain nombre d’endroits.

La sénatrice Miville-Dechêne : Exactement, mais l’intérêt national...

M. Harrison : Cela comporterait Prince Rupert, à titre d’exemple.

La sénatrice Miville-Dechêne : Il faut trouver un équilibre entre l’intérêt national et les considérations régionales et ce que les gens pensent dans ces régions. Ces personnes existent-elles pour vous? Ces collectivités ont-elles un mot à dire?

M. Harrison : Je peux invoquer le même argument. Qu’en est-il de nos collectivités qui ne veulent pas que l’on transporte 300 000 barils de pétrole par train en traversant leur territoire?

La sénatrice Miville-Dechêne : Vous pourriez utiliser cet argument. On effectue ce transport, mais les collectivités sont situées au bout du pipeline.

M. Harrison : Beaucoup de gens diraient que, si cela n’était pas nécessaire, ils préféreraient l’éviter. Mais l’intérêt national est servi parce que c’est la seule façon de transporter de l’énergie présentement.

C’est le rôle du gouvernement fédéral de déterminer ce qui est dans l’intérêt national. Voilà notre point de vue comme province à ce sujet : une approche qui englobe toutes ces réponses pour transporter l’énergie. Le gouvernement fédéral a fait un choix politique avec le projet de loi C-48, qui vise cette région bien précise. Il ne s’agit pas de l’intérêt national, ce qui est une justification politique intéressante de la façon dont vous différenciez les deux. Nous n’adhérons pas à la position du gouvernement fédéral.

La sénatrice McCoy : Merci. En ce qui concerne le tête-à-tête qui a eu lieu plus tôt ici, j’ai également fait partie du gouvernement. Nous disions toujours qu’il s’agissait de la période de questions, non pas de la période de réponses. Les ministres sont habiles pour répondre aux questions.

Je vous ai entendu dire que vous croyez que le risque associé au transport du pétrole par la mer est acceptable et j’aimerais revenir là-dessus pour obtenir un peu plus de précisions. Vous n’avez pas fait de lien avec quelque chose que vous avez mentionné plus tôt lorsque vous parliez de nombreuses précautions, comme des remorqueurs, des escorteurs et des pilotes qui connaissent bien les eaux. Comme vous parliez de risque, je souhaiterais vous poser la question suivante : à votre avis, s’agirait-il d’une réduction du risque maximale afin que l’on puisse atteindre un niveau mondial?

M. Harrison : Merci beaucoup, sénatrice McCoy, de la question. Elle est excellente. C’est précisément ce que nous proposerions. Nous devrions avoir les meilleures normes et la meilleure formation en matière de mesures de sécurité que possible. Je pense que nous avons déjà accompli un travail important en vue de nous assurer d’avoir certaines des meilleures normes de navigation maritime qui soient. Nous dirions que l’adoption de ces normes, et même leur amélioration si nécessaire, serait la marche à suivre appropriée.

La sénatrice McCoy : Nous savons qu’il y a plus de 3 000 navires qui naviguent régulièrement sur ces eaux à l’heure actuelle et que, en fait, ils sont tous sous la limite de poids de 12 500 tonnes brutes. Il y a eu trois déversements depuis 2006. Le ministre lui-même a reconnu que c’est la ligne de côte la moins bien protégée au Canada. Croyez-vous que notre comité devrait s’en soucier et recommander de renforcer la protection de cette région du Canada?

M. Harrison : Eh bien, loin de moi l’idée de donner des conseils ou des directives au comité, mais je crois qu’il serait approprié de formuler des recommandations sur la façon d’améliorer la sécurité maritime sans imposer une interdiction totale du transport.

Le président : Merci beaucoup, monsieur le ministre Harrison. Nous vous sommes reconnaissants de votre témoignage.

Je suis heureux d’accueillir notre dernier groupe de témoins ce matin. C’est incroyable, étant donné qu’il y a une élection en cours, que vous ayez du temps pour nous. Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous recevons Rachel Notley, première ministre de l’Alberta. Merci de participer à notre séance aujourd’hui. Vous avez la parole.

L’hon. Rachel Notley, première ministre de l’Alberta, gouvernement de l’Alberta : Merci beaucoup, et bonjour, mesdames et messieurs. Je vous parle aujourd’hui depuis Calgary, sur le territoire traditionnel des signataires du Traité no 7, où le peuple métis entretien un lien très profond avec la terre.

C’est un honneur pour moi de prendre la parole devant vous tous aujourd’hui. J’aimerais commencer par remercier votre comité de donner suite à mon appel de venir en Alberta pour mener des consultations sur le projet de loi C-48. Je crois sincèrement qu’il s’agit de la meilleure chose à faire. L’Alberta doit absolument participer à ces discussions, puisqu’elle est fortement touchée par la situation. C’est une question très importante, et c’est également la raison pour laquelle je m’adresse à vous aujourd’hui.

Je suis avec vous pour vous parler de l’avenir de notre industrie énergétique et de l’interdiction des pétroliers sur la côte Ouest, qui est terriblement mal avisée, le projet de loi C-48. J’ai ici trois amis avec moi aujourd’hui. Je suis heureuse de vous présenter Angela Allen, Edward Pena et Roger Auriti. Ils travaillent dans l’industrie énergétique.

Pourquoi m’accompagnent-ils? Pour deux raisons. Premièrement, je veux que tous les membres du comité puissent les regarder dans les yeux. Ils ne sont pas des chiffres sur une page, mais vos compatriotes canadiens, et les décisions que vous allez prendre les toucheront. Deuxièmement, comme vous l’avez mentionné dès le départ, il y a une élection en cours en Alberta, et elle concerne ces personnes — Angela, Edward, Roger et des millions d’Albertains comme eux. L’élection a une incidence sur leur emploi et leur avenir ainsi que leur confiance dans le fait que l’Alberta travaille pour eux.

Pourquoi l’élection a-t-elle une incidence sur leur emploi? Parce que nous avons subi ici en Alberta un ralentissement sans précédent qui a eu des répercussions considérables sur les travailleurs. Nous avons besoin qu’Ottawa travaille pour l’Alberta en ce a trait aux pipelines et aux politiques énergétiques et qu’il écoute ces gens, ceux-là mêmes qui sont le moteur de notre merveilleux pays.

Le Canada a la chance, comme vous le savez, d’avoir une ressource naturelle extrêmement précieuse, une ressource qui est en demande partout dans le monde et qui a contribué à bâtir le pays et amélioré le bien-être de tous les Canadiens. Elle est extraite du sol par des femmes et des hommes qui touchent de bons salaires leur permettant de subvenir aux besoins de leur famille. Ensuite, ces salaires sont dépensés dans des villes et des villages partout au Canada, des collectivités où les travailleurs peuvent mener une vie heureuse en toute sécurité.

Grâce à ces salaires, nous pouvons également financer des choses importantes comme des écoles et des hôpitaux, des institutions qui nous unissent et nous donnent de l’espoir pour l’avenir. Cette ressource est également extraite du sol dans une démocratie stable, où les droits sont respectés et où nous prenons au sérieux nos responsabilités relativement à l’environnement. Cela m’est d’une grande importance, tout comme ce l’est pour les gens qui sont avec moi ici aujourd’hui.

Nous devons défendre les valeurs qui font en sorte que le Canada est le meilleur endroit au monde où vivre, travailler et élever une famille, et il faut lutter pour une Alberta et un Canada qui travaillent en réalité pour tous.

Je suis un peu inquiète ces jours-ci parce qu’une grande partie de nos valeurs canadiennes sont à risque. Vous avez peut-être remarqué dernièrement que les Albertains ne sont pas les plus grands admirateurs d’Ottawa. C’est la façon polie de le dire. Si vous voulez savoir pourquoi, vous n’avez qu’à regarder le projet de loi C-48, la prétendue interdiction des pétroliers, qui s’étend de la pointe nord de l’île de Vancouver jusqu’en Alaska.

Avec le temps dont je dispose, j’aimerais vous donner trois raisons très précises pour lesquelles on doit rejeter ce projet de loi. Premièrement, il est tout simplement mauvais pour les emplois et les investissements. Deuxièmement, il ne s’agit pas d’une interdiction des pétroliers; c’est une interdiction visant l’Alberta. Cessons de dire qu’il en est autrement. Troisièmement, si vous continuez de faire la promotion de politiques dont les répercussions visent des provinces en particulier, comme la présente politique, cela occasionnera de nombreuses divisions. C’est le type de politique qui, comme nous le disons en Alberta, représente davantage ce que nous décrivons souvent comme une ruée vers la stupidité. Au bout du compte, vous allez nuire à notre pays et à notre sentiment d’unité. Voilà les enjeux.

Commençons d’abord par les emplois. Le monde change. Nous ne pouvons plus simplement vendre nos ressources dans un seul marché : les États-Unis. Ils sont notre plus grand client et notre plus grand concurrent. Tous les membres du comité m’ont entendue et ont entendu de nombreuses autres personnes affirmer cela à maintes reprises. Le manque de pipelines ne signifie pas seulement que nous sommes incapables de vendre notre ressource à l’étranger, cela veut dire que nous pouvons à peine livrer ce que nous produisons à l’heure actuelle. Nous ne pouvons pas transporter nos ressources, et il y a moins de travail pour Angela, Edward, Roger et des centaines de milliers d’autres personnes.

C’est une des raisons pour lesquelles l’Alberta transporte son pétrole par train. Ce n’est pas un moyen de transport que nous devrions utiliser, mais nous n’avons pas le choix parce que nous devons livrer notre produit — 120 000 barils par jour. L’entente sur le transport ferroviaire que nous avons conclue protégera les emplois des travailleurs dans une certaine mesure jusqu’à ce qu’Ottawa mette de l’ordre dans le gâchis des pipelines, mais ce n’est pas et ne devrait pas être une solution à long terme. Les pipelines sont la clé, et non pas un seul pipeline. Nous avons besoin que la canalisation 3, Keystone XL et le prolongement du pipeline Trans Mountain soient opérationnels pour relancer notre économie et ramener les bons emplois dont dépendent mes amis ici.

Même si le pipeline TMX est sur la bonne voie — et je vais en parler davantage dans un instant —, le projet KXL et la canalisation 3 sont examinés par le système juridique américain. Le projet de loi C-48 met notre sort entre les mains des Américains. Nous ne devrions pas imposer une interdiction totale des projets potentiels dans l’Ouest alors que des projets qui visent le Sud se heurtent encore à des obstacles. Cela n’a pas de sens.

Il serait juste de préciser que, il y a environ un an cette semaine, nous avons contraint Ottawa d’acheter Trans Mountain lorsque les investisseurs se sont retirés. Pour cela, nous remercions sincèrement le gouvernement fédéral. C’est un pas important vers l’avant. Cela a gardé le projet en vie. Au bout du compte, ce geste ne suffit pas et n’appuiera pas notre industrie dans son ensemble. C’est une partie de la solution, mais pas toute la solution, loin de là. Il faut qu’Ottawa appuie essentiellement ces travailleurs, non pas qu’il leur nuise.

Cela m’amène à mon deuxième point : il y a manifestement deux poids deux mesures au cœur de cette loi. Le projet de loi C-48 est une interdiction visant l’Alberta, comme je l’ai dit, non pas une interdiction des pétroliers. Après tout, le projet de loi C-48 permet encore à d’énormes navires méthaniers de naviguer sur ces eaux. Ce n’est donc pas du tout une interdiction des pétroliers. Il s’agit d’une interdiction qui empêche les ressources énergétiques produites par l’Alberta et par des Canadiens de se rendre dans des marchés d’outre-mer.

Mais permettez-moi d’être claire : ces produits se rendront dans les marchés étrangers. Si Ottawa interdit la circulation de pétroliers le long de la côte Nord, les investisseurs américains transporteront notre produit par train jusqu’en Alaska. Nous allons perdre des emplois et nous devrons vendre notre produit moins cher, et les mêmes eaux que vous essayez de protéger seront encore touchées parce que vous ne pouvez pas empêcher les États-Unis de passer par là.

Encore une fois, nous enrichirons les actionnaires américains au détriment des Albertains. Comme je l’ai dit, c’est une ruée vers la stupidité. Nous devons seulement être plus stratégiques.

En ce moment, la liste des produits interdits qui figurent dans le projet de loi C-48 va bien au-delà de ce qui est nécessaire. Parmi ces produits, on trouve le bitume partiellement valorisé, le pétrole brut léger, le pétrole brut synthétique et un certain nombre d’hydrocarbures plus légers. Je le répète, il n’y a pas de lien rationnel entre l’objectif allégué de l’interdiction des pétroliers et le bâtiment proprement dit et le mécanisme à l’égard de ce qui est prévu dans ce projet de loi.

À l’heure actuelle — et c’est important —, l’Alberta prend d’importantes mesures pour valoriser et raffiner ses ressources. En fait, cette démarche s’inscrit dans un effort sans précédent de diversification de notre économie, la plus importante du genre depuis l’époque du premier ministre Lougheed.

Un élément important de ce travail, la valorisation partielle, consiste à éliminer davantage de carbone du baril, ce qui est une bonne chose, ainsi qu’à raffiner le produit d’une manière qui aurait un effet sur sa réaction dans l’eau. C’est un projet extrêmement important. Il s’agit d’un investissement important pour notre économie, qui se traduira par plus de recettes pour nos ressources et moins d’émissions globales, sauf que, compte tenu de la façon dont le projet de loi C-48 est conçu actuellement, il nous est presque impossible d’attirer des investissements — ou, du moins, des investissements qui sont axés sur un moyen plus rapide de sortir du pays.

Le projet de loi C-48 décourage les investissements qu’il nous faut attirer en Alberta pour raffiner nos produits, y conserver davantage d’emplois, éliminer le carbone du baril et rendre nos produits plus sûrs pour l’expédition. Voilà toutes les choses que nous devrions essayer de faire en tant qu’acteurs stratégiques de l’industrie de l’énergie. Pourtant, nous avons le projet de loi C-48, dans sa forme actuelle, qui dit d’entrée de jeu aux investisseurs de ne même pas se donner la peine. Cela n’a aucun sens.

Ainsi, l’outil rudimentaire n’a essentiellement aucun lien avec la science. Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-48 est un outil très grossier qui supprime l’intérêt pour les investissements et l’incitation à innover sur le plan technologique, que ce soit sur le terrain ou dans le transport maritime. Cela n’a tout simplement aucun sens.

Au bout du compte, ce dont nous avons besoin, c’est que vous ne nous fassiez pas obstacle et que, plutôt, vous nous souteniez ici, en Alberta. Vous ne dressez pas d’obstacle pour le GNL; vous soutenez les activités. Même chose en ce qui concerne Hibernia, au large des côtes de Terre-Neuve, et les transporteurs de pétrole brut dans la Voie maritime du Saint-Laurent.

En Alberta, tout ce que nous demandons, c’est le même traitement pour les mêmes produits sur deux côtes différentes, parce qu’il y a actuellement une incohérence évidente entre la façon dont nous traitons les produits sur la côte Est et sur la côte Ouest.

Bref, nous devons mettre fin à cette politique de deux poids, deux mesures. Nous devons traiter tous les Canadiens sur un pied d’égalité. Ne dressez pas d’obstacles devant nous. Soutenez-nous.

Enfin, si vous continuez de nous faire obstacle au lieu de nous soutenir, si vous continuez d’appliquer la politique de deux poids, deux mesures qui est enchâssée dans le projet de loi C-48, vous allez nuire au pays tout entier. Nous devons faire en sorte que le Canada continue de fonctionner. Il est temps d’édifier la nation, d’affronter le reste du monde de manière unie et déterminée, d’avoir confiance en ce que nous sommes en tant que Canadiens et dans les compétences et la formation incroyables qu’ont les gens comme Angela, Edward et Roger.

Nulle part ailleurs on ne produit ses ressources énergétiques de manière aussi sécuritaire et en tenant autant compte des changements climatiques qu’en Alberta. C’est la même chose pour nos expéditions : elles sont sûres et respectueuses de l’environnement. Montrons au monde que nous sommes une superpuissance énergétique, un chef de file en matière de lutte contre les changements climatiques et un modèle pour ce qui est de défendre les emplois et relever les véritables défis liés au réchauffement climatique.

Pendant que nous y sommes, montrons à tous les Canadiens que nous pouvons faire croître notre économie et lutter contre les changements climatiques. Montrons aux Canadiens que nous pouvons défendre les travailleurs et la grande qualité de nos hôpitaux et de nos écoles. Montrons aux Canadiens que 90 000 emplois au centre-ville de Calgary sont tout aussi importants que 90 000 emplois au centre-ville de Montréal.

Je vais continuer à me battre pour les Albertains afin que l’on puisse construire des pipelines et diversifier notre économie, bâtir nos hôpitaux et nos écoles et faire en sorte que l’Alberta soit au service de tous. J’invite Ottawa à se joindre à nous. Ne nous faites pas obstacle. Soutenez-nous. Jetez le projet de loi C-48 à la poubelle, comme il se doit.

En terminant, je tiens à remercier les Albertains, comme mes amis Angela, Edward et Roger, de tout ce qu’ils font chaque jour pour bâtir notre province et notre industrie.

Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions, si vous en avez.

Le président : Merci beaucoup, madame Notley, et je suis heureux d’annoncer que nous allons nous rendre à Edmonton la première semaine de mai.

[Français]

Le sénateur Cormier : Bonjour, madame la première ministre. Je vais poser ma question en français. Je tiens d’abord à vous dire que je suis Néo-Brunswickois. Beaucoup de travailleurs du Nouveau-Brunswick contribuent à l’industrie pétrolière en Alberta. Il y a plusieurs travailleurs du Nouveau-Brunswick qui sont chez vous. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le mémoire que vous avez soumis à notre comité le 18 mars 2019.

Premièrement, dans le mémoire, vous dites qu’il n’y a pas eu de consultations véritablement inclusives et approfondies de la part du gouvernement fédéral. Or, dans une lettre que vous avez adressée au ministre Garneau le 9 novembre 2017, vous faites état de consultations menées par le gouvernement de l’Alberta, et il est notamment question de plusieurs réunions tenues avec le gouvernement fédéral entre mars et avril 2016. J’aimerais donc savoir quelle consultation n’a pas eu lieu.

Deuxièmement, dans le premier amendement que vous avez proposé, vous précisez que, si le projet de loi est adopté, il devrait l’être avec une annexe vide plutôt que d’inclure les substances actuellement interdites, et il devrait être modifié et complété ultérieurement à la suite d’une véritable consultation avec les Albertains. D’une part, s’il est adopté avec une annexe vide — et il est pratiquement inexistant —, j’aimerais savoir sur quelles études vous vous êtes basée. Lorsque vous parlez des substances interdites, vous faites référence à certaines études qui ont été menées sous la direction de Ressources naturelles Canada et qui établiraient que le bitume dilué se comporte sensiblement de la même manière que le pétrole brut conventionnel dans des environnements entourés de marais. Sur quelles études vous êtes-vous basée, et pouvons-nous avoir accès à ces études? Merci, madame.

[Traduction]

Mme Notley : Je vous remercie. Si j’ai bien compris, en gros, vous avez posé trois questions. Vous parlez de consultations, d’amendements et d’études. Est-ce à peu près cela?

Le sénateur Cormier : Exactement.

Mme Notley : Pour ce qui est des consultations, il ne fait aucun doute que nos fonctionnaires se sont entretenus avec des représentants du gouvernement fédéral pendant que le projet de loi C-48 était à l’étude, et notre ministre s’est certainement entretenu avec eux une ou deux fois également. Toutefois, je pense qu’il est juste de dire que nous n’avons vu aucune sorte de réaction à ce que nous avons dit. Il n’y a pas eu non plus de mesures prises à l’égard des préoccupations importantes que nous avons soulevées. Ce n’est qu’à l’échelon des hauts fonctionnaires que nous avons eu une idée précise de ce qui allait finalement se retrouver dans le projet de loi.

Certainement, pour ce qui d’arriver à une entente avec d’autres fonctionnaires sur les répercussions à plus grande échelle au sein de l’industrie de l’énergie... Je veux dire, au bout du compte, cela a des répercussions gigantesques sur l’Alberta. En résumé, ce que le projet de loi dit effectivement, c’est qu’on ne permettra pas que des produits provenant des sables bitumineux de l’Alberta soient expédiés à partir de la côte Nord. C’est là que se déroule la grande majorité des activités pétrolières et gazières du Canada.

La définition de ce qui serait inclus dans l’annexe à l’heure actuelle exclurait l’exportation à partir de la côte Nord de produits qui sont simplement acceptables sur la côte Est, mais pour lesquels, pour une raison quelconque, on a décidé que, ici en Alberta, ils ne peuvent être exportés à partir de la côte Ouest. Ensuite, bien entendu, nous connaissons tous très bien les difficultés que l’Alberta a éprouvées pour acheminer ces produits vers le centre ou l’est du pays pour d’autres raisons.

En conséquence, parce que la consultation est tellement importante pour l’Alberta, il ne suffit pas qu’il y ait eu des conversations entre les fonctionnaires au sein des ministères. Il devrait y avoir des consultations très importantes avec les dirigeants municipaux, les dirigeants de l’industrie, les dirigeants des travailleurs et les collectivités d’un peu partout. Essentiellement, cela constitue une mesure exceptionnellement vigoureuse contre notre capacité d’exporter à l’échelle internationale des produits des sables bitumineux de l’Alberta à un prix que l’on pourrait qualifier d’équitable. C’est pourquoi nous disons que cela n’est pas acceptable.

Les Autochtones sont les autres groupes dont les dirigeants n’ont pas été pleinement consultés. Il y a une multitude de groupes autochtones qui souhaitent participer à l’activité économique et industrielle en ce qui concerne le transport de notre produit vers l’Ouest, et ils n’ont pas été inclus de manière significative dans ce processus. C’est ce dont nous avons besoin au chapitre de la consultation. Cela fait tout simplement défaut.

Les répercussions du projet de loi sont si importantes que les conversations occasionnelles entre fonctionnaires sont loin d’être le genre de consultations qui auraient dû avoir lieu.

Pour ce qui est des amendements, permettez-moi de dire qu’il est tout à fait vrai que ceux que nous proposons rendraient le projet de loi presque vide de contenu, et c’est pourquoi nous disons qu’il faut simplement l’arrêter à ce stade-ci. Nous devons mieux comprendre les conséquences sur l’avenir global de l’industrie énergétique canadienne.

Comme vous le savez, nous avons dû prendre la mesure économiquement ridicule de réduire la production en Alberta parce que nous n’avons pas la capacité suffisante pour déplacer notre produit, ce qui le maintient bien en deçà du plafond des émissions, mais nous n’avons toujours pas la capacité de transporter notre produit. C’est une mesure antiéconomique énorme que nous avons dû prendre, parce que, depuis une dizaine d’années, nous nous dirigeons lentement vers un mur du fait que nous avons perdu la capacité de transporter notre produit.

Nous attendons actuellement après trois pipelines : le Trans Mountain — nous savons tous où le projet en est —; et les deux projets qui sont assujettis aux approches réglementaires américaines. Si nous ne les obtenons pas, la situation que je décris durera encore longtemps, et cela aura une incidence à long terme sur les emplois des gens.

Le gouvernement de l’Alberta investit dans le transport ferroviaire. Nous savons tous que cela n’est pas viable à long terme, mais c’est ce que nous sommes obligés de faire. C’est pourquoi je dis que l’importance de ce projet de loi a une importance énorme pour l’avenir de notre industrie. Nous ne pensons pas qu’il a lieu d’être, même avec des amendements, à ce stade-ci.

Le président : D’accord. Puis-je...

Mme Notley : Vous aviez une dernière question.

Le président : Madame la première ministre, je dois poursuivre, parce que nous n’avons pas beaucoup de temps. Les études qu’il vous a demandées, vous pourriez peut-être les faire parvenir à la greffière.

Mme Notley : C’est parfait.

Le président : Cette réponse était très longue. Il nous reste quatre personnes qui souhaitent poser des questions. Veuillez répondre brièvement.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : D’abord, madame la première ministre, bienvenue au Sénat par vidéoconférence. Je tiens à vous dire toute mon appréciation pour le travail que vous faites pour les Albertains et les Canadiens en général. Beaucoup de gens du Québec travaillent dans votre province.

On dit que 60 p. 100 de la côte de la Colombie-Britannique sera exclue de toute activité liée au pétrole, mais, si l’on exclut la côte ouest de l’île de Vancouver, qui est très difficile à aménager, c’est presque 95 p. 100 de la côte qui sera exclue. Le gouvernement vous propose d’acheminer tous les pipelines dans le port de Vancouver, qui serait le seul endroit où on pourrait aménager des terminaux. C’est la région la plus peuplée de la Colombie-Britannique en matière de densité. Est-ce que cette solution proposée est viable pour votre industrie, et est-ce qu’elle est réaliste par rapport au cheminement du pétrole tant de l’Alberta que de la Saskatchewan?

[Traduction]

Mme Notley : Nous connaissons tous les défis que nous avons dû relever pour construire le pipeline TMX. Nous pensons que nous sommes plus près que nous ne l’avons jamais été, mais cela dure depuis toujours, et ce ne sera pas suffisant en soi.

L’autre chose à propos du passage par Prince Rupert, c’est que, en ce qui concerne certains marchés, cela réduit d’un jour le temps de transport. Cela donne au produit que nous avons en Alberta et en Saskatchewan un avantage par rapport à celui qui proviendrait d’autres régions plus au sud des États-Unis. Pour une fois, nous pourrions nous avoir un avantage géographique plutôt qu’un désavantage, ce qui a été en partie à l’origine de la réduction du prix à laquelle les Canadiens ont dû faire face depuis le début.

Je pense que l’interdiction actuelle, encore une fois, ne tient pas compte de la nature unique des différents points le long de la côte Ouest pour ce qui est de la capacité de transporter le produit de façon sécuritaire. Je le répète, l’interdiction est un outil très grossier. Ce dont je parle ici, c’est de l’aspect géographique, non pas de la nature de ce qui est interdit, mais plutôt de la région à laquelle s’applique l’interdiction.

Nous devons nous demander s’il n’y a pas une approche plus précise qui nous permettrait de profiter de l’avantage que nous aurions de pouvoir expédier le produit à partir de la côte Nord-Ouest en mettant en place, bien entendu, des normes de sécurité maritimes appropriées.

Le président : Je vous remercie.

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci, madame la première ministre, de votre excellent exposé. J’aimerais vous entendre parler de la volonté de la grande majorité des tribus autochtones du long de la côte de la Colombie-Britannique qui ne veulent pas courir ce risque supplémentaire. Vous avez dit que, pour le moment, des pétroliers étrangers pourraient se trouver dans cette zone, mais ce n’est pas le cas. Ils respectent la zone d’exclusion, de sorte qu’il n’y a pas de pétroliers qui circulent le long de la côte nord de la Colombie-Britannique en ce moment.

De toute évidence, il s’agit d’un projet de loi difficile et controversé. Qu’en est-il des tribus autochtones qui vivent sur la côte et qui pourraient être touchées par un déversement? Il est impossible qu’il n’y ait aucun risque lorsqu’il y a de la circulation. Qu’en est-il de ces tribus? Je vois que vous êtes avec des travailleurs, et je compatis avec eux. Ce n’est pas un projet de loi facile.

Mme Notley : Je suis tout à fait d’accord. Je ne veux en aucun cas dire que ce ne sont pas des questions importantes. C’est pourquoi, bien sûr, nous devons nous concentrer sur la question de la sécurité et sur la façon dont nous l’assurons.

Il y a beaucoup de choses dangereuses qui sont expédiées à tout moment. Nous pourrions parler de ce qui pourrait arriver aux forêts s’il y avait une fuite de gaz naturel. Nous nous concentrons sur un produit en particulier et le risque qui y est associé. Lorsqu’on examine de façon scientifique les risques réels, les antécédents, les conséquences et la nature du produit interdit et qu’on les compare à d’autres produits pour lesquels des incidents se produisent tout le temps, que ce soit sur la côte Ouest, sur la côte Est ou ailleurs, nous avons ciblé ce produit en appliquant un ensemble de normes qui sont complètement à côté des normes qui s’appliquent à de nombreuses autres activités et à de nombreux autres produits qui ont des répercussions sur ces collectivités ainsi que sur d’autres.

Nous avons besoin d’un ensemble commun de règles qui sont appliquées, d’un degré commun de compréhension du risque acceptable et d’un niveau commun d’efforts déployés pour atténuer ce risque, parce que l’équité, c’est cela. On ne choisit pas une industrie parce qu’on l’a remarquée récemment, mais en fermant les yeux sur les autres types de risques et de dangers que nous acceptons tous les jours. C’est pourquoi nous disons que nous devons retourner à la case départ, examiner les données scientifiques et factuelles et trouver des moyens d’équilibrer ces intérêts et de protéger les collectivités plutôt que d’utiliser ce genre d’outil grossier, qui risque de tuer sensiblement une des industries les plus productives dont le pays profite actuellement.

La sénatrice Miville-Dechêne : Puis-je avoir un petit...

Le président : Nous manquons de temps.

La sénatrice Miville-Dechêne : Vous êtes en politique. Vous savez que c’était la promesse faite par M. Trudeau à de nombreuses tribus de la côte nord de la Colombie-Britannique. Qu’en est-il des tribus qui voient cela comme un geste de réconciliation et qui ne veulent prendre aucun risque?

Mme Notley : Il y a aussi un certain nombre de tribus entre Fort McMurray et la côte qui, en guise de geste de réconciliation, auraient également aimé être consultées et aimeraient profiter des retombées économiques qui découlent de cette industrie. Comme tous les Canadiens, les peuples autochtones n’ont pas tous le même avis sur le sujet. La réconciliation passe par l’écoute de chacun d’entre eux, et pas seulement de certains d’entre eux.

Le sénateur Manning : Bienvenue, madame Notley. Étant originaire de Terre-Neuve-et-Labrador, je suis pleinement conscient de la contribution de l’Alberta à notre pays. En fait, j’ai passé ma 17e et 18e année à Fort McMurray. Beaucoup de membres de ma famille sont encore là-bas. Je suis également parfaitement au courant de la contribution de l’Alberta par habitant au programme de péréquation du Canada et je sais que ma province et d’autres provinces en ont bénéficié. Je vais poser quelques brèves questions regroupées.

Lorsque le ministre des Transports Marc Garneau a comparu devant notre comité, il a dit que la persistance du pétrole brut était l’une des raisons pour lesquelles ce produit était ciblé plutôt que d’autres, comme le GNL. Les risques associés aux produits persistants diffèrent-ils de ceux associés aux produits non persistants? Si oui, dans quelle mesure? Je pense que beaucoup de gens ont de la difficulté à comprendre pourquoi nous pouvons empêcher l’expédition d’un produit pendant que nous autorisons l’expédition d’un autre.

Pourriez-vous également nous parler du transport des produits de l’Alberta vers le sud en comparaison du transport vers l’ouest ou vers l’est, des rabais sur le prix du pétrole et de l’incidence sur les emplois en Alberta et au Canada en général? Je sais que nous avons une solution, mais ce n’est pas la meilleure. Comment pouvons-nous améliorer cela? Je pose toutes ces questions en même temps et je vous souhaite bonne chance.

Mme Notley : Je vais essayer d’être brève dans ma réponse. De toute évidence, il y a une grande différence entre le GNL et le pétrole brut, mais, lorsqu’il s’agit de pétrole brut, ce n’est pas aussi simple que le laisse entendre le projet de loi. C’est-à-dire que tout le pétrole brut ne peut être géré de façon sécuritaire dans l’éventualité peu probable d’un déversement. Le pétrole brut est très diversifié au sein de cette catégorie. Il y a déjà du pétrole brut synthétique qui circule dans la Voie maritime du Saint-Laurent. Il y a déjà du pétrole brut léger partant de la côte Est. Pourtant, ces produits ont été interdits vers l’ouest.

C’est là où nous voulons en venir. Nous devons nous pencher sur les données scientifiques et sur les stratégies visant à modifier la nature du produit pour qu’il soit plus sécuritaire de le transporter et comprendre que le projet de loi propose d’interdire des produits qui sont plus sûrs que d’autres. C’est la première chose.

Ensuite, pour ce qui est de l’incidence de l’obligation d’aller au sud, elle est double. Évidemment, lorsqu’il y a suffisamment de capacité en matière de pipeline pour aller au sud, il y a toujours un rabais, et les Canadiens paient pour ce rabais. Ce qui se passe actuellement, toutefois, c’est que nous manquons de capacité. Le rabais était tellement démesuré — nous recevions environ 8 $ le baril à un moment donné; le rabais s’élevait à plus de 40 $ l’automne dernier — que nous avons en fait réduit la production. Cela n’a aucun sens. On ne peut pas arrêter de produire une chose qui donne de la valeur à votre nation dans son ensemble.

Nous ne voulons pas avoir à réduire la production pendant un certain temps. Nous devons garder nos options ouvertes. Deux des trois pipelines dont nous avons besoin pour réussir à l’heure actuelle sont soumis à des processus de réglementation sur lesquels nous n’avons aucun pouvoir parce qu’ils relèvent des États-Unis.

En tant que pays, nous devons garder nos options ouvertes. Ce projet de loi ferme la porte et décourage les investisseurs de continuer à travailler au Canada.

Le président : Merci beaucoup. Est-ce tout?

La sénatrice Stewart Olsen : Non, j’ai une très brève question.

Le président : Une brève question. J’aimerais que la sénatrice McCoy pose une question, étant donné qu’elle vient de l’Alberta.

Allez-y, sénatrice Stewart Olsen.

La sénatrice Stewart Olsen : Madame la première ministre Notley, merci. Le Nouveau-Brunswick a également souffert. Quand vous dites que tout est beau d’un côté, c’est faux, nous avons été étouffés avec Énergie Est. On n’a pas eu à essayer d’interdire les pétroliers.

Étant donné que vous êtes actuellement en campagne électorale, pouvez-vous nous assurer que tous vos adversaires adoptent la même position que vous en ce qui concerne l’avenir?

Mme Notley : Je ne peux pas parler au nom de tous mes adversaires avec certitude; je pense que ce serait inapproprié. Cependant, je dirais qu’il y a 95 p. 100 de chance que tous mes adversaires souscrivent à cette position.

La sénatrice Stewart Olsen : Je vous remercie.

Le président : Merci. C’était très bien, madame la première ministre.

La sénatrice McCoy : Merci d’être ici une fois de plus, madame la première ministre.

Les gens disent qu’ils préféreraient que notre pétrole soit enclavé parce qu’il contribue au changement climatique ou au réchauffement de la planète. Je sais que vous êtes une championne de l’atténuation du changement climatique et de l’adaptation à ce changement. Comment conciliez-vous votre position sur le transport d’une plus grande quantité de pétrole avec votre position sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre?

Mme Notley : C’est une très bonne question. Je le répète, cela remonte à l’une des premières initiatives que nous avons prises en tant que gouvernement en présentant notre plan de leadership en matière de changement climatique. Dans ce contexte, nous avons mis en place un plafond sur les émissions. Au début, nous avons réussi, grâce à ce programme et aux autres éléments du plan de leadership en matière de changement climatique, à attirer des investissements afin d’éliminer le carbone du baril et de trouver des moyens de le produire d’une manière plus responsable. Avec tout cela, on prévoit une croissance de la production, mais en maintenant les émissions et le carbone à un faible taux, en pourcentage de ce qui sort de l’Alberta et de ce qui est expédié, et en étant essentiellement un producteur de ce produit renouvelable de plus en plus durable et responsable.

Nous ne serons pas en mesure d’attirer ces investissements, même lorsque nous trouverons un moyen de produire de façon plus responsable, si nous n’avons aucun moyen de transporter le produit. Voilà ce dont il s’agit.

Le président : Merci beaucoup. Il faut conclure. Je suis désolé. Nous avons quelques autres points à l’ordre du jour, et les réunions du caucus commencent.

Nous savons à quel point vous êtes occupée en ce moment, madame la première ministre. Merci beaucoup d’avoir été en mesure de comparaître devant nous. Nous avons hâte de visiter la province de l’Alberta au cours de la première semaine de mai à cet égard. Je vous remercie encore une fois.

Mme Notley : Merci.

Le président : Sénateurs, si vous pouviez rester encore une minute, nous avons deux points à régler. J’espère que nous parviendrons à un accord unanime à leur égard et que nous pourrons clore très rapidement. L’un des points est le report de la date. Nous avions une date avec une motion, mais le gouvernement et l’opposition se sont entendus sur le 16 mai.

Pourrions-nous tous convenir que la date est maintenant le 16 mai plutôt que la date sur laquelle nous avons voté? Nous l’avons déjà fait auparavant. C’est l’entente que nous avons conclue avec le gouvernement. Si vous êtes d’accord, nous pourrions adopter cette motion à l’unanimité et nous en aurions terminé avec cela.

La sénatrice Stewart Olsen : Parlez-vous de l’étude article par article?

Le président : Oui, exactement. Le rapport doit être présenté au plus tard le 16 mai.

La sénatrice Miville-Dechêne : Donc, l’étude article par article serait...

Le président : Nous devrons prévoir cela plus tôt.

Le deuxième point concerne le budget. Nous avions un budget qui incluait Estevan, mais la ville a été exclue des dates de déplacements. Ensuite, nous avons présenté une motion demandant que, s’il y a suffisamment d’intérêt, nous demeurions à Regina le lendemain afin de prolonger notre séjour. Je recommande que nous conservions le budget, de sorte que nous n’ayons pas besoin de le renvoyer au Comité de la régie interne pour qu’il soit établi de nouveau. Ce n’est pas différent de la façon dont nous établissons le budget pour les sénateurs. Nous prévoyons 12 sénateurs dans notre budget; il est rare que nous ayons 12 sénateurs, comme dans n’importe quel comité, de sorte que nous ne dépenserons pas cet argent.

J’aimerais qu’il y ait un accord unanime à ce sujet. Cela aidera le comité de direction à nous organiser pour que la greffière puisse s’occuper de cela rapidement, car nous n’avons pas beaucoup de temps. Nous prévoyons partir le 29 avril. C’est la semaine que nous visons. Nous nous consulterons, puis nous prendrons une décision. Si vous êtes d’accord, nous dirons que la décision est unanime et que tout le monde est content. Je le suis.

Sénateur Boisvenu, je suis désolé. Votre question peut-elle attendre à demain? Nous pouvons toujours attendre à demain, sénateur Boisvenu, car cela nous donnera plus de temps pour en discuter, plutôt que de prendre les quelques minutes qu’il nous reste. C’est toujours plus facile d’en enlever. Je vous remercie.

(La séance est levée.)

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