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SECD - Comité permanent

Sécurité nationale, défense et anciens combattants


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE LA SÉCURITÉ NATIONALE ET DE LA DÉFENSE

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le lundi 14 juin 2021

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense se réunit aujourd’hui, à 14 heures (HE), par vidéoconférence, pour étudier le projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive.

La sénatrice Gwen Boniface (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Mesdames et messieurs les sénateurs, je suis Gwen Boniface, une sénatrice de l’Ontario, et j’ai le plaisir de présider ce comité. Aujourd’hui, nous tenons une séance publique du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense par vidéoconférence. Je vous remercie d’avance, chers collègues, de votre patience tandis que nous nous adaptons à cette nouvelle façon de tenir nos réunions.

Avant de commencer, j’aimerais rappeler aux sénateurs qu’ils doivent garder leurs microphones en sourdine en tout temps, à moins que la présidente ne leur donne la parole, et qu’ils doivent éviter de passer d’une langue à l’autre dans la même intervention.

Si des difficultés techniques surviennent, particulièrement en ce qui concerne l’interprétation, veuillez en faire part à la présidente ou à la greffière et nous nous efforcerons de régler le problème. Veuillez noter que nous devrons peut-être suspendre la séance pendant ce temps, car nous devons nous assurer que tous les membres sont en mesure de participer pleinement.

Enfin, j’aimerais rappeler à tous les participants que les écrans Zoom ne doivent pas être copiés, enregistrés ou photographiés; vous pouvez utiliser et partager les délibérations officielles affichées sur le site Web de SenVu à cette fin.

J’aimerais maintenant présenter les membres du comité qui participent à cette réunion, soit le sénateur Boisvenu, vice-président du comité; le sénateur Dagenais, vice-président du comité; le sénateur Dalphond, quatrième membre du comité directeur; la sénatrice Busson; la sénatrice Jaffer; la sénatrice Martin; la sénatrice McPhedran; la sénatrice Moodie; le sénateur Oh; la sénatrice Pate; et le sénateur Richards.

Pour faciliter le déroulement de cette réunion virtuelle, j’ai préparé une liste d’intervenants, qui commence par le parrain du projet de loi au Sénat, viennent ensuite les membres du comité directeur, qui seront suivis des autres membres du comité à tour de rôle. Si les sénateurs n’ont pas de questions à poser, il leur est demandé de le signaler à la greffière grâce à la fonction clavardage de Zoom.

Lors de la séance d’aujourd’hui, qui durera 90 minutes, les témoins disposeront chacun d’un maximum de sept minutes pour faire une déclaration préliminaire. Les sénateurs disposeront de quatre minutes chacun pour poser des questions.

Mesdames et messieurs les sénateurs, nous poursuivons aujourd’hui notre étude du projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive.

Nous sommes heureux d’accueillir aujourd’hui M. R. Karl Hanson, professeur de recherche auxiliaire à l’Université Carleton et ancien gestionnaire de la recherche correctionnelle à Sécurité publique Canada, qui comparaît à titre personnel; Mukwa Musayett (Mme Shelly Johnson), titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’indigénisation de l’enseignement supérieur et professeure agrégée à l’Université Thompson Rivers; Mme Franca Cortoni, professeure de psychologie criminologique à l’École de criminologie de l’Université de Montréal; et M. Carl James, professeur et titulaire de la Chaire Jean Augustine en éducation, communauté et diaspora à l’Université York.

Au nom du comité, je vous remercie tous d’être venus aujourd’hui. Nous allons commencer par M. Hanson, qui sera suivi de Mme Johnson, de Mme Cortoni et de M. James.

Vous avez la parole, monsieur Hanson.

M. R. Karl Hanson, professeur de recherche auxiliaire, Université Carleton et ancien gestionnaire de la recherche correctionnelle à Sécurité publique Canada, à titre personnel : Bonjour. Je suis heureux d’être ici aujourd’hui.

Pour ceux qui ne me connaissent pas, je suis psychologue agréé dans la province de l’Ontario. Comme cela a été dit, je suis universitaire à l’Université Carleton. Vous m’avez probablement invité ici principalement parce que j’ai travaillé au sein du gouvernement à titre de chercheur sur les questions de politique en matière de criminalité et d’intervention correctionnelle. J’ai pris ma retraite de Sécurité publique Canada en 2017, et depuis, je mène toujours des recherches et je participe à de nombreuses discussions sur ce que nous devrions faire pour gérer efficacement les risques présentés par les personnes qui sont passées par le système de justice pénale.

Comme j’ai passé une bonne partie de ma carrière à étudier les programmes de réduction de la récidive, vous ne serez pas surpris d’apprendre que je considère qu’il s’agit d’une initiative de grande valeur, et que je vous appuie, vous et la Chambre, d’avoir présenté cette mesure. J’appuie également la discussion au Sénat et la convocation de témoins, car il est important que ces propositions soient discutées et peaufinées autant que possible. Je suis heureux de pouvoir vous faire part d’informations et d’idées qui sont susceptibles de vous aider à orienter votre discussion sur ces questions.

Je pense qu’il faut se concentrer sur la grande question de savoir si cette initiative, pour ainsi dire, permettra d’atteindre les résultats souhaités.

L’aspiration à réduire la récidive criminelle n’est pas nouvelle. Elle est explicitement énoncée dans la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition de 1992. Si vous examinez les lois habilitantes de la plupart des provinces et des territoires, vous constaterez qu’elles ont aussi pour objectif central la réadaptation. Ce n’est pas le seul objectif de ces lois, mais c’est un objectif très clair.

Si vous parlez à des gens qui travaillent dans le système correctionnel, ils vous diront qu’ils sont déjà dans le domaine de la réadaptation. Il y a donc déjà beaucoup de bon travail qui se fait. Les systèmes correctionnels du Canada disposent d’ores et déjà d’outils d’évaluation des risques pour identifier les personnes et les faire participer de façon prioritaire aux programmes et aux interventions. Des programmes de réadaptation très divers sont utilisés, y compris des programmes spécialisés pour la violence par un partenaire intime, pour le risque de délinquance sexuelle et pour la toxicomanie. Il y a des programmes conçus pour les jeunes, les femmes et les personnes d’origine autochtone, alors ce n’est pas quelque chose de tout à fait nouveau. Nous faisons cela depuis longtemps.

Si le projet de loi est adopté, j’espère que dans trois ans, lorsque le moment sera venu de rédiger le rapport, il ne s’agira pas simplement de remettre un coup de peinture fraîche sur ce qui a été fait jusqu’à maintenant. Il y a beaucoup de bonnes choses qui pourraient être réemployées et identifiées dans ce rapport, mais j’espère que cette initiative sera l’occasion de faire avancer les choses. Et je pense que nous pouvons faire mieux.

Le taux de récidive des personnes libérées se situe entre 25 et 40 % après deux ans, et si vous attendez un peu plus longtemps, les chiffres augmentent. La plupart retourneront dans le système après quatre ou cinq ans. Ces chiffres sont trop élevés.

Il est également important de se souvenir que le fait d’être un « délinquant » n’est pas un état permanent. Presque tous les individus finissent par renoncer à la criminalité lorsqu’ils atteignent un âge avancé et une maturité accrue. Très peu de gens retournent à la criminalité après avoir été libres pendant 5 à 10 ans dans la société.

Cependant, le fait de vivre sans se livrer à la criminalité est un seuil d’exigence peu élevé en matière de réinsertion sociale. Selon un rapport récent de Sécurité publique Canada, 14 ans après avoir été libéré du SCC, le Service correctionnel du Canada, la plupart des personnes étaient sans emploi, et plus de la moitié d’entre elles n’avaient aucun revenu d’emploi. Ce serait formidable si nous pouvions faire mieux. Quelles mesures pourrait-on prendre pour faire avancer les choses?

La première chose à laquelle j’encourage le gouvernement à réfléchir, c’est d’avoir des statistiques vraiment nationales sur la récidive. Les statistiques sur la récidive sont un sujet de conversation depuis de nombreuses années. Ce serait bien que ce soit possible. Il faudrait une collaboration avec les provinces, car certaines d’entre elles recueillent désormais ces données et il faudrait que cela soit développé. Cela pourrait se faire par l’entremise du système de données du Centre d’information de la police canadienne, le CIPC, avec la GRC, bien que cela nécessite un renforcement important de ce système. Il nous faut quelque chose pour savoir si cela fonctionne ou non. Sans un système ou une façon de surveiller la récidive, il sera difficile d’évaluer les efforts déployés. C’est possible. De nombreux pays ont des statistiques nationales annuelles sur la récidive. C’est clairement à notre portée sur le plan technique.

Deuxièmement, je pense que nous avons besoin de centres de formation. Si vous regardez partout au pays, il y a beaucoup de bons programmes, beaucoup de personnes qui font du bon travail, mais si vous voulez apprendre à bien faire ces choses, c’est très difficile. Il y a aussi, à ma connaissance, trop de programmes qui ont commencé comme projets pilotes, qui ont fait leurs preuves et qui ont pour l’essentiel disparu. Ils ont disparu parce que personne ne les soutient, parce qu’il n’y a pas de formation sur ces programmes, parce que les principaux intéressés sont passés à autre chose et ils ont pris leur retraite, comme le font les gens, et ont disparu. Nous avons besoin d’une certaine capacité de préservation et de diffusion des connaissances. Les centres de formation pourraient également servir de lieux de recensement des programmes prometteurs à l’échelle nationale et internationale.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur Hanson. Nous allons maintenant passer à Mme Johnson.

Mukwa Musayett (Shelly Johnson), titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur l’indigénisation de l’enseignement supérieur, professeure agrégée, Université Thompson Rivers, à titre personnel : [Mots prononcés dans une autre langue]

Je tiens à saluer les sénatrices et les sénateurs. Je vous remercie de m’avoir invitée à m’adresser à vous aujourd’hui.

Je m’exprime depuis le territoire non cédé et occupé des Tk’emlúps te Secwépemc. Je vis à environ trois kilomètres du pensionnat indien de Kamloops, où se trouvent 215 tombes anonymes de nos enfants, au confluent des rivières Thompson Nord et Thompson Sud.

J’ai un certain nombre de choses à vous dire et j’ai pensé qu’il serait important que vous sachiez — car c’est la première fois que je comparais devant un comité — que mes commentaires se fondent sur mon vécu de femme autochtone ojibwée de Saulteaux du territoire visé par le Traité no 4, la Première Nation Keeseekoose. Je suis la petite-fille de la regrettée Laura Stevenson Fischer, qui était détenue au pensionnat Lebret, dans la vallée de Fort Qu’Appelle, en Saskatchewan. Je suis une ancienne membre de la GRC, j’ai servi dans le Nord de la Colombie-Britannique. Pendant 25 ans, j’ai été travailleuse sociale aux Services de protection et de soutien pour les enfants au ministère du Développement des enfants et de la famille de la Colombie-Britannique et directrice générale d’un organisme délégué de protection de l’enfance des Premières Nations au centre-ville de Victoria, appelé Surrounded by Cedar Child and Family Services.

Ces 13 dernières années, j’ai travaillé comme universitaire, chercheuse et professeure autochtone à l’Université de Colombie-Britannique, à Vancouver, sur le territoire non cédé et occupé de la bande indienne Musqueam, ainsi qu’à l’Université Thompson Rivers sur le territoire non cédé et occupé des Tk’emlúps te Secwépemc. Ce que les sénateurs ne savent peut-être pas, c’est que 95 % de la Colombie-Britannique n’est pas visée par un traité.

J’ai fait partie de la toute première cohorte d’autochtones titulaires d’un doctorat à l’Université de la Colombie-Britannique, et c’est là que j’ai défendu ma thèse sur les enfants autochtones traumatisés en milieu urbain dans le système canadien de protection de l’enfance et d’éducation. C’est probablement la raison pour laquelle je suis devant vous aujourd’hui.

Mon étude a révélé que 100 % des participants que j’ai interviewés ont été victimes de violence sexuelle, physique ou émotionnelle lorsqu’ils étaient placés en famille d’accueil, ou qu’ils ont été négligés. J’ai aussi constaté dans le cadre de cette étude qu’ils avaient en moyenne été placés dans 10 écoles différentes, avec un maximum de 20 écoles, et j’ai relevé une moyenne de 8 placements différents en famille d’accueil, et jusqu’à 50 placements pour certains. La grande majorité des enfants, qui étaient adultes lorsque je les ai interviewés, étaient des enfants de survivants des pensionnats indiens et des enfants pris en charge. Ils avaient connu en moyenne huit travailleurs sociaux. La grande majorité de ces travailleurs sociaux n’étaient pas autochtones et la plupart de ces enfants ont été placés en famille d’accueil avant l’âge de quatre ans.

Lorsque j’ai fait des recherches en collaboration avec les tribunaux des Premières Nations du Canada et que j’ai étudié le plus ancien tribunal, ici en Colombie-Britannique, à New Westminster, les gens que j’ai vu comparaître devant la cour, le tribunal des Premières Nations, étaient issus du système de protection de l’enfance. Cela est devenu parfaitement évident dans leurs interactions avec les aînés. Ces personnes avaient été systématiquement dépouillées de leur culture, de leur langue et de leurs traditions et présentaient un très fort risque de récidive.

En 2014, j’ai tenu une conférence à l’Université de la Colombie-Britannique afin de réunir les dirigeants du Maori Youth Court en Nouvelle-Zélande, du Koori Court en Australie, des tribunaux autochtones américains aux États-Unis et des tribunaux des Premières Nations au Canada. À ma connaissance, c’était la première fois que des juges et des avocats de ces pays du Commonwealth se réunissaient pour parler du sort des jeunes dans leurs tribunaux. La récidive figurait en tête de liste des sujets.

Dans le cadre de cette préparation, j’ai travaillé avec les responsables de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées et j’ai consulté la juge Marion Buller sur certaines des questions à poser.

En ce qui concerne vos commentaires sur le lancement de projets pilotes et l’élaboration de programmes normalisés ou fondés sur des données probantes visant à réduire la récidive, une grande partie de ce travail a été effectué et a fait l’objet de rapports émanant de l’enquêteur correctionnel et de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Nous vous recommandons de lire ces rapports avant d’aller plus loin.

Nous voulons commencer par le début, en sachant quelles données doivent être recueillies et quelle est la meilleure façon de le faire. Nous devrons probablement identifier la race, la nation, le sexe, l’âge et, je dirais, le lien à la protection de l’enfance.

Afin d’augmenter les chances de réinsertion sociale des détenus, nous nous sommes demandé si quelqu’un avait demandé aux récidivistes pourquoi ils avaient récidivé et ce qui les aurait aidés à ne pas le faire. Où sont les recherches?

Les soutiens en matière de toxicomanie et de santé mentale sont vraiment importants en raison des séquelles laissées par le système des pensionnats indiens et le système de protection de l’enfance.

Lorsque nous avons fait l’étude pour le tribunal des Premières Nations, nous avons constaté qu’il y avait un manque de rapports psychologiques et psychiatriques dans les dossiers des gens, et qu’il y avait très peu, voire pas du tout, de planification intégrée des cas.

J’ai aussi siégé à un comité consultatif de citoyens, et il m’est apparu clairement dès la deuxième réunion que personne du ministère fédéral n’était intéressé à parler des questions qui devaient être abordées. La rengaine semblait être de dire qu’il n’y avait pas d’argent pour cela. On pavait sous mes yeux la voie vers la récidive, malgré ce que disaient les citoyens.

Les statistiques montrent que les détenus autochtones sont moins susceptibles de demander une libération conditionnelle et qu’ils sont plus nombreux à purger la totalité de leur peine. Quelles mesures de soutien sont à leur disposition pour les aider à réintégrer la société? Sont-ils plus susceptibles de récidiver parce qu’ils n’ont pas eu de libération conditionnelle? Nous devons cerner les risques et les problèmes auxquels ils sont confrontés, de la même façon que nous regardons les risques auxquels sont exposés les jeunes qui ont connu la prise en charge dans leur enfance.

Nous devons nous fixer comme objectif de réadaptation que tous les prisonniers terminent leurs études secondaires afin qu’ils puissent obtenir un emploi sûr et fiable.

Plutôt que de partir du principe que les programmes axés sur les Autochtones ou les programmes communautaires correspondent aux exigences ou aux définitions des services correctionnels, nous devons appuyer et financer les initiatives définies et dirigées par les Autochtones. Nous devons faire confiance aux collectivités pour savoir ce qui est le mieux pour leurs membres.

La présidente : Madame Johnson, je suis désolée vos sept minutes sont écoulées, mais je vous demande de continuer à nous soumettre vos réflexions lorsque vous répondrez aux questions. Merci beaucoup de votre exposé, meegwetch.

Nous allons passer à Mme Cortoni.

Franca Cortoni, professeure de psychologie criminologique, École de criminologie, Université de Montréal, à titre personnel : Merci beaucoup de m’avoir invitée à comparaître devant le comité. Comme Karl Hanson, je suis psychologue agréé dans la province de l’Ontario où, depuis 16 ans, j’offre des services d’évaluation et de traitement psychologique aux hommes condamnés pour des infractions sexuelles, qui sont soit incarcérés dans un établissement fédéral, soit en probation en Ontario. Durant cette période, j’ai aussi travaillé à temps partiel pendant quatre ans à offrir des services psychologiques, notamment aux femmes francophones incarcérées dans l’ancienne prison pour femmes.

Depuis 2007, je suis professeure à l’École de criminologie de l’Université de Montréal. Mes recherches portent sur la délinquance sexuelle chez les hommes et les femmes, en particulier sur les facteurs d’intervention liés à la délinquance et les interventions en lien à cette délinquance.

À part cela, au fil des ans, j’ai donné de la formation à divers professionnels; j’ai fait partie de comités consultatifs, pour la Commission des libérations conditionnelles du Canada, par exemple, et je donne régulièrement des conseils à des organismes et des organisations à l’échelle nationale et internationale en lien à l’évaluation et au traitement des hommes et des femmes reconnus coupables d’infractions sexuelles.

Comme vous pouvez le constater, toute ma carrière clinique et de recherche a été axée sur une meilleure compréhension du comportement criminel, en particulier la délinquance sexuelle, et sur l’élaboration de meilleurs programmes d’intervention pour réduire la récidive.

L’un des éléments qui a fait preuve de son efficacité en matière de réduction de la récidive est la disponibilité de systèmes communautaires pour appuyer les délinquants dans leurs efforts de réinsertion sociale. C’est dans ce contexte que j’appuie pleinement le projet de loi C-228. Je pense qu’il élargit et renforce le travail déjà effectué par le système de justice pénale canadien. Je suis très heureuse de l’appui que les députés et les sénateurs ont accordé jusqu’à présent au projet de loi C-228. Je pense que c’est un travail très important.

Comme l’a mentionné M. Hanson, les systèmes correctionnels au niveau fédéral, provincial et territorial visent à protéger la société en gérant les délinquants en toute sécurité, tout en leur offrant des services de réadaptation. Ces programmes vont de l’éducation aux programmes correctionnels normalisés et aux services psychologiques.

Nous savons qu’il y a de nombreux besoins en matière de réadaptation qui sont communs aux délinquants, mais la recherche montre en particulier que les services efficaces, qu’ils soient offerts en établissement ou dans la communauté, évaluent soigneusement les besoins particuliers d’un délinquant donné et les mettent en correspondance avec les services pertinents.

Cependant, d’importants écarts, par exemple, dans le risque de récidive, les besoins en matière d’intervention, la durée de la probation ou de la peine et la disponibilité des services pertinents dans les prisons ou dans la communauté signifient que de nombreux délinquants n’ont pas accès aux soutiens dont ils ont besoin et qui seraient conçus pour favoriser leur réadaptation.

Je vais donner un exemple rapide. Tout récemment, un article du journal La Presse de Montréal, examinait les services offerts aux délinquants sexuels dans une collectivité de la province de Québec. Cette étude a montré que les personnes relevant de la compétence provinciale doivent s’inscrire sur de très longues listes d’attente pour avoir accès à des services de traitement spécialisés dans leur communauté, principalement en raison d’une pénurie de services financés. En revanche, bien sûr, les délinquants sous responsabilité fédérale, une fois qu’ils sont sous surveillance communautaire, ont accès à des services financés et gérés par le SCC. Nous voyons donc, dans la même province, un système à deux vitesses fondé strictement sur la compétence correctionnelle.

À mon avis, une approche nationale cohérente comme celle que propose le projet de loi C-228 contribuerait à réduire ce genre d’iniquités entre les mêmes types de délinquants.

J’aimerais prendre un instant pour parler des délinquantes. Au Canada, et en fait dans la plupart des pays du monde, les délinquantes sont traditionnellement gérées selon les approches qui ont été élaborées et validées pour les délinquants de sexe masculin. Nous savons depuis longtemps, et particulièrement au Canada depuis le rapport La création de choix de 1990, que les femmes ont besoin de services qui répondent aux besoins de réadaptation propres à leur sexe. On ne peut plus prendre des services destinés aux hommes, remplacer « il » par « elle » et les appliquer aux femmes.

J’aimerais vous donner rapidement quelques exemples. Nous savons notamment qu’il y a un lien entre la pauvreté et la criminalité. Ce que les gens ne réalisent pas, c’est qu’en fait, ce lien est propre aux délinquantes. Ce n’est pas le cas pour les hommes. Au Canada, par exemple, l’écart salarial entre les sexes demeure une réalité pour un trop grand nombre de femmes, et il est particulièrement prononcé pour les femmes qui occupent des emplois à faible revenu. Pour les délinquantes, cette situation est exacerbée en raison de leur statut d’ex-délinquantes, mais aussi parce qu’elles ont généralement peu d’instruction formelle et peu de compétences professionnelles, de sorte que même comparées à leurs homologues masculins peu qualifiés, elles ont beaucoup moins accès à des emplois bien rémunérés. Par exemple, les délinquants de sexe masculin, même s’ils n’ont pas de compétences ou d’instruction, peuvent trouver des emplois relativement bien rémunérés, comme des postes de manœuvres dans le domaine de la construction.

Bien entendu, ce problème est exacerbé parce que les femmes ont tendance à toujours pourvoir à la totalité ou à la majeure partie des besoins de leurs enfants. Le fait est qu’elles n’ont pas accès à des services de garde d’enfants ayant des horaires souples. Par exemple, si elles ont la chance de trouver un emploi, mais que cet emploi ne correspond pas au schéma classique de 9 heures à 17 heures, du lundi au vendredi, les services de garde d’enfants sont pratiquement inexistants. Cela les replonge donc dans le cycle de la pauvreté.

Et, bien sûr, nous ne pouvons pas oublier que les femmes sont encore beaucoup plus sévèrement jugées par la société que les hommes pour leur comportement criminel et, par conséquent, cela complique leur réinsertion sociale.

Les antécédents de victimisation sont un autre exemple. Il est bien établi qu’il existe un lien étroit entre les antécédents de victimisation des femmes et la délinquance ultérieure, et cela est principalement aggravé par les problèmes de santé mentale et les problèmes de toxicomanie qui en découlent et qui précèdent leur entrée dans le comportement criminel. Même si les femmes ont des taux de récidive plus faibles que les hommes, elles ont besoin de plus de services pour rompre le lien entre la victimisation, les problèmes de santé mentale qui en découlent, la toxicomanie et le comportement criminel.

La présidente : Madame Cortoni, je vais devoir vous arrêter ici et vous demander de poursuivre ces commentaires dans vos réponses aux questions, si possible. Merci.

Carl James, professeur, titulaire de la Chaire Jean Augustine en éducation, communauté et diaspora, Université York, à titre personnel : Je vous remercie beaucoup, mesdames et messieurs les sénateurs, de m’avoir invité à participer à cette conversation sur la récidive dans le cadre de vos travaux sur la façon dont nous pourrions adopter des règlements pour réduire ce problème chez les jeunes.

Je vais parler de la situation des Canadiens racialisés et des jeunes Noirs en particulier. Je vais aussi parler du domaine que je connais le mieux, c’est-à-dire le rôle de la scolarisation et de l’éducation dans la vie des jeunes.

Je m’intéresse particulièrement à ce groupe, car, selon un récent rapport de Statistique Canada paru en 2016, 26,6 % de la population noire étaient des enfants de moins de 15 ans, tandis que 16,9 % de la population canadienne appartenait au même groupe d’âge. À mon avis, il s’agit d’une proportion importante de la population, dont nous devons tenir compte pour les jeunes Noirs et leurs parents, puisque cela a des répercussions sur l’ensemble de la collectivité et sur le genre de programmes liés aux questions dont nous discutons ici.

La scolarisation et l’éducation des jeunes Noirs est un sujet de préoccupation important, surtout lorsqu’on pense à l’expression couramment utilisée du « corridor qui mène de l’école à la prison ». La question que nous devons nous poser est la suivante : que se passe-t-il dans les écoles ou dans le système d’éducation qui pourrait expliquer en partie la situation des jeunes racialisés, des jeunes Autochtones et des jeunes Noirs en particulier?

À l’aide des données du Toronto District School Board, l’un des seuls conseils scolaires à fournir des données sur cette question des élèves, nous avons établi un profil des jeunes Noirs indiquant qu’ils ont tendance à être aiguillés vers des programmes d’éducation qui ne sont pas adaptés, surtout après avoir quitté l’école secondaire. Le pourcentage de jeunes Noirs ayant abandonné l’école ou ayant été suspendus et expulsés de l’école est également plus élevé que celui de leurs homologues.

Une analyse plus poussée révèle que les étudiants de troisième génération, pour la plupart originaires des Caraïbes, tirent en général moins parti du système éducatif. Ils ont tendance à se trouver dans des environnements scolaires où leur expérience se résume aux stéréotypes raciaux ou au profilage racial, à la discipline disproportionnée, à l’intimidation, aux perturbations de la scolarité et à des éducateurs qui remettent en question leurs comportements et leur capacité d’apprentissage.

En fait, des reportages récents dans de nombreuses régions du pays font état des traitements inéquitables, des mesures disciplinaires punitives et de l’intimidation préjudiciable que subissent les élèves noirs dans les écoles. Les médias rapportent les récits de parents selon lesquels leurs fils en maternelle et en primaire ont été suspendus de l’école, soulignant qu’il y a un préjugé inhérent dans la façon dont les jeunes Noirs sont punis dans nos écoles et que ce préjugé est ignoré.

Il ne fait aucun doute que ces milieux scolaires ne contribuent pas au bien-être éducatif et social des élèves, mais ils n’aident pas non plus compte tenu de la situation que vivent ces élèves, surtout lorsqu’ils sont confrontés au système de justice.

Le cas d’un jeune Noir d’une vingtaine d’années qui a été accusé d’avoir fui la police et qui a été arrêté en possession d’une arme à feu vaut la peine d’être mentionné ici. Il s’agit d’une affaire dans laquelle le juge Nakatsuru, après avoir tenu compte dans sa décision du témoignage d’experts et des antécédents sociaux de l’accusé, a cité des échecs systémiques dans le système d’éducation de ce jeune. Selon le juge, son éducation n’a pas réussi à fournir à l’adolescent ce dont il avait besoin pour relever les défis sociaux et économiques de sa vie. Le juge a écrit :

[...] le racisme envers les Noirs a façonné votre vie d’une façon qui vous a amené devant les tribunaux criminels [...] Vous n’avez pas trouvé de solution dans le système d’éducation publique. Je n’ai aucun doute que le racisme envers les Noirs a influé sur la façon dont on vous traitait à l’école [...] Je ne dis pas que vos enseignants étaient racistes, insensibles ou que vous n’avez pas votre part de responsabilité. Je reconnais plutôt les études qui démontrent systématiquement que ce racisme existe et n’a pas aidé les enfants noirs. Cette lacune du système d’éducation rend un enfant vulnérable aux démêlés avec le système de justice pénale [...]

Il est donc important de reconnaître ces problèmes et les difficultés que rencontrent les jeunes dans le système scolaire. L’important dans cette affaire, c’est que le juge était en mesure d’utiliser l’expérience fournie au tribunal. J’ai participé à cette affaire à titre de témoin expert et j’ai fourni une étude de base sur ce que le juge pourrait prendre en compte pour éclairer son jugement.

Si les jeunes rencontrent ce type de problèmes dans le système scolaire, nous pouvons considérer qu’ils sont susceptibles d’être exacerbés dans les prisons. Dans de tels cas, leur sens de l’identité et le traitement qu’ils reçoivent minent leur perception d’eux-mêmes et, bien sûr, cela a un effet sur leur vie après leur libération.

Par conséquent, lorsque nous examinons les programmes postérieurs à l’incarcération, nous devons tenir compte des antécédents culturels et des problèmes auxquels sont confrontées les personnes. Les gens qui travaillent auprès de ces jeunes devraient être issus de leur communauté et devraient leur donner des outils qui les aident à s’adapter au système une fois qu’ils sont sortis.

Nous pensons que l’éducation de toutes les personnes concernées devrait tenir compte de la race et du racisme systémique, car ce sont des facteurs que nous ne pouvons pas mettre de côté. En ce qui concerne la situation post-carcérale, nous savons que de nombreuses personnes rencontrent systématiquement des difficultés d’obtention d’un emploi et connaissent le chômage en sortant de prison.

M. Hanson a parlé de statistiques. Il serait utile d’avoir constamment les statistiques, mais il faut aussi tenir compte des antécédents raciaux des gens afin de comprendre en quoi leur situation peut être différente et ce que nous pouvons faire pour les personnes racialisées qui soit différent de ce que nous faisons pour les délinquants blancs afin de les aider dans leur réadaptation. Merci.

La présidente : Merci beaucoup. Nous allons passer aux premières questions.

La sénatrice Martin : Merci à tous nos témoins. J’ai l’impression que vous méritez que l’on vous consacre une séance complète chacun pour que nous puissions profiter de votre expérience et de votre expertise.

Monsieur Hanson, vous et d’autres avez mentionné l’importance d’avoir des statistiques de qualité qui soient comparables entre les provinces et les ministères fédéraux. Vous n’avez pu terminer ce que vous disiez à propos du véritable programme national de formation sur la statistique de la récidive, alors vous pourriez peut-être y revenir. Est-il possible de recueillir les statistiques dont nous aurons besoin pour mettre en œuvre un cadre national? Pourriez-vous compléter ce que vous disiez au sujet de ce qui vient après les programmes de formation? Merci.

M. Hanson : Je vous remercie pour cette question. Pour ce qui est de la récidive, oui, c’est possible. À l’heure actuelle, elle n’est pas gérée efficacement. Cette question est à l’ordre du jour depuis que j’ai commencé à travailler à Sécurité publique Canada, il y a 25 ans. Si vous vouliez obtenir de bonnes statistiques, vous pourriez le faire. Il faudrait des investissements et aussi des négociations avec les provinces. Même si toutes les provinces sont d’accord, elles pourraient participer séparément. Vous pourriez commencer avec les cartes que vous avez en main — les acteurs qui fonctionnent — cela vous permettrait d’obtenir un assez bon aperçu national, et au fur et à mesure que les personnes changent ou que les acteurs changent, vous pourriez vous adapter et obtenir les informations. Comme je l’ai dit, la plupart des pays d’Europe du Nord le font déjà, et de nombreuses provinces le font. Je pense que c’est clairement faisable à l’échelle nationale. Je serai ravi que vous parveniez à ce résultat.

La troisième chose dont je voulais parler — j’ai parlé des statistiques nationales et du fait que nous avons besoin de centres de formation, de centres permettant de conserver et de diffuser le savoir —, c’est que je travaille beaucoup à l’évaluation des risques, et je pense que le temps est venu de tenir des consultations véritables avec les communautés concernées. L’évaluation des risques repose à la fois sur les preuves et les valeurs. Donc, les éléments d’un outil d’évaluation des risques indiquent ce que vous devriez, ou ne devriez pas faire, et les diverses communautés doivent y participer. Elles doivent pouvoir examiner une évaluation des risques et dire : « Oui, je veux que les gens arrêtent de faire telle chose et je veux qu’ils fassent telle autre chose. » Il faut que les différentes communautés y adhèrent.

La sénatrice Martin : Merci.

Madame Cortoni, vous avez notamment dit qu’il fallait évaluer les besoins en fonction des programmes. Je pense que c’est vraiment essentiel. C’est un peu ce qui relie les choses entre elles. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et nous dire si c’est réalisable en ce qui concerne la coordination nationale et le cadre national, après l’adoption de ce projet de loi, s’il est adopté?

Mme Cortoni : Je vous remercie de votre question. En fait, cela nous ramène à ce que disait M. Hanson au sujet de l’évaluation des risques. Lorsque nous évaluons le risque, nous évaluons la probabilité que la personne recommence ou ne recommence pas, mais nous évaluons également les besoins. Quels sont les facteurs qui contribuent au comportement criminel? Ce sont ces facteurs que nous devons prendre en charge d’une manière qui soit pertinente pour la personne, que cela soit en fonction de son sexe ou de sa culture, selon le contexte. Cela se fait déjà. Nous disposons d’une quantité énorme de données empiriques qui démontrent l’importance d’associer ce genre de services. D’après mon expérience, c’est dans les systèmes provinciaux que les difficultés sont les plus grandes, parce qu’on y gère beaucoup de délinquants détenus à court terme. Nous n’avons tout simplement pas le temps d’établir ces correspondances et d’offrir les services appropriés.

Si un système plus intégré pouvait prendre forme comme par magie — je dis par magie, car cela exigerait énormément de travail et de bonne volonté de la part de tout le monde —, j’aime l’idée de ne pas faire intervenir seulement le système correctionnel et le système de justice pénale, mais aussi les systèmes du secteur privé et ainsi de suite pour que les services gagnent en homogénéité et ne soient pas simplement liés à une peine particulière.

La sénatrice Martin : Merci.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma première question s’adresse à M. James.

Vous avez une grande expérience dans le domaine de l’équité et du racisme systémique, je n’en doute pas du tout. J’aimerais savoir si, selon vous, l’élaboration de ce projet de loi ne tend pas un genre de piège quant au plan qui tiendrait compte des races. Dans quelle mesure ce projet de loi réduira-t-il les récidives? Ne risque-t-il pas, en même temps, de maintenir la marginalisation de certains groupes racialisés? Comment peut-on arriver à un équilibre dans ce projet de loi?

[Traduction]

M. James : Merci beaucoup pour la question. Lorsque nous prendrons en compte la race, et c’est la même chose pour le genre, nous serons en mesure de structurer des programmes en fonction des expériences culturelles de la personne en question. Ce faisant, nous ne la marginaliserons pas, mais nous l’amènerons à penser que nous sommes à l’écoute. Nous connaîtrons les antécédents culturels des personnes et nous leur offrirons des programmes qui sont pertinents et liés à leurs expériences. Ainsi, nous faciliterons vraiment les choses et nous serons probablement beaucoup plus efficaces qu’en traitant tout le monde de la même manière.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci.

Madame Johnson, j’ai une question pour vous. J’aimerais connaître votre point de vue sur certains facteurs qui entraînent un taux de récidive plus élevé chez les détenus des Premières Nations. Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure le retour de ces détenus dans leur communauté respective et leurs fréquentations contribuent à leur rechute? À votre avis, leur récidive peut-elle être liée, dans une certaine mesure, à la consommation d’alcool ou de drogue?

[Traduction]

Mme Johnson : Lorsqu'on réfléchit aux classifications de sécurité qui déterminent l’accès aux programmes, il est clair pour moi que certains prisonniers autochtones se voient refuser l’accès à des programmes qui sont fondés sur la classification plutôt que sur le besoin. Pour autant que je sache, personne n’a déterminé quels sont les programmes autochtones appropriés qui aideront à réduire la récidive. Quels sont-ils et quels sont les obstacles qui empêchent les Autochtones de participer à ces programmes, qu’ils soient libérés en ville ou qu’ils soient libérés dans leur collectivité? L’autre problème à mes yeux, c’est que les programmes ne sont pas offerts de façon continue. Les prisonniers peuvent être libérés avant que la prochaine série de programmes ne soit accessible.

J’ai aussi des réserves sur le paragraphe 83(2) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, parce qu’il n’exige pas que le service mette en relation les personnes en liberté avec des aînés, mais seulement que le service prenne des mesures raisonnables après consultation. Ce sont des questions qui touchent les peuples autochtones, d’après moi. L’autre problème, c’est que les aînés sont censés jouer un certain nombre de rôles dans la vie des gens, mais ils ne sont pas considérés comme du personnel. Il s’agit plutôt d’un programme qui existe selon les caprices du ministre.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je tiens à souligner les excellentes présentations de nos témoins. Effectivement, je déplore qu’on ait si peu de temps pour leur poser des questions qui m’apparaissent fondamentales.

Ma question s’adresse à M. Hanson.

Vous avez soulevé un problème qui m’apparaît majeur pour ce qui est de la réinsertion sociale de ces personnes. On travaille à partir de données statistiques sur la récidive qui sont partielles. C’est le vérificateur général qui l’a dit en 2018. On ne tient pas compte des gens qui ont été incarcérés dans une prison. On tient seulement compte que de ceux qui l’ont été dans un pénitencier.

En ce qui concerne les délinquants sexuels, au Québec par exemple, il y a quatre fois plus de prédateurs sexuels dans les prisons québécoises que dans les pénitenciers fédéraux, parce que la sentence à la suite d’un premier crime est souvent de moins de deux ans, et qu’aucun programme de réhabilitation ne s’adresse à cette clientèle, ou si peu.

Ma question est la suivante. Comment peut-on croire en une réinsertion sociale efficace si les gens font quatre ou cinq séjours en prison et qu’ensuite, on les transfère dans des pénitenciers fédéraux? Les gens ont développé des comportements, je dirais, presque déviants. Alors, comment est-il possible de croire en une réinsertion sociale efficace avec des systèmes de pénitenciers qui sont aussi fermés?

[Traduction]

M. Hanson : Je vous remercie de la question.

Il est difficile de faire en sorte que tous les différents systèmes fonctionnent ensemble. Je conviens que c’est une chose sur laquelle nous devons travailler. Les gens ne bénéficient pas seulement des services fédéraux ou des services provinciaux.

L’idée émergente qui consiste à avoir une gestion de cas plus centralisée est un pas en avant. Elle pourrait inclure les services de santé mentale et les services d’emploi, et pourrait être plus générale pour aider à coordonner les choses.

Il faut pour cela la collaboration des différents ordres de gouvernement, mais c’est un but qui vaut la peine d’être poursuivi.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Vous abordez le sujet très important de la santé mentale. On sait que dans les pénitenciers fédéraux, près de 40 % des hommes souffrent de maladie mentale; chez les femmes, la proportion atteint 60 %.

Lorsque ces gens sortent des pénitenciers, on les remet carrément dans la rue alors qu’il existe des projets de réinsertion au Canada. Je pense entre autres au programme Chez Soi qui donne de très bons résultats, soit une réduction de près de 90 % de la récidive. Ce programme ne coûte rien parce qu’on transfère les fonds des pénitenciers vers les services de santé mentale.

Que manque-t-il au gouvernement pour qu’il emprunte cette voie plutôt que de remettre ces gens à la rue pour les retrouver dans un pénitencier quelques années plus tard?

[Traduction]

M. Hanson : Je ne peux pas parler des forces ou des faiblesses du processus décisionnel du gouvernement, mais je suis d’accord pour dire que le programme Chez Soi est prometteur, tant du point de vue de la réduction de la pauvreté que du point de vue de la justice pénale. J’espère qu’un projet de loi comme celui-ci incitera les gens à réfléchir davantage à la façon de collaborer pour atteindre cet objectif important.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci beaucoup, monsieur.

[Traduction]

Le sénateur Dalphond : Je remercie les témoins de leurs commentaires très instructifs. Je dois dire que je suis heureux que nous ayons une deuxième série d’audiences. Certains proposaient que nous le fassions en une seule séance, mais nous serions passés à côté de beaucoup de choses.

Ma question s’adresse à Mme Musayett. Je suis perplexe, car le taux de récidive beaucoup plus élevé pour les personnes d’origine autochtone et le taux moyen de récidive en général indiquent que notre système n’est pas adapté. Vous avez dit, et je pense que c’est un point très important, que le programme devrait être dirigé et conçu par des Autochtones pour refléter leurs besoins et leurs cultures.

Y a-t-il des programmes qui existent à l’heure actuelle et que nous pourrions utiliser comme modèles, et sont-ils efficaces?

Mme Johnson : Je vous remercie de votre question. En Colombie-Britannique, il y a quelques pavillons de ressourcement que des Autochtones ont mis sur pied, mais ces pavillons sont destinés aux personnes incarcérées. Une fois qu’une personne revient dans une collectivité, il faut tenir compte des ressources particulières à chaque collectivité, d’un bout à l’autre du pays. Les collectivités urbaines, les collectivités dans les réserves, les collectivités métisses, les collectivités inuites — il n’y a pas de solution universelle.

Cependant, le rôle des aînés est un fil conducteur commun dans la vie des gens qui reviennent dans les collectivités et dans les projets liés aux prisonniers. Donc, si le paragraphe 83(1.1) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition n’exige pas la participation des aînés aux projets liés aux détenus, comment peut-on avoir l’assurance que le détenu recevra des soins et des services adéquats à son retour? Le problème, c’est qu’il n’y a pas suffisamment d’aînés financés, et ceux qui sont actuellement financés font des heures supplémentaires et manquent de ressources. Ils ne sont pas censés continuer à travailler avec le prisonnier après sa libération. C’est une vision à très court terme. Cela signifie une interruption de l’aide aux prisonniers. À ma connaissance, personne ne parle aux aînés en toute confiance de ce dont ils pensent avoir besoin.

L’autre problème, c’est que le contenu et l’utilité des rapports Gladue qui sont commandés actuellement varient. Il n’y a pas de normes qui dictent ce qui devrait figurer dans un rapport Gladue, et rien ne garantit que les Autochtones qui arrivent devant les tribunaux ou qui sortent de prison en auront un. La loi n’exige pas un rapport Gladue et ne dit pas dans quelles circonstances il pourrait servir. Un rapport Gladue peut servir à justifier une cote de sécurité plus élevée ou un refus de libération conditionnelle, mais il peut aussi aider à planifier un programme de libération, parce qu’on y trouve les antécédents de la personne.

Lorsque j’étais en Australie, j’ai vu les tribunaux Koori, qui sont des tribunaux pour adultes autochtones. Ils faisaient des recommandations au moment de la libération. Ils avaient accès à tous les dossiers de la personne depuis son enfance et sa prise en charge par l’État. Je me souviens d’avoir vu un jeune homme comparaître. Tout le monde pensait qu’il n’y avait pas d’espoir pour lui; il devrait probablement rester en prison pendant longtemps. Lorsque le juge a lu à haute voix le récit de ce qui lui était arrivé lorsqu’il était un petit garçon en famille d’accueil, tout le monde a compris comment il en était arrivé là où il était. Je n’ai pas vu ce genre de compréhension dans les tribunaux canadiens.

Nous avons donc la capacité de formuler des recommandations sur les plans de libération à partir des rapports Gladue, s’ils sont bien faits, en incluant les aînés et en examinant les ressources disponibles dans la collectivité ou les collectivités avoisinantes.

La présidente : Je suis désolée, mais nous allons devoir nous arrêter ici. Merci, sénateur Dalphond.

La sénatrice Busson : À l’instar de ma collègue la sénatrice Martin, j’aimerais souligner le calibre des témoins qui sont ici aujourd’hui. C’est merveilleux d’avoir des gens avec un tel bagage d’éducation et d’expérience. Je tiens également à souligner aujourd’hui que je parle à partir du territoire non cédé du peuple Shuswap en Colombie-Britannique.

Ma question s’adresse à Mme Johnson. Vos antécédents sont incroyablement riches et diversifiés, et j’ai senti une certaine frustration dans votre exposé. Je vous félicite de l’initiative que vous avez eue de mener une étude sur l’application internationale des tribunaux spécialisés des Premières Nations, surtout si on songe aux terribles séquelles laissées par les pensionnats indiens au Canada.

Pensez-vous qu’une des clés du succès du projet de loi C-228 serait de mettre sur pied des tribunaux spécialisés des Premières Nations pour traiter spécifiquement des questions autochtones et appliquer des solutions comme celles que vous avez proposées dans votre exposé? Merci.

Mme Johnson : En toute franchise, madame la sénatrice, les seules fois où j’ai eu de l’espoir lorsque je voyais de nos gens avoir affaire à la justice au Canada, c’était devant des tribunaux des Premières Nations. Il y en a de toutes sortes à travers le pays. Aucun ne voit les choses ou ne fonctionne de la même façon. Certains ont des juges autochtones, mais beaucoup n’en ont pas.

Ce sont des lieux d’espoir et c’est grâce à nos aînés. Les aînés sont des encyclopédies; ils sont les gardiens et les détenteurs du savoir culturel. Il y a un sentiment de compassion en raison de notre histoire commune et de notre survie aux politiques génocidaires de notre pays. Nous sommes tous des survivants qui sont encore debout. On sent cela dans la compassion des aînés, ainsi que la compréhension des problèmes de bien-être de l’enfance, de pauvreté, de toxicomanie et de santé mentale qui en découlent. Cela ne veut pas dire pour autant que vous avez carte blanche pour faire ce que vous voulez. Certaines des réactions les plus dures que j'ai entendues venaient de la part d’aînés qui avaient l’impression que les gens n'étaient pas francs au sujet de leur situation et de ce qu’ils avaient fait ou qu’ils n’assumaient pas la responsabilité de leurs actes.

C’est une chose pour un Autochtone de se présenter devant un juge blanc; c’en est une autre de se présenter devant un aîné qui ressemble à sa grand-mère ou à son grand-père et de recevoir des critiques cinglantes de sa part. L’impact est beaucoup plus fort quand cela vient de votre propre peuple. Je recommande vivement ces tribunaux. Avec les fonds disponibles, je pense que le temps est venu de les mettre à la disposition de tout Autochtone au pays. C’est là que je vois de l’espoir.

La sénatrice Busson : Merci beaucoup de vos observations. Merci.

La sénatrice Jaffer : Merci, madame la présidente, et merci à tous les témoins. Je suis d’accord avec mes collègues pour tout ce que vous nous avez appris aujourd’hui. Et nous en avons encore tellement à apprendre.

Ma question s’adresse à M. James. Vous avez effleuré le sujet, mais pouvez-vous nous parler de ces programmes conçus exprès pour les prisonniers racialisés lorsqu’ils sortent de prison et de la réalité qu’ils vivent lorsqu’ils partent? Il y a tant de choses que je peux dire au sujet de leur incarcération, mais il est question ici de récidive. Selon vous, quels programmes seraient utiles s’ils étaient en place maintenant?

M. James : Je pense à ces programmes qui sont en place dans la collectivité et qui sont administrés par des organismes communautaires où œuvrent des gens qui sont passés par là. Ils sont en mesure de les aider et de comprendre pleinement certaines de leurs expériences culturelles et de communiquer certaines des attentes à leur égard. Et ce ne sont pas seulement des attentes de la famille, mais parfois des attentes de la communauté qui peuvent être traduites par ces travailleurs communautaires, justement parce qu’ils sont passés par là.

Il y a aussi lieu d’aider sur le plan de l’éducation. Étant donné qu’ils n’ont peut-être pas eu de soutien dans le système d’éducation, les programmes qu’on leur offre à la libération pourraient aussi être des programmes éducatifs.

De la façon dont nous comprenons le racisme systémique, il y a parfois le problème du sous-emploi et du chômage chez les jeunes et les personnes de milieux racialisés. Il serait important de pouvoir les aider à réfléchir à la façon de se présenter en situation d’emploi, de pouvoir parler de leur expérience de formation et aussi de s’attaquer au racisme dont ils peuvent être l’objet.

Comme un avocat me disait, il y a des jeunes de milieux racialisés — des Noirs et des Sud-Asiatiques — qui ont dit que c’était la première fois que quelqu’un les écoutait. Lorsqu’ils sont de retour dans la collectivité, qu’ils travaillent avec des organismes communautaires, c’est la première fois qu’on les écoute et qu’on les aide comme ils ont besoin d’être aidés. Ce sont là, je pense, quelques-unes des façons dont les programmes communautaires pourraient aider ces personnes et fonctionner avec elles. L’éducation en fait partie.

Je dis aussi que les formations d’un jour ne suffisent pas. Il faut que ce soit permanent, une éducation qui leur rappelle constamment la situation et les gens avec qui ils travaillent.

La sénatrice Jaffer : Monsieur James, j’ai une question. Je vais travailler pendant l’été, comme je le fais depuis de nombreuses années. Vous avez parlé des gens des Antilles. Comme vous le savez, de très jeunes enfants sont amenés des Antilles dans notre pays et dans d’autres pays aussi. Malheureusement, leurs parents n’ont jamais réussi à leur obtenir la citoyenneté. Maintenant, ils peuvent être obligés de retourner dans une île des Antilles ou dans tout autre endroit du monde où ils n’ont aucune attache et peut-être très peu de famille. Est-ce qu’il y a des volets dans votre programme de réadaptation qui aideraient les gens qui sortent de prison à affronter cette situation très difficile d’immigration et qui sont renvoyés dans des pays qui ne sont pas vraiment le leur?

M. James : Oui, j’ai quelques références à ce sujet.

La présidente : Merci.

Le sénateur Oh : Je vous remercie de vos excellents exposés.

Ma question s’adresse à Mme Shelly Johnson. Si le projet de loi C-228 est adopté, quelles mesures supplémentaires le Service correctionnel du Canada peut-il prendre pour réduire le taux de récidive chez les délinquants autochtones? De plus, comment le cadre fédéral proposé peut-il répondre aux besoins des délinquants autochtones?

Mme Johnson : Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur. Étant donné que je suis dans l’éducation et que l’éducation a plongé beaucoup de nos gens dans les problèmes associés au régime des pensionnats indiens, je crois que c’est elle, comme l’a dit le juge Murray Sinclair, qui va nous en sortir.

Ce que je constate dans ma classe, c’est que beaucoup d’élèves arrivent avec une très faible compréhension de l’histoire canadienne du point de vue autochtone. Je pense que les gens qui vont appliquer cette loi seront peut-être au même niveau de compréhension. Chose certaine, les agents des services correctionnels fédéraux ont besoin de mieux connaître l’histoire des Autochtones au Canada. Avec tous les préjugés inconscients que les gens amènent avec eux au travail, depuis les enquêteurs, les juges et les avocats jusqu’aux gens qui s’occupent des programmes de réintégration, depuis ceux qui recueillent les statistiques jusqu’à ceux qui mènent les études, on voit bien qu’il y a très peu de compréhension. C’est mon impression. Voilà le premier problème.

Le deuxième, c’est qu’il y a très peu de programmes adaptés aux Autochtones dont ont pu bénéficier beaucoup de gens que je connais. Le rôle de nos aînés et de nos communautés... Dans certaines communautés, les problèmes de récidive viennent peut-être bien loin dans les priorités après la consommation d’eau insalubre ou un taux de chômage de 90 %. Il y a les toxicomanes. Il y a les gens qui abandonnent tout simplement, et le taux de suicide est très élevé dans nos communautés. À cause de tous ces problèmes qui sont imbriqués dans notre vie quotidienne, le racisme est présent dans tous les systèmes. Ce n’est pas seulement aux services correctionnels fédéraux ou provinciaux de s’en occuper. Il faut une approche concertée de tous les services concernés dans les administrations fédérale, provinciales et autochtones. Il faut réunir tous les acteurs à la même table pour déterminer ce qu’on peut raisonnablement faire au cours de la première année, des cinq premières années et des 10 premières années.

Cela fait 150 ans que nous sommes dans le pétrin. Il nous faudra un certain temps pour en sortir, pour être capables de nous asseoir — entre gouvernements et entre communautés — pour comprendre que ce qui convient aux Micmacs dans l’Est ne convient pas aux Pieds-Noirs en Alberta. Il faut que les gens de ces communautés puissent dire eux-mêmes : « Voici ce qui, selon nous, sera utile. Voici ce qui pourra aider. » Il faut y mettre de l’argent, évidemment. Si nous pensons que cela va se faire avec les budgets actuels, nous allons être exactement au même point dans 20 ans.

Le sénateur Richards : Je pense qu’on a probablement répondu à ma question, mais je vais demander à M. Hanson d’apporter quelques précisions. Est-ce que les prisons fédérales ou la GRC ont des données sur la récidive, de par la nature même de leur travail? Est-ce qu’il y a des statistiques sur la récidive chez les membres des gangs de rue de nos centres-villes? Sinon, il devrait y en avoir, mais pourriez-vous m’éclairer rapidement, s’il vous plaît?

M. Hanson : Un certain nombre de systèmes différents ont été mis en place pour surveiller les taux de récidive. La GRC en a quelques-uns, qui fonctionnent par l’entremise du Centre d’information de la police canadienne, mais ce n’est pas organisé de façon à ce qu’on puisse facilement en tirer des statistiques. On peut faire une recherche de personne. On peut chercher « David Richards » et voir s’il a déjà été impliqué dans un crime. Cependant, le système de la GRC n’est pas conçu pour dire quelle proportion des personnes fichées récidivent dans une année donnée. Ce n’est pas organisé de cette façon. Cela pourrait l’être, mais ce n’est pas le cas.

Les polices provinciales contribuent. Certaines provinces tiennent leurs propres statistiques sur les taux de récidive. Elles surveillent déjà la situation, mais elles le font différemment de l’une à l’autre. Pour ce qui est des membres de gangs, il se fait des recherches à ce sujet, pas de façon systématique, mais plutôt des recherches spécialisées.

Le sénateur Richards : Les gens ne se parlent pas? Les différents services de police et les différents établissements, ceux des provinces et du fédéral, ne s’en parlent pas vraiment?

M. Hanson : Eh bien, ils s’en parlent à l’occasion, mais pas assez pour que cela devienne un système qui fonctionnerait à l’échelle nationale. Il y a eu des discussions au cours des deux dernières décennies pour essayer de mettre cela en marche. À ma connaissance, cependant, il s’agit encore de projets pilotes ou d’endroits délimités.

Le sénateur Richards : Merci beaucoup.

La sénatrice McPhedran : Ma question s’adresse principalement à vous, madame Johnson. Je veux m’assurer d’avoir bien entendu ce que vous avez dit. Tout l’objet de ce projet de loi est d’établir un cadre fédéral, n’est-ce pas? Or, Je crois vous avoir entendue dire qu’il y avait dans le rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées certains aspects précis qui se rapportaient à l’établissement de ce cadre. Est-ce que je vous ai bien entendue?

Mme Johnson : Oui, vous m’avez bien entendue.

La sénatrice McPhedran : Merci. J’ai examiné plus attentivement l’article 2 du projet de loi. Au paragraphe (2), on dit : « Le cadre prévoit des mesures visant à [...] », puis cela continue avec les alinéas a) jusqu’à e). Je me demande si l’un ou l’autre de ces alinéas rejoint ce que vous disiez au sujet du rapport final de l’enquête. Si c’est le cas, pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?

Mme Johnson : Je parlais de supprimer les obstacles au partage des données. Si vous examinez les données du plan d’action national découlant de l’enquête et le plan du groupe de travail, vous trouverez des renseignements qui, je crois, seraient utiles à votre comité.

Ensuite, lorsqu’on parle de « favoriser la réinsertion sociale des personnes qui ont été incarcérées grâce à l’accès à des ressources adéquates et continues [...] », une des choses que je demandais, c’est si quelqu’un a parlé aux récidivistes. Pourquoi est-ce qu’ils ont récidivé, et qu’est-ce qui les aurait aidés à ne pas récidiver? Je sais que c’est un milieu très mouvant la plupart du temps, mais c’est tellement essentiel que cela s’impose à l’évidence. Il suffit de demander aux gens mêmes qui sont impliqués. Qu’est-ce qui vous a amené à récidiver? Est-ce un manque de soutien? Est-ce un manque de programmes et de services? Deviez-vous attendre trop longtemps? Est-ce que les programmes et les services étaient mal adaptés? Est-ce votre niveau de scolarité qui vous empêchait d’avancer? Est-ce à cause de votre santé mentale? Nous pouvons bien rester assis et jouer aux devinettes, mais à moins de demander aux premiers intéressés et de prendre le temps de les écouter, puis de créer des plans de guérison en fonction de ce qui est important pour eux, je pense que ce ne sera qu’une porte tournante.

C’est ainsi que je vois les choses, en tout cas.

La sénatrice McPhedran : Si j’ai bien compris votre réponse, surtout la dernière partie, vous dites qu’à l’heure actuelle, il n’y a pas de pratiques exemplaires ou, si vous voulez, de pratiques adaptées? Est-ce qu’il faut les créer?

Mme Johnson : Je pense que oui. En ce qui concerne les Autochtones, nous pouvons bien rester assis et dire : « Eh bien, vous savez, c’est juste une grande porte tournante. » Nous n’avons pas pris le temps d’examiner les besoins, les problèmes et les ressources. Nous n’avons pas demandé aux Autochtones mêmes ce qui, selon eux, ferait une différence dans leur vie. Je peux vous dire que dans le cadre de mon travail auprès des tribunaux des Premières Nations et de tous les Autochtones qui y sont passés, j’ai rarement vu un agent de probation ou de libération conditionnelle s’asseoir avec eux et demander : « Qu’est-ce qui s’est passé? Qu’est-ce qui vous a poussé à recommencer? » Je pense que c’est une première étape fondamentale.

La sénatrice Moodie : Je remercie les témoins d’être ici aujourd’hui. N’importe qui peut répondre à cette question. Avez-vous des données au sujet de l’impact de la récidive sur les enfants? Comment est-ce que cela se répercute d’avoir un parent ou un proche qui fait des séjours en prison, et dans quelle mesure est-ce que cela augmente la probabilité que les enfants se retrouvent eux-mêmes dans le système judiciaire?

Deuxièmement, quels programmes sont en place, à votre connaissance, pour aider les familles touchées par l’incarcération d’un proche?

Mme Johnson : Il y a cette vaste étude que j’ai menée au centre-ville de Vancouver sur un important organisme de protection de l’enfance autochtone en milieu urbain. Cet organisme a actuellement environ 400 enfants sous sa garde. En examinant les dossiers des enfants, nous avons constaté qu’un nombre écrasant de leurs parents et grands-parents avaient connu le régime des pensionnats indiens du Canada, puis celui du système canadien de protection de l’enfance. Parmi les enfants dont les parents ont été incarcérés, très peu de ceux que nous avons suivis ont abouti dans le système judiciaire.

Je peux dire que dans ma propre famille, c’est un problème qui nous touche tous. Dans ma famille, nous pouvons établir un lien direct entre des parents très jeunes, des enfants qui sont confiés à des familles d’accueil, puis qui se retrouvent dans le système judiciaire et qui connaissent enfin une mort prématurée. Je ne pense pas que ma famille soit la seule dans ce cas.

À ma connaissance, il se fait très peu de suivi des données. Les enfants qui sont passés du système de protection de l’enfance au système judiciaire... Ce ne sont que des observations empiriques que j’ai faites en siégeant à des tribunaux des Premières Nations, où des gens venaient parler de leur expérience des familles d’accueil. Je dirais qu’en un an, probablement 90 % des gens qui sont passés devant le tribunal des Premières Nations de New Westminster avaient été confiés à des familles d’accueil dans leur enfance. Et la plupart étaient devenus des parents. Là encore, ce sont des données qui ne sont pas suivies et qui devraient l’être.

La sénatrice Moodie : Madame Cortoni, il m’a semblé que vous auriez voulu répondre à la question.

Mme Cortoni : En fait, je n’ai pas de chiffres précis sur la proportion d’enfants de délinquants qui se retrouvent eux-mêmes plus tard dans le système de justice pénale. Je sais, cependant, qu’il y a eu des efforts pour mettre sur pied des programmes à leur intention, mais il s’agit dans la plupart des cas de projets pilotes qui, bien que très prometteurs, finissent par être abandonnés pour diverses raisons : manque de financement, départ de la personne responsable, et cetera.

La sénatrice Pate : Je remercie les témoins. Madame Johnson, j’ai eu, comme vous, le privilège et la responsabilité de siéger à des tribunaux autochtones ici sur ce continent, l’île de la Tortue, ainsi qu’à d’autres tribunaux, comme ceux des Maoris et ceux des Murris, des Koori et d’autres en Australie. J’ai aussi participé, il y a 21 ans, à des études sur les personnes qui sortaient de prison.

Vous ne serez probablement pas étonnée d’apprendre que, tout comme la Commission de vérité et réconciliation et l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, nous avons relevé que les personnes sortant de prison disaient avoir besoin de trois choses pour réussir et que celles qui ont réussi les avaient. Il leur fallait, essentiellement, un endroit où vivre, un groupe de soutien — familial, communautaire ou ayant une autre forme définie par la personne concernée — et un moyen de subvenir à leurs besoins, notamment quelque activité valorisante. Je vous vois hocher la tête et je suppose donc que vous n’êtes pas étonnée de ces résultats de recherche.

Pendant la pandémie, j’ai connu plusieurs personnes qui n’auraient pas pu auparavant obtenir une remise en liberté, en particulier des femmes autochtones qui avaient été désignées comme dangereuses et violentes et qui, du fait de l’évaluation que le système correctionnel en avait faite, n’avaient accès à aucune ressource communautaire. Comme les mesures de confinement durant la pandémie équivalaient à l’isolement, la Commission des libérations conditionnelles a accepté leur remise en liberté, et elles sont rentrées chez elles. Vous ne serez peut-être pas étonnée d’apprendre que, après deux ans dans un cas et six mois dans un autre cas, elles s’en tirent extrêmement bien. Même les gens du système correctionnel, au départ réfractaires à ces remises en liberté, y sont maintenant très favorables.

Il me semble que la raison pour laquelle tous les tribunaux, ainsi que les enquêtes, se penchent sur des facteurs comme l’accroissement des ressources — comme vous l’avez dit au sujet des services de protection de l’enfance — afin d’éviter d’alourdir le système de justice pénale après l’incarcération, c’est que ce genre de soutien semble être plus efficace. Avez-vous vu des exemples, outre ceux que vous avez déjà donnés, où les collectivités ont été en mesure d’assumer cette responsabilité et de diminuer le nombre de jeunes qui, du système de protection de l’enfance, passent au système judiciaire pour les jeunes, puis au système judiciaire pour adultes?

Mme Johnson : J’ai vu le Canada s’opposer devant les tribunaux à des demandes d’accroissement de ressources destinées aux enfants de Premières Nations. J’ai vu le sous-financement de ressources. Lorsque le sous-financement et le manque de soutien se font sentir dès l’enfance, il y a de bonnes chances que les gens suivent le chemin que vous venez de décrire. Quel avenir s’offre, dans ce pays, à ceux qui ont fait de piètres études, qui n’ont pas terminé l’école secondaire, à part un travail dans le secteur des services? Les écoles dans les réserves reçoivent beaucoup moins de financement que celles hors réserve. Le racisme qui imprègne toutes nos institutions a une incidence néfaste sur ces enfants.

On ne peut pas prendre une formule qui s’est avérée très utile dans une collectivité et la transposer dans une autre. Il faut du temps, des ressources et de l’initiative pour élaborer un programme ou un service qui sera utile. Nos traditions, notre langue et notre culture ont été piétinées pendant 150 ans, et il faudra donc un certain temps pour les rétablir.

Je ne peux pas prétendre que nous avons une baguette magique et que tout ira pour le mieux parce que ce n’est simplement pas le cas dans les villes. Ce ne sera pas le cas ailleurs au pays dans les collectivités des Premières Nations. Nous devons commencer au début. Nous devons, au départ, demander aux gens ce qui fonctionnera et, de plus, accorder des ressources pour les soutenir dans ce qu’ils estiment utile.

La présidente : Je suis désolée, madame Johnson. J’ai l’impression de vous interrompre sans cesse. Le temps de parole de la sénatrice Pate est écoulé. Il ne nous reste que quelques minutes pour un deuxième tour de questions.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à Mme Cortoni. Je connais votre expertise en matière de cas de nature sexuelle. Avez-vous une idée du nombre de cas qui ne sont pas récupérables, malgré toutes les interventions médicales ou autres qui sont offertes?

[Traduction]

Mme Cortoni : C’est une question très intéressante. J’ai examiné les chiffres une fois dans ma vie, lorsque je travaillais avec des délinquants à risque élevé au pénitencier de Kingston. Franchement, c’est un peu une supposition ou une estimation, si vous voulez, mais je dirais qu’il y a une très petite proportion des délinquants à risque élevé avec lesquels, en ce qui me concerne, nous ne savons pas quoi faire, quels que soient, comme vous l’avez dit, les traitements psychologiques ou médicaux qu’ils pourraient vouloir recevoir.

La grande majorité — je me base ici sur les résultats de recherche de M. Hanson sur l’évaluation du risque et les taux de récidive — des délinquants sexuels, tant qu’ils peuvent demeurer dans la collectivité entre 5 et 10 ans, voire davantage, s’en tirent bien. Plus longtemps ils restent dans la collectivité, moins ils risquent de récidiver. En général, les délinquants sexuels, collectivement, ont des taux de récidive inférieurs à ceux des autres délinquants, par exemple, les auteurs de crimes violents ou de crimes non sexuels. La nature du crime, bien sûr, fait qu’il est très différent pour tous ceux qui s’occupent de cas de récidive unique.

L’autre approche très prometteuse, y compris pour les délinquants dont le risque de récidive est de 100 %, est celle de Circles of Support and Accountability, mise au point en Ontario dans les années 1990. Il s’agit de programmes communautaires mis en œuvre par des bénévoles, mais des bénévoles formés par des spécialistes de la délinquance sexuelle — des gens comme moi, par exemple — et aussi par des policiers. Ils apprennent, tout en offrant du soutien, ce pour quoi il faut être aux aguets et quel genre de soutien est nécessaire pour ces hommes présentant un risque extrêmement élevé.

La sénatrice McPhedran : Ma question s’adresse à tous les témoins. Je me reporte encore une fois à l’article 2, qui énonce les mesures prévues par le cadre. Elle porte plus précisément sur le sous-alinéa 2c), qui prévoit qu’il faut « appuyer les initiatives à caractère confessionnel et communautaire axées sur la réinsertion sociale des personnes qui ont été incarcérées [...] »

Y a-t-il parmi vous quelqu’un qui a de la documentation sur les initiatives à caractère confessionnel ou qui a des préoccupations à ce sujet?

Mme Cortoni : Si vous le permettez, je vais poursuivre sur ce que je disais au sujet de Circles of Support. Je pense que ce sont de bons exemples dans ce contexte. Ce ne sont pas des initiatives entièrement fondées sur la foi religieuse, même si elles ont été lancées par des personnes professant une foi. Il s’agit d’initiatives communautaires où des bénévoles offrent du soutien tout en mettant les délinquants qui choisissent de participer devant leur responsabilité.

Ce n’est pas un programme correctionnel. Ce n’est pas mandaté par le système de justice pénale. Le délinquant doit se porter volontaire pour participer au programme. Les bénévoles ont l’appui de spécialistes qui les aident à comprendre à quoi il faut prêter attention. C’est un excellent exemple. Les initiatives de ce genre, qui se répandent dans beaucoup de pays, réduisent très efficacement la récidive chez les délinquants sexuels à risque élevé.

M. Hanson : Je pense que la participation fondée sur la foi peut, en soi, constituer un bien intrinsèque pour ces groupes confessionnels et peut être, ou ne pas être, un facteur qui réduit la récidive. Si ces programmes doivent faire partie d’une stratégie de réduction de la récidive, je pense qu’il faudra faire la démonstration de leur utilité. Circles of Support peut faire cette démonstration, mais beaucoup de programmes ne le peuvent pas. Je pense que c’est une chose à laquelle vous devez prêter attention.

La présidente : Permettez-moi de prendre un moment pour remercier tous les témoins de cet excellent groupe. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous nous avez accordé pour témoigner devant le comité aujourd’hui. Merci beaucoup.

Chers collègues, nous sommes maintenant prêts à procéder à l’étude article par article du projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive.

Avant de commencer, je tiens à rappeler un certain nombre de points. Si, à un moment donné, l’un des membres du comité ne sait pas clairement où nous en sommes dans le processus, il ne doit pas hésiter à demander des éclaircissements.

Je rappelle également que, lorsqu’il y a plus d’une proposition d’amendement d’un article, les amendements doivent être présentés suivant l’ordre des lignes de l’article. Par conséquent, avant de procéder à l’étude d’un amendement, je vais vérifier si des membres avaient l’intention de proposer, pour cet article, un amendement antérieur.

Si un membre propose un amendement, il serait utile de signaler au comité les autres articles du projet de loi sur lesquels l’amendement pourrait se répercuter. Je vous rappelle que, si un membre s’oppose à un article en entier, la procédure appropriée en comité n’est pas de proposer une motion visant à supprimer l’article en entier, mais de voter contre l’adoption de l’article quand il sera mis aux voix.

Je ferai de mon mieux pour que tous les membres qui souhaitent prendre la parole aient l’occasion de le faire. Si vous souhaitez intervenir, à n’importe quel moment du processus, vous devez utiliser la fonction « Lever la main » dans l’application Zoom pour signaler votre intention à la présidence.

Enfin, je tiens à rappeler aux membres que, s’il y a une incertitude quant aux résultats d’un vote oral ou à main levée, la façon la plus efficace de procéder est de demander un vote par appel nominal. Les membres savent que tout vote à l’égalité des voix annule la motion en question.

Êtes-vous d’accord pour que le comité procède à l’étude article par article du projet de loi C-228, Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive?

Des voix : D’accord.

La présidente : Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption du titre?

Des voix : D’accord.

La présidente : Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption du préambule?

Des voix : D’accord.

La présidente : Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption de l’article 1, qui contient le titre abrégé?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 2 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 3 est-il adopté?

La sénatrice McPhedran : Je suis désolée, madame la présidente. Les choses avancent tellement vite. Je tiens à exprimer des préoccupations au sujet de l’article 2, s’il vous plaît. Quand vous dites l’article 2, est-ce que vous incluez les paragraphes (1) et (2) et les alinéas a) à e), tout cela?

La présidente : Oui, c’est le cas.

La sénatrice McPhedran : Alors, oui, je veux certainement y revenir, je vous prie.

La sénatrice Martin : Puis-je vous demander, sénatrice McPhedran, si vous voulez simplement discuter de cet article ou si vous avez autre chose à proposer?

La sénatrice McPhedran : Oui. Après avoir entendu le groupe de témoins qui est parti il y a environ une minute, j’ai une préoccupation au sujet d’une disposition particulière du paragraphe 2(2) et je voudrais en parler.

La sénatrice Martin : Lorsque vous dites que vous voulez en parler, envisagez-vous un amendement? Parce que nous avons déjà dépassé ce point. Vous n’êtes pas intervenue quand nous examinions cet article.

La sénatrice McPhedran : Eh bien, je cherchais à intervenir.

La sénatrice Martin : Nous avons formellement adopté l’article en question.

La sénatrice McPhedran : J’essayais de mon mieux de me faire entendre et j’agitais la main.

La présidente : Sénatrice McPhedran, pourriez-vous nous faire part de vos préoccupations et pourrions-nous les entendre?

La sénatrice Martin : Avant d’autoriser ce retour en arrière — j’en reste un peu surprise —, j’aimerais savoir de quoi il s’agit. Faut-il obtenir l’autorisation pour y revenir? En fait, nous sommes déjà passés à autre chose.

La sénatrice McPhedran : Cette hâte à empêcher la discussion sur cet article me laisse perplexe. Nous y étions encore il y a quelques secondes à peine. Oui, je demande si nous pouvons revenir.

La sénatrice Martin : Ma question est simplement pour clarifier les choses. J’ai reçu l’observation de la sénatrice Pate. Proposez-vous une observation? Si vous proposez un amendement, c’est très différent. J’aimerais comprendre ce que vous demandez. Nous sommes passés à autre chose. Nous en sommes actuellement à un article différent.

La sénatrice McPhedran : Je demande que nous y revenions. Nous y étions encore il y a quelques secondes.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : S’il est amendé, il retourne à la Chambre.

[Traduction]

La sénatrice Martin : Oui. C’est ce qui me préoccupe.

Voici ce que je voudrais savoir de la sénatrice McPhedran. Nous avons entendu deux témoins expliquer leur point de vue. S’il est question de faire des observations, c’est quelque chose dont nous pouvons nous occuper plus tard et, pour le moment, nous pouvons continuer, plutôt que d’autoriser un retour à cet article particulier.

La sénatrice McPhedran : C’est une observation que je voudrais formuler.

La sénatrice Martin : D’accord. C’est important. Je m’excuse d’intervenir, mais j’étais inquiète de ce que vous vouliez proposer. Merci beaucoup, sénatrice McPhedran, d’avoir précisé qu’il s’agira d’une observation.

La présidente : Merci, sénatrice McPhedran.

L’article 3 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 4 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : L’article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le préambule est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le titre est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La présidente : Le projet de loi est-il adopté?

Des voix : D’accord.

La sénatrice Pate : Avec dissidence.

La présidente : Le comité souhaite-t-il annexer des observations au rapport? Je crois que nous en avons deux. Le comité veut-il continuer à huis clos pour discuter le texte des observations?

Des voix : D’accord.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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