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AEFA - Comité permanent

Affaires étrangères et commerce international


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 31 mars 2022

Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international se réunit aujourd’hui, avec vidéoconférence, 11 h 30 [HE], pour étudier le projet de loi S-217, Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre.

Le sénateur Peter M. Boehm (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénateurs, je m’appelle Peter Boehm. Je suis un sénateur de l’Ontario et je préside le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Avant de commencer, j’aimerais vous présenter les membres du comité qui participent à la réunion d’aujourd’hui : la sénatrice Gwen Boniface, de l’Ontario; la sénatrice Mary Coyle, de la Nouvelle-Écosse; la sénatrice Marty Deacon, de l’Ontario; la sénatrice Amina Gerba, du Québec; le sénateur Stephen Greene, de la Nouvelle-Écosse; le sénateur Peter Harder, vice-président du comité, de l’Ontario; le sénateur Michael MacDonald, de la Nouvelle-Écosse; le sénateur Mohamed-Iqbal Ravalia, de Terre-Neuve-et-Labrador; le sénateur David Richards, du Nouveau-Brunswick; le sénateur Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique. De plus, nous recevons aujourd’hui la sénatrice Ratna Omidvar, marraine du projet de loi S-217, à titre de témoin.

Je vous souhaite à tous la bienvenue. Je souhaite aussi la bienvenue aux gens qui regardent la webdiffusion de la réunion.

[Français]

Aujourd’hui, nous tenons une séance hybride. J’aimerais rappeler aux sénateurs et aux témoins qui participent à la réunion par vidéoconférence qu’ils sont priés de garder leur micro éteint en tout temps, à moins que le président leur donne la parole.

Je demanderais aux sénateurs d’utiliser la fonction « lever la main » pour indiquer qu’ils souhaitent intervenir. Les sénateurs présents dans la salle de réunion peuvent le signaler directement à la greffière, Mme Lemay.

Si un problème technique survient, particulièrement en ce qui a trait à l’interprétation, veuillez me le signaler ou l’indiquer à la greffière pour que nous puissions le régler rapidement.

Aujourd’hui, nous poursuivons notre étude du projet de loi S-217, Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre.

[Traduction]

Pour la première heure de la réunion, nous recevons trois distingués invités. Tout d’abord, comme je l’ai dit plus tôt, nous recevons la marraine du projet de loi S-217, notre collègue l’honorable Ratna Omidvar. Nous recevons également le recteur émérite de l’Université d’Ottawa, l’honorable Allan Rock, qui a également été ministre de la Justice, solliciteur général et ambassadeur du Canada aux Nations unies. Enfin, nous recevons le président du Conseil mondial pour les réfugiés et la migration, l’honorable Lloyd Axworthy, qui a été membre du Cabinet, notamment à titre de ministre des Affaires étrangères. D’ailleurs, au cours de cette période, lui et moi avons travaillé en étroite collaboration.

Nous vous remercions de vous joindre à nous. Avant de passer aux déclarations préliminaires, je tiens à rappeler aux membres du comité que nous n’entendrons qu’un seul groupe de témoins aujourd’hui. À la fin de cette partie de la réunion, nous passerons immédiatement à l’étude article par article du projet de loi.

Sénatrice Omidvar, vous avez la parole.

L’hon. Ratna Omidvar, marraine du projet de loi : Honorables sénateurs, je vous remercie de m’avoir invitée à témoigner devant le comité. Je vous remercie également de l’attention que vous avez portée à la proposition la semaine dernière.

Au cours du mois dernier, nous avons vu le monde changer. La brutalité de l’invasion russe en Ukraine a nécessité une intervention rapide et sévère de la communauté internationale. Nous avons vu l’imposition de régimes de sanctions, comme l’exclusion de la Russie du système bancaire SWIFT, auxquels nul ne se serait attendu il y a quelques semaines.

Récemment, le gouvernement a annoncé que la ministre Freeland se joindrait à un groupe de travail international avec les États-Unis, le Royaume-Uni et d’autres pour :

[...] collaborer en vue de prendre toutes les mesures juridiques possibles pour trouver, retenir, bloquer, saisir et, s’il y a lieu, confisquer les biens de ces particuliers et entités qui ont été sanctionnés relativement à l’invasion préméditée, injuste et non provoquée de l’Ukraine par la Russie, et à l’agression continue du régime russe.

La Loi sur la réaffectation des biens bloqués, comme proposée dans le projet de loi S-217, assurerait le fondement juridique requis pour tenir les dictateurs, les auteurs de violations des droits de la personne et les kleptocrates responsables de leurs gestes.

Comme nous avons peu de temps, j’aimerais aborder certains sujets qui ont fait l’objet de discussions la semaine dernière. Premièrement, il est vrai que le préambule du projet de loi met l’accent sur les personnes déplacées de force à titre de raison importante de cet effort. Toutefois, je soulignerais que l’article 6, la disposition habilitante pour les motifs de saisie et de réaffectation des biens bloqués, va bien au-delà du déplacement forcé. D’autres facteurs comme la corruption, les violations massives des droits de la personne et les meurtres extrajudiciaires peuvent donner lieu à une telle mesure. L’objectif est de veiller à ce que d’autres actes déplorables soient pris en compte.

De plus, en tant que sénateurs, nous savons que ce sont les dispositions habilitantes, et non le préambule, qui donnent du mordant à un projet de loi.

Deuxièmement, il est vrai que la plupart des régimes de sanctions visent à inciter un changement de comportement. Or, je tiens à souligner que lorsque la Loi sur les mesures économiques spéciales a été adoptée en 1992, le gouvernement avait fait valoir qu’elle allait bien au-delà d’un changement de comportement. Lors de son témoignage devant un comité en 1992, Barry Mawhinney, qui était conseiller juridique du secrétaire d’État aux Affaires extérieures, avait fait valoir que la loi visait à faire payer le juste prix à un autre gouvernement pour un comportement inacceptable.

La Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre, quant à elle, fait payer le juste prix aux bureaucrates qui ont volé les fonds publics et provoqué une catastrophe, en indignant leur propre peuple. La confiscation et la réaffectation des biens volés aux victimes pourraient avoir un effet dissuasif sur les autres oligarques et les inciter à changer leur comportement. Dans le cas de la Russie et de Poutine en particulier, les oligarques pourraient inciter ce changement de façon individuelle ou collective, en raison de leur influence sur Poutine.

Or, cette loi ne vise pas uniquement les changements de comportements. Elle vise aussi la justice. Les victimes de la corruption subissent l’indignité de perdre leur maison, leur vie, leurs perspectives et leur sécurité tandis que les oligarques se prélassent dans leurs manoirs à Londres ou leurs yachts ancrés sur la côte de l’Italie. La réaffectation des biens aux victimes permet de résoudre la quadrature du cercle sans nécessairement perdre le levier du changement.

Troisièmement, il y a eu ailleurs dans le monde des discussions au sujet de lois similaires qui miseraient sur le retour des biens au pays d’origine. C’est une solution logique dans certains cas, et la loi proposée le permettrait, mais il ne serait pas logique de rendre de l’argent à un régime qui est corrompu et qui a commis des violations des droits de la personne si aucun changement ne s’opère. Pensons par exemple au Venezuela. Il n’y a aucun avantage à rendre les fonds à un régime corrompu. Dans l’intervalle, les gens qui souffrent ont besoin de soutien et de justice. La Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre offre cette souplesse.

Quatrièmement, en ce qui a trait à la capacité des tribunaux de traiter la loi, je vous rappelle que le sénateur Dalphond, ancien juge du Québec, a fait valoir ceci lors de la deuxième lecture du projet de loi :

Dans l’ensemble, il n’y a rien à craindre dans le projet de loi S-217. Les idées qui le sous-tendent sont déjà bien établies dans les lois canadiennes relatives aux produits de la criminalité, y compris la Loi sur l’administration des biens saisis.

En conclusion, chers collègues, je dirais que pendant beaucoup trop longtemps, les dirigeants étrangers corrompus ont agi en toute impunité. Il ne suffit pas de les dénoncer; il faut les faire payer. La Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre nous permettrait de le faire. Merci.

Le président : Merci beaucoup, sénatrice Omidvar. Nous passons maintenant à l’honorable Allan Rock. Vous avez la parole.

L’honorable Allan Rock, c.p., recteur émérite, Université d’Ottawa, à titre personnel : Merci, monsieur le président et honorables sénateurs. Je suis reconnaissant d’avoir l’occasion de témoigner devant le comité aujourd’hui. J’aimerais faire valoir cinq points au sujet du projet de loi qui vous est présenté.

Premièrement, à mon humble avis, le projet de loi S-217 représente un exercice valide de la compétence constitutionnelle du gouvernement fédéral. En raison de son caractère véritable, il n’a rien à voir avec le rôle des provinces de notre fédération, mais tout à voir avec les relations internationales. Il se fonde sur le même pouvoir constitutionnel fédéral qui a été utilisé pour créer le régime de sanctions au départ. Il ajoute des outils à la trousse dont dispose le gouvernement du Canada pour appliquer les politiques étrangères. Il vise à atteindre un objectif étroitement lié au rôle que joue le Canada dans le monde et, à mon humble avis, il s’inscrit clairement dans la théorie de l’intérêt national de la disposition sur la paix, l’ordre et le bon gouvernement de la Loi constitutionnelle de 1867.

Deuxièmement, le projet de loi S-217 ne nuit pas à l’indépendance ou à l’impartialité des juges. Il exige d’eux ce qu’ils font déjà au quotidien : qu’ils évaluent le bien-fondé d’une demande judiciaire; qu’ils déterminent si les faits présentés au tribunal démontrent que le seuil de la preuve a été atteint et qu’ils acceptent, modifient ou rejettent la proposition du demandeur sur la façon dont les biens devraient être réaffectés. Le tribunal peut aussi jouer un rôle de supervision et recevoir les rapports sur la disposition des biens afin d’assurer le respect de l’ordonnance. En résumé, les juges se verront demander de statuer sur les faits et de prendre une décision juste.

Troisièmement, les sanctions ne visent pas uniquement à modifier les comportements. Elles visent aussi d’autres objectifs valides. Comme l’a fait valoir Mme Lilly lors de son témoignage devant le comité la semaine dernière, les sanctions peuvent être imposées pour plusieurs raisons; la modification des comportements n’en est qu’une parmi celles-ci. Les États peuvent imposer des sanctions pour plaire à un public national et lui montrer qu’ils sont proactifs, pour communiquer à un autre État leur détermination et pour prévenir certains types de comportements ou pour punir.

Mme Lilly a fait référence aux ouvrages juridiques, notamment à un article publié par Kim Nossal de l’Université Queen’s, qui examinait les sanctions à titre de punition et non dans un objectif de modification des comportements. Dans notre cas, l’objectif de la loi n’est pas simplement de punir, mais aussi de dissuader, de faire savoir au reste du monde que le Canada ne sera pas un lieu sûr pour garder les biens obtenus de façon illicite et d’atteindre un objectif de justice pour les victimes de l’inconduite des contrevenants en utilisant les biens pour les aider.

Quatrièmement, le modèle suisse a démontré que la réaffectation pouvait bien fonctionner. À titre de précision, la confiscation et la réaffectation des biens ici, comme en Suisse, se font uniquement s’il est impossible de s’entendre sur le retour cordial des biens au pays d’origine. On accorde la priorité à l’entraide juridique. La conclusion idéale serait de rendre des biens illégaux au pays d’origine et à son peuple par l’entremise de la négociation, mais s’il est impossible de le faire, alors le gouvernement suisse ou canadien peut faire une demande au tribunal pour la réaffectation des biens. La loi suisse encourage expressément la participation des organisations non gouvernementales dans la proposition. La Suisse a donc réaffecté plus de 2 milliards de dollars de cette façon à des fondations pour l’éducation, à des opérations de déminage et à d’autres fins.

Cinquièmement, le Canada ne sera pas le seul pays à adopter un tel régime. Le modèle suisse est déjà en place et fonctionne bien. D’autres pays, comme les États-Unis, réaffectent les biens bloqués par l’entremise de décrets. La loi respecte le modèle suisse en ayant recours aux tribunaux, puisqu’une telle approche assure une application régulière de la loi et la primauté du droit.

Il faut aussi tenir compte du groupe de travail international évoqué par la sénatrice Omidvar, créé par le G7, et dont fait partie la vice-première ministre du Canada. Soi dit en passant, rien ne laisse penser ici que les provinces devraient participer à ce groupe de travail international, dont l’objectif est d’examiner les circonstances dans lesquelles les biens bloqués peuvent être confisqués et réaffectés. Pour atteindre cet objectif, le Canada aura besoin du pouvoir statutaire conféré par le projet de loi S-217.

Mesdames et messieurs les sénateurs, je vous remercie. Je serai heureux de répondre à vos questions.

Le président : Merci beaucoup, monsieur Rock. Monsieur Axworthy, vous avez la parole.

L’honorable Lloyd Axworthy, c.p., président, Conseil mondial pour les réfugiés et la migration, à titre personnel : Je suis heureux de vous revoir et de pouvoir témoigner devant le comité. Pour commencer, je tiens à exprimer mon plein accord avec les propos de la sénatrice Omidvar et de M. Rock. Je vais utiliser le temps qui m’est accordé pour renforcer certains points qui ont été évoqués.

Aujourd’hui, il est temps d’intervenir de façon importante et novatrice pour lutter contre les conséquences négatives de la corruption. Le Conseil mondial pour les réfugiés et la migration travaille à ce dossier depuis plus de cinq ans. Nous avons réalisé notre première enquête en Tanzanie, dans un camp de réfugiés, où on nous a dit qu’une très grande partie des fonds qui étaient destinés aux services de santé et d’éducation de base étaient dérobés par les dirigeants. Seule une petite partie de l’argent se rendait aux organisations communautaires, qui n’étaient pas en mesure d’appuyer les droits et services fondamentaux. Cette situation se reproduit partout dans le monde.

En fait, la Banque mondiale nous a dit que plus de 20 milliards de dollars de biens bloqués restaient en suspens chaque année. Le blocage des biens a une certaine incidence, mais elle pourrait être beaucoup plus importante si les biens étaient saisis et réaffectés. Comme vous l’avez entendu, nous avons surtout centré nos efforts sur l’Ukraine. Le nombre et la portée des sanctions qui ont été appliquées nous permettent d’établir un lien direct entre la corruption des oligarques et les activités criminelles du régime russe. Ces deux éléments sont liés; ils ne sont pas distincts. Ils donnent lieu à des catastrophes, à la violence et à la destruction.

Le Sénat assume maintenant un important rôle de leadership à cet égard. Comme nous l’avons fait valoir dans notre première étude, il est important de trouver une façon de tenir les gens responsables. Il n’est pas seulement question de comportement ou de dissuasion, mais bien de responsabilisation. En même temps, nous devons réaliser qu’il faudra injecter des fonds pour la reconstruction et la restauration de l’Ukraine. On parle de dizaines de milliards de dollars de dommages au cours des quatre ou cinq premières semaines d’invasion, et du déplacement de plus de quatre millions de personnes.

Le conseil s’intéresse surtout aux personnes déplacées et aux réfugiés, et nous avons constaté que le système international n’était pas capable de financer ces réparations. Le système de parrainage des Nations unies permet parfois uniquement de rendre de 30 à 40 % des biens à la population pour offrir du soutien aux victimes.

Le point sur lequel je veux insister, c’est que la mesure législative présentée par la sénatrice Omidvar — qui est membre du conseil — représente l’occasion pour le Canada de faire preuve d’un vrai leadership. Étant donné mon expérience à Affaires mondiales, je sais que pour que les accords internationaux, la réforme et le changement s’opèrent, il faut des champions. Il faut qu’un gouvernement ou un groupe soit prêt à présenter des idées novatrices. Notre ministre des Affaires étrangères a parlé de la nécessité de se réunir. Cela signifie également qu’il faut créer; la mesure législative présentée au comité aujourd’hui est très créative. Grâce aux efforts et à la persévérance de la sénatrice Omidvar avec ce projet de loi qui pourrait être adopté par le Sénat, nous allons faire un important pas vers l’avant.

Comme l’a fait valoir M. Rock, la vice-première ministre est maintenant membre d’un groupe international du G7. D’où viendront les idées? Elles viendront des délibérations et des décisions que prendra le Sénat aujourd’hui.

Je vous remercie de tenir compte de ces observations. Sachez que la mesure que vous prendrez contribuera à nous permettre de faire un pas de plus vers la responsabilisation des personnes, la punition des criminels, la réparation des torts causés aux victimes et l’octroi d’un soutien à ces personnes. Cela constituera en soi une étape majeure dans la réforme de l’ordre international, qui subit de grandes pressions à l’heure actuelle.

Je vous remercie de votre attention. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président : J’aimerais remercier tous nos témoins de leurs déclarations préliminaires. Je voudrais également souligner que le sénateur Victor Oh s’est joint à nous.

[Français]

Avant de laisser la place aux questions, je rappelle aux membres du comité qui participent à la réunion à distance d’utiliser la fonction « main levée » pour signaler le désir d’être ajouté à la liste que tient notre greffière.

[Traduction]

Je tiens également à informer les membres du comité que, pendant la première série de questions, chacun de vous disposera d’un maximum de quatre minutes pour poser des questions et obtenir des réponses. Veuillez indiquer à qui vous souhaitez adresser votre question. Comme vous le savez, le temps limité qui vous est imparti signifie que vous devez être bref. Si le temps nous le permet, nous pouvons toujours organiser une deuxième série de questions.

J’aimerais aussi souligner que le sénateur Leo Housakos, du Québec, vient de se joindre à nous en sa qualité de chef intérimaire de l’opposition officielle. Soyez le bienvenu, sénateur.

Nous allons maintenant passer aux séries de questions.

La sénatrice M. Deacon : Je remercie nos invités et nos témoins de s’être joints à nous aujourd’hui. Le sujet que nous abordons est très important et tout à fait opportun.

Je crois comprendre que, si ce projet de loi est adopté, ce sont les tribunaux qui décideront de la répartition des biens saisis et confisqués. J’aurais d’abord pensé qu’en confiant cette décision au gouvernement en place dans le cadre des documents qu’il présente au tribunal, on aurait plutôt ajouté un niveau supplémentaire de responsabilité et d’imputabilité.

Quel a été le processus de réflexion qui vous a amené à permettre aux tribunaux, plutôt qu’au gouvernement, de décider de la répartition des biens?

Je poserais d’abord cette question à la sénatrice Omidvar, mais je serais heureuse que n’importe lequel d’entre vous s’exprime à ce sujet. Merci.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie de votre question, sénatrice Deacon.

Le fondement du projet de loi n’est pas seulement la justice. C’est aussi l’application régulière de la loi, la transparence et la responsabilité. Lors de l’élaboration de la structure du projet de loi, nous étions convaincus que le processus suisse, qui consiste à faire appel aux tribunaux pour rendre une décision selon la prépondérance des probabilités, après avoir entendu des témoins, y compris les propriétaires des biens, leur famille et le gouvernement du pays en question, nous permettrait d’aboutir à une décision équitable, responsable et justifiable. C’est ce qui a motivé l’intégration des tribunaux dans le processus.

Je pense que nous savons tous que nos tribunaux sont à l’abri de toute ingérence politique, et ils l’ont prouvé à maintes reprises. Je suis très satisfaite à l’idée que nous ayons recours à ce levier, au lieu de permettre que la décision soit assujettie à des motivations politiques, comme c’est le cas dans certains autres pays.

Je ne sais pas si M. Rock ou M. Axworthy souhaite ajouter quelque chose.

M. Rock : Je voudrais juste ajouter à cette excellente réponse, que j’approuve entièrement, que la façon dont nous avons envisagé le fonctionnement de ce système est la suivante : le procureur général, au nom du gouvernement, présenterait au tribunal un plan ou une proposition sur la façon dont les biens seraient réaffectés. Le tribunal serait alors saisi de ce plan afin qu’il puisse l’examiner, le mettre à l’épreuve, l’évaluer et entendre les autres parties à ce sujet.

Les tribunaux rendraient une ordonnance pour le paiement hors Cour de l’argent dans un certain but, mais ils le feraient vraisemblablement en fonction de ce que le gouvernement présenterait au tribunal, par l’intermédiaire du procureur général. Nous supposons également que le procureur général consulterait ses collègues du Cabinet avant d’aller de l’avant, y compris le ministre des Affaires étrangères, pour s’assurer que la demande est conforme à notre position internationale.

Voilà comment nous avons vu les choses.

Le président : Monsieur Axworthy, souhaitiez-vous répondre à la question?

M. Axworthy : Je pense que ces réponses sont amplement suffisantes.

Le président : Sénatrice Deacon, il vous reste moins d’une minute.

La sénatrice M. Deacon : Pendant le temps qu’il me reste, je précise que la question que je poserai pourrait être la partie B de ma question précédente. Si le tribunal décide que les biens bloqués doivent être saisis et distribués, tout organisme de bienfaisance enregistré au Canada aurait-il droit à cet argent? Un groupe de personnes pourrait-il y avoir droit? Quels sont les paramètres de cette décision? La décision est-elle laissée entièrement à la discrétion des tribunaux?

J’adresse cette question — cette partie B — à toute personne qui aimerait y répondre.

Le président : Veuillez répondre en 20 secondes.

La sénatrice Omidvar : Je vous indique très rapidement que, oui, le tribunal a la capacité de réaffecter les biens à un organisme de bienfaisance canadien, à un organisme de bienfaisance international ou à une organisation internationale ou multinationale comme l’ONU ou d’autres organismes. Donc, ma réponse rapide serait « oui ».

Le président : Merci. Nous passons à l’intervenante suivante.

La sénatrice Coyle : Je remercie infiniment tous les membres de notre groupe d’experts de cet après-midi.

Monsieur Rock, vous nous avez apporté un certain réconfort, notamment en parlant de l’expérience de la Suisse et des divers autres points que vous avez soulevés. Monsieur Axworthy, comme vous l’avez dit, le temps est venu d’adopter une initiative vraiment sérieuse et d’apporter une réponse novatrice à la corruption et à la criminalité connexe que vous avez décrites.

J’aimerais remercier la sénatrice Omidvar de son leadership, de sa créativité et de tous les efforts qu’elle a déployés, et j’aimerais remercier les autres membres du groupe d’experts qui ont déployé des efforts pour faire en sorte que ce dossier soit soumis à notre examen aujourd’hui.

J’allais en fait poser la même question que la sénatrice Deacon au sujet du processus, alors je vais passer directement à la question des amendements. Sénatrice Omidvar, vous savez que nous allons examiner aujourd’hui un certain nombre de modifications à apporter à cette mesure législative. Pourriez-vous nous parler de ces modifications, dans leur forme actuelle, et nous donner votre avis à leur sujet?

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie, sénatrice Coyle, de votre question. J’ai hâte d’intervenir à propos de ces amendements, en ma qualité de sénatrice, et non en ma qualité de membre du comité, si on me donne l’occasion de le faire.

À ma connaissance, cinq amendements ont été proposés.

Le premier est l’amendement de la sénatrice Gerba qui donne aux tribunaux la possibilité de retirer 2,5 % des avoirs bloqués pour couvrir les frais que le tribunal canadien peut encourir. Cet amendement de la sénatrice Gerba, qui s’inspire du modèle suisse, est formulé d’une manière souple. Il indique que « le tribunal peut »; il ne dit pas que « le tribunal doit ».

Mon opinion à ce sujet est que le comité devrait étudier attentivement l’amendement, car les 2,5 % des biens qui serviront à couvrir les frais du système judiciaire canadien privent les victimes de ces 2,5 %. Par conséquent, il faut bien réfléchir avant de permettre que le Canada soit associé à des sommes qui ont été entachées de différentes manières. Toutefois, le comité, dans sa sagesse, décidera du bien-fondé de l’amendement.

Les deux amendements de la sénatrice Coyle harmonisent le libellé de la Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre avec d’autres lois qui sont en jeu — c’est-à-dire les trois régimes de sanctions et, en particulier, la LMES. Les amendements découlent, je crois, des recommandations de la professeure Meredith Lilly, qui était, si je me souviens bien, la directrice des politiques du premier ministre Harper. Les amendements de la sénatrice Coyle visent à faire en sorte que le libellé de la Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre et des autres régimes de sanctions soit harmonisé. Parce qu’ils renforcent le projet de loi, je les appuie de tout cœur. C’est exactement le travail que le comité devrait faire; il devrait examiner le libellé du projet de loi, le mettre en contexte, et cetera. J’accueille donc favorablement ces amendements, et je les appuie.

Les amendements du sénateur Woo, qui limitent le champ d’application de la Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre à celui de la loi de Sergueï Magnitski, sont très problématiques à mes yeux, car ils limitent la portée du projet de loi à un seul régime de sanctions, à savoir celui de la loi de Sergueï Magnitski. À titre d’exemple, chers collègues, je vous dirai que, dans le cadre de la loi de Sergueï Magnitski, 30 oligarques russes ont été sanctionnés, alors que dans le cadre de la LMES, qui prévoit un vaste ensemble de sanctions, 800 oligarques russes ont été sanctionnés. Ces amendements limiteraient considérablement la portée de la justice que nous essayons d’obtenir ici.

Je pense que mon temps de parole est écoulé.

Le président : Merci, sénatrice Omidvar. Je suis sûr que nous reviendrons sous peu sur ces éléments.

Le sénateur Ravalia : Je remercie tous nos témoins de leur présence.

Lors de sa comparution devant le comité, le 24 mars, la professeure Meredith Lilly a fait remarquer que la liste des conditions permettant d’imposer des sanctions en vertu de la loi de Sergueï Magnitski et de la Loi sur les mesures économiques spéciales diffère de la liste des conditions de l’article 6 du projet de loi S-217, qui doivent être remplies pour qu’un tribunal puisse ordonner la réaffectation des biens bloqués.

Par exemple, elle a noté que le fait d’être associé à une grave atteinte à la paix et à la sécurité internationales ayant entraîné ou risquant d’entraîner une crise internationale grave, soit l’une des conditions énumérées dans la LMES qui a été utilisée pour sanctionner plus de 800 personnes à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ne figurait pas dans le projet de loi S-217 comme motif de réaffectation des biens.

Sénatrice Omidvar, certaines de ces incohérences vous préoccupent-elles, et devons-nous être plus judicieux dans notre manière de formuler le projet de loi actuel?

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie de votre question, sénateur Ravalia.

C’est précisément le genre de travail qu’un comité sénatorial devrait faire. Les témoins ont remarqué des incohérences. Cette incohérence a été réglée, ou elle sera réglée, par l’amendement que la sénatrice Coyle propose d’apporter au projet de loi, ce qui le renforcera.

Je crois que vous avez fait comparaître des témoins experts qui vous ont donné leurs meilleurs conseils. J’espère qu’en fin de compte, le projet de loi sera renforcé grâce à ces amendements. Je ne vois pas d’autres incohérences pour le moment.

Le sénateur Woo : J’adresse ma première question à M. Rock ou à M. Axworthy.

Vous avez tous mentionné le large éventail de sanctions qui ont été imposées à la Russie depuis le début de la guerre. Tout cela, bien sûr, a eu lieu en l’absence du projet de loi S-217.

Puis-je donc vous demander si, à votre avis, nous avons remarqué jusqu’à maintenant, des obstacles à l’imposition de sanctions contre la Russie?

M. Axworthy : Je pense que ce que vous décrivez est vraiment une superposition ou une accumulation des sanctions. Les sanctions qui ont été imposées bloquent les biens. Ce que le projet de loi S-217 prévoit, c’est une réaffectation des biens vers ceux qui ont été touchés par ces actions ou dont la vie a été détruite en raison de ces actions. Par conséquent, je pense que le projet de loi porte l’incidence des sanctions à un autre niveau.

Le fait que le G7 envisage désormais de déployer un effort international plus général renforcera les pressions exercées et aura une incidence plus importante sur l’État criminel de la Russie. Si ces gens constatent que les tirelires ne contiennent plus la moindre pièce de monnaie, ils auront peut-être encore plus de raisons d’essayer d’assumer leur criminalité et leur responsabilité.

Le sénateur Woo : Je vous remercie de votre réponse. Ce que vous avez fait valoir, à mon avis, c’est que les biens ont déjà été bloqués et ne sont donc plus accessibles aux oligarques et autres personnes sanctionnées.

La question qui nous est posée dans le projet de loi S-217, c’est la question de savoir si nous voulons faire des sanctions déjà en place un outil visant principalement à punir ou un outil de contrainte visant à modifier un comportement. C’est une question légitime avec laquelle nous sommes aux prises, mais c’est un fait que les sanctions sont déjà en place et que les biens sont inaccessibles à la Russie. Ce résumé de la situation est-il correct?

M. Rock : Votre résumé est correct, sénateur, mais il ne s’agit pas seulement de modifier le comportement ou de punir.

Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, des sanctions pourraient être adoptées dans un but de dissuasion. Dans le cas présent, le Canada dissuaderait les fonctionnaires étrangers corrompus de placer leur argent au Canada, car nous envoyons le signal que s’ils le font, cet argent risque non seulement d’être bloqué, mais aussi d’être confisqué et réaffecté. En outre, cette mesure législative a un autre objectif, c’est-à-dire celui d’offrir une certaine mesure de justice à ceux qui ont été lésés, blessés ou désavantagés par l’acte répréhensible en question.

Le Parlement, par l’intermédiaire du Sénat ou de la Chambre, peut agir pour un certain nombre de raisons. Dans le cas de la Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre, il y a un certain nombre d’objectifs atteints qui sont pertinents et importants pour notre politique étrangère.

Le sénateur Woo : Je vous remercie de votre réponse.

Sénatrice Omidvar, est-il exact que la grande majorité des biens déjà sanctionnés, qui sont actuellement répertoriés dans la LMES, ne seraient pas couverts par le projet de loi S-217 parce qu’ils appartiennent à des entités plutôt qu’à des particuliers, et que le projet de loi S-217 ne permet que la réaffectation de biens appartenant à des particuliers? En d’autres termes, le projet de loi S-217 n’aurait pas d’effet sur la grande majorité des organismes actuellement sanctionnés en vertu de la LMES?

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur. Vous avez raison de dire que le projet de loi S-217 est axé sur les ressortissants étrangers et non sur les entités étrangères.

En même temps, je dois souligner que, tel qu’il a été conçu, le projet de loi a toujours visé à cibler principalement les particuliers.

Le sénateur Richards : Je remercie tous nos invités de s’être joints à nous. Ma question est assez générale, et je l’adresse à M. Axworthy.

Quelle influence le Canada exerce-t-il à l’échelle internationale auprès d’autres pays en vue d’appuyer une volonté considérable et soutenue? Si nous n’en avons pas, serons-nous en mesure d’agir de façon unilatérale à l’égard du projet de loi?

M. Axworthy : Je vous suis reconnaissant de votre question, sénateur. Il s’agit d’une question très importante en ce moment.

Je pense que le Canada a la capacité et les antécédents nécessaires pour présenter sur la scène internationale de bonnes idées qui sont pratiques et stratégiques. Si vous le permettez, je vais en citer quelques-unes auxquelles j’ai contribué, comme le traité contre les mines antipersonnel. Ce traité est un produit de la diplomatie canadienne.

Je pense que si le Sénat devenait le précurseur de cette façon novatrice d’accentuer et de renforcer l’impact d’une sanction, c’est une mesure qui serait adoptée à une échelle beaucoup plus grande. Le fait que notre vice-première ministre est l’un des principaux acteurs du nouveau groupe de travail du G7 sur la façon de renforcer davantage le régime de sanctions est un signal très clair qu’il recherche un certain leadership de la part du Canada dans ce domaine.

Le Sénat est bien placé pour fournir ce type de modèle, qui est déjà disponible. Il ne lui sera pas nécessaire de refaire ses devoirs. Je pense que le projet de loi de la sénatrice Omidvar a déjà fourni la pointe de la lance qui suscitera une réaction internationale, et je suis certain que vous verrez votre travail aboutir à une collaboration internationale assez importante.

Le sénateur Richards : Merci, monsieur Axworthy.

Le sénateur Oh : Je remercie les témoins de leur présence.

Ma question concerne la création du registre que l’on propose de rendre public, dans lequel figurerait le nom de la personne ou de l’entité dont les biens ont été bloqués et la valeur de ses biens.

Dans le cadre du témoignage qu’il a livré récemment, M. Lévêque a déclaré qu’Affaires mondiales Canada n’avait pas accès à des renseignements détaillés sur les biens qui ont effectivement été bloqués en application des sanctions prévues par la loi canadienne. Que pouvez-vous dire à propos des difficultés juridiques et des problèmes de ressources cernés par Affaires mondiales Canada relativement à la création d’un registre public?

Ma question s’adresse à vous tous.

M. Rock : Si j’ai bien compris M. Lévêque, il a dit qu’Affaires mondiales Canada n’était pas actuellement en mesure de recevoir ces renseignements parce que ce ministère ne figure pas dans la liste de ceux qui peuvent les recevoir en vertu de la loi applicable. Un amendement serait nécessaire pour les faire entrer dans ce cercle.

Ma réponse à votre question, sénateur Oh, est que si la Loi sur la réaffectation des biens bloqués est adoptée, il faudra y apporter un amendement corrélatif pour permettre à Affaires mondiales Canada d’accéder aux renseignements nécessaires, qui sont requis en vertu de ce projet de loi.

La sénatrice Omidvar : M. Rock a tout à fait raison. J’ajouterais seulement qu’il n’est pas absolument nécessaire que le registre soit tenu par Affaires mondiales Canada. Il pourrait également être tenu par le CANAFE. Le gouvernement pourrait envisager d’autres options.

Le sénateur Oh : Nos témoins savent-ils si le régime de sanctions d’autres pays compte un registre accessible au public? Si oui, comment ces registres fonctionnent-ils?

M. Rock : Je ne le sais pas. Nous avons simplement jugé, en réfléchissant à cette proposition dans le cadre d’une réunion du Conseil mondial sur les réfugiés, que si les renseignements sur les biens bloqués ne sont pas publics, les Canadiens ne peuvent pas savoir ce qui pourrait être saisi et réaffecté.

L’idée est de faire en sorte que ces renseignements relèvent du domaine public et que les personnes et les groupes intéressés invitent ensuite le procureur général à présenter ce type de requête, en fonction de l’importance du bien en question et de la nature de la conduite de la personne responsable. Voilà l’idée.

M. Axworthy : Si vous me le permettez, j’aimerais ajouter quelque chose.

Il existe une technique éprouvée en diplomatie qui consiste à « nommer et dénoncer » les personnes ayant commis des actes répréhensibles. Le fait de disposer d’un registre dans lequel on divulgue de manière transparente où se trouvent les investissements des personnes concernées devient en soi un outil de dissuasion et d’action. Souvent, les gens sont choqués d’apprendre qui contrôle certaines ressources et certains biens dans leur pays. Je pense donc que la transparence aurait l’effet supplémentaire de renforcer l’incidence du registre proposé.

[Français]

La sénatrice Gerba : Ma question s’adresse à la marraine du projet de loi, la sénatrice Omidvar, mais l’honorable Allan Rock peut peut-être y répondre aussi.

Lors de la dernière séance de ce comité, le sous-ministre Alexandre Lévêque a expliqué que le partage constitutionnel des pouvoirs législatifs entre les provinces et le gouvernement fédéral pourrait être un enjeu en ce qui concerne le projet de loi S-217.

La sénatrice Boniface a d’ailleurs posé, durant la dernière séance, une question pertinente à ce sujet, dont nous avons reçu la réponse par écrit il y a quelques jours. Je laisserai la sénatrice prendre la parole si elle souhaite rebondir sur cela. Néanmoins, d’un point de vue général, il me semble que cette question du partage des compétences entre les ordres de gouvernement est importante. En effet, les objectifs du projet de loi sont louables, parce qu’on cherche à réaffecter les fonds bloqués aux populations. Toutefois, si la mise en œuvre de la loi donnait lieu à un imbroglio entre le gouvernement fédéral et les provinces, les objectifs de redistribution des fonds s’en trouveraient vraisemblablement affectés, et l’efficacité de la loi serait sans doute altérée.

Madame la sénatrice, quel est votre avis sur cette question? Pensez-vous que le projet de loi, dans sa forme actuelle, pourrait soulever des enjeux de collaboration entre les deux ordres du gouvernement? Si oui, auriez-vous des suggestions à faire à ce sujet?

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : Merci pour cette excellente et importante question.

Je ne suis pas avocate de droit constitutionnel, je vais donc m’en remettre à M. Rock, dont c’est le cas. Mais je peux vous assurer que nous pouvons citer des précédents et les autres avocats autour de la table ont également leur avis.

Je vais laisser M. Rock donner une réponse complète à cette question.

[Français]

M. Rock : J’ai déjà constaté que, à mon avis, le projet de loi que vous étudiez est constitutionnel. Il est toujours important que chaque gouvernement au Canada, que ce soit le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux, agisse à l’intérieur des pouvoirs que lui confère la Constitution.

Selon moi, ce projet de loi concerne les relations étrangères du Canada, les relations du Canada avec le monde entier. C’est tout à fait conforme aux responsabilités et aux pouvoirs constitutionnels du gouvernement du Canada de faire exactement cela.

[Traduction]

Je peux fournir un autre exemple de loi prévoyant ce type de mesure. Le paragraphe 3(2) de la Loi sur les Nations Unies prévoit ce qui suit :

Les biens ayant servi ou donné lieu à une infraction aux décrets ou règlements pris en application de la présente loi peuvent être saisis et retenus et faire l’objet d’une confiscation sur instance introduite par le ministre de la Justice [...]

La loi reconnaît donc déjà que, dans le cas de biens visés par des sanctions, le gouvernement du Canada peut prendre des mesures appropriées pour les saisir, les retenir et les confisquer.

La sénatrice Boniface : Merci beaucoup à nos témoins, en particulier d’avoir répondu à la dernière question, car j’ai abordé ce point la dernière fois. Merci pour ces précisions.

Ma question s’adresse à la sénatrice Omidvar. J’aimerais vous donner la possibilité de terminer votre réponse à la question du sénateur Woo sur le fait que le projet de loi vise les ressortissants étrangers et non les entités étrangères. Je pense que vous avez été interrompue, et le comité souhaite vivement que les choses soient claires à ce sujet.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie, sénatrice Boniface, de me donner cette possibilité. Je commençais à souligner que ce projet de loi a pour but de se concentrer sur les personnes étrangères corrompues. C’est pourquoi nous avons utilisé le terme « ressortissant étranger ».

Le régime de sanctions vise un grand nombre de personnes ainsi qu’un grand nombre d’entités étrangères. Notre projet de loi est axé sur les personnes. Plus tard, il pourra peut-être prendre une autre direction, mais pour l’instant, nous nous concentrons sur les personnes, car notre objectif principal est de rendre justice aux victimes de gains mal acquis.

M. Rock : Puis-je ajouter quelque chose à ce sujet, monsieur le président? Je tiens à m’assurer que le sénateur Woo ait bien compris. Si une personne est sanctionnée et qu’elle possède, par exemple, des actions au sein d’une entité, les biens qui sont bloqués — je veux dire que cette personne n’est pas autorisée à gérer ces actions si l’ordonnance est rendue en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales.

Ce que nous proposons dans le cadre de la Loi sur la réaffectation des biens bloqués est que ces actions soient saisies, vendues, que le produit de la vente soit versé au tribunal et qu’il soit ensuite réaffecté selon les directives du juge. Le simple fait que les biens prennent la forme d’actions dans une entité, ou de la possession d’une entité, ne les dispense pas d’être visés par la Loi sur la réaffectation des biens bloqués.

Si une personne X originaire de Russie, par exemple, a été sanctionnée, elle ne peut pas gérer des biens ici au Canada. Si ces biens comprennent des actions d’une entité, il est possible d’ordonner la vente de ces actions et de verser ces sommes au tribunal en vue de leur réaffectation. Je voulais simplement que ce soit clair.

Le président : Merci. M. Axworthy souhaite-t-il également intervenir? Il nous reste environ une minute.

M. Axworthy : Je peux faire un bref commentaire sous forme de comparaison.

Lorsque nous rédigions le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, il est clairement ressorti de tous les témoignages qu’il était beaucoup plus important de faire peser la responsabilité sur les personnes. Trop souvent, les personnes se cachaient derrière une entité. On ne pouvait pas les trouver. Lorsque vous commencez à tenir les personnes responsables de leurs actes, vous pouvez alors exiger qu’elles rendent directement des comptes.

Je pense que si l’on s’appuie sur ce précédent de la Cour pénale internationale, on peut en déduire que cela vaut également à ce contexte.

Le président : Merci beaucoup.

La sénatrice Omidvar : Si vous le permettez, j’aimerais prendre un instant pour élargir la conversation au-delà de l’Ukraine. Je sais que nous nous concentrons sur l’Ukraine, pour de bonnes raisons. Lorsque ce projet de loi a été présenté il y a deux ans, l’invasion de l’Ukraine n’était pas encore survenue.

Je veux que nous songions à la situation au Myanmar. Les noms des généraux de la Tatmadaw figurent sur la liste. Au Bangladesh, les réfugiés rohingyas, au nombre d’un million, vivent dans la misère la plus totale. Le Soudan du Sud a généré des réfugiés en Ouganda, et les noms des chefs de guerre figurent sur la liste des sanctions. Le Venezuela a généré des millions de réfugiés en Colombie et le nom du président Maduro figure également sur la liste des sanctions.

Je veux terminer en soulignant l’importance mondiale de ce projet de loi, même si, évidemment, nous mettons aujourd’hui l’accent sur l’Ukraine. C’est tout.

Le président : Je tiens à remercier nos témoins d’avoir été présents aujourd’hui. Vos témoignages ont été intéressants, et nous avons été honorés de votre présence.

Chers collègues, nous devons absolument nous arrêter à 13 h 30, et étant donné que plusieurs amendements pourraient être proposés aujourd’hui dans le cadre de l’étude article par article, je souhaite vous faire à tous quelques rappels.

Tout d’abord, si à tout moment un sénateur ne sait plus exactement où nous en sommes dans le processus, il doit demander des éclaircissements afin que nous puissions tous suivre. Pour ce qui est des mécanismes de la procédure, sachez que lorsque plusieurs amendements sont proposés pour un même article, ils doivent l’être dans l’ordre des lignes visées de cet article. Par conséquent, avant d’examiner un amendement à un article, je vérifierai si un autre sénateur avait l’intention de proposer un amendement relatif à un passage préalable de ce même article. Dans l’affirmative, il aura la possibilité de le faire.

Si un sénateur s’oppose à l’ensemble d’un article, je vous rappelle qu’en comité, la procédure pertinente n’est pas de proposer une motion visant à supprimer l’ensemble de l’article, mais plutôt de voter contre la proposition voulant que l’article fasse partie du projet de loi. Je rappelle également aux sénateurs que certains amendements proposés peuvent avoir des conséquences sur d’autres parties du projet de loi. Il serait donc utile qu’un sénateur qui propose un amendement indique au comité les autres articles du projet de loi sur lesquels son amendement pourrait avoir un effet. Cela permettra de s’assurer que les membres du comité restent cohérents dans leur prise de décision. Le personnel s’efforcera de noter les emplacements où des amendements ultérieurs devront être apportés, et il attirera notre attention sur ces emplacements.

À mesure que nous avançons, si les membres du comité ont des questions ou des préoccupations au sujet du processus, ils pourront invoquer le Règlement. En tant que président, j’écouterai leurs arguments et je rendrai une décision au terme d’une discussion suffisante sur la question. Bien entendu, toute décision prise par le président peut être portée en appel devant l’ensemble du comité en demandant si la décision doit être maintenue.

En ma qualité de président, je ferai tout mon possible pour que tous les sénateurs qui souhaitent prendre la parole puissent le faire. Je rappelle aux sénateurs que nous nous arrêterons à 13 h 30, que nous ayons ou non terminé notre étude d’aujourd’hui, et je demande à tous les sénateurs de s’en tenir à des remarques brèves et pertinentes.

En cas d’incertitude quant au résultat d’un vote par oui ou par non ou d’un vote à main levée, la méthode la plus efficace consiste à demander un vote par appel nominal, qui fournit des résultats sans ambiguïté. En cas d’égalité, comme les sénateurs le savent, la motion en question sera rejetée.

La sénatrice Omidvar, qui parraine le projet de loi, a demandé à rester pour cette partie de la discussion. Y a-t-il des objections à cela? D’accord? Merci beaucoup.

Y a-t-il d’autres questions à ce stade? Sinon, nous allons passer à l’étude article par article.

Honorables sénateurs, est-il convenu de procéder à l’étude article par article du projet de loi S-217, Loi sur la réaffectation de certains biens saisis, bloqués ou mis sous séquestre?

Des voix : Oui.

Le président : Merci. Est-il convenu de reporter l’étude du titre?

Des voix : Oui.

Le président : Est-il convenu de reporter l’étude du préambule?

Des voix : Oui.

Le président : Est-il convenu de reporter l’étude de l’article 1, qui contient le titre abrégé.

Des voix : Oui.

Le président : L’article 2 est-il adopté? J’ai entendu un « non ». Merci.

Le sénateur Woo souhaite proposer un amendement. Nous allons le faire circuler et le distribuer tout de suite.

Le sénateur Woo : Puis-je formuler mes remarques, monsieur le président, pour économiser du temps, ou devons-nous attendre?

Le président : Veuillez lire l’amendement et présenter votre argument, monsieur Woo.

Le sénateur Woo : Nous distribuons l’amendement en ce moment même, et vous pouvez le lire seuls. À titre d’information, s’il est adopté, un amendement corrélatif devra être apporté à l’article 5 figurant à la page 3.

Je souhaite faire figurer au dossier mon raisonnement concernant l’amendement, qui vise à retirer du champ d’application du projet de loi deux des trois lois sur les sanctions, limitant ainsi son application à la seule Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus.

Mon raisonnement est le suivant : Premièrement, les sanctions ont des objectifs multiples, y compris le signalement national politique, la sanction d’actes répréhensibles et l’incitation à un changement de comportement. Le projet de loi S-217 est compatible avec les deux premiers objectifs, mais va à l’encontre du troisième. Une sanction qui est irréversible en raison de la réaffectation d’un bien étranger perdrait tout pouvoir d’inciter le malfaiteur à changer.

La réaffectation du bien n’ajoute pas à l’effet dissuasif, car le blocage du bien est le principal facteur de dissuasion et non l’acte de réaffectation.

Deuxièmement, parmi les trois lois sur les sanctions auxquelles le projet de loi S-217 s’appliquera, la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus ne fait pas réellement partie du régime de sanctions. Il s’agit plutôt d’un outil d’entraide juridique entre le Canada et un pays demandeur permettant de rapatrier, par voie de négociation, des biens obtenus de façon irrégulière vers ce pays. Je crois qu’il serait inapproprié d’imposer une fonction unilatérale de rapatriement de biens à la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus, qui devrait permettre au Canada de travailler en coopération avec le pays touché.

Lorsque le pays touché est dirigé par un régime avec lequel le Canada ne peut pas travailler, il est préférable, à mon avis, que les biens soient mis sous séquestre jusqu’à ce qu’un régime acceptable revienne au pouvoir, plutôt que de les réaffecter de manière unilatérale.

Troisièmement, les deux autres lois visées par le projet de loi S-217 font partie du régime de sanctions du Canada, mais je crois qu’on peut faire une distinction importante entre la Loi sur les mesures économiques spéciales et la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus, ou loi de Magnitski.

Quatrièmement, la Loi sur les mesures économiques spéciales s’applique à des sanctions que le Canada a décidé d’imposer à des entités, personnes ou États étrangers qui ne découlent pas d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Cette loi est, en fait, un outil de la politique étrangère canadienne et est habituellement utilisée de concert avec la diplomatie et les autres moyens d’action de l’État. En ce sens, un des objectifs principaux des sanctions imposées dans le cadre de cette loi est d’instiller un changement de comportement, ce qui explique qu’on laisse explicitement la porte ouverte à une annulation des sanctions. À titre d’exemple, une sanction prise en vertu de la loi peut être modifiée ou annulée par une motion signée par au moins 50 députés et au moins 20 sénateurs. Un bien sanctionné en vertu de cette loi qui serait réaffecté aux termes du projet de loi S-217 rendrait inutile l’objectif d’instiller un changement de comportement et, je crois, réduirait le nombre d’outils à notre disposition dans la boîte à outils diplomatiques.

De plus, le projet de loi S-217 ne s’appliquerait pas à une forte proportion des biens actuellement bloqués en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales parce qu’il ne prévoit que la réaffectation des biens appartenant à des personnes.

Cinquièmement, la loi de Magnitski, par contre, vise essentiellement à punir les mauvais joueurs — et seulement des personnes, je dois le souligner, et non des entités — comme c’est le cas pour le projet de loi S-217. La loi, comme le veut son titre officiel, vise à rétablir « la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus ». Le changement de comportement ne semble pas être un objectif de cette loi, si ce n’est d’avoir un effet dissuasif sur les dirigeants corrompus en puissance qui voudraient placer des biens au Canada.

Une consultation rapide des discours des parrains de la loi de Magnitski lors des débats à la Chambre des communes et au Sénat permet de confirmer que l’objectif du Parlement visait avant tout la justice et la restitution plutôt que la diplomatie.

Sixièmement, par conséquent, s’il est tout à fait approprié que le projet de loi S-217 s’applique aux biens bloqués en vertu de la loi de Magnitski — je crois, en fait, qu’il s’agit de sa suite logique —, cela l’est beaucoup moins dans le cas de la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus et la Loi sur les mesures économiques spéciales.

Enfin, il se pourrait bien que les sanctions deviennent avec le temps un outil destiné principalement ou uniquement à punir, dans lequel cas, nous pourrions à une date ultérieure ajouter la Loi sur les mesures économiques spéciales à la portée du projet de loi S-217. Pour ce qui est de la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus, le problème reste le même. Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie mes collègues.

Le président : Je vous remercie beaucoup, sénateur Woo.

Le sénateur Harder : Je vous remercie, sénateur Woo, d’avoir soulevé ce point.

Je suis d’accord avec certaines de vos observations, mais ce qui me rassure, c’est le caractère facultatif et non obligatoire du projet de loi S-217. En d’autres mots, le gouverneur en conseil peut décider s’il est approprié d’en activer les dispositions selon les circonstances.

Je suis à l’aise avec la définition très large qui se trouve dans le projet de loi S-217, puisque nous agissons en vertu de la prérogative royale, et qu’il est très important pour nous de la protéger. Cela ne va pas à l’encontre de la prérogative royale. On ajoute simplement un outil dans la boîte à outils diplomatiques qui ne s’y trouve pas actuellement. Je voterai donc contre votre amendement.

Le sénateur Woo : Je vous remercie, sénateur Harder. Vous avez tout à fait raison de dire qu’il s’agit d’une option pour le gouverneur en conseil. La loi ne serait donc sans doute jamais utilisée de façon inacceptable ou irresponsable.

Ce que je cherche, en fait, c’est la cohérence dans le projet de loi S-217. Je pense qu’il est plus cohérent qu’un projet de loi qui vise à bloquer, à saisir et à réaffecter des biens s’applique à la loi de Magnitski, qui vise expressément à punir les fauteurs et à obtenir justice pour les victimes, plutôt qu’à la Loi sur les mesures économiques spéciales, qui vise en grande partie à amener un changement de comportement, et la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus, qui est axée principalement sur l’entraide juridique.

Je préférerais de ne pas donner au gouvernement un outil qui ne cadre pas avec la loi dans laquelle il se trouve. C’est pourquoi je propose de supprimer ces deux lois du projet de loi S-217. Je remercie toutefois le sénateur Harder de cette précision.

La sénatrice Omidvar : Je vais me contenter de répéter ce que j’ai déjà dit. Je pense que cet amendement porterait un coup fatal au projet de loi, qui ne pourrait pas avoir d’effet sur les régimes de sanctions mondiales, les trois que nous connaissons.

J’insisterais encore une fois sur le fait que lorsque la Loi sur les mesures économiques spéciales a été adoptée, il a clairement été mentionné dans les témoignages que l’un des objectifs n’était pas seulement d’en arriver à un changement de comportement, mais de bien faire comprendre à un autre gouvernement le coût réel d’un comportement inacceptable.

Je voudrais aussi vous faire remarquer que beaucoup de personnes sur les listes n’ont pas changé de comportement, et je pense que certaines personnes — pour parler des personnes seulement — ne le feront jamais. Je ne peux pas supporter l’idée d’attendre indéfiniment pendant que des gens souffrent et subissent les outrages que nous connaissons, et ce projet de loi vise à remédier à ce problème.

Le sénateur MacDonald : J’ai lu les raisons pour lesquelles le sénateur Woo veut apporter ces amendements au projet de loi S-217. Il veut essentiellement l’affaiblir pour en accroître la souplesse parce que, selon lui, il va à l’encontre de l’objectif de changer les comportements condamnables.

Il dit que l’un des objectifs principaux de la Loi sur les mesures économiques spéciales, par exemple, est d’amener un changement de comportement, et qu’on ne peut pas y arriver si les biens sont réaffectés par un tribunal. Il soutient qu’on supprimerait ainsi l’incitatif à changer de comportement, et il propose donc de limiter l’application du projet de loi à la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus, la loi de Magnitski.

Le premier point du sénateur Woo est que si le Canada saisit un bien appartenant à une personne sanctionnée, la saisie de ce bien signifie qu’on ne peut promettre son retour pour encourager un changement de comportement. Cela peut être le cas si le seul objectif de la saisie est d’amener un changement de comportement après que des gestes illégaux ont été posés.

Toutefois, la saisie d’un bien vise aujourd’hui à montrer à une personne — qui a, par exemple, des liens avec le régime de Poutine — que le Canada entend les sanctionner en saisissant le fruit de leurs gains mal acquis. Cela vise à les dissuader avant les agissements et non pas seulement après.

À mon avis, l’amendement du sénateur Woo va diluer l’intention du projet de loi et l’affaiblir, si bien que je ne peux pas l’appuyer, et j’encourage mes collègues à voter contre. Je vous remercie.

Le président : Sénatrice Coyle, j’ai vu que vous aviez la main levée, mais elle a été rabaissée. Je veux simplement m’assurer de ne pas commettre d’erreur. Il y a eu un problème technique. Vouliez-vous prendre la parole?

La sénatrice Coyle : La sénatrice Omidvar a parlé des points que je voulais soulever.

Le président : Je vous remercie beaucoup. Sommes-nous prêts à passer au vote?

Il est proposé par le sénateur Woo :

Que le projet de loi S-217 soit modifié à l’article 2, à la page 2, par substitution, aux lignes 9 à 14, de ce qui suit :

« vertu de l’alinéa 4(1)b) de la Loi sur la justice pour les vic- ».

Plaît-il aux sénateurs d’adopter la motion d’amendement? J’ai entendu des oui et des non. Je pense que les non l’emportent.

La motion est rejetée.

Y a-t-il d’autres amendements à l’article 2?

La sénatrice Coyle : Oui, j’ai un autre amendement à l’article 2, et je vais vous en expliquer les raisons avant de le présenter. La sénatrice Omidvar en a déjà parlé.

Cet amendement, et un autre que je vais présenter plus tard, découle d’un témoignage entendu lors de la dernière séance du comité. Je propose cet amendement parce que la loi sur la réaffectation des biens bloqués définit « bien bloqué » comme tout bien que le gouverneur en conseil a fait saisir, bloquer ou mettre sous séquestre par décret en vertu du paragraphe 4(1) de la Loi sur les mesures économiques spéciales.

M. Lévêque nous a dit la semaine dernière que le gouverneur en conseil recourt rarement à la deuxième option prévue au paragraphe 4(1) de la Loi sur les mesures économiques spéciales et choisit plutôt la première option prévue au même paragraphe. L’application de la loi sur la réaffectation des biens bloqués est donc limitée à une catégorie de biens bloqués par le gouverneur en conseil en vertu de la deuxième option prévue au paragraphe 4(1) de la Loi sur les mesures économiques spéciales.

Pour remédier à ce problème, comme il a été suggéré, je propose donc d’amender la définition de « bien bloqué » pour inclure les biens pour lesquels le gouverneur en conseil a pris un décret en vertu des deux options prévues au paragraphe 4(1) de la Loi sur les mesures économiques spéciales.

Je propose :

Que le projet de loi S-217 soit modifié à l’article 2, à la page 2, par substitution, à la ligne 10, de ce qui suit :

« a) l’article 4 de la Loi sur les mesures écono- ».

Le président : Je vous remercie, sénatrice Coyle. Quelqu’un aimerait-il prendre la parole au sujet de cet amendement?

Plaît-il aux sénateurs d’adopter cette motion? La motion est adoptée.

L’article 2 modifié est-il adopté? Il est adopté?

[Français]

L’article 3 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté. L’article 4 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté. L’article 5 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté. L’article 6 est-il adopté? Sénatrice Coyle? Très rapidement, s’il vous plaît.

[Traduction]

La sénatrice Coyle : C’est un peu difficile de procéder à l’étude article par article en ligne. Peut-on revenir à l’article 6?

Le président : Allez-y, sénatrice Coyle.

La sénatrice Coyle : Encore une fois, comme je l’ai mentionné précédemment, il s’agit d’un amendement qui découle d’un témoignage entendu la semaine dernière. Meredith Lilly a mentionné que :

[...] le projet de loi à l’étude est plus restreint dans la liste des conditions de réaffectation que ne l’est la loi habilitante, la LMES. La justification juridique la plus courante, et de loin, pour imposer des sanctions canadiennes est la condition suivante :

[...] une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales est susceptible d’entraîner ou a entraîné une grave crise internationale...

... comme le dit la LMES.

Il s’agit de la justification juridique invoquée pour les plus de 800 personnes sanctionnées à ce jour à cause de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Toutefois, la condition de la LMES, une « rupture grave de la paix et de la sécurité internationales », ne figure pas dans le projet de loi pour la réaffectation des biens. Il propose plutôt un ensemble restreint de conditions qui exige des preuves que les personnes sanctionnées ont été responsables ou complices de violations des droits de la personne, de déplacements forcés ou d’actes de corruption à grande échelle.

La question n’est pas futile, car cette incohérence de libellé pourrait avoir une incidence sur la capacité de la juridiction compétente de réaffecter pleinement des biens qui ont été bloqués au Canada, particulièrement en ce qui concerne la crise actuelle en Ukraine...

... et nous en avons parlé.

[...] Par conséquent, je veux m’assurer que la liste des conditions énoncées dans le projet de loi est fidèle aux intentions des sénateurs quant à son utilisation éventuelle si le projet de loi est adopté.

Ainsi, pour s’assurer que la loi sur la réaffectation des biens bloqués s’harmonise avec la Loi sur les mesures économiques spéciales — nous en sommes à l’article 6, page 3 —, je propose :

Que le projet de loi S-217 soit modifié à l’article 6, à la page 3, par adjonction, après la ligne 29, de ce qui suit :

« a.1) soit d’une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales qui a entraîné ou est susceptible d’entraîner une grave crise internationale; ».

Le sénateur MacDonald : L’amendement de la sénatrice Coyle aurait pour effet d’ajouter un sous-alinéa pour élargir les motifs pour lesquels un bien peut être saisi afin d’inclure :

a.1) soit d’une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales qui a entraîné ou est susceptible d’entraîner une grave crise internationale [...]

Je pense que la portée de cette disposition est trop vaste. Comment une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales se définirait-elle? Presque tout pourrait en faire partie. Par exemple, cela pourrait-il inclure l’intervention de l’OTAN en Afghanistan ou l’intervention de l’OTAN au Kosovo en 1999? Certains pourraient avancer qu’on peut définir ainsi une rupture sérieuse de la paix susceptible d’entraîner une grave crise internationale.

À mon avis, la portée est trop vaste. Je comprends que le but est de faire en sorte qu’elle s’applique à l’Ukraine, mais une autre solution pourrait être de dire « un étranger qui est responsable ou complice » et le nouveau a.1) : d’une invasion par un membre des Nations unies du territoire d’un autre membre des Nations unies, et dont l’action est condamnée soit par le Conseil de sécurité, soit par un vote majoritaire de l’Assemblée générale que le Canada a appuyé. Je pense que nous pourrions examiner la question.

Lorsque j’avais 12 ans, Israël a lancé une attaque de défense préventive sur les États qui se mobilisaient contre elle en 1967. Au vu de l’amendement de la sénatrice Coyle, cela aurait pu être considéré comme une rupture sérieuse de la paix et de la sécurité internationales entraînant ou étant susceptible d’entraîner une crise. La majorité des États à l’Assemblée générale des Nations unies l’auraient sans doute qualifiée ainsi, mais je ne pense pas que cela aurait été le cas du Canada.

À mon avis, il s’agit d’un autre exemple qui montre que l’amendement proposé ratisse sans doute trop large et qu’il doit être rejeté ou remplacé par une disposition qui porte expressément sur les invasions et le fait que le Canada les condamne clairement. En élargissant ainsi l’application du projet de loi S-217, cela peut avoir des conséquences inattendues. Je pense que l’amendement ratisse trop large et qu’il doit être rejeté dans sa forme actuelle.

Le sénateur Richards : Je suis d’accord avec le sénateur MacDonald. Je pense qu’il ratisse large. Et pire encore, je pense qu’il est presque entièrement subjectif, et je ne pense pas qu’il soit nécessaire dans le projet de loi. C’est mon avis.

La sénatrice Omidvar : Je vous remercie de vos observations, sénateur MacDonald et sénateur Richards. Je veux simplement rappeler à tous que c’est le procureur général du Canada qui fera la demande de confiscation et de réaffectation en fonction du consentement du gouvernement, et qu’il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire. L’ajout de ce libellé lui donne les moyens d’en faire plus, mais le pouvoir est discrétionnaire et la décision sera basée sur les objectifs de la politique étrangère. Cela ne s’appliquera pas à toutes les crises internationales et à toutes les ruptures de la sécurité internationale.

La sénatrice Coyle : J’aimerais remercier ma collègue. J’allais dire quelque chose de semblable. Nous nous efforçons, bien entendu, d’harmoniser le libellé avec ce qui se trouve dans la Loi sur les mesures économiques spéciales. La disposition sera donc utilisée de façon prudente et avec discernement, je ne pense pas qu’elle aille trop loin pour cette raison.

Le président : Plaît-il aux sénateurs d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Le président : Je pense que les oui l’emportent.

Sénateur MacDonald, seriez-vous d’accord pour une adoption « avec dissidence »?

Le sénateur MacDonald : J’aimerais demander le vote, si c’est possible.

Le président : Je vous remercie.

Gaëtane Lemay, greffière du comité : Le vote porte sur l’amendement de la sénatrice Coyle, article 6, page 3, ligne 29. Comme elle a déjà lu son amendement, je vais procéder au vote. Les sénateurs peuvent répondre par oui, non ou abstention.

Sénateur Boehm?

Le sénateur Boehm : Oui.

Mme Lemay : Sénatrice Boniface?

La sénatrice Boniface : Oui.

Mme Lemay : Sénatrice Coyle?

La sénatrice Coyle : Oui.

Mme Lemay : Sénatrice Deacon?

La sénatrice M. Deacon : Oui.

Mme Lemay : Sénatrice Gerba?

La sénatrice Gerba : Oui.

Mme Lemay : Sénateur Greene?

Le sénateur Greene : Oui.

Mme Lemay : Sénateur Harder?

Le sénateur Harder : Oui.

Mme Lemay : Sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Non.

Mme Lemay : Sénateur MacDonald?

Le sénateur MacDonald : Non.

Mme Lemay : Sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Non.

Mme Lemay : Sénateur Ravalia?

Le sénateur Ravalia : Oui.

Mme Lemay : Sénateur Richards?

Le sénateur Richards : Non.

Mme Lemay : Sénateur Woo?

Le sénateur Woo : Oui.

Mme Lemay : Le résultat est : pour, 9; contre, 4; et abstention, 0.

Le président : La motion est adoptée. Nous passons à l’article 7. L’article 7 est-il adopté? L’article 8 est-il adopté? L’article 9 est-il adopté? Je suis désolé, nous allons devoir revenir en arrière... est-ce l’article 8?

Mme Lemay : Oui, l’article 8, mais auparavant, l’article 6 modifié.

Le président : De plus, nous n’avons pas adopté l’article 6, tel que modifié. L’article 6, tel que modifié? Il est adopté. D’accord.

Nous avons un léger retard pour des raisons techniques. C’est notamment en raison de ma plaque d’identification qui m’empêche de voir l’écran, alors je n’ai pas vu que la sénatrice Gerba voulait intervenir, je crois, sur l’amendement proposé à l’article 8.

[Français]

Vous avez la parole, sénatrice.

La sénatrice Gerba : Merci, monsieur le président. En fait, l’amendement que je propose s’inspire de la Loi sur les valeurs patrimoniales d’origine illicite, qui a été adoptée en 2016 par la Suisse, qui est une référence en la matière aujourd’hui. Cette loi contient une disposition autorisant le prélèvement équivalent au maximum de 2,5 % de la valeur totale des biens saisis, dans l’objectif de couvrir les frais de procédure et de confiscation.

Comme vous le savez, monsieur le président et chers collègues, je viens du milieu des affaires, où les frais opérationnels et de gestion sont très, très importants. On ne peut pas faire fi de ces frais. Il faut que quelqu’un paie pour l’opération. La loi prévoit tout, sauf qui va payer pour la gestion de tout ce qui est confisqué et comment ce sera redistribué. Il faut que quelqu’un l’assume. C’est ce qui est à la base de l’amendement que je propose.

Interrogés la semaine dernière sur la possibilité d’intégrer une disposition semblable dans le projet de loi S-217, des intervenants ont, lors de cette séance, accueilli favorablement la proposition. Je cite le sous-ministre adjoint Alexandre Lévêque, qui a dit ceci :

Je crois que ce à quoi vous faites allusion est tout à fait adéquat et judicieux. En effet, si ce projet de loi voit le jour, nous souhaiterions que les considérations administratives liées aux coûts d’administration visant à soutenir les opérations soient prises en compte. Il serait un peu prématuré de vous donner un pourcentage exact, mais vous avez raison de penser que ce genre de coûts devrait être considéré afin que l’on aligne les ressources avec les objectifs.

Mme Côté-Freeman a également affirmé ce qui suit d’emblée, et je cite :

Comme vous l’avez bien compris dans mes propos, nous appuyons le projet de loi et certainement son esprit. Le problème au Canada, c’est qu’on a très peu de lois qui luttent contre la corruption qui sont mises en œuvre. Nous avons des ressources très limitées par rapport à cela.

La question du financement des objectifs poursuivis dans ce projet de loi est une garantie supplémentaire de leur mise en œuvre. Puisqu’on ne prévoit aucun mécanisme de financement, la loi ne sera pas mise en œuvre, parce qu’il faudra aller chercher l’argent quelque part.

Par ailleurs, les processus de confiscation et de restitution sont sans aucun doute complexes et très onéreux. C’est pourquoi je propose l’amendement suivant :

Que le projet de loi S-217 soit modifié à l’article 8, à la page 4, par adjonction, après la ligne 32, de ce qui suit :

(1.1) Avant de rendre une ordonnance en vertu du paragraphe (1), le tribunal peut ordonner, aux conditions qu’il estime indiquées, qu’une somme n’excédant pas 2,5 % de la valeur d’un bien bloqué à l’égard duquel des sommes lui ont été versées soit remise à Sa Majesté du chef du Canada ou d’une province pour rembourser les coûts liés à l’application de la présente loi et à la gestion des activités associées au bien bloqué sous le régime de l’une ou l’autre des lois suivantes :

a) la Loi sur les mesures économiques spéciales;

b) la Loi sur le blocage des biens de dirigeants étrangers corrompus;

c) la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski).

Voilà ce que je propose, et je vous laisse en débattre.

Le président : Merci sénatrice Gerba. Y a-t-il débat?

[Traduction]

Le sénateur Harder : Merci beaucoup, chers collègues.

J’ai deux préoccupations à ce sujet. Je comprends l’aspect permissif, et donc ceci n’est pas nécessaire, mais voici l’une de mes préoccupations : une personne sceptique pourrait accuser le gouvernement de cibler un bien pour le réaffecter afin de toucher 2,5 %. Mon autre préoccupation est la même soulevée plus tôt par la sénatrice Omidvar, à savoir, qu’au bout du compte, cela représenterait 2,5 % ou moins, selon l’application du pouvoir discrétionnaire. Autrement dit, ce sont moins de fonds disponibles pour la réaffectation et, par conséquent, nous serions privés de tous les avantages et des effets de la réaffectation.

Je suis préoccupé pour ces raisons, mais je comprends ce que la sénatrice tente de faire ici.

Le sénateur Woo : J’abonde dans le même sens que le sénateur Harder et je souhaite suivre le principe dont nous avons discuté plus tôt pour mon propre amendement, à savoir que nous ne devrions pas inclure dans un projet de loi une mesure à laquelle nous ne voulons pas que le gouvernement ait recours, bien qu’elle soit permissive dans les faits.

Le président : Merci beaucoup. Quelqu’un d’autre veut intervenir sur la question?

[Français]

La sénatrice Gerba : Je comprends qu’il y ait des réticences par rapport au fait que le gouvernement fédéral ne diminuera pas les sommes. Ma préoccupation, c’est de savoir qui prendra ces frais en charge. Le pourcentage de 2,5 % représente un maximum, mais peu importe le montant dont on parle, il faudra avoir un mécanisme de gestion de ces sommes ou de ces biens, et les contribuables canadiens devront en assumer les coûts.

Est-ce que nous tenons pour acquis que ce sont les contribuables qui assumeront la gestion de ces fonds et la rétribution aux victimes? C’était mon commentaire.

Le président : Merci de votre explication, sénatrice Gerba. Y a-t-il d’autres commentaires?

[Traduction]

Plaît-il aux honorables sénateurs d’adopter la motion modifiée? J’ai un oui. À mon avis, les non l’emportent. Nous pouvons la rejeter, avec dissidence, si cela vous va. Rejetée, avec dissidence.

Est-ce que l’article 9 est adopté? Adopté.

Le préambule est-il adopté? Adopté.

Le titre est-il adopté? Adopté.

L’article 1, qui contient le titre abrégé, est-il adopté? Adopté.

Le projet de loi, tel que modifié, est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Adopté.

Honorables sénateurs, êtes-vous d’accord pour que je fasse rapport de ce projet de loi, tel que modifié, au Sénat?

Des voix : D’accord.

Mme Lemay : Nous devons revenir à l’article 8, car nous avons rejeté l’amendement, mais n’avons pas adopté l’article.

Le président : D’accord. La greffière me dit que nous n’avons pas officiellement adopté l’article 8. C’est une erreur de ma part. Je pensais que nous l’avions adopté.

L’article 8 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Merci.

Êtes-vous d’accord, honorables sénateurs :

Que le légiste et conseiller parlementaire soit autorisé à apporter les modifications de forme, grammaticales ou d’autres corrections mineures nécessaires découlant des amendements adoptés par le comité, y compris la mise à jour des renvois et de la désignation numérique des dispositions?

Des voix : D’accord.

Le président : Merci.

Si nous avons terminé, chers collègues, je vais lever la séance. Notre prochaine réunion aura lieu jeudi prochain, le 7 avril. Nous entamerons notre étude sur le service extérieur canadien et d’autres éléments de l’appareil de politique étrangère au sein d’Affaires mondiales Canada.

La sénatrice M. Deacon : Je veux m’assurer que nous avons terminé les amendements avant de formuler une observation officielle. Vous permettez?

Le président : Allez-y.

La sénatrice M. Deacon : J’avais mentionné à mes collègues que j’avais l’intention de présenter un amendement, ce que je n’ai pas fait au bout du compte. Cependant, aux fins du compte rendu officiel, je tiens à préciser ceci.

La rétroaction reçue la semaine dernière et certaines suggestions de nos témoins m’ont poussée à examiner de plus près l’expression « ressortissant étranger » par opposition à « citoyen étranger » ou « personne étrangère ». Je l’ai fait en consultation avec les autres autour de la table dans le but de prendre la décision de revoir ce projet de loi dans son ensemble. Je me suis rendu compte que cet amendement allait en fait donner lieu à d’autres situations et d’autres défis.

J’ai donc choisi de ne pas proposer l’amendement, mais je voulais mentionner que c’était envisagé, et je voulais évidemment tenir compte de la rétroaction de nos témoins la semaine dernière.

Le président : Merci beaucoup, madame la sénatrice Deacon. Je m’excuse de ne pas vous avoir vue plus tôt. Merci de vos observations qui seront, bien sûr, ajoutées au procès-verbal.

(La séance est levée.)

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