LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’AGRICULTURE ET DES FORÊTS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 24 novembre 2022
Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 9 h 4 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-236, Loi modifiant la Loi sur l’assurance-emploi et le Règlement sur l’assurance-emploi (Île-du-Prince-Édouard); et à huis clos pour étudier ses travaux futurs.
Le sénateur Robert Black (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour à tous. Je souhaite d’abord la bienvenue aux membres du comité, à notre témoin ici présent et à notre auditoire sur le Web.
Je me présente : Robert Black, sénateur de l’Ontario et président du comité. Je demande à mes collègues de bien vouloir se présenter.
La sénatrice Simons : Paula Simons, de l’Alberta, territoire visé par le Traité no 6.
Le sénateur Klyne : Bonjour. Soyez les bienvenus. Marty Klyne, de la Saskatchewan, territoire visé par le Traité no 4.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Chantal Petitclerc, division sénatoriale de Grandville, au Québec.
[Traduction]
Le sénateur Cotter : Brent Cotter, de la Saskatchewan.
La sénatrice Duncan : Bonjour. Pat Duncan, du Yukon.
Le président : Merci.
Aujourd’hui, le comité se réunit pour étudier le projet de loi S-236, Loi modifiant la Loi sur l’assurance-emploi et le Règlement sur l’assurance-emploi (Île-du-Prince-Édouard).
Le témoin, M. Ian MacPherson, représente, ici en personne, l’Association des pêcheurs de l’Île-du-Prince-Édouard, dont il est le conseiller principal. Monsieur, vous disposez d’environ cinq minutes pour votre déclaration préliminaire. Je vous ferai signe quand il vous restera une minute. Après, nous passerons aux questions. Vous avez maintenant la parole.
Ian MacPherson, conseiller principal, Association des pêcheurs de l’Île-du-Prince-Édouard : Merci à vous, monsieur le président et aux autres membres du comité pour votre invitation à venir témoigner sur les modifications proposées pour l’Île-du-Prince-Édouard par le projet de loi S-236 et sous le régime de la Loi sur l’assurance-emploi.
Notre position est claire. Le programme d’assurance-emploi pour les pêcheurs est bien géré, il est efficace et, au besoin, il fournit l’aide requise par notre secteur.
J’avais l’intention de commencer en vous transmettant les excuses du capitaine Jenkins. Comme vous le savez, l’ouragan qui nous a frappés, il n’y a pas si longtemps, l’oblige à rencontrer un expert en sinistres aujourd’hui même, et il n’est pas particulièrement facile de rencontrer ce genre de personnes.
Notre association représente plus de 1 260 patrons de pêche, particulièrement du homard, du thon rouge, du flétan, du crabe des neiges, du hareng et du maquereau. L’apport de ces exploitants indépendants, propriétaires de leur bateau ou de petites entreprises, aux économies locales est considérable. Ces dernières années, nous avons assisté à une augmentation notable de cet apport, grâce à l’appréciation des fruits de mer. Cette appréciation a été corrélée à un certain nombre de facteurs, mais elle est également susceptible de fluctuer rapidement en fonction des marchés mondiaux et des catastrophes naturelles. Dernièrement, la tempête post-tropicale Fiona a frappé notre île, qui a subi des dommages sans précédent. Les dégâts de ce paroxysme météorologique sont visibles, et c’est l’incertitude quant au rétablissement des ressources halieutiques, vu qu’on connaît mal les répercussions subies par l’écosystème.
Les sénateurs et les députés des collectivités côtières connaissent l’existence d’un programme distinct pour les pêcheurs sous le régime de la Loi sur l’assurance-emploi. De nombreux gouvernements fédéraux ont pris en charge ce programme particulier, qui répond aux besoins des pêcheurs, le cas échéant, pour répondre aux difficultés du secteur des pêches, dont la situation et le nombre de prises peuvent varier considérablement d’une année à l’autre. Nombreux sont ceux qui ignorent qu’il est assorti d’une disposition de recouvrement des prestations si le revenu annuel d’un pêcheur en excède les paramètres.
Nous sommes venus confirmer, au nom de nos membres, que le programme actuel d’assurance-emploi pour les pêcheurs répond aujourd’hui aux besoins particuliers du secteur. Il est bien dirigé et nous tenons à nous assurer qu’on n’envisage pas de le modifier.
Aujourd’hui, la pêche présente son lot de difficultés, la ressource étant méticuleusement réglementée par le ministère des Pêches et des Océans. Notre association et ses membres consacrent des centaines d’heures par année à collaborer avec le ministère à l’établissement de limites de pêche pour assurer la durabilité de nos ressources. Pendant que certaines espèces reconstituent leurs stocks, les revenus que nous pouvons en tirer sont limités. Pour d’autres espèces, les titulaires de permis ne participent pas tous à l’effort de pêche pour que les stocks puissent se refaire plus rapidement et pour que la pêche soit plus rentable pour les autres. De ce fait, ensuite, notre secteur est devenu plus dépendant d’une espèce, le homard. Ce n’est pas l’idéal pour aucun pêcheur. Mais c’est la réalité. Comme les revenus peuvent varier considérablement d’une année à l’autre, nous avons besoin de mécanismes d’appui provisoire comme l’assurance-emploi pour les pêcheurs.
Dans l’Île-du-Prince-Édouard, l’année comporte deux saisons de pêche du homard : la première, de deux mois, à partir du début de mai; la seconde, entre début août et début octobre. Plus de mille patrons de pêche et de bateaux participent à la première, tandis que 250 bateaux participent à la campagne automnale. Les espèces secondaires se pêchent pendant les mêmes mois jusqu’à la fin octobre. Ordinairement, une glace épaisse entoure l’île en hiver, ce qui donne à notre secteur des pêches un caractère plus saisonnier qu’ailleurs. Voilà pourquoi, aussi, les programmes d’assurance-emploi pour les pêcheurs pourvoient aux besoins des ménages quand le revenu tiré de la pêche ne suffit pas en raison des variables que j’ai mentionnées.
Nos pêcheries sont vitales pour l’économie de l’île. Constituant l’un des trois principaux moteurs de son économie, elles contribuent à l’un des pourcentages les plus élevés du produit intérieur brut des provinces du Canada.
Nos membres sont de fiers pêcheurs qui transmettent la tradition aux générations suivantes. Malgré les nombreuses difficultés, le métier continue d’attirer les jeunes. La préférence de nos membres est de faire ce qu’ils aiment et de toucher des revenus de la pêche. Quand des difficultés surviennent, le maintien du programme d’assurance-emploi pour les pêcheurs, sous sa forme actuelle, avec ses exigences et sa structure, est vital en cas de besoin.
Merci.
Le président : Merci, monsieur MacPherson.
Allons maintenant aux questions des sénateurs. Je demande aux témoins et aux membres de bien vouloir éviter d’approcher la bouche trop près du microphone ou, en même temps, de retirer leurs écouteurs, par crainte d’un retour de son nuisible pour notre personnel sur place. Je rappelle aux sénateurs que, comme d’habitude, ils disposent de sept minutes pour leur intervention, questions et réponses comprises.
La sénatrice Simons : Merci, monsieur MacPherson, pour votre déclaration très intéressante, puisque, en Alberta, d’où je viens, le secteur des pêches est très différent.
Le projet de loi que nous étudions fondrait deux zones du programme d’assurance-emploi de l’Île-du-Prince-Édouard en une seule. Pour le programme spécial pour les pêcheurs, le nombre de zones en vigueur est-il de deux, également, ou est-il déjà de un?
M. MacPherson : Que je sache, il est de deux. J’espérais que le capitaine Jenkins aurait pu répondre à ces questions précises. Certains de nos membres ont été touchés quand les deux zones ont été édictées.
La sénatrice Simons : Devrait-il y avoir une zone ou deux? Voilà la question que nous sommes chargés de poser, de vous poser à vous. Croyez-vous qu’il est mieux qu’une zone corresponde à l’île, dans un souci d’équité pour tous, ou qu’une zone soit un fardeau disproportionné pour les habitants de l’extérieur de Charlottetown?
M. MacPherson : Il est certain que la plupart de nos membres habitent des collectivités côtières à l’extérieur de Charlottetown. Certains d’entre eux vivent à Charlottetown et à Charlottetown proprement dite. Dans les secteurs ruraux, il est plus difficile de toucher d’autre revenu que de la pêche. Le prix de l’essence ou ce genre de choses rend parfois impossibles les déplacements d’une extrémité de l’île à Charlottetown, par exemple.
La sénatrice Simons : Manifestement, pour pêcher, il faut être près de l’eau.
M. MacPherson : Pour répondre à votre question, nous voudrions le maintien des deux zones.
La sénatrice Simons : Cela présente une difficulté à notre comité. Aucun d’entre nous ne vient de l’île. Je viens de l’autre bout du pays, où l’économie est très différente.
M. MacPherson : J’ai épousé une Albertaine. Vous devez donc être quelqu’un de bien.
La sénatrice Simons : Vous avez du goût, comme mon mari.
Nous avons discuté avec des témoins qui ont prétendu, avec beaucoup de passion, que deux zones dans l’île, c’était injuste, que la province est minuscule, qu’untel, ici, reçoit son chèque et que son voisin immédiat n’en voit pas la couleur, ce qui crée du ressentiment.
Ce n’est pas ordinairement le rôle du Sénat de fixer les taux régionaux d’assurance-emploi. Je tiens à comprendre dans quelle mesure c’est une source de tension ou d’irritation parmi certaines de vos connaissances dans l’île. Les différences entre les prestations sont-elles assez modestes pour ne vraiment déranger personne?
M. MacPherson : Je ne peux vraiment parler de ce que, je suppose, serait l’assurance-emploi traditionnelle ni la comparer avec celle du pêcheur, deux programmes structurés différemment. Je ne peux parler de toutes les complexités des programmes, mais, en fin de compte, le nôtre fonctionne bien pour nos membres. Comme je l’ai évoqué dans ma déclaration préliminaire, nos membres préfèrent que la totalité de leur revenu provienne de la pêche, mais certaines ressources et certaines espèces présentent pour nous beaucoup de difficultés.
La sénatrice Simons : Comme je l’ai dit, nous avons entendu des témoignages différents. Je crois comprendre, en lisant entre les lignes que ça n’engendre pas de crise importante dans votre communauté, mais vous préféreriez le statu quo à la fusion de deux régions en une seule.
M. MacPherson : Exact, et le maintien des heures d’admissibilité dans les régions rurales.
La sénatrice Simons : Merci beaucoup.
M. MacPherson : Mais je vous en prie.
Le sénateur Cotter : Merci, monsieur MacPherson, d’être venu. C’est des plus appréciés. Je ne vis pas dans l’île, mais je m’y rends chaque été pour déguster du homard capturé par vos pêcheurs, et je l’aime beaucoup.
Avez-vous une idée générale du nombre de pêcheurs de l’île qui profiteraient du programme d’assurance-emploi pour les pêcheurs? Combien, en gros, comptent sur ce programme pendant une année moyenne?
M. MacPherson : Je n’ai pas accès à ce genre de statistiques. Je tiens notamment à faire remarquer que peu de gens savent qu’une disposition de l’assurance-emploi prévoit le recouvrement des prestations. Elle ne commence pas à s’appliquer avant la saison suivante. Heureusement que les cinq ou six dernières années ont rapporté gros. Le nombre de ces pêcheurs aurait donc sensiblement diminué entretemps, parce que la pêche, qui est ce qu’ils veulent faire, les rémunère bien.
Le sénateur Cotter : Vous rappelez la vulnérabilité qui accompagne une si forte dépendance à l’égard du homard. Un facteur de ces dernières années de vaches grasses a peut-être été le nombre assez élevé de captures qui a coïncidé avec de bons prix.
M. MacPherson : Le homard et le crabe des neiges ont rapporté beaucoup. Nos pêcheries de flétan et de poisson de fond sont très limitées. En général, un pêcheur peut capturer un thon rouge par année, peut-être deux. Voilà les principaux ressorts de notre secteur.
On apprend que le sébaste, dont la pêche était très importante, il y a une vingtaine d’années, revient dans le golfe. Bien qu’il faille encore attendre quelques années pour que ce poisson soit d’une taille suffisante pour la pêche vivrière, nous espérons qu’il redeviendra exploitable dans certaines provinces. Les mauvaises nouvelles sur la pêche sont tellement nombreuses, mais des stocks rebondissent.
Comme dans d’autres domaines, la diversification est toujours préférable. Nous nous sommes sortis de la COVID, mais les chaînes logistiques ont été perturbées. Quand la COVID a frappé, la pêche commençait. L’année a été très difficile, mais elle est derrière nous, et il y en a eu de bonnes depuis.
Le sénateur Cotter : Le sénateur Black et moi sommes allés distribuer des pommes de terre alors que le problème de la gale verruqueuse battait son plein.
Après la fin de la saison de pêche à quelles activités peut-on s’adonner? Quel genre de travail les pêcheurs cherchent-ils? À quel genre de travail s’occupent-ils? Combien d’emplois sont disponibles pendant la saison creuse?
M. MacPherson : Tout dépend de la saison. Beaucoup l’ignorent, mais, en été, le taux d’emploi dans l’Île-du-Prince-Édouard est l’un des plus élevés au Canada. Cela montre à quel point l’économie est saisonnière. Des pêcheurs vont pêcher l’automne, à compter du mois d’août. Ils peuvent donner un coup de main, par exemple, comme camionneur dans le transport des pommes de terre, ce genre de choses, parce que l’agriculture est un secteur important de l’île. Certains de nos membres exploitent des entreprises, des poissonneries ou ils sont charpentiers, par exemple, s’ils ne préparent pas la saison à venir. Mais le printemps est, pour la majorité de nos membres, une période très décisive.
Le sénateur Cotter : Merci.
Le sénateur Klyne : Je vous en prie.
Vers la fin de votre réponse à la sénatrice Simons, vous avez dit que les membres de votre association préféraient ne pas toucher à la région économique, donc de ne pas fusionner les zones. Vous avez conclu en préconisant le maintien du nombre de semaines requis pour l’admissibilité aux prestations.
M. MacPherson : Du nombre d’heures.
Le sénateur Klyne : Désolé. Du nombre d’heures. Oui. J’en déduis que vous comprenez la conséquence de la fusion des zones, soit la réduction du nombre d’heures requises pour l’admissibilité à Charlottetown et son augmentation dans le reste de l’île. Fait intéressant, vous recevriez moins de prestations, et les habitants du reste de l’île, parce qu’ils passeraient de cette région où le taux de chômage est de 6 % ou moins à une région où il approcherait les 7 %, en recevraient plus. Ils gagneraient au change, contrairement aux bénéficiaires de la région économique de l’Île-du-Prince-Édouard.
M. MacPherson : C’est exact. C’est ce que je comprends.
Le sénateur Klyne : C’est intéressant. Je crois que vous êtes la première personne qui dit comprendre cela. De nombreuses personnes pensent que le projet de loi va plus loin, mais ce n’est vraiment pas le cas, à moins qu’on remanie le régime d’assurance-emploi, ce que ne prévoit pas cette mesure législative.
M. MacPherson : C’est pourquoi je veux faire très attention de m’en tenir au programme des prestations de pêcheur. Comme je l’ai un peu expliqué plus tôt, le problème, c’est que tout le monde est occupé en même temps, que ce soit en raison du tourisme, de l’agriculture ou de la pêche, car, même si les pêcheurs de la saison de pêche d’automne commencent seulement à pêcher au mois d’août, ils effectuent leur travail préparatoire en mars, avril et mai. Je peux comprendre que c’est un problème, car durant la période où une personne est disponible pour travailler, l’économie tourne au ralenti parce qu’elle est saisonnière.
Le sénateur Klyne : Presque tous les secteurs sont saisonniers.
M. MacPherson : C’est exact.
La sénatrice Petitclerc : Je vous remercie beaucoup pour votre présence. Votre contribution est très utile.
Le sénateur Klyne a mentionné que nous étudions un projet de loi qui a un objectif très précis, qui va se concrétiser également au terme du processus de modernisation du régime d’assurance-emploi. Je me demande si vous avez réfléchi à ce qui rendrait le régime meilleur pour votre région. Avez-vous des attentes à l’égard de ce processus de modernisation, ou voyez-vous cela comme une initiative quelconque?
M. MacPherson : Souvent, lorsqu’il est question du gouvernement, on se montre généralement assez critique à l’égard d’un ministère ou d’un programme en particulier, et je tiens à dire aujourd’hui qu’il s’agit d’un programme qui est unique. Ce ne sont pas toutes les personnes qui composent avec le régime d’assurance-emploi au Canada qui savent comment manipuler ce programme. En fait, manipuler n’est pas le bon mot. Je dirais plutôt fonctionner au sein de ce programme. C’est pourquoi nous souhaitons qu’il conserve son caractère unique.
Je tiens à réitérer que nous espérons continuer de connaître des années productives, de sorte qu’un nombre décroissant de nos membres ait besoin des prestations d’assurance-emploi. Nous semblions venir tout juste de passer au travers des difficultés causées par la pandémie, et maintenant, nous sommes aux prises avec la guerre en Ukraine et d’autres événements qui rendent les gens nerveux. C’est pourquoi nous souhaitons que ce filet de sécurité et les critères d’admissibilité demeurent inchangés.
La sénatrice Petitclerc : Merci.
La sénatrice Duncan : Monsieur MacPherson, lorsque vous parlez du programme, faites-vous référence précisément au programme des prestations de pêcheur? Est-ce bien cela? Ce projet de loi, qui a été présenté à l’origine par la sénatrice Griffin, porte sur la région 1 et la région 2 en ce qui a trait au régime d’assurance-emploi dans son ensemble, mais il ne fait pas précisément référence au programme des prestations de pêcheur. Je vous ai entendu dire qu’il ne fallait pas toucher au programme des prestations de pêcheur, car il fonctionne bien. Je pense que c’est le message que vous nous transmettez.
Ce changement concernant ces régions a été apporté en 2014. Qu’avez-vous à dire sur la façon dont le programme fonctionnait avant 2014, quand ce changement a été effectué, et sur la façon dont il fonctionne depuis 2014? Est-ce qu’il a changé d’une quelconque façon?
M. MacPherson : Je crois savoir que non. Un certain nombre de nos membres vivaient dans des centres urbains, mais ils représentaient un très petit pourcentage de l’ensemble de nos membres. Si je me souviens bien, ce changement a été effectué par la ministre Shae, alors qu’elle était ministre des Pêches. Je ne me souviens plus quel était son portefeuille, mais je sais qu’elle est retournée aux Pêches.
Vous avez tout à fait raison, sénatrice. Je sais que vous voulez parler du régime d’assurance-emploi et de ce changement proposé par la sénatrice Griffin et que nous parlons d’un programme en particulier. Le programme des prestations de pêcheur n’a été mentionné dans aucune des mesures que j’ai vues en vue d’une révision, mais nous ne voulons pas assumer qu’on ne touchera pas à ce programme. C’est pourquoi j’ai cru important d’exprimer notre opinion aujourd’hui. Je dois dire très honnêtement que, dans d’autres régions du Canada, de nombreuses personnes ignorent l’existence d’un programme distinct pour les pêcheurs.
La sénatrice Duncan : D’accord. Vous nous dites donc très clairement de ne pas toucher au programme des prestations de pêcheur, car il fonctionne bien. Je suis consternée, dois-je dire très honnêtement, d’entendre parler de la disposition de récupération des prestations, car, dans le cadre d’autres initiatives gouvernementales de soutien durant la pandémie, la récupération des prestations a été assez importante et difficile. J’ose espérer que, dans le cadre du processus de modernisation, on se penchera sur cette disposition de récupération des prestations. Globalement, vous avez dit que ce projet de loi ne concerne pas le programme des prestations de pêcheur, qui est un programme distinct que vous ne voulez pas voir modifié.
M. MacPherson : Oui. Vous l’avez exprimé clairement. C’est fantastique.
La récupération des prestations est un élément intéressant, car, comme toute autre chose, elle a lieu après coup. Nous espérons que les gens disposent des ressources nécessaires, mais parfois, après quelques années difficiles, il faut se rattraper financièrement. Vous avez tout à fait raison de dire que cela peut mettre les gens dans une situation difficile, car, même si vous avez eu une bonne année, cela ne signifie pas nécessairement que vous avez une tonne d’argent à la banque au moment de la saison des impôts.
La sénatrice Duncan : Avez-vous également dit que le changement apporté en 2014 n’a eu aucune incidence sur le programme des prestations de pêcheur, ce changement concernant la délimitation?
M. MacPherson : D’après ce que je comprends, si vous habitez dans cette région, le nombre d’heures assurables s’applique. Nous avons abordé cette question, mais je crois comprendre que vous pouvez avoir une exploitation sur la côte et habiter à Charlottetown, et si vous êtes dans cette région, vous devez accumuler les heures assurables. Le changement a eu une incidence sur un très petit nombre de nos membres à l’époque. Je n’ai pas une idée du chiffre en ce moment. Je ne dirais pas que le présent changement nous a pris par surprise, mais nous ne l’avons pas vu venir. Nous sommes aux prises avec de nombreux enjeux ces temps-ci. Le point que nous voulons faire valoir aujourd’hui, avec l’appui de notre conseil d’administration, c’est qu’il existe un programme distinct pour les pêcheurs au sein du régime d’assurance-emploi et que ce programme fonctionne bien. Comme vous l’avez dit, nous voulons que le nombre d’heures assurables requises soit maintenu. Je n’ose pas trop parler des prestations régulières d’assurance-emploi, car je crois que d’autres témoins en ont parlé. Je vais m’arrêter là.
La sénatrice Simons : J’aimerais apporter une précision à la suite des questions de la sénatrice Duncan. Lorsque le directeur parlementaire du budget a évalué les coûts de ce projet de loi, il a certes inclus le programme des prestations de pêcheur. Dans cette évaluation, on peut lire qu’on estime que les coûts associés aux prestations de pêcheur vont augmenter de 400 000 $ en 2022-2023. Cette hausse est répartie entre tous les pêcheurs admissibles, alors ce n’est pas une énorme augmentation, mais il y aura tout de même une hausse. Ensuite, en 2023-2024, les coûts diminueraient de 800 000 $, et il en serait de même durant les années suivantes. L’incidence globale sur le programme des prestations de pêcheur sur cinq ans est une diminution nette de 2,6 millions de dollars, mais cette réduction est répartie sur cinq ans. Je vous mentionne cela aux fins du compte rendu, car je crois qu’il s’agit d’un autre aspect qui suscite de la confusion, à savoir que le rapport du directeur parlementaire du budget inclut clairement le programme des prestations de pêcheur. La question de la sénatrice Duncan porte à croire qu’elle pense que les prestations de pêcheur ne sont pas visées par le projet de loi, mais je ne suis pas certaine que c’est le cas. De toute évidence, le directeur parlementaire du budget ne pense pas que c’est le cas.
Je suis désolée, j’étais censée poser une question. Lorsque l’un de vos membres présente une demande de prestations, est-ce qu’il reçoit des prestations régulières d’assurance-emploi en plus des prestations de pêcheur?
M. MacPherson : D’après ce que je comprends, il s’agit d’un programme distinct.
La sénatrice Simons : Qu’en est-il s’il travaille dans deux domaines différents? Que se passe-t-il s’il travaille une partie du temps dans le secteur de la pêche et une autre partie du temps dans le secteur du tourisme? J’imagine que certaines personnes jonglent avec deux emplois durant l’année en vue d’augmenter leur nombre d’heures d’emploi. Est-il possible que certaines personnes reçoivent les deux types de prestations? Ou bien est-ce que les prestations de pêcheur sont réservées aux personnes dont le revenu provient exclusivement des activités de pêche?
M. MacPherson : Je crois comprendre que ce programme s’adresse précisément aux pêcheurs. Je pense que l’une des différences fondamentales, c’est que, dans le cas de ce programme, une demande peut demeurer ouverte. En ce qui a trait aux prestations régulières d’assurance-emploi, généralement, lorsque la personne commence un emploi, on ferme la demande. Dans le cas du programme des prestations de pêcheur, la demande peut demeurer ouverte, et des calculs sont effectués. Il peut arriver qu’un pêcheur occupe un autre emploi, mais cela entre dans les calculs.
La sénatrice Simons : Est-ce que le programme décourage les gens d’occuper un autre emploi saisonnier durant la saison intermédiaire, en les privant de leurs prestations de pêcheur s’ils occupent un autre emploi?
M. MacPherson : Je ne crois pas. La raison est que les jeunes pêcheurs en particulier sont assez lourdement endettés. Ils vont travailler, pendant de nombreuses années, peut-être dans une moindre mesure ces dernières années, dans l’Ouest canadien pour diminuer leur endettement. Comme je l’ai dit, l’économie de l’Île-du-Prince-Édouard est saisonnière. C’est un problème. Au bout du compte, je peux dire avec certitude que les pêcheurs veulent pêcher. C’est ce qu’ils font et c’est ce qu’ils aiment faire. C’est leur passion. Ils souhaitent que la pêche soit leur source de revenus.
Encore une fois, sénatrice, je suis désolé que le capitaine Jenkins ait eu un empêchement. Vous voudrez peut-être tenir une autre séance pour discuter des détails. Je crois que c’est très important pour nous tous. Dans ce qui est proposé dans le projet de loi, il n’est aucunement question des prestations de pêcheur, mais le directeur parlementaire du budget a inclus le programme dans son rapport. Il faudra donc clarifier tout cela. Notre point de vue ne change pas, mais il est important que vous compreniez bien de quoi il retourne.
La sénatrice Simons : En effet. J’ai l’impression, pour emprunter une métaphore propre à votre domaine, que vous naviguez en eau très profonde et que vous ne savez pas où se trouvent les récifs.
Le sénateur Cotter : Je ne ferai pas une métaphore.
Monsieur MacPherson, savez-vous quelle était la position de votre organisation en 2014, lorsque ces deux régions ont été créées? Étiez-vous en faveur ou contre ou bien vous n’avez pas été consultés? Avez-vous des informations à ce sujet?
M. MacPherson : Au départ, lorsque le changement a été apporté, on nous l’a présenté d’une façon un peu différente, et je sais que nous avons communiqué avec le ministre approprié en vue de clarifier ce que ce changement allait signifier pour nos membres. Pardonnez-moi, car ce n’est pas parfaitement clair. Je crois que les membres habitant à l’intérieur de ce périmètre de Charlottetown devaient accumuler davantage d’heures.
Le sénateur Cotter : Merci.
Le président : Y a-t-il d’autres questions, chers collègues? Comme il n’y en a pas, je vais vous remercier beaucoup, monsieur MacPherson, pour votre présence aujourd’hui. Nous sommes reconnaissants pour votre contribution dans le cadre de notre étude de ce projet de loi. Vous avez soulevé quelques questions sur lesquelles nous allons devoir nous pencher.
Je tiens également à remercier les membres du comité pour leur participation active et leurs questions judicieuses, et comme je le fais toujours, j’aimerais remercier le personnel qui nous appuie dans la salle et à l’extérieur de la salle également. Nous sommes reconnaissants du travail de tous.
La sénatrice Simons : Puis-je proposer, monsieur le président, que nous passions à huis clos pour 5 à 10 minutes?
Le président : C’est la dernière chose que j’allais dire.
La sénatrice Simons : C’est pourquoi nous travaillons si bien ensemble.
Le président : Nous allons faire une pause, et je propose donc que nous poursuivions ensuite à huis clos pendant une dizaine de minutes.
(La séance se poursuit à huis clos.)