LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’AGRICULTURE ET DES FORÊTS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 4 mai 2023
Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), avec vidéoconférence, pour examiner, pour en faire rapport, l’état de la santé des sols au Canada.
Le sénateur Robert Black(président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Bonjour, tout le monde. Nous sommes ravis de vous voir ici aujourd’hui. Je sais que quelques autres collègues vont arriver plus tard.
J’aimerais commencer par souhaiter la bienvenue aux membres du Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts, à nos témoins et aux auditeurs qui regardent la réunion sur le Web. Je suis Rob Black, sénateur de l’Ontario et président de ce comité.
Aujourd’hui, le comité se réunit pour examiner, pour en faire rapport, l’état de la santé des sols au Canada. Avant que nous entendions nos témoins, j’aimerais commencer par demander à nos sénateurs autour de la table de se présenter.
Le sénateur Cotter : Bonjour. Je suis Brent Cotter, et je suis un sénateur de la Saskatchewan.
La sénatrice Burey : Bonjour, tout le monde. Je suis Sharon Burey, sénatrice de l’Ontario.
Le sénateur Klyne : Bonjour. Je suis le sénateur Marty Klyne, de la Saskatchewan, du territoire visé par le traité no 4. Bienvenue à nos invités ce matin.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Chantal Petitclerc, division sénatoriale de Grandville, au Québec. Merci d’être là.
[Traduction]
La sénatrice Jaffer : Je suis la sénatrice Mobina Jaffer, de la Colombie-Britannique.
Le sénateur Oh : Bonjour. Je suis Victor Oh, sénateur de l’Ontario.
Le président : Merci, chers collègues. Avant de commencer, je veux vous rappeler qu’en cas de difficultés techniques, plus particulièrement avec l’interprétation, veuillez le signaler à la présidence ou à la greffière, et nous nous efforcerons de régler le problème.
Aujourd’hui, nous accueillons, par vidéoconférence, M. Ian Boxall, président de l’Agricultural Producers Association of Saskatchewan, M. Jake Ayre, vice-président de Producteurs agricoles Keystone du Manitoba, M. Paul Pryce, directeur de la politique de BC Agriculture Council, et M. David Rourke, qui est agriculteur, chercheur en recherche appliquée sur les céréales, étudiant au doctorat, grand-père de neuf enfants et époux.
J’aimerais maintenant vous inviter à faire vos déclarations. Vous disposerez chacun de cinq minutes. Je lèverai la main lorsqu’il restera une minute. Lorsque j’aurai les deux mains levées, cela signifiera que vous devez conclure vos remarques.
Sur ce, monsieur Boxall, la parole est à vous.
Ian Boxall, président, Agricultural Producers Association of Saskatchewan : Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Comme vous l’avez mentionné, je suis Ian Boxall, et je suis le président de l’Agricultural Producers Association of Saskatchewan. Nous représentons 15 000 familles d’agriculteurs et d’éleveurs. Je suis un agriculteur de la communauté de Tisdale dans le nord-est de la Saskatchewan.
Nous remercions le président et les membres du comité d’avoir entrepris cette étude. Les sols agricoles constituent une ressource stratégique pour le Canada. Les agriculteurs de la Saskatchewan gèrent plus de 40 % des terres cultivées du Canada et plus d’un tiers des pâturages naturels et cultivés du pays. Nous avons constaté de première main que l’amélioration de la santé et de la productivité des sols peut avoir des effets positifs sur l’environnement et créer des débouchés économiques pour les Canadiens.
Pour de nombreux agriculteurs, l’agriculture durable consiste à préserver la viabilité environnementale et économique de la terre pour la génération suivante. Selon cette définition, les agriculteurs de la Saskatchewan sont des chefs de file mondiaux en matière de production durable. Depuis le dernier rapport du Sénat en 1984, des progrès importants ont été réalisés en matière de conservation des sols, de productivité et de piégeage du carbone. Les avantages en matière de conservation du sol de semis direct et de culture continue ne peuvent pas être sous‑estimés. Il suffit de penser à la sécheresse historique d’il y a deux ans, qui nous a épargné les grandes tempêtes de poussière et les amoncellements de terre qui caractérisaient les sécheresses de cette ampleur avant que le semis direct ne devienne une pratique courante.
Notre ferme a commencé la production de cultures sans labour en 1997. Nous avons depuis constaté des améliorations importantes dans la santé du sol. Le sol est mieux protégé, la rétention de l’humidité est améliorée et nous constatons continuellement une augmentation de la matière organique dans nos analyses du sol. Ces améliorations — étendues à des millions d’acres dans toute la province — ont augmenté à la fois la productivité et la quantité de carbone stockée dans nos sols chaque année. Selon Agriculture et Agroalimentaire Canada, ou AAC, les sols agricoles de la Saskatchewan sont passés du statut d’émetteur net en 1981 à celui de puits de carbone en 2016. Pendant ce temps, la production agricole a augmenté de 91 % au cours de la même période.
L’adoption généralisée de ces pratiques agricoles durables n’aurait pas été possible sans le partenariat des scientifiques et des chercheurs en agriculture. Cela nous amène à notre première recommandation : Le Canada a des chercheurs de calibre mondial spécialisé dans l’agronomie, la sélection végétale et la science des sols. Nous devons veiller à ce que ces chercheurs reçoivent le soutien financier nécessaire pour poursuivre leurs travaux. Les témoins précédents ont relevé des pratiques pour améliorer la santé des sols, le captage du carbone et l’efficacité de la production. Nous comptons sur ces scientifiques et ces chercheurs pour effectuer les essais et recueillir les données nécessaires à l’adoption de ces pratiques au niveau de l’exploitation.
Notre deuxième recommandation est la suivante : dans le même ordre d’idées, il est nécessaire de disposer de données de référence et de modèles régionaux appropriés pour mesurer la santé des sols et la séquestration du carbone. Il s’agit d’un domaine scientifique très complexe, qui est compliqué encore davantage par la diversité des productions et la variabilité du climat au Canada. Il est important que nous disposions de données précises pour mesurer les progrès et vérifier les résultats.
Une troisième recommandation très importante pour ce comité est de soutenir une approche stratégique qui reconnaisse les contributions des premiers à l’adopter. Les politiques actuelles du Canada en matière de crédit de carbone et de tarification représentent un défi important pour nos membres. Les agriculteurs de la Saskatchewan ont adopté des pratiques agricoles qui stockent des millions de tonnes de carbone dans le sol chaque année, mais ils ne sont pas admissibles aux crédits parce qu’ils sont générés par une pratique qui a commencé avant 2017. Pendant ce temps, les agriculteurs de la Saskatchewan absorbent des milliers de dollars de coûts supplémentaires en raison du prix du carbone sur le carburant et d’autres intrants.
Nous savons que le Sénat étudie le projet de loi C-234, qui élargira l’exemption agricole au propane et au gaz naturel admissibles. Ce projet de loi permettra d’alléger considérablement les coûts liés à la taxe sur le carbone, et nous recommandons vivement son adoption dans les meilleurs délais.
Notre dernière recommandation au comité est de reconnaître la nécessité de prendre des mesures précises pour soutenir la santé des terres fourragères et de pâturages. Ces terres ont une grande valeur écologique et constituent un puits de carbone important. Nos recommandations concernant le financement de la recherche, la modélisation de la santé des sols et les programmes d’incitation s’appliquent également aux terres fourragères et de pâturages. Les témoins précédents ont parlé de la nécessité des terres fourragères et des prairies dans ces régions.
Je tiens également à mentionner les pressions financières auxquelles sont confrontés les éleveurs de l’Ouest du Canada et la perte potentielle de zones fourragères et de pâturages si le nombre de bovins continue à diminuer.
La prise en compte de ces facteurs économiques dépasse probablement le cadre de cette étude. Toutefois, je soulignerai la nécessité d’améliorer l’accès aux programmes de gestion des risques et de soutien en cas de sécheresse. L’augmentation du financement public pour les projets d’infrastructures hydrauliques dans les exploitations agricoles serait utile dans ce domaine, tout en soutenant les pratiques de pâturage améliorées qui sont connues pour améliorer la santé des sols et le piégeage du carbone dans le paysage.
Je vous remercie, monsieur le président, de cette occasion. J’ai hâte à la discussion.
Le président : Merci, monsieur Boxall. Monsieur Ayre, la parole est à vous.
Jake Ayre, vice-président, Producteurs agricoles Keystone du Manitoba : Monsieur le président, honorables membres du comité, je vous remercie d’avoir invité notre organisme à participer aujourd’hui à votre étude sur l’état de la santé des sols. Je m’appelle Jake Ayre et je suis un agriculteur de Minto, au Manitoba. Ma famille, qui exploitait une ferme céréalière et d’élevage dans le Sud-Ouest de l’Angleterre, a immigré au Canada en 2002 et s’est installée à Minto, où elle exploite une ferme de semences sélectionnées et de cultures commerciales.
Notre exploitation est maintenant très axée sur l’agriculture de précision. L’application de fertilisants à doses variables, l’échantillonnage du sol selon des prélèvements en grille, les humidimètres, la cartographie de la conductivité électrique et le suivi des données sont parmi les plus importants outils que nous utilisons actuellement. Cela nous permet d’effectuer un suivi efficace et de cartographier le placement des semences et des engrais dans l’ensemble de notre exploitation, et d’établir, après la récolte, une corrélation avec les données de rendement.
Je suis également vice-président de Keystone Agricultural Producers, ou KAP, qui est l’organisation vouée à la politique agricole générale du Manitoba et qui est soutenue par les agriculteurs membres. Grâce à son travail de défense des intérêts, notre organisme donne à ses membres une voix unifiée sur les questions liées à l’agriculture. Nous travaillons avec les gouvernements, l’industrie et les intervenants sur des enjeux d’importance qui touchent tous les agriculteurs, avec pour objectif d’assurer aux agriculteurs un avenir durable et rentable.
Aujourd’hui, je veux vous présenter mon point de vue d’agriculteur sur certaines méthodes et techniques que nous utilisons dans nos exploitations, sur notre vision de l’avenir fondée sur la mise en œuvre de ces méthodes optimales pour le maintien et l’amélioration de la santé des sols, et sur la contribution possible du gouvernement pour façonner cet avenir.
Les agriculteurs du Manitoba reconnaissent les avantages de l’amélioration et de la préservation de la santé des sols, rendus possibles par la rotation des cultures, la gestion des pâturages, les pratiques de culture sans labour, l’échantillonnage des sols, la gestion des éléments nutritifs, la Gérance des nutriments 4B, la prévention du compactage des sols et la plantation de cultures de couverture.
En tant qu’agriculteur, je fais de mon mieux pour assurer la durabilité des terres que je cultive et dont je tire des récoltes. Mon exploitation agricole est mon gagne-pain. Sans la prospérité continue des cultures et produits que nous produisons ainsi que celle des sols et de l’environnement, nous ne pourrions pas continuer de gagner notre vie et le secteur agricole du Manitoba et de l’ensemble du Canada ne générerait pas des activités économiques d’une valeur de plusieurs milliards de dollars.
Toutefois, nous ne pouvons pas y arriver seuls. Des investissements supplémentaires dans les pratiques exemplaires de gestion, ou PEG, permettraient d’accroître la capture des émissions de GES et d’améliorer la santé des sols. Cela comprend des investissements dans la Gérance des nutriments 4B — dont KAP fait la promotion par l’intermédiaire d’un protocole d’entente signé avec le gouvernement provincial et Fertilisants Canada — ainsi que dans le pâturage en rotation, les cultures intercalaires, les cultures de couverture et l’agrandissement des zones riveraines.
L’intégration de pratiques favorables à la santé des sols a des avantages potentiels pour les agriculteurs : augmentation des matières organiques dans le sol; réduction de l’érosion; augmentation du carbone dans le sol; résistance accrue à la sécheresse et aux inondations. En fin de compte, cela peut entraîner une productivité accrue et une meilleure résilience aux changements climatiques.
Le discours public entourant l’agriculture et l’environnement est généralement axé sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Même si cet aspect n’est pas toujours explicitement mentionné dans ces conversations, cela fait partie intégrante de la santé des sols et de la réduction des émissions d’oxyde nitreux.
Selon les données de Fertilisants Canada, l’adoption de la Gérance des nutriments 4B permettrait de réduire les émissions provenant d’engrais de 1,6 mégatonne d’équivalent dioxyde de carbone par rapport au niveau de 2020. Cela n’aurait pas d’incidence sur la production alimentaire.
Les agriculteurs du Manitoba ont adopté des pratiques agricoles novatrices afin de réduire les émissions et d’améliorer la santé des sols, notamment l’adoption de la Gérance des nutriments 4B et des programmes du Fonds d’action à la ferme pour le climat, ou FAFC. Toutefois, des facteurs comme les intrants agricoles, l’endettement, les conditions du marché et la rentabilité peuvent avoir une incidence sur les décisions relatives à l’adoption de ces pratiques. Il est donc essentiel d’offrir des mesures incitatives pour stimuler l’adoption de telles pratiques. En fin de compte, on ne peut pas faire un virage vert lorsqu’on est dans le rouge.
L’adoption de la culture sans labour ou avec travail minime du sol et la réduction de la jachère d’été au Manitoba ont permis de réduire les taux d’érosion annuels. Il est possible d’en faire plus au Manitoba pour favoriser l’adoption de pratiques qui pourraient améliorer la santé des sols et pour obtenir un financement accru de la part de tous les ordres de gouvernement.
En 2021, selon AAC, 3 476 exploitations agricoles du Manitoba ont déclaré utiliser des pratiques de culture sans labour, ce qui représente 3,16 millions d’acres. En outre, en 2021, le quart des agriculteurs manitobains utilisaient des engrais à libération lente. Dans l’ensemble, on observe au Manitoba une variation cumulée positive de la teneur en carbone organique dans le sol.
Le drainage souterrain et par canalisation est une pratique plus courante au Manitoba. Il est important de minimiser les pertes d’azote lorsqu’un agriculteur accroît le drainage sur une propriété. En effet, le drainage est un élément de la santé du sol qui augmente la productivité. Il s’agit d’une approche qui favorise l’augmentation de la superficie consacrée à la production agricole.
Nous sommes d’avis que d’autres aspects doivent faire l’objet de plus de recherches, notamment les cultures de couverture, les terres irriguées, le lessivage des nitrates et l’ammoniaque. Il serait avantageux d’encourager l’application d’engrais sous la surface, tout en gardant à l’esprit que certains types de sols sont plus sujets à la lixiviation que d’autres. En outre, nous recommandons la tenue d’une étude sur la santé des sols à l’échelle de la province du Manitoba.
En conclusion, comme pour toute discussion sur la durabilité, je tiens à souligner l’importance d’examiner des solutions qui tiennent compte de ce que nous considérons, en tant qu’agriculteurs, comme les trois volets de la durabilité — et qui ont tous la même valeur, pour nous —, à savoir les facteurs environnementaux, sociaux et économiques.
Je tiens à remercier encore une fois les membres du comité d’avoir pris le temps d’écouter le point de vue d’un agriculteur manitobain et de notre organisme sur la question de l’état de la santé des sols. Je vous remercie d’avoir entrepris cette étude sur cet important sujet. C’est avec plaisir que je répondrai à vos questions. Merci.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Ayre. Monsieur Pryce, vous avez la parole.
Paul Pryce, directeur de la politique, BC Agriculture Council : Je vous remercie de me donner l’occasion de prendre la parole devant ce comité pour discuter de l’important sujet qu’est la santé des sols. C’est pour moi un honneur d’être ici aujourd’hui au nom du BC Agriculture Council, ou BCAC.
Le BCAC est un organisme non gouvernemental à but non lucratif et il est le principal défenseur pour les priorités du secteur en Colombie-Britannique. Le BCAC représente fièrement les membres de 29 associations agricoles qui, à leur tour, représentent environ 96 % des ventes à la ferme en Colombie-Britannique.
Nous souscrivons à plusieurs points qui ont été soulevés par l’Agriculture Carbon Alliance dans sa lettre au comité en décembre 2021, notamment la demande pour la cartographie des sols à l’échelle du Canada. En Colombie-Britannique, le plus récent exercice de cartographie des sols a été achevé vers 1980. L’actuel manuel de classification du potentiel agricole des terres utilisé par le gouvernement de la Colombie-Britannique a été publié il y a 40 ans, en date d’avril dernier. Je souligne au passage que ce manuel se trouve en ligne, mais pas en format PDF interrogeable. Il y a environ 10 ou 15 ans, un pauvre fonctionnaire très travaillant a numérisé sa copie papier, avec cils, poussière et tout le reste.
Bien que les données de la cartographie des sols de 1980 soient toujours pertinentes, il pourrait être extrêmement utile de mettre à jour ces données pour assurer la durabilité à long terme de l’agriculture, en particulier dans le contexte de la Colombie-Britannique. Comme vous le savez peut-être, la Colombie-Britannique a une caractéristique unique : la réserve de terres agricoles. Conscient des pressions concurrentes exercées sur les terres, le gouvernement britanno-colombien a décidé, il y a 50 ans, de réserver 5 % de la superficie totale de la province à la production agricole. Aujourd’hui, seulement 3 % des terres de la province sont utilisées à cette fin. Cependant, l’actualisation de la cartographie des sols pourrait aider à déterminer si certaines terres incluses dans la réserve de terres agricoles qui étaient propices à la production agricole en 1980 ne le sont plus aujourd’hui et, le cas échéant, à déterminer les raisons de ce changement.
Je crois savoir que ce comité examine les mesures que peut prendre le gouvernement fédéral pour favoriser l’amélioration de la santé des sols agricoles. J’aimerais donc prendre un peu de temps pour parler des défis propres à la Colombie-Britannique. La ville de Delta est une collectivité de la région du Lower Mainland. Il s’agit d’une importante zone de production agricole pour la province, mais l’élévation du niveau de la mer accroît le risque de salinité du sol dans la région et réduit également l’accès à l’eau d’irrigation durant la saison de croissance habituelle. L’inondation des régions côtières comme la région de Delta pourrait avoir une incidence à long terme sur la sécurité alimentaire. L’avancée de l’eau de mer salée vers l’intérieur des terres augmente la salinité des terres et rend l’eau d’irrigation impropre à l’utilisation. Des investissements dans l’infrastructure d’atténuation des inondations et dans la commercialisation de technologies émergentes intégrant le dessalement dans les systèmes d’irrigation pourraient contribuer à composer avec ce risque.
Les eaux de ruissellement provenant d’incendies de forêt et d’autres catastrophes naturelles peuvent aussi avoir des répercussions sur la santé des sols. Par exemple, si des macronutriments provenant d’un incendie de forêt pénètrent dans une rivière et qu’un agriculteur en aval y puise de l’eau pour son exploitation, cela aura une incidence sur la santé des sols. Les particules aérosolisées provenant d’un incendie de forêt peuvent transporter ces macronutriments très loin, de sorte qu’il n’est même pas nécessaire d’être en aval pour ressentir ces effets négatifs.
Lorsqu’ils cherchent des façons d’aider les agriculteurs et les éleveurs, il importe que les différents ordres de gouvernement évitent le dédoublement des programmes ou des exigences réglementaires. Actuellement, le gouvernement de la Colombie-Britannique accorde la priorité aux pratiques d’agriculture régénératrice. Même si la définition exacte du terme « régénératrice » fait toujours l’objet de discussions, il pourrait s’agir de pratiques comme l’agriculture sans labour ou avec travail réduit du sol, qui peuvent contribuer à la séquestration du carbone. Alors que le gouvernement provincial fait la promotion de l’agriculture régénératrice, le gouvernement fédéral a entrepris des consultations sur une stratégie d’agriculture durable qui laisse déjà entrevoir des chevauchements. Une meilleure coordination entre le fédéral et les provinces pour la promotion de l’agriculture durable — sur les plans économique et environnemental — permettrait de transformer les chevauchements potentiels en mesures complémentaires, au lieu d’être source de confusion pour le secteur agricole et les collectivités servies par nos agriculteurs.
Je vous remercie encore une fois de m’avoir donné l’occasion de présenter ces observations sur l’état de la santé des sols en Colombie-Britannique. Je serai ravi de répondre à vos questions. C’est avec plaisir que je vous transmettrai tout renseignement ou ressource qui pourrait aider le comité dans son étude. Merci beaucoup.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Pryce. Monsieur Rourke, la parole est à vous.
David Rourke, agriculteur, à titre personnel : Bonjour, les « dragons ». Oh, désolé, mauvaise émission. Blague à part, bonjour honorables sénatrices et sénateurs. Je suis ici pour vous vanter les mérites de l’agriculture contribuant à la carboneutralité dans l’Ouest canadien, de l’innovation, des politiques et de la pratique. Ce que j’attends de vous, c’est une boîte à outils complète pour faire ce travail.
Qui suis-je? Je m’appelle David Rourke. J’ai grandi à Winnipeg. Je suis un agriculteur de première génération. Je travaille ici, à Minto, au Manitoba, juste au sud de la ferme de M. Ayre, depuis 43 ans. J’ai fait des recherches sur de petites parcelles répétées pendant 47 ans. J’ai été un mari pendant 46 ans. Je suis père de quatre enfants et grand-père de neuf petits-enfants. Le fait d’être grand-père de neuf enfants est peut‑être la raison pour laquelle je suis ici.
Nous avons connu des débuts modestes, en 1980, lorsque nous avons eu l’occasion de louer 300 acres de terrain. Aujourd’hui notre exploitation agricole a une superficie de 6 000 acres. Nous avons également créé une société de recherche agricole appelée Ag-Quest, qui possède cinq stations de recherche dans l’Ouest du Canada et qui pourrait, en fait, jouer un rôle plus important dans le domaine des essais de recherche appliquée que toute autre entité dans l’Ouest canadien.
On me dit que je suis une bête rare. Je suis un agriculteur et un chercheur qui propose des solutions pragmatiques et évolutives pour l’atténuation du réchauffement planétaire. Donc, pourquoi suis-je ici? Pourquoi un agriculteur de 67 ans fait-il un doctorat, à la recherche de ce que j’appelle une culture céréalière à empreinte carbone nette positive dans l’Ouest canadien? D’autres parleraient plutôt de « culture sans labour plus ».
En 2015 — à l’époque de l’Accord de Paris —, j’ai fini par sortir la tête du sable et j’ai pris conscience que le réchauffement climatique était quelque chose que nous ne devions plus ignorer. En 2016, j’ai presque pleuré lorsque l’ancien président Trump a été élu. Je savais qu’il allait se retirer de cet accord. En 2018, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat a publié un rapport spécial sur les répercussions d’un réchauffement climatique de 1,5 °C dans lequel on indiquait que nous n’étions pas sur la bonne voie.
En 2019, j’ai assisté à un séminaire sur le leadership climatique avec Al Gore. Lors d’une séance de discussion sur la foresterie et l’alimentation, j’ai été stupéfait par le manque de connaissances sur les façons de nourrir les populations. Après cette réunion, j’ai conclu qu’il n’y avait pas assez de connaissances dans la salle pour produire assez d’aliments pour la pause-café, et encore moins pour nourrir la ville d’Atlanta ou 7 millions de personnes.
En 2020, j’ai écrit un livre intitulé A Road to Fossil Fuel Free Farming: An Example and a Challenge. J’ai rejoint les rangs d’un club agricole, parrainé par General Mills, sur l’agriculture régénératrice. En 2021, j’ai commencé mon doctorat.
En 2022, nous avons continué les parcelles répétées sur notre propre ferme, mais j’ai également établi des liens entre la Fondation de la famille Weston et le Collège communautaire Assiniboine, ou CCA, pour lancer une initiative d’agriculture à empreinte carbone nette positive pour la santé des sols.
J’ai deux propositions du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, ou CRSNG. L’une d’entre elles — une collaboration avec le CCA — est presque à l’étape du lancement. L’autre, en collaboration avec l’Université du Manitoba, porte sur ce que j’appelle la technologie des semences à germination tardive.
Essentiellement, nous avons accepté que le réchauffement climatique constitue une menace existentielle. Il y a beaucoup d’images satellitaires. Le pape l’affirme. Le Pentagone peut le démontrer. Les compagnies d’assurance en ressentent les répercussions. Mais il ne faudrait surtout pas croire les scientifiques qui connaissent le phénomène du réchauffement climatique depuis les années 1800. Dans son rapport au gouvernement américain, en 1978, James Hansen a démontré que c’était attribuable à l’activité humaine, et cela a été confirmé dans tous les rapports des Nations unies depuis.
Qu’est-ce que j’attends de vous? J’ai besoin d’une boîte à outils complète. J’ai besoin d’aide pour peaufiner et, dans certains cas, remplacer les 11 pratiques exemplaires de gestion.
J’aimerais attirer votre attention sur l’une de ces pratiques : les cultures de couverture. Tout le monde fait valoir que les cultures de couverture font partie de la solution, et c’est vrai. Toutefois, ce serait comme demander aux agriculteurs de l’Ouest canadien d’ensemencer une superficie de 78 millions d’acres une deuxième fois en cours d’année — pendant le moissonnage-battage, cette fois — en assumant les frais de 30 $ à 70 $ et en espérant que l’investissement leur sera profitable un jour.
Ma femme me dit que si je pense que je devrais descendre de la moissonneuse-batteuse pour semer à l’automne, c’est que je souffre sûrement d’un trouble saisonnier de l’ensemencement. Je dirais qu’il nous faut plus d’outils; j’ai proposé la création d’un programme de technologie de semences à germination tardive permettant un ensemencement de cultures de couverture et de cultures commerciales en une seule étape. Ce n’est qu’un exemple de ce qu’il faut faire pour accomplir ce travail. Je vous remercie.
Le président : Merci, monsieur Rourke. Merci à tous les témoins. Nous allons passer aux questions des sénateurs. Plusieurs sénateurs veulent en poser.
Avant de passer à la période de questions, je demanderais aux sénateurs et aux témoins dans la salle de ne pas parler trop près du micro et de ne pas enlever leur écouteur lorsqu’ils prennent la parole. Nous voulons éviter les phénomènes acoustiques, qui pourraient être dangereux pour nos collègues qui sont tout près et qui nous assistent aujourd’hui.
Comme pour la première partie de la séance, je rappelle aux sénateurs qu’ils disposeront chacun de cinq minutes et que le temps sera chronométré. Je vais lever la main lorsqu’il restera une minute, et les deux mains, lorsque le temps sera pratiquement écoulé.
La sénatrice Simons : Monsieur Rourke, j’aimerais commencer avec vous et revenir sur ce que vous avez appelé votre trouble d’ensemencement saisonnier. Nous revenons tout juste de Guelph, où nous avons rencontré des agriculteurs qui pratiquent la culture de couverture. Je viens des Prairies comme vous, et je me suis demandé comment diable cela fonctionnerait, pas seulement dans les vastes champs que vous avez décrits, mais aussi dans le climat des Prairies — à ne pas confondre avec des conditions climatiques extrêmes — avec ses automnes hâtifs et ses printemps tardifs.
À l’Université de Guelph, on nous a montré des champs utilisés pour les cultures d’hiver. J’ignore complètement, je l’avoue, ce qui pourrait être utilisé comme culture d’hiver. Dans mon coin de pays — à Edmonton — et dans le Nord, le blé d’hiver pourrait-il être cultivé? En semant à l’automne, que peut‑on récolter? Quelles cultures sont assez résistantes pour survivre à l’hiver?
M. Rourke : Voilà pourquoi je propose la technologie de germination tardive des semences. De nombreuses idées sont mises de l’avant, et certaines techniques pourraient être utilisées dans des cas précis, mais la plupart ne sont pas vraiment adaptables.
J’ai mené des recherches sur le blé d’hiver à l’Université du Manitoba de 1980 à 1983. C’est à cette époque que ma femme a inventé l’expression « trouble de l’ensemencement saisonnier ». Cette pratique est vraiment perturbatrice. Nous n’avons pas assez d’équipement et de personnel pour l’appliquer à grande échelle. Si nous pratiquons la culture de couverture avec la vesce velue et le seigle d’automne et que nous cultivons ces céréales, nous commençons à voir des avantages. Les deux cultures doivent pour cela être semées en même temps que le canola ou le blé de printemps pour que leur germination survienne au début de la sénescence des cultures commerciales, soit 80 jours plus tard. Mais si nous attendons la moisson ou après la moisson, le moment où les cultures devraient commencer à pousser est déjà passé.
Idéalement, la plupart des cultures d’automne doivent être en terre le 1er septembre, voire peut-être une semaine ou deux auparavant. Dans ma région, si l’ensemencement est hâtif, les cultures ne pousseront pas, car cela tombe en plein dans la sécheresse. Si l’année est humide, c’est déjà trop tard et nous avons manqué le bateau. Souvent, c’est soit trop sec, trop humide ou trop tard. Nous avons seulement une ou deux semaines de jeu. La fenêtre est petite.
Vous avez raison. Ce qu’ils font en Ontario est formidable. Ils peuvent épandre du trèfle rouge sur le blé d’hiver, et il poussera. Au Manitoba, ce serait comme jeter de l’argent par les fenêtres.
J’ai parlé à des gens de la California State University à Chico. Ils m’ont dit qu’ils semaient leurs cultures de couverture à la fin du mois d’octobre, et que ces cultures poussaient tout l’hiver. Selon eux, la culture de couverture de plusieurs espèces sans travail du sol accroît considérablement la quantité de carbone organique dans le sol.
Nous devons nous spécialiser dans les cultures de couverture. Ces types de cultures, combinés avec la pratique de semis direct, sont essentielles à la santé du sol.
La sénatrice Simons : Merci beaucoup.
Le sénateur Oh : Merci aux témoins de leur présence parmi nous aujourd’hui. Ma question s’adresse à M. Ian Boxall et à M. Jake Ayre.
Quels outils sont en place au fédéral et au provincial pour aider à maintenir et à accroître le taux de succès à long terme du secteur de l’élevage?
M. Boxall : Les outils en place pour assurer la pérennité du secteur de l’élevage sont très limités. En Saskatchewan, la taille du cheptel connaît un déclin — qui se chiffre à des centaines de milliers d’individus — depuis les deux dernières années en raison de la quantité insuffisante d’outils qui pourraient assurer le succès du secteur.
En parcourant la province l’été dernier, comme je le fais chaque année avec mes enfants, j’ai observé un nombre accru de cultures céréalières dans des champs qui servaient auparavant de pâturage pour le bovin. C’est très préoccupant.
Les outils faisant partie des boîtes à outils fédérales et provinciales, qui permettraient d’assurer le succès du secteur de l’élevage — et d’assurer la croissance continue des cultures fourragères et des pâturages naturels —, sont insuffisants.
M. Ayre : La situation que décrit M. Boxall correspond à ce que nous observons au Manitoba. Les éleveurs de bovins de la province ne cessent de répéter que le train actuel de programmes de gestion des entreprises est mal adapté aux exploitations agricoles, que ce soit les exploitations simples ou les exploitations mixtes qui combinent la production de céréales et de bovins.
Dans la province, plusieurs se demandent comment faire pour préserver les prairies en l’absence de mesures incitatives et de justifications financières pour le faire.
Le sénateur Oh : Selon vous, qui devrait montrer la voie — le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux — pour que les deux secteurs y trouvent leur compte?
M. Boxall : Comme pour le reste, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux travaillent très bien ensemble en agriculture. Il y a tout lieu de penser que cette collaboration se poursuivra. Je suis d’avis que la préservation des prairies naturelles est avantageuse pour les Saskatchewanais — et très avantageuse pour l’ensemble des Canadiens —, car celles-ci forment un élément vital de la partie écologique de l’équation.
M. Ayre : Je suis d’accord avec vous. La collaboration entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux s’est avérée fructueuse dans le passé. Pour qu’elle perdure à long terme, il faut continuer dans cette voie.
Le sénateur Oh : Merci.
Le sénateur Cotter : Merci à tous les témoins pour leur présentation. Vos observations sont éclairantes et très utiles pour notre étude.
Ma question s’adresse surtout à vous, monsieur Boxall, mais peut-être aussi à M. Ayre. Elle porte essentiellement sur les Prairies.
Je commence en précisant, monsieur Boxall, que des membres de ma famille habitent à Tisdale et dans les environs. Je ne vais pas les nommer, au cas où vous les connaîtriez, mais je suis assez au fait des défis et des réalisations que vous décrivez. Je suis sans cesse impressionné par le lien entre l’agriculture créative et la recherche issue des universités et d’autres secteurs et par les avancées dans les domaines de l’agriculture et de la science des sols qui en résultent.
Vous avez observé des améliorations dans la séquestration de carbone, ainsi qu’un accroissement notable du rendement au cours des 20 ou 30 dernières années. Est-ce que des boîtes à outils appropriées ou encore des connaissances adéquates, actuelles et futures, peuvent encore entraîner des progrès sur ces fronts? Sommes-nous arrivés à un plateau de la productivité, ou pouvons-nous faire mieux en mettant en place des techniques agricoles plus avant-gardistes?
M. Boxall : Selon les chiffres tirés de l’enquête de Statistique Canada, nous sommes passés de 21,7 millions de tonnes en 1981 à 41,7 millions de tonnes en 2016. Si nous continuons dans cette avenue, c’est parce que les agriculteurs sont innovateurs. Ils ont choisi cette voie de leur propre initiative pour deux raisons : ils se préoccupent du sol et de l’environnement, et ils sont payés à la production. De fait, la durabilité à la ferme est de nature environnementale et économique et je crois que les agriculteurs continueront à progresser si la recherche démontre que ces efforts sont payants sur le plan environnemental et sur le plan économique.
Je pense en effet qu’il est possible d’en faire plus. Mais que doit-on faire exactement? Nous devons continuer à financer la recherche pour trouver la réponse à cette question.
Le sénateur Cotter : Merci. Monsieur Ayre, souhaitez-vous ajouter quelque chose?
M. Ayre : Depuis cinq ans, ma sœur et moi-même déployons énormément d’efforts pour intégrer les technologies qui émergent au fil du temps. Je ne parle pas seulement du GPS et de la gouverne automatique.
J’ai expliqué dans ma déclaration comment nous pouvions suivre efficacement la quantité d’engrais épandue jusqu’à la récolte ainsi que les données sur le rendement. Or, les agriculteurs dans la province ne possèdent pas tous cette technologie. Les modifications à apporter aux équipements pour y intégrer les technologies entraînent des coûts. Par exemple, dans un quart de section, ou 140 acres, d’avoine que nous avons ensemencée l’an dernier, nous avons économisé plus de 2 200 gallons d’engrais liquide dans un seul champ en utilisant la technique de fertilisation par zone — la cartographie de la conductivité électrique du sol — et en intégrant les cartes à nos équipements d’épandage d’engrais. Ces technologies réduisent les émissions, les risques de lessivage et même les coûts. Nous les appliquons un champ à la fois. Elles ne s’étendent pas encore à toute l’exploitation, mais ce sera le cas un jour.
Davantage de fermes devraient recourir à des technologies comme celle-là, non seulement pour saisir et suivre les données, mais aussi pour savoir quelle quantité d’engrais elles ont économisée et pour mesurer les répercussions sur leur exploitation agricole. Les technologies existent. Il nous reste à les adapter.
Le sénateur Cotter : Merci.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Je vais poser ma question en français.
Ma question s’adresse à qui veut bien y répondre, parce qu’elle est quand même assez générale.
Cela fait un petit bout de temps qu’on a commencé cette étude. Je remarque qu’on a entendu des choses très particulières aux régions et aux provinces, mais il y a aussi des lieux communs qui reviennent.
Ma question est la suivante : puisqu’éventuellement, on devra faire des recommandations à la suite de cette étude et qu’il y a un rapport que vous connaissez certainement, le rapport de RBC intitulé Terrain fertile : Comment le carbone du sol peut-il servir de récolte commerciale à l’ère du changement climatique?, qui recommande, entre autres, l’élaboration d’une stratégie nationale en matière de sols, j’aimerais vous entendre là-dessus.
Est-ce la bonne approche? Serait-ce utile? En a-t-on besoin? Aimeriez-vous une stratégie nationale en matière de sols? Si oui, comment voyez-vous cette stratégie? Que devrait-elle comporter?
Je ne sais pas qui voudrait répondre à la question en premier.
[Traduction]
M. Boxall : Merci de la question.
Je crois que nous pourrions établir une stratégie nationale. En même temps, vu la grande diversité de l’agriculture à l’échelle du pays, la tâche serait passablement compliquée. Est-ce que je crois que le gouvernement fédéral doit contribuer à l’établissement d’objectifs dans certains domaines? J’en suis convaincu. Mais les objectifs doivent être établis par région.
Les techniques agricoles en Saskatchewan sont très différentes des techniques agricoles en Ontario. Même dans le Sud du Manitoba, où M. Ayre et M. Rourke ont leur exploitation, les choses n’ont rien à voir avec ce que je fais chez moi.
Le contenu de la stratégie et les activités de recherche devraient être établis sur une base régionale. À mon avis, il y a moyen de réduire les émissions de carbone ou les émissions d’oxyde nitreux dans toutes les régions, mais ces efforts doivent être appuyés par la recherche.
Cet aspect est crucial.
[Français]
La sénatrice Petitclerc : Merci beaucoup. C’est très utile.
Nos autres témoins veulent-ils se prononcer là-dessus?
C’est très utile pour nous, car nous avons souvent des idées de stratégie nationale, mais au fond, ce que l’on veut savoir, c’est ce dont on a besoin exactement, ce qui sera le plus utile. M. Pryce, peut-être? Je vois des mains levées.
[Traduction]
M. Pryce : Tiens, je vais me lancer, mais je ne veux pas bousculer M. Ayre et M. Rourke.
Je pense que le concept de stratégie nationale que propose la RBC est intéressant, mais en même temps, je crains que nous ayons trop de stratégies. Le gouvernement fédéral a mis en place la Stratégie pour une agriculture durable, tandis que le gouvernement provincial a sa stratégie sur la sécurité des bassins versants de même que sa stratégie marine côtière, et j’en passe. Il y a tellement de stratégies que le producteur moyen pourrait s’y perdre et se demander si tout cela ne fait pas partie d’un projet de création d’emplois au gouvernement. Sans blague, je pense que l’objectif est de créer des avantages tangibles pour les producteurs.
En fait, la stratégie nationale proposée ne devrait-elle pas s’intégrer aux efforts que déploie déjà le gouvernement fédéral dans le cadre de la Stratégie pour une agriculture durable, vu les chevauchements? En effet, certains points que nous avons soulevés aujourd’hui, comme la mise à jour de la cartographie des sols du Canada, pourraient s’y retrouver. Au lieu de déclarations politiques, la stratégie prévoirait toute une série de mesures tangibles que pourraient prendre le gouvernement et les producteurs.
Voilà mes prémisses. Merci beaucoup de la question, sénatrice.
La sénatrice Petitclerc : Merci.
M. Ayre : Mes commentaires vont reprendre ce que vient de dire M. Boxall, car le Manitoba est une province très diversifiée. À Minto — la région d’où je viens —, je produis du maïs ainsi qu’une variété d’autres cultures que M. Boxall ne pourrait pas cultiver à Tisdale.
Du point de vue de Keystone Agricultural Producers of Manitoba — lorsque j’entends M. Pryce et M. Boxall parler des études sur le sol les plus récentes menées dans la province —, je ne peux pas dire de mémoire à quand remonte la dernière étude au Manitoba. M. Rourke s’en souvient peut-être. Je pense que cela fait un bail.
La stratégie nationale pourrait comporter entre autres des levés pédologiques à jour sur les sols au Manitoba. Comme vient de le dire M. Boxall, la mise en place d’une stratégie nationale est une idée fantastique à première vue. Par contre, les techniques utilisées à Delta, en Colombie-Britannique, à Minto, au Manitoba, et à Guelph, en Ontario, et celles utilisées à Summerside, aux environs de Charlottetown, à l’Île-du-Prince-Édouard, sont difficilement comparables, comme l’a dit M. Pryce. Les types de sols varient selon la région, tout comme les techniques utilisées par les producteurs. Je pense que ce serait très difficile d’adopter une approche uniforme. Il faudrait peut‑être établir des critères généraux.
M. Rourke : En tant que citoyens du monde et en tant que Canadiens, nous avons l’occasion d’être audacieux. La donne actuelle me fait beaucoup penser au président Kennedy qui avait dit en 1962 que les États-Unis allaient envoyer un homme sur la lune et le ramener sur Terre en toute sécurité. Pour remplir notre mission envers la protection de l’environnement, nous devons faire preuve de beaucoup d’audace.
Il faut mettre en place une stratégie canadienne et une stratégie mondiale sur la réduction ou l’élimination de la consommation de combustibles fossiles — qui ne se limiteraient pas à accroître l’efficacité des engrais azotés, car cet objectif, bien que louable, n’est pas l’objectif final de 2050 — et sur la séquestration optimale de carbone dans le sol de sorte qu’il ne se répande pas dans l’atmosphère. Cette stratégie répondrait de surcroît aux besoins alimentaires de la population.
C’est le moment d’être audacieux et de mettre en place des stratégies nationales de cette ampleur, mais en tenant compte des différences régionales. Ce n’est sûrement pas hors de notre portée.
Le président : Merci, monsieur Rourke.
La sénatrice Jaffer : Je suis également de la Colombie-Britannique, monsieur Pryce. Je veux parler des phénomènes climatiques extrêmes en Colombie-Britannique — inondations, sécheresses et vagues de chaleur — et des défis qu’ils posent. J’ai plusieurs questions à vous poser, mais la première est la suivante. Quelles sont les conséquences des conditions météorologiques extrêmes sur la santé des sols en Colombie-Britannique? Qu’est-ce qui se fait comme recherche pour qu’on puisse comprendre ces conséquences et rendre votre secteur agricole plus résilient?
M. Pryce : Je vous remercie beaucoup de cette question, sénatrice. Je pense que ces phénomènes climatiques extrêmes ont de nombreux effets négatifs sur la santé des sols. L’exemple que j’ai mis en évidence, bien sûr, est celui de Delta : le coin salé se trouve à proximité, alors la montée du niveau de la mer amène plus d’eau salée à l’intérieur des terres. Cela menace des terres agricoles de premier ordre. Bien sûr, les incendies de forêt ont des conséquences plus importantes. Les inondations viennent mélanger les choses; elles déplacent différents nutriments du lit de la rivière vers le sol et vice-versa. Mais le plus grave, ce sont les incendies de forêt, et on ne sait pas exactement comment y remédier, outre l’adoption de pratiques de gestion forestière efficaces qui, espérons-le, empêcheront ou limiteront l’intensité des incendies de forêt. Il est difficile de faire face à la situation une fois que les dégâts ont été causés et que les débris sont dispersés dans l’air et dans des zones telles que les terres agricoles.
Les effets sont assez graves, mais jusqu’à présent, la technologie est un peu limitée dans ce que nous pouvons faire. Il semble qu’il y ait des recherches prometteuses dans d’autres régions du monde sur des démarches combinant le dessalement et l’irrigation. Il existe des moyens d’empêcher l’eau salée — dans une région comme celle de Delta — d’atteindre l’eau d’irrigation. Toutefois, cette technologie est très artisanale, très expérimentale et assez coûteuse. Il faudrait peut-être investir davantage pour poursuivre ces développements. Comme je l’ai dit, une grande partie de ce travail se fait ailleurs dans le monde, et non au Canada.
La sénatrice Jaffer : J’ai une question plus précise. Savez-vous quelles ont été les incidences des inondations de 2021 en Colombie-Britannique sur les terres agricoles et la santé des sols?
M. Pryce : L’effet sur la santé des sols est difficile à déterminer à ce stade, notamment parce que nos données de cartographie des sols sont dépassées, ce qui nous empêche de faire la comparaison. Cependant, les effets sont certainement très graves. Les producteurs sont très reconnaissants de l’aide apportée par les gouvernements fédéral et provinciaux, et beaucoup d’entre eux ont ainsi évité de devoir mettre fin à leur production. Certains ont pu s’en sortir, mais cela ne signifie pas nécessairement que l’année a été bonne. Les gens se trouvaient toujours dans une situation difficile, mais au moins de nombreuses familles d’agriculteurs ont évité de faire faillite et de devoir cesser leurs activités de production.
Les effets perdurent. À ma connaissance, il y a encore des exploitations agricoles dans le Lower Mainland qui n’ont pas été entièrement reconstruites ou qui n’ont pas repris la production. Il y a encore des détritus laissés par les inondations, et il y a encore beaucoup de travail à faire pour réparer les pots cassés.
La sénatrice Jaffer : J’ai une autre question à vous poser. Vous avez dit que le soutien du gouvernement a permis à certains agriculteurs de s’en sortir, mais l’aide du gouvernement a-t-elle contribué à accroître la résilience face à de tels événements météorologiques? Qu’est-ce qu’il faut faire de plus?
M. Pryce : Je pense qu’il faut d’importants investissements dans l’atténuation des inondations, car rien n’a été fait jusqu’à présent. Le gouvernement provincial a annoncé la construction d’une station de pompage à Abbotsford, par exemple, ce qui pourrait être utile. Il pourrait y avoir des investissements dans la production riveraine : il s’agit d’utiliser des zones tampons naturelles pour essayer d’empêcher l’eau de pénétrer dans les terres agricoles en cas d’inondation. Cependant, au bout du compte, il faut des infrastructures en dur — comme des barrages et des digues — pour prévenir des inondations de cette ampleur. Ce n’est pas en consacrant 10 millions de dollars ou 20 millions de dollars ici et là, pour des haies et des buissons, qu’on empêchera un événement dévastateur comme celui que nous avons connu en novembre 2021. Oui, je pense que des investissements importants sont nécessaires.
Le sénateur Klyne : Je vais poser ma première question à M. Boxall. Récemment, M. Rick Burton, sous-ministre de l’Agriculture du gouvernement de la Saskatchewan, a comparu devant notre comité. Je dirais que sa déclaration liminaire a été pour moi une grande source de fierté pour le Saskatchewanais que je suis. En faisant une vérification de base, j’ai trouvé vos propos lors de votre comparution devant le Comité permanent de l’industrie et de la technologie de la Chambre des communes, alors qu’il étudiait le projet de loi C-244, visant le droit de réparer. Je vais citer une partie de vos propos à l’intention du comité. Elle remonte à décembre dernier :
Au cours de la dernière décennie, l’équipement agricole s’est énormément modernisé. Cette modernisation a contribué à faire de la Saskatchewan l’endroit le plus durable au monde pour produire des aliments, du carburant et des fibres. Grâce à l’intégration d’outils numériques et mécaniques, nous pouvons faire beaucoup plus avec moins, et nous avons 30 ans d’avance sur le reste du monde en ce qui concerne le contrôle des sections, la culture sans travail du sol et l’agriculture de précision.
Monsieur Boxall, vous êtes un agriculteur de quatrième génération de la Saskatchewan. Cela me permet de penser que vous avez vu de vos propres yeux ce qui se passe lorsque les terres agricoles changent au fil du temps, en fonction des phénomènes climatiques et de l’intervention humaine. Compte tenu des propos élogieux de M. Burton, ainsi que de votre témoignage devant l’autre comité, que je viens de lire, j’aimerais savoir si vous êtes préoccupé par l’érosion ou la dégradation des sols dans les exploitations agricoles des Prairies. Avez-vous remarqué un changement significatif dans les conditions du sol au cours de votre vie d’agriculteur?
M. Boxall : Je vous remercie de votre question, sénateur Klyne. En ce moment, en Saskatchewan, compte tenu de nos méthodes agricoles et parce que nous pratiquons le semis direct, je ne suis pas inquiet. Je m’apprête à ensemencer la semaine prochaine, et je vais ensemencer des terres qui n’ont pas été touchées depuis l’automne dernier. J’ai du chaume pour garantir que l’humidité est là et que le sol est au même niveau qu’à l’automne dernier. Grâce à la bonne stratégie de drainage mise en place par la province, nous constatons moins d’érosion et moins de dégâts dus au ruissellement de l’eau.
Je ne suis pas inquiet pour les sols en Saskatchewan. Je pense qu’il est important de souligner que les agriculteurs se soucient de l’environnement et de la santé des sols plus que les gens le reconnaissent. J’en suis persuadé. Nous nous en soucions. Nous voyons tous les jours comment cela affecte nos fermes. Je travaillais à la ferme lorsque nous avons commencé le semis direct. Nous roulions en voiture, et je me souviens de mon père qui disait que ça ne pousserait jamais, parce qu’il avait l’habitude de semer sur de la terre noire. Il disait que cela ne pousserait jamais. Depuis 1997, notre production a explosé. Nous utilisons moins d’eau, moins d’engrais et moins de produits chimiques.
Le sénateur Klyne : Monsieur Ayre, le comité a beaucoup entendu les agriculteurs parler des technologies qu’ils utilisent pour suivre la productivité de leurs exploitations. Par exemple, certains agriculteurs utilisent maintenant la technologie pour suivre les rendements, utiliser l’eau de manière plus efficace et rendre les opérations agricoles plus durables. Je suppose que beaucoup de vos membres agriculteurs utilisent ces pratiques axées sur les améliorations technologiques.
Avez-vous beaucoup de membres qui ont tardé à adopter les nouvelles technologies ou de cas particuliers qui ne l’ont pas fait ou qui sont incapables de le faire? Si c’est le cas, que peut-on faire pour encourager un plus grand nombre de vos membres à utiliser les nouvelles technologies, par exemple en offrant des mesures d’incitation comme celles qui sont proposées pour les véhicules électriques? Est-ce une solution envisagée?
M. Ayre : Je vous remercie de cette question, sénateur Klyne. Pour l’instant, nous ne disposons pas de données exactes sur l’adoption des nouvelles technologies par les agriculteurs. Je sais que l’utilisation de la fonction Autosteering, une fonction de gouverne automatique, est mentionnée assez souvent et qu’au Manitoba, cette fonction est utilisée dans plus de 60 % de nos exploitations agricoles.
En ce qui concerne d’autres technologies dont j’ai parlé, s’il existait des programmes pour adapter l’équipement... Une partie du financement vient juste d’être débloquée. Hier, j’ai discuté avec un producteur, et il y a maintenant un programme pour adapter un pulvérisateur à la technologie WEED-IT, qui ne traite que le vert dans le champ au lieu de pulvériser un pesticide sur toute la surface. Il y a des programmes qui sortent maintenant, mais ils ont été annoncés il y a deux jours.
La sénatrice Burey : Bonjour à tous. Merci beaucoup de votre participation. Je suis une nouvelle sénatrice de l’Ontario et j’apprends beaucoup.
Ma question porte sur le transfert de connaissances; j’ai peut‑être manqué une partie de ce qui s’est dit parce que j’ai dû sortir de la salle. J’ai entendu parler de l’agriculture de précision. Je poursuis dans la même veine que les questions du sénateur Klyne. Comment obtenez-vous des fonds pour ce type d’initiatives? Nous pourrions commencer par M. Boxall, puis M. Ayre, ou quiconque souhaite répondre.
M. Boxall : Je vous remercie de votre question. Dans nos fermes, les agriculteurs ont adopté beaucoup de ces pratiques parce que c’était la bonne chose à faire. Il n’y a pas eu de financement pour cela; en ce qui concerne le semis direct et le taux variable, il y a eu quelques programmes pour cela, mais ce n’est pas accessible à tout le monde. Nous l’avons fait parce que nous en avons vu les avantages dans notre exploitation. Les agriculteurs de la Saskatchewan l’ont fait parce que c’est la bonne chose à faire : ils veulent préserver la santé des sols et l’environnement de leurs exploitations.
M. Ayre : Je dirais la même chose. En ce qui concerne ma ferme et les autres producteurs avec lesquels j’ai parlé, je sais que les producteurs l’ont fait non seulement parce qu’ils ont vu les avantages environnementaux, mais aussi parce qu’ils ont vu les avantages financiers. J’ai parlé tout à l’heure du tabouret à trois pattes et des piliers de la durabilité.
Pour ce qui est des programmes dont j’ai parlé précédemment, il s’agit du financement du Partenariat canadien pour une agriculture durable, ou PCAD, qui vient d’être débloqué. Il y a toute une série de programmes qui en découlent : des programmes visant à réduire l’intensité du travail du sol et l’utilisation d’engrais pour les semences dans des conditions de faible perturbation. Si nous avions eu ce genre de programmes il y a 5 ou 10 ans, il y aurait peut-être eu un certain engouement. Mais, comme l’a dit M. Boxall, je sais qu’un grand nombre de nos producteurs, y compris notre exploitation, l’ont fait parce que c’était la bonne chose à faire et que nous en avons vu les avantages.
La sénatrice Burey : À ce sujet, les gens d’Agriculture et Agroalimentaire Canada nous ont parlé des laboratoires vivants et des programmes de soutien par les pairs. Est-ce que quelque chose de ce genre a cours en Saskatchewan, en Colombie-Britannique ou au Manitoba?
M. Rourke : Il y a un programme de laboratoires vivants dans l’Est des Prairies; il s’agit en fait du deuxième cycle de ce programme. Le premier cycle a été mis sur pied par M. Gray, qui travaillait à l’époque pour Agriculture et Agroalimentaire Canada. L’un des principaux objectifs était d’essayer d’augmenter le carbone organique du sol dans le cadre de l’initiative « 4 pour 1000 » annoncée lors de l’Accord de Paris. Cela ne s’est pas vraiment réalisé.
C’est un excellent programme et une excellente idée, mais on commence seulement à apprendre à fonctionner ainsi qu’à maîtriser les concepts clés en matière d’innovation. J’attends avec impatience le prochain cycle du programme des laboratoires vivants.
M. Pryce : En Colombie-Britannique, nous avons un programme de laboratoires vivants qui accomplit un travail exceptionnel, même si je suis peut-être un peu partial parce que le BCAC est l’un des promoteurs conjoints des laboratoires vivants. Nous sommes de fervents partisans de ce programme et nous apprécions l’excellent travail qu’il accomplit.
En ce qui concerne votre question sur le transfert de connaissances — et je m’appuie peut-être sur ce que M. Ayre a dit précédemment —, dans le cadre du Partenariat canadien pour une agriculture durable qui s’étend sur cinq ans, il existe en Colombie-Britannique, par exemple, le programme de transfert des connaissances et de la technologie, et il y a probablement des équivalents dans d’autres provinces également en raison de la nature du PCAD, qui est un accord fédéral-provincial.
Dans ce cas particulier, c’est parfois difficile parce que le financement offert au producteur agricole ou à l’association d’agriculteurs est assez limité, soit environ 1 500 $ pour participer à des conférences, à des séminaires universitaires, et ainsi de suite. S’il s’agit d’une journée sur le terrain, de la visite d’une exploitation qui applique une pratique régénératrice et d’un apprentissage pratique, il faut compter environ 7 500 $. Il est parfois difficile de participer à ce genre d’activités quand on a un budget limité.
S’il était possible d’obtenir du gouvernement qu’il assume une plus grande part des coûts et qu’il s’engage davantage dans les années à venir, nous serions certainement ravis, mais, bien sûr, le PCAD a été signé récemment, et c’est peut-être une question que nous réexaminerons dans cinq ans. Merci beaucoup.
La sénatrice Burey : Merci.
M. Ayre : Producteurs agricoles Keystone est un collaborateur du projet des laboratoires vivants.
Le président : J’ai une question à poser à M. Rourke. Comme vous l’avez entendu précédemment, certains d’entre nous se sont rendus à Guelph la semaine dernière. Nous avons visité une ferme biologique où nous avons appris qu’ils pratiquent le travail minimal du sol, mais que tous les quatre ans, ils procèdent à un travail profond du sol. Comment cela se compare-t-il aux pratiques dont vous avez entendu parler dans les provinces des Prairies? Ces pratiques sont-elles efficaces? Faites-vous des recherches à ce sujet?
M. Rourke : Je fais parfois preuve d’une curiosité excessive, et je m’intéresse au bio depuis la fin des années 1970.
Pendant quelques années, nous sommes passés de la culture sans labour à la culture biologique — en 2017 —, et maintenant nous sommes revenus à la culture sans labour plus. Je pense qu’il y a des niches où le bio peut fonctionner, et je pense qu’il supporte mieux les conditions plus humides — comme en Ontario —, mais chaque fois que nous labourons dans l’Ouest du Canada, nous créons de la sécheresse. Nous ne pouvons alors pas établir nos cultures de couverture. Nous finissons par labourer davantage pour lutter contre les mauvaises herbes.
Nous devons être très prudents dans notre façon d’envisager l’agriculture biologique, en particulier dans les régions sèches. Mais il y a toujours des agriculteurs novateurs qui réussissent dans ce domaine. Je pensais pouvoir faire de la culture biologique sans labour, mais c’est pratiquement impossible.
Encore une fois, je serais très prudent. Il y a de très bonnes leçons que nous pouvons tirer de nos amis qui font du bio, sur le plan des perspectives agroécologiques, et que nous pouvons commencer à utiliser pour remplacer certains pesticides et assurer une meilleure efficacité des engrais naturels.
Le président : Merci. Monsieur Ayre, vous avez parlé de l’agriculture de précision et vous avez dit que vous l’utilisiez. Dans quelle mesure l’agriculture de précision a-t-elle été adoptée dans votre voisinage, disons? Êtes-vous une lueur d’espoir pour les gens autour de vous qui verront cela et voudront l’essayer? Quel est le degré d’adoption de cette méthode?
M. Ayre : Je vous remercie de cette question, monsieur le président. En ce qui concerne l’agriculture de précision, le GPS Autosteer est une solution qui est souvent évoquée. Très honnêtement, dans notre région, ce système est utilisé à 100 %, simplement pour des raisons d’efficacité, de fatigue de l’opérateur et de réduction massive... Je dirais que c’est à 100 %.
En ce qui concerne certaines de nos pratiques, dont l’échantillonnage du sol en grille, la cartographie EC et la fertilité par zone — peut-être que M. Rourke pourra nous en parler aussi —, le taux d’adoption est d’environ 70 %. Dans ma région, j’ai discuté avec des producteurs, et certains d’entre eux sont confrontés à une forte salinité dans notre coin de pays. Les 100 ou 200 premiers pieds autour d’un champ sont souvent très salins, ce qui limite la croissance des cultures. Avec la fertilisation par zone, très souvent, on coupe le fertilisant dans ces zones parce que l’azote s’y trouve en très forte concentration, mais que rien ne va pousser là.
Cette pratique suscite de plus en plus d’intérêt et les gens posent des questions. Je pense qu’il s’agit d’une pratique qui sera de plus en plus utilisée parce que les gens y voient non seulement des avantages pour l’environnement, mais aussi des avantages sur le plan de la réduction des coûts.
Le président : Monsieur Rourke, souhaitez-vous intervenir?
M. Rourke : Je suis d’accord en grande partie avec ce qui vient d’être dit. Nous utilisons tous, assurément, le guidage automatique. Nous sommes de plus en plus nombreux à nous équiper d’un système de contrôle des zones, afin d’éviter les chevauchements de nos pulvérisateurs, ce qui se fait assez facilement. Certains de nos équipements d’ensemencement en sont équipés, de sorte que nous pouvons éviter ces chevauchements grâce à la technologie.
Au sujet de l’agriculture de précision, j’ai réalisé une étude il y a quelques années, et j’ai découvert que la meilleure chose à faire dans les zones salines — les zones humides —, c’est de les ensemencer en fourrage, de mettre du fumier provenant de mes étables au sommet des collines et d’essayer d’équilibrer les choses. Au fur et à mesure que la technologie s’améliore — et des gens comme M. Ayre sont très pragmatiques à cet égard —, les solutions seront de plus en plus nombreuses. La génération qui me suit sera, je pense, plus intéressée que moi.
Le président : Je vous remercie beaucoup.
La sénatrice Simons : On parle tellement de stratégie, qu’on finit par s’y perdre. Tout le monde a une stratégie. La seule chose qui soit pire qu’une stratégie, c’est un cadre. J’ai été journaliste pendant 30 ans, et chaque fois que quelqu’un me disait qu’une histoire portait sur une stratégie ou un cadre, je perdais intérêt. Je crains que, comme sénatrice, ce soit toujours le cas.
Que pouvons-nous faire, concrètement? Vous avez tous une grande expérience pratique. Mon père avait l’habitude de dire qu’un expert est un type qui vient de l’extérieur de la ville avec ses diapositives. Que pouvons-nous faire pour nous assurer que, dans notre rapport, nous ne nous contentons pas de mettre des mots sur une page qui deviendront une stratégie ou un cadre, mais que nous apporterons des solutions pratiques aux défis auxquels nous faisons face pour enrichir nos sols et en faire de bons réservoirs de carbone?
Désolée, c’était une question très décousue, du mauvais journalisme. J’aimerais commencer par M. Pryce. Ensuite, j’aimerais entendre chacun de nos invités à tour de rôle.
M. Pryce : Je vous remercie beaucoup de cette question, sénatrice. Je pense qu’on peut éviter de se perdre en mots si le rapport du comité — je ne veux pas être trop présomptueux — contient trois mesures claires et réalisables que les gouvernements fédéral et provinciaux peuvent mettre en œuvre ensemble, plutôt que, comme nous l’avons fait, de vouloir se doter d’une sorte de stratégie ou de cadre.
Je pense qu’un mandat pour réaliser la cartographie des sols à l’échelle du Canada serait une mesure claire et concrète qui pourrait être mise en place assez rapidement. Bien sûr, il faut que quelqu’un paie, et je crois que c’est là où le comité peut user de son influence pour dire que le gouvernement fédéral et les provinces doivent travailler ensemble pour déterminer qui va payer la facture pour cartographier les sols.
Une autre mesure concrète qui pourrait faire l’objet d’une recommandation est la suivante : faire en sorte que la cible ou la stratégie d’Agriculture et Agroalimentaire Canada en matière de réduction des émissions d’engrais repose sur des données, sur l’intensité des émissions, plutôt que sur une réduction générale des émissions. Bien entendu, cela nous oblige à réfléchir à la santé des sols à partir de données plutôt qu’à partir d’un calcul fait sur le coin d’une table.
Nous demandons une cartographie des sols, et nous disons ensuite de mettre le tout à profit en mesurant l’intensité des émissions.
J’espère que cela répond à la question, et qu’il s’agit là d’idées intéressantes à prendre en considération.
M. Rourke : Je suis heureux que vous posiez la question. Comme je fais mon doctorat, j’ai un cadre et un peu de stratégie, alors je dois être prudent.
Je pense que le Sénat se trouve dans une position unique pour ne pas nécessairement dire aux gens ce qu’ils veulent entendre, mais pour tenter d’interpréter ce que nous devons vraiment savoir. Le rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat dit en quelque sorte ce que nous devons savoir : nous devons cesser d’utiliser des produits à base de combustibles fossiles, en particulier les produits à usage unique comme le carburant diésel et les engrais azotés. Nous ne pouvons pas nous passer d’azote, alors nous avons besoin d’une autre stratégie. Nous devons utiliser les légumineuses et la culture sans labour qui, comme l’a montré M. Dave Franzen, peut réduire l’utilisation de l’azote de 40 à 50 livres pour le blé et jusqu’aux deux tiers pour le maïs. Certaines de ses données sont tout à fait étonnantes. Ces chiffres s’appuient sur une centaine d’essais.
Nous devons soutenir davantage la fixation de l’azote asymbiotique. Toutes les grandes entreprises travaillent sur cette technologie.
Nous devons envisager des stratégies vertes. Diverses petites et grandes entreprises s’y intéressent.
Ensuite, nous devons utiliser les principes 4B pour nous assurer que les émissions provenant des nouvelles pratiques sont vraiment réduites.
Nous devons faire preuve d’audace et profiter de l’occasion qui se présente pour nous orienter dans la bonne direction.
M. Boxall : Je ne suis pas d’accord avec M. Rourke. Il n’est pas possible de se débarrasser des combustibles fossiles. Actuellement, je ne peux pas utiliser de tracteurs électriques dans ma ferme. SaskPower et, je pense, toutes les provinces sont dans le même bateau en ce sens que nous n’avons pas l’infrastructure nécessaire. Il est hors de question d’éliminer complètement les combustibles fossiles.
Voici où le Sénat a la possibilité d’agir : ce qu’on observe depuis la COVID, et au cours des deux dernières années, c’est ce qui se passe géopolitiquement dans le monde, et le fait que les pays cherchent la sécurité alimentaire et qu’on se tourne vers le Canada pour obtenir des aliments sûrs et de haute qualité. Il doit y avoir un équilibre entre environnement et production. À aucun moment une politique ou une stratégie — quel que soit le nom qu’on lui donne — ne devrait nuire à la production, parce que nos produits sont recherchés et nécessaires dans le monde entier pour nourrir la planète. Il faut un équilibre entre les deux.
La sénatrice Jaffer : J’ai une autre question à vous poser, monsieur Pryce. Puisque vous faites partie du BC Agriculture Council, comment trouvez-vous la collaboration entre le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les municipalités? Je veux être transparente ici et dire que je suis agricultrice à Abbotsford. À titre d’exemple, les digues sont un gros problème pour nous. Nous constatons que le gouvernement fédéral n’insiste pas sur la construction de digues, ce qui entraîne des inondations dans la région.
Savez-vous quelque chose à ce sujet? Votre conseil fait-il quelque chose pour obtenir l’aide des États-Unis afin de mettre fin aux inondations? Êtes-vous au courant?
M. Pryce : Je vous remercie beaucoup de la question, sénatrice. Tout d’abord, en ce qui concerne la collaboration entre les différents ordres de gouvernement, je pense que la collaboration est excellente entre la province et les municipalités. Je pense que, par exemple, comme vous le savez sans doute, nous avons la Provincial Agricultural Land Commission en Colombie-Britannique, ce qui oblige la province et les municipalités à se parler.
Je pense qu’il y a un manque de collaboration entre le gouvernement fédéral et la province. À titre d’exemple, j’ai mentionné dans ma déclaration liminaire que le gouvernement provincial fait la promotion de l’agriculture régénératrice, et que la stratégie d’agriculture durable du gouvernement fédéral emprunte une autre voie. Au BC Agriculture Council, nous aimons le concept d’agriculture durable parce qu’il s’agit d’une approche à multiples facettes de l’agriculture, en ce sens qu’elle doit être durable à la fois sur les plans environnemental et économique, par opposition à l’agriculture régénératrice qui a une définition étroite de la durabilité qui ne tient pas compte de l’aspect économique. Il y a donc des différences entre le gouvernement fédéral et la province.
Je pense que l’atténuation des inondations est un autre exemple qui témoigne du manque de collaboration. Il s’agit sans doute de prendre conscience de l’importance du problème, mais il faudra aussi des investissements et des ressources considérables pour l’atténuer à l’avenir. Aucune des deux parties ne veut avoir à assumer ce fardeau financier, ce qui signifie qu’il faut attendre de voir qui se lassera en premier et qui prendra les devants.
Du point de vue du BC Agriculture Council, que ce soit la province ou le gouvernement fédéral qui prenne les devants, cela nous importe peu, mais il faut que quelqu’un le fasse. Les producteurs ne peuvent pas vraiment construire des barrages et des digues. Il faut qu’il y ait un appui réglementaire et du financement de la part du gouvernement.
Nous jouons un petit rôle dans le Traité du fleuve Columbia parce qu’il doit être renouvelé en septembre. Toutefois, nous n’avons pas de discussions avec le gouvernement américain. Nous comprenons qu’il s’agit d’une relation de nation à nation. Bien entendu, il y a aussi des consultations auprès des populations autochtones qui sont menées dans le cadre du traité.
Nous discutons avec la province, lui demandons de rendre des comptes, d’agir, mais nous ne pouvons pas contourner le gouvernement fédéral en tant que tel et nous engager auprès de nos homologues américains. J’espère avoir répondu à votre question.
La sénatrice Jaffer : Oui, en effet. Je vous remercie.
Le sénateur Klyne : Je vais essayer de poser deux questions rapidement, et la première s’adresse à M. Rourke.
J’ai été très intéressé par cette pratique dans votre ferme appelée « culture biologique sans labour ». Je suis heureux que notre président ait posé une question à ce sujet, car j’ai été en quelque sorte surpris que vous ne l’utilisiez pas. Je vais aborder cette question sous un angle différent, car elle m’intéresse.
Pour le comité et les personnes qui nous regardent, je rappellerai que vous avez été cité dans le Manitoba Co-operator au sujet de la culture biologique sans labour. Selon cet éditorial, le terme « culture biologique sans labour » signifie :
... essayer d’avoir des racines vivantes dans [...] le sol pendant la plus grande partie possible de l’année, augmenter la biodiversité, minimiser la perturbation du sol, garder la surface du sol couverte et intégrer des animaux sur tous les acres.
C’est ce qui m’intéressait.
Si j’ai bien compris, il y a peu de régions et de conditions de sol où l’on pourrait adopter cette pratique. Pourriez-vous nous décrire ces conditions? Recommanderiez-vous cette pratique à ceux qui ne l’utilisent pas pour qu’ils puissent éventuellement bénéficier des bonnes conditions?
M. Rourke : Je vous remercie de la question. J’y ai beaucoup réfléchi. Je me suis intéressé à la culture biologique parce que je pensais que nous pourrions devenir un peu plus autonomes. Nous avons emprunté cette voie pendant un certain temps.
Je pense qu’il est possible de faire de la culture biologique sans labour. Un agriculteur dans l’Indiana, Rick Clark, le fait à grande échelle. Cependant, il a trois avantages que je n’aurai jamais.
Il reçoit assez régulièrement 40 pouces de pluie. Lorsqu’il sème en surface ou dans le sol, cela pousse. Je n’ai pas ce luxe. Je sème dans le sol et je me croise les doigts. La culture sans labour est très utile; elle permet de conserver l’humidité pour que la graine ait plus de chances de pousser. Si je laboure, je fais deux choses : je sème et je prie.
Le deuxième avantage qu’il a, c’est un hiver suffisamment doux pour qu’il puisse cultiver une légumineuse annuelle d’hiver, et il peut semer en vert. Il sème déjà du seigle d’automne, et il peut semer en vert. Cela lui donne un énorme avantage agronomique. Je pense que nous pourrons le faire de plus en plus si nous disposons d’une technologie de semences à germination retardée.
Le troisième avantage qu’il a, c’est d’avoir un voisin qui a une ferme laitière biologique. Tout ce qu’il n’aime pas, il le hache, de sorte que le contrôle des mauvaises herbes devient moins problématique. Comme nous n’avons pas beaucoup d’humidité, je ne pense pas que nous puissions faire cela à grande échelle dans l’Ouest du Canada. Plus on a de vaches et moins on travaille le sol dans un système biologique, plus on s’en rapproche. Mais pour la plupart d’entre nous, nous n’allons pas ériger des clôtures, planter des plantes vivaces et acheter des vaches. Cela va à contre-courant de l’économie et du marché.
Le sénateur Klyne : Je vous remercie de la réponse.
Ma deuxième question s’adresse à ceux qui viennent de discuter des combustibles fossiles et de la dépendance à leur égard. Je me demande si vous avez entendu parler — ou pensé — à l’engrais Soileos, qui est censé résoudre les problèmes d’apport de micronutriments d’aujourd’hui, tout en améliorant les terres de demain. Ne me citez pas, mais je crois qu’il a également été suggéré qu’il pourrait remplacer l’engrais azoté.
M. Rourke : Si votre question s’adresse à moi, j’aimerais revenir un peu en arrière. M. Boxall a certainement raison; nous ne pouvons pas nous débarrasser de l’engrais azoté demain. Nous avons besoin d’engrais azotés dans un avenir prévisible. Toutefois, les choses ne cessent d’évoluer, comme il l’a constaté dans sa propre exploitation. Autrefois, la meilleure pratique de gestion était la mise en jachère l’été, et aujourd’hui, nous désapprouvons cette pratique.
Je pense que des investissements sont nécessaires pour se débarrasser des engrais à base de combustibles fossiles. Je ne pense pas que nous devrions avoir des tracteurs électriques, mais nous pouvons utiliser du biodiésel et du diésel synthétique, fabriqués à partir de notre propre canola, pour alimenter nos tracteurs. Je ne pense pas que cela soit hors de question, et cela correspondrait à ce que les Nations unies estiment nécessaire.
En ce qui concerne l’engrais Soileos, j’ai essayé de nombreux produits à base de micronutriments au fil des ans, et je n’y ai pas trouvé beaucoup d’avantages. Je ne suis pas un expert en ce qui concerne les effets de ce produit, mais je suis généralement prudent.
Le sénateur Klyne : Je vous remercie.
M. Boxall : Je pense qu’il existe de nombreux produits. Je ne le connais pas non plus. J’ai adhéré à la Gérance des nutriments 4B, et j’applique donc le produit au bon endroit, au bon moment et à la bonne dose. Je pense que cela donnera d’aussi bons résultats que n’importe quel autre remède de charlatan qui circule.
Les agriculteurs se font parfois piéger par tous ces micronutriments et autres produits. Si vous échantillonnez votre terre, que vous comprenez ce que vous avez, que vous adoptez les principes 4B et que vous faites ce qu’il y a de mieux, je pense que nous pouvons obtenir beaucoup de résultats sur cette base.
Je répète que c’est la production qui compte. On s’intéresse à nous et on continuera de s’intéresser à nous.
Le président : Mes questions s’adressent à M. Ayre et M. Boxall.
Qu’est-ce qui se fait au sein de vos organisations provinciales? Je sais que vous échangez de l’information et que vous organisez des réunions et des ateliers pour aider les agriculteurs à acquérir de nouvelles compétences en matière de rendement, de rétention d’eau et de santé des sols, mais que faut-il faire d’autre, au niveau tant provincial que fédéral, pour améliorer le transfert des connaissances? Avez-vous des recommandations à formuler sur ce qu’il faudrait faire de plus?
M. Boxall : Ce qui s’est passé dans la communauté agricole — pas seulement au Canada et dans mon quartier, mais aussi dans le monde entier —, c’est l’utilisation des médias sociaux. J’ai essayé des techniques que j’ai vues dans d’autres pays parce que je pense qu’elles présentent un avantage dans mon exploitation. De nos jours, le transfert de connaissances ne devrait jamais être un problème. Nous disposons de tant de plateformes où nous pouvons parler de ce qui fonctionne et de ce qui ne fonctionne pas. En fin de compte, certains éléments demeurent régionaux. Nous avons des fermes expérimentales qui peuvent mener des recherches, organiser des séances sur le terrain et publier des articles, et elles ont la possibilité d’échanger leurs connaissances de cette manière. Actuellement, avec toutes les plateformes dont nous disposons, la communication et le transfert de connaissances ne devraient jamais être un problème. C’est mon avis sur la question.
M. Ayre : Pour faire écho à ce que vient de dire M. Boxall, j’ai parlé du financement du Partenariat canadien pour une agriculture durable qui a été annoncé récemment. J’ai appris l’existence de ce programme grâce à notre organisation qui a rediffusé le gazouillis du gouvernement provincial. Comme le comité le sait bien, le transfert de connaissances et la communication sont assurément un problème pour tous les ordres de gouvernement. Comme l’a dit M. Boxall, il s’agit de s’assurer d’utiliser un large éventail de médias et de programmes — médias sociaux, recherche locale à la ferme, universités ou collèges communautaires — et d’assurer un large accès à l’information.
Le président : Merci beaucoup, messieurs Boxall, Ayre, Pryce et Rourke d’avoir fait preuve de passion et d’optimisme ce matin. Je tiens à vous remercier de votre participation aujourd’hui à notre étude. Cela nous aidera à rédiger notre rapport final, qui, nous l’espérons, trouvera un écho dans tout le Canada.
J’aimerais également remercier les membres du comité de leur participation active et leurs questions réfléchies.
Je voudrais prendre un moment, comme je le fais toujours, pour remercier les personnes qui nous aident dans notre travail : les interprètes, l’équipe des Débats qui s’occupe de la transcription, le préposé à la salle des comités, le technicien des services multimédias, l’équipe de radiodiffusion, le Centre d’enregistrement, la DSI et notre page.
Chers collègues, s’il n’y a pas d’autres points à l’ordre du jour aujourd’hui, je vais lever la séance sur ces mots : « Que le 4 mai soit avec vous ».
(La séance est levée.)