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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’AGRICULTURE ET DES FORÊTS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 19 octobre 2023

Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre; et, à huis clos, pour étudier un projet d’ordre du jour (affaires futures).

Le sénateur Robert Black (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Bonjour à tous, et merci de votre présence. J’aimerais tout d’abord souhaiter la bienvenue aux membres du comité et à toutes les personnes qui visionnent la séance sur Internet.

Je m’appelle Robert Black, sénateur de l’Ontario, et je préside ce comité. Je demanderai maintenant à mes collègues de se présenter, en commençant par la vice-présidente.

La sénatrice Simons : Paula Simons, de la province de l’Alberta, territoire du Traité no 6.

Le sénateur Cotter : Brent Cotter, sénateur de la Saskatchewan.

[Français]

Le sénateur Cormier : Sénateur René Cormier, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

Le sénateur Woo : Bonjour. Yuen Pau Woo, de la Colombie-Britannique.

[Français]

La sénatrice Saint-Germain : Bonjour, Raymonde Saint-Germain, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Burey : Sénatrice Sharon Burey, de l’Ontario.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Julie Miville-Dechêne, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Cardozo : Andrew Cardozo, de l’Ontario.

Le sénateur MacDonald : Michael MacDonald, gentleman-farmer de la Nouvelle-Écosse.

Le sénateur Plett : Don Plett, du Manitoba.

Le sénateur Oh : Victor Oh, de l’Ontario.

Le président : Merci, et bienvenue chers collègues.

Nous nous réunissons aujourd’hui pour entreprendre l’étude article par article du projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre.

J’aimerais tout d’abord faire quelques rappels.

Si, à un quelconque moment, vous ne savez plus trop où nous en sommes dans la procédure, n’hésitez pas à demander des éclaircissements. Je veux m’assurer que tout le monde est toujours sur la même longueur d’onde quant au déroulement du processus.

Pour ce qui est des modalités de procédure, lorsqu’il est proposé d’adopter plus d’un amendement à un article, les amendements doivent être proposés dans l’ordre des lignes de l’article. Si un sénateur s’oppose à l’ensemble d’un article, il ne doit pas alors proposer une motion pour supprimer l’intégralité de l’article, mais plutôt voter contre l’article tel qu’il figure dans le projet de loi.

Certains des amendements proposés peuvent avoir des effets corrélatifs sur d’autres parties du projet de loi. Si un sénateur propose un amendement, il est donc utile de signaler au comité les autres articles du projet de loi qui pourraient être touchés par l’amendement, à défaut de quoi les membres du comité pourraient avoir beaucoup de difficulté à prendre des décisions cohérentes.

Puisqu’il n’est pas nécessaire de donner un préavis pour proposer des amendements, les amendements ne peuvent donc avoir fait l’objet d’une analyse préliminaire visant à déterminer quels amendements pourraient avoir des conséquences sur d’autres amendements, et lesquels pourraient être contradictoires.

Si vous avez des questions sur la procédure ou sur l’acceptabilité d’une quelconque intervention, vous pouvez invoquer le Règlement. En tant que président, j’écouterai les arguments, je déciderai si la question ou l’appel au Règlement a été suffisamment discuté et je rendrai une décision. Le comité est l’ultime maître de ses travaux, dans les limites fixées par le Sénat, et le comité au complet peut faire appel d’une décision de la présidence en demandant si la décision doit être maintenue.

Je tiens à vous rappeler qu’en cas d’incertitude au sujet des résultats d’un vote oral ou d’un vote à main levée, la solution la plus efficace est de demander un vote par appel nominal, dont les résultats sont évidemment sans équivoque.

Enfin, je vous rappelle qu’un vote à égalité de voix annule la motion sur laquelle il porte.

Avant de poursuivre, avez-vous des questions sur l’un ou l’autre des points que je viens de soulever? Parfait, nous allons commencer.

Chers collègues, est-il convenu de procéder à l’étude article par article du projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre?

Des voix : D’accord.

Le président : Êtes-vous d’accord de suspendre l’adoption du titre?

Des voix : D’accord.

Le président : L’article 1 est-il adopté?

Monsieur le sénateur Dalphond, vous pouvez présenter votre amendement.

Le sénateur Dalphond : Je propose un amendement à l’article 1, page 1. Je vais en lire le libellé.

[Français]

Que le projet de loi C-234 soit modifié à l’article 1 :

a) à la page 1, par substitution, aux lignes 4 à 17, de ce qui suit :

« 1 (1) L’alinéa c) de la définition de machinerie agricole admissible, à l’article 3 de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, est »;

b) à la page 2, par suppression des lignes 1 à 8.

[Traduction]

Cet amendement limitera la portée du projet de loi à l’équipement de séchage du grain, en excluant essentiellement le chauffage des étables. Il limitera au séchage du grain les exemptions visées par ce projet de loi et exclura le chauffage et le refroidissement des étables.

On a clairement expliqué au comité qu’il est possible de recourir à d’autres solutions et de procéder plus efficacement pour le chauffage des étables, et ce, davantage que pour le séchage du grain, quoiqu’à cet égard d’importants gains d’efficacité soient aussi possibles. Le député Ben Lobb, parrain du projet de loi, a déclaré devant ce comité qu’il existe des séchoirs à grain plus efficaces. Selon le professeur Chandra Singh, du Lethbridge College, le recours à des équipements plus efficaces permettrait d’obtenir de réduire d’environ 30 % les émissions dans le séchage du grain.

Mais passons au chauffage; les choses sont encore plus claires à ce sujet. Pour le chauffage ou le refroidissement des étables, plusieurs options de rechange ou gains d’efficacité sont possibles, de divers moyens : meilleure isolation, chauffage par le sol, pompes à chaleur géothermiques, pompes à chaleur à air, ventilateurs à haut rendement énergétique, chauffage par la biomasse, éclairage par diodes électroluminescentes, éclairage plus naturel, peintures de couleur claire qui réfléchissent la chaleur, etc. Certaines de ces solutions, déjà adoptées dans des maisons et autres bâtiments au Canada, nous sont familières. De nombreux individus et entreprises investissent dans ces solutions pour réduire les émissions, en se prévalant des incitatifs prévus par la politique de tarification du carbone.

Je citerai le parrain du projet de loi, le député Lobb :

Le chauffage des étables évolue au même rythme que le chauffage des résidences, des bâtiments commerciaux ou des bâtiments industriels — parce que c’est financièrement intéressant.

Cet amendement préservera l’incitation financière à réduire les émissions produites par l’élevage du bétail en étable en autorisant l’investissement dans des solutions autres ou plus efficaces de chauffage ou de refroidissement des étables — une option dès maintenant disponible. Certains partisans du projet de loi nous ont dit qu’il répondait à un manque d’options de rechange viables, ou peut-être à un manque de solutions efficaces. Pour ce qui est du chauffage des bâtiments d’élevage, cette prémisse est fausse. Le Parlement ne devrait pas légiférer sur la base d’une fausse prémisse.

Enfin, dans une perspective plus large, cet amendement découragera les autres secteurs de tenter d’exempter — peut-être au moyen d’autres projets de loi d’initiative parlementaire — leurs activités économiques nécessitant le chauffage de bâtiments, comme les magasins de détail ou l’infrastructure de la chaîne d’approvisionnement. Comme l’a dit la professeure Kathryn Harrison, un des témoins, le Canada doit éviter d’ouvrir des brèches dans son actuel plan climatique, comme l’a fait la Scandinavie.

Pour encourager la réduction de la pollution, et considérant la crise climatique actuelle, il faut imposer un coût aux émissions. Avec cet amendement, nous pouvons au moins tracer une ligne. Si vous êtes prêt à investir pour réduire les émissions émises par le chauffage ou le refroidissement des étables, la loi devrait l’encourager tout en accordant un allégement par le remboursement de taxe de 2022 prévu au projet de loi C-8. Je vous remercie.

Le président : Merci. L’honorable sénateur Dalphond propose :

Que le projet de loi C-234 soit modifié à l’article 1 :

a) à la page 1, par substitution, aux lignes 4 à 17, de ce qui suit :

« 1 (1) L’alinéa c) de la définition de machinerie agricole admissible, à l’article 3 de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre, est »;

b) à la page 2, par suppression des lignes 1 à 8.

La sénatrice Burey : Je vous remercie de votre participation à ce comité, monsieur le sénateur Dalphond. Je respecte vraiment vos commentaires. Étant membre du Sénat de fraîche date, je suis encore en période d’apprentissage. La première chose qu’on m’a remise est le guide intitulé La procédure du Sénat en pratique, que j’étudie assidûment.

Je voudrais si possible invoquer le Règlement, concernant la recevabilité de l’amendement proposé par mon estimé collègue.

À la page 141 du guide, on peut lire ce qui suit :

Un amendement doit respecter le principe et la portée du projet de loi en plus d’être pertinent. Il existe un principe fondamental : « le vote de la Chambre en faveur du principe du projet de loi, lors de son adoption en deuxième lecture, lie le comité. Il ne doit pas, par conséquent, proposer des amendements qui portent atteinte à ce principe ».

On lit plus loin que l’amendement ne doit pas aller à l’encontre des buts originaux du projet de loi.

Mes arguments porteront sur la portée du projet de loi, sur la décision prise en deuxième lecture et sur la question de savoir si l’amendement va ou non à l’encontre des buts originaux.

J’ai cité le sommaire du projet de loi concernant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Il dit que ce projet de loi modifie la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre afin d’élargir la définition de « machinerie agricole admissible » et d’inclure le gaz naturel commercialisable et le propane à l’exemption qui s’applique au combustible agricole admissible. Cela signifie que la machinerie agricole admissible englobe maintenant les appareils servant au séchage du grain ainsi qu’au chauffage et au refroidissement des bâtiments d’élevage, et que les combustibles agricoles admissibles comprennent désormais le gaz naturel commercialisable et le propane.

En deuxième lecture, l’objectif du parrain du projet de loi était de créer de nouvelles exemptions pour les pratiques agricoles essentielles, comme le séchage du grain ou le chauffage et le refroidissement des bâtiments d’élevage et des serres. C’était également l’intention visée par le parrain à l’autre chambre. Cela répond à la question de la portée et de ce qui a été décidé en deuxième lecture.

J’en viens maintenant au troisième point, soit amender un projet de loi d’une manière qui porte atteinte à ses principes et à ses objectifs initiaux. À mon avis, ce serait aller à l’encontre de l’objectif initial du projet de loi que d’exclure du projet de loi un bien employé pour chauffer ou refroidir un bâtiment ou une structure similaire servant à élever ou à loger du bétail ou pour cultiver des récoltes — ce qui est selon moi la conséquence concrète de l’amendement du sénateur Dalphond.

Monsieur le président et chers collègues, j’aimerais connaître votre avis sur la recevabilité de cet amendement.

Le président : Nous allons discuter de ce rappel au Règlement.

Le sénateur Woo : Merci, madame la sénatrice, d’avoir soulevé ce point et d’étudier si diligemment le guide La procédure du Sénat en pratique.

Je ne crois pas que cet amendement aille à l’encontre de l’objectif du projet de loi. L’idée même de prévoir des exemptions soulève la question de savoir quels secteurs devraient bénéficier d’exemptions, et il est raisonnable qu’un comité sénatorial se penche sur l’à-propos d’inclure ou d’exclure les secteurs et les processus décrits. Il est concevable que le comité ait pu envisager d’étendre les exemptions à d’autres secteurs. Nous ne l’avons pas fait. En tout cas, je n’ai entendu aucune suggestion à cet effet. Faire l’inverse, c’est-à-dire retirer un des secteurs jugés non pertinents par le sénateur Dalphond, me semble tout à fait conforme à l’orientation générale du projet de loi.

Cet amendement, comme l’a expliqué le sénateur Dalphond, présente une logique. Il n’est pas proposé de manière capricieuse. Il n’est pas présenté dans la simple intention malveillante de porter atteinte au projet de loi. Si vous écoutez attentivement l’explication du sénateur Dalphond, vous comprendrez bien qu’il existe, dans le cas du chauffage des étables, des options de rechange au gaz naturel et au propane, en raison des similarités avec le chauffage des bâtiments en général.

De par notre expérience de vie et de travail dans des maisons et autres bâtiments, nous savons bien que les technologies permettant d’améliorer l’efficacité du chauffage ont considérablement évolué, et que beaucoup d’entre nous, y compris moi-même, sommes influencés par les incitatifs qui encouragent l’installation d’équipements plus efficaces. C’est la même chose, à bien des égards, pour les bâtiments d’élevage. La logique se défend. J’ignore si vous serez d’accord, mais la logique est défendable et c’est pourquoi, monsieur le président, je propose en tout respect de rejeter ce rappel au Règlement.

Le président : Y a-t-il d’autres interventions sur le rappel au Règlement?

Le sénateur Plett : La sénatrice Burey a indiqué qu’elle était en quelque sorte un nouveau membre du comité. Ma nomination à ce comité en particulier est un peu plus récente, mais j’ai passé les neuf ou dix premières années de ma vie au Sénat à siéger au comité de l’agriculture; je l’ai vraiment apprécié, et je suis heureux d’être ici aujourd’hui.

Le parrain du projet de loi au Sénat est absent à la réunion d’aujourd’hui pour d’autres travaux du Sénat, ce qui explique ma présence en tant que membre d’office.

Monsieur le président, je pourrais faire quelques remarques liminaires. Elles s’appliquent à la fois à cet amendement et à d’autres, après quoi j’aimerais formuler quelques commentaires sur cet amendement en particulier, en appui au rappel au Règlement de la sénatrice Burey.

Le président : Vous allez donc intervenir au sujet de son rappel au Règlement?

Le sénateur Plett : Mes observations vont porter sur son recours au Règlement, mais elles valent pour cet amendement et pour tous les autres, peu importe que votre décision soit favorable ou non au recours au Règlement de la sénatrice Burey.

Amender le projet de loi, chers collègues, causerait du tort aux agriculteurs en retardant son adoption, et ils nous ont dit à quel point cette législation est essentielle pour le secteur agricole. J’ai eu des discussions avec de multiples organismes agricoles à propos de ces amendements, et ils sont très indignés qu’une poignée de sénateurs se livrent à ces petits jeux — ce sont leurs propres mots — alors que c’est de leur gagne-pain qu’il est question.

Les représentants de l’organisme Grain Farmers of Ontario m’ont dit que la principale raison de ne pas appuyer cet amendement et aucun autre amendement, c’est que les agriculteurs vont encore devoir attendre pour obtenir un congé de taxe sur le carbone parce que le projet de loi devra être renvoyé à la Chambre des communes.

Nous travaillons sur cette mesure depuis des années. C’est maintenant que ce congé est nécessaire, pendant que les agriculteurs récoltent le grain et le font sécher. Si le Sénat adopte le projet de loi cet automne, les agriculteurs pourront bénéficier de ce congé de taxe pour les récoltes de cette année, et ce serait ce qui pourrait leur arriver de mieux.

Je comprendrais qu’on appuie ces amendements si des raisons valables les justifiaient, mais ce n’est pas le cas. C’est évident pour quiconque a suivi attentivement les témoignages devant le comité et ailleurs. En fait, ces amendements sont frivoles et vexatoires.

Le projet de loi a été examiné sous toutes ses coutures par le Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes. Les amendements proposés n’y apportent aucune valeur ajoutée, et nous devrions respecter la décision de la Chambre. Le projet de loi a reçu l’appui unanime du Parti vert, du Bloc québécois, du Nouveau Parti démocratique et du Parti conservateur, de même que de quelques députés libéraux, dont le président du Comité de l’agriculture.

Le président : Désolé, sénateur Plett.

Le sénateur Woo : J’aimerais intervenir ensuite.

Le sénateur Plett : Tous ces partis sont favorables à une tarification de la pollution, mais ils ont estimé que le projet de loi était la meilleure voie à suivre pour les agriculteurs, la sécurité alimentaire et l’environnement.

Pour ce qui est de cet amendement précis, je fais écho à l’observation de la sénatrice Burey comme quoi il est contraire à l’esprit du projet de loi et doit par conséquent être jugé irrecevable.

Je vais lire des extraits de La procédure et les usages de la Chambre des communes :

Pour être recevables, les amendements doivent être conformes aux règles et usages de la Chambre établis pour assurer l’intégrité du projet de loi. Il incombe au président du comité de décider de la recevabilité des amendements; celui-ci est conseillé à cette fin par le greffier législatif.

Voici les principales règles régissant la recevabilité des amendements :

Principe du projet de loi : Le principe du projet de loi correspond à l’objet ou à la fin qu’il vise à réaliser. Le principe du projet de loi est établi lors de son adoption à l’étape de la deuxième lecture. Tout amendement qui contredit le principe du projet de loi est irrecevable.

Portée du projet de loi : La portée du projet de loi correspond au plan législatif ou aux mécanismes par lesquels les principes du projet de loi seront réalisés; la portée est établie lors de l’adoption du projet de loi à l’étape de la deuxième lecture. Tout amendement qui dépasse la portée du projet de loi est irrecevable.

Lorsqu’un projet de loi est renvoyé en comité avant la deuxième lecture, les amendements peuvent proposer des modifications au principe et à la portée du projet de loi.

Monsieur le président, l’amendement proposé porte atteinte au principe du projet de loi et il dépasse clairement sa portée. Si vous me le permettez, j’aimerais lire, aux fins du compte rendu, une lettre rédigée par le président et le vice-président du Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes à ce sujet. Il va de soi que la lettre vous a été adressée, sénateur Black, mais je suis certain qu’elle a été envoyée en copie conforme à l’ensemble des sénateurs :

Nous vous écrivons aujourd’hui à propos de l’étude par votre comité du projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Ce projet de loi est de la plus haute importance pour les agriculteurs partout au Canada, et il a reçu l’appui de députés de tous les partis à la Chambre des communes. Le comité de l’agriculture de la Chambre des communes a procédé à un examen rigoureux du projet de loi, et il a amendé la disposition de temporisation en proposant une exemption de huit ans ainsi que l’inclusion des bâtiments essentiels à la production agricole dans l’esprit du projet de loi.

Nous comprenons tous les deux qu’il incombe au Sénat d’examiner minutieusement les projets de loi que lui renvoie la Chambre, mais nous pensons en revanche que les sénateurs doivent faire preuve de retenue et s’abstenir de dénaturer l’esprit et l’objet d’une mesure émanant de la Chambre élue démocratiquement. L’amendement que propose le sénateur Dalphond et portant suppression des dispositions liées au chauffage des bâtiments utilisés pour loger des animaux ou cultiver des végétaux irait totalement à l’encontre de l’intention du projet de loi et de la volonté exprimée par la grande majorité des députés. Nous estimons que cette initiative vise à corriger une omission dans le régime initial de tarification de la pollution, dans lequel le propane et le gaz naturel ne figurent pas sur la liste des exemptions.

Nous le répétons, le temps presse. Ce projet de loi est important pour les agriculteurs. Plus l’hiver approche, plus le projet de loi aura d’incidences sur leur capacité de payer les coûts et les rentrées de fonds. Tout amendement au projet de loi entraînera un report de l’adoption. Nous sommes bien conscients du rôle du Sénat, mais nous demandons aux membres de votre comité de mettre en balance leurs propositions d’amendements et l’importance de faire progresser ce processus législatif. Votre travail est important et les agriculteurs comptent sur vous. Nous vous demandons, distingués collègues parlementaires, de faire en sorte que le projet de loi C-234 avance le plus rapidement possible.

La lettre est signée par MM. Kody Blois et John Barlow, respectivement président et vice-président du Comité permanent de l’agriculture de la Chambre des communes.

En tout respect, je donne mon appui à la motion de la sénatrice Burey selon laquelle l’amendement dépasse la portée du projet de loi et est par conséquent irrecevable.

Le président : Merci, sénateur Plett.

Le sénateur Woo : Je trouve extraordinaire que le sénateur Plett nous exhorte à donner notre blanc-seing au texte adopté par la Chambre des communes et qu’il nous lise, pour les fins du compte rendu, une lettre de deux coprésidents, ou d’un président et d’un vice-président d’un comité de la Chambre, qui demandent aux sénateurs de se plier à leur volonté, ni plus ni moins.

La seule partie de la lettre qui mérite notre considération est celle où il nous est demandé d’envisager les amendements en fonction de leur bien-fondé et d’établir s’ils résistent à un second examen objectif visant à déterminer si l’intérêt du pays est servi. Nous ne pouvons pas nous laisser influencer par les déclarations comme quoi ils sont des élus, contrairement à nous. Nous ne pouvons pas non plus nous laisser influencer par le fait que la Chambre a rendu une décision et qu’elle s’attend à ce que nous nous y conformions.

Pour ce qui a trait à la portée du projet de loi, il vise l’exemption de volets précis des activités agricoles. Une des principales activités, le séchage des récoltes, n’est pas visée par l’amendement proposé par le sénateur Dalphond. Exclure certains domaines du champ d’application du projet de loi ne change en rien son intention. À maintes reprises, les sénateurs ont appuyé l’exclusion de certains éléments du champ d’application de projets de loi que lui avait renvoyés la Chambre. J’encourage la greffière, qui est peut-être en train de faire des recherches sur la légitimité du recours au Règlement, de demander à ses collègues de se pencher sur les nombreux exemples de projets de loi pour lesquels les sénateurs ont demandé la suppression de certaines parties qui avait pour effet de restreindre le champ d’application général. C’est exactement ce qui est demandé aujourd’hui, et c’est pourquoi ce recours au Règlement n’est pas recevable.

Le président : Merci.

Le sénateur Dalphond : Je félicite la sénatrice Burey, qui nous propose une nouvelle manière d’aborder les projets de loi au Sénat, le rôle des comités et la nécessité de ces débats, ou les raisons de les éviter. C’est intéressant.

Je vais revenir à certains points soulevés par le sénateur Plett. Je me rappelle que durant les deux législatures précédentes, la Chambre des communes a adopté deux — pas une, mais deux — motions dans lesquelles elle avait des demandes pressantes envers le Sénat. Dans la première, elle nous implorait d’adopter le projet de loi de Romeo Saganash sur la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et, dans la seconde motion, elle nous implorait d’adopter celui de Rona Ambrose sur la formation des juges. Les députés nous informaient qu’ils avaient adopté ces projets de loi à l’unanimité et ils nous imploraient d’en faire de même. Le sénateur Plett était l’un de ceux qui avaient été très indignés. À ses dires, ces demandes menaçaient l’indépendance du Sénat.

Nous pourrions en dire autant de la lettre envoyée hier, et je suis tout à fait d’accord avec sa déclaration à propos de l’indépendance du Sénat. D’ailleurs, je suis certain qu’il continue de penser de la même façon, et je pense comme lui.

Concernant la portée des amendements, la décision des présidents va toujours dans le même sens. Vous pouvez vérifier dans les textes. Il existe une présomption selon laquelle les amendements sont recevables. C’est la règle. Quelle est la portée d’un amendement? Je vous propose de revenir aux discussions que nous avons eues au Sénat ces dernières années, et notamment celles qui ont porté sur le projet de loi C-21 sur les armes à feu et les amendements adoptés en comité. Ce que le sénateur Plett nous dit ce matin est de la musique à mes oreilles. J’imagine que son discours s’appliquera également quand nous discuterons du nouveau projet de loi C-21 et des amendements qui pourront y être apportés. J’espère qu’il continuera de défendre les mêmes principes.

Je peux aussi vous renvoyer au projet de loi C-48 sur l’interdiction des pétroliers. Les amendements proposés par différents comités, y compris ceux qui ont obtenu l’appui des conservateurs, visaient la mise en place d’un corridor. La sénatrice Miville-Dechêne s’en souvient certainement. Il a été proposé de mettre en place un corridor sur lequel pourraient circuler les pétroliers plutôt que de les interdire. Les conservateurs ont jugé que c’était tout à fait acceptable. Je vous donne aussi l’exemple récent de la Loi sur la radiodiffusion.

Ce matin, je suis très franchement impressionné par l’aisance avec laquelle ils nous sortent des arguments qui vont à contresens de leur comportement précédent. Et il est notoire que pour dégager un principe, il faut observer les comportements, et que les précédents établissent la règle.

Monsieur le président, ce recours au Règlement constitue une tentative très habile de faire dévier le débat, mais il n’est pas recevable. Merci beaucoup.

Le président : Merci.

Le sénateur MacDonald : Je conviens avec le sénateur Woo que nous ne pouvons pas nous laisser intimider et nous laisser influencer, pour reprendre ses mots, par les membres de la Chambre. J’entends certains des arguments avancés par le sénateur Dalphond, mais j’ai l’impression que nous oublions tous le point de vue des agriculteurs. Ce sont eux qui vont être pris dans un étau. Au lieu de nous disputer à propos de nos déclarations respectives sur notre indépendance, nous devrions penser aux agriculteurs qui vont payer la taxe cet hiver, qui vont lutter pour préserver leur exploitation et leur famille. C’est sur cette réalité que nous devrions nous concentrer.

Le sénateur Plett : Je serai très bref. Tout d’abord, ce n’est pas moi qui ai invoqué le Règlement, mais le sénateur Dalphond prétend que j’essaie habilement, avec la sénatrice Burey… Je lui ai donné mon appui, c’est tout.

Par ailleurs, je sais que les sénateurs Woo et Dalphond adorent ergoter et ils ne ratent pas une occasion de me critiquer. Mon intention n’était pas de les critiquer ou de critiquer qui que ce soit dans le comité. Je pense d’ailleurs qu’ils devraient arrêter leurs enfantillages et leurs tentatives de me prendre en défaut. Ils devraient plutôt essayer de chercher ce qui ne va pas dans le projet de loi. Si c’est ce qu’ils veulent faire, fort bien.

Mais, monsieur le président, restons polis. Il y a ici quelques messieurs qui ont donné leur appui à ce gouvernement 96 % du temps. Si vous cherchez quelqu’un qui se laisse influencer par un gouvernement, cherchez du côté de ces deux messieurs qui ont maintenant le culot de dire qu’il y a une incohérence entre ce que j’affirme et ce que je crois. Je suis très cohérent. Je suis du côté de tous les agriculteurs du pays. J’ai grandi dans une communauté agricole. Je sais ce que les agriculteurs vivent. Ce que j’observe maintenant, ce sont des tentatives frivoles de bloquer le projet de loi pour le compte de quiconque leur a ordonné ou leur a donné la directive de le faire. Nous savons tous que c’est ce qui se passe.

Si l’intention des sénateurs Woo et Dalphond est de faire de l’obstruction et de tergiverser pour que le processus échoue, fort bien. Faisons cela. Je vais m’y mettre aussi. Mais s’ils veulent se comporter en adultes polis et contribuer à un débat de qualité sur le bien-fondé du projet de loi plutôt que d’ergoter sur leur sympathie ou leur antipathie pour Don Plett, je suis prêt à en faire autant.

Il faut avancer, monsieur le président. Je crois que vous avez un devoir. Quelqu’un a soutenu qu’une proposition était irrecevable. Cela ne vient pas de moi, mais d’une collègue, et je lui ai tout simplement donné mon appui.

Le président : Y a-t-il d’autres interventions?

Le sénateur Woo : Monsieur le président, je voudrais seulement revenir sur les attaques personnelles du sénateur Plett à l’endroit du sénateur Dalphond et à mon endroit relativement à notre soi-disant infantilisme et au fait que nous devons nous comporter en adultes. Ce genre de propos n’ont pas leur place dans les délibérations de ce comité et, en fait, ils ne devraient jamais être permis dans l’enceinte du Sénat. Je vous demande de faire un rappel à l’ordre.

Concernant ce que le sénateur MacDonald a dit quant à la nécessité d’écouter les agriculteurs, je suis d’accord. Je suis d’accord que cette mesure concerne les agriculteurs et que nous devons mener notre réflexion en pensant à ce qui sera le mieux pour le secteur agricole, l’économie canadienne et l’environnement. Cependant, cela n’a rien à voir avec le recours au Règlement, et je suis convaincu, monsieur le président, que vous le comprenez très bien.

Le président : Merci. Est-ce que quelqu’un d’autre souhaite intervenir?

Le sénateur Dalphond : Pour conclure le débat sur le recours au Règlement, je vous renvoie, monsieur le président, au sommaire du projet de loi tel qu’il a été présenté à la Chambre des communes :

Le texte modifie la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre afin d’élargir la définition de machinerie agricole admissible et d’inclure le gaz naturel commercialisable et le propane à l’exemption qui s’applique au combustible agricole admissible.

L’amendement que j’ai proposé ne change rien à cela. Il vise à limiter la portée des amendements, mais il ne change rien au fait que le projet de loi vise à modifier la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Il ne contredit aucunement cette intention.

Le président : Merci. Quelqu’un souhaite ajouter quelque chose?

Le sénateur Oh : Monsieur le président, distingués collègues, je me suis promené un peu partout en Ontario, mais également ailleurs au pays, et j’ai rencontré de nombreux agriculteurs. Ce qu’ils m’ont dit, c’est qu’il est très important d’adopter ce projet de loi avant l’hiver. Ils ont besoin de ce projet de loi. Cette mesure ne concerne pas seulement la pollution et le changement climatique, mais également l’inflation et la situation critique de notre économie.

J’espère que le comité va faire en sorte que le projet de loi soit adopté le plus rapidement possible. Merci.

Le président : Merci. Y a-t-il d’autres interventions? Chers collègues, je vais prendre vos observations en délibéré. Êtes-vous d’accord pour suspendre la séance quelques minutes afin que je puisse examiner le recours au Règlement avec la greffière? Est-ce que cela vous convient?

Des voix : Oui.

Le président : Êtes-vous d’accord?

Des voix : D’accord.

(La séance est suspendue.)

(La séance reprend.)

Le président : Distingués collègues, merci d’être ici, et merci d’être restés.

Honorables sénateurs, j’ai maintenant l’intention de rendre ma décision sur le recours au Règlement de la sénatrice Burey concernant l’amendement proposé par le sénateur Dalphond. Je remercie les sénateurs qui ont pris part au débat sur ce recours au Règlement. Diverses décisions antérieures sur l’importance du principe du projet de loi en deuxième lecture ont été mentionnées au cours de ce débat. Je ne vais donc pas y faire de nouveau référence.

Si on applique les idées liées au principe au recours au Règlement, il convient de rappeler que l’objectif principal du projet de loi C-234 est de modifier la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre afin d’élargir la définition de « machinerie agricole admissible » — pour y inclure celle qui sert au séchage du grain ou au chauffage et au refroidissement d’un bâtiment utilisé pour l’élevage — et d’inclure le « gaz naturel commercialisable » comme « combustible agricole admissible ». À mon avis, l’exclusion du projet de loi de structures comme les étables et les serres irait à son encontre.

Les structures représentent des éléments essentiels du projet de loi C-234. L’amendement du sénateur Dalphond va directement à l’encontre du principe du projet de loi. Considérant que l’amendement contredit le principe fondamental du projet de loi et ne respecte pas la décision rendue par le Sénat à l’étape de la deuxième lecture, j’estime qu’il est irrecevable. Bien que les débats soient permis et bienvenus au sein du comité, je considère l’amendement irrecevable et je tranche en faveur du recours au Règlement de la sénatrice Burey.

Le sénateur Dalphond : Comme vous le savez peut-être, un amendement semblable a été proposé à la Chambre des communes, dans le cadre de l’étude en comité. Il a été rejeté par six voix contre cinq, mais il a fait l’objet d’un débat au cours duquel jamais l’idée qu’il aille à l’encontre du projet de loi n’a été évoquée. C’était un amendement semblable. Monsieur le président, je demande que le comité réexamine votre décision.

Le président : En gardant cela à l’esprit, et considérant qu’il n’y a pas de débat, je demande au comité de se prononcer sur la question de savoir si la décision de la présidence doit être maintenue.

Honorables sénateurs, une demande a été adressée à la présidence et je crois que nous allons la soumettre à un vote par appel nominal.

Ferda Simpson, la greffière du comité : L’honorable sénateur Black, l’honorable sénatrice Burey, l’honorable sénateur Cardozo, l’honorable sénateur Cormier, l’honorable sénateur Cotter, l’honorable sénateur Dalphond, l’honorable sénatrice LaBoucane-Benson, l’honorable sénateur MacDonald, l’honorable sénatrice Miville-Dechêne, l’honorable sénateur Oh, l’honorable sénatrice Simons, l’honorable sénatrice Saint-Germain, l’honorable sénateur Woo et l’honorable sénateur Plett.

Le président : Les sénateurs présents qui souhaitent s’abstenir de voter peuvent quitter la table maintenant.

La greffière va appeler les sénateurs par leur nom, en commençant par le président et par ordre alphabétique ensuite. Les sénateurs pourront voter de vive voix en disant « oui » s’ils sont favorables à la décision ou « non » s’ils s’y opposent, ou encore « Je m’abstiens ». La greffière annoncera ensuite le résultat du vote et le président déclarera si la décision est maintenue ou rejetée.

Voici la question : La décision de la présidence doit-elle être maintenue?

Mme Simpson : L’honorable sénateur Black?

Le sénateur Black : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Burey?

La sénatrice Burey : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cardozo?

Le sénateur Cardozo : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cotter?

Le sénateur Cotter : Je m’abstiens.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Dalphond?

Le sénateur Dalphond : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice LaBoucane-Benson?

La sénatrice LaBoucane-Benson : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur MacDonald?

Le sénateur MacDonald : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Je m’abstiens.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Saint-Germain?

La sénatrice Saint-Germain : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Woo?

Le sénateur Woo : Non.

Mme Simpson : Oui : 5; non : 7; abstentions : 2.

Le président : Merci. La décision de la présidence n’est pas maintenue. Nous allons donc ouvrir le débat sur l’amendement proposé par le sénateur Dalphond.

Le sénateur Plett : Comme vous vous en doutez certainement, je m’oppose fermement à l’amendement. Le projet de loi a été soigneusement réfléchi. Je sais que le sénateur Woo s’indignera du fait que je prends encore la parole, mais je vais néanmoins y aller de mes observations.

Le projet de loi a reçu l’appui de députés de toutes les formations politiques. Il a été adopté par 176 voix contre 146, y compris par l’ensemble des députés conservateurs, du Nouveau Parti démocratique, du Bloc québécois et du Parti vert. Il a aussi rallié trois braves libéraux qui comprennent la réalité agricole, soit Kody Blois, le président du Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire de la Chambre des communes; Heath MacDonald, le député de Malpeque, et Robert Morrissey, le député d’Egmont. Il n’existe aucune raison d’amender le projet de loi. Il doit être adopté tel quel pour diverses raisons, y compris pour celles que je vais exposer.

Comme le comité l’a abondamment entendu, il n’existe aucune solution viable pour remplacer le propane et le gaz naturel actuellement. C’est un fait qui a été répété à maintes reprises devant le comité, mais je vais vous citer Ian Boxall, le président de l’Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan :

Bien que des technologies comme l’hydrogène, l’énergie solaire, l’énergie éolienne, la biomasse et la géothermie soient prometteuses, leur application demeure limitée en raison de nos conditions environnementales uniques et de notre vaste territoire.

Distingués collègues, à la lumière des témoignages qu’a reçus le comité et des mémoires qui lui ont été soumis, j’estime premièrement que cet amendement est tout simplement frivole et que son seul effet sera de pénaliser les agriculteurs, encore une fois. Ont-ils vraiment besoin qu’une poignée de sénateurs s’acharnent ainsi sur leur sort?

Deuxièmement, la taxe sur le carbone est censée donner un signal de prix pour favoriser la transition vers des combustibles à faibles émissions de carbone. Or, à défaut de combustibles de remplacement, le signal de prix n’a pas l’effet escompté pour ce qui concerne le propane et le gaz naturel utilisés à des fins agricoles. Pour cette seule raison, l’exemption des bâtiments est aussi nécessaire que celle des séchoirs à grain.

Troisièmement, le gouvernement a reconnu que la taxe sur le carbone pour le propane et le gaz naturel utilisés à des fins agricoles devrait être remise directement aux exploitations agricoles quand il a instauré le remboursement existant.

Voici ce que le gouvernement a annoncé dans la Mise à jour économique et budgétaire de 2021 :

Conscient que de nombreux agriculteurs utilisent le gaz naturel et le propane dans le cadre de leurs activités, et conformément à l’engagement du budget de 2021, le gouvernement propose de retourner les produits issus de la redevance sur les combustibles directement aux agriculteurs des administrations assujetties à un filet de sécurité au moyen d’un crédit d’impôt remboursable, à compter de l’exercice 2021-2022 de la redevance sur les combustibles.

Toutefois, comme l’ont expliqué de nombreux témoins, le mécanisme de remboursement est trop rudimentaire. Il faut prévoir des exemptions pour les séchoirs à grain et le chauffage des bâtiments.

Quatrièmement, il ne faut pas oublier que le diésel et l’essence sont à la source de 85 % des émissions des carburants agricoles et qu’ils sont déjà exemptés de la tarification sur le carbone. Or, le propane et le gaz naturel génèrent moins d’émissions que ces deux carburants.

Le sénateur Dalphond propose d’encourager les agriculteurs à cesser d’utiliser le propane et le gaz naturel pour chauffer leurs bâtiments, et de les remplacer par de l’essence et du diésel. Une politique publique qui impose une taxe sur des carburants plus sobres en carbone et exempte ceux qui sont plus polluants n’a aucune logique.

Des programmes fédéraux, et notamment le Programme des technologies propres en agriculture — qui offre un remboursement de la taxe pour le propane — visent à alléger le fardeau des coûts du gaz naturel et du propane pour les agriculteurs. C’est bien, mais, en réalité, l’accès à ces programmes est difficile. Ils sont surchargés de demandes.

Les programmes sont bienvenus et nécessaires, mais ils bénéficient à un trop petit nombre d’agriculteurs. L’argument selon lequel l’exemption ne devrait pas s’appliquer aux bâtiments parce qu’il existe d’autres programmes d’aide pour les agriculteurs ne tient pas la route. Ces programmes sont tout simplement insuffisants.

L’autre réalité dont il faut être conscient est que refuser l’exemption des bâtiments qui est prévue au projet de loi C-234 se traduira par un désavantage concurrentiel des agriculteurs canadiens face à ceux qui ne sont pas assujettis à des taxes sur les carburants ailleurs dans le monde. Les agriculteurs vendent leur production aux prix du marché mondial. Ils ne peuvent pas refiler aux consommateurs la note pour la taxe sur le carbone liée au séchage du grain, ou au chauffage et au refroidissement de leurs bâtiments. L’exemption des bâtiments revêt la même importance pour eux que celle qui s’applique aux séchoirs à grain.

Enfin, le même amendement a été proposé par le député Ryan Turnbull à la Chambre des communes — ce qui a déjà été mentionné ici — et il a été rejeté. Ce serait une perte de temps de renvoyer à la Chambre un amendement qu’elle a déjà examiné et qui sera rejeté de nouveau. Je le répète, distingués collègues, ce serait une perte de temps, ce qui de toute évidence est l’effet recherché par les sénateurs Dalphond et Woo. Ils ont maintenant le soutien de ce gouvernement qui a toujours maintenu qu’il ne se mêlerait pas des affaires émanant des députés, mais qui maintenant vote sur un projet de loi.

Nous perdons du temps, et ce temps est coûteux pour les agriculteurs. Vous tous, distingués collègues, avez des électeurs qui sont des agriculteurs dans vos circonscriptions et vos provinces. Vous leur coûtez de l’argent.

Distingués collègues, les exemptions de la taxe sur le carbone ne sont pas un problème. Elles existent déjà. Ces exemptions sont nécessaires pour que la politique soit bien ciblée et efficace, et qu’elle n’entraîne pas de résultats indésirables. L’exemption des bâtiments est essentielle pour les raisons que j’ai exposées, et j’espère que vous allez soutenir notre secteur agricole en votant contre cet amendement.

J’ai une dernière observation. Le comité a entendu à maintes reprises qu’il n’existe pas de carburants de remplacement pour le propane et le gaz naturel. L’amélioration de l’efficience associée au propane et au gaz naturel ne fait pas partie de l’intention du projet de loi. La réduction des coûts de chauffage est déjà une très forte incitation pour les agriculteurs. Les agriculteurs feront tout ce qu’ils peuvent pour réduire les émissions puisque cela les fait économiser.

Nous avons devant nous un gouvernement qui tente de défaire un projet de loi d’initiative parlementaire. C’est choquant, et je vais assurément voter contre l’amendement, monsieur le président.

Le président : Merci. Je vous rappelle à tous que nous débattons actuellement de la proposition d’amendement.

Le sénateur Cotter : Je vais aborder la question sous un angle un peu différent de celui qu’a proposé le sénateur Plett, mais je vais arriver à la même conclusion. Mon point de vue sera le même pour tous les amendements qui pourraient être soumis à notre attention, et je ferai donc une seule intervention.

J’ai écouté tous les témoignages qui nous ont été présentés et j’ai lu tous les documents pertinents. De toute évidence, cet amendement aiderait les agriculteurs à améliorer, dans une certaine mesure, leur situation sur le plan des revenus et des coûts. Je crois que les promoteurs du projet de loi en ont expliqué l’importance. Ce n’est pas négligeable, mais ce n’est pas énorme non plus.

Parallèlement, pour ce qui concerne le changement climatique, les émissions de gaz à effet de serre et de CO2, les répercussions ne sont pas négligeables non plus, mais elles ne sont pas énormes.

Mon second point est que je préférerais que le projet de loi comporte, outre des mesures de réduction des coûts, un mécanisme incitatif pour favoriser la transition vers des carburants moins polluants. Je reconnais néanmoins que la moindre retouche au projet de loi entraînera les conséquences évoquées par le sénateur Plett, et ce n’est pas ce que je souhaite.

J’appuie la volonté du gouvernement d’écologiser notre économie et de déployer des efforts pour lutter contre le changement climatique. C’est un point de vue stratégique légitime et vaste, qui mérite d’être pris en considération.

Comme le dit le gouvernement, l’écologisation de l’économie requiert certaines mesures visant une mise en œuvre équitable. Forcément, un régime national très ambitieux d’écologisation de l’économie aura des répercussions inégales sur les secteurs de l’économie et les régions du pays. L’agriculture fait partie des secteurs les plus susceptibles de subir les contrecoups de ce fardeau inéquitable, et certains aspects de la politique gouvernementale visent à les atténuer.

De plus, et c’est lié à ce qui précède, les agriculteurs et les producteurs sont individuellement considérés par le gouvernement comme des piliers de l’avenir économique, tout comme le secteur agricole et agroalimentaire dans sa globalité. À mes yeux, le modeste correctif qui est proposé pour alléger le fardeau de la taxe sur les émissions de gaz à effet de serre est conforme à notre engagement à soutenir cette économie et les gens qui fournissent les produits. Je suis optimiste. J’aurais préféré, comme je l’ai dit, que le projet de loi comporte un volet incitatif explicite pour certains éléments de cette petite partie de l’équation, mais je pense qu’il y aurait eu des conséquences négatives et fâcheuses.

Le projet de loi propose une aide au secteur agricole, aux producteurs et à l’économie agroalimentaire dont le coût en argent serait relativement faible, mais qui contribuerait de manière remarquable à démontrer notre immense gratitude à l’égard de ce secteur essentiel. C’est aussi une main tendue, quoique timidement, vers ceux de nos concitoyens qui sont parfois exaspérés par les politiques gouvernementales. Je m’arrête ici, mais l’essentiel est que je voterai contre l’amendement proposé.

Pour ce qui concerne les autres amendements, et même si, à la différence du sénateur Plett, je pense qu’ils ont été proposés de bonne foi et dans un esprit constructif, je ne crois pas qu’il serait indiqué de les adopter dans les circonstances. Merci.

Le président : Merci, sénateur Cotter.

Le sénateur Woo : Je remercie le sénateur Cotter de nous avoir présenté une analyse nuancée du projet de loi et d’avoir fait preuve d’honnêteté envers nous tous pour ce qui concerne cet amendement et ceux qui suivront. Il a assisté à toutes nos audiences et il a entendu toute l’information qui nous a été livrée. Le sénateur Plett n’a assisté à aucune de nos audiences, ou du moins il n’était pas présent pour plusieurs d’entre elles, et il nous a donné un résumé partial des conclusions.

Le sénateur Cotter a tout à fait raison de souligner que, d’un côté, les émissions de gaz à effet de serre de ce secteur — ou plus précisément celles qui proviennent des étables et des séchoirs — sont relativement minimes dans le contexte global. Il a aussi fait remarquer une chose que le sénateur Plett a occultée, soit la part relativement modeste des coûts liés au gaz naturel dans les charges totales des exploitations agricoles. Selon les estimations que nous avons entendues de la part de témoins ou qui découlent de recherches sérieuses, c’est beaucoup moins que 1 %. Je peux également vous donner une autre information qui n’a pas été mentionnée, mais je suis certain que le sénateur Cotter est au courant : le prix du gaz naturel a connu une baisse importante depuis plus de 10 ans et il pourrait continuer de baisser. Ce que cela signifie, c’est que l’incidence de la tarification des émissions de gaz à effet de serre du gaz naturel et du propane est relativement faible pour les agriculteurs. Il ne faut pas banaliser cela, mais c’est une information qui nous a été donnée lors des témoignages et il ne faut pas oublier.

Je suis également profondément reconnaissant au sénateur Cotter d’avoir parlé d’équité et de la nécessité de veiller à ce qu’une frange de la population canadienne ne soit pas indûment pénalisée par une politique nationale comme la tarification des émissions de gaz à effet de serre alors que d’autres Canadiens sont épargnés. J’encourage le sénateur Cotter et d’autres à réfléchir à ceci : si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, il s’appliquera uniquement aux administrations assujetties à un filet de sécurité et il s’ensuivra automatiquement des inégalités pour les autres administrations visées par le régime national de tarification des émissions de gaz à effet de serre. L’inégalité des efforts demandés aux agriculteurs pour réduire les émissions sera donc perpétuée si le projet de loi est adopté.

Quant à l’argument concernant le caractère relativement modeste des répercussions de l’exemption, il peut être juste au sens absolu, mais ce serait très naïf de notre part de penser que l’adoption du projet de loi ne servira pas à renforcer les arguments politiques et la promotion des intérêts sectoriels afin d’obtenir des exemptions dans d’autres secteurs.

Nous savons déjà que le parrain du projet de loi est contre la taxe sur le carbone. Son parti est contre la taxe sur le carbone. Il est contre la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Le mot d’ordre est d’abolir la taxe. Ce serait extrêmement naïf de notre part à tous de penser que si ce projet de loi est adopté, ce mot d’ordre, cet appel et cette campagne ne seront pas repris de plus belle par d’autres secteurs qui cherchent aussi à obtenir des exemptions.

Les amendements que nous proposons et nos arguments contre certaines propositions du projet de loi visent entre autres à reconnaître le défi particulier que la réduction de leur consommation de propane et de gaz naturel pose aux agriculteurs. Le mécanisme en place pour alléger une partie de ce fardeau est le crédit d’impôt remboursable. Si j’ai l’occasion plus loin dans le débat, je vais parler de la possibilité — qui pourrait peut-être mener à une politique — pour le gouvernement d’améliorer le mécanisme de crédit d’impôt remboursable afin qu’il cible mieux les exploitations agricoles qui utilisent du propane et du gaz naturel pour le séchage des récoltes.

Une fois de plus, je remercie le sénateur Cotter de ses observations. J’ai énoncé quelques arguments en contrepoint et je nous encourage à voter sur ce premier amendement proposé par le sénateur Dalphond.

Le président : Merci, sénateur Woo.

La sénatrice Simons : Je suis profondément déchirée parce que, à titre de vice-présidente du comité, j’ai assisté à toutes les délibérations et j’ai entendu tous les témoignages.

Nous avons demandé à des spécialistes en matière de génie de l’équipement de séchage du grain s’il existe des solutions de remplacement viables. Leur réponse m’a quelque peu surprise, et je ne pense pas être la seule ici. Ils nous ont affirmé que pour le séchage du grain, il n’existe pas de solution de remplacement crédible et viable qui pourra être commercialisée à court terme. C’est selon moi un argument très convaincant en faveur d’une exemption de l’équipement de séchage du grain.

Pour ce qui concerne le chauffage des étables et des serres, la preuve est moins solide. Il existe des solutions de remplacement et, surtout pour ce qui concerne les serres, le régime fiscal prévoit déjà des compensations pour les systèmes de chauffage au gaz naturel et au propane. Je crois que j’ai été la première ici à demander à un témoin quelles seraient les conséquences d’une exemption qui s’appliquerait seulement au séchage du grain et non aux bâtiments. La logique derrière l’amendement proposé par le sénateur Dalphond est simple.

Cela dit, je reviens toujours aux témoignages que nous avons reçus de fonctionnaires à qui nous avons demandé pourquoi les exemptions avaient été définies de cette façon. Ils nous ont répondu — je n’en suis pas encore revenue — que c’était parce que c’est ce que la Colombie-Britannique a fait. La Colombie-Britannique est devenue le modèle pour le reste du pays, sans aucune considération pour le fait que son climat est passablement plus tempéré que celui des Prairies ou de certaines parties de l’Ontario.

Je sais bien que si les provinces des Prairies avaient maintenu ou créé leurs propres régimes de tarification du carbone, elles auraient pu instaurer des exemptions à leur guise. Ce qui est assez paradoxal, c’est qu’une province comme l’Alberta s’est débarrassée d’un régime étoffé de tarification du carbone et se retrouve maintenant à la merci des politiques qu’Ottawa lui imposera en la matière. Nous, les Albertains, avons décidé de ne pas nous occuper de nos propres affaires. Qui l’eût cru?

De prime abord, la logique derrière l’amendement proposé par le sénateur Dalphond est irréfutable. En revanche, je crains qu’il mette les agriculteurs qui ont des exploitations dans les régions où le climat est impitoyable dans une position très injuste puisque le modèle n’a jamais été pensé en fonction de leurs besoins.

Le président : Merci.

Le sénateur MacDonald : En réfléchissant aux propos du sénateur Woo, il m’est venu à l’esprit qu’il faut éviter de faire marche arrière sur la question du carbone. Les agriculteurs peuvent déjà se prévaloir d’exemptions pour le diésel et l’essence, une mesure instaurée par les libéraux. Comme ils ont eux-mêmes aboli cette taxe, cet argument ne tient pas debout.

Nous devons penser avant tout à l’intérêt des agriculteurs. Nous sommes en octobre et nous sommes au Canada. L’hiver approche et je ne crois vraiment pas que cet argument est assez solide puisqu’ils ont déjà accordé des exemptions du même genre.

Je suis également surpris et consterné, monsieur le président, par l’annulation de votre décision. Je suis ici depuis 14 ans et c’est la première fois que je suis témoin d’une telle chose.

Le président : Merci, sénateur MacDonald.

Le sénateur Dalphond : Je serai bref. Pour ce qui concerne la dernière remarque du sénateur MacDonald, je crois me souvenir que la Chambre a déjà annulé une décision du sénateur Housakos, et que mes propres collègues y ont contribué. Cela dit, passons à l’essence de l’amendement.

Le parrain du projet de loi, M. Lobb, est un député de l’Ontario. Il a déclaré ceci :

Dans le domaine du chauffage des étables, les progrès sont étroitement liés à ceux qui sont réalisés dans le domaine du chauffage des maisons et des bâtiments commerciaux ou industriels, parce que c’est sensé sur le plan financier.

Personne ne conteste le fait que des bâtiments sont plus efficients et qu’ils sont chauffés grâce à des technologies existantes. Nous avons entendu parler d’une ferme en Alberta qui fonctionne complètement hors du réseau. Elle n’utilise ni gaz naturel ni propane, alors nous savons qu’il existe des solutions de remplacement.

Nous savons que certains programmes mis en place par le gouvernement ne réussissent pas à répondre à la demande parce que trop d’agriculteurs demandent des subventions pour faire des choses. Nous savons qu’il est possible d’accroître l’efficience d’une ferme en favorisant une meilleure circulation d’air, en installant une pompe à chaleur et des panneaux solaires. Ces technologies sont déjà vendues sur le marché. Même le parrain du projet de loi le reconnaît.

Ce qui est proposé, c’est de donner un congé aux agriculteurs, rien de plus. C’est ce qui est proposé. Le comité s’est fait dire, pas seulement par le directeur parlementaire du budget, mais également par un représentant du domaine du séchage du grain en Ontario, que ces opérations sont confiées à des tiers dans une proportion de 60 % par des tiers. Le projet de loi n’aura donc pas vraiment d’incidence dans la plus grande province, où la quantité de grain séchée est la plus importante, parce que 60 % de ce grain est séché par des tierces parties qui ne seront pas admissibles aux exemptions, et qui nous ont dit qu’elles ne seraient plus concurrentielles face aux agriculteurs qui possèdent un séchoir à grain.

Le projet de loi est loin d’être parfait. Il a été rédigé à la hâte. L’objectif du promoteur, c’est que la taxe soit abolie. Nous savons quel parti appuie cette politique.

Il faut revenir à ce que nous avons entendu à la Chambre des communes et devant le comité. Ce que nous avons entendu, c’est qu’il existe une importante distinction entre les installations de séchage du grain — dont l’efficience peut déjà être améliorée, certes, mais pour lesquelles les technologies ne sont pas forcément prêtes — et les installations de chauffage, pour lesquelles les gains d’efficience sont beaucoup plus réalistes parce que les nouvelles technologies sont sur le marché. Si nous décidons d’accorder un congé aux agriculteurs, comme le sénateur Woo l’a évoqué, les données indiquent que ce sera moins de 1 %. Le directeur parlementaire du budget a même parlé de quelque chose comme 0,4 % pour le coût énergétique du séchage du grain par rapport aux charges totales d’exploitation. On ne parle pas d’un congé de millions de dollars, mais de 1 milliard de dollars sur 8 ans. C’est ce que cette mesure coûterait en supposant que le plein tarif s’appliquerait, soit 170 $ la tonne.

Distingués collègues, la logique et les témoignages vont dans le même sens : il existe une distinction évidente entre le chauffage des étables et le séchage des grains, ce que même le parrain du projet de loi admet. L’amendement que je propose a également été soumis à la Chambre des communes, comme l’a fait remarquer le sénateur Plett. Il a été rejeté par six voix contre cinq, ce qu’il a omis de mentionner.

C’est la réalité. Nous procédons à un second examen objectif. Nous avons l’information. Nous ne devrions pas être influencés par la politique et le programme d’un parti politique. Nous devons nous baser sur les faits, et il est évident qu’il y a une grande différence entre le séchage du grain et le chauffage des étables. Merci.

Le sénateur Plett : Permettez-moi d’abord de dire que le sénateur Dalphond a tout à fait raison de dire que je suis conservateur. Je suis fier d’être conservateur. Je suis très fier de nos politiques et de ce que le Parti conservateur du Canada a fait pour notre pays au cours des 150 dernières années, le premier premier ministre du pays ayant été un conservateur. Mais cela n’a rien à voir avec le fait d’être conservateur ou libéral. Ce projet de loi a été adopté à l’unanimité par le Bloc québécois, le NPD et le Parti vert. Comment pouvons-nous être plus éloignés que les conservateurs et les verts sur les questions environnementales?

Les seules personnes qui font de cette question une question politique sont celles qui, dans 96 % des cas, votent en faveur de ce gouvernement. Je ne sais pas pourquoi nous ne votons pas sur le bien-fondé du projet de loi, et non sur le fait que nous appuyons ou non les libéraux ou les conservateurs.

Les sénateurs Woo et Dalphond disent tous les deux que les effets de cette mesure sont négligeables, mais selon eux, les effets négligeables touchent uniquement les agriculteurs. Eh bien, qu’en est-il du projet de loi? Ce serait donc aussi négligeable dans le projet de loi, mais, pour une raison quelconque, c’est extrêmement important dans le projet de loi.

Lorsque nous écoutons certains opposants à ce projet de loi, nous avons l’impression que cela annulera en quelque sorte l’impact et l’efficacité de la tarification du carbone. C’est tout simplement faux, chers collègues. Nous parlons d’une très petite exemption ciblée qui s’applique à un domaine précis dans lequel la taxe sur le carbone ne répond pas à son objectif en matière de politique publique, mais qui, en fait, fait le contraire.

Bien que les opposants se plaisent à laisser entendre qu’accorder une exemption pour le propane et le gaz naturel à des fins agricoles équivaudrait à retirer la pièce fatidique qui ferait s’effondrer une tour Jenga, la réalité est en fait tout à fait différente. Les exemptions font partie de la conception de la politique.

Chers collègues, comme je l’ai dit plus tôt, les exemptions ne sont pas un défaut, mais une caractéristique d’un régime de tarification du carbone. Elles sont nécessaires pour veiller à ce que la politique soit ciblée et efficace et qu’elle ne produit pas de résultats indésirables. Il y a des exemptions pour les agriculteurs et les pêcheurs, ainsi que des allégements ciblés supplémentaires pour les résidents des collectivités rurales et des petites collectivités, les utilisateurs de carburants aviation dans les territoires, les exploitants de serres et les centrales électriques qui produisent de l’électricité pour les collectivités éloignées et les peuples autochtones.

Le projet de loi C-234 n’est pas innovateur. C’est une modeste correction qu’il faut apporter à la série d’exemptions existantes. Elle n’aura aucune incidence sur l’efficacité de la taxe sur le carbone, mais elle aura une grande incidence sur les agriculteurs et leur capacité à soutenir la concurrence sur un pied d’égalité et à continuer d’adopter des technologies plus efficaces.

Il aidera les agriculteurs du Bloc québécois. Il aidera les agriculteurs du NPD. Il aidera les agriculteurs du Parti vert. Il n’aidera pas seulement les agriculteurs conservateurs, sénateur Dalphond. Je vous assure que les agriculteurs qui votent pour les conservateurs vont en profiter, tout comme les agriculteurs qui votent pour le Bloc québécois et les libéraux. Arrêtons donc de dire : « Les conservateurs s’opposent à la taxe sur le carbone, alors nous devons adopter cet amendement. » Cela ne tient tout simplement pas la route. Si vous avez un amendement qui est valable, défendez-le en fonction du mérite, et non en fonction de ceux qui s’y opposent.

Le président : Merci, sénateur Plett. Lorsque nous aurons entendu les sénateurs MacDonald et Woo, nous terminerons le débat et nous passerons au vote.

Le sénateur MacDonald : Sénateur Dalphond, vous avez parlé des thermopompes. J’ai installé des thermopompes chez moi. Je sais combien elles coûtent et comment elles fonctionnent. Vous auriez besoin de 100 thermopompes pour un poulailler de 100 000 pieds carrés. Savez-vous combien cela coûterait? Nous devons faire preuve de pragmatisme et être réalistes dans ce que nous faisons.

Encore une fois, le Parti vert et le NPD ont appuyé ce projet de loi; ce n’est pas une initiative partisane. Je crois que nous devons éviter de tomber dans la partisanerie et nous concentrer sur l’enjeu : aider les agriculteurs à survivre dans le contexte économique actuel. Nous savons combien coûte la nourriture au Canada, et nous allons maintenant augmenter les coûts d’exploitation d’une ferme. Si vous augmentez les coûts d’exploitation d’une entreprise agricole, vous augmentez le coût des aliments.

Nous faisons fausse route. Je crois que nous devons réévaluer la question.

Le sénateur Woo : Permettez-moi d’abord de faire un commentaire sur la présence de membres d’office de ce comité qui ont été parachutés dans notre étude article par article, sans avoir siégé...

Le sénateur Plett : J’invoque le Règlement, monsieur le président.

Monsieur le président, le débat porte sur un amendement, et non sur... Je fais un rappel au Règlement.

Le débat porte sur un amendement, et non sur le fait que j’aie ou non le droit d’être ici. Il y a au Sénat des règles que le sénateur Woo n’aime pas. Nous comprenons cela. Il est très clair à ce sujet et c’est tout à fait son droit.

Les différences entre les opinions du sénateur Woo et les miennes sur plusieurs questions politiques sont claires, mais la plus grande différence est que je reconnais qu’il a le droit d’avoir son opinion, et je reconnais que j’ai le droit d’avoir la mienne.

Nous avons des règles au Sénat qui me permettent, en tant que membre d’office, d’être ici, et dans ce cas — que je sois d’accord ou non avec la participation du gouvernement au débat sur un projet de loi d’initiative parlementaire —, les règles permettent aussi à la sénatrice LaBoucane-Benson d’être ici. Il n’y a pas de discussion possible, monsieur le président, et je vous demande respectueusement de restreindre le débat au sujet à l’étude. Il ne s’agit pas de savoir si j’ai le droit d’être ici ou non.

Le sénateur Woo : Débat sur le rappel au Règlement.

Le président : Débat sur le rappel au Règlement.

Le sénateur Woo : Le sénateur Plett s’est opposé au fait que le représentant du gouvernement vote d’une certaine façon dans son intervention précédente, alors que ce n’était pas sur cette question précise.

C’est la poêle qui se moque du chaudron. J’ai dit ce que j’avais à dire. Il y a une asymétrie et une injustice dans la façon dont le statut d’office est accordé à certains groupes seulement et pas à d’autres. Si vous êtes d’accord, monsieur le président, j’aimerais passer au débat sur l’amendement.

Le président : Je dois me prononcer sur le rappel au Règlement. À ce sujet, je vais simplement vous demander de conserver votre attention sur l’amendement. Il reste un intervenant, puis nous passerons au vote.

Le sénateur Woo : La question de savoir si les exemptions font partie de la politique est importante. Bien qu’il y ait, en fait, des exemptions intégrées dans la politique, les meilleurs économistes et les meilleurs analystes de la tarification du carbone — de la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre — comprennent bien que dans l’élaboration d’un régime de tarification de la pollution, les exemptions sont sous-optimales et moins appropriées que les remboursements, notamment les remboursements fondés sur le revenu, les remboursements pour perte de revenu et les remboursements qui portent sur la tarification fondée sur le rendement. Ce sont les mécanismes à privilégier dans la conception d’un régime de tarification de la pollution.

En fait, il y a une mesure de ce genre pour le gaz naturel et le propane, car dans un précédent projet de loi d’exécution du budget, le gouvernement a établi un crédit d’impôt remboursable pour remettre aux exploitations agricoles tous les produits de la tarification de la pollution provenant du gaz naturel et du propane, et ce, jusqu’aux derniers cents.

Ce montant est versé à l’ensemble du secteur, et pas nécessairement proportionnellement aux quantités utilisées par certaines exploitations agricoles et certains séchoirs à grain, mais pour maintenir l’incitation par les prix. Cela signifie que les exploitations agricoles qui font plus d’efforts et qui ont déjà investi dans des mesures d’efficacité pour leurs opérations de séchage du grain ou de chauffage de leurs étables obtiendront davantage que les exploitations qui n’ont rien fait à cet égard. Mais c’est là toute la raison d’être d’une incitation par les prix. Je suis donc d’avis qu’il est profondément trompeur de laisser entendre que les exemptions sont, en fait, la voie à suivre dans un régime de tarification du carbone.

Je veux faire valoir un point qui est très important, alors que nous examinons cet amendement et tous les autres. L’argument avancé par les promoteurs — et nous l’avons entendu à maintes reprises de la part des sénateurs Plett et MacDonald — est qu’il n’y a aucune autre voie possible.

À certains égards, c’est exact, mais il n’est pas simplement question de solutions de rechange. Il est question de gains d’efficience, et du fait que la tarification de la pollution ne vise pas nécessairement à encourager l’utilisation d’une toute nouvelle technologie qui pourrait ou non exister — nous espérons que quelque chose se concrétisera —, mais plutôt à encourager les gens à apporter des changements progressifs qui amélioreront l’efficacité, même en utilisant les technologies existantes.

Le sénateur Plett n’a pas entendu tous les témoignages, alors il n’a pas entendu plusieurs témoins dire que certains séchoirs à grain ont 20 ou 30 ans. Un de nos témoins vedettes nous a dit qu’il avait remplacé son séchoir l’an dernier seulement, je crois, et il a reconnu que son appareil précédent — son ancienne installation — avait, je crois, plus de 20 ans. Nous avons besoin d’incitatifs pour encourager les agriculteurs à faire ce changement, et il ne s’agit pas de trouver une fusion ou une sorte de solution magique. Nous devons réaliser des gains d’efficience supplémentaires et, même si rien ne peut remplacer le gaz naturel et le propane aujourd’hui, la tarification de la pollution fait un bon travail en encourageant les agriculteurs — que ce soit pour les étables ou le grain — à changer ce qu’ils peuvent changer aujourd’hui avec la technologie actuelle.

Le président : L’amendement proposé par l’honorable sénateur Dalphond propose que le projet de loi C-234 soit modifié à l’article 1. Dois-je le lire au complet? Voulez-vous que j’en fasse la lecture? Puis-je me dispenser de lire la motion? Merci beaucoup.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Nous allons tenir un vote par oui ou non. Alors, procédons.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Black?

Le sénateur Black : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Burey?

La sénatrice Burey : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cardozo?

Le sénateur Cardozo : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cotter?

Le sénateur Cotter : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Dalphond?

Le sénateur Dalphond : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur MacDonald?

Le sénateur MacDonald : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice LaBoucane-Benson?

La sénatrice LaBoucane-Benson : Je m’abstiens.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Saint-Germain?

La sénatrice Saint-Germain : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Woo?

Le sénateur Woo : Oui.

Mme Simpson : Il y a 7 voix contre 6 et 1 abstention.

Le président : Je vais déclarer la motion d’amendement adoptée. L’amendement est-il adopté? L’article 1 modifié est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le président : Merci. Adopté tel que modifié.

Le sénateur Woo : Nous n’avons pas besoin d’interruption, n’est-ce pas? Devrions-nous poursuivre?

Le président : Nous continuons. L’article 1 modifié est adopté.

Je demande maintenant si l’article 2 est adopté?

Des voix : Oui.

Le sénateur Woo : Honorables collègues, je propose :

Que le projet de loi C-234 soit modifié à l’article 2, à la page 2, par substitution, aux lignes 22 et 23, de ce qui suit :

« 2 (1) Les paragraphes 1(2.1) et (5) entrent en vigueur à la date du troisième anniver- ».

Vous savez tous que le projet de loi prévoit actuellement une période de temporisation de huit ans, après quoi les exemptions disparaissent à moins qu’il y ait un décret du gouverneur en conseil et que certaines motions soient adoptées par la Chambre et le Sénat.

La période de huit ans est plus ou moins arbitraire. On a dit que c’était la période nécessaire pour permettre l’émergence de nouvelles technologies, peut-être, ou pour permettre aux agriculteurs de trouver des solutions de rechange. Mais, chers collègues, ce qui se passera, c’est que pendant ces huit ans, le prix de la pollution augmentera de 15 $ par année. Je crois que d’ici la fin de la période de huit ans, elle sera de 170 $ la tonne par rapport au prix actuel de 65 $. C’est une énorme augmentation.

Dans le cas des agriculteurs qui n’auront fait aucun changement et qui n’ont peut-être pas de solutions de rechange — ou qui ne s’y sont pas préparés —, de très grands changements devront être faits à la fin de la période de huit ans, et cette adaptation pourrait être dévastatrice.

Cela créera aussi, bien sûr, une forte pression pour étendre l’exemption, quelle que soit la technologie disponible.

Cet amendement propose une période plus courte pour deux raisons, la première étant de ne pas accepter une période aussi longue qui pourrait aggraver les difficultés d’adaptation des agriculteurs. Mais la deuxième, et la plus importante, est qu’un examen du régime de tarification de la pollution aura lieu en 2026. Cet examen sera mené par Environnement et Changement climatique Canada. L’ensemble du régime de la tarification sera examiné et il y aura des séances de consultation et de mobilisation avec les intervenants provinciaux, territoriaux et autochtones. Les incidences sur les relations interjuridictionnelles et les préoccupations soulevées par mes collègues seront examinées. Les répercussions de la tarification de la pollution sur la compétitivité internationale seront examinées.

Je serai heureux de vous donner plus de détails sur le contexte, mais pour être bref, ce sont les principaux arguments en faveur d’une période de temporisation plus courte.

Le président : Merci, sénateur Woo. Voulez-vous poursuivre le débat?

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le président.

Le président : Je vous rappelle de nouveau que vous parlez de l’amendement.

Le sénateur Plett : Aucune preuve n’a été présentée au comité pour montrer que la période de temporisation devrait passer de huit ans à trois ans. Aucune.

En fait, comme l’a souligné M. Lubitz, professeur associé à l’École de génie de l’Université de Guelph, nous parlons d’un minimum de six à huit ans, et peut-être plus. Le sénateur Woo sera peut-être surpris d’apprendre que je suis capable de lire les témoignages et d’écouter les réunions de comité lorsque je suis dans mon bureau. Même si, comme il le dit, je n’ai pas assisté à toutes les réunions, j’ai une idée assez précise de ce qui s’est passé lors des réunions.

En réponse à une question de la sénatrice Simons au sujet de certaines technologies — à savoir si elles seraient opérationnelles d’ici huit ans —, M. Lubitz a répondu : « Il est difficile de me prononcer sur les technologies en cours d’élaboration. »

Il a poursuivi comme suit :

Nous avons parlé de la technologie de thermopompe; c’est ce que nous étudions. D’autres travaillent aussi sur la biomasse et sur d’autres technologies. On pourrait soutenir que certaines de ces technologies sont sur le point d’être prêtes à une utilisation expérimentale à petite échelle de prototype, mais, à mon avis, la question la plus importante est de savoir quand elles seront prêtes pour un déploiement à grande échelle. Je crois que certaines de ces technologies seront prêtes dans un délai de huit ans, mais pas dans un an ou deux. Notre projet n’atteindra pas cet objectif au cours de la prochaine année ou des deux prochaines années, mais il pourrait le faire d’ici six ou huit ans. De même, je ne suis pas au courant d’autres technologies qui seraient prêtes pour un tel déploiement à grande échelle dans les deux prochaines années. Il faut beaucoup de temps pour franchir ces étapes vers le déploiement et l’expansion. Il s’agit d’une grande infrastructure, dont la construction, la mise à l’essai et la reconstruction prennent beaucoup de temps.

M. Singh, chaire de recherche principale de Génie agricole et technologie au Lethbridge College, a fait écho à l’incertitude du professeur Lubitz en disant :

Je ne sais pas si cela prend trois ou cinq ans et si ces carburants seront offerts sous une forme que les agriculteurs peuvent utiliser. Peut-être que oui, peut-être que non. Je suis désolé, mais je ne peux pas vous donner une réponse claire.

Dans son mémoire présenté au Comité permanent de l’agriculture et l’agroalimentaire de la Chambre des communes, le Conseil de l’innovation agroalimentaire a déclaré :

La recherche et l’innovation en matière d’utilisation de sources d’énergie renouvelables [alternatives] […] sont très prometteuses pour les exploitations agricoles. [Cependant, la technologie n’est pas encore viable pour de nombreuses activités agricoles. Des recherches et des innovations sont nécessaires pour répondre aux besoins du secteur agroalimentaire.]

Au fur et à mesure que d’autres sources d’énergie sont découvertes, il est important de prendre en considération leur extensibilité, leur abordabilité et leur propension à être adoptées.

Est-ce que cela signifie que nous n’arriverons jamais à un point où nous serons en mesure de remplacer le propane et le gaz naturel? Non. Cependant, la plupart des experts indiquent qu’il nous faudrait au moins une décennie avant de pouvoir disposer de sources d’énergie de rechange viables, éprouvées, abordables et « extensibles ».

Ce sont des professionnels, chers collègues. Chers collègues, cet amendement ne repose sur aucune preuve et, en fait, il devrait être rejeté. Nous devons faire avancer le projet de loi sans cet amendement. Merci.

Le sénateur MacDonald : Je veux simplement souligner que le sénateur Woo a dit que la limite de huit ans était arbitraire. Pourquoi est-ce plus arbitraire que la limite de trois ans que vous proposez?

Le sénateur Woo : Parce qu’il y aura un examen obligatoire après trois ans. C’est ce qui se produira, que cela nous plaise ou non, et cet examen pourrait fort bien permettre de dissiper l’incertitude dont le sénateur Plett a parlé à juste titre, à savoir l’incertitude qui entoure les processus technologiques. Nous n’en savons rien.

Tout ce que j’ai pu comprendre de la récapitulation de certains témoignages par le sénateur Plett, c’est que les gens ne savent pas. Il n’est pas question d’un ou deux ans, mais peut-être de cinq ou six ans. Trois ans me semblent se situer entre les deux possibilités.

N’oubliez pas qu’en adoptant cet amendement qui ferait qu’il y aurait une disposition de temporisation de trois ans plutôt que de huit ans, il serait toujours possible de prolonger les exemptions. Cela n’empêche pas que cela se fasse. L’amendement nous permet simplement d’utiliser un processus d’examen établi, obligatoire et sérieux qui sera mené par Environnement et Changement climatique Canada et les conclusions de cet examen officiel pour établir ce qu’il faut faire à l’égard d’exemptions supplémentaires.

Le sénateur Dalphond : J’appuie l’amendement et, pour apporter une précision au sujet des témoignages entendus par le comité, le 26 septembre, Mme Cool-Fergus, directrices des politiques nationales du Réseau action climat Canada, a dit qu’elle n’était pas d’accord avec la période de huit ans parce qu’elle nuit à l’innovation. Elle a souligné que la demande pour des programmes de technologies numériques propres dépasse maintenant l’offre, et que le long délai fait que des personnes qui sont prêtes à envisager des solutions de rechange continuent à utiliser de l’équipement désuet pendant plus longtemps.

De plus, une disposition de temporisation de huit ans nous amène au-delà de la date cruciale de 2030, qui est la date cible pour atteindre certains jalons. Nous sommes donc ici pour le rappeler, car n’oubliez pas qu’il s’agit du troisième report de la tentative de soustraire les agriculteurs à la tarification. Cela a commencé en 2020 alors qu’ils demandaient huit ans, ce qui voulait dire la fin de 2028. Nous demandons maintenant huit ans alors que nous sommes en 2023, ce qui nous amène à 2031, une date qui dépasse la date cible de 2030.

Il s’agit d’un amendement cohérent et logique. De plus, en 2030, après la réalisation de l’examen obligatoire, s’il s’avère nécessaire d’apporter des ajustements, le gouvernement pourra le faire. Merci.

Le sénateur MacDonald : Le sénateur Woo a dit que la question sera éclaircie dans trois ans. Nous aurons des élections dans trois ans et vous pouvez être certains que tout sera éclairci.

Le sénateur Plett : Le sénateur Woo a dit que tout ce qu’il pouvait comprendre de mes observations, c’est que nous ne le savons pas. Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous n’avez pas dites, mais c’était quelque chose du genre. Que ce que j’avais dit ne lui avait pas permis de connaître la durée de la période.

En fait, ce que j’ai dit, c’est que je crois que certaines seront prêtes pendant la période de huit ans. C’est très clair, au cours de la période de huit ans.

Il est possible que ce soit dans six ou huit ans. La majorité des experts disent qu’il faudrait au moins une décennie. Je ne sais pas si cela peut être plus clair : un délai de trois ans n’est pas acceptable.

Nous entendons des experts compétents, et pourtant autour de cette table, nous disons : « Eh bien, vous ne savez pas de quoi vous parlez. Nous ferons autre chose. » Au moins, ayez l’expertise nécessaire avant de proposer un amendement. Avec tout le respect que je lui dois, le sénateur n’a pas l’expertise nécessaire; ce sont les témoins qui l’ont.

Le président : Merci, sénateur Plett.

L’honorable sénateur Woo propose :

Que le projet de loi C-234 soit modifié à l’article 2, à la page 2, par substitution, aux lignes 22 et 23, de ce qui suit :

« 2 (1) Les paragraphes 1(2.1) et (5) entrent en vigueur à la date du troisième anniver- ».

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement proposée?

Je crois que nous allons procéder de nouveau à un vote par oui ou non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Black?

Le sénateur Black : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Burey?

La sénatrice Burey : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cardozo?

Le sénateur Cardozo : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Cotter?

Le sénateur Cotter : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Dalphond?

Le sénateur Dalphond : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice LaBoucane-Benson?

La sénatrice LaBoucane-Benson : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur MacDonald?

Le sénateur MacDonald : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Oh?

Le sénateur Oh : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

Mme Simpson : L’honorable sénatrice Saint-Germain?

La sénatrice Saint-Germain : Oui.

Mme Simpson : L’honorable sénateur Woo?

Le sénateur Woo : Oui.

Mme Simpson : Il y a 7 voix contre 7.

Le président : Comme il y a égalité des voix, l’amendement est rejeté.

L’article 2 est-il adopté?

Des voix : D’accord.

Le président : Merci.

Comme il est 10 h 55, voulez-vous que nous poursuivions encore cinq minutes?

Le sénateur Plett : Oui.

Le président : Très bien.

Le titre est-il adopté… désolé, sénateur Woo?

Le sénateur Woo : Il y a un amendement — l’amendement 4 — que j’aimerais proposer. Il se trouve dans votre liasse. Il s’agit de l’article 2, aux pages 2 et 3. Puis-je proposer l’amendement?

Le président : Allez-y.

Le sénateur Woo : Je propose :

Que le projet de loi C-234 soit modifié à l’article 2 :

a) à la page 2, par substitution, aux lignes 24 à 36, de ce qui suit :

« saire de l’entrée en vigueur de la présente loi. »;

b) à la page 3, par suppression des lignes 1 à 10.

Dans leur forme originale, ces dispositions permettent que les exemptions prévues dans le projet de loi C-234 soient prolongées au-delà de la période de temporisation simplement par une résolution du gouverneur en conseil et des motions de la Chambre des communes et du Sénat. Elles n’exigent pas le même genre d’examen et de vérification de la part de l’autre Chambre ou du Sénat.

Il y a une certaine automaticité dans la proposition actuelle de prolonger les exemptions.

Je crois que maintenant que nous avons une période de temporisation de huit ans — une période de huit ans qui serait, comme je l’ai fait valoir, plus difficile à ignorer pour les agriculteurs et à refuser sur le plan politique, exerçant donc une pression accrue sur le maintien des exemptions — nous ne devrions pas, en tant que Chambre de second examen objectif, permettre que la prolongation de ces exemptions soit si facile.

Pour être clair, je ne dis pas que nous devrions éliminer la possibilité de maintenir les exemptions, mais cela devrait se faire dans le cadre du fonctionnement normal du Parlement du Canada, c’est-à-dire qu’un projet de loi concernant la prolongation devrait être déposé afin que nous puissions recueillir de nouvelles données, tenir des débats à la Chambre et au Sénat, puis prendre une décision en fonction des mérites de la nouvelle mesure législative. Je vous remercie.

Le président : Merci.

Nous arrivons à la fin de notre séance, mais nous allons écouter le sénateur Plett, et nous reprendrons le débat à la prochaine réunion.

Le sénateur Plett : Tout d’abord, monsieur le président, je crois que nous devrions terminer cette réunion du comité; nous devrions terminer l’étude de ce projet de loi. C’est ce que nous allions faire, et nous n’avons besoin que de quelques minutes pour terminer l’étude du projet de loi. Je trouverais extrêmement inutile d’y consacrer une autre réunion. Merci. Vous pouvez parler lorsque vous avez le micro. Pour le moment, j’ai la parole. Je trouverais extrêmement inutile que nous levions la séance alors que nous avons pratiquement terminé. C’est une autre tactique dilatoire du sénateur Woo pour faire de manière détournée quelque chose qu’il ne pouvait pas ouvertement. Je ne vais donc pas en débattre tant que nous n’aurons pas convenu de terminer l’étude du projet de loi aujourd’hui.

La sénatrice Saint-Germain : Ce projet de loi est important pour les agriculteurs, mais aussi pour l’économie canadienne et pour nous. Je crois que nous devrons continuer parce que nous manquons de temps aujourd’hui. Plusieurs d’entre nous — c’est mon cas — ont d’autres engagements à respecter. Malheureusement, je n’ai pas suffisamment de temps pour me prononcer sur les autres amendements et les observations qu’il nous reste à étudier.

Si vous me le permettez, j’espère que les prochaines réunions seront respectueuses — de tous les côtés — des collègues, de leurs points de vue, de leurs votes et de leur expertise.

Le président : Merci. Nous devons absolument nous arrêter à 11 heures, car il y a une autre réunion et nous devons quitter la salle.

Sur ce, chers collègues, je vous remercie de votre attention, de vos dialogues et de vos débats d’aujourd’hui.

Je tiens à remercier les personnes qui sont derrière nous, les participants en ligne qui nous soutiennent — et qui nous ont beaucoup appuyés aujourd’hui — ainsi que nos collègues du bureau.

Nous nous reverrons le mardi 24 octobre, à 18 h 30.

(La séance est levée.)

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