LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES BANQUES, DU COMMERCE ET DE L’ÉCONOMIE
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 10 avril 2024
Le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie se réunit aujourd’hui, à 16 h 15 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier toute question concernant les banques et le commerce en général.
La sénatrice Pamela Wallin (présidente) occupe le fauteuil.
[Traduction]
La présidente : Bonjour et bienvenue à tous à la présente séance du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie. Je m’appelle Pamela Wallin et je suis présidente du comité. Je voudrais vous présenter les membres qui sont des nôtres aujourd’hui. Il s’agit du sénateur Loffreda, vice-président, de la sénatrice Bellemare, du sénateur C. Deacon, du sénateur Gignac, de la sénatrice Marshall, du sénateur Massicotte, de la sénatrice Miville-Dechêne et du sénateur Yussuff.
Aujourd’hui, nous allons tenir une discussion sur les taux d’intérêt plus élevés et de leurs répercussions à long terme. Nous avons le plaisir d’accueillir virtuellement Paul Beaudry, professeur à l’École d’économie de Vancouver à l’Université de la Colombie-Britannique. Il a également été sous-gouverneur de la Banque du Canada de février 2019 à sa retraite, en juillet 2023.
Dans un discours prononcé en juin 2023, il nous a prévenus du fait que nous entrons dans une nouvelle ère où les taux d’intérêt sont structurellement plus élevés. Nous l’avons invité aujourd’hui à nous faire part de son point de vue. Nous vous remercions de votre temps et de vos observations. La parole est à vous, monsieur Beaudry. Soyez le bienvenu.
Paul Beaudry, professeur, École d’économie de Vancouver, Université de la Colombie-Britannique, à titre personnel : Merci beaucoup. Je suis heureux de comparaître aujourd’hui.
Je vais commencer par quelques observations. Évidemment, il y a toute une série de questions sur les taux d’intérêt. Il y a la vision à court terme qui fait ressortir beaucoup de points saillants, mais il y a beaucoup d’aspects à long terme, et j’aimerais en parler.
À court terme, nous avons reçu d’autres nouvelles ce matin concernant des indications du fait qu’il y aura une réduction des taux d’intérêt au cours des prochains mois. Ce pourrait être dès le mois de juin, si les choses continuent d’être comme elles le sont actuellement. Beaucoup de mesures de l’inflation pointent dans la bonne direction, alors nous pourrions voir cette réduction bientôt. Cette réduction pourrait prendre un peu plus de temps. Elle ira peut-être en juillet, mais, quoi qu’il arrive, il est fort probable que nous assistions à des diminutions des taux d’intérêt au cours des prochains mois. Il y a des aspects liés au fait que les taux fluctuent un peu différemment aux États-Unis par rapport au Canada qui pourraient créer des tensions supplémentaires; c’est tout de même la tendance générale.
La question beaucoup plus intéressante à se poser est la suivante : où ira la tendance? Même s’il y a une légère réduction, c’est vraiment l’aspect des choses qui pourraient se produire à long terme et les taux ultérieurs qui sont très importants. Ce sont les taux qui influent vraiment sur le prix des actifs, de l’habitation et de bien d’autres choses au Canada dont les gens se soucient. Afin de comprendre la situation dans laquelle nous nous trouvons maintenant, il est important de revenir un peu en arrière pour voir où nous en étions avant la COVID et comment nous en sommes arrivés là.
Pour mettre les choses en perspective, avant la pandémie de COVID, le taux d’intérêt, du moins le taux directeur établi par la Banque du Canada, était à 1,75 % et l’inflation, à 2 %. Dans ce contexte, les taux réels étaient essentiellement de 0 %. C’était un contexte très particulier; c’était très différent. Il a vraiment changé en 30 ans. Si nous revenons 30 ans en arrière, il a connu une diminution graduelle de 3 à 4 % des taux réels qui ont atteint 0 %, et ce phénomène n’était pas particulièrement centré sur le Canada. Il était commun à un ensemble de pays. La plupart des économies avancées affichaient une tendance très semblable parce que les marchés financiers sont très intégrés.
En général, on ne considère pas que les banques centrales sont à l’origine de cette situation. Il s’agit beaucoup plus des forces structurelles générales de l’économie : l’idée du montant dont les gens ont besoin et qu’ils veulent épargner, du nombre de bonnes occasions d’épargner et du genre d’actifs qu’ils peuvent utiliser pour le faire. C’est une combinaison de ces facteurs à l’échelle internationale qui crée beaucoup de pression qui détermine les taux à long terme.
Une bonne partie des choses qui ont fait baisser les taux au cours de la période de 30 ans qui a précédé la COVID étaient des facteurs comme le vieillissement de la population dans de nombreuses économies avancées. C’était le cas même en Chine, alors il y a des facteurs démographiques. La démographie a fait en sorte que les gens qui pouvaient épargner ont voulu le faire en vue de la retraite, et c’était beaucoup d’épargne.
Il y a aussi eu l’intégration de la Chine dans le système mondial. Les Chinois ont toujours eu des taux d’épargne très élevés. Cette tradition a créé beaucoup de pression, beaucoup d’aspects de l’épargne accrue pendant cette période et beaucoup d’appétit pour ce que nous pourrions appeler des actifs sans risque, qui sont en quantité relativement petite dans le monde. Ainsi, les obligations de pays moins risqués comme le Canada en ont profité, ce qui a fait baisser les taux. Il y a aussi eu une augmentation de l’égalité dans le monde. En général, les gens riches ont tendance à épargner davantage. Ces pressions ont également fait baisser les taux. Il y a eu beaucoup de facteurs qui ont entraîné beaucoup d’épargne dans le système.
D’un autre côté, même s’il est beaucoup question de changements technologiques au cours de cette période, ce qui est surprenant, c’est que, malgré la baisse des taux d’intérêt dans la plupart des pays, les possibilités d’investissements qui pouvaient générer beaucoup de profits n’étaient pas très abondantes. Il y avait un manque d’investissement par rapport à toute cette épargne, et c’est ce qui faisait baisser les taux d’intérêt. Je tiens à souligner que la Chine avait un réel appétit pour des actifs sûrs — surtout les obligations américaines, mais même les canadiennes — et que cet appétit faisait baisser les taux.
Ce sont toutes des choses qui se sont produites pendant 30 ans avant la COVID. Puis, nous sommes entrés dans la période de la COVID, et beaucoup de choses ont changé à peu près en même temps, certaines directement. De fait, nous avons une plus grande réserve d’actifs dans l’économie, en ce sens que de nombreux pays dans le monde, y compris le Canada, ont raisonnablement enregistré un gros déficit pendant la pandémie de COVID, ce qui a créé davantage d’actifs qui doivent être absorbés par le système. C’est une pression à la hausse sur les taux à long terme.
Les tendances et une partie de la démographie ont également changé. Même si bon nombre de baby-boomers étaient en âge d’épargner pendant la période qui a précédé la COVID, beaucoup sont à la retraite et en train de désépargner. En outre, les aspects géopolitiques ont changé les choses, compte tenu du fait que la Chine a réduit son exposition à une grande partie des dettes des économies avancées. Globalement, cette situation a entraîné des baisses.
La présidente : Nous allons nous arrêter là et passer aux questions, parce qu’on vous en posera justement sur ces sujets. Merci beaucoup, monsieur Beaudry. Nous allons commencer les questions avec le sénateur Loffreda, vice-président.
Le sénateur Loffreda : Je vous remercie de votre présence, monsieur Beaudry. Bien que la relation entre les taux d’intérêt et les risques systémiques soit complexe et puisse être influencée par divers facteurs, les taux d’intérêt élevés peuvent entraîner des risques systémiques dans le système financier. À l’heure actuelle, les plus inquiétants pour l’économie canadienne comprennent les vulnérabilités du marché de l’habitation, le niveau d’endettement élevé des ménages — au Canada, le niveau d’endettement du consommateur, qui est le véhicule et le moteur de l’économie, est particulièrement élevé —, les chocs économiques qui pourraient être causés par des événements mondiaux, les incertitudes géopolitiques et le défi constant lié aux répercussions des changements climatiques sur divers secteurs.
Quels aspects vous préoccupent le plus? Selon vous, quelles stratégies permettraient d’atténuer ou de gérer efficacement ce risque?
M. Beaudry : Je pense que vous avez tout à fait raison de penser à certains de ces risques. Ils sont très pertinents. Cela dépend beaucoup des fluctuations des taux à long terme. Voilà pourquoi j’ai insisté sur cet aspect pour encadrer notre discussion.
Évidemment, au Canada, la majeure partie de la dette est hypothécaire. Nous avons des dettes à l’égard d’autres choses — des dettes de carte de crédit, des dettes de voiture —, mais les gros montants sont dans l’habitation. Nous devons toujours tenir compte du marché immobilier et des risques qui y sont associés. De bien des façons, nous parlons beaucoup de la pénurie en ce moment, et c’est très pertinent. Toutefois, pour avoir une bonne idée de l’évolution du prix des maisons au fil du temps et savoir pourquoi nous sommes actuellement dans une situation plus vulnérable, il faut regarder en arrière.
Au cours des 30 années qui ont précédé cette période, alors que les taux d’intérêt étaient à la baisse, le prix des maisons était à la hausse. Si on multipliait les deux, c’était assez constant. Les ménages paient habituellement ce que nous appelons le ratio du service de la dette. Ce qui est surprenant, c’est que, malgré tous les aspects dont nous parlons, comme l’augmentation de la dette et la hausse du prix des maisons, le ratio du service de la dette est demeuré très constant.
C’est exactement ce qui s’est passé après la COVID. Le ratio du service de la dette, après avoir été constant pendant 30 ans, a vraiment augmenté. C’est parce que les prix sont plus élevés. Ils ont vraiment augmenté. Le prix des maisons a augmenté au début de la pandémie de COVID — il a légèrement baissé, mais il est encore loin de ce qu’il était au début —, puis les taux d’intérêt ont augmenté. C’est cette combinaison.
Or, si on multiplie les deux, le ratio a vraiment augmenté. En réalité, il s’agit de la plus grande vulnérabilité. Je vais mettre les choses en perspective. Avant la COVID, même si nous avions des problèmes, les choses s’équilibraient et le ratio du service de la dette était toujours semblable. Maintenant, nous devons réfléchir à la façon dont il va s’ajuster.
Une chose facile, c’est que, si les taux d’intérêt redescendent au niveau où ils étaient, il s’agira peut-être d’un ajustement. Toutefois, s’ils restent à ces niveaux élevés — pas exactement aux 5 % actuels, mais s’ils ne baissaient qu’à 4 %, ce serait tout de même le double par rapport à la période antérieure à la COVID —, il sera difficile de continuer à rembourser ces dettes. Au fil du temps, surtout si l’immigration diminue un peu et que les choses se rééquilibrent, il pourrait y avoir un ajustement important du marché de l’habitation.
En général, nos normes de souscription sont très rigoureuses au Canada, et une grande partie des mesures que les banques ont prises pour s’assurer que les consommateurs pouvaient assumer des taux d’intérêt plus élevés étaient importantes, mais il faut continuer de mettre l’accent là-dessus. Il nous faut un système où les gens qui achètent un bien auront la capacité de continuer à faire ces paiements à des taux potentiellement plus élevés qu’avant la COVID. À mon avis, c’est la chose la plus importante à faire dans le cadre de ce processus.
Le sénateur Loffreda : Merci.
La sénatrice Marshall : Je veux parler un peu de la psychologie des taux. Il y a quelques années, tout le monde disait que les taux allaient rester bas, et les gens sont allés emprunter. Maintenant, ils se font dire que les taux sont un peu élevés en ce moment, mais qu’ils vont diminuer en juin, alors les gens sont encore en train d’emprunter, en se disant que, s’ils peuvent seulement se rendre jusqu’en juin, lorsque les taux baisseront, tout ira bien.
Pourquoi les économistes sont-ils enclins à dire aux gens qu’il y aura de bonnes nouvelles dans l’avenir — même le gouvernement et la Banque du Canada ont dit que les taux demeureraient bas —, alors que nous ne savons pas s’il y en aura? Même les 5 % que nous avons actuellement… si on regarde ce qui s’est passé au cours des 40 dernières années, j’ai renouvelé mon taux hypothécaire à 22 % au milieu des années 1980. Pourquoi veut-on ou doit-on dire que les taux vont baisser? Pourquoi le message n’est-il pas plus prudent? Pourquoi n’est-ce pas : « Nous espérons que les taux vont baisser, mais ce ne sera peut-être pas le cas, alors préparez-vous »? Pourquoi envoie-t-on ce message?
M. Beaudry : C’est une question à laquelle il est difficile de répondre. Je pense qu’on a envoyé des messages qui ont changé à maintes reprises. Tout d’abord, disons qu’il y a un aspect lié à la diminution des taux. De façon générale, il a été surprenant de constater la mesure dans laquelle ils avaient diminué avant la COVID. Cet aspect est resté, en quelque sorte. Il y a aussi l’aspect lié au fait que, lorsque la COVID est arrivée, on a eu l’idée de maintenir les taux bas pendant un certain temps pour faciliter la reprise. Je pense que le message est plus mitigé, mais peut-être pas assez à votre goût.
Je suis d’accord avec vous. Je répète sans cesse qu’il faut être plus prudent à cet égard. Je suis tout à fait d’accord avec ce que vous dites et avec l’idée de faire attention.
Même s’il est question à l’heure actuelle d’une réduction des taux, ce ne sera peut-être pas une très grosse réduction. Ils pourraient passer de 5 % à 4,5 %, peut-être 4,25 %, et ils pourraient rester stables pendant un certain temps, surtout si l’on tient compte de la situation actuelle aux États-Unis. Nous sommes également influencés par ce pays dans ce genre de situation, et l’économie américaine croît très rapidement. De fait, les pressions inflationnistes sont encore là. Les États-Unis ne seront pas non plus en mesure de réduire rapidement les taux, et cette situation influence le Canada. Je suis tout à fait d’accord avec vous.
Quant à savoir pourquoi ce n’est pas plus, encore une fois, nous avons vu certaines des nouvelles, aujourd’hui. Mark Carney disait que la diminution avait encore ralenti. D’autres personnes sont intervenues. Ce n’est pas comme si personne ne le disait, mais peut-être qu’il n’y a pas assez de gens qui le disent. Encore une fois, nous devons être honnêtes au sujet de ce que nous ne savons pas, mais j’ai toujours dit que les gens devraient être prêts à ce que les taux demeurent élevés, quoique je ne dis pas que j’ai une boule de cristal et que je suis certain qu’ils ne redescendront pas.
La sénatrice Marshall : Cela me rappelle la météo de Terre-Neuve. Tout le monde dit qu’à Terre-Neuve le beau temps est toujours à venir. Nous disons maintenant que les faibles taux sont toujours à venir.
La présidente : La banque nous a également dit, au cours de la période qui a précédé la pandémie — bien entendu, avant que quiconque n’ait prévu la COVID — « Allez-y, empruntez; les taux sont à la baisse », et les gens l’ont fait.
La sénatrice Marshall : Oui, ils l’ont fait, et ils continuent d’emprunter parce qu’ils pensent que les taux vont redescendre.
La présidente : Puis, pendant la pandémie de COVID, nous avons entendu dire que les taux étaient transitoires, mais ils ne l’étaient pas.
La sénatrice Marshall : C’est très préoccupant pour l’économie.
La présidente : Tout le monde devrait faire preuve d’un peu plus de prudence en faisant des déclarations, si ce n’est pas déjà le cas.
[Français]
Le sénateur Gignac : Bienvenue, monsieur Beaudry, et merci pour votre service public au sein de la Banque du Canada.
J’aimerais vous poser une question qui n’a pas été soulevée aujourd’hui par les journalistes à la conférence de presse avec le gouverneur, mais qui concerne un débat qui a lieu au sein de la communauté des économistes, c’est-à-dire les mesures qu’utilise la Banque du Canada pour mesurer l’inflation fondamentale. La Banque du Canada dit que l’inflation fondamentale est encore autour ou au-dessus de 3 %, mais si on prend la mesure qu’utilisait la Banque du Canada de 2001 à 2016, l’IPCX, qui est à 2,5 %, ou si on adopte l’approche de la Banque centrale de Suède, qui enlève les intérêts hypothécaires, on est plutôt autour de 2 %.
Desjardins et la Banque Nationale ont mentionné dans des articles que la Banque du Canada surestimait l’inflation fondamentale.
Pensez-vous que les mesures qu’utilise la Banque du Canada pour mesurer l’inflation fondamentale sont appropriées?
M. Beaudry : C’est une bonne question. Plusieurs mesures différentes ont été utilisées. La banque a fait beaucoup de travail pour choisir ces mesures et représenter ce qui se passe dans l’économie.
En fait, dans les derniers mois plus particulièrement, il y a beaucoup moins de différence que ne le disent les gens. Si on prend les mesures à plus court terme, je crois que celles qu’utilise la Banque du Canada sont assez bonnes, mais il faut vraiment examiner les changements à assez haute fréquence. Si on regarde les changements dans certaines de ces mesures fondamentales de l’inflation utilisées par la Banque du Canada sur trois mois, et qui sont vraiment les mesures qu’ils regardent le plus, ces mesures ont aussi beaucoup diminué; elles sont en train de descendre dans la fourchette des 2 %.
Ce qu’on a entendu aujourd’hui, avec le gouverneur Macklem qui a ouvert un peu la porte pour ce qui est de la baisse des taux d’intérêt en juin, reflète cette question.
Je ne pense pas que ce soit si différent. Les gens ne regardent pas les choses de façon aussi différente. Je pense que les mesures utilisées sont assez bonnes.
Il faut dire aussi que la Banque du Canada a ces mesures, mais regarde l’ensemble. Il n’est pas question de dire que c’est dogmatique, qu’on a deux mesures et qu’on ne regarde que ça. La question, c’est vraiment de voir si tout un ensemble de mesures qui poussent dans la même direction peut nous assurer que l’inflation reviendra à 2 %. À l’inverse, le pire serait que la banque ait besoin de hausser de nouveau les taux d’intérêt si l’inflation n’est pas ramenée à sa cible.
Le sénateur Gignac : Sur le plan de la politique fiscale, bien des choses n’aident pas beaucoup la Banque du Canada. Avec ce qui se passe en Ontario et au Québec, avec les déficits plus élevés et avec les annonces du gouvernement fédéral depuis deux semaines, est-ce qu’à votre avis la politique budgétaire va continuer de nuire à la politique monétaire en stimulant l’économie inutilement en 2024?
M. Beaudry : Non, pas tant que cela. Je crois qu’on est dans cette situation et qu’on a vraiment dépassé le fait d’avoir un marché du travail très serré; on est passé d’une économie vraiment surchauffée à une économie qui ne l’est plus vraiment en ce moment. Donc, l’inflation de base actuelle n’est pas causée par la surchauffe de l’économie, mais c’est plutôt un entraînement ou une habitude qu’on a, depuis quelques années maintenant, de voir beaucoup d’inflation.
J’avais des questions un peu plus tôt à propos de la psychologie. Ici, je crois que la question de la psychologie de l’inflation est importante. On veut vraiment être certain de ne pas être dans une situation où la psychologie de l’inflation en est à 3 % ou 3,5 %; on veut vraiment revenir à 2 %.
Je ne crois pas que le problème se trouve du côté de ce que la demande est en train de créer.
Je crois qu’on verra des baisses, parce que tout pointe dans la bonne direction et indique que l’inflation est en train de revenir à sa cible.
[Traduction]
La présidente : Que pensez-vous de ce que Mark Carney a dit l’autre jour? Il ne critiquait pas explicitement le gouvernement, mais il a laissé entendre qu’un environnement économique changeant exige « [...] une discipline fiscale et un accent incessant sur la prestation, plutôt qu’un réflexe de dépense qui ne fait que traiter les symptômes, mais ne guérit pas la maladie. »
Êtes-vous d’accord avec cette affirmation?
M. Beaudry : J’y souscris certainement. Encore une fois, nous devons réfléchir au risque dont nous parlions tout à l’heure en ce qui concerne les ménages, mais cela s’applique aussi au gouvernement… les taux à long terme. Lorsque les taux étaient à 0 %, les gouvernements pouvaient essentiellement emprunter autant qu’ils le voulaient. Ce n’était pas un gros problème parce que les intérêts ne s’accumulaient pas au fil du temps. À 0 %, si on prend le pourcentage du PIB ou quelque chose du genre, on ne crée pas beaucoup de problèmes. Maintenant, les taux réels sont plus élevés, et cela devient une situation coûteuse.
Les gouvernements doivent s’adapter, comme tout le reste. Lorsque nous parlons de différents aspects, celui-ci est important. Il faut examiner les vraies causes. On ne veut pas simplement dépenser pour dépenser. Alors, oui, je suis d’accord avec les deux parties de cette déclaration.
[Français]
La sénatrice Bellemare : Bienvenue chez nous, monsieur Beaudry. J’ai une question concernant l’efficacité de la politique monétaire dans un contexte de taux d’intérêt réel plus élevé.
Plusieurs économistes le disent actuellement : ce n’est pas demain qu’on reverra les taux d’intérêt qu’on a connus avant la pandémie. À cette époque, on se rappelle que les taux d’intérêt réel étaient négatifs.
Si on a des taux d’intérêt plus élevés à l’avenir et que cette situation devient normale, qu’est-ce que cela dit sur l’efficacité future de la politique monétaire s’il y a des poussées inflationnistes?
Est-ce que, à ce moment-là, augmenter encore les taux pour combattre l’inflation se ferait à un coût prohibitif? Quels sont vos commentaires sur l’efficacité de la politique monétaire à l’avenir?
M. Beaudry : Je dirais que l’efficacité peut encore exister. Si on défend l’efficacité, la capacité de contrôler la vitesse de l’économie et de contrôler l’inflation, je ne vois pas pourquoi le fait de se trouver dans une situation de taux d’intérêt réel un peu plus élevé réduirait cette efficacité. En fait, cela pourrait même l’augmenter, en ce sens que cela prendra peut-être moins de grands changements dans les taux d’intérêt pour faire l’ajustement nécessaire.
Je ne vois pas pourquoi l’efficacité deviendrait plus inefficace.
D’un autre côté, ce qui pourrait être difficile, c’est une combinaison de facteurs dans l’environnement. Par exemple, on commence à voir des changements sur le marché immobilier — en ce moment, tout est tellement chaud qu’on ne pense même pas que le prix des maisons pourrait rebaisser.
Par contre, d’ici quelques années, il pourrait y avoir des changements importants. La situation deviendrait compliquée s’il y avait un ajustement du côté des prix des maisons et s’il y avait de l’inflation, et s’il fallait remonter les taux en même temps. Ce ne serait pas facile. Je pense que ce sont des situations qu’il faudra envisager. Je ne crois pas que cela va nécessairement arriver, mais je ne crois pas que je remettrais en question l’efficacité comme telle.
La sénatrice Bellemare : Vous croyez que c’est le taux de chômage qui va augmenter le coût de la politique monétaire?
M. Beaudry : Du côté de l’efficacité, il se pourrait qu’on ait besoin d’augmenter seulement un peu les taux d’intérêt pour faire exactement l’ajustement nécessaire. C’est toujours le marché du travail qui fait une grosse partie de l’ajustement. C’est comme cela que fonctionne la politique monétaire, mais je ne crois pas que cela changerait beaucoup.
Vous voyez peut-être les choses différemment.
La sénatrice Bellemare : Merci.
[Traduction]
Le sénateur C. Deacon : Merci beaucoup d’être des nôtres, monsieur Beaudry.
Je veux me concentrer sur l’effet des taux d’intérêt sur les exportateurs et sur le dollar canadien et le dollar américain. Il joue un grand rôle. J’en ai certainement beaucoup profité lorsque 1 dollar américain donnait 1,60 dollar canadien. Il était facile d’augmenter les ventes. C’était merveilleux jusqu’aux sept ou huit années suivantes, après l’année 2000, où le dollar a atteint la parité; je n’avais pas les mêmes avantages, et la croissance des ventes était un peu plus difficile.
Nous avons un taux de change de l’ordre de 1,30 dollar canadien ou de 1,40 dollar canadien pour 1 dollar américain depuis environ sept ans. Au moment où nous dissocierons notre politique de taux d’intérêt — si nous le faisons — de celle des États-Unis, avez-vous bien réfléchi aux répercussions à cet égard? Parce que cette mesure peut certainement avoir un effet important sur les entreprises.
M. Beaudry : Tout à fait. L’un des grands risques que je remets en question en ce moment, c’est la différence de vitesse entre le Canada et les États-Unis et la façon dont le taux de change s’adaptera à cette différence. Actuellement, aux États-Unis, tout pointe vers un report de la réduction des taux d’intérêt. Il se peut que ce pays conserve les taux actuels, ou des taux qui s’en rapprochent, pendant un certain temps. La situation pourrait changer, l’économie pourrait ralentir considérablement aux États-Unis, mais, à l’heure actuelle, elle croît très rapidement et l’inflation ne diminue plus, alors les taux pourraient stagner.
Au Canada, tout pointe vers une réduction de certains des taux. Comme notre marché hypothécaire est très différent, les taux d’intérêt ont touché les ménages beaucoup plus rapidement, et cela a vraiment ralenti l’économie canadienne. Alors nous pourrions réduire les taux. Lorsque l’écart entre les taux canadiens et américains devient assez important, donc si les taux commencent à augmenter de 50, 75 ou 100 points de base, on commence généralement à avoir une dépréciation du dollar canadien. Or, cette situation aide et nuit à différentes parties. En tant qu’exportateurs, elle nous aide à l’égard de certains aspects; en tant que consommateurs, il y a des parties qui sont difficiles, et il y a l’inflation qui fait augmenter directement le prix de beaucoup de biens importés. Alors il y a beaucoup de répercussions, et c’est l’un des risques qui, selon moi, est présent en arrière-plan.
Pour l’avenir, si nous avons cet aspect de deux vitesses entre le Canada et les États-Unis, je crains qu’il y ait un ajustement du taux de change. Et il n’y a pas qu’un bon côté. Vous avez parlé du bon côté des choses, mais nous importons beaucoup de marchandises d’équipement qui coûtent de plus en plus cher, alors ce n’est pas aussi simple que cela.
Le sénateur C. Deacon : J’aimerais poursuivre brièvement, madame la présidente.
À mes yeux, c’est un peu le risque. Les États-Unis connaissent une croissance exceptionnelle au chapitre de la productivité, contrairement au Canada. Si les ventes augmentent et que tout a l’air bien beau parce qu’on se fonde uniquement sur les taux d’intérêt, le problème, c’est que le coût des biens que nous importerons sera beaucoup plus élevé, ce qui créera une pression inflationniste. À un moment donné, il pourrait y avoir une faille dans le système qui serait très inquiétante si nous nous permettions de trop nous dissocier des taux américains.
M. Beaudry : Je suis entièrement d’accord avec vous. J’ai mentionné un peu dans ma déclaration préliminaire que c’est précisément l’une des raisons pour lesquelles la baisse des taux pourrait être plus lente au Canada. Une fois que nous nous serons un peu éloignés des taux américains, je pense que la pression va augmenter. On ne peut pas trop s’éloigner sans qu’il y ait un très gros rajustement du dollar canadien. Oui, je suis tout à fait d’accord pour dire que c’est un danger et, dans un certain sens, il faut que certains aspects de la croissance reviennent au Canada afin que l’on soit plus aligné et que l’on échappe à ce risque. Mais il n’est pas facile de voir d’où viendra cette croissance.
La sénatrice Martin : Merci, monsieur Beaudry. Dans votre discours de juin 2023 devant la Chambre de commerce du Grand Victoria, vous avez laissé entendre que les taux d’intérêt au Canada pourraient, à long terme, demeurer plus élevés qu’ils ne l’étaient avant la pandémie. Nous en avons parlé. Vous avez mentionné quatre forces clés qui ont maintenu les taux d’intérêt à un niveau plus bas dans les années qui ont précédé la pandémie et qui ont maintenant changé après la pandémie.
Ma question est la suivante : en plus de ces quatre éléments, quel rôle ou quel impact l’augmentation de la dette publique joue-t-elle dans ces perspectives? L’augmentation de la dette publique exacerbera-t-elle les efforts visant à faire baisser les taux d’intérêt? Si c’est le cas, dans quelle mesure s’agira-t-il d’un facteur?
M. Beaudry : Si nous regardons un grand nombre des aspects des taux à long terme, c’est vraiment le marché international. La dette a de l’importance, mais presque comme un aspect international, parce que tous les marchés de capitaux ouverts font en sorte qu’une grande part de celle-ci est déplacée au-delà des frontières et ce genre de choses. Alors, en ce qui concerne l’incidence de la dette canadienne sur les taux canadiens à long terme, ce n’est pas un effet important. Si nous en arrivions à un stade où on aurait un sentiment de défaut de paiement au Canada ou l’impression que le pays ne peut pas rembourser sa dette, ce serait différent. Mais la simple masse de la dette canadienne ne change pas grand-chose.
Là où la dette change la donne, c’est lorsque l’on regarde tous les pays ensemble, c’est-à-dire le Canada, les États-Unis, l’Europe, le Japon, qui contractent une dette considérable qui, cumulativement, joue un rôle dans le système global… encore une fois, lorsque je parlais de cet équilibre entre l’épargne et l’investissement, il s’agit de l’épargne et de l’utilisation de ces différentes choses. S’il y a de plus en plus d’objets à détenir, la dette globale dans le monde joue un rôle. Alors, l’une des forces qui feront grimper ces taux à long terme, c’est le montant de la dette, mais à l’échelle mondiale. Donc, pour ce qui est de la partie canadienne, à moins que nous en arrivions à un stade où nous commençons à craindre de ne pas pouvoir la rembourser et où les gens en arrivent à perdre confiance, je ne pense pas qu’elle ait un effet important sur les taux à long terme.
La sénatrice Martin : Eh bien, cette réponse nous donne une certaine assurance, mais, en même temps, je sais que le coût du service de la dette augmente, ce qui préoccupe grandement les Canadiens.
Pour revenir en arrière, nous disions que l’inflation est toujours bien présente aux États-Unis. En juin dernier, Statistique Canada a publié un rapport selon lequel les importations en provenance de ce pays peuvent influer sur l’inflation intérieure du Canada dans une proportion pouvant atteindre 50 %. Vous avez répondu plus tôt au sénateur C. Deacon, et je me demande à quel point cette possibilité devrait nous préoccuper.
M. Beaudry : Selon moi, il s’agit d’une préoccupation importante. Le parcours a toujours pris un certain temps. Sa durée dépend un peu de la vitesse. Encore une fois, je crains fort que, si le Canada et les États-Unis maintiennent ces vitesses très différentes, il y ait des pressions pour que nous réduisions les taux, puis il y a le taux de change, et nous avons parlé des biens importés et du fait qu’ils reviennent, et nous nous retrouvons avec un réel problème. Alors, je m’inquiète à cet égard. Il faudra voir comment les choses vont se dérouler.
Pourtant, aux États-Unis, la croissance va bon train. Je pense qu’elle se maintiendra pendant un certain temps, mais elle pourrait ralentir. Bien d’autres personnes pensent qu’il y aura un peu plus de ralentissement, et une reprise un peu plus importante au Canada. Nous pourrions ne pas tellement diverger et bien nous porter; cependant, si nous divergeons et continuons de le faire, je comprends les inquiétudes que vous exprimez, et il pourrait falloir ajuster le taux de change. Parfois, nous voyons des choses sur le marché des taux de change. Il ne fluctue pas beaucoup depuis plusieurs années — bien qu’il y ait des hauts et des bas —, mais les taux de change ne sont pas non plus constants. Si, soudainement, il y a une mauvaise passe et que tout le monde commence à se dire : « Eh bien, le Canada n’a pas l’air d’un endroit très bien », et ainsi de suite, alors, oui, il pourrait y avoir une fluctuation rapide, et ce ne serait pas bon pour l’inflation.
La présidente : Merci beaucoup.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : Bienvenue, professeur Beaudry. Vous l’avez mentionné : l’économie demeure plus forte que prévu, malgré une inflation légèrement plus élevée de 0,5 % aux États-Unis.
Les Américains arrivent à garder leur économie forte avec une consommation soutenue et des dépenses d’entreprise et d’administration publique qui demeurent robustes. Pourquoi le Canada n’arrive-t-il pas au même résultat?
Je sais que mon collègue le sénateur Deacon a parlé de nos difficultés de productivité, mais y a-t-il d’autres facteurs qui expliquent que nous avons un plus piètre résultat économique?
M. Beaudry : Certainement. Il y a deux choses différentes. Plus fondamentalement et à plus long terme, je pense que la productivité est l’un de ces éléments.
La réponse exacte à la question de savoir pourquoi on a ce déficit de productivité... Je peux vous donner des idées, mais je n’ai pas de boule de cristal. Si je pouvais répondre à ce défi, ce serait extraordinaire.
D’un côté direct et à court terme, on a un système d’hypothèque qui est très différent de celui des États-Unis. Donc, le ralentissement qui est plus important au Canada qu’aux États-Unis n’est pas vraiment surprenant, car on a ici beaucoup plus d’hypothèques à court terme et beaucoup plus de gens qui contractent des hypothèques à taux variables. L’augmentation des taux d’intérêt est assez semblable aux États-Unis et au Canada, mais ici, cela frappe beaucoup plus de gens ou de ménages directement, disons, à cause de certains de leurs frais. Aux États-Unis, à l’opposé, il y a beaucoup de gens qui ne seront presque pas affectés. Ils peuvent avoir des hypothèques de 20 à 25 ans à taux fixe, ce qui fait qu’il y a peu de personnes qui sont affectées directement.
Je pense qu’à court terme, on comprend bien pourquoi les mêmes taux d’intérêt ont beaucoup plus affecté le Canada. À plus long terme, cette croissance est vraiment basée sur la productivité. C’est une bonne question et c’est un défi très important pour le Canada.
La sénatrice Miville-Dechêne : Donc, vous avez dit que vous ne vouliez pas en parler, mais pourquoi ne vous risquez-vous pas à nous expliquer pourquoi vous croyez que notre productivité est plus basse que celle des États-Unis?
M. Beaudry : Je peux en parler, mais il faut regarder chaque élément et regarder de tous les côtés.
Le plus frappant, c’est que quand on divise les différents secteurs à travers le Canada, on s’aperçoit que les secteurs à grande productivité aux États-Unis, qui incluent le secteur de la haute technologie et de l’informatique, sont beaucoup plus importants de ce côté. Les secteurs qui ont été les plus performants aux États-Unis sur le plan de la productivité sont des secteurs relativement plus petits au Canada.
La question est de savoir pourquoi on n’a pas réussi avec le temps à investir davantage dans ces secteurs et pourquoi on est resté dans des secteurs où la productivité augmente moins. Il faut un changement ou un transfert dans l’économie pour se diriger vers ces secteurs.
Ce n’est pas facile — ce n’est pas comme si on n’y allait pas du tout, mais c’est quand même relativement lent.
La sénatrice Miville-Dechêne : Merci.
[Traduction]
La présidente : Monsieur Beaudry, je voudrais vous demander votre avis au sujet d’une question que personne n’a soulevée. Il y a une semaine ou 10 jours, j’ai lu les observations de la première sous-gouverneure, Carolyn Rogers. Elle parlait de productivité, mais aussi de l’économie en général. Elle a dit : « Vous connaissez les affiches qui disent : “En cas d’urgence, cassez la vitre”? Eh bien, le temps est venu de casser la vitre. »
Vous savez mieux que quiconque que les représentants de la Banque du Canada parlent rarement aussi franchement. Avez-vous été surpris, et êtes-vous d’accord?
M. Beaudry : Je ne suis certainement pas surpris, et je pense que je suis d’accord. S’il existe un enjeu important pouvant réunir au Canada beaucoup de gens qui peuvent s’entendre sur le fait qu’il y a un problème de productivité, c’est bien le bien-être à long terme des Canadiens. Il est très difficile d’imaginer qu’il puisse y avoir une hausse du niveau de vie au Canada sans qu’il y ait d’augmentation.
Souvent, il est beaucoup plus facile de penser aux problèmes à court terme. Ceux-ci sont à long terme. S’il faut en parler, ce sont des choses auxquelles nous devons trouver des solutions qui ne sont pas nécessairement faciles. Il y a beaucoup de tensions entourant la recherche de solutions et les coûts que nous sommes prêts à réduire ailleurs pour y parvenir.
Oui, c’est l’un des plus grands défis pour le Canada qui doit réfléchir à ce qu’il va faire et le déterminer maintenant. Il y a la transition climatique qui s’ajoute à cela, alors nous devons réfléchir, dans ce contexte, à la façon dont nous allons procéder et faire en sorte que la productivité augmente davantage. En outre, ce n’est pas seulement par rapport aux États-Unis. C’est par rapport à presque toutes les économies avancées. Nous sommes au bas de l’échelle. L’Italie semble faire aussi piètre figure que nous, mais c’est à peu près tout.
La présidente : Comment interprétez-vous l’expression « casser la vitre »?
M. Beaudry : Ce n’était pas une proposition de solution. Elle a dit qu’il fallait « casser la vitre », sans dire ce qu’il y avait de l’autre côté.
Je pense que cela signifie qu’on doit veiller à ce qu’aucun sujet ne soit tabou, ouvrir la discussion sur tous les fronts et dire : « Faisons preuve d’ouverture, formons un seul et même groupe, réfléchissons à cela, allons de l’avant, brassons des idées et essayons de trouver une solution. » Il n’y a pas lieu de se retenir à cet égard. Je ne vois pas d’autre signification à l’expression « casser la vitre » à ce moment-ci.
La présidente : Cela ressemble à ce que demande le comité des banques dans tous les rapports qu’il a produits récemment.
Le sénateur Yussuff : Merci d’être ici, monsieur Beaudry.
Comme vous le savez, nous parlons des taux de la banque nationale par rapport aux efforts en vue de contenir l’inflation. Selon un certain nombre d’économistes, les taux élevés de la banque contribuent à l’entêtement à réduire l’inflation, étant donné que beaucoup de gens, par leurs hypothèques et leur capacité à rembourser leur dette, doivent endurer cela. En soi, cela contribue à l’inflation. La banque semble faire la sourde oreille jusqu’à maintenant, car elle ne pense pas avoir à s’efforcer de faire comprendre aux Canadiens qu’il s’agit d’un problème qu’ils doivent régler eux-mêmes.
L’inflation globale diminue, mais si les taux ne commencent pas à baisser de façon importante, la banque ne contribue-t-elle pas également à l’inflation, avec laquelle les Canadiens sont aux prises au quotidien?
M. Beaudry : Sur le plan technique, vous avez tout à fait raison. C’est un effet secondaire de la politique monétaire. Une partie de cela entraîne une hausse des taux, ce qui comprend les coûts hypothécaires qui entrent en ligne de compte dans l’inflation. Cependant, je pense que c’est une vision trop étroite. C’est comme un traitement contre le cancer qui entraîne des effets secondaires. Certains de ces effets secondaires sont très désagréables. En même temps, cela ne veut pas dire que vous allez renoncer à ce remède. Vous constatez ces effets secondaires et vous trouvez une solution. Vous ne voulez pas que les effets secondaires priment sur le traitement proprement dit, alors vous les gardez à l’œil. Bon nombre des mesures de base ne prennent pas en compte ces taux d’intérêt, de sorte que nous examinons des biens qui n’incluent pas les éléments que nous cherchons à examiner.
C’est exactement ce que la banque essaie de faire, c’est-à-dire éliminer certains de ces éléments, les faire passer et déterminer s’il s’agit de forces sous-jacentes qui éliminent cela et qui nous ramènent en arrière. Oui, cette politique sur l’inflation a des effets secondaires indirects, mais je ne pense pas que l’inflation sous-jacente soit principalement attribuable à cette force.
Le sénateur Yussuff : Bien sûr. Ce n’est pas ce que j’ai dit. Je dis simplement que cela y contribue.
M. Beaudry : Exactement. Je suis tout à fait d’accord avec vous. Comme je l’ai dit, cela y contribue. C’est comme un autre type de traitement entraînant des effets secondaires. Vous ne voulez pas que les effets secondaires soient pires que le traitement, mais vous avez les deux en même temps et vous essayez de trouver un équilibre.
La présidente : Merci.
Il y a quelque chose que j’ai oublié de dire plus tôt, alors je vais le dire maintenant, et je le ferai de nouveau à notre prochaine réunion, à titre de rappel à tous.
Bien qu’il soit facile de l’oublier, tous les débats publics des comités sont sous-titrés en temps réel par des sténographes parlementaires professionnels. Les sous-titres permettent aux membres du public, surtout ceux qui sont sourds ou malentendants, de suivre nos délibérations. Ces sous-titres servent également à préparer les transcriptions officielles des réunions.
Je vais maintenant prendre un moment pour saluer et remercier les sténographes parlementaires, soit Mary, Caroline, Mariann et Guylaine. Elles ne sont pas présentes avec nous dans la salle, mais elles suivent de près les discussions d’aujourd’hui et les rendent accessibles à tous les gens qui nous regardent.
Nous pouvons aider les téléspectateurs à suivre nos débats en parlant un à la fois, en évitant d’alterner entre l’anglais et le français pendant une intervention et en réduisant au minimum les bruits de fond. Ces pratiques exemplaires aideront le personnel à assurer l’exactitude de l’interprétation, de la transcription et du sous-titrage des délibérations.
Je rappelle une fois de plus qu’il ne s’agit pas de trop ralentir notre débit, mais une prononciation claire aide tout le monde.
Il nous reste environ 20 minutes, et nous allons procéder à un bref deuxième tour.
Le sénateur Loffreda : Monsieur Beaudry, j’ai sous les yeux une entrevue que vous avez récemment accordée à la CIBC, le 30 janvier 2024. En tant qu’ancien sous-gouverneur de la Banque du Canada et sommité de longue date du milieu universitaire canadien, vous avez grandement contribué aux décisions de la Banque du Canada de 2019 à 2023. Les rapports de recherche que vous avez produits et les discours que vous avez prononcés en tant que sous-gouverneur de cette institution sur les perspectives à long terme des taux d’intérêt sont intéressants.
J’aimerais avoir des précisions. Compte tenu de l’environnement actuel, et en mettant vos recherches en contexte, pouvez-vous nous dire non seulement à quel niveau les taux d’intérêt vont s’établir, mais aussi à quel niveau ils devraient s’établir?
M. Beaudry : Pour ce qui est du « devraient », il y a un aspect qui concerne le niveau auquel nous voulons que les choses se situent. Je ne sais pas si elles seront là où je le pense. L’orientation des taux à long terme est beaucoup plus déterminée à l’échelle internationale. C’est un peu comme prédire l’orientation du prix du pétrole; c’est quelque chose d’international. À long terme, les taux d’intérêt sont déterminés par les marchés internationaux.
Il est difficile de répondre à cette question du « devraient ». C’est pourquoi cela revient à la situation actuelle, où nous voyons les forces avec lesquelles nous devons composer en tant que Canadiens, en considérant cela comme l’environnement général dans lequel nous évoluerons et en nous préparant pour cela. Pour revenir à cet aspect, les taux d’intérêt pourraient revenir aux niveaux d’avant la pandémie, mais la plupart des indicateurs me laissent penser qu’ils risquent de ne pas revenir tout à fait à ces niveaux, même si cela n’est pas impossible pour autant. Nous devons nous préparer à cela à tous les échelons — à l’échelon des ménages, des entreprises et des gouvernements — et en tenir compte. Mais je ne pense pas que nous devrions essayer de réfléchir au niveau où ils devraient être. Le monde est ce qu’il est, et il nous donnera les taux d’intérêt avec lesquels nous devrons composer.
Le sénateur Loffreda : Si je pose la question, c’est à cause des niveaux d’endettement des gouvernements partout dans le monde et du niveau d’endettement des consommateurs canadiens. Pensez-vous que nous pourrions supporter des taux d’intérêt élevés à long terme?
M. Beaudry : Pour réfléchir à cela, nous pouvons examiner les ménages, les entreprises et le gouvernement.
En ce qui concerne les ménages, certains d’entre eux — ceux qui trouvent actuellement une façon de s’en sortir — seront incapables de supporter ce régime de taux d’intérêt élevés. Oui, il y aurait un rajustement. Si les taux d’intérêt demeurent élevés, il faudra rajuster le prix de certaines maisons au Canada pour rendre le logement plus abordable, car c’est un sous-produit de cela. Nous devons réfléchir à ce rajustement et nous y préparer. Là encore, je ne suis pas en train de dire qu’il y aura un effondrement complet ou quelque chose de ce genre. C’est simplement que le ratio du service de la dette est très élevé.
Il en va de même pour les gouvernements. Si les taux d’intérêt demeurent élevés, le ratio du service de la dette est plus élevé, ce qui signifie qu’il doit y avoir des rajustements sur d’autres fronts et des réductions de dépenses ailleurs. De véritables rajustements doivent être faits sur plusieurs fronts.
En même temps, si vous examinez la situation financière des Canadiens en général… Là encore, je tiens à préciser que certains ne pourraient pas se payer cela, mais de nombreux Canadiens le pourraient. Cela ne veut pas dire qu’ils seront heureux de le pouvoir, mais la réalité, c’est que la situation financière de nombreux ménages canadiens qui possèdent des maisons et des biens est très bonne à l’heure actuelle. Il y a beaucoup de marge de manœuvre, de sorte que les gens pourront survivre à cela, mais ce ne sera pas agréable.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les taux d’intérêt ne disparaissent pas. Ils vont vers d’autres ménages qui font aussi de l’argent. Il y a toutes sortes d’éléments qui s’équilibrent au bout du compte, mais il s’agit d’un véritable défi à certains égards. S’ils demeurent élevés, il y a un sous-ensemble de ménages qui trouveront cela très difficile. Les gouvernements auront aussi beaucoup de rajustements à faire, car ils se sont habitués à un environnement où les taux sont très bas.
[Français]
Le sénateur Gignac : J’aimerais aborder un sujet qui n’a pas été abordé jusqu’ici : la démographie, l’immigration et son rôle. Le Canada connaît la croissance la plus forte depuis 1967, et 98 % de cette croissance sont liés à l’immigration.
J’aimerais comprendre l’impact de l’immigration sur les gains en matière de productivité. Les entreprises semblent recourir davantage aux immigrants temporaires pour combler leurs besoins sur les ventes au lieu d’investir. Est-ce positif ou négatif sur le plan de la productivité, cette hausse importante des travailleurs temporaires, et quel est l’impact sur le taux neutre? Je sais que c’est un concept abstrait d’économiste. Est-ce que tout cela a un impact à la hausse ou à la baisse? Si on prend le PIB per capita, on est actuellement en récession; le PIB per capita est revenu au niveau de 2016.
M. Beaudry : Il y a deux questions qui concernent l’immigration en général et la poussée récente des travailleurs temporaires. À mon avis, la productivité et la vitesse d’immigration sont deux choses différentes. L’immigration ne vient pas aider ni réduire la productivité. Il y a beaucoup de côtés positifs à l’immigration, comme la diversité et d’autres éléments, mais si on veut assurer une croissance de la productivité, ce n’est pas la façon de résoudre le problème.
À court terme, en particulier lorsqu’il y a beaucoup de travailleurs temporaires — qui ne sont pas les travailleurs les plus qualifiés —, cela réduit mécaniquement la productivité au Canada.
Si on regarde le lien entre la croissance de productivité et la population à travers les pays, essentiellement, c’est zéro. Ce n’est pas comme cela qu’on réussit à avoir de la croissance. Quelle était votre deuxième question?
Le sénateur Gignac : Est-ce qu’il y a un impact sur le taux neutre?
M. Beaudry : Les déficits ou la dette canadienne pour le taux neutre sont davantage déterminés à l’échelle internationale. L’immigration au Canada affecte le taux neutre de façon très minimale. C’est pour la même raison que je pense que la dette nationale, à moins d’être au bord de la faillite, ne crée pas beaucoup de problèmes par rapport au taux neutre.
Il faut savoir comment vivre avec ce taux qui est déterminé à l’international.
La sénatrice Bellemare : Je vous ramène à votre ancienne vie de banquier à la Banque du Canada. J’imagine que vous vous intéressez toujours à ce sujet.
Quelle est votre opinion sur le fait qu’on observe que de plus en plus de banques centrales ont des comités de la politique monétaire composés de membres externes? Dans certains pays, le nombre de membres externes est même plus élevé que celui des membres internes.
Ne croyez-vous pas que si le Canada faisait cela, cela résoudrait certains problèmes par rapport à la politique monétaire d’aujourd’hui? Comme le disait Tiff Macklem lui-même, on ne peut plus se fier aux modèles économétriques. L’incertitude est omniprésente et le fait de prendre des décisions en petit groupe dont les membres pensent tous pareil fait augmenter la probabilité de se tromper. Si on avait une politique monétaire plus réfléchie, avec des experts en matière monétaire et économique qui sont issus de milieux différents, est-ce que ce serait préférable? Qu’en pensez-vous?
M. Beaudry : Je crois que c’est une bonne idée d’avoir un peu plus de diversité dans le comité au sein de la banque centrale. Mélanger des personnes de l’interne et de l’externe est une bonne idée. D’un autre côté, je dirais que j’appuie cette idée, car il y a eu un petit mouvement dans cette direction avec l’ajout d’un membre de l’externe. Cela bouge un peu dans cette direction.
Il y en aura peut-être un autre qui s’ajoutera à l’avenir. C’est une très bonne idée. Si on regarde les pays qui ont une diversité au sein de ces comités et les décisions qu’ils ont prises dans les dernières années, je ne vois pas de corrélation. Je pense que c’est une bonne idée, mais je ne crois pas que cela changerait beaucoup les décisions finales.
Je ne crois pas que les pays qui ont une plus grande diversité de membres prennent des décisions très différentes des autres pays.
La sénatrice Bellemare : Lorsqu’on pense que le problème de la productivité est très grave au Canada, croyez-vous que le Canada a eu pendant trop longtemps des taux d’intérêt réels beaucoup plus élevés que la moyenne des autres pays? Est-ce qu’il y a une relation entre les taux d’intérêt réels plus élevés et la faiblesse de l’investissement et de la productivité?
M. Beaudry : Il y a certainement un élément, mais je ne crois pas que c’est un élément essentiel. Cela fait longtemps qu’on a eu des taux d’intérêt bas, donc on aurait dû se reprendre à ce moment-là.
[Traduction]
Le sénateur C. Deacon : Merci beaucoup, monsieur Beaudry. Dans son discours, Mme Rogers est entrée dans les détails. J’étais content de ce que j’ai vu à cet égard. La nécessité d’investir pour remédier à la disparité entre les besoins en main-d’œuvre et les compétences professionnelles au Canada — surtout chez les nouveaux Canadiens —, l’attention insuffisante accordée aux applications de technologie à forte valeur ajoutée dans l’ensemble de notre économie, les investissements insuffisants dans les secteurs de la propriété intellectuelle et de la machinerie, ainsi que la position stratégique proconcurrentielle limitée qui est la nôtre depuis longtemps, qui a effectivement protégé les oligopoles et qui a entraîné une forte concentration des entreprises. Il s’agit là de quatre points clés auxquels nous avons consacré beaucoup de temps au sein du comité. En juin dernier, nous avons publié un rapport qui portait plus particulièrement sur les trois derniers points.
Nous mettons beaucoup l’accent sur la transition d’une économie fondée sur les biens matériels et l’exportation de ces biens vers une économie fondée sur les données et les biens numériques. Pouvez-vous nous dire quelques mots là-dessus, du point de vue de la nécessité d’accroître les recettes et la productivité par heure de travail des Canadiens afin de pouvoir protéger la prospérité dans l’avenir?
M. Beaudry : Je suis d’accord en ce qui concerne les problèmes. Il est facile de dire que nous n’investissons pas suffisamment là-dedans. La question, dans un certain sens, est la suivante : s’il s’agit là du symptôme, pourquoi n’investissons-nous pas? Pourquoi ne le faisons-nous pas? Le simple fait de constater qu’il y a une discordance… À tout le moins, c’est ce que nous voulons, mais nous voulons aussi comprendre les causes plus profondes. Il existe différentes hypothèses, mais il est difficile d’obtenir les éléments et de comprendre pourquoi les entreprises canadiennes n’offrent pas davantage de programmes de formation, comme cela se fait dans d’autres pays. Pourquoi n’investissent-elles pas dans certains domaines? C’est très intrigant. À coup sûr, le problème se trouve là, mais il est un peu plus difficile de trouver une solution.
Je suis tout à fait d’accord avec vos propos. Vous voulez un système concurrentiel. En même temps, lorsque nous examinons l’une des raisons, simplement en examinant d’un point de vue technique les différences sur le plan de la distribution, nous constatons que les grandes entreprises sont un secteur très productif. C’est l’une des raisons pour lesquelles les États-Unis sont productifs : il y a de très grandes entreprises. Il est vrai que nous avons protégé un trop grand nombre de nos grandes entreprises, mais cela ne signifie pas que nous ne voulons pas de grandes entreprises.
Nous avons ce problème au Canada. D’une part, nous voulons de grandes entreprises et être concurrentiels, mais d’autre part, nous ne sommes pas très gros et nous ne pouvons pas avoir beaucoup de grandes entreprises concurrentielles. Nous aimerions bien les avoir, mais c’est le compromis à faire. Nous jouons toujours sur ces deux tableaux : comment créer un chef de file canadien qui est véritablement grand, mais qui ressent la concurrence de l’extérieur, tout en lui permettant d’être grand à l’intérieur du Canada. C’est ce que nous voulons faire, plutôt que de dire qu’au Canada, nous allons simplement réduire la taille de toutes les entreprises parce que nous ne deviendrons presque certainement pas très productifs.
Le sénateur C. Deacon : Si nous pouvions demander à notre merveilleuse et dévouée greffière d’envoyer un lien vers notre rapport de juin pour que nous puissions obtenir des commentaires à ce sujet, ce serait très apprécié. Je pense que nous vous en serions tous reconnaissants, monsieur Beaudry. Merci.
La présidente : Nous allons le faire.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : J’aimerais savoir ce que vous pensez de ce que les analystes de la Financière Banque Nationale, Matthieu Arseneau et Alexandra Ducharme, ont écrit récemment, et je les cite :
[...] les données officielles sous-estiment les progrès réalisés par la Banque du Canada dans la maîtrise de l’inflation, ce qui crée un risque que la banque centrale calibre sa politique monétaire de manière trop restrictive.
Pensez-vous que ces deux analystes ont raison?
M. Beaudry : Je ne crois pas, et même si je ne suis plus là, je crois que tout le groupe à la Banque du Canada essaie de prendre toutes ces mesures et de prendre l’information. Je crois que ce qui est difficile, c’est de savoir à quel point on trouve vraiment important de revenir à notre cible de 2 %. Donc, si on est très attaché à cette cible, il faut être assez prudent pour ramener le côté de l’inflation. Ce serait facile d’avoir une inflation qui devient galopante ou se stabiliserait à 4 ou 5 %.
Les Canadiens ne sont pas heureux avec une inflation à 4 ou 5 %; ils veulent qu’elle revienne à 2 %. Pour être certain que cela se produise, il faut être assez prudent. Si on prend les mesures qu’on aime le plus pour changer des choses, on retournera peut-être en contexte d’inflation.
J’ai l’impression que oui, c’est difficile; je crois qu’on est tout près d’avoir des baisses de taux, mais je suis très heureux de voir les progrès qui ont été faits dernièrement.
Je suis beaucoup plus confiant maintenant, car il y a une baisse par rapport à l’ensemble des mesures relatives à l’inflation, et je crois que c’est beaucoup plus probable qu’on va revenir à la cible de 2 %.
La sénatrice Miville-Dechêne : Merci.
[Traduction]
La présidente : Merci beaucoup, monsieur Beaudry. Nous vous remercions vraiment de votre contribution. M. Beaudry est l’ancien sous-gouverneur de la Banque du Canada. Il a occupé ce poste de 2019 à 2023, et il enseigne maintenant à l’École d’économie de Vancouver de l’Université de la Colombie-Britannique.
Ainsi, en ce jour où la Banque du Canada a communiqué une décision, nous sommes heureux d’avoir pu recueillir vos commentaires sur ses tenants et aboutissants.
Merci pour votre témoignage d’aujourd’hui.
Je vais poursuivre un moment avec le groupe qui est ici. Je le dis simplement pour que tout le monde soit au courant de ce que nous allons faire.
Merci, monsieur Beaudry.
M. Beaudry : Merci. Ce fut un véritable plaisir.
La présidente : [Difficultés techniques]. Si nous discutons avec le gouverneur de la banque, nous aborderons un large éventail de sujets. Mais ces questions ont été soulevées. Nous avons essayé d’intégrer cela.
Le sénateur Gignac : [Difficultés techniques]. Est-ce lié au projet de loi de Rosa Galvez? Corrigez-moi si je me trompe. C’est le 8 mai.
La présidente : Oui. Nous allons traiter de cette question. Nous ne savons pas à quoi nous attendre pour l’instant, mais des mesures budgétaires nous seront évidemment communiquées, et trois projets de loi de la Chambre des communes nous seront probablement soumis avant la fin de juin également. L’horaire est très chargé.
Le sénateur Loffreda : De plus, madame la présidente, le 18 avril, l’Alliance sur le carbone d’origine agricole…
La présidente : Je viens de le mentionner, oui.
Le sénateur Loffreda : La sénatrice Galvez est au courant, car j’ai envoyé un message texte à ce sujet. Je communique constamment avec elle au sujet de ce qui s’en vient pour nous.
La présidente : C’est notre ordre du jour pour l’instant. Nous couvrons tous les sujets que nous devons examiner, et nous serons occupés d’ici la fin de juin. Je vous remercie tous de votre participation. Sur ce, nous allons mettre fin à la réunion, et je demande aux membres du comité de direction de rester parmi nous.
(La séance est levée.)