LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 2 juin 2022
Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-5, Loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé.
Le sénateur Paul J. Massicotte (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Je m’appelle Paul Massicotte, je suis un sénateur du Québec et je suis président du comité.
Aujourd’hui, nous tenons une séance hybride du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.
J’aimerais présenter les membres du comité qui participent à la réunion aujourd’hui : Margaret Dawn Anderson, des Territoires du Nord-Ouest; David Arnot, de la Saskatchewan; Claude Carignan, c.p., du Québec; Pierre Dalphond, du Québec; Rosa Galvez, du Québec; Stan Kutcher, de la Nouvelle-Écosse; Mary Jane McCallum, du Manitoba; Julie Miville-Dechêne, du Québec; Judith Seidman, du Québec; Karen Sorensen, de l’Alberta; Josée Verner, c.p., du Québec.
Bienvenue à tous, chers collègues, ainsi qu’à tous les Canadiens et Canadiennes qui nous regardent.
Aujourd’hui, nous continuons l’article par article du projet de loi S-5, Loi sur le renforcement de la protection de l’environnement pour un Canada en santé.
[Traduction]
Avant de commencer, j’aimerais signaler la présence sur Zoom de représentants du gouvernement, au cas où les membres auraient des questions techniques à soulever pendant que nous étudions le projet de loi article par article.
[Français]
Nous accueillons aujourd’hui des représentants d’Environnement et Changement climatique Canada : M. John Moffet, sous-ministre adjoint, Direction générale de la protection de l’environnement; Mme Laura Farquharson, directrice générale, Affaires législatives et réglementaires, Direction générale de la protection de l’environnement; Mme Jacqueline Gonçalves, directrice générale, Sciences et évaluation des risques, Direction générale des sciences et de la technologie; M. Bryan Stephens, gestionnaire par intérim, Politique législative, Direction générale de la protection de l’environnement. Nous accueillons également un représentant de Santé Canada : M. Greg Carreau, directeur général, Direction de la sécurité des milieux.
Je voudrais donner des précisions le processus que nous suivrons pendant cette réunion. Si quelqu’un souhaite proposer un amendement, je vous demande de procéder de la manière suivante : si ce n’est pas trop long, lisez d’abord à haute voix le libellé existant de l’article que vous souhaitez amender.
Si plusieurs membres du comité souhaitent modifier le même article, seul le premier sénateur proposant l’amendement pourra lire l’article se trouvant sous la rubrique « débat ». Lisez ensuite votre amendement et expliquez brièvement les raisons de cet amendement. Les questions et les débats suivront, mais soyons brefs, directs et essayons de ne pas nous répéter, s’il vous plaît. Ensuite, nous procédons au vote. Lorsque je demanderai si une motion est adoptée, je demanderai aux membres qui sont en faveur de la motion de lever la main; puis, je demanderai à ceux qui s’opposent à la motion de l’indiquer avec un pouce pointant vers le bas.
Enfin, je tiens à rappeler aux sénateurs que s’ils ont le moindre doute quant aux résultats d’un vote à main levée, la façon la plus harmonieuse d’intervenir est de demander un vote par appel nominal qui aboutira à des résultats clairs. Les sénateurs doivent savoir que, en cas d’égalité des voix, la motion sera rejetée.
J’aimerais apporter une précision concernant les sous-amendements. Un sous-amendement devrait proposer un changement mineur, c’est-à-dire apporter une précision ou corriger une erreur, par exemple, pas modifier complètement le texte ou le dénaturer négativement. Dans ce cas, il sera préférable que vous votiez contre l’amendement proposé et que vous proposiez votre propre amendement.
Je vous rappelle qu’un amendement ou un sous-amendement doit être proposé dans les deux langues officielles. En cas de doute, il vous restera l’étape de la troisième lecture pour proposer vos amendements.
Enfin, en ce qui concerne l’ordre des motions, le bon processus à suivre est le suivant : je demande d’abord s’il y a consentement pour adopter l’article, puis un amendement peut être proposé et, enfin, un sous-amendement.
Le processus de décision doit également suivre un ordre précis. Nous devons d’abord voter sur le sous-amendement, puis sur l’amendement tel que modifié ou non et, enfin, sur l’article tel que modifié ou non.
Nous avons plusieurs motions dont l’étude a été reportée, donc nous allons les garder comme telles. Nous allons procéder immédiatement avec l’article 10.
L’article 10 est-il adopté? Adopté.
Il y a un amendement anticipé de la sénatrice Miville-Dechêne. Vous pouvez y aller.
La sénatrice Miville-Dechêne : Il s’agit du no JMD-S5-10.1-10.3-5-37. Cet amendement fait référence à l’article du projet de loi S-5 qui est le paragraphe 56(1), à la page 5.
[Traduction]
Si vous voulez vous reporter au projet de loi, c’est 56(1), page 5 et voici ce que je propose de changer. Permettez-moi de lire cet amendement très court.
Que le projet de loi S-5 soit modifié à la page 5, par adjonction, après la ligne 37, de ce qui suit :
10.1(1) Le paragraphe 56(1) et le passage du paragraphe 56(2) de la même loi précédant l’alinéa b) sont remplacés par ce qui suit :
56(1) Le ministre :
— et j’insiste sur la suppression du mot « peut ». Avec cet amendement, le libellé est plus directif. Par conséquent, l’amendement se lit comme suit :
Que le projet de loi S-5 soit modifié à la page 5, par adjonction, après la ligne 37, de ce qui suit :
« 10.1 (1) Le paragraphe 56(1) et le passage du paragraphe 56(2) de la même loi précédant l’alinéa b) sont remplacés par ce qui suit :
56 (1) Le ministre :
a) identifie toute personne — ou catégorie de personnes — qui fabrique, importe, transforme ou rejette, ou qui utilise au cours d’une activité de fabrication ou de transformation commerciale l’un ou l’autre des substances ou produits suivants :
(i) une substance — ou un groupe de substances — qui est inscrite sur la liste des substances toxiques de l’annexe 1,
(ii) une substance — ou un groupe de substances — à laquelle les paragraphes 166(1) ou 176(1) s’appliquent,
(iii) un produit contenant ou pouvant rejeter dans l’environnement une substance — ou un groupe de substances — qui est inscrite sur la liste des substances toxiques de l’annexe 1;
b) publie dans la Gazette du Canada et de toute autre façon qu’il estime indiquée un avis obligeant toute personne — ou catégorie de personnes — qu’il a identifiée à élaborer et à exécuter un plan de prévention de la pollution à l’égard d’une question visée aux sous-alinéas (1)a)(i) à (iii).
(1.1) Le ministre peut, pour identifier les personnes ou les catégories de personnes visées à l’alinéa (1)a), publier dans la Gazette du Canada et de toute autre façon qu’il estime indiquée, un avis obligeant toute personne — ou catégorie de personnes — à lui communiquer les renseignements dont elle dispose ou auxquels elle peut normalement avoir accès, notamment les renseignements concernant sa participation à toute activité liée à une question visée aux sous-alinéas (1)a)(i) à (iii).
(2) L’avis visé à l’alinéa (1)b) peut préciser :
a) la substance — ou le groupe de substances — ou le produit;
(2) Le paragraphe 56(5) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
(5) Sur demande écrite du destinataire de l’avis visé à l’alinéa (1)b), le ministre peut exempter celui-ci de l’obligation de prendre en considération tout facteur précisé dans l’avis s’il estime, en se fondant sur les motifs énoncés dans la demande, que cela est déraisonnable ou impossible.
10.2 Le paragraphe 58(1) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
58 (1) Toute personne tenue d’élaborer un plan de prévention de la pollution en application des articles 56 ou 291 ou d’un accord sur les mesures de rechange en matière de protection de l’environnement dépose auprès du ministre, dans les trente jours suivant la fin du délai fixé, selon le cas, par l’avis visé à l’alinéa 56(1)b) — et, le cas échéant, prorogé en vertu du paragraphe 56(3) —, par le tribunal en vertu de l’article 291 ou par l’accord, une déclaration portant que le plan a été élaboré et est en cours d’exécution.
10.3 Le paragraphe 60(1) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
60 (1) Afin de déterminer et d’analyser les mesures de prévention ou de contrôle relatives à une substance — ou un groupe de substances — ou un produit, le ministre peut publier, dans la Gazette du Canada et de toute autre façon qu’il estime indiquée, un avis obligeant les personnes ou catégories de personnes visées par un avis conformément à l’alinéa 56 (1)b) à lui présenter tout ou partie du plan de prévention de la pollution dans le délai qu’il fixe. ».
À partir de ce point, tous les autres paragraphes ont des amendements corrélatifs très courts qui procèdent de la formule « visé à l’alinéa ». Si vous êtes d’accord, je peux arrêter de lire, car la discussion portera là-dessus. Ces amendements sont très courts. Nous avons des exemples comme « À l’alinéa 56(1)b) », donc je ne pense pas que je doive lire tout le texte. Je tiens ici à m’expliquer plus avant.
Il s’agit de prévention. Nous avons parlé depuis le début de cette étude article par article de la toxicité de ces substances. Nous avons là un moyen de renforcer le plan de prévention. Ici, vous devez savoir que la demande d’un plan de prévention par le gouvernement est introduite par un « peut », donc il peut demander un plan de prévention, mais il n’y a pas d’obligation. C’est la grande faiblesse du projet de loi, et nous en voyons les résultats. L’Association canadienne du droit de l’environnement estime que seulement 25 des 150 substances toxiques de l’annexe 1 font l’objet de plans de prévention de la pollution, ce qui signifie que même si les plans sont nécessaires pour essayer de se débarrasser de ces substances le plus rapidement possible, seulement 25 des 150 substances toxiques répertoriées ont été prises en charge.
Cet amendement serait un renforcement, car il signifierait que les entreprises identifiées devront donner des informations au ministre et au gouvernement. Elles auront l’obligation d’établir un plan de prévention de la pollution pour ces substances. C’est la grande différence.
Quelques associations — pas mal en fait — ont dit que tout cet aspect prévention du projet de loi devrait être renforcé, mais il y a plus encore. En 2017, dans un rapport de la Chambre des communes, on faisait état d’une recommandation explicite du rapport de 1995 sur le premier examen de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, ou LCPE. Dans ce rapport, il était indiqué que les substances déclarées toxiques présentent des risques importants pour la santé humaine et l’environnement. Compte tenu de ces risques et du consensus de la société canadienne sur la nécessité de prendre des mesures pour réduire les risques causés par les substances toxiques, le gouvernement a proposé de modifier la LCPE pour permettre au ministre d’exiger l’élaboration et la mise en œuvre de plans de prévention de la pollution pour les substances toxiques.
Vous voyez donc que cette question préoccupe les députés et le Parlement depuis longtemps, et nous avons maintenant la possibilité de renforcer ce projet de loi. Comme le dit ma collègue Rosa Galvez, nous n’avons qu’une seule chance. Il nous faudra peut-être 20 ans de plus pour revenir sur cette loi, et je pense que le minimum que peuvent faire les entreprises qui ont affaire à ces substances toxiques, c’est d’essayer de s’en débarrasser et d’avoir dès que possible un plan pour en diminuer l’utilisation. Merci.
Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup, monsieur le président. Je veux parler de cet amendement particulier, mais avant de le faire, j’aimerais préciser deux ou trois choses.
Tout d’abord, au nom de tous les membres du comité — si je peux faire quelque chose comme cela — ou du moins, certainement en mon nom, je veux remercier les experts qui ont écouté nos débats, et qui nous ont fourni des renseignements si importants et d’une telle clarté. Il est parfois essentiel d’écouter les personnes qui ont passé leur vie à comprendre ces mesures législatives et qui ont cherché à établir si ces mesures étaient les meilleures pour traiter de ces enjeux particuliers. C’est vraiment une bonne chose que nous prenions leurs conseils au sérieux.
Deuxièmement, j’aimerais répondre à certaines observations formulées par la sénatrice Miville-Dechêne ce matin et hier, selon lesquelles nous n’avons qu’une seule chance de modifier la Loi canadienne sur la protection de l’environnement. Tout le monde ici a entendu le ministre nous dire qu’il y aurait d’autres examens de la LCPE. Il nous incombe de dire que nous ne sommes pas d’accord avec le ministre et de le faire avec substance, et non pas seulement de faire des déclarations qui, manifestement, contredisent le ministre. Soit nous n’avons pas confiance dans le ministre — ce qui est un vrai problème — soit nous faisons nos propres hypothèses qui ne correspondent pas à ce que dit le ministre. Ce n’est pas juste. Nous devrions être très prudents quant au type de déclarations que nous faisons.
Le gouvernement s’oppose à cet amendement, d’abord pour un rappel au Règlement, puis, si ce n’est pas une question de fond, sur d’autres aspects.
Je dois dire que je suis assez confus parce que la motion crée trois nouveaux articles, 10.1, 10.2 et 10.3, qui proposent de modifier des dispositions de la loi qui sont déjà modifiées par les articles 10 et 11. La motion aurait pu être mieux structurée en étant présentée comme une motion visant à modifier les articles 10 et 11 existants.
Si la motion était appuyée, l’article 10.1 remplacerait la version du paragraphe 56(1) qui vient d’être modifiée par l’article 10. De même, l’article 10.3 remplacerait le paragraphe 60(1), mais l’article 11, qui vient tout de suite après, aurait remplacé à nouveau ce même paragraphe 60(1).
Peut-être pourrions-nous obtenir des conseils des fonctionnaires ici présents sur cette question particulière. Je vous en serais reconnaissant. J’aurai ensuite d’autres observations à formuler, mais peut-être que les fonctionnaires peuvent nous aider à résoudre cette énigme.
John Moffet, sous-ministre adjoint, Direction générale de la protection de l’environnement, Environnement et Changement climatique Canada : Le problème fondamental que nous voyons au sujet de cet amendement ne concerne pas la question de la prévention de la pollution — c’est l’objet de base dans la loi — et nous n’avons pas non plus de réserves quant au soutien de l’utilisation des exigences de planification de la prévention de la pollution, car la LCPE était une loi innovatrice lorsque cette disposition a été adoptée. Elle était en fait fondée sur les exigences de certains États américains en matière de plans d’efficacité énergétique, mais nous avons été les premiers à exiger des plans de prévention de la pollution.
La question, cependant, c’est de savoir si nous avons besoin d’un plan de prévention de la pollution — ou d’un plan P2 — pour chaque substance toxique et chaque utilisateur de chaque substance toxique. L’architecture de base de la LCPE permet au gouvernement d’utiliser la mesure ou la série de mesures de gestion des risques qu’il juge appropriée ou la meilleure. Le fait que seulement 25 substances toxiques soient soumises à l’exigence d’un plan P2 n’est pas inquiétant si l’on considère toutes les autres approches que nous utilisons, y compris les règlements d’interdiction et d’autres types de règlements, de normes, de lignes directrices et d’accords qui couvrent toutes les substances toxiques. En d’autres termes, nous ne nous contentons pas d’utiliser des plans de prévention de la pollution. Nous avons parfois recours à des exigences beaucoup plus robustes et beaucoup plus contraignantes.
En outre, il ne serait pas non plus approprié que chaque utilisateur de chaque substance toxique prépare un plan, étant donné que tous les utilisateurs ne « créent » pas un risque. Ce que nous devons faire, c’est nous concentrer sur les endroits où le risque se produit et sur les personnes les mieux placées pour prévenir ce risque. C’est pour cette raison que l’approche actuelle permet au ministre d’exiger la création de substances toxiques.
C’est ainsi que les dispositions actuelles sont structurées et enchâssées dans la loi.
Le président : Je vous remercie.
Le sénateur Arnot : Je n’ai pas le droit de vote au sein de ce comité. Habituellement, je suis membre du comité, mais je sens qu’il est de mon devoir de faire l’observation que je m’apprête à faire ce matin. Je parle ici au sens figuré.
Je pense que nous devons mettre l’accent sur la réflexion en amont, c’est-à-dire sur la prévention. C’est sur cette considération plutôt que sur la surveillance que devraient reposer cette loi et sa mise en œuvre, car nous avons entendu des promesses et de bonnes intentions de la part des décideurs comparaissant comme témoins et d’autres personnes. Nous avons également entendu de bonnes intentions qui ont été remplacées par des actions contraires dans le cadre des relations découlant de traités. La sénatrice McCallum en a donné de nombreux exemples. Dans les relations découlant de traités, nous avons vu que la Couronne a abdiqué ses responsabilités, en particulier envers la Première Nation Tataskweyak, au Manitoba, et les deux autres qui ont été touchées. C’est le « meilleur » exemple au Canada; c’est le pire en fait, le plus consternant. On en a parlé hier. J’ai pu voir la réaction des sénateurs autour de la table lorsque la sénatrice McCallum a parlé des résultats de cette abdication foncièrement honteuse pour le Canada.
Les 1 000 juges de première instance qui entrent chaque jour dans leur salle d’audience au Canada pour administrer le droit pénal arrivent de toute évidence avec de bonnes intentions. Je peux dire qu’en droit pénal, le processus de détermination de la peine, les promesses de bonne conduite, de changement de comportement et de changement d’agissements faites avec de très bonnes intentions aboutissent à des taux de récidive très élevés. C’est donc une notion éculée que de dire que le meilleur prédicteur de l’avenir est constitué par les actions du passé, surtout lorsqu’il s’agit de confiance. La prévention de la pollution en amont devrait être le principe fondamental, et non le contrôle de la qualité, de la quantité ou du degré de pollution qui se produit. Sinon, nous nous retrouvons en aval avec le fait accompli, et la seule option qui reste est de réparer, ce qui coûte très cher, car les dommages sont considérables.
Permettez-moi une dernière observation. Nous devrions faire attention à l’utilisation du mot « peut » lorsque le contexte exige quelque chose de plus directif. Il s’agit fondamentalement d’une question de confiance, comme l’a dit le sénateur Kutcher. Lorsqu’on nous demande d’accorder notre confiance à des décideurs politiques animés de bonnes intentions, la question qu’il faut se poser est la suivante: « cette confiance est-elle mise au bon endroit? »
Je dis donc aujourd’hui que, même si je n’ai pas le droit de vote, j’appuie l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne. Je vous remercie.
Le président : Je vous remercie.
La sénatrice Galvez : Merci beaucoup, sénateur Arnot. Je suis tout à fait d’accord avec votre évaluation de la situation. Le titre de ce projet de loi parle du « renforcement de la protection de l’environnement ». C’est le titre du projet de loi.
Le moyen le plus efficace d’y parvenir est de prévenir la pollution. Non pas de la contrôler et de la gérer, mais bien de la prévenir. Lorsque nous comparons la mouture initiale de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, celle de 1999, à ce qui est proposé ici, il convient de reconnaître que nous ne renforçons pas la prévention. Nous renforçons le contrôle et la gestion. Voilà donc une toute petite occasion d’améliorer le projet de loi.
Maintenant, le sénateur Kutcher soutient que nous ne faisons pas confiance au ministre. Je suis désolée, mais je fais confiance à ce ministre. Cependant, je ne sais pas si je vais faire confiance au prochain. Nous devons donc rendre le projet de loi aussi rigoureux que possible.
La prévention est le moyen le moins coûteux, et nous devrions le faire respecter. Je soutiens cet amendement de la sénatrice Julie Miville-Dechêne.
La sénatrice Seidman : Merci beaucoup, sénateur Arnot et sénatrice Miville-Dechêne. Évidemment, la prévention est essentielle. Dans le monde médical, la prévention est également essentielle. Nous savons tous que c’est beaucoup mieux de prévenir que de chercher à guérir. J’en suis pleinement consciente.
J’ai une question concernant la constitutionnalité et la compétence provinciale entourant ces questions, et je la pose au nom des parties prenantes. Les fonctionnaires pourraient peut-être m’éclairer à ce sujet.
M. Moffet : Eh bien, madame la sénatrice, je ne pense pas pouvoir vous donner un avis juridique définitif, mais je peux dire que la partie 4 de la loi — où sont abordées ces questions — est là depuis 1999. Nous avons émis environ deux douzaines d’avis qui obligent plusieurs entreprises à préparer des plans de prévention de la pollution et nous n’avons jamais été contestés. En fait, ces exigences se sont révélées très efficaces.
Je pense que la raison pour laquelle elles n’ont pas été contestées, c’est qu’elles ne disent pas aux entreprises comment mener leur barque. Elles n’empiètent pas sur les compétences provinciales. Elles se focalisent sur la substance toxique et exigent des entreprises qu’elles préparent un plan.
Je tiens toutefois à souligner qu’elles n’obligent pas les entreprises à prévenir la pollution.
Cette disposition autorise le ministre à exiger d’une entreprise qu’elle prépare un plan, et l’entreprise a ensuite carte blanche quant au contenu du plan et à l’importance des mesures qu’elle prend pour prévenir la pollution. Nous utilisons donc cette disposition lorsque nous sommes convaincus que les entreprises visées prendront effectivement les mesures nécessaires. Dans d’autres cas, nous réglementons et exigeons explicitement que des mesures soient prises, ce qui n’exclut pas, dans de nombreux cas, une interdiction totale d’utiliser la substance en cause, ce qui est le moyen le plus efficace de garantir qu’elle ne sera plus utilisée et de prévenir ainsi la pollution. Merci.
La sénatrice Seidman : Qu’en est-il des questions de compétence provinciale concernant les expositions professionnelles? Cela peut-il devenir problématique?
M. Moffet : La question de l’autorité compétente en matière de santé et sécurité au travail compte beaucoup dans la façon dont nous effectuons nos évaluations des risques et dans la direction que nous donnons à nos activités de gestion des risques. C’est un problème récurrent que Santé Canada, en particulier, s’efforce de résoudre.
Les dispositions dont nous parlons ici n’abordent pas cette question parce que nous ne pouvons utiliser ces dispositions que lorsque nous avons établi qu’une substance est toxique. Jusqu’à présent, nous nous sommes focalisés sur l’évaluation du risque que représente une substance pour la santé humaine en examinant les risques pour le public canadien — les populations vulnérables —, mais nous n’avons pas mis l’accent sur la santé et la sécurité au travail.
La sénatrice Seidman : Votre réponse m’aide beaucoup, merci.
Le président : Il y a quatre ou cinq personnes qui attendent pour formuler des commentaires ou poser des questions. Si vous pouviez tous être brefs, nous pourrons peut-être un jour passer à la mise aux voix.
La sénatrice Sorensen : J’ai une question rapide pour la sénatrice Miville-Dechêne. Lorsque j’ai parcouru tout cela, j’ai fini par retenir huit ou neuf thèmes qui revenaient sans cesse de la part des témoins. Le premier était la confidentialité. Je ne comprends pas tout à fait si cette motion parle de confidentialité.
D’accord, ça me va. Je vous remercie.
La sénatrice Miville-Dechêne : C’est après, à l’article 50.
La sénatrice Sorensen : Merci.
La sénatrice McCallum : Je vous remercie pour toutes vos observations. Je voulais demander quelque chose au ministre. Il a dit qu’il y avait 25 substances qui ont été ciblées et qui exigent des plans P2, et qu’autrement il y a des interdictions et des exigences réglementaires rigoureuses qui couvrent toutes les substances toxiques.
Vous serait-il possible de nous faire parvenir tous ces renseignements afin que nous les ayons?
Nous pourrions alors être sûrs que vous vous occupez de toutes les substances toxiques, car vous ne pouvez pas vous contenter de simplement choisir. Chacune d’entre elles a une incidence sur les citoyens canadiens. Lorsque nous parlons de compétence provinciale, je pense qu’il faut toujours mentionner qui en est exclu, à savoir les Premières Nations, car c’est le gouvernement fédéral qui est responsable des Indiens et des terres indiennes, et cela couvre beaucoup de choses.
Comme je l’ai dit hier, si le système fonctionne, pourquoi les substances toxiques ont-elles augmenté sur les terres des premiers peuples, sur les terres des Premières Nations, des Métis et des Inuits? Quand vous dites qu’elles ont toutes augmenté, ce n’est pas le cas. J’aimerais que le ministre nous dise comment les 150 substances ont été traitées.
Le président : Consentez-vous à ce que M. Moffet réponde à la question? Évidemment, le ministre n’est pas présent.
M. Moffet : En tant que responsables des activités de gestion des risques, nous pouvons fournir au Sénat un aperçu des mesures de gestion des risques. À titre d’information, je précise qu’en vertu de la LCPE, un peu plus de 400 mesures de gestion des risques ont été élaborées pour les diverses substances figurant sur la liste des substances toxiques. Nous pouvons vous fournir cette liste de mesures et la correspondance entre les mesures et les substances.
Le président : Bonne idée.
Le sénateur Patterson : Il me semble évident qu’il convient que le mot « may » figure dans la version anglaise actuelle du projet de loi, simplement parce que les plans de prévention de la pollution ne sont pas la seule façon de lutter contre les substances toxiques. Tout dépend de la façon dont ces substances seront utilisées, comme le dit M. Moffet. Les plans ne sont qu’une mesure parmi d’autres. Mais, en fait, l’organisme de réglementation, c’est-à-dire le gouvernement, a la capacité d’interdire complètement une substance. Si une substance est interdite ou réglementée autrement, aucun plan de prévention de la pollution ne sera nécessaire.
Je suis convaincu que ce qu’a dit M. Moffet a du sens et qu’il y a une raison plausible d’accorder un certain pouvoir discrétionnaire. Un plan de prévention de la pollution, qui, comme il l’a indiqué, est élaboré par l’industrie de toute façon, n’est qu’une des nombreuses autres mesures possibles. La plupart des autres mesures sont plus strictes. Ce serait un projet de création d’emploi artificiel que d’exiger que chaque substance toxique ait un plan de prévention de la pollution, alors que tout dépend de son utilisation et qu’il existe des mesures plus strictes à prendre. J’hésite donc à approuver l’amendement.
Il y a une autre question que j’aimerais poser à M. Moffet et qui a été soulevée par le sénateur Kutcher. Cet amendement modifie des articles que nous avons déjà approuvés, notamment les articles 10 et 11. Ce qui me préoccupe, c’est que nous nous sommes déjà occupés des articles 10 et 11.
M. Moffet pourrait-il expliquer comment cet amendement pourrait, en fait, annuler ou modifier les approbations que le comité a déjà données pour ces deux articles? Merci.
M. Moffet : Sénateur Patterson, j’aimerais faire remarquer qu’il s’agit en fait d’une question qui devrait être posée au président et à la greffière, mais je voudrais souligner que, dans le meilleur des cas, il y aurait deux articles 56 dans la loi. Cet amendement ne remplace pas l’article 56. Il ajoute un nouvel article 56, ou bien il annule les amendements précédents. Je pense qu’il y a un certain tri à faire afin de déterminer l’endroit où cet amendement doit être inséré dans la loi, et par rapport aux autres amendements.
En ce qui concerne les questions de procédure, je m’en remets à la greffière du comité qui est responsable de ces questions.
Le sénateur Patterson : Monsieur le président, pourrions-nous demander à la greffière de clarifier la question, comme le suggère M. Moffet?
Le président : Sénateur Patterson, à la toute fin du processus, nous examinerons tous les amendements. Nous disposons d’un personnel juridique qui les examinera pour s’assurer qu’il y a une bonne fusion des intérêts, et l’ordonnancement des amendements deviendra donc logique à ce moment-là. Au moment du vote, nous voterons en principe sur les objectifs de cet amendement, puis nous en réglerons les détails ultérieurement.
Le sénateur Patterson : Merci.
Le sénateur Kutcher : J’aimerais réitérer les préoccupations du sénateur Patterson, qui sont fondamentales. La façon dont cet amendement est rédigé obligera les gens à mettre en place des stratégies de prévention de la pollution pour des substances qui sont soit strictement réglementées, comme les médicaments utilisés pour traiter le cancer, soit des substances en voie d’élimination progressive en raison de leur toxicité.
Je voudrais également rappeler que nous sommes tous d’accord pour dire que la prévention de la pollution est la première étape. Il n’y a rien de merveilleux dans cet amendement qui soit différent de la loi elle-même. Je veux que nous nous souvenions que la LCPE indique que « ...l’objet premier de la loi est de contribuer au développement durable au moyen de la prévention de la pollution ».
Je pense que nous devons également être prudents en ce moment lorsque nous attribuons des perspectives à la loi qui, d’après nous, ne figurent pas dans le texte de loi, alors qu’elles s’y trouvent effectivement. Je précise encore une fois que le gouvernement s’oppose à cet amendement pour les raisons que nous avons déjà stipulées et que le sénateur Patterson a également mentionnées. Je suis heureux que cet amendement soit mis aux voix si les gens le souhaitent.
Le président : Merci. Nous procédons essentiellement à une deuxième série de questions, alors faisons-le vite et bien.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : Je voulais intervenir sur les propos de M. Moffet selon lesquels le gouvernement peut recourir à toutes sortes d’autres armes et moyens pour prévenir la pollution.
Je vous dirais que rien, dans mon amendement, n’empêche le gouvernement d’intervenir de différentes façons pour prévenir la pollution. Cet amendement propose d’obliger les entreprises à établir un plan de prévention si elles possèdent une des trois catégories de substances et si elles les utilisent.
En ce moment, c’est ce qu’on appelle être dans l’ère du temps. On demande aux entreprises elles-mêmes de se conscientiser et de réfléchir à un plan de prévention et à un plan d’élimination de ces substances. Cela fait vraiment partie des projets de loi qui sont les plus populaires en ce moment. Je songe à celui que j’ai proposé sur l’esclavage moderne : l’idée est de convaincre les entreprises d’analyser leur chaîne d’approvisionnement pour comprendre s’il y a du travail forcé.
Il peut y avoir des mesures plus autoritaires, mais on peut tout autant mettre en place ces plans de prévention, qui restent tout de même un exercice qui oblige les entreprises à réfléchir à cet égard.
J’aimerais aussi rappeler à M. Moffet que deux rapports de la Chambre des communes ont souligné que l’approche actuelle n’était pas suffisante, qu’il fallait renforcer la prévention et qu’une façon de le faire était effectivement de ne pas seulement donner la possibilité d’adopter un plan de prévention, mais bien d’obliger les entreprises nommées à le faire.
Voilà ce que je voulais dire pour justifier l’importance de cet amendement dans le cadre d’un renforcement des mesures pour prévenir l’émission de substances toxiques.
Le président : Y a-t-il d’autres commentaires?
[Traduction]
La sénatrice Seidman : J’aimerais poser une question au sujet du processus. Le sénateur Patterson a déclaré que nous, les membres du comité, avions déjà approuvé l’article 10, et je tiens juste à m’assurer que ce n’est pas le cas. Nous nous sommes arrêtés à l’article 9, et je voulais simplement m’assurer que nous comprenions tous clairement cet enjeu.
Chantal Cardinal, greffière du comité : Nous allons voter sur ce nouvel amendement, puis nous adopterons l’article 10.
La sénatrice Seidman : Exactement.
Mme Cardinal : Si son amendement est adopté, il aura un nouvel article 10.1.
La sénatrice Seidman : Merci.
Le président : Il est proposé par l’honorable sénatrice...
Le sénateur Gold : Excusez-moi, monsieur le président. Avant que nous procédions au vote, ce que je suis heureux de faire, me permettez-vous de formuler une observation, s’il vous plaît?
Je veux appuyer officiellement ce que le sénateur Kutcher a dit plus tôt. Les fonctionnaires qui sont ici sont indépendants du gouvernement. Ce sont des fonctionnaires. Ils sont les experts dans ce domaine. Je demande que lorsque nous exprimons des opinions concernant le gouvernement, nous ne les adressions pas aux fonctionnaires. Ils sont ici pour nous aider, et ils font un travail formidable. Je pense que nous leur devons ce respect. Merci.
Le président : Soyez très brève, car nous sommes sur le point de voter.
La sénatrice McCallum : Je tiens à dire que les gens ne sont pas au courant de tout ce qui doit être entendu.
Ma vie a emprunté un chemin très différent du vôtre. Alors quand j’affirme quelque chose, c’est la vérité, ce n’est pas une opinion. Et si je dis que je ne suis pas ici pour attaquer les fonctionnaires... quand j’examine la situation, je constate que les Premières Nations ont été ignorées. Quand vous pensez aux sénateurs, sénatrice Miville-Dechêne, même le fait d’exiger un plan de prévention de la pollution va changer les mentalités. La réparation d’un bassin de décantation des résidus va être tellement coûteuse. Vous n’avez pas accepté les algues bleues et tout ce qui s’en vient. C’est le gouvernement qui va se retrouver aux prises avec ce problème.
Soit vous payez des milliards et des milliards de dollars après coup, soit vous stoppez le problème, comme la réflexion en amont exprimée par le sénateur Arnot.
[Français]
Le sénateur Dalphond : J’ai une question à poser à M. Moffet. Actuellement, le régime est facultatif. Le ministre peut identifier certains produits et certaines entreprises et demander à ces entreprises de créer des programmes de prévention de la pollution. Les entreprises qui ont été ciblées par le ministère sont-elles toutes de juridiction fédérale?
[Traduction]
M. Moffet : Oui, sénateur. La loi s’applique à tous les Canadiens et à toutes les entreprises canadiennes, mais seulement à certaines fins. Le but de la loi est donc de prévenir la pollution. Dans le cas présent, nous parlons de la pollution causée par des substances toxiques.
La constitutionnalité de l’accent mis sur les substances toxiques en vertu de la loi a été approuvée par la Cour suprême du Canada. Donc, là encore, la loi ne donne pas au gouvernement fédéral le pouvoir de dire à toutes les entreprises comment gérer leurs affaires. Mais elle lui donne le pouvoir de prendre des mesures préventives à l’égard des substances qui ont été évaluées comme répondant aux critères de toxicité de la LCPE.
[Français]
Le président : Merci. Sommes-nous tous d’accord pour que l’on passe au vote?
[Traduction]
Des voix : Oui.
Le président : Il est proposé par l’honorable sénatrice Miville-Dechêne que :
Le projet de loi S-5 soit modifié par adjonction du nouvel article 10.1-10.3, à la page 5, après la ligne 37.
Plaît-il aux honorables sénateurs d’adopter la motion d’amendement? Si vous êtes d’accord, levez la main.
Des voix : D’accord.
Le président : Si vous êtes en désaccord, pointez le pouce vers le bas.
L’article 10 est-il adopté?
D’accord.
L’article 10.1 est-il adopté?
D’accord.
L’article 11 est-il adopté?
Il est adopté.
L’article 12 est-il adopté?
Bien.
L’article 13 est-il adopté?
D’accord.
L’article 14 est-il adopté?
L’article 15 est-il adopté?
La sénatrice Galvez a un amendement à présenter.
La sénatrice Galvez : Quel est le numéro dans votre document?
Mme Cardinal : Dans la feuille de route, il s’agit de 26a, RG-S5-15-8-2a.
Le sénateur Patterson : Quel est le numéro sur la feuille de route?
La sénatrice Galvez : L’amendement fait référence à l’amendement 26a de votre feuille de route. Il concerne la prise de règlements. Il précise ce qui suit :
Que le projet de loi S-5 soit modifié à l’article 15, à la page 8, par substitution, aux lignes 1 à 3, de ce qui suit :
« (2) L’alinéa 67(1)d) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
d) prévoyant les conditions, procédures d’essai et pratiques de laboratoire auxquelles il faut se conformer pour l’analyse, l’essai ou la mesure de la propriété ou particularité, y compris les procédures et les pratiques pour remplacer, réduire ou raffiner l’utilisation d’animaux vertébrés; ».
L’amendement vise simplement à harmoniser la disposition avec mes amendements précédents, concernant les essais sur des animaux, qui ont été adoptés.
L’article 67 de la LCPE établit l’autorité réglementaire du gouverneur en conseil en ce qui concerne les propriétés ou les caractéristiques des substances, ainsi que les conditions, les procédures d’essai et les pratiques de laboratoire à suivre pour analyser, tester ou mesurer les propriétés ou les caractéristiques.
L’amendement modifie le point d) par adjonction, afin d’indiquer explicitement que le pouvoir du gouverneur en conseil de prendre des règlements concernant les conditions, les procédures d’essai et les pratiques de laboratoire comprend l’autorité de prendre des règlements concernant les procédures et les pratiques visant à réduire ou à remplacer l’utilisation d’animaux.
Il vise simplement à harmoniser la disposition avec mes amendements précédents, concernant les essais sur des animaux.
Le sénateur Kutcher : Je pense que c’est un bon pas en avant. Mais je demanderais d’ajouter le mot « raffiner » parce que nous avions parlé de réduire, de remplacer ou de raffiner.
La sénatrice Galvez : Mais il est là.
Le sénateur Kutcher : Il est déjà là? Je ne l’avais pas vu. Je suis désolé. D’accord. C’est très bien.
La sénatrice Galvez : D’accord.
Le sénateur Kutcher : J’avais mal lu.
Le président : Y a-t-il d’autres commentaires? Sinon, tout le monde est-il d’accord? Mettons la question aux voix.
L’honorable sénatrice Galvez propose ce qui suit:
Que le projet de loi S-5 soit modifié à l’article 15, à la page 8, par substitution, aux lignes 1 à 3, de ce qui suit :
« (2) L’alinéa 67(1)d) de la même loi est remplacé par ce qui suit :
d) prévoyant les conditions, procédures d’essai et pratiques de laboratoire auxquelles il faut se conformer pour l’analyse, l’essai ou la mesure de la propriété ou particularité, y compris les procédures et les pratiques pour remplacer, réduire ou raffiner l’utilisation d’animaux vertébrés; ».
Êtes-vous d’accord, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : D’accord.
Le président : Tous ceux qui sont pour? D’accord.
Si vous êtes contre, veuillez pointer le pouce vers le bas.
La motion est adoptée.
L’article 19 est-il adopté?
Je suis désolé. Avez-vous un autre amendement, sénatrice Galvez?
Mme Cardinal : Le numéro 27 sur la feuille de route.
La sénatrice Galvez : Cet amendement concerne l’amendement du numéro 27 sur votre feuille de route, dont voici le libellé:
Que le projet de loi S-5 soit modifié à l’article 15, à la page 8, par substitution, à la ligne 6, de ce qui suit :
« cancérigène, mutagène, toxique pour la reproduction ou présentant d’autres risques suscitant un niveau de préoccupation équivalent. ».
L’amendement élimine donc la référence au « plus haut niveau de risque », car il est difficile de comprendre ce que représente un « plus haut niveau de risque ».
Nous pouvons demander des précisions aux représentants.
L’amendement modifie les mots « plus haut niveau de risque » pour décrire plus précisément ce qu’on pourrait considérer comme étant un « plus haut niveau de risque » et il remplace ces mots en reprenant une partie du libellé du paragraphe 15(1) du projet de loi S-5, en utilisant les mêmes mots, c’est-à-dire ceux qui réfèrent à une propriété ou particularité d’une substance au sujet de laquelle le gouverneur en conseil peut prendre des règlements.
Le fondement de ma proposition, c’est que le projet de loi S-5 adopte un nouveau régime qui donne la priorité à l’interdiction des substances qui présentent le risque le plus haut niveau de risque sans toutefois définir ce que représente le « plus haut niveau de risque ». La classification des substances présentant le plus haut niveau de risque pour la santé humaine se fera par voie de règlement plus tard. L’intention déclarée du plus haut niveau de risque pour la santé humaine est de prescrire le seuil pour les substances lorsqu’il s’agit de la cancérogénicité, la mutagénicité, la toxicité pour la reproduction et d’autres circonstances et conditions pertinentes. Je reprends donc ce libellé ici.
Cela permettrait de combler une lacune importante dans le régime actuel de quasi-élimination de la LCPE 1999, qui exige la quasi-élimination des substances jugées persistantes, bioaccumulables et actuellement toxiques dans l’environnement, mais qui ne prévoit aucune exigence parallèle pour les substances très préoccupantes pour la santé humaine.
Le président : Je vous remercie, sénatrice.
Le sénateur Patterson : Je suis reconnaissant aux représentants d’être ici pour nous aider, mais avec tout le respect que je dois au sénateur Gold, je ne dirais pas qu’ils sont indépendants du gouvernement. Ils relèvent tous d’un ou d’une ministre, mais nous le savons et nous le comprenons.
Cela dit, je voudrais demander à M. Moffet s’il est nécessaire de définir plus précisément les substances qui présentent le plus haut niveau de risque, comme le proposent les amendements de la sénatrice Galvez. En effet, elle estime que le libellé actuel proposé doit être précisé. Est-il nécessaire de définir plus précisément les substances qui présentent le plus haut niveau de risque?
M. Moffet : Sénateur, j’aimerais expliquer le fonctionnement de cette disposition et la raison pour laquelle son libellé mentionne des substances de façon générale avec une référence au plus haut niveau de risque. La loi actuelle crée essentiellement deux approches. La première exige la quasi-élimination des substances persistantes et bioaccumulables, tandis que toutes les autres substances sont visées par une approche plus générale, axée sur la prévention de la pollution.
Nous savons, comme l’a souligné la sénatrice Galvez, qu’en plus de la persistance et de la bioaccumulation, il existe de nombreuses autres caractéristiques inhérentes aux substances qui les rendent très préoccupantes.
L’intention du projet de loi est de remplacer le régime de quasi-élimination des substances persistantes et bioaccumulables par un nouveau régime qui se concentre plus largement sur les substances présentant le plus haut niveau de risque, et ce sont les mots qui sont utilisés dans le projet de loi à ce moment-ci. L’objectif de cette disposition est de permettre au gouvernement de définir ce qu’est une substance qui présente le plus haut niveau de risque. Plutôt que de préciser dans la loi qu’il s’agit seulement des substances cancérigènes et mutagènes, l’idée est de donner au gouvernement le pouvoir de définir ces caractéristiques par voie de règlement. Ensuite, puisque ce sera dans un règlement, il sera possible de modifier ce règlement de temps en temps, de sorte que nous ne serons pas coincés comme nous l’avons été pendant 22 ans avec seulement la persistance et la bioaccumulation, ou seulement la cancérogénicité ou la mutagénicité.
Il s’agirait d’accorder un pouvoir étendu, puis tous les détails concernant les substances exactes qui doivent être visées par cette nouvelle approche seraient précisés dans un règlement qui, à son tour, serait modifié de temps en temps.
Bref, nous vous conseillons de ne pas définir les mots « le plus haut niveau de risque » dans la loi, mais de donner le pouvoir de les définir par voie de règlement — et c’est l’intention de cette disposition.
Le sénateur Patterson : Je vous remercie beaucoup.
Le sénateur Kutcher : Je pense que l’intervention du représentant a bien exprimé la préoccupation selon laquelle cela limiterait la capacité d’intervenir au sujet du plus haut niveau de risque dans les règlements, et je pense que nous ne voulons pas limiter les intervenants et affaiblir le projet de loi.
Je présenterai également des amendements à l’article 21, qui aborde un grand nombre de ces questions.
Je suis d’accord avec la sénatrice Galvez pour dire qu’il nous faut de meilleures structures pour faire cela, mais je ne pense pas que nous puissions limiter les fonctionnaires lorsqu’il s’agit de faire le nécessaire dans le cadre des règlements. Je crains toutefois que cet amendement ait le potentiel de causer une telle situation.
La sénatrice Galvez : Mon problème avec l’idée de conserver les mots « le plus haut niveau de risque », c’est que je ne comprends pas à quoi cela fait référence. Est-ce que cela fait référence au risque aigu, par exemple un pompier qui va dans un incendie où il est grandement exposé à des gaz, ce qui signifie que c’est le plus haut niveau de risque parce qu’il va en mourir? Ou bien les mots « le plus haut niveau de risque » concernent-ils le cas d’un enfant qui vit dans un village autochtone et qui boira de l’eau qui contient des substances cancérigènes, développera une tumeur et mourra d’un cancer à l’adolescence? Je ne parle pas de façon théorique; j’ai vu cette situation se produire.
Quel type de « plus haut niveau de risque » aborderez-vous, le risque aigu ou le risque à long terme qui découle d’une exposition chronique? Pour moi, il suffit de dire « le plus haut niveau de risque ».
L’autre problème que me posent les mots « le plus haut niveau de risque », c’est lorsqu’il s’agit d’établir la limite du plus haut niveau de risque. Où commence ce risque? Qui détermine ce seuil? Quel risque est acceptable? Selon l’Agence de protection environnementale des États-Unis, le décès d’une personne sur un million est un risque acceptable. Dans l’ensemble de la LCPE et du projet de loi S-5, on ne dit rien à ce sujet.
Bref, quel risque considérerons-nous comme étant acceptable?
M. Moffet : Ce sont toutes des questions très importantes, et encore une fois, il s’agit de fournir ces renseignements dans les règlements. Je rappelle aux sénateurs que cet article est un pouvoir réglementaire lié à une disposition dont nous n’avons pas encore discuté — c’est-à-dire l’article 21 — qui remplace le régime actuel de quasi-élimination et crée une nouvelle obligation de prendre des mesures très strictes à l’égard des substances qui sont définies dans ces règlements comme étant des substances qui présentent le plus haut niveau de risque.
Le projet de loi précise également qu’au minimum, ces substances comprennent les substances persistantes et bioaccumulables, les substances cancérigènes et les substances mutagènes. Nous devons ensuite définir ce que ces mots signifient. Je comprends que ces mots soient plus précis que la formulation « le plus haut niveau de risque », mais nous devons définir ce que nous entendons par cancérogénicité. Comment évaluerons-nous cela? Qu’entendons-nous par « mutagénicité »? Y a-t-il d’autres caractéristiques que la science en évolution identifie comme étant des indicateurs de risque élevé et que nous devrions inclure dans les règlements? Tous ces détails doivent être certainement approfondis. La meilleure façon d’y arriver est de procéder par l’entremise de règlements qui seraient élaborés en consultation avec les Canadiens et qui suivraient le processus normalisé et transparent d’élaboration des règlements, et qui pourraient être modifiés de temps à autre beaucoup plus facilement que s’ils étaient codifiés dans une loi.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : Je prends la parole pour appuyer l’amendement de ma collègue la sénatrice Galvez. Je trouve que, contrairement à ce qu’on entend autour de cette table, il n’impose pas de limite et il ne lie pas les mains du gouvernement. Quand on le lit, on voit effectivement les mots « cancérigène, mutagène, toxique », mais on mentionne également ceci, et je cite :
[...] ou présentant d’autres risques suscitant un niveau de préoccupation équivalent. ».
Donc, on ouvre la porte à toute autre désignation. Je n’ai pas de formation scientifique, évidemment, mais le cancer est effectivement un meurtrier silencieux qui prend du temps, et le fait de l’évoquer est important symboliquement. Ce ne sont pas juste les grands incendies que l’on prend en considération, mais ce qui se passe individuellement dans le corps des gens exposés.
Je ne crois pas qu’il y a de limite; au contraire, je suis d’avis qu’il y a ici un exemple de risques élevés qui sont souvent sous-estimés parce qu’on ne les voit pas.
[Traduction]
Le sénateur Dalphond : Cela ajoutera un sous-paragraphe au paragraphe 67 de la loi qui énoncera ce qui suit : « Le gouverneur en conseil peut, sur recommandation du ministre, prendre des règlements qui respecteraient, pour l’application du paragraphe 77(3), la classification d’une substance comme substance cancérigène, mutagène, toxique ou suscitant un niveau de préoccupation équivalent. »
En droit, cela signifie que l’arrêté doit être équivalent à ces choses, car nous avons une liste. Il y a donc une limite. Lorsque les législateurs décident de fournir des exemples dans une liste, cela signifie que les juges, les avocats, les entreprises et les commerces devront se conformer aux choses qui sont clairement énoncées, ce qui signifie, au bout du compte, que nous limitons le pouvoir du gouverneur en conseil de définir ce que représente « le plus haut niveau de risque » et d’avoir un ensemble de choses plus vaste que cette liste limitée ou que l’équivalent de celle-ci.
Je comprends l’objectif. Il est certain que ces choses me semblent présenter le plus haut niveau de risque, mais vous limitez le type du plus haut niveau de risque. Personnellement, je trouve que c’est limitatif.
Le sénateur Patterson : D’accord.
La sénatrice Seidman : Les représentants ont donné des réponses très utiles. Je les remercie.
C’est un enjeu important. Nous avons entendu de nombreux témoignages qui démontrent que c’est un enjeu important. Je comprends votre amendement, sénatrice Galvez, mais j’ai des préoccupations semblables à celles du sénateur Dalphond. En effet, on parle « d’autres risques suscitant un niveau de préoccupation équivalent ». Le mot équivalent réduit le risque et le rend plus exclusif, car l’amendement réduit les risques à ceux que vous avez énumérés ou à des risques équivalents.
La sénatrice Galvez : Et si nous éliminions le mot « équivalent »?
La sénatrice Seidman : J’ai également du mal à confier cela au processus d’élaboration de règlements, car nous savons tous combien de temps il faut pour rédiger des règlements. Nous avons déjà attendu beaucoup trop longtemps pour la rédaction de règlements dans le cas d’autres textes législatifs importants, alors cela ne m’inspire pas beaucoup confiance. Mais en même temps, nous devons faire preuve d’un certain respect à l’égard de ce processus. Je suis indécise, car je comprends les enjeux, mais j’ai tendance à pencher du côté du « plus haut niveau de risque » uniquement parce que cela laisse place à une notion plus vaste.
Je crains que même si on éliminait le mot « équivalent » et que l’on se contentait d’écrire « d’autres risques suscitant un niveau de préoccupation équivalent » ou « d’autres risques élevés suscitant un niveau de préoccupation équivalent ». Que faisons-nous en énumérant « cancérigènes, mutagènes, toxiques pour la reproduction et autres risques les plus préoccupants »? Nous énumérons des choses, et peut-être n’y a-t-il aucune raison de les énumérer.
On a fait référence à l’article 21. Si vous regardez l’article 21, à la page 16, vous verrez que ces préoccupations sont énumérées très clairement. Je me demande simplement si nous ne sommes pas en train de nous faire du souci, même s’il s’agit d’une question importante. Je ne sous-estime pas du tout le point que vous faites valoir.
La sénatrice Galvez : Les mots « le plus haut niveau de risque » sont utilisés dans le cas des personnes qui ont subi une exposition aiguë et non une exposition chronique. Si la personne n’en meurt pas aujourd’hui, en ce moment, parce qu’une tumeur est en train de se développer, ce n’est pas considéré comme le plus haut niveau de risque, mais cela deviendra le plus haut niveau de risque lorsque la tumeur se développera et que la personne en mourra.
Le président : Monsieur Moffet, je crois que vous aviez levé la main. Souhaitiez-vous ajouter quelque chose?
M. Moffet : Oui, s’il vous plaît. Je me rends compte qu’il n’est pas dans l’ordre des choses d’intervenir sans qu’on me le demande, mais je tenais à souligner le lien entre cette disposition et la disposition ultérieure que la sénatrice vient de mentionner.
Nous avons structuré les amendements dans le projet de loi pour faire en sorte que cette nouvelle approche s’applique aux substances présentant « le plus haut niveau de risque ». Pour mettre en œuvre ce nouveau régime, nous devons définir ce qu’est « le plus haut niveau de risque ». C’est la raison pour laquelle nous avons fait référence à ces mots dans cette disposition, afin de permettre au gouvernement de définir en détail ce qui constitue une substance présentant « le plus haut niveau de risque ».
Encore une fois, la loi exigera que cela vise, au minimum, la bioaccumulation persistante, la cancérogénicité et la mutagénicité. Cela permettra également au gouvernement de fournir des détails sur l’interprétation de ces mots et d’ajouter d’autres considérations au fil des découvertes scientifiques. Les mots « le plus haut niveau de risque » sont essentiels pour que la loi soit cohérente et pour permettre au gouvernement de placer les substances présentant le plus haut niveau de risque dans un volet distinct.
Le président : Je vous remercie.
La sénatrice Sorensen : J’aimerais simplement souligner que la lecture du point 41 de la feuille de route me permet de croire que cette question sera abordée à un autre moment.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : Je reste convaincue que l’idée de nommer des choses réelles dans un projet de loi a un but important par rapport à des dispositions que je vois, qui ont trait au caractère « bioaccumulatif » et qui font référence à des concepts bien plus complexes. L’idée de nommer de vraies choses, comme les cancers, ne limite pas. Cependant, je suis d’accord pour proposer un sous-amendement qui irait dans le même sens que l’amendement et qui dirait en français « cancérigène, mutagène, toxique pour la reproduction ou présentant d’autres risques suscitant le plus haut niveau de préoccupation »..
On garderait l’exemple vivant, parce que nous avons eu beaucoup de personnes qui ont témoigné sur ces questions et elles nous ont rappelé que nous faisions affaire avec des êtres humains.
Le président : Que disait l’amendement en anglais?
La sénatrice Miville-Dechêne : Je l’ai lu en français parce que je le maîtrise mieux.
[Traduction]
Lorsqu’on parle de la classification d’une substance, on utilise des mots comme cancérigène, mutagène, toxique pour la reproduction et suscitant le risque le plus préoccupant — suscitant...
La sénatrice Seidman : Suscitant le plus haut niveau de préoccupation.
La sénatrice Miville-Dechêne : Oui — suscitant le plus haut niveau de préoccupation. Je vous remercie.
Le président : D’accord.
La sénatrice McCallum : Quand on dit que cela sera abordé à l’article 21 ou dans d’autres parties du projet de loi, pourquoi est-ce un problème de le souligner ici, dans ce cas? Cela existe déjà dans un autre projet de loi. Ce sera donc appuyé par l’article 21.
Lorsqu’on envisage de laisser à d’autres organismes le soin de trouver une définition, il faut tenir compte du fait qu’il n’y a pas nécessairement de femmes ou d’Autochtones dans ce groupe, de sorte que ces gens ne comprendront pas ce que signifie « le plus haut niveau de risque » pour les Autochtones, surtout en ce qui concerne la reproduction, car c’est une chose à laquelle les hommes ne pensent pas. Il y a tellement de choses qui affectent la reproduction, surtout chez les Autochtones.
Lorsque la loi ou le projet de loi n’aborde pas les questions que nous soulevons, il s’agit en réalité de racisme environnemental.
Comment allons-nous permettre que cela se produise? Nous ne le pouvons pas. Nous continuons à nous battre pour que nos voix soient entendues, mais elles continuent d’être écartées, car nous pensons différemment — c’est notre langue.
Ce sont donc toutes des choses qui présentent un risque élevé, et il n’y a pas de limite. J’appuie l’amendement qui allait être présenté. Je vous remercie.
Le président : Je vous remercie.
Le sénateur Arnot : J’aimerais formuler un commentaire. Je suis un vieil homme, mais je suis un nouveau sénateur, et vous pourrez donc m’aider avec ce qui suit.
Je n’abdique aucune responsabilité de faire de ce projet de loi le meilleur projet de loi possible ici, au Sénat. Il a d’ailleurs été proposé au Sénat. Nous voulons tous qu’il soit efficace. Je m’efforcerais donc de le rendre le plus efficace, le plus rigoureux, le plus solide et le plus normatif possible à ce moment-ci, au Sénat.
Lorsque le projet de loi sera envoyé à l’autre endroit, les députés de cet autre endroit seront soumis aux pressions des intervenants de tous les côtés de la question. Ils prendront une décision, dont ils devront rendre compte aux électeurs canadiens. L’objectif ici est de tenter de faire en sorte que ce projet de loi, lorsqu’il quittera le Sénat, offre la meilleure protection possible aux citoyens canadiens — à notre avis. Je pense que nous sommes tous sur la même longueur d’onde, mais il me semble qu’il pourrait être utile d’en tenir compte au moment d’évaluer la validité des amendements. Je vous remercie.
Le président : Je suggère que nous passions au vote. Nous devons bien sûr commencer par le sous-amendement... il se lirait comme suit :
cancérigène, mutagène, toxique pour la reproduction ou présentant d’autres risques suscitant le plus haut niveau de préoccupation.
Est-ce que le sous-amendement est adopté? Que ceux qui sont en faveur lèvent la main. Que ceux qui sont contre tournent le pouce vers le bas. Le sous-amendement est adopté par cinq voix contre quatre.
Plaît-il aux honorables sénateurs d’adopter l’amendement tel que modifié?
Ceux qui sont contre doivent l’indiquer avec un pouce vers le bas.
L’amendement est adopté.
Est-ce que l’article 15 tel que modifié est adopté? Que tous ceux qui sont pour lèvent la main. Ceux qui sont contre? L’article 15 est adopté.
Est-ce que l’article 16 est adopté?
La sénatrice McCallum : Mon amendement porte sur l’article 16 à la page 8. Il propose :
Que le projet de loi S-5 soit modifié à l’article 16, à la page 8, par substitution, à la ligne 27, de ce qui suit :
« (iii.2) le fait qu’il existe une population vulnérable ou des terres vulnérables ».
— en relation avec la substance.
On peut actuellement lire à la ligne 27 : « […] le fait qu’il existe une population vulnérable relativement à la substance […] »
Mon raisonnement est fondé sur un adage de la langue crie qui dit [la sénatrice s’exprime en langue crie].
Cela signifie qu’il ne faut jamais oublier. Il n’existe pas d’équivalent français pour [la sénatrice s’exprime en langue crie]. Ce mot cri signifie « tout ce que nous portons en nous ». C’est notre histoire, l’astronomie, la terre, l’eau, le ciel, les animaux et tout le reste. Nous tous portons tout cela en nous.
Nous ne pouvons pas séparer tous ces éléments, car ils ont un impact sur chaque personne et, surtout, sur la collectivité que nous formons. Les terres les plus ciblées par l’extraction des ressources sont des terres vulnérables parce qu’elles abritent les minéraux et les autres ressources naturelles, mais les terres adjacentes sont également touchées par l’écoulement des toxines.
J’ai donné l’exemple des résidus des bassins de décantation qui se déversent déjà dans la rivière Athabasca et qui se retrouveront dans le fleuve Mackenzie avant de terminer leur course dans l’océan Arctique.
Il y a aussi le cas des communautés de Tataskweyak et de South Indian Lake au Manitoba qui sont touchées par les travaux hydroélectriques. On y retrouve maintenant des algues toxiques provenant du Sud. Ces algues vont aussi aboutir dans l’océan Arctique.
Y a-t-il une seule parcelle de terre qui a déjà été traitée avec respect par ceux qui en extraient les ressources? Ont-ils plutôt simplement laissé sur place leurs matières toxiques pour rendre cette terre vulnérable? Le vide réglementaire existant affecte les Autochtones, car la terre est au cœur même de leur existence. Ce sont justement ces terres et ces eaux qui sont riches en ressources naturelles et qui entraînent par conséquent les plus grands risques d’exploitation et de dépossession. Les gens croient que l’époque où les Européens sont arrivés ici pour déposséder les gens de leur terre et les coloniser est depuis longtemps révolue. Ce n’est pourtant pas le cas. Cette dépossession se poursuit quotidiennement au Canada. C’est la raison pour laquelle il ne faut pas protéger uniquement les personnes. Il faut aussi protéger la terre.
Le sénateur Kutcher : Je tiens à remercier la sénatrice McCallum. Vous faites à nouveau un travail remarquable pour nous sensibiliser à ces enjeux importants en nous faisant voir les choses dans des perspectives différentes. Je veux personnellement vous en remercier.
Néanmoins, le gouvernement s’oppose à cet amendement pour les quelques raisons que voici. Il n’existe pas de définition pour le concept de terre vulnérable. Il faut se demander si l’on ne laisse pas ainsi de côté les eaux. J’aimerais d’abord que nos fonctionnaires nous disent ce qu’ils en pensent. Ensuite, j’aurai peut-être une suggestion à vous soumettre.
M. Moffet : Merci. Comme vient de l’expliquer le sénateur Kutcher, le terme « terre vulnérable » n’est pas d’usage courant pour nous. Sa signification n’est pas bien comprise et il n’englobe pas nécessairement toutes les considérations environnementales qui devraient être prises en compte dans une évaluation des risques, y compris celle qui porterait sur les populations vulnérables.
Le terme « environnement » est utilisé dans toute la Loi et y est défini de façon très large. Il serait donc judicieux de l’employer en l’espèce, de préférence à la notion de terre.
Le président : Merci.
Le sénateur Kutcher : Merci pour cette explication, monsieur Moffet. J’allais demander à la sénatrice McCallum si elle serait disposée à accepter un sous-amendement qui viserait à substituer le terme « environnement » au terme « terre vulnérable » afin de donner une perspective plus large à cette disposition.
Le président : Quel terme proposez-vous?
Le sénateur Kutcher : Environnement.
La sénatrice McCallum : Le mot que j’ai utilisé en cri correspond à « environnement », mais sa signification est beaucoup plus large. Il va plus loin encore. Mais la proposition me convient.
Le président : Quelqu’un devrait lire l’amendement dans sa formulation exacte.
La sénatrice Galvez : Puis-je poser une question au représentant du ministère?
Le président : Je vous en prie.
La sénatrice Galvez : Monsieur Moffet, pouvez-vous nous expliquer pourquoi « environnement » serait préférable à « écosystème »?
M. Moffet : Sénatrice, la rédaction de modifications législatives est notamment difficile du fait qu’il faut s’en tenir aux termes tels qu’ils sont définis par la loi, plutôt que par leur usage courant ou l’interprétation que l’on en fait généralement. Le terme « environnement » est déjà défini dans la LCPE. Il englobe les écosystèmes et leur fonctionnement. Compte tenu du libellé actuel de la Loi, le terme « environnement » serait celui qui serait le plus générique possible pour englober les terres, les eaux, le fonctionnement des écosystèmes et tout le reste.
[Français]
Le sénateur Carignan : Vous avez répondu à la question que je voulais poser aux fonctionnaires. Le terme « terre vulnérable » n’est pas défini. Le fait de l’ajouter serait même plus limitatif, car on vise l’environnement. Je ne pense pas qu’on ait besoin de spécifier qu’il s’agit de l’environnement, car le but du projet de loi est justement de protéger l’environnement. Le fait de l’inclure précisément dans ce sous-alinéa risquerait de poser des difficultés d’interprétation. De plus, le joindre aux termes « population vulnérable » ou « environnement » me semble diluer le sens du terme « population vulnérable ». En essayant d’être trop parfait, on devient imparfait.
[Traduction]
Le sénateur Kutcher : Pour officialiser le tout, je propose un sous-amendement pour que l’on écrive « ou un environnement » au lieu de…
Le président : Pourriez-vous relire le tout au complet avec les termes exacts?
Le sénateur Kutcher : Certainement; « le fait qu’il existe une population ou un environnement vulnérable relativement à la substance. »
Le président : Très bien.
La sénatrice McCallum : Cette proposition me convient. Je vais retirer la mienne.
Le président : Je vais lire le sous-amendement en anglais et en français encore une fois, après quoi nous le mettrons aux voix.
En anglais, ce serait « whether there is a vulnerable population or environment. » En français, ce serait :
[Français]
« [...] le fait qu’il existe une population vulnérable ou un environnement vulnérable ».
Je vais le relire.
[Traduction]
En anglais, ce serait donc « whether there is a vulnerable population or environment. »
[Français]
En français, il se lit comme suit :
« [...] le fait qu’il existe une population ou un environnement vulnérable ».
Sommes-nous d’accord? Que ceux qui sont d’accord lèvent leur main.
Le sénateur Carignan : Désolé, monsieur le président, mais j’ai demandé la parole.
Le président : Sénateur Carignan, vous avez une question?
Le sénateur Carignan : Oui. J’aimerais qu’on définisse ce qui constitue un environnement vulnérable.
[Traduction]
M. Moffet : Sénateurs, il y a deux choses qu’il serait peut-être bon que vous sachiez. Premièrement, le terme « environnement » est défini de façon très générale dans la Loi; et, deuxièmement, il est question d’un « élément de l’environnement […] vulnérable » à l’article 287 de la Loi qui traite de la détermination de la peine. Alors, nous avons déjà défini le concept d’environnement, et nous avons déjà établi un précédent pour la prise en compte d’un élément vulnérable de l’environnement. Cela pourrait être une façon de concrétiser la volonté exprimée par la sénatrice McCallum qui souhaite s’assurer que la recherche porte sur les éléments vulnérables de l’environnement en plus des populations vulnérables.
[Français]
Le sénateur Carignan : Pouvez-vous nous donner un exemple d’environnement vulnérable?
Le président : Monsieur Moffet, avez-vous entendu la question?
M. Moffet : Oui.
[Traduction]
La notion d’effets cumulatifs est de mieux en mieux comprise au sein de la communauté scientifique, si bien qu’un environnement pourrait être considéré vulnérable si, par exemple, il a été soumis à de nombreuses agressions pendant une période donnée et qu’un nouveau facteur de stress, sous la forme d’une nouvelle émission de polluants dont l’effet aurait pu être négligeable par ailleurs, pourrait avoir des impacts considérables sur cet environnement déjà affaibli à répétition au fil des ans.
Le président : D’accord. Est-ce que le sous-amendement est adopté? Levez votre main. Qui s’y oppose? C’est adopté.
Plaît-il aux honorables sénateurs d’adopter l’amendement tel que modifié? Levez votre main. Quelqu’un s’y oppose? L’amendement est adopté.
Nous allons maintenant passer à l’amendement de la sénatrice Galvez.
La sénatrice Galvez : C’est l’amendement no 29a dans votre feuille de route. Il fait suite aux autres amendements traitant de l’expérimentation sur les animaux. Il prévoit :
Que le projet de loi S-5 soit modifié à la page 9, par adjonction, après la ligne 17, de ce qui suit :
« 16.1 La même loi est modifiée par adjonction, après l’article 68, de ce qui suit :
68.1 (1) Les ministres ne peuvent recourir à des méthodes utilisant des animaux pour produire des données ou mener des enquêtes afin de déterminer, selon le cas :
a) si une substance est effectivement ou potentiellement toxique;
b) s’il y a lieu de prendre des mesures de contrôle — et, dans l’affirmative, d’en déterminer la nature — à l’égard de l’un ou l’autre des éléments suivants :
(i) une substance,
(ii) un produit qui en contient,
(iii) un produit qui est susceptible de rejeter une substance dans l’environnement, y compris une substance inscrite sur la liste des substances toxiques de l’annexe 1.
(2) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si :
a) d’une part, il est scientifiquement impossible d’obtenir les données ou de mener l’enquête autrement qu’à l’aide de méthodes utilisant des animaux;
b) d’autre part, les données ou l’enquête sont nécessaires pour atteindre des objectifs liés à la protection de l’environnement ou de la santé humaine. ».
Je rappelle qu’il ne s’agit pas d’interdire les essais sur les animaux. On veut seulement interdire les expérimentations animales qui ne sont pas nécessaires.
Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup, sénatrice Galvez, de traiter de ces enjeux vraiment cruciaux.
J’aurais une question pour nos fonctionnaires à ce sujet. Le gouvernement s’oppose à cet amendement du fait qu’il entraverait les activités d’évaluation et de gestion des risques en ajoutant des couches de bureaucratie. En outre, le gouvernement craint qu’il soit très difficile, voire impossible, de déterminer ce qui peut être scientifiquement possible ou ce qui est scientifiquement impossible.
En théorie, il pourrait être scientifiquement possible de réaliser une étude sans recourir à des animaux, mais cela exigerait 50 années de travail et coûterait 100 millions de dollars. Cela nous empêcherait dans les faits d’évaluer les risques comme il est nécessaire de le faire. Si l’on réalisait les essais sur un animal, cela prendrait beaucoup moins de temps et l’on obtiendrait les résultats plus rapidement. Ce sont donc les réserves du gouvernement par rapport à cet amendement.
Je souscris totalement au principe que vous défendez ici, mais j’aimerais que les fonctionnaires puissent éclairer notre lanterne.
Le président : Est-ce que vous pouvez nous aider à y voir plus clair?
M. Moffet : Je veux d’abord souligner que le critère qui serait établi au moyen de cet amendement serait beaucoup plus strict que ce que prévoit l’approche générale adoptée avec les amendements précédents qui visaient d’abord et avant tout à éviter les tests sur les animaux et à s’arrimer aux nouvelles pratiques internationales qui cherchent à remplacer, réduire ou raffiner l’utilisation d’animaux.
Je demanderais toutefois à mon collègue, Greg Carreau, de Santé Canada de vous expliquer plus en détail les répercussions que pourrait avoir cet amendement. Merci.
Greg Carreau, directeur général, Direction de la sécurité des milieux, Santé Canada : Merci beaucoup.
Comme on l’a mentionné quelques fois déjà, on s’efforce actuellement de réduire le recours aux tests réalisés au moyen d’animaux. L’expérimentation animale demeure pour l’instant l’indicateur le plus fiable des risques associés à différents problèmes de santé complexes, comme le cancer.
Il existe maintenant de nombreuses méthodes permettant d’effectuer des essais de toxicité sans avoir recours à des animaux. Nous utilisons ces méthodes pour les programmes de Santé Canada. Il y a cependant d’autres essais de toxicité qu’il est scientifiquement possible de réaliser, mais dont les résultats ne peuvent toujours pas être validés, faute d’une fiabilité scientifique suffisante pour en faire des indicateurs de la santé sur lesquels on pourrait se fonder.
La terminologie « scientifiquement possible » pourrait donc faire en sorte qu’il serait plus difficile pour les fonctionnaires de Santé Canada d’utiliser les données découlant de l’expérimentation animale alors même qu’elles représentent l’indicateur le plus fiable d’un risque pour la santé.
Je pense qu’il est important de noter en terminant que, parallèlement à ses efforts pour réduire le recours aux tests sur les animaux, Santé Canada poursuit ses recherches sur des méthodes pouvant remplacer ces tests, lesquelles doivent être validées au moyen de l’expérimentation animale. Le ministère continue donc d’effectuer des essais sur les animaux afin d’en arriver à mettre au point d’autres méthodes de test.
La sénatrice Galvez : Je rappelle que cet amendement ne vise pas à interdire les tests sur les animaux. Nous voulons interdire seulement ceux qui ne sont pas nécessaires.
Je peux constater qu’il s’agira en fait de savoir qui va déterminer ce qui est scientifiquement possible ou non. Il y a une question que j’ai posée à maintes reprises et que l’on ne cesse d’éluder. Qui effectue l’expérimentation? Est-ce l’industrie ou le gouvernement? Et qui prend la décision?
Cela nous ramène encore une fois à la question des risques, car c’est toujours la même qui se pose. Qui détermine quel risque est acceptable. Je n’ai jamais eu de réponse à cette question. Mais je suis très patiente, et je vais continuer de la poser.
Le président : Essayons encore une fois.
Monsieur Carreau, pouvez-vous répondre à cette question?
M. Carreau : Pour ce qui est des autres méthodes pouvant être scientifiquement valides, cela se fait en collaboration à l’échelle internationale. Il y a des lignes directrices pour les tests qui sont approuvées sur une tribune internationale pour déterminer, à notre satisfaction comme à celle de la plupart des pays du monde, ce qui peut constituer une méthode de substitution suffisamment rigoureuse pour servir d’indicateur fiable des risques pour la santé humaine. C’est donc le gouvernement qui s’en charge en collaboration avec des instances internationales.
Le président : Merci.
Le sénateur Patterson : Au sujet de cet amendement, nous savons tous à quel point le cancer peut ravager notre population. Je pense qu’aucune famille n’est à l’abri des effets dévastateurs de cette maladie.
Les fonctionnaires nous ont indiqué que les données découlant de l’expérimentation animale demeurent le moyen le plus fiable d’évaluer les traitements pour de terribles maladies comme le cancer. Le gouvernement s’emploie activement à chercher d’autres méthodes pour arriver au même résultat, mais doit effectuer des tests sur les animaux pour valider les méthodes en question.
La sénatrice Galvez nous dit que son amendement n’interdirait pas les tests sur les animaux. Mais l’amendement empêcherait la génération de données au moyen de tels essais sur les animaux, ce qui inclurait même les données permettant de valider les méthodes de substitution à l’expérimentation animale.
Je crains donc que l’amendement ait en réalité pour effet d’entraver les efforts du gouvernement pour mettre au point de nouveaux traitements qui ne sont pas fondés sur l’expérimentation animale. Il faut savoir si ces traitements fonctionnent vraiment. La seule façon de le savoir, c’est d’effectuer des essais sur des animaux. Cet amendement ne permettrait pas que des données soient générées afin de valider ces nouvelles méthodes de substitution. Je crois que cela irait à l’encontre des progrès souhaités dans le traitement de maladies terribles comme le cancer, et je ne pense donc pas pouvoir appuyer cet amendement.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Ma question s’adresse aux représentants du ministère.
[Traduction]
À la lumière de ce que disait le sénateur Kutcher, et peut-être aussi certains fonctionnaires, je crois comprendre que les principales réserves viennent du fait que, dans un premier temps, le paragraphe 1 de l’article 68.1 proposé établirait un principe limitant ou empêchant l’utilisation d’animaux vertébrés, alors que le paragraphe 2 offrirait une échappatoire à cet égard
On indique en effet dans ce second paragraphe que le recours aux vertébrés est envisageable s’il est scientifiquement impossible d’obtenir les données autrement. Je pense que le sénateur Kutcher a indiqué qu’il s’inquiétait notamment du fait qu’il s’agit là d’un seuil très élevé, car quelque chose peut-être scientifiquement possible et coûter des millions de dollars, ne pas être facilement accessible sur le marché, etc. Je comprends cette préoccupation et je la partage.
J’ai participé à la rédaction de ces dispositions avec le bureau de la sénatrice Galvez. Serait-il préférable que nous indiquions qu’il n’est pas raisonnablement possible d’obtenir les données? Nous abaisserions ainsi le seuil en précisant qu’il faut que cela ne soit pas raisonnablement possible. On prévoirait ainsi une exception que je qualifierais de raisonnable.
À moins que nos fonctionnaires aient des réserves à ce sujet, je proposerais que l’amendement soit modifié en ce sens. Mon sous-amendement viserait donc à remplacer le terme « scientifiquement » au paragraphe 2 par « raisonnablement ». On indiquerait donc qu’« il n’est pas raisonnablement possible d’obtenir les données ».
Le président : Il s’agirait donc de remplacer « scientifiquement » par « raisonnablement ».
[Français]
Pouvez-vous nous le lire en français?
Le sénateur Dalphond : En français, ce serait ce qui suit :
[…] d’une part, il n’est pas raisonnablement possible d’obtenir […]
Le président : Nous pourrions peut-être y réfléchir.
[Traduction]
La sénatrice McCallum : J’aimerais que les représentants de Santé Canada puissent nous dire de quelle façon on choisit les toxines qui vont faire l’objet d’une expérimentation animale, comment ces toxines sont portées à votre attention et de quelle manière le tout est acheminé. Qu’est-ce qui coûte le moins cher, les tests sur les animaux ou les autres méthodes? Est-ce que le coût a une incidence sur la décision qui est prise? C’est une question pour les gens de Santé Canada.
M. Moffet : Peut-être puis-je commencer à vous répondre avant de céder la parole à mon collègue de Santé Canada.
La sénatrice McCallum : D’accord.
M. Moffet : Il y a quelques enjeux à considérer. Nous souhaiterions principalement que l’on se concentre sur l’efficacité des tests et l’acceptation de leurs résultats.
Lorsque nous prenons des décisions ayant une incidence sur des substances utilisées partout dans le monde, nous devons nous assurer de le faire d’une manière qui sera reconnue par les autres pays. Comme le soulignait M. Carreau, nous y parvenons en nous en remettant dans la mesure du possible à des méthodes de test qui sont acceptées par la communauté scientifique internationale.
Il y a par ailleurs des enjeux liés au temps et aux ressources nécessaires pour effectuer ce travail accompli par le gouvernement. Nous cherchons bien sûr à prendre les décisions aussi rapidement que possible et en utilisant le moins possible de fonds publics. Ce sont là des considérations importantes pour le gouvernement, et tout particulièrement pour Santé Canada et Environnement et Changement climatique Canada. M. Carreau pourra peut-être fournir de plus amples détails sur l’efficacité et l’acceptabilité de ces méthodes de test.
M. Carreau : Merci, monsieur Moffet. Il y a effectivement de nombreuses autres méthodes qui ont été mises au point, notamment par exemple pour ce qui est de la sensibilisation cutanée et de l’irritation oculaire. Comme je le mentionnais précédemment, les problèmes de santé plus complexes, comme le cancer, compliquent l’élaboration de méthodes scientifiques de substitution. Des efforts sont déployés en ce sens, aussi bien au Canada qu’ailleurs dans le monde, mais il faudra un certain temps pour que la communauté internationale parvienne à mettre au point ces nouvelles méthodes pouvant devenir des indicateurs fiables de la santé.
Pour répondre à une autre question de la sénatrice, je ne crois pas que les coûts soient pris en considération. On s’est engagé, à l’échelle internationale comme au Canada, à mettre au point ces nouvelles méthodes de test. La difficulté continue de résider dans la complexité scientifique de l’exercice.
La sénatrice McCallum : Comment choisit-on les toxines qui seront soumises à des tests? D’où vient l’information? Comment décidez-vous quelles toxines seront testées?
M. Moffet : Cela répond à d’autres amendements du projet de loi. La loi actuelle comporte un certain nombre de voies ou de processus pour identifier les substances que nous devrions examiner, qui pourraient être préoccupantes et que nous évaluons. Le processus principal consiste à catégoriser toutes les substances qui étaient utilisées dans les années 1990. Nous avons maintenant terminé cet exercice. Vous verrez dans une disposition ultérieure que l’une des modifications proposées à la LCPE est l’obligation d’élaborer un plan de consultation, de publier et de mettre à jour régulièrement un plan de priorités afin que, ensemble, les ministres de l’Environnement et de la Santé puissent communiquer au public, à l’industrie et à la communauté scientifique les types de substances qui seront traitées en priorité au cours de la prochaine période. De cette façon, un processus continu est en place pour identifier les substances à évaluer pour déterminer si elles sont toxiques. L’objectif est de s’éloigner d’un entonnoir législatif et d’avoir un ensemble plus vaste de considérations pour s’assurer que l’élaboration de ce plan est fondée sur la contribution du public.
La sénatrice Sorensen : Je tiens à remercier le sénateur Dalphond, car j’allais prendre la même tangente que lui, alors j’appuierai ce sous-amendement. Il a été proposé à quelques reprises. Je pense que nous sommes tous du même avis en ce qui concerne les essais sur les animaux vertébrés, et je me souviens des observations concernant la convocation d’un groupe d’experts pour faire avancer ce concept visant à remplacer, à réduire et à optimiser, ainsi que pour mettre au point une sorte de stratégie pour réduire les essais sur les animaux. Je pense que nous sommes tous sur la même longueur d’onde.
Le sénateur Kutcher : Je pense qu’il y a eu beaucoup de progrès, mais il en faut encore plus en ce qui concerne les essais sur les animaux. Je suis ravi que ce dossier avance. Nous devrions peut-être voter sur le sous-amendement raisonnable.
Le président : Je suggère que nous nous prononcions sur le sous-amendement proposé par le sénateur Dalphond.
Il a été proposé par le sénateur Dalphond que le projet de loi S-5 soit modifié par adjonction, à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 68.1, de ce qui suit :
il n’est pas raisonnablement possible d’obtenir les données...
Et ensuite :
[Français]
(2) Le paragraphe (1) ne s’applique pas si :
a) d’une part, il n’est pas raisonnablement possible d’obtenir […] »
[Traduction]
Tous ceux qui sont en faveur du sous-amendement, veuillez lever la main. Quelqu’un y est-il opposé? Le sous-amendement est adopté.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement dans sa version modifiée? Tous ceux qui sont en faveur, veuillez lever la main. Tous ceux qui sont contre, faites le signe du pouce vers le bas. L’article 16 modifié est-il adopté?
Des voix : Adopté.
Le président : L’article 16.1 modifié est-il adopté? Vous êtes tous d’accord?
Une voix : D’accord.
Le président : L’article 17 est-il adopté? Il l’est.
L’article 18 est-il adopté?
Sénatrice Galvez, je pense que vous avez atteint votre quota?
La sénatrice Galvez : Je suis encore sur les animaux. Nous sommes tous des animaux. Nous sommes inclus.
Cet amendement est désigné dans votre feuille de route comme étant l’amendement 30a. Il se lit comme suit :
Que le projet de loi S-5 soit modifié à l’article 18, à la page 11, par adjonction, après la ligne 27, de ce qui suit :
« b.1) les méthodes, les procédures d’essai et les pratiques de laboratoire à respecter pour remplacer, réduire ou raffiner l’utilisation d’animaux vertébrés; ».
Bref, c’est pour être en phase avec l’amendement précédent.
Le sénateur Kutcher : Ce sera facile. Je veux le renforcer. Premièrement, ce devrait être a.1) et non pas b.1)
La sénatrice Galvez : Non, c’est l’autre.
Le sénateur Kutcher : On m’a dit que ça devrait être a.1).
Je voulais également ajouter « les conditions, méthodes, procédures d’essai ». Cela s’appliquerait aux conditions dans lesquelles les animaux sont gardés.
La sénatrice Galvez : Désolée, mais on ne vous entend pas.
Le sénateur Kutcher : Je veux ajouter le terme « conditions ».
La sénatrice Galvez : Où?
Le sénateur Kutcher : Le libellé serait « les conditions, méthodes et procédures d’essai » pour que l’amendement ajoute les conditions dans lesquelles les animaux sont gardés...
Mme Cardinal : Nous avons des copies à distribuer à tout le monde. Elles seront distribuées sous peu. À la fin, lorsque nous examinerons la motion visant à renuméroter les dispositions, ce sera correct. Ne vous souciez pas de la disposition a.1).
Le sénateur Kutcher : Vous m’en voyez très soulagé.
Le président : Y a-t-il des questions sur le sous-amendement proposé?
Le sénateur Dalphond : Je veux appuyer le sous-amendement. Il est logique, et il serait peut-être aussi sensé de le placer après l’alinéa a) car il reflète cet alinéa a), si bien qu’on aurait a.1), puis b), soit « la manière dont l’essai est réglé ».
Le président : S’il n’y a pas de question, puis-je passer au vote? Le sous-amendement proposé est-il adopté? Levez la main si vous êtes d’accord.
Une voix : Adopté.
Le président : Si vous n’êtes pas d’accord, faites un signe de pouce vers le bas. C’est adopté.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion modifiée? Tous ceux qui sont en faveur, veuillez lever la main. Formidable. Tous ceux qui sont contre? Non. Elle est adoptée.
L’article 18 modifié est-il adopté? Adopté. Bien.
L’article 19 est-il adopté?
La sénatrice Galvez : C’est quel numéro?
Mme Cardinal : C’est le 31a.
La sénatrice Galvez : C’est l’amendement 31a dans la feuille de route.
Encore une fois, cet amendement va dans le même ordre d’idées de la série d’amendements relatifs aux essais sur les animaux dans le plan d’action :
Que le projet de loi S-5 soit modifié à l’article 19, à la page 12, par substitution, à la ligne 15, de ce qui suit :
« a) qui précise les initiatives et les activités visant à promouvoir l’élaboration et la mise en œuvre de méthodes n’utilisant pas des animaux qui fourniraient suffisamment de renseignements pour permettre d’évaluer les risques d’atteinte à la santé ou à l’environnement que présentent les substances évaluées sous le régime de la présente partie;
a.1) qui doit énumérer les substances pour lesquelles ils ».
Et il se poursuit.
Le président : Y a-t-il des questions? C’est assez clair. Pas de question?
La sénatrice Miville-Dechêne : Mais pourquoi faire comme la première disposition? Est-ce que ça devrait être la priorité? Pourrions-nous mettre l’alinéa c)?
La sénatrice Galvez : C’est ce que la greffière a proposé.
La sénatrice Miville-Dechêne : Cela ne change rien? À mon sens, c’est une question de priorité.
Le sénateur Kutcher : Puis-je demander aux fonctionnaires ici présents s’ils pensent qu’une telle orientation favoriserait ou entraverait les stratégies exhaustives visant à promouvoir les essais que nous devons faire? Les fonctionnaires pourraient-ils nous dire ce qu’ils en pensent?
M. Moffet : Je ne pense pas que cela nuirait aux stratégies. Je pense qu’elle devrait être déplacée au bas de la liste. L’objectif principal de cette disposition, comme je l’ai expliqué plus tôt, est le plan selon lequel les ministres seraient tenus de publier et qui indiquerait essentiellement ce qu’ils vont faire, quelles sont les priorités en matière de gestion des substances toxiques, lesquelles nous allons évaluer et quelle sera l’orientation générale pour les prochaines années.
Étant donné l’intérêt des sénateurs pour la réduction des essais sur les animaux, il serait approprié d’inclure dans ce plan, entre autres, les activités que le gouvernement entreprendra pour réduire l’utilisation des essais sur les animaux, mais ce serait un élément ou un sous-élément du plan plutôt que l’élément clé.
[Français]
Le sénateur Carignan : En fait, je ne sais pas si c’est le bon moment de le dire, parce que je viens de le lire.
Lorsqu’on lit l’amendement incluant le nouvel alinéa a.1), on voit que cet alinéa est incompréhensible. Il y a une faute de structure que j’ai de la difficulté à identifier, mais l’alinéa doit être rédigé différemment, bien évidemment. On peut lire ce qui suit :
a.1) qui doit énumérer les substances pour lesquelles ils ».
En fait, les termes « ils » et « qui doit » me semblent problématiques. Il faudrait peut-être faire une correction de coquilles dans cet amendement, mais je conviens que cela ne touche pas directement l’amendement de la sénatrice Galvez.
[Traduction]
La sénatrice Galvez : Je crois savoir que les sénateurs ont demandé que l’amendement que j’ajoute puisse être placé à l’alinéa c). Il n’y a aucun problème avec cela mais, bien sûr, il y a de petites choses qui devront être modifiées. Par exemple, après l’alinéa a), vous avez mis « a) et ». Il ne devrait pas y avoir le mot « et ». Nous devrons le retirer. Puis-je avoir l’assurance que les greffiers s’en occuperont?
Le président : Oui.
La sénatrice Galvez : D’accord.
Le président : Est-ce que tout le monde comprend les légers changements que nous y apportons? Bien. Passons au vote sur l’amendement.
Mme Cardinal : Nous pourrions le faire à la fin pour la renumérotation. Si vous décidez que vous voulez que ce soit l’alinéa c), il peut faire l’objet d’une renumérotation à la fin de l’étude article par article.
Le président : Bien. Tous ceux qui sont en faveur de l’amendement proposé? Si vous vous y opposez, faites le signe du pouce vers le bas. Il est adopté.
Je pense que la sénatrice Galvez a une autre motion à proposer.
La sénatrice Galvez : C’est donc l’amendement 32 dans votre feuille de route. Il porte sur le remplacement et l’évitement, et il vise à apporter des clarifications.
Le terme est « individuellement ». Il se lit comme suit :
Que le projet de loi S-5 soit modifié à l’article 19, à la page 12, par substitution, à la ligne 38, de ce qui suit :
« stances par catégorie plutôt qu’individuellement en vue d’éviter les substitutions dans la même catégorie qui peuvent avoir un effet nocif; ».
Il clarifie davantage l’intention d’évaluer les substances par catégorie. Certains composés sont regroupés par catégorie. Lorsqu’on parle de composés pétroliers, on dit C10 à C20, C40 à C50. On ne mentionne pas le composé individuel. Ces composés sont gérés par catégorie. Ainsi, lorsqu’un des composants d’une catégorie est toxique, il y a de fortes chances pour que l’ensemble des composants de cette catégorie présente des éléments de toxicité, d’où l’intérêt de les classer par catégorie. Cela a pour objectif d’éviter le remplacement d’une substance par une autre de la même catégorie qui est tout aussi nocive.
Je pense avoir le soutien du gouvernement, mais mon collègue, le sénateur Kutcher, a peut-être un autre sous-amendement. Tant qu’il n’anéantit pas mon amendement, j’espère pouvoir l’appuyer.
Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup. Sénatrice Galvez, êtes-vous assise?
La sénatrice Galvez : Je suis assise.
Le sénateur Kutcher : Le gouvernement et moi-même appuyons cet amendement.
La sénatrice Galvez : Un miracle.
Le président : Passons au vote. Tous ceux qui sont en faveur de l’amendement? Si vous vous y opposez, veuillez faire le signe du pouce vers le bas.
L’article 19 modifié est-il adopté? Il est adopté. L’article 19 est-il adopté? C’est fait.
Avant que nous passions à l’article 20, qui semble faire l’objet de nombreuses opinions, nous avons atteint notre limite de temps et nous ne pouvons pas continuer. Encore une fois, merci beaucoup de cette matinée productive. Je vous en suis très reconnaissant.
[Français]
Je pense que nous avons fait de grands progrès. C’est un exemple à suivre pour notre prochaine réunion qui se tiendra bientôt.
(La séance est levée.)