LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 17 septembre 2024
Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 18 h 54 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada — Terre-Neuve-et-Labrador et la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada — Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.
Le sénateur Paul J. Massicotte (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Je m’appelle Paul J. Massicotte, je suis un sénateur du Québec et je suis président du comité.
Aujourd’hui, nous tenons une séance du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.
Avant de commencer, je voudrais demander à tous les sénateurs et aux autres participants qui sont ici en personne de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices visant à prévenir les incidents liés au retour de son.
Veuillez tenir votre oreillette éloignée de tous les microphones à tout moment. Lorsque vous n’utilisez pas votre oreillette, placez-la, face vers le bas, sur l’autocollant placé sur la table à cet effet.
Merci à tous de votre coopération.
Je vais demander à mes collègues du comité de se présenter, en commençant par ma droite.
La sénatrice Verner : Josée Verner, du Québec.
La sénatrice Oudar : Manuelle Oudar, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Prosper : P. J. Prosper, de la Nouvelle-Écosse, territoire mi’kmaq.
La sénatrice White : Judy White, de Ktaqmkuk aq Lapato’lk, mieux connue sous le nom de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Petten : Iris Petten, de Terre-Neuve-et-Labrador.
Le sénateur Francis : Brian Francis, d’Epekwitk, l’Île-du-Prince-Édouard.
Le sénateur D. M. Wells : David Wells, de Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Galvez : Rosa Galvez, du Québec.
La sénatrice McCallum : Mary Jane McCallum, du Manitoba.
Le sénateur Tannas : Scott Tannas, de l’Alberta.
[Français]
Le président : Je vous souhaite la bienvenue, chers collègues, ainsi qu’à tous les téléspectateurs de partout au pays qui regardent nos délibérations.
Aujourd’hui, le comité poursuit son examen du projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi de mise en œuvre de l’Accord atlantique Canada — Terre-Neuve-et-Labrador et la Loi de mise en œuvre de l’Accord Canada — Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers et apportant des modifications corrélatives à d’autres lois.
Nous accueillons aujourd’hui Jessica Ginsburg, avocate, et Patrick Butler, conseiller principal en énergie et en mines, de Kwilmu’kw Maw-Klusuaqn, de même que Sidney Peters, chef et coprésident de l’Assemblée des chefs mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse.
Je vous souhaite la bienvenue et vous remercie d’avoir accepté notre invitation. Dix minutes sont réservées pour vos allocutions d’ouverture.
La parole est à vous, madame Ginsburg. Vous serez suivie du chef Sidney Peters.
[Traduction]
Jessica Ginsburg, avocate, Kwilmu’kw Maw-Klusuaqn : Avec la permission du comité, j’aimerais donner au chef Peters la possibilité de prendre la parole avant moi.
Le président : Bien sûr.
Sidney Peters, chef et coprésident, Assemblée des chefs mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse : Kwe‘! Bonsoir, membres du Sénat et invités. Je suis le chef Sidney Peters, chef de la Première Nation de Glooscap et coprésident de l’Assemblée des chefs mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse. Je suis heureux d’être présent aujourd’hui et de comparaître devant vous pour vous adresser nos déclarations.
Comme vous l’avez mentionné, je suis accompagné de mes deux techniciens, Jennifer et Patrick, qui répondront à vos questions d’ordre technique. Comme vous le savez, en tant que dirigeants, nous ne connaissons pas toujours tous les détails, et ils sont là pour répondre à toutes les questions vraiment précises.
Je voulais souligner que, bien sûr, en 2010, nous avons établi une relation de travail avec les gouvernements provincial et fédéral par l’intermédiaire de notre Cadre de référence relatif au processus de consultation entre les Mi’kmaqs, la Nouvelle-Écosse et le Canada, qui a été élaboré et mis en œuvre par la suite dans le cadre du processus néo-écossais, ou le Made-in-Nova Scotia Process, sous la direction de l’Assemblée des chefs mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse. À l’heure actuelle, la Première Nation de Membertou est la seule communauté mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse qui ne fait pas partie de notre assemblée.
Dans le cadre de notre processus de consultation, KMK a coordonné et facilité des consultations auxquelles ses représentants ont participé avec les gouvernements fédéral et provinciaux sur des centaines de projets et d’initiatives qui pourraient avoir une incidence sur nos droits, notamment les droits de pêche, protégés en vertu de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Nous comparaissons devant vous aujourd’hui parce que les activités qui seront autorisées sous le régime du projet de loi C-49 pourraient avoir des répercussions négatives sur nos droits prévus à l’article 35.
Les gouvernements provincial et fédéral ont eu amplement l’occasion de discuter du projet de loi C-49 avec les Mi’kmaqs, mais ils ne l’ont pas fait. Compte tenu du défaut de la Couronne de tenir des consultations et de la nature longue et très technique de ce projet de loi, nous sommes heureux d’avoir la possibilité de soulever nos préoccupations auprès de vous aujourd’hui.
Le premier élément que je veux aborder avec vous aujourd’hui est l’obligation de tenir des consultations. La Couronne a cette obligation en ce qui a trait aux décisions concernant nos ressources lorsque celles-ci peuvent avoir des répercussions potentiellement graves sur nos droits et nos titres ancestraux. Le projet de loi C-49 est structuré comme une longue série de décisions de planification stratégique, dont le point culminant est l’autorisation d’effectuer des travaux dans le cadre de projets d’énergie renouvelable extracôtiers. Le projet de loi ne prévoit aucune consultation, ou des consultations inadéquates, relativement à la réglementation, aux directives, aux principes, aux recommandations sur les énergies renouvelables extracôtières, aux appels d’offres, aux permis visant des terres submergées et aux autorisations.
Nous voudrions que les changements suivants soient apportés : le processus de consultation devrait couvrir tous les principaux points de décision du processus de planification stratégique, et le projet de loi devrait être structuré de manière à favoriser le respect de ces obligations de consultation avant que les décisions finales ne soient prises. Le processus de planification commence par la réglementation, puis se poursuit avec les directives, les principes, les recommandations sur l’énergie renouvelable extracôtière, les appels d’offres et les permis visant des terres submergées, ce qui aboutit à des autorisations qui n’ont pas autrement fait l’objet de consultations dans le cadre du processus prévu par la Loi sur l’évaluation d’impact.
Le projet de loi doit également tenir compte des évaluations environnementales, des évaluations régionales et des évaluations stratégiques menées par la régie. Nous croyons qu’il devrait y avoir des déclencheurs et des facteurs clairs qui guident l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la régie et les exigences du processus, y compris la tenue de consultations aux moments appropriés.
Le thème de l’obligation de tenir des consultations est étroitement lié à l’information que la régie est autorisée à communiquer pour s’acquitter de son obligation. L’article 122 du projet de loi traite de la communication de renseignements, tout comme l’article 19. Nous voulons qu’une exception soit ajoutée à l’un de ces articles pour que, comme dans le cas des autres ordres de gouvernement, les gouvernements autochtones aient le droit d’accéder à l’information aux fins de consultations en vertu de l’article 35 sans avoir d’abord besoin du consentement de la partie qui l’a fournie. Si un promoteur juge que les documents qui font état de répercussions sur nos droits prévus à l’article 35 contiennent des renseignements confidentiels, l’intervention appropriée consiste à négocier une entente de confidentialité avec le groupe autochtone consulté, et non à limiter la divulgation de renseignements clés.
Nous sommes conscients du fait qu’on ne connaît pas encore toutes les répercussions potentielles de l’énergie renouvelable extracôtière sur les droits de pêche. Ce sont des technologies nouvelles et émergentes, et leur incidence sur les espèces océaniques sont encore à l’étude dans le monde entier. Les répercussions pourraient aller de problèmes liés à la sécurité et à la navigation à des zones qui deviennent inaccessibles ou interdites à nos pêcheurs, en passant par le déplacement d’espèces océaniques ou des changements touchant les conditions de l’eau, par exemple.
Compte tenu de ces incertitudes et de l’importance fondamentale de la subsistance, de notre gagne-pain et de la pêche commerciale, il est particulièrement décevant qu’il n’y ait eu aucune discussion à ce sujet avant le dépôt du projet de loi. Nous avons entendu dire haut et fort que la participation des communautés mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse est essentielle au succès à long terme du secteur de l’énergie renouvelable extracôtière. Notre participation fait partie intégrante de la résolution des problèmes historiques, de la gestion des défis actuels en matière de ressources et de l’élaboration de structures de cogestion.
Dans le passé, le développement du Canada a souvent entraîné d’importantes disparités économiques pour nos communautés, empiété sur nos droits et créé des déséquilibres de pouvoir et des tensions sociales dans les régions. Ces difficultés persistent dans le secteur des pêches, et je n’ai pas besoin de souligner les tensions continues qui existent entre les pêcheurs mi’kmaqs et non autochtones, ainsi qu’avec le ministère des Pêches et des Océans du Canada. Pour évaluer et atténuer les répercussions sur nos droits de pêche, en tenir compte et nous indemniser à cet égard, il faut adopter une approche à plusieurs volets. Dans le cadre de cette approche, la Couronne doit notamment s’acquitter de son obligation de tenir des consultations, en commençant par les premiers points de décision du processus de planification stratégique, avant que les décisions ne soient prises.
L’un des principes énoncés dans le projet de loi porte sur le fait d’accorder de l’importance à la prise en compte des effets sur les activités de pêche pendant le processus de délivrance des permis visant des terres submergées. Nous appuyons le sentiment qui sous-tend ce principe, surtout compte tenu des possibilités de réconciliation économique importantes pour nos communautés grâce à l’exploitation des éoliennes au large des côtes, mais nous continuons de nous attendre à ce que le Canada respecte son obligation constitutionnelle de tenir des consultations au titre du Cadre de référence relatif au processus de consultation entre les Mi’kmaqs, la Nouvelle-Écosse et le Canada. Un projet de loi comme celui-ci fait partie intégrante de la protection de nos droits et de nos ressources et de la promotion de notre participation économique en tant que communautés des Premières Nations.
Il faut veiller à ce que le régime d’indemnisation qu’il prévoit tienne compte de tous les types de pertes, et pas seulement de celles causées par des débris ou des substances néfastes. Ces pertes pourraient comprendre le déplacement de pêcheurs ou de poissons hors des lieux de pêche traditionnels ou découler de l’utilisation de nouvelles technologies, car ces conséquences sont toujours imprévisibles.
Avant de céder la parole à Jessica Ginsburg de KMK, je tiens à remercier les sénateurs de m’avoir invité à comparaître aujourd’hui. Il est important pour les communautés que nous représentons d’avoir la possibilité de faire connaître leurs préoccupations et de savoir que les Mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse sont représentés dans le cadre de ces discussions. Merci. Wela’lioq.
Mme Ginsburg : Bonjour. Je m’appelle Jessica Ginsburg, et je suis avocate à Kwilmu’kw Maw-Klusuaqn. Je comparais devant vous aujourd’hui non pas pour m’opposer au projet de loi C-49, mais pour militer en faveur d’un projet de loi qui respecte les droits constitutionnels des Mi’kmaqs et qui établit un juste équilibre entre la promotion des possibilités de développement et la promotion de nos communautés de pêcheurs. Comme l’a souligné le chef Peters, il s’agit d’un projet de loi long et très technique, comme vous le savez tous, et il était important pour nous d’effectuer notre examen afin de comprendre ses répercussions et ses conséquences.
Nous sommes heureux d’avoir la possibilité de discuter avec vous aujourd’hui. Malheureusement, il ne semble pas que l’on nous donnera la même possibilité à l’échelon provincial. En ce moment même, la Nouvelle-Écosse fait adopter à toute vapeur son projet de loi parallèle, le projet de loi 471, Advancing Nova Scotia Opportunities Act, ou loi visant à favoriser les possibilités en Nouvelle-Écosse. Ce projet de loi a franchi l’étape de la deuxième lecture le 12 septembre, deux jours seulement après sa présentation, et, malheureusement, la seule journée allouée au comité responsable de la modification des lois pour la réception de mémoires était hier, ce qui entrait en conflit avec le voyage que nous avons effectué ici pour discuter avec vous aujourd’hui.
Je vais reprendre là où le chef Peters s’est arrêté, avec les évaluations régionales. KMK a participé activement aux évaluations régionales des éoliennes extracôtières en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve depuis leur lancement en avril 2022. Le projet de loi n’accorde pas de poids à ces évaluations régionales et ne tient pas compte des recommandations dans son processus de planification. Cette omission mine et sous-estime tout le temps et toutes les ressources que nous avons consacrés aux évaluations régionales, et elle donne à penser que les divers ministères fédéraux et provinciaux qui travaillent sur les éoliennes extracôtières adoptent une approche compartimentée.
Nous demandons un amendement qui permettrait que l’on lance des appels d’offres et octroie des permis visant des terres submergées uniquement dans les zones qui ont été recommandées aux fins de développement dans le cadre des évaluations régionales. À l’heure actuelle, sous le régime de la Loi sur l’évaluation d’impact et de son règlement d’application, le gouvernement peut dispenser les projets éoliens extracôtiers des évaluations d’impact propres au projet à la suite d’une évaluation régionale. Si l’on n’accorde pas dans le projet de loi un poids approprié aux évaluations régionales, il est possible que ces évaluations puissent être utilisées comme moyen de contourner les évaluations propres au projet plutôt que comme moyen de prendre des décisions plus éclairées et graduelles au sujet des éoliennes extracôtières.
Ensuite, je vais aborder l’aide financière aux participants. Le projet de loi ajouterait l’article 142.022 proposé, qui prévoit que :
[l]a Régie peut établir un programme d’aide financière pour faciliter la participation du public et des peuples autochtones du Canada aux consultations relatives à toute question concernant la zone extracôtière.
En revanche, sous le régime de la Loi sur l’évaluation d’impact, l’agence « est tenue » d’établir un programme d’aide financière aux participants aux évaluations d’impact et aux évaluations régionales et stratégiques. Il y a d’autres exemples de programmes obligatoires d’aide financière aux participants, comme celui prévu dans la Loi sur la Régie canadienne de l’énergie. De plus, les tribunaux tiennent de plus en plus compte du fait qu’on a offert ou non une aide financière aux participants comme facteur dans l’évaluation de la solidité du processus de consultation de la Couronne.
En conséquence, nous recommandons que le programme d’aide financière aux participants prévu dans ce projet de loi devienne obligatoire. C’est particulièrement important dans ce contexte pour trois raisons : premièrement, le développement de l’énergie renouvelable extracôtière est un processus qui est long, nouveau et très technique et qui exigera que les communautés aient accès à des ressources et à une expertise importantes afin qu’elles puissent participer sur un pied d’égalité. Deuxièmement, les consultations autochtones en vertu de l’article 35 devraient commencer bien avant l’étape de l’évaluation d’impact. Troisièmement, la régie pourrait mener des évaluations environnementales, des évaluations régionales et des évaluations stratégiques qui ne sont pas visées par la Loi sur l’évaluation d’impact.
Le dernier thème que j’aimerais aborder est le principe relatif aux contrats de service au titre de l’article 98.7 proposé. Cette section énonce trois nouveaux principes, dont deux se rapportent à la fourniture de biens et de services. Le premier principe concerne la capacité de « toute société canadienne ou tout individu » d’essayer, dans des conditions de libre concurrence, d’obtenir des contrats de fourniture de biens et de services à l’appui de l’industrie de l’énergie renouvelable extracôtière. Le deuxième principe souligne qu’il est important de veiller à l’élaboration de mesures pour augmenter la participation des groupes sous-représentés à la fourniture de biens et de services.
Il s’agit d’un domaine d’intérêt majeur et d’un avantage économique potentiel pour les peuples autochtones, et, pourtant, malgré l’accent qu’il met sur la participation des groupes sous-représentés, le libellé limité à « toute société canadienne ou tout individu » n’inclut pas les divers types d’entités autochtones qui pourraient souhaiter soumissionner pour ce type de travaux.
Par conséquent, nous recommandons que le libellé de cette disposition soit rendu plus inclusif par l’ajout du terme « organisation autochtone » au texte de l’alinéa 98.7a) et par l’ajout de définitions pour les termes « organisation autochtone » et « corps dirigeant autochtone ».
On l’a fait dans le cas d’autres projets de loi et lois. Par exemple, le projet de loi S-273 a été modifié de manière à inclure ces termes dans la définition de « personne », dans le contexte des ententes relatives à la conception, à la construction ou à l’exploitation du réseau de digues de l’isthme de Chignecto. Ces termes figurent également dans des lois comme la Loi sur le ministère des Services aux Autochtones.
Je vais m’arrêter là. Je remercie le comité de nous avoir permis de venir nous adresser à vous aujourd’hui.
Le président : Merci beaucoup, madame Ginsburg.
Nous avons beaucoup de questions à vous poser. Manifestement, le sujet suscite beaucoup d’enthousiasme. Il est très complexe, et nous sommes vraiment sensibles à votre point de vue.
La sénatrice White : Je remercie les témoins, et Wela’lin, chef Peters. Il est toujours bon d’avoir un chef et un aîné parmi nous. Je suis honorée que vous soyez des nôtres aujourd’hui. Comme vous l’avez tous mentionné, la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador et certaines communautés mi’kmaqs manifestent certainement beaucoup d’intérêt.
Compte tenu des préoccupations au sujet du processus de consultation, que vous avez adéquatement décrites, croyez-vous qu’il y a une façon de faire en sorte que le projet de loi puisse être adopté sous sa forme actuelle et que des consultations significatives et continues puissent avoir lieu à une étape ultérieure? Pensez-vous que ce soit possible? Dans l’affirmative, à quoi le processus ressemblerait-il? Sinon, c’est bien aussi.
M. Peters : Merci beaucoup de poser cette question.
Celle que je poserais en retour est la suivante : si le projet de loi a été adopté tel quel, quelles sont les répercussions sur la réglementation, et quelle incidence les consultations ont-elles sur le projet de loi? D’après ce que j’ai toujours compris, on adopte une loi, et on prend le règlement par la suite. Mais, si le projet de loi est adopté, comment pourrons-nous tenir des consultations après coup? Voilà ce que je ne comprends pas.
C’est malheureux, pour être honnête avec vous. C’est frustrant pour nous. Les Mi’kmaqs éprouvent de la frustration à l’idée d’avoir consacré beaucoup de temps au processus néo-écossais et d’en avoir passé beaucoup à rencontrer des représentants de la province et du gouvernement fédéral. La façon dont cela s’est passé… d’après ce que je crois savoir, il y a eu des lettres dans lesquelles il était question de collaboration, mais la collaboration n’est pas de la consultation. Je ne sais pas comment on en est arrivé à ce stade. Je suis un peu frustré de constater qu’on ait pu se rendre aussi loin sans que nous le sachions, en tant que nation de la Nouvelle-Écosse… sans vraiment comprendre.
Nous comprenons véritablement l’importance du développement économique pour nos communautés, mais nous devons aussi avoir la possibilité d’être consultés à ce sujet. Il ne s’agit pas uniquement de développement économique. À mon avis, c’est là que les choses sont parties à la dérive.
Je voudrais que ma nation, ou à l’échelon de l’assemblée… demander cette possibilité d’être consultés. C’est tout ce que nous demandons. Nous ne demandons pas de retarder le processus ou quoi que ce soit. Tout ce que nous demandons, c’est d’avoir la possibilité d’être consultés. C’est la seule raison pour laquelle nous sommes là.
La sénatrice White : Merci.
Le ministre Wilkinson a fourni une longue liste de communautés et d’organisations autochtones avec lesquelles on a communiqué, selon lui. Manifestement, il y a eu des lacunes, du fait que toute une province — en fait, 12 collectivités — affirme que ce n’est pas le cas. Comment pouvons-nous rendre la stratégie du gouvernement plus efficace dans l’avenir, pas tant pour ce projet de loi que pour l’avenir? De toute évidence, ce que vous dites, c’est que cela n’a pas fonctionné.
M. Peters : Au bureau du chef, nous recevons presque chaque jour des lettres concernant des consultations. Nous en recevons qui disent : « Nous voulons tenir des consultations sur l’installation d’un ponceau dans une entrée de cour », ou je ne sais quoi. Les dirigeants examinent la lettre. Nous avons notre bureau — celui de KMK, celui de l’assemblée — qui essaie d’examiner ces lettres, et nous avons reçu des centaines et des centaines de dossiers sur lesquels on travaille.
Ce qui m’inquiète ou me dérange réellement, c’est qu’on joue avec les mots. S’agit-il de collaboration? S’agit-il de consultations? De quoi s’agit-il? La véritable collaboration ou la création de cette relation… c’est qu’il faudrait qu’on nous dise : « Oui, nous voulons vraiment vous consulter. » Il y a l’obligation de tenir des consultations, et c’est tout ce que nous avons demandé. Nous recevons beaucoup de lettres envoyées pour nous dire : « Nous aimerions collaborer avec vous. » Que signifie vraiment le mot « collaboration »? S’agit-il réellement de consultations, ou bien allons-nous simplement avoir une discussion et réunir tout le monde?
Dans le cas d’un projet de loi comme celui-ci et compte tenu de sa réelle, véritable importance, je pense que nous aurions dû avoir cette possibilité.
La sénatrice Petten : Je vous remercie infiniment d’être des nôtres ce soir. Je me réjouis de vous revoir tous les trois, chef Peters, madame Ginsburg et monsieur Butler. J’ai été tellement heureuse d’avoir pu m’entretenir avec vous lorsque je suis allée à Halifax, en août, et je tiens à vous remercier pour votre mémoire et les commentaires que vous avez formulés ce soir.
En août, l’une des choses dont nous avons discuté concernait les possibilités économiques — que vous venez de mentionner — qu’offrira le projet de loi, et je me demande si vous pourriez nous faire part de vos réflexions sur la participation des Mi’kmaqs à ce processus jusqu’à maintenant et s’ils pourraient souhaiter participer à des projets éoliens extracôtiers dans l’avenir.
M. Peters : Comme vous le savez, chaque communauté travaille de façon indépendante, et il y a des organisations ou des entreprises qui s’adressent à ses membres pour leur parler des possibilités et de quoi que ce soit. Ce pourrait être près de leur collectivité ou peu importe. Elles ne communiquent pas nécessairement toujours cette information ou le nom des entreprises avec lesquelles elles travaillent.
L’Assemblée des chefs mi’kmaqs de la Nouvelle-Écosse donne à ses communautés la possibilité de le faire, car bon nombre d’entre elles trouvent que c’est vraiment difficile, et elles ont besoin de ces possibilités de travailler avec diverses entreprises. Est-ce qu’elles en informent toujours tout le monde? Pas vraiment. Si c’est une occasion en or et qu’il y a de l’argent à faire, habituellement, elles vont le chercher. Voilà ce qui arrive.
Ici, par exemple, je sais que vous avez vu des lettres ou je ne sais quoi. Il y a trois communautés qui travaillent avec une entreprise, et c’est très bien. Nous ne sommes pas contre l’énergie renouvelable ou quoi que ce soit du genre. Ce qui nous préoccupe vraiment, c’est la possibilité… et pourquoi n’avons-nous pas été consultés? Parce que l’autre chose en ce qui concerne la collaboration et les consultations, c’est que, eh bien, les consultations sont consignées officiellement. La collaboration se résume à dire « Nous avons collaboré », mais elle n’est pas consignée officiellement.
Le sénateur D. M. Wells : Je remercie les témoins de leurs exposés, de leur présence ici et de nous avoir forcés à vous inviter alors que nous aurions dû le faire avant. Il est important de le reconnaître.
En ce qui concerne l’aide financière aux participants et les consultations de base, considérez-vous que les amendements qui pourraient être apportés au projet de loi devraient être carrément axés sur la Nouvelle-Écosse ou sur les deux offices des hydrocarbures extracôtiers? Ce n’est pas grave si vous ne l’avez pas fait. Je me demande simplement si vous avez pensé à Terre-Neuve-et-Labrador ou si c’est seulement pour la Nouvelle-Écosse.
M. Peters : Mme Ginsburg pourra probablement vous donner plus de détails que moi, mais pour ma part, en tant que membre de la nation mi’kmaq, j’estime qu’il est important que nous travaillions en tant que nation, et pas seulement avec une région en particulier. C’est ce que nous essayons de faire… je ne dis pas qu’il faut « prêcher », mais nous essayons de comprendre à quel point la nation mi’kmaq est importante, mais en tant que nation mi’kmaq, nous devons vraiment travailler là-dessus ensemble.
Je ne suis pas ici uniquement pour la Nouvelle-Écosse. Je pense que les consultations sont importantes partout au pays. Ce n’est pas seulement pour la Nouvelle-Écosse. Je pense qu’il faut tenir des consultations à Terre-Neuve-et-Labrador, au Nouveau-Brunswick et à l’Île-du-Prince-Édouard.
Je vous cède la parole, madame Ginsburg.
Mme Ginsburg : Oui. Je dirais que, d’un point de vue juridique, les communautés autochtones de partout au pays font face aux mêmes défis dans le cadre des consultations. Comme je l’ai mentionné dans mes observations, lorsque les tribunaux cherchent à déterminer si la Couronne a rempli son obligation de tenir des consultations, surtout en ce qui concerne les types de développements d’ordre très technique qui nécessitent souvent une expertise particulière que les organisations autochtones ne possèdent pas nécessairement, les tribunaux vérifient de plus en plus si les règles du jeu sont équitables, notamment sur le plan économique. Une aide financière a-t-elle été offerte aux participants? C’est un facteur, et c’en serait un dans le cas de toute évaluation, où que ce soit. Si le fait que la Couronne s’est acquittée de son obligation de tenir des consultations était contesté, ce pourrait être un facteur que l’on soulèverait. De fait, au titre de la loi, je ne vois pas pourquoi ce serait différent dans une autre région du pays.
Le sénateur D. M. Wells : Vous avez mentionné l’inclusion dans le projet de loi de l’article 98.7 proposé concernant la fourniture de biens et de services. Vous savez peut-être que, sous le régime des lois de mise en œuvre des accords, les offices sont responsables de quatre catégories, soit la santé et la sécurité, la gestion des ressources, l’environnement et les retombées industrielles. Voyez-vous des entités autochtones… et je ne sais pas si je devrais les appeler « entreprises », parce que je ne sais pas comment elles sont structurées, mais je sais que, dans le projet de loi proposé, on dit « toute société canadienne ou tout individu ». Les entités autochtones qui veulent profiter des avantages économiques des activités extracôtières ne seraient-elles pas englobées dans la catégorie « sociétés canadiennes », ou sont-elles quelque chose de différent?
Mme Ginsburg : Elles pourraient être quelque chose de différent. Certaines communautés auraient une entité constituée en personne morale, mais parfois, ce pourrait être une bande. On s’est demandé si les bandes étaient considérées comme des personnes morales à diverses fins. Une bande n’est qu’un exemple. Il pourrait également y avoir d’autres types de structures d’entreprise, et il n’y aurait pas nécessairement de société en cause. S’il s’agissait d’une société, l’entité entrerait, en quelque sorte, dans une catégorie bien précise, quoique, compte tenu de l’objectif des principes d’inclusion des groupes sous-représentés, il est à espérer qu’on inclurait également les différents types de structures que ces groupes sous-représentés pourraient assumer.
Le sénateur D. M. Wells : Merci.
La sénatrice Galvez : Merci beaucoup de votre exposé très important et intéressant. Il clarifie, et il fournit également plus de détails et nous aide à comprendre ces consultations avec les peuples autochtones, quand elles sont significatives et quand elles ne sont, comme vous l’avez mentionné, que de la collaboration. Ce n’est pas la première fois que nous entendons dire que les communautés sont submergées de courrier et de questions, mais cela ne veut absolument pas dire qu’elles sont dûment consultées.
En étudiant ce cas, j’en suis arrivée non pas à cette conclusion, mais à cette compréhension. Depuis 2010, une douzaine de collectivités ont conclu une entente avec le gouvernement de la Nouvelle-Écosse afin d’être consultées. Cette entente s’intitule « Cadre de référence relatif au processus de consultation entre les Mi’kmaqs, la Nouvelle-Écosse et le Canada ». Il est établi depuis 2010. Nous, ici, au sein du comité, avons étudié la modernisation de la Loi sur l’évaluation d’impact, et le projet de loi contient aussi plusieurs dispositions qui suscitent le besoin de consulter les communautés. J’étais tellement heureuse qu’en 2021, le 21 juin, jour du solstice, nous ayons adopté la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, ou DNUDPA. Je peux voir que trois grands textes de loi ont été adoptés à l’appui de cette consultation significative et inclusive.
Je me demande si nous ne confondons pas une évaluation d’impact de ce projet de loi avec une évaluation d’impact d’un projet en particulier. Je pense qu’éventuellement, lorsqu’un de ces promoteurs trouvera l’endroit exact où il veut développer un projet d’énergie éolienne, il y aura aussi une autre occasion de tenir des consultations. N’est-ce pas ainsi que cela devrait fonctionner?
Je comprends votre argument selon lequel l’évaluation régionale et stratégique doit être incluse, alors la deuxième question est la suivante : devrait-elle être incluse dans la réglementation de l’énergie? Devrions-nous le leur dire, mais pas maintenant?
Mme Ginsburg : En ce qui concerne votre première question, comme vous l’avez mentionné, il y a la Loi sur l’évaluation d’impact modernisée, puis il y a l’évaluation d’impact à l’étape de l’autorisation. C’est non pas pour toutes les autorisations, mais pour certaines, et on peut s’attendre à ce que les projets aillent de l’avant en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact, à moins qu’ils ne soient exemptés, ce qui est également une possibilité.
Toutefois, relativement à l’obligation de tenir des consultations, il faut consulter les Autochtones sur les décisions concernant la planification stratégique. Les autorisations — si vous les imaginez comme une pyramide — sont au bas de la pyramide. Il ne s’agit aucunement de les minimiser, mais la chaîne décisionnelle commence au-dessus d’elles. Certaines décisions sont contraintes ou déjà prises au moment où on arrive à l’étape de l’autorisation. Notre mémoire contient un petit diagramme. Il y a la réglementation, les directives, les principes, les recommandations sur les énergies renouvelables extracôtières, les appels d’offres, les permis visant des terres submergées et l’autorisation. La liste est très longue.
L’arrêt Haïda est une des affaires faisant le plus autorité concernant l’obligation de tenir des consultations. Il ne mettait pas en cause l’étape de la délivrance de permis, qui équivaudrait davantage aux autorisations. C’était l’étape de l’octroi de concessions. L’une des choses qui ont été défendues dans cette affaire, c’est l’importance de consulter les Autochtones plus haut, parce que certaines des décisions contraignantes avaient déjà été prises. Même si la Loi sur l’évaluation d’impact peut entrer en jeu à l’étape de l’autorisation, elle n’élimine pas la nécessité de tenir des consultations par d’autres moyens, plus haut dans la chaîne décisionnelle.
Pourriez-vous me rappeler votre deuxième question?
La sénatrice Galvez : Je crois comprendre votre réponse.
Mme Ginsburg : Oui.
La sénatrice Galvez : Ce que je crois comprendre, c’est que vous avez besoin qu’on vous rassure quant au fait que la synergie de la décision vous inclura toujours, mais elle inclura qui? La communauté qui se trouve à côté du projet? Ou bien voulez-vous que ce soit toutes les communautés? Je vous prie de me le dire.
Mme Ginsburg : Pour en venir à ce que vous disiez à propos du besoin de nous rassurer, qui se rapporte à votre question de savoir s’il serait acceptable d’adopter le projet de loi tel quel, je considère que les deux sont liés. J’aimerais prendre un moment pour en parler. Le libellé actuel du projet de loi comporte des dispositions qui rendraient très difficile la tenue des consultations que nous demandons et que nous recommandons.
Les règlements ne devraient pas servir à modifier les lois. Si c’est dans la loi et que c’est problématique, c’est dans la loi. Par exemple, le projet de loi énonce déjà les principes. Il y a une section sur les principes. Ils sont déjà établis. Les principes influencent les décisions subséquentes. Ils ne seront pas modifiés plus tard. Ils sont enchâssés dans la loi, ou devrais-je dire dans le projet de loi. Si nous voulons influencer les principes, c’est maintenant que nous en avons la possibilité.
Un autre article du projet de loi prévoit que les modalités des licences, ainsi que les modifications apportées aux licences, peuvent être négociées en privé entre les titulaires de licences et la régie. C’est prévu dans le projet de loi. Ce n’est pas un bon exemple de consultation. Il est prévu que ces deux parties peuvent conclure cette entente.
S’il y a des problèmes de ce genre, à mon avis, il ne faut pas les régler à l’étape de la réglementation; c’est quelque chose qu’il faut régler tout de suite avant que le problème ne soit enchâssé.
Je me souviens maintenant de votre deuxième question. Elle portait sur les évaluations régionales et ce que nous recommandons. C’est un peu mêlant. Le projet de loi mentionne des évaluations régionales que la régie pourrait effectuer, et il y a les évaluations régionales au titre de la Loi sur l’évaluation d’impact. On les désigne par le même terme, ce qui est malheureux, car elles ne sont pas les mêmes.
Les évaluations régionales en cours, auxquelles nous avons consacré tellement de temps, sont prévues dans la Loi sur l’évaluation d’impact. Nous dirions qu’elles consistent en partie à faire beaucoup de démarches pour ce qui est d’examiner les utilisations conflictuelles des terres ou des océans, par exemple entre les pêches et les projets potentiels d’éoliennes extracôtières. On fait le travail scientifique, le travail de recherche. Le projet de loi ne reconnaît pas du tout ces évaluations ni ne leur donne un rôle. Elles ne sont pas du tout mentionnées.
Nous recommandons que l’on ne fasse pas d’appel d’offres et que l’on ne délivre pas de permis dans les régions qui n’ont pas fait l’objet d’une recommandation de développement dans le cadre de ces évaluations régionales. Quant à savoir où elles devraient être intégrées dans le processus, c’est à un stade relativement précoce, juste avant l’appel d’offres. Il ne devrait pas y avoir d’appels d’offres dans des régions qui ne sont pas recommandées aux fins de développement à l’issue de ces évaluations régionales. J’espère que cela répond à votre question.
Le président : Merci.
La sénatrice McCallum : Je commencerai par dire qu’on n’a pas tenu de consultations avec les chefs mi’kmaqs et que nous avons maintenant ce projet de loi. La seule façon de dissiper vos préoccupations est de présenter des demandes sous la forme d’amendements. Vous demandez à jouer un rôle actif en tant que titulaires de droits et qu’organismes qui représentent vos valeurs sociales, culturelles et environnementales, parce que vous êtes un peuple qui dépend de l’eau. Exact?
Quand on regarde la dévastation causée par les sociétés extractives sur le territoire, on constate que l’on consacre beaucoup d’argent à l’atténuation. Un grand nombre d’entre elles ne le font pas de toute manière. Dans les amendements que vous avez proposés, il est question de prévention, parce que nous ne devrions pas toujours atténuer les effets, n’est-ce pas?
Certaines décisions judiciaires ont exigé la prise de mesures pour protéger le poisson. On dirait presque que les Premières Nations sont toujours obligées de s’adresser aux tribunaux, et elles n’ont pas l’argent nécessaire.
Ma question est la suivante : vous demandez, par des amendements, à jour un rôle actif. Est-ce exact?
M. Peters : C’était connu en 2010 lorsque le processus néo-écossais a été lancé. C’était l’un des problèmes. Nous en avions assez, comme vous l’avez dit, d’aller devant les tribunaux. Cela coûte cher. C’est à ce moment-là qu’a commencé tout ce processus lié à l’accord tripartite avec les gouvernements fédéral et provincial. Nous avions ces discussions ensemble. Elles portaient en partie sur des consultations. Ce n’est pas quelque chose de nouveau.
Je vais être franc. Une partie de la frustration vient du fait que, pour devenir un dirigeant politique ou un technicien, il faut comprendre comment le processus fonctionne. Le gouvernement au pouvoir sait très bien comment le processus fonctionne. Ces consultations n’ont tout simplement pas eu lieu. Voilà pourquoi ce processus est en place. C’est aussi à cet égard que le projet de loi est important. Nous devons faire nos devoirs avant qu’il soit adopté. Tout ce que nous venons dire, c’est que nous aurions aimé que l’on tienne ces consultations avant la rédaction du projet de loi.
Ce n’est rien de nouveau. L’obligation de tenir des consultations existe depuis un bon moment. Je ne sais pas où ni quand on a échappé le ballon, mais nous sommes dans cette situation. Il est important que nous continuions de nous manifester et de veiller à ce que le gouvernement et le Sénat comprennent qu’ils ont laissé tomber notre nation dans ce dossier. Croyez-moi, nous sommes comme vous. Je suis certain que tout le monde reçoit des appels et subit des pressions de la part de je ne sais qui affirmant qu’il est important que le projet de loi soit adopté. Il présenterait un réel, véritable et énorme avantage pour la région de l’Atlantique. Cela dit, il y a un processus fondamental, et nos droits sont très importants à nos yeux. Si nous continuons à laisser faire et à dire que nous en parlerons après coup… c’est tellement frustrant pour nous. Croyez-moi, ce n’est pas seulement le gouvernement fédéral. Le gouvernement provincial ne s’est pas présenté à l’assemblée afin de nous parler. Nous lui avons même demandé s’il pouvait nous fournir le rapport qu’il avait présenté.
Je vais être honnête. Nous participions à une rencontre avec tous les ministres de la Nouvelle-Écosse lorsque le ministre des Ressources naturelles et des Énergies renouvelables, M. Rushton, est venu au Sénat pour prendre la parole. Le premier ministre provincial et moi étions coprésidents de la réunion, et je n’avais aucune idée de ce qui se passait. Quand les gens ont entendu dire que nous avions rédigé une lettre, c’est à ce moment-là qu’ils se sont vraiment mis en colère. J’aurais aimé que le premier ministre me parle et me dise : « Que faites-vous? Je pensais que vous étiez tous d’accord. » J’ai dit : « Nous n’étions même pas au courant de la comparution du ministre. » Malheureusement, la relation que nous avons n’est pas bonne. Cela nous frustre en tant que nation. Il est frustrant pour nous, du côté fédéral, d’avoir à dire : « Comment cela se fait-il? » Je sais que tout le monde exerce des pressions pour qu’il soit adopté. C’est certain. Nous savons quelles pourraient être les répercussions. Nous voulons donner cette possibilité d’être consultés et de fournir notre point de vue sur le projet de loi. C’est tout ce que nous demandons.
La sénatrice McCallum : Un patrimoine culturel tangible et immatériel accompagne les préoccupations que vous avez, surtout en ce qui a trait au volet culturel. Je vais vous donner un exemple parce que je ne connais pas votre région.
Au Manitoba, nous travaillons avec les responsables de l’hydroélectricité et sur l’incidence qu’ont leurs travaux sur l’esturgeon. Voilà donc le patrimoine culturel tangible. Il est en voie d’extinction. Grâce à cet esturgeon et au lien étroit que les Cris ont avec ce poisson, il y a une valeur que l’on donne. Il y a d’abord le transfert des connaissances sur le mode de vie culturel, des aînés aux jeunes. Il y a la structure de gouvernance qui vient de la terre, de l’eau et de tout cela. L’autre élément serait le régime alimentaire qui l’accompagne et la nourriture.
L’UNESCO a établi un système qui permet de protéger tout ce que nous perdons, car il n’est pas seulement question de perte de poisson. On perd plus que cela. Ce que nous constatons maintenant, c’est qu’il s’agit d’une forme de génocide parce que cette perte change la structure de votre vie en tant que titulaires de droits sur ce territoire, n’est-ce pas? Lorsque vous regardez ce qui se passe dans votre région, voyez-vous l’incidence que ces activités ont sur votre culture?
M. Peters : Oui. Il y a beaucoup de développement qui se fait partout au pays et même dans notre propre région. Comme je l’ai déjà mentionné, certaines communautés collaborent avec de nombreuses entreprises à cet égard. Nous avons un comité des retombées sur le développement économique qui travaille avec des entreprises pour les aider et aider la communauté. De nombreuses communautés obtiennent des avantages de ces entreprises en faisant exactement ce que vous dites. Elles contribuent en ce qui a trait aux aspects culturels, à la recherche et aux enquêtes. Il y a de nombreux avantages à en tirer. Bien sûr, c’est après coup. Ensuite, il est question des retombées dont nous pouvons parler en tant qu’organisations, de nation à nation, pour en faire l’essai. On tient beaucoup de ces discussions. Il en découle beaucoup de bonnes choses avantageuses. Mais ce n’est qu’après avoir été de l’avant avec le projet en question. Bien souvent, nous ne nous occupons pas de savoir qui obtient les contrats, mais bon nombre d’entre eux viennent nous voir et nous disent : « Voulez-vous y prendre part? Cela paraîtra bien si nous avons une communauté des Premières Nations avec nous. »
Pour être honnête avec vous, il serait intéressant que l’on effectue réellement une véritable étude et de dire quels sont vraiment les avantages réels qui en découleront pour nos communautés. C’est pourquoi nous avons au sein du KMKNO un comité des retombées qui travaille sur des protocoles d’entente pour essayer d’être un peu cohérent et s’assurer que, d’une façon ou d’une autre, la nation en bénéficie réellement et véritablement. Ce n’est pas qu’une seule communauté. Nous essayons d’examiner la situation en tant que nation. Certaines communautés voisines pourraient en profiter plus que d’autres. Mais cela dit…
Le sénateur Francis : Ma question est la suivante : quelles seront les conséquences pour les pêcheurs, en particulier les pêcheurs mi’kmaqs, dont les droits de pêche sont confirmés par l’arrêt Marshall de la Cour suprême, qui perdront l’accès aux zones extracôtières pour le développement de projets énergétiques extracôtiers, s’ils ne sont pas indemnisés? Comment proposez-vous que les pêcheurs soient dédommagés? Avez-vous un montant en tête ou un plan? Si quelqu’un veut répondre à cette question, sentez-vous à l’aise.
Mme Ginsburg : Il y a tout lieu de croire que les collectivités de pêcheurs seraient touchées, comme nous l’avons vu dans d’autres administrations, et compte tenu de notre connaissance intuitive de l’ampleur de ces développements et de l’intersection des emplacements et des zones de pêche. Il s’agit de pêche de subsistance, de pêche de subsistance convenable et de pêche commerciale. Il faut s’attendre aux répercussions. La réponse aux répercussions n’est pas simple, comme vous l’ont sûrement dit d’autres intervenants du milieu de la pêche.
C’est vraiment dommage que ces discussions n’aient pas eu lieu plus tôt, car s’il avait été davantage possible de discuter du régime d’indemnisation, je suppose que les choses auraient pu être formulées différemment dès le départ. Dans le cadre de cette approche, l’État doit s’acquitter de son obligation de consulter. Cela fait partie de l’objectif. L’obligation de consulter a pour objet la prise en compte des répercussions sur les droits, par exemple ceux en matière de pêche, et la prise de mesures d’adaptation à cet égard.
Comme je l’ai mentionné plus tôt, les évaluations régionales portent également sur les répercussions sur la pêche. Il est paradoxal et déroutant, bien franchement, qu’il n’y ait pas eu de recoupement entre les discussions sur ce projet de loi et les comités d’évaluation régionale, et inversement, et que les évaluations régionales ne figurent pas dans ce projet de loi. C’est une omission déroutante.
Nous recommandons également que l’un des principes relatifs à l’importance de prendre en compte les effets sur les activités de pêche au cours de la procédure de délivrance des permis d’exploitation des terres immergées soit élargi de manière à ce qu’il s’applique non pas uniquement à la procédure de délivrance des permis d’exploitation des terres immergées, mais à l’ensemble de cette chaîne de décisions réglementaires dont j’ai parlé.
Comme vous le dites, le régime d’indemnisation est d’une portée très étroite, et il ne réglerait pas le problème du déplacement des pêcheurs eux-mêmes ni celui de l’éventuel déplacement des espèces qu’ils pêchent. À vrai dire, ce régime d’indemnisation est inadéquat. J’ose espérer que, s’il y avait eu davantage de discussions, il aurait été élaboré différemment dès le départ.
Le sénateur Prosper : Je remercie les témoins d’être parmi nous.
J’aimerais parler de l’expression « longue série de décisions de planification stratégique ». C’est un élément important de ce projet de loi.
Chef Peters, vous avez mentionné que le projet de loi ne prévoit aucune indemnisation, ou une indemnisation inadéquate, pendant l’ensemble du processus allant du règlement aux directives, aux principes, aux recommandations, aux appels d’offres, aux permis d’exploitation de terres immergées et aux autorisations.
Il y a eu des suggestions ou des questions concernant, eh bien, le fait de savoir s’il est possible de régler certaines des questions fondamentales relatives aux droits de consultation à l’extrémité inférieure du spectre, c’est-à-dire lorsque toutes les autres décisions sont prises ou que les éléments sont énoncés dans la loi, que quelqu’un puisse venir et dire : « Eh bien, vos problèmes peuvent être examinés à l’étape de l’autorisation. » Ces éléments sont interdépendants.
Ma question s’adresse peut-être directement à vous, madame Ginsburg. Que diriez-vous à ceux qui diraient : « Nous allons consulter; consultons au sujet des recommandations. » Concentrons-nous sur ce point précis. Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela pose problème si l’on n’envisage pas non plus de tenir de consultations sur toutes les autres composantes de ce processus de planification stratégique?
Mme Ginsburg : Certainement. Vous avez cité un exemple intéressant qui figure dans la liste. Vous commencez par les recommandations sur l’énergie renouvelable, ce qui est un élément intéressant puisqu’il s’agit en fait de décisions des ministres. Le projet de loi indique que l’organisme de réglementation est censé s’acquitter de l’obligation de consulter, mais ces décisions clés relèvent des ministres. Ce sont des recommandations de l’organisme de réglementation.
En ce qui concerne la réflexion, eh bien, que font les recommandations? Elles se répercutent sur les permis. C’est l’étape suivante. Elles se répercutent sur bon nombre des décisions qui suivent. Dans la plupart des cas, les ministres disposent d’un délai de 60 jours pour prendre une décision quant aux recommandations. Vous pensez, tout d’abord, qu’il s’agit de recommandations que l’organisme de réglementation adresse au ministre mentionné dans le projet de loi — pas dans un règlement, mais dans le projet de loi —, qui prévoit une période de 60 jours. Si les ministres sont préoccupés par le fait qu’ils ne se sont pas acquittés de leur obligation de consulter — ce sont eux qui prennent les décisions —, un délai de 60 jours ne suffira pas pour y remédier. Des prolongations pourraient être accordées dans certaines circonstances.
D’entrée de jeu, je crains que l’on s’en remette à l’organisme de réglementation pour les consultations, mais ces points de décision clés relèvent des ministres et sont assortis d’un échéancier. D’emblée, c’est ce qui me vient à l’esprit.
Une fois passée l’étape des recommandations, vous pensez que bon nombre des autres décisions sont assujetties aux recommandations. Comme je l’ai dit, représentons-nous cela comme une pyramide; si vous tenez des consultations sur les recommandations — et j’insiste sur le « si » — est-ce que cela signifie que vous vous êtes acquitté de votre obligation de consulter sur toutes les décisions subséquentes? Eh bien, probablement pas.
La raison pour laquelle je dis cela est la suivante : les recommandations traiteront-elles de tous les détails des permis? Je suppose que non. Nous ne savons pas à quoi ressemblent les recommandations, mais je soupçonne qu’elles ne sont pas détaillées au point de traiter de la nature des modalités d’un permis. Elles pourraient aborder certains de ces aspects en termes généraux, mais d’autres détails n’apparaîtraient probablement qu’au moment où l’on traiterait des décisions relatives aux permis.
Donc, oui, il doit y avoir des consultations sur les recommandations, car toute une série de décisions subséquentes sont assujetties aux recommandations. Si vous ne menez pas de consultations à ce niveau, vous exercez déjà des contraintes sur les décisions de niveau inférieur. Mais il ne suffit pas de mener des consultations à ce niveau, car cela ne couvrira probablement pas tous les détails qui entrent en ligne de compte dans les décisions de niveau inférieur.
Je ne sais pas si j’ai expliqué cela clairement.
Le sénateur Prosper : Oui, et je vous remercie de cet exemple, car, comme je l’ai mentionné plus tôt, il faut que ces consultations soient significatives.
Quelle serait la solution? On parle d’un processus qui existe depuis 2010. Tout le monde est au courant de son existence. Ils n’ont pas utilisé ce processus. En ce qui concerne la planification stratégique, cette longue série de décisions de planification stratégique, quelle serait la solution adéquate pour ce qui est de la consultation aux fins de l’article 35? Est-ce qu’il pourrait s’agir, par exemple, de l’étape du règlement jusqu’à celle des autorisations, d’un volet consultation qui serait expressément prévu dans ce projet de loi?
Mme Ginsburg : Je dirais que oui.
Le processus lui-même, à tout le moins, doit donner une place à la consultation. À mon avis, il ne devrait pas y avoir de points de décision, par exemple en ce qui concerne les modalités des permis, qui relèvent explicitement, selon le projet de loi, d’une entente conclue entre l’organisme de réglementation et le titulaire du permis. C’est le libellé du projet de loi. Une entente conclue entre l’organisme de réglementation et le titulaire de permis. Ce n’est pas un signe de consultation. Cela indique que deux parties réunies dans une pièce ont décidé ensemble d’une chose qui pourrait avoir une incidence sur les droits prévus à l’article 35.
Il y a eu plus tôt une question au sujet de la modernisation de la Loi sur l’évaluation d’impact et de l’adoption de la Loi sur la DNUDPA. Le gouvernement fédéral présente des projets de loi modernes qui témoignent d’une ère nouvelle axée sur la consultation.
Ce projet de loi est très fortement calqué sur la loi qui existait déjà. Il aurait été très facile de le rédiger de manière à dire oui, il y a une consultation. Il y a un avis avant cette décision, et pas seulement un avis après que la décision a été prise. Il y a de nombreux endroits dans le projet de loi où il est explicitement mentionné que l’avis est donné après que la décision a été prise.
Je ne dis pas que cela remplirait l’obligation de consulter, mais on n’a même pas franchi l’étape de dire que l’avis doit être donné au préalable. Il aurait été très facile… à tout le moins un moyen d’introduire une pause dans le processus, qui aurait pu signifier que, oui, nous avons l’intention de consulter. Mais ces pauses n’ont pas été introduites. À quelques exceptions près, il n’y a pas de pause ni de signal indiquant qu’un avis doit être donné avant que les décisions ne soient prises.
La sénatrice Galvez : Merci beaucoup. Plus vous parlez et plus nous discutons, mieux nous comprenons. Vous avez raison. Vous avez raison en ce sens que ce projet de loi est une vieille loi, et qu’il y a des lois plus modernes qui tiennent mieux compte, de façon plus holistique, de notre relation avec les peuples autochtones.
Si je comprends bien, ce projet de loi n’est pas une évaluation d’impact. Ce projet de loi ne fait que dire que nous sommes maintenant ouverts à d’autres types de projets énergétiques. Outre les projets pétroliers et gaziers, ce projet de loi ouvre expressément la porte à des projets éoliens dans ce secteur.
À mon avis, ce dont vous parlez, c’est de la question de savoir quel projet de loi aura plus de pouvoir que l’autre ou primera sur l’autre lorsque le projet lui-même sera réalisé. J’ai de la difficulté à concevoir que ce projet de loi sera considéré comme étant des plus modernes, et il s’appuiera davantage sur les projets de loi plus récents lorsqu’il s’agit d’un projet précis.
En fin de compte, ma question est la suivante : y a-t-il une façon de formuler cette demande dont vous nous parlez, soit celle visant à ce que l’organisme de réglementation tienne compte de votre évaluation stratégique et de votre évaluation initiale, qui peut être intégrée à titre d’observation ou, plus encore... Je ne sais pas, monsieur le président, chers collègues, nous pourrions peut-être poser une question précise à ce sujet au ministre Wilkinson. Nous pouvons demander l’assurance que cette planification stratégique dans cette évaluation régionale… C’est dire qu’il s’agit de deux choses différentes, car vous avez mentionné qu’il s’agit de deux choses distinctes. Donc, obtenir l’assurance que, dans le cas d’un projet, la Loi sur l’évaluation d’impact et la DNUDPA primeront et l’emporteront sur les lois à venir.
Mme Ginsburg : Le projet de loi est structuré de telle façon que, à l’étape de l’autorisation, à laquelle je crois que vous faites allusion, il y a une possibilité que la Loi sur l’évaluation d’impact s’applique. Il ne devrait pas y avoir de conflit entre les deux. C’est simplement que la Loi sur l’évaluation d’impact, lorsqu’elle s’applique, arrive très tard dans ce processus. Ce serait à la dernière étape, celle de l’autorisation, laquelle, selon mon schéma, se trouve au bas de la pyramide. Elle ne s’appliquera pas tout le temps, et il pourrait y avoir des exceptions, et il pourrait y avoir des types d’autorisations qui, du reste, ne déclenchent pas son application. Mais à part cela, en supposant — et c’est très hypothétique — que cela s’applique à l’étape de l’autorisation, cela ne corrige pas ce qui vient avant l’autorisation. Cela ne corrige pas les points de décision qui mènent aux autorisations.
Je ne sais pas comment cela pourrait être corrigé. Les garanties ne nous mènent pas très loin lorsque le projet de loi lui-même est structuré d’une façon qui ne semble pas laisser de place à la consultation ni indiquer une intention de consulter. Comme le chef Peters l’a mentionné, même la période précédant la présentation du projet de loi a signalé une absence d’intention de consulter. Si l’on ajoute à cela que le projet de loi lui-même ne signale pas une intention de consulter et, en fait, qu’il comporte des points de décision vraiment problématiques tout au long du processus, il me serait difficile d’imaginer à quoi ressemblerait cette garantie.
La sénatrice McCallum : Je voulais parler de l’aide financière aux participants, dont il est question dans le passage suivant :
La Régie peut établir un programme d’aide financière pour faciliter la participation du public et des peuples autochtones du Canada…
Je constate que le libellé de la recommandation formulée par votre groupe n’inclut pas les différents types d’entités autochtones qui pourraient avoir un intérêt à soumissionner pour ce type de travaux. Vous avez recommandé des organisations autochtones et l’organe directeur, mais nous avons un problème de vol et de fraude d’identité. Il y a des organisations — je crois que vous savez desquelles je veux parler — qui prétendent être des organisations autochtones, et il n’y a pas de processus de vérification. N’est-ce pas? Il y a donc de la fraude d’identité, et le gouvernement s’adresse habituellement à ceux qui sont d’accord avec lui, et il dit : « Nous avons mené des consultations et ce groupe nous appuie. » Ce groupe n’est peut-être même pas établi dans votre région. Est-ce que cela signifie que je pourrais aller dire : « Vous savez quoi? Je pense que c’est ce que nous devrions faire »? Est-ce que l’expression « des peuples autochtones » vous pose problème? Êtes-vous aux prises avec un problème de vol et de fraude d’identité?
M. Peters : Merci beaucoup de cette question.
Est-ce que l’expression « des peuples autochtones » me pose problème? Là encore, pour revenir en arrière, qui détermine qui sont les peuples autochtones à l’échelle du pays? C’est un problème auquel nous nous heurtons dans chacune de nos collectivités. C’est une bataille que mène notre assemblée. Qui devrait déterminer qui nous sommes? C’est nous qui devrions le déterminer, et non le gouvernement fédéral. Cela fait partie du problème. Nous commençons à le constater à mesure que des gens se marient à l’extérieur du monde autochtone. Lorsque des choses se produisent, lorsque les avantages et les revendications territoriales diminuent, qui en profite? C’est là que le problème se pose.
L’une des questions sur lesquelles nous nous penchons — et nous travaillons sur la situation de l’emploi partout au pays —, c’est celle de savoir qui est Autochtone et qui ne l’est pas. Nous voyons toutes sortes de bourses dans les universités, et tout le monde semble déterminer que, oui, ils sont autochtones. C’est une chose à laquelle nous travaillons, et nous devons continuer de le faire.
Cela dit, il nous appartient, à nous et au gouvernement autonome, de signaler que c’est à nous qu’il revient de déterminer de qui il s’agit vraiment. Par certaines de ces autres choses, nous devons, en tant que nation, signaler qui, selon nous, est vraiment et véritablement autochtone. Bien honnêtement, il y a beaucoup d’entreprises qui disent : « Je vais en embaucher un ou deux et dire que notre effectif est à moitié autochtone. » Au bout du compte, honnêtement, qui profite vraiment de cette situation? En tant que Premières Nations, nous devons vraiment commencer à prendre cela en main et même commencer à sensibiliser les gens de l’extérieur au fait qu’il est important que nos droits ne soient pas simplement dispensés à gauche et à droite.
Je vais vous laisser répondre au volet plus technique de la question.
Mme Ginsburg : Pour que ce soit bien clair, l’amendement que nous proposons consiste à remplacer « peut » par « doit » : « doit établir un programme d’aide financière aux participants ». Donc, non pas « doit fournir des fonds à un groupe autochtone », mais « doit établir le programme ». Je ne pense pas qu’un quelconque programme puisse échapper complètement aux problèmes de vol d’identité dont vous avez fait mention, mais on peut présumer que le programme lui-même devrait remplir des critères et des conditions afin d’obtenir le financement. Ce que nous demandons, c’est qu’un programme soit exigé et, espérons-le, qu’il soit bien conçu de manière à ce que l’argent aille aux bonnes collectivités.
Le président : Permettez-moi de reformuler notre point de vue pour être sûr que la réponse sera la même.
Notre point de départ est que le projet qui a été proposé est d’une qualité phénoménale. Je suis un homme d’affaires, je regarde ce qu’il pourrait vous apporter sur le plan financier dans l’avenir, mais aussi sur le plan du respect des engagements en matière de changement climatique, et c’est une occasion extraordinaire. Nous essayons de nous assurer de ne pas nuire à cela, car je pense que tout le monde est d’accord avec cela.
Nous essayons de déterminer ce que nous pouvons faire en ce qui a trait à la prise de décisions. Si nous n’apportons aucun amendement au projet de loi en tant que tel, il n’y aura pas de retard. Nous avons le droit, en fait, d’ajouter des observations. Nous essayons tous de réfléchir à une façon détournée d’obtenir l’observation dont nous avons besoin pour conférer un certain degré de responsabilité au ministre tout en adoptant le projet de loi tel quel. Autrement dit, il s’agit d’un ajout au projet de loi sous forme d’observation, mais l’observation doit être suffisamment stricte pour garantir des mesures précises et des résultats précis.
Si nous adoptons cette approche — et nous sommes très souples quant à la teneur de l’observation —, pouvons-nous parvenir à faire cela sans retarder le projet proprement dit? Serait-il possible d’obtenir les bons résultats en utilisant ces outils?
M. Peters : Là encore, bien honnêtement, nous avons eu ce problème de nombreuses fois avec les gouvernements au moment de faire avancer les choses, disant : « D’accord, laissons tomber, et la prochaine fois, nous l’examinerons et nous l’approuverons. »
Mais à mes yeux, là encore, nous revenons à vous et nous vous demandons de consulter. Nous voici tous réunis ici, à la dernière minute, alors que nous devons prendre une décision parce qu’il y a des gens en coulisse qui font pression sur nous.
Vous avez raison, sénateur. Quelle est l’importance de ce projet en particulier? C’est un projet, bien sûr. Il ne s’agit que d’un seul projet, mais vu la façon dont le projet de loi évolue, il pourrait y avoir d’autres projets plus tard.
Mais comment puis-je avoir la certitude que, si vous dites : « Oh, nous allons prendre cela en considération en tant qu’observations »... En fin de compte, comment pouvons-nous avoir la garantie absolue qu’on donnera effectivement suite à ces observations ou qu’elles seront réellement prises en compte? Je ne le sais pas pour l’instant.
Le président : C’est ce que vous venez juste de dire. Comment pouvons-nous obtenir un suivi? Comment pouvons-nous motiver le ministre à simplement faire un suivi? Nous pourrions joindre une observation selon laquelle il s’agit d’une question extrêmement grave. Vous, les témoins, avez l’impression qu’il y a manquement. Vous êtes déçus. Par conséquent, dans l’observation, vous dites que le ministre doit répondre; tous les 90 jours, le ministère doit communiquer des observations écrites disant : « Voici les progrès que nous avons réalisés quant aux ententes et aux amendements que vous souhaitiez. » Nous pourrions procéder ainsi et rendre cela public. Le rapport doit être public. Le rapport doit être suffisamment sérieux et détaillé pour qu’il y ait des résultats. Est-ce que cela contribue à nous faire avancer?
Mme Ginsburg : Nous nous trouvons dans une situation paradoxale. Une absence de consultation et même une absence de communication, même sur le plan des relations. Depuis des années, il y a des réunions sur la question de l’énergie, mais on n’a même pas parlé de cela dans ces réunions. Donc, une absence de consultation débouche sur un problème de consultation sur le projet de loi, et nous sommes vus comme ceux qui « retardent » les choses. Je mets ce mot entre guillemets parce que ce n’est pas notre intention, bien sûr. Mais le fait de dire ensuite : « Et cela sera corrigé par une solution de bonne foi », tout cela me laisse un goût amer, si je peux m’exprimer ainsi.
Le président : Vous êtes contrariés. Je comprends cela. Vous avez raison de l’être. Nous n’allons pas vous le reprocher. Ce n’est pas possible. En même temps, nous ne voulons pas vous punir du fait que vous êtes quelque peu fâchés contre l’autre, alors je dis : « Hum, n’y a-t-il pas moyen »… En d’autres termes, mordez-vous la langue, mais nous devons mener à bien ce projet et exiger une reddition de comptes suffisante par l’entremise des observations de telle sorte que le ministre doive vous répondre. Je ne suis pas un médecin qui essaie de sauver le patient; je veux simplement m’assurer que nous obtenons les bonnes décisions à la toute fin.
M. Peters : Je ne sais pas qui est « l’autre » dont vous parlez. De qui s’agit-il?
Le président : Je n’en suis pas sûr.
M. Peters : D’accord. Je n’étais pas tout à fait certain, vous avez parlé de « mettre l’autre en colère » ou quelque chose du genre.
Oui, c’est un moment critique pour nous tous. Cela nous a tous mis dans une situation où nous n’avions pas besoin d’être ici. Nous savons tous que si cela avait été respecté comme il avait été prévu.... Mais, cela dit, comme vous l’avez mentionné, peu importe où cela nous mène, nous allons faire plaisir à certaines personnes, et mettre d’autres personnes vraiment en colère contre nous. C’est toujours comme cela à toutes les tables auxquelles nous participons. Voulons-nous essayer de trouver une solution? Oui. Nous, les Mi’kmaqs, voulons faire ce qui est le mieux pour tout le monde. Nous voulons être utiles, et nous savons à quel point c’est important, mais nous en avons vraiment assez de nous faire dire des choses du genre : « Eh bien, nous sommes désolés de ne pas vous avoir consultés. » Non, il y avait un moyen.
Même depuis que nous avons entendu parler de l’adoption du projet de loi, le ministre n’a jamais communiqué avec moi. La province n’a pas communiqué avec moi pour me demander : « Que pouvons-nous faire et comment pouvons-nous améliorer la situation? » Depuis juin, nous avons eu l’occasion de dire : « Faisons quelque chose. » Je ne comprends tout simplement pas. Comment se fait-il qu’ils n’aient pas voulu prendre contact avec nous en tant que nation? Ils ont communiqué avec quelques Premières Nations, oui, mais même lorsqu’on lit les lettres qui leur ont été envoyées, il y est question de développement économique. Il n’y est pas vraiment question de consultation. J’ai lu la lettre de Terry au sujet des consultations, et j’ai demandé : « Eh bien, à propos de quoi avez-vous mené des consultations? Pouvez-vous nous en faire part? » C’est tout ce que nous demandons. Faites-nous en part de manière à ce que nous sachions que ce projet de loi… Et vous en avez peut-être parlé dans le cadre de votre examen. Nous n’avons pas eu l’occasion d’examiner cela avant d’être impliqués là-dedans.
Pouvons-nous faire quelque chose à ce sujet? J’espère que oui, mais nous ne savons pas si des observations comme celles que vous avez évoquées fonctionneront ou non. Comment pouvons-nous nous assurer que, dans l’avenir, il y aura vraiment consultation? Cela ne s’est pas produit, et c’est ce qui est frustrant. Ensuite, cela revient à une question non pas technique, mais politique : « D’accord, vous devez prendre une décision politique. Est-ce la bonne chose à faire? »
Le sénateur Prosper : J’essaie simplement de comprendre l’expression « observation stricte ». Je n’arrive pas vraiment à imaginer une observation assez stricte pour avoir un effet réel lorsque la question fondamentale est celle du respect et de la reconnaissance de la loi qui existe sur ce territoire. Si je devais choisir entre une observation stricte et des dispositions de modification au sein d’un projet de loi qui respectent les droits prévus à l’article 35, je pense que je préférerais la seconde option.
Voici où je veux en venir. Ce projet de loi envisage la délégation d’une partie du droit, l’obligation de consulter, cette obligation de l’État. Madame Ginsburg, vous avez mentionné qu’il n’y a pas de recoupement avec les évaluations régionales. Chef, dans vos notes, vous évoquez une certaine prudence en ce qui concerne les évaluations environnementales menées par l’organisme de réglementation. Il me semble qu’il a l’obligation de consulter, mais il mène ses propres évaluations ici. Où réside leur véritable obligation ici?
Madame Ginsburg, le point sur lequel je veux insister est le suivant. Dans votre déclaration, vous avez parlé du fait d’accorder aux évaluations régionales l’importance qu’elles méritent dans le projet de loi. Est-il possible que ces évaluations puissent être utilisées pour contourner des évaluations propres à un projet plutôt que pour prendre des décisions plus éclairées, des décisions par étapes, au sujet de l’énergie éolienne en mer? Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
Mme Ginsburg : Oui. Idéalement, les évaluations régionales en cours contiennent beaucoup de renseignements intéressants et portent sur de nombreux sujets. Il y a eu une bonne participation de la communauté micmaque. Comme vous l’avez dit, dans un monde idéal, tout ça devrait guider la rédaction du projet de loi, être mentionné dans le projet de loi et encadrer les décisions quant au moment où un appel d’offres pourrait être lancé et des permis pourraient être octroyés. C’est le scénario le plus optimiste ou un scénario solide.
Le problème ou le pire des scénarios, c’est que, selon le paragraphe 2(2) du Règlement sur les activités concrètes en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact, pour l’application de la définition de projet désigné à l’article 2 de la Loi sur l’évaluation d’impact, les activités concrètes qui peuvent être désignées par le ministre en vertu de l’alinéa 112(1)a.2) de cette loi sont celles mentionnées aux articles 34, 44 et 45 de l’annexe. Donc, dans le règlement actuellement en vigueur en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact, il y a une disposition qui fait essentiellement référence à l’énergie éolienne extracôtière. À l’heure actuelle, un projet éolien extracôtier de 10 éoliennes ou plus déclenche une évaluation d’impact, mais, dans le règlement en question, il y a une disposition qui dit que l’énergie éolienne extracôtière peut faire l’objet d’une exemption.
C’est comme une menace qui plane au-dessus de nos têtes. C’est en quelque sorte une disposition alambiquée de la Loi sur l’évaluation d’impact, mais essentiellement, si ces projets font l’objet d’évaluations régionales, ils pourraient alors être admissibles à l’exemption. Je suppose que l’idée, c’est que, si une évaluation régionale est réalisée, il n’est pas nécessaire de mener une évaluation d’impact dans le cadre du projet. C’est le pire des scénarios : la possibilité que les évaluations régionales servent d’excuse afin de contourner le besoin de procéder à l’évaluation pour obtenir une autorisation. Ce serait le pire des scénarios si les évaluations régionales n’avaient pas vraiment de poids dans le projet de loi, mais donnaient lieu à des exemptions en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact. C’est à cela que je faisais allusion. Encore une fois, il s’agit en quelque sorte d’un exercice de confiance, mais cela indique que ces projets précis pourraient éventuellement faire l’objet d’exemptions dans l’avenir.
La sénatrice McCallum : Je ne sais pas comment le dire. En fait, je suis très contrariée que nous ayons mis tout ça sur les épaules du chef en disant : « Comment pouvons-nous adopter rapidement ce projet de loi? » Il semble s’agit de la principale préoccupation, et nous lui demandons de faire confiance à un système qui fait continuellement fi de l’obligation de consultation et des droits garantis par l’article 35, qui ont déjà été violés ici. Avec une observation, il n’y a pas de responsabilisation. Vous demandez à un groupe de faire confiance à des responsables des niveaux fédéral et provincial qui ont rédigé un projet de loi sans consultation. Vous demandez maintenant si une observation… En tant que sénateurs, notre travail consiste à faire venir ici les gens qui ne sont pas représentés à la Chambre des communes, à les écouter et à leur permettre de défendre leurs droits. C’est notre travail en tant que sénateurs. Lorsque vous êtes arrivée, vous nous avez posé des questions au sujet de ces amendements, et il faut le faire. Je tiens à m’excuser de la situation dans laquelle vous vous retrouvez. Je ne suis pas d’accord, et nous devons nous battre pour vos droits.
Le sénateur Tannas : Je voulais vous poser une question, madame Ginsburg, et peut-être aussi au chef. Nous avons parlé d’observations. Il s’agit en quelque sorte d’un prix de consolation que nous utilisons ici, au Sénat, lorsque les gens n’obtiennent pas ce qu’ils demandent. Apporter un amendement, c’est la mesure importante et forte que nous pouvons prendre sur le plan législatif; ce n’est pas quelque chose que nous faisons souvent, et nous ne le faisons certainement pas souvent lorsqu’il y a des pressions, comme c’est le cas ici.
Je suis ici depuis assez longtemps pour avoir déjà vu une telle situation; ça me rappelle le projet de loi sur la marijuana, dans lequel le gouvernement s’engageait légalement auprès des Autochtones à faire X, Y et Z s’ils cessaient de penser uniquement à apporter un amendement. Ils accepteraient en fait de se gouverner eux-mêmes… Et je repense constamment à la déclaration ministérielle relative à une exemption qui ferait en sorte que la Loi sur l’évaluation d’impact ne s’appliquerait pas — et c’est dans cette loi qu’il y a déjà beaucoup de garanties —, parce que nous avons dit que c’était un projet de loi plus moderne.
Madame Ginsburg, dans le contexte d’un engagement ou d’une entente entre le gouvernement fédéral et les Mi’kmaqs relativement à cette situation précise, pensez-vous à autre chose qui pourrait être mieux que l’observation, mais moins dommageable que l’amendement, et qui donnerait tout de même l’assurance juridique dont nous avons parlé et que vous pourriez faire appliquer, au besoin? Pouvez-vous imaginer quelque chose du genre?
Mme Ginsburg : Pour être juste, nous avons cerné un certain nombre de domaines de préoccupations, et certains de ces domaines concernent directement le libellé du projet de loi. À ces égards, c’est le libellé du projet de loi qui pose un problème. Il pourrait y avoir d’autres domaines, par exemple, s’il y avait un engagement. Je me demande si c’est possible lorsqu’il s’agit d’exercer un pouvoir discrétionnaire; je me demande également dans quels domaines une telle chose pourrait être possible. Je n’ai pas réfléchi à cela à l’avance.
Absolument, s’il y avait une assurance que les éoliennes extracôtières ne seraient pas exemptées en vertu de la Loi sur l’évaluation d’impact, ce serait très bien. Cependant, pour que ce soit absolument clair, une telle mesure ne règle pas beaucoup des problèmes soulevés dans le projet de loi lui-même. Est-ce que ça semble être quelque chose de positif? Oui.
Le sénateur Gold : Merci d’être venue. Je suis heureux que nous vous ayons donné l’occasion de vous préparer et d’être ici avec nous. Je suis le représentant du gouvernement au Sénat. Je le dis simplement pour que vous le sachiez et que vous puissiez évaluer ce que je dis sous cet angle.
Je tiens d’abord à dire que je comprends vos frustrations. Je crois comprendre que le fait d’avoir reçu une lettre il y a quelques années n’a peut-être pas eu le même effet ou la même incidence sur vous que sur d’autres nations qui ont participé à cette initiative, comme vous l’avez mentionné.
Je veux simplement dire quelque chose au sujet de la question générale des observations, et je parle maintenant au nom du gouvernement du Canada.
Comme la sénatrice Galvez l’a souligné au début, le projet de loi renvoie à l’article 35, et la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est une loi-cadre à laquelle nous sommes liés, tout comme l’autre texte législatif dont il a été question. Cela signifie, en droit, comme vous le savez, madame Ginsburg, que tout ce qui est associé au projet de loi, aux décisions et aux règlements doit respecter les droits en question, qui ne sont pas créés par l’article 35, mais qui sont reconnus ou confirmés par lui.
À cet égard — et c’est peut-être beaucoup trop légaliste, vous me pardonnerez —, il n’y a pas de délégation de l’obligation de consulter dans le projet de loi. Il est reconnu que les responsables peuvent se fier à l’organisme de réglementation, mais le gouvernement conserve l’obligation absolue en vertu de l’article 35, peu importe ce que fait l’organisme de réglementation. Il s’agit simplement d’une obligation indépendante découlant des droits inhérents reconnus à l’article 35.
En ce qui a trait aux observations, le gouvernement les prend très au sérieux, et il l’a fait dans le passé. En effet, si nous empruntons cette voie, les recommandations pourraient inclure tous les facteurs qui devraient et pourraient être pris en considération dans le processus de réglementation en vue de la création de règlements et ainsi de suite, ce qui donnerait un peu de corps à l’obligation de consulter qui est enchâssée dans notre loi, même si les mesures prévues dans la loi ne le mentionnent pas expressément à chaque étape.
Tout cela pour dire, encore une fois, que je vous remercie d’être ici et d’avoir soulevé ces préoccupations, mais le gouvernement prendra — et prend — au sérieux tout ce que fait le Sénat, y compris les observations qui sont formulées. Je ne peux pas prendre d’engagement au nom du ministre au sujet des lettres que le sénateur Tannas a signalées — et il avait raison de dire qu’elles se sont avérées efficaces, du moins par le passé —, et c’est quelque chose que je vais certainement explorer de mon côté. Encore une fois, merci d’être ici.
Le président : Merci beaucoup.
Je dois vous informer qu’il ne nous reste que deux ou trois minutes. Apparemment, il n’y a aucune marge de manœuvre. La séance devra absolument être levée. Je vous remercie beaucoup d’avoir été parmi nous aujourd’hui. Je pense que nous avons eu une très bonne discussion. Nous comprenons assurément les problèmes que vous avez, et nous comprenons leur importance. Nous comprenons également que vous avez des raisons d’être frustrés, parce qu’il y a un problème fondamental concernant la relation de confiance et la crédibilité de cette relation. Peu importe ce que nous ferons, nous ne corrigerons pas tout cela en une semaine, mais nous ferons de notre mieux, essentiellement, en nous occupant des projets de loi. Merci beaucoup d’avoir été parmi nous. Je pense que vous avez eu un effet important sur notre comité.
La sénatrice McCallum : Puis-je formuler un commentaire? Lorsque le sénateur Tannas a pris la parole, il a parlé d’un amendement de façon négative, de la situation où un amendement est préjudiciable. Je ne vois jamais d’amendements… Eh bien, ils sont parfois frivoles. Cette situation me préoccupe. Lorsque le sénateur Gold a pris la parole, il a demandé une observation. Cette demande vient d’un groupe qui a déjà violé les droits parce qu’il n’y a pas eu de consultation. Ils disent : « Eh bien, faisons-leur encore confiance. » Voyez-vous d’un mauvais œil les amendements que vous avez proposés?
Mme Ginsburg : Non.
La sénatrice McCallum : Non? Merci.
Le président : En prévision de l’examen article par article du projet de loi C-49 le jeudi 19 septembre 2024, les membres qui souhaitent proposer une modification doivent consulter le conseiller juridique désigné du Bureau du légiste et conseiller parlementaire pour s’assurer que les modifications sont rédigées dans le format approprié et dans les deux langues officielles.
(La séance est levée.)