LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE L’ÉNERGIE, DE L’ENVIRONNEMENT ET DES RESSOURCES NATURELLES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le jeudi 3 octobre 2024
Le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles se réunit aujourd’hui, à 9 h 2 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi C-76, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada.
Le sénateur Paul J. Massicotte (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Je m’appelle Paul J. Massicotte, je suis un sénateur du Québec et je suis président du comité.
Aujourd’hui, nous tenons une séance du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles.
Je demanderais à mes collègues du comité de se présenter, en commençant par ma droite.
[Traduction]
Le sénateur Dean : Tony Dean, représentant l’Ontario.
La sénatrice Sorensen : Karen Sorensen, parc national Banff, Alberta, territoire du Traité no 7.
La sénatrice McCallum : Mary Jane McCallum, du Manitoba.
La sénatrice Anderson : Margaret Dawn Anderson, Territoires du Nord-Ouest.
Le sénateur D. M. Wells : David Wells, Terre-Neuve-et-Labrador.
La sénatrice Robinson : Bonjour. Mary Robinson, de l’Île-du-Prince-Édouard.
[Français]
Le président : Le comité poursuit son examen du projet de loi C-76, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada. Nous accueillons, de la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6, Kayli Avveduti, directrice générale; de la Nation Aseniwuche Winewak, Lauren Moberly, membre, Forum des Autochtones du parc national de Jasper; de la Société pour la nature et les parcs du Canada, Chris Rider, directeur national, Conservation.
Je vous souhaite la bienvenue et vous remercie d’avoir accepté notre invitation. Cinq minutes sont réservées pour vos allocutions d’ouverture.
La parole est à vous, madame Avveduti. Vous serez suivie de Mme Moberly et de M. Rider.
[Traduction]
Kayli Avveduti, directrice générale, Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 : Merci.
Bonjour, honorables sénateurs et membres du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je m’appelle Kayli Avveduti et je suis membre de la Première Nation d’Alexander et directrice générale de la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6, ici en Alberta. Je suis reconnaissante d’avoir l’occasion de vous parler et de vous faire part de notre point de vue sur le projet de loi C-76.
La Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 est un organisme de défense des intérêts, qui assure une représentation politique unifiée pour les nations signataires du Traité no 6. Nous préconisons le maintien de la protection de ce traité fondamental, ainsi que des droits inhérents et des droits de la personne des peuples signataires de traités de nos nations membres.
Le parc national Jasper a été créé dans le cadre du Traité no 6, sans la participation ou le consentement des titulaires de droits issus de traités. Le parc a vu le jour à l’intérieur du territoire visé par le Traité no 6, mais il a entraîné le retrait forcé des Premières Nations et a limité notre accès continu à notre territoire, à nos sites cérémoniels traditionnels et à la récolte de plantes médicinales et de nourriture. Depuis la création du parc national Jasper, les Premières Nations visées par le Traité no 6 essaient de tenir Parcs Canada, en tant qu’organisme de la Couronne, responsable des modalités du traité et de l’obliger à respecter les droits inhérents issus de traités confirmés dans la Loi constitutionnelle de 1982.
Au cours des dernières années, Parcs Canada a commencé à reconnaître les torts historiques causés par la création du réseau de parcs nationaux et les préjudices continus découlant du non‑respect des droits issus de traités. La confédération et les Premières Nations signataires du Traité no 6 ont eu l’occasion de parler de ces préjudices historiques, de contribuer à leur réparation et de forger une relation nouvelle, plus équitable et plus respectueuse, avec Parcs Canada.
Le parc national Jasper a créé le Forum des Autochtones du parc national de Jasper, auquel la confédération et nos nations membres ont été invitées à participer. Il s’agit d’un comité consultatif par l’entremise duquel Parcs Canada demande conseils et orientation aux titulaires de droits des Premières Nations dont le territoire traditionnel chevauche le parc national Jasper. Les responsables du parc national Elk Island cherchent à créer un comité semblable, et la confédération a offert des conseils sur sa création et sur les possibilités d’améliorer ce processus, afin de mieux respecter les droits issus de traités.
Depuis 2022, la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6, par l’entremise de son protocole de coopération et de dialogue avec la Ville d’Edmonton, est un partenaire de Parcs Canada dans le cadre de l’initiative des parcs urbains nationaux. Grâce à ce partenariat, nous avons travaillé en étroite collaboration avec le personnel de Parcs Canada et nous avons sensibilisé davantage ses responsables à la nécessité de respecter les obligations de l’organisme découlant des traités, dans le cadre des pouvoirs qui lui sont délégués au nom de la Couronne.
Le rôle de la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 n’est pas de sensibiliser quiconque aux responsabilités découlant des traités, surtout pas la Couronne ou ses organismes. Nous défendons les droits des titulaires du Traité no 6 en Alberta et nous veillons à ce que les droits issus de traités soient respectés. La confédération est déterminée à faire en sorte que les termes, l’esprit et l’intention du Traité no 6 soient respectés. Notre message et nos attentes sont toujours clairs. C’est d’ailleurs ce message que la confédération véhicule dans toutes ses interactions avec Parcs Canada et le gouvernement du Canada.
La Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 n’appuie pas le projet de loi C-76. Parcs Canada et le gouvernement du Canada, à titre de représentants de la Couronne, ne se sont pas acquittés de leur obligation de consulter les titulaires de droits visés par le Traité no 6, ni de tenir compte de leurs besoins. Le projet de loi ne prévoit pas de consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause pour les peuples autochtones, conformément aux principes énoncés dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones ou dans la Loi de 2021 sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones du gouvernement du Canada. En déléguant le pouvoir d’aménagement à la municipalité de Jasper, Parcs Canada et le gouvernement du Canada s’éloignent plus encore de leurs obligations découlant des traités et de tout recours juridique qui pourrait être disponible pour les tenir responsables.
En tant que partenaires gouvernementaux, les chefs visés par le Traité no 6 s’attendent à ce que tous nos vis-à-vis respectent leurs responsabilités en vertu du Traité no 6. Cela comprend la consultation concernant toutes les décisions qui ont une incidence sur les terres visées par le Traité no 6 et la participation à ces décisions. Pour chaque mesure et décision qu’ils prennent, de même que pour chaque projet de loi qu’ils présentent, Parcs Canada et le gouvernement du Canada ont la possibilité de respecter l’esprit et l’intention de la relation scellée par traité. Ce n’est pas le cas pour le projet de loi C-76.
Je vous remercie de me donner l’occasion de m’adresser au comité ce matin. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Le président : Madame Moberly? Je vous en prie.
Lauren Moberly, membre, Forum des Autochtones du parc national de Jasper, Nation Aseniwuche Winewak : Bonjour.
Je m’appelle Lauren Moberly et je représente les Aseniwuche Winewak de Grande Cache, en Alberta. Je suis également directrice de la Grande Cache Historical Society, membre du Forum des Autochtones du parc national de Jasper et propriétaire d’une entreprise du nom de Fallen Mountain, située sur le territoire traditionnel des Aseniwuche Winewak, près de Grande Cache, en Alberta. C’est un honneur pour moi d’être ici aujourd’hui.
À titre de directrice de la Grande Cache Historical Society, je me spécialise dans l’histoire des peuples autochtones des régions de Grande Cache, de Hinton et de Jasper-Athabasca, avec un accent particulier sur mon héritage familial dans ces régions. Je collabore avec divers organismes locaux, dont le Jasper Yellowhead Museum and Archives, la Willmore Wilderness Foundation et les Mountain Métis. Grâce à mon travail et à l’éducation que j’ai reçue, j’ai pu comprendre le long lien documenté de ma famille avec ce qu’on appelle aujourd’hui le parc national Jasper.
Je fais partie depuis deux ans du Forum des Autochtones du parc national de Jasper, qui est actif depuis deux décennies. Avant la création du forum, les responsables du parc national Jasper ont consulté de nombreux groupes autochtones, comme la Métis Association of Alberta dans les années 1990, qui était représentée par ma cousine, l’aînée Lena Ouellette.
En 2004, Lena a créé le Council of Elders of the Descendants of Jasper Park, un groupe dont un représentant continue de rencontrer chaque année les responsables du parc Jasper.
Auparavant, chacune des six familles autochtones cries et métisses déplacées de la réserve forestière de Jasper lorsqu’elle a été désignée parc national en 1907 avait un représentant à ces réunions. Mes parents, de même que d’autres membres de ma famille, faisaient partie des deux groupes, tout comme leurs parents, qui ont été évincés par la force de leur lieu de naissance dans le parc national Jasper.
Ces groupes ont joué un rôle essentiel dans l’histoire de notre collectivité et la promotion de partenariats durables avec Parcs Canada, car le peuple Aseniwuche Winewak n’est pas visé par un traité et n’est pas réputé avoir de statut à cet égard.
Le Forum des Autochtones du parc national de Jasper a été créé en 2005, sur la base des collaborations antérieures. N’importe quelle communauté autochtone était libre de participer à ce nouveau forum sans avoir à fournir de documents prouvant son lien direct avec le parc national Jasper. Cela a permis à 25 groupes autochtones distincts d’être représentés pour un seul parc national de l’Alberta.
Au cours de ses deux décennies de collaboration, le Forum des Autochtones du parc national de Jasper a mené à bien deux projets dans la municipalité de Jasper, soit le Two Brothers Totem Pole, ainsi que des panneaux d’information, dont l’un met en lumière l’histoire de ma famille, dans le cadre de l’Exposition autochtone de Jasper. Cette exposition vise à offrir à chacune des 25 nations participant au forum une tribune pour raconter sa propre expérience de l’éviction, avec ou sans documentation historique à l’appui.
De plus, le Forum des Autochtones du parc national de Jasper a coordonné des activités traditionnelles de récolte dans le parc national Jasper, en collaboration avec certaines collectivités partenaires de Parcs Canada, comme les collectivités de Stoney et de Simpcw.
Le peuple Aseniwuche Winewak s’est formellement opposé à ces activités, avec des lettres du président de la nation Aseniwuche Winewak expliquant les raisons justifiant cette opposition. Ces lettres ont été distribuées aux responsables du parc Jasper et aux représentants du Forum des Autochtones du parc national de Jasper en 2007, avant la tenue de ces activités, et de nouveau en 2023.
Avant chacune de ces activités, et en dépit de ces obligations, les collectivités de Stoney et de Simpcw ont tenu des activités de chasse près de la propriété historique de ma famille dans le parc national Jasper, ce qui a entraîné la mort de cinq animaux en 2023. De tels actes sont non seulement irrespectueux de l’histoire de ma collectivité, mais ils sont aussi préjudiciables. En 2023, une réunion avec les responsables du parc Jasper a révélé que deux mouflons mâles adultes ont été découverts décapités dans le parc national Jasper en guise de représailles pour avoir permis ces activités.
Il est important de noter que ces dernières ne correspondent pas aux pratiques traditionnelles. Par exemple, le wapiti a été introduit pour la première fois dans le parc national Jasper dans les années 1920 par Parcs Canada, après le déplacement forcé de ma famille.
Depuis sa création, le Forum des Autochtones du parc national de Jasper a compliqué et retardé le règlement des questions touchant les Autochtones dans le parc. En tant que membre, j’ai été témoin de cas de violence physique et latérale lors de ces réunions, ainsi que d’intimidation et d’incohérences lors des réunions annuelles du forum.
Mark Young, de Parcs Canada, a indiqué que le budget annuel est insuffisant pour couvrir les coûts associés à la participation de nombreux groupes, principalement en raison du remboursement des frais de déplacement des représentants de l’Alberta et de la Colombie-Britannique.
Il y a eu un manque flagrant de représentation uniforme, et la communication avec les responsables du parc s’est révélée difficile, particulièrement en ce qui concerne les sites culturels proposés et le changement de nom des lieux culturels importants.
De plus, les sentiers équestres sauvages non entretenus et fermés empêchent les collectivités et les organisations locales de préserver les sentiers de montagne à l’intérieur du parc, dont certains ont été défrichés et ouverts par ma propre famille.
Je crois que ce projet de loi, s’il est adopté, facilitera l’établissement de liens plus étroits entre les communautés autochtones locales comme les Aseniwuche Winewak et le district municipal. Le courage d’exprimer sa voix peut souvent être entravé par la multitude de groupes qui affirment des liens historiques avec la région du parc national Jasper dans le contexte du forum.
Par conséquent, je préconise la mise en œuvre d’un processus d’enregistrement qui intégrerait des documents historiques factuels, ce qui aiderait à clarifier la situation des communautés autochtones liées à la vallée de Jasper.
Je vous remercie de votre temps et de votre attention.
Chris Rider, directeur national, Conservation, Société pour la nature et les parcs du Canada : Bonjour, monsieur le président et distingués membres du Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles. Je vous remercie de l’accueil chaleureux que j’ai reçu ce matin.
Je suis le directeur national, Conservation, à la Société pour la nature et les parcs du Canada, la SNAP. Je vous suis reconnaissant de me donner l’occasion de témoigner aujourd’hui au nom de mes collègues de notre section de l’Alberta, alors que nous travaillons au rétablissement complet de la collectivité de Jasper et du parc national Jasper.
Le parc national Jasper est très important pour beaucoup de gens. Ses paysages montagneux emblématiques occupent une place spéciale dans le cœur des Albertains, des Canadiens, des visiteurs et des peuples autochtones, dont le territoire traditionnel remonte à des temps immémoriaux.
C’est pour cette raison que je tiens à vous remercier d’avoir permis aujourd’hui le témoignage de la Première Nation Aseniwuche Winewak et de la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6. Je veux joindre ma voix aux leurs de toutes les façons possibles.
Pour ma part, je fais partie des nombreuses personnes qui aiment Jasper, ayant passé du temps à apprécier sa beauté et la communauté qui s’y trouve. Évidemment, mon expérience n’est rien comparativement à celle de bien des gens, et cela comprend le personnel, le conseil d’administration et les partisans de la SNAP du Nord de l’Alberta, qui ont tous des liens étroits avec le parc. En fait, la section du Nord de l’Alberta de la SNAP a été créée en 1968 par des gens qui cherchaient à protéger les beautés naturelles de Jasper face aux menaces croissantes auxquelles sont confrontées ses valeurs écologiques.
Honnêtement, nous sommes encore sous le choc de la rapidité avec laquelle la situation s’est aggravée à Jasper et de la dévastation qu’ont subie tous ceux qui ont été touchés par cet incendie. Nous sommes reconnaissants que les parties habitées et sauvages aient été évacuées en toute sécurité. Nous sommes également bouleversés par la perte d’un des pompiers qui a travaillé si fort pour protéger la collectivité. L’impact de cet incendie se fera sentir pendant de nombreuses décennies.
Parallèlement, à la SNAP, nous voulons nous assurer que la restauration du parc se fait de façon à accélérer le rétablissement de la collectivité, de l’environnement naturel et des droits des membres des Premières Nations dont c’est le chez-soi.
Les terres et les eaux du parc national Jasper sont un élément essentiel du réseau d’aires protégées de l’Alberta et du Canada, qui assure la conservation de l’habitat d’espèces sauvages, grandes et petites. L’environnement naturel du parc est la raison pour laquelle des millions de visiteurs y affluent chaque année.
Je tiens à mentionner que nous sommes tout à fait d’accord pour dire que, pour aider la collectivité à se rétablir, une exemption aux obstacles — comme l’a suggéré la sénatrice Sorensen — devrait être accordée. Il est important que la ville se reconstruise rapidement. En même temps, nous demeurons préoccupés par la prise en compte des répercussions sur l’environnement et les droits des peuples autochtones qu’auront les modifications apportées aux lois régissant le développement dans le parc national Jasper.
La Loi sur l’Agence Parcs Canada exige que la priorité en matière de gestion des parcs soit de maintenir ou de restaurer l’intégrité écologique, en mettant l’accent sur son importance dans la préservation du patrimoine naturel.
L’intégrité écologique est cruciale pour le réseau des parcs nationaux du Canada, car elle assure la préservation et la résilience de leurs valeurs culturelles et écologiques intrinsèques.
Nous sommes d’accord pour que la municipalité de Jasper ait la capacité de délivrer des permis et d’accélérer le rétablissement après les feux de forêt de cet été. Toutefois, dans le cadre de la modification de la loi pour appuyer cet objectif, nous aimerions avoir l’assurance que son autre objectif, qui est de protéger l’intégrité écologique du parc, est maintenu. Cela comprend un plafond pour le développement commercial et les limites de l’empreinte de la ville.
De plus, nous voulons nous assurer que les règlements municipaux qui s’appliquent à la planification et à l’aménagement sont cohérents et conformes au Plan directeur du parc national Jasper, et que des processus sont mis en place pour résoudre les conflits entre l’aménagement et le développement de la ville et le plan de gestion du parc. Cela devrait se faire dans le cadre de processus de consultation appropriés, en tenant compte du temps nécessaire pour consulter les Premières Nations.
La SNAP du Sud de l’Alberta a fait face au même genre de problèmes à Banff, où les plans de réaménagement de la région comportaient des incompatibilités avec le plan de gestion du parc, avec pour résultat de menacer l’intégrité écologique de ce dernier.
En terminant, nous sommes solidaires des gens de Jasper et nous les aidons à avoir les outils dont ils ont besoin pour régénérer la collectivité. Lorsque ce travail sera terminé, Jasper aura un aspect différent, mais nous savons que la collectivité reviendra plus forte et demeurera passionnée, bienveillante et bien informée, en se souciant profondément de la nature qui se trouve à l’intérieur de ses limites.
À mesure que le processus avancera au cours des prochains mois, nous espérons que nos préoccupations pourront être réglées, afin que le parc et les gens qui y vivent puissent se rétablir pour le bien de la collectivité et de la nature qu’elle protège.
Merci.
Le président : Si vous me le permettez, j’aimerais commencer par poser une question à Mme Avveduti. Vous avez précisé que la communauté autochtone n’avait pas été suffisamment consultée et que, par conséquent, les obligations de Parcs Canada n’avaient pas été respectées. Avez-vous soulevé cette question directement auprès de Parcs Canada ou de ses représentants pour leur faire savoir qu’une collectivité est déçue du processus? Si oui, comment ont-ils réagi?
Mme Avveduti : Je vous remercie de la question. Comme je l’ai dit dans mon exposé, nous entretenons une relation continue avec Parcs Canada dans le cadre de l’initiative des parcs urbains nationaux. Certains signaux d’alarme ont été lancés au début, mais nous n’avons pas communiqué nos préoccupations par les voies officielles au sujet de ce projet de loi.
En fait, comme vous pouvez l’imaginer, nous nous occupons d’un certain nombre de dossiers ici à la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6, et l’invitation à participer à tout dialogue à ce sujet a été lancée il y a deux jours à peine par ce comité, Nous n’avons donc pas eu de pourparlers officiels avec Parcs Canada au sujet du projet de loi.
Le président : Selon votre interprétation de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, à quel niveau et à quel moment devrait-on vous consulter? Quel devrait être le processus?
Mme Avveduti : Nous sommes d’avis que toute mesure législative susceptible d’avoir une incidence sur les nations devrait faire l’objet d’une consultation ou d’une information immédiate. C’est donc dire qu’au moment de la rédaction et de la présentation du projet de loi, nous nous serions attendus à un avis ou à une possibilité de consultation de la part de Parcs Canada.
Le président : Merci.
La sénatrice Sorensen : Merci. J’ai une petite question pour Mme Moberly. Pouvez-vous me dire quels sont les membres autochtones qui participent au Forum des Autochtones du parc national de Jasper?
Mme Moberly : À l’heure actuelle, il y a 25 membres différents. Il faudrait que je consulte ma liste, mais bon nombre d’entre eux sont des Aseniwuche Winewak, des Mountain Métis — je sais que les nations visées par les Traités 7, 8 et 6 envoient des représentants de leurs collectivités respectives qui ont des liens avec le parc national Jasper.
La sénatrice Sorensen : Merci beaucoup. Je suis heureuse d’apprendre que les choses se passent bien au parc national Jasper.
Le sénateur D. M. Wells : J’ai une question pour Mme Avveduti qui va dans le même sens que celle que le président de notre comité a posée. Je sais que cela n’a pas été fait lors de la rédaction ou de la présentation du projet de loi, mais est-il prévu quelque part dans le processus de mise en œuvre, si ce projet de loi était adopté, que les Premières Nations signataires du Traité no 6 participent à une sorte de processus de consultation?
Mme Avveduti : Pas à ma connaissance. Je ne crois pas que quelque chose soit prévu en ce sens.
Le sénateur D. M. Wells : Merci.
La sénatrice McCallum : Je vous remercie de vos présentations et je vous souhaite la bienvenue au Sénat. J’aimerais revenir aux liens historiques qui existent dans la région. Les Premières Nations occupaient ce territoire avant le premier contact, c’est-à-dire depuis des temps immémoriaux. Les Métis s’y sont installés après l’arrivée des Européens, ce qui fait qu’il y a différents niveaux historiques. La présence sur ces terres se situe à différents niveaux. Il ne faut toutefois pas oublier que nous sommes apparentés. La matriarche de tous les Métis du Canada — de chacun des Métis — est une femme des Premières Nations. Les droits diffèrent. Il y a aussi le vol et la fraude au chapitre de l’identité dans nos vies.
Je me rends compte que, partout au Canada, il y a une lutte entre les Métis et les Premières Nations, pour savoir quels sont les droits et qui est propriétaire de quoi. Qui sont les titulaires de droit dans les différentes régions du Canada? Il est très triste que nous ayons encore à faire face à ce genre de question.
Ma question s’adresse aux deux dames. Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez ajouter au projet de loi, ou y a-t-il moyen de faire avancer le dossier dont nous sommes saisis? L’absence de consultations adéquates est toujours source de grandes frustrations. Lorsque je suis partie l’autre jour, je pensais que cela avait été réglé, mais chaque fois, tout est à recommencer. Voyez-vous un moyen de faire avancer les choses?
Mme Avveduti : Je vous remercie de votre question, sénatrice McCallum. Notre position à la confédération a toujours été et demeurera toujours que toute loi doit respecter l’obligation de consulter, ce qui n’a pas été le cas cette fois-ci. Je crois que la voie à suivre, à notre avis, est la possibilité de consulter nos 16 nations membres de la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6, afin de mieux comprendre toutes les répercussions, y compris celles de la loi. Nous n’avons pas eu l’occasion de le faire avec nos nations, et nous n’avons certainement pas eu la possibilité d’avoir ces conversations avec les représentants de Parcs Canada ou du gouvernement du Canada. Pour l’avenir, il est donc essentiel que l’obligation de consulter adéquatement soit respectée.
Le président : Madame Moberly. Je vous en prie.
Mme Moberly : Je suis d’accord. L’obligation de consulter est de la plus haute importance dans notre communauté, ne serait-ce que pour comprendre les règles législatives et saisir ce qui se passe exactement sur nos territoires traditionnels et dans nos régions. En collaboration avec le Forum des Autochtones du parc national de Jasper, des représentants du district municipal de Jasper ont assisté à la dernière réunion du forum qui a eu lieu au Centre des Palissades dans le parc national Jasper. À partir de là, je crois qu’il faut simplement plus de communication et une meilleure connexion au sein de la municipalité de Jasper et dans les environs, ainsi qu’avec les communautés autochtones voisines, y compris les Aseniwuche Winewak.
La sénatrice McCallum : À cause de la situation désastreuse à Jasper, est-il encore possible de consulter, même si le projet de loi est adopté, pour que les gens puissent se prononcer? Est-ce que ce serait suffisant pour vous?
Mme Avveduti : Je vous remercie de la question. Si le projet de loi est adopté et que l’obligation de consulter est imposée par la suite, quelle sera la possibilité d’apporter des changements à la loi si des préoccupations sont soulevées? Selon la compréhension que j’ai du processus législatif, les possibilités seraient très limitées pour ce qui est de contester et de remettre des choses en question après l’adoption du projet de loi.
Nous ne sommes donc pas convaincus que cette approche serait avantageuse pour nos nations et qu’elle leur donnerait la possibilité de comprendre les répercussions potentielles ou de soulever des préoccupations au sujet des répercussions potentielles de la loi, si cette dernière était adoptée et que l’obligation de consulter venait par la suite.
Le président : J’aimerais bien poser une question à la sénatrice Sorensen. D’après ce que je comprends du projet de loi, qui m’a été expliqué au cours de séances privées, même si le projet de loi est approuvé, le processus relatif à la répartition des pouvoirs doit être entièrement décidé. Nous ne savons même pas qui obtiendra quel pouvoir, et tout ce qui s’ensuivra. Est-ce bien le cas? Si c’est le cas, cela ne représente-t-il pas une façon d’inclure ces gens pour s’assurer qu’ils sont entendus?
La sénatrice Sorensen : Je dirais que la réponse est oui, absolument. Ce qui se produira avec l’adoption de ce projet de loi, peut-être pour la gouverne des témoins, étant donné qu’il y a tellement de travail à faire pour veiller à ce que les politiques soient rédigées en tenant des consultations appropriées — et apparemment, il en faut davantage —, la première chose qui doit se produire, c’est que Jasper doit créer un plan communautaire, ce qu’a fait Banff. Au-delà de ce projet de loi, le règlement sur l’aménagement du territoire sera constitué de l’accord de constitution en société, du Plan de gestion du parc national Jasper et d’un plan communautaire, et tous ces documents doivent être inclus dans la loi pour que Jasper ait tous les pouvoirs nécessaires.
C’est donc dire qu’ils peuvent commencer immédiatement. Au départ, il y a des exemptions aux obstacles qui sont actuellement prévus dans la loi. Cela leur permettra d’aller de l’avant. La municipalité de Jasper a embauché un urbaniste pour la première fois, ce qui est formidable; elle commence à prendre des mesures pour l’avenir. Je peux assurer à toutes les personnes présentes dans cette salle et à nos témoins qu’il y aura beaucoup plus de discussions entre la municipalité de Jasper et Parcs Canada, ainsi que des consultations avec les peuples autochtones au moment de la signature des documents définitifs.
La situation est inhabituelle, mais ce que nous approuvons, c’est une exemption aux obstacles, afin que les formalités appropriées puissent être remplies en temps opportun.
Le président : Permettez-moi également d’ajouter, comme vous le savez, que nous avons l’intention de procéder à l’étude article par article du projet de loi; par conséquent, nous avons invité des représentants du ministère à se joindre à nous et à répondre à nos questions. Si vous me le permettez, lorsqu’ils viendront, nous leur poserons cette question, afin de déterminer s’il est déjà trop tard, de voir ce qu’ils ont fait et de savoir pourquoi ils n’ont pas adopté un processus plus complet.
La sénatrice Anderson : Ma question s’adresse à Mmes Avveduti et Moberly. Vous avez parlé de l’obligation de consulter. Pouvez-vous définir ce que vous entendez par « obligation de consulter »?
J’aimerais vous donner un peu de contexte. Très souvent, ce que nous entendons au comité, c’est que le gouvernement fédéral a respecté son obligation de consulter, sans que cela soit défini, et lors des derniers témoignages, il y a quelques jours, il a été question d’engagement, puis on a parlé de « contact ».
À mon avis, il y a une grande différence entre « contact », « engagement » et « obligation de consulter ». Pouvez-vous nous donner votre définition de « l’obligation de consulter »?
Mme Avveduti : Je vous remercie de la question. En tant que titulaires de droits issus de traités — et je sais que cette position est un peu différente de celle de Mme Moberly —, nous croyons que l’obligation de consulter exige que le gouvernement fédéral, en tant que représentant de la Couronne et du partenariat issu de traités, rencontre et consulte directement les titulaires de droits issus de traités, c’est-à-dire directement les communautés. Je veux être très claire. La Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 n’est pas un titulaire de droits issus de traités. Nous sommes une organisation dont les membres sont des titulaires de droits issus de traités. L’obligation de consulter exige donc que le gouvernement du Canada consulte directement les titulaires de droits issus de traités, ainsi que les nations, et non les organisations qui les représentent. Ce n’est pas ce qui a été fait dans le cadre de ce processus. Notre définition de « l’obligation de consulter » est donc la suivante : consulter directement les titulaires de droits issus de traités et leur donner l’occasion de comprendre les répercussions et de fournir leurs propres commentaires, ainsi que d’exercer des recours en ce qui concerne les répercussions potentielles au chapitre de la législation.
Mme Moberly : Puisque nous ne sommes pas signataires d’un traité, l’obligation de consulter pour les Aseniwuche Winewak a toujours été de consulter les descendants directs de ceux qui ont été évincés du parc national Jasper en 1907, des six familles qui ont été expulsées. Depuis, chacun de ces groupes a travaillé avec des organisations externes — notre définition prévoit de rencontrer les descendants, parce qu’ils sont encore en vie et qu’ils font partie de ces groupes, comme le Upper Athabasca Elders Council, qui continue de rencontrer les responsables du parc national Jasper chaque année pour discuter de certaines choses relatives au parc, comme les sites culturels et patrimoniaux. C’est l’obligation de consulter les descendants des premières personnes évincées.
Le président : Merci beaucoup. Cela met fin à la discussion de ce groupe. Merci beaucoup à vous trois pour votre contribution. Je pense que vous nous avez grandement éclairés. Nous vous avons certainement entendus et nous verrons ce que nous pouvons faire. Merci beaucoup de vous être joints à nous. Pardon, sénateur Arnot.
Le sénateur Arnot : Madame Avveduti, comme vous le savez probablement, si ce projet de loi n’est pas adopté, il y aura des conséquences très graves pour les gens de Jasper, du parc national Jasper et de nombreux intervenants, parce que le temps presse. Je conviens que les membres de la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 devraient être consultés. Seriez-vous satisfaite si le Sénat, dans le cadre de ce comité, faisait une recommandation selon laquelle, dorénavant, chacun des membres de la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 devrait être consulté de façon significative afin de respecter les droits issus de traités des Premières Nations que vous représentez?
Cela vous conviendrait-il? Je m’appuie sur ce que la sénatrice McCallum a demandé, et je suis d’accord avec les sentiments qui sous-tendent sa question. Je crois que si nous formulions une recommandation sous la forme d’une observation, nous apaiserions les préoccupations que vous avez soulevées.
Mme Avveduti : J’aimerais répondre à quelques éléments de votre question. Tout d’abord, nous sommes tout à fait conscients de la situation catastrophique dans laquelle se trouvent Jasper et ses habitants, nous avons prié pour eux et nous continuons de le faire. Compte tenu de tout cela, nous comprenons.
Le risque, c’est la pente glissante dans laquelle nous nous engageons, et c’est la raison pour laquelle il faut bien faire les choses du premier coup. Si nous avions été consultés comme il se doit, même rapidement, nous ne nous sentirions pas exclus du processus. D’abord et avant tout, le fait de bien faire les choses du premier coup fait une grande différence, mais nous accueillons favorablement l’offre du comité sénatorial de mettre en place l’observation et l’exigence — j’espère, si nous pouvons utiliser un langage plus fort — pour veiller à ce que les nations soient consultées et mobilisées.
Je tiens à préciser que la Confédération des Premières Nations signataires du Traité no 6 représente 16 nations dans la région visée par le traité, mais qu’il y en a plus que cela dans la région visée, ici en Alberta, qui ont accès au site. Je tiens donc à préciser que lorsque ces recommandations seront mises de l’avant, elles devront inclure tous les titulaires de droits issus de traités du territoire qui considèrent que le parc national Jasper fait partie de leur territoire traditionnel, c’est-à-dire davantage que les 16 nations que représente la Confédération. Je vous remercie de votre question.
La sénatrice McCallum : Les gens parlent de la situation catastrophique du parc national et de ce qui s’est passé, mais il ne faut pas oublier que les Premières Nations ont été déplacées et se trouvent elles-mêmes dans une situation catastrophique depuis des centaines d’années. Elles ne sont jamais consultées. Or, à quel moment devons-nous dire que c’en est assez? Nous devons reconnaître qu’elles sont constamment placées dans de telles situations, qu’elles doivent passer en deuxième parce qu’il y a une situation si urgente, et c’est toujours le même refrain. Je tenais à ce que cela figure au compte rendu. Merci.
La sénatrice Robinson : Je voulais dire que lorsque nous avons reçu le ministre, M. Guilbeault, et un membre du personnel, M. Andrew Campbell, il y a quelques jours, je leur ai demandé s’ils estimaient que l’obligation de consulter avait été respectée. Essentiellement, la réponse du ministre a été... en fait, Andrew Campbell a dit que seulement un ou deux des 24 groupes qu’ils avaient identifiés pourraient dire qu’ils n’avaient pas été consultés.
Il s’est empressé de dire qu’il ne voulait pas parler au nom des Premières Nations, mais le cabinet du ministre a été très clair en disant que l’obligation de consulter avait été respectée. Le comité a récemment mené une étude du projet de loi C-49, dans le cadre de laquelle certaines nations mi’kmaqs de la Nouvelle‑Écosse nous ont dit qu’elles n’avaient pas été consultées. Je tenais à soulever ce point aux fins du compte rendu.
Si les témoins ont des commentaires à faire, je serai heureuse de les entendre.
Mme Avveduti : Je vous remercie de vos commentaires. Nous partageons les sentiments et l’expérience des Mi’kmaqs relativement au projet de loi C-49. Nous ne croyons pas que l’obligation de consulter a été respectée. En fait, nous avons rencontré nos 16 chefs des nations membres hier pour soulever cette question et obtenir la permission de comparaître devant le comité sénatorial, et ils ont tous dit la même chose, à savoir qu’ils n’étaient au courant d’aucun effort déployé dans le cadre de ce projet de loi, et ils n’ont pas senti non plus que l’obligation de consulter avait été respectée pour leurs nations individuelles.
Le président : Madame Moberly, vouliez-vous ajouter quelque chose?
Mme Moberly : Oui. Notre communauté est du même avis. Même si nous avons consulté les responsables du parc national Jasper dans le cadre du forum autochtone de Jasper, personne n’a dit à notre communauté que ce nouveau projet de loi allait être adopté. C’est pourquoi je suis autorisée à être ici aujourd’hui, pour que je puisse informer davantage ma communauté.
Je le répète, lorsque nous nous réunissons dans le cadre du forum autochtone de Jasper, Parcs Canada a une obligation de consulter. C’est la tribune de consultation dans la région, mais comme de nombreuses nations revendiquent des liens, cela complique les choses et il est difficile de faire entendre sa voix dans ce contexte.
La sénatrice Robinson : Je voulais souligner que le ministre et son personnel nous ont dit que 6 des 24 nations avaient répondu parce que seulement 6 d’entre elles estimaient que ces terres étaient sacrées. Je tenais à le souligner.
Le président : Merci beaucoup d’être avec nous aujourd’hui. Je pense que vous avez certainement suscité un bon débat. Nous sommes heureux de voir que vous faites votre travail et que vous contribuez au processus. Merci beaucoup d’être ici aujourd’hui et d’être à l’affût de ces questions.
C’est la fin de notre table ronde. Comme je l’ai dit plus tôt, nous avons demandé la présence des gens de Parcs Canada ce matin. Je leur demanderais donc de se joindre à nous maintenant.
[Français]
Nous avons invité les gens de Parcs Canada à se joindre à nous pour répondre à des questions et nous permettre de procéder à l’étude article par article.
[Traduction]
Nous avons tous une question évidente. Il y a des gens qui ont des droits issus de traités et qui estiment qu’ils n’ont pas été consultés comme il se doit, et ils disent constamment que nous n’avons pas respecté les obligations découlant du traité.
Qu’en pensez-vous? Partagez-vous cette opinion? Si c’est le cas, pourriez-vous nous donner plus de détails sur les raisons pour lesquelles vous croyez avoir respecté nos obligations de consultation découlant des traités, si vous le pouvez?
Jewel Cunningham, vice-présidente, Politique stratégique et planification, Parcs Canada : Je vous remercie de la question. Je ne veux certainement pas parler au nom de nos partenaires autochtones en ce qui concerne l’obligation de consulter, mais je vais dire quelques mots. Nous avons parlé de la consultation associée aux changements que nous proposions d’apporter avec les autorités responsables au sujet de l’aménagement des terres à Jasper. La consultation a commencé en 2022, et nous avons publié un rapport sur ce que nous avons entendu.
Dans ce contexte, la dernière fois que nous avons comparu, mon collègue a dit que nous avions envoyé des lettres à 24 partenaires autochtones et représentants associés à Jasper. Nous avons reçu six réponses et nous avons personnellement rencontré quatre groupes, et la plupart des commentaires ont été ceux dont mon collègue a déjà parlé.
Les membres ont certainement exprimé un intérêt particulier pour les secteurs du parc qu’ils pourraient utiliser à des fins cérémonielles et d’autres types d’intérêts associés à l’utilisation traditionnelle. Cependant, les précisions concernant le permis, les pouvoirs et ce genre de choses justifient l’identification d’un domaine d’intérêt clé par ceux à qui nous avons parlé.
Le président : Vous avez dit avoir envoyé une lettre à 24 ou 26 personnes.
Mme Cunningham : Oui, 24.
Le président : Pourquoi 24? Est-ce que cela inclut tous les détenteurs de droits issus de traités dans la région?
Mme Cunningham : Oui. C’est notre pratique habituelle en matière de consultation. Ce sont tous les membres qui ont manifesté leur intérêt pour Jasper.
Le président : Pour les 24, est-il précisé dans la lettre « veuillez me rappeler » ou « veuillez confirmer que vous avez reçu une copie de cette lettre et que, par conséquent, nous devons faire un suivi », ou s’agit-il d’une lettre qui demeure sans suite si les destinataires n’y répondent pas?
Mme Cunningham : Non, c’est une invitation à la consultation. De nombreuses Premières Nations nous disent de quelle façon elles souhaitent que nous les consultions. Certaines demandent que nous venions dans leur communauté, d’autres demandent que nous nous rencontrions personnellement et d’autres répondent également par lettre. C’est une invitation à la consultation.
Le président : Si elles ne répondent pas, faites-vous un suivi pour vous assurer qu’elles ont bien reçu la lettre et qu’elles envisagent de se joindre à vous?
Mme Cunningham : Je ne peux pas le confirmer pour l’instant, mais nous nous sommes engagés auprès du comité à fournir la liste des 24 membres et les lettres qui leur ont été envoyées.
Le président : Est-ce que nous pouvons en prendre connaissance?
Mme Cunningham : Oui.
La sénatrice McCallum : Pourquoi n’y a-t-il pas eu de communication directe pour une obligation légale de consulter? Pourquoi a-t-on envoyé une lettre? Parce que vous ne savez pas qui reçoit la lettre, et c’est tellement important. Pourquoi n’a‑t‑on pas communiqué directement avec les intéressés au lieu d’envoyer une lettre?
Mme Cunningham : Je vous remercie de la question. Je ne peux pas vous dire exactement si nous avons eu des activités de sensibilisation précises pour donner suite à la lettre, mais c’est souvent de cette façon que nous lançons des consultations. Ce n’est pas la seule forme d’invitation à une consultation; l’envoi de lettres aux personnes-ressources marque le début du processus, puis il est suivi de l’invitation à participer comme elles choisissent de le faire et selon les ressources dont elles disposent pour le faire. Je ne peux pas confirmer si nous avons fait un suivi différent.
La sénatrice McCallum : Je trouve ahurissant que l’on se soit contenté d’envoyer des lettres. Il faudrait peut-être recommander un contact plus direct, parce que nous avons eu ce problème avec l’un des parcs lorsque la cheffe est venue me voir. Elle m’a dit que Parcs Canada n’avait pas communiqué avec eux. Cela se produit encore et toujours.
Je me sens très mal, car cela nous place dans une situation délicate où nous devons faire face à cette urgence pour les uns et passer outre aux droits des autres.
La sénatrice Sorensen : Il est troublant que l’on décide de procéder simplement par l’envoi d’une lettre, parce qu’on ne sait peut-être pas où cette lettre a abouti. On m’a toutefois dit, à un moment donné, qu’en ce qui concerne Parcs Canada, les organisations signataires du Traité no 6 et du Traité no 8 ont demandé à l’agence de consulter directement les nations membres, puisqu’on ne veut pas le faire au plus haut niveau de cette organisation. En guise de confirmation, des lettres ont été envoyées directement aux nations membres, et pas nécessairement à l’organisation, selon leurs directives, dans la mesure où elles veulent que des lettres soient envoyées aux nations, et que les nations... en fait, je ne me rappelle pas à combien de nations signataires du Traité no 6 vous avez dit que des lettres avaient été envoyées. Est-ce exact?
Mme Cunningham : C’est exact.
La sénatrice Sorensen : Pour ceux d’entre nous qui ne sommes pas autochtones, cela peut porter à confusion. Je comprends les concepts d’une organisation, d’une nation et d’une bande, mais le risque est grand que les lettres n’arrivent pas au bon endroit. Je voulais obtenir des précisions à ce sujet parce que les nations signataires du Traité no 6 font partie du forum de Jasper, n’est-ce pas? C’est ce qu’une de nos témoins a dit.
Mme Cunningham : À ce forum, 16 nations membres sont représentées.
La sénatrice Robinson : Au sujet du projet de loi C-49, le chef Sidney Peters, un chef mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse, nous a dit qu’il recevait beaucoup de courrier. Il a dit : « Nous avons reçu des lettres concernant l’obligation de consulter sur l’emplacement d’un ponceau. »
Si le Canada avait reçu une lettre des États-Unis — d’un autre pays — lui demandant sa réponse sur une question vitale, considéreriez-vous qu’il s’agit d’un moyen de communication efficace de la part d’un pays étranger, si les États-Unis, par exemple, communiquaient avec le Canada pour lui demander : « Nous voulons vous entendre à ce sujet »? et, dans le cas où ils ne recevraient pas de réponse du Canada, ils faisaient simplement ce qu’ils voulaient faire? Ma deuxième question est la suivante : comment pensez-vous que nous puissions avancer? Comme la sénatrice McCallum l’a dit, nous sommes constamment placés dans une position très difficile pour un projet de loi que beaucoup d’entre nous voulons appuyer. Nous devons avancer et, ce faisant, nous devons consentir à cette absence d’obligation de consulter. Comment pouvons-nous avancer?
Mme Cunningham : Je vous remercie de cette question. Je crois que l’on a parlé plus tôt des obstacles au transfert du pouvoir en matière d’aménagement des terres de Parcs Canada à Jasper. À l’heure actuelle, il y a deux obstacles qui nous empêchent d’avancer, le premier étant la loi, le deuxième étant l’accord relatif à l’administration locale, qui est signé entre la ministre du Patrimoine canadien, qui est responsable de Parcs Canada, et la municipalité elle-même. Il y a des étapes supplémentaires à franchir avant que le transfert soit réellement effectué. C’est donc l’un des aspects à prendre en considération.
La loi, en soi, n’abroge pas non plus notre obligation de consulter. L’article 2.2 de la Loi sur les parcs nationaux du Canada exige toujours que nous confirmions l’obligation de consulter au sujet des répercussions pour les partenaires autochtones de bon nombre des activités que nous menons sur les terres de nos parcs, y compris celles qui sont visées dans cette loi. Il y a de nombreuses autres occasions de poursuivre le dialogue, la consultation et le respect de notre obligation de consulter.
En ce qui concerne l’accord relatif à l’administration locale, pour apporter la modification qui permettra à la Ville de Jasper d’entreprendre l’aménagement des terres, nous avons également besoin d’un plan communautaire et de règlements administratifs, qui doivent tous deux être conformes au mandat, aux responsabilités et aux obligations environnementales de Parcs Canada. Nous les examinerons et les approuverons également. C’est une autre étape importante lors de laquelle nous pourrons certainement régler certaines des questions qui ont été soulevées par nos partenaires et nous assurer de respecter notre obligation de consulter.
La sénatrice Robinson : Je ne sais pas si vous avez répondu à ma première question. Trouveriez-vous qu’il s’agit d’un moyen de communication efficace si les États-Unis nous avaient envoyé une lettre et si, en l’absence d’une réponse, ils avaient simplement décidé d’aller de l’avant avec un projet dans lequel nous voulions avoir notre mot à dire? Pensez-vous que le Canada jugerait cela comme un moyen de communication raisonnable?
Mme Cunningham : Je reconnais que nous pouvons faire mieux. Nous pouvons faire mieux en ce qui concerne la mobilisation des communautés des Premières Nations, des Métis et des titulaires de droits traditionnels. Nous faisons de notre mieux. Souvent, nous commençons par envoyer une lettre, et c’est une pratique mise en œuvre par Parcs Canada et d’autres ministères également, mais nous pouvons certainement faire mieux sur le plan de la sensibilisation. Je suis d’accord.
Le président : Madame Cunningham, nous voulons que vous vous sentiez tellement mal de ne pas vous être acquittée complètement de votre tâche que vous vous en souviendrez pour le reste de votre vie.
Le sénateur Arnot : Je tiens à informer le président que je vais proposer au bon moment une observation qui, je l’espère, répondra à toutes les préoccupations des témoins autochtones que nous avons entendus ce matin.
La sénatrice Anderson : J’aimerais également faire quelques observations. Vous avez dit que vous avez écrit des lettres à 24 personnes, que six d’entre elles ont répondu et que vous en avez rencontré quatre. Cela représente un sixième du groupe que vous avez l’obligation de consulter. Dans toutes les lois concernant les peuples autochtones, on nous a dit que l’obligation de consulter n’avait pas été respectée, et vous avez dit que, très souvent, vous commencez par l’envoi d’une lettre. Cela pose manifestement un très grave problème. Si tous les représentants, y compris les peuples autochtones, nous disent qu’ils n’ont pas été consultés au sujet de chaque projet de loi, alors il faudrait reconnaître que le gouvernement ne peut pas s’acquitter de son obligation de consulter au moyen de l’envoi d’une simple lettre. Vous dites ensuite que vous reconnaissez que vous pouvez faire mieux, mais allez-vous le faire? Si vous reconnaissez que vous pouvez faire mieux, est-ce qu’un message sera envoyé à tous les ministères pour veiller à ce que, lorsqu’il s’agit de mesures législatives futures, quand des gens diront qu’ils n’ont pas été consultés, les représentants ne viennent pas nous sortir comme excuse qu’ils ont envoyé une lettre mais qu’ils n’ont pas eu de réponse.
Ce n’est pas la première fois que nous entendons dire que vous avez envoyé des lettres et que vous n’avez pas eu de réponse. C’est un refrain assez courant, et il est consternant de constater que vous considérez vous être acquittée de votre responsabilité par le simple envoi d’une lettre. Lorsque vous avez une responsabilité à l’égard des peuples autochtones en vertu d’un traité, il est déplorable d’entendre que si vous avez envoyé une lettre, même si vous n’avez pas eu de réponse, vous estimez avoir assumé vos responsabilités. Je tiens à ce que cela figure au compte rendu. Merci.
Le président : Sur cette note, madame Cunningham, savez‑vous qu’à la toute fin de la lettre, il est précisé : « Veuillez confirmer; veuillez nous répondre. » C’est clair et net. C’est assez clair pour conclure que si 20 personnes n’ont pas répondu, c’est peut-être parce qu’il y a quelque chose qui cloche dans la lettre. Comment la lettre a-t-elle été rédigée? Quel suivi était attendu?
Mme Cunningham : Je suis désolée, mais je n’ai pas la lettre devant moi et je ne l’ai pas examinée. Je devrai faire un suivi à ce sujet.
Le président : Je pense que cela met fin à la discussion s’il n’y a pas d’autres questions. Merci beaucoup. Nous allons procéder à l’étude article par article.
[Français]
Avant de commencer, j’aimerais rappeler certaines choses aux sénateurs. Si vous ne savez plus où nous en sommes, n’hésitez pas à demander des précisions. Je vais faire en sorte que chacun d’entre vous sache en tout temps où nous en sommes.
En ce qui concerne la procédure, je tiens à rappeler aux sénateurs que lorsqu’on propose plus d’un amendement pour le même article, les amendements doivent être proposés suivant l’ordre des lignes du texte à modifier. Par conséquent, avant que nous examinions un amendement ou un article, je vérifierai si d’autres sénateurs ont l’intention de proposer un amendement modifiant une ligne précédente du même article. Si c’est le cas, ils auront l’occasion de le faire.
Je fais une petite précision. Si un sénateur s’oppose à un article en entier, la procédure normale en comité n’est pas d’adopter une motion pour supprimer l’article au complet, mais plutôt de voter contre cet article lorsque nous procéderons au vote.
À ce propos, je vous invite à consulter le paragraphe 698(6) de Beauchesne, qui dit ceci :
Un amendement est irrecevable s’il ne vise qu’à supprimer un article, puisqu’il suffit dans ce cas de voter contre l’adoption de l’article en question.
J’aimerais également rappeler aux sénateurs que certains amendements proposés peuvent avoir des conséquences sur d’autres parties du projet de loi. Je renvoie les sénateurs au paragraphe 698(2) de Beauchesne, qui dispose que le président ne peut recevoir un amendement :
[...] s’il va à l’encontre ou s’écarte des dispositions du projet de loi adoptées jusque-là par le comité, s’il contredit une décision que le comité a rendue au sujet d’un amendement antérieur [...]
Si l’on se fie à cet énoncé, il serait très utile qu’un sénateur qui propose un amendement indique au comité quels sont les autres articles du projet de loi sur lesquels son amendement pourrait avoir une incidence. Autrement, il pourra être très difficile pour notre comité de rester cohérent dans ses décisions.
Le personnel s’efforcera de noter les endroits où les amendements subséquents doivent être proposés et nous les signalera. Lorsqu’il n’est pas nécessaire de donner un préavis pour proposer des amendements, il peut évidemment ne pas y avoir eu d’analyse préliminaire des amendements pour déterminer ceux qui peuvent avoir des répercussions sur les autres articles, ou vice versa.
Si les membres du comité ont une question concernant le processus ou le bien-fondé de quoi que ce soit, ils peuvent soulever un rappel au Règlement. La présidence écoutera les arguments, décidera du moment où nous aurons assez discuté de la question de procédure et rendra une décision.
Bien entendu, le comité est maître de ses travaux dans les limites établies par le Sénat, et un sénateur peut interjeter appel d’une décision de la présidence devant le comité en demandant si la décision doit être maintenue.
La troisième lecture est l’étape finale de l’étude du projet de loi dans son ensemble. Les amendements aux articles peuvent également être proposés à l’étape de la troisième lecture. À titre de président, je ferai de mon mieux pour m’assurer que tous les sénateurs qui souhaitent prendre la parole puissent le faire. Cependant, je devrai compter sur votre coopération et je vous demande à tous de vous en tenir aux faits et de parler le plus brièvement possible.
Enfin, je tiens à rappeler aux sénateurs qui ont le moindre doute quant au résultat d’un vote de vive voix ou d’un vote à main levée que la façon la plus harmonieuse d’intervenir est de demander un vote par appel nominal, qui mènera à des résultats clairs. Les sénateurs savent que, en cas d’égalité des voix, la motion sera rejetée.
Avez-vous des questions sur ce que je viens de dire? Sinon, nous allons procéder à l’étude article par article.
Est-il convenu de procéder à l’étude article par article du projet de loi C-76, Loi modifiant la Loi sur les parcs nationaux du Canada?
Des voix : D’accord.
Le président : Êtes-vous d’accord pour suspendre l’adoption du titre?
Des voix : D’accord.
Le président : L’article 1 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Le président : L’article 2 est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Le président : Le titre est-il adopté?
Des voix : D’accord.
Le président : Le projet de loi, tel qu’il a été amendé, est-il adopté? En fait, il n’y a aucun amendement.
Des voix : D’accord.
Le président : Le comité souhaite-t-il annexer des observations au rapport?
[Traduction]
Le sénateur Arnot : Chers collègues, je vais soumettre à votre examen cette observation, qui se lit comme suit :
Le Comité reconnaît les frustrations et les préoccupations valables et profondes soulevées par les témoins autochtones qui ont comparu devant lui. Nous attendons du gouvernement qu’il consulte toutes les nations autochtones ayant des liens avec le parc national de Jasper lors de la mise en œuvre du projet de loi, qu’il remplisse ses obligations fiduciaires, qu’il réponde à la meilleure norme de qualité de l’honneur de la Couronne et qu’il respecte l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui reconnaît les droits issus de traités des peuples autochtones.
J’espère ici utiliser le meilleur libellé possible pour en arriver au résultat qui aurait dû être obtenu.
Le président : Des commentaires? Nous allons examiner cet amendement, si vous n’y voyez pas d’inconvénient. Sénateur Wells, vous avez probablement un amendement, mais pouvons-nous examiner celui-ci d’abord? Il est distinct du vôtre.
Le sénateur D. M. Wells : J’aimerais parler de cette observation.
Sénateur Arnot, je vous remercie. Nous sommes tous sur la même longueur d’onde. Aux fins de discussion, je ne sais pas si nous pouvons dire que « Nous attendons du gouvernement » dans une observation. Les observations ne peuvent être contraignantes, et si nous disons que « Nous attendons du gouvernement », c’est évidemment...
Le sénateur Arnot : Je pourrais plutôt dire « Nous nous attendons à ce que le gouvernement ».
Le sénateur D. M. Wells : Comme vous voulez.
Le sénateur Arnot : Si cela répond à votre préoccupation.
Le sénateur D. M. Wells : Je demanderais l’avis de la greffière et de l’analyste à ce sujet, mais « Nous nous attendons à ce que le gouvernement » me convient. Cependant, je sais que nous ne pouvons pas contraindre le gouvernement dans une observation.
Le président : Réglons cette question. Est-ce que cela vous convient?
Ferda Simpson, greffière du comité : Il revient au comité de prendre la décision.
Le président : La décision revient évidemment au comité, mais on semble nous aviser que c’est une formulation acceptable.
Le sénateur D. M. Wells : Qu’est-ce qui semble acceptable?
Le président : L’amendement, tel que modifié. Il semblait acceptable.
Le sénateur D. M. Wells : Pour utiliser « Nous attendons du gouvernement »?
Le président : Non, pas « Nous attendons du gouvernement », mais bien « Nous nous attendons à ce que le gouvernement ».
Le sénateur D. M. Wells : « Nous nous attendons à ce que le gouvernement », d’accord. C’est bien.
Par ailleurs, sénateur Arnot, vous avez parlé d’obligations fiduciaires. N’y a-t-il pas quelque chose de plus fort? N’y a-t-il pas une obligation légale?
Le sénateur Arnot : L’obligation légale est l’obligation fiduciaire. Le gouvernement du Canada, la Couronne, en tout temps, doit se conformer à l’obligation de ne pas nuire ou de veiller à ne pas conclure de transactions douteuses. C’est son obligation.
Le sénateur D. M. Wells : C’est son obligation légale?
Le sénateur Arnot : Oui.
Le sénateur D. M. Wells : Vous avez parlé d’« obligations fiduciaires ». Serait-il acceptable de plutôt dire « obligation légale »? Cela semble plus fort que « fiduciaires ».
Le sénateur Arnot : L’obligation fiduciaire est reconnue en droit constitutionnel en la matière. C’est pourquoi j’utilise cette expression. Il y a une obligation fiduciaire. Elle a fait l’objet de nombreux litiges. Elle est conforme aux décisions de la Cour suprême du Canada. Dans bien des cas, on parle de l’obligation fiduciaire, qui est très élevée. C’est une obligation de fiduciaire.
Le sénateur D. M. Wells : Dans ce cas, je comprends. D’accord, cela me convient.
La sénatrice McCallum : J’avais aussi une observation à soumettre.
Le président : Voulez-vous la lire?
La sénatrice McCallum : Oui.
Le Comité demande au gouvernement fédéral d’améliorer manifestement son approche lorsqu’il s’acquitte de son obligation fiduciaire de consulter les détenteurs de droits des Premières Nations, des Inuits et des Métis au sujet des projets de loi qui ont une incidence sur leurs droits issus de traités, leurs droits inhérents et leurs terres traditionnelles. Le Comité exhorte le gouvernement fédéral à s’acquitter de son obligation fiduciaire de consultation à toutes les étapes du processus législatif, de la conceptualisation à la mise en œuvre, en passant par la rédaction.
Le président : De toute évidence, nous ne pouvons pas soumettre les deux.
Sénateur Arnot, avez-vous des commentaires? Certaines de vos idées y figurent. On y retrouve aussi l’obligation fiduciaire. Qu’en pensez-vous?
Le sénateur Arnot : Je retire ma suggestion si la sénatrice McCallum n’aime pas ce que j’ai proposé.
Le président : Laquelle est la plus complète?
La sénatrice McCallum : Pouvons-nous entendre de nouveau l’observation du sénateur Arnot?
Le sénateur Arnot : Oui :
Le Comité reconnaît les frustrations et les préoccupations valables et profondes soulevées par les témoins autochtones qui ont comparu devant lui.
Nous nous attendons à ce que le gouvernement consulte toutes les nations autochtones ayant des liens avec le parc national de Jasper lors de la mise en œuvre du projet de loi, qu’il remplisse ses obligations fiduciaires, qu’il réponde à la meilleure norme de qualité de l’honneur de la Couronne et qu’il respecte l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui reconnaît les droits issus de traités des peuples autochtones.
La sénatrice McCallum : Nous devrions tenir un vote. Je n’y verrais pas d’inconvénient.
Le Comité demande au gouvernement fédéral d’améliorer manifestement son approche lorsqu’il s’acquitte de son obligation fiduciaire de consulter les détenteurs de droits des Premières Nations, des Inuits et des Métis au sujet des projets de loi qui ont une incidence sur leurs droits issus de traités, leurs droits inhérents et leurs terres traditionnelles. Le Comité exhorte le gouvernement fédéral à s’acquitter de son obligation fiduciaire de consultation à toutes les étapes du processus législatif, de la conceptualisation à la mise en œuvre, en passant par la rédaction.
Le président : Pourriez-vous répéter cette phrase?
La sénatrice McCallum : Le Comité exhorte le gouvernement fédéral à s’acquitter de son obligation fiduciaire de consultation à toutes les étapes du processus législatif, de la conceptualisation à la mise en œuvre, en passant par la rédaction.
Le président : Je ne suis pas un expert en la matière, mais je croyais qu’on nous avait dit que l’obligation de consulter intervenait à des points de décision clés.
La sénatrice McCallum : Si nous écrivons « Le comité exhorte le gouvernement fédéral à s’acquitter de son obligation fiduciaire de consultation à des points de décision clés », comment l’obligation de consulter maintenant va-t-elle se poursuivre par la suite? Parce qu’elle doit se poursuivre. Nous pouvons changer cela si vous le voulez.
La sénatrice Sorensen : Je préfère la version de la sénatrice McCallum. Je pense qu’elle est formulée de façon plus générale. J’appuie l’une ou l’autre de ces observations, mais je pense que celle de la sénatrice reconnaît que du travail a été fait. Il faut le faire et je crois que vous l’avez écrit dans votre version.
Le président : Les deux sont très bonnes.
Le sénateur Arnot : La façon dont je l’ai formulée est propre à ce projet de loi, et dire au gouvernement du Canada ce qu’il doit faire dans tous les cas pourrait être un peu exagéré. Nous avons déjà vu cela se produire dans le cas de la Loi sur les armes à feu, parce que j’ai parlé de la même chose.
La sénatrice Anderson : En ce qui concerne ce projet de loi en particulier, les deux témoins autochtones ont dit qu’ils n’étaient pas des titulaires de droits. En ce qui concerne ce libellé précis, je préfère la version du sénateur Arnot parce qu’elle s’applique plus particulièrement aux nations signataires de traités qui sont liées aux terres de Jasper. Cela donnerait une porte de sortie au gouvernement, car ce ne sont pas des titulaires de droits issus de traités, mais bien des Autochtones ayant des liens avec ces terres.
Le président : Cela devient du ouï-dire parce qu’ils ne sont pas directement touchés. Ils n’ont pas reçu la lettre. Il faut donc faire attention au libellé. Nous spéculons un peu dans ce cas.
La sénatrice Robinson : Pouvons-nous nous appuyer sur l’une ou l’autre de ces options pour reconnaître la situation difficile dans laquelle nous avons été placés? Nous avons entendu dire que l’obligation de consulter n’avait pas été respectée, mais nous sommes obligés d’adopter ce projet de loi en raison de l’urgence à Jasper. Pouvons-nous soumettre une observation dans cette déclaration qui reconnaît que nous sommes placés entre l’arbre et l’écorce?
Le président : Pour être honnête avec vous, je ne suis pas sûr d’aimer cela.
La sénatrice Robinson : J’admire votre honnêteté.
Le président : Les conséquences pour nous devraient être mineures par rapport à l’importance de la question pour les peuples autochtones.
La sénatrice Robinson : Il ne s’agit pas tant de nous; cependant, nous avons été placés dans une situation où nous devons décider si nous allons approuver un projet de loi alors que l’obligation de consulter n’a pas été respectée. Je tiens à faire observer que le gouvernement doit s’acquitter de son obligation de consulter afin que nous puissions ensuite étudier le projet de loi comme il se doit et que nous ne soyons pas forcés de décider si nous allons faire fi des droits des personnes qui détiennent des droits issus de traités.
Le sénateur Arnot : Ces deux commentaires expriment deux idées distinctes et devraient constituer deux observations distinctes. Cependant, j’aime bien ce que la sénatrice Robinson essaie de dire, car cela s’est déjà produit quelques fois au Sénat. Nous ne pouvons accepter que la Couronne ne respecte pas sa norme de qualité de l’honneur. C’est ce qui est en jeu ici.
Le sénateur D. M. Wells : J’aurais deux choses à dire à ce sujet. La première, c’est que l’observation que propose le sénateur Arnot est plus pertinente pour ce projet de loi. Celle de la sénatrice McCallum, qui est tout à fait juste, est davantage conforme à la pratique générale du gouvernement en ce qui concerne le non-respect des obligations. S’il s’agit d’observations sur ce projet de loi, il est plus prudent de s’en tenir au libellé plus précis du sénateur Arnot, avec les changements appropriés au sujet des témoins représentant les traités et ce genre de choses, parce que nous avons eu des témoins qui représentaient les traités, mais c’était nuancé.
Deuxièmement — et cela rejoint l’excellent point que la sénatrice Robinson a soulevé —, si l’une de nos tâches consiste à améliorer un projet de loi, et qu’on insiste manifestement pour que nous l’approuvions, cela nous enlève l’obligation d’essayer de l’améliorer, si toutefois c’était possible. Je n’aime pas l’idée de traiter de quelque chose qui n’a pas fait l’objet d’un travail préparatoire adéquat, comme des consultations avec les Premières nations de la façon la plus appropriée.
La sénatrice Anderson : Je tiens à souligner que le sénateur Arnot pourrait être plus clair en mentionnant toutes les nations qui sont liées au parc national Jasper parce qu’il fait partie de leur territoire traditionnel visé par un traité.
Le sénateur Arnot : Si vous voulez ajouter ces mots à mon observation, je n’y vois pas d’inconvénient. Je suis d’accord. D’après ce que je comprends, le comité directeur examine tous les libellés proposés et les finalise. Ce que je dis est cohérent, mais j’aime la proposition de la sénatrice Anderson, qui veut que ce soit très clair et très précis.
Le président : Vous avez raison. Comme vous le remarquerez, je soulèverai les questions par la suite — avec l’approbation du comité — pour permettre au comité directeur de peaufiner le libellé et de l’approuver, mais je pense que la suggestion a beaucoup de mérite. Le comité directeur tient à s’assurer d’exprimer l’opinion de l’ensemble du comité, et pas seulement la sienne. Nous progressons bien. Sénatrice McCallum, sommes-nous près du but avec la suggestion de la sénatrice Anderson, si nous faisons cet ajout?
La sénatrice McCallum : Oui.
Le président : Donc, ça va pour cette question. Qu’en est-il de l’autre question que la sénatrice Robinson a soulevée?
Le sénateur Arnot : J’appuie ce qu’a dit la sénatrice Robinson. Il est important d’avoir une deuxième observation qui reflète la préoccupation qu’elle a soulevée.
Le président : Quelqu’un a-t-il proposé un libellé?
La sénatrice Sorensen : Votons-nous sur les observations?
Le président : Nous allons voter sur les observations. Je veux m’assurer que nous formulons nos observations de manière appropriée.
La sénatrice Sorensen : Nous ne voulons pas voter sur celle-ci tant que nous n’aurons pas parlé des autres.
Le président : C’est ce que désire le comité.
La sénatrice Robinson : J’aimerais bien en sortir une de mon esprit avant de commencer à réfléchir à une autre. Je ne sais pas ce que les autres en pensent. Je serais d’accord pour voter sur celle-ci.
Le président : Est-ce que cela vous convient? Voulez-vous voter?
Tous ceux qui sont en faveur de l’observation proposée par le sénateur Arnot, avec certaines modifications dont nous avons discuté?
Des voix : D’accord.
Le président : Bien. Revenons à l’observation faisant suite aux remarques de la sénatrice Robinson et du sénateur Wells. Quelqu’un a-t-il un libellé à proposer?
Le sénateur Dean : J’aimerais proposer quelque chose, si vous me permettez.
Le président : Allez-y.
Le sénateur Dean : Merci. Je propose :
Tout en reconnaissant l’urgence actuelle dans le parc national Jasper, le comité a émis des inquiétudes à l’égard de l’examen d’une mesure législative dans un contexte où des questions ont été soulevées au sujet de l’obligation de consultation de la Couronne.
Le président : Des commentaires?
La sénatrice Robinson : Je me demande si nous ne devrions pas être plus fermes ou plus catégoriques et dire : « Les Premières Nations nous ont dit, directement, que la Couronne ne s’était pas acquittée de son obligation de consultation [...] ».
Le sénateur Dean : Certainement, oui.
Le président : Cela ne fait-il pas partie du libellé que le sénateur Arnot a recommandé? Si vous revenez sur « l’obligation de consultation », je pensais que c’était inclus. C’était très vaste. À mon avis, cette idée était incluse. Ce que vous essayez de souligner, c’est la situation difficile dans laquelle nous nous trouvons. Cela doit en découler.
Sénateur Dean, qu’en pensez-vous?
Le sénateur Dean : Si le libellé traduit cette idée, le comité de direction pourrait peut-être terminer le travail.
Le président : Pourriez-vous nous aider? Quelqu’un pourrait-il proposer quelque chose? Sénateur Wells, vous avez beaucoup de créativité. Que suggérez-vous?
Le sénateur Dean : Oui. Que diriez-vous de :
Tout en reconnaissant l’urgence actuelle dans le parc national Jasper, le comité a émis des préoccupations au sujet de l’examen d’une mesure législative alors que des questions ont été soulevées au sujet de l’obligation de consultation de la Couronne.
Je pense que la sénatrice Robinson voudrait probablement dire « alors que des témoignages ont laissé entendre » ou « alors que selon les témoignages versés au compte rendu, l’obligation de consulter de la Couronne n’a pas été respectée ».
Le président : Est-ce que cela vous convient? Sénatrice McCallum, cela vous convient-il?
La sénatrice McCallum : Quelle est la responsabilité du Sénat en raison de la décision de la Cour suprême selon laquelle nous devons nous occuper des gens qui sont sous-représentés, et qu’ils sont notre priorité? Quelle est la responsabilité du Sénat lorsque nous savons que l’obligation de consulter ne s’est pas concrétisée?
Le président : Nous avons deux choix : soit rejeter le projet de loi, soit formuler une observation afin d’essayer d’attirer l’attention du gouvernement pour que cela ne se reproduise plus.
La sénatrice McCallum : Cela nous place dans une situation difficile. Je pense que nous devrions préciser quelle est notre responsabilité.
[Français]
La sénatrice Verner : En français, on pourrait sûrement dire « déplore »; « le comité déplore », c’est plus fort que « a des inquiétudes ». Je comprends qu’on ne peut pas traduire littéralement, mais en français, on pourrait dire « déplore ».
[Traduction]
Le président : « Déplorer » serait très bien. Cela indique que c’est une situation difficile dans laquelle ils nous ont placés et que nous sommes presque en colère, ce qui, à mon avis, est le bon ton.
Une voix : Nous sommes en colère.
Le président : Je pense que c’est approprié. Êtes-vous d’accord, sénateur Arnot?
Le sénateur Arnot : Il y a une chose dont j’ai déjà parlé. Ce n’est peut-être pas approprié ici.
L’une des choses fondamentales qui devraient se produire dans l’organe exécutif du gouvernement, chaque fois qu’une mesure législative comme celle-ci touchant les droits ancestraux ou issus de traités, l’article 35, dans le mémoire au Cabinet, les fonctionnaires devraient dire au Cabinet, au pouvoir exécutif, qu’ils se sont conformés aux obligations constitutionnelles en vertu de l’article 35. Nous n’avons pas compétence pour leur dire comment faire leur travail.
C’est vraiment ce qui devrait se passer, et chaque fois que les peuples autochtones et les droits issus de traités sont concernés, ils devraient donc dire : « Nous nous sommes conformés », parce que l’exécutif ne pose pas ces questions.
Le Cabinet n’a probablement pas posé ces questions pour la Loi sur les armes à feu, cette loi ou le projet de loi C 49. Cependant, je ne sais pas comment nous pouvons remédier à cela aujourd’hui.
Le président : Comme vous le savez, lorsque nous nous sommes penchés sur la question des Mi’kmaqs, nous avons formulé une observation. Nous avons obtenu une longue réponse et un long engagement de la part du ministre quant à la façon dont on allait régler le problème et faire en sorte que cela ne se reproduira plus jamais.
Le sénateur Arnot : Je ne le savais pas.
Le président : C’était important.
J’ai oublié le libellé. Ce libellé est-il suffisamment général pour s’appliquer à nous? Je ne me souviens plus si c’était seulement la loi que nous examinions. Quelqu’un se souvient-il de cette lettre? Aucun d’entre nous.
Que pensez-vous du libellé proposé par le sénateur Dean? Avons-nous suffisamment de renseignements pour savoir ce que nous voulons et comment nous voulons procéder?
Jesse Good, analyste, Bibliothèque du Parlement : Je pense que vos sentiments à ce sujet sont suffisamment clairs pour que nous puissions rédiger une recommandation répondant à vos préoccupations, et la faire approuver par le comité directeur.
Le président : Puis-je demander officiellement que nous votions sur cette observation telle que proposée? Tous ceux qui sont pour?
Des voix : D’accord.
Le président : Permettez-moi de passer au sénateur Wells, qui a une autre observation à faire.
Le sénateur D. M. Wells : J’espère que vous trouverez cela facile. Je l’ai rédigée et je l’ai transmise à mes collègues du comité de direction; cependant, après la discussion que nous venons d’avoir, je vais apporter un petit changement au libellé, si vous me le permettez.
Chers collègues, voici le libellé que je propose :
Étant donné que les pouvoirs et les ressources financières futures seront fournis grâce à l’adoption de ce projet de loi et que le ministère de l’Environnement et du Changement climatique a failli à son mandat de protéger les forêts qui relèvent de sa compétence, le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les mesures recommandées pour la prévention et l’atténuation des feux de forêt soient mises en œuvre, et il doit en faire rapport au Parlement chaque année.
La sénatrice Sorensen : Je suis tout à fait d’accord avec le texte que je viens de recevoir, et qui ne contient pas la deuxième phrase au sujet du gouvernement fédéral.
Je ne peux pas accepter la mention que vous avez ajoutée. Ce que je lis ici est excellent.
Le sénateur D. M. Wells : Ce que vous lisez là n’est pas ce qui est sur la table.
La sénatrice Sorensen : C’est ce qu’on m’a donné. Vous venez de modifier quelque chose à la volée.
Je ne suis pas d’accord avec l’énoncé qui se trouve au milieu. Je peux l’appuyer si c’est supprimé, mais je ne peux pas l’appuyer...
Le président : Est-ce la deuxième phrase que vous n’aimez pas?
La sénatrice Sorensen : C’est la partie sur le ministère de l’Environnement et du Changement climatique.
Le sénateur D. M. Wells : Permettez-moi de le relire :
... et le ministère de l’Environnement et du Changement climatique a failli à son mandat de protéger les forêts qui relèvent de sa compétence [...] ...
Nous avons appris cela au comité. Nous l’avons appris directement.
Le sénateur Arnot : Je suis d’accord avec la sénatrice Sorensen et le sénateur Wells. Je ne sais pas si nous pourrions en arriver à cette conclusion à la lumière de ce que nous avons entendu. Je ne suis pas sûr que nous puissions dire qu’ils ont échoué à la lumière de ce que nous avons entendu. C’est pourquoi je suis d’accord avec le libellé original. Je vais faire cette observation.
La sénatrice McCallum : Je suis d’accord. Je ne peux pas dire que le ministère a échoué. Je n’ai pas de rapport en ce sens. Je ne sais pas ce qu’il en est. Cela me met mal à l’aise.
Le sénateur D. M. Wells : Je n’ai pas d’objection à supprimer cela et à conserver le libellé original.
Le président : Pourquoi ne pas dire : « Des questions ont été soulevées au sujet de... »?
Le sénateur D. M. Wells : Oui.
Le président : Donc, vous ne le précisez pas, mais vous dites que des questions ont été soulevées...
Le sénateur D. M. Wells : Nous avons...
Le sénateur Arnot : Sénateur Wells, si vous enlevez cela, ce sera adopté en environ trois secondes.
Le sénateur D. M. Wells : Ce n’est pas ce qui me motive, comme vous le savez peut-être.
Le sénateur Arnot : Je le sais.
Le président : Lisez ce que vous aimeriez voir.
Le sénateur D. M. Wells : J’aime votre compromis. J’ai demandé au ministre si son programme de gestion des terres était une réussite. De toute évidence, ce n’en était pas une, car nous parlons tous les jours du fait que des forêts sont en train de brûler. Nous entendons le ministre et d’autres ministres le dire. Si nous ne le mentionnons pas ici, sommes-nous en train de dire que leurs pratiques d’aménagement forestier sont une réussite? De toute évidence, ce n’est pas le cas.
La sénatrice Sorensen : Je vis dans cet environnement, et dans mes fonctions précédentes, j’ai travaillé avec ce ministère et avec Parcs Canada pendant 17 ans. Les feux de forêt sont des feux de forêt, et ce ne sont pas tous les incendies qui peuvent être évités, à moins d’être prêts à déboiser profondément dans la forêt et à aménager un stationnement en ciment autour de ces municipalités. Comme dans le cas de tous les autres incendies de grande envergure au pays, je suis horrifiée par cet incendie. Nous ne voyons pas les choses de la même façon, vous et moi. Vous parlez sans cesse des 30 % qui ont brûlé tandis que je parle des 70 % qui ont été épargnés. Je suis désolée; je suis très émotive à ce sujet.
Comment cet incendie a-t-il pris fin, sans que des gens soient morts et en évacuant tout le monde? J’hésite à parler d’une « réussite » parce qu’il est difficile d’utiliser ce mot dans ce contexte. Cependant, la prévention, la préparation, l’atténuation, les équipes d’incendie de Parcs Canada, et tous ceux qui ont pris l’avion pour aller aider cette collectivité, ont sauvé 70 % de cette ville, et je ne peux pas accepter ce que vous dites. Comme je l’ai dit, je suis heureuse d’appuyer cette observation, mais j’estime que toute mention d’une incapacité à prévenir tous les incendies au pays serait injustifiée.
Le sénateur D. M. Wells : Je ne laisse pas l’émotion m’aveugler. À une certaine époque, j’étais à la tête d’un organisme de réglementation qui s’occupait de l’environnement extracôtier. Il existe un système d’examen des événements négatifs appelé le système du nœud papillon. Les trois étapes sont les suivantes : tout ce que vous pouvez faire pour prévenir quelque chose, puis l’événement, puis tout ce que vous pouvez faire par la suite pour prévenir les dommages, les blessures et ce genre de choses. Pensez à la conduite automobile : Avant un accident, nous avons l’inspection des véhicules, les permis de conduire, les lampadaires et tout ce qui peut prévenir les incidents. Il y a ensuite un incident, car il y en a toujours. Il y a les ceintures de sécurité, les coussins gonflables, les garde-corps et l’assurance, puis il y a tout ce qui vient après.
Cette observation, sénatrice Sorensen, n’a rien à voir avec tout ce qui s’est passé après le début de l’incendie. Je parle seulement des choses que le ministère de l’Environnement et du Changement climatique n’a pas faites malgré toutes les preuves, tous les rapports d’experts et tous les témoignages reçus dans les tribunes qui ont eu lieu avant l’événement. Je ne parle pas de toutes les choses merveilleuses, importantes et qui ont sauvé des vies qui se sont produites par la suite. Ce n’est pas ce dont je parle.
Ce que je veux dire, c’est qu’il était clair, d’après les témoignages que j’ai entendus et les documents que j’ai lus en prévision de nos audiences, que le ministère avait failli à sa mission. Dès 2017, on nous a prévenus que le ministère n’avait pas fait le nécessaire. C’était une poudrière. Ce n’était qu’une question de temps. Il suffisait d’une étincelle. Nous avons entendu tout cela. C’est ce dont je parle. Je ne parle pas des choses merveilleuses qui se sont produites, et je ne veux pas le faire. C’était formidable que ce ne soit que 30 %. C’est formidable, mais même 30 % ne me satisfait pas.
Même si je ne vis pas en Alberta, mon travail consiste à me préoccuper des lois qui améliorent les choses, et je pense que ce soit le cas ici.
Le sénateur Arnot : Je pense que cette question devrait être traitée de façon globale. Je m’inquiète beaucoup des feux de forêt et de la façon dont ils sont traités de façon ponctuelle au Canada. Je crois que nous avons besoin d’une stratégie nationale, et je pense que le comité est déterminé à étudier les catastrophes climatiques et, plus particulièrement, les feux de forêt. L’exemple qui a été cité est celui de Lytton, en Colombie-Britannique, où des inondations sont survenues en raison des changements climatiques et d’une catastrophe climatique. Nous sommes censés examiner cela dans le cadre de notre plan de travail, que j’appuie vraiment. Je pense que c’est vraiment important. Mais je ne pourrai pas appuyer le sénateur Wells.
Le président : Sénateur Wells, le fait est que vous n’allez pas parvenir à un consensus ou même à une majorité, pour être franc avec vous. Je comprends les questions que cela soulève. Cela ne me pose aucun problème. Mais je ne pense pas que nous ayons suffisamment de preuves pour tirer des conclusions, alors je recommande fortement que le deuxième paragraphe dise « Des questions ont été soulevées au sujet de... » Autrement dit, vous laissez la porte ouverte pour dire que nous devrions en apprendre davantage à ce sujet, mais je ne pense pas que nous ayons suffisamment de preuves pour dire qu’ils sont certainement incompétents.
Je pense que vous devriez revoir cela et dire que des questions ont été soulevées, et cetera. Cela vous conviendrait-il?
Le sénateur D. M. Wells : Cela me semble acceptable. Si nous ne disons rien, cela revient à dire, comme le ministre, que la gestion des forêts est une grande réussite.
Le président : Nous ne pouvons pas tirer ces conclusions.
Le sénateur D. M. Wells : Je comprends.
La sénatrice Sorensen : Je ne sais pas à quoi ressemblera le libellé final. Je peux appuyer le libellé qui m’a été donné à l’avance. Il me plaît et je peux l’accepter, mais je ne vais pas nécessairement accepter quoi que ce soit d’autre.
Le président : Sénateur Wells, pourriez-vous lire ce que vous proposez à la suite de mon commentaire?
Le sénateur D. M. Wells : Je vous demanderais peut-être de lire votre libellé.
Le président : Je ne l’ai pas sous les yeux.
Le sénateur D. M. Wells : Je n’ai pas votre libellé sous les yeux.
Le sénateur Arnot : Sénateur Wells, si vous approuvez ce que vous avez proposé, je serai entièrement d’accord.
Le sénateur D. M. Wells : Je comprends cela, mais je pense que nous devons aller un peu plus loin. Sénateur Massicotte, je crois que c’est ce que vous proposiez. Voulez-vous que j’écrive quelque chose à ce sujet?
Le président : Si vous n’y voyez pas d’inconvénient. Entretemps, je vais poursuivre le reste de la réunion, si vous voulez bien prendre une minute pour ajouter ces quatre ou cinq mots.
Nous reviendrons pour traiter de cette modification, mais si ce n’est pas possible, je vais procéder à la lecture. Avez-vous d’autres observations à faire?
[Français]
Est-il convenu que le Sous-comité du programme et de la procédure soit autorisé à approuver la version finale des observations qui seront annexées au rapport, dans les deux langues officielles, en tenant compte de la discussion d’aujourd’hui et en apportant tout changement nécessaire lié à la forme, à la grammaire ou à la traduction?
[Traduction]
Je propose maintenant la résolution qui donne au comité directeur le pouvoir de finaliser le libellé de toutes les observations. Tout cela vous semble-t-il acceptable? D’accord?
Des voix : Oui.
[Français]
Le président : Est-il convenu que je fasse rapport de ce projet de loi au Sénat dans les deux langues officielles, en tenant compte de l’observation du sénateur Wells?
[Traduction]
Cela vous convient? Avant de terminer, je vais accorder une minute de plus au sénateur Wells.
Le sénateur D. M. Wells : Chers collègues, essayons ceci :
Étant donné que l’adoption de ce projet de loi permettra d’attribuer des pouvoirs et des ressources financières à l’avenir, et que le ministère de l’Environnement et du Changement climatique aurait pu faire plus pour atténuer les incendies, le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les mesures recommandées pour la prévention et l’atténuation des feux de forêt soient mises en œuvre, et à ce qu’il en soit rendu compte au Parlement chaque année.
Le président : Puis-je faire un commentaire? J’ai un problème avec la deuxième phrase, ou peut-être était-ce la première. Pourriez-vous la relire lentement?
Le sénateur D. M. Wells : « et que le ministère de l’Environnement et du Changement climatique — qui est le ministère responsable — aurait pu faire plus pour atténuer les incendies [...] »
Le président : C’est là que nous sommes un peu coincés.
La sénatrice Sorensen : À titre de précision, si je devais considérer cela — et je ne le ferai pas —, c’est Parcs Canada. Ce n’est pas le ministère. Je sais que le ministère supervise Parcs Canada, mais c’est Parcs Canada. C’est son agence, mais c’est purement sémantique.
Le sénateur D. M. Wells : Ma question, parce que je ne vis pas dans le parc, est la suivante : les feux de forêt se sont-ils produits à l’extérieur du parc?
La sénatrice Sorensen : Non.
Le sénateur D. M. Wells : Des feux de forêt se produisent à l’extérieur des parcs.
La sénatrice Sorensen : Absolument.
Le sénateur D. M. Wells : Voilà où je veux en venir.
La sénatrice Sorensen : D’accord, mais je ne peux toujours pas appuyer cela.
Vous avez laissé entendre que ce serait différent, mais vous dites toujours la même chose de trois façons différentes.
Le président : Nous avons un problème avec la conclusion. En un sens, vous lancez une accusation ferme de conduite fautive, et c’est là le problème.
Le sénateur D. M. Wells : Le ministère aurait pu faire plus en matière d’atténuation.
Le président : Ou « des questions ont été soulevées quant à savoir si le ministère aurait pu faire plus ». J’aime mieux ça.
Le sénateur D. M. Wells : D’accord. Cela me convient.
Le président : Parce que je pense que nous avons des questions, mais nous n’avons pas l’information nécessaire pour tirer des conclusions. Est-ce que cela vous convient?
Le sénateur D. M. Wells : « Des questions ont été soulevées », oui. Alors, personne n’est fautif.
Le président : Lisez le texte au complet, si vous le voulez bien.
Le sénateur D. M. Wells : « Étant donné que l’adoption de ce projet de loi permettra d’attribuer des pouvoirs et des ressources financières à l’avenir, et [...] » au passé « [...] que des questions ont été soulevées [...] » Je dois mentionner le ministère :
... des questions ont été soulevées au sujet des activités d’atténuation relevant de la compétence du ministère de l’Environnement et du Changement climatique, le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les mesures recommandées pour la prévention et l’atténuation des feux de forêt soient mises en œuvre, et à ce qu’il en soit rendu compte au Parlement chaque année.
Chers collègues, je dis « qu’il en soit rendu compte au Parlement chaque année », parce que nous ne pouvons pas l’obliger à le faire, mais il doit y avoir un certain niveau de reddition de comptes. Ce n’était pas un événement positif. C’était un événement négatif.
Le président : Y a-t-il des commentaires sur l’observation modifiée qui est proposée?
La sénatrice Sorensen : Absolument. Chaque comité auquel je siège, chaque projet de loi que j’examine soulève des questions, et je n’inclurais jamais une telle déclaration dans une observation. Je ne pense pas que cela ait sa place dans une observation. Comme je l’ai dit, chaque comité et chaque projet de loi soulève des questions. Des actes répréhensibles peuvent être signalés.
Je demande simplement une mise aux voix, et je voterai contre.
Je suis désolée, sénateur Wells, parce que j’aimais vraiment cette modification, mais je ne peux pas appuyer la partie du milieu, peu importe la façon dont vous la formulez.
Le sénateur D. M. Wells : C’est bien.
Le président : Faisons ce qui est proposé ...
Le sénateur D. M. Wells : Passons au vote.
Le président : Je veux m’assurer que les gens entendent.
S’il n’y a pas d’autres commentaires, nous allons procéder à la mise aux voix, si vous le souhaitez.
La sénatrice McCallum : Je comprends la préoccupation du sénateur Wells, et lorsque nous avons fait notre tournée en Alberta, des questions ont été soulevées au sujet de la sécurité incendie là-bas à l’époque — c’était quelques semaines avant, du fait que Banff serait dans la même situation que Jasper, et que ce n’était qu’une question de temps avant que l’incendie ne touche également Banff.
La question a été soulevée, alors je comprends qu’il faut que quelqu’un examine sérieusement comment on va prévenir les incendies là-bas. Et ils le font. Ils en ont la capacité. On a dit que ce pourrait être dans 10 ans, et que le temps presse, parce que cela arrivera tôt ou tard. C’est ce qui me préoccupe également.
Le sénateur Arnot : Je m’adresse à la sénatrice McCallum. Je pense que le comité va étudier précisément cette question dans le cadre du plan de travail proposé. C’est ce que je crois comprendre.
Le président : Mais c’est beaucoup plus large. Nous parlons ici précisément de...
Le sénateur Arnot : Je vais proposer une motion pour modifier l’observation du sénateur Wells.
Le président : Allez-y.
Le sénateur Arnot : C’est pour enlever tous les mots qui ne sont pas dans cette version imprimée. Je propose une modification à son observation.
Le sénateur D. M. Wells : Un vote a été demandé, et si c’est rejeté...
Le président : Il y a ensuite une discussion.
Le sénateur D. M. Wells : Oui.
Le président : Avez-vous d’autres commentaires concernant l’observation proposée par le sénateur Wells?
La sénatrice McCallum : Puis-je poser une question? Lorsque vous dites que « le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les mesures recommandées pour la prévention et l’atténuation des feux de forêt soient mises en œuvre », cela répond-il à votre préoccupation?
Le sénateur D. M. Wells : Oui, cela y répond.
La sénatrice McCallum : Pourquoi ne pas laisser les choses ainsi?
Le sénateur D. M. Wells : Cela restera là. Toute la discussion portait sur les activités du ministère responsable, parce que des questions ont été soulevées sur ce qui a été fait.
Nous pouvons relire les notes du comité, cependant nous avons entendu parler d’un certain nombre d’hectares, mais on ne nous a pas donné de pourcentage. C’était environ 1,4 %.
Le président : Pourriez-vous relire l’observation proposée?
Le sénateur D. M. Wells : Oui :
« Étant donné que l’adoption de ce projet de loi permettra d’attribuer des pouvoirs et des ressources financières à l’avenir [...] » c’est là que nous allons ajouter « [...] et que des questions ont été soulevées au sujet du ministère de l’Environnement et du Changement climatique et de ses mesures d’atténuation [...] » quelque chose de ce genre; nous pouvons le reformuler. « [...] le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les mesures recommandées pour la prévention et l’atténuation des feux de forêt soient mises en œuvre [...] » et c’est parce que nous disons qu’elles ne l’ont pas été, alors nous disons maintenant qu’elles doivent l’être « [...] et « qu’il en soit rendu compte au Parlement chaque année. »
Le président : Avez-vous d’autres commentaires à faire à ce sujet avant que nous passions au vote? Y a-t-il d’autres commentaires?
Je demande à tous ceux qui sont en faveur de l’amendement proposé par le sénateur Wells...
La sénatrice Sorensen : Je veux un vote. Je veux que la question soit posée à chacun de nous.
Le président : Un vote par appel nominal, alors?
La sénatrice Sorensen : Oui, merci. Désolée.
La sénatrice McCallum : Pourrions-nous l’entendre de nouveau?
Le sénateur D. M. Wells : Étant entendu que nous allons peaufiner le libellé au comité de direction si nous obtenons l’autorisation de le faire :
Étant donné que l’adoption de ce projet de loi permettra d’attribuer des pouvoirs ainsi que des ressources financières à l’avenir, et que des questions ont été soulevées au sujet des mesures d’atténuation relevant du ministère de l’Environnement et du Changement climatique, le gouvernement fédéral doit veiller à ce que les mesures recommandées pour la prévention et l’atténuation des feux de forêt soient mises en œuvre, et qu’il en soit rendu compte au Parlement chaque année.
Le président : Procédons au vote par appel nominal.
[Français]
Mme Simpson : L’honorable sénateur Massicotte?
Le sénateur Massicotte : Oui.
Mme Simpson : L’honorable sénatrice Anderson?
La sénatrice Anderson : Oui.
Mme Simpson : L’honorable sénateur Arnot?
Le sénateur Arnot : Non.
Mme Simpson : L’honorable sénateur Dean?
Le sénateur Dean : Non.
Mme Simpson : L’honorable sénatrice McCallum?
La sénatrice McCallum : Oui.
Mme Simpson : L’honorable sénatrice Robinson?
La sénatrice Robinson : Oui.
Mme Simpson : L’honorable sénatrice Sorensen?
La sénatrice Sorensen : Non.
Mme Simpson : L’honorable sénatrice Verner?
La sénatrice Verner : Oui.
Mme Simpson : L’honorable sénateur Wells?
Le sénateur Wells : Oui.
Mme Simpson : Pour : 6; contre : 3.
Le président : Adopté.
[Traduction]
Y a-t-il d’autres commentaires?
Le sénateur Arnot : J’espérais présenter mon amendement et le faire adopter. Je n’ai pas d’autres commentaires.
Le président : Bon essai.
La sénatrice Sorensen : Merci, sénateur Wells, d’avoir adouci le ton.
[Français]
Le président : Est-il convenu que je fasse rapport au Sénat de ce projet de loi avec des observations dans les deux langues officielles?
[Traduction]
Des voix : D’accord.
Le président : Adopté.
Merci beaucoup. C’était une bonne discussion.
(La séance est levée.)