LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 23 novembre 2022
Le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles se réunit aujourd’hui, à 16 h 16 (HE), avec vidéoconférence, pour l’étude du projet de loi S-205, Loi modifiant le Code criminel et une autre loi en conséquence (mise en liberté provisoire et engagement en cas de violence familiale).
Le sénateur Pierre-Hugues Boisvenu (vice-président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le vice-président : Bonjour, honorables sénateurs.
Avant de commencer nos travaux, j’aimerais demander aux membres du comité de se présenter, en commençant par ma droite.
[Traduction]
La sénatrice Batters : Sénatrice Denise Batters, de la Saskatchewan.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Pierre Dalphond, division sénatoriale De Lorimier, au Québec.
[Traduction]
Le sénateur Cotter : Brent Cotter, sénateur de la Saskatchewan.
Le sénateur Harder : Peter Harder, de l’Ontario.
[Français]
La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario.
La sénatrice Dupuis : Renée Dupuis, division sénatoriale des Laurentides, au Québec.
[Traduction]
La sénatrice Pate : Kim Pate, des magnifiques rives de la Kitchissippi, sur le territoire non cédé et non abandonné des Algonquins Anishinaabeg.
[Français]
Le vice-président : Sénateur Pierre-Hugues Boisvenu, vice-président du comité, du Québec.
Aujourd’hui, nous poursuivons notre étude du projet de loi S-205, Loi modifiant le Code criminel et une autre loi en conséquence (mise en liberté provisoire et engagement en cas de violence familiale).
Chers collègues, si vous n’y voyez pas d’objection, comme je suis parrain du projet de loi, je vais inviter le sénateur Dalphond à présider la réunion d’aujourd’hui.
Le sénateur Pierre J. Dalphond (président suppléant) occupe le fauteuil
Le président suppléant : Merci beaucoup, chers collègues. Merci beaucoup, sénateur Boisvenu.
Nous recevons aujourd’hui M. Brian Sauvé, président de la Fédération de la police nationale. Il n’en est pas à sa première comparution devant nous.
Nous recevons également par vidéoconférence, de la Police provinciale de l’Ontario, Mme Kari Dart, commandante du Bureau des enquêtes et du soutien, et M. Bryan MacKillop, commandant de la région du Nord-Ouest. Enfin, à titre personnel, nous accueillons M. Brian Simpson, policier à la retraite du Service de police de la Ville d’Edmonton.
Sans plus tarder, nous donnons la parole à M. Sauvé, qui est présent dans la salle. Vous avez cinq minutes.
[Traduction]
Brian Sauvé, président, Fédération de la police nationale : Merci de m’avoir invité à comparaître aujourd’hui. Je m’appelle Brian Sauvé. Je suis sergent à la GRC, mais aussi président de la Fédération de la police nationale, la FPN, l’unique agent négociateur accrédité, représentant près de 20 000 membres de la GRC au Canada.
Le projet de loi S-205 porte sur une question à laquelle nous devrions accorder plus d’attention en tant que société. La lutte contre la violence familiale et la fourniture d’outils supplémentaires pour assurer la sécurité des collectivités partout au Canada sont des mesures que la FPN et ses membres appuient et souhaitent voir mises en œuvre. Selon Statistique Canada et Femmes et Égalité des genres Canada, des 107 810 personnes âgées de 15 ans et plus qui ont été victimes de violence entre partenaires intimes en 2019, 79 % étaient des femmes. Jusqu’à maintenant, les recherches ont montré que les femmes sont plus souvent victimes des formes les plus graves de violence entre partenaires intimes et, comme par les années passées, le taux a été plus de 3,5 fois supérieur chez les femmes que chez les hommes en 2019.
Le projet de loi est un grand pas dans la bonne direction pour la lutte contre la violence familiale au Canada, mais si le gouvernement fédéral ne fournit pas des ressources suffisantes à la police et au système judiciaire et n’élabore pas de réglementation connexe avec les provinces et les territoires, l’objectif principal, c’est-à-dire de protéger des personnes qui en ont besoin, pourrait ne pas être atteint.
Le projet de loi S-205 adopte une approche proactive pour améliorer la sécurité publique : grâce à la modification du paragraphe 501(3) du Code criminel, les juges et la police pourront inclure le port d’un dispositif de surveillance électronique à chaque étape de la procédure judiciaire s’ils le jugent nécessaire pour protéger la vie de la victime. La modification donnera plus de pouvoir aux policiers en leur permettant d’imposer l’utilisation d’un bracelet de surveillance électronique.
L’an dernier, le Québec est devenu la première province au Canada à adopter les dispositifs de surveillance pour protéger les victimes de violence familiale. Le programme a été annoncé à la fin de 2021 et devrait être mis en œuvre dans toutes les régions de la province d’ici la fin de 2023. En 2021 seulement, 18 féminicides présumés auraient été commis par des partenaires intimes au Québec. Tous les gouvernements du pays doivent veiller à ce que les victimes de violence familiale se sentent en sécurité, et les dispositifs de surveillance peuvent être considérés comme un outil supplémentaire pour garantir que c’est le cas.
Chose importante, pour s’assurer que les dispositions du projet de loi sont mises en œuvre adéquatement, il est essentiel d’aborder les ressources policières. Le nombre d’infractions contre des personnes et liées à des comportements de harcèlement et de menaces a augmenté de façon générale depuis 2017, notamment durant la pandémie. Cette augmentation accroît déjà la pression sur les tribunaux et sur la police et rend plus difficile la gestion de la charge de travail avec les ressources accessibles.
Le projet de loi prévoit une augmentation des interventions policières, mais cela s’accompagne d’un besoin de ressources policières, surtout dans les collectivités rurales. Dans les villes, où la densité de la population est élevée, la police peut intervenir rapidement lorsqu’elle est avisée du fait que le délinquant se trouve dans la zone interdite; par contre, la densité élevée de la population fait aussi qu’il y a plus d’appels prioritaires par jour, et il faudra plus de policiers pour maintenir les délais d’intervention. Dans les régions rurales, les policiers sont généralement plus dispersés, vu la faible densité de la population et les distances à parcourir beaucoup plus grandes pour répondre à un appel.
Si le projet de loi est mis en œuvre, il faudra accroître ces ressources critiques pour qu’il atteigne ses objectifs. Nos membres veulent s’assurer que les victimes de violence familiale se sentent en sécurité et peuvent compter sur les systèmes en place. L’insuffisance des ressources financières et humaines continuera de poser problème si nous faisons les choses à moitié. Nous appuyons l’intention du projet de loi de protéger les victimes de violence familiale et encourageons les gouvernements fédéral et provinciaux à collaborer avec leurs homologues de la sécurité publique à la mise en œuvre de mesures supplémentaires permettant d’attaquer les causes profondes de la violence familiale. Nous encourageons fortement tous les gouvernements à accroître les ressources dont disposent les policiers pour répondre au besoin d’assurer la sécurité publique, tant maintenant que dans l’avenir.
Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Bryan MacKillop, commandant de la région du Nord-Ouest, Police provinciale de l’Ontario : Merci, monsieur le président.
Je suis le commandant régional de la région du Nord-Ouest de la Police provinciale de l’Ontario. Je suis accompagné de ma collègue, la surintendante en chef Dart, commandante du Bureau des enquêtes et du soutien de la Police provinciale de l’Ontario.
[Français]
En mon nom personnel, au nom de la commandante Dart et au nom de mes collègues de la Police provinciale de l’Ontario, je voudrais vous remercier sincèrement pour l’invitation qui nous a été faite de participer à la séance du jour.
Bien que je puisse m’exprimer en français, je ferai le reste de mon témoignage en anglais, car c’est la langue dans laquelle je suis à l’aise pour discuter du sujet très technique qui nous concerne aujourd’hui.
[Traduction]
La Police provinciale de l’Ontario croit qu’il est important que les services de police puissent donner leur avis sur un projet de loi comme celui-ci, qui a une incidence directe sur le travail des policiers et sur la sécurité publique. Nous appuyons l’esprit du projet de loi S-205, qui vise à offrir plus de protection aux victimes de violence entre partenaires intimes et familiales. La Police provinciale de l’Ontario s’est engagée à adopter dans ses interventions une approche axée sur les victimes et sur les personnes et à traiter les victimes avec respect, compassion, équité, intégrité et dignité.
Du point de vue du travail de la police, il y a quelques passages du projet de loi qui, à notre avis, pourraient être approfondis ou clarifiés. Notre organisation a cerné à cet égard la terminologie et les définitions, la surveillance électronique, les programmes de traitement et les considérations multijuridictionnelles. Nous soumettons au comité l’idée qu’il pourrait être utile que plusieurs des termes utilisés soient précisés ou définis pour appuyer l’application du projet de loi. Il s’agit entre autres des termes « violence », « violence familiale », « partenaire intime », « dispositif de surveillance électronique » et « médias sociaux ».
À titre d’exemple, dans certains passages du projet de loi, il est question de « violence familiale », tandis qu’ailleurs on parle de « violence entre partenaires intimes ». Le point de vue de la Police provinciale de l’Ontario, c’est qu’il faudrait s’assurer que lorsque le terme « violence familiale » est utilisé, l’intention du législateur est d’aborder ce qui a trait à tout membre du ménage, y compris les enfants, et que lorsque c’est le terme « violence entre partenaires intimes » qui est utilisé, l’intention est de parler de ce qui concerne le partenaire intime.
Nous aimerions aussi attirer l’attention sur des éléments du projet de loi dont une prise en compte inadéquate aura selon nous une incidence sur son efficacité. Il s’agit notamment de l’affectation de ressources appropriées dans les domaines liés à l’approbation, à l’entretien et au suivi de l’équipement de surveillance électronique décrits dans le projet de loi; des répercussions supplémentaires sur les services de police, y compris la charge de travail, la formation du personnel et les opérations; et de la disponibilité, de l’accessibilité et de la diversité des programmes de traitement imposés par les tribunaux qui sont décrits dans le projet de loi.
De plus, il y a des considérations multijuridictionnelles à prendre en compte relativement à la responsabilité de superviser la production de rapports et le respect des dispositions du projet de loi concernant la participation à un programme de traitement ou le port d’un dispositif de surveillance électronique imposés par les tribunaux.
J’aimerais que ma collègue, la surintendante en chef Dart, nous parle des domaines que nous avons cernés, comme la surveillance électronique, et de certaines des statistiques préliminaires que nous avons pu recueillir en prévision de la réunion d’aujourd’hui.
Kari Dart, commandante du Bureau des enquêtes et du soutien, Police provinciale de l’Ontario : Merci, chef MacKillop.
J’aimerais commencer par faire écho à ce qu’a mentionné mon collègue en disant que l’information que nous sommes en mesure de vous fournir aujourd’hui n’est que préliminaire et que nous serions heureux d’avoir l’occasion de fournir ultérieurement plus de détails et de données au comité par écrit.
Les données que nous avons pu recueillir jusqu’à maintenant appuient l’esprit du projet de loi et indiquent qu’une protection accrue des victimes de violence familiale et entre partenaires intimes leur serait bénéfique.
De 2017 à 2021, 32 homicides ont été commis par des partenaires intimes sur le territoire de la Police provinciale de l’Ontario. La Police provinciale de l’Ontario n’a pas accès à toutes les données provinciales; par conséquent, ce nombre exclut les homicides commis dans les régions dont d’autres services de police sont responsables.
Depuis 2017, la Police provinciale de l’Ontario a répondu à plus de 155 000 querelles de ménage. Cela équivaut à environ 25 000 par année. Depuis 2017, plus de 23 000 querelles de ménage ont fait intervenir un acte de violence, comme une agression, une agression armée ou une agression sexuelle, selon les définitions de Statistique Canada. De ce nombre, 83 % ont été le fait d’un partenaire intime.
De 2017 à 2022, la Police provinciale de l’Ontario a enregistré une augmentation de 82 % des querelles de ménage avec violation des conditions de liberté sous caution. En ce qui concerne la surveillance électronique, la Police provinciale de l’Ontario aimerait souligner que, bien que le projet de loi ajoute le port du dispositif de surveillance électronique à la liste existante des conditions d’engagement et de mise en liberté provisoire qui figurent déjà dans le Code criminel, il ne précise pas que d’autres conditions accompagnent cette mesure. Sans condition supplémentaire, prévoyant, par exemple, que le défendeur ne se présente pas à l’adresse de la plaignante, à son lieu de travail, etc., il est peu probable que le suivi de l’endroit où se trouve un défendeur au moyen d’un dispositif de surveillance électronique offre beaucoup plus de protection à une victime de violence entre partenaires intimes ou familiale.
Nous réitérons notre appui aux modifications proposées du Code criminel visant à offrir un soutien supplémentaire aux victimes et aux survivantes de violence entre partenaires intimes et familiale. La Police provinciale de l’Ontario fait la promotion d’un environnement de prévention du crime et de bien-être de la collectivité, où les victimes et les survivantes se sentent en confiance et à l’aise de signaler un crime. Merci.
Le président suppléant : Nous passons maintenant à notre quatrième témoin, M. Brian Simpson. Oh, il ne pourra pas venir. Désolé. Voilà qui termine les exposés des témoins.
Nous allons maintenant donner la parole à nos collègues pour qu’ils puissent poser des questions. Chacun disposera de cinq minutes pour poser des questions et obtenir des réponses.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Ma première question s’adresse à M. Sauvé. Selon une étude menée récemment par l’Université de Montréal et l’Université du Québec à Montréal sur le respect des ordonnances « 810 » — les ordonnances où un juge peut imposer une distanciation entre la victime et l’agresseur —, l’agresseur ne respecte pas ses conditions dans plus de 50 % des cas.
Une autre donnée inquiétante indiquait que la majorité des homicides ou des féminicides qui avaient été commis, notamment au Québec, l’avaient été pendant cette période, c’est-à-dire au moment où l’individu avait reçu l’ordre de ne pas s’approcher de la victime.
Ma question est relativement simple. Est-ce que, selon vos données, l’imposition du bracelet électronique, ordonnée par un juge à un agresseur susceptible de causer des blessures sérieuses à sa victime ou à la personne qui l’a dénoncée, permettrait de diminuer la délinquance par rapport aux ordonnances et assurerait une meilleure protection pour les femmes?
[Traduction]
M. Sauvé : Je pense que c’est une question valable. Je tiens à être toujours optimiste. Plus nous donnons d’outils aux intervenants de notre système judiciaire, des agents de police aux juges, en passant par les agents de probation, mieux le système fonctionnera.
À propos des engagements de ne pas troubler l’ordre public « 810 » , de la mise en liberté provisoire par voie judiciaire et de la détermination de la peine, mes collègues de la Police provinciale de l’Ontario ont fait de bonnes observations au sujet de l’élargissement de la portée du projet de loi… pas nécessairement de la portée, mais des dispositions prévoyant le port d’un bracelet de surveillance, afin qu’elles soient plus précises sur le plan de la nature et de l’utilisation. Nous sommes, les policiers, des gens simples : nous ne sommes pas des avocats. Des dispositions supplémentaires permettraient à la police d’interpréter plus largement la nature de notre travail. Le projet de loi nous donnera des outils supplémentaires pour faire respecter la loi par ceux qui violent une ordonnance de mise en liberté provisoire par voie judiciaire, leur probation ou leur engagement de ne pas troubler l’ordre public « 810 ».
Tout cela pour dire « oui ».
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Ma seconde question s’adresse à l’un ou l’autre des représentants de la Police provinciale de l’Ontario. Je crois que Mme Dart a déclaré que le bracelet électronique ne protégerait pas toutes les femmes, notamment si elles sont agressées à leur lieu de travail. Les données sur les féminicides ont montré que la majorité des féminicides sont commis dans la résidence de la plaignante. Je pense à un cas qui s’est produit en Beauce récemment, où le meurtre a eu lieu dans la voiture de la plaignante. Ce qui se produit au travail, c’est bien plus du harcèlement que des agressions physiques, et cela se fait souvent au moyen d’appels téléphoniques ou de messages interposés.
Vous avez parlé de plus de 160 000 déclarations ou plaintes en cinq ou six ans, ce qui est énorme. Il est certain que ces gens reprennent leur liberté, souvent très rapidement. En dehors du bracelet électronique, quels autres moyens pourriez-vous proposer afin d’assurer la sécurité des femmes, sachant que l’on ne pourra jamais mettre un policier derrière chaque agresseur?
[Traduction]
Mme Dart : Merci de votre question. Je partage vos préoccupations.
Ce que j’ai dit tout à l’heure, c’est que nous pourrions très bien avoir une meilleure occasion de combiner encore davantage nos efforts, y compris les dispositifs de surveillance électronique, ce qui suppose pour nous d’évaluer plus à fond la technologie, sa viabilité et son caractère adéquat dans toutes les régions du Canada.
Comme nous le savons, la technologie ne fonctionne pas aussi bien dans certaines régions du pays que dans d’autres. Je pense qu’il est très important pour nous d’être très prudents par rapport aux outils que nous évaluons et à la façon dont nous les déployons.
Je pense que le déploiement du dispositif de surveillance électronique profitera davantage aux victimes d’actes criminels s’il est combiné aux autres conditions dont il a été question, que les tribunaux pourraient imposer, par exemple, s’assurer qu’un délinquant sait qu’il ne peut pas se présenter à certaines résidences ou à d’autres endroits précis. Dans ce cas, il est très clair que le délinquant sait où il peut et où il ne peut pas aller.
Le dispositif de surveillance électronique améliorerait alors encore davantage notre capacité de surveiller le délinquant et de le tenir responsable en cas de manquement, si cela répond à votre question.
Le sénateur Boisvenu : Merci.
Mme Dart : Merci.
Le sénateur Harder : Merci, monsieur le président. Comme les témoins, j’appuie le projet de loi et son intention. J’aimerais comprendre deux choses un peu mieux : premièrement, les ressources et, deuxièmement, l’efficacité du bracelet électronique.
Pour ce qui est des ressources, sergent Sauvé, vous avez parlé de la loi du Québec, qui a été adoptée à l’échelon provincial, et de sa mise en œuvre. Avez-vous une idée des ressources qui ont été consacrées à cette initiative au Québec? Évidemment, il n’a pas été nécessaire de modifier le Code criminel pour appliquer les dispositions législatives en question.
Ma question est la suivante : le modèle québécois est-il l’exemple à suivre, sans renvoi au Code criminel du Canada? Si c’est le cas, les problèmes de ressources touchent alors l’infrastructure policière, qui relève des provinces partout au pays, même si le service peut être fourni contractuellement par la GRC.
M. Sauvé : C’est une bonne question. Malheureusement, ou heureusement, nous ne représentons pas les services de police du Québec. Il faudrait que j’aille parler à mes collègues de l’association des policiers de Montréal ou de la Fraternité des policiers et policières de Québec : c’est eux qui seraient le mieux placés pour en parler du côté syndical au Québec.
Au Canada, en général, je pense qu’il est toujours bon, du point de vue des policiers, que la loi soit uniforme et qu’elle soit appliquée de façon uniforme. Le Code criminel est le Code criminel du Canada.
Ce qui est proposé ici permet en fait d’envisager l’uniformité des programmes à l’échelle du Canada, l’uniformité des décisions judiciaires partout au Canada et l’uniformité de l’application. Un agent de police de Montréal pourrait donc déménager à York, par exemple, et entreprendre une carrière au sein d’un autre service de police, et l’état d’esprit ou l’application, la façon dont il fait son travail, demeureraient inchangés.
Le sénateur Harder : J’ai une question pour le chef MacKillop au sujet des ressources. Vous avez parlé du besoin de ressources supplémentaires si le projet de loi est adopté. Dans l’affectation des ressources, s’agit-il de la ressource supplémentaire la plus efficace que vous demanderiez?
M. MacKillop : Je pense que ce qui est important, c’est de comprendre quelle pourrait être la portée de la loi, le nombre de cas auxquels elle s’appliquerait. Il y a la capacité pour les agents d’imposer eux-mêmes les conditions. L’application de la surveillance électronique dans le contexte d’une ordonnance « 810 » augmentera certainement le nombre de cas où un tribunal imposera le port du dispositif de surveillance. Du point de vue de la diligence raisonnable, cela s’accompagne de l’obligation d’intervenir en temps opportun.
Par conséquent, je pense que, par défaut, l’ajout d’une mesure législative de ce genre, de façon générale, nécessitera en fait des ressources supplémentaires, non seulement pour agir rapidement, mais aussi pour mener les enquêtes, qui exigeront peut-être une autorisation judiciaire pour pouvoir appliquer la loi ou recueillir les éléments de preuve pertinents. C’est la raison pour laquelle il est important, même selon moi dans le cadre de l’examen du projet de loi, d’envisager la possibilité de renoncer aux autorisations judiciaires dans certaines circonstances.
À titre d’exemple, serait-il nécessaire d’obtenir une ordonnance du tribunal pour surveiller une personne qui porte un dispositif électronique? Si c’est le cas, il faudrait des ressources pour le faire. Vous pouvez imaginer l’incidence possible sur les ressources policières.
Il s’agit donc d’une occasion d’inclure dans le projet de loi des possibilités de renoncer à des choses comme les autorisations judiciaires dans le cas de choses très évidentes comme la surveillance des personnes, ce qui pourrait réduire partiellement les demandes de ressources. Au bout du compte, en ajoutant cette mesure supplémentaire, qui peut être appliquée par un agent, à tous les échelons des tribunaux, on va par défaut créer un environnement où plus de policiers seront requis pour pouvoir enquêter adéquatement sur la loi, de surveiller les vrais criminels, ou les accusés qui portent les dispositifs et d’appliquer la loi.
Le sénateur Harder : Ai-je le temps de poser une autre question?
Le président suppléant : Une minute.
Le sénateur Harder : Permettez-moi de poser une question complémentaire au chef MacKillop. Vous venez du Nord-Ouest de l’Ontario, qui est en grande partie rural, de petites villes et des régions rurales. Pourriez-vous nous parler un peu de l’efficacité de la mise en œuvre de cette initiative et de la nature unique des régions rurales de l’Ontario relativement à ce qui serait nécessaire du point de vue de la technologie et de la formation, ainsi que de l’atténuation du problème de la distance?
M. MacKillop : Certainement. Bien entendu, le contrat est conclu avec le solliciteur général, et la technologie entourant l’utilisation de la surveillance électronique devrait assurément être évaluée dans nos collectivités. Comme vous le savez, nous n’avons pas nécessairement de connexion cellulaire ou les mêmes possibilités d’effectuer la surveillance que dans une région urbaine. Nous devons également tenir compte du fait que le projet de loi prévoit deux éléments différents qui sont très importants pour nos régions rurales, et il s’agit non seulement de la surveillance électronique, mais aussi du traitement. Dans le Nord de l’Ontario et dans de nombreuses autres régions du Canada, il n’y a pas d’accès uniforme aux soins de santé permettant que la possibilité du traitement soit appliquée de manière générale et, plus précisément, à ceux à qui les tribunaux imposeront un traitement.
À titre d’exemple, dans le cas d’une personne qui vit dans le Nord de Geraldton ou dans le Nord de l’Ontario qu’on souhaite surveiller électroniquement se posent les problèmes touchant l’installation du dispositif, la surveillance en tant que telle et la capacité de suivre la personne, qui dépendent de la technologie. Si on ajoute l’application d’une chose comme le traitement, dans le cas où la personne n’a pas nécessairement de possibilités de traitement à l’endroit où elle vit, toutes ces choses sont des considérations dans le cadre du projet de loi, qui sont certainement à l’avant-plan de nos préoccupations.
La sénatrice Batters : Merci beaucoup à vous tous d’être ici, en personne ou virtuellement, et merci beaucoup de servir la population canadienne et toutes les personnes à qui vous venez en aide chaque jour.
Ma première question s’adresse à vous, monsieur Sauvé. Bien que la surveillance électronique soit une possibilité que les juges peuvent envisager depuis un certain temps, comme vous le savez, certaines provinces ont récemment mis au point des programmes visant à en accroître l’utilisation. L’exemple du Québec a été donné, car cette province met son programme en œuvre depuis peu. Comme vous représentez la Fédération de la police nationale, je me demande si vous pouviez nous dire si vous connaissez d’autres programmes provinciaux et s’ils fonctionnent ou non. J’aimerais aussi savoir si vous pensez que d’autres provinces s’intéresseront davantage à l’élaboration de programmes de surveillance électronique et ce que vous pensez que le gouvernement du Canada peut faire et devrait faire pour contribuer à leur élaboration?
M. Sauvé : Merci, madame la sénatrice. J’ai beaucoup parlé de notre système judiciaire au cours des derniers mois dans le cadre de diverses comparutions devant divers comités. J’ai une grande confiance dans notre système juridique, mais je crois aussi que nous, les Canadiens, avons laissé notre système judiciaire dépérir sur le plan des ressources. Lorsque je parle de ressources, je parle non seulement des policiers dans la rue, mais aussi des agents de probation, des agents de correction, des juges, des procureurs de la Couronne, et cetera, qui permettent au système judiciaire de fonctionner dans des délais courts et adéquats.
Il est injuste pour une victime ou pour un accusé d’attendre le procès pendant longtemps. Évidemment, il y a eu l’arrêt Jordan de la Cour suprême, qui accélère les choses, mais qui entraîne également la suspension de certaines procédures parce que notre système judiciaire ne peut pas instruire ces affaires en temps opportun.
Plus il y a d’outils et de ressources accessibles dans le système — la police étant à l’avant-plan, le fer de lance, puisque nous intervenons au moment où l’incident survient, puis en cas de plainte de violation de la surveillance électronique, des distances ou de l’engagement de ne pas troubler l’ordre public, et cetera —, plus le système peut être efficace. Au bout du compte, nous devons avoir un système doté des outils nécessaires pour que les victimes se sentent à l’aise de se manifester et qu’elles sachent qu’elles seront en sécurité tout au long d’une procédure criminelle devenue longue.
Tant que nous ne pourrons pas régler ce qui se passe en arrière-plan, nous devons nous occuper de ce qui se passe à l’avant-plan.
La sénatrice Batters : Oui, je suis d’accord avec vous. En ce qui concerne en particulier les programmes de surveillance électronique dans l’ensemble du pays, à votre connaissance, y a-t-il des provinces où certains aspects de ces programmes se sont révélés plus efficaces que d’autres? Si oui, quels sont-ils? Encore une fois, je vous pose la question par rapport au rôle du gouvernement fédéral dans la surveillance électronique en particulier, puisque c’est ce dont il est question dans le projet de loi.
M. Sauvé : Je crois que mes collègues de la Police provinciale de l’Ontario ont abordé un sujet — et nous en avons parlé un peu à l’autre endroit — c’est-à-dire le réseau à large bande pour la sécurité publique au Canada. Nous entendons parler du fait que, de notre point de vue, même en ce qui concerne les communications radio de nos membres, qui dépendront d’un réseau semblable ou du même réseau que celui que les dispositifs de surveillance électronique utiliseront, elles ne fonctionnent pas partout et fonctionnent rarement dans le Nord.
Quand on pense à la surreprésentation des populations dans notre système de justice pénale, à quoi est-elle attribuable? Quelle est la cause de ce problème? Est-ce l’accès aux soins? Est-ce l’accès aux services? Ou est-ce parce que les gens n’ont pas la possibilité de se réadapter adéquatement? Et cela nous ramène aux dispositifs de surveillance électronique. Je pense qu’ils sont sous-utilisés dans le système actuel principalement parce qu’ils n’ont pas été mis à l’épreuve et que leur efficacité n’a pas été démontrée dans le contexte présentenciel. Après la détermination de la peine — c’est-à-dire pour les patrouilles, les condamnations ou dans la collectivité où la peine doit être purgée —, ils sont utilisés, et dans les régions densément peuplées, ils sont efficaces, à mon avis, du moins en Colombie-Britannique, où j’ai toujours travaillé.
La sénatrice Batters : Et quelle est la situation en Colombie-Britannique, puisque c’est là que vous avez travaillé? Quel genre de programme de surveillance électronique y a-t-il dans cette province? Est-ce quelque chose qui a récemment été amélioré ou pensez-vous qu’il y a des mesures particulières qui pourraient améliorer le fonctionnement?
M. Sauvé : Je dirais qu’ils ne sont pas utilisés souvent. D’après mon expérience, ils ne sont pas souvent utilisés dans un contexte de détermination de la peine ou de mise en liberté provisoire par voie judiciaire. Ils sont parfois utilisés après la détermination de la peine dans la collectivité. Je pense que c’est ce qui se passe par défaut, principalement parce qu’il y a un manque de ressources. À tous ces égards, on compte sur les agents de libération conditionnelle et des services correctionnels pour assurer une prise de contact en personne, virtuelle ou par téléphone, et non sur la surveillance électronique.
La sénatrice Batters : Travaillez-vous dans la région de Vancouver? Dans quelle région de la Colombie-Britannique travaillez-vous?
M. Sauvé : Je travaillais dans le Lower Mainland, oui.
La sénatrice Batters : Même là, où l’on pourrait penser qu’il n’y a pas nécessairement de problème de réseau à large bande, des choses comme ça — je viens de la Saskatchewan. L’accès au réseau à large bande est très incertain dans des endroits comme le Nord de la Saskatchewan.
M. Sauvé : Oui, nous recevons beaucoup de plaintes de nos membres au sujet des problèmes d’accès au réseau à large bande et de sécurité publique pour ce qui est des communications dans le Nord de la Saskatchewan. Mais même dans le Lower Mainland, il n’y a pas de problèmes de communication — tout est numérique, la plupart du temps chiffré — mais est-ce déjà une ressource digne de confiance ou est-ce que nous comptons sur le bon vieux téléphone, les rencontres en personne et la surveillance virtuelle pour les libérations conditionnelles et les probations?
La sénatrice Batters : Merci.
Le président suppléant : Votre expérience en Colombie-Britannique a-t-elle trait à un bracelet qui est porté par le condamné — parce que vous avez dit que c’était après la détermination de la peine — accompagné d’un dispositif sur le téléphone cellulaire ou un autre appareil de la victime qui lui permet de voir qu’il s’approche, ou s’agit-il simplement d’un bracelet de cheville que porte le condamné?
M. Sauvé : Mon expérience a entièrement trait aux bracelets de surveillance électronique après la détermination de la peine. Je n’ai jamais arrêté quelqu’un pour violation de la surveillance électronique après la mise en liberté provisoire par voie judiciaire ou avant la détermination de la peine. Cependant, après la détermination de la peine, ils fonctionnent très bien, surtout pour surveiller un délinquant en liberté conditionnelle. On peut le suivre et il y a un bip sur le téléphone.
Pour ce qui est des victimes d’actes criminels, je reviens à ce que j’ai dit depuis le début. Plus les Canadiens auront d’outils à leur disposition pour pouvoir faire confiance au système, mieux ce sera.
Le président suppléant : Ma question porte sur un point plus précis. S’agit-il d’un bracelet électronique que porte la personne déclarée coupable...
M. Sauvé : Oui.
Le président suppléant : ... et qui est constamment surveillé? Ou est-ce quelque chose qui s’accompagne d’un dispositif sur le téléphone cellulaire de la victime et qui lui indique en temps réel si la personne s’approche d’elle?
M. Sauvé : Non. À ma connaissance, il s’agissait de bracelets électroniques.
Le président suppléant : Merci .
[Français]
La sénatrice Dupuis : Merci aux témoins d’être ici. Madame Dart, j’aimerais que vous précisiez ce que vous entendez quand vous parlez de l’évaluation de la technologie partout au Canada, parce que cela ne fonctionne pas dans toutes les régions.
Selon l’expérience de la Police provinciale de l’Ontario, est-ce que les données auxquelles vous avez fait référence entre 2017 et 2021, que vous avez proposé de déposer au comité, sont désagrégées entre les régions urbaines et rurales, les communautés autochtones et les petites et grandes villes?
[Traduction]
Mme Dart : Je vous remercie de vos questions. En ce qui concerne les données que je vous ai présentées aujourd’hui, je n’ai pas de ventilation selon les régions urbaines et rurales. Je peux tenter de savoir si c’est accessible et présenter cela au Sénat, si cela vous intéresse.
La première partie de votre question visait à tirer au clair mes propos concernant l’utilisation des dispositifs en milieu rural par opposition à leur utilisation en milieu urbain. Elle était très axée sur l’accessibilité de la technologie permettant d’utiliser les dispositifs, dont mon collègue de la GRC a parlé plus en détail.
Je dirais qu’en Ontario, à ce moment-ci, le recours à la surveillance électronique est facilité par une entreprise privée que le ministère du Solliciteur général a gérée et qui est responsable de la relation et de l’accord. La relation est entre la police et cette entreprise privée, qui communique directement avec le service de police responsable lorsqu’elle constate une infraction.
Ce dont je veux parler — et je sais que la GRC en a également parlé —, c’est de l’importance de l’uniformité à l’échelle du Canada, qui permettrait aux forces de l’ordre de disposer d’une approche uniforme quant à la façon de surveiller l’information et d’y accéder. Voilà ce que j’aurais à dire à ce sujet, en espérant avoir répondu à votre question.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Monsieur Sauvé, merci de nous rappeler que la question des ressources, ce n’est pas la première fois que vous l’évoquez devant nous. La question des ressources est essentielle.
J’aimerais que vous nous aidiez à comprendre. Il y a la question des ressources et aussi celle de la formation des policiers. Je vous ai posé la question sur un autre sujet, mais je reviens sur la formation. Oui, il y a la question des ressources, mais selon vous, est-ce que la formation des policiers est suffisante actuellement? Si l’on introduit de nouvelles technologies, je suppose qu’il existe une formation dispensée aux policiers pour s’assurer qu’ils vont maîtriser ces technologies. Avez-vous évalué les différents types de programmes de formation?
[Traduction]
M. Sauvé : Non, je ne l’ai pas fait. Je vous remercie de votre question, madame la sénatrice. C’est une bonne idée. Je suis le gars du syndicat ici, alors, bien sûr, je vais demander plus de ressources pour à peu près tout. Je vais quantifier cela en disant que je ne suis pas toujours en train de parler du fait qu’il faut plus de personnel sur le terrain ou plus d’agents de police. Nous allons déployer les caméras corporelles au sein du personnel de la GRC à la fin de l’année et au début de l’année prochaine. Pour ce qui est des ressources et du financement des programmes à cet égard, ce sont peut-être les employés municipaux, les adjoints des services des détachements ou les conservateurs des pièces à conviction qui participeront au téléchargement des images.
Quant aux ressources qui me viennent à l’esprit, est-ce que cette technologie sera surveillée dans nos stations de transmissions opérationnelles? Est-ce que des ressources seront affectées exclusivement à la surveillance des délinquants qui portent des bracelets de surveillance électronique dans la collectivité? Qui recevra l’alerte, qui créera le dossier et qui dépêchera toutes les ressources nécessaires, qu’il s’agisse d’un policier, d’un agent de probation, d’un agent correctionnel ou de quelque chose du genre?
De plus, nous allons devoir examiner les effectifs sur le terrain du point de vue d’un policier ou d’un shérif, en fonction de la province ou du territoire, parce qu’il s’agit d’un mandat de plus, d’une tâche supplémentaire pour les policiers à ce moment-ci — surtout les membres de la GRC —, qui sont déjà surchargés. Leur mandat s’est élargi au cours des 20 dernières années, alors que les choses sont demeurées relativement inchangées sur le plan des ressources humaines.
Nous voyons la formation d’un bon œil. Là encore, je suis le gars du syndicat; j’adore l’idée de formation. Le déploiement des caméras corporelles prendra la forme d’une formation sur cette nouvelle technologie. Je soupçonne que ce serait passablement la même chose pour la surveillance électronique, et que nos membres s’en réjouiraient.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Lorsque vous parlez d’ajouter des paires de bottes sur le terrain, est-ce que vous incluez les groupes de femmes qui interviendraient avec les policiers dans des programmes, pas seulement de formation des policiers, mais aussi de soutien aux victimes de violence?
M. Sauvé : Fort possiblement. Lorsqu’on parle de ressources, ce sont toutes les ressources humaines autour des victimes, même autour du détachement et du service policier, qui sont nécessaires pour compléter le cercle.
[Traduction]
Le sénateur Cotter : Je remercie encore une fois les témoins de nous avoir éclairés.
Je suis avocat; cependant, sur des sujets comme celui-ci, je suis moi-même un simple néophyte, et je vous suis reconnaissant de ce que vous nous apprenez.
Je voulais poser quelques questions sur la formation, mais d’un point de vue légèrement différent de celui de la sénatrice Dupuis.
Tout d’abord, je pense qu’il serait juste de dire que nous parlons ici de ressources — du moins si rien ne change — qui seraient fournies par les provinces plutôt que par le gouvernement fédéral, car au Québec, c’est le gouvernement qui a financé le programme et que c’est la façon naturelle dont les services policiers ont tendance à être déployés, qu’il s’agisse de la Police provinciale de l’Ontario ou des services contractuels de la GRC dans diverses administrations. Monsieur Sauvé, mon interprétation est-elle exacte?
M. Sauvé : Oui, les services policiers sont régis par les provinces.
Le sénateur Cotter : Nous trouvons un peu inquiétant — c’est peut-être une simple question de tolérance — que les mesures de soutien qui seraient offertes dans le cadre de cette initiative ou d’autres initiatives puissent varier d’une province à l’autre, car ce sont les provinces qui devront faire les choix en matière de ressources. Je ne crois pas me tromper en disant cela.
En ce qui concerne la formation des policiers, nous avons entendu dire ici et ailleurs qu’il arrive — je ne veux pas dire « souvent » — mais disons qu’il n’est pas inhabituel que les policiers qui interviennent dans de telles circonstances — et ma question s’adressera à vous tous — ne soient pas toujours pleinement sensibilisés quant aux types de situations qui constituent vraiment de la violence entre partenaires intimes, qui est presque toujours perpétrée par des hommes envers des femmes. En fait, nous choisissons parfois des mots — franchement, l’expression « violence entre partenaires intimes » représente une tentative d’exprimer en des termes neutres une situation qui n’est pas neutre. Il me semble que l’un des témoins, Mme Dart, a parlé de « querelles de ménage », comme dans : « nous avons répondu à 155 querelles de ménage ». Je crois que c’est le mot qu’elle a utilisé, si je ne m’abuse.
J’aimerais donc connaître la mesure dans laquelle on forme ou devrait former les policiers pour accroître leur degré de sensibilisation au sujet des situations auxquelles ils sont exposés de manière à ce qu’ils puissent intervenir plus efficacement en première ligne.
De plus, je vais poser une question — même si c’est surtout à la présidente que j’aimerais la poser — au sujet de la formation des juges, parce que les affaires de ce genre se retrouvent habituellement devant les juges des cours provinciales à un moment ou à un autre. Certaines préoccupations ont été soulevées, notamment par le parrain du projet de loi, quant au fait que la réaction des juges est parfois incomplète, pas assez sensible ou pas totalement éclairée.
Est-ce que l’un d’entre vous ou chacun d’entre vous pourrait répondre à cette question?
M. MacKillop : Je peux commencer.
Il faut absolument que la formation soit continue. À mes yeux, s’il y a une façon dont le projet de loi peut contribuer à former et à éclairer les agents, ainsi que les intervenants du système judiciaire, comme vous l’avez si bien dit, c’est en instaurant des définitions appropriées qui permettent une bonne compréhension de la loi. Par exemple, en ce qui concerne plus particulièrement la définition de « violence », les actes de violence entre partenaires intimes font généralement intervenir différents types d’infractions, comme la violence physique, la violence psychologique ou émotionnelle, et pourraient inclure l’administration de la justice.
Parfois, dans le projet de loi, il est question de violence envers une victime. Le comité voudra peut-être se demander si le terme « violence » devrait englober la violence physique et psychologique, ainsi que les événements liés à ces actes, mais qui relèvent de l’administration de la justice. La clarification de cette définition facilite non seulement son application, mais aussi la formation de nos agents et la transmission aux tribunaux des renseignements dont ils ont besoin pour pouvoir progresser convenablement vers une condamnation.
Un autre exemple serait la différence entre violence familiale — comme vous l’avez laissé entendre — et violence entre partenaires intimes. Certains articles du projet de loi délimitent les deux termes, et il est important, du point de vue de l’application de la loi, de la formation et des corps policiers, de comprendre que la violence entre partenaires intimes renvoie à un acte de violence ou une agression qui survient dans le cadre d’une relation amoureuse, et que, en général, le terme « partenaire intime » renvoie à des conjoints ou partenaires amoureux tant actuels qu’anciens. En revanche, le terme « violence familiale » a une portée plus générale qui englobe tout comportement violent ou agressif qui se manifeste à la maison.
Le projet de loi traite des deux définitions ou termes particuliers. Là encore, le fait de bien définir ces termes permettra d’offrir une meilleure formation, d’appliquer mieux et plus rapidement le projet de loi après son adoption, et d’accroître les possibilités d’obtenir des condamnations et d’appliquer adéquatement la loi.
J’insiste donc sur le fait qu’il est toujours nécessaire d’offrir une formation continue à tous nos agents, étant donné que la dynamique de la violence entre partenaires intimes et de la violence familiale est en constante évolution. Le projet de loi est une excellente occasion de contribuer à cette formation en énonçant très clairement l’intention, les objectifs et les définitions de la loi, qui, comme nous le savons tous, sont les éléments qui mènent habituellement à des problèmes devant les tribunaux et pourraient limiter notre capacité de soutenir les victimes dans la mesure du possible.
Mme Dart : Si vous me le permettez, pour poursuivre dans la même veine que le chef MacKillop, il s’agit aussi pour nous d’une occasion d’examiner le projet de loi C-202. Je ne veux pas dire que je connais le projet de loi dans ses moindres détails ou que j’en comprends toutes les subtilités; cependant, je sais qu’il introduit des termes qui se rapportent à des comportements contrôlants ou coercitifs que nous cherchons à cerner et à criminaliser. Quant aux définitions contenues dans ce projet de loi, c’est peut-être aussi pour nous une occasion de les examiner plus à fond, car la clarté est de la plus haute importance pour nos agents. La clarté nécessite de la formation, et nous devrons les former davantage pour qu’ils comprennent ce à quoi ils répondent et la meilleure façon d’intervenir en fonction de l’incident de victimisation qui s’est produit.
La sénatrice Pate : Merci à tous les témoins. J’aimerais d’abord poser ma question au commandant Dart, et d’autres voudront peut-être ensuite y répondre aussi.
Je veux juste revenir sur ce que vous venez de dire. Comme vous le savez, en juin de cette année, le jury a formulé des recommandations dans l’affaire du triple féminicide commis dans la région. La plupart des recommandations portaient sur la nécessité de croire les femmes et de leur offrir du soutien lorsqu’elles signalent des cas de violence. En fait, la semaine dernière, nous avons entendu des témoins qui étaient elles-mêmes des victimes. Elles ont parlé du fait de signaler parfois des incidents à la police et de ne pas être crues ou de signaler ce qu’elles considéraient comme une menace et que la police ne considérait pas comme une menace.
Ceux d’entre nous qui travaillent dans ce domaine depuis longtemps ont entendu beaucoup d’histoires de ce genre. Je suis sûre que c’est le cas pour bon nombre d’entre vous aussi.
Donc, si vous deviez établir les priorités en matière d’affectation des ressources, s’agirait-il, d’abord et avant tout, de la surveillance électronique ou alors d’autres recommandations formulées par beaucoup des gens, dont plusieurs d’entre vous, dans un autre contexte? Seraient-elles affectées en priorité aux services de soutien, à la sensibilisation, au soutien communautaire ou à la surveillance électronique?
Mme Dart : Merci de votre question.
Comme je l’ai dit plus tôt, je crois que, si nous voulons avoir du succès dans notre approche visant à soutenir les victimes et les survivantes et à faire en sorte que les délinquants répondent de leurs actes, nous devons adopter une démarche très dynamique et à volets multiples au moment d’aborder cette question très importante. Je dirais que, en plus de la surveillance électronique dont nous parlons, de la formation dont nous entendons parler et des ajouts et modifications au Code criminel que nous appuyons, je peux parler au nom de la Police provinciale de l’Ontario en ce sens que nous sommes déterminés à être meilleurs et à faire mieux en adoptant une approche très axée sur les victimes. Je veux dire par là que nous devons tenir dûment compte de l’obligation prévue par la Loi sur les services policiers d’aider les victimes et de comprendre leurs besoins, mais aussi recentrer notre compréhension de l’excellence en matière d’enquête.
Cela signifie que nous devons incorporer une approche axée sur les victimes au cœur de tout cela, examiner notre façon d’interagir avec les victimes d’actes criminels, évaluer leurs besoins et mieux les soutenir. Ce sont toutes des questions que la Police provinciale de l’Ontario prend très au sérieux. Nous nous adaptons et nous investissons des ressources pour mieux répondre aux besoins des victimes d’actes criminels, en plus de soutenir nos agents et nos membres qui répondent à ces besoins.
M. Sauvé : Je vais ajouter quelque chose à cette réponse.
Je suis agent de police depuis 19 ans, et je peux dire qu’avec les services policiers d’aujourd’hui et les membres avec qui nous travaillons aujourd’hui, ce n’est plus le même monde qu’il y a 19 ans. Les services de police ont évolué. La formation et la sensibilisation dont on a parlé et les ressources qui sont consacrées à la justice réparatrice ou aux services aux victimes offerts aux échelons des détachements, des municipalités ou des provinces ont vraiment commencé à s’implanter. Nous ne devrions pas relâcher nos efforts maintenant. Nous devons continuer à évoluer et améliorer la formation et le programme offerts non seulement aux policiers, mais aux intervenants de l’ensemble du système, comme on l’a dit plus tôt. Les victimes ont-elles l’impression qu’on leur fait confiance dans le processus judiciaire? Comment pouvons-nous prendre des mesures d’adaptation pour la présentation d’éléments de preuve, si le prévenu ne veut pas faire face à la personne qui l’accuse? Selon moi, il faudra vraiment apporter des améliorations à ce genre d’aspects, et nous pouvons nous améliorer. Nous sommes meilleurs aujourd’hui qu’il y a 20 ans.
La sénatrice Pate : Chef MacKillop, si vous voulez formuler un commentaire, ce matin, j’ai reçu un appel d’un agent de police qui s’occupe exactement de ces situations. La réponse qu’il m’a donnée était qu’à son avis, nous devons nous assurer que des mesures de soutien sont en place afin que les femmes puissent être soutenues, qu’elles aient des endroits sûrs où aller et qu’elles soient confiantes du fait que, non seulement les policiers, mais aussi les tribunaux de la famille et d’autres, les croiront, et qu’il faut que ces mesures de soutien soient instaurées. Il a dit que ce devrait être une priorité, d’abord et avant tout, et que, si ces mécanismes ne sont pas en place, nous finirons par avoir recours au genre de mécanismes qui sont proposés dans le projet de loi. Y en a-t-il parmi vous qui seraient surpris?
M. MacKillop : Non, sénatrice. Ce projet de loi porte beaucoup sur les façons dont nous allons tenir le délinquant responsable. Ce que je suis très heureux de lire, c’est l’inclusion de l’approche axée sur la victime, telle qu’elle est envisagée dans la loi. Comme la cheffe Dart l’a mentionné, le fait de permettre la surveillance électronique est un autre niveau et une autre occasion d’assurer la dissuasion et d’enquêter sur une personne sans nécessairement compter sur un plus grand nombre de témoignages ou d’interactions avec la victime. Ce niveau supplémentaire de surveillance serait un outil additionnel pour nos agents et notre système judiciaire, qui appuierait l’information fournie par une victime, ou peut-être que nous n’aurions même pas besoin de cette information. Il s’agirait d’une occasion d’intercepter la personne en question avant que nous ayons à faire face à une nouvelle victimisation ou, peut-être, que la plaignante soit victimisée de nouveau.
J’ai également mentionné à quelques reprises que j’apprécie l’inclusion du traitement ou de la demande de traitement obligatoire. C’est là que je veux faire ressortir une occasion de nous assurer de clarifier le libellé relativement à la question de savoir si la personne est tenue de suivre un traitement ou de le terminer. Le libellé de la loi est très important. Je veux également souligner la possibilité d’inclure le fait que le programme ou l’organisme qui offre le traitement devrait être tenu de signaler toute non-conformité directement à la police. Il s’agit là de deux exemples de ressources supplémentaires et de niveaux de responsabilisation additionnels qui pourront être utilisés pour garantir qu’il sera possible de contrôler le délinquant ou l’accusé. Ce sont des niveaux de dissuasion, et ils ajoutent d’autres personnes, organismes et groupes qui surveillent le comportement de l’accusé sans nécessairement faire porter à la victime la responsabilité de tout nous signaler. Je pense que ce projet de loi réattribue cette responsabilité au délinquant et remet l’accent sur lui et qu’il pourrait alléger une partie du fardeau du processus judiciaire qui pèse sur la victime.
La sénatrice Clement : Je tiens à remercier les témoins et vous tous de votre travail. J’aimerais revenir à la question des ressources et aux questions posées par la sénatrice Dupuis et par les sénateurs Cotter et Harder. Lorsque j’étais maire de la Ville de Cornwall, je siégeais à la commission des services policiers, et nous y tenions des conversations au sujet des budgets de la police. Nous savons que l’argent vient de la province, mais il s’agit vraiment de discussions communautaires sur les budgets de la police. Ils sont abordés dans les médias locaux. Les habitants d’une ville participent, avec la force municipale, aux discussions sur les budgets.
Ma question est la suivante : qu’arrivera-t-il si vous n’obtenez pas les ressources nécessaires? Que se passera-t-il si ce projet de loi est adopté et que vous n’obtenez pas les ressources pour une raison ou pour une autre, où allez-vous ressentir la pression? Qu’est-ce que cela va donner si vous n’obtenez pas les ressources et que vous devez faire ce travail imposé par le projet de loi?
M. Sauvé : Nos membres feront respecter la loi et répondront aux appels, même sans les ressources supplémentaires, parce que c’est tout simplement le genre de personnes à qui nous avons affaire. Ils le font depuis des années avec des budgets fixes, que ce soit à l’échelon municipal, provincial ou même fédéral. Allons-nous les épuiser? Éventuellement. Les ressources doivent faire partie de l’équation.
Mme Dart : Je vous remercie de me donner la possibilité d’aborder la question. Chef MacKillop, je sais que vous voudrez peut-être aussi parler des ressources. Je conviens du fait que, grâce à l’ajout de toute possibilité qui nous permettra de mieux réussir, et pas seulement les efforts d’application de la loi que représenterait ce projet de loi… La responsabilité supplémentaire associée à l’application du projet de loi — nous sommes là pour le faire, et nous le ferons volontiers pour servir — signifie que des possibilités s’offriront à nous. Lorsque nous tenons les délinquants responsables, cela vient avec du travail et du temps supplémentaires. Le fait que nos agents consacrent plus de temps et de soutien à… par exemple, si nous réussissons grâce à la surveillance électronique, il s’agit d’une réussite pour ce qui est d’un délinquant responsable d’un manquement. Cette réussite signifie également que des agents consacreront du temps à enquêter sur le manquement en question et à préparer l’information et la trousse pour les tribunaux. Tout cela se répercute un peu sur le temps des agents.
Nos agents sont trop dispersés dans la lutte contre tous les types de crimes. Les demandes croissantes ont une incidence sur les ressources policières. Nous devons faire attention de veiller à ce que… à chaque occasion qui nous est présentée de maintenir l’ordre, nous devons également nous assurer de disposer des ressources nécessaires pour le faire. Voilà où je veux en venir.
M. MacKillop : Je vais aborder la question sous un autre angle. La nature multijuridictionnelle de la criminalité et des enquêtes qui pourraient être menées exige une approche nationale, comme l’a expliqué le sergent Sauvé. Vous étiez à Cornwall, sénatrice; j’ai été commandant de Hawkesbury pendant de nombreuses années, et je peux vous dire qu’il faut envisager d’inclure un élément interprovincial dans ce projet de loi pour les personnes qui utilisent les services ou qui résident dans plus d’une province. Si on manque de ressources, je ne voudrais pas que les besoins des victimes ne soient pas comblés, qu’elles ne soient pas servies ou qu’elles soient mal servies parce qu’une personne a profité d’un problème juridictionnel, où une collectivité ou province est nantie et l’autre, défavorisée. Il s’agit d’une occasion de créer une norme nationale qui, par défaut, requerra un financement général. Comme vous le savez, à Cornwall, si un couple originaire de Montréal a un problème familial, je ne voudrais pas qu’il y ait une disparité dans la possibilité de profiter de ce projet de loi.
Le président suppléant : Merci. Comme le temps file, nous devons malheureusement clore la discussion. Au nom du comité, je voudrais remercier M. MacKillop, Mme Dart et M. Sauvé de leur présence aujourd’hui. Leurs commentaires ont été très utiles. Si Mme Dart pouvait nous envoyer les données dont elle a parlé, malheureusement, il faudrait que ce soit dans les prochains jours, si possible. Je ne veux pas exercer trop de pression, mais le comité entendra d’autres témoins cette semaine et, la semaine prochaine, il procédera à l’étude article par article, alors, si vous pouvez nous fournir des renseignements à ce sujet, nous vous en serions très reconnaissants.
Je suis désolé d’annoncer que nous avons un problème technique avec la connexion de M. Newark. Il ne possède pas le bon appareil pour le microphone, alors nous ne pouvons pas fournir le service d’interprétation, malheureusement. Il nous regarde, et il va nous transmettre une copie de sa déclaration écrite.
Si vous voulez répondre à des questions, monsieur Newark, veuillez ajouter les réponses à votre déclaration. Nous serons heureux de les communiquer aux membres du comité. Je m’excuse au nom du comité pour ce problème technique.
Nous accueillons notre prochain témoin qui, heureusement, dispose de l’équipement approprié : M. James Gacek, professeur adjoint à l’Université de Regina. Il est l’auteur d’un livre qui semble très intéressant, du moins par son titre, Portable Prisons: Electronic Monitoring and the Creation of Carceral Territory, qui signifie « des prisons portables : la surveillance électronique et la création d’un territoire carcéral ».
M. Gacek a fait sa thèse de doctorat en criminologie, Carceral Territory: Experiences of Electronic Monitoring Practices in Scotland, titre qui signifie « territoire carcéral : expériences liées aux pratiques de surveillance électronique en Écosse ». Votre expérience a eu lieu dans des régions très rurales, alors nous avons hâte d’en entendre parler.
Vous disposez de cinq minutes, monsieur Gacek.
James Gacek, professeur adjoint, Université de Regina, à titre personnel : Je suis ravi d’être ici. Je suis heureux de m’adresser à vous tous.
Honorables sénateurs, je vous remercie de m’avoir invité à prendre la parole aujourd’hui à titre de témoin dans le cadre de votre étude du projet de loi. Comme on m’a bien présenté, je m’appelle James Gacek, et je suis professeur adjoint au département des études juridiques de l’Université de Regina. Mes recherches portent sur les services correctionnels et la justice communautaire. Elles consistent en partie à continuer d’étudier l’efficacité de la surveillance électronique dans divers pays et administrations du monde, dont le Canada, les États-Unis et le Royaume-Uni.
Après avoir examiné le projet de loi S-205, j’inciterais à la prudence au moment d’adopter un projet de loi qui prévoit l’utilisation d’appareils de surveillance électronique dans le cas des hommes qui ont commis des actes de violence contre des femmes et dans celui des délinquants en général. J’expliquerai brièvement pourquoi il faut faire preuve de prudence.
Mes recherches sur la surveillance électronique ont récemment été publiées dans mon livre intitulé Portable Prisons: Electronic Monitoring and the Creation of Carceral Territory. Dans ce document, je me concentre sur l’Écosse en tant qu’étude de cas pour examiner les conséquences directes, indirectes et collatérales de ce type de peine imposée aux délinquants. J’ai interviewé des prisonniers écossais, anciens et actuels, et observé G4S Scotland, l’entreprise du secteur privé, et ces travailleurs, afin d’étudier le fonctionnement de ce type de punition et ses répercussions sur les communautés marginalisées.
J’aurais de nombreuses conclusions à aborder, mais, par souci de brièveté et compte tenu du temps imparti, aujourd’hui, je voudrais attirer votre attention sur trois d’entre elles. Premièrement, mes conclusions portent à croire que la surveillance électronique, en tant que forme de punition autonome à imposer à un délinquant, ne permet aucunement au délinquant ou à la victime de relever les défis auxquels ils sont confrontés. Sénateurs, comme vous le savez très bien, une technologie comme celle-ci ne déchire pas le tissu de misogynie, de racisme et de préjugés de classe qui alimentent la violence faite aux femmes et entre partenaires intimes et qui se perpétuent encore aujourd’hui dans notre société. Lorsque les gouvernements décident d’imposer une peine de surveillance électronique à des délinquants, les efforts visant à corriger les inégalités sociétales, économiques, raciales et entre les sexes sont sacrifiés au profit d’une surveillance accrue qui n’est pas nécessaire.
Deuxièmement, j’ai découvert dans le cadre de mes recherches que les délinquants font preuve de créativité en mobilisant leur temps en dehors du couvre-feu ou leurs temps libres pour interagir avec leur famille, leurs amis et la collectivité. Plusieurs répondants ont souligné qu’ils continuaient de consommer des drogues et de l’alcool et de faire la fête avec des pairs antisociaux et associés à des gangs.
De plus, dans le cadre de mes recherches, d’autres m’ont laissé entendre qu’ils poursuivaient ces activités à la maison même pendant le couvre-feu. La surveillance électronique n’est donc pas une solution miracle qui mettra fin abruptement aux habitudes des délinquants. Cette information signifie plutôt qu’il est malheureusement possible que la violence faite aux femmes et entre partenaires intimes ne cesse pas même si une peine de surveillance électronique est imposée.
Troisièmement et finalement, dans mon livre, plusieurs répondants ont affirmé qu’ils étaient capables d’échapper à la surveillance électronique ou de trouver des brèches dans le périmètre de surveillance. Cela signifie que, lorsque G4S Scotland délimite une résidence, la société du secteur privé crée un plan numérique de la maison afin que le marqueur puisse détecter l’endroit où le délinquant pourrait se trouver. Si le périmètre de la résidence n’est pas délimité correctement ou en cas d’interruption de service, les délinquants pourraient être en mesure d’échapper brièvement à la surveillance. Ces échappatoires n’aident en rien les femmes et les partenaires intimes du point de vue de la violence à laquelle elles sont exposées.
De plus, les défis technologiques associés à la surveillance électronique sont plus susceptibles de déranger et de déstabiliser les familles des délinquants, qui, selon mes recherches, sont des groupes de personnes déjà marginalisées qui vivent dans des lotissements délabrés et dans une misère honteuse.
Pour conclure ma déclaration préliminaire, je tiens à vous remercier, honorables sénateurs, de votre engagement à mettre fin à la violence faite aux femmes et entre partenaires intimes. Je reconnais qu’il reste encore beaucoup de travail à faire pour mettre fin à cette violence. Pourtant, nous pouvons nous attaquer à ce problème de plusieurs façons, sans recourir à la surveillance électronique. Seul un réinvestissement massif dans le bien-être social, l’éducation publique, les soins de santé universels et universels, le logement abordable et un revenu de base garanti pourra nous permettre de commencer à éliminer la violence structurelle et conjugale à laquelle les femmes et les partenaires intimes sont exposées quotidiennement. Malheureusement, et comme je l’ai déjà expliqué en détail, la surveillance électronique et l’approche proposée par son inclusion dans ce projet de loi ne sont pas les moyens les plus appropriés. Je vous demande instamment de faire preuve de prudence et de résister à une mesure législative qui laisse croire qu’il en est autrement.
Je vous remercie de votre attention, et je cède le reste de mon temps au président et au comité.
Le président suppléant : Merci. Vous avez terminé juste à temps.
[Français]
Les premières questions seront posées par le sénateur Boisvenu, le parrain du projet de loi.
Le sénateur Boisvenu : Merci à notre invité.
La première chose que je pourrais dire, c’est que je suis totalement d’accord avec vous lorsque vous dites que le bracelet électronique n’est pas une solution miracle. C’est un outil parmi d’autres pour tenter de sauver la vie de femmes qui sont en danger. Vous avez affirmé que le port du bracelet électronique augmentait la violence; disposez-vous de données à cet égard?
[Traduction]
M. Gacek : Je vous remercie de poser la question, sénateur. Je ne dirais pas exactement que j’insiste sur le fait qu’il augmente la violence. Je dirais qu’il y a une possibilité, comme pour toute autre chose dans la vie, que l’inquiétude, les préoccupations et le risque augmentent pour les personnes qui sont encore à la maison. Nous avons vu des recherches, non seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis et au Royaume-Uni, qui donnent à penser que les conclusions sont partagées au sujet de l’instauration de la surveillance électronique, surtout lorsque, comme nous l’avons observé durant la pandémie, on était préoccupé par le fait que les gens étaient coincés à domicile, et encore plus à l’idée que les femmes et les partenaires intimes étaient, malheureusement, enfermées avec leur conjoint, partenaire et délinquant.
Je ne dirais pas qu’il y a eu une augmentation de la violence. J’affirmerais qu’il y a eu une augmentation des torts et des risques.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : D’accord, j’ai compris.
C’est donc une hypothèse que vous énoncez. Vous dites également que les hommes peuvent échapper à la surveillance électronique; disposez-vous de données sur l’inefficacité des bracelets électroniques?
[Traduction]
M. Gacek : Oui, en fait, dans mon propre livre. J’ai parlé à plusieurs hommes qui, lorsque je leur ai posé des questions au sujet de leurs problèmes liés à la surveillance électronique, m’ont donné des réponses portant sur l’incapacité de faire appel aux services sociaux et aux organismes d’aide sociale et le fait de ne pas être disponibles pour respecter leurs engagements en matière de travail et de rendez-vous. Cela arrive aussi beaucoup aux hommes.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Avez-vous analysé l’expérience espagnole?
[Traduction]
M. Gacek : C’est une bonne question. Ma connaissance au sujet de certaines études espagnoles semble indiquer que les résultats sont très mitigés. Je sais qu’on tient une conversation sur le fait que les victimes bénéficieraient d’une certaine forme de surveillance associée au marqueur de surveillance électronique. J’inviterais également à la prudence à cet égard. Cela accroît déjà les préoccupations des victimes en matière de protection de la vie privée, alors que nous faisons intervenir les intérêts du secteur privé dans leurs droits en la matière. Les résultats semblent mitigés.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Êtes-vous au courant du fait que l’expérience menée en Espagne a réduit de 25 % le nombre de femmes assassinées dans ce pays?
[Traduction]
M. Gacek : Malheureusement, je ne suis pas au courant de l’étude dont vous parlez, monsieur le sénateur.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : D’accord. Je n’ai pas d’autres questions.
[Traduction]
La sénatrice Batters : Merci beaucoup de votre présence, monsieur Gacek. Vous et moi sommes tous deux de Regina et, malheureusement, la situation en Saskatchewan est terrible en ce qui a trait à la violence familiale. Comme vous le savez sans doute, les femmes autochtones en particulier sont très souvent victimes de cette violence.
Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que vous n’appuyiez pas cette mesure en raison des « répercussions sur les communautés marginalisées ». Qu’en est-il des personnes issues de communautés marginalisées qui sont victimes de violence familiale? Vous n’avez pas passé beaucoup de temps à en parler, alors vous pourriez peut-être approfondir cette question.
Vous avez affirmé que ce n’était « pas une solution miracle ». Mais, monsieur Gacek, ne s’agit-il pas d’une mesure utile pour les femmes qui courent un risque très élevé de violence familiale? Le projet de loi peut leur offrir une mesure qui leur procurera une certaine sécurité, ne serait-ce que le temps dont elles auront besoin pour se rendre dans un endroit sûr, prendre des dispositions avec leur famille et avoir un certain niveau de contrôle qu’elles n’avaient pas tout au long de leur situation malheureuse avec l’agresseur.
M. Gacek : Je vous remercie de votre question, madame la sénatrice. En ce qui concerne les enjeux touchant les communautés marginalisées et racisées, le droit pénal prévoit déjà des outils, ce qui donne à penser que la police dispose déjà des mesures de soutien nécessaires pour intervenir auprès de ces types de communautés.
L’imposition de la surveillance électronique aux délinquants peut faire plus de tort que de bien. On discute des outils que nous pouvons déjà utiliser, comme la mise sur pied de services communautaires ou d’équipes d’intervention en cas de crise qui permettraient à ces personnes — des femmes et des partenaires intimes — de trouver les ressources et le soutien dont elles ont besoin sans avoir à passer par une période de surveillance électronique.
La sénatrice Batters : Les services aux victimes, les services communautaires et les services d’urgence sont utilisés tout le temps dans ce genre de cas. En quoi, selon vous, la surveillance électronique aggraverait-elle la situation?
M. Gacek : Je suis vraiment désolé, sénatrice. On dirait que la question est coupée; je ne reçois pas exactement ce que vous dites à tous les trois ou cinq mots.
La sénatrice Batters : Je ne sais pas ce qui se passe avec ces microphones ici, mais, apparemment, il y a eu des problèmes de microphone à ce siège en particulier. J’espère qu’il pourra être réglé avant la prochaine réunion du comité.
Vous disiez qu’il était possible que la surveillance électronique empire les choses. Je ne comprends pas vraiment en quoi, selon vous, elle pourrait aggraver la situation. De plus, lorsque vous parlez de soutien communautaire et de soutien en cas de crise, on a constamment recours à ces mesures. Peut-être pourriez-vous nous expliquer plus en détail en quoi, selon vous, la surveillance électronique pourrait aggraver une situation, alors que nous avons entendu le témoignage direct de trois victimes de violence familiale lors d’une de nos dernières séances de comité. Ce projet de loi n’est pas seulement le fruit d’une réflexion du sénateur Boisvenu; il est aussi le résultat de la rencontre de 150 victimes qui se sont réunies pour affirmer que c’est exactement le genre de mesure qu’elles estiment nécessaire.
M. Gacek : Je ne veux certainement pas faire abstraction des préoccupations que les victimes veulent communiquer. Je pense qu’il est très important que nous tenions ce genre de conversation relativement à ce projet de loi.
Je suppose que ce que j’essaie de dire par là, c’est que, encore une fois, nous avons déjà au sein du système de justice pénale des outils à notre disposition pour nous occuper adéquatement des délinquants. L’ajout d’un autre niveau de surveillance visant des délinquants qui sont déjà marginalisés et, fort probablement, racisés semble être une mesure très sévère de la part du gouvernement. Comme je l’ai déjà dit et comme vous l’avez mentionné, madame la sénatrice, il existe déjà des mesures d’intervention communautaire.
Nous devrions vraiment concentrer nos efforts sur le financement et les ressources nécessaires à ces mesures d’intervention communautaire. Il me semble tout à fait inutile d’ajouter la surveillance électronique.
La sénatrice Pate : Je vous remercie de comparaître. Vous avez mentionné un certain nombre d’autres options que vous privilégieriez par rapport à la surveillance électronique. Comme vous le savez sans doute, les coûts ont été établis à au moins plusieurs centaines de dollars pour l’équipement seulement, sans parler de la surveillance.
Si vous vouliez bien nous en dire davantage sur la façon dont vous envisageriez certaines de ces autres mesures ainsi que sur les raisons pour lesquelles et la façon dont vous en feriez des priorités, ce serait utile.
M. Gacek : Absolument. Je vous remercie, sénatrice, de poser la question. Je pense que, si nous examinons certaines des autres préoccupations concernant, comme je l’ai déjà mentionné, les désavantages économiques et sanitaires par rapport à la surveillance, je n’ai pas la ventilation des coûts en soi de certaines de ces autres initiatives, mais je pense qu’il y a certes des aspects, des éléments, que nous devons vraiment reconsidérer lorsqu’il est question, encore une fois, de la violence faite aux femmes et entre partenaires intimes.
Malheureusement, je n’ai pas de ventilation des coûts comme telle, mais il est certain que je vois tout de même l’importance de mettre l’accent sur les équipes civiles d’intervention en cas de crise, sur le soutien au triage, sur les espaces sûrs pour les personnes qui ont vécu des situations de violence familiale et entre partenaires intimes, sur les refuges destinés à ces groupes marginalisés et sur la recherche de façons dont nous pouvons servir la collectivité plutôt que d’avoir recours à la surveillance électronique.
La sénatrice Pate : [Difficultés techniques]… la Saskatchewan, et nous savons, d’après la situation, qu’il ne s’agissait pas seulement de violence contre les femmes, mais que la violence raciste et misogyne faisait partie de toute la panoplie des problèmes dans la situation de la nation crie de James Smith. Avez-vous de l’expérience ou pourriez-vous nous parler de ce que les membres des communautés autochtones réclament en ce qui a trait à ces problèmes, tant pour les victimes que pour les auteurs de violence?
M. Gacek : Je vous remercie de votre question, madame la sénatrice. Malheureusement, je ne dispose pas de cette information. Je discute actuellement avec un grand nombre de mes collègues autochtones afin de découvrir, en particulier, quelles mesures plus significatives ils aimeraient obtenir, mais, malheureusement, je ne dispose pas de cette information en ce moment.
La sénatrice Pate : Merci.
Le sénateur Harder : Sur le même thème, j’aimerais avoir une meilleure idée de votre préférence quant à la hiérarchie des interventions qui conviendrait mieux que cette mesure pour ce qui est de régler les problèmes que le projet de loi tente de régler. Autrement dit, donnez-nous une idée des domaines auxquels vous consacreriez une ressource supplémentaire plutôt qu’à la surveillance électronique.
M. Gacek : Je vous remercie de la question, sénateur. Je pense que, compte tenu de ce que nous savons au sujet du délinquant typique, du fait qu’il est déjà marginalisé et racisé, des niveaux élevés de toxicomanie, d’alcoolisme et de toxicomanie, des faibles niveaux d’éducation, des niveaux élevés de dysfonctionnement familial, et possiblement des traumatismes intergénérationnels, les discussions portent sur les façons pour nous de fournir davantage de ressources pour les initiatives en santé mentale.
Alors, je suis favorable, en principe, à une mesure législative qui garantirait que les services de soutien en santé mentale seront adéquatement financés et qu’un plan complet sera mis en place, certainement avec le consentement des provinces, bien entendu. Je verrais davantage d’efforts consacrés au soutien en santé mentale, étant donné que, lorsque les policiers entrent en contact avec des personnes et des délinquants, la plupart du temps, on discute de la question de savoir si un soutien en santé mentale est bien perçu dans le cadre de cette interaction.
Je crois qu’il est beaucoup plus important de discuter de la santé mentale que de laisser entendre qu’il faut plus de surveillance durant cette situation malheureuse entre le délinquant et la victime.
Le sénateur Harder : Monsieur le professeur, savez-vous si des recherches sont menées au Québec en ce qui concerne l’expérience de la mise en œuvre — même s’il est encore tôt — de la surveillance électronique à l’échelon provincial? S’agit-il d’un de vos domaines d’intérêt universitaire auquel vous vous consacrez?
M. Gacek : C’est une bonne question, monsieur le sénateur. J’aimerais savoir si les provinces estiment que la surveillance électronique est efficace sur leur territoire. Cette question m’intéresse. Vous avez raison, il est encore tôt, étant donné que certaines de ces études, celles dont je me souviens actuellement, sont légèrement désuètes. Il faudrait que je me rafraîchisse la mémoire, pour ainsi dire, et que je me renseigne.
Je pense qu’on se demande si nous considérons que la surveillance électronique est efficace à l’échelon provincial, si elle est acceptée du public, si celui-ci a l’impression qu’on a la confiance nécessaire pour confier ce genre d’outil au système de justice pénale dans cette province. De plus, qui serait responsable de cet outil? Quelles autorités, et qui serait responsable en cas d’échec de la surveillance?
Le sénateur Harder : Encore une fois, j’aimerais savoir si vos recherches ont permis de découvrir si la question de la surveillance électronique avait été soulevée à la réunion fédérale-provinciale des ministres responsables des activités des solliciteurs généraux ou des procureurs généraux. Ont-ils demandé qu’on accorde une plus grande priorité à la surveillance électronique qu’auparavant? S’agit-il, selon vos recherches, de la meilleure façon d’apporter des modifications au droit pénal? Autrement dit, l’ordre de gouvernement qui met souvent en œuvre la loi pourrait collaborer avec le gouvernement du Canada relativement à ses responsabilités à l’égard du Code criminel pour s’assurer que les modifications qui y sont apportées proviennent de l’administration qui paie pour le processus décisionnel quant à l’efficacité de la mesure et qui en est la plus rapprochée. Êtes-vous au courant de ces questions?
M. Gacek : Merci de poser la question. Malheureusement, je ne suis pas au courant de l’existence d’une telle conversation. Mes recherches sont plus ou moins axées sur les échelons fédéral et international, alors il faudrait que j’aie un peu plus de temps pour m’intéresser aux affaires provinciales et territoriales, mais je pense que c’est une conversation fascinante.
Le sénateur Harder : Je vous remercie.
M. Gacek : Merci.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Merci à notre témoin.
J’aimerais revenir sur trois éléments que vous avez évoqués et sur ce que vous tirez de votre analyse des expériences d’autres pays en matière de surveillance électronique.
Je comprends très bien le premier élément. Cependant, j’aimerais que vous reveniez sur les deuxième et troisième éléments, à savoir que ceux qui sont accusés ont l’air de profiter du système. J’aimerais que vous nous donniez des précisions sur les conclusions auxquelles vous êtes arrivé et sur les échappatoires qui peuvent survenir dans l’application de ce genre de surveillance électronique.
Merci.
[Traduction]
M. Gacek : Oui. Je vous remercie de la question, sénatrice. Alors, pour ce qui est de mon deuxième point, mes recherches ont révélé que… lorsque j’ai parlé aux répondants de la façon dont ils vivaient avec la surveillance électronique, c’était le problème : ils étaient toujours capables de trouver des façons de s’adonner à des activités déviantes et même presque criminelles pendant le couvre-feu et en dehors de celui-ci. Alors, le fait qu’ils ne se préoccupaient pas de savoir si l’entreprise du secteur privé les surveillait a certainement suscité chez moi des préoccupations, en ce qui concerne non pas la possibilité qu’ils récidivent dans l’avenir, mais presque l’efficacité de la technologie en soi.
Il s’agit de savoir où les ressources du gouvernement ou du secteur public sont utilisées à bon escient et comment nous pouvons nous assurer que la collectivité est protégée et se sent en sécurité dans le cadre de ce processus. C’est préoccupant. Je n’ai jamais fait de recherches ni tenu de consultations auprès de personnes qui ont commis des crimes haineux ou à grande échelle. La plupart des répondants, voire tous, avaient commis des infractions relativement mineures. Toutefois, là où je veux en venir, c’est qu’ils ne voyaient pas l’utilisation de cette technologie comme une punition.
La façon dont nous parlons de punition doit également faire partie de la conversation. C’est une des façons à l’égard desquelles j’inviterais certainement à la prudence en ce qui concerne l’efficacité de la surveillance électronique pour nous.
En ce qui concerne la troisième question, oui. Je veux faire écho aux réflexions d’autres témoins à ce sujet. Lorsqu’il y a interruption de service… le Canada n’est pas doté d’une bande passante forte et uniforme permettant d’accéder à Internet partout au pays. Lorsqu’il y a des interruptions de service et des pannes de courant et lorsque les délinquants sont capables de trouver des façons de perturber le marqueur ou l’unité de surveillance du domicile, ces possibilités peuvent susciter de plus grandes préoccupations quant à l’efficacité de la surveillance électronique et à la pertinence de cette punition, compte tenu des autres problèmes qui peuvent exister dans la vie du délinquant.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Je ne sais pas si vous avez eu l’occasion d’entendre les policiers tout à l’heure, mais ils ont expliqué que, dans les régions rurales où le système ne se rendait pas — et même s’il s’y rendait —, le nombre de policiers est tellement restreint qu’il n’y a pas de façon de rejoindre la personne en question.
Dans les recherches que vous avez faites, avez-vous croisé des informations sur cet aspect des ressources consacrées à la surveillance?
Quelles données avez-vous trouvées sur la formation supplémentaire qui aurait été donnée aux corps policiers en question où l’on aurait implanté ce genre de service?
[Traduction]
M. Gacek : Je vous remercie de la question, madame la sénatrice.
C’est très important de parler de cet aspect également, parce que, pendant que j’observais les travailleurs de G4S Scotland, ce problème a certainement été soulevé, surtout quand on regarde l’étude de cas de l’Écosse. Il y a encore dans ce pays des régions rurales où les interruptions de service sont fréquentes, surtout dans le Nord. Les travailleurs de G4S Scotland qui doivent conduire pour s’assurer que le marqueur et la technologie fonctionnent, dans certains cas, ne peuvent tout simplement pas le faire.
Des problèmes se posent, non seulement en ce qui a trait à l’interruption des services, mais, comme nous l’avons vu dans les régions rurales de l’Écosse et dans d’autres régions de notre propre pays, lorsqu’il n’y a pas de services de santé mentale dans les régions rurales ou éloignées, quel genre de conversation avons-nous vraiment? C’est là que nous devons remettre en question l’efficacité de la surveillance pour ce qui est de s’occuper des délinquants et d’aider et de soutenir les victimes dans leur cheminement.
[Français]
La sénatrice Dupuis : Dans les recherches que vous avez faites, avez-vous croisé des gens, des données ou des informations sur l’implication de groupes de soutien pour les femmes comme parties prenantes et comme intervenants directs avec les policiers, puis dans le système de justice, pour essayer de contrer la méfiance et la non-confiance des femmes envers le système de justice?
[Traduction]
M. Gacek : C’est une très bonne question, sénatrice.
Malheureusement, mes recherches n’ont pas porté là-dessus. Ce qui préoccupait les répondantes qui voulaient avoir accès à des services d’aide sociale en ce qui a trait à la surveillance électronique, c’est qu’elles ne pouvaient tout simplement pas accéder à ces services, compte tenu des responsabilités professionnelles et à l’égard de l’éducation des enfants qu’elles devaient assumer tout au long des journées. Elles craignaient que leur vie privée et familiale interfère avec ce type de service.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Je voulais juste informer notre témoin avant que je pose ma question.
Nous sommes tous d’accord pour dire qu’on ne pourra jamais placer un policier derrière chaque agresseur qui est accusé ou qui commet des gestes liés à la violence conjugale; c’est tout à fait utopique.
On sait aussi que les policiers disent que les plaintes en matière de violence conjugale sont en constante croissance et que les victimes vont souvent porter plainte des dizaines et des dizaines de fois contre le même individu.
On sait également que, dans 50 % des cas, selon l’étude menée par l’Université de Montréal, les agresseurs ne respecteront pas les conditions émises par la cour, notamment celle de respecter une distance entre la victime et eux.
Ce projet de loi compte également un volet très important de soutien aux agresseurs en les obligeant à suivre une thérapie, afin d’éviter que la justice devienne des « portes tournantes » pour eux.
En sachant que, dans une grande proportion, les agresseurs ne respectent pas les conditions émises par la cour — comme de ne pas approcher la victime — et en sachant que les victimes sont généralement assassinées avant la tenue d’un procès, quels moyens proposez-vous aux victimes pour qu’elles puissent bénéficier de meilleures mesures de sécurité de la part du système de justice?
Si on n’utilise pas les bracelets électroniques, que préconisez-vous pour assurer la sécurité de ces femmes qui dénoncent leur agresseur?
[Traduction]
M. Gacek : Je vous remercie de votre question, sénateur. J’apprécie le contexte dans lequel vous l’avez posée, bien sûr.
Encore une fois, il faudrait que je me reporte à une structure et à un plan plus complets dans le cadre desquels nous aurions des espaces sûrs et des refuges pour les femmes et les personnes qui ont été victimes de violence entre partenaires intimes et plus de fonds à disposition pour les interventions communautaires en cas de crise et les équipes chargées de ces interventions.
Il existe déjà des initiatives communautaires dont nous pouvons certes nous inspirer et qui sont mises en œuvre partout au pays où il n’est pas question de surveillance électronique. Des plans sont déjà en place, et j’espère certainement que nous pourrons avoir une conversation au sujet de ces espaces sûrs et de ces refuges pour les victimes de violence entre partenaires intimes afin que nous puissions, idéalement, commencer à nous attaquer à cette violence.
[Français]
Le sénateur Boisvenu : Monsieur Gacek, il y a des centres pour les femmes victimes de violence dans toutes les municipalités du Québec, comparativement à il y a 40 ans, alors qu’il y avait à peu près 10 établissements. Il y en a maintenant des centaines.
Cela fait 40 ans qu’on dit aux femmes de sortir de chez elles et d’aller se cacher. Ne croyez-vous pas qu’il faut changer la culture pour faire en sorte qu’on traite les hommes avec une thérapie au lieu de cacher les femmes? En attendant que la thérapie soit efficace, ne faudrait-il pas trouver minimalement un moyen coercitif pour les empêcher d’approcher de leur victime, en particulier après une dénonciation, qui est une période critique dans la montée de la violence?
Ne croyez-vous pas qu’il faut changer cette culture et s’adresser maintenant à l’agresseur, pour réduire le nombre d’agressions et faire en sorte de réduire l’effet des « portes tournantes » dans le système de justice?
[Traduction]
M. Gacek : Merci de poser la question, monsieur le sénateur.
Je suis tout à fait d’accord avec vous. Il y a des façons dont ce projet de loi pourrait mettre l’accent sur les initiatives en santé mentale, et je les appuierais certainement. J’estime que, dans l’esprit de la loi, ce devrait être une priorité pour nos collectivités. Je dirais tout de même que les questions de santé mentale sont un aspect important du fait de s’assurer que les délinquants et les victimes obtiennent le soutien dont ils ont besoin.
Le président suppléant : Les gens ont-ils d’autres questions? Non.
Je vais prendre quelques minutes. Je suis désolé de vous garder en ligne pendant quelques minutes de plus.
Monsieur Gacek, on nous a dit que la période pendant laquelle le risque est le plus élevé pour les victimes de violence familiale est après la séparation. C’est une période d’intensité élevée, de six à huit mois, la première année. Après cela, la pression baisse et le risque diminue.
Je ne sais pas si vous êtes au courant de ces chiffres et si vos recherches ont montré la même situation que celle que vous avez observée sur le terrain.
M. Gacek : Je vous remercie de la question, sénateur. Malheureusement, je n’ai pas ces chiffres sous la main pour vous en faire part. Mes recherches n’étaient pas axées sur cet aspect en particulier.
Le président suppléant : Vos recherches portent-elles davantage sur les délinquants et le processus de détermination de la peine?
M. Gacek : Oui, c’est exact.
Le président suppléant : En supposant qu’il soit vrai, d’après les données qui nous ont été fournies, que la période la plus risquée soit après la séparation, celle-ci correspond plus ou moins à la période de mise en liberté sous caution. C’est la période où les procédures judiciaires commencent, la police dépose les accusations et le procès se tiendra à un moment donné, après la communication de certains documents.
À vos yeux, la surveillance électronique pendant la période de mise en liberté sous caution présente-t-elle un certain avantage, où on donne à la victime la possibilité de se sentir relativement en sécurité ou au moins d’avoir l’impression que l’accusé est surveillé?
M. Gacek : Je vous remercie de cette question, monsieur le sénateur.
Je pense qu’il est question d’assurer la sécurité des victimes, et je ne veux certainement pas le nier. Cependant, les recherches dont nous disposons, surtout au Royaume-Uni et aux États-Unis, donnent à penser que, lorsqu’il y a une surveillance électronique préalable à la détention, elle vise trop souvent des personnes marginalisées et déjà racisées. On accroît la surveillance de groupes déjà opprimés.
Encore une fois, je ne veux pas minimiser la responsabilité individuelle. Je veux assurer la sécurité des victimes, mais nous devons faire preuve de prudence avant d’étendre la surveillance alors que nous disposons déjà des outils nécessaires pour nous occuper adéquatement des délinquants.
Le président suppléant : Dans le cadre de vos recherches, sur quel type de surveillance travaillez-vous, le bracelet qui assure une surveillance constante de l’accusé ou du délinquant, si c’est après la détermination de la peine? Avez-vous travaillé avec une certaine surveillance où l’accusé est surveillé pendant que la victime ou présumée victime est également connectée au système, par exemple, sur son iPhone ou son téléphone ordinaire? On lui dira si le délinquant présumé se trouve à proximité ou à un kilomètre de chez elle ou à une distance de deux kilomètres, ou bien s’il va au marché et qu’il se trouve à proximité de son lieu de travail. Avez-vous fait des recherches sur ce type de surveillance, que nous appelons la double surveillance? C’est-à-dire que l’agresseur et la victime sont tous deux connectés au système et, bien entendu, la police ou l’organisme surveille tout cela.
M. Gacek : Merci de poser la question. Oui. En ce qui concerne mes propres recherches, ce sont surtout, voire tous, des bracelets émetteurs qui ont été placés à la cheville de l’accusé ou du délinquant à différents moments de son processus de justice pénale.
En ce qui concerne la double surveillance, mes recherches ne portent pas là-dessus, mais il existe certaines études qui émanent de l’Europe et qui ont produit des résultats mitigés sur la question de savoir si cette surveillance assure vraiment la sécurité des victimes. Pour l’instant, je ne connais pas assez bien ces études pour pouvoir communiquer leurs résultats ou leurs conclusions, puisque je ne les ai pas menées, mais je sais qu’elles existent. Comme je l’ai déjà dit, les recherches que j’ai effectuées portent généralement sur les bracelets émetteurs.
Le président suppléant : Si je puis importuner mes collègues un peu plus et vous garder en ligne encore quelques minutes... J’ai été plutôt tranquille lors du premier groupe.
Le fait que cette surveillance entraîne des coûts compte-t-il parmi vos préoccupations? Par exemple, en Ontario, une entreprise appelée Recovery Science Corporation demande de 500 $ à 600 $ par mois pour assurer la surveillance. Êtes-vous préoccupé par le fait que la personne qui a été accusée doit assumer les coûts et qu’elle pourrait faire partie du groupe marginalisé et, par conséquent, nous imposons un autre fardeau à des personnes qui n’ont pas suffisamment de ressources?
M. Gacek : C’est une autre bonne question, sénateur.
Je pense que ce qui me préoccupe à cet égard, c’est la façon dont nous envisageons les grands enjeux concernant... Je suis désolé, pourriez-vous répéter la question?
Le président suppléant : Dans certaines provinces — je pense que c’est certainement le cas en Ontario; je ne sais pas quelle est la situation en Saskatchewan —, l’accusé offre parfois au juge dans l’ordonnance de mise en liberté sous caution le port d’un dispositif de surveillance, mais il doit payer pour ce dispositif. La possibilité que des personnes marginalisées soient privées de fonds suffisants ou restent en prison parce qu’elles ne peuvent pas payer pour le système fait-elle partie de vos préoccupations?
M. Gacek : Je vous remercie de la question et de la précision.
Oui. Deux problèmes se posent à cet égard. Il ne s’agit pas seulement du coût de la surveillance électronique. Je me trompe peut-être sur les dates, mais je crois que le Service correctionnel du Canada a présenté un rapport dans lequel il a décrit certains des coûts liés à la surveillance électronique de détenus sous responsabilité fédérale. Nous nous rendons compte du fait que la détention d’un prisonnier dans un établissement fédéral coûte environ 115 000 $ par année, comparativement à une année de surveillance électronique qui coûte généralement environ 36 000 $. On pourrait donc faire valoir que les coûts sont moins élevés dans le secteur public parce que la surveillance nous permet de garder les gens hors des établissements. Ce serait vrai si les données n’indiquaient pas déjà que nous avons encore la double, voire la triple, occupation des cellules en prison. La question n’est pas de savoir non pas combien cette surveillance va coûter au secteur public; il s’agit plutôt de savoir si cette technologie est efficace.
Pour répondre à votre autre question, monsieur le sénateur, au sujet des amendes, nous constatons que les personnes marginalisées sont trop souvent incapables de les payer, et il s’agit de savoir si le système de justice pénale impose arbitrairement des amendes à des personnes qui ne pourront jamais les payer. Alors, l’instauration de la surveillance électronique pourrait entraîner une bifurcation ou créer des catégories de délinquants qui sont capables de payer et de délinquants qui ne le peuvent pas, et, trop souvent, ce seront les deuxièmes contre les premiers.
Le président suppléant : Si nous prenons l’exemple du Québec, diriez-vous que ce modèle apaise certaines de vos préoccupations, parce que c’est la province qui fournit le système, de sorte qu’il est gratuit pour l’accusé et pour la victime présumée?
M. Gacek : Merci de poser cette question. Je crois qu’on a tenu une conversation sur la façon dont le système de justice pénale, en tant qu’institution publique, peut contribuer à une compréhension holistique de la justice.
Ce qui me préoccupe au sujet de l’intervention du gouvernement à cet égard, c’est que, trop souvent, comme nous l’avons observé dans le cadre d’autres recherches, les gouvernements qui sont incapables de fournir ce type de service finissent inévitablement par confier le travail à une entreprise du secteur privé. Le fait de traiter avec le secteur privé soulève toute une série d’autres problèmes que j’ai observés dans le cadre de mon travail, où nous ne savons pas comment les données sont conservées et archivées lorsque cette surveillance est en cours… et nous devons nous demander si cette mesure devient plus efficace comme punition si le secteur privé y joue un rôle.
Alors, il y a une question qui me préoccupe à cet égard, et c’est celle de savoir en quoi cette punition est vraiment utile aux victimes qui essaient d’être en sécurité. C’est une question que je soulèverais de nouveau.
Le président suppléant : Merci. Je pense que vous faites allusion à la question de la protection de la vie privée.
M. Gacek : Oui. Merci.
La sénatrice Pate : Monsieur le président, vos questions m’ont amené à m’en poser une autre.
Dans l’expérience écossaise de la surveillance électronique, dans le rapport des Écossais sur son utilisation, l’examen de la surveillance électronique a révélé que, compte tenu des défis et des succès liés à l’utilisation de cette technologie, elle ne constituait pas une stratégie efficace pour ce qui est de réduire la récidive, mais qu’elle contribuait à l’élargissement du filet, et que l’intervention la plus efficace étant une surveillance adéquate des personnes en liberté sous caution.
Est-ce que cette conclusion correspond aux recherches que vous avez effectuées, et est-ce qu’elle vous amène à nous adresser d’autres recommandations quant aux ressources qui pourraient être mieux affectées, non seulement pour protéger les personnes qui pourraient autrement être victimisées, mais aussi pour prévenir la perpétration d’actes de violence?
M. Gacek : Bien sûr. Merci infiniment de poser la question, madame la sénatrice. Je souscris entièrement à cette conclusion. Je connais ce rapport.
Mes recherches abondent dans le même sens que lui, à savoir que la surveillance électronique ne fait qu’élargir le filet et qu’elle assure une surveillance plus étroite que nécessaire. Mes homologues écossais tiennent des discussions qui laissent entendre que nous devons parler de la proportionnalité de la mesure en tant que punition à imposer dans le système de justice pénale et nous demander si nous pouvons mettre en place des mécanismes de responsabilisation afin de nous assurer qu’elle n’est pas considérée comme un autre moyen d’aller au-delà de l’incarcération, jusqu’à l’incarcération électronique, car elle crée une situation où une personne est prise au piège dans sa maison et inévitablement coincée dans sa vie. Alors, il y a cette conversation.
Comme je l’ai déjà répété, je pense qu’il existe de plus grandes initiatives en ce qui a trait à l’éducation et à l’approche communautaire, mais aussi en matière de services et de soutien en santé mentale. Trop souvent, nous examinons le profil du délinquant, et la santé mentale est un problème important que, comme nous le savons tous, la surveillance électronique ne réglera pas.
Le président suppléant : Y a-t-il d’autres questions? Je n’en vois plus d’autres.
Monsieur Gacek, votre livre est-il accessible sur Internet? Pouvons-nous l’acheter sur le site Web, ou pourriez-vous nous en envoyer un ou deux exemplaires?
M. Gacek : Avec plaisir. Il est accessible par l’intermédiaire de McGill-Queen’s University Press, et j’espère qu’il l’est aussi dans votre librairie locale.
Le président suppléant : Si vous pouviez en envoyer un exemplaire au greffier du comité cette semaine, nous le mettrons à la disposition des membres du comité. Je promets qu’une fois que nous aurons terminé, mes amis de la Bibliothèque du Parlement veilleront à ce que l’exemplaire soit envoyé à la Bibliothèque du Parlement et soit mis à la disposition des autres parlementaires.
M. Gacek : Je vous remercie.
Le président suppléant : Voilà qui nous amène à la fin de la séance. Je vous remercie de votre présence, professeur Gacek.
Monsieur Newark, je suis certain que vous nous avez écoutés pendant les 50 dernières minutes. Nous avons hâte de recevoir vos documents, et nous vous remercions à l’avance de nous les avoir fournis et de nous avoir fait part de toute observation que vous aimeriez ajouter à la suite des questions posées par les sénateurs. Merci.
(La séance est levée.)