LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mercredi 5 juin 2024
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 14 h 32 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier la teneur complète du projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024.
Le sénateur Claude Carignan (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Honorables sénateurs et sénatrices, bon après-midi. Avant de commencer, je voudrais demander à tous les sénateurs et aux autres participants qui sont ici en personne de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices visant à prévenir les incidents liés au retour de son. Veuillez prendre note des mesures préventives suivantes, qui ont été mises en place pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris les interprètes.
[Traduction]
Si possible, assurez-vous de prendre place de manière à augmenter la distance entre les microphones. N’utilisez que les oreillettes noires approuvées. Il ne faut plus utiliser les anciennes oreillettes grises. Veuillez tenir votre oreillette loin de tous les microphones, et ce, en tout temps. Lorsque vous n’utilisez pas votre oreillette, mettez-la face en bas sur l’autocollant placé sur la table à cet effet. Merci de votre collaboration.
Je souhaite la bienvenue à tous les sénateurs ainsi qu’à ceux qui nous regardent partout au pays sur le ParlVU du Sénat.
[Français]
Je m’appelle Claude Carignan, je suis un sénateur du Québec et je suis président du Comité sénatorial permanent des finances nationales. Je vais maintenant demander à mes collègues de se présenter, en commençant par ma gauche.
Le sénateur Forest : Éric Forest, de la division du Golfe, au Québec.
Le sénateur Gignac : Clément Gignac, de la division de Kennebec, au Québec.
La sénatrice Galvez : Rosa Galvez, du Québec.
Le sénateur Loffreda : Bonjour et bienvenue. Tony Loffreda, du Québec.
Le sénateur Dalphond : Pierre Dalphond, division De Lorimier, au Québec. Je pense que c’est le banc québécois de ce côté-ci.
La sénatrice Kingston : Joan Kingston, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
La sénatrice MacAdam : Jane MacAdam, de l’Île-du-Prince-Édouard.
La sénatrice Ross : Krista Ross, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
Le sénateur Smith : Larry Smith, d’Hudson, au Québec.
[Français]
Le président : Honorables sénateurs et sénatrices, nous poursuivons aujourd’hui notre étude sur la teneur complète du projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024, qui a été renvoyé à ce comité par le Sénat du Canada le 9 mai 2024.
Nous sommes heureux d’accueillir aujourd’hui des représentants de différents groupes et industries : Eric Gagnon, vice-président des affaires corporatives, Imperial Tobacco Canada Ltd; Judith Barry, cofondatrice et directrice des relations gouvernementales, Club des petits déjeuners du Canada; Steven Staples, directeur national de la politique et du plaidoyer, Coalition canadienne de la santé; Christine Comeau, directrice exécutive, Association des microbrasseries canadiennes; Rob Cunningham, analyste principal des politiques, et Ciana Van Dusen, gestionnaire, Défense de l’intérêt public (prévention), de la Société canadienne du cancer.
On vous demande, dans un premier temps, de nous adresser la parole pour un maximum de cinq à sept minutes. Sur ce, je donne la parole à Eric Gagnon, Judith Barry, Steven Staples, Christine Comeau et Rob Cunningham.
Eric Gagnon, vice-président des affaires corporatives, Imperial Tobacco Canada Ltd : Bonjour et merci de nous donner l’occasion de commenter le projet de lois C-69. Je m’appelle Eric Gagnon et je suis vice-président des affaires corporatives chez Imperial Tobacco Canada. Même si je ferai mon allocution en anglais, je serai heureux de répondre à toutes vos questions en français.
[Traduction]
Tout d’abord, permettez-moi de dire que les jeunes ne devraient pas consommer de produits contenant de la nicotine. Comme pour le cannabis et l’alcool, seuls les adultes devraient consommer de la nicotine. Ce qui est encourageant, c’est que le taux de jeunes qui fument quotidiennement a baissé pour atteindre un creux historique au Canada à 1 %. Toutefois, nous devons nous assurer que les jeunes n’aient pas accès à d’autres produits contenant de la nicotine.
Imperial Tobacco Canada est résolument engagée dans cet effort, et nous faisons tout en notre pouvoir pour prévenir l’accès des jeunes à la nicotine. Par exemple, nous travaillons étroitement avec nos partenaires de la vente au détail en leur donnant des outils et de la formation, et toute personne prise à vendre ces produits aux jeunes perdra le droit de vendre tous nos produits. Même si l’industrie du tabac a tendance à prendre le blâme pour la consommation chez les jeunes, ce ne sont pas nos produits auxquels les mineurs ont accès. Les jeunes se procurent plutôt des centaines de produits non réglementés et illégaux. Si l’objectif véritable est de garder les produits contenant de la nicotine loin des jeunes, nous invitons les sénateurs à se concentrer sur le marché illicite qui prospère en raison du manque d’application de la loi. Les vendeurs illicites ne respectent aucune règle, dont celle de vérifier une preuve d’âge.
Pour revenir au projet de loi C-69, je vais mettre l’accent sur les modifications apportées à l’article 326 de la Loi sur les aliments et drogues, qui donneront au ministre de la Santé des pouvoirs extrêmes de rendre des ordonnances afin de passer outre au processus d’approbation réglementaire des produits thérapeutiques. Ceux-ci comprennent tous les médicaments, les appareils médicaux et les produits de santé naturels. Ces pouvoirs excessifs devraient alarmer les sénateurs, parce que la première utilisation déclarée de ces pouvoirs se fonde sur des prémisses complètement fausses. Le ministre Holland prétend vouloir ces pouvoirs pour lutter contre les sachets de nicotine, et nous sommes la seule entreprise qui offre un tel produit approuvé par Santé Canada.
ZONNIC est un sachet de nicotine de 4 milligrammes conçu pour aider les fumeurs à arrêter, tout comme les gommes à mâcher, les pastilles et les atomiseurs à la nicotine. Santé Canada l’a approuvé après deux ans d’examen où nous avons dû démontrer son innocuité et son efficacité comme produit pour cesser de fumer. On a dit bien des faussetés sur le ZONNIC, le ministre lui-même l’a fait, donc permettez-moi de clarifier les choses.
Le gouvernement n’impose pas de limite d’âge pour la vente de produits thérapeutiques de remplacement de la nicotine, mais il y en a une pour le ZONNIC. Les arômes font partie des produits pour cesser de fumer depuis bien avant l’arrivée du ZONNIC sur le marché, et le fait de prétendre que nous utilisons des arômes pour attirer les jeunes n’est simplement pas vrai. Comme toutes les autres entreprises, nous employons des arômes pour aider les adultes à cesser de fumer.
Enfin, nos initiatives liées à l’emballage et au marketing ne diffèrent pas de celles de nos concurrents. En fait, nous utilisons moins de formes de publicité, et notre limite d’âge est bien plus stricte. Je situe le contexte, parce que le ministre Holland semble focaliser particulièrement sur nous, peut-être à cause de son poste précédent de lobbyiste antitabac. Le ministre cherche à justifier son coup de force en donnant à penser que nous avons contrevenu à notre licence pour le ZONNIC, mais c’est faux. Nous avons tenu de nombreuses réunions avec des représentants de Santé Canada qui nous ont confirmé que c’était bel et bien faux.
Rien ne prouve que nos produits sont dangereux, qu’ils n’aident pas les fumeurs à cesser de fumer ou que les jeunes en consomment. Cela va au cœur des problèmes que nous trouvons à l’article 326. Nous croyons que des questions légitimes se posent à savoir si ce type de pouvoir remis entre les mains d’une seule personne se justifie dans un pays qui respecte la science et qui valorise la primauté du droit.
Or, si le Parlement accorde des pouvoirs extrêmes aux ministres pour qu’ils mènent des vendettas personnelles, songez aux abus potentiels. Nous sommes pris pour cible aujourd’hui, mais tout autre produit thérapeutique pourrait l’être demain, parce que tous les prochains ministres de la Santé disposeront de ces pouvoirs. Si vous pensez que c’est alarmiste, sachez que la Louisiane vient de déclarer deux pilules abortives comme étant des substances contrôlées et dangereuses il y a quelques semaines.
Fait plus fondamental encore, les pouvoirs du ministre prévus à l’article 326 entachent le processus d’approbation scientifique fondé sur les preuves visant les produits thérapeutiques à cause de considérations politiques et personnelles. Pendant ce temps, le ministre et les lobbyistes antitabac se taisent quant à la grande disponibilité des sachets de nicotines illégaux. Ces produits contiennent beaucoup plus de nicotine et sont vendus en dehors des chaînes de commerces au détail responsables.
Santé Canada doit approuver et réglementer les produits en fonction de preuves objectives, et non de préjugés du ministre. Ainsi, il faut abroger l’article 326 en entier.
Merci. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
[Français]
Judith Barry, cofondatrice et directrice des relations gouvernementales, Club des petits déjeuners du Canada : Bonjour, honorables sénateurs et sénatrices. Comme M. Gagnon, je serai heureuse de répondre à vos questions en français ou en anglais, mais je ferai mon allocution en anglais.
[Traduction]
Depuis 1994, le Club des petits déjeuners travaille avec ses partenaires de tous les secteurs pour que les écoliers aient accès à de la nourriture saine et qu’ils atteignent leur plein potentiel. À l’heure actuelle, nous collaborons avec des intervenants dans toutes les provinces et tous les territoires pour nourrir et aider à nourrir un demi-million d’enfants tous les jours, dont 45 000 élèves autochtones.
Le Club des petits déjeuners a accueilli avec enthousiasme l’annonce historique relative au budget de 2024 qu’a faite le gouvernement du Canada. Il va investir un milliard de dollars sur cinq ans dans un programme national d’alimentation scolaire. Cela fait des décennies que certains intervenants demandent qu’on apporte un tel changement de politique. Cette avancée majeure marque un tournant dans l’engagement du pays envers le bien-être de tous les enfants, et elle rendra la vie plus abordable aux familles du Canada, où un enfant sur trois risque d’aller à l’école le ventre vide.
Même si c’est un bon début, 1 milliard de dollars sur cinq ans et 70 millions de dollars la première année sont des montants insuffisants pour couvrir tous les besoins actuels au pays. Il est crucial de rappeler à tous que cet investissement louable s’ajoute à l’investissement actuel des provinces et des territoires dans l’alimentation scolaire, ainsi qu’aux contributions privées et communautaires. Nous avons toujours besoin de toutes les contributions. Ces montants vont nous aider à mettre en place un programme national cohérent et à jeter les bases pour donner accès à tous les enfants au Canada à des aliments nutritifs.
Un programme national d’alimentation scolaire robuste est essentiel non seulement pour réduire la faim, mais aussi pour favoriser de meilleurs résultats en apprentissage, une éducation à la nutrition, une meilleure santé mentale et physique, et l’égalité sociale. C’est pourquoi il faut mettre en œuvre une politique nationale d’alimentation scolaire et un processus budgétaire à long terme pour garantir cet investissement d’un milliard de dollars au fil du temps.
Pendant trop longtemps, le Canada a été le seul pays du G7 à ne pas compter sur un programme national d’alimentation scolaire. Nous sommes ravis de voir que le gouvernement du Canada applique le budget déposé le 16 avril 2024 et encourage la ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social à conclure des accords bilatéraux avec les gouvernements des provinces et des territoires. Croyez-moi, ces gouvernements sont prêts à négocier et à agir. Les partenaires autochtones sont prêts aussi.
Le Club des petits déjeuners appuie entièrement le projet de loi sur le budget et encourage le gouvernement à aller de l’avant avec son premier engagement de financement qui aura une incidence marquée sur le bien-être des enfants. Nous espérons accélérer les retombées de cet investissement le plus tôt possible.
En conclusion, le programme national d’alimentation scolaire n’est pas qu’un montant dans le budget; c’est un investissement dans l’avenir des enfants et, par extension, de notre pays. Il faut garantir que tous les enfants aient accès aux aliments nutritifs dont ils ont besoin pour réussir. Ainsi, nous permettons à une génération plus en santé, plus éduquée et mieux outillée de contribuer à la société. Nous nous assurons aussi que cet investissement génère des retombées sociales et économiques grâce à l’approvisionnement en nourriture et à l’emploi locaux. Ce programme est une étape essentielle vers un Canada plus équitable et plus prospère.
Merci de votre temps et de votre attention. Meegwetch.
Steven Staples, directeur national de la politique et du plaidoyer, Coalition canadienne de la santé : Merci, sénateur Carignan, et merci, honorables membres du comité. Je tiens à vous remercier de m’avoir invité ici aujourd’hui. Je salue tout spécialement mes concitoyens du Nouveau-Brunswick. Nous sommes notamment bien représentés à Fredericton.
Notre organisation a été fondée en 1979. Ses membres visent à défendre et à améliorer notre système de santé public. Dans nos rangs, nous comptons des syndicats de travailleurs de la santé, des groupes communautaires, des étudiants et des experts de la santé publique.
En février, le gouvernement fédéral a présenté un projet de loi pour mettre en œuvre la première phase de l’assurance-médicaments nationale afin d’offrir une couverture universelle pour les contraceptifs et les médicaments contre le diabète en partenariat avec les provinces et les territoires. Le projet de loi C-64, la Loi sur l’assurance-médicaments, a été adopté en troisième lecture à la Chambre des communes lundi.
Le projet de loi C-69, dont nous discutons aujourd’hui, joue un rôle prépondérant dans le régime d’assurance-médicaments du gouvernement. Le budget 2024 accorde 1,5 milliard de dollars sur cinq ans, à partir de 2024-2025, à Santé Canada pour appuyer le lancement d’un régime national d’assurance-médicaments — ce qui constitue une première pour un budget fédéral.
Dans les jours suivant l’introduction de l’assurance-médicaments, la Coalition canadienne de la santé a publié une déclaration pour saluer le dépôt du projet de loi C-64. Je vous ai fourni cette déclaration dans notre mémoire. Elle a reçu l’aval d’un ensemble vaste et divers de plus de 49 organisations et de chercheurs, de groupes de la société civile et de soignants de toutes les régions du pays, y compris d’organisations comme la Fondation des maladies du cœur du Canada, Médecins canadiens pour le régime public, Action Canada pour la santé et les droits sexuels et des organisations au Québec comme la Coalition Solidarité Santé et l’Association québécoise des infirmières et infirmiers. Le Conseil de la santé du Nouveau-Brunswick nous a aussi donné son appui, ainsi que nombre de coalitions de la santé provinciales et d’autres organisations qui représentent des infirmières et des défenseurs des droits des personnes handicapées, des retraités, des femmes et des immigrants. Toutes ces organisations souscrivent à notre déclaration.
Ensemble, le projet de loi C-69 et le projet de loi C-64 constituent un jalon historique et un premier pas important pour continuer à progresser vers un régime national d’assurance-médicaments universel.
Le Canada est le seul pays dans le monde développé qui possède un système universel de santé qui ne comprend pas de couverture universelle des médicaments sur ordonnance en dehors des hôpitaux.
Nous avons urgemment besoin de l’assurance-médicaments pour améliorer la santé des gens qui vivent au Canada. Une personne sur cinq a signalé à Statistique Canada qu’elle n’avait pas accès à la couverture des médicaments sur ordonnance. Les gagne-petit, les immigrants et les personnes racisées sont le plus durement touchés.
De plus, il faut réduire les coûts totaux des médicaments dans notre système de santé. Selon le directeur parlementaire du budget, le DPB, les prix des médicaments sur ordonnance au Canada sont environ 25 % plus élevés que la médiane des pays de l’OCDE. Un régime d’assurance-médicaments à payeur unique qui a le pouvoir d’acheter des médicaments en vrac est le meilleur moyen de négocier des prix plus bas avec les fabricants de médicaments.
Les membres de la Coalition canadienne de la santé endossent de tout cœur les recommandations que le Conseil consultatif sur la mise en œuvre d’un régime national d’assurance-médicaments a faites en 2019, sous la direction du Dr Eric Hoskins.
Un programme national visant à mettre en place la couverture publique pour les contraceptifs, les médicaments contre le diabète et le matériel connexe, offerte dans une approche à payeur unique dans les systèmes de santé publics provinciaux, est une étape historique pour suivre les orientations recommandées dans le rapport Hoskins sur l’assurance-médicaments.
Enfin, il reste bien des étapes à franchir pour en venir à la couverture universelle et à un formulaire national de médicaments.
Nous exhortons les sénateurs à garantir que les projets de loi C-69 et C-64 mènent à un régime public d’assurance-médicaments universel à payeur unique en partenariat avec les provinces et les territoires. Il faut également s’assurer de verser un financement adéquat et prévoir des mesures d’imputabilité, conformément aux principes de la Loi canadienne sur la santé.
Je répondrai à vos questions avec plaisir.
[Français]
Le président : Merci beaucoup, monsieur Staples.
Madame Comeau, vous avez la parole.
[Traduction]
Christine Comeau, directrice exécutive, Association des microbrasseries canadiennes : Merci beaucoup de m’avoir invitée à témoigner devant vous, estimés membres du Comité sénatorial permanent des finances nationales.
C’est vraiment un honneur, et je suis très enthousiaste d’avoir l’occasion de vous parler du sujet favori de bien des gens: les bières artisanales canadiennes.
Je m’appelle Christine Comeau, et je suis directrice exécutive de l’Association des microbrasseries canadiennes, l’AMC. L’AMC fonctionne selon un modèle fédéré: toute microbrasserie au Canada membre d’une association provinciale est automatiquement membre de l’AMC. Nous collaborons aussi avec la Canadian Coalition of Independent Craft Brewers, qui représente également les grandes microbrasseries du Canada. Cela signifie que nous sommes la voix nationale des microbrasseries indépendantes au Canada par excellence.
Il y a près de 1 200 microbrasseries indépendantes au Canada, d’un bout à l’autre du pays, et 55 % d’entre elles se situent dans des collectivités rurales. Il serait difficile de trouver une autre industrie qui a connu une telle croissance récemment et qui touche autant les collectivités locales.
Les microbrasseries demandent généralement beaucoup de travail. Chaque brassin est soigneusement brassé à la main. C’est pourquoi elles soutiennent près de 21 000 emplois, ce qui représente environ 60 % de tous les emplois dans l’industrie de la bière, même si les bières de microbrasseries ne constituent que 17 % de toute la bière brassée au Canada. Les microbrasseries contribuent au produit intérieur brut à hauteur de 1,7 milliard de dollars.
Comme bien des petites entreprises, les microbrasseries n’ont pas échappé à la COVID, aux perturbations dans les chaînes d’approvisionnement, à l’inflation galopante et aux coûts d’emprunt. L’inflation a durement touché notre industrie. Le malt coûte jusqu’à 50 % plus cher, le prix des canettes d’aluminium a augmenté de 20 % et le prix du carton, de 16 %. Contrairement aux grandes brasseries qui achètent leurs intrants en vrac et qui peuvent absorber ces coûts, les microbrasseries ne peuvent simplement pas hausser les prix assez pour couvrir leurs coûts. En 2023, nous avons connu la première année de fermetures nettes de microbrasseries, soit 70 fermetures au Canada. Mais il y a de l’espoir. Les Canadiens adorent les bières artisanales, et les touristes aussi. Les bières artisanales canadiennes continuent de gagner des parts de marché, et il y a encore beaucoup de place pour la croissance.
Nous tenons à remercier le gouvernement de l’allégement de la taxe d’accise prévu dans le projet de loi C-69, et en particulier, d’avoir coupé de moitié le taux du droit d’accise sur les 15 000 premiers hectolitres de bière brassée au Canada pendant les deux prochaines années. Nous sommes reconnaissants qu’il reconnaisse l’urgence d’agir en appui aux microbrasseries canadiennes, qui emploient plus de 20 000 travailleurs dans l’industrie.
Les récentes données d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada montrent qu’en 2022, 63 % des près de 900 microbrasseries canadiennes n’étaient toujours pas rentables. Dans le rapport, on explique aussi qu’un important obstacle à la rentabilité, c’est les marges et les taxes qu’imposent les provinces et le gouvernement fédéral aux microbrasseries canadiennes. C’est pourquoi nous demandons la réforme de la Loi sur la taxe d’accise désuète, qui a été établie en 2006.
Nous nous réjouissons des annonces récentes et souhaitons également un soutien accru aux plus grandes microbrasseries indépendantes grâce à un taux d’accise fédéral progressif, axé sur la croissance, qui permettrait à toutes les microbrasseries de croître jusqu’à 500 000 hectolitres sans se heurter à un gouffre fiscal. Ces plus grandes microbrasseries représentent plus de 60 % de la production de bière artisanale du pays et contribuent considérablement à la création d’emplois, à l’investissement, à la croissance économique et à la promotion du tourisme au Canada.
Divers gouvernements provinciaux ont adopté un régime fiscal axé sur la croissance qui va bien au-delà des 75 000 hectolitres que le gouvernement fédéral utilise actuellement pour définir la bière artisanale. À l’exception des changements apportés ce printemps, aucune modification majeure n’a été apportée depuis 2006, à une époque où le secteur de la microbrasserie était encore loin d’être l’industrie si solide d’aujourd’hui au Canada. Il est temps de mettre un terme à cette disparité fiscale, d’autant plus que nos concurrents américains peuvent brasser jusqu’à 7 000 000 d’hectolitres de bière par an avant d’atteindre des taux d’accise plus élevés.
Selon une récente étude d’impact économique sur l’industrie canadienne des microbrasseries réalisée par MNP, ce petit investissement dans les microbrasseries canadiennes est conforme aux règles commerciales et deviendra neutre ou positif en termes de recettes, et non un fardeau pour le Trésor public. Le ministère des Finances a validé les conclusions de MNP, affirmant que ces évaluations se tenaient.
Une fois de plus, nous souhaitons remercier le gouvernement pour l’allègement de la taxe d’accise prévu dans le projet de loi C-69, et nous pensons qu’il est possible d’apporter un changement radical et permanent, mais progressif et axé sur la croissance, afin de permettre à toutes les microbrasseries de croître sans se heurter à un gouffre fiscal.
Je suis vraiment heureuse de l’occasion qui m’est donnée d’être ici aujourd’hui. Cela représente beaucoup pour moi, pour mon conseil d’administration et pour les quelque 1 200 microbrasseries du Canada. Je suis toujours à votre disposition comme personne-ressource. Nous avons beaucoup d’informations sur notre industrie. Cet été, si vous visitez une microbrasserie, je vous encourage à aller à la rencontre des gens qui se cachent derrière la bière. Je me ferai un plaisir de vous présenter chaleureusement, parce qu’il n’y a rien de tel qu’une présentation chaleureuse autour d’une bonne bière de microbrasserie bien fraîche. Tout ce que vous avez à faire, c’est de demander. Ne serait-ce que si vous cherchez des conseils sur un festival de la bière ou les bières de microbrasserie à essayer, mon équipe et moi-même serons heureux de vous aider. Merci beaucoup et santé!
[Français]
Le président : Merci beaucoup, madame Comeau. Monsieur Cunningham, c’est votre tour.
Rob Cunningham, analyste principal des politiques, Société canadienne du cancer : Merci, monsieur le président. Honorables sénateurs et sénatrices, au nom de la Société canadienne du cancer, merci de nous donner la possibilité de témoigner.
[Traduction]
Je m’appelle Rob Cunningham et je suis analyste principal des politiques à la Société canadienne du cancer. Je suis accompagné de Ciana Van Dusen, gestionnaire de la Défense de l’intérêt public et de la prévention.
Dans notre témoignage, nous aimerions souligner notre appui à quatre mesures contenues dans le projet de loi C-69 : l’augmentation de la taxe sur le tabac, l’augmentation de la taxe sur le vapotage, les dispositions sur la communication d’information et le nouveau pouvoir conféré par la Loi sur les aliments et drogues, qui permettra de restreindre davantage les sachets de nicotine. Nous demandons instamment à tous les sénateurs d’appuyer ces mesures importantes.
Tout d’abord, l’augmentation des taxes sur le tabac est la stratégie la plus efficace pour réduire le tabagisme, en particulier chez les jeunes. Les jeunes sont particulièrement sensibles aux augmentations de taxes sur le tabac. Nous appuyons l’augmentation de 4 $ par cartouche prévue dans le budget.
Bien que l’industrie du tabac s’oppose aux augmentations de taxes sur le tabac, elle procède elle-même à des augmentations massives des prix. Sur la période de 10 ans allant de 2014 à 2023 inclusivement, l’industrie du tabac a augmenté le prix moyen des cigarettes, hors taxes, de 31,80 $ par cartouche. Il s’agit d’une augmentation de 279 % sur 10 ans, alors que l’inflation cumulée n’a été que de 31 %. Je fournirai par la suite un graphique au comité pour qu’il puisse examiner ces données plus en détail.
Pour la seule année 2023, l’industrie a augmenté ses propres prix de 5,40 $ la cartouche, soit de plus que l’augmentation de taxe de 4 $ prévue dans le budget. Nous estimons, en tout respect, qu’il n’est pas crédible que l’industrie du tabac s’oppose aux augmentations de taxes du gouvernement alors qu’elle applique elle-même d’énormes augmentations de prix. Pour ce qui est de la contrebande, n’oublions pas qu’Imperial Tobacco et les deux autres grandes entreprises ont été trouvées coupables de contrebande et condamnées à des amendes et à des réparations civiles totalisant 1,7 milliard de dollars.
Deuxièmement, les taxes sur le vapotage sont essentielles pour aider à réduire les niveaux dramatiquement élevés de vapotage chez les jeunes. Selon les données les plus récentes, 24 % des jeunes canadiens de 16 à 18 ans pratiquent le vapotage, contre 9 % sept ans plus tôt. Nous avons besoin d’un train complet de mesures pour réduire le vapotage chez les jeunes, y compris par la taxation.
Le cadre fiscal fédéral pour le vapotage a été initialement proposé pour consultation en juin 2021. L’inflation cumulative depuis a été de 14 %. Ainsi, l’augmentation de 12 % de la taxe sur le vapotage prévue dans le budget, que nous appuyons, ne suit même pas le rythme de l’inflation. Nous vous sommons instamment d’augmenter encore davantage la taxe sur le vapotage.
Il existe une faille fiscale qui permet d’appliquer un taux d’imposition moindre aux cigarettes électroniques jetables. Sur ce point, nous sommes d’accord avec Imperial Tobacco pour dire qu’il y a une lacune et qu’il faut augmenter le taux d’imposition des cigarettes électroniques jetables. Les cigarettes électroniques jetables sont populaires auprès des jeunes en partie parce qu’elles sont très bon marché. Les produits qui sont vendus contiennent des volumes de nicotine par bouffée de plus en plus élevés, ce qui réduit d’autant le coût par bouffée. Par exemple, voici un produit de 500 bouffées, dont le coût par bouffée est de 2,2 cents. Pour un produit de 1 500 bouffées, le coût revient à 1,6 cents la bouffée. De plus en plus, il y a même des produits de 10 000 bouffées, comme celui-ci, dont le coût par bouffée n’est que de 0,3 cents. Cela rend le tabac plus abordable pour les jeunes.
Troisièmement, certaines dispositions du projet de loi C-69 facilitent la communication d’informations entre les ministères. Cela facilitera l’application de la loi.
Enfin, le projet de loi contient des modifications à la Loi sur les aliments et drogues qui permettront au gouvernement d’adopter des restrictions supplémentaires sur les sachets de nicotine. Ces dispositions sont nécessaires et essentielles. La situation actuelle est gravement inadéquate.
En octobre 2023, Imperial Tobacco Canada a lancé des sachets de nicotine sur le marché canadien au moyen de publicités mettant l’accent sur le style de vie, un peu comme on le faisait par le passé pour les cigarettes, des publicités montrant des personnes joyeuses, jeunes, dans des contextes sociaux et sportifs, de manière à toucher les jeunes dans les médias sociaux et dans les publicités affichées dans les dépanneurs près des bonbons et des barres de chocolat. L’entreprise proposait des saveurs attrayantes pour les jeunes, telles que Brise tropicale, que j’ai ici. Brise tropicale n’est même pas un véritable arôme. Il s’agit de l’aspiration à un certain mode de vie.
Les produits classiques de remplacement de la nicotine, tels que les gommes et les timbres à la nicotine, ne posent pas problème pour les jeunes. En revanche, comme nous l’avons vu aux États-Unis et en Europe, les sachets de nicotine sont problématiques. Cela a incité des pays comme la Belgique et les Pays-Bas à interdire complètement les sachets de nicotine. Nous avons besoin de mesures immédiates pour protéger les jeunes en vertu des nouveaux pouvoirs conférés par le projet de loi C-69, que nous appuyons. Nous devons protéger la nouvelle génération de jeunes contre une dépendance à la nicotine qui pourrait durer toute la vie. Nous vous remercions.
[Français]
Le président : Merci beaucoup, monsieur Cunningham. Nous allons procéder à la période des questions avec les sénateurs. Exceptionnellement, la réunion durera 1 h 30, donc il reste maintenant une heure. On va y aller avec cinq minutes par sénateur, mais je serai assez sévère avec le temps de parole. S’il vous plaît, ayez des questions et des réponses concises pour qu’on puisse avoir le plus d’informations possible. Merci.
[Traduction]
La sénatrice Marshall : Je vais commencer par Mme Barry parce que j’ai déjà été enseignante et que je sais qu’il faut un programme alimentaire dans les écoles.
J’ai toujours pensé qu’il s’agissait d’un programme de petits déjeuners, mais après vous avoir entendue, il se peut que ce ne soit pas tout à fait cela. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce qui est envisagé? Vous avez dit qu’il n’y avait pas assez d’argent. De combien avez-vous besoin? Le budget prévoit 79 millions de dollars pour cela cette année. Pourriez-vous nous donner une idée de la façon dont vous allez dépenser ces 79 millions de dollars?
Mme Barry : Merci pour votre question, sénatrice. La politique et notre programme font partie d’un programme national d’alimentation scolaire, qui encourage les communautés scolaires à mettre en œuvre un programme de petits déjeuners, de déjeuners ou de collations nutritives. Dans certains cas, elles utiliseront des programmes existants ou ajouteront un second volet à leur journée scolaire.
Les décisions sont prises au niveau communautaire et, dans certains cas, au niveau provincial. Par exemple, à Terre-Neuve-et-Labrador, votre gouvernement a mis en place un programme provincial de repas qui s’appuie sur le programme des petits déjeuners existant. Il est géré par la Kids Eat Smart Foundation.
Ces fonds s’ajoutent au soutien déjà alloué par les divers ordres de gouvernement, ainsi qu’aux investissements privés et communautaires.
Cela dit, si nous voulons offrir l’accès à des aliments nutritifs à 5 millions d’écoliers à l’échelle du pays, nous aurons besoin d’au moins 3 à 6 $ par enfant et par jour. Il y a 180 jours d’école. Nous aurions ainsi besoin de milliards.
La sénatrice Marshall : Le budget prévoit 79 millions de dollars. Quelle somme auriez-vous aimé y voir?
Mme Barry : Pour la première année, idéalement, nous aurions souhaité l’injection d’au moins 200 millions de dollars parce qu’un milliard de dollars sur cinq ans, c’est 200 millions de dollars par an. Cela dit, il s’agit d’une base satisfaisante sur laquelle nous appuyer, et c’est le premier investissement dans un programme national d’alimentation scolaire. Nous le reconnaissons, et nous espérons qu’il pourra croître au fil du temps.
La sénatrice Marshall : Comment allez-vous répartir ces 79 millions de dollars? Allez-vous donner un certain montant à chaque province?
Mme Barry : D’après ce que nous ont dit les gens des gouvernements provinciaux et territoriaux, certains ont l’intention de négocier avec la ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, et ils voudraient exiger un investissement au prorata et par habitant. D’autres tiennent surtout à ce que tous les enfants reçoivent leur juste part de l’allocation. Pour un enfant vivant dans une communauté éloignée, accessible par avion, il faudra plus qu’un simple investissement par habitant.
La sénatrice Marshall : Qui allouera l’argent? J’avais l’impression que cet argent irait à votre association, mais c’est le gouvernement qui l’allouera aux différentes provinces?
Mme Barry : Exactement. On évoque dans le budget des accords bilatéraux entre le gouvernement fédéral, soit la ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, et les gouvernements provinciaux et territoriaux, de même qu’avec les partenaires autochtones.
La sénatrice Marshall : C’est très bien. Merci.
Je vais poser ma question, et il y aura peut-être un deuxième tour.
Monsieur Gagnon, j’aimerais que vous nous disiez pourquoi vous pensez que ZONNIC est ciblé par le ministre. Au deuxième tour, ce sera ma question.
Le président : Vous aurez le temps de vous préparer.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci de vos témoignages. Ma première question s’adresse à Mme Barry et concerne les petits déjeuners, qui est une initiative exceptionnelle. J’ai eu la chance de présider une organisation qui s’appelle COSMOSS et qui travaille en ce sens, et un des éléments qui a beaucoup contribué à notre succès, c’est d’avoir réussi à faire collaborer les gens du secteur de la santé, du secteur communautaire et du monde municipal. Déjà les municipalités participent à des projets de collaboration et au défi du petit déjeuner. Comment le programme d’alimentation scolaire proposé par le gouvernement devrait-il mettre à profit les ressources municipales?
Mme Barry : C’est une très bonne question; merci beaucoup. Nous encourageons vraiment le développement d’une solution à coûts partagés avec tous les ordres de gouvernement, y compris les municipalités. Il y a plusieurs municipalités au pays qui contribuent considérablement aux efforts, mais il reste beaucoup à faire. Ce qui serait cohérent dans cette implantation d’un programme national, c’est que le gouvernement fédéral puisse encourager les gouvernements provinciaux et territoriaux à bâtir cette structure de saine gouvernance qui va devenir collective, ce qui fera en sorte que nourrir un enfant, c’est l’affaire de tous.
C’est donc ce que l’on souhaite, au-delà de tous les ordres de gouvernement : que les communautés et les parties prenantes privées et communautaires et scolaires continuent aussi d’augmenter leurs contributions.
Le sénateur Forest : Habituellement, le gouvernement s’engage pour cinq ans. Ma crainte, c’est qu’on soit en train de développer un service essentiel, que le gouvernement se retire ensuite et qu’on soit aux prises avec un besoin incontournable, mais pour lequel les intervenants, particulièrement les municipalités, n’auraient pas la structure financière requise pour assumer cette responsabilité. Comment peut-on s’assurer que cet engagement soit pérenne à long terme, et pas ponctuel pour cinq ans, pour créer la demande et s’en laver les mains par la suite?
Mme Barry : C’est une très bonne question et c’est un peu ce que j’évoquais dans mon allocution. Comment réussir à implanter réellement une politique budgétaire et une loi qui permettront aux Canadiens et aux Canadiennes de compter sur cet investissement complémentaire? Ce n’est pas un investissement qui couvre tous les besoins, loin de là. Comme je le disais à votre collègue, des milliards de dollars seraient nécessaires annuellement. Donc, l’objectif, c’est vraiment d’implanter une politique et un projet de loi permanent sur lesquels on pourra construire et, idéalement, rejoindre tous les enfants au pays à travers les années.
Le sénateur Forest : Après le petit déjeuner, on passe aux 5 à 7 et aux microbrasseries. Plus de 60 % de la bière artisanale est produite par des microbrasseries qui brassent plus de 15 000 hectolitres. Quelle est la moyenne de ce qu’ils brassent? J’aimerais connaître la distinction entre les microbrasseries des villages qui deviennent une partie importante de l’offre touristique sur plusieurs circuits, particulièrement dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie.
Au-delà de 75 hectolitres, on parle de microbrasseries beaucoup plus industrielles. Vous nous dites que 60 % de la bière artisanale est produite par des microbrasseries qui brassent plus de 15 000 hectolitres.
Quelle est la moyenne d’hectolitres brassés par vos brasseries?
[Traduction]
Mme Comeau : Merci. Je comprends votre question.
La grande majorité — environ 95 % de toutes les microbrasseries canadiennes — se situerait sous le seuil de 15 000 hectolitres. Toutefois, celles qui se situent au-dessus de ce seuil brassent 60 % de toute la bière artisanale.
La grande majorité d’entre elles sont donc très petites; certaines ont une capacité de 500 à 1 000 ou 2 000 hectolitres. Les plus grandes ont une plus grande incidence sur l’ensemble du secteur en termes de création d’emplois et d’investissements.
[Français]
Le sénateur Gignac : Je vais continuer sur la lancée du matin de mon collègue le sénateur Forest avec Mme Barry.
Premièrement, je vous remercie pour ce que vous faites. Je crois que c’est plus difficile d’apprendre à l’école pour les enfants qui ont l’estomac vide.
Pourriez-vous partager avec nous des statistiques qui font la comparaison des écoles où l’on est déjà organisé pour offrir des petits déjeuners, par opposition à d’autres écoles? Avez-vous fait des études? Pouvez-vous partager certains résultats avec nous? Sinon pourriez-vous nous envoyer un petit document dont on pourrait prendre connaissance?
Mme Barry : Merci pour votre question, monsieur le sénateur; elle est très appréciée. Tout à fait, on pourrait partager un document détaillé avec vous.
On sait à l’heure actuelle que l’on rejoint près d’un demi-million d’enfants avec le Club des petits déjeuners du Canada. Ces enfants sont répartis dans plus de 3 200 écoles au pays, dans toutes les provinces et dans les territoires.
Cela dit, il y a des écoles qui reçoivent des services de la part d’autres organisations au pays. On croit qu’à l’heure actuelle, selon certaines études, il y aurait plus d’un million d’enfants — entre 1 million et 1,5 million d’enfants au pays sur une population scolaire totale de 5 millions — qui ont accès à un programme de nutrition scolaire, soit un programme de déjeuner, de dîner ou de collation santé — fruits, légumes, ce type de programme. On est loin de la coupe aux lèvres, finalement, puisqu’il s’agit seulement de 20 % de la population étudiante. Parmi ces programmes déjà en place, les besoins sont plus grands.
Ces dernières années, il y a eu une augmentation de 28 % pour ce qui est de l’insécurité alimentaire des enfants au pays. Depuis deux ans, c’est dramatique. Plus le coût de la vie et de la nourriture augmentent, plus il y a de participants qui arrivent et ont besoin de ces programmes.
Faire fonctionner ces programmes devient extrêmement coûteux.
Le sénateur Gignac : Merci. Ma prochaine question ira du côté de M. Gagnon.
Monsieur Gagnon, j’aimerais vous donner une occasion de réagir un peu au témoignage de M. Cunningham. Disons que votre compagnie ou l’industrie s’est fait un peu passer à tabac — excusez-moi pour le jeu de mots —, parce que les hausses de prix par opposition aux taxes...
Y a-t-il des choses que vous aimeriez partager avec nous avant que l’on poursuive les témoignages?
M. Gagnon : Oui; merci de me donner cette occasion, monsieur le sénateur.
En fait, ce que M. Cunningham ne dit pas, c’est que depuis 2014, le nombre de réglementations auxquelles on fait face dans l’industrie du tabac, c’est de l’acharnement. On est passé d’un emballage neutre à changer les messages sur la santé sur les paquets de cigarettes, à changer le format du paquet parce que les groupes du secteur de la santé pensaient que le paquet n’était pas assez gros pour mettre le message sur la santé et que les gens ne comprendraient pas. Donc, il fallait un paquet plus gros. Aujourd’hui, on est rendu avec un message relatif à la santé sur chaque cigarette. C’est à coût de millions et de millions de dollars que l’industrie doit s’adapter, et cela se fait souvent sur une période assez rapide. Il faut, bien entendu, payer pour tout cela.
Pour les sachets de nicotine, il y a plusieurs choses qu’on n’a pas dites. On nous a dit qu’on n’avait pas le droit d’amener des produits au Sénat, donc vous avez reçu une brochure, mais si vous regardez la brochure qu’on vous a laissée, il y a des produits dont on parle dans la brochure qui sont à saveur d’explosion de fruits, de baies fraîches et de mangue rouge. Là, on isole Imperial Tobacco Canada Ltd, mais la réalité, c’est que ces couleurs, ces marques et la manière de vendre ces produits sur le marché existent depuis des décennies. Lorsque c’est l’industrie pharmaceutique qui le fait, les groupes de santé ne sont pas préoccupés, mais dès qu’Imperial Tobacco Canada Ltd essaie de lancer des produits pour aider les gens à arrêter de fumer — on sait que la plupart des gens veulent arrêter de fumer, car il y a des risques importants associés au tabagisme —, tout à coup, nous ne sommes pas traités comme les autres compagnies. Donc, c’est pour cela qu’on dit qu’il y a de l’acharnement sur notre compagnie, tout à fait.
Le ministre de la Santé dit qu’on a utilisé une faille, mais c’est tout à fait faux. On a passé par un processus de deux ans avec Santé Canada. Je pense qu’on peut faire confiance à Santé Canada pour émettre des licences à des compagnies qui sont capables de montrer l’efficacité et la sécurité des produits qui sont mis sur le marché. Sinon, je vous dirais qu’on est aussi bien d’éliminer Santé Canada si on n’a pas confiance en nos institutions.
Le sénateur Gignac : Je vous remercie.
[Traduction]
Le sénateur Smith : Monsieur Gagnon, je sais que la sénatrice Marshall veut probablement poser la même question, donc je me ferai porteur du relais. Dans votre mémoire, vous supposez que les modifications à la Loi sur les aliments et drogues sont le moyen utilisé par le ministre pour répondre aux préoccupations liées à vos sachets de nicotine. On peut lire ce qui suit dans le mémoire soumis au comité :
... l’approche du ministre de la Santé, qui semble se concentrer sur un seul produit de TRN provenant d’une seule entreprise et être fondée sur de la désinformation flagrante, soulève des préoccupations.
Selon le gouvernement, ces changements donnent au ministre de nouveaux outils pour combler les lacunes ou remédier aux vulnérabilités en matière d’accès aux produits alimentaires ou thérapeutiques. Pourriez-vous expliquer pourquoi vous estimez que ce changement cible vos produits plutôt que l’ensemble du marché des produits thérapeutiques?
M. Gagnon : Il y a plusieurs choses. Premièrement, le ministre Holland n’a pas hésité à dire exactement à quoi il veut s’en prendre, et il s’en prend à Imperial Tobacco Canada. Il l’a dit publiquement.
Deuxièmement, le fait est, sénateur, que si nous avions fait quoi que ce soit de mal, Santé Canada a d’ores et déjà le pouvoir de révoquer notre licence. Cela fait partie de ses responsabilités. Lorsqu’on obtient une licence pour un produit de santé naturel ou un produit de remplacement de la nicotine, on doit respecter les règles. Il faut commercialiser le produit comme un produit de désaccoutumance. C’est la seule façon dont on peut en faire la promotion, faute de quoi, si le produit n’est pas utilisé de la façon voulue, la licence est révoquée.
Il y a une raison pour laquelle Santé Canada n’a rien fait de tel, c’est que nous n’avons rien fait de mal. Pour cette raison, je pense que le ministre essaie de s’emparer du pouvoir de nous retirer notre licence, parce qu’il ne veut pas qu’Imperial Tobacco Canada participe au marché des produits de désaccoutumance.
Le sénateur Smith : Quel type de lobbying... ou le gouvernement a-t-il consulté votre organisation? Votre réponse mène à une question simple, qui est la suivante : comment vous positionnez-vous dans vos consultations avec le gouvernement ou quel type de consultations le gouvernement a-t-il fait mener auprès de vous pour trouver une forme de solution?
M. Gagnon : Nous avons eu de nombreuses discussions avec des fonctionnaires de Santé Canada, qui se sont déroulées dans la collaboration. Ils nous ont demandé un certain nombre de choses, comme de mettre davantage en évidence la mention 18+ dans la publicité. Même si ce n’est pas obligatoire, nous l’avons fait. Ils ont fait des commentaires sur les couleurs. Nous avons proposé de produire un emballage blanc. Ils ne nous en ont pas reparlé, mais nous serions prêts à le faire.
Le ministre Holland a également déclaré publiquement qu’il nous infligerait une amende. J’ai donné une conférence de presse à ce sujet, sénateur. Il n’a pas besoin de chercher si loin. Nous voulons rencontrer le ministre de la Santé. Il ne veut pas nous rencontrer. En fin de compte, nous sommes une société légitime, et Imperial Tobacco et les autres sociétés de tabac versent chaque année 9 milliards de dollars en taxes aux gouvernements du Canada. Mais ils ne veulent pas nous rencontrer. Nous avons essayé.
Si la question porte sur le lobbying, les associations comme celle de M. Cunningham économiseront 5,3 millions grâce au cadre sur le tabac. La convention-cadre sur le tabac ne permet pas aux gouvernements de consulter les sociétés de tabac...
Le sénateur Smith : J’aimerais demander à M. Cunningham de se joindre à la discussion à ce sujet.
M. Cunningham : Merci, sénateur.
Les préoccupations que j’ai exprimées aujourd’hui sont également partagées par de nombreux autres organismes de santé, comme l’Association pulmonaire du Canada, la Fondation des maladies du cœur et d’autres.
Imperial Tobacco a une longue histoire de marketing auprès des mineurs. La Cour suprême du Canada l’a constaté dans un jugement citant des documents internes de la société, même si celle-ci déclarait publiquement ne pas cibler les mineurs.
Le type de marketing utilisé lors du lancement de ce produit montre, selon moi, les véritables intentions de la société dans cette publicité pour les jeunes prônant un certain mode de vie. Cette publicité n’est pas axée sur l’arrêt du tabac. Je pense que c’est cette expérience qui nous a poussés à nous inquiéter autant, qui a poussé le ministre de la Santé à être légitimement très inquiet et à proposer cette solution.
Selon le gouvernement, ces modifications à la Loi sur les aliments et drogues ont également d’autres fins. Par exemple, en cas de pénurie de lait maternisé, il y a un mécanisme qui pourrait s’appliquer. L’épinéphrine, un décongestionnant, se retrouve apparemment dans des drogues de rue. Cet outil en garantirait une meilleure utilisation. Ces modifications s’appliqueraient en cas de rappel aussi. Apparemment, pour certaines catégories de produits, il n’existe pas de pouvoirs suffisants pour procéder à un rappel, comme c’est le cas pour d’autres catégories.
Il existe donc un certain nombre de mécanismes et d’avantages au-delà des sachets de nicotine. Les groupes de santé à l’échelle internationale sont très préoccupés par l’industrie du tabac, qui a tendance à commercialiser ces sachets de nicotine d’un pays à l’autre. Le Canada doit se doter d’une réglementation beaucoup plus adéquate pour protéger les jeunes, et c’est ce que fera le projet de loi C-69.
Le sénateur Smith : La dernière fois que ces deux témoins ont comparu, monsieur le président, ils étaient beaucoup plus proches l’un de l’autre. Est-ce un signe des temps?
La sénatrice Galvez : On peut prendre cela à la rigolade ou s’inquiéter de la situation dans son ensemble. Je suis grand-mère de trois enfants. Ce qui m’inquiète, c’est le fait que... J’habite à proximité des deux écoles et je vois les enfants fumer et vapoter de plus en plus. C’est vraiment triste.
Je souhaite également procéder à un contre-interrogatoire et discuter de cette situation. L’incidence de surpoids et de diabète de type 2 chez les enfants est à la hausse. Elle augmente de manière exponentielle, plus rapidement aux États-Unis qu’au Canada, mais nous suivons habituellement les Américains.
Cette augmentation de l’incidence de diabète de type 2 et de surpoids chez les enfants se reflète chez les enfants des minorités ethniques à faible revenu et chez les enfants autochtones, comme le révèlent de nombreuses données.
Ce qui est intéressant, c’est que ces jeunes qui subissent des effets néfastes sur leur santé éprouveront des difficultés à l’âge adulte. Nous savons que nous envisageons la mise en œuvre d’un régime d’assurance-médicaments qui coûtera beaucoup d’argent, en particulier pour fournir des médicaments contre le diabète aux enfants et à des personnes qui n’ont probablement pas une alimentation saine.
Que se passe-t-il? Pourquoi ne nous concertons-nous pas pour nous fixer le même objectif, à savoir réduire la consommation d’aliments ultratransformés chez les enfants? Parce que ces aliments ultratransformés contiennent trop de sodium, de sucres et de gras saturés et qu’ils entraînent des troubles cardiovasculaires, métaboliques, mentaux et alimentaires, ainsi que des décès, etc. Comment pouvons-nous travailler ensemble et résoudre ces problèmes à la source et non à la fin, en tentant de déterminer à qui nous donnons plus d’argent pour résoudre ces problèmes, ce qui fait augmenter les coûts? Ma question s’adresse à M. Staples, à Mme Barry et à M. Cunningham.
M. Staples : Nous sommes heureux que le régime d’assurance-médicaments couvre ces deux catégories de médicaments, les contraceptifs, les médicaments contre le diabète et les produits connexes. Je n’ai pas de données ventilées sur la différence entre le diabète de type 1 et celui de type 2, ni sur le nombre de personnes concernées. Mon collègue, M. Mike Bleskie, qui a comparu avec moi devant le comité de la Chambre des communes, a raconté qu’à l’âge de 12 ans, il a reçu un diagnostic de diabète de type 1. Ce n’était pas lié à... C’est seulement la loterie génétique qui lui a donné cette maladie. C’est un jeune homme d’une trentaine d’années. Il travaille à la demande, il n’a pas d’assurance et il paie des centaines de dollars par mois pour ses médicaments essentiels qui lui permettent de rester en vie. Il a précisé qu’il avait une assurance à un moment donné, car il travaillait dans le cadre d’un contrat. À la fin de ce contrat, il a tenté d’obtenir une autre assurance, mais on a refusé sa demande en raison de sa condition préexistante. Il s’est donc retrouvé non seulement travailleur à la demande sans emploi, mais il a également dû assumer lui-même le coût de ses médicaments.
Cela va réellement aider les gens. Comme nous le savons, lorsque les gens ne prennent pas leurs médicaments — il a parlé de réduire ses médicaments de moitié et de réutiliser ses lancettes et d’autres dispositifs —, cela augmente les résultats négatifs en matière de santé. Je suis tout à fait d’accord avec vous. On appelle ce que vous décrivez des déterminants sociaux de la santé. Ce sont des choses dont nous devons tous nous occuper, mais nous devons aussi nous occuper de questions telles que les soins primaires. C’est la raison pour laquelle nous affirmons que l’assurance-médicaments permettra de réduire les coûts. Il ne s’agit pas seulement d’améliorer la qualité de vie, mais aussi de faire en sorte que les gens aient accès aux médicaments dont ils ont besoin. Nous disons toujours que des ordonnances remplies mènent à des salles d’urgence vides.
Mme Barry : Selon la vision du Club des petits déjeuners du Canada relativement au programme national d’alimentation dans les écoles et tel qu’indiqué dans le rapport Ce que nous avons entendu, en ce qui concerne les consultations publiques qui ont été menées avant la mise en œuvre du programme national d’alimentation dans les écoles, il est clairement établi qu’il doit valoriser et promouvoir des normes et des lignes directrices saines et nutritives, en s’appuyant sur le Guide alimentaire canadien et en veillant à ce qu’il recoupe trois écosystèmes, soit l’éducation, la santé et l’agriculture — il s’agit bien entendu du système alimentaire.
Nous encourageons le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux à travailler à titre de parties prenantes multiministérielles sur ce type d’enjeu, car il a des répercussions et des résultats sur ces écosystèmes.
Vous avez raison, et nous pouvons faire mieux. Nos enfants doivent être protégés. Le programme national d’alimentation dans les écoles, le Guide alimentaire canadien, l’éducation nutritionnelle et l’aide apportée aux enfants pour qu’ils acquièrent des compétences culinaires, etc., sont autant d’occasions d’y arriver.
[Français]
Le président : Il reste 30 secondes. On va essayer de limiter les questions à trois, parce que c’est difficile de couper la parole aux gens.
[Traduction]
La sénatrice Galvez : Vous pouvez toujours nous donner d’autres idées.
Ciana Van Dusen, gestionnaire, Défense de l’intérêt public (prévention), Société canadienne du cancer : Je peux dire avec certitude que, comme vous l’avez mentionné, il est important de fournir des médicaments et des remèdes une fois qu’un diagnostic a été posé, mais aussi, comme vous l’avez dit, de faire de la prévention. Nous considérons que les régimes alimentaires riches en sel, en sucres et en gras saturés contribuent à toutes sortes de maladies chroniques, y compris le cancer. Je sais que vous connaissez les restrictions en matière de commercialisation dont nous souhaitons ardemment l’adoption très prochainement pour aider les familles canadiennes et les parents à prendre des décisions pour leurs enfants et pour promouvoir des régimes nutritifs et des habitudes alimentaires saines, mais nous reconnaissons également que l’offre et l’accessibilité des aliments sont des éléments essentiels, et des programmes comme notre programme national d’alimentation dans les écoles vont dans ce sens.
Il ne s’agit pas d’une solution unique ou universelle, mais bien d’une action collective qui rassemble toutes ces choses pour promouvoir des milieux sains pour les Canadiens.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Ma première question s’adresse à Mme Comeau.
[Traduction]
Quel est le pourcentage de bières artisanales exportées aux États-Unis? Je présume que ce produit est surtout consommé à l’échelle locale ou régionale.
Mme Comeau : C’est une très bonne question, sénateur. La bière artisanale est, par sa nature, un produit instable qui doit être conservé au froid. Elle devrait être traitée comme le lait, c’est-à-dire dans une chaîne frigorifique complète du début à la fin du processus. De nombreuses brasseries artisanales canadiennes — c’est-à-dire la majorité d’entre elles — ne pasteurisent pas leurs produits. Cela crée certains obstacles. À l’heure actuelle, puisque ce secteur a connu une croissance rapide, un grand nombre d’entre elles tentent simplement de réussir à l’échelle locale avant d’accroître leurs activités et d’atteindre une taille suffisante pour pouvoir exporter leurs produits. Je pense qu’il y a encore d’énormes possibilités et qu’il y a même de nombreuses possibilités d’exporter non seulement à l’étranger, mais aussi d’exporter d’une province à l’autre, à l’intérieur du Canada.
Le sénateur Dalphond : Ce qui est encore plus difficile.
Mme Comeau : C’est exact. Je crois qu’il y a de nombreuses possibilités d’aider les brasseries artisanales à atteindre la taille et l’envergure qui leur permettront d’exporter leurs produits.
Le sénateur Dalphond : Vous avez exprimé des inquiétudes au sujet des droits de douane. Quel est le problème à cet égard? Il s’agit surtout de produits locaux.
Mme Comeau : Pour les taux de la taxe d’accise?
Le sénateur Dalphond : Oui.
Mme Comeau : Les taux de la taxe d’accise s’appliquent toujours à toutes les bières brassées au Canada. Dans le cadre du projet de loi C-69, les taux de la taxe d’accise ont été réduits de 50 % pour les 15 000 premiers hectolitres. Cela représente un allégement important pour les petites brasseries. Nous souhaitons rendre ce changement permanent et faire passer la limite de 15 000 hectolitres à 500 000 hectolitres.
Le sénateur Dalphond : Vous considérez que ce type de taxe fédérale, qui s’ajoute à la TPS, représente une sorte d’obstacle à la croissance des brasseries artisanales.
Mme Comeau : Oui, c’est exact.
Le sénateur Dalphond : Malgré le fait que cela augmente.
Mme Comeau : Oui, mais il y a de nombreuses difficultés sur tous les plans. Les compétences provinciales examinent la situation et prennent les devants. Elles voient ce que fait le gouvernement fédéral, et le gouvernement fédéral prend l’initiative d’alléger les taux de la taxe d’accise, ce qui nous aide à faire comprendre que les marges et les taxes sur la bière nuisent grandement à l’industrie, surtout en ce moment où les coûts des intrants sont très élevés.
Le sénateur Dalphond : S’agit-il de bières en canettes ou en bouteilles de verre?
Mme Comeau : De nos jours, la majorité des bières sont vendues en canettes.
Le sénateur Dalphond : Les bouteilles représentaient autrefois l’un des coûts. J’ai cru comprendre que les brasseries n’utilisaient pas des bouteilles standards et que cela représentait donc un coût important pour la distribution et la récupération.
Mme Comeau : Oui. Nous avons observé que, pendant la COVID-19, de nombreuses brasseries qui produisaient beaucoup de bière pour la vendre en barils aux bars n’étaient plus en mesure de le faire pendant cette période, et elles se sont donc rapidement converties aux canettes. C’est maintenant devenu la norme dans cette industrie.
Le sénateur Dalphond : Je vous remercie.
[Français]
Monsieur Gagnon, je comprends que le ministre peut, en vertu de la section 30 avec laquelle vous avez un problème, émettre des ordonnances. Je comprends que ces ordonnances seront considérées comme étant des instruments réglementaires. Par conséquent, elles devront être publiées, il y aura une période de consultation, puis une période de prise en considération, sauf si cela ne vise qu’une personne. Quelle est votre préoccupation exactement? Que vous ne serez pas consulté? Le ministre ne peut pas se lever un matin et décider d’émettre une ordonnance.
M. Gagnon : À partir du moment où le ministre juge qu’il y a un risque pour la santé publique, il peut obtenir tous les pouvoirs nécessaires pour agir. Le problème qu’on a, dans ce cas-ci, est qu’il n’y a pas de danger pour la santé publique. Si c’était le cas, il y a de nombreux produits que l’on devrait bannir. Si on regarde le taux d’utilisation du cannabis auprès des jeunes, il est probablement beaucoup plus élevé que pour les sachets de nicotine.
Le sénateur Dalphond : Vous êtes inquiet, mais cela ne peut se faire que par arrêté ministériel, et cela ne se fait pas en se levant un matin; il faut publier, il faut consulter, puis il faut...
M. Gagnon : Cela se peut. Cependant, notre compréhension, c’est que le gouvernement et le ministre ne sont pas obligés de consulter. Il y a eu des discussions avec Santé Canada; ils ont dit qu’ils allaient consulter, mais c’est vraiment l’article 326 du projet de loi qui donne les pleins pouvoirs au ministre de la Santé d’agir. Je sais qu’on a parlé de différents produits en Louisiane, mais c’est un risque réel. C’est pour cela qu’hier, à la Chambre, il y a des députés qui ont posé plusieurs questions et qui sont très préoccupés par le fait qu’on donne autant de pouvoirs à un ministre. Plusieurs groupes se sont dits opposés à ce que le processus soit modifié et à ce qu’on donne ces pouvoirs au ministre. Je comprends ce que vous dites, mais ce n’est pas obligatoire qu’il y ait une consultation. Dans ce cas-ci, il pourrait y en avoir une, mais ce n’est pas obligatoire.
Le président : Merci, monsieur Gagnon.
[Traduction]
La sénatrice MacAdam : Ma question s’adresse à M. Cunningham. Quel est le taux de vapotage actuel chez les jeunes au Canada? Selon vous, qu’est-ce qui explique ce taux?
M. Cunningham : Chez les élèves de la 10e à la 12e année au Canada, ce taux est de 24 %. Il était de 9 % il y a sept ans. C’est donc toute une augmentation.
De nombreux facteurs contribuent à cette situation. Les prix sont très bas comparativement à ceux des cigarettes, d’où l’importance de la taxe sur le vapotage — même si les prix restent bien inférieurs à ceux des cigarettes. Des arômes attrayants, une facilité d’accès — un grand nombre de consommateurs obtiennent ces produits en ligne, car il n’y a pas d’interdiction de vente sur Internet ou de réglementation adéquate en ce qui concerne les restrictions sur les arômes. Il y a donc de multiples facteurs.
La sénatrice MacAdam : D’accord. Selon vous, comment les augmentations de taxes sur les cigarettes électroniques proposées dans le projet de loi C-69 pourraient-elles contribuer à réduire ce taux?
M. Cunningham : Nous savons que les jeunes sont sensibles aux prix plus élevés. C’est évident. La taxe fédérale est en place depuis le 1er janvier 2023. Elle sera bientôt appliquée en Ontario, au Québec, aux Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. Puis, quelques mois plus tard — la date reste à confirmer — suivront l’Alberta, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, l’Île-du-Prince-Édouard et le Yukon.
L’augmentation de la taxe est faible, c’est-à-dire seulement 12 %, mais chaque petite mesure a des effets réels. Au moins, cela se rapproche de l’inflation. Nous pouvons espérer que le gouvernement sera en mesure d’apporter d’autres rajustements plus tard, notamment en ce qui concerne l’échappatoire pour les cigarettes électroniques jetables.
La sénatrice MacAdam : J’ai une autre question. Vous avez mentionné qu’il y a encore énormément de travail à faire pour atteindre l’objectif de la Stratégie canadienne sur le tabac, soit un taux de tabagisme inférieur à 5 % d’ici 2035. Selon vous, quelles sont les mesures supplémentaires les plus importantes qui devraient être prises à l’avenir?
M. Cunningham : Je pense qu’il serait formidable que le gouvernement fédéral et les provinces interdisent les efforts de promotion qui sont toujours en cours. Les fabricants de tabac accordent d’énormes promotions incitatives aux détaillants pour qu’ils vendent de plus grandes quantités de tabac, par exemple des primes s’ils atteignent certains objectifs en matière de volume des ventes. Nous ne devrions pas permettre cela pour ce type de produits.
L’Île-du-Prince-Édouard a fixé à 21 ans l’âge minimum pour la vente de tabac et de cigarettes électroniques. Terre-Neuve-et-Labrador a annoncé la semaine dernière qu’elle allait mener des consultations sur ce sujet, ainsi que sur la proposition d’une génération sans tabac. Trente États américains l’ont déjà fait. Cela se fait à l’échelle nationale aux États-Unis. Toutes les provinces pourraient leur emboîter le pas.
L’Île-du-Prince-Édouard affirme déjà que les cigarettes électroniques ne devraient être vendues que dans des magasins spécialisés. La province mène des consultations sur la possibilité de vendre aussi le tabac dans des magasins spécialisés, comme c’est le cas pour le cannabis. Ce serait une très bonne mesure. Il n’est pas nécessaire que tous les dépanneurs, les stations-service et les épiceries vendent des cigarettes. Ce système est en place pour des raisons historiques.
Ce sont là quelques exemples. Nous pouvons investir énormément dans des programmes supplémentaires, car il y a encore beaucoup à faire.
La sénatrice MacAdam : Je vous remercie.
J’aimerais poser une question à Mme Barry. Quelles sont les sources de financement du Club des petits déjeuners du Canada?
Mme Barry : C’est une bonne question. Je vous remercie beaucoup, sénatrice. Le financement du Club des petits déjeuners du Canada provient principalement de donateurs privés et de particuliers par l’entremise de campagnes de financement, etc. Le gouvernement du Québec fournit actuellement un financement parce que nous offrons nos services à titre de partenaire stratégique et de partenaire d’exécution aux provinces et aux territoires. Ce sont donc nos principales sources de revenus pour le moment.
Un programme national d’alimentation dans les écoles ne transférera pas d’argent aux organisations non gouvernementales et aux intervenants en matière d’alimentation des élèves comme le Club des petits déjeuners du Canada. Je dois dire que c’est un peu dommage. Nous pensons que les accords bilatéraux avec les provinces et les territoires sont la voie à suivre, mais nous pensons que les intervenants en matière d’alimentation des élèves contribuent grandement à faire en sorte que les communautés scolaires sont en mesure de mettre en œuvre des programmes durables et efficaces. En l’absence de ces types d’experts, il est difficile pour nos équipes scolaires d’assurer ce mandat et d’en faire une priorité.
La sénatrice MacAdam : Dans votre déclaration préliminaire, vous avez mentionné qu’à l’heure actuelle, des programmes alimentaires dans les écoles étaient offerts aux enfants dans toutes les provinces.
Mme Barry : Oui, c’est bien cela.
La sénatrice MacAdam : Dans quelle mesure participez-vous à ces programmes dans les provinces?
Mme Barry : Nous participons actuellement à au moins la moitié des programmes à l’échelle du pays. Nous aimerions beaucoup en faire davantage pour les programmes existants et participer à d’autres programmes.
Des centaines d’écoles ont présenté une demande au Club des petits déjeuners du Canada, mais nous ne pouvons pas les intégrer à notre réseau en raison d’un manque de ressources.
Le sénateur Loffreda : Ma question s’adresse aux représentants de la Société canadienne du cancer.
Nous continuerons d’augmenter les taxes — et j’aimerais entendre vos commentaires et ceux du représentant d’Imperial Tobacco Canada à ce sujet — et cela contribue à l’augmentation des ventes illégales de tabac. Des études indiquent que le tabagisme cause le cancer. Ces études sont de plus en plus évidentes et fiables.
Il y a un problème chez nos jeunes, non seulement en ce qui concerne le tabagisme, mais aussi le vapotage, et 24 % des étudiants consomment des produits de vapotage. C’est un nombre élevé. De nombreuses familles ont exprimé des inquiétudes au sujet du vapotage.
Qu’est-ce qui nous échappe? Comment remédier à cette situation? Nous ne faisons qu’augmenter les taxes, ce qui accroît les ventes illégales de tabac. Y a-t-il d’autres solutions?
M. Cunningham : Nous devons adopter une approche globale. Ce qui est intéressant, c’est que le Québec a le taux de taxe le moins élevé au Canada, mais la province semble avoir mis en place de très bonnes mesures de contrôle. Dans son dernier budget, elle a estimé son marché illicite à moins de 10 %. Elle a pris un certain nombre de mesures que d’autres provinces pourraient également envisager de mettre en œuvre.
Il faut prendre des règlements plus sévères. Le problème du vapotage chez les jeunes est tout à fait évitable. Nous pouvons tirer des leçons de la lutte contre le tabagisme. Ces leçons ont été douloureusement apprises, et nous devons tout recommencer pour les produits de vapotage en ce qui concerne les taxes, la réglementation des arômes, l’âge minimum, les endroits où ces produits peuvent être vendus et les techniques de commercialisation. Le gouvernement a dû rattraper son retard, par exemple en ce qui concerne les restrictions relatives à la publicité. Nous pouvons mieux tirer nos leçons et les mettre en œuvre de manière plus énergique.
En ce qui concerne les jeunes, on pourrait facilement fixer l’âge minimum à 21 ans. Il est actuellement de 18 ou 19 ans, sauf à l’Île-du-Prince-Édouard, où il est déjà de 21 ans. Je ne sais pas si Imperial Tobacco est favorable à cette mesure. J’espère que c’est le cas.
Le sénateur Loffreda : J’aimerais connaître l’avis du représentant d’Imperial Tobacco à ce sujet.
M. Gagnon : Nous ne sommes pas nécessairement contre un âge minimal de 21 ans, mais une telle mesure ne résoudra pas le problème. Songez à la raison pour laquelle nous avons légalisé le cannabis au Canada. C’est parce que les jeunes consommaient du cannabis à tout vent. Vous pouvez augmenter l’âge légal, mais si vous ne mettez pas en application les règlements, vous ne réglerez pas le problème du vapotage chez les jeunes.
Le Québec est un bon exemple. En effet, la province a interdit tous les arômes, à l’exception du tabac. À l’heure actuelle, 90 % du marché québécois du vapotage est illégal — en six mois, c’est 90 %. Les seules qui respectent la loi sont les sociétés productrices de tabac.
M. Cunningham a fait un certain nombre d’affirmations sur le vapotage que nous soutenons pleinement. Il faut durcir la réglementation. Il y a trop d’arômes. Des produits de 15 000 bouffées n’ont aucun sens. Nous serions ravis de collaborer avec la Société canadienne du cancer pour élaborer un cadre qui abordera l’enjeu du vapotage chez les jeunes, car c’est un problème.
Nous avons besoin de mesures qui seront applicables; c’est le problème que nous rencontrons.
Le sénateur Loffreda : Je vous remercie.
Je m’adresse au représentant de la Société canadienne du cancer. Y a-t-il quelque chose que nous pouvons faire en matière de sensibilisation? Il est évident que nous n’éduquons pas suffisamment notre population, et j’entends parler de plus en plus de gens qui sont frappés par le cancer. La dépendance est une chose terrible. Faisons-nous du bon travail en matière d’éducation dans les écoles sur les plans du tabagisme et du vapotage?
M. Cunningham : Nous avons besoin d’une stratégie globale qui inclut la fiscalité, la législation et les programmes. Nous ne finançons pas les campagnes dans les grands médias, les campagnes de communication de masse de Santé Canada ou des provinces qui avaient lieu il y a quelques décennies. Je pense qu’il y a plus à faire dans ce domaine.
Le moyen le plus important de communiquer les risques pour la santé est l’emballage lui-même et le produit. De nouvelles mises en garde sur la santé viennent d’apparaître sur le paquet et la cigarette. C’est un moyen de sensibiliser la population.
Nous n’avons pas le même type d’avertissements sur les produits de vapotage. Il n’y en a qu’un seul sur la dépendance. On peut toutefois en faire plus à ce chapitre.
Le sénateur Loffreda : Pourquoi ne pas aller dans nos écoles pour enseigner aux enfants? Ils commencent à vapoter très jeunes. Ils veulent être acceptés. Il y a des problèmes de santé mentale partout, et ils vapotent à un âge très précoce.
Faisons-nous suffisamment bien notre travail? Avez-vous besoin de fonds publics pour entrer dans les écoles et enseigner aux enfants que le vapotage... Je ne suis pas médecin, mais j’ai entendu tellement de préoccupations négatives sur le vapotage et son incidence sur les enfants.
M. Cunningham : L’éducation en milieu scolaire fait partie de la réponse. Le tabagisme et le vapotage sont déjà dans le programme scolaire. Je pense que cette option pourrait être évaluée.
Tout ce marketing sape les efforts des enseignants en classe, ou des parents, de sorte que réglementer la commercialisation de ces cigarettes électroniques jetables et très bon marché pourrait accroître l’efficacité de la sensibilisation.
La sénatrice Kingston : Monsieur Staples, j’aimerais commencer par dire que j’ai longtemps été associée au Syndicat des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick et à la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers. Je suppose donc que vous savez d’emblée ce que je pense de cette question. Ces gens se réjouissent bien sûr que les provinces et les territoires collaborent pour établir un régime universel à payeur unique à l’avenir. C’est un début. C’est la première phase.
Ma question est la suivante : à votre avis, quelle est la prochaine étape à franchir pour mettre en place un régime complet d’assurance-médicaments au Canada?
M. Staples : Merci beaucoup, sénatrice Kingston. Je vous remercie également d’avoir rencontré nos membres qui étaient ici en février, de même que tous les sénateurs qui ont échangé avec nos bénévoles ayant comparu plus tôt cette année pour parler de l’assurance-médicaments.
Il est vrai que les infirmières ont joué un rôle clé, et qu’elles sont nos partenaires les plus proches dans la mise en place d’un régime national universel d’assurance-médicaments à l’échelle provinciale et nationale. Ma patronne est une infirmière, et elle dit qu’elle a vu des gens arriver à l’hôpital. Il y a une expression pour cela, et c’est le non-respect de la médication en raison des coûts. C’est quand un patient n’a pas les moyens de payer son médicament et ne le prend pas. Ces gens finissent littéralement aux urgences. Elle en a été témoin plus d’une fois.
Pour l’instant, nous sommes très satisfaits du budget. La somme de 1,5 milliard de dollars qui s’y trouve nous convient. Ce montant peut changer au fil du temps, car la prochaine étape consiste à obtenir l’accord des provinces. Une fois que le budget sera adopté, ainsi que le projet de loi C-64, la Loi concernant l’assurance-médicaments — si nous pouvons le faire rapidement —, je pense qu’il y a un certain nombre de provinces qui sont prêtes et désireuses d’entamer ces négociations bilatérales.
Nous sommes certainement prêts à travailler avec les dirigeants de ces provinces aussi. Nous connaissons des gens dans les organisations d’un bout à l’autre du pays. Nous pourrions probablement citer maintenant plusieurs provinces qui, je pense, souhaiteraient aller en ce sens.
Faisons en sorte que le programme soit financé. Mettons en place le cadre juridique, puis travaillons avec les provinces pour mettre en branle les négociations bilatérales. Nous procéderons ensuite à une évaluation. Le projet de loi C-64 prévoit la constitution d’un comité d’experts qui se penchera sur le déroulement du programme, les enseignements tirés et ce qu’on appelle un « projet pilote ».
Je pense que bien des gens voudront que d’autres classes de médicaments soient ajoutées. J’ai entendu des personnes qui traitent des allergies, des allergies alimentaires et d’autres choses de ce genre. Je sais que la Fondation des maladies du cœur du Canada est une autre organisation qui a signé la déclaration. Elle souhaite avoir un tel régime.
Je pense que nous verrons immédiatement beaucoup d’autres groupes de patients venir dire : « En fait, le régime fonctionne vraiment pour les contraceptifs, et aussi pour le diabète. Qu’en est-il de nos patients? »
La sénatrice Kingston : Que pensez-vous de l’élaboration d’une bonne liste nationale qui relèverait de l’Agence canadienne des médicaments? Est-ce important dans le cadre de la conception du régime?
M. Staples : Nous sommes ravis que l’Agence canadienne des médicaments, ou ACM, ait été créée. Elle planchera sur une liste nationale, et je sais que de nombreuses études ont été réalisées sur de telles listes.
Lorsque je parle à des personnes de l’ACM, par exemple, qui ont participé à ces études, je constate que ce n’est apparemment pas sorcier. Il est assez facile d’élaborer des listes. Chaque province en possède. Il existe un certain nombre de modèles qui pourraient être mis en place. Je ne suis pas un expert, mais mon conseil d’administration en compte. Ils parlent de médicaments sécuritaires en guise de point de départ.
Nous voulons que ce soit un plan complet, et il faudra évaluer ce qui y sera inclus et quels seront les conseils en matière de prescription. Tout ce volet viendra plus tard. Nous souhaitons que les médicaments essentiels soient ajoutés dès que possible.
La sénatrice Kingston : Lorsque vous vous adressez aux provinces, vous pouvez leur faire savoir que c’est là qu’il est possible de réaliser des économies, avec les achats en gros et le reste.
M. Staples : Je le ferai absolument. Je suis tout à fait d’accord.
La sénatrice Ross : Madame Comeau, pensez-vous qu’il est exact de prédire que les microbrasseries bénéficieront d’un allégement fiscal de plus de 86 000 $ sur une période de deux ans?
Mme Comeau : C’est une excellente question. Je vous en remercie.
La taille de la brasserie a un impact important sur l’ampleur des économies. Étant donné qu’il y a une réduction de 50 % du taux du droit d’accise jusqu’à 15 000 $, si vous êtes une petite brasserie qui produit, disons, 1 000 ou 2 000 hectolitres, l’économie serait de l’ordre de 2 000 ou 3 000 $ par année. Une brasserie de 15 000 hectolitres économisera donc 82 000 ou 83 000 $ par an, en effet.
Cette économie diminuera au fil des ans, car les taux du droit d’accise sont liés à l’inflation, de sorte que les taux continueront d’augmenter et que les économies fléchiront.
La sénatrice Ross : Avez-vous l’impression qu’il pourrait y avoir un allégement après deux ans? Pensez-vous que cet allégement pourrait devenir permanent, ou que faudrait-il pour qu’il le soit?
Mme Comeau : Bien sûr, nous espérons et réclamons que cette mesure devienne permanente et que le seuil de 15 000 hectolitres soit augmenté. Nous aimerions viser 500 000 hectolitres.
La sénatrice Ross : Expliquez-moi la différence entre un microbrasseur et un brasseur.
Mme Comeau : Au sein de notre association, lorsque nous parlons de nos microbrasseries canadiennes, nous faisons référence à celles qui sont détenues et exploitées de façon indépendante. Nous nous dissocions des grandes multinationales, plus communément appelées les grandes brasseries. Lorsque je parle de brasseurs ou de microbrasseurs dans mon témoignage d’aujourd’hui, il s’agit d’une seule et même idée.
La sénatrice Ross : Connaissez-vous d’autres produits pour lesquels la taxe augmente annuellement de la même façon?
Mme Comeau : Il est très inhabituel que des augmentations de taxes se produisent année après année sans débat à la Chambre ou au Sénat. Le tabac en ferait partie, mais il n’est certainement pas courant d’avoir de telles hausses sans discussion ni débat.
La sénatrice Ross : J’ai une dernière question à vous poser. Comment pourrait-on amplifier l’incidence sur ces petits brasseurs artisanaux? Outre l’élargissement du programme ou l’augmentation à 500 000 hectolitres, quelles autres modifications fiscales ou autres mesures aimeriez-vous voir?
Mme Comeau : Il est certain que nous souhaitons une réforme de la taxe d’accise. Je pense que nous avons la possibilité de travailler avec le gouvernement et d’examiner les différentes politiques en place. Lorsqu’il est question de réexaminer la Loi sur la taxe d’accise, qui est dépassée, nous sommes tout à fait disposés à en discuter, à nous réunir et à travailler en partenariat pour trouver une situation où tout le monde serait gagnant.
La sénatrice Ross : Merci beaucoup.
La sénatrice Pate : Monsieur Staples, j’aimerais revenir sur les questions de ma collègue, la sénatrice Kingston.
Lorsque vous avez comparu devant le comité de la Chambre sur cette question, vous avez fait l’observation suivante :
[…] Quand j’entends des témoins dire que le système fonctionne très bien, je demande : « Pour qui fonctionne-t-il très bien? » […] Il semble bien fonctionner pour l’industrie et pour les sociétés d’assurances, mais il ne fonctionne pas bien pour l’ensemble des Canadiens. C’est pour cette raison que ce projet de loi sur l’assurance médicaments est si important. […]
Je suis curieuse de savoir si vous pouvez en dire plus là-dessus, en quelque sorte, et s’il y a d’autres éléments que vous voulez vous assurer que nous prenons en compte. Je poserai ma deuxième question en même temps pour gagner du temps.
Comme vous le savez peut-être, je suis la marraine au Sénat du projet de loi C-64, et je comprends que certains détracteurs de l’assurance-médicaments laissent entendre que le projet de loi n’est pas nécessaire, sous prétexte que 97 % des Canadiens sont déjà couverts. Les données montrent que ce n’est pas le cas. Par ailleurs, certains de ceux qui s’y opposent affirment que le projet de loi limitera les choix des Canadiens en matière de médicaments.
Je suis curieux de savoir ce que vous répondriez à ces déclarations et si vous pouviez discuter en particulier de l’importance et souligner — vous l’avez déjà fait — tout autre point que vous souhaitez aborder concernant l’importance d’un système public d’assurance-médicaments à payeur unique.
M. Staples : Je vous remercie. Ces remarques ont été faites dans le cadre de présentations d’une agence de lobbying représentant des assurances et d’une autre qui s’adressait à des fabricants de médicaments. J’ai été vraiment frappé par leur manque de compassion. On se contentait de dire que la plupart des gens étaient favorables à cette mesure, qu’elle était nécessaire et qu’il ne fallait pas interférer avec la modélisation. Même les fabricants de médicaments ont dit — nous parlions des achats en gros, comme l’a mentionné la sénatrice — « Oh, nous n’aimons pas les achats en gros. Nous voulons que les choses restent comme elles le sont. » Des personnes bien au fait nous affirmaient que ce n’était pas ce qu’elles avaient observé.
Bien sûr, nous sommes conscients qu’il s’agit d’un pays libre et que les autres sont libres de dire ce qu’ils pensent. Nous sommes confrontés à ces arguments, mais nous sommes ici pour parler de ce que nous savons. Prenons l’exemple de Statistique Canada : l’organisme mène ses propres enquêtes et constate que 20 % des gens ont des problèmes.
J’ai lu dans le Globe and Mail qu’un médicament, le Trikafta, engouffre une part énorme des budgets publics. Le traitement coûte 300 000 $ par personne, alors que son prix de fabrication se situe entre 5 000 et 6 000 $. Il s’agit là d’un profit faramineux. Je sais que la recherche et le développement sont inclus dans le prix, mais on dépasse tout simplement les bornes. Nous devons permettre aux gens d’avoir accès aux médicaments et réduire le coût global.
Qu’en est-il de cette couverture d’assurance à 97 %? Mes collègues qui travaillent dans le domaine de la santé sexuelle m’ont éclairé sur ce point. Ils disent que des gens ont peut-être besoin de contraceptifs, mais que la couverture en question, c’est l’assurance d’un mari violent ou des parents d’une adolescente. Cette couverture ne leur sert à rien parce qu’il y a maintenant un enjeu de confidentialité entre la personne qui a besoin de contraceptifs et son médecin. C’est pourquoi cette classe particulière de médicaments est si importante, et c’est ici que le programme sera utile.
La sénatrice Pate : On nous a aussi dit que les détenus n’étaient toujours pas couverts par les dispositions de la Loi canadienne sur la santé. Un certain nombre de groupes ont avisé notre bureau que le fait de ne pas inclure dans la définition d’un assuré en vertu de cette loi les détenus des pénitenciers fédéraux constitue une violation des normes minimales internationales pour le traitement des détenus.
Seriez-vous d’accord pour dire qu’il est temps de mettre fin à la discrimination des prisonniers fédéraux dans ce contexte?
M. Staples : C’est un point très intéressant. Je pense que nous souhaitons élargir à tous les groupes l’interprétation de la Loi canadienne sur la santé, qu’il s’agisse des détenus ou des personnes sans papiers au Canada, un autre volet sur lequel nous avons travaillé. L’interprétation doit être aussi large que possible. Si vous vivez ici, vous aurez accès au système de santé public dont nous bénéficions tous.
La sénatrice Pate : Merci beaucoup.
Le président : Je vous remercie. Il nous reste deux minutes. Je vais poser une question à Mme Comeau.
[Français]
C’est un beau privilège et un bel avantage pour les microbrasseries, mais dans ma région, il y a également de petites cidreries, des producteurs de gin et des producteurs de whisky. Ils travaillent beaucoup avec les microbrasseries dans leur mise en marché de produits, dans l’accueil sur le plan du tourisme et dans les dégustations. Est-ce qu’il y a une raison pour laquelle ce sont seulement les microbrasseries? Est-ce parce que vous êtes plus efficaces par rapport à la représentation ou parce qu’il y a un enjeu qui m’échappe?
[Traduction]
Mme Comeau : Merci beaucoup. C’est une excellente question.
Je pense que, ce que vous constatez, c’est que les consommateurs ont tendance à élargir leur expérience de consommation.
Peut-être qu’ils iront un jour dans une microbrasserie, et le lendemain dans une cidrerie ou une distillerie. Ce qui est légèrement différent, cependant, c’est que l’industrie de la bière artisanale au Canada est plus mature qu’un grand nombre de ces petites distilleries. Il s’agit d’un nouveau segment émergent. Nous sommes beaucoup plus nombreux, et l’union fait la force. Nous sommes peut-être un peu mieux organisés. Néanmoins, nous constatons certains des défis que nous rencontrons chez les autres producteurs artisanaux aussi.
Vous avez parlé de la collaboration. Notre secteur est incroyablement collaboratif et novateur. La possibilité de travailler avec d’autres brasseries, ou avec des cidreries ou des distilleries, est une chose que nous voyons tout le temps. Nous encourageons certainement cette collaboration.
[Français]
Le président : Merci. Cela conclut notre réunion. Si l’édifice tient toujours, nous aurons une réunion à 18 h 45 ce soir pour poursuivre notre étude. Je remercie tous les témoins de s’être déplacés et d’avoir répondu à toutes nos questions. Je remercie également toute l’équipe.
Honorables sénateurs, je veux vous rappeler qu’une petite partie de la séance se tiendra à huis clos ce soir pour que l’on commence à donner des directives sur le rapport à venir. Merci.
(La séance est levée.)