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NFFN - Comité permanent

Finances nationales


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 25 octobre 2022

Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 9 h 1 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier la teneur du projet de loi C-31, Loi concernant des mesures d’allégement du coût de la vie relative aux soins dentaires et au logement locatif.

Le sénateur Percy Mockler(président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je veux souhaiter la bienvenue à tous les sénateurs ainsi qu’à tous les Canadiens qui nous regardent sur sencanada.ca.

[Français]

Je m’appelle Percy Mockler, sénateur du Nouveau-Brunswick, et je suis président du Comité sénatorial permanent des finances nationales.

[Traduction]

Je vais maintenant demander à mes collègues de bien vouloir se présenter.

Le sénateur Loffreda : Sénateur Tony Loffreda, de Montréal, au Québec.

La sénatrice Pate : Kim Pate, d’ici même sur les rives de la Kitchissipi, territoire qui n’a été ni cédé ni abandonné par les Algonquins anishinabes.

La sénatrice Omidvar : Ratna Omidvar de Toronto, en Ontario.

La sénatrice Anderson : Sénatrice Anderson, des Territoires-du-Nord-Ouest.

Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l'Ontario.

La sénatrice Duncan : Pat Duncan, du Yukon.

Le sénateur Harder : Peter Harder, de l'Ontario.

La sénatrice Marshall : Elisabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Smith : Larry Smith, du Québec.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.

[Traduction]

Le président : Nous commençons ce matin notre étude de la teneur du projet de loi C-31, Loi concernant les mesures d’allégement du coût de la vie relatives aux soins dentaires et au logement locatif. Ce projet de loi a été envoyé au comité le 20 octobre 2022 par le Sénat du Canada.

Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui M. Yves Giroux, directeur parlementaire du budget. J’aimerais que mes collègues sénateurs et les Canadiens qui nous regardent sachent que M. Giroux était censé être à Halifax aujourd’hui. Lorsque nous avons communiqué avec lui hier, il s’est immédiatement rendu disponible avec son équipe.

Merci beaucoup, monsieur Giroux. Toutes les fois que nous vous avons convoqué, vous avez donné suite à notre invitation.

M. Giroux est accompagné de deux analystes-conseils, Mme Busby et M. Ammar. Bienvenue à vous tous et merci d’avoir accepté notre invitation à témoigner devant le Comité sénatorial des finances nationales. Il est toujours enrichissant de vous recevoir avec votre équipe, monsieur Giroux. Votre témoignage nous aide toujours à mettre l’accent, au bénéfice de tous les Canadiens, sur quatre grands principes : la transparence, la reddition de comptes, la fiabilité et la prévisibilité dans la gestion financière du Canada.

Nous allons maintenant entendre vos observations préliminaires, après quoi nous passerons aux questions des sénateurs.

[Français]

Monsieur Giroux, la parole est à vous.

Yves Giroux, directeur parlementaire du budget, Bureau du directeur parlementaire du budget : Merci, monsieur le président.

Honorables sénatrices et sénateurs, nous vous remercions de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd’hui. Nous sommes heureux d’être ici pour discuter de notre analyse du projet de loi C-31, Loi concernant des mesures d’allègement du coût de la vie relatives aux soins dentaires et au logement locatif, qui a été publiée dans deux notes distinctes sur l’évaluation du coût d’une mesure législative, les 14 et 20 octobre 2022.

Je suis accompagné aujourd’hui de Carleigh Busby, conseillère-analyste principale responsable de l’évaluation du coût du supplément unique au programme d’Allocation canadienne pour le logement, et de Nasreddine Ammar, conseiller-analyste principal de l’évaluation du coût de la Prestation dentaire canadienne.

La partie 1 du projet de loi C-31 propose l’établissement d’une Prestation dentaire canadienne (PDC), qui prévoit des paiements initiaux non imposables pour couvrir les frais dentaires des enfants de moins de 12 ans, en fonction du revenu familial net rajusté. Nous estimons le coût de la Prestation dentaire canadienne à 703 millions de dollars pour les deux périodes de prestations, qui s’étendent du 1er octobre 2022 au 30 juin 2024. Nous avons également publié un tableau supplémentaire sur le coût de la PDC par province.

[Traduction]

La partie 2 du projet de loi C-31 édictera la Loi sur la prestation pour logement locatif. On y prévoit la création d’une prestation unique de 500 $ à l’intention des locataires canadiens à faible revenu. Nous estimons que cette mesure augmentera les dépenses fédérales de 940 millions de dollars au cours de l’exercice 2022-2023, avec environ 1,7 million de bénéficiaires. Nos estimations indépendantes sont quelque peu différentes des chiffres du gouvernement. Malheureusement, nous ne sommes pas en mesure de vous fournir une conciliation complète de l’écart entre ces estimations, car le gouvernement n’a pas encore publié les détails ou la méthodologie à l’appui de ses calculs.

Mme Busby, M. Ammar et moi-même nous ferons maintenant un plaisir de répondre à vos questions sur notre analyse du projet de loi C-31 ou sur tout autre aspect du travail du Bureau du directeur parlementaire du budget. Merci.

Le président : Avant de passer aux questions, j’aimerais demander aux membres du comité et aux témoins présents dans la salle de ne pas trop se pencher sur leur microphone ou d’enlever leur oreillette s’ils s’apprêtent à le faire. Nous éviterons ainsi tout effet acoustique pouvant avoir des répercussions néfastes pour le personnel du comité dans la salle.

Nous pouvons maintenant passer aux questions des sénateurs. Nous tiendrons un seul tour de questions au cours duquel les sénateurs auront droit à un maximum de cinq minutes chacun. Nous attendons un second groupe de témoins à 10 heures. Je vous demande donc de poser vos questions directement aux témoins.

Je prierais par ailleurs nos témoins de bien vouloir répondre de façon succincte. La greffière m’avisera quand le temps sera écoulé.

La sénatrice Marshall : Merci, monsieur Giroux, d’être des nôtres aujourd’hui avec vos collaborateurs.

J’aimerais que nous parlions d’abord du programme pour le logement. Je pense que vous avez déjà répondu partiellement à ma question. Pour cette prestation, le gouvernement a estimé les coûts à 475 millions de dollars alors que votre estimation est de 940 millions de dollars. Dans vos observations, vous avez indiqué ne pas pouvoir faire une conciliation complète. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il y a un écart aussi prononcé entre les coûts estimés par le gouvernement dans le budget et ceux avancés dans votre note d’information?

M. Giroux : Je ne saurais vous le dire pour la prestation au logement. Dans le cas de la prestation dentaire, nous pouvons présumer que l’écart est en partie attribuable aux frais d’administration. Mais nous ne pouvons pas le savoir avec précision pour ce qui est de la prestation au logement, à moins que Mme Busby puisse nous en dire davantage. Je crois d’ailleurs que c’est le cas.

Mme Carleigh Busby, analyste-conseil, Bureau du directeur parlementaire du budget : Je tiens à préciser que le montant de 475 millions de dollars que vous avez cité correspond à l’estimation initiale fournie par le gouvernement dans le budget. Le gouvernement a depuis actualisé cette estimation qui est passée à 1,2 milliard de dollars avec 1,8 million de bénéficiaires.

La sénatrice Marshall : Sauriez-vous nous dire comment on est ainsi passé de 475 millions de dollars à 1,2 milliard de dollars? C’est vraiment une énorme différence.

Mme Busby : Malheureusement, je l’ignore.

La sénatrice Marshall : Merci beaucoup.

Avez-vous une ventilation par province? Est-ce que vous pourriez fournir ces renseignements au comité? J’aimerais bien en prendre connaissance, car les régimes de soins dentaires varient d’une province à l’autre. Certaines provinces vont ainsi recevoir une aide plus considérable que d’autres, et j’aimerais bien voir à quoi cela pourra ressembler. Merci.

Vous avez par ailleurs décrit la méthodologie utilisée pour le programme de prestation au logement.

Avez-vous une idée de la façon dont les responsables gouvernementaux vont s’y prendre pour confirmer que les personnes qui présentent une demande sont bel et bien admissibles à la prestation?

M. Giroux : D’après ce que j’ai pu voir dans le projet de loi, on va exiger une attestation indiquant le montant du loyer payé. Le gouvernement précisera sans doute ultérieurement tous les détails de l’administration du programme.

La sénatrice Marshall : Il y a tout un éventail de programmes de subventions au loyer offerts par les différentes provinces.

M. Giroux : Effectivement.

La sénatrice Marshall : Si un demandeur bénéficie déjà d’une subvention semblable, comment pourra-t-on faire la vérification pour s’assurer qu’il n’est pas indemnisé en double?

M. Giroux : Ce sera une considération importante pour l’administration du programme.

Pour revenir à votre question concernant la ventilation provinciale pour la prestation au logement, je dois vous dire que nous l’avons affichée ce matin même sur notre site Web en nous disant que cela pourrait sans doute intéresser les sénateurs.

La sénatrice Marshall : Oh, c’est sur votre site?

M. Giroux : Oui.

La sénatrice Marshall : C’est là que j’aurais dû chercher cette ventilation. Merci.

Parlons maintenant de la prestation dentaire. Qu’entendez-vous exactement par « revenu net ajusté » dans votre note sur l’évaluation du coût de cette mesure législative?

Nasreddine Ammar, analyste-conseil, Bureau du directeur parlementaire du budget : Nous utilisons la même définition de « revenu net » que pour l’Allocation canadienne pour enfants. Le « revenu net ajusté » correspond au revenu net moins les montants reçus précédemment au titre de la Prestation universelle pour la garde d’enfants.

La sénatrice Marshall : Ce sont les seuls montants déduits du revenu net?

M. Giroux : Il s’agit du revenu net ajusté après que certaines sommes, comme — sauf erreur de ma part — les cotisations à un REER et à un régime de pensions, aient été déduites du revenu total.

La sénatrice Marshall : Pour ce qui est de la prestation dentaire, vous nous avez fait part de vos prévisions, mais j’aimerais savoir si vous avez tenu compte du coût réel. Comment pouvez-vous déterminer quel sera le coût si un bénéficiaire est admissible à un autre programme ou si un enfant est couvert par le régime de soins dentaires d’une autre personne? Comment prenez-vous ces éléments en considération?

M. Giroux : Nous avons examiné les données déjà existantes sur l’utilisation des services dentaires ainsi que sur leur coût moyen. Certaines données sont ventilées par groupe d’âge, et nous avons aussi des chiffres sur la proportion d’enfants bénéficiant d’un régime d’assurance privé.

Nous avons aussi pris en considération les régimes provinciaux de prestations assurant une couverture aux enfants jusqu’à un certain âge, et je peux vous dire qu’ils varient d’une province à l’autre. Nous avons recoupé toutes ces informations en procédant de plus à un rajustement, car la mise en place d’un régime donnant accès à des prestations fait généralement augmenter le recours aux services dentaires. Notre estimation tient donc compte de tous ces éléments.

La sénatrice Marshall : Est-ce que vous avez affiché sur votre site Web la ventilation par province aussi bien pour la prestation dentaire que pour la prestation au logement? Est-ce qu’on peut les voir toutes les deux?

M. Giroux : Oui, il y a deux notes distinctes.

Le sénateur Smith : Bienvenue à vous, monsieur Giroux, ainsi qu’à vos collaborateurs.

Vous avez utilisé les données de l’Enquête canadienne sur le revenu de 2018 et du recensement de 2016 pour estimer le coût de la prestation au logement qui est prévue dans le projet de loi dont nous sommes saisis. Vous notez dans votre analyse des coûts que les données provenant de ces deux sources ne nous renseignent pas sur la population actuelle de déclarants au Canada.

Pour bien accomplir son travail, il est important que votre bureau puisse compter sur des données de qualité qui sont également à jour. J’aimerais savoir ce que vous pensez des difficultés auxquelles se heurtent les gouvernements lorsqu’il s’agit de trouver les données nécessaires pour recenser toutes les personnes admissibles lors de la mise en œuvre de programmes semblables.

M. Giroux : Il faut effectivement se montrer très prudent lorsqu’on utilise des données qui remontent à quelques années. Cela nous oblige à nous en remettre à des hypothèses quant à la croissance démographique et à la croissance des revenus. Nous formulons ainsi des hypothèses sur la croissance de certains segments de la population — en l’espèce, les enfants de moins de 12 ans — ainsi que sur la croissance du revenu des ménages dont ces enfants font partie. Comme nous avons recours à des hypothèses, il se peut que nous nous écartions de la réalité par quelques points de pourcentage.

Tout cela laisse planer une part d’incertitude quant à nos estimations, mais le problème se pose également pour le gouvernement, à moins qu’il ne dispose de données plus récentes qu’il ne nous aurait pas communiquées, mais cela m’étonnerait. Nous travaillons sans doute avec les mêmes ensembles de données pour ce qui est du revenu et de la population, mais il n’en demeure pas moins que cela vient effectivement avec son lot de difficultés.

Le sénateur Smith : Est-ce que le problème est plus répandu dans les secteurs ruraux pouvant être plus difficiles d’accès comparativement aux grandes régions métropolitaines?

M. Giroux : Plus on essaie d’entrer dans les détails et de s’intéresser à de petits segments de la population, plus le degré d’incertitude augmente.

À titre d’exemple, si nous effectuons une estimation des coûts à l’échelle nationale, nous obtenons un degré de certitude plus élevé qu’à l’échelle provinciale. Moins une province est peuplée, plus il est difficile de prévoir avec précision l’accroissement de sa population étant donné les gens qui peuvent migrer d’une province à l’autre et qui ne sont pas pris en compte dans nos estimations. Il en va de même pour la croissance des revenus.

Le sénateur Smith : Le projet de loi C-31 renferme des dispositions portant sur les violations et les pénalités pouvant être imposées à quiconque touche des prestations auxquelles il n’a pas droit en faisant une déclaration fausse ou trompeuse. De telles déclarations ont été fréquentes pendant la pandémie avec la Prestation canadienne d’urgence, ou PCU, et les subventions pour le loyer.

J’aimerais que vous nous disiez si votre analyse de ces programmes a pris en considération les risques de déclaration fausse et trompeuse et s’il s’agit pour vous d’une question pouvant être préoccupante.

M. Giroux : C’est une bonne question. Notre analyse n’a pas tenu compte des risques de fraude, car ceux-ci dépendent dans une large mesure de la façon dont le programme est administré par le ministère.

Cependant, le projet de loi exige que le demandeur produise une attestation indiquant qu’il a reçu des soins dentaires ou qu’il a l’intention d’en recevoir. Comme les risques de fraude seront sans doute élevés, il faudra mettre en place des mesures efficaces pour faire appliquer la loi et procéder aux vérifications requises.

Vu que l’admissibilité sera probablement fondée sur la production d’une attestation, l’administration devra effectivement se montrer stricte. Sinon, il pourrait y avoir des abus. C’est l’une des choses qui me préoccupent personnellement à titre de contribuable.

Le sénateur Smith : Si l’on revient à ce qui s’est passé avec la PCU, je pense que le gouvernement voulait alors se dépêcher de verser cet argent à ceux qui en avaient besoin. C’est la raison pour laquelle je pose la question. Je me demande si l’on prévoit un certain pourcentage dans les estimations pour s’assurer d’être bien conscient du risque de fraude afin d’éviter de se faire berner comme la dernière fois.

M. Giroux : Nous n’avons pas inclus un pourcentage pour la fraude à proprement parler. Nous avons présumé que le recours aux services allait augmenter, car la nouvelle prestation, conformément à l’objet du projet de loi, fera en sorte que ces services seront essentiellement sans frais. Nous n’avons pas prévu un montant additionnel pour la fraude.

Le sénateur Smith : Merci.

Le sénateur Harder : Merci à nos témoins. Grâce à votre travail, il est plus facile pour le Sénat comme pour les Canadiens de savoir à quoi s’en tenir pour ce qui est des coûts.

Pouvez-vous nous dire si vous vous êtes intéressés aux coûts actuels des problèmes d’accès aux soins dentaires pour notre système de santé?

M. Giroux : C’est une très bonne question, mais nous n’avons pas considéré cet aspect. Nous n’avons pas cherché à savoir quels avantages peut procurer ce projet de loi. Comme il est bien établi que le recours aux soins dentaires permet d’éviter certains coûts, notre examen a porté exclusivement sur les coûts du projet de loi lui-même.

Le sénateur Harder : Vous serait-il possible d’étendre la portée de votre examen pour tenir compte de ces coûts?

M. Giroux : Ce serait chose possible, mais l’exercice exigerait des ressources considérables. Il faudrait alors formuler des hypothèses quant au nombre de personnes qui se prévaudront de cette mesure et aux types de coûts qui sont évités lorsque les enfants de moins de 12 ans voient plus régulièrement le dentiste. C’est donc envisageable, mais il faudrait voir exactement combien cela pourrait coûter.

Le sénateur Harder : À mon avis, il serait bon que les Canadiens puissent voir ainsi les deux côtés de la médaille en sachant que certains — dont je fais partie — ne vont pas manquer de soutenir que les avantages pour notre système de santé dépassent largement les coûts que nous allons engager pour étendre la couverture des soins dentaires.

J’aimerais aussi savoir si vous avez cherché à évaluer dans quelle mesure notre réseau de soins dentaires est capable d’absorber l’accroissement de la demande qu’entraînera la couverture étendue de ces soins et à déterminer quel pourrait être l’incidence sur les coûts globaux.

M. Giroux : Nous ne nous sommes pas demandé si les dentistes canadiens sont capables de répondre à la demande. Et cela ne se limite pas aux dentistes, car il y a aussi les orthodontistes et les autres professionnels en soins dentaires. Nous avons présumé que la capacité était suffisante. C’est peut-être le cas, mais il se peut également que ce soit plus problématique dans certaines régions du pays.

Nous avons présumé que, dans l’ensemble, la capacité non utilisée est suffisante au sein de notre réseau de soins dentaires.

Le sénateur Harder : Pouvez-vous vous pencher sur la question et nous confirmer éventuellement que c’est bel et bien le cas?

M. Giroux : Nous pouvons certes le faire si c’est ce que souhaite le comité et s’il adopte une motion en ce sens — et nous pouvons en faire autant pour la question des avantages pour le régime de santé.

Le sénateur Harder : Je pense que ce sont deux éléments d’information qui seraient fort utiles pour nous. Je laisse au comité dans son ensemble le soin de trancher quant à savoir si nous allons ou non demander ces renseignements. Je crois que cela nous serait d’une grande utilité.

La sénatrice Pate : Merci à nos témoins. Je conviens avec mes collègues que votre contribution nous est précieuse.

Je vais poursuivre dans le sens des considérations que viennent de soulever les sénateurs Harder et Smith. Je m’intéresse moi aussi à l’envers de la médaille. Parallèlement aux économies à long terme pour notre système de santé du fait de la diminution du nombre de nouveaux problèmes associés à la santé dentaire, on peut se demander si les ressources déployées sont suffisantes. Si on considère ce qu’il en coûte pour la plupart d’entre nous en services dentaires annuellement, 650 $, c’est bien peu. On parle du fait que l’admissibilité est fondée sur une attestation, mais je dois dire que ce n’est pas tant la fraude qui m’inquiète dans ce contexte. Lorsqu’il peut s’agir de familles qui arrivent difficilement à payer leur loyer et à mettre de la nourriture sur la table, j’ai plutôt tendance à me demander si l’aide offerte est suffisante.

Par ailleurs, si une personne bénéficie d’un régime provincial, ce qui est moins probable étant donné que cette mesure cible plus précisément la classe moyenne — et vous me corrigerez si j’ai tort à ce sujet —, je crains — comme vous l’avez vous-même souligné dans vos rapports — que la province cherche à récupérer une partie de ces sommes.

J’ai jeté rapidement un coup d’œil à l’information que vous avez affichée ce matin. Je n’y ai vu aucune référence à une telle analyse sur d’éventuelles mesures de recouvrement par les provinces avec une possible restriction de l’accessibilité à la prestation dentaire.

Je suis consciente que c’est une question assez vaste, mais elle s’inscrit dans la foulée des interventions de mes collègues. Toute précision supplémentaire à ce sujet nous serait extrêmement utile.

M. Giroux : Merci. À ma connaissance, aucune province n’a laissé entendre, en réaction au lancement du programme fédéral, qu’elle récupérerait l’argent de ses propres programmes. C’est une éventualité que ne confirme aucune déclaration.

En ce qui concerne le bien-fondé des 650 $, la moyenne des dépenses semble inférieure. Sans le moindre doute, il arrive peut-être — et un pourcentage important de fois — que les dépenses soient supérieures.

M. Ammar possède plus de renseignements. Il a étudié plus en détail le montant moyen des dépenses.

M. Ammar : Merci. Pour la prestation dentaire, la répartition de la population par groupe de revenus n’a pas révélé que le groupe majoritaire était constitué des familles au revenu net inférieur à 70 000 $. La plupart des enfants admissibles recevront donc le maximum de 650 $. Mais, si on combine ce groupe à celui des enfants appartenant à d’autres familles à revenu supérieur, la moyenne des prestations sera inférieure — peut-être aux environs de 500 ou de 550 $.

La sénatrice Pate : En ce qui concerne la prestation pour le logement locatif, ce problème est-il le même pour la récupération des montants ou en avez-vous vu la possibilité? Parce que, certainement, si on occupe des logements subventionnés ou dont le loyer est indexé sur le revenu, un effet direct chez certains pourrait être concevable.

M. Giroux : Je le répète, à ce que je sache, aucune province n’a déclaré vouloir recouvrer l’argent. Mme Busby dit que non. Comme elle ne me donne pas de coups de coup de pied sous la table, ça laisse entendre qu’elle n’est au courant d’aucune intention en ce sens.

La sénatrice Pate : Monsieur le président, si je pouvais me permettre de le suggérer, l’analyse proposée par le sénateur Harder pourrait-elle comprendre une extrapolation fondée sur les recouvrements qui ont visé la Prestation canadienne d’urgence et d’autres prestations dont certaines ont constitué une véritable aubaine pour des provinces, par l’exclusion de certains bénéficiaires ou la récupération de leurs prestations?

M. Giroux : Nous explorerons cette possibilité.

La sénatrice Pate : Merci.

Le sénateur Boehm : Je souhaite la bienvenue à M. Giroux et à son équipe. Je voulais continuer de suivre la piste ouverte par le sénateur Harder et que la sénatrice Pate vient de parcourir. Je tournerai plutôt mon regard vers l’avenir. Le budget de 2022 propose un régime national de soins dentaires d’une enveloppe de 5,3 milliards de dollars en cinq ans et qui en débourserait 1,7 milliard dès l’exercice actuel.

Bien sûr, on l’inaugurera cette année avec les enfants de moins de 12 ans, puis, l’année prochaine, on l’élargira aux jeunes de moins de 18 ans, aux personnes âgées et aux personnes handicapées pour le mettre pleinement en œuvre avant 2025.

Si on fait des projections vers l’avenir, le montant des dépenses prévues par le gouvernement dans ce programme est-il réaliste, ne serait-ce qu’à cause de l’inflation? Pouvons-nous nous attendre à des augmentations sensibles? Comment évalueriez-vous cette initiative par rapport aux économies à long terme?

Je suppose que je vous demande de regarder dans votre boule de cristal de directeur parlementaire du budget.

M. Giroux : Je n’en possède pas. Mais un aspect important de la détermination des coûts à venir résidera dans l’administration du programme. Si c’est le même genre de programme qu’envisage le projet de loi C-31, le coût dépendra de la rigueur administrative. Si le programme s’apparente davantage à un véritable régime de soins dentaires avec présentation obligatoire de reçus puis remboursement, les coûts administratifs seront sensiblement plus élevés. Un autre facteur important sera le type de service assuré. Faute de tous ces détails, il est difficile de déterminer si on dispose d’assez d’argent ou si ça coûtera davantage.

Le sénateur Harder a fait allusion à la capacité du système. S’il devait y avoir des problèmes de capacité et si les dentistes et d’autres professionnels des soins dentaires augmentaient leurs honoraires, il est évident que les coûts pourraient rapidement dépasser 1,7 milliard. Tout ça pour dire que les inconnues sont trop nombreuses en ce qui concerne la formule et les modalités du programme pour se prononcer sur la suffisance de l’enveloppe.

Le sénateur Boehm : Merci.

Le sénateur Loffreda : Merci, monsieur Giroux, pour vos analyses toujours pénétrantes.

Voyons deux sujets de préoccupation que nous n’avons pas encore abordés. L’un serait l’inflation. Manifestement, dans une économie de 2 000 milliards de dollars, nous savons tous que l’impact de 475 ou de 945 millions, selon vos estimations, sera insignifiant. Que pensez-vous de l’inflation? Beaucoup ont dit craindre que ces mesures ciblées et relativement modestes n’augmentent les pressions inflationnistes au Canada. Faut-il les croire? Le fait que les mesures ciblent la population à faible revenu et que les dépenses sont précises fait-il moins craindre l’effet inflationniste de ce projet de loi?

Voici mon autre sujet de préoccupation : ce que nous mesurons s’améliore et, parfois, si nous voulons des résultats, nous devons mesurer et observer. Un point faible de cette prestation dentaire est qu’elle est versée aux parents. Savons-nous qu’elle ira vraiment à l’obtention de soins dentaires? C’est une crainte qui a déjà été formulée.

Aimeriez-vous ajouter quelque chose? Qu’en pensez-vous, vu que vous privilégiez toujours les chiffres, les rapports et les mesures que nous pouvons prendre? Y a-t-il une autre façon de le mesurer ou d’atténuer ce risque?

Nous nous fions aux Canadiens pour qu’ils se servent de la prestation pour leurs enfants. Combien de temps pourront-ils prendre pour aller chez le dentiste?

Il serait néanmoins bon de disposer d’un système de suivi et de mesurer le véritable avantage que les Canadiens en retirent. Existe-t-il un rapport que nous pouvons consulter sur le nombre d’enfants qui ont eu des prestations dentaires avant ce paiement et qui en auront après la sanction royale de ce projet de loi? Pourrions-nous trouver ces chiffres dans un rapport?

M. Giroux : Merci de votre question. Sur le risque d’inflation, vous avez fait justement remarquer que, dans une économie de 2 000 ou de 2 500 milliards de dollars, 1 ou 1,5 milliard de dollars ne sont pas susceptibles d’entraîner une différence globalement importante. Mais, si on revient aux craintes de problèmes de capacité du sénateur Harder, certains professionnels de la santé ou des soins dentaires ou certains propriétaires fonciers pourraient tenter une prise de bénéfices. Ils pourraient décider d’augmenter les loyers ou les honoraires pour profiter d’une partie de la manne de l’aide de l’État offerte à certains Canadiens. Ça s’est déjà vu et c’est peut-être la raison pour laquelle le gouvernement a chargé le Bureau de la concurrence de trouver dans d’autres secteurs d’activité des prises illicites de bénéfices pendant la pandémie. Il se peut que, dans certaines régions, les prix augmentent en raison de ces prestations.

Mais, comme la mesure cible des secteurs précis de la population canadienne, ça diminue vraisemblablement les répercussions de cette prise illicite de bénéfices.

Personnellement, j’estime essentiel pour un gouvernement qui édicte une loi d’essayer d’en mesurer les avantages et les effets significatifs, y compris positifs. Rien ne l’annonce dans le projet de loi ni dans l’intention du gouvernement. Si le passé est garant de l’avenir, je doute que ça se fasse, parce que, quand nous avons examiné les indicateurs de rendement du gouvernement relatifs aux services aux Autochtones, nous avons découvert qu’il n’avait pas réussi à atteindre une part importante des objectifs précis qu’il s’était lui-même fixés — et qu’il avait corrigés au fil du temps — ni respecté ses propres étalons de mesure.

Je parierais donc qu’il est peu probable, malheureusement, qu’il mesurera les effets du projet de loi.

Le sénateur Loffreda : Merci.

Je suis également préoccupé par la logistique de la gestion de ces nouvelles prestations, qui repose, comme nous le savons, sur les déclarations de revenus des populations ciblées. J’en ai discuté en comité avec la ministre Freeland et d’autres, mais c’est à refaire. Nous savons que de 10 à 12 % de la population ne produit pas de déclaration de revenus et qu’elle ne sera pas considérée comme admissible à ces prestations par l’Agence du revenu du Canada.

Que pourrions-nous faire désormais, je vous le demande, à vous, qui êtes plongé dans les rapports et les chiffres? Y a-t-il une solution? Nous n’en discutons jamais assez, pourtant c’est bien de 10 à 12 % de la population qui peut vraiment avoir besoin de ces prestations, mais que nous ne pouvons pas atteindre. Nous ignorons de qui il s’agit et où elle se trouve. Le Canada existe depuis 1867. Parvenu à la maturité, il devrait s’intéresser à cette fraction de la population et en prendre soin. Qu’en pensez-vous?

M. Giroux : De plus en plus de prestations dépendent de la fiscalité pour leur distribution directe au contribuable ou de la production des déclarations de revenus des particuliers et des familles. Pourtant, le gouvernement n’agit pas autant en amont que vous le croiriez possible en 2022, par exemple, pour atteindre les contribuables qui ne produisent pas leurs déclarations de revenus.

Nous avons de bons moyens de déterminer la proportion de Canadiens qui devraient les produire parce qu’ils reçoivent des prestations, mais qui ne le font pas. Le gouvernement semble toujours compter sur des bénévoles pour aider les contribuables à produire leurs déclarations.

Je croirais que, aujourd’hui, il serait plus facile, en agissant en amont, de les rejoindre pour qu’ils en retirent quelque chose. Nous pouvons facilement trouver les contribuables débiteurs qui ne produisent pas de déclaration. Ce n’est peut-être pas beaucoup plus difficile de trouver les autres, qui obtiendraient des prestations.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Giroux.

À titre d’information, lorsque j’étais vice-président des finances de l’Association des policières et policiers provinciaux du Québec, je m’occupais de gérer les plans d’assurance-maladie et d’assurance dentaire. Il y avait 13 000 bénéficiaires. Ce n’est rien si l’on compare avec ce qui va se passer au Canada, mais je peux vous dire que, année après année, on constatait qu’il y avait des déficits.

Quand je regarde les chiffres fournis par le gouvernement, je me demande si c’est une décision politique. Ce programme pourrait devenir un gouffre financier, si je regarde les systèmes de soins dentaires.

Est-ce normal que les Canadiens doivent assumer les frais de ce programme sans qu’il y ait eu de projections financières plus étoffées de la part du gouvernement?

M. Giroux : C’est une bonne question, monsieur le sénateur. Je pense que vous êtes mieux placé que moi pour y répondre.

Le gouvernement a déposé des estimations de coûts pour le projet de loi C-31. Par contre, le projet de loi C-31, du moins pour la partie liée à la Prestation dentaire canadienne, est censé être le début d’un programme national. Ce serait probablement à l’avantage des législateurs et des législatrices d’avoir des projections beaucoup plus solides que ce que vous avez déjà vu, non seulement en ce qui concerne le projet de loi C-31, mais en ce qui concerne l’ensemble du programme d’assurance dentaire. C’est seulement un acompte sur un programme qui est censé être beaucoup plus vaste et permanent.

Selon moi, ce n’est pas normal que vous n’ayez pas de meilleurs renseignements.

Le sénateur Dagenais : Quand j’étais superviseur du régime d’assurance dentaire, j’ai constaté certaines choses. Quand vous arrivez chez le dentiste et que vous dites que vous avez une assurance, la facturation n’est pas la même que si vous n’avez pas d’assurance. J’ai même dû contacter des dentistes pour leur dire que les frais étaient exagérés.

Avez-vous entendu parler d’une méthode de contrôle ou d’une charte de tarifs pour les soins dentaires, ce qui éviterait les surprises liées aux dépassements budgétaires?

M. Giroux : Non. Le projet de loi C-31 est basé uniquement sur l’intention d’offrir aux Canadiens des services dentaires pour leurs enfants ou d’y avoir recours. On pourrait se retrouver, avec le projet de loi C-31 dans sa forme actuelle, dans une situation où un parent paie 150 $ ou 200 $ pour un nettoyage, mais reçoit quand même le montant de 650 $ de prestations.

Le projet de loi ne vise pas à limiter ou à circonscrire les frais dentaires selon un barème. Ce sera laissé à la discrétion des dentistes et des professionnels de la santé dentaire, conformément aux barèmes provinciaux en vigueur. On sait que cela varie grandement d’une ville ou d’une province à l’autre. Dans le projet de loi C-31, il n’y a pas de mesures visant à limiter les frais dentaires qui seront facturés pour les enfants de moins de 12 ans.

Le sénateur Dagenais : J’espère que les nettoyages ne coûteront pas 200 $ ou 300 $ pour le régime de soins dentaires.

[Traduction]

La sénatrice Omidvar : Merci beaucoup, monsieur Giroux, d’être venu. Je voudrais approfondir des questions soulevées par mes collègues. La sénatrice Pate a soulevé le problème de la récupération des montants, laquelle n’est pas souhaitable. Mais l’harmonisation avec les programmes provinciaux et municipaux l’est, puisqu’on compte plus de 80 programmes dentaires fédéraux, provinciaux ou municipaux. Plus de 30 s’adressent aux enfants. Dans quelle mesure le projet de loi manifeste-t-il l’intention d’une harmonisation avec les programmes provinciaux en vigueur?

M. Giroux : Dans le projet de loi, je n’ai découvert aucune disposition qui vise une harmonisation des programmes dentaires. On prévoit plutôt de ne pas considérer comme admissibles les enfants dont les parents ont souscrit une assurance dentaire privée et de considérer comme admissibles ceux qui sont protégés par un programme provincial, seulement dans la mesure où ils doivent faire des débours.

C’est que les provinces et les régimes privés sont des premiers payeurs, tandis que le régime fédéral se place au deuxième ou au troisième rang. Je n’ai décelé aucune intention en vue d’une harmonisation sauf ce que je viens de dire.

La sénatrice Omidvar : Recommanderiez-vous que, quelque part, pendant l’existence du programme, on évalue les montants supplémentaires obtenus par les Canadiens par rapport à ce qu’on est revenu chercher dans leurs poches?

M. Giroux : C’est une excellente question, mais elle concerne la conception stratégique du programme. Mieux vaudrait peut-être la poser aux témoins qui suivront. Mais la remarque est très intéressante.

La sénatrice Omidvar : L’un de nous vient d’avancer le pourcentage de Canadiens qui ne produisent pas de déclaration de revenus et qui, par conséquent, ne sont pas admissibles à ces prestations — 10 à 12 %. J’apprends que l’Agence du revenu du Canada lance une initiative, « Préparez-vous à produire votre déclaration de revenus ».

Votre estimation des coûts prévoit-elle, avec optimisme, une marge pour un taux supplémentaire de production, disons même 3 %, ce qui serait souhaitable?

M. Giroux : Oui. Notre estimation a tenu compte d’une augmentation de l’accès aux services dentaires ou de leur utilisation après la création d’une prestation. Nous avons choisi la tranche des revenus supérieurs, sachant, d’après les statistiques et l’historique, que les particuliers ou les familles à faible revenu ont tendance à moins utiliser les services dentaires que les familles dont les revenus sont élevés ou dans la médiane. Comme le programme ne sera pas très regardant quant aux preuves de paiement et aux factures, nous avons supposé que c’est le taux d’utilisation des services par les familles à revenu élevé qui s’appliquera aux enfants.

La sénatrice Omidvar : Je vois. Je me demande seulement, en revenant aux interactions avec les programmes provinciaux, si vous croyez qu’il aurait été plus efficace pour le gouvernement de transférer l’argent aux provinces, de qui relèvent les soins de santé, plutôt que de créer une nouvelle entité?

M. Giroux : Il est certain que ça aurait été mieux adapté aux réalités et aux besoins des provinces — et des territoires — de leur transférer l’argent. Il aurait peut-être fallu longuement discuter et négocier avec eux.

La sénatrice Anderson : Merci, monsieur Giroux.

J’observe que, dans votre note sur la Prestation dentaire canadienne, vous faites allusion aux services de santé non assurés. Comme vous le savez sans doute, la moitié des habitants des Territoires du Nord-Ouest se rangent dans cette catégorie. Elle comprend les soins dentaires.

Quel est, alors, le rapport entre cet argent et les services non assurés? A-t-il un impact sur eux? Est-il récupéré par ces services?

M. Giroux : D’après ce que j’ai compris, il s’ajoutera aux services de santé non assurés. Mais je pourrais me tromper. D’après ma lecture du projet de loi, les services de santé non assurés seront le premier payeur, et si les familles doivent faire des débours après s’être prévalues de ces services, elles deviendraient alors admissibles à la prestation dentaire.

La sénatrice Anderson : Simplement pour que vous le sachiez, trois communautés des Territoires du Nord-Ouest sont dotées de cliniques dentaires. On y compte, en tout, neuf cliniques — huit, en fait — et cinq cliniques de thérapeutique dentaire.

Actuellement, dans une petite communauté isolée, il faut, en cas de problème dentaire, consulter une infirmière qui remplit un formulaire, n’étant pas compétente pour faire des travaux dentaires. J’ai appris que le dossier pouvait, même quand les problèmes sont graves, traîner deux mois, avec des conséquences sur la santé physique du patient. Je tiens à faire remarquer que, incontestablement, des problèmes énormes se posent dans les Territoires du Nord-Ouest et, j’imagine, dans le Nunavut.

Très souvent c’est dans le Sud qu’on donne des soins dentaires aux enfants, ce qui signifie que les familles doivent s’y rendre avec leur enfant pour les obtenir. L’argent auquel elles sont admissibles — pour leurs enfants — doit-il aller directement à ces soins? Peut-il les défrayer du transport et de la nourriture?

M. Giroux : Pour obtenir ce niveau de détail, je pense qu’il vaudrait mieux s’adresser aux fonctionnaires qui seront affectés à l’administration du programme. Je n’ai malheureusement pas ces renseignements, si je me fie à ce qu’il y avait dans la mesure législative et l’information donnée par les ministères.

La sénatrice Anderson : Merci, monsieur.

La sénatrice Marshall : Monsieur Giroux, encore une fois à propos du programme de soins dentaires, lorsque vous avez estimé les coûts, vous avez inscrit 35 millions de dollars pour l’administration. Dans votre note, vous avez expliqué pourquoi vous avez utilisé 5 %, mais quand je regarde le programme, il est vraiment juste question de l’envoi de chèques par la poste.

M. Ammar disait que le revenu net rajusté était obtenu en retirant l’Allocation canadienne pour enfants. On dirait tout simplement que c’est calculé dans votre système informatique et que vous envoyez le chèque par la poste.

La somme de 35 millions de dollars semble donc être très élevée. Je me demande si vous pouvez en parler. Cela semble excessif pour envoyer les chèques par la poste.

M. Giroux : Je suis d’accord avec vous. Cela semble certainement généreux, et oui, ce l’est. Cela tient compte du fait que nous estimons que ce sera probablement semblable aux services de santé non assurés, mais le gouvernement pourrait facilement le faire pour moins. Cela voudrait toutefois dire qu’il se contenterait d’envoyer des chèques et de recevoir les demandes sans faire beaucoup de vérifications.

Le gouvernement pourrait décider de dépenser ce que nous avons estimé pour les coûts administratifs si des vérifications étaient faites, mais on pourrait en faire très peu ou beaucoup. C’est la raison pour laquelle il est difficile d’établir les coûts administratifs avec beaucoup de certitude.

La sénatrice Marshall : Cela pourrait comprendre la vérification faite après le versement, n’est-ce pas?

M. Giroux : Oui.

La sénatrice Marshall : Je pense au nombre croissant de fonctionnaires. Prévoyez-vous que du personnel supplémentaire sera nécessaire à la mise en œuvre du programme?

M. Giroux : D’après ce que j’ai vu au cours des dernières années, je suis certain qu’il faudra plus de monde pour administrer cette prestation.

La sénatrice Marshall : Mais vous ne savez pas combien de personnes. Merci beaucoup.

Le sénateur Smith : Monsieur Giroux, lorsque vous avez évalué les coûts de la Prestation dentaire canadienne, vous avez indiqué que les coûts comportementaux sont sensibles au choix des taux de participation. Vous dites que c’est une source d’incertitude. Pouvez-vous en dire plus sur les coûts comportementaux, qui seront d’environ 128 millions de dollars pendant la durée du programme selon vos estimations? Et pour revenir à des questions précédentes, est-ce que cela tient compte de l’emplacement géographique, de l’endroit où les gens vivent?

M. Giroux : Les coûts comportementaux sont liés au fait que nous observons, de manière générale, que les ménages à faible revenu ont tendance à utiliser beaucoup moins souvent les services dentaires que les personnes à revenu élevé. Il y a diverses raisons à cela, dont probablement le manque de liquidités. Ou ils ont des dépenses plus urgentes, par exemple pour se nourrir et se loger convenablement.

Nous avons supposé que, grâce à cette prestation, qui aidera à régler une partie des problèmes de liquidité, le recours aux services dentaires augmentera et sera probablement beaucoup plus comparable à ce que nous voyons pour les ménages à revenu élevé. Ce ne sont pas tous les enfants qui voient un dentiste, même dans les ménages à revenu élevé, et nous supposons donc que cette prestation fera en sorte que la proportion de personnes à faible revenu qui vont chez le dentiste sera la même que pour les personnes ou les ménages à revenu élevé.

Le sénateur Smith : Pouvez-vous nous dire comment vous êtes arrivé au chiffre de 128 millions de dollars? De quels facteurs avez-vous tenu compte pour faire cette estimation?

M. Giroux : Nous nous sommes servis de la proportion d’enfants qui utilisent les services dentaires dans les catégories de revenu ciblées par le projet de loi C-31 et de l’augmentation du taux de participation pour qu’il soit comparable à celui des ménages à revenu élevé.

Le sénateur Smith : Merci.

La sénatrice Pate : Je veux revenir à la question des coûts de vérification et d’administration. Il me semble que la discussion porte souvent sur les personnes pauvres qui seraient plus susceptibles de commettre une fraude que les personnes à revenu élevé. Vous avez établi les coûts en tenant compte, entre autres choses, du revenu minimum garanti, du revenu de base et de la mise en œuvre de ce genre de mesures.

Je voudrais rappeler qu’il y a 20 ans, lorsque nous nous sommes penchés sur un énorme programme de vérification qui a été mis en œuvre en Ontario, il a été démontré qu’il faudrait débourser un minimum d’environ 200 000 $ par mois pour surveiller des personnes déclarées frauduleuses, et 90 % de ces personnes ne touchaient même pas l’aide sociale du programme l’Ontario au travail. Je me demande donc si, en établissant les coûts, vous vous êtes fiés à la notion voulant que les personnes pauvres ou les personnes à plus faible revenu commettent plus souvent une fraude que les personnes à revenu élevé.

De plus, j’aimerais revenir à un sujet que nous avons déjà abordé. Si les gens prennent l’argent, mais qu’ils s’en servent pour se nourrir, n’y aurait-il pas de répercussions plus positives sur leur santé à long terme?

Je reconnais qu’il faut formuler pour cela toute une série d’hypothèses qui ne sont peut-être pas de votre ressort, mais si vous en avez examiné quelques-unes, je serais très curieuse de vous entendre parler de votre analyse.

M. Giroux : Merci. Je n’irais pas jusqu’à dire que le taux de fraude est plus élevé chez les personnes pauvres que chez les personnes riches. Je ne pense pas l’avoir dit. Si j’y ai fait allusion, je suis vraiment désolé parce qu’il n’y a pas de données probantes pour le prétendre. En fait, quand j’étais à l’Agence du revenu du Canada, je ne me souviens pas d’avoir vu plus de cas de fraude chez les personnes à faible revenu que chez les personnes à revenu élevé. C’est peut-être le cas, mais je n’ai aucune donnée probante pour étayer cette affirmation.

Pour ce qui est des avantages de l’utilisation de la prestation à d’autres fins, comme mieux se loger ou mieux se nourrir, c’est une question intéressante. Je ne me suis pas penché là-dessus. Nous ne nous sommes pas encore penchés là-dessus, mais il ne fait aucun doute qu’il y aurait également des avantages pour les familles à utiliser la prestation pour cela. Nous n’avons toutefois pas examiné la question.

La sénatrice Pate : Je tiens à préciser que je ne laissais pas entendre que c’est ce que vous avez dit. C’est toutefois une supposition courante, à savoir que les pauvres sont plus susceptibles de déjouer le système que les riches.

Le président : Merci pour cette précision, sénatrice Pate.

La sénatrice Duncan : Je m’excuse si on a déjà posé la question et donné la réponse. Vous voudrez peut-être répondre par écrit, monsieur Giroux.

J’aimerais vous entendre davantage sur les chevauchements entre ce que le gouvernement propose dans le projet de loi C-31 et les services de santé non assurés. Par exemple, nous devrions connaître le coût de l’administration du Programme des services de santé non assurés pour les Premières Nations et les Inuits d’un bout à l’autre du Canada.

Il y a aussi la question de ce qui est couvert et de ce qui ne l’est pas, la façon dont ces demandes sont traitées et la manière dont les services de santé non assurés fonctionnent individuellement pour les Autochtones.

J’ai également une préoccupation. Le Canada est vraiment la quatorzième province à la table lorsqu’il est question des soins de santé, car il est responsable des gens de la Défense nationale et de la GRC ainsi que des Autochtones partout au Canada. Pour ce qui est du coût des soins dentaires offerts à ces personnes, je ne vois pas vraiment à quel endroit il en est question dans vos notes sur les coûts et les prestations, à quel endroit on tient compte de la responsabilité du Canada à cet égard.

M. Giroux : Je pense comprendre votre question, mais veuillez me reprendre si je me trompe.

Nous avons examiné la proportion d’enfants déjà assurés au privé ou qui le sont grâce à des programmes parrainés par le gouvernement. Je pense que nous avons tenu compte du fait que certains enfants sont couverts par les services de santé non assurés. Nous reconnaissons aussi le fait qu’en dépit de ces programmes provinciaux et fédéraux, d’autres dépenses ne sont peut-être pas couvertes. Par exemple, des programmes provinciaux ou le Programme des services de santé non assurés ne couvrent annuellement qu’un nombre limité d’interventions, comme le nettoyage et ainsi de suite. Je ne suis pas dentiste et je ne vais donc pas essayer de les nommer. Il est donc possible qu’il y ait des frais à assumer.

À ma connaissance, nous en avons tenu compte, et les coûts du projet de loi sont établis en fonction des coûts déjà couverts par les programmes provinciaux et fédéraux. Mais il y a encore des dépenses même pour les personnes couvertes.

M. Ammar : Je veux ajouter mon information. Vous avez raison. Lorsque nous établissons les coûts, nous ne tenons pas compte de l’ensemble de la population du Canada. Nous n’avons pas tenu compte de certains groupes, comme les Premières Nations, les personnes qui vivent dans les territoires ou qui sont dans l’armée, car nous n’avions pas les données nécessaires. Les frais dentaires que nous estimons s’appliquent seulement aux principales provinces au Canada et ne tiennent pas compte de ces segments de la population.

La sénatrice Duncan : Je pense que nous devons examiner de manière plus approfondie l’information disponible au moyen du Programme des services de santé non assurés. Par exemple, je crois que le sénateur Harder a posé une question sur les résultats en matière de santé. Les programmes de santé buccodentaire offerts dans les écoles aux Territoires du Nord-Ouest et au Yukon — je ne veux pas parler pour la sénatrice Anderson, mais ils sont sans aucun doute offerts au Yukon — existent depuis des années pour les enfants de la maternelle à la huitième année. Il n’y a pas de vérification du revenu pour les enfants qui fréquentent l’école. Les programmes sont offerts par l’entremise des écoles. Nous devons obtenir les données sur les résultats en matière de santé de ces programmes en nous adressant au bon ministère. Dans l’approche pangouvernementale, je pense qu’il y a beaucoup d’information disponible grâce au Programme des services de santé non assurés et à la façon dont il est mis en œuvre. Ces renseignements pourraient permettre de pousser plus loin la discussion et votre examen.

Puis-je proposer un examen de ces données?

M. Giroux : Madame la sénatrice, j’aimerais pouvoir me montrer aussi optimiste que vous à propos de l’étendue des données sur les résultats en matière de santé de différents programmes, mais j’ai des doutes sur la disponibilité de ces données.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Monsieur Giroux, j’ai une brève question sur le projet de loi C-31. Si l’on considère le programme d’aide au logement et si l’on regarde la situation économique actuelle, je crois qu’il est difficile d’être contre cette aide financière aux familles. On nous oblige à examiner le projet de loi sur les soins dentaires, qui représentera des dépenses faramineuses sur lesquelles on n’aura pas toujours de contrôle.

N’aurait-il pas été préférable d’avoir deux projets de loi différents pour faire un meilleur examen de l’assurance dentaire, car ce sera hors de contrôle, alors que la situation financière pour le logement est plus facile à évaluer? Le projet de loi sur les soins dentaires, c’est un peu l’inconnu.

M. Giroux : Vous avez raison, sénateur, ce sont deux questions distinctes. Le logement est une aide ponctuelle et la Prestation dentaire canadienne est plutôt la mise en œuvre initiale d’un programme permanent. Oui, il aurait été préférable qu’il y ait deux projets de loi distincts, étant donné qu’ils ont une ampleur et une durée dans le temps différentes. Toutefois, cela relève d’une question de stratégie législative et de gestion de la Chambre et du Sénat, sur laquelle je ne suis malheureusement pas suffisamment qualifié pour commenter.

Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Giroux.

[Traduction]

Le président : Je vais demander au directeur parlementaire du budget de terminer son exposé. Monsieur Giroux, avez-vous d’autres observations sur le projet de loi C-31?

M. Giroux : Non. Nous avons essayé de répondre à vos questions du mieux que nous le pouvions. Nous vous souhaitons bonne chance dans vos délibérations.

Le président : Si jamais vous pensez avoir quelque chose à ajouter, veuillez le faire avant le 2 novembre par l’entremise de notre greffière.

Chers collègues, nous passons maintenant au deuxième groupe de témoins. Nous avons parmi nous des fonctionnaires de l’Agence du revenu du Canada et de l’Agence de la santé publique du Canada ainsi que des représentants de la Société canadienne d’hypothèques et de logement. On m’a dit qu’un représentant de chaque organisation allait faire une déclaration liminaire, et leurs collègues les aideront ensuite à répondre aux questions des sénateurs.

Nous accueillons Gillian Pranke, sous-commissaire à la Direction générale de cotisation, de prestation et de service, de l’Agence du revenu du Canada; Nadine Leblanc, vice-présidente principale, Politique, de la Société canadienne d’hypothèques et de logement; Lynne Tomson, sous-ministre adjointe déléguée à la Direction générale de la politique stratégique de Santé Canada; et le Dr James Taylor, dentiste en chef du gouvernement du Canada de l’Agence de la santé publique du Canada.

Bienvenue à tous, et merci d’avoir accepté de témoigner aujourd’hui sur le projet de loi C-31. Avant de commencer, j’aimerais demander à tous les autres témoins que je n’ai pas nommés de se présenter avant de répondre à une question.

Sur ce, nous allons maintenant entendre les observations des témoins en commençant par Mme Gillian Pranke, qui est sous-commissaire à la Direction générale de cotisation, de prestation et de service de l’Agence du revenu du Canada.

Madame Pranke, vous avez la parole.

Gillian Pranke, sous-commissaire, Direction générale de cotisation, de prestation et de service, Agence du revenu du Canada : Je vous remercie de nous avoir invités, ma collègue Heather Daniels, qui est directrice générale, Direction des programmes de prestations, Direction générale de cotisation, de prestation et de service, et moi, à venir discuter aujourd’hui de la teneur du projet de loi C-31, Loi concernant des mesures d’allègement du coût de la vie relatives aux soins dentaires et au logement locatif.

Comme vous le savez, l’agence est responsable de l’administration de programmes fiscaux fédéraux et de certains programmes fiscaux provinciaux et territoriaux, ainsi que de l’exécution d’un certain nombre de programmes de versements de prestations. Chaque année, l’agence perçoit des centaines de milliards de dollars en recettes fiscales pour le compte des gouvernements du Canada, et elle distribue des paiements de prestations exacts en temps opportun à des millions de Canadiens.

L’agence offre également de l’aide et des renseignements à ceux qui en ont besoin et travaille très fort pour sensibiliser les Canadiens qui pourraient ne pas recevoir les crédits d’impôt ou les prestations auxquels ils ont droit.

En ce qui concerne les deux mesures incluses dans le projet de loi C-31, l’agence, sous réserve de l’approbation parlementaire et de la sanction royale de la loi, administrerait et assurerait la mise en œuvre des programmes proposés de Prestation dentaire canadienne et de supplément unique à l’Allocation canadienne pour le logement. L’objectif de l’agence en matière d’administration et de prestation des programmes sera de minimiser le fardeau administratif des Canadiens, tout en atténuant le potentiel d’utilisation outrancière.

Monsieur le président, je serai maintenant heureuse de répondre à vos questions.

[Français]

Nadine Leblanc, vice-présidente principale, Politique, Société canadienne d’hypothèques et de logement : Bonjour, monsieur le président. Merci de l’invitation et merci de nous donner l’occasion de discuter de ce projet de loi.

[Traduction]

En tant qu’agence nationale du logement du Canada, la Société canadienne d’hypothèques et de logement existe pour loger les Canadiens.

[Français]

Nous jouons un rôle important dans le système de logement avec nos produits commerciaux et nos programmes établis conformément à la Stratégie nationale sur le logement.

Partout au pays, beaucoup trop de familles à faible revenu ont de la difficulté à payer leur loyer ou à trouver un logement locatif abordable. La pandémie de COVID-19 et la récente augmentation du coût de la vie n’ont fait qu’empirer les choses.

Les Canadiens vulnérables ont besoin d’une aide supplémentaire pour joindre les deux bouts.

[Traduction]

Le supplément unique à l’Allocation canadienne pour le logement fournirait un paiement unique de 500 $ à environ 1,8 million de locataires à faible revenu. L’admissibilité au supplément unique au programme de l’Allocation canadienne pour le logement serait réservée aux personnes qui présentent une demande et qui répondent à tous les critères suivants : avoir produit leur déclaration de revenus pour 2021; être âgé d’au moins 15 ans à la fin de 2022; avoir un revenu net rajusté inférieur à 20 000 $ en ce qui concerne les personnes seules ou inférieur à 35 000 $ pour les familles; être résidant du Canada aux fins de l’impôt en 2022; avoir leur résidence principale au Canada; avoir payé un loyer pour leur propre logement au Canada en 2022; et consacrer au moins 30 % de leur revenu net rajusté à leur loyer.

L’Agence du revenu du Canada traiterait les demandes et les paiements pour le supplément unique à l’Allocation canadienne pour le logement au nom de la Société canadienne d’hypothèques et de logement. En assumant que le projet de loi reçoive la sanction royale, les demandeurs admissibles pourraient faire une demande via le site sécurisé Mon dossier de l’agence ou en appelant son centre de contact. Les participants admissibles qui se sont inscrits au dépôt direct pourront revoir le paiement rapidement, soit dans cinq jours ouvrables.

La nouvelle prestation unique s’ajouterait à l’Allocation canadienne pour le logement actuellement cofinancée et versée par les provinces et les territoires. Le complément ponctuel à l’Allocation canadienne pour le logement serait un élément d’une trousse de solutions visant à améliorer l’abordabilité du logement partout au Canada ainsi qu’à aider les locataires à faible revenu. Ces solutions visent à offrir un logement au plus grand nombre de Canadiens possible et à rendre le logement abordable pour tous.

Merci. C’est maintenant avec plaisir que je vais répondre à vos questions.

Le président : Merci.

Nous passons maintenant à Lynne Tomson, qui est sous-ministre adjointe déléguée à la Direction générale de la politique stratégique de Santé Canada. Madame Tomson, vous avez la parole.

Madame Tomson, si vous le voulez bien, nous allons passer au Dr Taylor, et nos techniciens essaieront de vous reconnecter.

Nous allons entendre le Dr James Taylor, qui est dentiste en chef du gouvernement du Canada à l’Agence de la santé publique du Canada.

Dr James Taylor, dentiste en chef, gouvernement du Canada, Agence de la santé publique du Canada : Merci de m’avoir invité à prendre la parole.

Je suis heureux de m’adresser à vous au sujet de l’importance de la santé buccodentaire et des soins dentaires. Avoir une bonne santé buccodentaire nous permet de parler, de manger et d’interagir socialement. De plus, une bonne santé dentaire joue un rôle central dans la protection contre les infections microbiennes.

Les trois quarts des Canadiens visitent le dentiste au moins une fois par année. Cependant, en 2018, 35 % des Canadiens n’avaient pas d’assurance dentaire et 22 % n’ont pas consulté de professionnel de la santé dentaire à cause du coût.

Le projet de loi C-31 aideraient ces personnes sans assurance dentaire et permettrait à beaucoup plus de Canadiens de consulter des professionnels de la santé buccodentaire.

Selon l’étude sur le fardeau de la maladie à l’échelle mondiale réalisée en 2019 par l’Organisation mondiale de la santé, les caries sont le problème de santé qui est le plus souvent non traité dans le monde

Une fois arrivé à l’âge adulte, 96 % des Canadiens ont déjà eu une carie. Nos populations vulnérables sont touchées de manière disproportionnée, surtout les gens qui habitent dans les collectivités rurales, les aînés, les ménages à faible revenu, les personnes handicapées et les personnes racisées, y compris les Autochtones.

Selon une enquête nationale, 20 % des Canadiens ont une maladie des gencives peu graves ou graves. Ces maladies peuvent en grande partie être évitées. Cette proportion est plus importante chez les personnes âgées et les personnes à faible revenu.

La santé buccodentaire est un élément fondamental de notre santé globale, et la négliger peut entraîner de graves problèmes de santé. Il existe des liens entre les maladies buccodentaires et d’autres problèmes de santé tels que le diabète, le cancer, les maladies cardiaques et les accidents vasculaires cérébraux, les maladies respiratoires, ainsi que la démence, l’obésité et les naissances prématurées.

Une mauvaise santé buccodentaire et les maladies buccodentaires peuvent également aggraver les problèmes de santé existants et affecter la qualité de vie d’une personne. Les douleurs buccales, les dents manquantes ou les infections buccales peuvent affecter la façon dont une personne parle, mange et socialise, et peuvent nuire au développement de l’enfant.

De nombreux Canadiens ont du mal à accéder aux soins dentaires en raison de leur coût, et ce, malgré une variété de programmes publics qui complètent la couverture d’assurance privée liée à l’emploi. Les personnes qui n’ont pas accès aux soins dentaires ont souvent recours aux services d’urgence des hôpitaux, qui sont surchargés. On estime que 1 % de toutes les visites aux urgences chaque année sont le fait de patients souffrant de problèmes dentaires non urgents. On estime à 1,8 milliard de dollars le coût de ces visites évitables aux urgences en 2017.

Dans beaucoup de ces cas, le patient a quitté les urgences avec des problèmes de santé buccodentaire non traités et sans savoir où chercher de l’aide. Il est rare que ces visites à l’hôpital permettent de traiter les problèmes dentaires sous-jacents, ce qui peut conduire à de nouvelles visites.

Dans le domaine de la santé buccodentaire, l’Agence de la santé publique du Canada a travaillé à de multiples initiatives avec des partenaires, dont diverses universités canadiennes. Elle a collaboré avec l’Université de la Saskatchewan et l’Université de l’Alberta à la production d’information en ligne conviviale sur le bon nettoyage des dents des nourrissons et des enfants, des adultes, des personnes âgées et des femmes enceintes, ainsi que de l’information à l’intention des aidants naturels qui offrent du soutien à domicile aux personnes âgées atteintes de démence.

Dans le domaine de la prévention des maladies, l’agence s’est associée à l’Université du Manitoba et a collaboré avec de nombreuses organisations nationales clés de professionnels de la santé pour produire l’Outil national d’évaluation du risque de la carie. Cet outil permet aux professionnels de la santé canadiens d’évaluer en toute confiance leurs patients d’âge préscolaire et de prendre les mesures nécessaires pour prévenir la carie dentaire chez les jeunes enfants. Il permet également d’orienter ces patients vers les approches de soins appropriées.

L’agence s’est également associée à l’Université Laval et a collaboré avec les principales organisations nationales de professionnels de la santé pour produire l’Outil canadien d’évaluation de la santé buccodentaire des personnes aînées. Cet outil permet aux fournisseurs de soins de santé primaires canadiens d’évaluer la santé buccodentaire des aînés, particulièrement dans le contexte des établissements, afin de veiller à ce qu’ils reçoivent les soins de santé buccodentaire nécessaires.

La santé des Canadiens demeure prioritaire pour le gouvernement. Comme la santé buccodentaire est un élément important de notre santé globale, elle est également prioritaire.

Je vous remercie. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions.

Lynne Tomson, sous-ministre adjointe déléguée, Direction générale de la politique stratégique, Santé Canada : Merci pour cette occasion de parler au Comité sénatorial permanent des finances nationales du projet de loi C-31. Je suis accompagnée de Lindy VanAmburg, directrice générale, Groupe de travail des soins dentaires.

J’aimerais expliquer comment ce projet de loi, s’il est adopté, fournirait un soutien financier aux familles canadiennes de sorte qu’elles commencent à avoir accès aux soins dentaires dont elles ont tant besoin.

Comme vous le savez, le budget de 2022 prévoit 5,3 milliards de dollars sur cinq ans, dont 1,7 milliard de dollars en ce moment, pour fournir des soins dentaires aux Canadiens dont le revenu familial est inférieur à 90 000 $. À compter de cette année, le gouvernement fait le premier pas vers l’atteinte de cet objectif avec la création de la Prestation dentaire canadienne, une prestation provisoire pour les familles admissibles ayant des enfants de moins de 12 ans.

Cette loi conférerait...

Le président : Madame Tomson, nous éprouvons des difficultés techniques.

Si nous ne réussissons pas à vous joindre, il ne fait aucun doute que nous vous demanderons de venir au comité plus tard. Merci.

Honorables sénateurs, j’aimerais vous informer que nous disposerons d’un maximum de cinq minutes chacun pour une seule série de questions. Par conséquent, veuillez poser vos questions directement. Je vais demander aux témoins de répondre de façon concise. La greffière me signalera la fin de votre temps de parole.

La parole est maintenant à la sénatrice Marshall.

La sénatrice Marshall : J’ai la même question pour les deux programmes. J’aimerais connaître la logistique de la mise en œuvre pour savoir comment les bénéficiaires peuvent avoir accès au financement.

Pour les soins dentaires, cela dépend des autres couvertures qu’ils ont dans le cadre d’autres programmes. Pour le loyer, cela dépend des subventions au loyer qui sont offertes, je pense, par l’intermédiaire des sociétés de logement provinciales.

Quelles sont exactement les procédures de mise en œuvre? Quelles sont les procédures de vérification au départ, et quelles sortes de procédures postérieures à la mise en œuvre envisagez-vous une fois l’argent versé?

Mme Leblanc : Je vous remercie de cette question. Nous pouvons peut-être commencer par la prestation pour le logement.

Je précise que, pour obtenir cette prestation, il n’est pas nécessaire de recevoir une subvention dans le cadre du programme de la province ou du territoire. La prestation se fonde sur les critères d’admissibilité que nous avons mentionnés et qui sont repris dans le projet de loi. Je peux le répéter. Mais concernant la mise en œuvre, je dirai, pour rester concise, que la demande se fera par attestation, sur un portail administré par l’Agence du revenu du Canada. Les demandeurs devront avoir produit leur déclaration de revenus de 2021. La raison en est que leurs revenus seront validés dès le départ dans le cadre de leur processus de demande. Il s’agit de l’un des freins et contrepoids du processus d’attestation.

Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration liminaire, si le demandeur a accès au dépôt direct, le traitement de la demande pourra prendre jusqu’à cinq jours ouvrables, avant la réception du montant. Je terminerai en disant qu’il y a un contrôle de conformité et de vérification après l’approbation.

La sénatrice Marshall : J’aimerais un éclaircissement. Avant que le chèque soit envoyé par la poste, aucune vérification ne permet de déterminer si le demandeur est déjà subventionné, disons par la société provinciale de logement ou par un autre programme. Cela dépend entièrement de son revenu?

Mme Leblanc : Quelques critères s’appliquent, mais la réponse est non. L’un des critères est bien sûr le revenu, donc 20 000 $ pour les personnes et 35 000 $ pour les familles. Mais il faudra aussi que le demandeur fournisse des renseignements sur le loyer qu’il a payé en 2022. Ce loyer payé doit représenter au moins 30 % de son revenu net ajusté. Il y aura une validation initiale de ce calcul.

La sénatrice Marshall : En ce qui concerne les procédures postérieures au versement du montant, vous dites qu’il y aura une sorte de vérification ou d’audit.

Est-ce que ce secteur ou cette direction est constitué et déjà en place?

Mme Leblanc : Bien sûr, en attendant que le projet de loi reçoive la sanction royale, l’ARC mettra en place la fonction administrative nécessaire pour soutenir ce programme, y compris les vérifications et les contrôles de conformité. Ils tirent parti des leçons apprises ainsi que des pratiques qu’ils ont mises de l’avant durant la pandémie, et ces vérifications porteront principalement sur la validation du loyer selon une méthodologie fondée sur le risque.

La sénatrice Marshall : Pour le programme dentaire, quelqu’un peut-il me dire quel type de vérification sera effectué au départ? J’ai l’impression qu’il s’agit simplement de l’émission d’un chèque. Si vous avez droit à l’Allocation canadienne pour enfants et que vous répondez aux critères de revenu, vous recevrez le chèque. J’aimerais que cela soit confirmé. J’aimerais savoir si, une fois le chèque émis, il y a une sorte de processus de vérification ou de contrôle après coup.

Mme Tomson : Merci pour cette occasion de vous parler aujourd’hui. J’aimerais expliquer comment ce projet de loi, s’il est adopté, fournirait un soutien financier aux familles canadiennes pour qu’elles commencent à avoir accès aux soins dentaires dont elles ont tant besoin.

Comme vous le savez, le budget de 2022 prévoit 5,3 milliards de dollars sur cinq ans, dont 1,7 milliard de dollars en ce moment, pour fournir des soins dentaires aux Canadiens dont le revenu familial est inférieur à 90 000 $. À compter de cette année, le gouvernement fait le premier pas vers l’atteinte de cet objectif avec la création de la Prestation dentaire canadienne, une prestation provisoire pour les familles admissibles ayant des enfants de moins de 12 ans.

Cette loi conférerait au ministre de la Santé le pouvoir de définir cette prestation et, avec l’appui du ministre du Revenu national, de verser des fonds aux bénéficiaires admissibles.

[Français]

Je vais parler des critères d’admissibilité. Pour bénéficier de cette prestation, le demandeur doit avoir à sa charge un enfant âgé de moins de 12 ans qui n’a pas accès à une assurance dentaire privée. Le demandeur doit avoir produit une déclaration de revenus pour l’année précédente et avoir reçu l’Allocation canadienne pour enfants pour cet enfant. Il doit avoir gagné un revenu net familial ajusté inférieur à 90 000 $. Il doit avoir engagé des frais de soins dentaires au nom de son enfant ou prévoir de le faire pendant la période de prestations; il ne doit pas avoir été et ne sera pas entièrement remboursé pour ces frais dentaires par un autre régime provincial ou fédéral. Les demandeurs admissibles peuvent réclamer une prestation pour chaque enfant dont ils ont la charge et doivent être en mesure de prouver leur admissibilité en conservant leurs reçus, par exemple.

[Traduction]

Les montants suivants seront versés aux demandeurs admissibles : 650 $ par année pour chaque enfant si le revenu familial est inférieur à 70 000 $; 390 $ par année pour chaque enfant si le revenu familial se situe entre 70 000 $ et 79 999 $; et 260 $ par année pour chaque enfant si le revenu familial se situe entre 80 000 $ et 89 999 $. Un paiement initial tient compte du fait que de nombreux bénéficiaires admissibles n’ont pas la latitude financière nécessaire pour attendre le remboursement. Une fois la prestation reçue, elle peut servir à payer les services dentaires reçus de tout professionnel des soins dentaires réglementé et titulaire d’un permis en règle de l’organisme de réglementation, afin d’obtenir les soins dentaires que ce fournisseur juge nécessaires.

Les demandeurs admissibles peuvent demander une prestation pour chaque enfant dont ils ont la charge et pourront démontrer leur admissibilité, comme je l’ai dit, en conservant les reçus. L’ARC vérifiera les renseignements contenus dans ses systèmes actuels relatifs aux déclarations de revenus et à l’Allocation canadienne pour enfants, notamment le revenu, l’âge des enfants et le lien du demandeur avec l’enfant. Au moment de faire sa demande, le parent admissible devra également fournir des renseignements sur les éléments suivants pour aider à confirmer son admissibilité : les coordonnées du professionnel des soins dentaires qui a fourni ou fournira les services dentaires et la date du rendez-vous; les coordonnées de son employeur, s’il en a un, ainsi que celles de l’employeur de son époux ou conjoint de fait aux fins de vérification de l’accès à un régime de soins dentaires de l’employeur; et tout autre renseignement demandé pour vérifier son admissibilité.

Seul le parent qui reçoit l’Allocation canadienne pour enfants pour l’enfant en question peut présenter une demande, et l’ARC peut communiquer avec des professionnels des soins dentaires pour vérifier les détails fournis dans la demande. Cette prestation n’est pas imposable puisqu’elle est destinée à payer des frais de santé précis. À cette fin, le projet de loi modifie la Loi de l’impôt sur le revenu afin d’inclure les montants reçus en vertu de la Loi sur la prestation dentaire conformément au paragraphe 81(1), « Sommes à exclure du revenu ».

Outre la Loi de l’impôt sur le revenu, le projet de loi modifie également la Loi sur la taxe d’accise et la Loi de 2001 sur l’accise afin de permettre la communication de renseignements confidentiels à un fonctionnaire de l’Agence du revenu du Canada ou de Santé Canada chargé d’administrer la prestation et d’en assurer l’intégrité. J’espère que cette information sera utile aux délibérations du comité. Je serai ravie de répondre à toutes vos questions.

La sénatrice Marshall : Madame Tomson, ce sont des explications très utiles qui me permettent de circonscrire ma question. Comment vérifiez-vous que le demandeur avait effectivement droit à la prestation et que celle-ci a été utilisée pour des soins dentaires? Le processus de vérification a posteriori — je l’appelle ainsi parce que c’est ce qu’il semble être, car il suivra l’émission du chèque — a-t-il déjà été établi ou est-il presque établi?

Mme Tomson : Pour répondre à la première partie de votre question sur la détermination de l’admissibilité, étant donné que l’ARC administre l’Allocation canadienne pour enfants, à laquelle vous devez avoir accès, elle connaît l’existence de ces enfants et peut donc déjà faire une détermination en fonction des revenus du parent de l’enfant. Beaucoup de choses sont déjà faites.

Comme je l’ai mentionné, les parents doivent ensuite attester de différents éléments et fournir également des renseignements. Une fois que tout cela est recueilli et évalué, la prestation est versée et peut servir à payer des soins dentaires en fonction des populations visées. Les parents doivent conserver les reçus afin que l’ARC puisse vérifier la conformité après coup. Le processus repose sur des modèles de conformité existants. Mme Pranke aurait peut-être quelque chose à ajouter sur la question de la conformité.

La sénatrice Marshall : Merci beaucoup. C’est bon. Merci.

Le sénateur Smith : J’ai une question pour Santé Canada et l’Agence de la santé publique, pour faire suite à des discussions qui ont eu lieu avec le premier groupe de témoins. L’augmentation du taux de participation des familles canadiennes qui cherchent à obtenir des services de soins dentaires grâce à la prestation dentaire fera augmenter la demande de tels services. Selon les principes économiques de base, l’augmentation de la demande entraîne la hausse des prix. Est-ce que le gouvernement a analysé la possibilité d’une augmentation des frais dentaires en raison de cette prestation?

Mme Tomson : En ce qui concerne l’établissement des frais dentaires, cela se fait à l’échelle provinciale. Les professionnels des soins dentaires — et je céderai sous peu la parole au Dr Taylor pour qu’il explique cette partie — peuvent ensuite s’en servir comme point de repère. Ils peuvent facturer des montants moindres ou supérieurs. C’est la province qui établit le guide des honoraires dentaires, et il s’applique à tous les praticiens de la province.

Les soins dentaires sont en grande partie dispensés par des praticiens privés, et il existe de nombreux régimes privés qui les suivent. Quant à savoir si les tarifs peuvent augmenter en raison de cette prestation, nous ne savons pas si cela se produira sur le marché. Je n’ai pas de résultats d’analyse de sensibilité permettant de savoir si cela se produirait et d’en connaître les incidences. Nous savons qu’environ 500 000 enfants vont bénéficier de cette prestation provisoire à travers le pays.

Il y a déjà des pénuries dans certaines régions. Nous savons qu’il y a plus de dentistes dans les régions urbaines, mais certaines régions connaissent des pénuries d’hygiénistes dentaires. C’est la raison pour laquelle cette prestation ne concerne pas uniquement les dentistes, mais l’ensemble de la profession; nous voulons garantir le meilleur accès possible aux services. Nous ne nous attendons pas à ce qu’il y ait beaucoup de mouvement à court terme. C’est évidemment un élément dont nous tenons compte lorsque nous réfléchissons à ce que serait le programme à long terme.

Le président : Docteur Taylor, aimeriez-vous ajouter quelque chose?

Dr Taylor : Merci beaucoup, monsieur le président. Comme le disait Mme Tomson, chaque province ou territoire établit ses propres guides des honoraires pour les professions réglementées pratiquant de façon indépendante, et ce, en fonction du Guide du système de codification standard et du répertoire des services établi par l’Association dentaire canadienne. C’est cette grille qui permet d’évaluer les honoraires individuels. Mais au cours des nombreuses années où j’ai été dentiste autorisé — je ne dirai pas combien — et où j’ai observé les processus par lesquels les provinces et les territoires fixent ces frais, les associations... et je comprends qu’ils sont fixés par une association privée... D’après mon expérience, les frais se fondent davantage sur le coût des matériaux et le coût de la main-d’œuvre, et pas simplement en fonction de l’offre et de la demande.

Je ne veux pas parler au nom des associations provinciales. L’Association dentaire canadienne est beaucoup mieux placée pour aider à ce sujet, mais je dirai que je ne pense pas que ce sera un facteur. Il faut comprendre qu’un montant de 1,7 milliard de dollars par an qui va dans une industrie de 16 à 17 milliards de dollars par an ne va pas bouleverser l’industrie.

Je me ferai un plaisir de répondre à d’autres questions si je n’ai pas été clair ou si j’ai utilisé trop de terminologie technique.

La sénatrice Omidvar : Cela me rappelle l’arrivée, en 2016, d’une famille de 12 réfugiés syriens que nous avions parrainés. Huit d’entre eux étaient des enfants. Leurs dents étaient complètement cariées parce qu’apparemment trop de bonbons sont distribués dans les camps. Je peux vous dire que les 650 $ par enfant auraient changé énormément de choses, mais au lieu de cela, nous avons dû compter sur le sens du bénévolat du milieu des soins dentaires. Je me réjouis donc de cette prestation, après cette expérience.

J’ai cependant une question pour les représentants de l’ARC au sujet des 10 à 12 % de Canadiens qui ne produisent pas de déclarations de revenus. Pourriez-vous nous décrire votre stratégie « Préparez-vous à faire vos impôts » et nous dire si vous avez intégré des indicateurs et des repères de performance dans la stratégie, afin de pouvoir évaluer si la stratégie est efficace ou non, et si vous avez un objectif en tête pour le pourcentage de Canadiens qui produiront leur déclaration de revenus parmi les 10 à 12 % qui ne le font pas?

Mme Pranke : Je vous remercie de cette question, monsieur le président. En ce qui concerne la campagne « Préparez-vous », c’était sur le site Web Canada.ca. Elle a été lancée le jour du dépôt du projet de loi ou après le dépôt du projet de loi au Parlement. C’est une campagne qui explique aux citoyens ce qu’ils doivent faire maintenant. Il y a deux principaux moyens d’obtenir ces prestations. Les gens peuvent utiliser le portail sécurisé Mon dossier pour les particuliers à l’ARC, ou encore Mon dossier Service Canada. Ils peuvent donc faire une demande en ligne, et ils ont également la possibilité de la faire par téléphone.

La campagne « Préparez-vous » encourage les gens à s’inscrire à Mon dossier et au dépôt direct s’ils ne l’ont pas déjà fait.

Je peux parler très brièvement des taux d’accès. Comme ma collègue, Lynne Tomson, l’a mentionné, la prestation dentaire se fonde sur bon nombre des contrôles dans les systèmes relatifs à l’Allocation canadienne pour enfants, et la grande majorité des personnes qui reçoivent l’allocation sont inscrites à Mon dossier. Elles ont donc un accès en ligne à leur dossier et la grande majorité d’entre elles sont inscrites au dépôt direct.

Si le projet de loi est adopté par le Parlement et reçoit la sanction royale, nous avons bon espoir que lorsque le programme sera lancé, les personnes qui feront une demande dans le cadre du programme de soins dentaires pourront le faire sans difficulté. Je pense que c’est un élément important à savoir.

En ce qui concerne les autres mesures que nous prenons à l’Agence du revenu du Canada pour aider les gens à se préparer, nous envisageons de faire des envois postaux. Nous faisons également appel à nos partenaires du Programme communautaire des bénévoles en matière d’impôt pour faire passer le message. Nous examinons de nombreuses façons de nous assurer que les citoyens connaissent le nouveau programme. Nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues de Santé Canada à cet égard.

J’aimerais également mentionner quelque chose. Vous avez parlé du taux de Canadiens qui ne produisent pas de déclaration de revenus. Je pense qu’il est important que le comité sache que, depuis plusieurs années — depuis au moins 2014 —, l’Agence du revenu du Canada s’efforce de trouver les personnes qui ne produisent pas de déclaration de revenus, et pas seulement celles qui ne produisent pas de déclaration de revenus et qui, de toute évidence, doivent de l’argent à l’Agence du revenu du Canada. Nous nous concentrons sur les personnes à revenu faible et modeste qui ne se prévalent pas des prestations et des crédits auxquels elles ont droit.

C’est un programme que nous conservons. Nous l’avons maintenu tout au long de la pandémie et, grâce aux efforts déployés, nous avons constaté, et nous continuons de constater, que le nombre de personnes qui se prévalent des prestations et des crédits augmente.

Si je peux vous donner un exemple de 2020, 40 millions de dollars ont été versés en remboursements à des personnes qui, autrement, n’auraient pas pu avoir accès à ces prestations. Dans le cas de l’Allocation canadienne pour enfants, plus de 15 millions de dollars en prestations ont été versés.

Les efforts que l’Agence du revenu du Canada a entrepris ces dernières années aident à trouver les personnes, en particulier les personnes vulnérables, qui n’obtiennent pas les prestations et les crédits auxquels elles ont droit.

La sénatrice Omidvar : [Difficultés techniques] la crise de la COVID a eu un effet positif, c’est que plus de personnes produisent maintenant une déclaration de revenus parce que les gens sont généralement plus conscients du fait que c’est ce qui leur permet d’obtenir des prestations.

Mme Pranke : Pardonnez-moi, monsieur le président, je n’ai pas compris la question.

La sénatrice Omidvar : Je me demandais si l’on peut attribuer l’augmentation du taux de Canadiens qui produisent une déclaration de revenus aux efforts que vous avez déployés ou encore au fait que, en raison de la crise de la COVID, plus de gens savent maintenant qu’il faut produire une déclaration de revenus pour obtenir des prestations.

Mme Pranke : Je vous remercie de cette question, monsieur le président. Il ne s’agit que d’hypothèses ici, mais je dirais que c’est probablement une combinaison des deux. Vous avez tout à fait raison de dire qu’il y a une exigence. Ces programmes sont fondés sur la nécessité de valider le revenu, et à cette fin, les gens doivent avoir produit une déclaration de revenus.

J’aimerais souligner que, contrairement aux premiers programmes qui ont été mis en place en réponse à la COVID, pour bénéficier du programme de soins dentaires et du programme de prestations pour le logement, il faut avoir produit une déclaration de revenus pour l’année 2021. Il s’agit d’une période ferme contrairement à la Prestation canadienne d’urgence. En ce qui concerne l’intégrité de la validation, il est nécessaire de déterminer l’admissibilité en fonction du revenu qui a été déclaré, entre autres facteurs. Toutefois, il existe de nombreuses initiatives qui contribuent à augmenter les taux de déclaration dans tout le pays.

La sénatrice Pate : Ma question s’adresse aux représentantes de Santé Canada. Je vous remercie de l’information que vous avez fournie sur les effets à long terme pour les soins de santé. Je me demande si, avec la vérificatrice générale, l’Agence du revenu du Canada ou le directeur parlementaire du budget, vous avez examiné les économies à long terme qui découleraient de ce genre de prestations et les économies au chapitre des coûts de soins de santé. Et si ce n’est pas le cas, êtes-vous prêtes à entreprendre cette démarche?

Mme Tomson : Je vous remercie de la question.

Nous savons qu’une mauvaise santé buccodentaire a des conséquences sociales et économiques importantes. On vient de parler des salles d’urgence. Les patients qui ont des affections dentaires non urgentes représentent environ 1 % des visites aux urgences, ce qui entraîne des coûts pour le système de soins de santé. En 2017, par exemple, ils étaient estimés à 1,8 milliard de dollars.

Le nombre de jours d’école que les enfants manquent en raison de douleurs buccodentaires est important, soit environ 2,6 millions. De nombreux enfants — 57 % des enfants âgés de 6 à 11 ans — ont une carie et, en moyenne, 2,5 dents sont touchées par la carie. Ce sont là des conséquences importantes d’une mauvaise santé buccodentaire.

C’est un aspect que nous voulons évaluer, en particulier du point de vue de la prévention et compte tenu du fait qu’il est important d’investir dans des mesures préventives pour réaliser des économies par la suite, notamment lorsqu’il s’agit des enfants. Une détection et des soins précoces feront en sorte que les coûts seront moindres dans l’ensemble du système.

Je n’ai pas de détails sur le programme et sur les résultats quantitatifs que nous essayons d’atteindre, mais c’est quelque chose que nous examinons lorsqu’il s’agit d’établir un programme à long terme pour les soins dentaires.

Le sénateur Boehm : J’ai examiné un peu l’histoire du rapport de la Commission Rowell-Sirois de 1940 sur les relations fédérales-provinciales — ou les relations entre le Dominion et les provinces comme on les appelait à l’époque —, qui concluait que les soins dentaires devaient faire partie intégrante des services essentiels offerts en matière de santé. Il concluait que compte tenu de la pénurie de professionnels des soins dentaires, il pourrait y avoir un problème. La Commission Hall a tiré une conclusion similaire en 1964.

Ma question s’adresse d’abord au Dr Taylor. Selon votre vue d’ensemble des services dentaires au pays, pensez-vous qu’il y a suffisamment de professionnels dentaires pour faire face à une possible hausse? Cela pourrait-il également favoriser la reconnaissance des titres de compétence des nouveaux arrivants qui viennent au Canada et qui pourraient être qualifiés?

J’aimerais obtenir votre point de vue là-dessus.

Dr Taylor : Merci de votre question, sénateur. Avant de céder la parole à ma collègue, Mme Tomson, pour ce qui est des ressources humaines en santé et de ce que fait Santé Canada à cet égard, comme l’a mentionné un témoin précédent, le principal problème est la répartition des professionnels de la santé buccodentaire, qui s’accompagne d’une pénurie dans les régions rurales, les régions du Nord, les régions éloignées et les centres-villes.

Il y a des problèmes présentement dans plusieurs des professions de santé buccodentaire réglementées en ce qui concerne les chiffres et on s’efforce d’y remédier par la formation, mais je dirais qu’à l’heure actuelle, c’est davantage une question de répartition des professionnels.

Le sénateur Boehm : Merci.

Avez-vous peut-être d’autres observations?

Mme Tomson : Si je puis me permettre, cette prestation provisoire vise les enfants de moins de 12 ans. Nous estimons à environ 500 000 le nombre d’enfants qui y auront accès, répartis dans tout le pays.

Des différences existent d’un bout à l’autre du pays — zones urbaines, rurales et éloignées —, et c’est également la raison pour laquelle le projet de loi permet aux professionnels de la santé buccodentaire — donc pas seulement les dentistes, mais aussi les hygiénistes et différents praticiens — de s’assurer qu’il y a toujours un accès partout au pays.

À plus long terme, en ce qui concerne les éléments que vous avez mentionnés quant à la reconnaissance des titres de compétences ou à d’autres mesures que nous pourrions appuyer pour la formation professionnelle, ce sont tous des éléments que nous prenons en compte lorsque nous songeons au programme à plus long terme.

Le sénateur Boehm : Mes prochaines questions s’adressent au représentant de l’Agence de la santé publique du Canada, mais les représentantes de Santé Canada pourraient également vouloir y répondre.

L’un des plus grands problèmes concernant les prestations c’est de s’assurer que non seulement les personnes admissibles présentent une demande, mais aussi qu’elles savent que le programme existe. Nous avons entendu parler d’initiatives de sensibilisation qui ont été entreprises, en particulier auprès des populations difficiles à joindre et vulnérables.

J’aimerais savoir s’il existe un plan pour diffuser l’information dans d’autres langues que l’anglais et le français, notamment dans les langues autochtones et dans d’autres langues, ce qui permettrait d’inclure les nouveaux arrivants au Canada.

Enfin, comme nous l’avons constaté pendant la pandémie de COVID, la mésinformation et la désinformation constituent un problème de plus en plus important dans de nombreux domaines et la santé, bien sûr, ne fait pas exception. A-t-on des préoccupations au sujet de la mésinformation en ce qui a trait à la prestation dentaire canadienne et à la santé buccodentaire en général? Si oui, existe-t-il un plan pour lutter contre cela?

Dr Taylor : Merci de la question, sénateur

Je m’en remets à ma collègue de Santé Canada, car c’est au sein du ministère que la campagne de communication se déroulera pour ce programme. Je conviens que la sensibilisation en sera un élément important.

Mme Tomson : Merci.

Nous prévoyons mettre en œuvre un vaste programme de communication et de sensibilisation. Cela a déjà été mis en branle avec la campagne « Préparez-vous ». Une fois que le Parlement aura adopté le projet de loi et qu’il aura reçu la sanction royale, un autre programme sera lancé.

Il repose sur deux ou trois piliers. Il y aura une vaste campagne sur Internet et dans les médias sociaux. Nous envisageons également de faire de la publicité et de préparer des documents qui pourraient être téléchargés par divers professionnels de la santé buccodentaire afin de pouvoir vraiment communiquer avec les diverses populations. Un programme très bien pensé est en place.

C’est une prestation. Lorsqu’on dit qu’il pourrait y avoir confusion, nous voulons vraiment être clairs sur le fait qu’il s’agit d’une prestation provisoire d’une durée de deux ans seulement, le temps que le gouvernement fédéral mette en place un programme. Ce n’est pas un programme. Il s’agit d’une prestation provisoire destinée à soutenir les enfants dans un premier temps, pendant que nous envisageons de l’élargir, conformément aux paramètres du budget.

Nous obtiendrons des statistiques de l’ARC pour savoir quel est le taux d’accès dans chaque province afin de toujours pouvoir adapter la campagne.

En ce qui concerne les différentes langues, c’est ce que j’ai compris, mais je cède la parole à ma collègue, la directrice générale, Lindy VanAmburg, qui est responsable du Groupe de travail des soins dentaires et qui vous en dira un peu plus à cet égard.

Le président : Madame Tomson, c’est à vous que s’adresseront mes observations. Pouvez-vous envoyer par écrit les renseignements supplémentaires à la greffière s’il vous plaît afin que tous les sénateurs ici présents puissent poser des questions aux quatre ministères ou organismes?

Acceptez-vous, madame Tomson, de répondre à cette dernière question par écrit?

Mme Tomson : Absolument.

La sénatrice Duncan : Je remercie les témoins qui comparaissent devant nous aujourd’hui.

Ma question se fonde sur la question du sénateur Boehm sur la disponibilité des services. Il a été question des régions du Nord, des régions éloignées et rurales et de l’accès aux services.

Les services dentaires sont couverts par le Programme des services de santé non assurés, de sorte que la population autochtone n’aura pas nécessairement accès à ces services. Les services dentaires sont couverts par le programme, mais tout dépend aussi de la possibilité d’accéder à ces services.

J’aimerais savoir s’il y a un plan pour s’assurer que non seulement les services seront disponibles dans les régions du Nord, éloignées et rurales, mais qu’ils le resteront et que nous n’assisterons pas à une fuite des services vers le sud du Canada où ils sont déjà offerts.

Mme Tomson : Je vous remercie de la question.

Comme vous l’avez mentionné, le Programme des services de santé non assurés est un programme public complet fondé sur les besoins médicaux. Il n’est pas fondé sur le revenu.

Il s’agit vraiment ici de combler les lacunes. C’est pour les services de soins dentaires.

Encore une fois, on parle d’une prestation provisoire destinée à fournir un certain accès aux enfants âgés de moins de 12 ans. Nous ne nous attendons pas — nous avons consulté diverses associations et je crois que certaines d’entre elles comparaîtront devant le comité plus tard — à ce qu’il y ait un tel mouvement au cours des deux prochaines années.

La sénatrice Duncan : Je vous remercie. Cela montre que la mesure vise davantage le Sud du Canada que le Nord, car nous accédons aux services différemment. Je soutiens pleinement cette initiative.

J’aimerais simplement poursuivre avec l’ARC au sujet de ma préoccupation, à savoir que des personnes seront prises dans un enchevêtrement bureaucratique lorsqu’elles produiront leur déclaration de revenus et communiqueront avec l’ARC en ce qui a trait à cette prestation.

Si je pouvais demander à la représentante de l’ARC de nous expliquer comment l’agence a l’intention de gérer ce programme de prestations dans la mesure où il recoupe le Programme des services de santé non assurés auquel ont accès des habitants du Nord canadien. De plus, où avons-nous obtenu certains des chiffres concernant les avantages du programme?

Mme Pranke : Je vous remercie de la question, monsieur le président. Je crois que ma collègue, Mme Tomson, voudra ajouter quelque chose en ce qui concerne certains des chiffres.

Pour répondre à votre question sur la communication avec l’ARC et l’expérience de service des demandeurs — et vous parlez particulièrement de ceux des régions rurales et du Nord —, nous travaillons actuellement à nous assurer que nous avons élargi les activités de notre centre de contact. Des employés pourront répondre aux questions et aider les gens dans le processus de demande s’ils ne peuvent pas ou ne veulent pas faire une demande de prestation dentaire en ligne.

J’aimerais également souligner qu’en 2019, trois centres de services du Nord ont été créés, dont le personnel est composé d’employés de l’ARC. À peu près au même moment, une ligne spécialisée a été établie pour les résidants du Nord. Il y a aussi une ligne spécialisée pour les gens de cette collectivité qui est disponible et qui est entièrement accessible aux habitants du Nord.

On s’attend à ce que les gens puissent faire leur demande en ligne ou par téléphone. Nous nous efforçons de faire en sorte que l’expérience de service soit la plus positive possible.

Il y avait une question au sujet de la langue et de l’accessibilité des renseignements. Je peux vous dire qu’il y a actuellement des renseignements sur l’Allocation canadienne pour enfants, qui est la porte d’entrée de la prestation dentaire canadienne proposée. En effet, les renseignements sur l’Allocation canadienne pour enfants sont offerts dans 12 langues autochtones. Ces renseignements sont donc actuellement accessibles. Nous envisagerons d’élargir l’accessibilité si ce projet de loi est adopté par la Chambre et reçoit la sanction royale.

Le président : Je vous remercie, sénatrice Duncan.

Honorables sénateurs et mesdames et messieurs les témoins, trois autres sénateurs prendront la parole pour terminer cette série de questions. Il s’agit des sénateurs Loffreda, Harder et Dagenais. Si le temps ne nous permet pas d’entendre les réponses aux questions, je demanderai aux représentants des ministères en question d’envoyer le reste de leurs réponses par écrit. Sommes-nous d’accord sur ce point, mesdames et messieurs les témoins? D’accord.

Le sénateur Loffreda : Je remercie les témoins d’être ici. Je me réjouis de l’arrivée de cette prestation. Je pense que tous les Canadiens devraient avoir accès aux soins dentaires, car c’est très important pour l’état de santé général.

Dr Taylor a déclaré qu’il s’agit de 1,7 milliard de dollars supplémentaires dans une industrie de 17 milliards de dollars. Cette augmentation de 10 % ne va pas bouleverser l’industrie, mais je suis certain qu’un grand nombre de personnes affirmeront le contraire. Toutefois, de nos jours, je suis sûr que de nombreux entrepreneurs accueilleraient favorablement une augmentation de 10 % de leur volume d’activités.

Ce qui me préoccupe, c’est la capacité. En effet, au cours de mes discussions — et vous pourrez peut-être confirmer les faits —, on m’a dit que nous ne manquons pas de dentistes, mais peut-être d’hygiénistes dentaires. Cela fera-t-il augmenter la demande ou les salaires au point que l’inflation devienne un problème?

Je pense à l’impact sur les entreprises, car vous avez mentionné, docteur Taylor, que 25 % des Canadiens n’ont pas d’assurance dentaire et 22 % d’entre eux ne reçoivent pas de soins dentaires en raison des coûts. Toutefois, 75 % des Canadiens ont une assurance-maladie. Si nous nous projetons dans l’avenir et que cette mesure est élargie — ou même aujourd’hui —, les entreprises songeront-elles à éliminer l’assurance, ce qui aura un effet boomerang dans lequel un nombre encore moins élevé de Canadiens auront accès aux soins dentaires?

Dr Taylor : Je vous remercie, sénateur, de cette question. Pour ce qui est de l’accessibilité, je m’en remets à mes collègues de Santé Canada, en particulier en ce qui concerne l’effet boomerang.

Je peux toutefois affirmer que oui, en effet, il y a des pénuries d’hygiénistes dentaires et d’assistants dentaires. Mais encore une fois, le problème concerne leur répartition, c’est-à-dire leur nombre dans les régions rurales comparativement à leur nombre dans les banlieues et les régions urbaines.

Nous tenons compte de cet élément dans les discussions que nous avons actuellement. Nos collègues de Santé Canada consultent actuellement les associations professionnelles et la communauté universitaire qui forme ces professionnels pour savoir exactement comment intégrer cette dynamique dans les plans à venir. Je demanderais donc à mes collègues de Santé Canada de vous donner plus de précisions au sujet de ces discussions.

Mme Tomson : Puisque le temps est limité, comme je l’ai mentionné, ce projet de loi qui sera renvoyé au comité porte sur une prestation provisoire de deux ans qui vise les enfants.

Selon nos discussions avec des intervenants de l’industrie, nous ne prévoyons pas qu’il y aura des déplacements à l’heure actuelle pour cette prestation. Ce sont toutes des questions importantes que vous avez soulevées.

Les déplacements représentent une préoccupation. La formation des professionnels en soins de santé buccodentaire est une autre préoccupation. Ce sont tous des éléments dont nous devons tenir compte dans le cadre de notre réflexion sur la conception de ce programme à plus long terme.

Le sénateur Loffreda : Je vous remercie.

Le sénateur Harder : J’aimerais formuler deux brefs commentaires et poser ensuite une question.

Tout d’abord, j’encouragerais les responsables, dans le cadre de leurs efforts pour élargir le programme, à considérer plus directement la question de la capacité, surtout en ce qui concerne la répartition.

Deuxièmement, je vous encouragerais à justifier les coûts en misant davantage sur les résultats en matière de santé, mais aussi sur les économies potentielles, comme l’a déjà dit Dr Taylor, si on évite des visites dans les services d’urgence. Je soupçonne qu’il y a d’autres coûts liés aux soins de santé qui n’ont pas encore été abordés dans la documentation.

Ma question — et je n’aurais aucun problème à recevoir une réponse par écrit — concerne le fait que le directeur parlementaire du budget a déclaré plus tôt aujourd’hui que les coûts administratifs cernés dans ces documents étaient « très généreux ». Je présume qu’en jargon bureaucratique, cela signifie qu’ils sont « très gonflés ». Est-ce aussi votre avis? Si oui, comment avez-vous calculé le montant des coûts administratifs? Je vous remercie.

Le président : À qui s’adressait votre question, sénateur Harder?

Le sénateur Harder : Aux experts en matière de coûts administratifs. Je présume que Mme Pranke et Mme Tomson sont les principales responsables.

Mme Pranke : Je vous remercie de la question, monsieur le président. Je peux répondre en premier.

Nous avons travaillé en étroite collaboration avec nos collègues de Santé Canada en ce qui concerne plus particulièrement la prestation dentaire canadienne, c’est-à-dire la prestation proposée, afin de déterminer quelle serait notre part des coûts pour verser la prestation. Bien entendu, le ministère paie également sa part des coûts.

Je peux vous dire que nous avons tiré de nombreuses leçons de la mise en œuvre de prestations conçues dans un délai très court. Par exemple, de nombreuses leçons ont été tirées de la PCU et d’autres prestations, et c’est la raison pour laquelle, vous savez, il faut lier la prestation dentaire canadienne à une année d’imposition, afin de pouvoir évaluer clairement l’admissibilité.

En ce qui concerne plus précisément les exigences de l’Agence du revenu du Canada, nous nous assurons que nous avons le niveau de couverture approprié pour fournir le service. Ces prestations sont offertes aux citoyens. Selon la proposition, la prestation serait lancée le 1er décembre, et nous veillerons donc à ce que le centre de services dispose de la capacité nécessaire pour servir les citoyens pendant la première période de demande, qui se termine le 30 juin.

Le président : Madame Pranke et madame Tomson, pourriez-vous envoyer le reste de vos réponses à cette question par écrit, s’il vous plaît?

[Français]

Le sénateur Dagenais : Les témoins pourront nous répondre par écrit.

Ma première question s’adresse à Mme Pranke. Vous êtes chargée d’administrer le programme de soins dentaires au sein d’un programme existant. Vous êtes à l’Agence du revenu du Canada. On sait que l’ARC a dû engager des fonctionnaires de plus pour administrer les prestations d’urgence comme la PCU et la PCRE. Je présume que vous devrez engager des fonctionnaires de plus pour administrer le volet des soins dentaires.

Combien de fonctionnaires supplémentaires comptez-vous engager? On parle, bien entendu, de soins dentaires. Il s’agira donc de personnel qui aura des connaissances dans le domaine des soins dentaires. Est-ce qu’il y aura aussi des sous-traitants? Quel budget supplémentaire sera nécessaire? Vous pourrez répondre à ces questions par écrit si vous le désirez.

Madame Tomson, vous avez parlé des compagnies d’assurance. C’est bien connu, la facture pour un traitement chez le dentiste est toujours plus élevée si le patient possède une assurance que s’il paie de sa poche. D’ailleurs, le directeur parlementaire du budget nous a dit qu’il n’existait aucune grille tarifaire pour encadrer les frais dentaires. Trouvez-vous que l’absence d’encadrement est normale?

Vous pourrez me répondre par écrit si vous le désirez. Les réponses écrites sont toujours les bienvenues, car les écrits restent.

Le président : Nous allons maintenant conclure cette réunion. Un grand merci aux témoins d’avoir comparu aujourd’hui. C’était grandement apprécié.

[Traduction]

Avant de lever la séance, j’aimerais rappeler aux témoins qu’ils doivent remettre leurs réponses par écrit à la greffière au plus tard le mercredi 2 novembre 2022, avant la fin de la journée. Cela dit, j’aimerais également informer les sénateurs que notre prochaine réunion aura lieu demain soir, le mercredi 26 octobre à 18 h 45, afin de poursuivre notre étude sur la teneur du projet de loi C-31. Je vous remercie beaucoup.

(La séance est levée.)

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