LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES FINANCES NATIONALES
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 5 novembre 2024
Le Comité sénatorial permanent des finances nationales se réunit aujourd’hui, à 9 heures (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-279, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu (données sur les organismes de bienfaisance enregistrés).
Le sénateur Claude Carignan (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Bonjour à tous. Honorables sénateurs, bienvenue.
[Traduction]
Avant de commencer, je voudrais demander à tous les sénateurs et aux autres participants en personne de consulter les cartes sur la table pour connaître les lignes directrices sur la prévention des incidents liés à la rétroaction acoustique. Assurez-vous de garder votre oreillette loin de tous les microphones en tout temps. Lorsque vous n’utilisez pas votre oreillette, placez-la face vers le bas sur l’autocollant placé sur la table à cette fin. Je vous remercie tous de votre collaboration.
Je souhaite la bienvenue à tous les sénateurs, ainsi qu’aux téléspectateurs de partout au pays qui nous regardent sur sencanada.ca.
[Français]
Je m’appelle Claude Carignan, je suis un sénateur du Québec et je suis président du Comité sénatorial permanent des finances nationales. J’aimerais maintenant demander à mes collègues de se présenter, en commençant par ma gauche.
Le sénateur Forest : Bonjour. Éric Forest, division du Golfe, au Québec.
La sénatrice Galvez : Rosa Galvez, du Québec.
Le sénateur Dalphond : Pierre Dalphond, division De Lorimier, au Québec.
Le sénateur Loffreda : Bonjour. Tony Loffreda, du Québec.
[Traduction]
La sénatrice Senior : Paulette Senior, de l’Ontario.
La sénatrice Pate : Kim Pate, et je vis ici, sur le territoire non cédé et non abandonné des Algonquins Anishinabe. Bon anniversaire, sénatrice Omidvar.
La sénatrice MacAdam : Jane MacAdam, de l’Île-du-Prince-Édouard.
La sénatrice Ross : Bonjour. Krista Ross, du Nouveau-Brunswick.
La sénatrice Marshall : Elizabeth Marshall, de Terre-Neuve-et-Labrador.
Le sénateur Smith : Sénateur Larry Smith, de Saurel, au Québec.
[Français]
Le président : Merci. Honorables sénateurs et sénatrices, nous continuons notre étude du projet de loi S-279, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu (données sur les organismes de bienfaisance enregistrés), qui a été renvoyé à ce comité par le Sénat du Canada le 30 mai 2024.
Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui l’honorable Ratna Omidvar. Comme la sénatrice Pate l’a dit, elle a rajeuni d’un an, on le voit très bien. On vous souhaite un joyeux anniversaire. Merci d’avoir accepté notre invitation, en cette importante journée, de prendre le petit déjeuner avec nous. Nous vous allouons 5 à 10 minutes pour prononcer votre allocution d’ouverture et ensuite nous aurons des questions et des réponses. La parole est à vous, sénatrice.
[Traduction]
L’honorable Ratna Omidvar, ancienne sénatrice et marraine du projet de loi : Je remercie le sénateur Carignan et les membres du comité. Je dois dire que c’est un cadeau d’anniversaire d’un autre genre que de se lever et de comparaître devant un comité, mais ce projet de loi me tient beaucoup à cœur, et je suis donc très heureuse de comparaître devant vous.
Je vous remercie de me permettre de vous parler aujourd’hui du projet de loi S-279, qui modifiera la Loi de l’impôt sur le revenu en prévoyant la collecte de données sur les organismes de bienfaisance enregistrés.
Je n’ai pas élaboré ce projet de loi par moi-même. Il découle en fait de la huitième recommandation du rapport du Comité sénatorial spécial sur le secteur de la bienfaisance intitulé Catalyseur du changement : une feuille de route pour un secteur de la bienfaisance plus robuste. Vous vous souviendrez que ce comité a été créé par l’ancien sénateur Terry Mercer. J’ai eu le privilège d’occuper le poste de vice-présidente aux côtés de la sénatrice Yonah Martin.
Le projet de loi S-279 est une mesure simple et pragmatique qui appuie nos aspirations en matière de lutte contre le racisme, de diversité et d’inclusion se concentrant sur le secteur de la bienfaisance. Comme je l’ai souligné à maintes reprises à la Chambre, chers collègues, ce secteur est un élément essentiel de notre société. Il emploie 2,5 millions de personnes et représente 8,2 % de notre PIB. Pourtant, il n’y a pas de collecte systématique de données sur sa gouvernance à un égard. On ne recueille pas de données systémiques dans l’ensemble, mais, à l’heure actuelle, nous mettons l’accent sur la gouvernance. L’un des défis particuliers tient au fait que nous n’avons pas de données sur les effectifs et les dirigeants du secteur et que l’absence de données nuit à l’élaboration de politiques efficaces parce que, comme nous l’avons dit à maintes reprises, les bonnes politiques sont fondées non pas sur des anecdotes, mais sur des données probantes.
Le projet de loi S-279 propose une mesure modeste, mais essentielle, pour combler cette lacune au chapitre des données probantes en mettant l’accent sur la gouvernance des 85 000 organismes de bienfaisance du Canada. Chacun de ces organismes a un conseil d’administration chargé d’établir les missions, de déterminer les politiques, de surveiller les politiques d’embauche, les politiques d’investissement, et ses membres sont responsables d’assurer le respect, etc. de la réglementation, de sorte que leurs décisions ont des répercussions importantes sur les Canadiens. Si l’on suppose qu’il y a de 10 à 12 administrateurs par organisme de bienfaisance — mes calculs ne sont peut-être pas précis, et les vôtres sont probablement meilleurs —, c’est environ un million de Canadiens qui occupent des postes de gouvernance au Canada. Toutefois, nous ne savons pas encore qui ils sont. Représentent-ils la diversité de la collectivité qu’ils servent? Cette absence de données signifie que, même si les organismes de bienfaisance adoptent souvent la diversité en principe, il se pourrait que ce ne soit pas le cas en pratique. En 2019, le rapport du Comité sur la bienfaisance a souligné la portée considérable du secteur et la nécessité de disposer de données sur la diversité pour mesurer les progrès en matière d’inclusion.
En comparaison, le secteur des entreprises est régi par une loi qui a été approuvée par le Sénat en 2018, le projet de loi C-25, la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Elle obligeait les sociétés ayant une charte fédérale à présenter un rapport annuel sur la diversité démographique de leurs conseils d’administration. De plus, la Loi canadienne sur les sociétés par actions exige que ces sociétés déposent un plan de diversité. D’une certaine manière, elle a créé un cadre pour la surveillance et la promotion de la diversité au sein des conseils d’administration des entreprises. Cependant, il n’y a pas d’exigence équivalente pour le secteur de la bienfaisance, ce qui signifie que, même si la diversité est un objectif, il n’y a pas de données générales ou probantes qui permettent de suivre les progrès.
Afin de combler cette lacune, en 2020, j’ai écrit une lettre ouverte au secteur de la bienfaisance pour recueillir ses propres données sur la diversité. Statistique Canada a réagi et a mené un sondage volontaire auprès de 8 835 participants, dont 6 170 administrateurs. Il s’agissait de la première tentative ciblée de comprendre la diversité au sein de la gouvernance des organismes de bienfaisance. Le sondage a révélé certaines représentations. Comme on s’y attendait, tout allait très bien en ce qui concerne le genre, mais il a montré une sous-représentation importante d’autres groupes en quête d’équité, comme les personnes racisées, les Autochtones, les immigrants et les personnes en situation de handicap.
Bien que le sondage ait été utile, sa portée était limitée parce qu’il était volontaire, qu’il ne résiste pas à des données solides…
Le président : Un instant, s’il vous plaît, sénatrice Omidvar. Nous avons perdu l’interprétation.
Mme Omidvar : D’accord.
Le président : Nous avons réglé le problème. Veuillez poursuivre.
Mme Omidvar : L’enquête menée par Statistique Canada donnait un aperçu, mais elle ne brosse pas un tableau complet du secteur, car il s’agissait d’un sondage volontaire et externalisé. Ses résultats ne sont pas statistiquement significatifs.
Afin d’établir une collecte de données robuste, le projet de loi S-279 propose une solution simple : l’ajout d’une question sur la diversité de la gouvernance aux formulaires T3010 que les organismes de bienfaisance sont tenus de soumettre chaque année à l’Agence du revenu du Canada, ou l’ARC. Cette modification législative conférerait le pouvoir nécessaire, sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu, pour procéder à la collecte de ces données.
La proposition s’appuie sur les principes d’équité en matière d’emploi pour assurer des mesures normalisées et comparables et s’harmonise avec le cadre établi par le Canada aux fins de la collecte de données sur la main-d’œuvre. À l’instar de l’équité en matière d’emploi, chers collègues — je tiens à le souligner —, il ne s’agit pas de quotas, mais de recueillir des preuves. Au cours des 30 dernières années, nous avons tous pu constater que la collecte de données sur la main-d’œuvre par l’entremise des lois sur l’équité en matière d’emploi a transformé le marché du travail canadien en favorisant une plus grande sensibilisation, ce qui pourrait entraîner des changements dans le secteur de la bienfaisance.
Le projet de loi S-279 permettrait la collecte de données annualisées afin d’obtenir une vue d’ensemble des données démographiques et de la diversité de la gouvernance dans l’ensemble du secteur. Ces données pourraient dégager des tendances et des disparités, mais, fait plus important encore, ces renseignements demeureraient agrégés, ce qui préserverait la confidentialité des organisations individuelles et des administrateurs.
Ce projet de loi propose une approche pratique pour appuyer nos aspirations en matière de diversité de la gouvernance dans le secteur de la bienfaisance. J’espère que vous appuierez ce pas en avant réalisable et utile, et j’ai hâte de répondre à vos questions. Merci.
Le président : Merci, sénatrice Omidvar. Nous allons passer aux questions.
La sénatrice Marshall : Bienvenue, sénatrice Omidvar. J’espère que vous commencez votre première journée de retraite sur une bonne note.
J’ai plusieurs questions à vous poser. J’y vais dans le sens inverse. J’ai trouvé que les dispositions d’entrée en vigueur à la fin du projet de loi étaient quelque peu ambitieuses. Supposons, par exemple, que votre projet de loi soit adopté assez rapidement et qu’il reçoive la sanction royale avant Noël. Il s’appliquera à l’année d’imposition qui commence après le 31 mars. Pensez-vous que cette période sera suffisante pour que les organisations puissent réunir l’information nécessaire? Je crois que vous avez dit dans votre déclaration préliminaire qu’il y avait environ un million de personnes dans les structures de gouvernance. Est-ce exact? En outre, dans votre projet de loi, vous employez le terme « autres responsables ». Vous parlez d’« [...] administrateurs, dirigeants, fiduciaires et autres responsables [...] » De qui s’agirait-il? J’essaie de rassembler tout cela pour évaluer si les délais prévus aux articles 5 et 6 sont réalistes.
Mme Omidvar : Merci, sénatrice Marshall. Ce sont d’excellentes questions, comme toujours.
Je crois que le délai est réalisable parce que le formulaire T3010 existe déjà et parce que les définitions que nous utilisons sont établies dans la Loi sur l’équité en matière d’emploi. Il s’agit d’ajouter une autre question à un formulaire que tous les organismes de bienfaisance doivent déjà remplir.
Pour ce qui est du libellé « administrateurs, dirigeants, fiduciaires et autres responsables », je pense que nous l’avons tiré de l’actuel code de l’impôt sur le revenu, parce que c’est celui qui est utilisé. Si je me trompe, je suis certaine que vos autres témoins pourront le signaler.
La sénatrice Marshall : Je crois que vous avez dit qu’un million de personnes font partie de la structure de gouvernance qui vous intéresse. Est-ce le bon chiffre, ou ne vous ai-je pas bien entendue?
Mme Omidvar : Il s’agit d’une supposition, sénatrice Marshall. On dénombre 85 000 organismes de bienfaisance au Canada. D’après mon expérience, ils auraient normalement entre 10 et 12 administrateurs. Si je fais le calcul, j’arrive à un million. Bien entendu, ce chiffre ne comprend pas les gens comme moi qui siègent à deux conseils. C’est un million d’administrateurs différents qui travaillent pour 85 000 organismes de bienfaisance.
La sénatrice Marshall : D’accord, c’est noté.
Lorsque vous parlez de révoquer le statut d’organisme de bienfaisance si les renseignements ne sont pas fournis, pourquoi est-on allé jusqu’à la révocation du statut? Pourquoi ne commencerait-on pas par imposer une amende? Pourquoi n’y aurait-il pas quelque chose comme une punition progressive?
Mme Omidvar : La révocation par l’ARC du statut d’organisme de bienfaisance suit une progression par étapes. On appelle cela une lettre administrative. Alors, bien que j’utilise la révocation, il y a un processus établi à l’ARC. Aucun organisme de bienfaisance ne voit son statut révoqué à tort et à travers. L’ARC ne fait pas cela. En fait, d’après mon expérience, la révocation est souvent ordonnée après trois ou quatre années de négociations et d’améliorations relatives à la non-conformité, etc. C’est une étape importante. Mais la procédure administrative de celle-ci n’est pas immédiate.
La sénatrice Marshall : Merci beaucoup. Je poursuivrai au deuxième tour, s’il vous plaît. J’aurai d’autres questions à poser.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci, sénatrice, de marrainer ce projet de loi important et nos meilleurs vœux d’anniversaire en cette journée.
Ma première question porte sur le fait que — et vous l’avez indiqué — Statistique Canada a fait, de son côté, un sondage qui était volontaire et qui mesurait plus de quatre critères, dont l’âge. Dans ce projet de loi, pourquoi se limiter aux quatre critères identifiés?
[Traduction]
Mme Omidvar : À ma connaissance, la Loi sur l’équité en matière d’emploi désigne quatre groupes qui doivent être mesurés. Sénateur Forest, je ne suis pas au courant pour ce qui est de l’âge, mais on mesure la participation au marché du travail des femmes, des membres de groupes de personnes en situation de handicap, des groupes autochtones et des minorités racisées. Est-ce que cela répond à votre question, sénateur Forest?
[Français]
Le sénateur Forest : Oui. Dans le fond, l’objectif que tout le monde poursuit, et ce projet de loi y contribuerait, c’est d’avoir une plus grande efficience au niveau des clientèles de ces organismes. En fait, nos organismes de bienfaisance sont des acteurs excessivement importants pour améliorer la situation de différentes clientèles fragilisées. Pouvez-vous illustrer comment le fait d’avoir un meilleur portrait des gestionnaires de ces organismes peut contribuer à augmenter l’efficience des organismes de bienfaisance au Canada?
[Traduction]
Mme Omidvar : Je dirais que ce portrait nous aidera à comprendre si les administrateurs, les dirigeants et les fiduciaires des organismes de bienfaisance du Canada reflètent la diversité du pays, des régions, des collectivités et du secteur. Il est important de le savoir. Sénateur Forest, vous siégez probablement au conseil d’administration — c’est certainement mon cas — d’un organisme de bienfaisance. Les conseils d’administration prennent des décisions extrêmement importantes. Ils établissent la mission. Leurs membres sont les ambassadeurs. Ils établissent les politiques relatives aux investissements et aux ressources humaines. Ils embauchent et congédient des gens. Ils gèrent les comptes de placement que les organismes de bienfaisance peuvent avoir. Il est donc important de savoir qui sont ces gens pour avoir une idée de la gouvernance au pays. Nous avons déjà un portrait de celle des entreprises du pays, et je pense que le moment est venu pour nous de mettre les organismes de bienfaisance sur la même voie.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci.
[Traduction]
Le sénateur Smith : Bon anniversaire, sénatrice. Vous paraissez plus jeune que jamais.
Mme Omidvar : Merci.
Le sénateur Smith : L’une des préoccupations soulevées, par exemple, par les petits organismes de bienfaisance, c’est qu’ils ont souvent de la difficulté à recruter des membres du conseil d’administration et que, par conséquent, le non-respect des exigences énoncées dans le projet de loi pourrait avoir une incidence sur leur statut d’organisme de bienfaisance. Pourriez-vous nous éclairer sur cette question? Est-ce un fait dont vous avez tenu compte lorsque vous avez rédigé le projet de loi? S’agit-il d’une préoccupation valable?
Mme Omidvar : Il n’y a aucune obligation de faire autre chose que la déclaration. Il n’y a pas de punition pour le défaut de faire quoi que ce soit, mis à part la déclaration, sénateur Smith. C’est tout ce que nous demandons. Il n’est pas question de quotas. Il ne s’agit pas de dire qu’ils doivent respecter la désignation aux fins de l’équité en matière d’emploi selon leur représentation au pays ou au sein de la population active. Tout ce qu’ils sont tenus de faire, c’est la déclaration. Il n’y a aucun risque qu’un organisme de bienfaisance perde son statut pour quoi que ce soit d’autre que l’inobservation de l’exigence de déclaration. Même dans ce cas, comme je l’ai expliqué à la sénatrice Marshall, c’est un très long processus.
Il ne faut pas oublier non plus que, même s’il y a 85 000 organismes de bienfaisance, bon nombre d’entre eux sont membres de grands organismes sectoriels comme les Fondations communautaires du Canada, Imagine Canada et les Clubs garçons et filles du Canada, qui est un organisme qui chapeaute tous les clubs d’enfants ou d’adolescents. Tous ces organismes-cadres aideront les organismes de bienfaisance à répondre à cette question supplémentaire dans leur formulaire de déclaration.
Le sénateur Smith : Dans la même veine, une approche plus ciblée, axée sur les grandes fondations ou organisations, pourrait-elle être plus efficace pour ce qui est d’atteindre les objectifs du projet de loi sans accabler les petits organismes de bienfaisance? Est-ce une affaire de grands organismes par rapport aux petits? S’agit-il d’un facteur?
Mme Omidvar : Il y a 85 000 organismes de bienfaisance au Canada. C’est une question. Je reconnais que le formulaire T3010 est compliqué à remplir. J’ai travaillé au sein d’organismes de bienfaisance, et j’ai de l’expérience à cet égard. La plupart de ces organismes ont un comptable qui prépare leurs états financiers vérifiés et qui remplit ces formulaires pour eux. La plupart des organismes de bienfaisance fournissent ces renseignements à leur comptable, en fonction de ceux qu’ils recueillent.
Je ne crois pas que cette exigence va gêner excessivement les petits organismes de bienfaisance, surtout si les organisations du secteur les soutiennent par des efforts de renforcement des capacités. Je pense que ce soutien doit faire partie de l’équation. Si le projet de loi entre en vigueur, nous devrons communiquer clairement le fait que c’est une affaire de collecte de données, et non pas de quotas. Il n’y a rien à craindre. Nous devons le préciser.
Le sénateur Smith : Dans votre discours à l’étape de la deuxième lecture, vous avez mis l’accent sur le problème de « l’effet couche de neige » au sein des organismes de bienfaisance, où la diversité des titulaires de postes inférieurs ne se traduit pas par de la diversité au sein de la direction. À votre avis, comment le projet de loi S-279 réglera-t-il ce problème, au-delà des simples déclarations que prévoit son libellé actuel? Y a-t-il des mesures de responsabilisation particulières que vous aimeriez voir mises en œuvre en parallèle avec le projet de loi?
Mme Omidvar : Votre souvenir de mon observation au sujet de « l’effet couche de neige » est tout à fait exact. Je crois très fermement que le secteur souscrit aux objectifs de diversité. Il n’a tout simplement pas les données probantes. Une fois qu’elles seront là et que le ministre présentera un portrait d’ensemble de la diversité de la gouvernance au pays, je crois que les organismes de bienfaisance feront ce qui s’impose et, compte tenu de la dynamique et de la gouvernance qui leur sont propres, ce qu’ils estiment être la bonne chose à faire en fonction de leur mission, de leur région et de leur collectivité. Le Canada est un grand pays. Il y a des organismes de bienfaisance dans les petites et les grandes villes. Il faut être conscient de la diversité de notre pays.
C’est pour cette raison très précise que je n’ai pas exigé le dépôt d’un plan de diversité, sénateur Smith. Je veux que ce projet de loi soit progressif. Je crois que le secteur de la bienfaisance fera ce qu’il faut. Comme je l’ai mentionné, la Loi canadienne sur les sociétés par actions est allée un peu plus loin et exigeait un plan de diversité. Je ne crois pas que ce soit nécessaire. Vous pourrez interroger les témoins des autres groupes, mais je crois fermement que le secteur fera ce qu’il faut une fois que les données seront disponibles.
Le sénateur Smith : Merci.
La sénatrice Galvez : Bon anniversaire, sénatrice Omidvar.
Sénatrice Omidvar, félicitations. Le projet de loi que vous avez présenté est une façon très élégante et simple d’assurer la transparence de ces données importantes que vous cherchez à obtenir. J’ai également fait partie de plusieurs organisations non gouvernementales — ou ONG — et du conseil d’administration d’un organisme à but lucratif. Il ne fait aucun doute que la diversité des conseils d’administration pourra donner lieu à de meilleures décisions qui représentent la société et les collectivités qu’ils servent.
J’aimerais seulement obtenir des précisions. Je crois que l’objectif du projet de loi est d’accroître la transparence. Comme vous l’avez dit, les conseils d’administration déclarent déjà cette information, alors pourquoi pas le secteur des organismes de bienfaisance? L’idée est de rendre ces données publiques. Au bout du compte, nous voulons promouvoir certains changements, et ces changements découleront de la transparence. Selon vous, qui publiera ces résultats? Statistique Canada, les sondages d’analyse ou d’autres ONG qui vont nous parler des lacunes au chapitre de la diversité des conseils d’administration des organismes de bienfaisance?
Mme Omidvar : Sénatrice Galvez, je vous remercie de poser cette question importante.
Le ministre est tenu de déposer chaque année, en juin, un rapport de données agrégées. Vous êtes ingénieure. Vous savez que, lorsqu’on a un ensemble de données, on peut l’examiner, l’analyser et en tirer des conclusions. Je crois que c’est ce qui arrivera. Une fois que le ministre aura déposé le rapport devant les deux Chambres du Parlement, les organismes de bienfaisance pourront se comparer aux données nationales, régionales ou même sectorielles sur la participation au marché du travail. Les données sont comme des pièces d’or. On peut les examiner, les analyser, les faire briller et les frotter, et elles raconteront toujours une histoire plus détaillée selon la façon dont on les regarde.
La sénatrice Galvez : Mon collègue, le sénateur Forest, a mentionné quatre critères. Vous attendez-vous à ce qu’au fil du temps, on demande de plus en plus de renseignements afin d’obtenir un meilleur portrait, d’obtenir une meilleure transparence et de favoriser certains changements nécessaires dans le secteur?
Mme Omidvar : Merci, sénatrice Galvez; c’est une question importante.
Ce projet de loi est lié à la Loi sur l’équité en matière d’emploi. Lorsque cette loi sera modifiée — je crois que nous nous attendons tous à ce qu’elle le soit au cours des prochaines années —, l’article du projet de loi reflétera les modifications apportées par le gouvernement du Canada au droit régissant l’équité en matière d’emploi.
Le sénateur Loffreda : Bienvenue au comité, sénatrice Omidvar, et bon anniversaire. Félicitations pour l’héritage remarquable que vous nous avez laissé au Sénat. Bonne chance dans vos projets ultérieurs.
Je suis d’accord pour dire que les personnes qui possèdent les données possèdent l’avenir, alors les données sont importantes.
J’aimerais approfondir la question de la révocation et de la lettre du 30 mai que les membres de la Coalition pour les données fédérales sur le secteur à but non lucratif ont publiée. Elle s’adressait aux sénateurs, aux députés et aux ministres. Les membres de la coalition appuient l’intention du projet de loi S-279, y compris Imagine Canada, dont un représentant comparaîtra au sein de notre deuxième groupe de témoins. Cependant, au moment où ils écrivent, ils ne croient pas que les organismes de bienfaisance devraient risquer de perdre leur statut parce qu’ils n’ont pas fourni les données pertinentes, comme le prévoit l’article 3 du projet de loi. La coalition demande que le projet de loi soit amendé.
Que pensez-vous de cette proposition? Êtes-vous réceptive à leur point de vue ou maintenez-vous que la déclaration doit être obligatoire? Le non-respect de cette exigence pourrait entraîner des conséquences. Je rappelle que la Loi de l’impôt sur le revenu prévoit que le ministre peut révoquer l’enregistrement. Ce n’est pas automatique. Vous avez discuté des détails.
C’est un point important et une lettre importante qui a été adressée aux sénateurs, aux députés et aux ministres. J’aimerais savoir ce que vous en pensez.
Mme Omidvar : Merci, sénateur Loffreda.
Je voulais donner du mordant au projet de loi. Comme vous le savez peut-être, la Loi canadienne sur les sociétés par actions, avec la révision du projet de loi C-25 que nous avons approuvée en 2018, n’a aucun mordant. Bien que certaines entreprises effectuent la déclaration, d’autres le font faiblement ou partiellement, et le tableau n’est pas très convaincant sur le plan de la collecte des données. Afin de nous assurer que les exigences en matière de données sont respectées, j’ai inséré la question de la révocation qui, comme je l’ai dit, est une dernière étape. Toutefois, sénateur Loffreda, nous sommes en comité. Si le secteur estime qu’il faudrait énoncer de façon plus précise que des mesures administratives devraient être prises pour régler les cas de non-conformité, bien sûr, je serais ouverte à cette idée, tout comme le comité, je l’espère.
Le sénateur Loffreda : Je vous remercie de cette réponse.
Autre question : j’ai examiné les conclusions de l’exercice de consultation électronique du Comité sénatorial spécial. Comme vous vous en souvenez peut-être, la question 9 du sondage portait sur les défis liés à la gouvernance. On a demandé aux répondants d’expliquer en quoi quatre défis différents liés à la gouvernance étaient préoccupants pour leur organisation. Seulement 18 % des répondants ont dit qu’il est très préoccupant d’assurer la diversité parmi les membres du conseil d’administration et les cadres supérieurs. Dans quelle mesure êtes-vous préoccupée par le fait que seulement 18 % des répondants s’inquiètent de la diversité au sein de leurs conseils d’administration et chez leurs cadres supérieurs? C’est peu. Pensez-vous que le résultat est attribuable au manque de sensibilisation? Faut-il rappeler aux organismes de bienfaisance canadiens l’argument en faveur de la diversité ainsi que les avantages qui sont associés à celle-ci? Nous le savons tous les deux. J’ai siégé à 21 conseils d’administration avant d’être nommé au Sénat. Je crois en la diversité, mais je suis surpris de ce résultat.
Mme Omidvar : Il m’a surprise, moi aussi. Lors des témoignages devant le Comité sénatorial sur le secteur de la bienfaisance, comparativement aux 18 %, nous avons entendu dire qu’il y avait des préoccupations au sujet de la diversité dans ce secteur, et c’est pourquoi la recommandation a été intégrée au rapport.
Une partie de ce manque de sensibilisation vient peut-être du sentiment que ce n’est pas important ou nécessaire. Il pourrait provenir de l’emplacement de l’organisme de bienfaisance. Il peut provenir de groupes ethnospécifiques qui ne se préoccupent pas du tout de la représentation. Le Comité sénatorial sur le secteur de la bienfaisance s’est servi de cette question comme point de départ, mais pas en tant que donnée probante.
Le sénateur Loffreda : Merci.
La sénatrice MacAdam : Je suis heureuse de vous revoir, sénatrice Omidvar. Bon anniversaire. Merci d’être des nôtres aujourd’hui.
Je lisais la réponse du gouvernement, rédigée en 2021, au rapport du Comité sénatorial spécial sur le secteur de la bienfaisance, plus précisément sa réponse à la recommandation 8, sur laquelle, comme vous l’avez dit dans votre discours à l’étape de la deuxième lecture, le projet de loi S-279 est fondé. Bien que le gouvernement ait appuyé la recommandation, dans la réponse, l’ancienne ministre mentionne le rôle du CCSB, le Conseil consultatif sur le secteur de la bienfaisance, qui, si j’ai bien compris, est un forum consultatif permettant au gouvernement du Canada d’engager un dialogue constructif avec le secteur de la bienfaisance. Dans sa réponse, le gouvernement dit qu’il demandera au CCSB d’envisager de mener une étude plus approfondie sur cette question, et si le CCSB décide d’examiner la question, l’Agence du revenu du Canada examinera et étudiera les recommandations qui en résulteront.
Savez-vous s’il y a eu d’autres études ou examens? Quels sont les recommandations ou les principaux points à retenir de ce processus?
Mme Omidvar : Merci.
Vous entendrez plus tard Bruce MacDonald, qui a siégé à la première version du CCSB. Nous avons eu une rencontre avec l’ARC. Le conseil consultatif donne des conseils; il ne fait pas la loi. De fait, ce n’est pas l’ARC qui fait la loi. C’est le ministre des Finances qui fait les lois.
J’avais espéré que je pourrais simplement m’adresser à la ministre responsable de l’ARC et que nous pourrions, par voie réglementaire, ajouter une autre question au formulaire T3010, mais c’est impossible. Il faut modifier la Loi de l’impôt sur le revenu pour ajouter une question de ce genre à ce formulaire.
Je ne connais pas les recommandations du conseil concernant la diversité dans le secteur. Il s’est reconstitué après une pause de deux ans. Vous pourriez peut-être poser cette question à M. MacDonald.
La sénatrice MacAdam : Merci.
Mme Omidvar : Sénatrice MacAdam, je devrais également dire que ce conseil formule des recommandations. On ne les suit pas nécessairement. La loi devient la loi pour tout le monde.
La sénatrice MacAdam : Je m’interroge sur le fardeau administratif que représentent pour les organismes de bienfaisance les nouvelles exigences en matière de déclaration. Avez-vous des renseignements à ce sujet ou quoi que ce soit dont vous pourriez nous faire part?
Mme Omidvar : J’ai entendu des représentants d’organismes de bienfaisance, surtout des plus petits, affirmer que ces exigences alourdiraient leur fardeau. Le formulaire T3010 n’est pas simple à remplir, mais le projet de loi ajoute une question, et c’est la suivante, comme je l’imagine : combien d’administrateurs avez-vous? On inscrit le nombre d’administrateurs. Combien correspondent à la définition des groupes désignés aux fins de l’équité en matière d’emploi? Il y aurait quatre cases. Voilà ce qu’ils auraient à faire.
Bien sûr, il y a des administrateurs, des dirigeants et des fiduciaires qui peuvent choisir de ne pas s’autodéclarer. C’est la Loi sur la protection des renseignements personnels. L’organisme de bienfaisance ne peut divulguer que la réponse qu’il reçoit de l’administrateur. Ce serait cela la question.
Je vous dirais qu’avec l’appui d’organisations du secteur comme Imagine Canada, les Fondations communautaires du Canada et Fondations philanthropiques Canada, on pourrait renforcer les capacités suffisamment pour ne pas ajouter au fardeau du secteur de la bienfaisance.
Ses représentants, lorsqu’ils nous ont parlé, étaient à l’avant-garde des aspirations en matière de diversité et d’inclusion. Je fais partie de la communauté. J’ai lu les blogues. J’ai lu les bulletins. Ils sont extrêmement préoccupés par les dons de bienfaisance versés aux organismes autochtones et noirs, peu importe où ils se trouvent au Canada. C’est leur aspiration. Je pense que c’est leur façon de joindre le geste à la parole.
La sénatrice MacAdam : Merci.
[Français]
Le sénateur Dalphond : Bon anniversaire, chère collègue. Ce n’est qu’une journée de plus, mais c’est une journée où vous commencez à nous manquer.
Ma question porte sur les données. Ce qui est proposé, c’est un rapport annuel par le ministre, déposé dans les deux Chambres, qui donne les données brutes sur le nombre de fiduciaires, d’administrateurs et de dirigeants des fondations de façon générale dans tout le pays. Le danger des statistiques, c’est que plus elles sont larges et générales, moins elles nous donnent d’informations et plus elles peuvent cacher des choses. Je me demandais si les données ne devraient pas être publiées sous forme plus régionale, par exemple par territoire ou par province, pour montrer s’il y a des régions où il y a davantage de progrès et d’autres régions où il y en a moins, tout en préservant l’anonymat que vous cherchez à préserver. Qu’est-ce que vous pensez de cela?
[Traduction]
Mme Omidvar : Je pense qu’il est tout à fait possible qu’une fois que les données nationales agrégées seront disponibles, on puisse les ventiler par région, par secteur et par mission, peu importe comment vous les appelez. Ce sera certainement possible, j’espère, sénateur Dalphond.
Le sénateur Dalphond : Puisqu’il s’agit d’un projet de loi « S », si on apporte un amendement, vous ne vous y opposeriez pas, si j’ai bien compris.
Mme Omidvar : Non, je ne m’y opposerais pas.
Le sénateur Dalphond : Merci.
Vous avez également dit qu’il n’y avait pas de plan de diversité, contrairement à la Loi canadienne sur les sociétés par action — ou LCSA —, alors devrions-nous également poser la question suivante : avez-vous un plan de diversité? Une simple question, ne pas rendre cela obligatoire, mais dans la réponse de ces organisations, qu’elles fournissent également des données sur l’existence ou l’inexistence d’un plan de diversité?
Mme Omidvar : Je ne crois pas que le fait d’obliger les organismes de bienfaisance à déposer un plan de diversité serait un bon amendement ou une bonne exigence dans ce projet de loi. Comme je l’ai dit, le secteur aspire déjà à la diversité. Il a besoin de données probantes pour s’assurer que les aspirations sont suivies de politiques.
Selon moi, cette obligation aurait aussi pour effet d’alourdir incroyablement le fardeau des organismes de bienfaisance. N’oubliez pas que, contrairement aux sociétés, ils n’ont pas de service des ressources humaines. Ils n’ont pas d’employés qui sont uniquement responsables de la conformité avec le gouvernement. Je crois que ce serait une mesure très onéreuse, et je recommanderais fortement que l’on ne la prenne pas.
Je devrais aussi vous demander, sénateur Dalphond, et vous connaissez probablement la réponse : à quoi servent les plans de diversité prévus dans la LCSA? On les met sur une tablette et on ne les regarde jamais.
Le sénateur Dalphond : Merci.
La sénatrice Kingston : Bon anniversaire, sénatrice Omidvar. Je suis heureuse de vous revoir cette semaine. J’en suis ravie.
Je vais poser une question en fonction de certains renseignements que nous avons reçus et qui ont été créés par Imagine Canada. Le Nouveau-Brunswick en a été exclu, et cela m’a donc particulièrement intéressé. Pour ce qui est de la désagrégation des données, les organismes de bienfaisance ne naissent pas tous égaux, entre guillemets. Imagine Canada signale qu’il y a des organismes communautaires sans but lucratif, des entreprises sans but lucratif et des organismes gouvernementaux sans but lucratif. Je me demande si vous ou les gens du secteur êtes préoccupés par les différences entre les types d’organismes de bienfaisance, si on veut, en ce qui concerne leur capacité ou leur aspiration à créer l’environnement diversifié dont nous avons besoin.
Mme Omidvar : Le projet de loi ne s’applique qu’aux organismes de bienfaisance enregistrés par le gouvernement du Canada et qui ont le privilège — un privilège extraordinaire, devrais-je ajouter — de recevoir des dons que des particuliers leur ont versés, lesquels peuvent être déduits de leurs impôts. Il ne vise pas les organismes sans but lucratif. Il s’applique non pas aux organismes à vocation sociale ou à toute autre organisation, mais seulement aux 85 000 organismes de bienfaisance enregistrés.
La sénatrice Kingston : Les universités, par exemple, ont le statut d’organisme de bienfaisance et, par conséquent, elles font partie d’une catégorie distincte, à mon avis, pour ce qui est de la capacité de faire certaines choses, contrairement aux petits organismes de bienfaisance. Quels seraient vos commentaires à ce sujet?
Mme Omidvar : Les universités sont des organismes de bienfaisance, alors elles devront effectuer la déclaration si le projet de loi est adopté.
Dans un certain sens, votre question est à celle du sénateur Dalphond. Les données nationales pourraient être désagrégées. Par exemple, Universités Canada pourrait vouloir examiner la gouvernance des universités et des collèges au Canada. Ce n’est pas un petit bassin, mais ce n’en est pas un grand non plus.
Je dois également insister sur le fait que la confidentialité ne devrait en aucun cas être compromise. Il ne s’agit pas de dénoncer et d’humilier. Il s’agit de recueillir des données probantes. Si la désagrégation est faite de façon responsable, et j’imagine que l’ARC aura un rôle à jouer dans la façon dont elles seront désagrégées ou quant aux données qui seront fournies aux fins d’une analyse plus approfondie... j’espère que ce genre de désagrégation permettra de tirer une leçon qui pourra ensuite être appliquée.
La sénatrice Kingston : Merci.
La sénatrice Ross : Bonjour, et permettez-moi d’ajouter mes vœux d’anniversaire à tous les autres que vous avez reçus aujourd’hui. C’est formidable de vous voir ce matin.
Lorsque j’étais à l’emploi de la Chambre de commerce de Fredericton, nous étions un membre fondateur du Défi 50-30. Cette semaine, nous en étions à près de 3 000 organisations qui ont accepté de relever ce défi, ce qui est positif, mais pas énorme. Croyez-vous que, même s’il ne s’agit que d’une déclaration et d’une collecte de données, les prochaines étapes seront des quotas et des objectifs comme ceux que préconise le Défi 50-30? Espérez-vous que la réglementation de la composition et de la structure du conseil d’administration se concrétisera?
Mme Omidvar : Sénatrice Ross, je suis ravie de vous voir. Merci à vous tous pour vos bons vœux d’anniversaire.
Je déteste le mot « quotas ». Il ne s’agit pas de quotas. En fait, cette mesure pourrait amener les organismes de bienfaisance à se fixer un objectif et à l’atteindre au fil du temps. Elle pourrait les amener à modifier leurs politiques... par exemple, s’ils sont dotés ou non d’un comité des candidatures, ou bien ils pourraient envisager de limiter la durée des mandats. Le cœur et la gloire des personnes qui sont nommées résident dans les politiques de gouvernance de ces organismes. Le secteur pourra décider lui-même de lancer un défi, 50-30, quel qu’il soit, et de s’engager sur cette voie, mais pas le projet de loi.
La sénatrice Ross : À titre de suivi, oui, je suis d’accord; certes, le Défi 50/30 est ambitieux. J’ai constaté au sein de notre organisation qu’il avait modifié le comportement et les objectifs de notre comité des candidatures. Je pourrais ajouter que ce défi a changé la composition de notre conseil d’administration de façon assez radicale. Même si ce n’est pas l’objet du projet de loi, j’aimerais savoir si vous espérez que ce soit le résultat qu’il finira par produire.
Mme Omidvar : Oui.
La sénatrice Ross : Peter Drucker a dit qu’on ne peut pas améliorer ce qu’on ne peut pas mesurer.
Mme Omidvar : Vous l’avez dit, madame la sénatrice. Vous avez tout à fait raison. C’est mon aspiration.
La sénatrice Ross : Merci beaucoup.
La sénatrice Pate : Sénatrice Omidvar, je vous remercie d’attirer l’attention sur le fait qu’il ne s’agit que d’une des facettes de votre important travail au Sénat.
J’aimerais que nous abordions un volet légèrement différent de la question, étant donné qu’il s’agit d’une aspiration. Avant d’être au Sénat, j’ai moi aussi passé la plus grande partie de ma vie professionnelle, comme vous le savez, dans le secteur de la bienfaisance et au sein d’organisations qui aspiraient non seulement à éviter « l’effet couche de neige », comme vous l’avez décrit, mais aussi à faire participer plus de femmes et à accroître la diversité en général.
Vendredi, j’ai rencontré une organisation qui a du mal à attirer des gens vers le travail qu’elle fait. Les petites organisations servent souvent des groupes qui ne sont pas toujours les plus populaires, pas de grands groupes comme Imagine Canada ou d’autres grands organismes de bienfaisance, mais certains des plus petits qui triment dur pour essayer d’atteindre la diversité et qui emploient des moyens créatifs, mais qui n’ont pas les ressources nécessaires pour faire venir les gens qu’ils veulent avoir au sein de leur conseil d’administration dans le cadre de leur gouvernance. Certains ont recours à des organismes consultatifs. D’autres embauchent occasionnellement des personnes, s’ils ont les fonds nécessaires, mais, souvent, ils sont limités par leur portée et leur manque de ressources. Je ne sais pas si vous avez des commentaires à faire à ce sujet ou si vous pensez que ce genre de mesure aiderait ces petits organismes en particulier.
Mme Omidvar : Vous avez tout à fait raison. Parfois, la volonté est là, mais il est difficile de trouver des gens. Je l’admets.
Il y a de nombreuses années, à Toronto, j’ai lancé une initiative dans le cadre de laquelle nous avons recueilli les noms de candidats qualifiés appartenant à des minorités visibles et à d’autres groupes en quête d’emploi. Nous avions un site Web. Des conseils d’administration présentaient des demandes. Il y avait une sorte de processus de jumelage avec les conseils d’administration. Je ne suis pas certaine que cette initiative existe, mais elle existe à Toronto sous une forme différente, sous la direction d’une autre institution. Il se peut fort bien que, dans le cadre de cette initiative, on ait tenu une base de données nationale structurée en ce sens. Il s’agissait d’une initiative de programme. Ce n’était pas une loi, bien entendu. Je peux imaginer que A sera égal à B qui sera égal à C.
Vous soulevez un bon point. De nombreux organismes de bienfaisance ont du mal à trouver des administrateurs qualifiés et des membres de groupes désignés. Il doit y avoir des moyens. Nous devons trouver ces moyens de les trouver et de les jumeler.
La sénatrice Pate : Merci.
La sénatrice Senior : Je vous remercie, sénatrice Omidvar, d’être une championne du secteur, dont je proviens moi aussi et où j’ai œuvré pendant très longtemps. Bien sûr, je vous transmets également mes meilleurs vœux d’anniversaire.
J’ai siégé à de nombreux conseils d’administration, en ai présidé certains et en ai dirigé d’autres en tant que membre du personnel, et j’avais mois aussi pour véritable passion de diversifier non seulement les organismes au sein desquels je travaillais, mais aussi le secteur dans lequel je servais. Certains d’entre eux, malgré ma présence, produisaient l’effet « couche de neige », pour ainsi dire. Je dirais que j’ai eu des moments de déception et que j’ai peut-être même versé quelques larmes en m’efforçant de diversifier certains de ces organismes, dont certains sont nationaux, d’autres sont des fédérations, mais j’ai aussi travaillé au sein d’organisations membres. Je connais bien la lutte. Je vois le projet de loi S-279 comme une façon douce d’aider ceux qui aspirent à diversifier leur direction.
En ce qui concerne la question de la sénatrice Pate sur la façon d’aider les organismes, j’ai parfois constaté qu’il faut modifier légèrement la façon dont nous cherchons à amener des gens à siéger à nos conseils d’administration. Au lieu de donner un coup de coude à un ami en lui disant « Veux-tu siéger à mon conseil d’administration? », peut-être qu’il faut trouver des gens parmi ceux-là mêmes que nous servons. L’effet a été que nous servons des populations diversifiées, mais que nous ne les considérons pas nécessairement comme une source dans laquelle puiser des membres des conseils d’administration. Pourriez-vous nous en parler du point de vue des organismes qui adoptent un autre mode de pensée quant aux façons dont ils peuvent diversifier leur direction?
Mme Omidvar : Merci, sénatrice Senior. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que vous serez une formidable championne du secteur au cours de votre mandat important dans l’avenir.
Je pense que vous parlez de l’expérience vécue. Je crois qu’il est important d’apporter de l’expérience vécue au sein des conseils d’administration et dans les décisions de gouvernance, mais cela dépend vraiment de la maturité du conseil d’administration. Je ne peux pas l’inclure dans le projet de loi. Je ne peux qu’y saisir les désignations d’équité en matière d’emploi.
Lorsque les données seront disponibles et que les gens commenceront à réfléchir à ces choses, à creuser plus et à s’informer, ils pourraient bien en arriver à la conclusion que, s’ils sont un organisme au service des jeunes, pour l’amour du ciel, ils ont besoin que des jeunes siègent au conseil d’administration, ou bien, s’il s’agit d’une organisation au service des mères célibataires, je pense qu’il est assez naturel de souhaiter que des mères célibataires siègent au conseil d’administration. Certaines de ces conclusions ont déjà été tirées. Je connais de nombreux conseils qui ont adopté cette politique, mais je pense qu’il y en a beaucoup d’autres dont ce n’est pas le cas.
Encore une fois, une fois que les données seront disponibles, elles mèneront à une réflexion sur les politiques de gouvernance, et il est à espérer, sénatrice Senior, que des gens comme vous parcourront le pays pour parler des changements qu’il faut apporter aux politiques de gouvernance afin que les conseils d’administration soient à l’image de la collectivité et des gens qu’ils servent.
La sénatrice Senior : Merci.
[Français]
Le président : Merci, madame Omidvar.
J’ai une question à laquelle vous avez déjà répondu en partie : quelle est la prochaine étape? Selon ce que je comprends, vous parlez plutôt de politiques, d’éléments non coercitifs et d’incitations en utilisant l’information qui sera donnée.
Toutefois, j’essaie de penser, parce que j’ai siégé à plusieurs fondations de différents genres dans ma région. Je pense entre autres à — excusez l’expression — ma gang des Chevaliers de Colomb, un organisme composé d’hommes seulement et qui est reconnu comme organisme de charité. Il verra arriver cette pratique et aura des inquiétudes, à savoir s’il sera obligé de s’agrandir ou s’il perdra son numéro d’organisme de charité. J’ai comme l’impression qu’il verra le tout comme un bras dans l’engrenage.
Pourriez-vous commenter pour mes amis les Chevaliers de Colomb?
[Traduction]
Mme Omidvar : Je vous remercie, sénateur Carignan. Les Chevaliers de Colomb sont effectivement une institution renommée.
Comme je l’ai déjà dit, et permettez-moi de le répéter sans équivoque : tout ce que vous aurez à faire, c’est fournir les données. Vos données, le nom de votre organisme et l’identité de ses administrateurs ne seront jamais divulgués au public. Cela fait partie de la collecte de données agrégées.
Les Chevaliers de Colomb sont un organisme particulier. Je ne crois pas qu’il y ait de chevalières. Peut-être qu’il devrait y en avoir. Vous y réfléchirez peut-être. Je ne sais pas. Je ne fais pas partie de ce club. Je pense qu’il est assez inhabituel à notre époque qu’un club soit réservé aux hommes. Je pourrais me tromper. Toutefois, si ces données font bouger les esprits des Chevaliers de Colomb, vous savez quoi? Ils pourront m’appeler, et je pourrais peut-être envisager de devenir chevalière. Je n’ai aucune idée de ce que cela signifie.
Je tiens à vous assurer, sénateur Carignan, quant au fait que les organismes de bienfaisance ne devraient pas craindre cette mesure législative. Il n’y a rien à craindre. La seule exigence est de fournir des données sur les gouverneurs. C’est tout.
[Français]
Le président : Parfait, merci. Ils devront peut-être fusionner avec les Filles d’Isabelle.
[Traduction]
Je crois que vous aviez une question à poser au deuxième tour, alors allez-y.
La sénatrice Marshall : Avons-nous le temps de poser des questions?
Le président : Une minute.
La sénatrice Marshall : Sénatrice Omidvar, y a-t-il eu une période de consultation? Avez-vous soumis l’avant-projet de loi à un certain nombre d’organismes de bienfaisance, ou bien l’avez-vous rendu accessible pour consultation publique? Pouvez-vous nous en parler un peu?
Mme Omidvar : Oui, nous l’avons fait.
Comme je l’ai fait remarquer au Sénat, chaque projet de loi que j’ai présenté l’a été en consultation avec un groupe d’experts. Bon nombre des autres témoins que vous verrez et que vous entendrez faisaient partie de ce groupe, y compris de grands avocats en droit des organisations caritatives. J’ai pris la parole à de nombreuses occasions au sujet de ce projet de loi, sur des balados, en personne et dans le cadre de webinaires. Je vais continuer de le faire. Le secteur est très au courant. Je dirais que ces consultations ont été utiles. Elles m’ont aidée à comprendre certaines choses. Mais, si le projet de loi est adopté, l’ARC lancera ses propres consultations sur la réglementation et l’élaboration de celle-ci. C’est une autre forme de consultation. Je dois vous dire que j’ai consulté toutes les grandes organisations du secteur au pays.
La sénatrice Marshall : D’accord. Et la réaction a été assez positive, n’est-ce pas?
Mme Omidvar : La réaction a été assez positive. Vous pourrez vérifier par vous-même parce que leurs représentants vont comparaître à titre de témoins.
La sénatrice Marshall : Merci.
[Français]
Le président : Merci. Nous sommes arrivés à la fin de notre présentation pour la première heure, nous allons suspendre la séance quelques minutes pour accueillir notre prochain groupe. Madame Omidvar, vous avez le choix de rester et de suivre nos débats ou de profiter de la journée pour célébrer. Au revoir et merci.
[Traduction]
Mme Omidvar : Je vous remercie, honorables sénateurs, du temps que vous m’avez accordé.
[Français]
Le président : Nous reprenons avec notre deuxième groupe. Nous avons le plaisir d’accueillir aujourd’hui Andrew Chunilall, chef de la direction de Fondations communautaires du Canada, et Bruce MacDonald, président-directeur général d’Imagine Canada.
Bienvenue et merci d’avoir accepté notre invitation à comparaître aujourd’hui. Nous allons maintenant entendre l’allocution d’ouverture de M. Chunilall, suivies de celle de M. MacDonald. Monsieur Chunilall, vous avez la parole.
[Traduction]
Andrew Chunilall, chef de la direction, Fondations communautaires du Canada : Merci et bonjour, honorables sénateurs. Je fais partie du mouvement des Fondations communautaires du Canada depuis 11 ans, au départ, à titre de vice-président des finances de la fondation communautaire de London, et à mon poste actuel. Bien sûr, j’ai siégé à plusieurs conseils.
Les Fondations communautaires du Canada, ou FCC, sont un organisme de leadership national composé de 207 fondations communautaires locales de partout au pays. Aujourd’hui, le mouvement des Fondations communautaires du Canada touche plus de 90 % des collectivités canadiennes et gère plus de 7,5 milliards de dollars d’actifs collectifs, principalement sous forme de fonds de dotation permanents. De concert avec ces fondations communautaires et un réseau de partenaires, qui comprend des donateurs fortunés, les gouvernements fédéral et provinciaux, les administrations municipales et des fondations d’entreprises, les PPC aident à trouver des solutions locales pour apporter des changements à l’échelle nationale relativement aux enjeux qui importent le plus à ces collectivités respectives.
Depuis plus de 100 ans, les fondations communautaires sont un point de contact pour activer le leadership local, l’expertise en la matière, les données communautaires et la capacité financière afin de renforcer le bien-être communautaire dans les collectivités rurales et les centres urbains de toutes les régions du pays.
Depuis 2016, les FCC collaborent avec le gouvernement du Canada et les fondations communautaires locales pour offrir de très importants programmes de subventions, s’occuper des priorités communautaires et injecter plus de 260 millions de dollars dans les collectivités locales par le truchement de plus de 10 000 projets qui couvrent l’ensemble des provinces et des territoires du pays. Dans le cadre de chacun de ces programmes, les FCC et les fondations communautaires ont tiré parti des possibilités et des ressources supplémentaires. Par exemple, par l’entremise du Fonds pour l’égalité des genres, les fondations communautaires ont réaffecté 110 millions de dollars de leurs propres investissements afin de les rendre adéquats sur le plan du genre et de mieux soutenir les communautés.
Lorsque je me suis joint à mon premier conseil d’administration, il y a 11 ans, les gens assis autour de la table ne ressemblaient pas du tout à ceux d’aujourd’hui. Les décisions qu’ils prenaient étaient également différentes. Nous avons déjà vu à quel point les décisions et les possibilités de financement peuvent être radicalement différentes lorsque les conseils d’administration semblent radicalement différents. Par exemple, je regarde mes collègues de la Fondation pour les communautés noires, ou FPCN, et du Fonds de résilience des peuples autochtones, ou FRPA. Les deux organismes ont des conseils composés entièrement de membres de leur communauté respective et de celle qu’ils servent, ce qui leur permet de s’assurer de vraiment comprendre les besoins locaux et de demeurer responsables des décisions relatives au soutien. La réception de fonds destinés aux organismes communautaires n’est que la première étape pour s’assurer que chaque membre a accès aux ressources essentielles. La diversité qui reflète nos collectivités et la responsabilité de prendre des décisions sont ce qui nous mène vers un avenir équitable.
La FPCN et le FRPA ne sont que deux exemples des nombreux organismes communautaires qui évoluent et changent la composition de leur conseil d’administration pour assurer un avenir équitable. En fait, regardons la liste du principal bailleur de fonds équitables au Canada, le Top 50 Equitable Funders, où les fondations communautaires représentent moins de 10 % des actifs des fondations de tout le pays, mais plus de 30 % des bailleurs de fonds. Nous prenons l’équité au sérieux et nous travaillons en vue d’un avenir où la répartition équitable des ressources n’est plus un défi et où les conseils d’administration sont diversifiés partout au Canada. La diversité au sein des conseils d’administration des organismes sans but lucratif est importante, mais elle est surtout prudente pour les fondations. Le capital s’accompagne d’une responsabilité, et, en changeant notre façon d’acheminer les fonds, nous changerons aussi qui en profite.
Je vais vous laisser avec des données de mes collègues d’Imagine Canada. Selon une étude récente, seulement 32 % des organismes sans but lucratif ont vérifié la composition de leur conseil d’administration. Il y a une énorme lacune au chapitre de nos connaissances et de notre compréhension des voix à la table de décision et pour ce qui est de savoir qui reçoit du financement. Il nous manque actuellement les données et les tendances qu’elles pourraient nous montrer. Toutefois, nous avons une voie à suivre. Si nous commençons à recueillir les données maintenant, dans 10 ans, nous saurons qui prend les décisions, et les Canadiens sauront qui reçoit un financement équitable.
Merci.
Bruce MacDonald, président-directeur général d’Imagine Canada : Honorables sénateurs, je vous remercie de m’avoir invité à discuter de cette importante mesure législative.
Je tiens d’abord à souligner que je me joins à vous aujourd’hui depuis ce qui sont aujourd’hui les territoires des Premières Nations visées par les Traités nos 6, 7 et 8, ainsi que la patrie des Métis. Les terres et les eaux de Banff sont utilisées depuis des millénaires par les peuples autochtones à des fins de subsistance, de cérémonie, de commerce et de voyage. Nous les remercions de leur intendance continue et de partager la terre avec nous.
Aujourd’hui, je comparais à titre de président-directeur général d’Imagine Canada, un organisme de bienfaisance national dont la mission est de renforcer les organismes de bienfaisance et les organismes sans but lucratif canadiens afin qu’ils puissent mieux servir les personnes et les communautés au pays et à l’étranger. Imagine Canada est également membre de la Coalition pour les données fédérales sur le secteur à but non lucratif, un groupe de plus de 40 organismes sans but lucratif qui militent en faveur d’une meilleure collecte de données fédérales sur notre secteur.
La diversité des dirigeants dans le secteur sans but lucratif a de l’importance parce qu’elle suppose un élargissement de la réflexion, de l’expertise et de l’expérience, qui sont essentielles pour résoudre les problèmes sociaux et environnementaux complexes auxquels s’attaquent les organismes sans but lucratif. Nous devons adopter de nouvelles approches pour régler les problèmes enracinés à la base. De plus, pour qu’une organisation puisse bien servir une communauté en particulier, elle a besoin de connaissances et de relations approfondies. Si un organisme ne compte aucun représentant des communautés qu’il sert parmi ses dirigeants, il risque davantage de prendre des décisions sous-optimales sur le plan des programmes, des relations, de la stratégie et plus encore. Un récent sondage mené dans le cadre du projet canadien de réflexions sur la bienfaisance Charity Insights Canada Project, ou CICP, a révélé que seulement 48 % des organismes de bienfaisance estiment que leur équipe de direction reflète entièrement ou modérément la diversité des collectivités qu’ils servent.
En 2023, le Collectif pour une relance équitable, un groupe composé d’une quinzaine d’organisations, a publié son étude comparative sur l’équité, qui portait de façon générale sur l’équité dans le secteur sans but lucratif. Il a mis en évidence quelques enjeux importants, y compris le fait que, bien que la plupart des dirigeants d’organismes sans but lucratif appuient l’équité, la diversité et l’inclusion, beaucoup moins d’entre eux le font de façon très intentionnelle. Le soutien de la direction, l’adhésion du personnel et l’engagement du conseil d’administration sont les catalyseurs les plus fréquemment cités des pratiques d’équité, de diversité et d’inclusion, ou EDI. Les organismes dirigés par des Noirs, par des Autochtones et par des personnes appartenant à d’autres groupes sous-représentés en font davantage pour promouvoir l’IDE, et ce, même s’ils servent certaines des communautés ayant les plus grands besoins, font l’objet d’attentes plus élevées et se heurtent à des obstacles plus importants.
Pendant de nombreuses années, il y a eu des preuves anecdotiques d’un manque de diversité dans la gouvernance du secteur de la bienfaisance, mais peu de données fiables à l’appui. Cette lacune fait partie d’une plus vaste insuffisance des données à laquelle notre secteur fait face. Le projet de loi S-279 comblerait cette lacune en nous fournissant des données annuelles sur la diversité des conseils d’administration des organismes de bienfaisance, ce qui nous permettrait de cerner les points à améliorer et de suivre les changements au fil du temps. Imagine Canada appuie cet objectif. Dix-sept membres de la Coalition pour les données fédérales sur le secteur à but non lucratif, dont Imagine Canada, ont également signé une déclaration publique commune à l’appui de l’objet du projet de loi. Cependant, nous avons des suggestions pour l’améliorer et accroître ses chances de produire un véritable changement dans notre secteur.
Premièrement, le projet de loi prévoit que l’ARC pourra révoquer le statut d’organisme de bienfaisance d’un organisme s’il néglige de déclarer combien de ses administrateurs appartiennent aux catégories d’équité en matière d’emploi dans sa déclaration de renseignements annuelle T3010. Cependant, il est déjà obligatoire pour les organismes de bienfaisance de produire des déclarations T3010. Nous estimons que cette mesure est trop sévère et que l’ARC devrait adopter une approche éducative si les organismes de bienfaisance ont produit leur déclaration T3010 sans y inclure les renseignements sur la diversité du conseil d’administration ou s’ils ont mal rempli cette section. Nous aimerions que le projet de loi soit amendé de manière à ce que les conséquences du fait de ne pas remplir cette section soient les mêmes que pour les autres sections du formulaire T3010.
Deuxièmement, le projet de loi exige que les organismes de bienfaisance recueillent et conservent des renseignements démographiques confidentiels. Il s’agit d’une nouveauté pour de nombreux organismes de bienfaisance, et il leur faudra du temps et des capacités avant de pouvoir la mettre en œuvre. Bien que les exigences en matière de déclaration prévues dans le projet de loi puissent sembler minimes, elles sont particulièrement importantes pour 55 % des organismes du secteur qui n’ont pas de personnel rémunéré et qui sont entièrement gérés par des bénévoles. Si nous voulons que ce projet de loi ait l’effet escompté, nous devons veiller à ce que les organismes de bienfaisance soient capables de recueillir, de stocker et de déclarer ces données de façon responsable et exacte, ainsi que de prendre des mesures pour combler les lacunes en matière de diversité. Dans le mémoire prébudgétaire d’Imagine Canada, nous avons recommandé que le gouvernement mette en place un fonds de renforcement des capacités afin d’améliorer les pratiques en matière d’équité, de diversité et d’inclusion au sein des organismes sans but lucratif et qu’il affecte 30 millions de dollars à ce travail.
De plus, nous croyons qu’il serait utile que le gouvernement fédéral finance des organismes qui ont une expertise en matière de diversité, d’équité et d’inclusion, comme la Fondation canadienne des relations raciales, afin qu’ils fassent de l’éducation et du renforcement des capacités dans le secteur. Ces organismes pourraient offrir une formation et créer des ressources pour aider les organismes de bienfaisance à se conformer aux exigences du projet de loi et à améliorer la diversité parmi leurs dirigeants.
Troisièmement, on s’inquiète dans le secteur au sujet de la confidentialité des données. Le projet de loi interdit à l’ARC d’identifier des particuliers ou des organismes de bienfaisance dans son rapport annuel sur ces données, mais il ne précise pas dans quelles autres circonstances les données pourraient être divulguées — par exemple, dans le cadre de procédures judiciaires ou de vérification — ni la façon dont elles seront ventilées dans le rapport annuel. Nous aimerions que l’ARC travaille avec le secteur sans but lucratif et caritatif pour veiller à ce que la confidentialité des données soit protégée.
Je vous remercie encore une fois de m’avoir donné l’occasion de commenter ce projet de loi. Je serai heureux de répondre à vos questions.
Le président : Je vous remercie de vos exposés.
La sénatrice Marshall : Merci, messieurs Chunilall et MacDonald, pour votre déclaration préliminaire.
Il y a deux articles précis du projet de loi au sujet desquels j’aimerais connaître votre opinion. Le premier concerne le délai accordé aux organismes de bienfaisance pour fournir l’information une fois que le projet de loi aura reçu la sanction royale.
La deuxième partie du projet de loi sur laquelle j’aimerais connaître votre point de vue est celle qui porte sur la révocation du statut d’organisme de bienfaisance. Monsieur MacDonald, je remarque que vous l’avez mentionnée dans votre déclaration préliminaire. Je croyais aussi qu’il s’agissait d’une sanction sévère, mais, lorsque l’ancienne sénatrice Omidvar a témoigné, elle a expliqué qu’on suivait un processus par étapes à l’Agence du revenu du Canada avant que le statut ne soit révoqué. Toutefois, ce n’est pas précisé dans le projet de loi.
J’aimerais savoir ce que vous pensez à la fois de la révocation du statut d’organisme de bienfaisance et de la question de savoir s’il y aura suffisamment de temps pour fournir les renseignements demandés.
M. Chunilall : D’après ce que nous avons compris, chaque fois que des changements importants sont apportés aux formulaires T3010, l’ARC fournit des conseils et de l’information sur ce qu’elle recherche. Nous croyons qu’avec ce niveau de consultation, d’apprentissage et de clarté quant à la nature des renseignements, les organismes de bienfaisance, en particulier les fondations, auront le temps de les fournir. De nombreuses fondations communautaires — je ne peux pas dire toutes — recueillent déjà beaucoup de données démographiques sur la composition du conseil d’administration. Il s’agit donc de prendre ces renseignements et de les catégoriser de la façon demandée dans le formulaire T3010.
La sénatrice Marshall : Mais le projet de loi est très précis en ce qui concerne l’échéancier, alors, même si l’Agence du revenu du Canada se sent plus généreuse en vous accordant plus de temps, c’est la loi qui prévoit le délai. Il me semble que cela pourrait être une source de préoccupation. Je ne pense pas que l’on puisse compter sur l’Agence du revenu du Canada pour exempter les gens de l’échéance législative.
M. Chunilall : En ce qui concerne le genre de questions qui sont posées dans le formulaire T3010, pour les organismes de bienfaisance de grande et de moyenne taille, je ne crois pas qu’il y aurait un problème, mais pour les organismes de bienfaisance de plus petite taille, cela pourrait être un processus fastidieux parce qu’ils ont moins de ressources et moins de capacité. Il n’y a donc pas de solution unique pour l’ensemble du secteur, mais je peux certainement voir comment cela pourrait désavantager les petites institutions.
La sénatrice Marshall : Et la révocation du statut d’organisme de bienfaisance?
M. Chunilall : Oui. Il y a un processus par étapes. Nous comprenons que s’il y a inobservation ou si la déclaration n’a pas été faite, l’ARC ne révoque pas simplement le statut sans au moins quelques points d’intervention. Encore une fois, le fait de demander l’information et la façon dont on la demande ne devraient pas nécessairement entraîner un processus punitif en ce qui concerne le type de renseignements qui sont déclarés. Il faut simplement que les renseignements soient déclarés. Je ne pense pas que les organismes de bienfaisance courent un risque important de voir leur statut révoqué, étant donné qu’il s’agit d’un processus par étapes et que l’ARC travaillera en consultation avec le secteur en vue de s’assurer que les données demandées sont fournies.
La sénatrice Marshall : Monsieur MacDonald, au cas où je manquerais de temps, pourriez-vous commencer par la révocation du statut d’organisme de bienfaisance?
M. MacDonald : Comme je l’ai dit, nous aimerions que cette disposition soit supprimée pour plusieurs raisons. Nous croyons qu’il est important d’abord et avant tout d’informer les organismes afin qu’elles aient le temps de le faire.
L’autre élément, c’est qu’il n’y a pas d’autre partie dans le formulaire T3010 où il est expressément indiqué qu’il y aurait une possibilité de révocation si une ligne n’était pas remplie ou remplie incorrectement. Encore une fois, étant donné que la grande majorité des organismes ont fait remplir ce formulaire par des bénévoles, je pense que c’est trop sévère et trop rapide pour que le secteur puisse vraiment bien gérer.
La sénatrice Marshall : Merci.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci de votre allocution liminaire. Effectivement, l’aspect de la révocation est quelque chose qui est assez important et l’on sait que nos organismes de bienfaisance ont des mandats fort importants à assumer. Ils ont des rôles et des bénévoles qui s’y impliquent, et ce n’est pas toujours prestigieux. Il y a des rôles qui demandent un grand investissement. L’aspect de la révocation, je trouve cela un peu troublant. Si je comprends bien, vous souhaiteriez plutôt que cela ne figure pas, qu’on n’ait pas cette exigence?
[Traduction]
M. MacDonald : C’est exact. Essentiellement, les organismes de bienfaisance doivent remplir leur formulaire T3010. Ce que nous suggérons, c’est qu’il ne devrait pas y avoir de dispositions de révocation précises en rapport avec une case ou une ligne du formulaire T3010; cela ferait partie des exigences de déclaration régulières.
[Français]
Le sénateur Forest : Merci. Je pense que l’intention du projet de loi est fort louable. J’essaie de mesurer ce qu’on va demander à nos organismes et les bénéfices des clients de ces organismes. Quand on regarde nos organismes de bienfaisance, ce sont souvent des organismes très sectoriels. Je prends l’exemple de la fondation du Club des petits déjeuners dont le but premier est d’offrir aux enfants l’occasion d’atteindre leur plein potentiel en commençant chaque journée d’école avec des aliments nutritifs. Il y a différentes activités, cela peut être une fondation en matière de développement culturel d’une région.
Je ne sais pas si c’est le portrait que vous avez à Imagine Canada, mais dans nos régions, on voit que bon nombre de ces organismes ont une mission très pointue et sectorielle. Donc, la diversité à l’intérieur de ces organisations est souhaitable, mais c’est aussi un peu complexe parce que ce n’est pas toujours évident de faire du recrutement.
Pensez-vous que la compilation de ces données agrégées sera un bénéfice important pour la clientèle de ces organisations? Deuxièmement, pensez-vous que cela va augmenter passablement les lourdeurs administratives?
[Traduction]
M. MacDonald : Cette question s’adresse-t-elle à l’un d’entre nous en particulier?
[Français]
Le sénateur Forest : La question s’adresse à celui qui veut y répondre.
[Traduction]
M. MacDonald : En ce qui concerne les avantages ultimes pour le client, je pense que la réponse courte est « oui ». À mesure que les organismes créent et établissent des programmes qui répondent le mieux aux besoins de leurs collectivités, à mesure que leurs collectivités changent et évoluent, ceux qui cherchent à les servir doivent faire de même. Lorsqu’on examine notre secteur, les postes de direction, c’est-à-dire les cadres supérieurs et les conseils d’administration — l’accent est vraiment mis sur ces conseils —, ils doivent évoluer afin qu’on puisse s’assurer qu’ils sont pertinents à l’égard des collectivités qu’ils desservent. Ils prendront de meilleures décisions, seront mieux informés et mobiliseront davantage les bénévoles et les donateurs. Il s’agit en fait d’un état d’évolution constante qui permet de veiller à ce que les pratiques et les programmes suivent le rythme des changements qui se produisent dans les collectivités canadiennes. Pour certaines organisations, le fait de disposer de données permettant de poser des questions sur leur situation en tant qu’organisation par rapport à leurs collègues ou à d’autres régions du pays… il est vraiment important pour un conseil d’administration de poser des questions et de réfléchir.
Je vais m’arrêter ici. Monsieur Chunilall, vous voudrez peut-être revenir sur la question des formalités administratives, et j’y reviendrai si le temps le permet. Du point de vue de la pertinence, il est essentiel d’avoir ces données en vue de favoriser cette évolution constante.
M. Chunilall : Merci, monsieur MacDonald. Je vais poursuivre dans la même veine que M. MacDonald.
En 2020, un rapport a été publié à l’intention du secteur. Il a été réalisé en collaboration avec la Fondation pour les communautés noires de l’Université Carleton. Il s’intitulait Non financé : les communautés Noires, les oubliés de la philantropie canadienne. Essentiellement, en examinant l’ensemble des formulaires T3010 de toutes les fondations au Canada, le rapport a pu démontrer que le montant du soutien apporté par les intermédiaires philanthropiques aux organisations au service de la communauté noire, dirigée par les membres de la communauté noire ou régie par ses membres était inférieur à 0,01 % du financement global. Mark Blumberg, un avocat de Toronto spécialisé dans les œuvres de bienfaisance, a effectué une analyse similaire, mais cette fois-ci, il a pris les données du formulaire T3010 et il a essayé de déterminer combien d’argent était destiné à soutenir les communautés autochtones. Le résultat était effectivement le même, alors nous savons que le fait que nous manquons parfois de diversité dans nos intermédiaires de financement a un effet tangible sur l’utilisation de l’argent. Ces deux rapports indépendants utilisant les données du formulaire T3010 ont permis de déterminer qu’un montant disproportionnellement faible est consacré au soutien des communautés importantes de notre pays. Nous croyons que le fait d’avoir des équipes et des conseils d’administration diversifiés est un moyen d’atténuer ce problème et d’aider à orienter le financement de façon plus équitable.
Le sénateur Smith : Monsieur Chunilall, vous avez fait remarquer que le capital s’accompagne d’une reddition de comptes. Dans le projet de loi, comme la sénatrice Omidvar l’a souligné, il n’y a pas de sanction pour autre chose que le fait de ne pas faire de déclaration, et il n’y a pas de quota et, par conséquent, de risque de perdre le statut d’organisme de bienfaisance, à moins que l’organisme ne fasse pas de déclaration. Selon vous, quelles mesures de reddition de comptes devrait-on ajouter au projet de loi afin de veiller à ce que les organismes de bienfaisance s’efforcent de diversifier leurs conseils d’administration?
M. Chunilall : Je ne crois pas que le projet de loi devrait traiter de la reddition de comptes. L’important ici, c’est que nous disposions de l’information. Le secteur est toujours réceptif à l’idée d’avoir de bons renseignements et de bonnes données. Si nous pouvons y avoir accès, le secteur a un moyen d’assurer sa propre reddition de comptes. Ce que je veux dire par là, c’est que si les organisations locales disposent de renseignements transparents sur la composition de leurs conseils d’administration, les communautés leur demanderont des comptes. Je ne crois pas que le projet de loi lui-même ait besoin de ce genre de mesures de contrôle.
Les organismes de bienfaisance sont des organismes publics. Ils seront informés par leur communauté. Les gens vont se manifester et dire : « Nous avons cette information. Nous constatons que vos conseils d’administration ont une vision particulière. Elle ne représente pas nécessairement la diversité ou la composition de la communauté. Nous pensons que vous devriez apporter un changement. Nous pensons que vous devriez vous pencher sur cette question. » D’après mon expérience, les organismes de bienfaisance ont été très réceptifs à ce genre d’invitation.
Le sénateur Smith : Monsieur MacDonald, pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
M. MacDonald : Oui. Absolument.
Tout d’abord, il est important de souligner que le simple fait de remplir le formulaire T3010 est un acte de reddition de comptes que tous les organismes de bienfaisance sont tenus de faire chaque année. Cela fait partie du privilège fiscal d’être un organisme de bienfaisance enregistré. La mesure de la reddition de comptes est intégrée dans le formulaire T3010.
Ce qui nous semble inutile, c’est d’inclure la déclaration de révocation. Des conséquences sont déjà prévues pour les organismes de bienfaisance qui ne remplissent pas leur formulaire T3010. Ils ont des conversations avec l’organisme de réglementation. Je pense qu’il est important que le point de départ de ces conversations soit l’éducation et l’information. Cela nous ramène au fait que plus de la moitié des organismes auront recours à des bénévoles. Il leur faudra du temps pour comprendre comment le faire et bien le faire. Le point de départ d’un échec ne devrait pas être la perte du statut d’organisme de bienfaisance. On devrait plutôt se demander comment on peut les aider à s’assurer que les renseignements sont exacts.
Le sénateur Smith : Merci, messieurs.
La sénatrice Galvez : Je remercie nos témoins de leur présence et de leurs réponses à nos questions.
Je tiens à apporter une précision parce que je suis un peu confuse. Le secteur caritatif est protégé. Il paie moins d’impôt selon certaines conditions. Le projet de loi vise à accroître la transparence, mais la transparence est protégée parce qu’il ne demande pas de noms et de détails. Il ne fait que demander des catégories, comme l’a décrit son auteur, la sénatrice Omidvar. Ce que ce rapport demande, ce sont les catégories. Cette information est déjà là, je crois. Il n’est pas nécessaire de faire des calculs ou des études parce que les conseils d’administration sont connus. Les personnes qui convoquent les réunions savent à qui elles s’adressent. Elles connaissent la composition du conseil. Il est facile de fournir des renseignements.
Mes questions s’adressent à M. MacDonald parce qu’il a proposé trois amendements. La première concerne le temps. Ont-ils suffisamment de temps? L’entrée en vigueur n’est prévue qu’après deux ans, soit le deuxième 31 de l’année suivant la sanction royale. Cela leur donne plus d’un an pour recueillir ces renseignements s’ils ne les ont pas, ce dont je doute, car ils devraient les avoir. Selon moi, cela ne pose pas de problème. Je ne pense pas que cet amendement soit nécessaire. En ce qui concerne votre deuxième amendement concernant l’argent fourni par le gouvernement fédéral pour aider ces organismes, je ne sais pas si vous le savez, mais nous sommes des sénateurs, et nos projets de loi ne peuvent pas demander au gouvernement de dépenser de l’argent. Si le gouvernement veut le faire par la suite, c’est son choix. J’aimerais que vous réagissiez aux commentaires sur vos premier et deuxième amendements.
M. MacDonald : Bien sûr. Avec plaisir.
Il est important de noter que notre commentaire sur le premier amendement est lié à la question de la révocation. Nous recommandons que le projet de loi soit modifié de façon à ce que les conséquences de ne pas remplir cette section soient les mêmes que pour les autres sections du formulaire T3010. Nous voulons que l’ARC adopte une approche cohérente si la case est vide ou si l’information qu’elle contient semble inexacte. Nous ne pensons pas qu’il soit sain pour la relation entre l’ARC et le secteur de passer directement à la révocation, et cela n’aide pas les organismes à vouloir appuyer ces travaux.
Le deuxième amendement visait à reconnaître le fait que bon nombre de ces organismes sont petits et qu’ils auront besoin de soutien afin d’accomplir ce travail. Oui, il y a du temps. Je précise que notre recommandation se trouve dans notre mémoire prébudgétaire. C’est une autre façon pour le gouvernement d’obtenir des fonds supplémentaires en vue d’aider les organismes à faire ce genre de travail de renforcement des capacités. En un sens, c’est l’une des faiblesses chroniques des organismes axés sur la prestation de services. Leur administration est l’une des choses les moins attrayantes pour de nombreux bailleurs de fonds. Il faudra faire du travail supplémentaire, et cela répond aux questions de l’autre sénatrice au sujet des formalités administratives. C’est du travail supplémentaire. Nommons-les ainsi. Cela ne veut pas dire que ce n’est pas un travail supplémentaire important. Nous devons reconnaître que les organismes de bienfaisance auront besoin de temps et de soutien pour bien faire les choses.
La sénatrice Galvez : Merci.
La sénatrice Ross : Ma question s’adresse à M. MacDonald. Dans votre mémoire prébudgétaire, vous avez proposé un soutien au renforcement des capacités. Selon vous, qu’arriverait-il si ce soutien n’était pas fourni?
M. MacDonald : Ce sera tout simplement plus difficile. Nous demandons aux organismes qui ne sont peut-être pas familiarisés avec les processus et qui n’ont pas recueilli ce type de renseignements… soyons francs, il peut s’agir de conversations délicates avec les directeurs, où l’on demande de préciser les aspects de la race et d’autres caractéristiques de la diversité. Ils auront besoin de soutien pour bien faire les choses. Le fait de ne pas avoir ce soutien supplémentaire et financé signifie que, pour de nombreux organismes, le processus d’apprentissage sera plus lent, voire un peu douloureux. Les organismes ont dû rendre compte de différents renseignements au fil des ans. Il nous faut simplement du temps pour comprendre comment procéder. Dans la mesure du possible, compte tenu de la petite taille de certains de ces organismes et du fait que nous pouvons leur offrir un soutien multisectoriel afin qu’ils puissent faire les choses bien, plus rapidement et mieux, il est logique d’accélérer le processus et la précision et, par conséquent, les leçons que nous pouvons en tirer. Il est important de noter qu’il s’agit d’apprentissage et de pertinence. Il ne s’agit pas de mesures punitives.
La sénatrice Ross : Monsieur Chunilall, permettez-moi tout d’abord de dire que j’adore le travail des fondations communautaires. J’ai déjà siégé au conseil d’administration de la fondation communautaire de Fredericton, alors j’apprécie vraiment le travail que font les organisations.
Pourriez-vous me donner une idée de la façon dont cela pourrait stimuler le soutien aux organismes de bienfaisance? Par exemple, lorsque les fonds d’investissement sont désignés comme des fonds verts, cela favorise un certain type d’investissement et incite les gens à se tourner vers ces organismes afin de récompenser le bon travail qu’ils accomplissent. Avez-vous l’impression que ces conseils d’administration, qui reflètent davantage la diversité, auront plus de succès pour ce qui est de la collecte de fonds?
M. Chunilall : Absolument. Je pense qu’il existe une corrélation directe entre la composition d’un conseil d’administration et l’acheminement des ressources aux communautés. Chaque communauté évolue, comme l’a mentionné M. MacDonald. Le défi auquel notre secteur fait face, c’est qu’il est difficile pour nos conseils d’administration et nos équipes de suivre le rythme de ces changements. Il y a toujours des angles morts en ce qui concerne les besoins d’une communauté. Il y a de nombreuses façons de composer avec ces angles morts en fonction des différentes parties de la communauté, de la façon dont nous interagissons avec ces différentes parties et de ce que nous demandons à nos équipes de faire.
Mais une autre composante est l’approche de gouvernance. Souvent, les équipes sont occupées et ont la tête baissée. Elles disposent de ressources minimales. Elles essaient de maintenir des liens dans toutes les parties de la communauté. Le conseil d’administration est le dernier palier qui dit : « Avez-vous jeté un coup d’œil à cette partie de la communauté? J’ai communiqué avec ses représentants. J’ai entendu dire qu’il leur faudrait des ressources. Nous devrions peut-être procéder à une consultation et à une mobilisation. » Le conseil d’administration joue donc un rôle essentiel. Dans de nombreux intermédiaires philanthropiques, il est la dernière ligne de défense pour ce qui est d’approuver les ententes de financement. J’ai déjà donné deux exemples par rapport aux communautés autochtones et aux communautés noires. Vous pouvez imaginer, surtout dans les centres urbains comme Vancouver, Calgary et Toronto, qu’il y a énormément de diversité, beaucoup de poches et d’angles différents dans ces collectivités. Il est très difficile pour une organisation de s’y retrouver. Il existe de nombreuses façons de faire face à cette situation. La gouvernance est un moyen essentiel d’aider à orienter l’acheminement des ressources.
La sénatrice Ross : Merci beaucoup, monsieur Chunilall, et à vous aussi, monsieur MacDonald.
La sénatrice Pate : Vous avez peut-être entendu mes questions tout à l’heure, mais si ce n’est pas le cas, l’un des problèmes auxquels font face les petites organisations, les petits organismes de bienfaisance — je pense que vous en avez parlé un peu —, tient au fait qu’ils ont de la difficulté à attirer des gens, que ce soit en raison de leur mandat très ciblé, de leur emplacement ou d’une combinaison de ces facteurs. J’aimerais savoir quelles mesures vous envisagez de mettre en place. Lorsque je travaillais dans le secteur caritatif, nous faisions souvent des choses comme trouver des façons créatives de mettre sur pied des groupes consultatifs, faire venir des gens moyennant rétribution, dans les cas où cela ne serait pas possible autrement, ou encore mener un groupe spécial de… là encore, quelque chose comme un groupe consultatif, mais des groupes de réflexion axés sur des questions précises, ce genre de chose. Croyez-vous que ce genre de disposition pose un problème pour ces petits organismes qui pourraient aspirer à se diversifier?
J’ai aussi donné l’exemple d’une organisation de ce genre qui, pas plus tard que vendredi, a communiqué avec moi pour tenter de recruter des Autochtones au sein de son conseil d’administration. Il y a tellement de gens qui travaillent dans ces secteurs, et ils sont sursollicités. Il est difficile de trouver des gens qui sont prêts à siéger à des conseils d’administration parce qu’ils ont déjà beaucoup de travail.
M. Chunilall : Oui. Je suis heureux de répondre en premier à cette excellente question.
Je pense qu’il y a une présomption selon laquelle les grandes organisations sont mieux à même d’avoir des conseils d’administration qui reflètent la diversité des collectivités qu’elles desservent. D’après mon expérience, les grandes et les petites organisations font face au même défi. Par exemple, je travaille pour une organisation nationale. À certains moments, notre conseil compte 18 membres. Même à 18 membres, nous ne reflétons toujours pas la diversité du Canada. Mais nous évaluons la composition de notre conseil d’administration en fonction des données de référence critiques à notre disposition. Nous savons que, à tel ou tel moment, nous ne cocherons pas toutes les cases, mais au moins nous savons quelles cases nous n’avons pas cochées. Nous pouvons alors explorer d’autres façons de faire au sein de nos organisations, notamment en ce qui a trait à la constitution d’équipes ou aux types de personnes et de partenaires que nous mobilisons, pour nous aider à nous accommoder de certaines des contraintes auxquelles nous faisons face en matière de diversification de notre conseil. De nombreux conseils comptent de 10 à 14 membres, voire 15. Surtout dans les grands centres urbains, même dans ceux de taille moyenne, pour un organisme de bienfaisance de grande taille ou de petite taille, même avec autant de gens, il est impossible de répondre à tous les critères de diversité. L’important, c’est de comprendre où se situent les lacunes, car cela nous permet d’atténuer les choses dans un autre secteur de l’organisation ou de contribuer à l’élaboration de stratégies et de tactiques qui peuvent compenser le manque de diversité au sein de nos équipes ou de nos conseils d’administration.
M. MacDonald : J’ai deux brèves observations à faire à ce sujet.
Tout d’abord, je pense que le projet de loi est bien conçu, en ce sens que, pour en revenir à ce que vous avez dit, sénatrice, il y a des organisations qui, en raison de leur sous-secteur ou de leur région, craignent peut-être que les rapports sur la diversité les fassent mal paraître à ce moment-ci. Le fait que cela se fera sous forme agrégée protège les organisations et leur permet de se sentir à l’aise de soumettre ces données. Je pense que cet aspect de la conception est utile.
La deuxième partie de votre question, cependant, découlera de la première, selon moi, en ce sens qu’à mesure que nous comprendrons mieux la composition des conseils d’administration de notre secteur, des organismes comme Imagine Canada et, je pense, Fondations communautaires Canada et d’autres acteurs provinciaux, locaux et nationaux s’emploieront à combler les lacunes que nous relevons. Qu’il s’agisse de webinaires d’information, de pratiques exemplaires ou de dirigeants qui se réunissent et discutent ensemble des méthodes qu’ils utilisent pour trouver des bénévoles, les recruter et les soutenir afin qu’ils siègent à ces conseils, le fait d’avoir une conversation fondée sur des données permettra à ce travail d’être plus efficace.
La sénatrice Pate : Merci.
Le sénateur Loffreda : Ma question s’adresse à M. MacDonald. J’aimerais revenir une fois de plus à la lettre que vous avez cosignée avec d’autres organismes sans but lucratif faisant partie de la Coalition pour les données fédérales sur le secteur à but non lucratif. Nous savons que vous appuyez ce projet de loi, mais vous demandez par ailleurs un amendement qui supprimerait la disposition du projet de loi octroyant au ministre le pouvoir de révoquer, s’il le souhaite, l’enregistrement d’un organisme de bienfaisance qui ne fournit pas ses données sur la diversité. Nous avons entendu les commentaires de la sénatrice Omidvar au sujet de cette proposition lors de la première partie de la réunion, et vous avez déjà fait des observations à ce sujet, mais si vous le souhaitez, vous pourriez nous expliquer pourquoi la coalition demande cet amendement et pourquoi elle n’appuie pas cette mesure de conformité. Vous pourriez en dire davantage là-dessus. C’est une question importante.
Dans votre lettre, vous dites également que vous pourriez proposer d’autres amendements à mesure que le projet de loi franchira les étapes du processus législatif. Cette lettre a été publiée il y a cinq mois. La coalition a-t-elle songé à d’autres éventuels amendements depuis?
Enfin, des préoccupations ont aussi été soulevées en ce qui concerne la protection de la vie privée. Quelle est l’importance de ces préoccupations? Est-ce que ces préoccupations en matière de protection de la vie privée pourraient dissuader des gens d’intégrer un conseil d’administration? Ce sont des questions importantes. Des observations supplémentaires seraient les bienvenues. Merci.
M. MacDonald : Monsieur, je vais commencer par la question de la révocation. Il convient de souligner que le ministre a déjà un pouvoir de révocation en cas de non-conformité d’une organisation relativement au formulaire T3010. Ce que nous recommandons ici, c’est de ne pas choisir une ligne ou une case du T3010 et d’y associer des dispositions de révocation. Le pouvoir existe déjà. Il n’est pas nécessaire que cela figure dans le projet de loi. Nous n’aimons pas vraiment le précédent que cela pourrait créer. Si les organisations ne remplissent pas leur T3010 correctement, l’organisme de réglementation interviendra. Ce que nous disons, c’est qu’il ne devrait pas s’agir d’un point de départ pour une révocation; il devrait s’agir d’un point de départ pour la sensibilisation et l’information. À notre avis, cela va trop loin.
Je ne me souviens pas de la deuxième, alors je vais passer à la troisième et vous pourrez peut-être me rappeler la deuxième.
En ce qui concerne la confidentialité, le fait est que le projet de loi interdit à l’ARC d’identifier des particuliers ou des organismes de bienfaisance dans son rapport annuel sur ces données, mais elle ne précise pas vraiment dans quelles autres circonstances les données pourraient être divulguées. Qu’il s’agisse d’une procédure judiciaire ou d’une procédure de vérification, nous voudrions collaborer avec l’ARC pour nous assurer que les données sont confidentielles et que cette confidentialité est protégée. Essentiellement, si nous leur disons que cela sera sous forme agrégée — et cela nous ramène à ce que j’ai dit plus tôt en réponse à la question de la sénatrice Pate—, les organisations seront rassurées de savoir qu’elles ne seront pas considérées individuellement, mais au sein d’un ensemble, au moment où elles s’emploient à se diversifier. Il s’agit d’avoir d’autres conversations avec l’ARC pour s’assurer que les données seront utilisées de cette façon et que, si on prévoit de les utiliser autrement, la confidentialité des données de chaque organisation sera respectée dans le cadre de ce processus.
Pourriez-vous me rappeler la deuxième question?
Le sénateur Loffreda : Oui. La deuxième question portait sur d’autres éventuels amendements.
M. MacDonald : Voilà. Je dirais à ce moment-ci que les trois points que j’ai soulevés sont ceux qui sont le plus d’actualité.
Le sénateur Loffreda : Croyez-vous que l’exigence de divulgation dissuaderait certains Canadiens de faire partie du conseil d’administration d’un organisme de bienfaisance? De nombreux Canadiens pourraient penser que… Je sais que, à l’époque où je travaillais dans le secteur bancaire, on me proposait une fois par semaine de faire partie d’un conseil d’administration. Vous deviez divulguer votre situation, et l’autre revenait vous voir et vous demandait : « Hé, pourquoi les avez-vous choisis plutôt que moi? » Voyez-vous cela comme une préoccupation?
M. MacDonald : À mon avis, il s’agit assurément d’un facteur. Je ne suis pas certain que je qualifierais cela de préoccupation à ce moment-ci. Nous parlons ici d’un équilibre. Nous voulons nous assurer qu’un système qui fonctionne d’une certaine façon depuis longtemps continue d’évoluer. Cela va nécessiter de l’information et des questions. Avec le temps, comme notre société est en constante évolution en raison de l’immigration et que diverses parties de nos collectivités sont littéralement en train de changer, nos dirigeants ont la responsabilité de changer eux aussi. Ces conversations deviendront plus naturelles au fil du temps. Ce sont des facteurs. Je ne suis pas certain de les considérer comme des préoccupations.
Le sénateur Loffreda : Merci.
La sénatrice MacAdam : Monsieur MacDonald, ce projet de loi est lié à la recommandation 8 du rapport du Comité sénatorial spécial sur le secteur de la bienfaisance. J’ai lu la réponse qu’a fournie le gouvernement à ce rapport en 2021. Il disait que le gouvernement appuyait la recommandation, et l’ancienne ministre souligne le rôle joué par le Comité consultatif sur le secteur des organismes de bienfaisance, qui, si j’ai bien compris, est un groupe consultatif qui permet au gouvernement du Canada d’engager un dialogue constructif avec le secteur caritatif. Je crois comprendre que vous faisiez partie de ce comité consultatif. Le gouvernement mentionne qu’il demandera au comité d’envisager de mener une étude plus approfondie sur la question et que, s’il décide de le faire, l’ARC examinera et prendra en considération les recommandations qui en découleront.
Savez-vous si une étude ou un examen plus approfondis ont été effectués et quelles sont les recommandations ou les principales leçons qui ont découlé de ce processus? Vous en avez peut-être déjà mentionné un certain nombre, mais pourriez-vous formuler des commentaires là-dessus? Si d’autres travaux sont envisagés ou s’il y a d’importantes leçons dont nous n’avons pas encore discuté, je serais heureuse d’en entendre parler.
M. MacDonald : Je vous remercie de votre question. Vous mettez vraiment ma mémoire à l’épreuve, car cela remonte à quelques années.
Oui, pour tout vous dire, j’étais l’un des coprésidents du Comité consultatif sur le secteur des organismes de bienfaisance, et c’était un sujet de discussion. Je cherche les rapports à ce sujet parce que beaucoup de travail a été fait. Nous avions des groupes de travail sur la collecte de données, et il y a eu des recommandations concernant une stratégie nationale en matière de données. De plus, nous avions un groupe de travail sur la collaboration avec les populations vulnérables. Bien honnêtement, il faudrait que je relise les rapports pour voir s’il y a une recommandation précise concernant la collecte de données. En toute franchise, je ne m’en souviens tout simplement pas. Je sais toutefois qu’il s’agissait de conversations importantes. Je ne me souviens tout simplement pas s’il s’agissait d’une recommandation précise.
La sénatrice MacAdam : D’accord, merci. Pourriez-vous fournir cette information au comité?
M. MacDonald : Certainement.
La sénatrice MacAdam : Merci.
[Français]
Le président : Vous voyez que les sénateurs de ce comité sont toujours bien préparés.
[Traduction]
La sénatrice Kingston : Ma question s’adresse à M. MacDonald. Je me demande encore sur quoi reposent vos préoccupations concernant la confidentialité des données, étant donné que, dans la section relative au contenu, la loi prévoit ce qui suit : « ne peut contenir aucun renseignement permettant d’identifier un organisme de bienfaisance enregistré ». L’ARC possède toutes sortes d’autres renseignements à notre sujet, au sujet des entreprises, au sujet des organismes de bienfaisance, etc. J’aimerais que vous nous en disiez davantage sur la nature de vos préoccupations quant au problème que pose la confidentialité des données.
M. MacDonald : Oui, certainement.
Notre réflexion porte sur des discussions que nous avons eues au sein du secteur. La collecte des données sera quelque chose de nouveau pour certains organismes. Il y aura peut-être un peu de malaise lorsqu’ils commenceront à avoir des conversations avec les administrateurs. Il est raisonnable de penser qu’ils se sentiront à l’aise lorsqu’ils comprendront comment ces données seront utilisées.
Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, je crois qu’il y a un manque de clarté quant aux autres utilisations qui pourraient être faites de ces données. Pourraient-elles être utilisées dans le cadre de procédures de vérification ou de procédures judiciaires? Même si l’intention est de les utiliser de façon éclairée et sous une forme agrégée, notre recommandation est de faire en sorte que nous ayons des conversations avec l’ARC sur la façon dont cela fonctionnerait afin que les organisations puissent avoir l’assurance que ces données seront uniquement communiquées de ces façons, et jamais en fonction d’organisations prises individuellement.
Dans le cadre de cette conversation, nous faisons ressortir certaines questions qui ont été soulevées par le secteur, et nous voulons nous assurer qu’elles sont intégrées au processus afin que les organisations se sentent à l’aise au moment de fournir ces données dans leur formulaire T3010.
La sénatrice Kingston : Ne serait-il pas inusité, cependant, que cela arrive aux données, à la lumière de la façon dont l’ARC agit lorsque quelque chose est exigé dans le cadre d’une vérification, comme vous l’avez dit, par exemple?
M. MacDonald : Oui. Encore une fois, le secteur est tellement vaste. Il y a 86 000 organismes de bienfaisance enregistrés. Cela ne concerne pas les organismes sans but lucratif, mais plutôt les organismes de bienfaisance enregistrés. Il est normal d’être nerveux lorsqu’on a affaire à l’organisme de réglementation, alors il est important de rassurer le plus possible les bénévoles et le personnel qui remplissent ces formulaires en leur disant que cela sera utilisé d’une façon qui ne leur nuira pas. Cela fera plutôt partie d’un apprentissage collectif pour le secteur. Ce que nous essayons de faire, c’est de clarifier les choses pour rassurer les organisations quant à la façon dont les données seront utilisées dans l’avenir.
La sénatrice Kingston : Merci.
Le président : Merci aux témoins. Le temps est écoulé, alors nous allons conclure la séance. Je vous remercie de votre présence aujourd’hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
[Français]
Demain, le 6 novembre, à 18 h 45, le comité reprendra son étude du projet de loi S-264, Loi instituant la Journée internationale pour la coopération et la justice fiscales. Merci à tous et merci à nos témoins.
[Traduction]
La sénatrice Galvez : Quand poursuivrons-nous l’étude du projet de loi? Y a-t-il un calendrier?
[Français]
Le président : En fait, on l’a introduit aujourd’hui. C’était la dernière journée pour la sénatrice. On essayait de mettre le projet de loi à l’horaire pour lui permettre d’être ici. Finalement, elle était à distance, mais on voulait profiter de l’occasion pour entamer les travaux. Nous allons poursuivre avec le projet de loi du sénateur Dalphond, puis continuer avec le plan de travail établi que nous vous avons acheminé la semaine dernière. Pas à l’ensemble des membres? On essaiera d’acheminer le plan de travail à l’ensemble des membres. Je pensais qu’il avait été envoyé à tout le monde. Merci beaucoup.
(La séance est levée.)