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POFO - Comité permanent

Pêches et océans


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES PÊCHES ET DES OCÉANS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 1er juin 2023

Le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans se réunit aujourd’hui, à 9 h 5 (HE), avec vidéoconférence, pour examiner la réponse du gouvernement au quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans, déposé auprès du greffier du Sénat le 12 juillet 2022.

La sénatrice Bev Busson (vice-présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La vice-présidente : Bonjour à tous. Je m’appelle Bev Busson, je suis une sénatrice de la Colombie-Britannique et j’ai le plaisir de présider la réunion de ce matin.

Nous tenons aujourd’hui une réunion du Comité sénatorial permanent des pêches et des océans. S’il y a des difficultés techniques, particulièrement en ce qui a trait à l’interprétation, veuillez le signaler au président ou au greffier, et nous nous efforcerons de régler le problème. Avant de commencer, j’aimerais prendre quelques instants pour permettre aux membres du comité de se présenter, en commençant par l’honorable sénateur qui se trouve immédiatement à ma droite.

Le sénateur Kutcher : Je m’appelle Stan Kutcher et je viens de la Nouvelle-Écosse. Bienvenue.

La sénatrice R. Patterson : Rebecca Patterson, de l’Ontario. Bienvenue.

La sénatrice Osler : Gigi Osler, du Manitoba.

Le sénateur Francis : Brian Francis, Epekwitk, Île-du-Prince-Édouard.

La sénatrice Ataullahjan : Salma Ataullahjan, de l’Ontario. Bienvenue.

La sénatrice Cordy : Jane Cordy, de la Nouvelle-Écosse. Bienvenue.

La vice-présidente : Le 7 mars 2023, la réponse du gouvernement au quatrième rapport du comité, intitulé Paix sur l’eau, a été déposée auprès du greffier du Sénat, conformément à l’ordre de renvoi visant l’étude de la réponse du gouvernement dont le comité a été saisi le 24 février 2023.

Aujourd’hui, dans le cadre de ce mandat, le comité entendra d’abord Michelle Glasgow, cheffe de la Première Nation de Sipekne’katik. Merci d’avoir apporté une tenue traditionnelle. C’est vraiment un plus pour notre conversation. Au nom des membres du comité, je vous remercie de votre présence. Je crois savoir que vous avez une déclaration préliminaire à faire. Après votre exposé, les membres du comité auront des questions à vous poser.

Michelle Glasgow, cheffe, Première Nation de Sipekne’katik : Bonjour, sénateurs, et merci de m’accueillir ici. C’est bien d’avoir beaucoup de Néo-Écossais ici aussi. Je me sens chez moi.

Plus de 20 ans se sont écoulés depuis l’arrêt Marshall de la Cour suprême, et nous avons encore l’impression de ne pas avoir voix au chapitre. La réaction du ministère des Pêches et des Océans, le MPO, au fait que nous exerçons nos droits en tant que Mi’kmaqs n’est pas pacifique ou amicale et ne respecte pas les obligations découlant des traités qui incombent à la Couronne. L’arrêt Marshall date d’il y a plus de 20 ans, et aucune modification n’a encore été apportée à la Loi sur les pêches ou à son règlement d’application en ce qui a trait à notre droit à la pêche de subsistance. Le refus de permettre aux Autochtones de vivre de la pêche est la poursuite de l’oppression systématique du gouvernement à l’égard de nos peuples autochtones. Le Sénat a présenté un rapport sur les pêches autochtones intitulé Paix sur l’eau. Ce rapport mentionnait précisément que ce n’est pas avec le MPO que Sipekne’katik devrait aborder ces questions.

Si vos députés ne respectent pas les paroles et la sagesse du Sénat, comment pouvons-nous nous sentir respectés et entendus en tant qu’Autochtones? Le rapport dit que ce n’est pas avec le MPO que nous devrions aborder ces questions. Il dit que nous devrions en parler avec Marc Miller, le ministre des Relations Couronne-Autochtones, mais, lorsque nous avons écrit au ministre Miller, on nous a dit d’en parler avec la ministre du MPO.

Nous sommes prudemment optimistes, mais honnêtement, comment faire pour rétablir notre relation avec le MPO? Chaque année, nous suivons notre processus de consultation. Il fait intervenir les membres de notre collectivité et concerne notre plan de gestion de la pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles, ainsi que la pêche de subsistance.

Nous consultons nos pêcheurs, nos aînés et les membres de notre collectivité, parce que toutes leurs voix sont importantes, car nos traités sont des droits collectifs. Nous rédigeons nos plans de gestion des pêches et nous les présentons au MPO et à Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada — RCAANC —, et le MPO renvoie toujours son plan en disant que le plan de pêche de Sipekne’katik se fait sans consultation avec le ministère.

Je me rappelle que, il y a environ huit ans, nous avons créé une nouvelle version de notre plan alimentaire, social et rituel. Nous l’avons envoyée au MPO, qui nous l’a renvoyée en nous disant qu’il reproduisait notre plan, mais le manque de confiance s’est accru au fil des ans et cela a incité Sipekne’katik à envoyer une lettre dans laquelle nous disions que nous n’avons pas besoin de son approbation et que nous sommes capables de gérer nos propres plans. Pourtant, le MPO ne tient absolument pas compte de notre processus et de nos droits et, en conséquence, il porte des accusations contre nos pêcheurs qui ne respectent pas le plan approuvé par lui, mais qui respectent les plans de gestion des pêches approuvés par nous.

Le MPO nous écrit souvent pour nous consulter sur certaines questions, mais il nous donne des délais de réponse courts. Une fois, c’était 12 jours, et une autre, seulement quelques jours. Ce n’est pas assez de temps pour faire les recherches nécessaires, établir les faits et, surtout, pour la consultation de la collectivité, qui est au cœur de notre processus décisionnel.

Lorsque nous écrivons au MPO et à RCAANC, nous ne recevons aucune réponse, ou nous en recevons une après plus de six mois. Cela fait plus de 20 ans, et le MPO continue de harceler les membres de notre bande. Il les suit lorsqu’ils pêchent sur la côte Sud de la Nouvelle-Écosse, il fait du profilage racial et suppose qu’ils enfreignent la loi, alors que ce n’est pas le cas. Les membres de notre bande pensent qu’ils doivent pêcher la nuit parce qu’on ne respecte pas notre droit de pêcher pour assurer notre subsistance.

Le MPO porte des accusations contre les membres de notre bande à tout propos, par exemple le fait d’avoir trop de homards d’après la limite qu’il nous a imposée, ou de pêcher sans autorisation même si nous y sommes autorisés par notre traité, ce qui a été confirmé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Marshall ainsi que par le plan de gestion de Sipekne’katik. Le MPO n’a jamais respecté notre droit de pêcher pour assurer notre subsistance, même après que nous lui avons soumis des plans de subsistance pour le homard et que nous avons créé nos propres étiquettes y renvoyant, que nous avons remises aux membres de notre bande.

Il y a en ce moment plus de 20 affaires devant les tribunaux provinciaux mettant en cause des membres de notre collectivité qui pêchaient pour s’assurer une subsistance convenable. Dans chacun des cas, ils ont été accusés de pêche sans autorisation, même s’ils avaient été autorisés à pêcher par notre chef et par notre conseil ainsi qu’en vertu de notre plan de gestion.

Les gens de notre collectivité sont traités comme des criminels, et ceux qui commettent réellement des crimes reçoivent un traitement spécial. Prenons par exemple les accusations portées contre 23 incendiaires non autochtones et une personne non autochtone accusée d’avoir agressé un de nos dirigeants élus. Ils ont tous bénéficié de la justice réparatrice, qui est un processus autochtone, tandis que, lorsqu’un de nos membres a été accusé d’entrave à la justice, la Couronne lui a refusé l’accès à la justice réparatrice.

Comment pouvons-nous aller de l’avant lorsque nous avons l’impression d’être coincés dans un système qui opprime injustement notre peuple et que ce sont nos oppresseurs qui ont autorité sur nous? Nos droits ne sont pas respectés par le MPO, même si les droits des Autochtones sont des droits collectifs reconnus par la Cour suprême. Le MPO fait continuellement une mauvaise interprétation de l’arrêt Marshall II en ce qui concerne son pouvoir de réglementation de nos pêches. Ce qu’il refuse d’accepter, c’est que, selon l’arrêt Marshall II, son droit de réglementation se limite à la conservation et à la sécurité publique.

En 2022, le MPO a restreint notre pêche au homard à des fins alimentaires, sociales et rituelles. Il a limité nos prises de homard à 45 000 livres pour l’année. Lorsqu’il a imposé des limites à notre pêche à des fins alimentaires, sociales et rituelles, il n’y a pas eu de véritable consultation avec Sipekne’katik, et il n’a pas pu prouver en quoi il était équitable de le faire.

L’an dernier, dans la zone de pêche du homard 34, plus de 45 millions de livres de homard ont été pêchées par des pêcheurs commerciaux, et il ne s’agit que d’une seule zone. Si nous incluons les autres zones de pêche du homard en Nouvelle-Écosse, ce sont plus de 100 millions de livres qui ont été pêchées l’an dernier, et ce n’est pas notre peuple qui les a pêchées.

Vu le nombre de permis de pêche commerciale et le nombre de homards récoltés par les pêcheurs commerciaux, rien ne justifie qu’on empiète sur nos droits de pêche au homard, mais la quantité que notre collectivité peut pêcher est limitée.

De plus, la Cour suprême du Canada a précisé clairement dans de nombreuses affaires que les droits des Autochtones ont préséance sur les pêches commerciales, mais le MPO place le privilège commercial au-dessus de nos droits de pêche individuels et issus de traités. Cette pratique est partiale et est la cause de conflits et de divisions. Les mesures allant à l’encontre des droits ancestraux ou issus de traités doivent être justifiées. Même après que la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, ou DNUDPA, a reçu la sanction royale en 2021, ce qui confirme notre droit de gérer nos propres pêches, le MPO ne respecte pas nos plans de gestion. Cela fait plus de 20 ans, et nous nous battons encore pour notre droit de pêcher et pour notre droit de gérer nos propres plans.

Merci.

La vice-présidente : Merci beaucoup, cheffe Glasgow. Votre contribution est appréciée.

Plusieurs sénateurs veulent vous poser des questions.

Le sénateur Francis : Cheffe Glasgow, le harcèlement et la violence subis par vos pêcheurs et par l’ensemble de la collectivité en 2020 ont attiré l’attention au pays et à l’étranger, mais il semble que les choses ne se soient pas beaucoup améliorées. À votre avis, pourquoi la ministre et le ministère sont-ils si réticents à respecter la décision du plus haut tribunal du pays?

Mme Glasgow : Avec 2020 et tout ce qui s’est passé, le MPO a eu deux ans pour porter des accusations contre nos membres. J’ai l’impression qu’il a attendu que tout se calme, pour ainsi dire, et, tout récemment, probablement à la fin de 2022, ses représentants sont venus dans notre collectivité et ont porté des accusations contre une vingtaine de membres de notre collectivité.

Donc, pendant ces deux années, on n’a pas entendu parler du fait qu’ils allaient être accusés, et je crois que c’est 23 mois plus tard que les accusations ont été portées. Je pense qu’ils espéraient simplement que nous partions ou que nous nous arrêtions, mais c’est notre mode de vie. Pour bon nombre des membres de notre collectivité et de leur famille, c’est ainsi qu’ils subviennent aux besoins de leur famille et de leurs enfants.

Le sénateur Francis : Comment décririez-vous la relation actuelle avec le MPO?

Mme Glasgow : Lorsqu’ils sont arrivés dans notre collectivité, j’ai reçu beaucoup de messages. Ce que nous avons fait, c’est que nous avons tenu d’urgence une réunion du conseil et que nous avons adopté une motion selon laquelle les représentants du MPO ne sont pas autorisés à entrer librement dans notre collectivité, parce que nous avons remarqué qu’ils semblent causer intentionnellement des conflits avec nos membres afin que les accusations puissent être portées plus facilement.

Lorsque quelqu’un vient dans notre collectivité, c’est en tant qu’invité, mais ils s’imposent, alors nous avons adopté des règles et des règlements. Lorsqu’ils viennent, ils s’adressent à la GRC et lui remettent leurs documents, puis la GRC communique avec les membres, parce que nous avons une meilleure relation avec la GRC dans notre collectivité.

Le sénateur Francis : Merci de votre réponse, cheffe.

La vice-présidente : Merci, cheffe Glasgow.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup, cheffe Glasgow, d’être parmi nous, et félicitations pour votre nomination.

Mme Glasgow : Merci.

Le sénateur Kutcher : J’ai trois questions, mais, bien sûr, chaque question comporte plusieurs volets, et le sénateur Ravalia m’a cédé son temps de parole. Merci.

Ma première question porte sur les pêches fondées sur les droits et la sensibilisation. Savez-vous si le MPO a créé des programmes de sensibilisation pour enseigner aux citoyens de la Nouvelle-Écosse ce qu’est une pêche fondée sur les droits? Vous a-t-on demandé, à vous et à votre peuple, de créer conjointement des programmes de sensibilisation pour enseigner à la collectivité en général ce qu’est une pêche fondée sur les droits? La troisième partie de la question est la suivante : avez-vous remarqué un changement quelconque dans la compréhension de ce qu’est une pêche fondée sur les droits chez les Néo-Écossais au cours des cinq ou six dernières années? C’est ma première question.

Mme Glasgow : Merci, sénateur, de vos questions.

À ma connaissance, le MPO n’a élaboré aucun programme de sensibilisation à l’égard des pêches fondées sur les droits. On ne nous a pas demandé de créer quoi que ce soit pour sensibiliser qui que ce soit à nos pêches fondées sur les droits.

Quelle était la dernière partie de votre question?

Le sénateur Kutcher : Avez-vous remarqué un changement dans la compréhension qu’ont les Néo-Écossais de ce qu’est une pêche fondée sur les droits au cours des cinq ou dix dernières années?

Mme Glasgow : Cela dépend de la collectivité, je dois dire. À Halifax, beaucoup plus de gens sont compréhensifs, disposés et ouverts à apprendre. Sur la côte Sud, nous devons composer avec une ambiance un peu différente.

L’une des choses les plus importantes à l’échelle du Canada, et particulièrement en Nouvelle-Écosse, c’est que tout le monde doit savoir ce que sont les droits issus de traités et ce que sont exactement les droits ancestraux. C’est ce qu’il manque dans nos provinces.

Si nous pouvions enseigner à nos enfants, dès un jeune âge, des choses qui ont trait directement à notre région, à notre province, au lieu de toutes les autres leçons d’histoire qu’on leur enseigne, alors, lorsqu’ils deviendront des adultes, ils comprendront mieux, mais ce n’est pas ce qui se passe.

Lorsque nous insistons pour qu’il y ait davantage d’enseignement sur la pêche fondée sur les droits, nous devons insister pour qu’il y ait davantage d’enseignement sur nos traités, sur les Premières Nations et sur notre mode de vie.

Le sénateur Kutcher : Merci, cheffe Glasgow.

Savez-vous si le MPO a pris des mesures pour réduire le racisme au sein du ministère?

Ma deuxième question est la suivante : le MPO vous a-t-il demandé de créer conjointement des programmes ou des interventions pour lutter contre le racisme systémique au MPO?

Ma troisième question fait suite à la deuxième. Avez-vous remarqué un changement touchant les attitudes racistes au sein du MPO au cours des 5 à 10 dernières années?

Mme Glasgow : Merci encore de vos questions.

Je n’ai connaissance d’aucune mesure que le MPO ait prise ni du fait que le MPO ait créé quoi que ce soir pour réduire le racisme ou contribuer à la réduction. On ne nous a rien demandé de créer conjointement.

Les choses n’ont pas changé au cours des cinq dernières années. Si vous regardiez des vidéos de 1999 et de 2000, c’était le bateau de mon père. Mon père est Alexander Peter McDonald, et il a également été chef. Il se battait alors. Il se bat toujours. Il est maintenant plus âgé. En 2020, il pêchait encore. Il se bat toujours pour son droit de pêche. C’est le combat d’une vie. Je l’ai toujours connu. C’est un grand guerrier. Il se bat encore. Il habite dans la région de Digby. Il se fait discret. Il sait qu’il y a encore du racisme. C’est toujours la même chose.

Le sénateur Kutcher : Merci de votre réponse.

Ma dernière question sera très brève. En tant que ministère fédéral, le MPO est-il capable de s’occuper adéquatement des pêches fondées sur les droits?

Mme Glasgow : Merci de votre question.

Je ne pense pas que la solution passe par le MPO lorsqu’il s’agit de l’une ou l’autre de nos pêches issues de traités. Le conflit qui a été créé par le MPO et le sentiment général que nos gens ont lorsque le MPO intervient ne sont pas bons.

Pour aller de l’avant de façon positive, il faudrait quelque chose d’établi par les Mi’kmaqs et pour les Mi’kmaqs qui ne relève pas du MPO. Le MPO ne travaille pas pour nous. À nos yeux, le MPO travaille pour les pêcheurs commerciaux. Merci.

La sénatrice Ataullahjan : Cheffe Glasgow, vous avez dit qu’on vous a demandé de rétablir votre relation avec le MPO. Pensez-vous que cette relation peut être rétablie?

D’ailleurs, pourquoi la responsabilité de rétablir une relation rompue depuis si longtemps vous incomberait-elle? Qu’en est-il de leur responsabilité?

Mme Glasgow : Merci de votre question.

Lorsque je parle aux membres de ma collectivité et à nos pêcheurs, je ne pense pas que nous puissions aller de l’avant de façon positive tant que le MPO exerce une autorité sur nous, parce que nous estimons pouvoir gérer nos plans nous-mêmes.

Je ne sais pas pourquoi nous devons trouver une façon de traiter le MPO dans son ensemble. Il y a des agents qui sont gentils, mais on peut les compter sur les doigts de la main. Il est très difficile d’aller de l’avant avec le MPO en affirmant l’autorité qu’il a.

Lorsque nous avons nos plans de gestion, que nous les présentons et que nous faisons toutes les consultations avec la collectivité, c’est beaucoup de temps et de travail. La voix des gens de notre collectivité est entendue dans notre plan de gestion. Ensuite, nous les envoyons au MPO et il dit « Non », ce sont des plans équitables. Nous voulons aussi travailler à la préservation et à la conservation des espèces.

Il semble qu’il nous impose des limites pour que des accusations soient portées dès qu’elles sont dépassées. Nous constatons qu’il utilise nos plans. Il manipule nos plans pour pouvoir porter des accusations contre nos membres. Je ne pense pas que nous puissions aller de l’avant de façon positive avec le MPO.

La sénatrice Ataullahjan : Le comité a entendu dire que le MPO est maintenant ouvert aux idées des Premières Nations. Vous avez déjà plus ou moins répondu à ma question. Avez-vous aussi l’impression qu’il est prêt à vous écouter? Est-ce l’impression que vous avez lorsque vous interagissez avec le MPO? Vous venez de dire que le conflit a été créé par le MPO. Pourtant, on nous dit maintenant qu’il est ouvert à vos idées. Est‑ce l’impression que vous avez?

Mme Glasgow : Il est prêt à nous écouter.

La sénatrice Ataullahjan : Des idées, oui.

Mme Glasgow : Oui. Lorsqu’il s’agit d’élaboration conjointe, j’ai l’impression qu’il est ouvert à nous écouter simplement pour cocher une case dans sa liste et dire : « Nous avons écouté la Première Nation. » C’est maintenant « nous l’avons élaboré ensemble », alors que, tout ce qu’ils font, c’est écouter, mais ils ne prennent rien de ce que nous avons dit et ne l’appliquent à rien. J’ai l’impression que cela leur sert simplement à cocher une case, mais ce n’est pas significatif.

La sénatrice Ataullahjan : Je vous remercie de votre franchise.

La sénatrice Cordy : Merci d’être ici. Vos réponses sont très concrètes. C’est utile.

Comme je viens de la Nouvelle-Écosse, je me souviens de l’arrêt Marshall de 1999. C’était il y a 24 ans. Nous sommes ici, à Ottawa, à parler encore du fait que l’arrêt Marshall n’est pas mis en œuvre et n’est pas appliqué par le gouvernement. Nous aimerions si possible brasser les choses et voir si nous pouvons faire en sorte qu’elles commencent à changer.

Les discussions devraient se tenir de nation à nation. Ce que nous avons entendu de votre part et de celle de nombreux autres témoins, c’est que, en fait, ce n’est pas une discussion de nation à nation : il y a une hiérarchie, et les collectivités autochtones sont en dessous, donc pas sur un pied d’égalité. Je le dis à ma manière. C’est l’impression que me donnent les témoins que nous avons entendus.

Vous avez parlé de ne pas traiter avec la ministre ou le ministère des Pêches, mais plutôt de parler avec le ministre Miller. Je vois cela comme une décision d’un tribunal, même avec le ministre de la Justice Lametti, et il n’y aurait pas de conflit au sein du ministère des Pêches, mais ce serait plutôt la mise en œuvre d’une décision judiciaire. Cependant, après 24 ans à travailler avec le MPO, cela ne me semble pas fonctionner, de mon point de vue d’observatrice. Qu’en pensez-vous?

Mme Glasgow : Merci de votre question. Cela ne fonctionne pas. Vingt-quatre ans, c’est très long, surtout lorsque des gens font l’objet d’accusations. Des gens perdent des bateaux et des véhicules. Mon père, par exemple, a perdu son camion en 1999. Il était si heureux, lorsqu’il a eu ce camion flambant neuf, qu’il s’en vantait. Il en avait toujours voulu un, mais n’avait jamais eu les moyens. Alors, il a eu ce camion flambant neuf, mais ils l’ont pris et l’ont gardé pendant plus de 10 ans. Lorsqu’il l’a récupéré, il n’était plus en bon état. C’est très triste que les gens de notre collectivité essaient de s’établir et ne soient pas en mesure de le faire.

Il faut faire quelque chose. Cela ne fonctionne pas. En ce moment, nous avons une poursuite contre le Canada devant les tribunaux et nous devons prouver que nous avons des droits. Nous optons pour la médiation; pourquoi devons-nous prouver que nous avons ces droits? Il y a 24 ans que l’arrêt Marshall a été rendu, et je pense que la situation est peut-être pire qu’avant. Ils s’en servent contre nous parce que rien n’est défini. Ils portent des accusations contre nous, contre les gens de notre collectivité, et c’est terrible.

La sénatrice Cordy : Ma réponse à quelqu’un qui m’a dit, à propos de l’arrêt Marshall, « Eh bien, nous avons besoin de plus de temps » était « Eh bien, combien? » Cela fait 24 ans. Avez‑vous besoin de 30 ans, de 40 ans, de 50 ans? » Je pense que le commun des mortels jugerait que 24 ans, c’est amplement suffisant pour mettre pleinement en œuvre l’arrêt Marshall.

J’aimerais revenir sur ce dont vous parliez plus tôt concernant ce qui s’est passé en 2020, c’est-à-dire l’attention à l’échelle nationale à l’égard des pêches sur la côte Sud, à Sipekne’katik en particulier. Ceux qui ont vu ce qui se passait ont une image de ce qui est arrivé aux pêcheurs autochtones de la côte Sud. Vous avez dit — et je ne le savais pas — que le MPO avait eu deux ans pour porter des accusations, mais qu’il avait attendu qu’un peu plus de deux ans se soient écoulés avant de le faire, et que beaucoup de gens devaient avoir oublié. Pensez-vous que c’était intentionnel?

Mme Glasgow : Nous pensons que c’était intentionnel. Nous avons l’impression que même aujourd’hui, dans le cas de la pêche à la civelle, ils prennent des noms. Il n’y a pas encore d’accusations, mais ils vont attendre 22 mois, et il va y en avoir. Je pense que c’est intentionnel et qu’ils laissent les gens se mettre à l’aise, puis ils vont leur asséner de multiples accusations. C’est terrible pour notre peuple.

La sénatrice Cordy : Merci.

La sénatrice R. Patterson : Merci, cheffe Glasgow. Votre père doit être très fier que vous soyez ici. Vos réponses sont percutantes.

Une chose que nous entendons constamment dire par les témoins, c’est que les gens à la base souffrent des conséquences du système qui vous a été imposé. Mais la vraie grande question, c’est celle de la confiance et du respect à l’échelon national. C’est le thème qui ressort de ce que j’entends.

Lorsqu’on brise la confiance — et peut-être qu’elle n’a jamais existé — et qu’on manque de respect, il faut plus qu’une politique ou une procédure pour la rétablir. Il faut une solution beaucoup plus vaste. Pouvons-nous intégrer l’idée — et cela fonctionne bien dans le travail avec mes collègues ici — qu’il s’agit d’une relation de nation à nation et que le MPO est un outil d’une nation?

Nous avons entendu d’autres témoins parler du fait que, s’ils avaient la capacité de régler le problème de la confiance, du respect et de la compréhension des droits des Autochtones — que ce soit dans le cadre de la DNUDPA, de la réconciliation, des droits issus de traités ou d’autre chose — il y aurait une autre solution que celle d’essayer de parler des quotas aux responsables des pêches. C’est la conséquence d’un mauvais système.

Vous semblez très sage dans votre façon d’envisager l’ensemble du système. Si tous les obstacles étaient éliminés et que vous étiez en mesure de faire une recommandation, en tant que cheffe de votre peuple, pour régler le problème de la confiance, du respect et de la compréhension, quelle recommandation feriez-vous pour essayer de rétablir cette relation aux plus hauts échelons afin que le système puisse mieux respecter les droits des Autochtones?

Mme Glasgow : Merci de votre question. Je l’ai déjà dit avec les autres chefs : je pense que le MPO ne peut pas adéquatement nous gérer et exercer une autorité sur nous. Il y a trop de conflits et un trop grand manque de confiance et de respect. Si c’était possible, l’idéal serait que nous ayons notre propre ministère mi’kmaq des pêches et des océans pour nous gouverner nous-mêmes. De mon point de vue de chef — et nous avons nos propres plans de gestion —, nous devrions être en mesure de régir nos propres plans de gestion. Nous devrions pouvoir décider des quantités que notre peuple peut pêcher, en gardant à l’esprit la préservation et la conservation des espèces, et décider de la répartition. Nous pouvons le faire, mais ils nous disent que nous ne pouvons pas gérer nos propres plans lorsqu’ils les modifient. En quoi ne sommes-nous pas assez intelligents pour créer des plans et gérer nos propres plans alors que nous sommes les premiers intendants des terres?

C’est très insultant de consacrer tant de temps et d’efforts à l’élaboration d’un plan qui convient aux gens de notre collectivité — lorsqu’ils y consacrent tant de réflexion et de temps — et de le voir modifier par eux, comme ça. Nous devrions nous entendre de nation à nation — la Première Nation de Sipekne’katik, la Première Nation de Potlotek, la Première Nation d’Eskasoni —, d’abord entre Premières Nations, puis avec le Canada. Nous ne devrions pas avoir à traiter individuellement avec le MPO, qui, à mon avis, nous sépare et nous isole. Ensuite, nous nous battons les uns contre les autres parce qu’une communauté obtient quelque chose que l’autre n’a pas, alors que, en fait, nous tous, les Premières Nations, devons nous réunir et décider de ce que nous devons faire. On nous impose un système qui ne nous convient pas. Ce n’est pas ainsi que nous travaillons. Merci.

La sénatrice R. Patterson : Merci. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé des prises de homards. Il y a déjà cette pêche commerciale massive et votre part est très petite. D’un point de vue pratique, d’une façon ou d’une autre, quelque part, il faudrait que vous ayez un lien avec le système. Compte tenu de la recommandation que vous venez de nous faire, quel lien entrevoyez-vous entre vos pêches et le gouvernement fédéral, de sorte que la communication existe à l’échelon de la collectivité et qu’il n’y ait pas de gens qui viennent vous imposer des choses?

Mme Glasgow : Merci. La limite qu’ils imposent fait partie de nos plans. C’est une pêche alimentaire, sociale et rituelle. Ils ont limité la quantité que nous pouvons pêcher pour manger. Ils ont limité la quantité que nous pouvons pêcher pour nos rituels et que nous pouvons donner aux gens de notre collectivité. Lorsque nous prélevons une partie de notre pêche au homard pour la collectivité, il y a une limite. Il y a des gens qui ne reçoivent rien parce que nous ne pouvons pas dépasser cette limite. Ils ne reconnaissent pas du tout notre pêche de subsistance. La limite est de zéro. Nous ne pouvons pas pêcher pour avoir une subsistance convenable. Ils disent non. Nos pêcheurs de subsistance ont l’impression d’être traités comme des criminels, mais ils nous imposent une limite pour notre alimentation, ce qui n’est pas correct. Pourquoi peuvent-ils juger de la quantité que nous pouvons pêcher pour nourrir les gens de notre collectivité?

La sénatrice R. Patterson : Tout à l’heure, vous opposiez RCAANC, d’une part, et le MPO et la ministre, de l’autre. Si vous aspiriez à des pêches autochtones indépendantes auxquelles différentes nations participeraient, quel serait, selon vous, leur principal point de contact avec le gouvernement du Canada? À votre avis, où cela se situerait-il, idéalement?

Mme Glasgow : Le lien devrait être l’échange d’information à des fins de conservation et de préservation. Le lien devrait être l’échange d’information pour la santé et la sécurité, mais il ne devrait pas servir à imposer des limites et à porter des accusations contre les gens de notre collectivité. Alors je pense que, si nous pouvons établir un lien, ce devrait être parce qu’il y a beaucoup d’organisations différentes qui travaillent pour nous, et nous sommes très fiers de la conservation et de la préservation des espèces. Si ce qu’il faut, c’est communiquer nos renseignements sur la quantité qui est pêchée dans l’ensemble, je pense que ce serait bien, mais je ne pense pas que l’autorisation devrait venir du Canada. Je pense que nous devrions être en mesure d’autoriser nos gens collectivement. Merci.

La sénatrice Osler : Merci beaucoup, cheffe, de votre témoignage d’aujourd’hui.

Je vais revenir sur certains de vos propos concernant le conflit avec le MPO et faire suite aux questions du sénateur Patterson. Il s’agit des négociations et de la conversation de nation à nation. Le comité a entendu divers témoins au sujet du rôle du MPO et de RCAANC dans la négociation des pêches fondées sur les droits. Tout récemment, il a entendu dire que le MPO n’est pas disposé à écouter les idées des Premières Nations, peut-être un peu plus que par le passé, et le comité a entendu dire que RCAANC semble plus engagé à l’égard de cet objectif. Donc, pour faire suite aux questions du sénateur Patterson, à votre avis, en quoi les négociations ou la dynamique de la discussion sur les pêches fondées sur les droits seraient-elles différentes si RCAANC était le ministère fédéral responsable des négociations sur les pêches fondées sur les droits?

Mme Glasgow : Merci de votre question. Après des années de négociations, ce que j’en pense, c’est qu’ils veulent toujours que nous renoncions à quelque chose, c’est-à-dire à nos droits. Tout ce qu’il faut, c’est que nos droits soient respectés. Nous devons être traités comme des égaux et non pas comme si nous étions inférieurs, que nous ne comprenions pas et que nous ne pouvions pas gérer nos propres plans. Nos droits doivent être respectés. Dans de nouvelles négociations, ils veulent que nous renoncions à nos droits. C’est très, très important... nos droits issus de traités, nos droits autochtones, en tant que membres des Premières Nations.

Ce n’est pas avec le MPO que nous ferons avancer les choses de façon positive. Nous pouvons essayer RCAANC. Mais c’est difficile, parce que, lorsqu’on offre aux Premières Nations de négocier, j’ai l’impression qu’on leur dit habituellement qu’elles peuvent avoir telle ou telle chose et que les deux choses sont très, très petites. Les choix qu’ils nous donnent ne sont pas bons du tout. Je pense donc que l’important, c’est de comprendre nos droits, de sensibiliser les gens à nos droits et de respecter les droits ancestraux et issus de traités que nous avons en tant que membres des Premières Nations. Merci.

La vice-présidente : Merci beaucoup. Avant que nous passions au deuxième tour, j’aimerais poser une question. Je suis en fait émue par votre témoignage convaincant sur les expériences que vous et votre Première Nation avez vécues en essayant de faire respecter votre droit inhérent et constitutionnel à une pêche fondée sur les droits.

Je suis un peu choquée de voir que, malgré les décisions de la Cour suprême dans l’affaire Marshall, le MPO porte encore des accusations de ce genre et qu’elles parviennent jusqu’au système judiciaire. C’est davantage un commentaire qu’une question, mais je suis choquée que cela se produise encore, compte tenu de la décision contraignante de la Cour suprême du Canada. Je pense qu’il faut déconstruire le système à cet égard pour savoir où cela va mal.

Un commentaire que vous avez fait m’a intéressée. Un certain nombre des recommandations que nous avons formulées dans notre premier rapport portaient sur l’interaction de la GRC avec votre Première Nation en particulier, mais aussi avec un certain nombre d’autres Premières Nations, dans l’application des droits de pêche. Vous avez mentionné qu’elle servait d’intermédiaire pour faire respecter vos droits dans votre collectivité ces derniers temps. Pourriez-vous nous expliquer un peu plus comment cela fonctionne?

Mme Glasgow : Merci de votre question. En ce qui concerne votre premier commentaire au sujet des accusations portées par le MPO, je ne sais même pas combien de fois mon père a été accusé. Il a souvent été accusé. Toutes les accusations ont été abandonnées. Les gens de notre collectivité qui sont accusés dépensent beaucoup d’argent en honoraires d’avocats et passent beaucoup de temps sans voir leur famille et sans aller au travail. On prend leur bateau. On prend leur véhicule. Au bout du compte, les accusations sont abandonnées. Elles sont toutes abandonnées. La dernière affaire concernait des membres de ma famille. Elle a duré près de deux ans, puis les accusations ont été abandonnées.

Si elles vont être abandonnées, pourquoi faire perdre leur temps aux gens de notre collectivité? Pourquoi leur faire gaspiller de l’argent? Pourquoi les irriter et les mettre encore plus en colère contre le MPO si on va finir par abandonner les accusations parce qu’on ne peut prouver qu’elles sont fondées? Lorsque nous disons que nous pêchons pour assurer une subsistance convenable et que nous pêchons en vertu de droits issus de traités, ils laissent tomber les accusations parce qu’ils ne peuvent nous accuser de rien.

Ensuite, en ce qui concerne la GRC, ce n’est pas pareil dans toutes les collectivités, mais, dans la nôtre, il y a quelques agents de la GRC en qui notre collectivité et nos membres ont confiance, et ils ont établi de très bonnes relations avec eux. L’un d’eux était Joe Young. Il n’est pas très grand. Nous l’appelons Mighty Joe Young. Il est très gentil. Il est dans notre collectivité depuis un bout de temps et il peut entrer chez n’importe qui. Il est vraiment très bon pour parler avec les gens. Ce n’est pas peu dire lorsqu’il s’agit de Sipekne’katik. Mais il a été muté récemment, alors, en ce moment, nos services de police sont insuffisants. Mais lorsque notre motion a été présentée, c’était parce que Joe était là. Il avait de la facilité à parler aux membres de notre communauté. Alors nous allons peut-être devoir modifier un peu notre plan.

La vice-présidente : Merci. Je comprends. Il ne nous reste pas beaucoup de temps, et votre témoignage est si convaincant que beaucoup de gens veulent vous poser des questions complémentaires.

Le sénateur Francis : Le gouvernement fédéral continue d’utiliser le cadre législatif et réglementaire créé pour les pêches fondées sur les privilèges pour régir les pêches fondées sur les droits. À votre avis, cheffe, est-ce approprié ou devrait-il y avoir un cadre juridique et réglementaire distinct pour régir les pêches fondées sur les droits afin d’assurer une mise en œuvre complète?

Mme Glasgow : Merci de votre question. Je ne pense pas que ce soit la bonne façon de procéder. Je pense que la pêche fondée sur les droits est différente. Ce sont nos dirigeants, nos chefs, nos conseils et nos programmes qui doivent la régir. Il faut que ce soit nous qui la régissions. Je pense que ce serait la bonne façon de procéder à l’avenir. Merci.

Le sénateur Kutcher : Cheffe, nous avons entendu des témoignages incroyablement percutants de votre part aujourd’hui et durant toute notre étude. Je tiens simplement à vous dire que vous avez fait aujourd’hui l’une des déclarations les plus percutantes que j’ai entendues, et j’espère simplement qu’elle se reflétera dans notre rapport. Je paraphrase, mais vous avez dit quelque chose comme : « Ils ne peuvent pas nous dire quelle quantité nous pouvons manger. » Je pense que c’est l’une des phrases les plus percutantes que j’ai entendues ici.

Je vous écoutais parler du fait que les accusations étaient abandonnées. J’aimerais avoir votre opinion là-dessus. Je ne suis pas un professionnel du système judiciaire, mais cela me semble être non pas une question juridique, mais plutôt du harcèlement. C’est du harcèlement constant. Je me demande si vous pensez que ce genre de harcèlement pourrait en fait être une expression de la façon dont le racisme systémique est appliqué par le système de justice.

Mme Glasgow : Je vous remercie de vos commentaires et de votre question.

Oui, c’en est une. Un avocat de notre collectivité, Michael McDonald, représentait beaucoup de gens faisant l’objet des accusations portées en 2020, et toutes les accusations ont été abandonnées. Mais nous l’avons embauché pour nous aider dans notre service des pêches issues de traités, puisque nous sommes en train d’en créer un. D’après ce qu’il raconte, il doit composer avec beaucoup de problèmes au sein du système judiciaire, et c’est injuste. Notre peuple est très mal traité simplement à cause de notre identité, à cause de l’endroit où nous sommes nés, en fait, parce que nous sommes nés avec des droits inhérents. Nous sommes nés avec des droits issus de traités. Nous subissons de la discrimination à cause de cela de la part du MPO ainsi que du système judiciaire. Je ne comprends pas pourquoi le système judiciaire continue d’admettre les accusations alors que, au bout du compte, c’est une si grande perte de temps et d’argent. Merci.

La vice-présidente : Merci beaucoup.

Si personne d’autre n’a quelque chose à ajouter, j’aimerais faire écho aux observations du sénateur Kutcher et répéter que votre témoignage d’aujourd’hui a été très instructif et incroyablement convaincant, et que nous veillerons à ce que vos propos soient bien rendus dans notre rapport. Merci beaucoup d’être ici aujourd’hui pour nous aider, cheffe.

Le sénateur Francis : Sipekne’katik a déposé une plainte contre le Canada aux Nations unies. Pourquoi a-t-il fallu un recours international? Quels autres recours juridiques votre collectivité a-t-elle exercés au pays?

Mme Glasgow : Merci de votre question.

Nous avons jugé devoir le faire et ne pas avoir d’autre choix. Nous avions l’impression d’être coincés. Nous nous sentions obligés de nous adresser à l’ONU pour être vus et traités comme des égaux, parce que nous estimions que, au Canada, nous n’étions pas traités comme une nation ou comme un peuple.

Merci.

La vice-présidente : Encore une fois, merci d’avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd’hui. Cela a été extrêmement utile.

Honorables sénateurs, notre second groupe de témoins est le suivant : Wilbert Marshall, chef de l’Assemblée des chefs mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse, et Justin Martin, coordonnateur de la pêche mi’kmaq au Bureau de négociation Kwilmu’kw Maw-klusuaqn. Désolée de prononcer aussi mal. Je me suis exercée à dire tout cela hier soir.

Je crois comprendre, chef Marshall, que vous avez préparé une déclaration préliminaire.

Wilbert Marshall, chef, Assemblée des chefs mi’kmaq de la Nouvelle-Écosse : Je vais vous présenter le côté sombre des pêches, puis M. Martin vous présentera l’autre côté. Le côté sombre, ce sont tous les combats que nous livrons — et qui sont toujours en cours — avec les pêcheurs non autochtones et le MPO. Cela fait de nombreuses années maintenant.

Grandir dans la collectivité toute sa vie et se faire traiter... nous ne sommes pas riches, vous savez. Nous n’étions pas vraiment pauvres, mais mes parents ont toujours... c’était une collectivité très unie. Mes oncles et mes tantes étaient là, et le Sante’ Mawio’mi se tenait chez nous chaque année. Les gens venaient de partout. Il y avait de la pêche partout. Il y avait une collectivité il y a longtemps. C’est l’une des collectivités les plus anciennes de la Nouvelle-Écosse et, en fait, du Mi’kma’ki.

La pêche de subsistance a commencé en 2006, peut-être... je peux me tromper d’année. Lorsque nous avons commencé à la pratiquer à St. Peters Bay, seulement six pêcheurs avaient commencé à pêcher, et nous avons subi énormément d’intimidation. Lorsque nous sommes arrivés là-bas, je pense que le syndicat de l’association des pêcheurs a fait venir tous ses pêcheurs à St. Peters. Il devait y avoir environ 200 bateaux. J’ai donc pris l’initiative d’aller sur chacun de ces bateaux, et j’ai commencé à parler à tous ces pêcheurs. Ils disaient des choses comme : « Vous n’avez jamais pêché auparavant; vous n’avez jamais pêché le homard. » Je me souvenais d’une conversation avec notre mère, et elle m’a dit que nous pêchions bel et bien le homard, mais que nous nous cachions toujours pour le faire. Il le fallait, parce qu’on se faisait tirer dessus, ou on se faisait battre ou intimider. Beaucoup de gens ne veulent se battre avec personne. Il y a des gens qui se lèvent et se défendent, mais, la plupart du temps, nous n’aimons pas nous battre. Nous l’avons fait toute notre vie, et pourquoi le ferions-nous?

Quoi qu’il en soit, tout a découlé de cela. C’est à ce moment-là que j’ai su que la pêche était un mode de vie. Je le savais déjà quand j’étais jeune, parce que nous pêchions toujours, mes oncles, mon père et mes cousins. Nous pêchions l’anguille... de tout, en fait.

Il y a quelques années, nous avons commencé à pratiquer la subsistance convenable. C’était un de mes gars, en fait… Craig Doucette; je le connais par cœur — mon cousin, pour l’amour de Dieu. À partir d’un certain âge, les gens commencent à vous appeler « oncle ». C’est ainsi qu’il m’appelle maintenant; peut‑être parce que je grisonne. Craig a dit : « Mon oncle, je veux aller à la pêche. » Je lui ai dit : « Très bien. » J’ai donc communiqué avec Justin pour lui dire que nous voulions pratiquer une subsistance convenable. J’ai communiqué avec l’assemblée et nous avons commencé. Treize collectivités y ont participé. Tout le monde l’appelle Potlotek; tout a commencé avec Potlotek, mais nous avions assuré une participation communautaire. Ils ont commencé, et nous nous sommes rencontrés presque chaque semaine — parfois deux fois par semaine — sur Zoom. C’était aussi pendant la pandémie de COVID-19. Nous avons tout fait au téléphone, mais nous avons décidé de commencer à pêcher le 1er octobre et nous avons mis le plan au point. Ils ont choisi deux saisons : le printemps et l’automne. Ils ont pris 70 casiers chacun. J’étais un peu réticent au moment d’établir le nombre de casiers.

Quoi qu’il en soit, il a fallu un certain temps. La première saison, la même chose s’est produite avec le chef Glasgow. Le MPO prenait les casiers et les bateaux. C’était un jeu pour eux, en fait. Au bout du compte, ils ne nous font pas payer, mais la manœuvre a un peu nui à nos pêcheurs, parce que la saison était presque terminée lorsqu’ils ont récupéré leurs bateaux. Et c’est parce qu’il y avait deux agents, peut-être, qui n’aimaient pas nos gars. Les agents du MPO sont habituellement d’anciens pêcheurs, ou ils ont de la famille ou des amis qui pêchent, et ils nous rendent la vie difficile. Je le sais parce que j’ai aussi des amis au sein du MPO.

Je parlais à M. Francis, et je vous parlais tout à l’heure… Désolé, je saute du coq à l’âne, mais je le fais de mémoire. Je fais cela depuis un certain temps. Je ne fais que parler et parler. Vous devrez me dire de me taire un moment donné; je vais bien le prendre.

Quoi qu’il en soit, la situation se poursuit, et je n’ai pas aimé établir le nombre de casiers, mais c’était logique pour nos gars. Ils veulent aller pêcher au printemps et à l’automne… 70 casiers. J’ai dit au plus 100 casiers; 210 casiers par bateau, alors c’est ce qu’ils ont fait. Cela a commencé cette année. L’an dernier, le MPO a saisi le bateau de Craig. Ils ont pris son bateau. Il en était très fier. Il a acheté l’un des plus beaux bateaux. Je sais que vous m’avez écouté la dernière fois que j’étais ici. Nos gars pêchaient avec des bateaux bric-à-brac, si je puis dire. Un homme est revenu; son bateau avait presque coulé. Il venait de gagner la rive. Ses pompes de cale ont flanché, et j’ai dit : « Les gars, vous prenez des risques. » Ils vont loin, parce que St. Peters Bay… Ces gars-là vont pêcher jusqu’à Gabarus et Fourchu; on parle de deux ou trois heures pour se rendre là. La seule raison, c’est que les pêcheurs non autochtones ne voulaient pas que les nôtres pêchent dans d’autres secteurs, comme L’Ardoise et Framboise. Nous avons déjà eu des problèmes. Ils ont coupé nos casiers et saboté nos bateaux et notre équipement. C’est difficile. Et nous ne nous sommes pas battus.

Je vais vous donner un exemple. Il y a quelques années, après l’arrêt Marshall, pour la première fois, en 1999, tout le monde achetait des bateaux, de l’équipement et tout le reste. Nous avons obtenu un permis pour la zone de pêche du homard 27, c’est‑à‑dire Glace Bay. Les gars étaient contents, ils allaient pêcher. Nous nous sommes tous préparés, nous avons amené le bateau sur place, et le lendemain matin, les gars sont allés pour pêcher. Toutes les fenêtres avaient été peintes à l’aérosol, les fils avaient été coupés, et nos pièges avaient été lacérés. Parfois, les casiers avaient même été brûlés. Nous avons alors acheté des casiers en métal, mais ils coupaient les filets. À la fin de la saison, nous avons abandonné. Nous avons plutôt loué le permis, parce qu’ils ne voulaient pas de nous. Mais maintenant, nous avons des gars qui pêchent dans la zone 27, et je sais que leurs quais sont dans un état pitoyable. Tout à coup, ils nous ont dit d’utiliser nos quais. Et j’ai dit à mes amis de faire attention. Ils sont gentils avec nous maintenant, mais je ne peux pas m’en empêcher… Je les ai vus. Je ne sais pas combien de fois ils nous ont traités de la sorte sans s’arrêter.

Ce qui s’est passé à Lennox Island, à l’Île-du-Prince-Édouard… Je parlais au chef hier. J’ai dit : « Vous devez faire attention, chef; vous savez ce qui nous est arrivé. » Il a dit : « Ils nous ont fait la même chose à l’Île-du-Prince-Édouard. » J’ai demandé ce qu’ils faisaient, et il m’a répondu qu’ils ne les laissaient pas utiliser leur quai pendant très longtemps, puis tout d’un coup, ils avaient besoin de réparations, et ils leur offraient d’utiliser le quai. Ils ont fait réparer leur bateau; on parle de coûts de 20 millions de dollars… Et une fois le travail fait, ils ne nous voulaient plus là. J’ai dit : « Vraiment? »

Nous devons faire attention. Nous voulons nos propres quais. Le MPO sait que nous voulons nos propres quais. Les responsables du ministère ont dit qu’ils le feraient, mais je ne sais pas s’ils le feront ou non. Le lien de confiance avec le MPO est brisé. La seule raison pour laquelle je dis une telle chose, c’est qu’il n’y a pas si longtemps, j’ai eu le privilège de rencontrer la ministre et quelques-uns de ses collègues. Il y a deux chefs qui s’occupent des pêches; il y a moi, et il y a le chef Jerry. Je suis le mauvais chef, et il est le bon. Je suis le genre d’homme qui peut parfois devenir assez méchant et je dis les choses comme elles sont. Je ne vais pas me défiler et je ne vais pas passer par quatre chemins; parfois je ne le dis pas de la bonne manière, mais je parle du fond du cœur, parce qu’on voit tellement de choses, et c’est mal.

Quoi qu’il en soit, la ministre était là et elle a commencé à parler. Et quelques réunions avant, j’avais demandé si la ministre comprenait ce que nous disions. Obtient-elle les bons renseignements? Ils ont dit : « Oui, elle les reçoit ». Ils ont donc fait venir la ministre, et elle a commencé à parler, et tout d’un coup, elle a commencé à parler de civelles et de homards et elle avait la mauvaise information. Je lui ai dit qu’elle n’avait pas les bons renseignements et je lui ai demandé où elle avait obtenu l’information. Mais c’est ce que nous voulions. Nous voulions rencontrer la ministre directement, mais elle doit aussi avoir la bonne information. Elle ne voulait pas nous donner l’occasion de réfuter ses arguments parce qu’elle devait partir; elle était pressée. Nous n’y arriverons pas de cette façon. Si nous voulons résoudre un problème, il faut rester là jusqu’à ce qu’on trouve une solution. Je ne sais pas combien de fois je me suis assis avec différents intervenants.

La politique autochtone est tellement différente. À mes yeux, le chef Brian est toujours le chef Brian. Il pourrait vous dire que nous nous occupons des choses au jour le jour. Les histoires qu’on entend parfois sont incroyables. Vous ne savez pas si vous êtes au bord du gouffre. Parfois, les gens veulent se suicider; ce n’est pas drôle, mais c’est le genre de choses qu’on entend. On prend ces situations à cœur.

Les gens veulent pêcher. Toute ma vie, on nous a dit que nous étions paresseux et que nous ne voulions rien faire. Tout à coup, les nôtres veulent faire une grande différence; ils veulent pêcher. Ce n’est qu’un petit pourcentage. On ne deviendra pas tous des pêcheurs, mais si nous avions eu cette chance il y a longtemps, il y aurait plus de pêcheurs chez eux qu’il n’y en a maintenant.

J’ai parlé des pêches aux nouvelles à quelques reprises. Chaque fois qu’une personne passe aux nouvelles, les gens la reconnaissent. Je vais parler du sénateur Kutcher dans un instant. J’étais dans un Tim Hortons à Halifax, à Hammonds Plains. Je faisais la queue et deux hommes baraqués m’ont dit : « Nous vous connaissons, vous êtes le chef. » Je les ai regardées et je leur ai demandé ce que je pouvais faire pour eux. Un des deux m’a dit : « Vous n’allez pas pêcher. » Ils voulaient se battre avec moi dans la file d’attente, mais heureusement, le gestionnaire est intervenu. J’ai dû attendre leur départ à l’intérieur, parce que je me serais probablement fait battre. C’était des colosses. Je m’en moquais; j’étais furieux. Je n’allais pas reculer et je ne l’ai pas fait.

C’est le genre de choses qui nous arrivent. Tout ce que nous voulons, c’est pêcher, et ce n’est pas tout le monde qui va pêcher. Vous savez, il n’y a qu’un petit pourcentage des nôtres qui vont à l’eau. Nous voulons pêcher; nous sommes prêts. Le MPO nous a demandé de présenter un plan de gestion, et nous l’avons fait. Il y avait même les 13 communautés concernées, plus l’institut des ressources naturelles Unama’ki chez nous. Shelley Denny est une biologiste marine. Elle a fait sa maîtrise; elle est docteure, en fait. Vous ne pouvez pas trouver mieux qu’elle, et le gouvernement l’utilise gratuitement; ils l’utilisent. Tout à coup, elle nous a aidés à élaborer ce plan, mais ce n’était pas suffisant pour le MPO… Encore une fois, ils l’ont utilisée. Ils sont hypocrites. Ils l’utilisent. Je ne comprends tout simplement pas. Mais ce n’est pas suffisant; c’est la même chose qu’avec le chef Glasgow.

La vice-présidente : Je pourrais vous écouter toute la journée; certaines des choses que vous avez vécues sont fascinantes, mais nous avons une pause à 11 heures. Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, puis-je donner la parole aux sénateurs? Nous pourrions vous écouter toute la journée, parce que vous avez tellement de choses à raconter, mais je veux m’assurer que les sénateurs vous donnent l’occasion précieuse de répondre à leurs questions.

Le sénateur Francis : Le MPO continue de laisser entendre que les limites saisonnières et d’autres restrictions à l’exercice des droits sont nécessaires à des fins de conservation. À votre avis, est-ce une préoccupation valable? Les pêches fondées sur les droits sont-elles les pêches privilégiées qui représentent une menace du point de vue de la conservation?

M. Marshall : Non, je pense que ce qui s’est passé, c’est que le MPO ne veut pas imposer de limites aux non-Autochtones. C’est la solution facile. Tout ce que le ministère a à faire, c’est réduire le nombre de casiers. Nous ne cherchons pas à gagner 1 million de dollars, mais certains d’entre eux gagnent de tels montants. Ils gagnent beaucoup plus que 1 million de dollars. La réduction des casiers est la seule façon d’y arriver, mais ils ne veulent pas le faire. Cette solution ne fait pas bonne figure pour eux. C’est un problème tellement facile à régler.

Ce que je veux dire par réduction des casiers, c’est que pour chaque pêcheur qui a droit à 375 ou 250 casiers, enlevez-lui-en 50 casiers. Ces gars-là gagnent plus de 1 million de dollars, en tout cas certains d’entre eux, et par saison — par personne —, et ils nous disent de pratiquer une pêche de subsistance convenable. Nos pêcheurs sont descendus à 70 casiers au printemps et à l’automne, mais maintenant ils ne veulent plus que nous pêchions à l’automne. Ils ont demandé : « Ne pourrions-nous pas vous donner 140 casiers, dans ce cas-là? » C’est ce que je pense.

L’objectif, c’était de pêcher, et c’est ce que nous avons fait. Mais nous éprouvons encore des difficultés. Nous voulons toujours y aller, mais ils prennent nos casiers, nos bateaux… Quoi qu’ils fassent, ils ne font que nous faire mal paraître. Nous leur avons offert notre aide, et ils ont dit que les politiques devaient aussi changer.

Le sénateur Francis : Merci. À votre connaissance, quelles mesures la ministre ou son ministère ont-ils prises pour respecter et intégrer véritablement les lois, les principes et les connaissances autochtones dans le processus décisionnel en matière de pêches?

M. Marshall : Ils ont fait leur plan, mais la seule chose qui ne va pas, c’est qu’ils doivent cesser de se réunir à huis clos. Nous devrions être là avec eux lorsqu’ils parlent de nos plans. Il est impossible de faire un plan quand on n’est pas dans la même pièce. Pourquoi se réunir à huis clos? Pourquoi ne pas nous intégrer dans la discussion? Qu’est-ce qu’ils aiment? Au bout du compte, voilà! Nous devons obtenir leur bénédiction, mais nous le savions déjà. C’est pourquoi nous avions Shelley Denny. Elle est biologiste. Nous savons que les stocks de homards ne sont pas touchés, et il n’y avait pas beaucoup de pêcheurs.

Le sénateur Francis : Merci, chef.

La vice-présidente : Monsieur Martin, vous avez levé la main. Aimeriez-vous ajouter quelque chose à la conversation?

Justin Martin, coordonnateur de la pêche mi’kmaq, Bureau de négociation Kwilmu’kw Maw-klusuaqn : Je suis heureux d’avoir l’occasion de m’exprimer. J’aimerais situer les propos du chef Marshall dans leur contexte. Depuis l’arrêt Marshall, les progrès réalisés en matière de reconnaissance des droits issus de traités ont été très limités. Nous nous retrouvons avec un mandat ministériel restreint, des mesures d’application ciblées par le MPO, de la violence culturelle et coloniale et des violations des droits de la personne par le MPO, mais aussi un état d’esprit colonisateur qui continue d’influer sur la réconciliation et de favoriser les tensions raciales et la violence physique et culturelle envers nos pêcheurs. Nos pêcheurs, hommes et femmes, ont été pris pour cibles, ont fait l’objet de profilage racial et ont été criminalisés, et ce, même lorsqu’ils pêchaient conformément à l’autorisation du MPO.

J’aimerais vous faire part de deux incidents récents précis qui sont arrivés à nos membres. C’est lié à une situation dont le chef Wilbert a parlé plus tôt au sujet de la saisie dans la Première Nation de Potlotek qui a été effectuée l’automne dernier en vertu d’une mesure d’application de la loi ciblée. Les agents ont procédé à une arrestation publique et menotté les pêcheurs sur l’eau; ils en ont fait un événement public. Une telle démarche donne l’impression que nos pêcheurs avaient fait quelque chose de mal, mais c’est faux. Les actions des agents des pêches encouragent la haine raciale et accroissent la probabilité de violence physique et culturelle. Un tel harcèlement est motivé par la race et témoigne clairement d’une culture raciste dans les services du MPO responsables de la conservation et de la protection, C et P.

Le deuxième incident s’est produit ce printemps. Il s’agit d’une saisie dans un aéroport. Un agent des pêches en position d’autorité de C et P qui a assisté à des réunions avec l’assemblée et nos organisations mi’kmaqs sur le processus d’élaboration d’ententes en vue de la mise en œuvre de nos plans de pêche savait que les collectivités de Kespukwitk mettaient en œuvre un plan de gestion de la civelle axé sur la conservation et la protection ce printemps et qu’elles avaient obtenu une autorisation appropriée du MPO. Le 5 octobre 2023, ce même agent des pêches a saisi 25 kilogrammes de civelles autorisées par le MPO capturées par des pêcheurs mi’kmaqs. La vente de ces civelles aurait rapporté plus de 145 000 $. L’incident fait toujours l’objet d’une enquête, et les civelles et les revenus connexes ont été saisis le temps de l’enquête et à la discrétion de l’agent; 31 pêcheurs mi’kmaqs — 6 femmes et 25 hommes — ont subi des difficultés indues en raison du pouvoir discrétionnaire exercé ou non exercé par l’agent en question.

Je ne veux pas trop entrer dans les détails, mais j’aimerais parler des violations des droits de la personne. C et P ont traité les pêcheurs mi’kmaqs différemment des pêcheurs non autochtones. Il s’agit de violations de l’article 5 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, et le fait que le public cible les pêcheurs mi’kmaqs continue d’envoyer le message à la société canadienne selon lequel les pêcheurs mi’kmaqs sont des criminels. Cette situation favorise une tension accrue et un manque de confiance, ce que nous avons tous vu trop souvent et qui a créé de la haine, de la violence et des conflits liés à la race. Cette conduite contrevient à l’article 12 de la Loi sur les droits de la personne.

Ce sont tous des exemples clairs de la culture en matière d’application de la loi au sein de C et P qui vise à poursuivre la colonisation de notre peuple, à le victimiser et à lui nuire, quelles que soient les tentatives de réconciliation faites par d’autres secteurs, y compris au sein même du MPO.

Nous prions le Sénat de demander à la ministre des Pêches et des Océans d’évaluer la Direction de la conservation et de la protection du ministère et d’examiner les comportements et les décisions prises relativement aux Autochtones. Les Mi’kmaqs ont suggéré d’élaborer des pratiques de conservation et d’application de la loi axées sur la collaboration en matière de conservation avec des gestionnaires autochtones et de mettre en pratique activement des divisions relatives à l’application de la loi, en particulier avec nos pêcheurs mi’kmaqs. Nos gens pêchent pour améliorer leur vie et celle de leur famille, et même les tribunaux ont dit qu’ils avaient parfaitement le droit de le faire. Il est temps que le Canada fasse mieux et tienne le MPO responsable de ses actes. Merci.

La vice-présidente : Merci beaucoup, monsieur Martin.

Le sénateur Kutcher : Merci, chef, d’être ici avec nous. Dans le cadre d’une conversation que nous avons eue dans votre collectivité, vous avez fait part de certaines des expériences de racisme que vous avez vécues personnellement, et je me demande si vous pourriez en faire part au comité parce qu’il est important que nous fassions état du racisme qui persiste dans ces communautés.

M. Marshall : Je pourrais continuer, mais une chose qui me vient à l’esprit est l’une de mes nièces, en fait, elle fait partie des pêcheurs. On l’a traitée de « squaw » et de tous les noms qui existent encore aujourd’hui, elle a fait l’objet de harcèlement et de discrimination raciale. Ce n’est pas tout le monde qui est comme ça, mais il y en a beaucoup, et il faut que ces personnes arrêtent. L’éducation est la meilleure solution. Lorsque nous avons commencé la pêche de subsistance il y a longtemps, nos employés affichaient nos droits issus de traités partout pour que les gens puissent les lire. Beaucoup de personnes n’étaient pas au courant. Même quand j’étais jeune, je me souviens, comme Shelley Denny, que je ne connaissais pas grand-chose aux traités jusqu’à ce que je prenne un peu d’âge. Surtout en politique, vous avez appris à connaître vos traités. L’éducation est la clé; il faut sensibiliser les petits enfants dans les écoles publiques. En Nouvelle-Écosse, nous avons commencé à enseigner les traités dans le système d’éducation. Jaime Battiste, qui est maintenant député, a été l’un des premiers à fournir un enseignement sur les traités dans la province. C’est par l’intermédiaire de notre Mi’kmaw Kina’matnewey, ou MK que nous avons notre propre système d’éducation.

En ce qui concerne le harcèlement et le profilage racial constants : où cela s’arrête-t-il? Je ne pense pas que ce problème va disparaître. Toutefois, ce n’est que mon opinion parce que j’ai eu trop de mauvaises expériences. Dès qu’on a la peau brune, tout d’un coup, on est pêcheur. Je ne pêche pas. Je pêche pour le plaisir; je suis le genre de gars qui ne peut pas rester sur place.

Le sénateur Kutcher : Je m’adresse à vous et à M. Martin; je vais poser mêmes questions que j’ai soulevées dans la première partie. Pour mettre les choses en contexte, ces questions portent directement sur les réponses que nous avons obtenues du MPO au sujet des recommandations que nous avions formulées précédemment, parce que nous nous intéressions beaucoup à la question de l’éducation. Nous nous sommes intéressés à ce que le MPO essayait de faire pour lutter contre le racisme et à ce qu’il faisait pour sensibiliser les gens aux pêches fondées sur les droits. Voilà donc le contexte de mes questions; j’essaie de comprendre la réponse du MPO.

La première concerne les pêches fondées sur les droits. Monsieur Martin, vous pouvez intervenir également. Êtes-vous au courant de programmes d’éducation que le MPO a créés et offerts aux collectivités locales? Vous a-t-on déjà demandé de créer conjointement avec le MPO des programmes d’éducation sur les pêches fondées sur les droits? Avez-vous constaté un changement dans la compréhension de vos collectivités locales en ce qui concerne les pêches fondées sur les droits au cours des cinq ou dix dernières années?

M. Marshall : Je vais parler de ce dont je viens de parler : l’éducation dans les écoles. Nous avons commencé à sensibiliser les gens lorsque nous avons commencé la pêche de subsistance. Nous avons essayé par nous-mêmes de renseigner les pêcheurs sur les traités, sur l’année où ils avaient été conclus et sur ce à quoi ils servent. Mais, bien sûr, ils ont dit qu’ils n’étaient pas bons; ils ont été signés il y a longtemps. Quelqu’un a essayé de me parler à cœur ouvert et m’a dit que c’était il n’y a pas si longtemps. Il a dit que ses enfants apprennent des choses sur les droits issus de traités à l’école. J’ai dit que je pensais que c’était une bonne chose. Il a dit qu’il ne pensait pas que c’était correct. Je l’ai presque frappé. Mais à la fin, il a dit que c’était toujours ainsi lorsque nous étions pêcheurs. Il a dit qu’ils n’en avaient jamais eu l’occasion. Ils devaient se cacher pour aller pêcher quand ils étaient enfants parce qu’ils n’avaient pas le droit de le faire. Nous ne connaissions pas l’étendue de nos droits issus de traités. Nous sensibilisons les nôtres aussi, mais nous sensibilisons encore plus les non-Autochtones, parce que nous avons tout à fait le droit d’aller à la pêche. Mais M. Martin peut vous en dire plus au sujet du MPO.

M. Martin : Je comprends. D’après ce que j’ai compris — et j’occupe ce poste depuis cinq ans —, le MPO a fait un certain travail interne de sensibilisation sur les traités au niveau des gestionnaires régionaux. Les préoccupations que nous avons soulevées concernent la conservation et la protection, c’est-à-dire les agents sur le terrain et le recours, ou l’absence de recours, au pouvoir discrétionnaire lorsqu’il s’agit de prendre des décisions qui touchent les activités de pêche des nôtres.

Nous avons été très clairs. Je sais que je suis assis à la table depuis cinq ans. Nous avons été disposés à créer et à élaborer conjointement des processus et des séances d’information et de sensibilisation aux questions autochtones spécialement pour les intervenants de C et P. À ce jour, nous n’avons reçu aucune réponse de C et P sur l’élaboration ou la mise en œuvre d’un programme autochtone ou sur la mise en œuvre d’une sorte de cours pédagogique. Ce n’était pas une initiative de sensibilisation pour le MPO. Nous étions prêts à informer et à sensibiliser les gens, mais la ministre n’a pas donné de directive ou de mandat en vue de l’élaboration d’un tel processus.

Le sénateur Kutcher : Merci.

La prochaine série de questions porte sur le racisme enraciné. Vous nous avez parlé avec éloquence de la fréquence du racisme. Êtes-vous au courant d’activités que le MPO a entreprises pour réduire efficacement le racisme au sein du ministère en tant que tel?

M. Marshall : Nous les rencontrons presque toutes les semaines. On ne me l’a jamais dit, mais il y a quelque chose de positif dans tout ça : quelques personnes du MPO sont de notre côté. Je le sais parce que j’avais l’habitude de les rencontrer. Ils m’appelaient avant la réunion. Je vais taire leurs noms — je ne les nommerai pas —, mais cela m’a été utile parce qu’ils me fournissaient les questions. Je pense qu’ils ont découvert le jeu d’un de leurs membres. Je ne le vois plus là. C’est une question de relation et de confiance, mais les personnes haut placées continuent d’écouter les directives. Ceux qui sont moins bien placés sont en fait de bons gars. Ils sont de notre côté. Un homme m’a dit : « Continuez. Vous êtes sur la bonne voie. » J’ai dit : « Qu’est-ce que je fais? » Il a dit : « Vous dites les choses telles qu’elles sont. » Il le faut. C’est ainsi que les pêcheurs parlent à leurs propres députés et tout le reste. Je déteste utiliser ces mots, mais je les utilise. Parfois, ils sont efficaces; parfois, ils ne le sont pas. Il faut choisir. J’ai oublié votre question. Je n’ai encore rien vu.

Le sénateur Kutcher : Avant que M. Martin ne réponde, je crois comprendre — et je ne veux pas vous faire dire ce que vous n’avez pas dit, alors corrigez-moi si je me trompe — que le MPO ne s’est pas adressé à vous pour vous dire : « Nous aimerions collaborer à la création conjointe d’un programme qui traite du racisme enraciné. »

M. Marshall : Non, ils ne l’ont pas fait — vous avez ma parole —, du moins, pas dans ces mots. Ils disent : « Je vais travailler avec vous », mais ils travaillent derrière des portes closes. Cela ne fonctionnera pas de cette façon. Nous devons nous asseoir ensemble. Ils doivent cesser d’envoyer leurs subalternes. Nous voulons parler aux dirigeants. Vous perdez votre temps.

M. Martin : Ce n’est que récemment que Conservation et Protection a accepté de consulter les peuples autochtones au sujet de leurs actions et de la façon dont ils gèrent le racisme et l’application de la loi. Ces agents en position d’autorité sont établis dans l’industrie commerciale depuis des décennies. Ils nous ont toujours vus ou considérés comme des criminels qui venaient ici pour essayer d’exercer nos droits. Ils entretiennent des relations avec les représentants de l’industrie commerciale et les pêcheurs. Leurs décisions et leurs pouvoirs discrétionnaires sont fortement influencés par leurs relations au sein de ces groupes. Il y a un petit nombre d’Autochtones qui sont représentés au sein de C et P sur le terrain et dans ces postes décisionnels d’autorité, alors j’aimerais aborder cette question.

Le sénateur Kutcher : Merci beaucoup.

La sénatrice Ataullahjan : Merci, chef Marshall. J’ai bien aimé vous écouter, et je vous remercie de votre honnêteté. Nous en avons besoin. J’aime le fait que vous ne mâchiez pas vos mots. En tant que personne racisée... nous apprenons à être brutalement honnêtes.

Alors, la ministre est venue, elle a parlé, elle avait la mauvaise information et n’a pas eu le temps de vous écouter, ce qui était très irrespectueux. Pensez-vous qu’elle n’était là que pour cocher une case et dire : « J’y suis allée, c’est fait »?

M. Marshall : C’est l’impression que j’ai eue. En réalité, elle n’avait pas de temps à nous accorder. Cela n’a duré que quelques minutes, puis elle est partie. Nous avons été pris au dépourvu. Il aurait été bien d’avoir les questions avant la rencontre. Elle n’avait pas tous les bons renseignements. Elle parlait des civelles et de toutes ces choses. La pêche à la civelle est le moyen le moins coûteux de faire de l’argent pour les gens de notre peuple. Tout ce qu’il faut, c’est une paire de bottes en caoutchouc et un filet. Que vont-ils faire d’autre? Ils ont été ruinés toute leur vie. Ils n’ont pas d’argent. Ce sont nos femmes. Elles vont pêcher la nuit, le moment le plus dangereux où quelque chose pourrait se produire. Elles se font harceler, mais c’est acceptable pour les pêcheurs commerciaux. On peut lire à leur sujet dans les journaux, où il est question de répercussions sur leur mode de vie. Quoi? Attendez un instant. Voici une dame qui veut y aller, et c’est ce qu’elle faisait. Je savais pertinemment qu’elle voulait acheter des choses pour la cérémonie de ses enfants et tout le reste. Pendant que je suis là, je me dis que je devrais aller voir le premier ministre, puis je me rends chez Home Depot pour aller chercher des sacs à ordures et rapporter de l’argent. Mais ce n’est pas ce que veut notre peuple. Nous voulons aller à la pêche. Nous voulons apporter notre propre contribution. Nous ne voulons pas de cadeaux.

La sénatrice Ataullahjan : Nous entendons constamment parler de racisme. Le sénateur Kutcher a en quelque sorte posé ma question. Je griffonnais, sénateur Kutcher, et j’avais écrit « racisme inhérent ». C’est l’impression que nous avons toujours. Nous entendons constamment parler du racisme profondément enraciné au sein du MPO. Cette question a-t-elle déjà été soulevée auprès du ministère? De plus, M. Martin a parlé du fait que les pêcheurs sont traités différemment. Lorsqu’ils se font arrêter, ces images sont diffusées à la télévision. Les gens croient simplement les images qu’ils voient. Avez-vous l’impression que le MPO contrôle le discours?

M. Marshall : Certaines parties du MPO sont différentes. Il y a le C, le P et le MPO. C’est à leurs agents de décider comment ils veulent porter des accusations, mais ils devraient être mieux éduqués en matière de profilage racial. Ce qu’ils font n’est pas bien. Vous avez raison, et M. Martin aussi. Nous le savions déjà. Ils traitent nos gens différemment. Qui que ce soit d’autre qui se serait fait saisir son bateau l’aurait récupéré il y a longtemps. Cette personne aurait reçu une amende et se serait fait dire qu’elle doit respecter des conditions. Mais non, nous sommes maintenant à la mi-saison. Il pourrait récupérer son bateau — je ne sais pas s’il va le récupérer ou non —, mais il est trop tard. C’est pourquoi nous faisions la pêche à l’automne et au printemps. Nous n’avions que 70 casiers pour vivre à moitié décemment parce que nos gars ne voulaient pas faire face à tout le racisme. Mais nous y faisions tout de même face à l’automne. On se rend là-bas, mais, quand on revient, il n’y a pas de casiers. Ils sont coupés, ou notre bateau est saboté ou a coulé, ou quelqu’un a percé des trous dedans pour compromettre nos gars. Il y a aussi un danger. Des gens perçaient des trous dans les bateaux, mais, quand nous partions, nous ne savions pas que notre bateau coulait. Alors, nous nous précipitions pour revenir sur la rive parce que les pompes de cale ne fonctionnaient pas. Nos gars avaient des bateaux qui n’étaient pas en bon état. Certains prennent leur vie en main, mais ils ne peuvent pas s’en empêcher. C’est tout ce dont ils ont les moyens.

La sénatrice Ataullahjan : Pourrions-nous demander à M. Martin de formuler un commentaire?

M. Martin : Je vous remercie.

Le MPO a toujours démontré qu’il est incapable de créer, de maintenir ou d’élaborer un discours d’appui à la mise en œuvre fondée sur les droits. Je vais vous donner un exemple. Récemment, nous avons conclu une entente avec le MPO pour mettre en œuvre une pêche communautaire dans un district où quatre communautés ont élaboré et mis en œuvre un plan de gestion axé sur la conservation. Ce plan de gestion devait être utilisé pendant la saison de pêche du MPO. Avant le début de la saison, nous avons été incapables d’acquérir les places à quai qui auraient permis à nos pêcheurs d’exercer leurs activités au titre de cette autorisation du MPO. C’est parce que le MPO n’a pas été en mesure d’expliquer aux autorités de la gestion des prises qu’il s’agit d’une pêche autorisée. Les administrations portuaires ont rejeté les demandes des pêcheurs d’utiliser des places à quai dans cette région parce qu’elles ne comprenaient pas qu’il s’agissait d’une activité de pêche appuyée par le MPO.

Il revient à nos pêcheurs et à nos équipes d’éduquer et d’informer les représentants de l’industrie au sujet des plans de gestion communautaire axés sur la conservation que nous mettons en œuvre et des ententes que nous avons conclues avec le MPO.

Je ne veux pas perdre de vue la question. Il est clair que le MPO ne peut pas communiquer directement avec les titulaires autorisés de ses permis et qu’il communique uniquement avec les représentants de secteur. La lacune se situe entre le MPO et les pêcheurs commerciaux qui nuisent directement à nos activités. Il y a une énorme lacune au chapitre des communications entre la direction du MPO, les représentants de l’industrie de la conservation et de la protection et les titulaires de permis eux‑mêmes, et c’est là que réside le problème, de mon point de vue.

La vice-présidente : Merci beaucoup.

La sénatrice Cordy : Chef Marshall et monsieur Martin, je vous remercie infiniment de votre présence aujourd’hui. Votre témoignage, de même que celui qui a été présenté plus tôt aujourd’hui, est très puissant. Il vient du cœur, et je vous en suis très reconnaissante.

En tant qu’ancienne enseignante, j’aimerais revenir à l’idée de l’éducation et du fait d’éduquer les non-Autochtones — j’allais dire en Nouvelle-Écosse, mais au Canada — au sujet des droits et de l’histoire des peuples autochtones.

Notre groupe, le Groupe progressiste du Sénat, a beaucoup de chance parce que le sénateur Francis nous renseigne toujours sur l’histoire autochtone. Hier, il a organisé une cérémonie de la couverture pour nos sénateurs et notre personnel. J’avais beaucoup lu sur les peuples autochtones et l’histoire, mais le fait de participer à une cérémonie de la couverture a été une expérience incroyable, et c’était très émouvant et extrêmement puissant pour ce qui est d’amener notre groupe à comprendre pourquoi les choses sont comme elles sont. Je tiens à vous remercier publiquement, mais je pense qu’il est important que nous le fassions tout le temps.

Selon moi, vous avez tout à fait raison au sujet de l’éducation et de la nécessité de commencer par les jeunes. Il faut parfois beaucoup plus de temps que nous le souhaiterions, et j’ai lu que, dans certains cas, il a fallu plusieurs générations, ce qui, à mon avis, semble vraiment long, mais, au moins, nous avons un point de départ. Vous avez dit qu’il y a maintenant de l’éducation dans le système scolaire auprès des jeunes.

Les peuples autochtones ont-ils été consultés quant à ce que devrait être le format du programme éducatif ou des programmes?

M. Marshall : Oui. Nous l’avons amorcé avec le député Jaime Battiste; il a participé.

La sénatrice Cordy : Oh, c’est vrai?

M. Marshall : Plus tard, il est devenu député, mais il a été l’un des premiers éducateurs en matière de traités en Nouvelle-Écosse, et le programme est maintenant dans les écoles.

Au fil du temps, il faut le remanier constamment. J’espère que les adultes apprendront aussi d’une façon ou d’une autre. Ils le devraient. Je sais qu’ils vont apprendre de leurs enfants, mais ils devraient en apprendre davantage. C’est en ligne, et notre langue est en ligne. Vous pouvez aller en ligne dès maintenant et apprendre le mi’kmaq. C’est l’élément clé, l’éducation, parce que même notre propre peuple ne connaissait pas l’étendue de nos traités et de ses droits.

La sénatrice Cordy : Je m’interroge également sur les difficultés liées à l’obtention d’un permis de pêche au homard pour les peuples autochtones. Des témoins nous ont dit que ces permis étaient très, très difficiles à obtenir. Ils ont parlé du programme de rachat. Il n’y a tout simplement pas assez de permis disponibles, et les permis qui le deviennent coûtent tellement cher que de nombreux Autochtones n’ont pas les moyens de les acheter, parce qu’ils sont tout simplement hors de portée.

Pourriez-vous nous parler des défis?

M. Marshall : On nous a en fait blâmés pour cela, pour l’augmentation du coût de ces permis. Parce que le gouvernement va payer je ne sais quoi, et j’entends ces conversations, parce que les gens nous blâment, et certains des pêcheurs, comme je l’ai dit, je l’entends dire tout le temps. Certains pêcheurs se disputent : « C’est à cause de vous, le prix, et nous n’avons pas les moyens d’acheter des permis de pêche au homard. » Et j’ai dit : « Vous? » C’est cette bataille constante, comme les injures, et soudainement, c’est notre faute. Je leur dis simplement : « Nous n’avons même pas besoin d’acheter un permis. Au lieu de cela, nous allons à la pêche. » J’ai dit : « C’était avant le début de la subsistance convenable, et tout à coup, c’est une subsistance convenable. »

Le gouvernement a essayé de procéder à un rachat, mais, comme vous l’avez dit, les prix sont tellement ridicules à l’heure actuelle que le citoyen moyen n’en a pas les moyens, et le gouvernement ne paiera qu’un certain montant, et je ne peux pas lui en vouloir.

C’est pourquoi j’ai dit qu’il était important que l’on commence à récupérer les casiers. C’est la seule façon dont cela va fonctionner, et je sais que les gens ne veulent absolument pas y toucher, parce que cela va les faire mal paraître, mais que pouvons-nous faire d’autre? À moins que vous ne disiez simplement à nos gens « Allez pêcher! »

Je sais que certaines personnes restent sur la touche. Elles ne veulent pas encore aller à la pêche. Elles ont peur, et je ne le leur reproche pas. J’ai vu ce qui est arrivé, par exemple, des bateaux qui ont été renversés, d’autres qui ont été incendiés, des casiers qui ont été coupés, d’autres qui ont été brûlés, des femmes qui ont été agressées et qu’on appelle des squaws, et toutes ces choses raciales, simplement parce qu’elles voulaient aller à la pêche. Elles veulent gagner un revenu à peu près décent pour acheter des couches ou autre chose. Elles veulent faire quelque chose. Elles veulent construire leur propre maison, parce que, dans ma collectivité en ce moment — et dans toutes celles des Premières Nations du Canada, je dirais —, le manque de logements est tel… tout le monde est en train d’y retourner. Les Autochtones veulent tous retourner dans les réserves.

Mais nous ne devrions pas avoir à vivre dans des réserves. C’est notre pays. On entend toujours les gens dire « territoire non cédé », mais est-ce vraiment ce qu’ils veulent dire? Qu’est-ce que cela veut dire?

La sénatrice Cordy : La cheffe Glasgow a parlé de ce qui s’est passé dans la région de Digby, où des bateaux ont été incendiés et ce genre de choses, ce qui n’aide pas.

M. Marshall : Non, nous l’avons vécu. C’était en 2004 ou en 2006, je ne me rappelle plus. Nos bateaux ont été renversés, et les pêcheurs ont incendié leurs bateaux, et ils ont jeté nos voitures à l’eau, dans le canal et tout et tout.

Il y a un jeune homme… il est non autochtone, en fait, mais il a des enfants dans la communauté, et on peut dire qu’il y vit. On appelle cela les Journées des pirates, à St. Peter’s, et il y avait quelque chose qui se passait. Quoi qu’il en soit, ils ont battu cet homme si fort qu’ils l’ont presque tué, parce qu’il est ami avec nous, et c’est là que tout a commencé. Ils ont failli le tuer. Il leur a fallu un certain temps pour porter des accusations. Ils ont fini par inculper deux pêcheurs.

La sénatrice Cordy : Dans votre conclusion, vous avez parlé de la pêche à la civelle et du fait que des femmes qui souhaitaient pêcher des anguilles ont fait l’objet d’accusations. Est-ce bien ce qui s’est passé?

M. Marshall : Je ne sais pas si elles ont fait l’objet d’accusations, mais elles se sont fait harceler, et tout ce qu’elles voulaient, c’était gagner leur vie. C’est la façon la plus facile et la moins coûteuse d’aller pêcher. Tout ce dont on a besoin, ce sont des bottes de caoutchouc et un filet. C’est tout ce qu’il faut.

La sénatrice Cordy : C’est très différent des litiges commerciaux liés à la pêche à l’anguille.

M. Marshall : Exactement. J’ignorais moi-même que ces petites anguilles existaient. Je sais qu’au Cap-Breton, nous ne les pêchions pas vraiment. Nous les pêchions au harpon pendant la nuit. C’est comme cela que nous pêchions l’anguille chez nous.

Je sais que la civelle, c’est très payant. Je ne peux pas reprocher à nos gens d’aller à la pêche. Ils exercent leurs droits. Les pêcheurs commerciaux le font depuis de très nombreuses années, et tout d’un coup, ce n’est plus un secret : Toc, toc, on est là. Je ne leur en veux pas d’aller pêcher.

La sénatrice Cordy : Merci beaucoup.

M. Martin : J’aimerais revenir sur les difficultés que peut poser l’obtention de permis de pêche au homard. Il s’agit d’un processus contrôlé par l’industrie, de sorte que le prix des permis de pêche au homard que le MPO peut acquérir est contrôlé par l’industrie, et l’absence d’outils obligatoires et de souplesse pour établir et développer nos pêches indépendamment des permis de pêche commerciale est un problème auquel nous nous heurtons constamment avec la ministre.

Pour être tout à fait honnête, d’après mon expérience jusqu’à présent, le programme de rachat est un échec retentissant. L’industrie continue de s’efforcer de fournir des permis, et le ministère demeure incapable de les acheter en raison de la portée limitée de son mandat.

Je vais vous donner un exemple. Le golfe du Saint-Laurent est une région gérée par le MPO. Il comprend une demi-douzaine ou une douzaine de zones de pêche au homard. Il y a eu une mobilisation, et de nombreux permis — plus de 30 — ont été recueillis puis offerts au MPO pour qu’il les rachète afin de favoriser la participation des Autochtones et d’accroître les possibilités pour nos pêcheurs. Le MPO n’a acheté que sept de ces permis. Il n’a pas pu acquérir les autres en raison de la portée très limitée de sa politique en matière de rachat. J’aimerais donc aborder cette question.

Deuxièmement, j’aimerais appuyer les propos du chef Wilbert au sujet des femmes dans le secteur de la pêche à la civelle. Nous avons constaté une augmentation de plus de 10 % du taux de participation des femmes autochtones aux activités autorisées de pêche à la civelle ce printemps. Cela est attribuable au fait qu’il y a peu d’obstacles à l’entrée. Il n’est pas nécessaire d’être scolarisé, de posséder de l’expérience ou d’avoir de grandes capacités pour aller pêcher au bord de la rive. Nous l’avons constaté. Nous nous attendons à ce que les femmes autochtones continuent de se manifester, d’exercer leurs droits et de se donner à elles-mêmes et à leur famille les moyens de subvenir à leurs besoins.

Nous avons six femmes, des pêcheuses autochtones, qui ont été touchées par la récente saisie du MPO. Six femmes ont été directement touchées par la saisie continue de nos civelles, dont la pêche a été autorisée par le MPO.

Merci.

La sénatrice Cordy : Merci.

Le sénateur Francis : Ma question s’adresse à M. Martin et au chef Marshall. Je l’ai posée à la cheffe Glasgow plus tôt.

À votre avis, est-ce qu’un cadre juridique et réglementaire distinct devrait régir les pêches fondées sur les droits en vue d’une mise en œuvre complète?

M. Marshall : Depuis des années, nous disons au MPO que nous voulons un arrangement de cogestion avec lui. Ses politiques ne le permettent pas. Nous avons les nôtres. À brûle-pourpoint, je ne m’en souviens même pas. Nous avons nos propres gens chez nous. Nous avons dit : « Prenez nos gars et partez en bateau » Ils ont dit : « Nous ne pouvons pas le faire parce que nos politiques ne nous le permettent pas. » Nous voulons le faire. Il s’agit de quelqu’un de haut placé.

Ces autres types, nous leur parlons. Ils ne peuvent rien faire. Ils ont les mains liées. Peu importe qui leur parle, nous aimerions être dans la même salle que la ministre et certains de ses spécialistes qui pourraient prendre des décisions à ce sujet. Nous devons régler cela. Cela ne fera que s’amplifier. Nous n’en sommes qu’aux premières années.

Beaucoup de gens vont finir par aller pêcher. Nos communautés sont en croissance. Les gens reviennent. Il y a actuellement un afflux de personnes qui reviennent vivre dans ma communauté. Je n’arrive même pas à suivre le rythme. Il y a parfois 14 personnes qui vivent dans une même maison, pour l’amour de Dieu, ou 11 personnes vivant dans une même maison. Nous essayons. Chaque jour, nous fournissons de l’hébergement d’urgence. Nous plaçons les gens dans des refuges. Ou dans des hôtels. On peut se permettre de faire cela jusqu’à un certain point seulement. On ne peut pas continuer de recourir à des solutions de fortune.

Cela a beaucoup à voir avec la pêche. Les gens veulent pêcher. Ils veulent gagner de l’argent. Nous essayons d’éduquer les gens. Nous faisons tout ce que nous pouvons.

Le sénateur Francis : En ce qui concerne la pêche, êtes-vous capables de vendre votre poisson? Les gens veulent-ils acheter du poisson provenant de la pêche de subsistance convenable?

M. Marshall : C’est un autre aspect. Beaucoup de gens ne veulent pas acheter auprès de nous parce que... Nous avons eu une réunion à Dartmouth, puis à Halifax il y a peut-être quelques mois. J’ai oublié leur nom, mais deux ou trois représentants de l’association étaient présents. Un type était assis là. Ils parlaient du fait que la province avait levé l’interdiction de nous procurer un permis pour l’achat de mollusques et de crustacés. Ce type se fondait sur des renseignements qui remontaient à trois, quatre ou cinq ans. Je ne sais plus.

Quoi qu’il en soit, je l’ai interpellé là-dessus. Je lui ai dit : « C’est de la foutaise. » J’avais participé à une rencontre avec le MPO ce matin-là, avant de me rendre à cette réunion. J’ai dû corriger le type. J’ai dit : « Vous avez complètement tort. » Puis : « Je ne sais pas d’où vous tirez vos renseignements. »

La communication, c’est un autre élément. Vous devez mieux communiquer avec nous et avec les associations. Beaucoup d’associations ne savent pas ce qui se passe. Nous voulons être vos amis. Nous sommes plutôt comme cela, en train de dire : « Oh, un instant », car nous avons vécu tellement de choses.

Il y a de bonnes personnes. Certaines me disaient des choses. Certains de leurs propres pêcheurs me disaient des choses. Ils ont tellement peur de certains membres de leur association. Il ne devrait pas en être ainsi.

Ils m’ont dit : « J’aime la façon dont vous gérez vos pêches, et vous n’avez pas peur. » Ces gens-là en particulier ont peur, mais ils ne devraient pas avoir peur. C’est dirigé presque comme une mafia. Il ne devrait pas en être ainsi. Il faudrait que ce soit toute la communauté. Ils ne gèrent pas leurs pêches de cette façon.

La vice-présidente : M. Martin semble avoir quelque chose à dire. Je suis désolé de vous interrompre, mais il nous reste quatre minutes.

M. Martin : Merci. Je m’excuse, chef Wilbert, si je vous ai fait perdre le fil de votre pensée.

En réponse aux observations du sénateur Francis, je dirais que nous nous concentrons actuellement sur la question de la cogestion. Nous devons avoir la possibilité et la capacité de créer et d’établir un consensus dans nos collectivités afin d’élaborer effectivement nos propres lois, nos propres règlements et nos propres politiques à l’appui de la mise en œuvre adéquate de nos droits, et ensuite collaborer avec le MPO en vue de concevoir les outils et les règlements permettant de les mettre effectivement en œuvre dans le cadre d’une approche de cogestion.

À l’heure actuelle, la Loi sur les pêches ne fournit aucun outil à l’appui de notre mise en œuvre des pêches. Il est important que vous compreniez que le renforcement des capacités doit s’effectuer de concert avec les collectivités. Il ne suffit pas de leur envoyer de l’argent. Nous devons renforcer les capacités, éduquer les gens et les Autochtones pour contribuer à l’élaboration de la loi et à l’établissement d’un consensus, puis concevoir véritablement notre propre cadre afin d’aller de l’avant avec le MPO dans le cadre d’une approche de cogestion.

Quant à votre deuxième point, à savoir la vente, le chef Wilbert en a très bien parlé. Pour que nous puissions procéder à une mise en œuvre complète de nos pêches, il nous faut un examen complet de tous les règlements qui ont une incidence sur la chaîne de valeur des activités de pêche et les produits que nous créons.

À l’heure actuelle, nous nous opposons à la réglementation provinciale qui nous empêche de détenir effectivement des permis d’acheteur pour que nous puissions acheter nos propres produits de nos propres gens et les distribuer ensuite sur le marché. Nos produits se heurtent à un obstacle à l’entrée une fois que nous avons obtenu une autorisation du MPO. Les gens ont encore de la difficulté à les vendre aux acheteurs, qui sont essentiellement des organismes de réglementation du marché; ils contrôlent le marché, le flux et la dynamique des produits. C’est un obstacle. Ils ne veulent pas nécessairement traiter avec nous. En tant que propriétaires d’entreprise, ils n’ont pas à le faire.

Nous avons besoin de nos propres processus, de nos propres capacités d’achat et de notre propre marché. La capacité doit être renforcée depuis la capture jusqu’à l’autre bout de la chaîne de valeur. C’est ce qui manque à l’heure actuelle. Nous nous concentrons sur la pêche, pas sur la vente. C’est à cela que je pense en ce moment lorsqu’il s’agit de notre travail.

La vice-présidente : Merci, monsieur Martin.

Je dois m’excuser auprès du chef Marshall de l’avoir interrompu au moins deux fois au cours de la discussion. Il nous reste trois minutes. Comme votre opinion est très précieuse et que vous êtes réellement au fait de ce qui se passe sur le terrain — ou, dans ce cas-ci, sur l’eau —, j’aimerais vous offrir le temps qu’il nous reste pour vous permettre de formuler d’autres observations que, selon vous, nous devrions entendre.

M. Marshall : Au bout du compte, tout ce que nous voulons, c’est que nos gens aillent pêcher. Nous voulons collaborer avec le MPO, même si la situation semble parfois sombre. Il y a aussi de bonnes personnes. C’est dommage qu’on ne puisse pas demander aux bonnes personnes de parler davantage. Elles ont peur de se faire descendre. Je le sais pertinemment.

Parfois, lorsque nous tenons des réunions, nous avons des gens de notre côté, et je pense qu’il y en a plus que cela, en fait. La ministre doit aussi le savoir. Cela va même au-delà de la ministre. Je sais que le premier ministre doit intervenir lui aussi. Il doit le faire. Il doit dire quoi faire à ses soldats. C’est ce que sont ses ministres, n’est-ce pas?

Parfois, quand on est chef, on veut éviter de passer par-dessus la tête de ses collègues sur tel ou tel point, mais il faut parfois le faire. Parfois, quand quelque chose ne va pas, il faut prendre la parole. Il doit dire quelque chose. Je l’ai rencontré. Il était dans la communauté l’an dernier. Il semble être un homme raisonnable. Il a beaucoup aidé les Premières Nations. La bonne décision ici, c’est d’intervenir et de parler à ses ministres et à tous ceux à qui il doit parler. De toute évidence, ils ne sont pas bien informés.

Enfin, il y a aussi l’éducation. C’est le plus important. Il faut que ce soit dans les écoles. Il faut éduquer les gens. Cela prendra un certain temps. Cela ne se fera pas du jour au lendemain. Mais nous finirons par y arriver. Je ne sais pas quand. J’espère pouvoir le constater de mon vivant. J’espère que nous y arriverons.

Nous voulons accroître la sécurité et la qualité de vie de nos gens.

La vice-présidente : Merci beaucoup aux deux témoins d’avoir pris le temps de venir ici, et de nous avoir renseignés sur ce que nous devons savoir alors que nous poursuivons nos efforts pour que la mise en œuvre des pêches fondées sur les droits soit menée à bonne fin et de la bonne façon. Je vous remercie encore une fois de votre temps.

(La séance est levée.)

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