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SECD - Comité permanent

Sécurité nationale, défense et anciens combattants


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DE LA SÉCURITÉ NATIONALE, DE LA DÉFENSE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le lundi 8 mai 2023

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants se réunit aujourd’hui, à 16 heures (HE), avec vidéoconférence, pour étudier la teneur des éléments contenus dans la section 24 de la partie 4 du projet de loi C-47, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023; et à huis clos, pour étudier un projet d’ordre du jour (travaux futurs).

Le sénateur Tony Dean (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Honorables sénatrices et sénateurs, bienvenue à la réunion d’aujourd’hui du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants. Je suis Tony Dean, sénateur de l’Ontario et président du comité. Je demanderais à mes collègues de se présenter, en commençant par notre vice-président.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Jean-Guy Dagenais, du Québec.

Le sénateur Boisvenu : Pierre-Hugues Boisvenu, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Victor Oh, de l’Ontario.

La sénatrice M. Deacon : Bonjour. Marty Deacon, de l’Ontario.

Le sénateur Cardozo : Andrew Cardozo, de l’Ontario.

La sénatrice Anderson : Margaret Dawn Anderson, des Territoires du Nord-Ouest.

La sénatrice Dasko : Donna Dasko, sénatrice de l’Ontario.

Le sénateur Yussuff : Hassan Yussuff, de l’Ontario.

Le sénateur Boehm : Peter Boehm, de l’Ontario.

Le président : Merci, chers collègues.

Aujourd’hui, nous commençons notre étude sur la teneur des éléments de la section 24 de la partie 4 du projet de loi C-47, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023 et d’autres mesures.

La section 24 modifie la Loi sur les douanes, entre autres choses, de deux façons : premièrement, il serait permis à une personne arrivant au Canada de se présenter à l’Agence des services frontaliers du Canada, ou l’ASFC, par un moyen de télécommunication; deuxièmement, sous réserve des règlements, les exploitants d’aéronefs commerciaux arrivant au Canada seraient obligés de s’assurer que les bagages à bord soient transportés sans délai à la zone de bagages la plus proche.

Pour la première partie de la réunion d’aujourd’hui, nous avons le plaisir d’accueillir les représentants de l’Agence des services frontaliers du Canada : M. Graeme Hamilton, directeur général, Politiques relatives aux voyageurs, au secteur commercial et aux échanges commerciaux, Direction générale de la politique stratégique; M. John Ommanney, vice-président associé, Direction générale des voyageurs; M. Jeff Carr, directeur général, Bureau du dirigeant principal des données, Direction générale de la politique stratégique; et Mme Kelly Belanger, vice-présidente associée et codirigeante principale de l’information, Direction générale de l’information, des sciences et de la technologie.

Merci d’être des nôtres aujourd’hui. Nous vous invitons d’abord à nous présenter votre déclaration préliminaire, puis nous passerons aux questions de nos membres. Je crois savoir que M. Ommanney va nous présenter votre déclaration préliminaire, aujourd’hui.

Monsieur Ommanney, allez-y dès que vous êtes prêt.

[Français]

John Ommanney, vice-président associé, Direction générale des voyageurs, Agence des services frontaliers du Canada : Je suis heureux d’être ici pour discuter des modifications législatives proposées à la Loi sur les douanes. Je suis John Ommanney, et je suis vice-président associé à la Direction générale des voyageurs de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC).

Cet après-midi, je suis accompagné de collègues de divers secteurs de l’ASFC qui ont déjà été présentés. Les modifications dont je parlerai aujourd’hui sont nécessaires pour lever les obstacles actuels à l’avancement de l’initiative de modernisation des voyageurs de l’ASFC annoncée dans le budget de 2020-2021.

La modernisation des services aux voyageurs est une transformation à long terme du traitement des voyageurs qui introduira une série d’outils de traitement en libre-service volontaires qui accéléreront l’expérience de passage à la frontière et qui réduiront les temps d’attente en général.

[Traduction]

Comme de nombreuses agences frontalières à travers le monde, avant la pandémie de COVID-19, l’ASFC avait de la difficulté à gérer l’augmentation du nombre de voyageurs, compte tenu de l’utilisation généralisée du traitement manuel et papier à la frontière. Une fois les mesures de santé publique levées à l’été 2022, l’ASFC a rencontré des problèmes similaires avec la résurgence du volume de voyageurs.

Les modifications dont nous discutons aujourd’hui permettront à l’agence de faciliter l’utilisation éventuelle de technologies numériques libre-service qui moderniseront et simplifieront le traitement aux frontières.

Par exemple, les voyageurs qui arrivent au Canada auront la possibilité de se présenter par voie de télécommunication, comme une application mobile, lorsqu’elle est offerte. Ce faisant, les voyageurs interagiront avec l’ASFC par voie numérique et avant leur arrivée au Canada.

Le traitement traditionnel en personne restera disponible pour les personnes qui choisissent de ne pas utiliser les nouvelles technologies ou qui choisissent de ne pas le faire. Ces modifications ne changent pas ce que fait l’agence, mais comment elle le fera. Ces changements répondent aux nombreuses demandes que l’ASFC a reçues de l’industrie du voyage et du tourisme afin d’établir un continuum de voyage moderne en permettant l’utilisation de technologies numériques en libre-service sur une base volontaire.

[Français]

Bien que cette initiative vise à moderniser l’expérience du passage à la frontière pour les voyageurs, nous nous concentrons également sur l’amélioration des processus pour nos agents. Grâce au financement du budget de 2020-2021, l’agence déploiera des outils numériques pour minimiser le temps consacré au travail administratif, comme l’émission de reçus papier. Cela libérera du temps pour que les agents puissent se concentrer sur les activités d’évaluation des risques et d’application de la loi.

Les nouvelles technologies feront également un meilleur usage des données pour appuyer la prise de décision. L’ASFC s’engage à faire en sorte que sa ligne de front reste agile, et ces changements soutiendront la mobilisation des ressources pour les activités prioritaires.

[Traduction]

Entendre directement les agents de première ligne nous aide à concevoir et à planifier nos efforts de développement et à soutenir le déploiement éventuel en identifiant les exigences essentielles telles que les besoins en formation.

Au cours des sept derniers mois, j’ai parlé à plus de 1 000 agents de première ligne, surintendants et chefs dans quatre de nos sept régions. Je leur ai expliqué comment nos efforts visent à améliorer la manière dont ces nouveaux outils et sources d’information soutiendront leur important travail. Je visiterai les trois régions restantes ce mois-ci pour continuer ce dialogue avec les agents frontaliers.

Nous avons également créé de nombreux groupes de travail avec des officiers afin de continuer à travailler ensemble.

[Français]

J’ai également parlé au Syndicat des douanes et de l’immigration, au Commissariat à la protection de la vie privée et au Groupe consultatif sur la transparence en matière de sécurité nationale.

Nous avons réaffirmé que la modernisation des voyageurs ne consiste pas à remplacer les agents par la technologie. Il s’agit de tirer parti de la technologie pour aider les équipes de première ligne à faire leur travail de manière efficace et efficiente.

Les modifications législatives à la Loi sur les douanes dont nous discutons aujourd’hui préciseront aussi que les voyageurs répondront aux questions posées par un agent et doivent fournir les renseignements demandés qui sont liés au processus de dédouanement à la frontière. Cela comprend les détails du passeport et les réponses aux questions de déclaration que les voyageurs, comme vous, sont déjà habitués à fournir lorsque vous traversez la frontière.

[Traduction]

Les nouveaux pouvoirs soutiendront l’intégrité de la frontière aux points de passage qui ne sont pas dotés d’un agent de l’ASFC en exigeant des voyageurs qu’ils fournissent des renseignements avant leur arrivée. De plus, ils permettront aux agents d’ordonner à ces personnes de se présenter en personne si un agent le juge nécessaire, même si le voyageur a tenté de le faire par télécommunication.

La dernière série de modifications vise à combler une lacune de longue date dans le processus de livraison des bagages. Les transporteurs aériens commerciaux seront tenus de transporter leurs bagages jusqu’à une zone de bagages internationale, à moins d’en être exemptés en vertu de la réglementation. En pratique, cette modification officialisera les exigences actuelles de la politique et n’entraînera aucun changement pour les transporteurs aériens.

[Français]

Bien que ces modifications éliminent les obstacles législatifs à la modernisation des voyageurs, l’ASFC prévoit de mettre en œuvre cette initiative de façon progressive sur plusieurs années. Nous continuerons à collaborer avec l’industrie, au moyen de consultations informées et ouvertes sur les éléments réglementaires au cours des 12 à 18 prochains mois.

Ces modifications sont essentielles à l’initiative de modernisation de l’ASFC pour les voyageurs et appuient les grandes priorités du gouvernement du Canada en matière de modernisation et de numérisation.

[Traduction]

Je vous remercie beaucoup du temps que vous nous avez accordé aujourd’hui, et nous serons heureux de répondre à vos questions concernant les modifications proposées.

Le président : Merci, monsieur Ommanney, de nous avoir décrit de façon claire et concise le but des modifications proposées. Je suis certain que cela va intéresser énormément mes collègues.

Avant de passer aux questions, je vais demander aux participants dans la salle de bien vouloir éviter de trop s’approcher du microphone ou, s’ils le font, d’enlever leur oreillette; nous éviterons ainsi de créer de la rétroaction acoustique qui pourrait nuire au travail du personnel du comité dans la salle.

M. Hamilton, M. Ommanney, M. Carr et Mme Belanger resteront avec nous jusqu’à 17 h 15. Je veux m’assurer que tous les membres du comité puissent participer pleinement, alors je vais limiter le temps pour chaque question — y compris la réponse — à cinq minutes, cet après-midi. S’il vous plaît, posez des questions courtes et précisez à qui vous vous adressez.

Comme d’habitude, je vais laisser la première question à notre vice-président, le sénateur Dagenais.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci à nos invités. Ma question s’adresse à M. Ommanney. Monsieur Ommanney, avant de vous parler de la modernisation du traitement des passagers qui arrivent au pays, j’aimerais qu’on revienne un peu en arrière pour regarder une chose qui n’a manifestement pas bien fonctionné dans la dernière année, soit l’obtention des cartes NEXUS pour les Canadiens.

Le rétablissement du service en sol canadien pour les demandeurs est censé avoir été rétabli en avril et j’aimerais avoir la confirmation que tout est en place. Si c’est vrai qu’il y a un retard de 12 à 14 mois pour obtenir une carte NEXUS, quelles sont les mesures qui ont été mises en place pour remédier à la situation? Est-ce que vous avez ajouté du personnel pour diminuer les retards?

M. Ommanney : Merci pour la question.

On était en discussion avec nos partenaires des États-Unis pour rétablir le service NEXUS. C’est un programme binational, alors il faut que les deux parties s’y mettent. Il y avait un désaccord sur des éléments de protection qui sont offerts aux Américains dans le cadre du programme.

Nous avons réglé cette situation. Nous avons rouvert les centres d’inscription NEXUS aux États-Unis, il y a quelques mois, et on vient tout juste de rouvrir tous les centres d’inscription NEXUS dans les aéroports. Nous continuons d’élargir nos capacités pour ces centres.

[Traduction]

Avant la pandémie, environ 65 % de la capacité de ces centres d’inscription au personnel mixte se trouvaient au Canada. Nous avons fait un certain nombre de changements et avons rouvert les centres américains ainsi que les centres canadiens. Nous avons élaboré quelques approches pour que le processus d’évaluation du risque et le processus d’approbation puissent se faire séparément, de façon que nous n’ayons pas à être ensemble au même endroit. Des changements supplémentaires au système seront apportés à l’automne.

Essentiellement, nous comblons l’écart et nous suivons le rythme des demandes qui arrivent. Il y a toujours un arriéré de demandes que nous devons régler. Je suis désolé, mais je n’ai pas les chiffres avec moi aujourd’hui, alors je ne peux pas vous dire si nous sommes encore dans cette période de 12 à 18 mois, mais nous avons prolongé l’adhésion des membres, alors, si leur adhésion expire, elle continuera d’être valide jusqu’à ce que nous puissions programmer une entrevue.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Les bureaux canadiens de NEXUS étaient fermés, entre autres parce que le Canada refusait que les agents américains travaillent en portant une arme, comme s’ils étaient chez eux en territoire américain.

Comment s’est réglé le problème? Sont-ils armés aujourd’hui, comme ils le réclamaient? Le Canada a-t-il fini par céder aux demandes des Américains qui ne sont pas reconnus pour faire des concessions dans ce genre de situation? Est-ce que les retards que doivent subir les Canadiens voulant une carte NEXUS ne sont tout simplement pas le résultat d’un entêtement du gouvernement canadien à permettre aux agents américains d’être armés aux centres NEXUS?

M. Ommanney : L’enjeu n’était pas lié au fait d’être armé ou non. Cela concernait la protection donnée en vertu de Loi sur le précontrôle.

[Traduction]

Des protections sont offertes aux agents américains chargés des tâches de précontrôle en vertu de la Loi sur le précontrôle. Cela faisait partie des négociations sur cet accord international. On avait des opinions différentes quant à savoir si ces protections devaient être élargies pour englober d’autres activités.

Il y a dans tout cela un aspect qui touche la souveraineté, et la position en vertu de la Loi sur le précontrôle était que les activités de précontrôle devraient être couvertes, mais en même temps, le programme NEXUS était spécifiquement exclu. Cela n’était pas lié au fait que les agents pouvaient porter une arme ou pas. Plutôt, il s’agissait de savoir si les protections en vertu de la Loi sur le précontrôle étaient offertes.

Au bout du compte, le règlement que nous avons trouvé consistait à séparer les processus d’entrevue qui étaient précédemment conjoints au Canada. Les États-Unis mènent leur portion des entrevues dans les zones de précontrôle pour l’entrée aux États-Unis, et nous effectuons notre volet séparément.

Cela n’avait rien à voir avec l’armement des agents. C’est une question distincte. Nous avons réussi à régler cela en rouvrant les centres d’inscription américains et en séparant certains éléments du processus d’inscription qui, auparavant, étaient faits conjointement. Nous avons, comme je l’ai dit, rouvert tous les centres d’inscription dans les aéroports canadiens au cours du dernier mois, et nous recommençons à suivre le rythme des demandes qui arrivent.

[Français]

Le sénateur Dagenais : J’ai une dernière question.

Si on revient au budget, y a-t-il des sommes qui ont été prévues ou ajoutées à votre budget pour rétablir plus rapidement la situation en ce qui concerne le programme NEXUS ou vous a‑t‑on tout simplement dit de laisser aller les choses, à savoir que cela devrait se replacer?

M. Ommanney : Non; nous avions le budget nécessaire. Il s’agissait plutôt de réévaluer les options pour l’inscription des Canadiens ou des Américains qui voulaient être membres du programme NEXUS.

Nous sommes en train d’examiner des investissements pour voir s’il y a une autre manière de le faire du point de vue du système. Nous sommes en train de trouver une façon de rétablir la capacité de faire les entrevues. Aucune augmentation de budget n’a été nécessaire.

Le sénateur Dagenais : D’accord, merci beaucoup.

[Traduction]

Le sénateur Oh : Merci aux témoins d’être ici avec nous. Quels seront les avantages et les inconvénients de permettre aux voyageurs qui arrivent au Canada de se présenter eux-mêmes à un agent de l’ASFC par moyen de télécommunication?

M. Ommanney : Merci de la question. Cela offre quelques avantages à l’ASFC et aussi aux voyageurs.

Prenons l’exemple de la déclaration faite à l’avance, que vous connaissez peut-être. Aux bornes des aéroports participants — les 10 plus gros aéroports —, les voyageurs ont maintenant l’option de remplir leur déclaration de douanes sur leur téléphone plutôt que de devoir la faire à la borne. Les questions de la déclaration elle-même n’ont pas changé. Le processus après la borne, avec les agents, n’a pas changé non plus. Tout ce que nous avons fait, c’est donner aux voyageurs l’option de remplir l’information à l’avance.

De notre point de vue, l’avantage c’est qu’il n’est pas nécessaire de faire cela dans les terminaux d’arrivée. C’est à cet endroit qu’il y a des préoccupations quant au nombre de voyageurs qui arrivent et aux ralentissements qui sont parfois signalés. Selon les mesures que nous avons recueillies, cela permet aux voyageurs de sauver environ 30 % du temps qu’ils passaient précédemment à la borne.

Le processus est le même, en ce sens que, quand vous arrivez à la borne, vos données biométriques faciales sont enregistrées et comparées à la photo dans la puce de votre passeport. Avant, vous deviez répondre à la déclaration douanière à la borne, un processus qui prenait environ deux minutes. Maintenant, avec cette option sur votre téléphone, vous pouvez répondre aux questions à l’avance. Il faut tout de même que vos données biométriques faciales soient enregistrées et comparées avec celles de la puce de votre passeport, pour que nous puissions établir que la personne qui est là est effectivement la même que sur la pièce d’identité et qu’elle a le droit d’entrer au pays. Ensuite, cette personne ne fait que confirmer sa déclaration.

Cela sauve, comme je l’ai dit, environ le tiers du temps. Le voyageur passe environ 40 secondes de moins à la borne. De notre point de vue, si nous accumulons le temps sauvé par tous les voyageurs qui font cela, alors cela va améliorer notre débit aux arrivées.

C’est plus commode, et le processus simplifié est avantageux pour le voyageur qui arrive. De notre point de vue, c’est une façon de simplifier le processus en faisant en sorte d’éliminer une partie du travail au terminal d’arrivée. C’est un exemple parmi d’autres.

Un autre exemple est le traitement à distance. Dans certains endroits, il peut être difficile pour nous d’avoir une présence physique. Aujourd’hui, nous avons des sites de déclaration éloignés où les gens peuvent arriver à bord d’un navire, par exemple, puis ils doivent téléphoner et obtenir une autorisation de cette façon. Les outils de télécommunication offrent aux gens une autre façon de fournir l’information à l’avance. Nous pouvons l’évaluer et faire une partie du travail à l’avance. Finalement, quand le voyageur arrive, le processus est simplifié, et rien n’est changé dans l’information que nous demandons ou dont nous avons besoin. Dans certains cas, comme nous obtenons cette information à l’avance, nous avons une meilleure capacité d’évaluation des risques et à d’autres égards.

Le sénateur Oh : Durant mes deux ou trois derniers voyages à l’étranger, au retour, dans l’avion, avant d’atterrir, on nous remettait habituellement un formulaire de déclaration douanière. Ces formulaires ne sont plus utilisés?

M. Ommanney : C’est exact. Soit vous remplissez toute l’information à la borne, soit vous remplissez l’information sur votre téléphone intelligent. Nous avons numérisé une grande partie de l’information. Il y a tout de même certains cas où nous pourrions revenir au papier, par exemple s’il y a un problème technique avec les bornes. Je pense qu’il y a toujours quelques petits aéroports qui utilisent toujours les formulaires papier, mais vous avez raison, c’est l’avantage d’avoir ces outils. Nous pouvons donner aux voyageurs un autre moyen de remplir l’information.

Encore une fois, l’idée est que cela est volontaire. C’est une option pour les voyageurs qui veulent s’en prévaloir. Cela leur permet de remplir l’information dans le confort de leur foyer ou de l’avion, plutôt qu’au terminal d’arrivée où, si comme moi vous revenez après la semaine de relâche, il y a des gamins qui crient, par exemple.

Le sénateur Oh : Qu’en est-il des personnes âgées? Certains aînés n’ont pas de téléphone avec service 4G. Certains d’entre eux utilisent toujours leur téléphone simplement comme un outil de communication.

M. Ommanney : Absolument. Notre intention, à cet égard, est que ce soit des outils volontaires. Ceux qui ne veulent pas les utiliser, qui n’ont pas la technologie pour le faire ou qui ne se sentent pas à l’aise de les utiliser peuvent toujours accéder au traitement traditionnel. Ceux qui ne veulent pas remplir la déclaration sur leur téléphone peuvent toujours atterrir à l’aéroport, puis se rendre à une borne ou s’adresser à un agent pour se conformer aux exigences d’entrée.

Le sénateur Oh : Merci.

Le sénateur Cardozo : Merci d’être ici et de nous expliquer tout cela. C’est intéressant et un peu compliqué. Je suis toujours un peu nerveux quand les gens utilisent l’expression « modernisation », parce que cela comprend toutes sortes de choses ou peut cacher toutes sortes de choses.

Actuellement, quand vous vous rendez à l’une de ces bornes, elle prend votre photo. Maintenant, vous allez pouvoir le faire sur votre téléphone pendant que vous êtes dans l’avion, avant d’atterrir. Est-ce bien la différence quand vous parlez de « moyen de télécommunication »?

M. Ommanney : Ce que nous voudrions, c’est que vous allumiez votre téléphone intelligent pour lui permettre de faire ce qui se fait à une borne aujourd’hui. Il y a essentiellement trois choses que nous devons faire à votre arrivée. Nous devons établir que vous êtes bien la personne que vous prétendez être, vérifier votre titre de voyage — c’est-à-dire, pour être certains que vous n’êtes pas interdit de territoire au pays — et vérifier si vous vous êtes conformé aux exigences douanières.

Aujourd’hui, pour faire le lien entre votre pièce d’identité et vous, un agent vous regarde, regarde votre passeport et décide si vous êtes la même personne. Puis, l’agent vous pose des questions sur les exigences douanières. C’est-à-dire : avez-vous des devises à déclarer, avez-vous respecté la limite, ce genre de choses. Nous pouvons aussi utiliser les bornes pour faire tout cela. Voilà pourquoi j’ai dit que vos données biométriques faciales sont enregistrées pour qu’on puisse s’assurer qu’il y a la même image dans votre passeport et que ce passeport vous autorise à entrer au pays. Ensuite, vous devez répondre aux questions sur la déclaration douanière sur la borne. Vous pouvez aussi remplir la déclaration douanière sur votre téléphone. Nous n’offrons pas encore cette capacité, mais nous avons l’intention de faire en sorte que les gens puissent utiliser leur téléphone intelligent pour faire les autres choses que font les bornes actuellement, c’est-à-dire enregistrer vos données biométriques faciales et créer un titre de voyage numérique que nous pouvons ensuite utiliser pour confirmer que vous êtes bien la personne que vous prétendez être et que vous n’êtes pas interdit de territoire. Cela va nous donner des possibilités dans les lieux éloignés, par exemple.

Notre frontière est étendue. Il y a beaucoup de gens, comme je l’ai dit, qui se présentent aujourd’hui à un site de déclaration éloigné, à bord d’un navire. Ces gens doivent téléphoner, avoir une discussion avec un agent pour que celui-ci établisse tout cela. Nous voulons ajouter des fonctions et donner aux voyageurs cette option, s’ils le veulent, afin que nous puissions tout de même remplir notre mandat fondamental, c’est-à-dire établir que vous êtes bien qui vous prétendez être, que vous n’êtes pas interdit de territoire au pays et que vous vous êtes conformé à vos obligations.

Le sénateur Cardozo : C’est l’agent qui décide — je ne peux pas vous dire où c’est exactement, mais c’est quelque part sous l’article 476 — de vous demander de vous présenter au guichet, si votre photo n’est pas suffisamment nette à ses yeux.

Vous avez de l’expérience dans ce domaine, puisque vous avez utilisé la technologie photo. Comment faites-vous pour éviter la discrimination systémique? Je pense aux gens avec la peau foncée, qui portent le turban ou le hidjab, dont la photo ne sera peut-être pas claire. Comment faites-vous pour que ce ne soit pas toujours les mêmes personnes qui sont envoyées au guichet, tout en évitant de compromettre la sécurité?

Est-ce que toutes ces décisions peuvent être portées en appel devant l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement ou la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public?

M. Ommanney : Je vais répondre, puis je vais inviter M. Carr à répondre à vos questions sur la partialité.

Je pense avoir dit dans ma déclaration préliminaire que j’avais parlé au Commissariat à la protection de la vie privée du Canada et aussi au Groupe consultatif sur la transparence de la sécurité nationale. Nous voulions leurs conseils dans ce domaine, sur le genre de choses que nous devons prendre en considération. Un certain nombre de facteurs entrent en ligne de compte, pour les données biométriques faciales. Ce ne sont pas seulement les facteurs démographiques, il y a aussi les facteurs technologiques, les facteurs environnementaux, comme l’éclairage, et ainsi de suite. C’est pour cette raison qu’il est plus simple pour nous d’envisager l’utilisation des données biométriques faciales dans un contexte aérien, où on peut contrôler ce genre de choses, plutôt que dans le mode de transport terrestre, comme une voiture et d’autres choses comme cela.

Le sénateur Cardozo : Mais si vous êtes dans un avion, il n’y a pas beaucoup d’éclairage.

M. Ommanney : Bien sûr. Ce sont toutes des choses que nous devons prendre en considération, et que nous devons surveiller pour voir si les résultats sont différents pour certains groupes. Je vais demander à M. Carr d’en parler dans une seconde.

Le sénateur Cardozo : Est-ce qu’on peut porter ces décisions en appel à ces agences?

M. Ommanney : Oui, il y a un processus de plainte. Aussi, notre intention est que toutes les décisions qui peuvent avoir des conséquences défavorables sur un voyageur soient prises par un être humain. C’est un autre aspect essentiel. Par exemple, si vous vous rendez à une borne aujourd’hui et que la borne n’est pas en mesure d’établir une correspondance entre les données biométriques faciales et la photo dans la puce — peut-être que certaines photos et certaines puces sont de très mauvaise qualité —, cela n’a rien à voir avec la personne ou la technologie. C’est peut-être la faute du titre de voyage. Dans ce cas-là, un agent de service frontalier va se charger de faire le lien entre la personne et son identité.

Je pourrais peut-être demander à M. Carr de faire quelques commentaires au sujet de la partialité.

Jeff Carr, directeur général, Bureau du dirigeant principal des données, Direction générale de la politique stratégique, Agence des services frontaliers du Canada : Le risque de partialité est quelque chose que nous prenons très au sérieux, dans tous nos processus. C’est pour cette raison que nous insistons pour utiliser la meilleure technologie accessible, à mesure que nous mettons tout cela en œuvre. Par exemple, nous allons examiner les normes internationales comme celles du National Institute of Standards and Technology. Cette organisation a défini des normes relativement à la reconnaissance faciale. Nous avons aussi un laboratoire à l’interne et nous allons tirer parti de toutes les technologies et faire les tests nous-mêmes pour nous assurer du rendement et vérifier si les résultats sont différents pour divers groupes, afin de cerner toute partialité qu’il pourrait y avoir.

Un autre aspect important est que nous allons travailler à surveiller cela sur le terrain. Nous allons surveiller et évaluer tout ce que nous mettons en œuvre. Si nous observons une partialité, nous ferons des modifications. Cela pourrait être lié à la technologie, par exemple, à la position de l’appareil photo ou d’autres choses du genre; aux facteurs environnementaux que M. Ommanney a mentionnés, comme l’éclairage de l’aéroport qui ne convient pas à certains groupes; ou au logiciel utilisé. Nous sommes en train de bâtir de l’expertise à l’interne. Nous allons mettre tout cela à l’épreuve.

Enfin, nous allons travailler avec le monde universitaire et la société civile; nous sommes transparents, car nous expliquons ce que nous faisons et comment nous faisons nos tests. Nous allons leur demander quelles sont leurs préoccupations et comment nous pouvons les dissiper.

Le sénateur Cardozo : Quand est-ce que tout cela va entrer en vigueur?

M. Ommanney : Le projet lui-même a une durée de vie d’environ cinq à sept ans, et les différentes technologies vont être mises en œuvre à différents moments. Nous venons tout juste de lancer la déclaration à l’avance dans les grands aéroports. Ensuite, nous allons nous concentrer sur les principaux postes frontaliers du mode routier. Nous allons pouvoir accéder au traitement à distance grâce à certains changements, puis des règlements seront pris en conséquence à mesure que nous mettons tout cela en œuvre.

Quand nous voulons utiliser votre téléphone à une borne, par exemple, un certain nombre de choses doivent être prises en considération. Nous avons parlé des facteurs environnementaux. Nous pouvons contrôler ces facteurs au terminal d’arrivée. Je pense que vous avez donné l’exemple de quelqu’un qui essaie de le faire dans un avion ou ailleurs. Nous en sommes encore au début. La façon dont nous allons faire nos tests et acquérir diverses technologies va surtout dépendre des résultats en matière de partialité et de la conformité aux normes internationales, etc.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’aimerais tout d’abord souligner que le 8 mai 1945 souligne la fin de la guerre en Europe, alors que l’Allemagne nazie capitulait. Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants se doit de signaler cette journée importante et de remercier les Canadiens qui se sont battus lors cette guerre, ainsi que les familles qui ont perdu un proche.

Je souhaite la bienvenue à nos invités.

Je me mets à la place du citoyen normal pour qui c’est du chinois. En ce moment, les gens ont la possibilité de faire une déclaration électronique. La déclaration électronique est surtout utilisée pour le transport aérien. Est-ce que vous prévoyez d’étendre ce système à l’ensemble des vérifications douanières, y compris aux frontières terrestres?

Est-ce qu’il y aura toujours une obligation de se présenter devant un douanier ou à une borne avec son passeport? Est-ce que les deux systèmes s’apparentent, celui que vous voulez mettre en place et celui qu’utilisent déjà ceux qui voyagent en avion?

M. Ommanney : Le but pour nous est d’offrir aux voyageurs l’option de produire les déclarations à la frontière à l’aide leur téléphone intelligent. C’est une option pour tous les modes de transport, mais c’est la déclaration que l’on utilise dans le cadre du transport aérien que l’on veut étendre à tous les modes de transport. On souhaite offrir les formulaires qui doivent être remplis, il y a une option numérisée pour le faire; il y a aussi un outil pour calculer les frais de douanes qui doivent être payés.

Le sénateur Boisvenu : Donc si, par exemple, je me présente à la frontière de Lacolle et que j’ai rempli ma déclaration de façon électronique, est-ce que je passe tout droit ou j’arrête devant un douanier?

M. Ommanney : Vous allez arrêter devant le douanier, mais pour ce qui est du paiement, il n’est pas nécessaire de prendre votre passeport, de le numériser et de saisir de l’information. Il y a deux avantages à prévoir pour le mode terrestre : le premier est que cela va éliminer la nécessité pour l’agent de...

Le sénateur Boisvenu : Poser des questions?

M. Ommanney : Ils peuvent toujours poser des questions, mais ils vont déjà avoir les réponses sur la déclaration. Comme cela, si quelque chose les frappe comme étant...

Le sénateur Boisvenu : Suspect?

M. Ommanney : Ils peuvent orienter la conversation sur ces aspects. Alors, le but est vraiment d’éliminer les aspects administratifs comme la saisie de l’information, la réponse à la question afin que tout soit déjà là.

On est toujours à l’étape de la planification. Alors, je peux expliquer comment on envisage de le faire, mais cela pourrait changer. L’idée est d’envoyer la déclaration à l’avance, lorsque l’immatriculation est lue à l’approche du pill booth de l’agent, les informations sur l’identité et les réponses de la déclaration sont déjà fournies à l’agent pour qu’il puisse se concentrer sur l’engagement avec le voyageur.

Le sénateur Boisvenu : Les personnes qui ont des difficultés avec les appareils électroniques pour diverses raisons, types de problèmes, ou difficultés de compréhension auront-elles toujours la possibilité d’avoir recours à l’ancienne méthode consistant à se présenter, donner son nom, son numéro de passeport, etc.?

M. Ommanney : Pour les ports d’entrée qui existent aujourd’hui dans les aéroports ou aux frontières terrestres, disons que lorsqu’on parle de fournir les options de télétraitement, cela dépend un peu. Les voyageurs auront toujours la possibilité d’entrer par un port d’entrée terrestre, mais s’ils veulent les avantages comme c’est le cas lors de croisières, il nous faut l’information et les fonctionnalités qui sont nécessaires. Les options traditionnelles continueront donc d’être offertes.

Le sénateur Boisvenu : Vous dites qu’un agent pourrait demander à un voyageur de se présenter en personne.

M. Ommanney : C’est cela.

Le sénateur Boisvenu : Lorsqu’on va rentrer au pays, y aura‑t-il toujours un contact entre le voyageur et le douanier?

M. Ommanney : Cet exemple vaut pour quelqu’un qui veut rentrer à distance, disons que je vise à franchir la frontière dans l’angle nord-ouest, j’ai des options pour fournir mes informations et décliner mon identité, mais si, par exemple, j’ai besoin d’un agent d’immigration, il y a un permis qui doit être complété.

Le sénateur Boisvenu : Dans quelles circonstances le douanier rappellera-t-il le voyageur? Vous avez dit dans votre exposé que le douanier aura toujours la possibilité de rappeler le voyageur. Dans quelles circonstances cela pourrait-il arriver?

[Traduction]

M. Ommanney : Je pourrais donner l’exemple d’une personne qui veut traverser la frontière dans un lieu éloigné. Cette personne a donné ses informations, mais sa demande d’immigration doit être traitée. Peu importe qu’elle ait présenté sa déclaration et établi son identité, à la réception de ses informations, nous allons savoir que son dossier doit être traité et nous allons donc lui dire qu’elle ne peut pas se prévaloir de cette option, qu’elle ne peut pas entrer ainsi et qu’elle doit se présenter à un lieu où il y a un agent.

Un autre exemple serait une personne qui a des antécédents en matière d’application de la loi. Pour cette raison, on insisterait pour qu’elle se présente à un agent... pas dans toutes les circonstances, mais cela pourrait être un exemple de circonstances où on pourrait insister pour qu’une personne se présente à un agent. L’option serait offerte pour les gens qui veulent l’utiliser, mais nous réservons tout de même le droit qu’un agent des services frontaliers dise : « Même si vous avez fourni vos informations et que vous vous êtes conformé aux obligations douanières en utilisant les outils sur votre téléphone intelligent, nous voulons tout de même vous voir. »

Nous aurons aussi l’option d’avoir des agents sur le terrain — ce que nous appelons des équipes d’intervention mobiles —, qui pourront être présents aux sites maritimes éloignés, par exemple, pour effectuer des contrôles aléatoires ou d’autres choses pour s’assurer que les gens qui y arrivent font ce qu’ils doivent faire. Cela fait même partie de notre objectif. Si nous pouvons consacrer moins de temps aux voyageurs à faible risque, nous pourrons faire cela plus régulièrement et améliorer nos résultats en matière d’application de la loi.

La sénatrice M. Deacon : Merci d’être ici. Je pense que deux ou trois choses sont très claires. Personne ne sera laissé pour compte, peu importe où on se situe sur le continuum des outils technologiques et de la compétence technologique et peu importe l’appareil qu’on utilise. Je dirais que, quand vous êtes sur la Colline du Parlement, vous discutez probablement avec des gens qui voyagent tout le temps par avion. Nous avons nos propres expériences. Je sais que vous avez dû lancer des projets pilotes et effectuer des tests pour tout cela. Je suis enthousiasmée par la déclaration faite à l’avance. Je ne comprenais pas réellement, au début, mais j’ai vu certaines choses faites à Toronto, à Montréal et à Vancouver. Je pense que ce sont d’excellentes mesures. Quand il y a 600 personnes dans une salle pleine, et que chacune prend 25 secondes, cela s’additionne très rapidement.

J’ai deux questions à poser par rapport à cela. Premièrement, pouvez-vous me parler un peu de la situation pendant la pandémie et après la pandémie? Pouvez-vous me donner un aperçu de la dotation en personnel, du maintien en poste durant la pandémie et de la façon dont les choses se sont passées pour le personnel qui ne pouvait pas travailler de la maison? Je serais curieuse de savoir, avant tout, quelles ont été les conséquences. Puis, j’aurais une question complémentaire à ce sujet.

M. Ommanney : Merci. Avant tout, je veux ajouter quelque chose au premier commentaire que vous avez fait à propos de l’importance de cela au terminal d’arrivée. Je ne sais pas si vous avez entendu des témoignages de l’industrie aussi, mais le secteur de l’aviation s’intéresse beaucoup à l’introduction des nouvelles technologies qui aideraient à régler les problèmes de débit et feraient circuler les voyageurs à faible risque. Si vous voyagez à l’étranger, vous verrez que d’autres pays ont mis cela en place. Pour vous donner un cadre de référence, la semaine dernière à l’aéroport Pearson, plus de 150 000 voyageurs sont arrivés au terminal 1. C’est là que les gens utilisent le plus la déclaration faite à l’avance, soit environ 20 %. Cela veut dire que 36 000 voyageurs environ... un grand nombre de voyageurs ont sauvé environ 40 secondes à une borne. Cela commence à s’additionner et à faire une grande différence quant au nombre de personnes que nous pouvons faire circuler au terminal d’arrivée.

Pour ce qui est de la dotation, je pense que l’un des défis pour nous, c’est que les nouveaux agents des services frontaliers doivent venir du collège. Ce n’est pas comme si nous pouvions embaucher de nouveaux agents dans la rue. Ils doivent venir du collège, avoir été formés et être prêts. Pendant la pandémie, la nouvelle génération d’agents des services frontaliers au collège a été interrompue. Nous avons rattrapé notre retard, mais cela a incontestablement été un petit défi.

Nous avons pris des mesures pendant la pandémie pour essayer de maintenir notre capacité opérationnelle en accordant des congés supplémentaires à certains agents afin de ne pas exposer tout le monde à la COVID et de ne pas nous créer nous‑mêmes des difficultés opérationnelles. Bien sûr, comme pour tout le monde, la pandémie a créé quelques difficultés. Nous sommes une organisation de première ligne et, comme vous le dites, nous n’avons pas la possibilité de travailler à distance... même si nos agents visés par des mesures d’adaptation, par exemple, peuvent faire certaines choses. Mais, d’après les derniers chiffres que j’ai vus, je pense que nous avons rattrapé notre retard en ce qui concerne les agents provenant du collège, et nous continuons de trouver les agents dont nous avons besoin.

La sénatrice M. Deacon : Merci de nous avoir donné une idée du contexte.

Quand j’examine tout cela et le volet technologique, un élément me laisse perplexe à ce stade, et c’est le fait que les informations sont examinées au moyen des télécommunications. Si un voyageur se présente à l’Agence des services frontaliers du Canada — par un moyen automatisé, comme nous en avons parlé aujourd’hui —, ces informations finiront-elles à un moment donné par être examinées par un humain ou seront-elles intégrées dans un algorithme et analysées afin de cerner tout sujet de préoccupation?

M. Ommanney : Nous disposerons d’outils qui aideront l’agent à prendre des décisions. Nous incluons des outils qui examinent les informations dont nous disposons et qui les transmettent aux agents pour éclairer leurs décisions. En plus des informations que peut fournir à l’avance un voyageur, nous effectuons déjà un travail sur le risque, au sein de l’organisation, pour soutenir les décisions des agents.

Les agents continueront de prendre les décisions au chapitre des renvois et des interventions. Si je prends l’exemple du Centre de déclaration par téléphone — encore une fois, un site maritime éloigné —, les gens se présentent et doivent téléphoner et parler à un agent. Il y a parfois de l’attente. En été, il y a beaucoup de trafic maritime, et les gens attendent pour obtenir l’autorisation d’un agent. Cela offre une autre possibilité de présenter des demandes à l’avance et de traiter les risques. De plus, il serait possible, par exemple, de renvoyer une note au voyageur pour lui dire que, d’accord, il sera autorisé à entrer à son arrivée et il a été évalué. Cependant, c’est une évaluation qui sera toujours effectuée par l’agence. Si l’on décide d’intervenir auprès de ce voyageur, soit nous lui demandons de se présenter là où il y a du personnel, soit nous envoyons une équipe d’intervention mobile sur le site afin d’intervenir et d’interroger le voyageur.

La sénatrice M. Deacon : Merci.

Le sénateur Boehm : Je remercie les témoins d’être ici avec nous aujourd’hui. J’ai deux questions peut-être un peu élémentaires. La première concerne la façon dont vous assurez la sécurité des applications, car les acteurs malveillants sont toujours en train de nous rattraper, que ce soit en utilisant leurs propres algorithmes ou en prenant des contre-mesures quelconques. Il y a beaucoup d’escroqueries également, et les gens peuvent en être victimes. Le sénateur Oh a dit que les personnes âgées qui ne maîtrisent pas très bien l’informatique ont de la difficulté à se retrouver dans le système, même quand elles essaient.

J’ai remarqué que le secrétaire de la Sécurité intérieure des États-Unis était ici, la semaine dernière, et je me demandais si vous examiniez des programmes pour contrer les acteurs malveillants et si vous travaillez en étroite collaboration avec les États-Unis à cet égard.

M. Ommanney : Je peux peut-être demander à Mme Belanger de parler de la cybersécurité.

Kelly Belanger, vice-présidente associée et codirigeante principale de l’information, Direction générale de l’information, des sciences et de la technologie, Agence des services frontaliers du Canada : Je vous remercie de la question. La protection des renseignements personnels et la sécurité sont des considérations essentielles pour nous, et elles continueront de l’être. Nous travaillons bien évidemment en collaboration avec les États-Unis. Nous parlons à nos organisations partenaires. Nous avons parlé avec tout ce monde de la cybersécurité, de la façon dont ils travaillent, de ce qu’ils utilisent, s’il s’agit de centres de données, du nuage, etc.

Nous avons mis en place des mesures de protection. Nous travaillons selon le principe de la protection de la vie privée dès la conception. Nous avons des techniques de chiffrement très solides, les données sont chiffrées lorsqu’elles sont inactives et lorsqu’elles se déplacent. À Services partagés Canada, il y a une activation du nuage sécurisé, donc tout ce qui passe du nuage au sol est transféré en toute sécurité grâce à ce chiffrement.

Nous utilisons également ce que l’on voit dans de nombreuses industries actuellement, l’authentification multifactorielle. Vous devez avoir le second appareil pour la seconde partie de l’authentification que nous avons.

De plus, les informations ne sont utilisées et ne doivent être utilisées que par les personnes qui ont un besoin de savoir. Nous avons des employés qui peuvent les consulter; nous avons des registres, alors nous pouvons savoir qui est entré et qui les a utilisées; et nous avons des normes et des contrôles de sécurité pour la vérification des établissements où nous conservons les données et des personnes qui y ont accès.

La dernière chose que je dirais, c’est que nous avons également intégré des considérations relatives à la protection des renseignements personnels dans nos contrats avec ceux qui travaillent; s’ils ne sont pas des employés du gouvernement du Canada, nous nous assurons que ces contrats comportent des clauses visant à ce qu’ils respectent nos exigences en matière de protection des renseignements personnels également.

Le sénateur Boehm : Merci, madame Belanger.

M. Carr a tout à l’heure dit que vous travaillerez en collaboration avec la société civile et les organisations de consommateurs intéressés pendant la mise en œuvre de ces nouveaux programmes. Est-ce que cela suppose que vous direz aux gens qui sont les faux? Si vous allez sur Internet et que vous voulez télécharger l’application ArriveCAN, vous avez un certain nombre d’options. Quelques-unes exigent un numéro de carte de crédit, mais c’est une arnaque. Je pense qu’il est important de faire savoir quel est le véritable programme. Qu’en pensez-vous?

Mme Belanger : Quand nous découvrons ce genre de sites, nous les examinons et nous travaillons avec notre personnel de sécurité dans certains cas pour essayer de les faire disparaître. Comme vous le savez, dans de nombreux cas, comme vous l’avez dit pour ArriveCAN, il y en a toujours un qui fonctionne. Notre personnel de soutien est informé quand les gens appellent pour ce genre de choses; il sait ce qu’il faut répondre et leur dit qu’il ne s’agit pas des véritables sites. Mais nous avons également travaillé en collaboration avec notre équipe de communications pour nous assurer que, s’il existe des sites de ce type, nos sites Web indiquent clairement qu’ils sont frauduleux ou que ce ne sont pas nos vrais sites. Monsieur Ommanney, y a‑t-il autre chose?

M. Ommanney : Pas que je sache. Encore une fois, c’est l’éternel problème, pour les communications, essayer de faire comprendre que nous n’allons jamais vous demander de payer. C’est un peu comme ce que vit l’ARC pendant la période des impôts chaque année. Nous restons vigilants et nous essayons de faire comprendre le plus clairement possible que ce ne sont pas des sites légitimes, et quand nous pouvons prendre des mesures pour tenter de les faire disparaître, nous le faisons.

Le sénateur Boehm : Il y a quelques années, avant la pandémie, et même avant cela, il y avait toujours un plan visant à lancer un projet pilote aux États-Unis, où le Canada aurait une capacité de précontrôle, disons, dans une place ou ailleurs, dans un grand aéroport. Vu les récents événements et les récentes consultations, je me demandais si cette idée tient toujours et, si c’est le cas, à quoi cela ressemble.

M. Ommanney : Nous en discutons toujours avec nos homologues américains. Je dirais que nous n’en sommes qu’au tout début de la réflexion sur l’intérêt que cela aurait de notre point de vue et du point de vue des États-Unis, à la fois dans l’espace voyageur et dans l’espace commercial dans lequel nous travaillons. Je n’ai pas de précisions à donner aujourd’hui sur ce à quoi cela pourrait exactement ressembler, à part dire que c’est toujours un sujet de discussion.

Le sénateur Boehm : Le rêve est donc toujours vivant?

M. Ommanney : Oui.

Le sénateur Boehm : Merci.

Le président : J’aimerais faire un suivi rapide avant de poursuivre : je suppose que vous êtes chapeautés par le Centre de la sécurité des télécommunications pour ce qui a trait à la cybersécurité et que vous êtes connectés. Merci. C’est ce que je pensais.

Le sénateur Yussuff : Je remercie les témoins d’être ici.

Monsieur Ommanney, vous avez parlé tout à l’heure de l’arrivée dans l’un de nos principaux aéroports. J’ai l’habitude d’aller à Toronto assez souvent, et je n’ai jamais atteint la borne en 30 secondes. Je serais très content de le pouvoir, mais, bien sûr, la réalité pour de nombreuses personnes qui vivent dans la région du Grand Toronto, c’est que c’est toujours bondé. C’est l’aéroport le plus fréquenté du pays. Je comprends la nécessité d’intégrer certaines technologies pour accélérer le processus. Nous le faisons au moment où je vous parle. Les compagnies aériennes reçoivent beaucoup d’informations de ma part lorsque j’embarque sur un vol, et les États-Unis les reçoivent en avance, avant que j’atterrisse. Je comprends tout cela.

Dans ce contexte, quelles seraient les conséquences de l’utilisation de ce nouveau processus de télécommunication sur l’emploi des agents de l’ASFC, à l’avenir, y compris les autres enjeux qui pourraient avoir des conséquences?

M. Ommanney : Pour revenir à vos 30 secondes, je me suis peut-être mal exprimé, mais ce que nous constatons avec la déclaration faite à l’avance, si vous ne l’utilisez pas, il faut au voyageur moyen, une fois qu’il a atteint la borne, environ deux minutes pour la saisie des données biométriques, la confirmation d’identité et la déclaration douanière, et c’est environ un tiers plus rapide, soit environ 40 secondes de moins, si vous avez fait votre déclaration à l’avance. Je m’excuse si je me suis mal exprimé tout à l’heure.

Aucune partie de la modernisation des voyageurs n’a pour objectif de réduire le personnel. Nous voulons consacrer moins de temps à faciliter la circulation des voyageurs à faible risque et à résoudre des problèmes comme ceux dont vous parlez, par exemple l’encombrement à l’arrivée à l’aéroport Pearson, et consacrer plus de temps à des activités d’application de la loi d’une plus grande valeur, améliorer l’expérience des voyageurs, rendre la technologie plus disponible, améliorer l’expérience utilisateur des voyageurs et celle des agents. Une grande partie du travail que nous faisons vise à améliorer l’interface utilisateur pour nos agents, les informations qui sont à leur disposition, à réduire les tâches administratives qu’ils doivent accomplir, qu’il s’agisse de saisie ou d’entrée de données, ou à mieux soutenir les communications dont ils ont besoin sur le plan opérationnel, entre un agent principal et un agent de l’inspection secondaire, par exemple. Ce sont autant de choses qui leur prendront moins de temps lorsqu’ils traitent un voyageur et, par conséquent, ce temps pourra être consacré à des activités d’application de la loi de plus grande valeur.

On n’a pas ici l’intention de remplacer les agents par la technologie. Une grande partie de ce travail consiste à demander aux agents : comment la technologie peut-elle vous aider dans votre travail? De quelles informations avez-vous besoin? Comment voulez-vous les consulter? Comment devez-vous communiquer? Franchement, nous avons de nombreux systèmes en arrière-plan, et cela crée beaucoup de frictions pour nos agents qui doivent se connecter dans plusieurs systèmes. Il y a beaucoup de place à la simplification et à l’amélioration de leur expérience utilisateur. Cela leur permettra au bout du compte de consacrer plus de temps à ce que nous considérons comme des activités d’une plus grande valeur et, en même temps, d’offrir une meilleure expérience aux voyageurs et une expérience simplifiée aux voyageurs à faible risque.

Le sénateur Yussuff : L’agent de l’ASFC n’est qu’un point du processus de passage lorsque l’on revient au pays. Quelles sont les conséquences sur les agents de douanes, une ligne distincte que l’on franchit? Cela les aiderait-il d’une manière ou d’une autre dans leur travail? Ils ont la capacité de contrôler chaque voyageur; ils sont là pour récupérer les formulaires de déclaration. Quelles seraient les conséquences pour l’agent des douanes, qui effectue le contrôle secondaire auquel on est soumis lorsqu’on passe par l’ASFC?

M. Ommanney : Je pense que vous parlez de l’agent de l’inspection secondaire dans le cas d’un renvoi. Si nous fournissons de meilleures informations aux agents principaux, pour qu’ils puissent identifier plus rapidement les voyageurs à faible risque et les laisser reprendre leur route, cela leur permet également de se concentrer sur les voyageurs qui présentent un risque plus élevé ou plus d’intérêt, et qu’ils pourraient souhaiter renvoyer. L’un des objectifs est d’améliorer l’efficacité de ces renvois.

J’aimerais attirer votre attention sur d’autres éléments que j’ai mentionnés il y a un instant. L’une des choses que les agents m’ont dites au cours des discussions, c’est « Mais que doivent faire ces nouveaux outils pour vous? »

L’une des choses qu’ils ont souvent mises en avant est qu’il faut que les outils les aident à mieux communiquer les uns avec les autres. Quand un agent principal renvoie un voyageur à l’inspection secondaire, la raison de ce renvoi n’est pas toujours évidente pour l’agent de l’inspection secondaire. Si on pouvait faire en sorte que le système permette une meilleure communication entre les deux, on supprimerait ce type de lacune en matière d’information qui existe aujourd’hui.

Il y a des solutions, quand les outils et les informations que nous fournissons mènent à de meilleures et plus rapides décisions initiales, mais qui ont également une incidence positive sur les renvois à l’inspection secondaire et les résultats que nous y obtenons.

Le sénateur Yussuff : Actuellement, quand j’arrive, je passe par l’ASFC. Avant de passer, prendre mes bagages et sortir de l’aéroport, je remets le document à l’agent des douanes. Comment les agents pourraient-ils maintenant obtenir ce document, de manière électronique?

M. Ommanney : La raison en est qu’il s’agit de satisfaire aux exigences de présentation prévues par la loi. C’est l’une des choses que l’on a modifiées, ici.

L’information se trouve déjà dans le système. Il n’est pas nécessaire d’imprimer le papier et de demander à la personne de le remettre. On pourrait lui fournir un code QR sur son téléphone. Encore une fois, nous n’en sommes qu’au début. Nous n’avons pas encore trouvé la façon dont cela va fonctionner. C’est l’une des choses que ces modifications nous permettraient d’ajuster.

Le sénateur Yussuff : J’aimerais revenir sur une question que mon collègue, le sénateur Cardozo, a posée et qui est régulièrement soulevée par différentes communautés. Elle concerne les difficultés auxquelles elles sont confrontées et le profilage racial. Dans ce contexte, il faut reconnaître que nous avons eu ces problèmes et que de nombreuses tentatives ont été faites pour former les agents et les sensibiliser au fait que nous sommes un pays très diversifié.

Les technologies ne sont pas neutres. Ce que vous y mettez, c’est ce qui en ressort à la fin. Comment éviter cela à l’avenir et garantir que les autres communautés ne seront pas stigmatisées par cela?

M. Ommanney : Bien sûr. Je demanderais à M. Carr de ce que nous faisons pour tenter de savoir s’il y a des préjugés et comment nous pouvons réagir.

Je parlerais de l’autre point que vous avez soulevé. Il faut toujours, et nous le faisons — en formant et en sensibilisant les agents — nous assurer que les gens sont conscients des problèmes. Nous devons également examiner le processus décisionnel des agents, qui sont des humains, en ce qui a trait aux écarts dans les résultats.

Quant au système, c’est une chose dont nous sommes très conscients. Je crois avoir mentionné que le Commissariat à la protection de la vie privée et le Groupe consultatif sur la transparence de la sécurité nationale soulignent tous deux qu’il est important non seulement de nous occuper de cela, mais aussi d’être transparents sur notre façon de le faire, et de rassurer les Canadiens sur le fait que nous prenons cela au sérieux et que nous nous en occupons.

Je vais céder la parole à M. Carr.

M. Carr : Oui. J’ai une équipe dédiée à l’analyse des préjugés et de l’éthique des processus actuellement en place. Toute technologie ou tout algorithme futurs seront évalués du point de vue des préjugés et de l’éthique; nous allons mesurer les écarts dans les résultats et concevoir toutes les technologies et tous les algorithmes en gardant cela à l’esprit, afin que tout élément que nous pouvons supprimer de ces algorithmes ou de cette technologie soit supprimé avant qu’il n’ait une incidence.

Comme vous l’avez dit, toute donnée erronée qui entre dans la création risque de perpétuer ce préjugé à l’avenir, et c’est pourquoi nous sommes extrêmement prudents quant à ce qui est introduit dans le système; nous voulons être certains de réduire au minimum les préjugés qui entreront dans le système, à l’avenir. Nous procédons ensuite régulièrement au suivi et à l’évaluation.

La sénatrice Dasko : Merci d’être ici. J’ai quelques questions étant donné qu’on a répondu à la plupart de mes questions.

Je trouve que la carte NEXUS fonctionne très bien pour les voyages aux États-Unis. Ce processus sera-t-il meilleur et plus rapide que NEXUS? Je trouve qu’il est impossible de vivre sans une carte NEXUS, alors ne l’enlevez pas. Je sais que ce sont les Américains, mais vous voyez ce que je veux dire.

M. Ommanney : Le modèle opérationnel de NEXUS correspond tout à fait à la façon dont nous envisageons de traiter les voyageurs à faible risque. Mais il faut déterminer qui fait partie de ce flux.

L’expérience du voyageur et notre expérience — encore une fois, à ce premier stade de notre réflexion — sont comparables à la façon dont fonctionne le flux NEXUS.

La sénatrice Dasko : L’idée vous est-elle venue de là et du fait que cela fonctionne bien?

M. Ommanney : Honnêtement, je ne sais pas d’où l’idée est venue. C’est un problème auquel sont confrontées les agences frontalières du monde entier : comment simplifier le contrôle des voyageurs à faible risque pour pouvoir se concentrer sur les activités à haut risque, qu’il s’agisse des personnes qui traversent la frontière, des marchandises commerciales qui entrent, etc.

NEXUS s’appuie sur l’idée que l’on peut savoir avec un certain degré de confiance que ces personnes ont besoin de moins d’attention et peuvent donc être traitées de manière simplifiée. Nous gérons cela au moyen d’un processus d’évaluation en amont et d’un suivi continu des comportements des personnes participant au programme.

La sénatrice Dasko : J’ai une question sur les voyages en voiture. Comme mon collègue, je suis condamnée à utiliser l’aéroport Pearson chaque semaine. Plus tôt cette année, je suis passée par le pont Ambassador et je suis revenue par le traversier Walpole Island; c’est un trajet intéressant qui permet de passer du Michigan à l’Ontario en huit minutes.

Disons que vous voyagez en voiture, vous arrivez à la frontière et vous voulez rentrer au Canada. Vous dites « Tous ces camions sont ici. » Pouvez-vous sortir votre téléphone cellulaire et remplir le formulaire directement sur place, juste avant d’arriver?

M. Ommanney : Oui.

La sénatrice Dasko : Vous le pouvez.

M. Ommanney : L’idée est que vous pouvez le faire jusqu’à 72 heures à l’avance, encore une fois, selon ce que nous envisageons actuellement. Vous pourriez le faire. Il s’agit ensuite de confirmer que la déclaration est toujours valide au point de passage.

La sénatrice Dasko : Je vois. Vous devez donc le faire 72 heures à l’avance?

M. Ommanney : Vous n’avez pas à le faire, vous pouvez le faire.

La sénatrice Dasko : Je comprends.

M. Ommanney : Si vous êtes à un poste frontalier, vous êtes dans une longue file d’attente, et il y a une file d’attente à côté pour les personnes qui ont une carte NEXUS ou qui ont fait leur déclaration à l’avance; je vous conseille de la remplir avant de prendre le volant.

La sénatrice Dasko : D’accord. Vous êtes dans la file et vous vous dites que c’est terrible. Je vais remplir le formulaire et ça ira.

M. Ommanney : Encore une fois, en ce qui concerne l’évolution des choses, l’idée pour nous est d’intégrer en fin de compte toutes les obligations liées aux frontières, mais également des choses comme le temps d’attente et la façon de vous aider, en tant que voyageur, à décider du meilleur endroit où aller. Je dois satisfaire à toutes les exigences, calculer et payer mes droits et taxes. Au bout du compte, cela simplifiera le processus. Cela fonctionne pour vous parce que cela vous aide à simplifier le processus quand vous arrivez. Cela fonctionne pour nous parce que, surtout à la frontière terrestre, il s’agira d’informations obtenues à l’avance, ce que nous n’avons pas aujourd’hui.

La sénatrice Dasko : D’accord.

M. Ommanney : Il s’agit de la capacité, sur le plan opérationnel, d’avoir une idée des volumes qui arrivent, ou des personnes, du risque à traiter selon ces informations, de la décision qui peut être prise la plupart du temps, avant de voir ensuite la personne, de confirmer la déclaration et de savoir si l’agent a remarqué quelque chose d’important.

La sénatrice Dasko : Ces procédures ont-elles une incidence sur le trafic commercial?

M. Ommanney : Les procédures sont axées sur les voyageurs et les activités commerciales.

Une des choses dont je discute avec les agents... car ils sont en première ligne, et ils alternent souvent entre les opérations voyageurs et les opérations commerciales.

Bien sûr, notre travail est axé sur le traitement des voyageurs, les outils pour les voyageurs et ensuite sur la façon dont nous traitons ces informations; comment pouvons-nous appuyer la décision des agents concernant les voyageurs?

Nous demandons à divers groupes d’agents quelles seraient leurs exigences par rapport à l’interface, quel type d’exigences ils doivent prendre en compte. Nous voulons le faire en tenant compte du fait que leur travail ne porte pas uniquement sur les voyageurs. Ils peuvent alterner parfois.

Il est possible que certains éléments liés à nos opérations commerciales se reflètent dans ce que nous proposons aux agents. Du point de vue d’un utilisateur qui ne fait pas partie de l’ASFC, c’est uniquement axé sur les voyageurs.

La sénatrice Dasko : Prévoyez-vous que les gens continueront d’avoir le choix à la plupart des postes frontaliers?

M. Ommanney : Oui.

La sénatrice Dasko : Mode terrestre ou aérien?

M. Ommanney : L’un de mes collègues aime faire une analogie avec le secteur bancaire : vous pouvez toujours aller au comptoir; vous pouvez utiliser un guichet automatique, ou vous pouvez effectuer vos transactions sur votre téléphone. Nous voulons offrir un éventail d’options. Assurément, il y a de nombreux avantages, de notre point de vue, à ce que les gens l’utilisent.

Nous avons déjà parlé de cela en répondant à la question de votre collègue il y a un instant au sujet de l’aéroport Pearson. Il y a un avantage pour nous. Si nous pouvons éloigner le traitement du point d’arrivée, cela signifie que les gens passeront moins de temps à l’arrivée; c’est important pour nous, pour l’Autorité aéroportuaire du Grand Toronto et pour nos partenaires de l’industrie.

Nous avons également un intérêt commun à améliorer l’expérience des voyageurs. Comment faire pour que tout se passe sans heurt et le mieux possible?

C’est ce qui nous pousse à choisir ces outils-là, mais nous sommes conscients — comme il a été mentionné plusieurs fois — que ce n’est pas tout le monde qui voudra les utiliser ou qui pourra les utiliser. Nous maintiendrons l’accès au traitement traditionnel, mais cela devient plus difficile quand l’on parle des outils à distance. Encore une fois, l’idée, c’est que je vous donne une option, celle de traverser au milieu des Grands Lacs. Cependant, si vous ne voulez pas utiliser ces outils, vous devriez peut-être passer par le point d’entrée terrestre le plus proche. Il y aura des circonstances où cela pourrait être la seule option. Cependant, en ce qui concerne les grands aéroports et les postes frontaliers terrestres — c’est-à-dire ce qui est disponible aujourd’hui —, nous considérons cette offre comme une possibilité d’étendre les services et la portée des services actuellement disponibles.

Le président : Merci.

La sénatrice Anderson : Je remercie les témoins. L’Agence des services frontaliers du Canada prévoit-elle d’utiliser ou d’élargir davantage l’intelligence artificielle, ou l’IA? Si c’est le cas, existe-t-il un règlement et des lignes directrices pour le déploiement, l’utilisation et la promotion de l’IA parallèlement à la mise en œuvre de ce nouveau projet de loi?

M. Ommanney : Monsieur Carr, pourriez-vous dire ce qui constitue l’IA ou ce qui relève de l’IA? Nous avons l’intention d’utiliser l’analytique pour appuyer les décisions des agents, par exemple, pour valider des indicateurs qui pourraient être intéressants du point de vue du risque et ensuite fournir ces informations aux agents, pour éclairer leurs décisions. Je vais peut-être vous céder la parole, maintenant.

M. Carr : Nous explorons certainement l’utilisation potentielle de l’intelligence artificielle dans le travail sur les risques, à l’avenir. Tout ce que nous faisons est conforme aux règlements et aux normes du Conseil du Trésor, mais en outre, les dépasse en tous points. Nous n’allons pas nous précipiter pour en finir au plus vite, mais c’est une chose que nous explorons. Une fois que nous ferons suffisamment confiance aux outils — c’est-à-dire une fois qu’ils auront été soigneusement testés et mis à l’essai et que nous bénéficierons d’une forte adhésion des groupes externes qui peuvent nous poser des questions —, nous pourrons les mettre en œuvre.

La sénatrice Anderson : Et si vous décidiez de les mettre en œuvre, les règlements qui existent actuellement permettraient-ils de réagir aux préoccupations en matière de sécurité concernant les renseignements des particuliers, ou est-ce quelque chose qui devrait suivre toute décision que vous prendriez?

M. Carr : Je vais peut-être m’adresser à M. Hamilton au sujet du projet de loi. Chaque fois que nous mettrons en œuvre l’intelligence artificielle, ce sera en toute connaissance de cause. Le public serait informé de l’utilisation de ces types d’outils dans le cadre du processus. Les gens seraient informés.

M. Ommanney : Je ne sais pas si l’évaluation de l’incidence algorithmique en traitera également. Chaque fois que nous utilisons les algorithmes dans la prise de décisions, il y a un processus par l’intermédiaire du Conseil du Trésor concernant son incidence, et il y a ensuite une évaluation.

M. Carr : L’incidence doit être évaluée et publiée sur le site Web du Conseil du Trésor à l’intention de tous les Canadiens afin qu’ils sachent, par exemple, que nous utilisons l’intelligence artificielle pour prendre des décisions liées au risque à la frontière. Voici pourquoi nous l’utilisons. Voici l’information que nous utilisons et voici les types de décisions. Ces renseignements seraient affichés sur le site.

Graeme Hamilton, directeur général, Politiques relatives aux voyageurs, au secteur commercial et aux échanges commerciaux, Direction générale de la politique stratégique, Agence des services frontaliers du Canada : Le projet de loi et les modifications proposées dans le budget ne traitent pas des changements liés à l’utilisation de l’intelligence artificielle et des risques qu’elle comporte. Tout cela est régi par le cadre du Conseil du Trésor qui existe déjà, et nous nous y conformerions. La Loi sur les douanes prévoit déjà des restrictions en matière d’échange de renseignements entre les ministères. Ce point n’est pas non plus abordé dans le régime législatif. Il s’agit d’options à présenter à l’agence. Les éléments liés à l’échange de ces renseignements sur la protection des renseignements personnels et l’utilisation de l’intelligence artificielle continueraient d’être régis par les cadres existants à l’échelle du gouvernement du Canada. Dans le contexte de l’intelligence artificielle, c’est le Conseil du Trésor qui les détiendrait.

M. Ommanney : En plus, les mêmes restrictions dans la Loi sur les douanes concernant les renseignements que nous pouvons demander sont maintenues. Il ne s’agit pas de changer cela de quelque manière que ce soit, de sorte que les restrictions qui sont déjà en place dans la Loi sur les douanes s’appliquent à tout ce qui a été discuté aujourd’hui.

Le président : Il nous reste juste assez de temps pour que les sénateurs Boisvenu, Yussuff et Cardozo posent encore trois questions. Vous avez trois minutes chacun, et je serai très strict sur les trois minutes.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci à nos invités, encore une fois. Ce type de système fonctionnera-t-il seulement pour les résidents canadiens ou fonctionnera-t-il aussi pour les Américains qui veulent venir au Canada?

M. Ommanney : L’idée, c’est que les outils soient disponibles pour n’importe qui.

Toutefois, la détermination du risque sera éclairée par la catégorie de voyageur, ainsi que le fait qu’un Canadien qui revient au pays est un cas un peu plus simple que quelqu’un qui vient de l’étranger et qui a besoin de voir un agent d’immigration.

Le sénateur Boisvenu : Est-ce que les Américains développent des systèmes semblables pour leurs citoyens ou pour les Canadiens qui voyagent souvent aux États-Unis? Est-ce qu’ils sont à peu près au même niveau en matière de modernisation?

M. Ommanney : On vit avec les mêmes défis dans cet espace. Il y a beaucoup de voyageurs qui arrivent et il faut vérifier leur identité le plus vite possible et déterminer s’ils sont des personnes avec qui on aimerait interagir. On a des pays assez vastes.

Le sénateur Boisvenu : On sait que les Américains sont toujours très frileux à l’idée de voir des gens entrer chez eux. Ils ont une espèce d’obsession de contrôle de leur territoire; est-ce un frein à ce qu’ils développent les mêmes technologies que nous, ici?

M. Ommanney : C’est plutôt un frein aux catégories de voyageurs à qui ils offrent les outils. Ils ont des outils semblables aux nôtres et ils se penchent sur les mêmes types de technologies, les mêmes défis que nous.

[Traduction]

Nous envisageons les mêmes technologies. Nous allons peut‑être les mettre en œuvre différemment parce qu’il y a des différences de souveraineté et des préoccupations différentes. Pour ce qui est des défis fondamentaux, à savoir comment régler la question de l’identité et fournir aux gens un moyen d’entrer à distance, ou comment rationaliser l’entrée des voyageurs à faible risque dans un grand aéroport ou un poste frontalier terrestre, ces défis sont les mêmes. Ils peuvent se manifester de façon légèrement différente, mais nous aurons des types de technologies et d’approches similaires en jeu.

Le sénateur Boisvenu : Merci.

Le sénateur Yussuff : Il y a un autre éléphant dans la pièce dont nous n’avons pas parlé. Que se passe-t-il si on découvrait que j’avais menti dans les renseignements que j’ai fournis concernant mon autorisation préalable? Serais-je marqué dans le système pour toujours? Ces renseignements sont-ils communiqués à d’autres pays?

M. Ommanney : J’imagine que cela n’est probablement pas différent d’aujourd’hui, en ce sens qu’une personne qui entre dans le pays est tenue de fournir honnêtement des renseignements à un agent des services frontaliers. S’il s’avère qu’elle ne l’a pas fait, il y a un dossier d’application de la loi qui figurera dans le système.

Nous n’avons pas encore répondu aux questions sur la façon dont on détermine que vous présentez un faible risque, et si vous n’êtes plus considéré comme tel, la manière dont on revient à la désignation de faible risque. Toutefois, en ce qui concerne les antécédents en matière d’application de la loi, c’est pertinent pour nous lorsque vous vous présentez en voiture et que vous parlez à un agent à un poste frontalier terrestre. Si vous avez déjà fait l’objet de mesures d’application de la loi, cela fera partie de la façon dont ils vous regarderont lorsqu’ils interagiront avec vous et prendront leur décision concernant un renvoi. Ces éléments continueront d’être importants pour nous pour ce qui est d’évaluer le risque d’un voyageur qui arrive au pays. Mais la manière dont cela fonctionnera n’est pas encore déterminée. Elle sera très largement influencée par le fonctionnement actuel, sous réserve des commentaires qui ont été faits au sujet d’une évaluation. Nous ne voulons pas importer des préjugés, comme vous l’avez mentionné dans votre question précédente, alors s’il y a eu des résultats différents en matière d’application de la loi, par exemple, nous examinerons cela de près avant d’importer cela dans un système qui aide maintenant à orienter les renvois futurs.

Le sénateur Yussuff : À l’heure actuelle, en ce qui concerne votre carte NEXUS, si vous êtes en infraction, vous faites l’objet d’un signalement et d’une vérification constante. Vous n’en êtes peut-être pas encore là, mais je suppose qu’il se passera quelque chose et que vous devrez voir un agent pour obtenir...

M. Ommanney : Nous recevons entre 900 et 100 millions de voyageurs par an. Nous essayons encore de déterminer à quoi ressemble la normalité après la COVID, mais c’était la tendance avant la COVID. L’idée n’est pas que ce soit pour tout le monde. Nous essayons de réduire le nombre de voyageurs inconnus. Parce qu’à l’heure actuelle, tout le monde est traité comme un voyageur inconnu, ce qui n’est pas le cas. Dans certains cas, nous avons beaucoup de renseignements sur les voyageurs qui peuvent nous aider à reconnaître... Comme vous l’avez mentionné, sénatrice Dasko, le pont Ambassador. Il y a beaucoup de navetteurs à Windsor. Beaucoup de gens vont travailler à Détroit et reviennent tous les jours à 17 h 30; c’est la même voiture, les mêmes voyageurs.

J’ai mentionné plus tôt certaines des séances de mobilisation que j’ai eues avec des agents. Je vais dans tous les points d’entrée, et ils ont déjà une idée de ce à quoi ressemble un voyageur à faible risque pour eux. C’est différent dans chaque point d’entrée. Il s’agit vraiment d’essayer de nous aider à mettre en réserve cette expérience et de la partager ensuite avec nos collègues dans tout le pays afin que nous puissions passer le moins de temps possible avec les personnes qui présentent un faible risque et qui ne nous intéressent pas, pour approuver leur expérience et nous libérer afin de nous concentrer sur des activités à valeur ajoutée.

Le sénateur Cardozo : Permettez-moi de revenir sur les mécanismes de plainte que j’ai évoqués. Il y a l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement et la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public. Pouvez-vous me dire quelle est la différence entre les deux, lesquels s’appliquent à votre travail et lesquels s’appliquent à une personne qui a une plainte en vertu de ce nouveau processus?

M. Ommanney : Nous avons notre propre processus interne de plaintes à l’Agence des services frontaliers du Canada, l’ASFC.

Le sénateur Cardozo : C’est différent des deux que j’ai mentionnés?

M. Ommanney : Si vous êtes un voyageur et que vous avez l’impression d’avoir reçu un mauvais traitement à la frontière ou n’êtes pas satisfait de la décision, il y a un mécanisme de recours — un mécanisme de plaintes au sein de l’ASFC. Je pense que vous parlez de certains organes du gouvernement — la communauté de la sécurité nationale dans son ensemble. Je ne connais pas bien les distinctions.

M. Hamilton : Je ne voudrais pas déformer la nature exacte de leurs mandats. C’est peut-être une question que nous pouvons reprendre et sur laquelle nous pouvons vous donner un peu plus de renseignements.

Le sénateur Cardozo : Si vous pouviez me dire quel est le nom de la commission... la commission des plaintes de l’ASFC.

M. Ommanney : Nous n’avons pas d’organisme de surveillance. Il existe un projet de loi qui envisage la création d’un tel organisme, mais il n’a pas encore été adopté par la Chambre.

Le sénateur Cardozo : Donc, à ce stade, il n’y a pas d’organisme de surveillance pour l’ASFC?

M. Ommanney : C’est exact.

[Français]

Le sénateur Dagenais : L’utilisation des moyens électroniques pour vérifier l’identité des voyageurs qui arrivent au Canada, cela m’inquiète un peu, pas parce que je ne suis pas pour la modernisation, mais parce que les gouvernements fédéral et provinciaux n’ont pas une feuille de route impressionnante pour ce genre de transformation informatique, comme le système Phénix et SAAQclic. Ma crainte augmente quand vous dites que vous travaillez sur un plan de sept ans, parce que ce qui est bon aujourd’hui peut être totalement dépassé à la fin de vos examens, dans sept ans.

Concrètement, allez-vous acquérir des équipements qui ont fait leurs preuves ailleurs dans le monde ou allez-vous tenter d’implanter et de développer le système ici?

[Traduction]

M. Ommanney : Je vais peut-être demander à Mme Belanger de vous parler de notre processus de mise au point des technologies de l’information.

La réponse à votre question est probablement qu’il s’agit des deux : il y aura des domaines dans lesquels nous chercherons à acquérir des technologies existantes, testées et éprouvées. Par exemple, dans le domaine du traitement à distance, nous pourrions acquérir des commandes d’embarquement à distance des passagers qui seraient exploitées à partir d’un point d’entrée voisin. Nous cherchons probablement une technologie établie dans ce domaine. Dans d’autres cas, lorsque nous examinons nos propres systèmes internes et cherchons des façons d’éclairer notre prise de décisions, nous voudrions contrôler cela. Nous voudrions mettre cela au point. Il y aura donc des éléments que nous chercherons à mettre au point à l’interne, et il y en aura d’autres où nous irons chercher les éléments qui ont été testés et éprouvés.

Les algorithmes biométriques seraient un exemple d’éléments qui ont été testés et éprouvés. Nous ne voulons pas être à la fine pointe du progrès. Nous voulons adopter des choses qui ont été approuvées par le National Institute of Science and Technology. Nous avons déjà discuté des préjugés et d’autres aspects. Il existe des organismes internationaux qui disent : « Ces algorithmes fonctionnent, ceux-ci ne fonctionnent pas. » Nous voulons une technologie testée et éprouvée pour ce genre de choses.

Je pense que l’autre point que je voudrais souligner — puis j’inviterai Mme Belanger à ajouter quelque chose — c’est que nous sommes tout à fait prêts à offrir de petites choses progressives au fur et à mesure. Nous ne cherchons pas à offrir une grande solution au bout de sept ans. Nous voulons déployer un élément et voir s’il fonctionne. Nous pourrons alors dire : « D’accord, très bien, élargissons la solution. » C’est ce que nous pensons actuellement lorsqu’il s’agit d’étendre la fonction de déclaration faite à l’avance aux postes frontaliers terrestres. Nous la mettrons à l’essai dans quelques sites et verrons si elle fonctionne. Est-ce qu’elle permet d’obtenir les gains d’efficacité que nous souhaitons? Est-ce que cela fonctionne pour les voyageurs et les agents? Si tel est le cas, c’est parfait. Étendons‑la à nos autres sites.

Nos activités sont énormes et complexes. Les modes de déplacement sont nombreux. Je travaille à l’ASFC depuis environ trois ans et demi, et ce que j’ai appris, c’est qu’il y a un très grand nombre de permutations de voyageurs. Nous voulons créer le plus d’options possible, tout en reconnaissant la diversité réelle de nos activités. Nous devons aller tester ces petits éléments de façon progressive. C’est un peu notre philosophie et notre approche.

L’autre grand avantage de mon point de vue — encore une fois, pour revenir aux engagements que j’ai pris avec les agents — c’est que nous voulons montrer aux agents les améliorations et les mettre entre leurs mains, afin qu’ils ressentent le changement et en perçoivent les avantages. C’est un autre facteur important qui nous permet de nous attaquer à ce problème de façon progressive.

Mme Belanger : Absolument. J’allais également parler des éléments progressifs, mais l’autre chose que je voulais mentionner, c’est qu’au fur et à mesure que nous progressons — si nous menons un projet pilote et que nous effectuons une validation de principe avec les agents — nous voulons nous assurer que l’architecture et la sécurité dont nous disposons sont évolutives. Parfois, les choses fonctionnent bien à un endroit, mais on ne peut pas les apporter partout ailleurs. Ce sera essentiel pour nous dans le cadre de la conception et de l’examen de ce que nous devons acheter et construire. Nous devons nous assurer que le système est évolutif et qu’il peut être utilisé dans plusieurs régions du pays.

Le président : Merci beaucoup. Nous arrivons à la fin du groupe de témoins. Permettez-moi tout d’abord de vous remercier, monsieur Ommanney, madame Belanger, monsieur Hamilton et monsieur Carr, d’avoir grandement contribué à notre examen du projet de loi et d’y avoir apporté beaucoup de clarté. Je remercie nos collègues pour les questions qu’ils ont posées et pour leurs réponses exhaustives. Vous nous avez beaucoup aidés. Comme nous aimons le faire lorsque nous recevons des hauts fonctionnaires, des universitaires et d’autres personnes, nous vous remercions de votre contribution, du travail que vous faites et des services que vous rendez aux Canadiens. Vous le faites certainement en trouvant un équilibre entre l’efficacité et la sécurité et en tenant compte de l’équité, comme nous l’avons entendu aujourd’hui. Nous vous en sommes très reconnaissants et nous ne saurions trop vous remercier.

Nous allons maintenant passer à notre deuxième groupe de témoins. Pour les personnes qui se joignent à nous en direct cet après-midi, nous examinons la teneur des éléments de la section 24 de la partie 4 du projet de loi C-47, Loi portant à exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023, aussi appelée la Loi d’exécution du budget.

Dans le cadre du deuxième groupe, nous sommes ravis d’accueillir, par vidéoconférence, Mark Weber, président national, Syndicat des douanes et de l’immigration; et Me David Fraser, membre de la Section du droit de la vie privée et de l’accès à l’information, qui représente l’Association du Barreau canadien.

Merci à vous deux de vous joindre à nous aujourd’hui. Nous sommes impatients d’entendre ce que vous avez à dire. Pour commencer, nous vous inviterons à présenter vos déclarations liminaires, qui seront suivies par les questions de nos membres. Je vous rappelle que vous avez chacun cinq minutes pour présenter votre déclaration liminaire.

Maître Fraser, nous commençons par vous. La parole est à vous.

Me David T.S. Fraser, membre, Section du droit de la vie privée et de l’accès à l’information, Association du Barreau canadien : Merci beaucoup de me fournir l’occasion de comparaître devant le comité en tant que membre de la Section du droit de la vie privée et de l’accès à l’information de l’Association du Barreau canadien, tandis qu’il poursuit son importante étude des modifications proposées à la Loi sur les douanes concernant la modernisation des voyageurs.

Je devrais souligner dès le début que l’ABC dispose d’un processus très rigoureux afin d’examiner les présentations officielles devant être faites aux comités parlementaires comme celui-ci, et malheureusement, elle n’a pas encore eu l’occasion d’appliquer pleinement ce processus à cette initiative législative particulière. Je dis cela comme un avertissement ou une mise en garde afin que le comité ne considère pas mes commentaires d’aujourd’hui comme la déclaration ultime ou la position officielle de l’ABC. Mes commentaires d’aujourd’hui s’appuient sur des présentations antérieures que nous avons faites devant des comités parlementaires sur des questions liées à la protection de la vie privée à la frontière.

En prévision de mon témoignage aujourd’hui, nous avons fourni à la greffière une copie des exposés antérieurs de l’ABC sur des sujets connexes, mais ils ne traitent pas de cette initiative législative particulière.

L’Association du Barreau canadien s’efforce toujours de défendre la primauté du droit, l’administration de la justice, l’égalité et l’équité, autant de valeurs qui sous-tendent la Charte canadienne des droits et libertés. Cette initiative semble conçue pour offrir une plus grande flexibilité aux personnes qui entrent au Canada pour se soumettre à une entrevue ou à un examen par l’ASFC, en utilisant certaines technologies lorsque c’est un moyen efficace et souhaitable d’effectuer cette entrevue ou cet examen. Il semble que bon nombre des détails et des mécanismes de ce processus seront laissés aux règlements, qui ne nous ont pas encore été fournis et qui, je pense, n’ont pas encore été publiés à des fins de commentaires.

En tant qu’organisation, nous devrions veiller à ce que la technologie adoptée comporte les niveaux les plus élevés de protection de la vie privée et n’exclue pas ou ne désavantage pas par inadvertance les personnes qui n’ont peut-être pas accès à des technologies ou à des outils particuliers.

Par exemple, si l’Agence des services frontaliers du Canada proposait d’ajouter à la fonctionnalité de l’application ArriveCAN la possibilité d’organiser des vidéoconférences avec des agents de l’ASFC, probablement avec des informations de géolocalisation pour déterminer si la personne se trouve à un poste frontalier autorisé, cela devrait être fait de manière transparente et accompagné d’une solide évaluation des facteurs relatifs à la vie privée, communément appelée EFVP, pour veiller à ce que les principes de protection de la vie privée et les exigences juridiques en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, de la Loi sur les douanes et, bien sûr, de la Charte, soient rigoureusement respectés.

Le projet de loi parle également des « renseignements réglementaires » qui doivent être fournis dans les « circonstances réglementaires ». Bien sûr, cela signifie que ces détails seront laissés à la réglementation. Ces renseignements devraient être limités à ceux qui sont raisonnablement nécessaires pour évaluer l’admissibilité au Canada et devraient être adaptés pour éviter les recherches à l’aveuglette ou les incursions dans des droits juridiques importants tels que le secret professionnel de l’avocat.

Dans sa présentation sur la protection de la vie privée et le secret professionnel à la frontière, l’ABC a recommandé que l’ASFC adopte des politiques visant à clarifier que les renseignements protégés par le secret professionnel de l’avocat ne peuvent être divulgués sans le consentement du client ou une ordonnance du tribunal. Les agents de l’ASFC doivent respecter toutes les revendications du secret professionnel de l’avocat, qu’elles soient présentées par l’avocat ou son client.

Les agents de l’ASFC doivent suivre une procédure accélérée afin de répondre aux revendications du secret professionnel de l’avocat. Les décisions au sujet de l’applicabilité du secret professionnel de l’avocat ne peuvent être prises par les agents de l’ASFC; elles doivent l’être par un tribunal canadien.

Un examen exhaustif de la proposition et une évaluation solide des facteurs relatifs à la vie privée seront importants à cet égard. L’EFVP posera, entre autres, les questions suivantes : quel est le fondement législatif de cette collecte de renseignements personnels? Quelle est la portée de ce fondement? Ce qui est recueilli se limite-t-il à ce qui est utilisé à des fins légitimes? Est‑ce limité aux renseignements strictement nécessaires à ces fins? En ce qui concerne les vidéoconférences ou les images, sont‑elles enregistrées? Dans l’affirmative, comment sont‑elles protégées et quelles sont les limites de leur utilisation ultérieure? Combien de temps ces renseignements sont-ils conservés, et qui a accès à ces enregistrements? Et, bien sûr, comment tout cela est-il sécurisé?

J’espère que l’EFVP sera examinée par le commissaire à la protection de la vie privée du Canada et qu’elle sera également rendue publique.

Vous vous rappelez peut-être que, au début de la pandémie, le gouvernement du Canada a fourni une application d’alerte d’exposition à la COVID appelée « Alerte COVID ». Bien qu’elle n’ait pas eu le succès escompté, elle constitue un modèle de développement et de déploiement d’applications transparent. Le code source a été rendu disponible à des fins d’examen afin que les personnes sachent ce qu’elle faisait exactement et qu’elle ne faisait rien de plus. Il y a eu une certaine controverse associée à l’application ArriveCAN, qui, à mon avis, aurait probablement pu être atténuée si on avait mis le code source à la disposition des spécialistes de la sécurité et de la protection des renseignements personnels pour qu’ils l’examinent minutieusement et qu’il soit soumis à un examen par des tiers. On a aussi jugé que c’était obligatoire, ce qui cause parfois d’énormes problèmes à ceux qui ne voyagent pas avec un téléphone intelligent.

Par conséquent, nous recommandons que, quelle que soit la technologie adoptée et déployée pour faciliter ce nouveau mode d’entrée au Canada, elle fasse l’objet d’une évaluation approfondie des facteurs relatifs à la vie privée et d’un examen indépendant afin de garantir que la vie privée et la sécurité sont protégées au moyen de pratiques exemplaires.

Les personnes utilisant l’application ArriveCAN ont éprouvé un certain nombre de problèmes pour un certain nombre de raisons, par exemple, les personnes qui n’utilisent pas de téléphone intelligent ou n’ont pas accès à cette technologie particulière. Tout déploiement d’une nouvelle solution technologique doit tenir compte du fait que nous avons un fossé numérique au Canada et que ce fossé numérique peut être encore plus important parmi les voyageurs qui cherchent à entrer légalement au Canada. Des moyens doivent être mis en œuvre pour les personnes qui n’ont peut-être pas de téléphone intelligent ou qui choisissent de ne pas en utiliser à cette fin.

L’équité et l’inclusion exigent également que la solution technologique adoptée et déployée n’ait pas d’incidence négative sur les personnes handicapées. La Loi canadienne sur les droits de la personne prévoit un ensemble d’exigences claires pour veiller à ce que tous les programmes et les systèmes gouvernementaux ne fassent pas de discrimination à l’encontre des personnes pour des motifs de discrimination illicite.

Pour conclure, je tiens à répéter que l’ABC n’a pas encore eu l’occasion de déployer toutes ses ressources pour examiner ce mandat particulier. Merci beaucoup.

Le président : Maître Fraser, merci beaucoup de votre patience. Je dois vous dire que nous avons des problèmes techniques et que nous ne pourrons probablement pas vous poser de questions. Mais je sais que certains de nos membres auraient aimé cela, et nous verrons si nous pouvons faire un suivi d’une façon ou d’une autre si cela suscite un intérêt, et je suis sûr que ce sera le cas.

À ce stade, nous allons passer à notre deuxième témoin, M. Weber.

Monsieur Weber, je n’étais pas certain de savoir si vous vouliez fournir une déclaration liminaire ou juste répondre à des questions. Je laisse cela entre vos mains. Comment aimeriez‑vous procéder?

Mark Weber, président national, Syndicat des douanes et de l’immigration : Merci, monsieur le président. Je n’ai pas fourni de déclaration liminaire, mais si on me permettait de parler un instant, j’aimerais le faire.

Le président : Oui, vous pouvez le faire.

M. Weber : Merci de me donner l’occasion de vous parler aujourd’hui. Nous n’avons pas été consultés au sujet des modifications proposées à la Loi sur les douanes, alors nous lisons ce qui s’en vient et essayons d’interpréter comment cela changera le travail et le paysage pour nos membres. Nous avons certaines préoccupations.

Nous examinons le paragraphe 11(1) de la Loi sur les douanes et certaines des modifications proposées, qui prévoit qu’il faut se présenter « a) devant un agent, en personne ». Les mots « en personne » ont été ajoutés. Mais le changement le plus important figure à l’alinéa 11(1)b), qui stipule que les voyageurs doivent se présenter à l’Agence par « tout moyen de télécommunication que le ministre précise pour le bureau de douane en question ». À la lecture, il semblerait que l’intention du projet de loi soit de permettre aux voyageurs non seulement de se présenter par tout moyen de télécommunication, comme l’application ArriveCAN, Internet ou le téléphone, mais aussi de donner l’impression que cette information n’a pas besoin d’être examinée par un agent ou même par une personne.

Une autre de nos préoccupations se trouve au paragraphe 11(7), où l’on dit que les agents peuvent demander à quelqu’un de se présenter en personne. Rien dans le projet de loi proposé ne semble indiquer qu’un agent peut obligatoirement demander à une personne de se présenter à lui. Ce qui nous préoccupe, c’est que si un agent a des doutes au sujet de la criminalité potentielle, de la contrebande, et cetera, il doit y avoir plus qu’une simple demande de se présenter en personne.

Les préoccupations dont je parlerai aujourd’hui sont celles de nos membres, qui concernent surtout la sécurité et le manque de personnel. Comme bon nombre d’entre vous le savent, l’ASFC manque cruellement de personnel. Nous estimons qu’il nous faudrait de 2 000 à 2 500 agents de plus pour que les activités se déroulent correctement.

Ce type de technologie est souvent proposé comme moyen de remplacer les agents, et nous entendons des comparaisons avec un distributeur automatique de billets ou un kiosque automatisé. Nous comprenons qu’un kiosque automatisé puisse fonctionner dans une épicerie, mais les épiceries n’ont pas d’armes prohibées, d’opioïdes synthétiques, de pornographie juvénile, le genre de choses pour lesquelles nous sommes là pour intervenir.

Nous parlons d’avoir un flux de voyageurs à faible risque qui n’auront à faire face à aucun agent des douanes. Qui est à faible risque et qui décide qui est à faible risque? S’ils ne parlent à personne, comment les voyageurs sont-ils considérés comme à faible risque? Est-ce l’intelligence artificielle qui s’en charge?

Nous n’avons pas de détails à ce sujet, mais c’est inquiétant, surtout lorsque nous regardons une vidéo promotionnelle sur la modernisation de la frontière produite par l’ASFC, qui montre une voiture qui traverse la frontière, qui place son téléphone devant un écran, la barrière s’ouvre, et le commentaire suivant s’affiche : « Je ne peux pas croire que je viens de passer la frontière. Je n’ai eu à parler à personne ».

Nous sommes très préoccupés. Nous sommes préoccupés pour la sécurité du Canada. Nous sommes très fiers du travail que nous faisons. Nous pensons que certaines des propositions relatives à la technologie d’ArriveCAN, qui permettent aux gens de remplir leur déclaration avant d’arriver à l’aéroport et d’économiser le temps perdu à la borne... c’était le cas avant l’apparition des bornes. Lorsque les bornes ont été mises en place, nous avons informé l’ASFC à l’époque qu’elles ne fonctionneraient pas, et, bien sûr, elles ont considérablement ralenti les choses. Lorsqu’il s’agissait d’un agent à une guérite et que les bornes n’étaient pas là, vous remplissiez votre déclaration à bord de l’avion avant d’arriver.

C’est exactement ce que nous avions prévu, et nous sommes maintenant en train d’introduire une nouvelle technologie pour corriger une technologie qui n’a pas fonctionné et qui, nous l’avons dit au départ, ne fonctionnerait pas.

C’est frustrant. Nos membres sont très frustrés. M. Ommanney a fait de nombreuses visites, et c’est tout à son honneur, et il s’est entretenu avec les employés de l’ASFC au sujet des difficultés qu’ils rencontrent.

Ce dont nous avons besoin ici, c’est d’un moyen de nous assurer que nous sommes en mesure de parler à tous les voyageurs et de veiller à ce que les niveaux de dotation soient à la hauteur des besoins.

Merci.

Le président : Merci, monsieur Weber.

Nous allons maintenant passer aux questions. Je crains que les questions que nous avons ne puissent s’adresser qu’à M. Weber. Bien sûr, maître Fraser, si vous voulez que ces questions s’ajoutent aux mémoires que vous avez déjà présentés, nous vous encourageons à le faire, et nous serons heureux de les recevoir.

Je rappelle aux membres qu’ils ont jusqu’à 18 h 40 pour le groupe de témoins. Je vous demanderais de garder vos questions succinctes et de dire à qui vous posez la question. Nous devrions être en mesure d’avoir de quatre à quatre minutes et demie pour chaque question et réponse.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci, monsieur Weber, de votre témoignage. Je trouve dommage qu’on ne vous ait pas consulté sur les moyens technologiques et qu’on n’ait pas pris en compte votre expertise de l’utilisation des nouveaux moyens. Entre vous et moi, vous êtes les premiers intervenants. À titre d’ancien policier, on nous a remplacés par des radars photo, alors je ne sais pas si c’est plus efficace, mais je comprends votre inquiétude.

Le trafic illégal d’armes et de pièces d’armes entre les États‑Unis et le Canada est un fléau à l’origine de plusieurs meurtres d’un bout à l’autre du Canada, particulièrement à Montréal, à Toronto et à Vancouver.

Pouvez-vous nous faire part de votre évaluation des mesures en place pour combattre le crime organisé qui semble ne pas avoir trop de difficultés à déjouer la présence aux frontières? Est-ce que cela deviendra plus problématique en raison des nouvelles mesures mises en place — ce qu’on appelle la technologie?

[Traduction]

M. Weber : Merci de poser la question. Avant de répondre, je dois préciser que M. Ommanney et son équipe nous ont consultés, ainsi que nos membres, au sujet des changements proposés et de certains des défis auxquels nous sommes confrontés. Ce sur quoi nous n’avons pas été consultés, ce sont les changements apportés à la Loi sur les douanes en particulier. Bien sûr, je ne sais pas si ces changements technologiques pourraient avoir lieu sans ces modifications de la Loi sur les douanes.

Nous disposons d’un groupe de travail conjoint. De toute évidence, le trafic illégal d’armes à feu au Canada fait l’objet d’un travail important. Chaque fois que l’on supprime l’interaction entre un agent et un voyageur, on affaiblit en quelque sorte la sécurité aux frontières. C’est vraiment pour cela que nous sommes là.

Il existe des technologies qui pourraient être utiles pour nous et dont nous avons besoin, comme des installations d’inspection des chemins de fer. Dans le domaine maritime, nous n’inspectons qu’une infime partie des marchandises qui nous parviennent. Nos agents ont besoin de plus d’appareils à rayons X portatifs. Nous n’en avons pas. Des choses simples comme l’accès aux renseignements sur les entrées et les sorties des voyageurs qui vont aux États-Unis et en reviennent, nous en manquons. Nous ne disposons pas non plus d’un moyen d’identifier automatiquement les personnes qui apparaissent dans le Centre d’information de la police canadienne, ou le système du CIPC.

Il existe des technologies qui peuvent aider, et même certaines des technologies proposées par l’ASFC pourraient aider dans la mesure où l’interaction avec le voyageur est préservée. Une fois de plus, la grande crainte c’est qu’un groupe ou un sous-groupe soit arbitrairement jugé comme présentant un faible risque, et nous n’interagirons simplement jamais avec eux, n’obtiendrons jamais de renseignements de leur part, et ne saurons jamais ce qui se passe à la frontière, ce qui est une pensée terrifiante pour nous.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Vous avez mentionné votre manque de personnel. Les Forces armées canadiennes, la Gendarmerie royale du Canada et plusieurs corps policiers au pays ont de la difficulté à recruter du personnel.

Considérez-vous que les conditions de travail offertes aux agents frontaliers permettent d’attirer des candidats dans vos rangs?

[Traduction]

M. Weber : Le problème auquel fait actuellement face l’ASFC, ce n’est pas un manque d’intérêt pour l’emploi. Il s’agit vraiment d’un manque d’installations pour former assez de recrues en vue d’augmenter ce personnel. Actuellement, nous avons un collège à Rigaud, au Québec, qui forme toutes nos recrues. Si ce collège fonctionne à sa capacité maximale, cela représente moins de 600 recrues par année, ce qui ne couvre pas l’attrition.

Il est question d’ouvrir un deuxième collège, d’augmenter la capacité de Rigaud, ou de trouver une manière d’augmenter ces nombres. Ils n’augmentent jamais même si nous fonctionnons à capacité maximale.

Présentement, la situation est que nous sommes tellement en manque de personnel que les régions sont hésitantes à détacher des formateurs à Rigaud pour former de nouvelles personnes afin d’augmenter ces chiffres, simplement pour vous donner une idée de la pénurie de personnel.

Il s’agit d’une situation critique. On envisage un plan d’action d’été pour nous dans le cadre duquel les congés seront limités, où nous devrons encore faire des heures supplémentaires obligatoires, entre autres.

L’ASFC a demandé à des agents retraités de revenir travailler en vertu de contrats de 90 jours. Tout le monde sur le pont : c’est une situation désespérée pour nous de trouver suffisamment de personnes pour travailler à la frontière en ce moment.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Bienvenue à nos témoins.

Monsieur Weber, mes questions s’adressent à vous. Vous avez fait certaines déclarations qui m’inquiètent beaucoup. D’abord, vous dites que l’information qui sera fournie par le système informatique au moyen des cellulaires ou autres risque de ne pas être contrôlée ou vérifiée par les agents. Donc, vous allez perdre de l’information. Est-ce le cas avec ArriveCAN? Est-ce que l’on perd certaines des informations entrées dans ArriveCAN?

[Traduction]

M. Weber : L’information entrée sur ArriveCAN n’est pas perdue. Elle ne disparaît pas. La préoccupation est que si la personne qui utilise ArriveCAN n’a jamais d’interaction avec un agent, ou si un agent n’est jamais en mesure d’interagir avec elle, il n’y a pas moyen d’utiliser cette information. Une fois que quelqu’un est au Canada, pour ainsi dire, il est déjà trop tard.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Vous dites que des voyageurs pourraient entrer au Canada sans être vus par un douanier. Est-ce bien l’information que vous avez transmise?

[Traduction]

M. Weber : À l’heure actuelle, malheureusement, c’est le cas. Encore une fois, ce que nous avons pu constater, dans la vidéo promotionnelle créée par l’ASFC, c’est exactement ce qu’elle montre. La vidéo montre quelqu’un qui place son téléphone devant un écran à la frontière et continue à rouler, avec un slogan du genre « je n’arrive pas à croire que je viens de traverser la frontière ».

Présentement, pour vous donner une idée des bornes automatisées qui ont été mentionnées plus tôt dans nos aéroports principaux, l’idée qui sous-tendait une borne automatisée était qu’il y aurait des agents mobiles, de telle sorte que, si quelqu’un fait sa déclaration à une borne automatisée alors qu’elle franchit la ligne d’inspection primaire et se rend récupérer ses bagages, il y aurait des agents pour questionner un certain nombre de ces voyageurs. Il y aurait encore certaines interactions. La réalité, c’est que les effectifs sont si faibles que, dans de nombreux cas, il n’y a pas d’agents mobiles. Dans de nombreux aéroports, il arrive souvent que les gens fassent une autodéclaration à une borne, la carte est remise, et ensuite ils partent. Nous n’avons pas vraiment d’interaction avec eux.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : J’ai posé la question suivante au président de l’agence : est-ce que des citoyens qui entrent au Canada auront tous un contact personnel avec un douanier? Il m’a dit que oui. J’essaie de comprendre, vous dites que non, que certaines personnes vont entrer sans être vues, alors que d’autres disent que oui, tous les gens seront vus par un douanier.

Il semble y avoir une contradiction entre la vision des syndicats et celle de l’entreprise.

[Traduction]

M. Weber : Peut-être que cela aiderait les choses si je décrivais le processus étape par étape, par exemple, à l’arrivée dans l’un de nos aéroports principaux. Un voyageur se présente à l’une de nos bornes automatisées.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je connais le processus. Vous dites que des citoyens pourraient entrer au Canada et ce serait une entrée gratuite, ils ne verraient pas de douanier. Lorsque j’ai posé la question au président, il nous a dit que tous les citoyens qui vont revenir au Canada seront vus par un douanier.

Si cela est vrai que des citoyens entrent au Canada sans être vus, c’est inquiétant. Est-ce parce que vous n’avez pas toutes les informations? Est-ce parce que la consultation ne vous a pas permis de tout connaître? J’essaie de comprendre la contradiction entre votre déclaration et celle du président.

[Traduction]

M. Weber : Si vous me permettez, c’est pourquoi j’ai pensé que si j’expliquais le processus en détail, cela répondrait peut-être à la question.

Encore une fois, un voyageur sort d’un avion. Il se rend à une borne automatisée, fait sa déclaration à une machine, et la machine imprime un papier. Lorsqu’il passe, il doit montrer ce papier avec sa pièce d’identité afin que l’on puisse vérifier que c’est bien la personne qui voyage qui a un papier. S’il n’y a pas d’agent mobile en service, le voyageur récupère ses bagages, remet sa carte à la sortie et quitte l’aéroport. Si vous dites que l’interaction est l’agent qui regarde simplement la pièce d’identité et la carte de déclaration, je n’appellerais pas ça une interaction avec un agent. Peut-être que c’est ce que vous voulez dire.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Je n’ai jamais vécu une telle situation. Je ne suis jamais passé dans un aéroport sans voir un agent. Je ne connais pas cette situation.

Merci beaucoup.

[Traduction]

Le sénateur Cardozo : Ma question s’adresse à M. Weber. Vous dites qu’il vous manque environ 2 000 employés. Le site web de l’ASFC précise que vous comptez 6 500 agents en uniforme de l’ASFC. Est-ce le nombre total d’agents que vous avez ou avez-vous besoin de 2 000 agents supplémentaires? Avez-vous besoin de 2 000 autres agents et ensuite vous aurez 6 500 agents ou est-ce que vous avez 6 500 agents moins 2 000 agents présentement?

M. Weber : Oui. Actuellement, il s’agit des chiffres que nous avons obtenus de l’ASFC aussi. Nous estimons que nous avons besoin d’au moins 2 000 à 2 500 agents supplémentaires pour fonctionner à capacité comme nous le devrions.

Le sénateur Cardozo : En faisant des calculs... cela laisse entendre que vous avez 4,5 personnes par poste frontalier. C’est une moyenne. Étant donné que plusieurs d’entre eux auront besoin de beaucoup plus d’employés que ce nombre, certains compteront moins que cinq personnes. Si un poste frontalier est ouvert 24 heures par jour, il s’agit d’un petit effectif pour gérer un poste frontalier.

Actuellement, y a-t-il des points NEXUS, par exemple, qui n’ont pas de gens présents? Je dis cela en me fondant sur ma seule expérience. Je traversais Niagara Falls en voiture, de l’État de New York jusqu’en Ontario, et mon GPS ne cessait de m’emmener au point d’entrée NEXUS, mais je ne détenais pas de carte NEXUS. Le GPS ne me disait pas où se trouvait le poste frontalier régulier, alors je me suis dit que j’allais conduire jusqu’à l’entrée et demander à quelqu’un où se trouvait l’autre endroit. Je n’étais pas un sénateur à l’époque, alors j’ai fait cela avec nettement plus d’appréhension que je ne le ferais aujourd’hui. Toutefois, personne n’était présent. Je ne pouvais apercevoir personne dans mon champ de vision, alors j’ai fini par me promener en voiture dans les environs et trouver mon chemin jusqu’à l’autre endroit.

Existe-t-il actuellement des postes frontaliers où vous n’avez pas de personnes et où tout est effectué par reconnaissance photo ou par une sorte de contrôle vidéo?

M. Weber : Le système NEXUS est un programme destiné aux voyageurs dignes de confiance. Vous devez en faire la demande ou passer un certain contrôle et y être admissible pour bénéficier de ce programme. Il s’agit d’une situation différente de celle lorsque nous parlons à propos des voyages du public en général. On vous accorde un certain degré de confiance en ce qui concerne votre déclaration lorsque vous possédez la carte NEXUS parce que vous avez subi le contrôle à l’avance.

Nous avons effectivement des centres de déclaration par téléphone qui sont complètement à distance, oui. Il existe un permis pour franchir la frontière dans les régions éloignées qui permet à quelqu’un de traverser sans déclaration dans les régions éloignées. Il existe différentes situations, oui.

Le sénateur Cardozo : Mon autre question concerne la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public. Notre chercheur, M. Shapiro, vient de me confirmer qu’un projet de loi qui se trouve devant la Chambre a été adopté en deuxième lecture et vise à créer la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public, laquelle regrouperait les plaintes relatives à l’ASFC et à la GRC.

J’aimerais avoir vos réflexions à ce sujet. Je remarque que notre autre invité, Me Fraser, a quitté, mais je serais intéressé à entendre l’avis de l’Association du Barreau canadien au sujet de la Commission. Maître Fraser, pouvez-vous nous envoyer par courriel vos réflexions à propos d’un projet de loi sur les plaintes qui se trouve actuellement à la Chambre des communes?

Monsieur Weber, avez-vous un commentaire à faire au sujet de ce mécanisme de plaintes qui est actuellement en cours d’examen par la Chambre des communes?

M. Weber : Merci. Je n’en ai pas présentement. Ce n’est pas une question pour laquelle j’ai préparé une réponse ou effectué beaucoup de recherches. Je préférerais avoir l’occasion de fournir une réponse plus complète plus tard si vous me le permettez.

Le sénateur Cardozo : D’accord. Je vous remercie. Je présume, monsieur le président, que le projet de loi nous sera renvoyé si jamais il est adopté par la Chambre. Il est intéressant de souligner qu’actuellement, l’ASFC n’est soumise à aucune forme de contrôle ou de mécanisme de plaintes civil.

Le président : J’en ai bien l’impression. Cette question a déjà été discutée ici auparavant lorsque nous examinions un projet de loi similaire ou du moins qui portait sur le même domaine. Nous ferons un suivi.

Je vais simplement mentionner que si Me Fraser souhaite nous faire parvenir quelque chose par courriel pendant que nous poursuivons la réunion, nous lirons vos commentaires aux fins du compte rendu au fur et à mesure de nos travaux, maître Fraser.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie, maître Fraser et monsieur Weber, de votre présence cet après-midi.

J’ai plusieurs points... je suis préoccupée, et je pense que je vais poser directement une question. J’ai le sentiment que, d’une part, j’entends dire qu’il s’agit d’efficacité et d’utilisation de la technologie et non de RH et de dotation, et, d’autre part, qu’il pourrait s’agit de RH et de dotation et d’organismes. Je tente simplement d’intégrer cela dans quelques questions que je me pose.

J’ai réalisé — j’aurais aimé aborder la question avec le dernier groupe de témoins — que nous discutions de choses comme les télécommunications. Je pense toujours — eh bien, nous pensons tous — à la récente panne de Rogers l’année dernière et aux effets en cascade qui en ont découlé, dont nous continuons d’entendre parler. Si une situation similaire se produisait, qu’arriverait-il à la frontière avec ces systèmes automatisés proposés? Y aurait-il seulement un ou deux agents des services frontaliers pour quelques centaines de personnes qui auraient autrement utilisé les bornes automatisées pour faire leur déclaration? Savez-vous quelque chose à cet égard?

M. Weber : Je pourrais parler de ce qui s’est passé pendant la pandémie de COVID quand nous avons eu à gérer ArriveCAN, alors que l’application était utilisée spécifiquement pour répondre aux questions relatives aux mesures de santé publique. Nous avons des points d’entrée où il n’y a pas de WiFi où les gens ont eu des problèmes. Il y a également eu des gens qui ne savaient tout simplement pas comment utiliser la technologie ou qui ne disposaient pas de téléphones intelligents entre autres. Cela a créé d’importants retards lorsque la situation s’est produite. Je peux vous l’assurer.

La sénatrice M. Deacon : D’accord. Revenons à la dotation, alors. Vous êtes préoccupé par le fait que le niveau d’effectifs à la frontière est loin d’être ce qu’il devrait être, et vous avez également mentionné une pénurie d’endroits où nous pouvons offrir la formation. Vous avez parlé d’un seul endroit pour les nouveaux agents de l’ASFC. Craignez-vous que davantage d’automatisation — puisque nous l’augmentons — ne vienne gruger davantage l’expérience et l’expertise nécessaires à la formation des agents frontaliers à mesure que le temps passe? Voyez-vous cela comme un obstacle plutôt qu’une occasion?

M. Weber : Je crois que c’est possible à long terme. Encore une fois, je pense que chaque fois qu’une personne n’interagit pas avec un agent, on érode quelque peu la sécurité aux frontières. Une fois de plus, si nous créons une sous-classe de voyageurs à faible risque, nous ne savons pas vraiment comment la déterminer.

Notre formation est approfondie. Je crois qu’avec l’expérience de travailler à la frontière et en composant avec des centaines de voyageurs par jour, vous apprenez vraiment ce qu’il faut examiner et ce à quoi un voyage normal ressemble. Je ne suis pas certain que l’IA soit conçue pour être en mesure de faire cela. Là encore, si nous n’avons pas les personnes présentes et que nous mettons en place la technologie, même dans l’éventualité où la technologie ne serait pas utilisée — advenant des problèmes avec le WiFi ou la connectivité — nous n’avons pas vraiment la capacité ni les gens pour faire le travail de manière appropriée ou maintenir le flux d’arrivants aux frontières.

La sénatrice M. Deacon : Je vous remercie de votre réponse. Je dois y réfléchir un peu.

Je suis certaine que vous avez vu notre dernier groupe de témoins, et certaines préoccupations ont été soulevées en ce qui concerne les algorithmes et leur tendance à reproduire les préjudices humains, particulièrement lorsqu’il est question de la race. Nous avons reçu quelques encouragements de la part des fonctionnaires, qui en sont conscients et qui ne permettront pas que cela se produise. Êtes-vous convaincu qu’à notre époque de changement et de croissance technologique, nous serons en mesure d’accomplir cela?

M. Weber : Non je ne le suis pas. Il s’agit d’une préoccupation majeure. C’est en fait quelque chose que j’aurais dû mentionner dans ma déclaration liminaire comme étant l’une des principales préoccupations du syndicat. Pour vous donner un exemple de ce qu’il en est, nous avons organisé une formation conjointe antidiscrimination avec l’ASFC qui a été arbitrairement annulée le 31 mars par l’ASFC. Nous ne savons pas pourquoi. Nous pensons qu’il est important que nos agents continuent d’apprendre et nous nous efforçons de nous assurer qu’absolument tout le monde est traité de la même manière lorsqu’il se présente à la frontière.

Nous avons lu au sujet de certains des préjugés que l’IA véhicule, et nous examinons maintenant les changements législatifs qui permettront son utilisation que nous puissions sans vraiment savoir exactement comment cela va fonctionner, où l’on s’en va et quels préjugés surviendront. Je crois que c’est vraiment trop tôt pour envisager d’apporter ces changements avant d’avoir vraiment travaillé sur cette application et de l’avoir testée correctement.

Le sénateur Boehm : Ma question s’adresse à M. Weber. Nous avons entendu vos inquiétudes, mais en nous penchant sur les problèmes qui découlent de la modernisation — utilisons simplement ce mot pour l’instant — il s’agit de quelque chose de mondial. Les grands pays qui attirent de nombreux voyageurs — que ce soit par voie aérienne, maritime ou terrestre — tentent aussi de se moderniser autant que possible et d’utiliser la technologie pour procéder.

Je réalise qu’en Europe il y a l’espace Schengen, et il y a ceux qui sont hors de l’espace Schengen. Bien entendu, nous sommes étroitement liés aux États-Unis. Je me demande si vous avez eu l’occasion de discuter de vos préoccupations avec d’autres unités de négociation dans d’autres administrations qui pourraient avoir des inquiétudes similaires. Je suis conscient que ce n’est pas tout le monde qui est syndiqué, mais les problèmes sont, de manière générale, les mêmes. Il me semble qu’en discutant ensemble, vous pourriez être en mesure de cerner une voie à suivre.

M. Weber : Je vous remercie. C’est une excellente suggestion, mais nous ne l’avons pas encore fait. Nous n’avons pas discuté avec nos homologues d’autres pays. Je suis sûr qu’un grand nombre de ces questions sont similaires dans le monde entier.

Encore une fois, nous ne sommes pas des dinosaures. La technologie évolue sans cesse, et nous comprenons que nous devons nous adapter. Beaucoup de choses proposées pourraient être utiles. La vraie crainte est qu’elle remplace les agents. L’intelligence artificielle ou un ordinateur peut-il vraiment faire de manière aussi efficace ou rapide ce qu’un agent fait? Je peux vous assurer que non.

La création de cette sous-catégorie de voyageurs est vraiment préoccupante. Nous allons simplement dire qu’ils présentent peu de risque et qu’il n’est pas nécessaire de leur parler; il suffit de présenter son téléphone, et c’est parti. Évidemment, toute personne intéressée par la contrebande n’aura pas besoin de beaucoup de temps pour comprendre exactement comment cela va fonctionner, n’est-ce pas? Nous composons avec cela tout le temps. Nous en voyons tous les jours. Les criminels existent, et il est naïf de penser qu’ils ne sont pas assez intelligents pour comprendre comment contourner ces choses et qu’ils ne sont pas déjà en train de réfléchir à la manière de le faire.

Le sénateur Boehm : Je suis récemment allé à Mexico, et les autorités frontalières mexicaines avaient mis en place un nouveau système pour les voyageurs des pays membres de l’Accord de libre-échange nord-américain, l’ALENA. Ce système était très récent. Je crois que nous l’avons utilisé le deuxième jour où il était en place. En fait, il suffisait de se présenter à la borne, de faire numériser son passeport, et c’était tout. Aucun formulaire à remplir dans l’avion. L’ancien système a disparu, du moins pour les voyageurs de l’ALENA, c’est-à-dire ceux des États-Unis et du Canada qui entrent au Mexique. Lorsque j’ai demandé pourquoi ils faisaient cela, on m’a répondu qu’ils voulaient réduire le personnel. Cela semble être une approche uniformisée.

Vous pouvez présenter des observations à ce sujet, mais je dirais que les choses qui se passent dans le cadre de l’ALENA évoluent probablement très rapidement, de sorte qu’il pourrait être utile de parler à vos homologues américains ou mexicains lorsque vous regardez vers l’avenir.

M. Weber : Merci.

Le sénateur Yussuff : Merci aux deux témoins et merci, monsieur Weber, de votre déclaration liminaire.

J’ai posé la question à votre homologue qui était ici tout à l’heure concernant la réduction de la main-d’œuvre, et la réponse est très évidente. Ce n’est pas l’objectif de cette nouvelle technologie. Je comprends votre inquiétude. Évidemment, le souci est que la technologie a toujours pour effet, avec le temps, d’éroder le nombre de personnes dont vous pourriez avoir besoin lorsqu’elles n’ont pas besoin de faire la même chose.

J’essaie de concilier vos observations avec ce que nous avons entendu plus tôt. Nous sommes susceptibles de ne croire qu’une seule personne, alors qui devrions-nous croire avec les réponses que nous obtenons ici?

M. Weber : Mon rôle ici est de vous présenter des faits et de vous faire part de mon expertise en me fondant sur l’avis de nos membres qui me parlent constamment de ce sujet. Je peux dire que les employés de l’ASFC et les membres du Syndicat des douanes et de l’immigration, le SDI, sont très fiers de leur travail. C’est étrange, nous sommes un syndicat où, souvent, plutôt que d’avoir des problèmes liés aux relations de travail fondamentales telles que ceux qui tiennent aux salaires et avantages sociaux, nous traitons de questions de sécurité. Ce que j’entends de la part du personnel, presque avant les questions de travail, c’est « je veux pouvoir faire mon travail en toute sécurité. Je suis ici pour assurer la sécurité des Canadiens. Nous n’avons pas assez de personnel. Nous n’avons pas la capacité d’effectuer le travail que nous sommes censés faire. » Pour beaucoup de nos membres, c’est leur principale préoccupation, et tant mieux pour eux, je respecte cela. Cela montre le type de personnes qui travaillent à nos frontières.

Si je devais donner une estimation subjective, dans ce cas, je dirais que notre effectif actuel n’est pas en déclin. Je crois que nous sommes en train d’examiner la technologie simplement parce que nous n’arrivons pas à atteindre le nombre que nous devrions avoir en premier lieu. Je ne pense pas qu’il s’agisse nécessairement de perdre le nombre que nous avons actuellement. La réalité est que nous avons besoin de beaucoup plus de personnes pour travailler à la frontière que nous en avons actuellement.

Une autre préoccupation que je peux partager avec vous, que j’entends constamment de la part de mes membres et dont je suis témoin dans mon travail, c’est que mes homologues et les personnes avec lesquelles je travaille à l’ASFC et qui prennent ces décisions n’ont presque jamais travaillé en tant qu’agent. Dans le domaine de l’application de la loi, je peux vous dire que c’est tout à fait unique. Dans d’autres organismes chargés de l’application de la loi, lorsque vous atteignez les échelons supérieurs, vous avez affaire à des personnes qui ont travaillé comme policiers pendant de nombreuses années, qui ont gravi les échelons et qui savent de quoi elles parlent lorsqu’elles arrivent à ce niveau. L’ASFC, quant à elle, semble disposer d’une équipe presque continuellement renouvelée de personnes qu’elle a fait venir de l’extérieur pour tenter de résoudre le problème.

Une situation analogue s’est produite lorsqu’ils ont commencé à installer des bornes automatisées à l’aéroport. Le syndicat leur a dit exactement ce qui allait se passer avec ces bornes, et c’est exactement ce qui nous avions prédit qui s’est produit. Cependant, personne ne veut écouter ceux qui ont déjà travaillé dans un aéroport. Je pense qu’il s’agit d’une lacune fondamentale de la réflexion des autorités.

Je ne dis pas du tout que ce que M. Ommanney a proposé est entièrement une mauvaise idée. Je pense qu’une grande partie de ses idées pourraient être très utiles. Je le félicite d’avoir voyagé dans tout le pays et d’avoir parlé à nos membres pour obtenir leur avis, mais l’avis qu’ils lui donnent presque universellement est le suivant : « Nous avons besoin de beaucoup plus de gens. Nous devrions être deux fois plus nombreux sur ce lieu de travail. Oubliez tout ce qui concerne ArriveCAN. » C’est ce que lui et moi entendons.

Le sénateur Yussuff : Vous conviendrez qu’il y a un certain degré de frustration, comme nous l’avons vu récemment dans les aéroports. Les Canadiens attendent dans les avions, et ne peuvent pas descendre de l’avion, ils ne peuvent pas être traités parce que les files d’attente sont trop longues. Je suis certain que le gouvernement s’efforce de trouver un moyen d’améliorer la situation.

De même, j’apprécie, et c’est plus important, le travail que vos membres accomplissent en ce qui concerne la sécurité du pays. Ils constituent la première ligne de défense de la sécurité du pays, et nous ne voudrions pas que cela soit compromis de quelque manière que ce soit.

Y a-t-il quelque chose que vous puissiez proposer concernant la manière dont le projet de loi a été élaboré pour nous assurer que la sécurité de la nation ne sera pas compromise d’une quelconque manière, étant donné qu’un certain degré de technologie sera mis en œuvre dans un avenir proche qui, de toute évidence, aidera les voyageurs à être traités à la frontière beaucoup plus rapidement? C’est évidemment une préoccupation pour les Canadiens en général. Fait plus important encore, bien sûr, comment équilibrer cette responsabilité?

M. Weber : Je vous remercie. Deux choses me viennent à l’esprit. La décision de renvoyer une personne ou de l’autoriser à entrer doit toujours être prise par un agent. Elle ne peut être laissée à la technologie. C’est un changement que je ne voudrais pas voir se produire.

Par ailleurs, si un agent doit parler à un voyageur pour quelque raison que ce soit, il ne peut s’agir d’une demande dont le voyageur peut simplement faire abstraction. Si l’agent doit s’entretenir avec quelqu’un pour quelque raison que ce soit, il doit s’agir d’une obligation et non d’une demande.

Le sénateur Yussuff : Je vous remercie à nouveau de nous avoir présenté le contexte de ce nouveau processus de mise en œuvre. Merci.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Ma question s’adresse à M. Weber. À ma première question, je vous demandais si vous aviez été consulté et vous avez dit que oui, vous avez été consulté pour les modifications apportées à la loi, mais pas pour le domaine technologique.

Actuellement, il vous manque 2 000 agents des services frontaliers. Est-ce que vous craignez qu’on remplace les agents des services frontaliers par ce que j’appelle des robots? C’est beaucoup moins difficile pour le gouvernement de négocier avec des robots qu’avec un syndicat.

Je suis inquiet parce qu’à plusieurs endroits, on n’aura pas affaire à des agents et on pourra passer sans contacter quelqu’un. À partir de là, je ne pense pas que le gouvernement ou les dirigeants des services frontaliers mettront en place une deuxième école — que j’ai visitée à Rigaud et qui est une très bonne école. Cela dit, j’ai l’impression qu’on va vous remplacer par des robots et cela met en péril les frontières canadiennes.

[Traduction]

M. Weber : Je reprends ces préoccupations. Je m’excuse si mes observations précédentes ont donné lieu à une certaine confusion au sujet de la consultation ou de l’absence de consultation. Pour être clair, il y a eu une consultation concernant le changement technologique. Il n’y a pas eu de consultation sur les modifications à apporter à la loi.

Oui, absolument, c’est inquiétant. Je ne vois pas comment un système informatisé, comme je l’ai dit, un robot ou quoi que ce soit d’autre, pourrait effectuer le travail d’un agent. Je ne pense pas que cela soit remplaçable. On entend des commentaires tels que : « nous gérerons le point d’entrée à distance » et « nous aurons une barrière qui montera ou descendra ». Sans vouloir faire de blague, ce ne sera pas très difficile à contourner, n’est-ce pas? En matière de sécurité, je pense que beaucoup de choses proposées au chapitre de l’automatisation comme une borne dans une épicerie ou une banque relèvent de notre sécurité nationale, de la sécurité de nos communautés. J’ai du mal à considérer certaines de ces analogies comme justes.

[Français]

Le sénateur Dagenais : Merci.

Le sénateur Boisvenu : Je vais joindre ma voix à celle du sénateur Yussuff. Monsieur Weber, on est très reconnaissant du travail que les agents font pour garantir la sécurité à nos frontières. Je trouve quand même inquiétant que le syndicat n’ait pas été plus consulté au sujet des changements qui m’apparaissent fondamentaux sur le plan de la sécurité et du contrôle des voyageurs.

Ma question est relativement simple : comment votre syndicat travaille-t-il avec l’Agence des services frontaliers du Canada lorsque des changements aussi fondamentaux que ceux proposés dans le projet de loi se produisent? Comment travaillez-vous ensemble? J’ai l’impression qu’on est confrontés à deux mondes : celui de l’employeur et celui du syndicat, puis qu’il n’y a pas de communication. Comment travaillez-vous ensemble pour faire en sorte que si la loi est modifiée, ce ne soit pas au prix de la sécurité des voyageurs et de la sécurité du pays et de vos membres, également?

[Traduction]

M. Weber : Je vous remercie de la question. Notre syndicat travaille d’arrache-pied pour s’assurer qu’il y a autant de consultations que possible. Encore une fois, il y a eu des consultations sur certaines avancées technologiques. Il n’y a pas eu de consultation sur les modifications de la Loi sur les douanes qui permettrait à ces changements technologiques de se produire. C’est un défi. C’est une bataille difficile. J’ai décrit ce que nous avons vécu dans le passé lorsque les bornes automatisées ont été mises en place pour la première fois. Il peut être extrêmement frustrant pour notre syndicat et nos membres, des personnes qui ont réellement fait le travail, de présenter ce qui est, pour nous, des préoccupations et des problèmes évidents et de ne pas être entendus par les personnes qui n’ont jamais fait le travail.

Comment travailler ensemble? Encore une fois, je ne pense pas qu’il y ait deux solitudes. Je ne pense pas que tout soit noir et blanc. Je ne pense pas que toutes les technologies sont mauvaises. Je ne pense pas que tout ce qui est proposé est mauvais et inutilisable. Je pense qu’il y a certainement des choses qui le sont. Nous continuerons à travailler avec l’ASFC du mieux que nous pouvons. Cependant, encore une fois, si nous en arrivons au point où des décisions relatives à l’admissibilité sont prises indépendamment d’un agent de l’ASFC, où c’est l’intelligence artificielle, un robot ou quoi que ce soit d’autre qui s’en charge, je pense que notre sécurité frontalière sera grandement compromise.

[Français]

Le sénateur Boisvenu : Merci, monsieur Weber.

[Traduction]

Le sénateur Cardozo : M. Ommanney a parlé d’un certain nombre d’étapes qui seront franchies au cours des prochaines années. Ce projet de loi est-il extraordinaire ou s’agit-il simplement d’une partie de l’automatisation constante de la manière de faire les contrôles aux frontières?

M. Weber : J’ai parlé tout à l’heure de l’alinéa 11(1)b) en particulier. Si l’intention est qu’une personne ne soit jamais autorisée par une personne ou un agent, et que cela puisse être fait entièrement par un ordinateur ou l’intelligence artificielle, alors je pense que les changements apportés à ce projet de loi sont extrêmement préoccupants. Je pense qu’avant toute modification, nous devons être entièrement sûrs que telle n’est pas l’intention.

L’autre partie que j’ai mentionnée dans le paragraphe 11(7) de la Loi est que si les agents ont une raison de parler à un voyageur, le libellé ne peut pas laisser entendre qu’il s’agit d’une demande.

Vous ne pouvez pas soupçonner un voyageur d’essayer d’introduire clandestinement quelque chose qui n’est pas légalement autorisé à entrer au Canada, puis prévoir que l’agent peut simplement formuler une demande, dont l’intéressé peut faire fi ou non. Ce libellé doit absolument être examiné.

Le sénateur Cardozo : En ce qui concerne le travail que l’ASFC effectue avec la GRC aux postes frontaliers, les deux agences sont-elles présentes? La GRC fait-elle certaines choses et en faites-vous d’autres? Comment cela fonctionne-t-il?

M. Weber : Au point d’entrée, c’est nous. Entre les points d’entrée et à l’intérieur du Canada, c’est la GRC qui s’en occupe.

Le sénateur Cardozo : Pouvez-vous répéter?

M. Weber : Au point d’entrée, c’est l’ASFC.

Le sénateur Cardozo : D’accord.

M. Weber : Entre les points d’entrée et à l’intérieur du Canada, c’est la GRC qui est chargée de l’application des lois.

Le sénateur Cardozo : Au point d’entrée, comme à l’aéroport ou à Niagara Falls, c’est l’ASFC qui s’en charge?

M. Weber : Oui, c’est exact.

Le sénateur Cardozo : Je vous remercie. Si Me Fraser a quelque chose à ajouter, je serais intéressé d’entendre ce que l’Association du Barreau canadien a à dire sur ce projet de loi.

Merci, monsieur le président.

Le président : Je vous remercie.

Tout d’abord, je remercie mes collègues pour leurs questions qui, comme d’habitude, ont permis à nos témoins de nous donner le meilleur d’eux-mêmes.

Ceci nous amène à la fin de la rencontre avec le groupe de témoins. Je tiens à remercier nos deux invités, Me Fraser et M. Weber, de leur participation à l’examen du projet de loi. Nous vous sommes reconnaissants pour le temps que vous nous avez consacré et pour votre expertise.

Au nom du comité, je tiens à m’excuser une nouvelle fois auprès de Me Fraser pour les problèmes techniques qui ont limité votre capacité à participer pleinement à notre réunion d’aujourd’hui. La dernière chose que vous avez dite m’a marqué. Je vais la répéter ici. Je me souviens que vous avez dit que vous mettriez grandement l’accent sur la protection des renseignements personnels, quelle que soit la technologie déployée. Cela devrait faire l’objet d’une évaluation des répercussions sur la vie privée, qu’elle devrait être soumise — dans la mesure du possible — à un examen indépendant. J’ai été choqué du fait que cela allait vraiment au cœur de vos observations.

Nous vous invitons à nous soumettre toute information complémentaire. Nous la ferons traduire et la transmettrons rapidement à nos collègues.

Mesdames et messieurs, avec votre accord, nous allons procéder à la discussion à huis clos sur les informations que nous avons entendues aujourd’hui. Si tout le monde est d’accord — il semble que vous le soyez — nous suspendrons brièvement la séance pour préparer ce qui sera, je l’espère, une brève discussion.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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