Aller au contenu
SOCI - Comité permanent

Affaires sociales, sciences et technologie


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le jeudi 11 mai 2023

Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie se réunit aujourd’hui, à 11 h 32 (HE), avec vidéoconférence, afin d’examiner la teneur des éléments des sections 8, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 25, 27, 28, 29, 35 et 38 de la partie 4 du projet de loi C-47, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023; et à huis clos, pour l’étude d’un projet d’ordre du jour (travaux futurs).

La sénatrice Ratna Omidvar (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Je déclare ouverte cette séance du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. J’aimerais d’abord souhaiter la bienvenue aux membres du comité, aux témoins, ainsi qu’aux membres du public qui nous regardent. Je m’appelle Ratna Omidvar. Je suis une sénatrice de l’Ontario et je préside ce comité.

J’aimerais d’abord faire un tour de table afin d’inviter les sénateurs à se présenter, en commençant par la vice-présidente du comité.

La sénatrice Bovey : Patricia Bovey, du Manitoba.

La sénatrice Seidman : Judith Seidman, de Montréal, au Québec.

[Français]

La sénatrice Mégie : Marie-Françoise Mégie, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Bernard : Wanda Thomas Bernard, de la Nouvelle-Écosse.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Chantal Petitclerc, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Kutcher : Stan Kutcher, de la Nouvelle-Écosse.

La sénatrice Moodie : Rosemary Moodie, de Toronto, en Ontario.

La sénatrice Burey : Sharon Burey, de l’Ontario.

La sénatrice Osler : Gigi Osler, du Manitoba.

La sénatrice McPhedran : Marilou McPhedran, du Manitoba.

La présidente : Aujourd’hui, notre comité entame l’étude de la teneur des sections du projet de loi C-47, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023, qui ont été renvoyées au comité le 27 avril 2023.

En tout, 14 sections du projet de loi ont été renvoyées au comité. Nous devons présenter un rapport d’ici le 2 juin, ce qui signifie que nous avons beaucoup de contenu à examiner en peu de temps.

Je tiens à rappeler aux sénateurs que, dans le rapport, le comité peut formuler des observations sur les sections qui nous ont été renvoyées par le comité sénatorial des finances. Nous prévoirons du temps à la fin de chaque réunion afin de discuter de nos observations au fur et à mesure. Notre analyste pourra ainsi produire un rapport préliminaire, que nous aurons l’occasion d’examiner lorsque nous aurons fini d’étudier toutes les sections.

Notre premier groupe de témoins se concentrera sur la section 27, qui prévoit des modifications à la Loi sur les aliments et drogues dans le domaine des produits de santé naturels.

Aujourd’hui, nous accueillons sur place M. Aaron Skelton, président et chef de la direction de l’Association canadienne des aliments de santé, ainsi que M. Barry Power, rédacteur en chef et pharmacien en chef par intérim de l’Association des pharmaciens du Canada. Merci à vous deux d’être ici aujourd’hui.

Avant de commencer, j’aimerais demander aux membres du comité et aux témoins de ne pas vous pencher trop près du microphone pour parler. Si vous devez vous en approcher, veuillez d’abord retirer votre écouteur afin d’éviter les risques de rétroaction acoustique pouvant causer des problèmes au personnel du comité.

Je rappelle aux témoins que les organisations ont droit à cinq minutes chacune pour présenter leurs déclarations préliminaires. Les sénateurs pourront ensuite leur poser des questions.

Monsieur Skelton, je vous cède maintenant la parole.

Aaron Skelton, président et chef de la direction, Association canadienne des aliments de santé : Merci à vous, madame la présidente, et merci aux membres du comité de m’accueillir ici aujourd’hui. Je suis heureux d’avoir l’occasion de vous faire part de mes observations. Je m’appelle Aaron Skelton et je suis le président et le chef de la direction de l’Association canadienne des aliments de santé.

Depuis près de 60 ans, l’Association canadienne des aliments de santé travaille en collaboration avec Santé Canada afin de représenter les acteurs de l’industrie des produits naturels, biologiques et de bien-être. Les produits de santé naturels sont importants pour les Canadiens et pour l’économie canadienne. En effet, près de 71 % des Canadiens consomment de manière proactive des produits de santé naturels, tels que des vitamines et des suppléments. Il est primordial d’offrir à la population un accès à des produits sécuritaires, efficaces et réglementés.

L’industrie des produits de santé naturels occupe une place importante dans l’économie canadienne. Surtout composée de petites et moyennes entreprises, l’industrie emploie directement quelque 55 000 Canadiens et contribue pour 11,3 milliards de dollars au PIB du pays. On trouve des fabricants, des grossistes, des importateurs et des détaillants de produits de santé naturels dans presque toutes les circonscriptions d’un bout à l’autre du pays. Ces entreprises paient des impôts et fournissent des emplois, contribuant ainsi à l’essor des communautés.

Je suis ici aujourd’hui pour parler de la Loi visant à protéger les Canadiens contre les drogues dangereuses, aussi connue sous le nom de Loi de Vanessa. L’annexe 3 du budget prévoit de modifier la Loi sur les aliments et drogues afin d’assujettir les produits de santé naturels à la Loi de Vanessa. Cette modification a été une surprise pour notre association ainsi que pour l’industrie dans son ensemble.

À l’origine, la loi a été conçue pour encadrer les médicaments pharmaceutiques. Elle s’applique aux produits thérapeutiques, y compris les médicaments délivrés avec ou sans ordonnance, les vaccins, les thérapies géniques, les appareils médicaux, ainsi que les thérapies touchant les cellules, les tissus et les organes. La Loi de Vanessa ne s’applique pas, pour l’instant, aux produits de santé naturels ni aux produits cosmétiques.

Bien que l’Association canadienne des aliments de santé applaudisse la volonté de protéger les Canadiens contre les médicaments non sécuritaires, nous ne pouvons pas appuyer les modifications proposées à la partie 4, section 27 du projet de loi C-47. Nous demandons donc à ce que cette section soit retirée du projet de loi. Nous nous attendons à ce que le gouvernement fasse preuve de transparence en procédant à des consultations exhaustives, mais les événements récents ont miné notre confiance envers le processus.

Dès le départ, la procédure ayant mené à cette modification comportait des lacunes. En 2014, le comité permanent de la santé a débattu précisément de cette question et a décidé que les produits de santé naturels ne seraient pas assujettis aux pouvoirs conférés par la Loi de Vanessa. Le comité a plutôt proposé un « cadre d’autosoins » pour régir les produits à faible risque.

Or, près de 10 ans plus tard, ces travaux n’étant toujours pas achevés, c’est une industrie marquée par la frustration qui se présente à vous aujourd’hui. Il semble que l’engagement de 2014 pour la création du cadre d’autosoins se soit volatilisé. Plutôt que d’adopter un cadre spécial pour les produits à faible risque, Santé Canada a opté pour une approche fragmentaire qui nuit à l’industrie, à la population et, au bout du compte, aux responsables de la réglementation.

Nous avons mis en place un système de classe mondiale au Canada, mais nous ne pouvons en dire autant de la façon dont ce système est appliqué. Santé Canada possède d’importants pouvoirs pour faire appliquer les règles actuelles. Le ministère peut, par exemple, exiger la déclaration des effets indésirables, faire modifier une étiquette lorsque la sécurité d’un produit est remise en question, effectuer des saisies, exiger l’arrêt de la vente d’un produit, ou encore annuler ou suspendre un permis. Le problème est que Santé Canada continue d’ajouter de nouveaux règlements, mais n’applique pas adéquatement ceux qui existent déjà.

Plus précisément, il n’y a pas eu de véritables consultations menées auprès de l’industrie avant de décider d’étendre les pouvoirs conférés par cette loi aux produits de santé naturels. Or, faute de consultations, nous ne connaissons pas l’étendue de ces pouvoirs, dans quelle mesure ils seront utilisés ni quels sont les risques d’abus dans leur application. Bref, nous ne connaissons même pas l’étendue de ce que nous ignorons.

Cela dit, ce n’est pas le seul cas où notre industrie a souffert de consultations déficientes. En effet, de nouveaux règlements sur l’étiquetage ont été adoptés il y a moins d’un an. Ces modifications réglementaires sont les plus coûteuses jamais imposées à notre industrie. Pourtant, les consultations sur ces modifications ont été menées parallèlement avec deux autres processus de consultation, en plein été, avec des délais extrêmement serrés. Malheureusement, nos préoccupations touchant l’étiquetage électronique moderne et les petites entreprises ont été tout simplement ignorées.

Qui plus est, en plus de ces initiatives, le ministère a signalé son intention de mettre en place, d’ici deux ans, une structure de frais afin de couvrir ses coûts. Cette nouvelle structure aura des répercussions sur l’ensemble de l’industrie et sur les entreprises canadiennes. Pourtant, il n’y a toujours pas eu de consultations sur les coûts associés ni sur la méthodologie retenue.

Je tiens à clarifier un point. En tant qu’industrie, nous continuons d’appuyer l’adoption de règlements et de lois visant à protéger la population canadienne, dans la mesure où ces mesures législatives sont conçues et adoptées de manière transparente, responsable et adéquate.

Nous demandons aujourd’hui au comité de supprimer la section 27 de la partie 4 de ce projet de loi. Le Sénat a déjà amendé le budget en 2017, alors nous vous prions d’envisager de refaire la même chose cette fois aussi. Il ne faut pas assujettir les produits de santé naturels à cette loi tant que le processus de consultation et de communication n’aura pas été adéquatement effectué en vue de créer un cadre d’autosoins pour les produits à faible risque. Voilà ce à quoi l’industrie et la population s’attendent. Voilà ce qu’ils méritent.

Je vous remercie encore une fois de votre temps. Je serai heureux de répondre à toutes vos questions à ce sujet.

La présidente : Merci, monsieur Skelton. Monsieur Power, c’est à votre tour.

Barry Power, rédacteur en chef et pharmacien en chef par intérim, Association des pharmaciens du Canada : Bonjour à tous et merci, madame la présidente, de nous avoir invités à présenter nos points de vue sur les dispositions du budget qui portent sur la Loi sur les aliments et drogues, plus précisément sur l’inclusion des produits de santé naturels parmi les produits visés par les mesures de sécurité qui s’appliquent actuellement aux autres types de médicaments avec ou sans ordonnance.

Notre association, qui représente les 45 000 pharmacies du Canada, possède une compréhension unique des médicaments, qu’ils soient vendus sur ordonnance, sans ordonnance ou sous forme de produits de santé naturels. En tant que plus importante source d’informations sur les médicaments au Canada, notre association cherche également à aider les pharmaciens et les autres professionnels de la santé à comprendre quand et comment employer correctement un large éventail de médicaments, dans le but ultime de mieux conseiller les patients.

L’Association des pharmaciens du Canada appuie fermement la Loi de Vanessa depuis son adoption en 2014. Or, à cette époque, nous avons exprimé des préoccupations sur le fait que les produits de santé naturels étaient exclus du projet de loi. Nous sommes heureux de constater que cette question est maintenant revenue à l’ordre du jour.

Les produits de santé naturels forment une catégorie de produits utilisés à grande échelle et vendus dans les pharmacies et dans de nombreux autres commerces. Bien que les produits de santé naturels soient souvent perçus comme présentant de faibles risques pour la santé, il est important de se rappeler que « faibles risques » n’est pas synonyme d’« aucun risque », et que « naturel » ne signifie pas « sans danger ». Les produits de santé naturels peuvent causer des préjudices. Compte tenu de leur utilisation à grande échelle, nous sommes heureux de constater que de nouvelles dispositions réglementaires sont proposées pour aider à protéger la santé et la sécurité des Canadiens.

Le profil de risque des produits de santé naturels n’est toutefois pas le seul aspect qui soit abordé ici. Il semble en effet que les dispositions proposées prévoiraient des pouvoirs additionnels pour exiger un rappel lorsqu’un produit s’avère dangereux, par exemple en cas de contamination, ce qui s’est déjà vu par le passé avec d’autres médicaments ou avec des produits de santé naturels.

Les dispositions feraient également en sorte que des changements à l’étiquetage puissent être apportés plus rapidement lorsque des facteurs de risque précis sont cernés. À ce sujet, un rapport publié en 2021 par un vérificateur indépendant a révélé que sur 75 produits homologués pour la vente sur des sites Web canadiens, 56 % des produits commercialisés affichaient des étiquettes présentant des renseignements trompeurs, comme des allégations santé non autorisées, des directives de dosage inexactes ou des listes d’ingrédients incomplètes.

Bien que nous reconnaissions les avantages potentiels d’un grand nombre de produits de santé naturels, nous croyons également que la surveillance post-commercialisation est essentielle pour garantir que tous les médicaments et produits de santé répondent aux normes élevées auxquelles les Canadiens s’attendent. En élargissant la portée de certaines dispositions de la Loi sur les aliments et drogues afin d’y inclure les produits de santé naturels, nous pouvons nous assurer que les professionnels de la santé et les patients ont accès à des renseignements de qualité, qu’ils peuvent prendre des décisions éclairées au sujet de leur santé, et qu’ils comprennent bien les risques associés aux produits consommés.

Nous sommes heureux de collaborer avec le gouvernement pour assurer la bonne mise en œuvre de cet important projet de loi. Nous encourageons fortement les responsables gouvernementaux à consulter toutes les parties intéressées aussitôt que possible et de façon continue lorsqu’ils envisageront l’adoption de nouvelles modifications réglementaires.

Je vous remercie de votre temps et je suis impatient de répondre à vos questions.

La présidente : Merci beaucoup, monsieur Power. Nous allons maintenant passer aux questions.

Je vous rappelle, sénateurs, que vous disposez de quatre minutes pour votre période de questions, ce qui comprend les réponses. Je demande aux témoins d’essayer de répondre de manière succincte. Si vous le souhaitez, vous pourrez nous soumettre des réponses supplémentaires par écrit après notre réunion. Chers collègues, veuillez indiquer si votre question s’adresse à l’un des témoins ou aux deux, et si elle s’adresse aux deux, indiquez qui doit commencer.

Nous avons une longue liste de questions. Je vais commencer.

C’est pour vous deux. La Loi de Vanessa a été adoptée en 2014, il y a presque 10 ans. Pouvez-vous nous dire comment le comportement des consommateurs à l’égard des produits de santé naturels a évolué au cours de cette période?

M. Skelton : Au cours de cette période, sous l’effet de certaines forces macroéconomiques, telles que la pandémie, de plus en plus de Canadiens ont cherché à prendre le contrôle de leurs soins de santé, à prendre des décisions eux-mêmes et à utiliser les produits qu’ils jugent les mieux adaptés à leur état. En fin de compte, c’est un choix que nous encourageons, et de plus en plus de Canadiens considèrent cette catégorie de produits comme un outil leur permettant de gérer leurs soins de santé.

M. Power : Je reconnais que le nombre de personnes utilisant des produits de santé naturels a probablement augmenté au cours de la dernière décennie. Certains des changements apportés en collaboration avec la Direction des produits de santé naturels, par exemple, ont permis aux consommateurs d’obtenir de meilleurs renseignements. Dans les pharmacies, on nous demande souvent comment utiliser les produits de santé naturels. Il y a beaucoup de renseignements divergents; il y a beaucoup de renseignements sur Internet qui peuvent aller bien au-delà de ce qui est autorisé par la Direction des produits de santé naturels.

Il est donc très important de donner des éclaircissements et de fournir autant de renseignements que possible aux consommateurs.

La présidente : Je vous remercie. Monsieur Power, vous dites que cette modification du règlement arrive juste à temps, et selon vous, monsieur Skelton, c’est trop tôt.

M. Skelton : Oui.

Je précise que les pouvoirs conférés par la Loi de Vanessa ne répondraient pas aux questions que M. Power a soulevées et qui me semblent valables. L’éducation et l’application de la loi ne sont pas nécessairement améliorées par l’inclusion des produits de santé naturels dans la Loi de Vanessa, et je pense que c’est la raison pour laquelle l’étude et le débat ont été gravement négligés dans ce processus.

La présidente : Je vous remercie. La question suivante vient de la vice-présidente du comité.

La sénatrice Bovey : Je tiens à vous remercier tous les deux. Mes questions sont en quelque sorte aussi des commentaires. J’en ai deux.

Premièrement, nous vivons à l’ère de la désinformation, semble-t-il, et nous devons corriger la désinformation partout, sans trop savoir comment. Monsieur Power, pensez-vous que ce règlement contribuera à éliminer la désinformation sur certains de ces produits?

Je m’inquiète de voir mes amis, et surtout de la nouvelle génération, utiliser des produits parce qu’ils les ont vus à la télévision. Je suis préoccupée par la quantité de publicité qui passe à la télévision, et je ne sais pas quoi croire. Je possède un certain nombre de connaissances, mais je n’ai certainement pas de connaissances dans ce domaine. Je me demande si vous pourriez parler un peu de la désinformation.

Monsieur Skelton, pensez-vous que cet élément ne devrait pas figurer dans le projet de loi? En d’autres termes, ce projet de loi est-il trop omnibus et ces questions devraient-elles être traitées ailleurs? C’est mon point de vue.

M. Power d’abord.

M. Skelton : Je peux répondre à la première question. Je pense que les programmes d’éducation et les efforts de Santé Canada et des associations sont essentiels. Nous ne voyons pas le lien entre la transmission des pouvoirs prévus par la Loi de Vanessa et l’amélioration de la situation dont vous parlez, mais nous estimons qu’il est nécessaire d’améliorer et d’étendre les programmes d’éducation. C’est une chose à l’égard de laquelle nous nous sommes engagés en tant qu’association. Nous croyons fermement à l’importance de la sécurité des Canadiens, mais l’utilisation des pouvoirs prévus par la Loi de Vanessa ne corrigerait pas cela.

Pouvez-vous répéter la deuxième question?

La sénatrice Bovey : Je me demande s’il s’agit d’un projet de loi omnibus. J’aimerais toutefois également entendre M. Power sur la désinformation, si vous me le permettez.

M. Power : Je conviens que la Loi de Vanessa ne corrigerait pas les renseignements erronés accessibles au public. Nous vivons dans une société mondialisée où une grande partie des renseignements que les gens obtiennent sur leurs soins de santé, qu’il s’agisse de produits de santé naturels ou de produits sur ordonnance, provient d’Internet. Toute personne travaillant dans le secteur de la santé a déjà été contactée par un patient qui lui a dit avoir fait une recherche sur Google à propos de quelque chose. Tout le monde en est bien conscient.

L’avantage de la déclaration obligatoire des effets indésirables est qu’elle contribuera à augmenter la quantité de données probantes crédibles accessibles au Canada, comme c’est le cas pour les médicaments sur ordonnance. Les professionnels de la santé reçoivent souvent de Santé Canada des résumés de résultats probants de recherches, qui clarifient des questions relatives à des effets secondaires rares. Nous ne pouvons pas trouver tous les effets secondaires rares des médicaments tant que ceux-ci ne sont pas largement utilisés, et nous avons un système de production de rapports qui alimente les systèmes que nous avons.

Il est essentiel que nous disposions d’un système comparable pour tous les médicaments ou produits que les gens utilisent pour leur santé.

M. Skelton : J’ai juste une réponse rapide à donner. Je pense que les pouvoirs accrus conférés par la Loi de Vanessa ne modifient réellement que la déclaration obligatoire en milieu hospitalier. La déclaration est donc obligatoire.

La sénatrice Seidman : Merci à vous deux pour vos exposés. Je dois commencer par dire qu’en 2014, j’ai siégé à la table en tant que membre du Comité des affaires sociales, mais aussi en tant que promotrice de la Loi de Vanessa au Sénat. J’arrive donc avec un état d’esprit particulier sur ce sujet. Je me souviens de la conversation sur l’inclusion des produits de santé naturels dans le projet de loi, qui a été animée, si l’on peut dire, en raison des nombreuses opinions autour de la table. En fin de compte, le gouvernement a décidé de ne pas les inclure, mais de poursuivre l’étude de la question.

Enfin, nous sommes arrivés. Je pense que la surveillance après la mise sur le marché et le contrôle de la sécurité des produits de santé naturels sont urgents. Le terme même, « produits de santé naturels », véhicule déjà auprès du public une certaine perception dont il faut peut-être se méfier.

Je suis sûre que vous connaissez l’audit mené par le commissaire à l’environnement, auquel M. Power a fait référence. Le rapport sur les produits de santé naturels a été publié en 2021, et les auditeurs ont « constaté que pour 88 % de ces produits, les publicités présentaient des renseignements trompeurs », notamment ce qui suit :

 — des allégations santé non autorisées par Santé Canada parce qu’elles pourraient ne pas avoir été prouvées, notamment des allégations selon lesquelles le produit aiderait à soulager la fatigue, à accroître l’endurance ou à brûler les graisses;

 — un énoncé erroné selon lequel le produit était recommandé pour les enfants de 3 ans et plus, alors que le produit avait en fait été autorisé uniquement pour les adolescents et les adultes;

ainsi que « le mauvais dosage des ingrédients médicinaux ».

Le rapport a également révélé que même si les « titulaires de licence de mise en marché de produits de santé naturels sont tenus de signaler au ministère dans quels établissements titulaires d’une licence d’exploitation leurs produits sont fabriqués avant de les vendre », moins de 5 % des titulaires d’une licence active le faisaient. Voici un extrait du rapport du commissaire : « [On a] constaté un niveau élevé de non-conformité au sein de l’industrie relativement à la fabrication des produits et à leur qualité. »

En examinant les résultats des tests de 35 entreprises, Santé Canada a relevé des problèmes dans tous les établissements, notamment le recours à des matières premières périmées, la présence de quantités inacceptables de contaminants et des analyses qui ne confirmaient pas la date d’expiration du produit.

Tout cela m’amène à vous demander, monsieur Skelton, comment il se fait que nous ne puissions pas avoir une surveillance après la mise en marché des produits de santé naturels.

M. Skelton : Sénatrice, merci de votre question. En ce qui concerne le rapport, je pense que ce qui est essentiel, c’est le cadre dans lequel il a été rédigé. Il s’agissait à la fois de produits autorisés et non autorisés, réglementés et non réglementés. L’Association canadienne des aliments de santé convient que des améliorations sont nécessaires à la gestion de ces produits. Je tiens cependant à préciser que la Loi de Vanessa n’y remédiera pas. Le problème en est un d’application. Malheureusement, le contenu de ce budget ne le résoudra pas. Compte tenu de l’ampleur des défis mis en évidence dans le rapport, il aurait été prudent de procéder à un examen plus poussé de la meilleure façon de les relever. Ce n’est pas ce qui s’est passé.

Pour ce qui est du point de vue que vous avez exprimé, en 2014, il y a eu un débat approfondi. Ce débat n’a pas eu lieu cette fois-ci. Près de 10 ans après sa décision, le ministère n’a pas communiqué sur les défis à relever ni la meilleure façon de les surmonter.

Je précise que l’association n’est pas contre un examen visant à trouver la meilleure solution. Ce qui nous préoccupe, c’est l’absence d’examen et d’engagement à l’égard d’une discussion et d’un débat appropriés.

La sénatrice Osler : Merci aux témoins d’être venus ici aujourd’hui. Je souligne que Santé Canada a indiqué que la mobilisation et la consultation des intervenants sont en cours depuis 2016. J’ai une question pour chacun d’entre vous, et la première s’adresse à M. Skelton.

Dans la note d’information que vous avez envoyée au comité, vous avez signalé :

Des discussions doivent encore avoir lieu sur le cadre plus large de la réglementation des produits d’autosoins et la question visant à déterminer si les pouvoirs extrêmes conférés par la Loi de Vanessa concernant les médicaments sur ordonnance sont appropriés pour les produits à faible risque.

Ma question, monsieur Skelton, est la suivante : pourriez-vous avoir l’amabilité de préciser quelles mesures et exigences de la Loi de Vanessa vous semblent inappropriées pour la réglementation des produits de santé naturels et pourquoi?

Et pour M. Power, pourriez-vous nous dire quelles mesures et exigences qui ne sont pas prévues dans la Loi de Vanessa seraient appropriées pour la réglementation des produits de santé naturels?

M. Skelton : Merci, sénatrice, de votre question. La position de l’association porte moins sur ce qui est inclus ou exclu que sur l’absence d’étude et de débat appropriés.

Comme je l’ai mentionné dans ma déclaration d’ouverture, nous ne savons pas ce que nous ne savons pas. En l’absence d’une enquête et d’un examen appropriés mettant à contribution tous les intervenants, je soulignerai qu’en ce qui a trait à la Loi de Vanessa, le changement le plus important concernerait la déclaration obligatoire des effets indésirables par les hôpitaux. Ce secteur n’a pas non plus été associé à la discussion. Il est difficile pour nous de s’exprimer sur des questions précises alors que nous n’avons pas participé à la discussion sur les raisons de cette déclaration obligatoire.

M. Power : Je vous remercie de votre question. M. Skelton a raison. L’exigence de la Loi de Vanessa concerne les établissements de soins de santé et ne s’applique donc pas nécessairement à la société de consommation au sens large, en dehors de ces établissements. Je pense que c’est une mesure nécessaire, peut-être pas dans la législation, mais dans un programme d’éducation qui souligne à quel point il est important pour les gens de signaler les effets indésirables qu’ils ressentent. Les consommateurs ont la possibilité de signaler les effets indésirables des médicaments délivrés sur ordonnance et des vaccins, et les gens doivent savoir qu’une demande similaire peut être faite lorsqu’ils utilisent des produits de santé naturels. Je pense que c’est ainsi que nous obtiendrons la masse critique de renseignements dont nous avons vraiment besoin pour mieux informer tous les acteurs du système de santé, qu’il s’agisse des patients ou des professionnels de la santé.

Le sénateur Kutcher : Je remercie les témoins de leur présence. Mes questions s’adresseront à M. Skelton, mais je veux les inscrire dans un cadre. Je veux juste m’assurer que nous traversons le brouillard, comme un bon habitant des Maritimes.

Ce projet de loi porte sur l’amélioration de la sécurité des produits de santé naturels et non sur l’éducation à leur sujet. Il s’agit de deux questions distinctes.

Ce projet de loi arrive à point nommé. La Cambridge Health Alliance et le journal JAMA viennent de publier une étude sur la mélatonine. Aux États-Unis, les appels dans des centres antipoison liés à des oursons en gelée contenant de la mélatonine ont augmenté de 530 % au cours de la dernière décennie. Il s’agit d’une augmentation considérable et très inquiétante. Les chercheurs ont étudié 25 préparations différentes de mélatonine et ont découvert un autre problème déconcertant : la dose indiquée sur l’étiquette ne correspondait pas à la dose contenue dans le produit. En fait, une des 25 préparations étudiées ne contenait aucune trace de mélatonine. La plupart des préparations en contenaient beaucoup plus, d’où les appels dans des centres antipoison, et seuls trois d’entre elles avaient une dose se situant à 10 % près de la valeur indiquée sur l’étiquette, pour une fourchette de variation de 20 %. Nous avons donc un énorme problème. Je ne vais pas m’étendre sur toutes les recherches, un domaine que je connais bien par ailleurs.

L’objet du projet de loi est d’améliorer la sécurité des produits naturels. Monsieur Skelton, devons-nous comprendre que votre industrie est opposée à l’idée d’aider à garantir que les produits de santé naturels sont sûrs et efficaces et que l’étiquetage est correct? Et devons-nous comprendre que les intérêts de votre industrie devraient l’emporter sur la santé des Canadiens?

M. Skelton : Merci, sénateur, de la question. La priorité de l’association est la sécurité, l’efficacité et la qualité des produits accessibles aux Canadiens. Pour ce faire, le Canada dispose d’un régime réglementaire de premier plan. Tous les produits mis sur le marché au Canada doivent être homologués par Santé Canada, qui a la possibilité d’examiner tous les renseignements sur les risques, les contre-indications et les effets indésirables qui lui sont soumis. Le ministère a la possibilité de demander des données scientifiques supplémentaires, ce qu’il fait souvent, s’il estime ne pas disposer de données suffisantes pour valider la sécurité d’un produit. Ce sont les pratiques en vigueur dans le régime actuel.

Santé Canada dispose également de pouvoirs étendus lui permettant de saisir des produits, de mettre fin à la vente de produits, de retirer des licences de fabrication et des licences de vente de produits, ce qui empêche effectivement les Canadiens d’avoir accès à ces produits. Nous soutenons fermement cette intention. Il est tout à fait possible que d’autres mesures doivent être prises, mais il s’agit d’une mesure tellement globale et importante que nous pensons qu’il est inapproprié de l’adopter sans un débat et un examen approfondis. Oui, nous soutenons le projet de loi, et oui, nous pensons qu’il est important.

Le sénateur Kutcher : Ce que je vous ai entendu dire, c’est que vous êtes en faveur d’un étiquetage sûr, efficace et approprié, alors je ne vois pas pourquoi vous avez un problème avec le projet de loi, honnêtement.

M. Skelton : Je crois que ce qui nous préoccupe, c’est que les pouvoirs dont il est question n’ont pas été examinés ni débattus. Le risque d’excès et de réglementation inutile est important et mérite d’être débattu.

Le sénateur Kutcher : Les profits ne doivent pas se faire aux dépens de la santé des Canadiens.

La sénatrice Moodie : Les commentaires qui ont déjà été faits nous indiquent que les Canadiens cherchent à mieux contrôler leurs soins de santé et se tournent vers les produits de santé naturels pour y arriver. Nous entendons également parler d’un environnement dans lequel, comme le souligne le rapport du commissaire, il y a un niveau élevé de non-conformité — allant du dosage à d’autres renseignements erronés sur les produits.

Pour ce qui est de la nécessité éventuelle d’une surveillance renforcée après la mise en marché, j’aimerais poser deux questions à M. Power. Ce projet de loi va-t-il assez loin pour mettre en place un cadre réglementaire visant les produits de santé naturels?

La deuxième question est la suivante : pourquoi ne pas inscrire ce cadre dans le projet de loi? Devrions-nous déterminer où la Loi de Vanessa sur les produits de santé naturels s’applique à l’heure actuelle? S’agit-il uniquement des établissements hospitaliers?

M. Power : Merci de votre question. En ce qui concerne le cadre, comme je l’ai mentionné précédemment, plus nous recevons de rapports, meilleurs sont les renseignements dont nous disposons. Je pense que la Loi de Vanessa était initialement axée sur le milieu hospitalier pour lancer le processus et le rendre obligatoire. Si nous commençons à l’étendre aux établissements de proximité, nous devrons discuter du temps nécessaire à la production des rapports, des personnes qui les produiront et des conséquences d’une absence de rapport. Il y a donc une forte incidence liée au fait d’étendre le système au-delà du cadre institutionnel.

Je suis désolé, pouvez-vous répéter la première partie?

La sénatrice Moodie : Le projet de loi va-t-il assez loin pour mettre en place un cadre réglementaire visant les produits de santé naturels?

M. Power : Il existe une loi distincte pour les produits de santé naturels qui régit l’étiquetage, la production, etc. Je ne sais pas si la Loi de Vanessa est nécessairement le bon véhicule pour le faire. Il serait préférable d’aborder la question par l’entremise de la loi qui s’applique de manière spécifique à ces produits.

La sénatrice Moodie : Monsieur Skelton, la question que je voudrais vous poser est la suivante : pourriez-vous cerner des risques pour les consommateurs dans le cadre du régime réglementaire actuel?

M. Skelton : Non. Je pense que nous disposons aujourd’hui d’un régime réglementaire très solide. Santé Canada dispose de pouvoirs et d’outils étendus pour limiter les produits mis sur le marché. La principale préoccupation qui a été soulevée — et que nous soutiendrions — concerne l’application des règlements existants. Nous disposons de bons outils. Nous devons les utiliser. Il n’est pas approprié de mettre en place des outils supplémentaires, sans consultation et par l’entremise d’un projet de loi omnibus.

Je voudrais ajouter au commentaire précédent en disant qu’il existe une déclaration obligatoire des effets indésirables des produits de santé naturels pour l’industrie. Ce système existe depuis plus de 70 ans. La déclaration obligatoire existe en dehors du milieu hospitalier; la déclaration est obligatoire pour l’industrie.

La sénatrice Moodie : Pensez-vous qu’un projet de loi exigeant l’attention des gens changera cela?

M. Skelton : Je ne sais pas si l’application de la loi serait affectée par les rapports, non. Je pense que les outils existent et qu’il suffit de les utiliser.

La présidente : Merci.

[Français]

La sénatrice Mégie : Je vais à la base. J’ai été médecin de famille. Je recevais des patients qui venaient avec un sac de produits et qui préféraient prendre ces produits en disant : « C’est naturel, docteur, vos produits me rendent encore plus malade. » En fait, il y a différents types de dénominations, c’est‑à-dire les aliments de santé, les produits de santé naturels... Qu’est-ce qui les différencie par rapport à la production et à leur rôle thérapeutique? Il s’agit de la santé de la population. La population doit être au courant de ce qu’elle prend. Quand on parle d’un « aliment naturel », les gens se disent : « Ah, c’est naturel, docteur, je le prends. » Un produit de santé naturel? « Ah, c’est naturel aussi, je le prends. » Qu’est-ce qui est naturel là-dedans et qu’est-ce qui différencie les deux?

Même quand on va étudier le sujet dans le projet de loi, quelle est la préséance de l’un par rapport à l’autre? Je vous pose la question à vous deux. Monsieur Power, comme pharmacien, je suis sûre que vous avez toujours les mêmes demandes dans votre pharmacie et monsieur Skelton, si vous avez une idée des éléments qui les différencie, j’aimerais bien les connaître, s’il vous plaît.

M. Power : Merci pour la question. Je vais vous répondre en anglais.

[Traduction]

D’un point de vue thérapeutique, il y a très peu de différence entre un médicament sur ordonnance et un produit de santé naturel. Il s’agit dans les deux cas d’un produit que les gens prennent pour soigner ou prévenir quelque chose, qu’il s’agisse d’un supplément de calcium, d’un produit vitaminé, comme l’échinacée, que de nombreuses personnes utilisent pour prévenir le rhume, ou d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, par exemple, qui sert à traiter une insuffisance cardiaque ou une hypertension. Je pense qu’aux yeux de la population — exactement comme vous l’avez souligné —, les produits de santé naturels semblent plus sûrs parce qu’ils renferment le mot « naturel ». Ils sont souvent présentés comme provenant d’une plante. Lorsque je rencontre des gens qui ont décidé d’opter pour des produits de santé naturels et qui veulent cesser de prendre des médicaments sur ordonnance, je leur fais souvent remarquer qu’un certain nombre de médicaments sur ordonnance sont des dérivés de plantes qui peuvent être très toxiques.

Nous devons veiller à ce que les Canadiens comprennent bien la nature des produits, les risques qu’ils présentent et la meilleure façon de les utiliser. Les consommateurs et les professionnels de la santé doivent avoir des outils et être en mesure d’avoir ces discussions.

M. Skelton : Je suis d’accord avec M. Power. Je voudrais toutefois souligner que le profil de risque de ces deux catégories est différent. Cette question a d’ailleurs fait l’objet d’un débat approfondi en 2004, qui a débouché sur 53 recommandations formulées par le comité permanent. On y est revenu en 2014, lorsqu’on a décidé d’exclure les produits de santé naturels. C’est la raison pour laquelle la réglementation des produits de santé naturels est différente de la réglementation des médicaments.

Je suis d’accord avec M. Power concernant l’importance de l’éducation. Je pense qu’il y a encore beaucoup de travail à faire à ce chapitre, et je pense que nous, en tant qu’association, jouons un rôle en travaillant de concert avec Santé Canada. Ce dont il est question aujourd’hui au sujet de la Loi de Vanessa n’aurait pas d’incidence à cet égard. C’était la différence que je voulais souligner ici.

La présidente : Merci beaucoup.

[Français]

La sénatrice Petitclerc : Je vais poser ma question en français. Ma question s’adresse surtout à vous, monsieur Skelton. J’avoue que j’ai du mal à bien saisir le côté négatif de la section 27 pour le secteur des produits de santé naturels. Je m’explique. D’une part, vous dites que la rigueur est là et que vous avez des réglementations spécifiques à votre secteur, et d’autre part, on l’entend ici et dans la population, il y a parfois dans ce secteur-là un certain... Les gens ne sont pas certains, ils ont peur, ils ont un besoin de plus de crédibilité. Pour moi, il me semble qu’au contraire, ce projet de loi est positif pour les Canadiens en ce qui a trait à l’information et au fait de se sentir en sécurité, mais il est aussi positif pour le secteur en ce qui a trait à la crédibilité. Voilà ma question. Si on a un peu de temps, vous avez beaucoup parlé de tenir plus de débats et de mener plus d’études. J’aimerais un peu de concret.

Que voulez-vous comme débat ou de quoi avez-vous besoin comme étude? Vous pourriez me répondre en deux petites parties.

[Traduction]

M. Skelton : Je vais essayer de répondre à la première partie de votre question.

Je pense que le problème est que nous avons des règlements en vigueur — et vous avez indiqué que les gens s’interrogent sur ce qui est le mieux —, mais rien dans ce projet de loi ne permettrait de répondre à ces préoccupations. L’obligation des établissements de santé de signaler les effets indésirables et la création d’un nouvel outil pour veiller à l’application de la loi n’auraient aucune incidence à ce chapitre. Je pense que ce que le rapport de la vérificatrice générale du Canada a mis en évidence, c’est qu’on n’utilise pas les outils déjà en place.

Nous sommes tout à fait d’accord et, une fois encore, je tiens à souligner que le mandat de l’Association canadienne des aliments de santé est de veiller à ce que les Canadiens aient accès à des produits sûrs, efficaces et de qualité. Je crois que cela répond à votre première question.

La sénatrice Petitclerc : Je regrette de devoir vous interrompre, mais je n’ai que quelques minutes.

Je comprends que cela ne porte pas là-dessus, mais je ne vois pas quels sont les inconvénients. C’est la partie que je ne comprends pas. Je comprends que la population aimerait peut‑être qu’on en fasse davantage, mais je ne vois pas les inconvénients.

M. Skelton : Je pense que le problème est que nous ignorons quels sont les inconvénients potentiels, parce qu’il n’y a pas eu de débat ni d’étude approfondis.

Je tiens à dire que l’association serait favorable à un projet de loi distinct qui traiterait de cette question; je pense que ce serait approprié. Toutefois, la façon dont on a procédé ici est inadéquate et laisse de nombreuses questions en suspens.

La sénatrice Petitclerc : Merci.

La sénatrice Burey : Merci beaucoup d’être ici aujourd’hui.

Je voudrais signaler à nouveau l’importance de ce projet de loi. J’ai entendu parler d’« étiquetage », d’« application de la loi » et du fait que ce n’était « pas nécessairement la bonne façon de procéder », mais aussi de l’importance de la transparence et de la reddition de comptes. La sécurité des Canadiens est bien sûr primordiale.

Monsieur Power, vous avez dit quelque chose qui a attiré mon attention : un faible risque ne signifie pas qu’il n’y a aucun risque. En tant que médecin, je sais que des interactions graves peuvent se produire entre des produits de santé dits naturels et d’autres médicaments sur ordonnance. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?

Et, monsieur Skelton, pourriez-vous me donner un aperçu de ce que fait votre industrie pour veiller à ce que ces produits n’entraînent pas de graves interactions? Vous avez laissé entendre qu’il s’agit d’une industrie qui ne cesse de croître et qu’il y a beaucoup plus de gens qui utilisent ces produits. Pourriez-vous donc préciser votre rôle?

Et monsieur Power, pourriez-vous nous en dire davantage sur la gravité de ces interactions?

M. Power : Bien sûr. Je vous remercie de votre question.

Je peux vous donner quelques brefs exemples. Il existe un produit très courant appelé ginseng, qui procure un regain d’énergie et qui entre dans la catégorie des produits destinés à prévenir les rhumes et à renforcer le système immunitaire. Toutefois, chez certains consommateurs, on a décelé une élévation de la pression artérielle. C’est donc un bon exemple d’un produit qui est très couramment utilisé mais qui peut avoir des conséquences inattendues. Si nous ne disposons pas d’un système permettant de signaler ce genre de choses, les gens pourraient se retrouver avec des problèmes persistants.

Il existe un produit appelé Ginkgo biloba qui contribue à améliorer la mémoire, et de nombreuses personnes âgées l’utilisent. Des cas d’hémorragie ont été rapportés. De nombreuses personnes âgées prennent également des anticoagulants, ce qui peut aggraver le risque. Il s’agit d’un effet secondaire assez grave, à mon avis.

Il existe un certain nombre de produits qui peuvent provoquer des interactions. L’échinacée est largement utilisée pour prévenir les rhumes, et on pense qu’elle peut nuire au métabolisme des médicaments et accélérer l’élimination de l’organisme des médicaments contre les crises d’épilepsie et des contraceptifs. Des recherches plus approfondies sont nécessaires pour déterminer si ces risques sont pertinents du point de vue clinique, mais il s’agit là de préoccupations que je ne qualifierais pas de mineures.

M. Skelton : Je vous remercie pour votre question, sénatrice.

Nous sommes entièrement d’accord avec M. Power. Je pense qu’il est nécessaire de veiller à identifier les risques pertinents et les contre-indications associés à un produit.

Aujourd’hui, Santé Canada a la possibilité de le faire, comme pour tout produit ou installation qu’elle homologue, et de mener des recherches et des études supplémentaires lorsqu’il y a une préoccupation en matière de santé. Le ministère l’a d’ailleurs fait récemment en publiant des mises à jour sur certains produits. En 2017, il y a eu une mise à jour concernant l’extrait de thé vert. En 2023, les exigences relatives à la biotine ont été mises à jour.

Des outils existent pour répondre aux préoccupations soulevées par M. Power. Une fois encore, j’insiste sur le fait que nous ne voyons pas en quoi l’inclusion des produits de santé naturels dans la Loi de Vanessa pourrait atténuer ou changer quoi que ce soit.

La sénatrice Burey : Monsieur Power, pensez-vous que les deux...

La présidente : Cinq secondes.

La sénatrice Burey : Je suis désolée.

M. Power : Oui, la mesure législative actuelle facilite cela.

La présidente : Merci.

La sénatrice McPhedran : Je remercie les témoins qui comparaissent en personne aujourd’hui.

J’ai beaucoup appris au cours de cette discussion, mais j’aimerais simplement m’assurer de bien comprendre les principaux points que font valoir nos deux témoins.

Je crois que tout le monde s’entend ici sur l’objectif de la Loi de Vanessa et sur la nécessité de cette loi. Ce que vous semblez dire — et c’est ce que je veux vérifier auprès de vous —, c’est qu’on se demande si le projet de loi à l’étude permettrait réellement d’atteindre l’objectif visé en ce qui concerne les produits de santé naturels. Je crois que chacun d’entre vous a dit, dans ses propres termes, que ce projet de loi ne constitue pas nécessairement le meilleur moyen d’atteindre cet objectif. Corrigez-moi si je me trompe.

Ensuite, pouvez-vous me dire ce qui nous permettrait de faire passer la sécurité en premier lorsqu’il s’agit des produits de santé naturels? Si ce n’est pas cela, ce serait quoi?

M. Skelton : Je vous remercie de votre question, sénatrice.

Je conviens que certaines des préoccupations qui ont été exprimées aujourd’hui au sein du comité sont valables et doivent être approfondies, mais je suis d’avis que la Loi de Vanessa ne permettrait pas de répondre à ces préoccupations.

J’insiste à nouveau sur le fait que les outils existent au sein de Santé Canada et que le rapport de la vérificatrice générale a souligné que les outils existaient mais qu’ils n’étaient ni utilisés ni appliqués. Nous aimerions donc travailler en étroite collaboration avec Santé Canada pour développer et renforcer les outils d’éducation dont nous disposons, à la fois pour la population et pour l’industrie, ainsi que pour évaluer de manière plus approfondie comment améliorer la conformité et l’application de la loi.

C’est plus une question d’application, et on ne cherche pas à avoir un autre outil. Ces outils existent déjà.

M. Power : Je dirais que nous sommes favorables à l’inclusion des produits de santé naturels dans la Loi de Vanessa.

Il y a très peu de gens qui commencent à prendre un produit de santé naturel lorsqu’ils sont à l’hôpital, contrairement au nombre de personnes qui pourraient y être admises après en avoir pris. M. Skelton nous a dit que plus de 70 % des Canadiens admettent en prendre. On peut donc s’attendre à ce que des personnes se présentent à l’hôpital à cause d’un produit de santé naturel.

Ces personnes ont peut-être été admises en raison d’un effet indésirable causé en partie par un produit de santé naturel, alors je pense qu’il est essentiel d’inclure ces produits pour englober toutes ces situations.

La sénatrice McPhedran : Merci.

Si j’ai bien compris ce que vous dites, monsieur Skelton, aucune nouvelle mesure législative ne serait nécessaire pour répondre à cette préoccupation.

Et d’après ce que je comprends, monsieur Power, selon vous, c’est un changement législatif qui s’impose.

M. Skelton : Effectivement, il n’y a aucune information qui nous amènerait à conclure que c’est nécessaire.

La présidente : Monsieur Power, je vous vois hocher la tête.

M. Power : C’est exact. Vous comprenez bien notre position. Nous appuyons l’inclusion des produits de santé naturels dans la Loi de Vanessa.

La sénatrice Bernard : Merci à vous deux pour vos témoignages et vos réponses.

J’aimerais parler de la diversité de la population qui consomme ces produits. L’Énoncé et rapport sur les répercussions sur le genre, la diversité et la qualité de vie qui accompagne le budget de 2023 indique que la mesure proposée dans la section 27 peut avoir une plus grande incidence sur certaines personnes qui utilisent plus fréquemment les produits de santé naturels, « notamment les femmes, les Autochtones, les personnes 2ELGBTQI+ ainsi que les personnes noires et racisées ».

J’ai deux questions à poser à nos deux témoins : quelles sont les populations les plus susceptibles d’utiliser les produits de santé naturels plus souvent que le Canadien moyen? Pourquoi? Quelle pourrait être l’incidence des mesures proposées dans la section 27 sur ces populations?

M. Skelton : Je peux répondre à la première question. Nous n’avons pas de données précises pour étayer la question de la diversité. Je pense que c’est une excellente question. Nous réalisons actuellement des études de marché pour évaluer cet aspect. Par contre, je voudrais souligner — et c’est un fait bien connu — qu’il y a beaucoup de produits traditionnels qui se retrouvent dans la catégorie des produits de santé naturels, et je pense qu’il est essentiel de protéger le droit de choisir ces produits au sein des diverses communautés. Je ne sais pas si la Loi de Vanessa aura une incidence négative ou positive à cet égard. Encore une fois, nous ne le saurons pas parce que la démarche qui, selon nous, aurait dû être entreprise ne l’a pas été. La diversité fait donc partie du mandat relatif aux produits traditionnels, et par extension aux produits de santé naturels, mais je ne connais pas l’impact de la Loi de Vanessa parce qu’il n’y a pas eu d’examen ni d’étude à ce sujet.

La sénatrice Bernard : Aucune recherche n’a été effectuée, c’est bien ce que vous dites?

M. Power : Si on se penche sur les divers segments de la population, nous savons que les femmes ont davantage tendance à utiliser les produits de santé naturels, mais il faut savoir aussi que ce sont principalement les femmes qui achètent les produits de santé pour leur famille. Ensuite, il y a certainement les populations autochtones, et la médecine traditionnelle chinoise est également largement utilisée dans certaines populations asiatiques.

D’après ce que j’ai compris de la Loi de Vanessa, la notification obligatoire des effets indésirables des produits de santé naturels n’aurait pas pour effet de limiter leur accès. Au contraire, cela permettrait de recueillir des données afin de mieux orienter les praticiens qui utilisent ces produits et les consommateurs, afin qu’ils soient en mesure de prendre des décisions plus éclairées.

La sénatrice Bernard : D’accord.

La présidente : Je vous remercie. Nous allons maintenant amorcer notre deuxième série de questions, mais sachez que nous ne disposerons que de cinq minutes. J’aimerais demander à la sénatrice Seidman de poser sa question. Les sénateurs auront ensuite cinq minutes pour poser leurs questions, puis les témoins pourront répondre par écrit.

La sénatrice Seidman : Vous avez dit que nous n’avions pas besoin de cette mesure parce qu’elle ne ferait rien de plus que ce qui existe déjà. J’aimerais y revenir. En réalité, la mesure législative donnerait au ministre de la Santé la possibilité, par exemple, d’ordonner des rappels de produits dangereux ou d’exiger des entreprises qu’elles révisent les étiquettes, ce qui améliorerait certainement la capacité de Santé Canada de réagir aux risques graves en matière de santé et de sécurité.

La Loi de Vanessa visait justement à assurer cette surveillance des risques pour la sécurité que posent les produits mis sur le marché. J’aimerais que vous répondiez à une question qui a été posée par bon nombre de mes collègues, et plus directement par la sénatrice Petitclerc : « Quel problème cela pose-t-il? » Il y a effectivement une surveillance rigoureuse des risques pour la sécurité.

M. Skelton : Merci, sénatrice, pour cette question. Comme je l’ai dit, il y a des outils en place qui permettent déjà de faire ce genre de choses. Qu’il s’agisse d’ordonner l’arrêt des ventes, une saisie — à n’importe quel moment de la chaîne de possession des produits —, Santé Canada a le droit d’intervenir. Même en ce qui concerne la conformité de l’étiquetage, Santé Canada peut déjà exiger des changements sur les produits en vertu de la réglementation, et il l’a fait à maintes reprises.

Bref, nous ignorons pour quelle raison nous en aurions besoin. On n’a pas tenu d’enquête, d’étude ou de débat. C’est ce qui nous préoccupe, de même que la façon dont Santé Canada aborde ce type de discussions ou encore l’absence de discussions.

M. Power : Je dirais que nous devons l’inclure parce que nous avons besoin de cette information pour mieux informer les gens quant aux risques associés aux produits de santé naturels. Nous en savons très peu à leur sujet.

La sénatrice Seidman : Parce que cela n’a pas été inclus, n’est-ce pas? C’est là toute la question. Étant donné que la déclaration obligatoire des effets indésirables des produits de santé naturels n’a pas été incluse dans la proposition de 2014, nous ne connaissons pas très bien les risques parce que nous ne disposons pas de données sur leurs effets indésirables.

M. Power : C’est exact.

La sénatrice Seidman : On s’assurerait ainsi d’avoir cette information.

M. Power : Effectivement, du moins dans le contexte des établissements de santé.

La sénatrice Seidman : Merci.

La présidente : J’inviterais les sénatrices Osler, Moodie et Mégie à poser leurs questions. M. Power et M. Skelton soumettront leurs réponses par écrit.

La sénatrice Osler : Ma question s’adresse à M. Skelton. Merci encore pour votre témoignage aujourd’hui en tant que président et chef de la direction de l’Association canadienne des aliments de santé. J’ai été ravie de vous entendre dire plus tôt ce matin — et je vais essayer de vous citer — que votre priorité est l’efficacité et l’innocuité des produits de santé naturels.

Pourtant, on a constaté un niveau élevé de non-conformité au sein de l’industrie, comme l’a fait remarquer la sénatrice Seidman. Le rapport du commissaire à l’environnement et au développement durable, publié en avril 2021, indique que pour 88 % des produits examinés, les publicités présentaient des renseignements trompeurs, y compris des allégations de santé non autorisées par Santé Canada parce qu’elles pourraient ne pas avoir été prouvées.

Par conséquent, votre déclaration ne concorde pas avec ces données. Je vous demanderais de soumettre par écrit de plus amples explications au comité concernant votre déclaration et les données.

La sénatrice Moodie : Ma question s’adresse à nos deux témoins. J’aimerais savoir si les modifications proposées à la Loi de Vanessa priveront les consommateurs de leur droit de choisir.

[Français]

La sénatrice Mégie : Je voudrais revenir sur mon point. J’ai eu toute l’explication de M. Power en ce qui a trait aux produits de santé naturels, mais je n’ai pas vraiment eu d’exemples — juste un ou deux — d’aliments naturels. Ensuite, comme l’a dit ma collègue sénatrice Seidman, lorsque vous aurez fait toutes les études par rapport à l’innocuité, comment cette information sera‑t-elle transmise au public, sur le plan de l’étiquetage, notamment?

[Traduction]

La présidente : Il est dommage que nous ne puissions pas obtenir vos réponses tout de suite et poursuivre nos échanges, car malheureusement, notre temps est limité.

Je remercie nos deux témoins, M. Skelton et M. Power, de nous avoir fait part de leurs points de vue. Nous en tiendrons compte au moment de formuler nos observations.

Nous allons maintenant passer à la deuxième partie de la réunion, qui portera sur la section 28, qui renferme des modifications à la Loi sur les aliments et drogues afin d’interdire les essais de cosmétiques sur les animaux au Canada.

Nous accueillons M. Darren Praznik, président et chef de la direction de l’Alliance de l’industrie cosmétique du Canada, qui témoignera par vidéoconférence. Je vous remercie d’avoir accepté de comparaître devant le comité aujourd’hui. Je vous invite maintenant à faire votre déclaration. Je vous rappelle que vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration, après quoi nous enchaînerons avec une période de questions. Je dois informer les membres du comité que M. Praznik doit quitter à 13 h 15.

Monsieur Praznik, la parole est à vous.

Darren Praznik, président et chef de la direction, Alliance de l’industrie cosmétique du Canada : Merci beaucoup, madame la présidente. Je tiens à saluer tous les membres du comité. Je suis très heureux d’avoir l’occasion de m’exprimer au sujet des modifications contenues dans le projet de loi dont le comité est saisi.

Mon rôle ici est assez unique, en ce sens que non seulement je représente l’industrie par l’intermédiaire de l’Alliance de l’industrie cosmétique du Canada, mais cette loi, qui remonte probablement à 2014 ou 2015, nous a donné beaucoup de travail, en tant que parties prenantes. Nous vous avons remis aujourd’hui une série de lettres. La dernière lettre, qui remonte au 8 mai 2023, a été signée par l’Alliance animale du Canada, l’Alliance de l’industrie cosmétique du Canada, au nom de l’industrie, Cruelty Free International, Humane Society International et par des détaillants partenaires de ces deux dernières organisations. Puisque nous représentons l’industrie, nous représentons un certain nombre de détaillants.

Il y a quelques années, nous avons réussi à collaborer dans diverses circonstances pour régler les détails de cet objectif commun. Nous avons réussi grâce à un travail acharné de la part de nos organisations respectives, et nous sommes parvenus à nous entendre sur une approche visant à interdire les essais sur les animaux en fonction des principes de l’Union européenne. Bien entendu, cela se ferait dans le cadre de la structure réglementaire canadienne, car l’Europe a une réglementation quelque peu différente de celle du Canada, de sorte que les principes devaient être en phase avec notre structure réglementaire.

Nous avons également convenu, en tant que parties prenantes, qu’il était absolument essentiel que ces modifications soient rédigées par Santé Canada, en collaboration avec nous, et tiennent compte de la complexité de la Loi sur les aliments et drogues et du régime réglementaire. En outre, au cours de ce processus, alors que Santé Canada procédait — et procède toujours — à une réforme majeure de la réglementation des cosmétiques, des produits de santé naturels et des médicaments en vente libre, c’est-à-dire le cadre pour les produits d’autosoins, nous voulions nous assurer que ces amendements s’inscrivaient dans le cadre de cette réforme.

Nous sommes heureux de vous dire qu’il y a plusieurs années, les fonctionnaires de Santé Canada nous ont rencontrés et, sur une période de plusieurs années — probablement un peu moins d’un an — ont rédigé un énoncé de principes qu’ils ont présenté à leur ministre et sur lequel nous étions tous d’accord.

Comme vous pouvez le constater d’après notre correspondance, nous insistons depuis plusieurs années pour que le gouvernement procède à des modifications législatives. Étant donné le petit nombre de modifications, nous étions d’avis qu’il était préférable de le faire dans le cadre d’un projet de loi de réglementation ou d’exécution du budget. C’est ce que nous avons proposé au gouvernement.

Évidemment, la pandémie de COVID a retardé tout ce travail, mais nous avons été ravis cette année de voir que cela faisait partie du projet de loi d’exécution du budget. Je peux vous dire que toutes les parties prenantes ont participé à une séance d’information avec le personnel concernant les détails, y compris une réunion avec le personnel juridique qui a rédigé ce projet de loi, et nous étions tous d’accord pour dire que ces modifications, telles qu’elles sont rédigées, fonctionnent et sont conformes aux principes que nous avions proposés. Nous avons également eu l’occasion de discuter avec le cabinet du ministre et nous lui avons transmis une lettre similaire pour lui faire part de notre soutien.

Nous sommes heureux que ce dossier ait été porté à la connaissance du public grâce à un projet de loi d’initiative parlementaire déposé en 2015, si je ne me trompe pas, et qu’il ait suivi le processus, et je pense qu’une grande partie des détails qui devaient être réglés l’ont été en collaboration avec les fonctionnaires de Santé Canada. Par conséquent, nous vous recommandons fortement d’appuyer ce projet de loi tel quel.

Encore une fois, d’après la lettre que nous vous avons remise, nous avons certainement le soutien de toutes les parties prenantes représentant les organisations de défense des animaux et l’industrie, ainsi que de l’organisme de réglementation.

La présidente : Merci, monsieur Praznik. Certains d’entre nous ici présents se souviennent de notre collègue, la sénatrice Stewart Olsen et de tous les efforts qu’elle a déployés dans ce dossier. Vous avez fait en sorte que tout cela se concrétise.

Nous allons maintenant passer à la période de questions. Chers collègues, vous disposerez de quatre minutes pour les questions et réponses. Je cède maintenant la parole à la vice-présidente du comité, la sénatrice Bovey.

La sénatrice Bovey : Je vous remercie, monsieur, d’être parmi nous aujourd’hui. Je vous remercie ainsi que les parties prenantes et tous les intervenants de travailler avec diligence sur ce dossier depuis des années. J’ai fait partie des discussions antérieures et je sais bien qu’il faut beaucoup de temps et de nombreux partenaires pour faire avancer ces importantes questions. Je vous remercie de votre diligence.

Je comprends que vous soutenez cette partie du projet de loi.

J’aimerais vous poser une question connexe. On me l’a posée, peut-être pas maintenant, mais plus tôt, il y a quelques années, lorsque le sujet était à l’avant-plan : au lieu de procéder à des essais sur des animaux, quelles autres méthodes peuvent être utilisées pour protéger les consommateurs?

M. Praznik : C’est une excellente question. J’en ai beaucoup appris sur le sujet : le centre canadien des méthodes de substitution se trouve à l’Université de Windsor, et nous avons pu travailler étroitement avec sa direction. De plus, je siège, en compagnie de collègues de la Humane Society International et de Cruelty Free International, au conseil d’administration d’un partenariat international visant à faire progresser les méthodes de substitution à l’expérimentation animale.

Ce qu’on apprend en s’intéressant à la question, c’est qu’il ne s’agit pas de remplacer un test par un autre. Les méthodes de substitution aux essais sur les animaux englobent de nombreux éléments et toutes sortes de nouvelles façons de penser. C’est une manière très différente de concevoir les essais.

À mon avis, le défi qui attend le Canada, maintenant que ce projet de loi important progresse, même si nous avons aussi souligné la nécessité de réduire les essais sur les animaux en modifiant et en modernisant la Loi canadienne sur la protection de l’environnement, c’est que nous devrons mettre en place la formation sur ces nouvelles méthodes pour les organismes de réglementation, les scientifiques et les fabricants. Je recommande vivement au Sénat de jeter un coup d’œil au Centre for Alternatives to Animal Methods de l’Université de Windsor. C’est le seul centre canadien qui se concentre sur cette question, et tous les pays qui ont adopté une interdiction comptent un tel centre.

Je ne peux pas entrer dans les détails, mais différents intervenants peuvent se pencher sur le type de modèle et le cadre nécessaires pour adopter les méthodes de substitution aux essais sur les animaux.

La sénatrice Bovey : Je vous remercie de votre réponse. Je crois comprendre que, étant donné que ce projet de loi tient compte de la sécurité des Canadiens, le travail effectué dont vous êtes au courant permet d’affirmer que les produits offerts aux consommateurs sont sécuritaires.

M. Praznik : Oui. Ce qui est paradoxal, sénatrice, c’est que, grâce au travail fait en Europe et aux investissements provenant de l’Union européenne et de l’industrie au cours des 20 dernières années, nous ne faisons pas d’essais de cosmétiques sur les animaux aujourd’hui au Canada. Cela dit, il est très important que le Canada se joigne symboliquement à ce mouvement mondial.

Le véritable défi, en ce qui concerne les secteurs autres que le nôtre et les essais environnementaux, c’est qu’il faudra faire progresser les méthodes de substitution aux essais sur les animaux et, ce qui est tout aussi important, les faire approuver par les organismes de réglementation. Les organismes de réglementation, les fabricants et les scientifiques devront recevoir une formation sur ces nouvelles méthodes. C’est un changement de paradigme.

Non seulement ces nouvelles méthodes sont efficaces, mais elles ont aussi le potentiel, selon ce que nous avons vu, de donner de l’information encore plus précise sur les effets des produits sur le corps humain. Encore une fois, c’est un changement de paradigme, et ce sera le défi à relever.

La sénatrice Bovey : Merci beaucoup.

La sénatrice Seidman : Monsieur Praznik, je vous remercie de nous rappeler des souvenirs de 2017, où vous avez témoigné devant ce comité, je crois.

M. Praznik : Oui.

La sénatrice Seidman : Oui, d’accord. Vous avez parlé un peu des inquiétudes et de la refonte de l’approche de l’industrie à l’égard de ce type de mesure législative. Étant donné que vous aviez exprimé devant le comité des préoccupations au sujet du projet de loi en 2017, j’aimerais que vous nous rappeliez les inquiétudes que vous aviez et que vous nous disiez si elles ont été apaisées avec ce nouveau projet de loi.

M. Praznik : Merci. En tant qu’ancien législateur provincial au Manitoba — c’était il y a des dizaines années, un rôle qui a probablement sombré dans l’oubli depuis longtemps — et en tant qu’ancien ministre qui a dû se pencher sur des mesures législatives complexes, je peux vous dire que les projets de loi d’initiative parlementaire sont excellents pour faire progresser un principe. Ils sont parfois très efficaces, mais, même s’ils sont rédigés par des conseillers juridiques du Sénat, ils s’appuient souvent sur des connaissances insuffisantes au sujet de lois complexes comme la Loi sur les aliments et drogues. Une réforme majeure était en cours à l’époque. Nous étions préoccupés par les détails du projet de loi et les conséquences imprévues.

Cela peut sembler ridicule, mais, selon le libellé du projet de loi initial, il aurait été illégal de tester un shampooing pour chiens sur un chien pour déterminer s’il est efficace. De telles situations étaient créées par les définitions.

Nos préoccupations ne portaient pas sur le principe et l’objectif. C’était une question d’applicabilité. Une fois que le projet de loi a échoué à la Chambre des communes — en fait, même avant —, je crois que les discussions avec les groupes d’intervenants ont permis de corriger les aspects problématiques. De notre point de vue, ce qui était le plus important, c’était que les organismes de réglementation, qui sont nécessaires au bon fonctionnement d’un tel processus, contribuent à fixer les détails. Le projet de loi d’aujourd’hui le fait. Nous pensons qu’il est efficace. Toutes les questions sur les conséquences imprévues ont été réglées, et nous avançons tous ensemble vers l’atteinte du même objectif.

La sénatrice Seidman : Merci.

La sénatrice Osler : En tant que concitoyenne du Manitoba, je remercie M. Praznik des services qu’il a rendus à notre province. Merci de votre témoignage d’aujourd’hui.

Le projet de loi interdit les essais de cosmétiques sur les animaux au Canada, mais qu’en est-il des produits qui viennent d’autres pays où l’interdiction ne s’applique pas et qui sont vendus en ligne? Le projet de loi tient-il compte du commerce électronique de manière adéquate?

M. Praznik : Sénatrice, je suis toujours heureux de croiser d’autres Manitobains et je saisis toutes les occasions de promouvoir ma province.

Vous avez posé deux excellentes questions. D’abord, la loi s’applique à tous les produits vendus au Canada. Par conséquent, un produit fabriqué ailleurs et importé ici doit respecter le droit canadien. Dans la grande majorité des pays, notre industrie a généralement abandonné les essais sur les animaux. Il y a une exception : la Chine. Nous sommes un grand exportateur de produits cosmétiques en Chine. Le Canada est à la fois un grand importateur et un grand exportateur. Nous avons de très grandes entreprises qui fabriquent de nombreux produits pour des entreprises internationales. Jusqu’à il y a quelques années, la Chine exigeait toujours que les cosmétiques importés soient testés sur des animaux. Après beaucoup de lobbying, la Chine a accepté d’accorder une exemption, mais à la condition d’avoir un certificat de bonnes pratiques de fabrication délivré par le gouvernement. Nous avons donc travaillé avec des fonctionnaires de Santé Canada pendant plus d’un an pour mettre en place des moyens de délivrer ce certificat. Malheureusement, en raison du fonctionnement en vase clos du gouvernement, Santé Canada n’a pas encore donné son approbation.

Nous avons une solution temporaire provenant des ministères responsables de l’industrie de l’Ontario et du Québec : les essais sur les animaux ne sont donc pas nécessaires pour les produits qui sont fabriqués ici. Tout cela est injustifié parce que ces essais ne servent à rien. Nous attendons toujours qu’un haut dirigeant de Santé Canada donne le feu vert. On nous a servi la vieille excuse que cela ne fait pas partie du mandat. Pourtant, Santé Canada inspecte en ce moment ces installations qui sont souvent titulaires d’une licence d’établissement de produits pharmaceutiques, qui sont titulaires d’une licence d’exploitation pour les fabricants de produits de santé naturels ou qui respectent les bonnes pratiques de fabrication. Nous avons réglé tous les détails avec les fonctionnaires, mais on nous a dit que ce n’était pas dans le mandat. Si cela ne relève pas du mandat de Santé Canada, qui en est responsable? C’est un aspect sur lequel il faut continuer à travailler. Je ne suis pas certain d’avoir répondu à toutes vos questions, sénatrice.

La sénatrice Osler : Merci.

La présidente : J’ai une question sur les exceptions à l’interdiction proposée, qui s’appliquent aux produits cosmétiques vendus au Canada avant la date d’entrée en vigueur, soit six mois après la sanction royale. Pouvez-vous nous dire combien de produits cosmétiques qui utilisent des données provenant d’essais sur des animaux sont actuellement vendus au Canada et bénéficieraient de droits acquis en vertu de l’interdiction proposée?

M. Praznik : Je vais vous révéler quelques secrets de notre industrie.

La présidente : J’adore les secrets.

M. Praznik : Bien que nous fassions la promotion de tous nos produits comme étant nouveaux et innovants, la vérité est que la grande majorité des ingrédients utilisés dans nos produits sont des ingrédients qui existent depuis longtemps. Il s’agit de substances commerciales achetées auprès de fournisseurs d’ingrédients. Ils sont utilisés dans les produits de santé naturels, dans les aliments, dans les médicaments en vente libre et dans d’autres produits. Il s’agit en général de produits chimiques de base.

Au fil des ans, nombre d’entre eux ont fait l’objet, à un moment ou à un autre, de tests sur les animaux afin de satisfaire aux exigences réglementaires des pouvoirs publics. Alors, que faire de ces produits? Ces produits sont utilisés depuis longtemps sur le marché. Partout dans le monde, ces interdictions commencent à s’appliquer — dès le jour de leur entrée en vigueur — aux nouvelles substances et aux nouvelles exigences en matière d’essais. C’est ce qui s’est passé avec l’interdiction européenne, mais, très franchement, si un produit a été testé sur des animaux il y a 30 ans par Santé Canada, cet ingrédient est toujours utilisé aujourd’hui.

Les produits eux-mêmes n’ont pas fait l’objet d’essais sur les animaux, comme dans le cas de l’irritation des yeux du lapin. Ces essais n’ont pas été effectués depuis plus de 20 ans. En réalité, les ingrédients sont testés pour la santé et l’environnement. La plupart de ces ingrédients existent depuis des décennies et sont couramment utilisés. Pourquoi demander si ce produit a été expérimenté sur des animaux il y a 30 ans? Voilà pourquoi ces essais sont tournés vers l’avenir, et non vers le passé.

La présidente : En d’autres termes, malgré cet amendement, la pureté des ingrédients ne sera pas garantie.

M. Praznik : La pureté est subjective. C’est une bonne question et un excellent commentaire, mais, si la commercialisation d’un ingrédient a été approuvée il y a 30 ans et qu’il a été utilisé en toute sécurité pendant cette période, on peut affirmer que la consommation humaine au cours de ces décennies a démontré la sécurité de l’ingrédient. Au départ, pour être mis sur le marché, il aurait peut-être fallu effectuer ces essais, mais où se situe la limite? C’est une question difficile, n’est-ce pas? En tant que législateur, c’est vraiment une question difficile.

La présidente : Merci de partager votre point de vue avec nous.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci d’être avec nous aujourd’hui.

Le certificat GMP, si je comprends bien, est-ce pour approuver l’innocuité d’un produit ou pour confirmer le fait qu’il n’y a pas eu d’expérimentation sur les animaux?

Si c’est le cas, quand on le donne à la Chine, est-ce qu’on lui donne un passeport par en dessous, pour qu’elle puisse venir sur le marché sans que l’on sache si les produits ont été testés sur les animaux ou non?

[Traduction]

M. Praznik : C’est une très bonne question, car il s’agit d’un domaine assez complexe. Jusqu’à il y a quelques années, si la Chine importait ce que l’on appelle un produit cosmétique ordinaire — pas une crème solaire, qui serait considérée comme un produit de santé naturel ou un médicament —, elle exigeait que les importateurs effectuent une série d’essais sur les animaux pour prouver l’innocuité du produit pour les consommateurs chinois. Nous soupçonnons qu’il s’agit là d’un enjeu commercial, mais peu importe.

Notre industrie a exercé un lobbying très intense. Nous leur avons dit : « Ces tests n’ont aucun sens. Ils ne servent à rien du tout. Il s’agit d’une méthode très ancienne. Il faut s’en débarrasser. Pourriez-vous supprimer cette exigence, s’il vous plaît? » La Chine a accepté de la supprimer, mais elle a exigé, en remplacement de l’exception instaurée, qu’on présente un certificat délivré par le gouvernement pour ces produits, attestant qu’ils sont conformes aux bonnes pratiques de fabrication des produits cosmétiques et qu’ils sont donc sans danger.

Aucun gouvernement au monde ne délivre ces certificats pour les produits cosmétiques. Ils inspectent les installations, mais ils ne délivrent pas de certificats. En tant qu’association professionnelle, nous rassemblons les documents et nous les délivrons, mais nous ne sommes pas un gouvernement. Nous sommes donc allés voir Santé Canada et leur avons dit : « Écoutez, nous allons travailler avec vous pour mettre cela au point. » Toutes les installations de fabrication au Canada auxquelles cela s’appliquerait — une douzaine — sont presque toutes ou, en fait, toutes titulaires d’une licence d’établissement de produits pharmaceutiques de Santé Canada parce qu’elles fabriquent également des produits pharmaceutiques en vente libre, ou elles sont titulaires d’une licence de fabrication de produits de santé naturels ou elles répondent aux normes ISO en matière de bonnes pratiques de fabrication pour les cosmétiques. Nous avons donc demandé à Santé Canada s’ils étaient prêts à délivrer un certificat de bonnes pratiques de fabrication uniquement pour la Chine, afin que ce pays n’ait pas à effectuer d’essais sur les animaux. Nous avons réglé tous les détails avec les fonctionnaires, mais la direction nous a répondu : « Ce n’est pas vraiment notre travail, quelqu’un d’autre devrait s’en charger. » Or, il n’y a personne d’autre pour le faire.

Heureusement, les gouvernements du Québec et de l’Ontario, qui n’inspectent même pas ces installations, délivrent actuellement ces certificats, ce qui signifie que nos produits peuvent être vendus en Chine sans être soumis à des essais sur les animaux. Mais il s’agit là d’un simple remède de fortune alors que le gouvernement du Canada devrait apporter une solution à ce problème.

[Français]

La sénatrice Mégie : Qui assure le suivi une fois que les produits sont sur le marché, même pour les produits canadiens? On est sûr que ces produits n’ont pas été testés sur les animaux et ne leur ont fait aucun tort, mais il devrait y avoir un suivi aux cinq ans. Est-ce que cela existe? Est-ce qu’il y a des inspecteurs qui se consacrent à faire le suivi?

[Traduction]

M. Praznik : Oui. Santé Canada a fait appel à deux groupes d’inspecteurs différents pour nos produits. Ils effectuent des inspections cycliques. Il y a un processus de plainte; si vous vous plaignez de problèmes de santé à cause d’un produit que vous signalez, ils l’inspectent. Chaque année, ils choisissent une catégorie de produits différente qu’ils inspectent. Ils sont assez diligents.

Il y a quelques années, la vérificatrice générale s’est penchée sur le secteur des cosmétiques. Sur les 55 000 déclarations annuelles de produits cosmétiques, je pense qu’elle en a trouvé 50 qui ne respectaient pas les normes en matière d’ingrédients. Il s’agissait dans tous les cas de petits importateurs, pas de grandes entreprises. Le taux de conformité est donc très élevé.

[Français]

La sénatrice Mégie : Merci beaucoup.

La sénatrice Petitclerc : Je vais moi aussi poser ma question en français.

C’est une petite question. Ce que je comprends du projet de loi, c’est bien que quand l’interdiction entrera en vigueur, les produits qui sont déjà sur le marché resteront sur les étagères jusqu’à ce qu’ils soient écoulés? Cela semble raisonnable. Trouvez-vous que c’est une approche raisonnable? Avez-vous vu, dans d’autres pays où on a mis de l’avant ce genre d’interdiction, des actions immédiates pour retirer les produits? Est-ce que cela s’est déjà vu?

[Traduction]

M. Praznik : Tout d’abord, je tiens à préciser que nous n’effectuons pas d’essais sur les animaux pour nos produits. Ce n’est pas nécessaire et nous ne le faisons pas. Nous utilisons des ingrédients qui ont été approuvés et dont l’utilisation est autorisée. Certains de ces ingrédients, utilisés depuis des décennies, ont pu être testés sur les animaux pour répondre aux normes gouvernementales de l’époque. Tous ces ingrédients bénéficient de droits acquis.

Ce projet de loi va de l’avant, de sorte qu’à partir de la date où il entrera en vigueur, les essais sur les animaux ne pourront plus être utilisés pour garantir la sécurité de ce type de produits.

Très franchement, cela ne changera rien pour le marché, car nous nous sommes débarrassés de cette pratique il y a plusieurs années, mais il est vraiment important que le Canada se mette au diapason avec le reste du monde.

La présidente : Monsieur Praznik, on a beaucoup parlé de la Chine dans vos interventions, et c’est parce que la Chine représente un énorme marché d’exportation pour nous, mais aussi une plaque tournante pour les importations.

Y a-t-il d’autres pays non membres de l’Union européenne à prendre en considération?

M. Praznik : Parmi les usines canadiennes qui produisent des cosmétiques — l’une d’entre elles, en particulier, produit quelque 180 millions de rouges à lèvres par an qui sont exportés à partir du Canada, ce qui représente des exportations assez importantes — la plus grande partie est destinée à des pays comme les États-Unis, car nous distribuons sur le plan régional. Une petite partie est destinée à l’Europe, une autre à l’Asie, et la Chine est la plus importante.

La Chine est le seul pays vers lequel nous exportons qui est encore soumis à cette exigence inutile d’essais sur les animaux. La Chine bénéficie d’une exemption, mais elle est quelque peu problématique, comme nous l’avons indiqué, et nous aimerions que Santé Canada résolve ce problème dans l’intérêt de l’industrie et des exportations canadiennes.

La présidente : Merci, chers collègues.

Merci beaucoup, M. Praznik, pour le temps que vous nous avez consacré. Votre témoignage nous a apporté beaucoup de clarté et nous vous en sommes très reconnaissants.

Chers collègues, nous arrivons à la fin de notre deuxième série de témoignages. Je vous propose de suspendre très brièvement la séance afin de passer à huis clos pour une brève discussion sur les activités futures liées à l’étude.

(La séance se poursuit à huis clos.)

Haut de page