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TRCM - Comité permanent

Transports et communications


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES COMMUNICATIONS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mardi 29 novembre 2022

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd’hui, à 8 heures (HE), avec vidéoconférence, pour procéder à l’examen article par article du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois.

Le sénateur Leo Housakos (président) occupe le fauteuil.

[Traduction]

Le président : Je m’appelle Leo Housakos, sénateur du Québec et président du comité. Je demanderais à mes collègues de se présenter brièvement.

La sénatrice Simons : Je suis la sénatrice Paula Simons, du territoire visé par le Traité no 6, en Alberta.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Sénatrice Miville-Dechêne, du Québec.

Le sénateur Cormier : Sénateur René Cormier, du Nouveau-Brunswick.

[Traduction]

La sénatrice Dasko : Je m’appelle Donna Dasko, sénatrice de l’Ontario.

Le sénateur Klyne : Je m’appelle Marty Klyne, sénateur du territoire visé par le Traité no 4, en Saskatchewan.

[Français]

Le sénateur Dawson : Dennis Dawson, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Gold : Je m’appelle Marc Gold, sénateur du Québec et représentant du gouvernement au Sénat.

La sénatrice Sorensen : Je m’appelle Karen Sorensen, du territoire visé par le Traité no 7, en Alberta.

Le sénateur Quinn : Je m’appelle Jim Quinn, du Nouveau-Brunswick.

[Français]

La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario.

[Traduction]

Le sénateur Wells : Je m’appelle David Wells, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Manning : Je m’appelle Fabian Manning, de Terre-Neuve-et-Labrador.

Le sénateur Plett : Je m’appelle Don Plett, de Landmark, au Manitoba.

La sénatrice Wallin : Je m’appelle Pamela Wallin, de la Saskatchewan.

Le président : Je voudrais rappeler à tous mes collègues que nous recevons M. Thomas Owen Ripley, Mme Amy Awad et M. Charles Kouri, de Patrimoine canadien, qui ont également témoigné lors de la dernière séance. Nous vous remercions de comparaître de nouveau aujourd’hui.

Honorables sénateurs, nous nous réunissons pour poursuivre l’étude article par article du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois. Nous avons terminé notre dernière séance en réservant un amendement à l’article 2, proposé par la sénatrice Batters sous l’étiquette DNP-C11-2-4-1.

Pouvons-nous demander que des copies de cet amendement soient distribuées aux membres du comité à titre de rappel? Honorables collègues, des copies de l’amendement vous seront distribuées. La sénatrice Batters a parlé au cours du débat sur son amendement, et au moment de lever la séance, la sénatrice Wallin, le sénateur Plett et le sénateur Housakos étaient inscrits sur la liste pour poser des questions ou participer au débat. Sénatrice Wallin, je vous accorde la parole.

La sénatrice Wallin : Je vous remercie. Je ne tenterai pas de résumer tout le débat que nous avons tenu la semaine dernière. Je voulais poser une question, car la sénatrice Batters a cité certaines personnes. Or, Konrad von Finckenstein, ancien président du CRTC, Tim Denton, Peter Menzies, Matt Hatfield, d’OpenMedia, M. Michael Geist et Morghan Fortier, de Skyship Entertainment, qui ont également témoigné devant nous, ainsi que de nombreux créateurs en ligne que nous avons entendus au fil des mois, ont tous proposé d’instaurer une sorte de seuil dans ce projet de loi. Un grand nombre d’entre eux ont indiqué qu’un seuil financier serait important, car il donnerait au CTRC des lignes directrices quant aux entités qu’il peut réglementer.

Au cours de la dernière séance, le sénateur Gold a évoqué l’alinéa 5(2)h) proposé pour ne pas instaurer de seuil. Cet alinéa stipule explicitement que le CRTC doit éviter :

[...] d’imposer des obligations à l’égard de toute catégorie d’entreprises de radiodiffusion si une telle mesure ne contribue pas de façon importante à la mise en œuvre de la politique de radiodiffusion.

Le problème, c’est que les critères énoncés au paragraphe 3(1) sont très vagues, ce qui laisse encore au CRTC beaucoup de discrétion quant aux entités qu’il peut réglementer. C’est fort problématique, compte tenu des témoignages que nous avons entendus, et le paragraphe 3(1) ne résout pas les problèmes de portée soulevés par les créateurs et les anciens membres d’organismes de réglementation que j’ai énumérés.

Le sénateur Gold a également parlé de « seuils qui sont susceptibles d’introduire des distorsions dans l’application de la politique ». Je me demande ce que cela signifie. Le sénateur Gold pourrait-il apporter des éclaircissements sur ces deux points et expliquer ce que sont ces distorsions et quelles sont les préoccupations?

Le sénateur Gold : Eh bien, comme je ne suis pas un témoin, je me contenterai de dire ce qui suit : tout d’abord, le gouvernement s’oppose à cet amendement, qu’il juge superflu pour les raisons que j’ai évoquées. L’établissement d’un seuil comme celui-ci permet aux sociétés de se restructurer pour diviser leurs revenus ou d’autres éléments, et encourage les gens à se soustraire à la réglementation quand l’intention de la loi est claire. Le problème est évident depuis le début et le gouvernement s’est montré clair à ce sujet. C’est pour cette raison que nous nous opposons à l’amendement.

La sénatrice Wallin : Je ne comprends tout simplement pas. Des encouragements? De quelle manière le projet de loi donnerait-il des encouragements?

Le sénateur Gold : Sénatrice, je ferais respectueusement remarquer que l’imposition d’un seuil précis crée des situations où les pratiques d’affaires, les entreprises et les procédures comptables peuvent être structurées de manière à se soustraire à une mesure, c’est-à-dire à être en dessous du seuil dans le cas présent.

C’est ce que le gouvernement craint qu’il n’arrive. Il ne considère pas que cet amendement soit nécessaire et pense même qu’il pourrait avoir des conséquences inattendues qui seraient contraires à la politique du projet de loi.

La sénatrice Wallin : Le temps permet-il à M. Ripley de se prononcer sur la question?

Le président : Oui.

La sénatrice Wallin : Monsieur Ripley, d’autres témoins — dont Peter Menzies, qui a été cité ici — ont indiqué que si l’intention est de faire de l’argent avec les plateformes, alors l’argent entrera plus rapidement si on fixe des seuils désignés, qu’ils soient de 150 millions de dollars ou d’un autre montant, parce que l’intention sera claire et que le nombre d’audiences et de contestations sera moindre. Qu’en pensez-vous?

Thomas Owen Ripley, sous-ministre adjoint, Affaires culturelles, Patrimoine canadien : Bonjour. Je vous remercie, sénatrice Wallin. Je formulerai quelques observations de ma place à l’intention du président.

Je rappellerais au comité que les créateurs de contenu numérique ne peuvent être considérés comme des entreprises en ligne, peu importe leurs revenus, et ce, parce que le paragraphe 2(2.1) proposé indique explicitement que les utilisateurs qui téléversent du contenu sur les médias sociaux ne seront pas considérés comme des entreprises en ligne. Aux termes de la loi, ils ne seront pas considérés comme des entreprises en ligne, qu’ils gagnent 3, 10 ou 50 millions de dollars.

La sénatrice Wallin : Mais nous revenons encore au même problème : il faut que la loi soit claire pour orienter un organisme de réglementation.

M. Ripley : Sénatrice Wallin, le gouvernement ne disconvient pas qu’au chapitre des services privés de diffusion en continu, l’objectif de la Loi sur la diffusion continue en ligne consiste certainement à obliger les géants du domaine que nous connaissons tous à soutenir la culture canadienne.

Le problème avec une règle précise comme celle-ci, c’est que — comme j’ai tenté de l’expliquer au cours de la dernière séance — il peut y avoir, dans certains cas, de petits services, comme les services en ligne CBC Gem et TOU.TV de notre radiodiffuseur national, et d’autres radiodiffuseurs d’intérêt national comme CPAC, APTN ou TV5, qui pourraient lancer des services en ligne dans l’avenir et être fort bien placés pour vraisemblablement contribuer à la réalisation des objectifs stratégiques de la loi. Ainsi, si le seuil de revenu est fixé à 150 millions de dollars, par exemple, je ne pense pas que ces services seraient assujettis à la loi. On exclurait donc une série de services qui pourraient être très bien placés pour contribuer à la réalisation des objectifs stratégiques de la loi.

La sénatrice Wallin : Si Radio-Canada transforme ses activités en ligne subventionnées en une entreprise d’envergure valant 150 millions de dollars, nous devrions revoir la manière dont elle est financée.

M. Ripley : Je vous remercie, sénatrice. Pour répondre à votre question, je pense que CBC/Radio-Canada œuvre déjà dans un environnement où on s’attend qu’elle contribue à la réalisation des objectifs stratégiques de la Loi sur la radiodiffusion, et il en est tenu compte dans les conditions actuelles de sa licence.

L’amendement proposé indiquerait essentiellement que la loi ne s’applique pas aux services qui n’atteignent pas un certain seuil. J’essaie d’expliquer qu’on risque d’exclure des services dont les revenus sont inférieurs au seuil, mais qui, de par la nature de leur service, sont en fait très bien placés pour contribuer à la réalisation des objectifs stratégiques de la Loi sur la radiodiffusion.

La sénatrice Wallin : Je continue de revenir au même point : tout dépend du jugement de la personne qui occupe le fauteuil de président. S’il n’existe pas de seuil ou de chiffre précis, s’il n’y a pas d’autre définition, alors le président peut choisir qui il veut et décider que Radio-Canada ne sera pas assujettie à la mesure, mais qu’une autre entreprise privée le sera, considérant que son statut de président du CRTC l’autorise à effectuer ce choix arbitrairement.

M. Ripley : Je vous remercie, sénatrice. Je ne qualifierais pas cette décision d’arbitraire. J’admets que la loi ne prévoit pas de seuil de revenu précis actuellement. C’est vrai, mais comme le sénateur Gold l’a souligné, la tâche du CRTC consiste à évaluer les services dans le cadre de processus réglementaires. Le CRTC n’en arrivera pas à ses conclusions derrière des portes closes. Il doit déterminer quels services sont bien placés pour contribuer de façon importante à la réalisation des objectifs stratégiques de la loi.

La sénatrice Wallin : Pourquoi l’instauration de règles claires suscite-t-elle de la résistance? Les seuils sont souvent utilisés dans d’autres sphères d’activités, même celles sous réglementation gouvernementale. Si une entreprise gagne un revenu donné, elle est assujettie à la mesure. C’est bien ainsi que cela se passe, n’est-ce pas? Cela permet aux acteurs du domaine d’y voir clair. Je sais que le sénateur Gold continue de dire qu’il craint que les entreprises ne cherchent à se faufiler entre les mailles du filet et à éviter de payer de l’impôt, mais je ne suis pas certaine que ce soit une justification que nous voulions utiliser pour ne pas éclaircir les choses à l’intention des personnes qui travaillent dans ce domaine et qui bâtissent des entreprises.

M. Ripley : Je vous remercie, sénatrice Wallin. Ma réponse demeure la même. Le problème avec une règle précise comme celle-ci, laquelle établit un seuil de 150 millions de dollars par année, c’est qu’il y a actuellement tout un éventail de services qui, dans le contexte canadien, pourraient faire une contribution à la réalisation des objectifs stratégiques de la loi.

L’instauration d’un seuil aussi élevé aurait pour effet de les exclure et de faire en sorte qu’ils ne contribuent pas à ces objectifs.

La sénatrice Wallin : Vous voulez donc laisser la décision entièrement au jugement des conseillers?

M. Ripley : La décision se prend dans le cadre de processus réglementaires au cours desquels tous les intéressés ont l’occasion d’expliquer pourquoi ils considèrent que le service peut contribuer ou non à la réalisation des objectifs stratégiques.

La sénatrice Wallin : Nous avons pourtant discuté du coût de l’évaluation des plaintes et des examens. Très bien. Je vous remercie.

Le sénateur Plett : Eh bien, je vous remercie, monsieur le président. J’étais en train de poser une question quand vous avez levé la séance la semaine dernière. La sénatrice Wallin a déjà abordé le sujet, et c’est très bien, car elle l’a fait mieux que moi. Je l’en remercie. Je veux toutefois poser une question très directe, que je m’apprêtais à formuler.

Le fonctionnaire et le sénateur Gold semblent tous les deux penser que le seuil est trop élevé. Je demanderais donc au fonctionnaire s’il conviendrait de l’abaisser à 100 ou 75 millions de dollars. Il serait ainsi moins élevé. Cela vous rassurerait-il?

Ma deuxième question, que je poserai immédiatement, est la suivante. Votre ministère a-t-il reçu de la correspondance ou des messages de petites entreprises disant craindre que le projet de loi ne s’applique à elles? Notre comité a certainement reçu de nombreux messages à ce sujet. Ce sont là mes deux questions. Si nous abaissions le seuil à 100 millions de dollars, cela atténuerait-il en partie vos préoccupations?

M. Ripley : Je vous remercie de cette question, sénateur Plett. Je soulignerais, à l’intention de la présidence, que le problème reste que le seuil serait établi à un moment précis dans le temps. Il m’est donc difficile de dire actuellement quels services seraient de quel côté de la ligne aujourd’hui et dans l’avenir.

Le deuxième problème à cet égard est le suivant. Dans sa forme actuelle, la motion parle d’abonnements payants et de publicité intégrée. Même si j’admets certainement qu’il s’agisse de deux modèles d’affaires très présents aujourd’hui, il reste que les modèles d’affaires des services de diffusion en continu sont appelés à évoluer. C’est un phénomène que nous avons observé, n’est-ce pas? Par exemple, Amazon a intégré son service de diffusion en continu dans une offre globale. En étant très précis quant à la source de revenus, on pourrait rencontrer des difficultés lors de l’application de la disposition.

En ce qui concerne votre seconde question, sénateur, j’admets que le sujet a certainement fait l’objet de débats pendant l’examen du projet de loi et que des parties prenantes ont exprimé des préoccupations, faisant valoir que sans un seuil comme celui-ci, il pourrait leur être difficile de comprendre comment le projet de loi s’appliquera. C’est certainement un point qui a soulevé des débats à la Chambre des communes quand elle a examiné le projet de loi.

Le sénateur Plett : Avec tout le respect qui vous est dû, je demanderai, sans trop prendre de gants blancs, dans quelle mesure on cherche à protéger Radio-Canada?

M. Ripley : Sénateur, je pense que ce n’est absolument pas la motivation. Ce que j’essayais de faire comprendre, c’est que le projet de loi est formulé de manière à accorder au CRTC une certaine souplesse afin d’examiner la nature des entreprises et de déterminer si, selon leur nature et leur modèle d’affaires, elles sont bien placées pour contribuer à la réalisation des objectifs stratégiques de la Loi sur la radiodiffusion.

L’ampleur des services constituera certainement un facteur très pertinent dans le cadre de cette évaluation. Je n’en disconviens pas, mais ce ne sera pas le seul facteur que le CRTC examinera pour déterminer si un service peut contribuer de façon importante à la réalisation des objectifs stratégiques de la Loi sur la radiodiffusion.

Le sénateur Plett : Monsieur le président, avant de mettre cet amendement aux voix, je voudrai peut-être y proposer un sous-amendement, mais j’attendrai.

Le président : Le sénateur Manning a une question supplémentaire.

Le sénateur Manning : J’ai une question à l’intention du fonctionnaire. Y a-t-il — oui ou non — un seuil avec lequel vous seriez à l’aise ou qui conviendrait au ministère ou au gouvernement?

M. Ripley : Je vous remercie de cette question. J’indiquerais au président que le gouvernement est d’avis que la loi ne devrait établir aucun seuil. Comme je l’ai mentionné, la question a fait l’objet de débats à la Chambre des communes, mais au bout du compte, le gouvernement considère qu’il circonscrit le pouvoir du CRTC en n’incluant que les services qui sont en mesure de contribuer de façon importante à la réalisation des objectifs de la loi. Ce facteur sera évalué dans le cadre de processus réglementaires, mais si on instaure un seuil précis comme celui-ci, le CRTC risque de ne pas pouvoir déterminer adéquatement quels services sont particulièrement bien placés pour contribuer de façon importante à la réalisation de ces objectifs.

Le président : J’ai également quelques réflexions à formuler à cet égard.

Honorables sénateurs, c’est un amendement. Je sais que le leader du gouvernement en minimise l’importance, mais je n’énumérerai pas la pléthore de témoins qui ont comparu devant le comité pour dire qu’ils pensaient que c’est une des dispositions les plus affligeantes de ce projet de loi et qu’il faut rectifier la situation. C’est l’avis de producteurs de contenu numérique et d’un certain nombre d’anciens présidents du CRTC et pas d’un seul, il me semble. Un certain nombre de parties prenantes ont fait savoir que cette disposition est problématique.

J’ai entendu plus tôt le leader du gouvernement dire qu’il s’oppose à ce projet de loi parce que — si j’ai bien entendu — cela inciterait les Canadiens à tricher et, essentiellement, à contourner certaines règles. Bien entendu, si ces règles n’étaient pas imposées pour commencer, les producteurs de contenu, ces travailleurs autonomes qui génèrent des revenus pour eux-mêmes et pour le pays, ne seraient pas encouragés à tricher.

Je suis un peu déçu d’entendre un pareil point de vue.

Nous avons également entendu un ancien président du CRTC possédant une vaste expérience affirmer qu’il sera extrêmement difficile pour le CRTC de gérer des pouvoirs et des paramètres d’une telle ampleur. Je suppose que c’est une des principales motivations derrière cet amendement, avec le fait que le gouvernement refuse de rendre les instructions publiques.

Chaque intervenant, chaque leader du gouvernement, voudra se présenter devant le CRTC pour essentiellement demander des exemptions aux conditions et faire valoir que telle ou telle entité est conforme à ces lignes directrices. Pouvez-vous imaginer cela? Ce sera un exercice sans fin si le CRTC est aussi transparent que ce que le président prévoit en l’occurrence. Combien d’années dureront les audiences tenues auprès des intervenants? À défaut de quoi, la bonne volonté exprimée publiquement — c’est-à-dire la volonté du CRTC d’entendre chaque cas et de faire preuve de transparence — ne sera tout simplement pas au rendez-vous.

Par conséquent, le parrain du projet de loi ou le leader du gouvernement, que nous avons le privilège d’avoir avec nous, peut-il me dire quel sera le résultat lorsqu’une foule d’intervenants ne pourront pas se faire entendre devant le CRTC parce que tout le processus deviendra si lourd qu’il ne sera pas possible d’entendre ces intervenants? Quel sera le plan de secours du gouvernement pour entendre ces gens?

Par ailleurs, convenez-vous, monsieur le leader du gouvernement, que cet élément du projet de loi, ainsi que deux ou trois autres, pourrait être clairement rectifié si les instructions étaient rendues publiques?

Le sénateur Gold : Par respect pour le président, je ne vais pas refuser de répondre à une question. Je ne suis pas un témoin. Je suis ici pour exposer la position du gouvernement, et je l’ai exposée clairement. La question a été examinée en détail par des témoins, dans le cadre de discussions, et par nos fonctionnaires, à maintes reprises aujourd’hui.

La position du gouvernement est claire. Je pense que la question a été examinée comme il se doit. Nous comprenons ce qui s’est passé à l’autre endroit lorsque des amendements comme celui-ci et des sous-amendements subséquents ont été présentés. J’espère que tous les Canadiens qui nous regardent peuvent voir notre comité à l’œuvre.

Je pense qu’il est temps de passer au vote.

Le président : Monsieur le leader du gouvernement, certes, vous n’êtes pas un témoin, mais vous représentez quand même le gouvernement devant notre comité. Là encore, vous êtes libre de répondre ou non aux questions.

J’ai participé au débat. Je sais que le sénateur Plett tenait à ajouter quelque chose avant que nous passions au vote, comme il l’a dit tout à l’heure.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le président. En effet, j’ai quelque chose à ajouter.

Le sénateur Gold a raison. Cette question a été débattue, et j’espère moi aussi, à l’instar du sénateur Gold, que les Canadiens qui nous regardent constatent que les gens ici essaient d’y réfléchir sérieusement et de corriger les choses, car peu importe le gouvernement au pouvoir, des erreurs sont commises à l’occasion, et nous croyons que le gouvernement actuel fait quelques erreurs.

Je partage certainement la volonté du sénateur Gold et j’espère, comme lui, que les Canadiens regardent les délibérations de notre comité et se rendent compte que nous tenons un débat approfondi sur cette question, au lieu de l’étudier à toute vapeur comme cela a été fait à l’autre endroit.

L’amendement dont le comité est saisi en ce 29 novembre, monsieur le président, vient ajouter une nouvelle exclusion, et il se lit actuellement comme suit :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 2, à la page 4, par adjonction, après la ligne 2, de ce qui suit :

« (2.4) La présente loi ne s’applique pas aux entreprises en ligne dont les revenus au Canada tirés d’abonnements payants et de publicité intégrée ne dépassent pas cent cinquante millions de dollars annuellement. ».

J’aimerais proposer un sous-amendement pour que le montant de 150 millions de dollars soit remplacé par 100 millions de dollars, et nous reformulons également l’amendement comme suit :

La présente loi ne s’applique pas aux entreprises en ligne dont les revenus au Canada tirés d’abonnements payants et de publicité intégrée ne dépassent pas cent millions de dollars annuellement et qui comptent plus de cent mille abonnés au Canada.

Monsieur le président et chers collègues, la dernière fois que nous avons examiné cet amendement de la sénatrice Batters au cours de notre réunion du 23 novembre, M. Ripley venait de répondre à une question en faisant part de la préoccupation du gouvernement au sujet de l’amendement. Voici ce qu’il a déclaré :

À l’heure actuelle, le CRTC, par l’entremise de divers processus réglementaires, a évalué quelles devraient être les obligations des grandes et des petites entreprises, et ces exigences sont différentes. Par exemple, les obligations qui sont imposées aux entreprises comptant moins de 200 000 abonnés sont différentes de celles imposées aux grandes entreprises détenues par de grands groupes.

M. Ripley a ajouté :

En ce qui concerne l’établissement d’un seuil, le gouvernement est notamment préoccupé par les conséquences imprévues que celui-ci pourrait avoir. Par exemple, à 150 millions de dollars — soit le montant proposé —, les services en ligne exploités par CBC/Radio-Canada, par exemple, seraient exclus. Le gouvernement est d’avis que CBC/Radio-Canada est particulièrement bien placée pour contribuer aux objectifs stratégiques de la loi. Cette disposition exclurait CBC Gem, probablement, ainsi qu’ICI TOU.TV.

Le problème perçu tient à la surabondance de règles claires qui réduit la capacité du CRTC de prendre des règlements sensés, en fonction de la nature des entreprises.

Je me demande si l’une des façons d’y remédier ne serait pas d’abaisser le seuil prévu dans l’amendement, en le faisant passer de 150 à 100 millions de dollars. Ce montant serait conforme au témoignage que nous avons entendu de la part de M. Konrad von Finckenstein, ancien président du CRTC.

Lors de sa comparution devant notre comité, M. von Finckenstein a proposé ce qui suit :

[...] je vous invite à apporter un amendement au projet de loi visant à ajouter un paragraphe 2(4), qui se lirait comme suit :

La loi vise seulement les entreprises en ligne qui comptent plus de 100 000 abonnés au Canada ou dont les revenus générés au Canada dépassent les 100 millions de dollars.

M. von Finckenstein a appuyé sa proposition en déclarant ceci :

[...] le fait de se retrouver avec des pouvoirs aussi étendus, dont les paramètres sont aussi vagues, s’avérera extrêmement lourd pour le CRTC. Chaque partie prenante présentera des demandes d’exemption de conditions et fera valoir que cela relève des vastes pouvoirs accordés au CRTC. Il ne faut pas oublier que le CRTC est une cour d’archives qui cerne des problèmes, soit de son propre chef, soit par le biais de demandes; qui demande l’avis des parties et des intervenants concernés; qui tient des audiences, en direct ou sur papier; et qui rend ensuite une décision. Tout cela doit être fait dans le respect de la procédure et peut faire l’objet d’un appel judiciaire.

Par conséquent, limiter les pouvoirs permettra au CRTC de prendre des décisions judicieuses et ciblées en temps opportun. Bien sûr, l’objectif est de protéger et de renforcer la radiodiffusion canadienne et de favoriser la production canadienne. C’est pourquoi le projet de loi ne devrait viser que les grands diffuseurs en continu qui peuvent concurrencer de manière significative les diffuseurs établis. Les petits acteurs novateurs du Web devraient pouvoir utiliser pleinement leurs capacités d’innovation pour contribuer à la productivité globale de l’économie canadienne.

Chers collègues, je pense que le sous-amendement répondrait peut-être aux préoccupations soulevées par M. Ripley au nom du gouvernement.

Le président : La sénatrice Wallin souhaite intervenir au sujet du sous-amendement.

La sénatrice Wallin : J’aimerais obtenir un autre éclaircissement de la part de M. Ripley, si possible. Voici de quoi il s’agit. Je regarde la transcription du témoignage fourni par Morghan Fortier, de Skyship.

Elle a dit :

Alors que nous n’avons gagné que 370 000 $ ici au pays, nous avons payé 3,1 millions de dollars en impôts canadiens. Cela s’explique par le fait que nous sommes imposés sur nos revenus mondiaux et que la majorité de nos vues et de nos revenus proviennent de l’extérieur du Canada, comme c’est le cas pour la plupart des créateurs de contenu numérique.

À votre avis, comment cette situation serait-elle prise en compte lorsque vous déterminerez les personnes qui seraient visées ou exclues?

M. Ripley : Je vous remercie de votre question, sénatrice Wallin. Si je comprends bien le modèle d’affaires de Mme Fortier, son entreprise se classe dans la catégorie des créateurs de médias sociaux, car la distribution de son contenu se fait sur des plateformes de médias sociaux. Ainsi, en raison du paragraphe 2(2.1) proposé, que j’ai mentionné plus tôt, l’entreprise de Mme Fortier n’est pas considérée comme une entreprise en ligne parce qu’elle s’appuie sur les services de médias sociaux pour la distribution. La question de savoir quels sont les revenus de Mme Fortier ne s’applique pas puisque, je le répète, son entreprise n’est pas considérée comme une entreprise en ligne aux termes du projet de loi, tel que rédigé. Il n’est pas question d’imposer des obligations réglementaires à son entreprise au même titre qu’une entreprise de radiodiffusion.

La sénatrice Wallin : Cependant, si vous cherchez à obtenir de l’argent, ce qui est le but de cette disposition, et que vous taxez les gens, ce qui signifie que vous êtes au courant de leurs revenus mondiaux et de la façon dont ils les génèrent... je reviens toujours à la même question. C’est complètement arbitraire. Si cette entreprise prend de l’ampleur et génère encore plus de revenus à l’échelle mondiale que le montant qu’elle a mentionné ici, le CRTC pourrait décider qu’elle est assujettie à la loi; ce serait du ressort des conseillers.

M. Ripley : Dans la mesure où le modèle d’affaires s’appuie sur les services de médias sociaux pour la distribution, le CRTC n’a pas le pouvoir discrétionnaire de décider, du jour au lendemain, qu’une entité est une entreprise de radiodiffusion et qu’elle est assujettie à la loi. Le paragraphe 2(2.1) du projet de loi parle d’« utilisateur », et il peut s’agir d’une entreprise. En voici le libellé :

Ne constitue pas l’exploitation d’une entreprise de radiodiffusion pour l’application de la présente loi le fait, pour l’utilisateur d’un service de média social, de téléverser des émissions en vue de leur transmission par Internet et de leur réception par d’autres utilisateurs, pourvu que cet utilisateur ne soit pas le fournisseur du service, son affilié ou le mandataire de l’un deux.

Le CRTC n’a aucun pouvoir discrétionnaire lui permettant de décider tout à coup...

La sénatrice Wallin : Sauf en ce qui concerne les trois critères applicables.

M. Ripley : Les trois facteurs se rapportent au contenu publié sur un service de média social, mais il ne s’agit pas de décider soudainement que Mme Fortier et Skyship Entertainment constituent une entreprise en ligne. Par contre, YouTube — c’est-à-dire le service de média social ou la plateforme de distribution — pourrait être assujetti à la loi pour contribuer au système, en effet.

Le président : J’ai quelques questions sur le sous-amendement, et elles s’adressent en général à M. Ripley. Les fonctionnaires sont-ils d’accord pour dire que l’instauration d’un seuil allégerait le fardeau réglementaire? Si vous en convenez, quel est alors le problème?

M. Ripley : À l’heure actuelle, le système de radiodiffusion conventionnel part du principe qu’il est interdit d’exploiter une entreprise de radiodiffusion sans licence. Notre système est fondé sur les licences, et la seule façon d’exploiter actuellement une entreprise de radiodiffusion sans licence au Canada, c’est d’obtenir une exemption de licence. À l’avenir, cela ne s’appliquera pas aux entreprises en ligne. Le point de départ pour les entreprises en ligne, c’est qu’elles peuvent exploiter tout service basé sur Internet au Canada sans la permission du CRTC. On part du principe qu’il n’est pas nécessaire de demander une autorisation pour exploiter une telle entreprise. C’est une inclusion proactive.

Nous nous attendons à ce que le CRTC utilise, dans le cadre de ses processus réglementaires, des choses comme des seuils pour préciser que les entreprises dont les revenus sont supérieurs à tel ou tel montant ou qui comptent un nombre x d’abonnés canadiens — ou peu importe les autres facteurs qu’il déterminera — sont censées contribuer au système de radiodiffusion. Si on ne répond pas à ces critères, on n’a pas besoin de demander une exemption. On n’est pas visé. On n’est assujetti à aucune réglementation — donc, nul besoin d’exemption. Le projet de loi reconnaît que le point de départ, dans le contexte d’Internet, c’est qu’aucune autorisation n’est nécessaire pour exploiter ce genre d’entreprise.

Il y a donc un changement qui se produit ici. Je reconnais que, dans le système conventionnel actuel, il faut demander une exemption. Cependant, il n’est pas nécessaire de demander une exemption pour une entreprise en ligne basée sur Internet.

Le président : Ce n’est pas nécessaire, mais nous laissons au CRTC le soin d’en décider. Voilà ce que vous dites.

M. Ripley : Le CRTC décidera comment les services qui répondent à certains critères contribueront au système. Il précisera les attentes; par exemple, comme nous en avons déjà discuté lors d’autres réunions, les services qui satisfont à ces critères pourraient être tenus de consacrer, chaque année, un certain montant à des émissions canadiennes. Ces obligations seront établies au moyen d’ordonnances ou de règlements.

La sénatrice Wallin : Quand vous dites qu’il y a un ensemble de critères, seront-ils énoncés dans les règlements que nous n’avons pas encore vus?

M. Ripley : Les règlements ou les ordonnances du CRTC seront clairs quant à leur application. Je le répète, c’est déjà le cas. Le sénateur Plett a cité un extrait du témoignage que j’ai donné au cours de la dernière réunion. Par exemple, à l’heure actuelle, il existe différents instruments réglementaires qui s’appliquent à différentes entreprises, selon le nombre d’abonnés qu’elles comptent. Nous pouvons nous attendre à quelque chose de similaire lorsque le CRTC mettra en place des obligations réglementaires concernant les services de diffusion en continu.

Le sénateur Plett : Monsieur Ripley, comment résoudre la quadrature du cercle quand un ancien président, M. von Finckenstein, contredit complètement ce que vous dites? En fait, l’amendement correspond à ce qu’il a recommandé. La semaine dernière, vous avez clairement dit que le seuil de 150 millions de dollars reste trop élevé. Si nous essayons d’abaisser ce seuil, donnez-nous le chiffre et dites-nous que M. von Finckenstein a tort. Encore une fois, avec tout le respect que je vous dois, monsieur Ripley, c’est ce que l’ancien président du CRTC nous a recommandé de faire.

M. Ripley : Je vous remercie, sénateur Plett. L’ancien président a certainement droit à son opinion. Il a manifestement de l’expérience pour parler de ces questions. Ce n’est pas à moi, ici aujourd’hui, de changer la position du gouvernement. Ce n’est pas à moi de le faire. C’est une question que les parlementaires doivent examiner. J’ai exposé la position du gouvernement et les raisons qui la justifient. Malheureusement, ce n’est pas à moi de déterminer un seuil financier.

Le sénateur Plett : Je vous remercie, monsieur Ripley. Vous avez au moins clarifié une chose, à savoir que ce n’est pas votre opinion, mais celle du gouvernement. Je vous suis donc reconnaissant de votre franchise.

Le sénateur Manning : En fin de compte, monsieur Ripley, pour l’instant, il n’y aura pas de seuil dans la loi. Si le CRTC décidait plus tard d’ajouter un seuil aux obligations réglementaires ou aux critères, serait-il en mesure d’en instaurer un? Le CRTC pourrait-il le faire même si cela ne figure pas dans le projet de loi à l’heure actuelle?

M. Ripley : Je vous remercie de votre question, sénateur Manning. La réponse est oui. En fait, nous nous attendons à ce que, dans ses règlements et ses ordonnances, le CRTC énonce clairement leur application en fonction d’une sorte de critère ou de seuil. J’ai souligné, par exemple, qu’il existe actuellement des règles pour les petites, moyennes et grandes entreprises de radiodiffusion et que ces règles contiennent généralement un seuil lié au nombre d’abonnés.

Le CRTC déterminera ce qui est logique en fonction du contexte.

Le président : Plus j’entends de réponses sur ces questions, plus nous en débattons et plus nous entendons le ministre, le gouvernement et le président actuel du CRTC, plus j’ai l’impression qu’on nous dit : « Je me réserve le droit de faire demain ce que je promets de ne pas faire aujourd’hui. » C’est vraiment ce qui me préoccupe, et c’est pourquoi j’appuie le sous-amendement. Il est temps de mettre aux voix ce sous-amendement, s’il n’y a pas d’autres observations.

Des voix : D’accord.

Le président : Sénateur Plett, pouvez-vous répéter le sous-amendement pour les légistes?

Le sénateur Plett : Je propose :

La présente loi ne s’applique pas à une entreprise en ligne dont les revenus annuels au Canada tirés d’abonnements payants et de publicité intégrée ne dépassent pas cent millions de dollars et qui compte plus de cent mille abonnés au Canada.

Le président : Le texte est en cours d’impression et sera distribué dans quelques secondes.

Distingués collègues, pendant les mises aux voix, ayez l’obligeance d’appuyer sur le bouton de votre micro lorsque vous signifiez votre vote. Certains auditeurs de la procédure ont exprimé le désir de savoir comment les sénateurs votent. Si vous n’appuyez pas sur votre bouton, la seule façon qu’ils ont de savoir, c’est de lire sur vos lèvres. Ils entendent toutefois le résultat.

Distingués collègues, vous avez tous le sous-amendement devant vous. Il est proposé par le sénateur Plett :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 2, à la page 4, par adjonction, après la ligne 2, de ce qui suit :

« (2.4) La présente loi ne s’applique pas aux entreprises en ligne dont les revenus au Canada tirés d’abonnements payants et de publicité intégrée ne dépassent pas cent millions de dollars annuellement. ».

... et qui compte plus de cent mille abonnés au Canada.

Le sous-amendement est-il adopté?

Des voix : Oui.

Des voix : Non.

Le président : Je crois que le « non » l’emporte.

Le sénateur Plett : Je demande un vote par appel nominal, monsieur le président.

Le président : Le sénateur Plett demande la tenue d’un vote par appel nominal.

[Français]

Vincent Labrosse, greffier du comité : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Non.

M. Labrosse : Pour : 3; contre : 11; abstention : aucune.

[Traduction]

Le président : Le sous-amendement est donc rejeté.

Nous passons à l’amendement principal. Certains sont pressés de faire le travail rapidement; d’autres sont plus diligents.

Honorables sénateurs, sommes-nous d’accord au sujet de cet amendement?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Le président : Il semble que le camp du « non » l’emporte.

Le sénateur Plett : Je demande un vote par appel nominal, monsieur le président.

Le président : Nous avons une demande de vote par appel nominal au sujet de l’amendement principal.

[Français]

M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Oui.

M. Labrosse : Pour : 4; contre : 10; abstention : aucune.

[Traduction]

Le président : L’amendement est donc rejeté.

Reprise du débat sur l’article 2. Y a-t-il d’autres amendements?

La sénatrice Miville-Dechêne : Il a déjà été distribué, mais nous pouvons peut-être le distribuer à nouveau. C’est C11-2-4-5.

Le président : Nous allons distribuer à nouveau l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Je vais m’exprimer en français pour lire cet amendement. Est-ce que vous l’avez tous en main?

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 2, à la page 4 :

a) par substitution, à la ligne 5, de ce qui suit :

« a) la liberté d’expression et l’indépen- »;

b) par substitution, à la ligne 9, de ce qui suit :

« b) le droit des personnes à la protection de leur vie privée;

c) l’engagement du gouvernement du ».

Ce n’est pas si simple à comprendre de cette façon, mais je vais vous l’expliquer beaucoup plus simplement. L’ajout que l’on fait, c’est l’alinéa b). Nous sommes à la page 4 du projet de loi, je vous le rappelle, et nous souhaitons inclure dans ce projet de loi une disposition sur le droit des personnes à la protection de leur vie privée.

[Traduction]

Donc en anglais, nous ajoutons « the right of privacy to individuals ».

[Français]

Je n’ai rien inventé, ceci vient directement d’une recommandation du commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Philippe Dufresne, qui est venu nous parler au mois de septembre, au début de cette étude. Je vais le citer dans le texte :

Compte tenu de ce qui précède et de l’importance fondamentale de la protection de la vie privée, le Comité pourrait envisager une modification à l’article 3 de la Loi sur la radiodiffusion, afin d’y ajouter la protection de la vie privée des personnes en tant qu’objectif de la politique à cet égard dans la Loi. Cette approche serait similaire à celle adoptée dans la Loi sur les télécommunications. Elle permettrait de s’assurer que la protection de la vie privée est pleinement prise en compte dans l’interprétation et l’application du projet de loi, tant par le CRTC que par les entités réglementées et les tribunaux.

C’étaient les paroles du commissaire à la protection de la vie privée du Canada, Philippe Dufresne. Je vous rappelle que, dans nos recherches et nos décisions, nous avons choisi de mettre cet article à la page 4, sous le titre « Interprétation ». Il s’agit bel et bien d’une clause interprétative qui fait que cette protection de la vie privée sera interprétée à travers tout le projet de loi, surtout pour toutes les parties prenantes à ce projet de loi. Dans un contexte où Internet, comme vous le savez, pose des questions importantes en ce qui a trait à la protection de la vie privée, il est plus que nécessaire d’avoir une disposition qui a une portée assez large, afin de pouvoir minimiser les accrocs à la protection de la vie privée.

Je vais m’arrêter là-dessus. S’il y a des questions, je serai heureuse d’y répondre.

[Traduction]

Le sénateur Manning : J’ai quelques questions pour les fonctionnaires, monsieur le président, si je peux commencer par là, et ensuite j’aurai peut-être un sous-amendement à proposer à l’amendement de la sénatrice.

Le commissaire à la protection de la vie privée a-t-il été consulté avant le dépôt du projet de loi? Si la réponse à cette question est oui, le commissaire à la protection de la vie privée a-t-il soulevé la préoccupation que la sénatrice Miville-Dechêne soulève présentement? Si c’est le cas, pourquoi ces préoccupations n’ont-elles pas été enchâssées d’office dans le projet de loi? Cette question s’adresse aux fonctionnaires.

M. Ripley : Merci de votre question, sénateur. Nous nous souvenons que le commissaire à la protection de la vie privée n’a pas été officiellement consulté avant le dépôt du projet de loi. Cependant, comme vous le savez, il a participé au processus parlementaire, y compris en comparaissant devant ce comité.

Le sénateur Manning : On pourrait penser que cela aurait fait partie des discussions antérieures. Pourquoi le projet de loi a-t-il été rédigé sans dispositions sur la protection de la vie privée, comme celles mises de l’avant par la sénatrice Miville-Dechêne? La vie privée est une chose à laquelle nous accordons beaucoup d’importance. Bon nombre de nos témoins l’ont souligné. Je me demande pourquoi nous proposons un amendement maintenant. Y a-t-il une raison pour laquelle cela n’a pas été pris en compte dès le début?

M. Ripley : Merci de cette question, sénateur Manning. C’est en partie parce que nous estimons que les répercussions que la Loi sur la radiodiffusion pourrait avoir sur la vie privée sont déjà adéquatement traitées par le fait que le CRTC est assujetti à la Loi sur la protection des renseignements personnels. En effet, le CRTC figure dans les annexes de cette loi, ce qui l’oblige à en observer les obligations.

L’objet principal de la Loi sur la radiodiffusion n’est pas la protection de la vie privée des gens. Ce n’est pas la raison d’être de cette loi. Toutefois, cela n’enlève rien au fait que le CRTC doit respecter ses obligations au chapitre de la protection des renseignements personnels et de la vie privée des particuliers.

Je considère l’amendement proposé comme une indication que le CRTC doit se rappeler qu’il doit interpréter la loi en respectant le droit à la vie privée des personnes. De plus, je note que l’amendement tel qu’il est rédigé fait référence au concept qui lui permettra de rester toujours d’actualité à mesure que les cadres de protection de la vie privée et la compréhension que nous avons de cette notion continueront d’évoluer dans le contexte canadien.

Le sénateur Manning : J’aimerais proposer un sous-amendement à l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne. Après les mots « le droit des personnes à la protection de leur vie privée », j’aimerais ajouter une formulation plus substantielle concernant la protection des renseignements personnels et le partage ou la divulgation non autorisés. L’article, tel que modifié par le sous-amendement, se lirait alors comme suit :

(3) L’interprétation et l’application de la présente loi doivent se faire d’une manière qui respecte :

a) d’une part, la liberté d’expression et l’indépendance, en matière de journalisme, de création et de programmation, dont jouissent les entreprises de radiodiffusion;

(b) le droit à la vie privée des individus, y compris la protection de leurs renseignements personnels contre tout partage non autorisé ou toute divulgation non autorisée;

b) d’autre part, l’engagement du gouvernement du Canada à favoriser l’épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire et à appuyer leur développement, ainsi qu’à promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne.

Je propose cet amendement parce que, lorsque le commissaire à la protection de la vie privée a comparu devant notre comité, il a évoqué les répercussions potentielles du projet de loi sur la protection de la vie privée et a déclaré :

[...] la mise en œuvre du projet de loi d’une manière qui garantit que les renseignements demandés sont dépersonnalisés ou anonymisés est essentielle et mon bureau sera disponible pour fournir les conseils et l’orientation nécessaires.

Il a recommandé que le projet de loi soit modifié pour aller dans le même sens que l’approche adoptée dans la Loi sur les télécommunications, ce qui garantirait que la protection de la vie privée soit pleinement prise en compte lors de l’interprétation et de la mise en œuvre du projet de loi par le CRTC, les entités réglementées et les tribunaux.

Également, lors de sa comparution devant notre comité, Fenwick McKelvey, professeur agrégé à l’Université Concordia, a recommandé qu’en raison des dispositions du projet de loi relatives à la possibilité de découverte, ledit projet de loi soit modifié de manière à contribuer à la protection de la vie privée des personnes et à reconnaître l’importance publique et culturelle des renseignements les concernant.

L’amendement robuste qui est proposé viendra préciser que la protection de la vie privée comprend la protection de leurs renseignements personnels contre tout partage non autorisé ou toute divulgation non autorisée. Le sous-amendement vise à garantir qu’à notre époque où tant de renseignements personnels sont en ligne et peuvent être découverts, les Canadiens pourront, dans toute la mesure du possible, garder le contrôle sur ces renseignements.

Distingués collègues, nous vivons à une époque où la technologie a une capacité énorme d’empiéter sur la vie privée des gens. Comme l’a noté le commissaire à la protection de la vie privée, le projet de loi lui-même comporte de nombreux signes indiquant qu’il existe une intention de mettre au jour des masses d’informations sur les créateurs et les consommateurs canadiens, sur leurs habitudes de visionnement, leur nationalité, leurs préférences, leurs intentions, etc. Cela cautionne la nécessité d’inclure au moins un clin d’œil à la protection de la vie privée aux termes de l’objectif fondamental de la Loi sur la radiodiffusion.

J’appuie l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne. Le sous-amendement que je propose a pour but de le renforcer et d’ainsi donner suite à la recommandation du commissaire à la protection de la vie privée. Je vous remercie.

Le président : Sénateur Manning, auriez-vous par hasard le sous-amendement par écrit, le vrai texte?

Le sénateur Manning : Non, je ne l’ai pas.

Le président : Vous ne l’avez pas sous forme de texte? Pourriez-vous le répéter?

Le sénateur Manning : Ce qui suit est celui du sénateur Miville-Dechêne : « b) le droit des personnes à la protection de leur vie privée ». Je veux ajouter « y compris la protection de leurs renseignements personnels contre tout partage non autorisé ou toute divulgation non autorisée; ».

Le président : « Le partage de la divulgation non autorisée. »

Le sénateur Manning : « Tout partage non autorisé ou toute divulgation non autorisée ».

Le sénateur Gold : Le gouvernement appuie l’idée d’invoquer la vie privée dans ce projet de loi. Comme nous le savons tous, la protection de la vie privée est un enjeu important, un enjeu que nous respectons. Néanmoins, le gouvernement n’appuie pas ce sous-amendement.

Le gouvernement est d’avis qu’un amendement visant à assurer que le CRTC réglemente d’une manière qui respecte la vie privée des personnes est mieux placé dans un article de fond, soit l’article 5 de la loi, et non dans un article portant sur l’interprétation. En effet, cela permettrait d’atteindre le même objectif.

Je crois savoir que le parrain du projet de loi présentera un amendement lorsque nous arriverons à l’article 5. Cet amendement aura cependant pour effet de renforcer la protection de la vie privée des Canadiens qui utilisent les services de diffusion en continu et de radiodiffusion. Il ajoutera la protection de la vie privée des personnes aux critères que le CRTC doit prendre en compte lors de l’élaboration des règlements.

Nous soutenons l’idée de la protection de la vie privée. Merci, sénatrice Miville-Dechêne, d’avoir présenté cela. Nous pensons qu’il existe une protection plus forte, une meilleure façon de protéger la vie privée dans l’article 5. Voilà pourquoi nous nous opposons à ce sous-amendement.

Le président : Monsieur Ripley, nous avons maintenant confirmé que le ministère et le gouvernement n’ont pas consulté le commissaire à la protection de la vie privée avant de rédiger le projet de loi. A-t-on demandé au ministère de la Justice de donner son avis sur les questions de protection de la vie privée relatives à ce projet de loi?

M. Ripley : Merci, monsieur le sénateur. Le ministère de la Justice a effectivement été consulté sur l’examen du projet de loi par rapport à la Charte, qui comprend, évidemment, certains aspects de la vie privée. C’est dans cette optique que le projet de loi a été examiné.

Le président : Le ministère serait-il en mesure de faire part des conclusions de cet examen au comité, simplement en ce qui concerne la question de la vie privée?

M. Ripley : Comme vous le savez probablement, monsieur le président, je vous renvoie à l’énoncé de la Charte qui est publié avec chaque projet de loi déposé par le gouvernement et qui se penche sur toutes les dispositions applicables de cette dernière.

Le président : Sénatrice Miville-Dechêne, je suis de ceux qui reconnaissent le bien-fondé de cet amendement. Je suis content de voir le gouvernement reconnaître maintenant — dans le style « il était moins une » — qu’il a manqué son coup en ce qui a trait à la protection de la vie privée. Je trouve cela assez flagrant.

En fin de compte, alors que nous tentons de réorganiser la Loi sur la radiodiffusion à l’ère des plateformes numériques, le ministère et le gouvernement n’ont pas jugé essentiel de munir ce projet de loi de dispositions à toute épreuve pour assurer la protection de la vie privée et n’ont pas jugé essentiel d’obtenir un avis sur ce projet de loi de la part du commissaire à la protection de la vie privée nommé par ce Parlement et ce gouvernement.

Honnêtement, nous savons que toutes les lois sont imparfaites, mais dans le cas d’une mesure de cette nature — qui aura des répercussions sur des centaines de milliers, voire des millions de Canadiens —, le fait qu’on n’ait même pas levé le petit doigt pour obtenir par écrit une opinion concrète du commissaire à la protection de la vie privée, qu’il s’agisse de l’ancien ou du nouveau commissaire, a de quoi déconcerter.

J’appuie cet amendement. J’attends avec impatience tout autre amendement ou toute autre disposition qui viendrait renforcer la protection de la vie privée. Je ne pense pas que l’un exclut l’autre, mais c’est mon opinion sur cet amendement particulier.

Le sénateur Plett : Monsieur le président, vous avez dit ce que je voulais dire. Je trouve cela très troublant. Ce n’est pas une question, mais plutôt une observation.

Ce que la sénatrice Miville-Dechêne dit à juste titre dans son amendement sur le droit à la vie privée des personnes, c’est qu’il faut répondre aux préoccupations soulevées par le commissaire à la protection de la vie privée. Le gouvernement n’a pas reconnu cela immédiatement et il continue de s’en défendre. Il est possible qu’un amendement à venir aborde cette question, mais nous ne le savons pas. Ce que nous savons, c’est ce que nous avons devant nous aujourd’hui.

Je soutiens également cette proposition. Je suis assez troublé par le fait que le gouvernement n’ait pas pris plus au sérieux les préoccupations soulevées par le commissaire à la protection de la vie privée.

Je soutiendrai le sous-amendement du sénateur Manning, mais je soutiendrai aussi très certainement l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne. Je vous remercie.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : En ce qui concerne la question du sous-amendement présenté par notre collègue le sénateur Manning, je voulais apporter une précision.

Vous avez fait référence à la politique des télécommunications canadienne dont a parlé Philippe Dufresne lors de son témoignage. Or, je voulais vous rappeler que, dans cette politique, la seule phrase qui est mentionnée est la suivante : « contribuer à la protection de la vie privée des personnes ». Il n’y a pas là un amendement plus long qui explique les tenants et aboutissants de ce que constitue la protection à la vie privée.

Étant donné que le commissaire Dufresne est mieux qualifié que moi pour écrire un amendement le plus vaste possible sur la vie privée, je suis en désaccord avec votre sous-amendement, qui me semble une répétition, ou à tout le moins une explication partielle ou incomplète du droit à la vie privée. Je pense qu’on devrait s’en tenir à cette phrase, comme nous l’a indiqué, avec une précision excessive, le commissaire à la vie privée. Nous avons choisi de nous en tenir exactement à ses recommandations puisqu’il est l’expert en la matière.

Par ailleurs, pour répondre au sénateur Gold, je vous remercie de dire que, effectivement, il faut inclure une disposition relative à la protection à la vie privée. Il est clair que le CRTC est soumis à des lois, j’en suis bien consciente. Toutefois, ce projet de loi ne touche pas seulement le CRTC; il touche aussi plusieurs entreprises privées, particulièrement des plateformes étrangères. Donc, il faut que ce soit clair que l’on prévoit là aussi une protection de la vie privée.

La raison pour laquelle je suis d’avis qu’il faut que cet amendement figure dans l’article, comme je l’ai fait — et cet article, je vous le rappelle, est une clause interprétative et non substantive —, c’est à cause du paragraphe 5(3) de la Loi sur la radiodiffusion originale, qui dit ceci :

[Traduction]

(3) Le Conseil privilégie, dans les affaires dont il connaît, les objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion en cas de conflit avec ceux prévus au paragraphe (2).

Je vais donc traduire. Cela signifie que s’il y a un conflit, l’article qui a la priorité serait celui proposé dans mon amendement à l’article 2, plutôt que le paragraphe 5(2).

Ma conviction, après quelques recherches, c’est que si nous plaçons cette nouvelle disposition au paragraphe 2(3), comme je l’ai fait, elle a plus de chance d’être vastement appliquée que s’il est placé à l’article 5.

Le président : Sénatrice Miville-Dechêne, êtes-vous disposée à répondre à une brève question?

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui, je le suis.

Le président : Sans un amendement, comme le sous-amendement du sénateur Manning ou votre amendement, croyez-vous que ce projet de loi serait inapte à survivre à une contestation constitutionnelle devant les tribunaux sur cette question de la protection de la vie privée?

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Vous me permettrez de ne pas répondre à cette question.

Monsieur le président, je ne suis pas juriste. Ma priorité est d’essayer de protéger toutes les parties prenantes qui auront affaire à cette loi, les audiences comme les créateurs de contenu et les petits comme les grands joueurs.

Bien sûr, des lois existent et les lois permettent de recueillir des données quand cela se fait au nom d’une loi adoptée par le Parlement, mais il y a toutes sortes de limites à l’utilisation de ces données. Il est aussi très important — et on en a parlé — d’anonymiser ces données pour qu’on puisse avoir une idée de qui fait quoi, sans que les données personnelles des citoyens soient mises en cause. Cependant, je n’irai pas dans cette direction-là et je vous remercie de la question.

Le président : Merci beaucoup.

Le sénateur Dawson : Je confirme que je vais proposer un amendement à l’article 5 en ce qui a trait à l’aspect substantif. Le gouvernement a écouté le commissaire, qui a témoigné devant le comité. Nous avons tenu de nombreuses réunions et consultations et nous avons entendu beaucoup de témoignages. Nous avons écouté le commissaire et nous proposerons un amendement qui répondra à vos critères. Il n’est jamais trop tard pour bien faire les choses; c’est pourquoi nous avons ce devoir de second examen objectif.

Le président : C’est très apprécié, sénateur Dawson.

[Traduction]

Le sénateur Quinn : Merci, sénatrice Miville-Dechêne. J’ai bien aimé votre observation sur la clause substantive par rapport à la clause interprétative. Ma question est la suivante : pouvons-nous faire des modifications en ce sens aux deux endroits afin de parer à toute éventualité?

La sénatrice Miville-Dechêne : Nous devrions peut-être demander à nos experts.

Le sénateur Quinn : Oui. Merci. Je vais poser cette question au fonctionnaire.

Monsieur Ripley, pouvons-nous le faire aux deux endroits?

M. Ripley : Merci, sénateur Quinn, de cette question. La réponse courte est, oui, le comité pourrait le faire aux deux endroits. Cela servirait des objectifs légèrement différents. Encore une fois, là où la sénatrice Miville-Dechêne propose l’amendement, il s’agit d’une section d’interprétation qui s’applique à l’ensemble de la loi. Si je comprends bien, l’endroit où les leaders du gouvernement proposent de l’insérer demande spécifiquement au CRTC de considérer la chose dans le contexte de la politique réglementaire. En gros, disons que ces deux choses ne poseraient pas de problème de cohérence.

Le sénateur Quinn : Je vous remercie.

Le sénateur Manning : Permettez-moi d’ajouter quelque chose à cela. Je sais que le commissaire à la protection de la vie privée a assurément une grande expérience dans ce domaine, et c’est pour cela que je ne comprends pas pourquoi il n’a pas été consulté lors de la préparation du projet de loi.

Je suis également là depuis assez longtemps pour savoir que personne ne sait tout. Comme l’a très bien dit le sénateur Dawson, il n’est jamais trop tard pour bien faire.

Ma préoccupation porte uniquement sur les mots « le droit à la vie privée des personnes ». Bien que ce soit une occasion de répondre à cette préoccupation, le fait est que c’est une question ouverte. En proposant ce sous-amendement, j’essaie simplement de combler l’écart pour faire en sorte que, comme je l’ai dit, à une époque où il y a tant de renseignements personnels qui peuvent être découverts en ligne, les Canadiens puissent, dans la mesure du possible, garder le contrôle de leurs renseignements personnels.

L’objectif du sous-amendement était d’élargir ce que la sénatrice Miville-Dechêne a proposé pour s’assurer que les personnes, qui ne sont peut-être même pas conscientes que leurs renseignements sont disponibles en ligne, puissent être protégées d’une manière ou d’une autre. C’est le but de mon amendement. Je vais m’en tenir là. Je vous remercie.

Le sénateur Plett : Je comprends aussi ce que dit le sénateur Dawson, soit que le gouvernement a vu la lumière et a décidé d’agir, mais comme M. Ripley l’a souligné, le projet de loi peut être amendé aux deux endroits. Le gouvernement a alors, bien entendu, la chance de décider, lorsque le projet de loi sera de retour, s’il accepte l’un ou l’autre ou les deux amendements.

Nous n’enlevons assurément rien au gouvernement en amendant le projet de loi à deux endroits. J’appuie sans réserve le sous-amendement. Que le sous-amendement soit adopté ou non, j’ai bien l’intention d’appuyer l’amendement.

Le président : S’il n’y a pas d’autre intervenant, je vais mettre le sous-amendement aux voix.

Il est proposé par l’honorable sénateur Manning :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 2, à la page 4 :

a) par substitution, à la ligne 5, de ce qui suit :

« a) la liberté d’expression et l’indépen- »;

b) par substitution, à la ligne 9, de ce qui suit :

« b) le droit des personnes à la protection de leur vie privée;

c) l’engagement du gouvernement du ».

Et :

Que la motion d’amendement soit modifiée en remplaçant le texte proposé à l’alinéa b) par ce qui suit :

« b) le droit des personnes à la protection de leur vie privée, y compris à la protection de leurs renseignements personnels contre toute communication ou divulgation non autorisée; ».

Le sous-amendement est-il adopté?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Le président : Je pense que les « non » l’emportent. Le sénateur Manning demande un vote par appel nominal.

[Français]

M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Abstention.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Oui.

M. Labrosse : Pour : 4; contre : 9; abstention : 1.

[Traduction]

Le président : Par conséquent, le sous-amendement est rejeté.

Le sénateur Plett : Monsieur le président, je suis désolé, mais nous allons devoir poursuivre encore un peu sur ce point. Je vais proposer un autre sous-amendement.

Le président : L’avez-vous avec vous?

Le sénateur Plett : Il n’est pas rédigé, non, mais il est très court. Il s’agit d’ajouter les mots « et les créateurs » après les mots « les entreprises de radiodiffusion ».

L’article modifié par l’amendement et le sous-amendement se lirait :

(3) L’interprétation et l’application de la présente loi doivent se faire d’une manière qui respecte :

a) la liberté d’expression et l’indépendance, en matière de journalisme, de création et de programmation, dont jouissent les entreprises de radiodiffusion et les créateurs;

b) le droit des personnes à la protection de leur vie privée;

c) l’engagement du gouvernement du Canada à favoriser l’épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire et à appuyer leur développement, ainsi qu’à promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne.

Chers collègues, les créateurs qui sont venus témoigner nous ont souvent fait part de leurs préoccupations au sujet de ce projet de loi. Morghan Fortier, copropriétaire et présidente-directrice générale de Skyship Entertainment, nous a dit :

Ce qui me tient éveillée la nuit, à propos de ce projet de loi, c’est le risque qu’on interdise du contenu jugé non canadien, à l’entrée ou à l’intérieur du pays.

Scott Benzie, directeur général de Digital First Canada, s’est dit inquiet du fait que le projet de loi s’applique à l’ensemble de l’Internet. Il faut qu’il y ait des garde-fous.

Oorbee Roy, une créatrice de contenu et skateboardeuse, nous a dit :

C’est déprimant pour moi de voir que mon contenu sera mis de côté. [...] Qu’on puisse me mettre de côté et décider à ma place de ce que mon public veut voir, je ne peux pas lutter contre ça. Je suis vraiment découragée. C’est comme cela que je me sens.

Par ailleurs, les créateurs ont parlé de ce que la liberté d’expression à l’ère numérique moderne signifie pour eux et des possibilités formidables qui en découlent. Frédéric Bastien Forrest, chroniqueur et producteur de contenu, nous a dit :

Au sujet de la culture, 90 % des jeunes Canadiens dans la vingtaine regardent YouTube, et beaucoup d’entre eux regardent des créateurs canadiens — des créateurs du Manitoba, de l’Ontario, de l’Alberta, du Québec et de la francophonie canadienne.

M. Bastien Forrest a mentionné avoir regardé le rappeur franco-saskatchewanais Shawn Jobin sur YouTube. Il a dit :

Certaines de ses vidéos ont été vues plus de 100 000 fois. Ça, c’est notre culture francophone qui vit, qui circule, qui s’exporte.

Il a ajouté :

Ma chaîne YouTube à moi est en français, elle est suivie par plus de 30 000 personnes. La grande majorité des visionnements de ma chaîne proviennent du Québec et du Canada francophone. Environ 20 à 30 % de mes visionnements viennent de l’Europe, de la France et de la Belgique. Tous les jours, sur ma chaîne YouTube, un Européen consomme de la culture québécoise. À titre informatif, ma chaîne engendre entre 4 000 et 100 000 visionnements par mois. Pour plusieurs, ces chiffres sont minimes, mais pour nous au Québec, c’est suffisant pour en faire un métier.

L’entreprise Skyship Entertainment de Morghan Fortier, qui produit du contenu pour enfants et n’a été fondée qu’en 2015, a déjà un auditoire mondial pouvant atteindre chaque jour jusqu’à 30 millions de familles, salles de classe et garderies, dont un grand nombre de familles parmi les plus d’un million ici au Canada qui ont des enfants d’âge préscolaire à la maison.

Oorbee Roy s’est fait connaître sur TikTok et a mentionné au comité que grâce notamment à ses activités en ligne, elle gagne sa vie en inspirant les enfants et beaucoup d’autres gens. Elle nous a dit :

Ce sont des ouvertures à l’échelle mondiale. C’est vraiment excitant. Je me taille une vie à plein temps en tant que créatrice relativement petite. Je n’ai pas des millions d’adeptes. Je ne gagne pas des millions de dollars.

Chers collègues, ce que les témoins nous ont dit, c’est que les créateurs jouissent de la liberté d’expression en ligne et expriment leur indépendance en matière de création et de programmation. Toutefois, nous avons aussi entendu dire qu’ils ne se sentent pas suffisamment reconnus et protégés. En fait, ils craignent les répercussions de ce projet de loi. Cet amendement nous permettrait à tout le moins de leur montrer que nous les avons entendus. Nous pouvons affirmer que leur liberté d’expression et leur indépendance en matière de création et de programmation sont aussi reconnues.

La sénatrice Simons : Je comprends très bien l’esprit des commentaires du sénateur Plett, mais il parle d’une autre disposition. Cela ne concerne pas l’amendement dont nous sommes en train de discuter. Il s’agirait d’un amendement à la disposition 3a), alors que, si je comprends bien, l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne vise à créer une nouvelle disposition, la 3b).

Le président : Sénateur Plett, voulez-vous garder cet amendement?

La sénatrice Simons : Je ne sais pas si nous pouvons revenir en arrière...

Le président : Nous pouvons revenir en arrière s’il ne s’agit pas d’un sous-amendement. Vous dites qu’il s’agit de l’article 3?

La sénatrice Simons : Je disais que le sénateur Plett parle de la disposition 3a). Je ne suis pas nécessairement en désaccord avec ce qu’il dit, mais nous sommes en train de discuter de la disposition 3b).

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : J’ajouterais que c’est un amendement qui n’a pas grand-chose à voir avec le droit à la vie privée. En ce moment, l’amendement principal porte sur le droit à la vie privée. Ce que le sénateur Plett propose touche des éléments importants et intéressants, mais ils se trouvent dans une autre section. Habituellement, on étudie les sections dans l’ordre. Je ne crois pas que c’est un sous-amendement à mon amendement, c’en est un autre.

[Traduction]

Le président : Il semble en effet que ce soit un amendement distinct. Il faudrait...

Le sénateur Plett : Je vais le retirer pour l’instant et en faire un amendement distinct.

Le président : Il faudrait avoir la permission pour revenir en arrière. Sénateur Gold, vous vouliez intervenir?

Le sénateur Gold : Non, je vous remercie. Je n’ai rien à ajouter.

La sénatrice Simons : J’ai une question à propos de l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne.

Le président : Sénateur Plett, vous pouvez réserver votre amendement et le présenter plus tard.

Le sénateur Plett : Pouvons-nous revenir en arrière?

Le président : Nous ne pouvons pas revenir en arrière sans permission, à moins que cela s’applique à un autre moment.

Le sénateur Plett : Eh bien, je demande si nous avons la permission pour revenir en arrière et procéder ainsi.

La sénatrice Wallin : Vous ne pouvez pas revenir en arrière dans ce cas.

Le président : Nous ne pouvons donc pas revenir en arrière. C’est pourquoi il demande la permission de revenir à l’élément précédent.

En fait, je m’excuse, le greffier me dit que je n’ai pas besoin de permission. Vous pouvez revenir à l’article 2 à la prochaine réunion. Vous pouvez toutefois le réserver si vous le souhaitez, sénateur Plett.

Le sénateur Plett : Je peux le réserver, et ensuite nous pourrons revenir en arrière?

Le président : Oui.

Le sénateur Plett : D’accord.

Le président : Y a-t-il des questions au sujet de l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne?

Il est proposé par la sénatrice Miville-Dechêne que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 2, à la ligne 8. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Nous avons le consensus, alors l’amendement est adopté.

Le sénateur Gold : Je m’abstiens au nom du gouvernement.

Le président : Oui, je vous remercie. Ainsi, l’amendement est adopté avec dissidence.

Chers collègues, y a-t-il d’autres amendements au sujet de l’article 2?

Le sénateur Plett : Monsieur le président, est-ce ici que je présente mon amendement?

Le président : Oui, mais nous allons le réserver jusqu’à la prochaine réunion. Vous présentez votre amendement, mais nous le réservons jusqu’à la prochaine réunion.

Le sénateur Plett : D’accord. Eh bien, je l’avais proposé comme sous-amendement, mais je peux en parler à la prochaine réunion.

La sénatrice Wallin : Vous pouvez le présenter comme amendement, tout simplement.

Le président : Je comprends maintenant pourquoi le greffier veut le réserver. C’est parce que nous allons traduire votre amendement en français. Nous devons le réserver pour pouvoir le présenter.

Nous en sommes toujours à l’article 2. Y a-t-il d’autres amendements à cet article? Il n’y a pas d’autres amendements à l’article 2.

L’amendement du sénateur Plett est en cours de distribution.

Honorables collègues, l’amendement du sénateur Plett se lit :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 2, à la page 4, par substitution, à la ligne 8, de ce qui suit :

« diodiffusion et les créateurs; ».

Le sénateur Manning : Je n’ai pas de question pour le sénateur Plett, mais j’en ai quelques-unes pour les fonctionnaires.

On a souvent entendu dire lors des débats et par plusieurs témoins que le projet de loi n’offrait pas une protection adéquate aux créateurs, et je vais en citer quelques-uns. Cette protection a-t-elle fait l’objet de discussions à l’interne lors de la rédaction du projet de loi? Je ne vois nulle part le mot « créateur » dans le projet de loi, alors je me demande pourquoi ils ne sont pas mentionnés explicitement, alors qu’il en a été tant question lors de nos discussions.

M. Ripley : Je vous remercie, sénateur Manning. Par votre entremise, monsieur le président, l’entité — c’est-à-dire, l’entité réglementée ou assujettie à la réglementation prise en vertu de la Loi sur la radiodiffusion —, c’est le concept d’« entreprise de radiodiffusion ». La Loi sur la radiodiffusion porte essentiellement sur les entreprises de radiodiffusion et leurs contributions au système. Comme je l’ai mentionné dans mon échange avec la sénatrice Wallin, le projet de loi exclut clairement les créateurs des médias sociaux et prévoit qu’on ne doit pas les considérer comme des entreprises de radiodiffusion aux termes de la loi.

Au sujet de votre première question, sénateur, le gouvernement a, en effet, beaucoup pensé à la question des créateurs des médias sociaux lorsqu’il a déposé le projet de loi C-11. Voilà pourquoi il a présenté à nouveau l’article 4.1 proposé, qui exclut le contenu téléversé vers les services de médias sociaux, à l’exception du contenu commercial prévu à l’article 4.2.

Le simple fait que le mot « créateur » n’apparaisse pas dans le projet de loi ne veut pas dire que nous n’avons pas pris en compte leurs intérêts. Je répète que c’est parce que le projet de loi ne vise pas à réglementer les créateurs. La Loi sur la radiodiffusion cible les entreprises de radiodiffusion.

Le sénateur Manning : Selon vous, les créateurs sont protégés dans le projet de loi tel qu’il est rédigé actuellement?

M. Ripley : Je vais attirer votre attention sur quelques éléments contenus dans le projet de loi qui visent à tenir compte des intérêts des créateurs, soit le paragraphe proposé 2(2.1), qui les exclut du concept d’entreprise en ligne lorsqu’ils distribuent leur contenu via un média social, de même que l’article 4.1 proposé, qui exclut le contenu téléversé vers les services de médias sociaux.

Selon ce que je comprends, l’amendement proposé vise à élargir la portée de la disposition d’interprétation qui parle actuellement de la liberté d’expression et de l’indépendance en matière de journalisme, de création et de programmation non seulement pour faire mention des entreprises de radiodiffusion — qui, encore une fois, sont l’objet principal de la Loi sur la radiodiffusion et de la réglementation — mais aussi des créateurs. Cela obligerait le CRTC à examiner si ses processus réglementaires ont des répercussions pour les créateurs, encore une fois, en tenant compte du fait que les créateurs ne sont pas assujettis à la Loi sur la radiodiffusion et à la réglementation.

Le sénateur Manning : Est-ce que le libellé proposé dans le sous-amendement du sénateur Plett, par rapport au libellé actuel, entraînerait des contestations concernant l’application de la loi? Est-ce que l’ajout de ces mots entraînerait des contestations?

M. Ripley : Je ne vois pas matière à contestation. Au bout du compte, le CRTC serait tenu de prendre en considération la liberté d’expression et l’indépendance en matière de journalisme, de création et de programmation dont jouissent les créateurs lorsque leurs intérêts peuvent être touchés par ses décisions. Cela concerne principalement les médias sociaux. C’est ce à quoi je m’attendrais.

Le sénateur Plett : Monsieur Ripley, vous venez de répondre en partie à ma question en répondant au sénateur Manning. Toutefois comme je l’ai dit dans mes commentaires, des témoins nous ont dit que les créateurs jouissent de la liberté d’expression en ligne et expriment leur indépendance en matière de création et de programmation, mais aussi qu’ils ne se sentent pas suffisamment reconnus et protégés. En fait, ils craignent les répercussions de ce projet de loi.

S’il n’y a pas d’effets négatifs, ne seriez-vous pas d’accord pour dire que cela rassurerait les créateurs? Je crois vous avoir entendu dire qu’il n’y aurait pas d’effets négatifs sur le projet de loi.

M. Ripley : Encore une fois, mon rôle n’est pas d’exprimer une opinion sur ces questions. L’intention du gouvernement n’est pas de nuire à la liberté d’expression et à l’indépendance en matière de création des créateurs. Ce n’est pas l’intention du gouvernement. Je vois l’amendement proposé comme cohérent sur ce point puisqu’il demande au CRTC d’avoir cela à l’esprit tout au long de son processus décisionnel.

Le président : Monsieur Ripley, le ministère a-t-il envisagé à un moment ou un autre de revoir la définition du contenu canadien? Au bout du compte, nous voulons modifier la Loi sur la radiodiffusion pour tenter d’inclure les créateurs de contenu numérique dans les politiques sur le contenu canadien des services de radiodiffusion traditionnels. On nous a parlé de divers aspects de la réglementation dont le CRTC devra s’occuper. Toutefois, le ministère a-t-il réalisé à un moment donné que de nombreux créateurs de contenu numérique ne cadreraient pas avec la définition du contenu canadien traditionnel? Le gouvernement prévoit-il élargir ou restreindre la définition pour tenir compte de la réalité numérique des temps modernes?

M. Ripley : Au sujet de la révision de la définition d’ « émission canadienne », dans notre plan de travail, c’est ce que le CRTC devra faire après l’adoption du projet de loi C-11, notamment parce que des amendements définissent plus précisément les émissions canadiennes.

On le voit au paragraphe 10(1.1) proposé du projet de loi. À l’heure actuelle, la Loi sur la radiodiffusion ne définit pas ce qu’est une « émission canadienne ». Une des modifications proposées consiste à préciser les éléments de la définition dont devra tenir compte le CRTC. Il faut donc que le projet de loi soit d’abord adopté pour que le CRTC puisse faire le travail.

Pour ce qui est de la définition d’« émission canadienne » et des « créateurs des médias sociaux », l’intention du gouvernement n’est pas de faire en sorte que les créateurs des médias sociaux soient visés par une quelconque définition d’« émission canadienne ». À l’article 4.2 proposé, le gouvernement veut mettre l’accent sur le contenu commercial, qu’il s’agisse de contenu musical qui répond à la définition du MAPL ou de contenu audiovisuel qui répond à la définition d’« émission canadienne ». L’intention n’est pas d’élargir la définition pour inclure les créateurs des médias sociaux.

L’intention pour ce qui est des services de médias sociaux comme YouTube est de laisser ces deux écosystèmes coexister comme ils le font actuellement.

Le président : Chers collègues, je pense que cet amendement est très important. Nous avons encore là un exemple où il incombe aux parlementaires d’établir les paramètres dont M. Ripley parle. Je comprends que beaucoup ont eu le réflexe de penser que le CRTC allait nous fournir les réponses, mais je pense qu’il revient aux parlementaires, au gouvernement et au ministère de donner des directives plus claires au sujet de la loi et de la réglementation.

La sénatrice Wallin : Je pense avoir entendu M. Ripley le mentionner, mais je veux m’en assurer. En ajoutant les mots « et les créateurs », vous ne craignez pas que cela restreigne, interdise ou limite quoi que ce soit dans le projet de loi? Ce n’est pas un problème?

M. Ripley : Je vous remercie, sénatrice Wallin. Ma réponse était : l’intention du gouvernement n’est pas de limiter la liberté d’expression ou l’indépendance en matière de création des créateurs d’une quelconque façon dans le projet de loi. La Loi sur la radiodiffusion vise essentiellement à promouvoir l’expression culturelle.

La sénatrice Wallin : En le mentionnant, nous ne ferions que mentionner leur intention. C’est bien.

Le président : Chers collègues, l’honorable sénateur Plett propose d’amender le projet de loi C-11 — dois-je lire l’amendement ou en suis-je dispensé?

Des voix : Dispensé.

Le président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Oui.

Le président : Je crois que le « oui » l’emporte. Le gouvernement demande un vote par appel nominal.

[Français]

M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Oui.

M. Labrosse : Pour : 10; contre : 4; abstention : aucune.

[Traduction]

Le président : L’amendement est adopté.

Chers collègues, y a-t-il d’autres amendements à l’article 2?

L’article 2 modifié est-il adopté?

Des voix : Oui.

Le président : D’accord. L’article 2 est adopté tel que modifié.

Poursuivons, chers collègues. L’article 3 est-il adopté?

Sénateur Manning, pourriez-vous lire votre amendement?

La sénatrice Simons : Pourriez-vous nous dire le numéro afin que nous puissions les avoir dans le bon ordre?

Le président : C11-3-4-21, sénateur Manning. Nous allons vous remettre cet amendement. Nous l’avons sous la main.

Le greffier hésitait à le faire parce que l’on ne s’était pas entendu sur une diffusion préalable de ceux-ci.

Le sénateur Cormier : Pas les diffuser, mais simplement... D’accord.

Le président : Il ne m’en fournit même pas une copie.

La sénatrice Miville-Dechêne : Est-ce que l’autre côté s’oppose à ce que l’on transmette l’ordre?

Le président : Chers collègues, est-ce que quelqu’un s’oppose à ce que l’on transmette l’ordre pour l’article 3? L’ordre, tout simplement, afin que nous sachions qui doit intervenir. Nous pourrions montrer le cheminement avec exactitude afin que chaque sénateur sache où il se situe et ne passe pas tout droit, car il y en a un bon nombre. L’ordre pour l’article 3, tout simplement.

Nous pouvons continuer à débattre pendant qu’il s’exécute.

Le sénateur Manning : Merci, monsieur le président. Puisque les entreprises de radiodiffusion étrangères qui fournissent également de la programmation aux Canadiens sont incluses dans le système canadien de radiodiffusion, j’aimerais apporter l’amendement suivant :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 4, par substitution, aux lignes 25 et 26, de ce qui suit :

« tique, d’une manière qui soit appropriée en fonction de la nature des services qu’elle fournit et qui reflète le fait que les entreprises de radiodiffusion étrangères qui fournissent également de la programmation aux Canadiens sont comprises dans le système canadien de radiodiffusion; ».

Ainsi, le libellé « et qui reflète le fait que les entreprises de radiodiffusion étrangères qui fournissent également de la programmation aux Canadiens sont comprises dans le système canadien de radiodiffusion; » s’ajoute à « la nature des services qu’elle fournit ». Le but de mon amendement est de demander au comité de tenir compte du fait que les entreprises étrangères de diffusion continue en ligne sont des entreprises internationales et d’admettre la différence entre les stratégies de contenu et les radiodiffuseurs canadiens qui n’opèrent que dans un marché national fermé leur donnant accès à des avantages et protections cautionnés par la loi et la réglementation.

Chers collègues, nous avons entendu nombre de témoins traiter des contributions importantes faites par les entreprises de radiodiffusion étrangères au Canada. Wendy Noss, de l’Association cinématographique-Canada, a déclaré à notre comité que les studios mondiaux ont dépensé plus de 5 milliards de dollars au Canada en 2021, ce qui équivaut désormais à plus de la moitié de toute la production de l’ensemble du pays et à 90 % de la croissance de la dernière décennie. Ils ont embauché et formé quelque 200 000 créateurs canadiens des plus doués et leur ont offert des possibilités professionnelles.

Ils ont contribué au financement de nouvelles infrastructures et soutenu plus de 47 000 entreprises canadiennes uniquement en 2021. Ils favorisent également l’équité et la diversité devant et derrière la caméra.

Garrett Levin, président et chef de la direction de Digital Media Association, a déclaré au comité :

En moyenne, les services de diffusion en continu audio versent 65 à 70 % de leurs revenus en redevances. Comme j’en ai discuté avec vos collègues, ces redevances représentent le coût de l’octroi de licences et de l’utilisation des œuvres. Le coût similaire pour l’octroi de licences et l’utilisation des œuvres par les radiodiffuseurs commerciaux s’élève à environ 8,2 % de leurs revenus.

En outre, il a déclaré :

Bien que je comprenne le désir de dire que ce n’est pas une façon suffisante d’examiner les contributions au marché canadien, c’est certainement la contribution la plus directe au marché canadien qui est faite par les membres de la DiMA.

Dans son témoignage, Mme Noss a résumé la position de son organisme comme suit :

[...] les objectifs de la politique de radiodiffusion de l’article 3 doivent être suffisamment souples pour permettre à chaque service de diffusion en continu de donner le meilleur de lui-même. Pour atteindre ce résultat, nous exhortons le comité à adopter un amendement qui reconnaît que les entreprises mondiales sont maintenant incluses dans le système de réglementation canadien [...]

Cette approche reconnaît les différences fondamentales en matière de stratégies de contenu entre les services de diffusion en continu dont les modèles d’affaires particuliers sont en concurrence dans le monde entier, et les radiodiffuseurs canadiens qui n’opèrent que dans un marché national fermé leur donnant accès à des avantages et protections cautionnés par la loi et la réglementation.

Je crois qu’il n’est que juste de reconnaître la contribution de ces entreprises et aussi qu’elles sont des partenaires constructifs de notre système de radiodiffusion.

Nous avons également entendu des témoins sur les conséquences potentielles d’un traitement injuste des entreprises étrangères, et nous devons en tenir compte.

Konrad von Finchkentein, ancien président du CRTC, a prévenu que le CRTC a le pouvoir de prendre des règlements exigeant que les entreprises effectuent des dépenses et des contributions à des fonds pour la production de contenu canadien, mais que le droit aux bénéfices de ces dépenses ne devrait pas être limité à la propriété ou au contrôle canadien des producteurs ou à la propriété canadienne des droits de propriété intellectuelle. Ce faisant, nous exposerions le Canada à un grand risque de conflit, plus particulièrement avec les États-Unis, dans le cadre de l’Accord Canada—États-Unis—Mexique.

J’estime que nous pouvons commencer à inclure un juste équilibre dans cette mesure législative en reconnaissant à cet article que les entreprises de radiodiffusion étrangères qui fournissent également de la programmation aux Canadiens font partie intégrante du système canadien de radiodiffusion, et j’exhorte les sénateurs à appuyer mon amendement.

Merci, monsieur le président.

Le sénateur Plett : J’ai quelques questions pour M. Ripley, si possible. Monsieur Ripley, quand Wendy Noss, de l’Association cinématographique-Canada, a témoigné devant notre comité, elle a souligné que les studios mondiaux ont dépensé plus de 5 milliards de dollars au Canada en 2021, ce qui équivaut désormais à plus de la moitié de toute la production de l’ensemble du pays et à 90 % de la croissance de la dernière décennie. Ils ont embauché et formé quelque 200 000 créateurs canadiens des plus doués et leur ont offert des possibilités professionnelles, en plus de contribuer au financement de nouvelles infrastructures et au soutien de plus de 47 000 entreprises canadiennes uniquement en 2021.

Ma première question est très simple : est-ce que vos collègues ou vous contestez n’importe lequel de ces chiffres? J’ai ensuite deux autres questions.

M. Ripley : Merci, sénateur Plett.

Globalement, je crois que c’est juste. Je ne suis pas en mesure de confirmer les chiffres exacts. Tous les ans, on publie un rapport qui ventile le nombre de productions audiovisuelles au pays et qui porte sur diverses questions relatives aux tournages en extérieur de films étrangers par rapport aux programmes canadiens. C’est largement conforme aux tendances que nous cernons, mais je ne peux pas confirmer avec exactitude les chiffres qu’elle a fournis.

Le sénateur Plett : Je peux très bien le comprendre, mais, en gros, vous pensez qu’ils sont assez justes.

Quelle est l’importance des investissements étrangers, selon vous, pour les industries canadiennes de la radiodiffusion?

M. Ripley : Merci, sénateur Plett.

La présence d’entreprises internationales au Canada est vitale et très importante pour le système de production audiovisuelle. Le Canada trouve depuis longtemps un équilibre entre, d’une part, les intérêts des entreprises étrangères qui veulent venir ici et profiter de nos bonnes infrastructures, de nos grands talents et du cadre en place et, d’autre part, la nécessité d’une production nationale à l’image du Canada.

Le sénateur Plett : Merci beaucoup.

Voici ma dernière question : pourquoi cette reconnaissance n’est-elle pas explicitement reconnue dans le projet de loi, et a-t-on discuté de son inclusion?

M. Ripley : Merci pour cette question, sénateur Plett.

J’avancerais que le projet de loi vise fondamentalement à reconnaître la présence des services étrangers de diffusion en continu et à les intégrer au système de radiodiffusion. Si vous regardez l’alinéa 3(1)a) proposé, soit celui qui précède la disposition que l’on propose de modifier, vous constaterez qu’il se lit comme suit : « et il est reconnu que celui-ci comprend des entreprises de radiodiffusion étrangères qui fournissent également de la programmation aux Canadiens ». Le gouvernement reconnaît donc que ces services, à partir de maintenant, feront partie du système de radiodiffusion.

Le sénateur Plett : Donc, l’amendement ne ferait une fois de plus que renfoncer cela?

M. Ripley : Merci, sénateur Plett.

J’estime que, oui, c’est essentiellement une répétition du paragraphe qui précède.

Le président : Le débat est ouvert. Encore une fois, je suis d’avis que c’est un amendement judicieux qui s’approche vraiment du nœud du problème. Bien sûr, il reconnaît les entreprises étrangères et veut les inclure dans la Loi sur la radiodiffusion. C’est le but.

Évidemment, la question qui est débattue, c’est qu’elles ne sont pas forcément les diffuseurs habituels. Nous essayons manifestement de les réglementer comme si c’était le cas, ce qui suscite de l’incertitude. Selon moi, cet article avance simplement l’idée qu’il y a des acteurs pertinents dans notre système de radiodiffusion. J’estime que c’est le premier amendement d’autres qui devront s’appliquer à d’autres articles.

Au bout du compte, les investissements de ces entreprises de radiodiffusion étrangères sont indéniables. Il est aussi indéniable que, au début de la rédaction de la mesure législative, même l’ambassade américaine a téléphoné à un des ministres pour communiquer son inquiétude par rapport à la possibilité pour le projet de loi d’aller trop loin en engendrant du protectionnisme et en contrevenant à notre entente de libre-échange.

Différents témoins ont soulevé des risques de représailles, surtout de la part de notre grand partenaire commercial que sont les États-Unis. Il va sans dire que ces entreprises de radiodiffusion étrangères investissent des milliards dans les arts et la culture de ce pays. On le voit d’un océan à l’autre. On le voit à Montréal, à Toronto et dans des régions rurales du pays. Pour la première fois depuis des décennies, le Canada est un endroit de premier plan dans la réalisation de films et de documentaires. Nous en voyons les retombées dans l’industrie, où les artistes, les diffuseurs, les auteurs, les producteurs, les acteurs et les actrices travaillent comme jamais auparavant au Canada, générant des recettes pour le Conseil du Trésor. Toutefois, cela ne semble pas suffire. Nous voulons tout de même les réglementer davantage, sans pour autant leur donner accès au Fonds des médias du Canada dont les radiodiffuseurs traditionnels bénéficient et continueront de bénéficier conformément à ce projet de loi.

Nous avons vu les investissements dans l’industrie musicale en comparaison de la radio traditionnelle quand il est question de verser des redevances aux artistes et ainsi de suite.

Cet amendement coule de source. Chers collègues, nous devrions l’appuyer et, je le répète, nous devrions le renforcer dans les articles à venir afin de reconnaître ces investissements essentiels. Le Canada en profite même sur le plan touristique, du simple fait que les diffuseurs en continu et les plateformes numériques d’aujourd’hui montrent toute la beauté de notre pays, de toutes ses régions. Nous avons en effet constaté une hausse du tourisme au cours de la dernière décennie, en grande partie liée à certaines de ces entreprises de radiodiffusion.

C’est ma réflexion sur cet amendement.

S’il n’y a pas d’autres intervenants, nous allons passer au vote.

Il est proposé par le sénateur Manning que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, aux lignes 25 et 26, à la page 4... Puis-je me dispenser de lire la motion?

Des voix : Oui.

Le sénateur Plett : Non. Lisez-la.

Le président : Il est proposé par l’honorable sénateur Manning :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 4, par substitution, aux lignes 25 et 26, de ce qui suit :

« tique, d’une manière qui soit appropriée en fonction de la nature des services qu’elle fournit et qui reflète le fait que les entreprises de radiodiffusion étrangères qui fournissent également de la programmation aux Canadiens sont comprises dans le système canadien de radiodiffusion; ».

Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : Non.

Le président : Je crois que les « non » l’emportent.

Le sénateur Plett a demandé un vote par appel nominal.

[Français]

M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Non.

M. Labrosse : Pour : 3; contre : 11; abstention : aucune.

[Traduction]

Le président : L’amendement est donc rejeté.

Y a-t-il d’autres amendements à l’article 3?

L’amendement 3-4-30 est le suivant. Je crois qu’il est proposé par le sénateur Manning. Une copie vous sera remise.

Sénateur Manning, vous avez la parole.

Le sénateur Manning : J’aimerais proposer ce qui suit :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 4, par adjonction, après la ligne 35, de ce qui suit :

« (i.1) refléter les préférences et les intérêts des différents publics et en tenir compte,

(i.2) dans la mesure du possible, s’appuyer sur les forces du marché pour faire en sorte que les Canadiens obtiennent la programmation de leur choix, ».

Mon amendement vise à enchâsser le principe du choix du consommateur, qui, selon moi, n’est pas abordé dans le projet de loi.

Chers collègues, nombre de témoins nous ont parlé de l’importance de veiller à ce que notre système de radiodiffusion réagisse aux préférences et intérêts des Canadiens. Nous vivons en démocratie. Si notre politique en matière de radiodiffusion visait quoi que ce soit d’autre que de répondre aux préférences et intérêts des Canadiens, les gens seraient probablement nombreux à mettre en question le fonctionnement de notre démocratie. Je rappelle que Konrad von Finckenstein, ancien président du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, a témoigné devant notre comité en juin. Il a avancé que, même si la loi vise à protéger, à promouvoir et à favoriser la production de radiodiffusion canadienne, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ou CRTC, ne doit pas oublier que ce sont les consommateurs canadiens qui choisissent ce qu’ils veulent regarder. Ce choix est motivé par les forces du marché et n’est modifié qu’au besoin par des mécanismes de réglementation.

Il a indiqué que ce principe devrait figurer à l’article 3 de la loi, qui énonce la politique canadienne de radiodiffusion. Tim Denton, de l’Internet Society Canada Chapter, a tenu des propos semblables, c’est-à-dire que la politique canadienne de radiodiffusion devrait inclure le principe voulant que le règlement du CRTC respecte le choix de l’utilisateur et admet que la concurrence et les forces du marché contribuent à l’atteinte des objectifs de la loi. M. Denton a aussi affirmé que, même si le projet de loi C-11 présume implicitement que le fardeau de la production d’émissions sera assumé en grande partie par des diffuseurs en continu étrangers — c’est-à-dire américains — qui font concurrence aux diffuseurs canadiens, il n’y est nulle part question de la concurrence et du choix du consommateur.

Je crois que cet amendement vient corriger cette lacune. On a peut-être tendance à croire que tout ce que le CRTC fait est pour le bien de la population canadienne et du pays. Toutefois, de nombreux témoins nous ont fait part d’expériences qui ne sont pas tout à fait conformes à cette présomption.

Enchâsser ce principe dans le projet de loi est important pour atteindre l’équilibre. C’est important pour souligner le principe voulant que, dans une société libre, ce soient les gens qui doivent orienter le processus de consommation culturelle et non les organisations gouvernementales. Ainsi, je propose d’approuver cet amendement qui inclut le principe d’économie de marché et celui de la nécessité de reconnaître et de respecter le choix des Canadiens. Je demande votre appui. Merci, monsieur le président.

Le président : Merci, sénateur Manning. Le débat est ouvert. J’estime que c’est là aussi une question très importante. Il ne fait aucun doute que, très souvent dans ce projet de loi, on vise à donner les coudées franches au CRTC en matière de réglementation. Comme je l’ai dit plus tôt, on a semble-t-il tendance à dire, quand il est question de ce projet de loi : « Faites-nous confiance. Nous ferons ce qu’il faut. Croyez-nous. Nous n’allons pas toucher aux algorithmes. Croyez-nous. Nous n’allons pas censurer les générateurs de contenu, mais nous pouvons forcer les plateformes à le faire, bien sûr. Nous pouvons obliger les plateformes à modifier les algorithmes afin d’obtenir certains résultats. »

Au bout du compte, nous l’avons vu maintes et maintes fois. Malgré toute la bonne volonté, chaque fois qu’une entité gouvernementale réglemente quelque chose, c’est toujours le consommateur qui est pénalisé. Ce qui explique, en grande partie, pourquoi c’est au Canada que les factures de télécommunication sont les plus élevées. Nous payons cher, mais recevons très peu en retour.

Depuis un certain nombre d’années, l’industrie numérique est un véritable marché libre. Elle a eu l’occasion d’offrir des plateformes aux producteurs de contenu canadien, qui sont prospères et créent des entreprises solides. Encore une fois, cet amendement reflète de manière positive l’intérêt du public. Cette loi ne place nulle part le consommateur au premier plan. Tout au long de l’étude, le Comité a entendu un grand nombre de témoins qui nous ont clairement indiqué que, quoi que nous fassions pour réglementer Internet, les gens feront toujours leur choix avec un clic. Ils choisiront ce qu’ils veulent et ne veulent pas visionné. La réglementation ne fait que créer un manque de concurrence. Lorsqu’elle devient trop lourde, elle fait fuir les investisseurs. Elles ne semblent jamais apporter les résultats souhaités.

Cet amendement répond à une autre de mes préoccupations, à savoir que de nombreux témoins nous ont dit que le bilan du CRTC en matière de transparence, de responsabilité et d’accès est peu reluisant. Un certain nombre de témoins ayant comparu devant ce comité ont donné des exemples précis de délibérations du CRTC menées à huis clos et de décisions prises à huis clos et rendues publiques seulement des mois plus tard. On ne peut évidemment pas nier, d’après les témoignages que nous avons entendus, que le CRTC est une tour d’ivoire d’arbitres au sein de laquelle seules les personnes qui ont les moyens financiers nécessaires peuvent tirer profit de la présentation de leur cas.

Comme je l’ai dit plus tôt, de nombreux producteurs de contenu indépendants n’ont pas les moyens financiers de rivaliser avec des entreprises comme Bell Media, Rogers ou Quebecor. Aussi importantes que soient ces plateformes dans le domaine de la radiodiffusion, il en existe d’autres. Je pense que cet amendement traite du fait que le choix des consommateurs doit être souligné et protégé. Voilà pourquoi j’appuie cet amendement.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur le président. Pour reprendre votre dernier point, ce projet de loi semble faire totalement abstraction du choix et de la protection des consommateurs. Le gouvernement semble toujours reléguer les consommateurs au second plan.

Monsieur Ripley, la question de l’intégration des préférences et des intérêts des publics a-t-elle été abordée dans le cadre de la rédaction du projet de loi C-11?

M. Ripley : Merci beaucoup pour cette question, sénateur Plett. Oui, nous sommes au courant que ce genre d’amendement a également été proposé lorsque la Chambre des communes s’est penchée sur ce projet de loi. Bien que ce ne soit pas formulé comme vous le proposez, je dirais que lorsque vous examinez les objectifs politiques de la Loi sur la radiodiffusion, les intérêts des Canadiens sont présents. La Loi sur la radiodiffusion vise essentiellement à garantir que nous disposons d’une programmation dans les deux langues officielles et que nous nous reconnaissons dans celle-ci. La Chambre des communes a adopté des dispositions relatives aux conditions raisonnables de fourniture, de combinaison et de vente. Certains éléments des objectifs de radiodiffusion portent assurément sur les intérêts des Canadiens dans ce système.

Le sénateur Plett : Je pense toutefois que ces principes ne sont pas clairement intégrés dans ce projet de loi. Suggérez-vous qu’ils le sont?

M. Ripley : La difficulté liée au libellé sur les forces du marché est particulièrement problématique pour le marché anglophone. La Loi sur la radiodiffusion a en partie été conçue pour répondre au fait que, dans le Canada anglais en particulier, le marché était inondé d’émissions américaines. La Loi sur la radiodiffusion est donc en partie une réponse à cette situation. Bien que rien ne limite la présence d’émissions américaines ou étrangères sur le marché canadien, la Loi sur la radiodiffusion vise à garantir un investissement continu dans la production nationale, qu’il s’agisse de musique ou d’histoires.

Le sénateur Plett : Merci, monsieur Ripley.

La sénatrice Dasko : Chers collègues, j’ai proposé une partie de ceci comme amendement, mais je pense que cela devrait figurer dans un autre article. Je pense moi aussi qu’il est important de reconnaître que les publics font partie du système de la radiodiffusion, et cela ne figure nulle part ailleurs dans le projet de loi. On y mentionne les publics à quelques endroits, mais je pense qu’il est important de reconnaître qu’ils font partie de ce système, non pas de manière prescriptive, mais en nous assurant qu’ils sont pris en compte.

J’ai un autre emplacement pour cet amendement. L’amendement que je propose diffère très légèrement de celui-ci. Il se lit comme suit : « [...] refléter les préférences et intérêts de publics variés et y être réceptif; »

Je pense qu’il devrait figurer à l’alinéa 3(1)d), mais il devrait constituer une phrase distincte. Je pense qu’il s’agirait d’un emplacement plus adapté pour cet amendement et que cette formulation serait légèrement meilleure.

Je n’ai pas inclus et je ne propose pas d’inclure — peut-être que quelqu’un d’autre le fera — la phrase sur les forces du marché, parce que je pense, comme M. Ripley vient de le dire, qu’on irait ainsi à l’encontre d’un grand nombre des éléments de la Loi sur la radiodiffusion que nous avons créés au fil des décennies, en partie, comme on vient de le dire, comme réponse visant presque à combattre certaines forces du marché. Les forces du marché font toujours partie du système, mais je pense que l’inclusion de l’expression « forces du marché » ne serait pas utile. Je pense par contre qu’il serait très utile d’inclure quelque chose sur les publics.

Il existe évidemment différentes façons d’aborder cette question, mais je pense que ce libellé, à l’endroit où je l’ai placé, est supérieur à celui-ci, et je ne soutiens pas le libellé qui traite des forces du marché.

Je veux le proposer pour que vous y réfléchissiez :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 6, par adjonction, après la ligne 17, de ce qui suit :

« (3.1) La même loi est modifiée par adjonction, après le sous-alinéa 3(1)d)(iv), de ce qui suit :

(v) refléter les préférences et intérêts de publics variés et y être réceptif; ».

C’est ce que je voudrais proposer. Je veux le signaler à mes collègues. Je crois que l’on apporterait une légère amélioration sur le plan grammatical et que l’emplacement serait plus approprié. Je serais ravie de parler davantage de la question des publics à ce moment-là.

Je pense que le projet de loi appuie très fortement les communautés de producteurs. Il accorde beaucoup d’attention aux producteurs. Je soutiens cette démarche, mais je pense que nous devons également tenir compte de ce que les gens préfèrent, de ce qu’ils veulent voir et visionner, et que ces facteurs doivent également être pris en compte dans le système.

Le président : J’ai également hâte de pouvoir discuter de cet amendement, et je suis heureux que, comme moi, vous reconnaissiez le mot « consommateur ». Chers collègues, les mots « consommateur », « choix des consommateurs », « choix généré par l’utilisateur », « choix » ou « choix des consommateurs canadiens » ne figurent pas dans le projet de loi. Le leader du gouvernement ou les fonctionnaires peuvent me corriger sur ce point le cas échéant. Encore une fois, c’est difficile à comprendre.

On y parle de la radiodiffusion traditionnelle, des radiodiffuseurs traditionnels existants et de la façon dont nous devons aligner le numérique, les diffuseurs et les plateformes numériques, mais on y parle nulle part des consommateurs, du choix des consommateurs, du choix généré par les utilisateurs ou du choix des consommateurs canadiens.

Encore une fois, il est ahurissant de constater qu’alors que ce projet de loi sur la radiodiffusion aura une incidence extraordinaire sur ce que des centaines de milliers ou des millions de Canadiens choisissent d’afficher, sur la façon dont ils l’affichent et sur la manière dont ils visionneront ce contenu, on y mentionne nulle part — nulle part — les pauvres bougres qui paient les factures.

Personnellement, je trouve que c’est inadmissible. Certaines personnes disent que je me suis opposé très ouvertement à ce projet de loi. C’est vrai, et je m’y oppose, parce que je pense qu’en fin de compte, j’ai un travail à faire ici au nom des contribuables, et pas seulement des radiodiffuseurs traditionnels et des grandes entreprises qui viennent au Canada et font fortune, même si elles fournissent une plateforme qui crée des centaines de milliers d’opportunités pour la culture canadienne et la diffusent dans le monde entier.

Sénatrice Dasko, je soutiens cet amendement, et je soutiens tout amendement permettant au Parlement et à ce comité de défendre les droits, les choix et les intérêts des consommateurs.

La sénatrice Wallin : J’aimerais d’abord que M. Ripley s’exprime à ce sujet : Avez-vous des objections au libellé « refléter les préférences et intérêts de publics variés et y être réceptif; »? Crée-t-il un quelconque problème?

M. Ripley : Merci, sénatrice Wallin. Je vais répondre par l’intermédiaire de la présidence.

Je m’abstiendrai une fois de plus d’émettre une opinion à ce sujet. Ce libellé ajouterait un objectif politique supplémentaire qui porterait précisément sur les préférences et les intérêts des publics, et le CRTC devrait donc étudier cette question.

J’aimerais faire une observation. Comme j’ai essayé de le dire au sénateur Plett, si vous regardez, par exemple, le sous-alinéa 3(1)d)(iii) proposé, il est question de répondre aux besoins et aux intérêts de l’ensemble des Canadiens. On reconnaît ici que les objectifs de la loi et du système de radiodiffusion, qu’il s’agisse de la programmation ou des possibilités d’emploi, doivent servir les intérêts de tous les Canadiens.

La sénatrice Wallin : Le problème est que le terme « besoins » sous-entend que quelqu’un d’autre prend ces décisions, alors qu’en utilisant le terme « choix », on indique c’est la personne qui décide.

J’allais proposer un amendement favorable à un amendement favorable, et demander au sénateur Manning s’il serait disposé à scinder ces deux amendements pour qu’ils puissent être traités séparément. Je pense même que nous pourrions les placer aux deux endroits, comme l’a suggéré la sénatrice Dasko. Je pense que l’on peut mentionner ce point à différents endroits dans le projet de loi.

Je vais commencer par poser la question au sénateur Manning.

Le sénateur Manning : Bien sûr, pour faire suite aux commentaires de la sénatrice Dasko, les publics ne sont pas mentionnés dans le projet de loi, et ce serait assurément une façon de souligner qu’ils font partie du système de radiodiffusion. Je suis prêt à faire tout le nécessaire pour m’assurer que les publics sont abordés dans le projet de loi dans toute la mesure où ils le sont ici. Si nous devons le faire deux fois dans différentes parties du projet de loi, pourquoi pas. Parfois, il est bon de répéter les choses pour s’assurer que le message est bien passé.

Nous pouvons examiner l’inclusion de l’alinéa 3(1)i.2) proposé ailleurs dans le projet de loi.

Le président : Étant donné que sans consommateurs, nous n’avons pas de plateformes ni de diffusion, je pense que le fait de les mentionner même plus de deux fois serait une bonne chose.

La sénatrice Sorensen ne l’a pas encore proposé. Il fait encore l’objet d’un débat.

La sénatrice Dasko : Je pensais qu’une question directe avait été posée au sénateur Manning pour savoir s’il était prêt à diviser la motion.

Le président : Et il a dit oui, mais elle n’a pas encore proposé cette division.

La sénatrice Dasko : Je n’ai pas entendu cette partie.

Le président : Il a dit qu’il était d’accord.

La sénatrice Wallin : Il y a des commentaires que j’aimerais entendre.

Le président : Nous en sommes toujours au débat.

Le sénateur Plett : Je pense que la sénatrice Wallin a proposé une bonne solution.

Je suis d’accord pour dire que le fait de mentionner les publics à plusieurs endroits ne peut pas faire de mal. Nous avons abordé cette question il y a quelques minutes. Nous en avons parlé il y a quelques minutes, de la façon dont nous allions traiter le caractère complémentaire ou même duplicatif d’un amendement que nous avons adopté ici par rapport à un amendement que le sénateur Dawson pourrait proposer plus tard.

Je soutiendrai assurément l’amendement de la sénatrice Dasko, si et quand nous y viendrons. Je ne vois pas d’inconvénient au fait de refléter ce point à deux endroits. Je serais toutefois également favorable, si le sénateur Manning est disposé à le faire, à diviser cette section, comme l’a suggéré la sénatrice Wallin. Cette solution pourrait ou non correspondre à ce qu’a fait la sénatrice Dasko. Ma priorité est que ces éléments soient mentionnés, et j’aimerais que la notion de « forces du marché » y figure, mais je suis tout à fait disposé à diviser l’amendement si cela permet de faire adopter au moins une partie de l’amendement. Je m’en tiendrai là. Je vous remercie.

La sénatrice Dasko : Merci, monsieur le président. J’aimerais apporter une précision. On parle des publics à d’autres endroits dans le projet de loi. On ne mentionne peut-être pas le choix du consommateur, mais on mentionne le public en utilisant le mot « audience », qui est présent à certains endroits. On évoque par exemple la collecte de données pour la mesure de l’audience. La section sur la radiodiffusion communautaire contient un commentaire sur les publics. On les mentionne. Ils figurent évidemment dans le projet de loi, mais on ne les aborde pas d’une manière qui permette de les envisager comme un facteur du système. C’est donc ce que j’essaie de faire.

Je ne pense pas que dans ce cas, il soit utile de mettre la même chose à deux endroits. Ces passages se situent dans le même article. Il serait redondant de le placer au début de l’article et de répéter la même chose à la fin. Il s’agit exactement de la même partie du projet de loi. Je pense que nous ne devrions pas le faire. C’est un peu idiot. Ce n’est pas très très élégant.

Je pense qu’il serait préférable d’insérer cette mention à l’endroit que je vais proposer. Il s’agit assurément d’un amendement que je vais proposer. Nous verrons s’il est adopté ou non. J’estime simplement qu’il est inutile de répéter la même chose à deux emplacements situés dans le même article.

Vous pouvez donc proposer ce que vous voulez, mais je ne pense pas que nous devions procéder ainsi.

Le président : Là encore, sénatrice Dasko, je comprends votre point de vue. Le mot anglais « audience » (« public » en français) apparaît 12 fois dans un énorme projet de loi.

La sénatrice Dasko : C’est l’argument que je faisais valoir; le mot figure dans le texte de loi. Il est utilisé.

Le président : Ce qui n’est pas utilisé, c’est le mot anglais « consumers » (« consommateurs » en français). Il y a une grande différence entre le mot anglais « consumers » et le mot anglais « audiences ». Les consommateurs sont une tout autre chose que les publics. Les publics sont un élément mesurable; les consommateurs sont des gens que vous pouvez taxer et réglementer. Là encore, il y a le « choix du consommateur », ce qui est encore plus important — on devrait peut-être même utiliser l’expression « choix du public » ou « choix du public canadien » —, mais un « consommateur » est une force motrice du marché qui maintient une plateforme en service.

La sénatrice Dasko : Sénateur, le mot anglais « consumer » ne figure pas à cet endroit. C’est le mot anglais « audiences » qui est utilisé.

Le président : Il n’est pas utilisé, mais il devrait l’être. Voilà ce que je dis. Il y a une différence considérable entre un « public » et un « consommateur ». Un consommateur est un payeur et une force motrice d’un marché libre. Un public est un élément mesurable qui ne paie pas nécessairement. Voilà la grande différence. Si vous examinez le projet de loi, là où le mot anglais « audience » apparaît...

Le sénateur Klyne : Si vous n’avez pas payé, vous ne pouvez pas regarder le contenu.

Le président : Personne ne contestera qu’il y a une différence considérable entre un « public » et « consommateur », et je vous invite à examiner les endroits où le mot anglais « audience » figure dans le projet de loi. Vous constaterez qu’il est utilisé à des endroits où ils mesurent le contenu plus que toute autre chose. C’est là mon humble avis.

La sénatrice Wallin : Je vais retourner demander au sénateur Manning s’il envisagerait de diviser ces modifications. Puis-je proposer une motion en ce sens?

Le président : Quand vous dites « diviser », vous parlez d’un sous-amendement?

La sénatrice Wallin : J’aimerais que ces modifications fassent partie de deux amendements distincts

Le président : Il faut que ce soit présenté comme un sous-amendement.

La sénatrice Wallin : Mon sous-amendement viserait à retirer l’alinéa 3(1)i.2) de l’amendement principal.

Il ne resterait plus que le premier alinéa. Est-ce que c’est ce que j’ai accompli? Je ne sais pas s’il pourrait proposer l’alinéa à nouveau à titre de deuxième partie, s’il le souhaite.

Le sénateur Plett : Monsieur le président, avec tout le respect que je vous dois, si je pouvais me permettre d’intervenir, je dirais que je ne crois pas du tout que cela accomplisse ce que nous voulons. À mon avis, ce serait une chose si le sous-amendement disait simplement de diviser les alinéas en deux, mais ce que vous suggérez, sénatrice Wallin, c’est de supprimer complètement une partie des alinéas.

La sénatrice Wallin : Je ne sais pas comment faire autrement.

Le sénateur Plett : Moi non plus. Désolé.

La sénatrice Wallin : Je demande conseil au greffier.

Le sénateur Plett : Il faudrait peut-être que le greffier nous dise comment accomplir ce que vous tentez d’accomplir.

La sénatrice Wallin : Je sais que vous voulez prendre la parole. Je n’essaie pas de vous refuser le droit de présenter votre idée. Il y a beaucoup d’endroits dans le projet de loi où, selon moi, il faut répéter un certain concept ou une certaine idée. Je pense que c’est peut-être l’un de ces endroits, où nous pouvons...

Le président : Sénatrice Wallin, seriez-vous réceptive à l’idée d’insérer l’expression anglaise « consumer audiences » (« publics de consommateurs » en français)?

La sénatrice Wallin : Les « Preferences and interests » (« préférences et intérêts » en français)...

Le président : « Of consumer audiences » (« des publics de consommateurs » en français).

La sénatrice Wallin : Oui, ou séparés d’un « and » (« et » en français). Les consommateurs ont un vaste... nous consommons beaucoup de choses.

Le président : Mais ce sont aussi des gens qui font des choix en tant que public.

La sénatrice Wallin : J’ai entendu votre point de vue plus tôt, et je crois que votre argument est réel. J’essaie de résoudre l’autre problème en vue de ne pas compromettre l’intention du sénateur Manning, mais simplement diviser ses modifications.

Le président : Je pense que le sénateur Manning a déclaré qu’il ne verrait pas d’objection à ce que votre sous-amendement soit adopté.

Le sénateur Manning : À ce que les modifications soient divisées, et non supprimées.

La sénatrice Wallin : À ce qu’elles soient divisées.

Le président : Le greffier conseille que nous retirions l’alinéa 3(1)i.2), comme le suggère la sénatrice Wallin, et que nous votions sur l’amendement...

La sénatrice Wallin : Mais je ne veux pas retirer au sénateur Manning son droit de proposer son amendement.

Le président : Le greffier dit de prendre les deux amendements et de les mettre aux voix séparément. Ainsi nous diviserions l’amendement. Le premier vote porterait donc sur l’alinéa 3(1)i.1) proposé, c’est-à-dire sur l’amendement du sénateur Manning, et le second porterait sur l’amendement de la sénatrice Wallin. De cette façon, nous parviendrions à diviser les modifications.

Le sénateur Manning : En ce moment, nous sommes saisis de mon amendement complet.

Le président : Non. Ce que la sénatrice Wallin propose, c’est que nous supprimions l’alinéa 3(1) i.2) que vous proposez, et que nous votions séparément sur l’alinéa 3(1) i.1) proposé. Ensuite, nous voterions sur le deuxième amendement que la sénatrice Wallin propose.

La sénatrice Wallin : Au lieu de supprimer l’alinéa, je vais proposer que nous votions sur les alinéas 3(1)i.1) et 3(1) i.2) proposés séparément. Je ne sais pas si cela peut être considéré comme un amendement, mais je ferai ce que le greffier me dira.

Le sénateur Plett : Je suis désolé

Disons, par exemple, que nous faisons ce qui a été suggéré et que l’alinéa 3(1) i.1) proposé est rejeté. L’alinéa 3(1) i.2) pourrait-il alors se suffire à lui-même?

Le président : Techniquement, oui, mais les modifications seraient un peu décousues.

Pour commencer, ce que je voudrais proposer au sénateur Manning, c’est que nous modifions l’alinéa 3(1) i.1) de son amendement afin qu’il dise ce qui suit : « reflect and be responsive to the preferences and interests of consumer audiences » (« refléter les préférences et les intérêts des publics de consommateurs et y être sensible » en français). Voilà en quoi consisterait mon amendement, et nous en resterions là.

Le sénateur Plett : Et nous supprimerions complètement l’alinéa 3(1) i.2)?

Le président : Je conviens de conserver l’alinéa 3(1) i.2) et de procéder à un vote. Ensuite, nous aborderons séparément toute question que la sénatrice Wallin souhaite aborder. Cette idée est-elle sensée?

La sénatrice Wallin : Nous pouvons commencer par vos modifications; l’ordre que nous suivons importe peu.

Le sénateur Plett : Je ne sais pas si on peut proposer un sous-amendement, mais je suis heureux de le faire, monsieur le président, tel que vous l’avez formulé, et nous voterons sur l’ensemble de l’amendement pour voir où cela nous mène.

Le sénateur Manning : Juste pour clarifier les choses, si le sous-amendement que le sénateur Plett propose en vue d’ajouter les mots anglais « interests of consumer audiences »...

Le sénateur Plett : L’alinéa 3(1) i.2) demeure valide.

Le sénateur Manning : Nous votons uniquement sur ce sous-amendement. Mon amendement est donc toujours valide.

La sénatrice Wallin : Nous ajoutons le mot anglais « consumer ».

Le sénateur Manning : Si la sénatrice Wallin souhaite proposer le sous-amendement...

Le président : Nous attendrons pendant deux secondes afin d’obtenir la version finale en français et en anglais.

Le sous-amendement du sénateur Plett est distribué en ce moment.

L’honorable sénateur Plett propose :

Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 4, par adjonction, après la ligne 35, de ce qui suit :

« (i.1) refléter les préférences et les intérêts des différents publics et en tenir compte,

(i.2) dans la mesure du possible, s’appuyer sur les forces du marché pour faire en sorte que les Canadiens obtiennent la programmation de leur choix, ».

Le sous-amendement 1 dit ce qui suit :

Que la motion d’amendement soit modifiée par adjonction, après les mots « différents publics », de ce qui suit : « consommateurs ».

Chers collègues, êtes-vous pour le sous-amendement?

Des voix : Non.

Le président : J’ai entendu un « non ». Le sénateur Plett demande un vote par appel nominal.

[Français]

M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Oui.

M. Labrosse : Pour : 4; contre : 10; abstention : aucune.

[Traduction]

Le président : En conséquence, le sous-amendement est rejeté.

Nous pouvons voter sur l’amendement original, puis vous pourrez proposer un amendement distinct.

Vous pouvez proposer un sous-amendement pour supprimer le deuxième alinéa. À mon avis, c’est ce que vous avez recommandé à l’origine, n’est-ce pas?

La sénatrice Wallin : Je vais le faire.

Le président : Il est proposé par l’honorable sénatrice Wallin que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, de la page 4, par suppression de l’alinéa 3(1) i.2) proposé.

Honorables collègues, êtes-vous pour le sous-amendement?

Des voix : Non.

Le président : Je crois que les « nons » l’emportent de nouveau. Le sénateur Plett demande un vote par appel nominal.

[Français]

M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Yes.

M. Labrosse : Pour : 4; contre : 10; abstention : aucune.

[Traduction]

Le président : En conséquence, ce sous-amendement est rejeté. Nous allons maintenant voter sur l’amendement principal du sénateur Manning.

Il est proposé par l’honorable sénateur Manning que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3 de la page 4, à la ligne 30. Honorables sénateurs, vous plaît-il d’adopter la motion d’amendement?

Des voix : Non.

Des voix : Oui.

Le président : Les « nons » semblent l’emporter.

Le sénateur Plett : Pourquoi ne pas vérifier qui vote dans quel sens?

Le président : Le sénateur Plett demande un vote par appel nominal.

[Français]

M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?

Le sénateur Housakos : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?

La sénatrice Clement : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?

Le sénateur Cormier : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Dasko?

La sénatrice Dasko : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?

Le sénateur Dawson : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?

Le sénateur Gold : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?

Le sénateur Klyne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?

Le sénateur Manning : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?

La sénatrice Miville-Dechêne : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?

Le sénateur Plett : Oui.

M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?

Le sénateur Quinn : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?

La sénatrice Simons : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Sorensen?

La sénatrice Sorensen : Non.

M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?

La sénatrice Wallin : Yes.

M. Labrosse : Pour : 4; contre : 10; abstention : aucune.

[Traduction]

Le président : L’amendement est rejeté.

Chers collègues, y a-t-il d’autres amendements de l’article 3?

L’amendement suivant à l’ordre du jour est le C11-3-5-1, et c’est l’amendement de la sénatrice Dasko. Étant donné qu’il reste 30 secondes avant la fin de la réunion, nous voterons sur cet amendement au cours de la prochaine réunion. Merci, chers collègues. La séance est levée.

(La séance est levée.)

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