LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES COMMUNICATIONS
TÉMOIGNAGES
OTTAWA, le mardi 6 décembre 2022
Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd’hui, à 9 h 1 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois.
Le sénateur Leo Housakos (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Bonjour, je suis le sénateur Housakos, du Québec, et président du Comité sénatorial permanent des transports et des communications.
[Traduction]
Je voudrais inviter mes collègues à se présenter, en commençant par ma gauche.
La sénatrice Simons : Paula Simons, Alberta, territoire visé par le Traité no 6.
[Français]
Le sénateur Cormier : René Cormier, du Nouveau-Brunswick.
[Traduction]
Le sénateur Woo : Yuen Pau Woo, Colombie-Britannique.
Le sénateur Klyne : Bonjour. Marty Klyne, sénateur de la Saskatchewan, territoire visé par le Traité no 4.
[Français]
Le sénateur Dawson : Dennis Dawson, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Gold : Marc Gold, représentant du gouvernement au Sénat. Je suis du Québec.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : Sénatrice Miville-Dechêne, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Quinn : Jim Quinn, Nouveau-Brunswick.
[Français]
La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario.
[Traduction]
Le sénateur Manning : Fabian Manning, Terre-Neuve-et-Labrador.
Le sénateur Plett : Don Plett, de Landmark, Manitoba.
La sénatrice Wallin : Pamela Wallin, Saskatchewan.
Le président : Honorables sénateurs et sénatrices, nous sommes réunis aujourd’hui pour poursuivre notre étude article par article du projet de loi C-11, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres lois.
Nous pouvons compter une fois de plus sur le soutien très précieux des fonctionnaires de Patrimoine canadien. Nous accueillons ainsi M. Thomas Owen Ripley, sous-ministre adjoint délégué; Mme Amy Awad, directrice principale, Politique législative et du marché; et M. Yao Ahonda, gestionnaire, Radiodiffusion, Politique législative et du marché.
Honorables collègues, nous avons levé notre dernière réunion en réservant un amendement à l’article 3, proposé par la sénatrice Wallin. Dans le cadre de notre étude de cet amendement, nous étions en train d’examiner un sous-amendement proposé par la sénatrice Simons. Je confirme que des copies de l’amendement et du sous-amendement ont été distribuées aux membres.
Sénatrice Simons, à vous la parole.
La sénatrice Simons : Merci beaucoup, monsieur le président. Je veux noter que l’amendement proposé par la sénatrice Wallin est un peu compliqué du fait qu’il comporte deux parties distinctes. Mon sous-amendement porte sur la première partie seulement. Je propose :
Que la motion d’amendement soit modifiée par substitution, au sous-alinéa a)(i), de ce qui suit :
(i)par substitution, aux lignes 34 à 36, de ce qui suit :
« canadiennes originales en français et en anglais, »
Mon sous-amendement aurait pour effet de rendre moins prescriptif le sous-alinéa 7q)(i). Comme la sénatrice Wallin l’a elle-même souligné, le libellé original de cet alinéa était plutôt directif et exigeait une grande part de manipulation — pour utiliser un terme assez fort — active du potentiel de recherche algorithmique. Il soulève aussi l’intéressante question consistant à savoir ce qu’on entend exactement par « proportion équitable ». Si on est abonné à un service de diffusion en ligne par contournement de langue anglaise comme Prime Video d’Amazon ou Netflix, j’estime qu’il est injuste, voire irrationnel, de s’attendre à une proportion équitable de contenu en français. Je veux aussi noter, comme M. Ripley l’a souligné lors de notre séance de jeudi, qu’il ne s’agit pas d’un libellé qui émane du gouvernement. Le texte vient plutôt d’un amendement proposé par le Bloc québécois, non pas concernant le projet de loi C-11, mais bien, d’après la reconstitution des événements que M. Ripley et moi avons pu faire, lors du débat sur le projet de loi C-10 à l’autre endroit. Comme le libellé que je propose de changer ne vient pas du gouvernement, je ne m’attends pas à ce que celui-ci s’oppose nécessairement à ma proposition.
Si mon sous-amendement était adopté, le sous-alinéa se lirait « assurer la découvrabilité des services de programmation canadienne ainsi que des émissions canadiennes originales en langues anglaise et française ». Je crois qu’on peut considérer qu’il s’agit d’un amendement favorable.
La sénatrice Wallin : C’est effectivement le cas. C’est justement ce que je m’apprêtais à dire. Cette proposition me convient tout à fait.
Le sénateur Gold : Je serai bref. Le gouvernement s’oppose au sous-amendement. Lors de notre dernière séance, M. Ripley a proposé une autre interprétation du terme « équitable ». Il est important, étant donné les difficultés que connaît le marché francophone tout particulièrement, que des efforts soient déployés pour assurer la découvrabilité des émissions originales en langue française. De l’avis du gouvernement, l’approche proposée offre une plus grande latitude à l’intérieur du système. Elle permet la promotion du contenu dans les deux langues officielles dans les endroits où cela est pertinent.
En outre, en mettant l’accent sur l’anglais et le français comme cela est proposé dans ce sous-amendement, on risque selon nous de nuire à la programmation dans les langues autochtones et dans d’autres langues, ce qui va à l’encontre des amendements proposés par certains de nos collègues depuis le début de notre étude. Ce type de contenu provenant d’autres entreprises de radiodiffusion en anglais et en français devrait simplement être considéré comme étant canadien.
Merci pour cette proposition, mais le gouvernement ne va pas l’appuyer.
La sénatrice Miville-Dechêne : Je voudrais juste tirer une chose au clair. Sommes-nous en train de débattre du sous-amendement? Est-ce que l’on propose d’éliminer cette disposition qui vise à assurer la découvrabilité des services de programmation canadienne? Je pose la question parce que j’ai l’impression que c’est ce qu’on cherche à faire.
Le président : Nous débattons du sous-amendement, sénatrice.
La sénatrice Miville-Dechêne : Oui, mais vous avez lu le sous-amendement et il était encore question de découvrabilité, alors qu’il me semble que l’amendement avait supprimé cette mention.
Je suis désolée, mais j’essaie seulement de clarifier les choses.
La sénatrice Simons : Comme je le disais, c’est un peu compliqué du fait que l’amendement de la sénatrice Wallin comporte deux parties. Mon sous-amendement porte uniquement sur la première partie. Le terme « découvrabilité » est effectivement maintenu dans mon sous-amendement qui se lit comme suit : « … assurer la découvrabilité des services de programmation canadienne ainsi que des émissions canadiennes originales en langues anglaise et française… Je retiens ensuite la suggestion de la sénatrice Wallin quant à la suppression dans le sous-alinéa r) de la mention suivante : « … et veiller à ce que tout moyen de contrôle de la programmation génère des résultats permettant sa découverte… »
Pendant que j’ai la parole, je voudrais simplement répondre aux commentaires du sénateur Gold en lui disant ce que je pense de son argumentation suivant laquelle ma proposition serait en quelque sorte préjudiciable pour les langues autochtones. Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est malhonnête de sa part, mais je vous soumets que le libellé original de cette disposition est beaucoup plus préjudiciable pour les langues autochtones que celui du sous-amendement que je suggère. J’estime qu’il est un peu trompeur d’avancer une justification semblable.
Le sénateur Manning : La sénatrice Simons a indiqué que son sous-amendement allait assurer la découvrabilité passive. À mon sens, le terme « assurer » n’a rien de passif.
La sénatrice Wallin : Cette partie doit être supprimée.
Le sénateur Manning : Non, elle veut l’inclure.
La sénatrice Simons : Il est effectivement question d’« assurer la découvrabilité » dans la première partie, mais je crois qu’on peut l’interpréter comme incluant…
Le sénateur Manning : Je me demande simplement si vous seriez disposée à accepter un amendement à votre sous-amendement pour remplacer le terme « assurer » par « permettre ». « Assurer » n’offre aucune marge de manœuvre. En utilisant « assurer », on indique qu’il y a obligation; c’est une garantie. Le terme « permettre » offre pour sa part une plus grande souplesse. « Assurer » est prescriptif. Il n’y a pas de zone grise.
La sénatrice Simons : Je n’ai rien contre un tel amendement à condition que cela ne se traduise pas par une demi-heure d’attente pour que notre greffier législatif fasse son travail et que nous obtenions des copies imprimées. Si c’était le cas, je serais plus réticente.
Le sénateur Plett : Je suis d’accord. Nous devrions aller de l’avant.
Le sénateur Manning : Je préfère attendre quelques minutes aujourd’hui, plutôt que d’avoir à réparer les pots cassés dans trois ans
Le président : Seriez-vous disposée à accepter cet amendement?
La sénatrice Simons : Je suis prête à l’accepter, mais pas au risque de faire dérailler la séance dès les cinq premières minutes.
Le sénateur Manning : Je propose donc un amendement au sous-amendement pour que le terme « assurer » soit remplacé par « permettre ».
Le président : C’est pour cette raison qu’il pourrait être avantageux pour la suite des choses de communiquer ces propositions et de les regrouper.
Le sénateur Klyne : Je veux m’assurer d’une chose. Il est bien question ici du sous-alinéa (7)q)(i)? Plutôt que de supprimer les lignes 32 à 36, vous voulez seulement remplacer le terme « assurer » par « permettre »?
La sénatrice Wallin : On s’arrête également dans l’amendement après les termes…
Le sénateur Manning : Juste un instant. Ma proposition ne porte pas sur l’amendement de la sénatrice Wallin.
La sénatrice Wallin : Ou même l’autre moitié du premier amendement.
La sénatrice Simons : Le sous-amendement se lirait alors comme suit : « ... permettre la découvrabilité des services de programmation canadienne ainsi que des émissions canadiennes originales en langues anglaise et française… »
Des voix : D’accord.
La sénatrice Simons : Ou, pour répondre à la préoccupation du sénateur Gold, je suppose que nous pourrions simplement écrire « ... permettre la découvrabilité des services de programmation canadienne ainsi que des émissions canadiennes originales. » Il n’y aurait ainsi aucune discrimination contre la langue de qui que ce soit.
Le président : Pourriez-vous répéter encore une fois votre sous-amendement?
Le sénateur Manning : La sénatrice Simons vient en quelque sorte de le faire, mais je propose essentiellement que l’on remplace dans son sous-amendement le terme « assurer » par « permettre », de telle sorte qu’il se lirait comme suit : « ... permettre la découvrabilité des services de programmation canadienne ainsi que des émissions canadiennes originales... » et on laisserait ensuite tomber les termes « en langues anglaise et française ».
Le président : Il s’agirait d’un nouvel amendement, comme l’indique notre greffier, parce que ce terme ne figure pas dans le libellé du sous-amendement. Il est ailleurs dans le projet de loi. Vous pourrez proposer cet amendement plus tard, si vous le désirez.
J’ai une très brève question pour vous, sénatrice Simons. Je crains seulement que la formulation de votre sous-amendement fasse en sorte que le CRTC — le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes — soit davantage, plutôt que moins, habilité à manipuler les algorithmes. C’est ce qui me préoccupe depuis le commencement du débat et c’est ce qui continue de m’inquiéter.
La sénatrice Simons : Ce n’est certes pas le résultat recherché, pas plus par mon sous-amendement que par l’amendement de la sénatrice Wallin. Par ailleurs, pour répondre à l’intervention du sénateur Gold, si l’on considère la seconde partie de l’amendement de la sénatrice Wallin qui porte sur l’alinéa r), on peut lire clairement : « … dans les deux langues officielles ainsi qu’en langues autochtones… »
Je ne sais pas si c’est suffisant pour rassurer le sénateur Gold quant au fait que l’on ne cherche aucunement à faire de la discrimination à l’encontre des langues autochtones, lesquelles ne sont aucunement mentionnées dans le sous-alinéa 7q)(i) du projet de loi.
J’ai vraiment du mal à accepter l’allégation voulant que l’on ait l’intention ici de faire de la discrimination à l’encontre de la programmation autochtone, parce que la disposition dans sa forme initiale ne fait aucunement mention des langues autochtones. On pourrait même affirmer que nous en faisons davantage…
La sénatrice Miville-Dechêne : Je veux dire brièvement que je m’oppose à votre sous-amendement du fait que la disposition visée précise que l’exigence s’applique « notamment » à la langue française, une langue minoritaire au Canada. En ajoutant la langue anglaise, qui n’est pas minoritaire chez nous — malgré toutes les autres qualités qu’elle peut avoir par ailleurs —, on modifie le sens de cette disposition.
Je comprends que vous voulez que tout le monde soit sur le même pied, mais comme ce n’est pas vraiment notre réalité, je vais m’opposer à votre amendement, et ce, malgré tout le respect que j’ai pour vous
La sénatrice Clement : Monsieur Ripley, pourriez-vous nous dire ce que ce sous-amendement nous ferait perdre? Mon intervention fait suite à celle de la sénatrice Miville-Dechêne quant à notre impression que l’on cherche ici à protéger davantage le français que l’anglais. Que perdrions-nous si ce sous-amendement et l’amendement lui-même étaient adoptés?
M. Thomas Owen Ripley, sous-ministre adjoint délégué, Patrimoine canadien : Merci pour la question, sénatrice.
J’aurais deux choses à vous dire concernant le sous-amendement proposé. Premièrement, le libellé actuel est inclusif du fait qu’il traite des émissions canadiennes originales, et notamment des émissions de langue originale française, sans toutefois exclure les autres. Comme certains sénateurs l’ont souligné, je crois que le sous-amendement proposé par la sénatrice Simons nous ferait perdre le caractère inclusif de cette disposition en ne traitant que de l’anglais et du français.
Deuxièmement, le sous-amendement nous ferait perdre le concept de la découvrabilité « dans une proportion équitable » en indiquant simplement qu’il faut assurer la découvrabilité des émissions canadiennes originales en anglais et en français, sans rien préciser de plus.
La sénatrice Clement : Pouvez-vous nous dire alors en quoi nous toucherait la perte du concept de « proportion équitable »? Pouvez-vous nous donner un exemple?
M. Ripley : Merci pour la question.
Comme cette disposition découle d’une proposition venant d’un parti d’opposition, il m’est un peu difficile de vous parler de ce qui a pu motiver cette initiative.
L’une des difficultés vient du fait que l’alinéa q) porte sur « les entreprises en ligne qui fournissent les services de programmation provenant d’autres entreprises de radiodiffusion… » Cela s’appliquerait dans les faits à des services comme les chaînes Prime Video d’Amazon, Télé Élan de Rogers ou toute offre incluant les chaînes télé d’autres services à l’intérieur d’un abonnement.
La plupart des sous-alinéas suivants font intervenir ce concept des services de programmation offerts par une autre entreprise de radiodiffusion, exception faite de cette disposition touchant les émissions canadiennes. On jumelle en quelque sorte les deux concepts à l’intérieur même de l’alinéa q).
J’estime que ceux qui ont été à l’origine de cette disposition souhaitaient en ajoutant la précision « dans une proportion équitable » faire en sorte que l’on assure la découvrabilité des services de programmation canadienne ainsi que des émissions canadiennes originales en leur accordant un traitement juste par rapport aux services et aux émissions provenant de l’étranger. Il s’agit notamment de mieux faire connaître le contenu canadien dans le marché en question.
Ces dispositions s’inscrivent en fin de compte dans les objectifs stratégiques de la Loi et doivent être appliquées de concert avec les outils réglementaires dont le CRTC dispose en vertu des articles 9.1, 10 et 11.1.
[Français]
Le sénateur Cormier : Je vais voter contre le sous-amendement. Vous comprendrez que, pour reprendre ce qu’a dit la sénatrice Miville-Dechêne, on sait pertinemment que les découvertes de productions francophones sur Internet sont un problème important qui n’a rien à voir avec les défis que rencontrent les productions anglophones. Je respecte les productions anglophones, mais je vais voter contre l’amendement pour cette raison.
[Traduction]
La sénatrice Wallin : Pouvons-nous alors simplement demander à M. Ripley de nous indiquer ce qu’on entend exactement par « équitable » dans ce contexte? C’est ce qui est problématique. Nous ne savons pas quel sens on donne à ce terme. Je sais que ce n’est pas une proposition qui émane du gouvernement. C’est un amendement qui nous vient de l’opposition, mais si vous comptez l’appuyer, alors…
M. Ripley : Merci, sénatrice.
Par « équitable », on entend simplement que la proportion doit être juste.
Je répète qu’il s’agit, lorsque des entreprises en ligne distribuent la programmation d’autres entreprises en ligne — comme c’est le cas pour des services comme les chaînes Prime Video d’Amazon, Télé Élan de Rogers ou l’équivalent chez Bell —, de veiller à ce que l’un des objectifs stratégiques du CRTC soit de s’assurer que la programmation des chaînes télé canadiennes et les émissions canadiennes originales, et notamment les émissions de langue originale française, soient découvrables dans une proportion juste, équilibrée et équitable.
La sénatrice Wallin : Il y aurait une distinction à faire entre équitable et juste.
Le président : Je crois que nous avons pu entendre les arguments de part et d’autre.
Il est temps de mettre aux voix le sous-amendement de la sénatrice Simons. Qui est en faveur de ce sous-amendement?
Des voix : Non.
Des voix : Oui.
Le président : À mon avis, les non l’emportent. Le sous-amendement est donc rejeté.
Nous revenons à l’amendement principal proposé par la sénatrice Wallin.
La sénatrice Wallin : Comme nous en avons discuté tout à l’heure, je proposerais qu’on isole les deux changements que je suggère concernant l’alinéa q) de telle sorte que l’alinéa r) fasse l’objet d’un amendement à part qui se lirait comme suit : « ... les entreprises en ligne doivent clairement mettre en valeur et recommander la programmation canadienne, dans les deux langues officielles ainsi qu’en langues autochtones... » avec suppression du reste de l’alinéa qui indique « … et veiller à ce que tout moyen de contrôle de la programmation génère des résultats permettant sa découverte... »
Je répète qu’il est très difficile d’imposer des résultats ou d’évaluer les répercussions d’une directive.
Le président : Êtes-vous en train de proposer un sous-amendement à votre propre amendement?
La sénatrice Wallin : Je veux juste scinder mes deux propositions. Devons-nous obligatoirement nous prononcer sur l’amendement dans son ensemble? Avant cela, le sous-amendement de la sénatrice Simons ne portait-il pas uniquement sur le sous-alinéa q)(i)?
Le président : J’ai l’impression qu’il s’agit davantage d’un nouvel amendement que d’un sous-amendement.
La sénatrice Wallin : J’ai joint les deux propositions, ce qui est problématique du fait qu’elles portent toutes les deux sur l’alinéa q).
La sénatrice Simons : Puis-je proposer que nous mettions aux voix l’amendement de la sénatrice Wallin dans sa forme originale? Le changement proposé concernant l’alinéa r) correspond exactement à ce que je suggère dans mon prochain amendement.
La sénatrice Wallin : Exactement?
La sénatrice Simons : Oui.
La sénatrice Wallin : D’accord, c’est excellent.
La sénatrice Simons : Si vous regardez la feuille de route, vous verrez que mon amendement — le numéro 23, dont nous traiterons seulement après avoir réglé le sort de celui de la sénatrice Miville-Dechêne — propose de remplacer les lignes 18 et 19 de l’article 3 à la page 9. C’est donc essentiellement la même chose.
La sénatrice Wallin : Comme mes collègues ont rejeté la première partie de cet amendement, ils ne vont certes pas l’appuyer dans son ensemble.
La sénatrice Simons : Oui, peut-être.
La sénatrice Wallin : Je ne sais pas comment nous devons procéder, monsieur le greffier, car le tout a été proposé dans le cadre d’un seul et même amendement.
Le président : Le fait est que nous avons commencé à débattre de cet amendement, sénatrice Wallin. Un sous-amendement a alors été proposé. Il ne serait pas approprié de restructurer maintenant cet amendement. Ce que vous proposez ne correspond pas à un sous-amendement; il s’agit essentiellement d’un nouvel amendement.
Deux options s’offrent à nous. Nous avons déjà débattu de votre amendement, si bien que nous pourrions le mettre aux voix et vous pourriez ensuite en proposer un nouveau. Vous pourriez sinon retirer cet amendement et en proposer directement un autre.
Le sénateur Plett : Pourquoi ne pourrions-nous pas juste voter séparément sur les deux propositions?
Le président : Parce que nous sommes déjà saisis d’un amendement. Il faudrait qu’un sous-amendement soit proposé. À mon avis — et quelqu’un pourra peut-être nous dire que je fais fausse route —, ce que propose la sénatrice Wallin ne correspond pas à un sous-amendement.
La sénatrice Wallin : Je vais alors retirer mon amendement et en proposer immédiatement un autre concernant l’alinéa r).
Le président : C’est une possibilité.
La sénatrice Wallin : Ma proposition est déjà consignée sur la même page, si bien que nous ne devrions pas avoir à imprimer quoi que ce soit.
Le président : Puis-je vous demander de nous transmettre votre proposition par écrit, sénatrice?
La sénatrice Wallin : C’est juste ici. C’est la partie qui est en bas.
Le président : La sénatrice retire son amendement et en propose un nouveau.
La sénatrice Wallin : Je retire l’amendement dont nous sommes saisis pour en présenter un autre qui propose que l’alinéa r) se lise comme suit : «... les entreprises en ligne doivent clairement mettre en valeur et recommander la programmation canadienne, dans les deux langues officielles ainsi qu’en langues autochtones... » avec suppression du reste de l’alinéa r) se lisant actuellement comme suit : «... et veiller à ce que tout moyen de... »
La sénatrice Simons : Nous ne pouvons pas accueillir maintenant cet amendement, car celui de la sénatrice Miville-Dechêne vient avant. Nous devons mettre aux voix la partie supérieure, car la moitié inférieure...
La sénatrice Wallin : C’était un seul et même amendement. Vous avez choisi de ne traiter que de la première partie. J’essaie seulement de régler le problème. Peu m’importe la façon dont nous y parviendrons.
La sénatrice Omidvar : Monsieur le président, c’est en ma qualité de simple invitée au sein de ce comité que je suggèrerais que nous traitions d’abord du sous-alinéa (i) du paragraphe (7), avant de passer à la suite des choses, et notamment à l’amendement de la sénatrice Wallin, tel que modifié par le sénateur Manning avec l’ajout du terme « permettre ».
Le président : Il ne peut pas proposer de sous-amendement à ce sujet parce que cela ne se retrouve pas dans l’amendement de la sénatrice Wallin. Celle-ci vient de toute manière de retirer cet amendement pour en proposer un nouveau.
La sénatrice Wallin : Je ne sais pas de quelle autre façon je pourrais m’y prendre. Si quelqu’un peut me conseiller...
Le président : C’est une façon de faire tout à fait acceptable. Quelqu’un peut s’opposer à cet amendement, mais elle a le droit de le présenter de cette manière.
La sénatrice Simons : Je ne m’oppose pas à l’amendement. Comme son libellé est identique à celui de mon propre amendement, j’y suis favorable. Je crois simplement que nous ne suivons pas l’ordre normal des choses
La sénatrice Wallin : D’accord.
La sénatrice Simons : Ne devrions-nous pas traiter d’abord de l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne?
La sénatrice Wallin : Qui porte sur quelle disposition?
La sénatrice Miville-Dechêne : Réglons d’abord le sort de celui-ci. Pourrait-on mettre votre amendement aux voix?
La sénatrice Wallin : Non. Nous essayons plutôt de déterminer à quel moment je pourrais présenter mon nouvel amendement.
Proposez-vous un changement qui interviendrait avant l’alinéa r)? C’est ce qu’on cherche à savoir.
La sénatrice Miville-Dechêne : Non. Mon amendement porte sur un tout autre sujet.
La sénatrice Wallin : D’accord. Alors...
La sénatrice Simons : Sur la feuille de route, il vient avant celui-ci. L’amendement de la sénatrice Wallin a le même libellé que le mien.
La sénatrice Wallin : Nous en sommes rendus à celui-ci. Il faut simplement savoir si mon amendement vient avant celui de la sénatrice Miville-Dechêne. Je ne sais pas comment je pourrais me retrouver derrière elle.
Le sénateur Manning : Monsieur le président, quand vous serez prêt...
Le président : J’ai une question pour la sénatrice Simons. Est-ce que le libellé de l’amendement de la sénatrice Wallin est en partie similaire à celui de votre proposition? Quel est le problème? Nous pouvons en débattre.
La sénatrice Simons : Le problème, c’est que cela va nous obliger à revenir par la suite à l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne. Je suis entièrement favorable à ce qui est proposé ici. Je signale simplement que nous brûlons les étapes, parce que cet amendement de la sénatrice Wallin...
Le président : D’après ce que j’ai pu comprendre, l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne n’a rien à voir avec celui-ci.
La sénatrice Simons : Vous avez raison.
La sénatrice Wallin : Et il porte sur une disposition subséquente.
La sénatrice Simons : Le problème vient du fait que l’amendement proposé par la sénatrice Wallin visait à modifier deux dispositions complètement différentes.
La sénatrice Wallin : Tout était au paragraphe (7). C’est pour cette raison qu’on nous a dit de procéder ainsi.
Le président : Mais ils sont fortement interreliés, sénatrice Simons. Il y aura un certain chevauchement.
La sénatrice Simons : Tant que vous êtes prêt à permettre...
La sénatrice Miville-Dechêne : Le mien vient après le...
La sénatrice Wallin : Oui.
La sénatrice Simons : D’accord, selon la feuille de route, le vôtre est en deuxième...
La sénatrice Miville-Dechêne : Oui, c’est après.
La sénatrice Simons : Bien. Dans ce cas, je vais...
Le président : Si nous traitons la question soulevée dans votre amendement dès maintenant, la seule chose qui pourrait se produire serait l’élimination d’une question.
La sénatrice Simons : Oui.
La sénatrice Wallin : Nous pourrions, oui.
La sénatrice Simons : Oui. Allons-y, alors, si...
La sénatrice Wallin : Je retire donc tout l’amendement pour plutôt proposer ce qui a trait à l’alinéa (r) dans l’amendement, où ces trois lignes sont effacées pour reprendre avec celles-ci.
Le président : Chers collègues, vous avez la motion initiale de la sénatrice Wallin devant vous. Elle retire son amendement et propose simplement l’alinéa b) de celui-ci.
La sénatrice Wallin : Si tout le monde est d’accord, nous n’aurons pas à le réimprimer.
La sénatrice Simons : Je suis entièrement d’accord avec cet amendement. En effet, c’est exactement le même libellé que mon amendement, que je peux maintenant retirer.
Le président : Sénateur Manning, êtes-vous en faveur de cet amendement?
Le sénateur Manning : D’abord, je suis ravi que nous nous entendions tous sur quelque chose. C’est l’impression que j’ai, mais je suis tellement heureux qu’il n’y ait pas de désaccord, car ce processus est si long.
Je veux m’assurer que mon sous-amendement viendra après l’amendement de la sénatrice Wallin.
Le président : Sénateur, votre sous-amendement n’existe pas. Mais si vous souhaitez ajouter... Si vous voulez proposer un nouvel amendement, vous pouvez le faire.
La sénatrice Wallin : Mais il modifie le premier alinéa.
Le président : De cet amendement, mais il n’est plus question du premier alinéa.
La sénatrice Wallin : C’est pour cette raison qu’il propose un amendement.
Le président : Donc, vous proposez un sous-amendement pour remédier au problème?
La sénatrice Wallin : Ce n’est pas dans ma partie, mais dans la première.
Le sénateur Manning : Je propose un amendement, pas un sous-amendement.
Le président : Sénateur, il s’agit d’un amendement et il viendra après.
Concentrons-nous là-dessus, chers collègues. Nous sommes prêts pour la mise aux voix.
Est-ce que mes honorables collègues sont en faveur de l’amendement proposé par la sénatrice Wallin? Êtes-vous en faveur de cet amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Je crois que le « oui » l’emporte.
Le sénateur Gold : Non. Je demande un vote par appel nominal.
Le président : Un vote par appel nominal est demandé.
[Français]
Vincent Labrosse, greffier du comité : L’honorable sénateur Housakos?
Le sénateur Housakos : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?
La sénatrice Clement : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?
Le sénateur Cormier : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?
Le sénateur Dawson : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?
Le sénateur Gold : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?
Le sénateur Klyne : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?
Le sénateur Manning : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?
La sénatrice Miville-Dechêne : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?
Le sénateur Plett : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?
Le sénateur Quinn : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?
La sénatrice Simons : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?
La sénatrice Wallin : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Woo?
Le sénateur Woo : Non.
M. Labrosse : Pour : 5; contre : 9; abstention : aucune.
[Traduction]
Le président : L’amendement est donc rejeté.
Chers collègues, le greffier législatif est en train de rédiger l’amendement du sénateur Manning. Pour gagner du temps, nous allons passer au prochain point, soit l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne.
Sénatrice Miville-Dechêne, vous avez la parole.
[Français]
La sénatrice Miville-Dechêne : Je devrais commencer par lire l’amendement. Est-ce que l’amendement doit être distribué? Ce serait mieux que vous l’ayez sous les yeux pour que vous puissiez suivre.
Le président : Je suis tout à fait d’accord avec vous.
La sénatrice Miville-Dechêne : Le voici qui s’en vient.
En introduction, vous constaterez que cet amendement est le fruit d’un enjeu que je défends depuis deux ans au Sénat, c’est-à-dire la protection des enfants contre l’exposition à la pornographie.
Dans ce cas-ci, comme nous avons la chance, dans le projet de loi C-11, de parler des pouvoirs du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), c’est la raison de cette présentation. Maintenant que tout le monde a l’amendement, je vais le lire d’abord en anglais.
[Traduction]
Je propose ce qui suit :
Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 9, par adjonction, après la ligne 2, de ce qui suit :
« r.1) les entreprises en ligne doivent mettre en place des mécanismes, tels que des mécanismes de vérification de l’âge, pour empêcher que des émissions consacrées à la présentation, dans un but sexuel, d’activités sexuelles explicites ne soient rendues accessibles aux enfants par Internet; ».
[Français]
Je vous fais maintenant part de quelques arguments rapides parce que je sais que le temps passe. L’idée de cet amendement est la suivante : il vise le contenu pour adultes, la pornographie diffusée par des plateformes de diffusion en ligne.
Vous le savez, le CRTC a déjà l’autorité sur le contenu pour adultes diffusé par les diffuseurs traditionnels, notamment les chaînes payantes spécialisées. Ces contenus sexuellement explicites sont déjà soumis à des règles. Je précise que l’expression « matériel sexuellement explicite » ne réfère pas tout simplement à des personnes nues, mais qu’on parle ici d’activités sexuelles. Toutes les définitions de cette expression réfèrent à des prises de vue de près, des activités sexuelles explicites. On ne parle pas ici de simple nudité.
Dans la mesure où le projet de loi C-11 vise à confirmer et à étendre la juridiction du CRTC sur les plateformes en ligne — c’est ce qu’on fait dans le projet de loi —, il est normal que les pouvoirs du CRTC couvrent aussi le contenu pour adultes en ligne. En l’occurrence, il s’agit simplement de faire en sorte que ces contenus pour adultes, qu’ils soient diffusés en ligne ou par le biais de diffuseurs traditionnels, soient réservés aux adultes. Il n’est donc pas question ici, de quelque manière que ce soit, de censure, mais uniquement d’avoir en ligne le même traitement qu’il y a dans la vie pour ce qui est du contenu pour adultes qui est réservé aux personnes de 18 ans et plus.
Je vous rappelle deux choses : lors de ces audiences, nous avons entendu M. Peter Menzies, ancien vice-président du CRTC, qui a explicitement dit que le projet de loi C-11 donne au CRTC le pouvoir de réglementer tout le contenu audio et visuel sur Internet. Le CRTC pourra donc s’en prévaloir pour réglementer cette question.
Nous avons reçu quatre mémoires sur cette question de la part de groupes favorables à cet amendement. Je vous résume seulement celui du Centre canadien de protection de l’enfance qui relatait que des pays comme l’Allemagne et la France ont pris des règlements à cet égard et que le Canada devrait emboîter le pas et exiger que des plateformes qui offrent du contenu pour adultes emploient des technologies de vérification ou de confirmation d’âge. De même que nous protégeons les enfants contre les dangers du tabac, de l’alcool et de la marijuana ou des films violents, nous devons adéquatement protéger les enfants contre le contenu sexuellement explicitement en ligne.
Je m’arrête ici; vous avez quatre mémoires en tout et un témoignage pour soutenir cet amendement relativement court, parce qu’on laisse au CRTC le soin de décider des méthodes, à savoir comment cela se ferait. Bref, ici, on enjoint le CRTC à agir, mais on ne lui dit pas exactement comment dans cette question hautement technique; voilà.
[Traduction]
Le sénateur Gold : Merci, sénatrice Miville-Dechêne. Assurer la sécurité de nos enfants n’est pas seulement une priorité pour le gouvernement, mais pour nous tous et pour tous les gouvernements. Le gouvernement est toutefois d’avis que le projet de loi C-11 n’est tout simplement pas la bonne façon d’atteindre cet objectif important et d’accomplir ce travail important.
En effet, le gouvernement a de grandes préoccupations quant à la portée et à l’application de l’amendement proposé dans le contexte de la structure générale du projet de loi C-11. Le gouvernement du Canada souhaite proposer un texte législatif applicable à de possibles préjudices en ligne dans le but de protéger toute la population canadienne, y compris contre le type de préjudices proposé par cet amendement. Du point de vue du gouvernement, le cadre le plus approprié pour discuter de cette question importante serait dans le contexte de ce texte législatif. Pour ces raisons, le gouvernement ne peut pas appuyer cet amendement.
Le sénateur Plett : Je vais faire court, mais je crois que, quel que soit le cadre qui nous vient en tête, ils devraient tous sans exception nous permettre d’empêcher l’exploitation des enfants et la pornographie à laquelle les enfants ont accès, bref toutes les choses du genre, et que, si nous le répétons dans cinq projets de loi distincts, nous devrions le faire avec plaisir. Je trouve très étrange d’entendre le gouvernement affirmer que n’importe quel cadre ne convient pas pour empêcher de quelque façon que ce soit l’exploitation des enfants. Pour ma part, je salue les efforts de la sénatrice Miville-Dechêne à cet égard. Il est certain que je vais voter en faveur de cela, et j’ose espérer que ce gouvernement renoncera à son attitude selon laquelle seulement certains cadres et pas d’autres conviennent pour protéger nos enfants.
La sénatrice Clement : J’ai une question pour M. Ripley. Croyez-vous que cela pourrait être interprété comme le blocage de contenu éducatif? C’est la seule préoccupation que j’ai avec cet amendement, car s’il y a une discussion à propos de la santé sexuelle des jeunes, par exemple, vous pourriez avoir un site Web avec du contenu de nature sexuelle à des fins éducatives.
M. Ripley : Merci pour votre question, sénatrice Clement. Pour bien situer les sénateurs, la sénatrice Miville-Dechêne propose l’ajout d’un objectif stratégique à la mesure législative, de sorte que son opérationnalisation dépendrait de la façon dont le CRTC la mettrait en œuvre. Elle a traité de ses motifs qui, je le répète, d’après la lecture que je fais de l’amendement tel que déposé, s’inscrivent dans la façon dont elle les a exposés, surtout l’élément « d’activités sexuelles explicites ». Mais la véritable façon dont cela serait mis en œuvre dépendrait de décisions du CRTC. Évidemment, comme l’a souligné la sénatrice Miville-Dechêne, il y a déjà des façons de le faire par rapport aux normes de classement et aux avertissements émis quand on consomme du contenu sexuellement explicite. Il y a déjà des pratiques courantes dans l’industrie à cet effet.
Le sénateur Klyne : Je comprends l’argument, mais, pour rebondir sur ce qu’a dit le sénateur Plett, j’interprète cela comme deux choses différentes. D’une part, il y a le contenu sexuellement explicite d’enfants ou de mineurs, où il est question de contenu pour adultes qui ne précise pas que des enfants figurent dans le contenu sexuellement explicite.
Le sénateur Plett : L’amendement y remédie.
Le sénateur Klyne : Ah oui?
Le sénateur Plett : Il précise : « ...des mécanismes de vérification de l’âge, pour empêcher que des émissions [...] ne soient rendues accessibles aux enfants... »
Le sénateur Klyne : Pour ne pas qu’ils les regardent.
Le sénateur Plett : Pour qu’ils n’aient pas accès aux émissions, les enfants j’entends.
Le sénateur Klyne : Je suis d’accord avec vous. Je serais donc plus enclin à soutenir celui-là.
La sénatrice Miville-Dechêne : Vous avez raison de dire que ce sont deux choses différentes, mais nous parlons de l’exposition des enfants à du contenu réservé aux adultes.
Le sénateur Klyne : Destiné aux adultes.
La sénatrice Miville-Dechêne : Oui. Ce serait différent s’il y avait des enfants dans du contenu pour adultes. Il s’agit là d’une infraction criminelle, ce qui est complètement différent, et il y a des lois...
Le sénateur Klyne : Je comprends.
La sénatrice Miville-Dechêne : D’accord. Super.
Le sénateur Klyne : Cela ne change pas le poids des propos du sénateur Plett. Ce n’est pas sur quoi porte sa motion.
Le sénateur Gold : Pour que ce soit bien clair, je réitère que le gouvernement n’est pas contre la mise en place de mesures adéquates pour protéger les enfants dans un environnement numérique. Je tiens à souligner, et je le dirai sans parti pris, que la proposition du sénateur Plett et son soutien à cet amendement ont, dans les faits, les conséquences suivantes : en gros, ce projet de loi devrait donc régir tout le contenu audiovisuel en ligne, et le CRTC devrait ainsi assurer une surveillance plus serrée du contenu en ligne alors qu’il n’est pas supposé le faire et qu’il ne le fera pas au titre du projet de loi C-11, et ce, malgré un certain discours tenu durant tout le processus au sein de ce comité. Il s’agit d’un élargissement du rôle du CRTC pour inclure le contenu en ligne, ce qui n’est pas essentiellement l’objet du projet de loi. C’est pour cette raison, malgré les objectifs louables de l’amendement, objectifs que le gouvernement appuie, qu’il est inapproprié, de l’avis du gouvernement, de l’inclure dans le projet de loi à titre de nouvelles instructions au CRTC.
Le président : J’ai une question rapide là-dessus pour M. Ripley. Bien sûr, c’est un débat constant et le gouvernement continue d’affirmer ce que vient tout juste de déclarer le sénateur Gold, soit que le CRTC n’a actuellement pas les pouvoirs pour surveiller le contenu au titre de la Loi sur la radiodiffusion.
Le président du CRTC a comparu devant le comité et, après un bon nombre de questions, il a reconnu qu’il a déjà le pouvoir de surveiller le contenu. Nous avons donné des exemples précis datant de quelques mois où le CRTC est intervenu auprès de Radio-Canada et dans d’autres circonstances.
Monsieur Ripley, êtes-vous d’accord pour dire que la Loi sur la radiodiffusion, dans sa forme actuelle modifiée, donne ce pouvoir au CRTC s’il décide de s’en prévaloir?
M. Ripley : Merci pour votre question, monsieur le président.
La structure actuelle de l’industrie veut que les émissions diffusées par une chaîne de télé aient à respecter certaines normes de l’industrie.
Selon la structure actuelle, il y a une organisation menée par l’industrie, soit le Conseil canadien des normes de la radiotélévision, qui conçoit certains codes en matière, par exemple, de violence et de représentation équitable. On s’attend à ce que les chaînes de télé et les diffuseurs respectent ces codes.
Actuellement, si on tient compte du fait que certains services comme les services de médias sociaux peuvent être assujettis au projet de loi, le CRTC n’a absolument pas le pouvoir d’appliquer ces normes de radiodiffusion aux services de médias sociaux, et c’est clair dans le projet de loi parce que ce pouvoir ne s’applique qu’aux services qui contrôlent leurs émissions. Il est admis que les services de médias sociaux n’ont pas de contrôle sur le contenu qui y est affiché, donc le CRTC n’aurait pas la capacité, par exemple, d’étendre l’application des normes de radiodiffusion aux services de médias sociaux.
Le président : Donc, vous dites que, au titre de ce projet de loi, il n’aura pas ce pouvoir?
M. Ripley : Non, il n’aura pas ce pouvoir.
Le président : Merci.
La sénatrice Miville-Dechêne : Pour conclure, sur la question de la portée, j’ai bien sûr une divergence de vues avec le sénateur Gold. Si vous consultez l’étude article par article effectuée à la Chambre des communes, un amendement semblable a été présenté. Ce n’était pas le même, mais il partageait des caractéristiques avec celui-ci. Le représentant du gouvernement n’a jamais dit qu’il débordait du cadre, donc je me demande pourquoi c’est le cas aujourd’hui.
Je crois également que, parce que nous élargissons les pouvoirs du CRTC afin d’y inclure les entreprises en ligne, l’idée est d’élargir la portée des normes, comme vous le dites, car, à l’heure actuelle, il n’y en a pas. Il n’y a pas de mesures de protection. Il n’y a rien.
Ce sont des instructions que j’essaie de soumettre ici, des instructions qui donnent beaucoup de marge de manœuvre au CRTC quant à la façon de procéder.
Enfin, sénateur Gold, si j’avais la conviction que le gouvernement aborderait la pornographie dans le projet de loi sur le contenu numérique, les choses seraient probablement différentes, mais on ne m’a jamais donné la moindre garantie que cela faisait partie des priorités du gouvernement. Je crois qu’il est urgent de protéger les enfants et c’est pour cette raison que je profite de la réouverture de la Loi sur la radiodiffusion pour proposer cet amendement. Merci.
Le président : Merci, sénatrice. Nous avons un amendement proposé par l’honorable sénatrice Miville-Dechêne voulant que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 9. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : Oui.
Des voix : Non.
Le président : Je crois que le « oui » l’emporte.
[Français]
M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?
Le sénateur Housakos : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?
La sénatrice Clement : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?
Le sénateur Cormier : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?
Le sénateur Dawson : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold?
Le sénateur Gold : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?
Le sénateur Klyne : Abstention.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?
Le sénateur Manning : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?
La sénatrice Miville-Dechêne : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Abstention.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?
Le sénateur Plett : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?
Le sénateur Quinn : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?
La sénatrice Simons : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?
La sénatrice Wallin : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Woo?
Le sénateur Woo : Non.
M. Labrosse : Pour : 7; contre : 5; abstentions : 2.
[Traduction]
Le président : L’amendement est donc adopté.
La sénatrice Simons : Mon prochain amendement tombe à l’eau.
Le président : Souhaitez-vous le retirer?
La sénatrice Simons : Je ne veux pas vraiment le retirer, mais c’est inutile. Nous venons tout juste de voter là-dessus, donc...
Le président : Oui, nous venons de le faire.
La sénatrice Simons : Nous n’avons pas respecté l’ordre, et personne sauf moi ne semble s’en soucier.
Le président : Nous avons soulevé le point que nous allions déroger de l’ordre, sénatrice, et personne ne s’y est opposé. Nous avons convenu que le libellé sera abordé en conséquence.
Sénateur Manning, vous pouvez proposer votre amendement.
Le sénateur Manning : Je propose :
Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 8, par substitution, à la ligne 32, de ce qui suit :
« (i) permettre la découvrabilité des services de pro- ».
Je veux revenir sur ce que j’ai mentionné plus tôt. Je proposais cet amendement parce que j’avais l’impression que le mot « assurer » était trop directif et que « autoriser » donnerait au CRTC un peu de souplesse dans sa façon d’assurer la découvrabilité des services de programmation canadienne.
Nous avons entendu beaucoup de témoins qui ont soulevé les difficultés relatives à la clarté, à la certitude et à la stabilité dans la radiodiffusion canadienne dans le cadre du présent projet de loi. En ce qui a trait à l’incidence sur les consommateurs, John Lawford, directeur général et conseiller juridique général du Centre pour la défense de l’intérêt public, nous a dit :
Les consommateurs résistent naturellement à l’insertion de contenu canadien dans leurs visionnements automatisés ou les suggestions algorithmiques proposées sur des plateformes comme YouTube, et les créateurs numériques craignent que ces outils de découvrabilité ne se retournent contre eux et réduisent leur auditoire.
Pour ce qui est de l’incidence sur les créateurs, le créateur de contenu numérique Scott Benzie a dit très clairement que :
... les modifications dynamiques des algorithmes sont exclues, car les modifier, c’est compromettre les entreprises canadiennes et l’accès à leur public.
Mon amendement assure une certaine souplesse en ce sens plutôt que d’être aussi directif.
Le sénateur Gold : Merci. Le gouvernement est contre cet amendement. Le fait de changer l’exigence pour les plateformes d’« assurer » la découvrabilité par uniquement l’« autoriser » donne certes plus de souplesse, mais crée aussi une énorme échappatoire qui permet aux plateformes d’éviter de présenter adéquatement du contenu canadien. Dire que c’est autorisé ne signifie pas qu’elles le feront.
En fait, dans certains contextes, surtout dans le cas d’émissions en français, comme l’a souligné le sénateur Cormier, les gens ont de la difficulté à les trouver. Cette mesure législative et cette disposition visent non pas à forcer les gens à regarder du contenu, mais simplement à veiller à ce qu’ils y aient accès et à ce qu’ils puissent le trouver de façon équitable dans le contexte d’une plateforme donnée.
Le projet de loi actuel assure toujours une certaine souplesse ainsi qu’une approche collaborative pour établir les meilleures façons de mettre en valeur le talent canadien. Il ne s’agit pas strictement d’algorithmes; cela peut se faire d’autres façons, comme notre propre expérience en ligne en témoigne. Les plateformes ne sont pas toutes pareilles et le projet de loi reconnaît déjà qu’il n’y a pas de solution universelle.
Pour toutes ces raisons, le gouvernement ne peut pas appuyer cet amendement.
[Français]
Le sénateur Cormier : En français, la définition du verbe « permettre » comprend « laisser faire », « ne pas empêcher ».
Ce n’est pas très proactif. Donc, je voterai contre cet amendement.
[Traduction]
Le sénateur Quinn : J’ai une question pour M. Ripley. Lorsque nous disons « assurer » la découvrabilité des services de programmation canadiens — et je suis conscient qu’il existe différentes méthodes — je pense que nous parlons en fait du résultat clé. Comment pouvons-nous l’atteindre? Nous en revenons à la discussion sur la découvrabilité. Comment pouvons-nous l’assurer grâce à la promotion, à la facturation ou autre? Si vous n’obtenez pas ce résultat clé, tout ne revient-il pas à l’algorithme?
M. Ripley : Merci pour cette question, sénateur Quinn. La distinction à faire ici, et je pense que les sénateurs en ont déjà parlé, est celle entre une obligation positive et une indication permissive. En pratique, pour atteindre cet objectif stratégique, le CRTC utiliserait les instruments réglementaires décrits plus loin dans le projet de loi et chercherait à déterminer si certains outils peuvent servir d’obligation positive.
Je pense que nous pouvons utiliser toute une gamme d’instruments dans ce contexte, y compris la promotion et la mise en valeur sur les pages d’accueil. Encore une fois, l’élément principal de cet objectif concerne les services de programmation. Il s’agit en fait de la distribution des chaînes de télévision par des entreprises en ligne, comme Amazon Prime Video Channels, Rogers Ignite TV ou Bell.
Le sénateur Quinn : Je comprends votre explication, mais je reviens simplement au verbe « assurer ». En jargon gouvernemental, ce mot signifie que le résultat clé doit être atteint, sans quoi les personnes seront tenues responsables de cet échec. L’utilisation de ce terme constitue un ultimatum : vous devez veiller à ce que la découvrabilité soit primordiale pour l’obtention du résultat. Si telle est l’intention du gouvernement, très bien, mais cela remet en question les discussions que nous avons eues tout au long de l’année sur la découvrabilité et la manipulation des algorithmes. Excusez-moi. Il fallait que je revienne sur ce point, parce que c’est, d’après moi, ce que dit le texte.
La sénatrice Wallin : Je veux me faire l’écho de ce qu’a dit le sénateur Quinn. Je sais que nous en avons déjà parlé, mais le libellé n’est pas clair, bien que le paragraphe précédent dise : « les entreprises en ligne qui fournissent les services de programmation... ». On ne sait pas si le terme « entreprises en ligne » désigne des personnes ou des plateformes, car dans la définition, il pourrait s’agir de l’un ou l’autre. C’est donc là que le mot « assurer » pose problème. Je suppose que c’est la raison pour laquelle le sénateur Manning a évoqué ce point, qui reflète les préoccupations du sénateur Quinn et les miennes, car je pense que nous n’avons toujours pas éclairci ce point.
Le président : Je soutiens également cet amendement. J’estime que le gouvernement ne devrait jamais déterminer le résultat souhaité de quoi que ce soit. Cette idée me gêne beaucoup. Le respect du choix du consommateur n’est pas assuré dans ce projet de loi, et je pense que cet amendement constitue un petit pas dans la bonne direction.
Je vois que personne d’autre ne souhaite débattre, alors je vais mettre la question aux voix. L’honorable sénateur Manning propose que le projet de loi C-11 soit modifié à la ligne 32 de l’article 3, à la page 8. Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : Non.
Des voix : Oui.
Le président : Je pense que les non l’emportent. Nous allons procéder à un vote par appel nominal.
[Français]
M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?
Le sénateur Housakos : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?
La sénatrice Clement : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?
Le sénateur Cormier : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?
Le sénateur Dawson : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?
Le sénateur Gold : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?
Le sénateur Klyne : Abstention.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?
Le sénateur Manning : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?
La sénatrice Miville-Dechêne : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?
Le sénateur Plett : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?
Le sénateur Quinn : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?
La sénatrice Simons : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?
La sénatrice Wallin : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Woo?
Le sénateur Woo : Non.
M. Labrosse : Pour : 6; contre : 7; abstention : 1.
[Traduction]
Le président : L’amendement est donc rejeté.
La sénatrice Simons : L’un de mes amendements n’a pas été examiné.
Le président : Quel est son numéro, sénatrice?
La sénatrice Simons : Est-ce celui-ci? D’accord. Il s’agit de l’amendement à l’article 3, page 9. C’est mon autre amendement qui a été omis. Il va être distribué, n’est-ce pas?
Le président : Pouvez-vous répéter le numéro de l’amendement qui a été omis?
La sénatrice Simons : Oui. Celui qui a été omis était un double de celui de la sénatrice Wallin. C’est celui que je pensais retirer. L’amendement que nous conservons est le PS-C-11-3-9-18.
Le président : C’est celui que nous examinons maintenant, sénatrice.
La sénatrice Simons : Il s’agit d’un amendement au SB-5.
Le président : Il est en cours de distribution. Un instant, sénatrice. Je m’assure que tout le monde a votre amendement sous les yeux.
La sénatrice Simons : Je m’excuse. Il y a eu beaucoup de...
Le président : Nous nous sommes un peu éparpillés.
La sénatrice Simons : Je propose ce qui suit :
Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, à la page 9, par substitution, à la ligne 23, de ce qui suit :
« ser le journalisme local, ».
Cet amendement concerne un article qui a été modifié à l’autre endroit. Il traite de la participation communautaire et de la radiodiffusion communautaire. Il importe l’expression « favoriser la lutte contre la désinformation » dans la législation. J’estime que l’introduction de ce terme dans la législation à cette date tardive est très problématique. Il n’y a aucune autre référence à la désinformation dans la loi. Ce mot est aujourd’hui tellement politisé qu’il est devenu un véritable paratonnerre. Ce qui constitue de l’information exacte pour certains est de la désinformation ou de la propagande pour d’autres. Il serait inapproprié, dans le cadre de cette loi, de confier tout à coup au CRTC la responsabilité de déterminer ce qui constitue ou non de la désinformation. Si le gouvernement veut se pencher sur les préjudices en ligne à une date ultérieure, il devra le faire dans le cadre d’une autre loi. Le rôle du CRTC n’a jamais été de réglementer le contenu, et je pense que le fait de lui confier la tâche de déterminer ce qui est ou n’est pas de la désinformation est une proposition discutable.
Je propose donc, dans cet amendement, de supprimer le mot « désinformation » et, comme vous le verrez, de modifier légèrement l’article pour dire : « par la participation des membres de la collectivité, renforcer le processus démocratique et favoriser le journalisme local... ». Je ne peux pas lire dans les pensées de la personne qui a ajouté ce terme dans la loi, mais je soupçonne que cet amendement est conforme à ses intentions. Dire que la radiodiffusion communautaire doit soutenir le journalisme local et dire qu’elle doit lutter contre la désinformation sont deux choses totalement différentes. Je pense simplement que le terme « désinformation » expose la législation à une théorie du complot orwellienne, et nous n’avons pas besoin de cela.
Le sénateur Cormier : Je vous remercie, sénatrice Simons.
J’ai une question pour M. Ripley. Dans quel contexte la « désinformation » a-t-elle été introduite? Dans quel type de discussion a-t-elle été abordée à l’autre endroit?
M. Ripley : Merci, sénateur Cormier.
Cet amendement visait une meilleure reconnaissance de la dimension communautaire du système de radiodiffusion. Il vise donc à reconnaître les radiodiffuseurs communautaires et des campus. Ce libellé émane donc en fait des radiodiffuseurs communautaires, et il s’agit donc de la description qu’ils ont faite de leur rôle ou de la façon dont ils envisagent leur rôle au sein du système.
Le sénateur Cormier : Que proposerait l’amendement? Le terme « processus démocratique » serait-il plus clair, selon vous? Que sous-entend ce terme?
La sénatrice Simons : Le libellé est déjà présent.
M. Ripley : Oui. La sénatrice Simons propose de faire une distinction : souhaitons-nous soutenir les radiodiffuseurs communautaires dans la promotion et la création de nouvelles locales en tant que source d’information fiable, ou bien souhaitons-nous les motiver à utiliser des stratégies pour lutter contre la désinformation? Ces stratégies sont de différentes natures, comme l’éducation civique et numérique et autre. Je suis d’accord avec la sénatrice Simons sur le fait que le terme « désinformation » ne figure nulle part ailleurs dans la loi. C’est le seul endroit. Le reste de la loi traite généralement de la promotion de la production de certains types de programmes.
Le sénateur Cormier : Merci.
Le sénateur Quinn : J’aimerais, si possible, obtenir des éclaircissements sur l’expression « journalisme local ». Pourquoi ne pas parler de « radiodiffusion locale »? Je pose la question parce que je ne suis pas du métier et que vous l’êtes, ou l’avez été.
La sénatrice Simons : La réponse est simple. L’intégralité de la loi concerne la radiodiffusion. Nous n’avons pas besoin d’utiliser le mot « radiodiffusion ». Nous ne traitons pas de journalisme écrit. Il s’agit d’une loi sur la radiodiffusion.
Le terme « journalisme local » revient souvent dans d’autres documents du CRTC, comme certaines personnes me l’ont fait remarquer, et dans des corollaires comme l’Initiative de journalisme local. Je suis très irrité lorsque je vois dans un texte de loi gouvernemental que, d’une manière ou d’une autre, le CRTC ou, en fait, les radiodiffuseurs communautaires locaux ou sur les campus sont censés lutter contre la désinformation. C’est une chose complètement distincte. S’ils veulent s’appuyer sur le type de programmes de littératie communautaire ou d’éducation en ligne dont parle M. Ripley, c’est très bien; je les soutiens dans cette démarche.
Je ne pense pas que la lutte contre la désinformation devrait être leur mandat législatif, car je viens de la province de l’Alberta, où le gouvernement a défini la « désinformation » d’une manière qui pourrait différer largement de la façon dont je définis cette notion. Je pense que l’on injecte ici une dose de venin politique dans la loi. J’estime que l’État ne devrait pas se charger de définir ce qui constitue de la désinformation.
En outre, on impose une obligation très lourde aux petits radiodiffuseurs communautaires. Ils semblent être les seuls à devoir lutter contre la désinformation, contrairement à tous les autres acteurs de l’écosystème journalistique.
Cet amendement partait d’une bonne intention à l’autre endroit. Il n’est pas assez bien rédigé pour atteindre son objectif. J’espère que le gouvernement appuiera également cet amendement, car il s’agit d’une bien meilleure formulation de l’objectif de la radiodiffusion communautaire.
Le sénateur Quinn : Merci.
Le sénateur Klyne : Tel qu’il est formulé dans le projet de loi, l’objectif est de lutter contre — passez-moi l’expression — les « fausses nouvelles ». Sénatrice Simons, le journalisme local englobe-t-il le journalisme citoyen?
La sénatrice Simons : Cet article traite des radiodiffuseurs communautaires.
Le sénateur Klyne : D’accord. Comment...
La sénatrice Simons : Les radiodiffuseurs communautaires, qu’il s’agisse de...
Le sénateur Klyne : Les journalistes citoyens ne font-ils pas partie de la communauté?
La sénatrice Simons : Non. N’importe qui peut se dire journaliste citoyen. Toute personne disposant d’un compte Twitter ou Instagram peut se dire journaliste citoyen. De nombreuses personnes qui s’autoproclament journalistes citoyens ne luttent pas exactement contre la désinformation, si je puis dire.
Le sénateur Klyne : Exactement, c’est là le problème.
La sénatrice Simons : Voilà exactement pourquoi ce libellé est si toxique et pourquoi je pense que l’objectif de l’article est de renforcer le journalisme communautaire et l’accès communautaire, qu’il s’agisse d’une petite communauté rurale où quelqu’un a droit à une heure de radio chaque semaine pour parler du rapport sur la pêche ou la chasse, d’une station de radio de campus ou d’une chaîne de télévision câblée locale où vous pouvez voir une émission sur la cuisine de l’État du Kerala ou autre.
La tâche de lutter contre la désinformation ne doit pas revenir aux petites entreprises de radiodiffusion à accès communautaire. Dans ce projet de loi, nous ne demandons pas à la CBC ou à Global de lutter contre la désinformation ni aux radiodiffuseurs privés. Nous avons uniquement attribué cette énorme tâche aux radiodiffuseurs communautaires. Cela n’a aucun sens. Laissons-les se concentrer sur leur travail, qui est de faire du journalisme communautaire.
Nous aurons bientôt l’occasion de débattre de la désinformation, mais pas aujourd’hui.
Des voix : Il y a une question.
Le président : La sénatrice Clement veut poser une question.
La sénatrice Clement : Ma question s’adresse à la sénatrice Simons.
Je soutiens évidemment le journalisme local. À Cornwall, par exemple, nos journalistes locaux permettent aux gens de rester dans un endroit sûr, leur communauté. Ils peuvent faire confiance aux nouvelles qui proviennent de leurs journalistes locaux.
Le problème est la désinformation. J’utilise ce mot tous les jours. Je l’entends tous les jours. Je comprends qu’il soit controversé, mais il fait partie de notre vocabulaire. Ce que je souhaite, c’est que nous nommions le problème. J’estime qu’en intégrant le mot « désinformation », on nomme le problème. Nous soutenons le journalisme local parce que... je le soutiens. J’aimerais juste que vous m’en disiez un peu plus, comment...
La sénatrice Simons : Je passe une quantité de temps extraordinaire sur les réseaux sociaux à faire ce que je peux pour lutter contre la désinformation. La désinformation, en particulier celle propagée par des agents internationaux, qu’elle vienne de Russie ou de Chine, est notre fléau.
Je pense que le fait d’insérer ce terme dans cette section, qui traite exclusivement... non pas de la chaîne de télévision locale de Cornwall. La radiodiffusion communautaire est un secteur très précis. Il s’agit d’organismes de petite taille, à but non lucratif; plus tôt, nous avons indiqué que ces organismes étaient gérés par des conseils d’administration à but non lucratif. Nous parlons d’un sous-ensemble très particulier. Il est absurde de leur attribuer l’entière responsabilité de lutter contre la désinformation.
Évidemment, lorsque le gouvernement nous présentera son projet de loi sur les préjudices en ligne, et que le pauvre M. Ripley sera de retour ici, nous pourrons en parler.
Il est tout à fait inapproprié d’aborder cette question dans ce contexte. Compte tenu de la quantité de désinformation qui circule au sujet de ce projet de loi, et des théories du complot absuredes qui ont inondé nos boîtes de réception de dizaines de milliers de courriels provenant de personnes qui pensent que ce projet de loi est un complot du Forum économique mondial et qu’il fait partie d’un complot juif illuminati — et, croyez-moi, je reçois ce genre de courriels — je supplie le comité de ne pas motiver davantage ces personnes en donnant l’impression que le gouvernement attribue aux radiodiffuseurs communautaires le rôle de définir ce qui est et n’est pas une fausse nouvelle.
La sénatrice Clement : Merci, sénatrice
La sénatrice Wallin : Je fais écho à tout ce que vient de dire la sénatrice Simons, en tant que praticienne oeuvrant depuis 40 ans. Merci.
Le président : L’honorable sénatrice Simons propose que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 3, page 9, à la ligne 23... Puis-je omettre de lire la motion?
Des voix : Oui.
Le président : Plaît-il aux honorables sénateurs d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : Oui.
Le président : D’accord. L’amendement est adopté à l’unanimité.
Honorables collègues, l’article 3 modifié est-il adopté?
Des voix : Oui.
Le président : L’article 3 est adopté.
Des voix : Avec dissidence.
Le président : Avec dissidence. Maintenant nous passons aux choses intéressantes.
La sénatrice Simons : Monsieur le président, avant de poursuivre, serait-il possible, étant donné que tous ces amendements aux articles 4.1 et 4.2 se chevauchent... je ne sais pas. Il serait tout à fait inhabituel de tenir une sorte de discussion au cours de laquelle nous déterminerions ce que nous voulons faire, mais il y aura énormément de chevauchements dans ces amendements.
Le président : C’est pourquoi il y a eu un accord hier pour partager les amendements. Comme vous le voyez, aujourd’hui, c’était la première étape. Nous avons fait suivre le plan.
Tout au long du processus d’aujourd’hui, le greffier va passer les amendements en revue et mettre des astérisques à ceux qui se chevauchent. Les sénateurs auront l’occasion de discuter de cela avant les séances subséquentes, qui se teindront ce soir et le reste de la semaine. J’espère qu’en cas de chevauchement, nous serons en mesure de parvenir à un consensus avant de passer à l’étape du comité.
Le prochain amendement en est un du sénateur Manning.
Le sénateur Manning : Merci, monsieur le président.
Je propose :
Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 4 :
a) à la page 9, par suppression des lignes 34 à 40;
b) à la page 10, par suppression des lignes 10 à 33.
Le but de mon amendement est de supprimer ce qui l’on désigne maintenant comme l’exception à l’exemption pour le contenu généré par les utilisateurs. Bien que l’article 4 s’emploie d’entrée de jeu à exclure la réglementation du contenu généré par les utilisateurs, il prévoit ensuite des exceptions à cette exemption, ce qui a l’effet inverse.
Le contenu généré par les utilisateurs a été l’un des principaux points de discorde du projet de loi. Le gouvernement n’a cessé de prétendre que ces contenus ne sont pas visés, mais il a systématiquement omis de les exempter clairement dans le libellé du projet de loi.
Aussi récemment que lors de sa comparution devant ce comité le mardi 22 novembre, le ministre n’a cessé de dire que « [...] le projet de loi cible les plateformes, pas les utilisateurs ». Or, si vous réglementez les plateformes qui présentent du contenu généré par les utilisateurs, vous réglementez le contenu et les créateurs. Vous ne pouvez pas dissocier les deux.
Au cours de son témoignage, le ministre a également fait référence aux trois critères que le CRTC doit prendre en considération pour réglementer le contenu généré par les utilisateurs. L’accent ici est mis sur « prendre en considération ». Il peut les prendre en considération et passer outre. Ces critères ne sont pas déterminants, ils ne sont pas contraignants.
Tous les créateurs numériques qui ont comparu devant ce comité ont déclaré qu’étant donné la façon dont le projet de loi est rédigé, il ne fait aucun doute que leur contenu sera visé. L’actuel président du CRTC a reconnu que le contenu serait visé. Les anciens présidents et vice-présidents ont aussi dit que ce serait le cas; idem pour les plateformes et les juristes. Les seules personnes qui soutiennent que cela n’a pas d’importance sont le ministre et, je pense, le sénateur Dawson.
Je pense qu’il y a quelques membres de ce comité qui ne croient pas que cela n’a pas d’importance. Les créateurs numériques se sont présentés devant le comité et nous ont pratiquement suppliés d’amender cette partie du projet de loi. Ils nous ont dit que, contrairement à l’affirmation du gouvernement selon laquelle cela aidera les créateurs, ce projet de loi les obligera à faire faillite ou à délocaliser leurs entreprises. Chers collègues, je crois qu’il y a un risque élevé que le pouvoir réglementaire s’immisce dans une brèche créée par le projet de loi, et j’espère que cet amendement permettra de fermer cette brèche.
Le sénateur Gold : Le gouvernement s’oppose à cet amendement. Cela saperait vraiment, de manière fondamentale, l’un des objectifs clés du projet de loi.
En effet, cela soustrairait les plateformes de médias sociaux comme YouTube de la portée de la loi. YouTube est une plateforme où plus des deux tiers des Canadiens vont pour écouter de la musique et en faire la lecture en continu. Si les Canadiens vont en si grand nombre écouter les derniers albums — si on les appelle encore comme cela — ou des vidéoclips, des films, des émissions de télévision ou des extraits d’émissions de télévision, comme beaucoup d’entre nous le font, ces plateformes ne devraient-elles pas être soumises à des obligations similaires à celles des fournisseurs et des services, comme Spotify, qui est un populaire service de musique en ligne?
Cet amendement perpétuerait l’existence de règles inégales et inéquitables pour les diffuseurs en ligne. Les plateformes en ligne sont en constante évolution. Le fait d’exclure intégralement les médias sociaux de l’application de la Loi sur la radiodiffusion ne tient tout simplement pas compte des tendances réelles que nous observions sur ces plateformes, qu’il s’agisse de YouTube Music, TikTok ou des partenariats Stingray.
Le gouvernement s’oppose foncièrement à cet amendement. Je ne vais pas répéter tout ce que le gouvernement a dit au cours du témoignage. L’amendement viendrait vraiment saper un objectif important du projet de loi. Nous ne pouvons donc pas l’appuyer.
La sénatrice Simons : Je pense qu’il est extrêmement important que nous envoyions un message fort indiquant que le contenu généré par les utilisateurs n’est pas visé par ces mesures législatives. Malheureusement, je ne soutiendrai pas cet amendement particulier parce que je pense qu’il s’agit d’un outil qui n’a plus beaucoup de mordant, pour les raisons que le sénateur Gold a exposées.
Je tenais à préciser que nous finirons par arriver à l’amendement que la sénatrice Miville-Dechêne a rédigé, avec un peu d’aide de mon bureau et de moi-même, et dans lequel nous pensons avoir résolu le problème de l’exclusion du contenu généré par les utilisateurs tout en englobant les grandes chaînes de YouTube Music.
Bien que je sois d’accord avec les trois quarts ou peut-être les neuf dixièmes de ce que le sénateur Manning vient de dire, je tenais simplement à expliquer pourquoi je ne soutiendrai pas cet amendement, et la raison en est que je crois que nous avons trouvé une façon de concilier tout cela.
Le sénateur Quinn : Je me retire, sur la base de ce que le sénateur Simons a dit. J’attends de voir de quoi à quoi ressemblera cette solution. Merci.
Le président : Je soutiens l’amendement du sénateur Manning. Je pense qu’il est direct et sans équivoque. Le débat central qui se déroule au sein de ce comité depuis le début du projet de loi C-11 a porté sur cette tentative velléitaire du gouvernement de convaincre les gens que les plateformes sont visées, mais pas les créateurs, et il n’y a eu aucun signe tout au long du processus que le gouvernement était sérieux à ce sujet.
Je l’ai déjà dit et je le répète : j’ai l’impression que le gouvernement se réserve le droit de faire demain ce qu’il a promis de ne pas faire aujourd’hui. Nous l’avons entendu de la bouche du ministre et des fonctionnaires.
Les créateurs numériques sont-ils visés ou non? Ce projet de loi doit être très catégorique à ce sujet. Nous n’avons pas besoin d’essayer de trouver un équilibre. Nous devons être clairs et nets. Cela touche des centaines de milliers de Canadiens.
Vous avez raison, sénateur Gold. Il est ici question des personnes qui, à l’heure actuelle, connaissent une croissance fulgurante avec leurs entreprises et qui font rayonner de façon phénoménale la culture canadienne à l’étranger. Je pense que nous devons protéger les créateurs numériques et que cet amendement va dans ce sens. Pour cette raison, j’appuierai la motion.
Le sénateur Plett : Si c’était possible, j’aurais une question pour M. Ripley. Êtes-vous d’accord, monsieur, pour dire que si cet amendement est adopté, les créateurs individuels auront plus de certitude à l’égard de ces mesures législatives? En faisant cela, ne réglerions-nous pas cette question une fois pour toutes?
M. Ripley : Merci, sénateur Plett, de cette question. L’effet de cet amendement serait d’exclure tout ce qui est téléchargé sur un service de médias sociaux. Cela comprendrait, du point de vue du gouvernement, le contenu commercial téléchargé par ce que les plateformes appellent les utilisateurs institutionnels — il pourrait donc s’agir de maisons de disques ou de radiodiffuseurs —, et cela exclurait également le contenu téléchargé par les créateurs numériques, ainsi que par les Canadiens. Donc, cela soustrairait effectivement de la portée de la loi tout le contenu téléchargé sur un service de médias sociaux.
Le sénateur Plett : De nombreux créateurs ont comparu devant notre comité avec une opinion juridique voulant que ces dispositions du projet de loi les visent. Croyez-vous que leur opinion juridique tient la route?
M. Ripley : Comme le comité le sait, il y a eu un grand débat dans le contexte du précédent projet de loi C-10 lorsque le comité de la Chambre a choisi d’abroger l’article 4.1. Lorsque ce projet de loi, le projet de loi C-11, a été redéposé, le gouvernement a intentionnellement choisi d’inclure l’article 4.2 afin de préciser que l’objectif n’était pas d’inclure dans le champ d’application de la loi tout ce qui est téléchargé sur les médias sociaux, mais de se concentrer sur le contenu commercial défini en fonction de ces trois critères. C’était une réponse directe à ce que le gouvernement a entendu et aux préoccupations exprimées par les créateurs de médias sociaux, les universitaires et d’autres commentateurs au sujet des conséquences de l’abrogation de l’article 4.1.
En ce qui concerne ces trois facteurs, en fin de compte, le point de départ est que rien sur les médias sociaux n’est visé tant et aussi longtemps que le CRTC n’applique pas le processus réglementaire décrit à l’article 4.2 et ne définit pas, de manière précise et détaillée, ce que j’ai appelé le corpus de contenu des services de médias sociaux qui serait visé par la loi. Le gouvernement a clairement indiqué que l’objectif est de se concentrer sur le contenu commercial et de ne pas inclure le contenu des créateurs de médias sociaux qui conçoivent leur contenu et le téléchargent pour le diffuser sur ces plateformes.
Le président : Monsieur Ripley, pourquoi, à votre avis, le gouvernement est-il si réticent à donner des lignes directrices au CRTC en ce qui concerne les créateurs de contenu et à adopter la position selon laquelle il faut laisser le CRTC terminer la consultation publique? Nous n’allons pas leur donner de directives stratégiques, mais croyez-nous... l’objectif ici n’est pas de s’en prendre aux créateurs de contenu.
M. Ripley : Merci de la question, monsieur le président. Si je devais décrire ce que le gouvernement cherche à faire à l’article 4.2, je dirais que c’est d’indiquer, d’une manière qui soit fondée sur des principes, le genre de contenu qui, selon lui, lorsqu’il est distribué sur des plateformes de médias sociaux, pourrait éventuellement être assujetti aux objectifs stratégiques de la loi. Encore une fois, en raccourci, il s’agit de contenu commercial.
En fin de compte, la position du gouvernement est que le CRTC est l’entité qui est la mieux en mesure d’établir de manière pratique et détaillée à quoi cela ressemblera en pratique. Cela se fera par le biais d’audiences réglementaires avec l’industrie, ce qui donnera l’occasion aux plateformes de médias sociaux de se présenter et de dire que la meilleure façon de procéder est ceci ou cela. Ce sera l’occasion pour les créateurs de médias sociaux de se manifester et d’indiquer clairement comment telle ou telle disposition garantira que le contenu visé est clairement circonscrit. En même temps, ce sera l’occasion pour des intervenants comme les acteurs de l’industrie musicale commerciale de se manifester et d’exprimer leur point de vue sur la façon dont le contenu commercial sur un service comme YouTube devrait être traité.
Le gouvernement a cherché à établir les principes, tout en reconnaissant qu’en fin de compte, il est préférable de laisser à l’organisme de réglementation le soin de prendre les décisions relatives à la réglementation et de les mettre en œuvre.
Le président : Si je vous comprends bien, le contenu généré par les utilisateurs pourrait éventuellement être réglementé en aval par le CRTC.
M. Ripley : Merci de la question, monsieur le président.
En ce qui concerne les principes énoncés à l’article 4.2 — je pense en particulier à l’alinéa b) —, le gouvernement a voulu établir que le contenu qui, selon lui, pourrait ou devrait être enclin à réaliser les objectifs stratégiques de la loi est celui qui se trouve sur une autre entreprise de radiodiffusion, c’est-à-dire, quand cette dernière sert de substitut.
Comme l’a mentionné le sénateur Gold, les Canadiens se rendent-ils sur un service de médias sociaux et l’utilisent-ils comme substitut d’un autre service qui serait assujetti à la loi? Si c’est le cas, alors c’est une question d’équité. La position du gouvernement est qu’il demande à un service comme YouTube de contribuer aux objectifs stratégiques de la loi de la même façon qu’il l’exige d’un service comme Q Music ou Spotify. Toutefois, le gouvernement reconnaît que le modèle de cette plateforme particulière est différent et qu’une partie importante de celle-ci est également un service de médias sociaux. Il cherche à respecter cet écosystème et à faire en sorte que les deux puissent continuer à fonctionner ensemble.
Le président : Merci, monsieur Ripley.
Il est proposé par l’honorable sénateur Manning que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 4, page 9, à la ligne 30.
Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : Non.
Des voix : Oui.
Le président : Je crois que les non l’emportent. Nous allons procéder à un vote par appel nominal.
[Français]
M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?
Le sénateur Housakos : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?
La sénatrice Clement : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?
Le sénateur Cormier : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?
Le sénateur Dawson : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?
Le sénateur Gold : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?
Le sénateur Klyne : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?
Le sénateur Manning : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?
La sénatrice Miville-Dechêne : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?
Le sénateur Plett : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?
Le sénateur Quinn : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?
La sénatrice Simons : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?
La sénatrice Wallin : Oui, en principe.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Woo?
Le sénateur Woo : Non.
M. Labrosse : Pour : 4; contre : 10; abstention : aucune.
[Traduction]
Le président : L’amendement est donc rejeté.
La sénatrice Miville-Dechêne : Monsieur le président, j’ai une question. Serait-il possible de distribuer les amendements à l’avance?
Le président : Je leur ai demandé de les distribuer le plus rapidement possible, alors si nous pouvons...
La sénatrice Miville-Dechêne : Pouvons-nous avoir une liasse ou quelque chose de ce genre?
Le président : Nous ne pouvons pas les distribuer avant qu’ils ne soient proposés. Nous les regrouperons et les enverrons avant la prochaine réunion. Nous n’avons tout simplement pas été en mesure de le faire cette semaine.
La sénatrice Miville-Dechêne : Ce serait utile parce que nous pourrions avoir double...
Le président : Comme vous le savez, nous avons commencé à les envoyer au greffier tard hier soir.
La sénatrice Miville-Dechêne : Oui. Je voulais simplement m’assurer que la demande y figurait.
Le président : Il y travaille.
Le prochain amendement est celui de la sénatrice Wallin.
La sénatrice Wallin : Je vais retirer cet amendement.
Le président : Cela règle la question, et de façon très efficace, dois-je ajouter.
Nous passons donc à l’amendement DNP-C11-4-9-33, qui est en cours de distribution. Cet amendement est proposé par le sénateur Manning.
Sénateur Manning, vous avez la parole.
Le sénateur Manning : Je propose :
Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 4 :
a) à la page 9, par substitution, aux lignes 36 à 40, de ce qui suit :
« ragraphe par le fournisseur du service, son affilié ou le mandataire de l’un d’eux. »;
b) à la page 10, par suppression des lignes 10 à 33.
Distingués collègues, j’aimerais reprendre ce que Konrad von Finckenstein, ancien président du CRTC, a dit à notre comité. Il a dit que le gouvernement affirme ceci :
[...] il n’y a aucune intention de couvrir le contenu généré par les utilisateurs et de restreindre ainsi la liberté d’expression des Canadiens. Le contenu généré par les utilisateurs, bien qu’il soit généralement exempté, peut être assujetti à la loi par une exception à l’exemption prévue au paragraphe 4.1(2) du projet de loi. Il est clair que ce paragraphe a été conçu pour les diffuseurs hybrides, comme YouTube, mais on craint beaucoup qu’il touche d’autres diffuseurs de contenu numérique, comme on les appelle, qui produisent des programmes uniquement pour Internet, ainsi que les Canadiens ordinaires qui téléchargent des vidéos ou de la musique.
Le 28 septembre, Morghan Fortier, co-propriétaire et chef de la direction de Skyship Entertainment, a déclaré ceci au comité :
La sénatrice Simons a correctement décrit l’article 4.2 comme étant l’« enfant à problèmes » de ce projet de loi. [...] le CRTC nous a déjà donné son interprétation du projet de loi. Il a dit très clairement que le contenu produit par les utilisateurs est inclus dans la portée du projet de loi et qu’il obligerait les plateformes à manipuler artificiellement leurs algorithmes, de sorte que nous savons comment le gouvernement et le CRTC ont l’intention d’utiliser le projet de loi. S’ils font cela, d’autres pays suivront, et ce sera une énorme gaffe économique de la part du gouvernement.
Nous avons également entendu de nombreux créateurs individuels sur cette question. Par conséquent, je propose dans cet amendement que l’article 4.2 soit supprimé du projet de loi. Je suggère plutôt de modifier le paragraphe 4.1(2), afin de définir plus clairement la « portée ». La loi ne s’appliquera pas au contenu généré par les utilisateurs. Elle conservera l’exception pour les programmes téléversés sur des services de médias sociaux s’ils sont téléversés par « ...le fournisseur du service, son affilié ou le mandataire de l’un deux ».
Je crois que l’amendement offrira la précision dont les petits créateurs en ligne ont besoin et dont nous avons tellement entendu parler lors des témoignages de personnes qui ont l’impression d’être laissées pour compte dans ces changements. Je pense que la loi, dans sa forme actuelle, limite la portée et continue d’exclure le contenu généré par les utilisateurs. Cet amendement englobera ces éléments, et je compte donc sur votre soutien.
La sénatrice Simons : C’est en grande partie précisément le même amendement qui vient de faire l’objet d’un débat. Même si je sympathise avec son intention, je m’y opposerai pour la même raison, c’est-à-dire parce que nous avons déjà un meilleur amendement.
Le sénateur Gold : Eh bien, le gouvernement s’y oppose, et laissez-moi vous expliquer brièvement pourquoi. Essentiellement, il supprime les pouvoirs autrement accordés à l’organisme de réglementation en ce qui concerne le contenu des médias sociaux téléversé par des utilisateurs non affiliés. Nous ne parlons pas ici de fournisseurs de contenu individuels. Nous parlons d’entreprises comme Vevo ou Universal Music Group, des grandes entreprises et des services par lesquels la musique est téléversée sur YouTube.
L’effet de cet amendement serait essentiellement d’isoler YouTube — non, ce n’est pas le bon mot —, mais il permettrait plutôt à YouTube et à ces entreprises de téléverser du contenu commercial et d’éviter de payer leur juste part, alors que ces entreprises devraient le faire autrement.
Encore une fois, comme dans l’amendement précédent, cela va tout simplement à l’encontre de l’objectif fondamental de la loi. Il ne s’agit pas du contenu généré par les utilisateurs. Il s’agit d’utilisateurs non affiliés qui utilisent, favorisent, téléversent ou offrent, à des fins commerciales, un contenu commercial à des services comme YouTube.
Nous pensons que dans le cas de services de médias sociaux comme YouTube, qui est un moyen populaire de diffusion de contenu, si le même album se trouve sur YouTube ou sur Spotify, ces deux entreprises devraient avoir les mêmes obligations. Nous sommes donc contre cet amendement.
Le président : Sénateur Gold, comme vous venez de le dire, si l’intention du projet de loi n’est pas d’inclure le contenu généré par les utilisateurs, pourquoi cette hésitation à le préciser dans la loi?
Le sénateur Gold : En toute déférence, cette discussion a été très contestée tout au long du processus. Je sais qu’un grand nombre de personnes autour de cette table refusent tout simplement d’accepter la position du gouvernement, et je vais donc la répéter. Le gouvernement, après avoir entendu les témoignages, cherche à trouver un équilibre juste et raisonnable pour indiquer clairement que le contenu généré par les utilisateurs n’est pas visé ici et que cela vise uniquement, comme l’a dit M. Ripley — pour utiliser un raccourci — le contenu commercial. Le projet de loi établit donc un juste équilibre. Il respecte le processus de réglementation auquel toutes les parties intéressées peuvent participer. Il s’agit d’une réponse appropriée, équitable et responsable à l’évolution de l’environnement médiatique dans lequel nous nous trouvons.
Pour cette raison, le gouvernement croit que l’équilibre qu’il a trouvé est approprié et que des amendements de ce genre iraient à l’encontre des objectifs fondamentaux du projet de loi.
La sénatrice Wallin : À des fins d’éclaircissements, je sais, sénateur Gold, que vous dites qu’un grand nombre de personnes autour de cette table ont refusé d’accepter vos promesses sur le contenu généré par les utilisateurs, mais le président du CRTC et ses représentants juridiques se sont assis au bout de cette même table et ont affirmé qu’ils ont effectivement le pouvoir de capturer le contenu généré par les utilisateurs. Ils ont seulement promis qu’ils ne le feraient pas.
C’est la raison pour laquelle ce genre d’amendement est constamment proposé, car nous cherchons tous à apporter des éclaircissements. Nous voudrions qu’il soit clairement indiqué, par exemple, que le contenu généré par les utilisateurs ne sera pas visé.
Peut-être que si c’était indiqué quelque part dans le projet de loi, cela permettrait de rassurer un grand nombre de personnes.
Je vous remercie.
Le président : Souhaitez-vous répondre à cette intervention, sénateur Gold?
Il est proposé par l’honorable sénateur Manning que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 4, à la page 9... Puis-je me dispenser d’en faire la lecture?
Des voix : Oui.
Le président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : Non.
Des voix : Oui.
Le président : Je crois que les « non » l’emportent. Nous allons procéder à un vote par appel nominal.
[Français]
M. Labrosse : L’honorable sénateur Housakos?
Le sénateur Housakos : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Clement?
La sénatrice Clement : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Cormier?
Le sénateur Cormier : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Dawson?
Le sénateur Dawson : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Gold, c.p.?
Le sénateur Gold : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Klyne?
Le sénateur Klyne : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Manning?
Le sénateur Manning : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Miville-Dechêne?
La sénatrice Miville-Dechêne : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Omidvar?
La sénatrice Omidvar : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Plett?
Le sénateur Plett : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Quinn?
Le sénateur Quinn : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Simons?
La sénatrice Simons : Non.
M. Labrosse : L’honorable sénatrice Wallin?
La sénatrice Wallin : Oui.
M. Labrosse : L’honorable sénateur Woo?
Le sénateur Woo : Non.
M. Labrosse : Pour : 4; contre : 10; abstention : aucune.
[Traduction]
Le président : L’amendement est donc rejeté. Nous abordons maintenant un autre amendement proposé par le sénateur Manning.
Le sénateur Manning : Je voudrais informer le président que, dans un esprit de coopération et pour faire avancer les choses, je souhaite retirer mon amendement.
Le président : L’amendement a été retiré aussi rapidement qu’il a été distribué.
Nous abordons maintenant un amendement proposé par le sénateur Quinn.
Le sénateur Quinn : Je propose:
Que le projet de loi C-11 soit modifié à l’article 4, à la page 10, par substitution, à la ligne 11, de ce qui suit :
« peut, par règlement, sous réserve de résolution de ratification du Parlement, prévoir les émissions qui sont assu- ».
J’aimerais tout d’abord préciser que nous avons entendu de nombreux témoignages et reçu de nombreux courriels au cours des derniers mois dans lesquels on exprimait des préoccupations au sujet des pouvoirs conférés au CRTC. En fait, cet avant-midi, nous avons eu quelques discussions qui ont remis en question ce que ces pouvoirs peuvent être ou ne pas être.
Je crois qu’il faut tenir compte de ces préoccupations lorsque nous débattons et modifions le projet de loi C-11 au cours de cette importante étape qu’est l’étude article par article. C’est d’autant plus important que ce projet de loi tente de traiter Internet, les médias sociaux et d’autres entreprises en ligne comme des entreprises de radiodiffusion. Dans ce contexte, il faut tenir compte de nouvelles considérations qui ne s’appliquaient pas aux entreprises de radiodiffusion traditionnelles qui ont été régies, au cours des 30 dernières années, par la Loi sur la radiodiffusion actuelle et par le CRTC.
Mon amendement exigerait l’approbation du Parlement pour les règlements suivants: lorsque le CRTC définit, par voie de règlement, les exceptions à la non-application générale aux programmes sur les médias sociaux, lorsque le Cabinet émet des directives en matière de politique relatives aux entreprises en ligne et lorsque le Cabinet définit ce qu’est un programme canadien, un contenu canadien dans le cas des entreprises de diffusion continue en ligne.
Il y a un autre amendement corrélatif pour supprimer le dépôt en double d’une proposition de directive en matière de politique en vertu de l’article 8, si ma directive en matière de politique est adoptée. Cet article réduit l’exigence du dépôt d’un décret devant le Parlement pendant 40 jours de séance dans le projet de loi actuel à 30 jours civils, ce qui pourrait éventuellement supprimer la participation du Parlement pendant les longues périodes d’intersession, par exemple pendant les vacances d’été.
Cela signifie que lorsqu’un règlement, qui comprend un décret, est pris, il doit être déposé devant le Parlement dans les 15 jours ou, si le Parlement ne siège pas, dans les 15 premiers jours de séance du Parlement. Il est important de noter que le règlement n’entrera pas en vigueur tant qu’il n’aura pas été approuvé par les deux chambres du Parlement, et il revient au Sénat de décider de la manière de procéder avec une résolution de ratification du Parlement. Le Sénat pourrait procéder à un vote et approuver rapidement le règlement ou si les sénateurs estiment qu’un règlement nécessite une étude plus approfondie, le Comité sénatorial permanent des transports et des communications pourrait l’examiner rapidement et en faire rapport au Sénat.
Je reconnais que cela pourrait prendre un peu plus de temps, mais étant donné les préoccupations soulevées par toutes nos parties intéressées et les discussions qui ont eu lieu au sein de notre comité sur la question de savoir si ces nouvelles règles pour les entreprises en ligne permettront d’atteindre les objectifs ou non, il est tout à fait approprié que le Parlement ait le dernier mot sur la question de savoir si elles entreront en vigueur.
Je crois que le CRTC et le Cabinet s’efforceront de trouver un juste équilibre. Toutefois, comme j’ai déjà travaillé au Bureau du Conseil privé, je peux aussi comprendre que le processus de consultation sur la réglementation par l’entremise du processus de la Gazette du Canada peut parfois ne pas réussir à trouver cet équilibre, étant donné que la réglementation des entreprises en ligne en vertu du projet de loi C-11 est nouvelle.
Même si nous avons un Comité mixte permanent d’examen de la réglementation, et que l’un de nos témoins l’a décrit comme étant l’endroit où les règlements doivent être examinés, le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation n’a le pouvoir de rejeter un règlement que si le Sénat et la Chambre des communes sont d’accord. Cela signifie qu’un règlement serait déjà en vigueur, puis ensuite refusé par le Parlement. Ce type d’approche n’est pas idéal pour les préoccupations soulevées par le projet de loi C-11, et il a donc rarement été utilisé.
Si on assure une plus grande transparence et une meilleure surveillance grâce à l’approbation du Parlement, cela devrait contribuer à atténuer les préoccupations exprimées aujourd’hui et les préoccupations dont les Canadiens nous ont fait part au sujet de ces nouveaux pouvoirs de réglementation sur les entreprises en ligne.
En résumé, j’ai exposé un raisonnement qui, je pense, répond à une grande partie de la discussion d’aujourd’hui et aux Canadiens qui ont pris le temps de formuler des commentaires. Contrairement à ce qui est proposé dans le projet de loi, je dirais qu’il faut passer de 40 jours de séance à 30 jours civils, afin d’établir un équilibre où le CRTC, dans le cadre de son travail de réglementation des éléments de la diffusion en continu en ligne — et il s’agit d’une nouvelle activité —, devrait être assujetti aux deux chambres du Parlement pour une courte période d’examen et si tout va bien, ce serait adopté. Sinon, ce serait renvoyé au comité, afin de faire l’objet d’un examen rapide. C’est essentiellement l’objectif de cet amendement.
Le président : Sénateur Quinn, si je comprends bien, vous proposez d’exercer un rôle de surveillance après le processus consultatif mené par le CRTC. Est-ce que je vous ai bien compris?
Le sénateur Quinn : Le processus de publication dans la Gazette ne changerait pas, mais ce serait présenté au Parlement, où je m’attends à ce qu’il fasse l’objet d’un examen et qu’il soit ensuite, en toute probabilité, adopté très rapidement. Mais dans de nombreux cas, par exemple, comme certaines choses qui ont été soulignées ce matin au sujet de la marge de manœuvre que le CRTC puisse décider de prendre ou de ne pas prendre, je pense que le Parlement a la responsabilité de se pencher sur ces cas et de déterminer si cela respecte la portée de ce qui a été compris dans le cadre de la discussion, et ce que la loi pourrait devenir ou non.
Le sénateur Gold : Je vous remercie. Le gouvernement ne peut pas soutenir cet amendement, sénateur Quinn.
La présence d’un processus législatif et d’un processus de réglementation est une pratique courante et bien établie dans notre système de gouvernement. Le processus de réglementation, qui a été bien décrit au cours de la présente séance et qui est bien connu de tous les sénateurs, offre une contribution appropriée à tous les intervenants. Les règlements sont conçus pour servir de compléments au processus législatif dont nous, les sénateurs, sommes responsables, avec nos homologues de l’autre endroit. C’est précisément pour offrir à la fois une certaine souplesse et un certain degré d’efficacité lorsque les détails de la politique doivent être précisés.
Votre amendement, aussi bien intentionné soit-il, ne ferait que créer un niveau de processus indûment fastidieux pour ce qui est une partie bien établie de notre système de Westminster. Ce n’est pas nécessaire. Le processus de réglementation a été bien décrit par M. Ripley et d’autres intervenants, et il est bien compris. Il peut être utilisé — et il le sera — pour veiller à ce que les parties intéressées soient entendues et qu’un équilibre approprié soit atteint.
Pour ces raisons, nous ne pouvons pas appuyer l’amendement.
Le sénateur Quinn : J’aimerais indiquer que je comprends exactement ce qu’a dit le sénateur Gold. J’ai fait remarquer que le processus de la Gazette du Canada est un processus passif, car il n’exige aucune action de la part du gouvernement une fois les commentaires reçus. Ce n’est pas une nouvelle chose que j’ai inventée. Cela existe dans la Loi sur l’assurance-emploi pour les règlements incluant une activité commerciale dans les emplois assurables, et on dit ce qui suit :
La Commission peut, avec l’agrément du gouverneur en conseil et sous réserve d’une résolution du Parlement à cet effet, prendre un règlement en vue d’inclure dans les emplois assurables l’activité commerciale de toute personne qui exploite une entreprise au sens du paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.
Cela existe donc au sein du gouvernement. Il s’agit d’un mécanisme de contrôle dans un domaine qui nécessite un tel mécanisme, et puisqu’il s’agit d’un nouvel enjeu pour le CRTC et dans le cadre de la discussion que nous avons eue ici, je pense qu’il doit y avoir ce type de mécanisme de contrôle plus actif que passif.
Le président : Il est proposé par l’honorable sénateur Quinn que le projet de loi C-11 soit modifié, à l’article 4, à la page 10... Puis-je me dispenser d’en faire la lecture?
Des voix : Oui.
Le président : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion d’amendement?
Des voix : Non.
Des voix : Oui.
Le président : Il semble que les « non » l’emportent, avec dissidence, si vous le voulez bien, sénateur Quinn. Par conséquent, l’amendement est rejeté, avec dissidence.
L’amendement suivant a été proposé par le sénateur Manning.
Le sénateur Manning : Dans l’esprit de Noël, je souhaite le retirer.
Le président : L’amendement est ainsi retiré par le sénateur Manning. Nous passons donc à l’amendement suivant.
Le sénateur Manning : Dans l’esprit de Noël, je souhaite également retirer cet amendement.
Le président : Le sénateur Manning se montre très bienveillant aujourd’hui, au grand plaisir du sénateur Gold.
L’amendement suivant a été proposé par la sénatrice Wallin.
La sénatrice Wallin : Cet amendement est assez simple. L’objectif est de supprimer le mot « indirecte » des critères établis sur la façon de générer des revenus. Nous avons eu une discussion sur les entités qui seraient visées par les façons indirectes de générer des revenus et, bien entendu... Oh, est-ce le mauvais amendement?
Le président : Non.
La sénatrice Wallin : C’est le mauvais amendement... Il y a « directe, indirecte ». Je suis désolée. C’est une formulation similaire. Je retire cet amendement, car j’en ai un autre qui est plus précis. Toutes mes excuses.
Le président : Il reste une minute, sénatrice. Nous pouvons distribuer l’amendement suivant, sénateurs. Je vois que certains amendements suscitent l’enthousiasme de certains sénateurs plus que d’autres. C’est correct.
La sénatrice Miville-Dechêne : Ce serait une bonne idée de vous le laisser, car nous allons probablement le terminer ce soir.
Le président : Chers collègues, veuillez garder sous la main l’amendement qu’on est en train de vous distribuer, car nous pourrons ainsi reprendre là où nous nous étions arrêtés.
La sénatrice Miville-Dechêne : La sénatrice Simons vous a donné un aperçu de ce processus. Je vais vous expliquer brièvement d’où il vient. Nous savons tous que les créateurs de contenu ont exprimé de nombreuses craintes quant à la portée de l’article 4.2.2. C’est une partie un peu technique. Dois-je lire le libellé? Devrais-je m’en abstenir?
Le président : Tous les sénateurs ont l’amendement, et nous reprendrons avec l’amendement de la sénatrice Miville-Dechêne...
La sénatrice Miville-Dechêne : Je vais l’expliquer intelligemment ce soir. Je suis désolée.
Le président : Vous l’expliquerez en détail et nous en débattrons à fond, j’en suis sûr. Chers collègues, nous nous reverrons plus tard ce soir.
(La séance est levée.)