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TRCM - Comité permanent

Transports et communications


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES COMMUNICATIONS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 22 mai 2024

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd’hui, à 18 h 45 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier la teneur des éléments des sections 27 et 37 de la partie 4 du projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024.

Le sénateur Leo Housakos (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Je m’appelle Leo Housakos, je suis un sénateur du Québec et je suis président de ce comité.

[Traduction]

J’invite maintenant mes collègues à se présenter.

La sénatrice Simons : Sénatrice Paula Simons, de l’Alberta, du territoire visé par le Traité no 6.

[Français]

La sénatrice Oudar : Manuelle Oudar, du Québec.

La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario.

La sénatrice Miville-Dechêne : Julie Miville-Dechêne, du Québec.

[Traduction]

Le sénateur Quinn : Jim Quinn, du Nouveau-Brunswick.

La sénatrice Dasko : Donna Dasko, de l’Ontario.

[Français]

Le président : Aujourd’hui, nous poursuivons notre étude de la teneur des éléments des sections 27 et 37 de la partie 4 du projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024.

Ce soir, nous accueillons des fonctionnaires de Transports Canada qui sont responsables du train à grande fréquence dans le cadre de notre étude de la section 27, qui a trait à une filiale de VIA Rail. Nous avons parmi nous Vincent Robitaille, sous‑ministre adjoint, Chantale Côté, directrice générale, Politiques, intégration et gouvernance, François Camiré, directeur général, Technique, ingénierie et analyse d’impact, Luis Miguel Izquierdo Martin, directeur général intérimaire, Commerce et approvisionnement, et Natalie Dolan, directrice exécutive, Politiques.

[Traduction]

Bienvenue et merci d’être parmi nous ce soir. Monsieur Robitaille, vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration liminaire, après laquelle nous passerons aux questions et réponses.

[Français]

Monsieur Robitaille, la parole est à vous.

Vincent Robitaille, sous-ministre adjoint, Train à grande fréquence, Transports Canada : Merci, monsieur le président.

Au nom de Transports Canada, j’aimerais vous remercier de la possibilité de témoigner aujourd’hui. Je m’appelle Vincent Robitaille et je suis sous-ministre adjoint responsable du projet de train à grande fréquence (TGF) à Transports Canada.

J’aimerais commencer par rappeler que nous sommes réunis aujourd’hui sur le territoire traditionnel du peuple algonquin anishinabe.

[Traduction]

Je suis heureux d’être ici aujourd’hui pour parler de la disposition sur le train à grande fréquence, ou TGF, du projet de loi C-69 qui confère le statut de société mandataire à la filiale de VIA Rail, VIA HFR - VIA TGF Inc.

Cette mesure se trouve à la section 27 de la partie 4, aux pages 551 et 552.

[Français]

Je suis accompagné de Chantale Côté, directrice générale, Politiques, intégration et gouvernance, François Camiré, directeur général, Technique, ingénierie et analyse d’impact, Luis Miguel Izquierdo Martin, directeur général intérimaire, Commerce et approvisionnement, et Natalie Dolan, directrice exécutive, Politiques, pour le projet de TGF.

Le projet de TGF est le plus grand projet d’infrastructure de transport que le Canada ait connu depuis des générations. L’objectif du TGF est d’offrir un service ferroviaire plus rapide, plus fiable et plus fréquent. Toutefois, le TGF est plus qu’un projet ferroviaire.

En effet, 15 millions de personnes vivent actuellement dans le corridor de Toronto jusqu’à Québec. Les populations et les économies de l’Ontario et du Québec continueront de croître, tout comme la demande pour tous les modes de transport, y compris le transport ferroviaire de passagers.

Ce projet offre la possibilité de répondre aux demandes futures tout en transformant le transport ferroviaire en un mode de voyage plus durable et plus accessible pour les générations à venir.

Pour l’instant, VIA Rail ne peut plus améliorer de façon importante son service de transport de passagers.

La congestion ferroviaire sur les voies actuelles limite la fréquence des départs, la fiabilité des arrivées et la rapidité d’arrivée à destination.

En d’autres termes, sans un investissement transformateur, 10 millions de trajets par an seront effectués en utilisant des modes de transport plus polluants si on n’améliore pas le service ferroviaire de passagers.

[Traduction]

Le projet de TGF consiste à construire un nouveau système ferroviaire interurbain de transport de passagers sur 1 000 kilomètres pour desservir Toronto, Peterborough, Ottawa, Montréal, Laval, Trois-Rivières et Québec.

Le TGF fournira un service rapide, fiable et fréquent. Il triplera le nombre de voyages de passagers ferroviaires dans le corridor pour atteindre au moins 17 millions d’ici 2059. Il doublera le nombre de départs de trains, avec au moins 12 départs par jour entre les principales villes. Il améliorera considérablement la fiabilité des trains, qui partiront et arriveront à l’heure. Il offrira un service plus rapide, avec des temps de trajet plus courts.

Il continuera à desservir les communautés actuellement desservies par VIA Rail, telles que Kingston, Cornwall et Drummondville, pour lesquelles on prévoit des améliorations du côté des horaires et de la commodité. Il créera des milliers d’emplois bien rémunérés pendant la conception, la construction et l’exploitation.

Comme le moyen de transport est électrifié, il permettra de réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre, ou GES. De plus, il contribuera à l’engagement du gouvernement du Canada en faveur de la réconciliation avec les peuples autochtones.

[Français]

La mise en œuvre du TGF est divisée en quatre phases.

La première phase du projet, qui s’étendait de 2017 à 2021, était axée sur la diligence raisonnable de la proposition initiale de VIA Rail.

Cette évaluation a conclu que l’investissement dans le transport ferroviaire de passagers était nécessaire et qu’il apportait une valeur sociale, économique et environnementale importante.

Le gouvernement a annoncé dans le budget de 2022 sa décision de procéder à la phase 2 du projet — la phase d’approvisionnement.

Une nouvelle filiale de VIA Rail, VIA TGF-VIA HFR Inc., a été créée en 2022 pour servir de bureau de mise en œuvre du projet.

[Traduction]

Pendant que VIA TGF renforce ses capacités, le gouvernement mène un processus d’approvisionnement novateur qui tient compte des leçons tirées d’autres projets d’infrastructure canadiens et internationaux. VIA TGF joue le rôle de conseiller technique et commercial durant cette phase.

Une fois l’approvisionnement terminé et sous réserve des décisions du gouvernement, le projet passera à la phase 3, la phase de codéveloppement. La filiale VIA TGF sera alors pleinement opérationnelle et dirigera les activités réalisées pendant cette phase : l’élaboration de la conception de référence du TGF, l’engagement accéléré des intervenants et la préparation d’un contrat final d’accord de projet.

Elle sera suivie de la phase 4, la construction proprement dite du projet, et de la phase 5, l’entretien et l’exploitation sur une période de 40 ans.

Le projet de TGF continue de prendre de l’ampleur pendant la phase d’approvisionnement. En juillet, le gouvernement du Canada a qualifié trois équipes de soumissionnaires pour répondre à la demande de propositions.

En octobre dernier, le gouvernement a lancé la demande de propositions, une étape cruciale qui mènera à la sélection d’un partenaire — un promoteur privé — pour le projet. Les propositions devraient être reçues à l’été 2024 et l’évaluation sera terminée à la fin de l’automne 2024.

Afin de maximiser les avantages et l’innovation, la demande de propositions, ou DDP, exige des soumissionnaires d’élaborer deux solutions qui répondent aux objectifs du projet : l’une pouvant atteindre 200 kilomètres à l’heure, et l’autre comprenant des segments à grande vitesse pour réduire la durée des trajets. S’ensuivra une évaluation rigoureuse des coûts et des avantages d’intégrer une voie à haute vitesse à chaque tronçon du corridor.

[Français]

Grâce à cette approche, le gouvernement pourra déterminer la meilleure solution pour le TGF en s’appuyant sur une compétition féroce entre plusieurs des meilleures sociétés canadiennes et internationales.

Nous sommes convaincus qu’une telle compétition favorisera au maximum l’innovation et permettra d’obtenir le meilleur projet pour les Canadiens.

[Traduction]

Le processus d’acquisition du TGF respecte le calendrier prévu pour recevoir des offres cet été. Dans le cadre de la DDP, les soumissionnaires ont été très mobilisés et ont fourni des idées novatrices pouvant être mises à profit au cours de la prochaine phase du projet. Ils ont par exemple fait des propositions de tracé préliminaire qui minimisent le partage des droits de passage avec des sociétés ferroviaires hôtes et qui offrent des services de meilleure qualité et plus rapides avec des temps de déplacement plus courts. Nous nous attendons à recevoir des propositions qui amélioreront considérablement le projet.

Enfin, les mesures proposées dans la Loi d’exécution du budget visent à déclarer VIA TGF mandataire de Sa Majesté du chef du Canada. Cela est essentiel à l’heure actuelle pour faire progresser le train à grande fréquence.

La déclaration du statut de mandataire apportera de la certitude au processus d’approvisionnement. Il est essentiel de fournir les garanties nécessaires demandées par les trois soumissionnaires, ce qui apportera de la confiance dans le soutien financier du projet par le gouvernement du Canada.

Le statut de mandataire permettrait à VIA TGF de bénéficier des immunités, privilèges et prérogatives dont jouit la Couronne. Il aiderait aussi VIA TGF à élaborer sa stratégie d’acquisition des terrains. En tant que mandataire de la Couronne, les biens acquis par VIA TGF deviendront des terres fédérales.

En l’absence d’une déclaration de statut de société mandataire en vertu de cette loi, Transports Canada ne serait pas en mesure de fournir les garanties nécessaires demandées par les soumissionnaires avant la signature de l’entente d’avant-projet, prévue pour cet automne. Sans ces garanties, VIA TGF ne gagnerait pas la confiance du marché en raison de l’incertitude du soutien financier de la part du gouvernement. Ces garanties sont donc essentielles.

[Français]

Ceci conclut mes remarques. Encore une fois, je vous remercie de nous avoir invités à nous exprimer sur ce projet passionnant.

[Traduction]

C’est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : On discute ici de la partie du budget qui touche à la création de cette filiale de VIA Rail, qui est un sujet assez technique.

J’aimerais savoir ceci : quels sont les avantages d’une telle solution par opposition à demander à VIA Rail de faire le travail, et comment comparez-vous cela? Par exemple, au Québec, on a un très gros projet de TGM et on a demandé à la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) d’en faciliter la création. Donc, vous avez fait d’autres choix et vous créez de toute pièce une filiale, mais cela prendra du temps avant que celle-ci réussisse à avoir une certaine expertise. Expliquez-moi pourquoi vous avez fait ce choix. À part pour dire que c’est une société de Sa Majesté, qu’est-ce que cela nous donne de plus à nous, Canadiens?

M. Robitaille : Merci, madame la sénatrice.

En fait, l’approche que le gouvernement a utilisée est d’étudier partout dans le monde des projets semblables, afin de déterminer quelle est la meilleure structure pour livrer le projet.

Qu’est-ce qu’on a appris? Qu’il était bénéfique d’avoir une organisation qui se concentre sur le projet de construction, tout en gardant une autre organisation qui se concentre sur les opérations. C’est ce qu’on a présentement. VIA Rail va continuer de faire son excellent travail et de faire fonctionner les trains à travers le Canada et on aura aussi une organisation qui se consacrera à la gestion du projet, qui est — il faut se le rappeler — le plus grand projet d’infrastructure depuis la Voie maritime du Saint-Laurent. Cela demande donc des compétences différentes.

La société d’État a été créée en 2022; cela fera bientôt deux ans qu’elle existe, et elle a continué à bâtir sa capacité.

Son conseil d’administration est maintenant presque complet, un PDG a été nommé et ils en sont maintenant à environ 80 employés pour soutenir le projet, afin d’aller chercher une expertise de classe mondiale et d’agir comme contrepartie au secteur privé.

Le gouvernement est responsable de l’approvisionnement afin de garder son élan pendant que la société d’État bâtit sa capacité. On travaille main dans la main avec VIA TGF pour l’approvisionnement et pour l’appel d’offres, et lorsqu’un partenaire privé sera sélectionné, la responsabilité du projet deviendra celle de cette société d’État, qui sera maintenant suffisamment mature pour occuper ce rôle.

La sénatrice Miville-Dechêne : Je ne savais pas qu’on avait deux choix, soit un train qui est complètement à grande vitesse du début à la fin, ou avec seulement quelques portions à grande vitesse.

M. Robitaille : Dans le cadre de l’appel d’offres, on demande aux soumissionnaires deux solutions potentielles : une avec une vitesse maximale de 200 km/heure, que l’on appelle un service de train conventionnel — bien que beaucoup plus rapide que ce qu’on a actuellement —, et une deuxième proposition sans maximum de vitesse.

Cet été, nous recevrons leurs propositions, et avec cette information, le gouvernement pourra considérer les options de trains à grande vitesse, que ce soit pour certains segments ou pour la totalité du projet.

La sénatrice Miville-Dechêne : C’est encore sur la table, soit des segments ou tout le train qui serait à grande vitesse?

M. Robitaille : Exactement; la décision sera basée sur le coût, la qualité des propositions et les bénéfices que tout cela va offrir.

La sénatrice Miville-Dechêne : Est-ce qu’on a déjà un coût maximum? Est-ce que cela a déjà été prévu au budget?

M. Robitaille : À ce stade-ci, c’est prématuré d’avoir un budget, car il faut examiner les coûts sur l’ensemble du cycle de vie du projet. Il y a les coûts de construction, mais les revenus et la profitabilité vont aussi dépendre de la qualité du service et l’achalandage. Le coût initial de construction est plus élevé, mais il faut considérer les bénéfices à long terme.

La sénatrice Miville-Dechêne : J’adore les trains, alors le sujet m’intéresse beaucoup.

La sénatrice Simons : Moi aussi, j’adore les trains.

[Traduction]

Malheureusement, j’habite en Alberta, et ce train ne me sera pas vraiment utile. Pour mes voyages en Ontario et au Québec, j’ai hâte de pouvoir un jour monter dans le train, assise dans mon fauteuil roulant.

Je voudrais me concentrer sur la question de l’immunité de la Couronne et sur le regroupement des terres qui sera nécessaire. Si je comprends bien ce projet de loi, l’octroi du statut de société mandataire permettrait d’outrepasser la réglementation municipale ou provinciale en matière d’utilisation des terres pour acquérir des terrains. La société mandataire aurait vraisemblablement le même pouvoir que le gouvernement fédéral pour acheter ou exproprier des terres.

Pourriez-vous nous parler un peu de ce que cette immunité par rapport aux règles municipales et provinciales pourrait signifier pour le regroupement de terrains et nous dire si elle réduirait le coût des terrains?

M. Robitaille : Je donnerai la première partie de la réponse, puis je céderai la parole à Mme Dolan pour la seconde partie.

Le statut de société mandataire ne conférerait pas à VIA TGF le pouvoir d’exproprier des terrains. La loi sur l’expropriation, qui relève du ministre des Services publics et Approvisionnement, resterait une exigence pour les terrains. Cela dit, vous avez raison de dire qu’une fois qu’un terrain devient fédéral, l’applicabilité des réglementations municipales et provinciales est différente.

Je laisse la parole à Mme Dolan pour qu’elle nous présente les principales différences.

Natalie Dolan, directrice générale, Politiques, Train à grande fréquence, Transports Canada : Les terres fédérales ne sont pas assujetties aux impôts d’autres ordres de gouvernement. C’est un élément clé, mais ce n’est pas le principal. Il y a ce que l’on appelle les paiements tenant lieu d’impôts, que vous connaissez certainement. C’est ainsi que les municipalités sont indemnisées pour les terrains, sans recourir aux impôts. C’est un élément clé.

Un autre élément clé est que les terrains ne seraient pas visés par le zonage municipal. La filiale VIA TGF s’est dotée d’un vaste plan de mobilisation des parties prenantes municipales qui lui permettra de trouver un mécanisme pour travailler efficacement avec les municipalités sur le terrain. Toutefois, du fait qu’il s’agit de terres fédérales, elles ne seraient pas soumises aux règles de zonage municipal. Ce sont là les deux principales conséquences.

La sénatrice Simons : Je crois que M. Robitaille a dit au début que le projet serait aussi favorable pour la réconciliation. Est-ce que certains des droits de passage ou des terres que vous avez l’intention de regrouper sont des terres autochtones?

M. Robitaille : Le processus concurrentiel d’appel d’offres demande notamment une proposition de tracé. À ce stade, nous n’avons pas encore déterminé l’alignement final, c’est-à-dire l’endroit où les voies seront construites. Cela dit, les voies ne doivent pas être construites sur les terres de réserve actuelles, mais il y a aussi des zones qui font l’objet de revendications territoriales de la part de diverses communautés.

M. Camiré pourrait peut-être décrire notre vaste mobilisation et la manière dont le projet est conçu pour que nous puissions soutenir l’objectif de réconciliation.

François Camiré, directeur général, Technique, ingénierie et analyse d’impact, Train à grande fréquence, Transports Canada : Comme M. Robitaille l’a mentionné, nous utilisons deux critères dans le cadre de nos discussions avec les trois consortiums. Le premier est d’éviter les réserves, ainsi que les parcelles de terre visées par de potentielles revendications territoriales.

Pendant le processus d’approvisionnement, nous avons de nombreuses discussions avec les consortiums et nous examinons les propositions de tracés qu’ils pourraient envisager, en veillant toujours à prendre en compte les deux critères que je viens de mentionner.

Nous travaillons en étroite collaboration avec nos collègues du ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord, ou RCAANC, pour nous assurer de bien nous entendre sur les lieux discutés avec les promoteurs.

La sénatrice Simons : En règle générale, si j’ai bien compris, les mandataires de la Couronne ne passent pas de contrats avec la Couronne. Quelles sont les garanties mises en place pour s’assurer qu’il n’y a pas... Je ne sais pas si « conflit d’intérêts » est le terme technique approprié, mais si on se retrouve dans une situation où la filiale a été déclarée mandataire de la Couronne, vous lui donnez maintenant le pouvoir spécial de passer des contrats avec la Couronne également; est-ce exact?

M. Robitaille : La disposition prévoit qu’elle serait déclarée mandataire de la Couronne, mais elle pourrait également signer certains contrats comme si elle n’était pas mandataire de la Couronne. La déclaration de statut de mandataire n’est pas de signer des contrats avec la Couronne elle-même, mais de servir à certaines fins. Il est plus prudent que VIA TGF n’agisse pas comme mandataire de la Couronne.

La sénatrice Simons : Quel serait donc le fonctionnement? On dirait le train de Schrödinger. VIA TGF serait-elle ou non mandataire de la Couronne?

Mme Dolan : En tant que mandataire de la Couronne, elle ne passera pas de contrats avec la Couronne. Mais je pense que M. Robitaille disait que, même lorsqu’elle passe d’autres contrats, elle le fait en son propre nom.

Par exemple, si elle engageait un consultant, elle bénéficierait du soutien financier total de la Couronne. Si ses activités relèvent de son mandat comme il a été approuvé — par exemple, dans le cadre de son plan d’entreprise —, si elle exerce une activité approuvée et acceptée pour elle, c’est la Couronne qui lui donne ce soutien financier. Si la filiale conclut, par exemple, un accord avec un partenaire qui est un promoteur privé, elle sera soutenue financièrement par la Couronne. Elle s’engage donc dans la relation en tant qu’entité, mais elle a le soutien de la Couronne. Voilà le mécanisme, ce qui se passe en réalité. J’espère que l’explication est utile.

La sénatrice Simons : J’ai fait une blague, mais j’ai vraiment hâte de prendre ce train. J’en fais une obsession. Le deuxième élément le plus exaltant de notre lune de miel était le train à grande vitesse.

Le président : Sénatrice Simons, lorsque nous siégerons à huis clos, nous vous demanderons quelle partie a été la plus exaltante.

La sénatrice Dasko : Comment puis-je enchaîner après un tel commentaire? Je vous remercie de votre présence. Toujours sur le thème de l’exaltation, j’accueille cette proposition de train avec un grand enthousiasme. Comme j’habite Toronto, je suis toujours à la recherche d’un moyen plus rapide de me rendre à Montréal et à Ottawa. C’est la solution que j’attends, n’est-ce pas? Il ne nous reste plus qu’à espérer qu’elle se concrétise.

Vous avez déjà répondu à une de mes questions. J’allais vous demander combien d’entreprises soumissionnent ce projet. Vous avez dit qu’il y en a trois.

En ce qui concerne la passation des marchés, vous leur avez donné des spécifications pour deux options. Il doit certainement y avoir une marge de manœuvre dont eux et vous tenez compte. Pouvez-vous nous donner sa teneur?

M. Robitaille : Vous parlez d’une marge de manœuvre en matière de coûts?

La sénatrice Dasko : Oui.

M. Robitaille : À ce stade, nous devons respecter le processus concurrentiel et ne pas donner de chiffres qui pourraient influencer leurs propositions. Nous sommes impatients de recevoir les informations de nos soumissionnaires.

La sénatrice Dasko : Certains nombres doivent être mentionnés. Or, vous ne pouvez pas les répéter.

M. Robitaille : C’est exact.

La sénatrice Dasko : D’accord, c’est noté.

J’aimerais savoir quelle proportion de la voie ferrée sera nouvelle et réservée pour ce projet, et si le train devra emprunter d’autres voies. Les gares dans les communautés sont toutes situées dans des zones centrales. Sera-t-il possible de disposer d’une voie réservée sur tout le trajet? Vous devez utiliser des voies qui existent déjà, n’est-ce pas? Pouvez-vous nous donner un peu plus d’explications?

M. Robitaille : Nos différents soumissionnaires proposent des solutions différentes. D’après les informations dont nous disposons, les voies seront principalement réservées. On peut les imaginer à côté des voies existantes, comme les voies de fret, et parfois dans des zones complètement nouvelles. L’objectif est de se défaire de la dépendance à l’égard des sociétés ferroviaires hôtes comme le CN et d’autres.

Pour se rendre dans les villes, comme vous l’avez dit, il est avantageux que les stations soient situées dans les centres. Là encore, l’accès à ces stations est l’un des éléments les plus importants du TGF. Nous exigeons que les stations de Montréal, Toronto et Québec soient situées au centre-ville — soit dans une station existante, soit à proximité.

Pour se rendre dans ces villes, en particulier à Toronto, il faudra partager les voies avec Metrolinx. Il s’agit d’une société ferroviaire de passagers qui partage les mêmes idées que nous, et avec qui nous entretenons une excellente relation. À Montréal, les défis sont différents selon le type de voies utilisées. Dans l’ensemble, nous nous attendons à devoir partager des voies pour accéder au centre-ville.

La sénatrice Dasko : Comment composera-t-on avec les passages à niveau?

M. Robitaille : Pour que les trains puissent rouler à 200 kilomètres à l’heure, voire plus, la plupart ou la totalité des grands passages à niveau devront être supprimés pour le projet.

La sénatrice Dasko : Dans ce cas, quels sont les moyens mis en œuvre pour résoudre ce problème? Je pense aux trains européens que j’ai vus. Certains d’entre eux circulent le long de ce qui semble être un fossé très profond — j’emploie le mot « fossé » parce que je ne sais pas quel autre mot utiliser. Certains trains circulent essentiellement au-dessous du niveau du sol. C’est quelque chose que j’ai remarqué en Europe. Comment cela sera-t-il géré?

M. Robitaille : Il existe diverses solutions. L’une d’entre elles consiste à couper le relief pour les voies. Souvent, il est plus facile de faire passer les routes sous les voies, car les trains ne peuvent pas monter et descendre des dénivellations aussi abruptes que les voitures. C’est ce que l’on voit dans de nombreuses villes, comme Montréal et Toronto. De nombreuses routes passent sous les voies lorsque le relief a été grandement excavé.

La troisième option consiste à creuser un tunnel sur une partie du tracé ou à surélever les voies. Vous avez dû voir cette solution en Europe. Ce sont les approches les plus courantes pour séparer les trains des autres véhicules.

Le sénateur Quinn : Je vous remercie d’être parmi nous ce soir. Ma question revient sur l’une des questions précédentes de ma collègue. Nous allons créer une société mandataire de la Couronne qui agira de manière indépendante et deviendra l’autorité contractante, mais avec le soutien financier du gouvernement du Canada.

Comment la responsabilité sera-t-elle partagée? En fin de compte, si un problème survient, le gouvernement fédéral sera responsable parce que la société mandataire ne pourra pas assumer cette responsabilité. Est-ce exact?

M. Robitaille : Oui.

Mme Dolan : Merci, monsieur le sénateur. Vous avez mis le doigt sur l’essentiel. C’est exactement l’un des objectifs de l’initiative.

Le sénateur Quinn : Quand la filiale a été créée en 2022, pourquoi cette question n’a-t-elle pas été réglée? On comprenait assez bien la situation. Nous traitons cette question dans la Loi d’exécution du budget, et elle a d’importantes répercussions pour la création de cette société mandataire chargée d’effectuer le travail au nom du gouvernement du Canada. Le gouvernement et la société mandataire seront-ils liés pour l’examen et l’attribution des contrats, ou la société mandataire jouira-t-elle d’une indépendance totale?

M. Robitaille : Le projet compte et continuera de compter un processus de gouvernance solide. Bien entendu, la société a un PDG et un conseil d’administration qui ont une responsabilité fiduciaire à l’égard du projet. Il s’agit d’un projet d’édification de la nation assorti d’une grande complexité et d’un coût élevé, qui sera donc chapeauté par le gouvernement du Canada.

Je sais que j’ai abordé de nombreux points dans ma déclaration liminaire, mais à chaque étape du projet, le gouvernement prendra des décisions en fonction des progrès réalisés par le TGF.

L’objectif est de trouver un juste équilibre entre la flexibilité et l’agilité nécessaires pour faire avancer un tel projet à un bon rythme, tout en assurant un contrôle rigoureux de la part du gouvernement qui sera l’actionnaire, les contribuables étant les bailleurs de fonds ultimes du projet.

Le sénateur Quinn : Il y a toujours des éventualités de passif. Cela serait traité par le gouvernement fédéral de concert avec la société, n’est-ce pas?

M. Robitaille : Oui. La société sera entièrement financée par le gouvernement du Canada. Si le projet coûte plus cher, le coût sera plus élevé pour les contribuables. S’il coûte moins cher, le coût sera moindre pour les contribuables.

Le sénateur Quinn : Dans la documentation que nous avons reçue, il est écrit que les soumissionnaires — donc le secteur privé — souhaitent être confiants quant à la société. C’est pourquoi cette question est traitée de façon expéditive dans la Loi d’exécution du budget. Il est également écrit ailleurs dans la documentation qu’il aurait été possible de déposer un projet de loi distinct à ce sujet.

Si c’était une option, le ministère en aurait probablement parlé en 2022 au moment de discuter de la meilleure façon d’instaurer la société. Or, nous voici une fois de plus à traiter de la Loi d’exécution du budget pour des enjeux qui ont une grande incidence, mais nous semblons faire du rattrapage en choisissant maintenant l’approche qui aurait dû être adoptée dès le départ.

J’aurais aimé que les dirigeants de VIA Rail et de VIA TGF soient des nôtres ce soir, car ce sont eux qui seront responsables de la gestion globale de ce projet. Je suis conscient que vous travaillez pour le ministère, mais vous ne pouvez pas représenter cette société. Il serait injuste que je vous demande de répondre à des questions que je voudrais probablement poser à la société, n’est-ce pas?

M. Robitaille : Vous avez raison. Nous travaillons de concert avec VIA TGF pour l’approvisionnement. L’équipe Canada travaille sur ce projet. Nous nous préparons pour la phase suivante, qui sera la prise en charge du projet. Lors de cette étape, le gouvernement prendra du recul et reprendra son rôle d’actionnaire et d’investisseur dans le projet.

Le sénateur Quinn : Je sais que vous ne pouvez pas nous donner de catégorie d’estimation, mais vous pouvez probablement nous dire combien d’argent a été dépensé pour cette initiative jusqu’à présent, non?

M. Robitaille : En tout, on a dépensé 132 millions de dollars jusqu’au 31 mars 2024, ce qui couvre la diligence raisonnable. Comme VIA Rail a soumis sa proposition en 2016, ces coûts comprennent la diligence raisonnable liée à la proposition initiale, la création d’un bureau de projet conjoint entre VIA Rail et la Banque de l’infrastructure du Canada pour l’analyse de rentabilité du projet, la préparation de l’appel d’offres que nous avons lancé et les premiers frais liés à l’appel d’offres versés à tous les soumissionnaires.

Le sénateur Quinn : Qui assurera la gestion et la continuation du projet une fois celui-ci achevé? Est-ce la société d’État?

M. Robitaille : La société d’État — ou VIA TGF — sera responsable d’un contrat comprenant la conception, la construction, l’entretien et l’exploitation du service.

Le sénateur Quinn : La société s’en chargera?

M. Robitaille : Oui, elle se chargera de la supervision.

Le sénateur Quinn : Ma dernière question porte sur ce train à grande vitesse, qui aurait dû être instauré il y a longtemps. D’autres pays ont très bien fait à cet égard, mais de notre côté, il s’agit d’un projet qui se situe à l’extrémité supérieure du spectre de génération de revenus de VIA Rail. Si ces revenus sont comptabilisés dans les livres de la société, qui sera responsable de l’exploitation et de l’entretien du service? Qu’adviendra-t-il du reste du système de VIA Rail? Est-ce le début de la fin du service ferroviaire pour mes collègues dans l’Ouest ou dans la région de l’Atlantique, qui n’ont déjà presque plus de service? Est-ce le début de la fin? Nous nous concentrerons sur les grandes régions densément peuplées que l’on peut rapidement traverser. Est-ce bien ce qui va notamment se produire?

M. Robitaille : Dans le budget de 2024, le gouvernement du Canada s’est également engagé à remplacer la flotte de VIA Rail desservant le reste du Canada. Le service vers Halifax, entre Toronto et Edmonton et vers Vancouver est un engagement important du budget de 2024 pour le service à long terme que VIA Rail fournit au pays.

Le sénateur Quinn : Merci. Je poserai mes autres questions lors du deuxième tour.

La sénatrice Clement : Bienvenue au comité. Moi aussi j’adore les trains. Mon Dieu, c’est fou comme je les aime au Canada. Je n’étais pas en lune de miel, alors ce n’était pas excitant, mais j’ai pris un train rapide à Paris et je me suis dit : « pourquoi ne pourrions-nous pas avoir cela au Canada? » Ce projet génère assurément beaucoup d’enthousiasme.

J’ai trois questions à propos de la mobilisation communautaire, du processus d’approvisionnement et de Cornwall. J’ai été la mairesse de Cornwall, et nous avons eu des discussions difficiles avec VIA Rail sur le service en tant que petite collectivité située le long d’un corridor très fréquenté, mais aussi sur ce projet et ses implications pour Cornwall, qui est une petite ville de 50 000 habitants avec une communauté autochtone et des comtés qui se sentent exclus parce qu’ils se trouvent le long du chemin de fer appartenant au CN. Ce train à grande fréquence s’arrêtera-t-il à Cornwall?

Je vous parle au nom de la région en tant que sénatrice de l’Ontario. Pouvez-vous rassurer Cornwall et la région — qui se trouve entre Montréal et Kingston — et leur dire qu’ils ne seront pas laissés pour compte dans le cadre de ce projet?

Ma deuxième question porte sur le processus d’approvisionnement. Je suis une sénatrice de l’Ontario. Nous parlons du projet de train léger d’Ottawa, de l’échec de la Ville d’Ottawa et de la perception qu’a le public de l’approvisionnement et des partenariats avec des entités privées, n’est-ce pas? Vous avez dit, en réponse au sénateur Quinn, que la société d’État supervisera ce contrat, mais les Canadiens ont des doutes quant à la façon dont le gouvernement et les sociétés d’État établissent des partenariats avec des entités privées.

Ma troisième question porte sur la mobilisation communautaire. Nous avons mentionné le mot « contribuable ». Il s’agit du plus grand projet depuis le projet de la Voie maritime, et les contribuables doivent donc comprendre ce que cela signifie. Comment décrivez-vous ce projet au public? Je peux vous dire qu’à Cornwall, nous nous sentons un peu exclus. Nous aimerions nous sentir plus liés au projet, à tout le moins. Quels sont vos projets de mobilisation communautaire? Comment décrivez-vous ce projet aux Canadiens?

M. Robitaille : Merci, madame la sénatrice. Je vais répondre à votre question sur Cornwall et je passerai ensuite la parole à mon collègue, M. Martin, puis à M. Camiré, pour qu’ils vous parlent de l’approvisionnement et de la mobilisation communautaire respectivement.

Commençons par Cornwall. Je vous remercie de cette question. J’ai mentionné beaucoup de choses dans mes remarques liminaires. Le gouvernement s’est engagé à construire la nouvelle ligne qui sera la nouvelle emprise, mais aussi à préserver le service actuel fourni à des collectivités comme Cornwall et Kingston, donc la ligne entre Montréal et Toronto.

Cela dit, le nouveau service ne passera pas par Cornwall. Il passera plus au nord. C’est ce qui est prévu.

Une partie de l’engagement et de la demande que nous faisons aux soumissionnaires est d’améliorer le service fourni à ces collectivités. En tant qu’ancienne mairesse de Cornwall, je suis certain que vous avez déjà pris le train ou que vous l’avez vu passer. Présentement, les horaires sont optimisés pour les voyages entre Toronto et Montréal. J’ai regardé l’horaire offert pour Cornwall. Je pense qu’il est possible de se rendre à Montréal au plus tôt vers midi environ. Il en va de même pour Toronto.

Nous savons qu’une amélioration possible pour les passagers qui ne voyagent pas entre Montréal et Toronto serait d’offrir un horaire qui fonctionne pour les habitants de Cornwall ou de Kingston, ce qui n’est pas le cas présentement.

Pour être franc, bien que la nouvelle ligne ne passera pas par Cornwall, nous voyons des possibilités d’améliorer le service actuel afin de rendre le train plus attrayant pour ses habitants.

En ce qui concerne l’approvisionnement, nous avons examiné des projets au Canada et à l’étranger pour déterminer les pratiques exemplaires ainsi que les choses à faire et à éviter. Monsieur Martin, peut-être pourriez-vous nous expliquer les principales leçons tirées et les raisons pour lesquelles nous agissons ainsi?

M. Martin : Pour un projet très complexe d’une telle ampleur, il est très important de tirer des leçons d’autres projets, de mégaprojets. L’un d’entre eux était le train léger d’Ottawa. Nous avons surtout étudié de très près l’enquête publique et le rapport qui contenait diverses recommandations à ce sujet.

Il existe des différences entre notre approche et celle de la Ville d’Ottawa. Par exemple, nous avons choisi un modèle de collaboration PPP, ce qui est une avancée par rapport au modèle PPP traditionnel. Il s’agit d’une différence importante. Nous mobiliserons notre partenaire plus rapidement pour qu’il nous aide à innover et à trouver des façons de générer et de maximiser les avantages du projet. Comme l’a dit M. Camiré, nous avons également créé la société d’État pour attirer les professionnels et les compétences nécessaires à la réalisation d’un projet d’une telle ampleur.

Il est également très important que nous utilisions cette approche collaborative. Nous sommes en voie de sélectionner notre partenaire, à savoir le promoteur privé qui travaillera de concert avec VIA TGF pour que le projet progresse.

Enfin, nous devons également veiller à choisir un partenaire du secteur privé qui sera responsable de la conception, de la construction, de l’entretien et de l’exploitation. Nous croyons qu’il existe des différences majeures entre le projet que vous avez évoqué et le nôtre. Nous l’avons étudié, mais nous avons également étudié de nombreux autres projets au Canada et à l’étranger.

La sénatrice Clement : Je suis heureuse que vous ayez mentionné l’enquête sur le train léger, car elle a permis de recueillir beaucoup d’informations. Nous avons appris que les modèles PPP traditionnels n’aident pas les contribuables. En fin de compte, c’est l’agence gouvernementale qui finit par payer plus. Vous parlez d’un modèle de collaboration, ce qui est différent. Cela m’encourage. Nous continuerons à nous informer sur ce sujet.

M. Robitaille : Nous avons parlé de l’importance de l’opérateur. Dans les trois consortiums, il y a un grand opérateur international de chemins de fer conventionnels et à grande vitesse. Dans l’équipe Cadence, il y a Keolis et la SNCF de la France qui participent au processus. Ces opérateurs sont bien connus. Dans Intercity Rail Developers, il y a First Group, qui est le plus grand opérateur privé du Royaume-Uni et Renfe, qui est l’opérateur ferroviaire conventionnel et à grande vitesse en Espagne. Pour ce qui est de QConnexiON Rail Partners, il y a Deutsche Bahn, qui est l’opérateur en Allemagne.

Nous ne l’avons pas mentionné dans nos remarques liminaires, mais les meilleurs au monde sont en compétition pour ce projet. Le monde est à l’affût. Il s’agit du plus grand projet de l’heure, et tous veulent appuyer le Canada dans ce changement.

M. Camiré : Il est essentiel de consulter toutes les parties prenantes dans le cadre de ce projet, pour des raisons évidentes. Vous l’avez peut-être remarqué, mais VIA TGF, ou enfin le nouveau PDG, Martin Imbleau, a été très présent au cours des derniers mois. Il a rencontré les municipalités, les communautés autochtones et diverses chambres de commerce. Telle a été notre stratégie. Nous maintiendrons et augmenterons peut-être même la fréquence de cette mobilisation au cours de la phase de codéveloppement une fois que le partenaire aura été choisi.

Nous continuerons à rencontrer toutes les parties prenantes que je viens de mentionner tout au long de la phase de codéveloppement, notamment lors de l’évaluation environnementale.

La sénatrice Clement : Merci de ces réponses. J’ajouterai une dernière chose. Il sera très important pour les collectivités qui ne seront pas desservies par ce chemin de fer, peu importe où elles se trouvent au Canada, d’avoir la certitude que VIA Rail ne va pas... Bon, je sais que cela ne relève pas nécessairement de votre mandat, mais il y a un lien. Les Canadiens adhéreront à ce projet s’ils ont l’impression qu’ils ne seront pas privés de service. C’est crucial. Cela concerne Cornwall, mais pas seulement. Merci.

Le sénateur Quinn : J’aimerais juste poser quelques questions rapides, en fait.

L’article 35 sur les droits des Autochtones traite notamment de consultation. Vous avez dit que vous avez établi des routes potentielles. Avez-vous consulté les Premières Nations qui pourraient être affectées par ces trajets, ou attendez-vous que des décisions soient prises à cet égard pour mener des consultations? Cela pourrait s’avérer désastreux et dissuader les Premières Nations d’approuver le projet.

M. Robitaille : Transports Canada consulte les peuples autochtones depuis un an et demi en prévision du projet. VIA TGF a également commencé à le faire. Plus de 40 communautés autochtones pourraient être affectées par le projet. Nous les avons déjà consultées à plusieurs reprises. Si le temps le permet, je pourrais demander à M. Camiré de vous donner quelques exemples de ce que nous avons fait. Nous essayons d’innover et d’aller au-delà de ce que font les projets habituels pour atteindre ce niveau de réconciliation.

Le sénateur Quinn : Je tiens à être respectueux envers mes collègues. Vous avez répondu à ma question en disant que vous avez déjà eu des discussions, ce qui est une bonne chose.

En vertu de quelle autorité... Comme vous l’avez dit, ce projet desservira la région s’étalant de Toronto à Québec. Quelle est l’autorité qui permet au gouvernement fédéral de réaliser ce projet à travers l’Ontario et le Québec? Autrement dit, faut-il faire quelque chose pour lui donner l’autorisation d’exécuter ce projet dans ces provinces?

Mme Dolan : Je commencerai par dire que VIA Rail dessert déjà de nombreuses provinces. Cette nouvelle compagnie ferroviaire intégrera les services existants de VIA Rail et ajoutera la ligne TGF. Il s’agit d’une expansion des services existants et il s’agira d’une entreprise ferroviaire fédérale si nous nous en occupons. Il n’est donc pas nécessaire d’obtenir quelconque autorisation.

Le sénateur Quinn : Merci, car je m’interrogeais sur... L’un de mes sujets de prédilection est le pouvoir déclaratoire inscrit à l’article 92(10)(c), car c’est un pouvoir qui a été utilisé pour divers projets de grande envergure comme celui-ci au Canada. J’étais donc curieux de savoir si c’est quelque chose qu’il faudrait examiner. Je m’en tiendrai là.

J’ai une dernière question. Faudra-t-il rajuster le chemin de fer qui entre dans la gare de Québec pour accueillir le train à grande vitesse? Le chemin de fer actuel est-il suffisant?

M. Robitaille : Cela dépend du service qui sera fourni en fin de compte, mais il est peu probable que le chemin de fer actuel fournisse une capacité suffisante pour se rendre à la Gare du Palais. Pour le moment, il est trop tôt pour confirmer l’emplacement des gares, mais il faudrait soit l’améliorer pour accéder à la Gare du Palais, soit construire une autre gare à Québec proche du centre-ville qui offrirait un service convaincant aux citoyens.

Le sénateur Quinn : Je pose la question en raison de l’annonce de la semaine dernière au sujet de l’initiative [difficultés techniques]...

M. Robitaille : Le pont de Québec.

Le sénateur Quinn : ... si une partie de cela servirait à veiller à ce que la condition de la voie ferrée permette au train de traverser le fleuve pour se rendre aux stations. C’est là où se trouve la station.

M. Robitaille : Cela me permet d’apporter une précision. Le nouveau service demeurerait sur la rive nord; il ne traverserait pas le pont de Québec.

Le sénateur Quinn : D’accord. Parfait.

Une voix : C’est pourquoi il se rend à Laval.

M. Robitaille : Oui, à Laval, à Trois-Rivières puis à Québec, près de l’aéroport; il resterait de ce côté.

Le sénateur Quinn : Je vous remercie beaucoup pour ces renseignements et j’espère qu’à l’avenir, si le comité décide de voir comment les choses se passent, nous recevrons les représentants de la société. Merci.

La sénatrice Simons : J’aimerais vous poser deux questions complètement différentes. La première porte sur l’évaluation environnementale. La Loi sur l’évaluation d’impact s’applique ici parce qu’il s’agit d’une voie ferrée sous réglementation fédérale, qui passe par deux provinces.

Savez-vous à quoi ressemblera l’échéancier pour le processus d’évaluation de l’impact environnemental?

M. Robitaille : Vous avez raison; nous nous attendons à ce que la Loi sur l’évaluation d’impact s’applique au projet.

La sénatrice Simons : C’est l’autre projet de loi C-69, je sais.

M. Robitaille : C’est exact. Dans le budget de 2024, il y avait un énoncé sur la réalisation du processus d’évaluation de l’impact environnemental et du processus réglementaire, soit dans les cinq ans pour un projet de route verte comme celui-ci. Il s’agit d’une estimation, mais nous travaillons en étroite collaboration avec la société pour trouver des moyens de réduire ce délai.

La sénatrice Simons : C’est long. Ce serait une évaluation exhaustive.

Ma prochaine question n’a aucun lien avec la précédente, mais vous avez dit quelque chose qui m’a intriguée. Vous avez dit qu’il y avait un élément du budget de 2024 qui portait sur le service de VIA Rail dans l’Ouest canadien. Je comprends que ce n’est pas le sujet que nous abordons ce soir, mais en tant qu’Edmontonnienne, je peux vous dire que le service de VIA Rail dans l’Ouest est devenu horrible après la COVID. Avant, nous avions accès à un service ferroviaire de jour. Aujourd’hui, le seul train de VIA Rail arrive à Edmonton vers minuit, et vous amène à Jasper où il vous déposera vers 5 heures du matin, ce qui n’est vraiment pas commode. Cela signifie qu’on ne peut prendre le train vers Jasper en hiver pour aller faire du ski ou en été pour profiter du parc, ce qui est très mauvais pour le tourisme et pour les gens qui vivent à Edmonton et à Jasper.

Pouvez-vous me dire combien de fonds ont été réservés pour le service ferroviaire dans l’Ouest canadien ou est-ce que ma question est injustifiée parce que ce n’est pas l’objet de votre comparution ce soir?

M. Robitaille : Nous ne pouvons pas parler du service au nom de VIA Rail.

Je dirai, brièvement, que l’engagement du budget de 2024 vise le remplacement de la flotte utilisée entre Toronto et Vancouver. Ces trains ont près de 70 ans.

La sénatrice Simons : Ils sont assez charmants.

M. Robitaille : En effet. Si vous avez l’occasion de les prendre, je vous encourage à le faire.

La sénatrice Simons : Dans l’ancien temps, lorsque le train voyageait de jour, j’ai eu l’occasion de le prendre jusqu’à Jasper.

M. Robitaille : Les trains sont vieillissants et arrivent à la fin de leur vie utile; l’engagement vise à les remplacer.

Le budget ne précise pas la valeur des trains de remplacement, parce qu’il y aura un processus d’acquisition concurrentiel qui sera lancé. Mais c’est un projet important.

La sénatrice Simons : Est-ce que ces trains seront électriques? Est-ce qu’ils fonctionneront à l’hydrogène? Est-ce qu’ils seront plus écoénergétiques que les trains actuels? Est-ce qu’ils seront plus rapides? Améliorés?

M. Robitaille : Je dois m’en tenir à une réponse de haut niveau, car je ne peux parler au nom de VIA Rail à ce sujet, mais en ce qui a trait à la nature du service, je peux vous dire qu’il continuera de se faire principalement sur les rails du CN. Les trains fonctionneront toujours au diésel, mais les nouveaux moteurs sont beaucoup plus écologiques; les émissions seront donc grandement réduites.

La sénatrice Simons : J’aimerais beaucoup que l’on songe à un modèle hybride : au diésel et à l’hydrogène. L’Université de l’Alberta fait beaucoup de recherche sur le sujet. Je vis d’espoir.

Le président : Comme nous tous.

La sénatrice Dasko : Est-ce que VIA Rail a tenté de déterminer si les coûts de fonctionnement entraîneraient des profits ou des déficits? Quelle est la vision à cet égard?

M. Robitaille : En tenant compte du coût de fonctionnement seulement — et non du coût de construction —, le gouvernement s’attend à ce que le nouveau service soit rentable.

À l’heure actuelle, le service de VIA Rail bénéficie d’une subvention de fonctionnement, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du corridor. Avec le TGF, nous nous attendons à ce que le service engendre un surplus ou un profit chaque année.

La sénatrice Dasko : Est-ce que ce sera la vision dès le départ? Est-ce ainsi que le service est structuré?

M. Robitaille : Oui.

La sénatrice Dasko : Il fonctionnera sur une base de profit?

M. Robitaille : Oui.

La sénatrice Dasko : Merci.

Le président : Chers collègues, si vous n’avez pas d’autres questions, j’aimerais remercier les représentants de Transports Canada d’avoir été avec nous et d’avoir répondu à nos questions ce soir. Avec la permission du comité, nous allons poursuivre à huis clos afin de discuter de nos travaux.

(La séance se poursuit à huis clos.)

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