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TRCM - Comité permanent

Transports et communications


LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES TRANSPORTS ET DES COMMUNICATIONS

TÉMOIGNAGES


OTTAWA, le mercredi 25 septembre 2024

Le Comité sénatorial permanent des transports et des communications se réunit aujourd’hui, à 18 h 45 (HE), avec vidéoconférence, pour étudier le projet de loi S-269, Loi concernant un cadre national sur la publicité sur les paris sportifs.

Le sénateur Leo Housakos (président) occupe le fauteuil.

[Français]

Le président : Bonsoir, honorables sénatrices et sénateurs. Bienvenue à cette réunion du Comité sénatorial permanent des transports et des communications. Je m’appelle Leo Housakos, je suis un sénateur du Québec et je suis président de ce comité.

[Traduction]

J’inviterais mes collègues, en commençant par ma gauche, à se présenter brièvement.

La sénatrice Simons : Je suis la sénatrice Paula Simons de l’Alberta, et je viens du territoire visé par le Traité no 6.

[Français]

La sénatrice Clement : Bernadette Clement, de l’Ontario.

[Traduction]

Le sénateur Klyne : Bienvenue à nos invités. Je suis Marty Klyne, sénateur de la Saskatchewan, territoire visé par le Traité no 4.

La sénatrice M. Deacon : Marty Deacon, je viens de l’Ontario.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Bienvenue. Julie Miville-Dechêne, du Québec.

[Traduction]

La sénatrice Dasko : Donna Dasko, sénatrice de l’Ontario.

[Français]

Le président : Ce soir, nous poursuivons notre étude du projet de loi S-269, Loi concernant un cadre national sur la publicité sur les paris sportifs.

[Traduction]

Pour notre premier groupe de témoins ce soir, le comité accueille Matthew Young, directeur de la recherche de Greo Evidence Insights, associé de recherche principal du Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, et professeur associé de recherche à l’Université Carleton; et Rob Simpson, directeur à Sagewood Resources. Se joignent également à nous, par vidéoconférence, Brian Dijkema, président, Canada, à Cardus; et Helen A. Hayes, agrégée supérieure de recherche au Centre for Media, Technology and Democracy.

Bienvenue et merci de vous être joints à nous. Nous allons entendre les déclarations liminaires de cinq minutes de M. Young, suivi de M. Simpson, de M. Dijkema et de Mme Hayes. Les déclarations liminaires seront ensuite suivies par une période de questions et de réponses.

Monsieur Young, vous avez la parole, monsieur.

Matthew Young, directeur de la recherche, Greo Evidence Insights : Merci, sénateurs et sénatrices.

Je m’appelle Matthew Young et je suis ici au nom de Greo Evidence Insights et du Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances. Je suis honoré de comparaître pour l’étude du projet de loi S-269 du comité.

Greo Evidence Insights est une organisation canadienne indépendante sans but lucratif qui travaille dans la recherche sur le jeu et la réduction des préjudices depuis plus de 20 ans. Le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, ou CCDUS, a été créé par une loi du Parlement en 1988 afin d’assurer un leadership national concernant les questions de santé liées à la consommation de substances. Personnellement, je mène des recherches dans les domaines de la dépendance, de la consommation de substances et du jeu depuis plus de 30 ans.

Comme le décrit le préambule du projet de loi et comme d’autres témoins l’ont dit, les récents changements nationaux et provinciaux majeurs en matière de politique sur le jeu ont entraîné une augmentation soudaine des possibilités de participation légale au jeu en ligne. En avril 2024, 50 entreprises de jeu différentes exploitaient 82 sites Web différents dans la seule province de l’Ontario. Depuis 2022, nous avons tous observé une augmentation radicale de la publicité sur les jeux de hasard.

Un récent rapport conjoint du CCDUS et de Greo soutient que ces changements majeurs en matière de politique sur le jeu sont préoccupants, et ce, pour trois raisons principales : premièrement, ces changements ont entraîné une augmentation du jeu en ligne chez les Canadiens, ce qui devrait produire une augmentation des préjudices liés aux jeux en ligne parmi la population générale, surtout chez les jeunes et d’autres groupes vulnérables.

Deuxièmement, le type de jeu de hasard rendu accessible — le jeu en ligne — diffère fondamentalement des autres formes de jeu que nous connaissons, comme la loto 6/49, et est beaucoup plus risqué. Les Canadiens peuvent parier en ligne 24 heures par jour, sept jours par semaine depuis le confort de leur foyer en utilisant leur ordinateur ou leur téléphone intelligent et dépenser autant d’argent que celui auquel ils ont accès, y compris en utilisant leurs cartes de crédit.

Troisièmement, le volume des publicités sur le jeu qui associent sans cesse le sport aux paris banalise les jeux de hasard, ce qui amène les gens à penser que les paris font partie intégrante du plaisir qu’ils tirent des sports et du fait d’être des amateurs de sports. C’est tout particulièrement préoccupant chez les jeunes et les jeunes adultes.

Malgré ces préoccupations, les conséquences de ces changements sur la santé des Canadiens demeurent largement inconnues, car il n’y a pas de surveillance systématique nationale, provinciale ou territoriale des préjudices liés aux paris. Les données limitées disponibles ne sont pas bonnes. Par exemple, le nombre de personnes qui appellent la ligne d’aide sur le jeu compulsif de l’Ontario a augmenté de façon importante depuis 2021, principalement en raison des appels concernant le jeu en ligne. En outre, selon un récent sondage réalisé par Recherche en santé mentale Canada, 7 % des Canadiens répondaient aux critères du jeu compulsif. Cela représente une augmentation de plus de 1 000 % depuis la dernière évaluation en 2018. Les taux de jeu compulsif étaient même supérieurs chez les jeunes Canadiens âgés de 18 à 34 ans, atteignant 15 %.

Le jeu n’est pas une marchandise ordinaire comme le maïs ou le blé. Cela crée une dépendance, et une partie des personnes qui y participent subissent des préjudices. On l’assimile davantage à l’alcool, au cannabis ou au tabac. C’est pourquoi ces types de marchandises sont souvent réglementés par les mêmes autorités gouvernementales provinciales, comme l’Alberta Gaming, Liquor and Cannabis Commission, ou AGLC.

La nature intrinsèquement nocive de ces marchandises est aussi la raison pour laquelle il existe des codes ou des règlements nationaux qui régissent la publicité pour l’alcool, le tabac et le cannabis. En revanche, il n’existe pas de tels codes ou règlements nationaux pour le jeu. La nature intrinsèquement nocive de ces marchandises est également la raison pour laquelle le Canada dispose de stratégies ou de cadres nationaux pour le cannabis, l’alcool et le tabac afin de protéger la santé des Canadiens; cependant, il n’existe aucune stratégie nationale du genre pour le jeu. C’est pourquoi le CCDUS et Greo ont récemment publié un rapport, qui a été distribué, je crois, aux membres du comité, réclamant une stratégie pancanadienne pour répondre à l’augmentation prévue des préjudices liés aux jeux de hasard.

Pour ces raisons, nous félicitons la sénatrice Deacon et le sénateur Cotter de leur projet de loi et invitons le comité à examiner deux manières qui permettraient de le renforcer : premièrement, le projet de loi devrait être élargi pour inclure toute forme de jeu de hasard, et pas simplement les paris sportifs. Des données probantes démontrent que, bien que les paris sportifs puissent attirer des gens vers le jeu en ligne, les jeux de casino en ligne, y compris les machines à sous ainsi que d’autres jeux en ligne, représentent la plupart des mises totales faites sur les sites de jeux d’argent.

Deuxièmement, le projet de loi devrait inclure du financement pour charger une organisation compétente d’effectuer une surveillance et un suivi systématiques à l’échelle nationale des préjudices liés au jeu.

Nous vous remercions de nous avoir permis de présenter nos commentaires sur le projet de loi.

Le président : Merci, monsieur Young.

Je cède la parole à M. Rob Simpson.

Rob Simpson, directeur, Sagewood Resources, à titre personnel : Merci, sénateurs et sénatrices, de m’avoir invité à prendre la parole. Je vous prie de faire preuve de patience à mon égard alors que je prépare le terrain de façon inhabituelle pour vous présenter mes recommandations.

La publicité sur les paris sportifs existe sous deux formes : la première, la publicité adressée au grand public, sert à banaliser les paris sportifs, augmenter ses cachets au moyen de la participation de célébrités, recruter de nouveaux clients et confirmer que les outils et les ressources disponibles garantissent la sécurité, mais il est probable que ces résultats aient déjà été atteints à la satisfaction de l’industrie. Je veux dire par là que la base de joueurs a probablement une masse et un momentum suffisants pour se maintenir et s’élargir dans l’avenir.

La deuxième forme est une publicité directe adressée aux clients. Moins reconnue, elle sert à accroître la participation au jeu de la base de joueurs existants. Je dirais que, en particulier, on doit également lui prêter attention.

Le véritable discours sur le jeu nécessite des données, mais les données nécessaires sur les paris sportifs ne sont pas mises à la disposition du public. Compte tenu de leur absence, j’ai tiré auprès des casinos et des sondages en ligne des données afin de prévoir ce qui se trouve probablement là. La principale mesure organise toute la population des joueurs en fonction des sommes perdues dans une année et la sépare en déciles. Si la base de joueurs était de un million, chaque décile représenterait 100 000 personnes.

Veuillez vous reporter au tableau qui a été distribué, et je vous parlerai des flèches que l’on voit.

Conformément aux flèches du diagramme, voici cinq points clés à retenir : la flèche 1 montre qu’un peu moins de 20 % des clients des déciles 1 et 2 sortiront gagnant à la fin de l’année. Si l’on regarde la flèche 2 vers le bas, les déciles 3 à 8 montrent des pertes équivalant à plus du double de chaque transition, mais qui contribuent néanmoins relativement peu aux recettes globales. Dans le décile 9, cependant, les pertes connaissent une hausse importante, totalisant en moyenne 2 400 $ par année et contribuant à hauteur de 11,5 % aux recettes. La flèche 3 montre que la perte moyenne dans le dixième décile augmente ensuite de plus de 600 % pour passer à 15 200 $ pour l’année. Il convient de noter que la distribution dans le dixième décile est telle que la perte la plus élevée est supérieure à 1,5 million de dollars.

La flèche 4 montre que les clients du dixième décile génèrent plus de 80 % des revenus, et ils sont donc une principale source de préoccupation pour les fournisseurs de paris sportifs. Toutefois, une partie importante des joueurs dans le dixième décile abandonnent ou diminuent de beaucoup chaque année leurs activités en raison des préjudices qu’ils ont subis. Par conséquent, pour maintenir les profits, il faut les remplacer par de nouveaux clients appartenant aux déciles inférieurs. La croissance des profits d’une année à l’autre oblige d’augmenter la perte moyenne dans le dixième décile.

La cinquième flèche montre que, pour atteindre ces résultats, les fournisseurs emploient une panoplie formidable d’incitatifs pour favoriser la progression des clients vers le dixième décile et augmenter la perte moyenne dans ce décile. La publicité directe ciblant le client est le véhicule qui permet d’y arriver. Il est omniprésent, implacable et continue sans limites jusqu’à ce que le client n’ait plus rien à perdre.

La fidélisation augmente les pertes de clients à dessein; cependant, il y a une relation inévitable entre les sommes perdues et le début des préjudices. Ainsi, des centaines de milliers de personnes se situant dans les neuvième et dixième déciles sont exposées en toute connaissance de cause à un risque de préjudice accru.

Comment cette compréhension peut-elle s’appliquer à la publicité sur les paris sportifs? Ma recommandation générale est d’imposer des conditions à la capacité continue des fournisseurs de faire de la publicité et de commercialiser leurs produits liés aux paris sportifs. Le comité pourrait envisager quatre recommandations appliquées.

Premièrement, imposer une taxe maximale de 50 % sur toutes les publicités en ligne et les dépenses de commercialisation, et consacrer ces recettes à la surveillance de la prévalence des préjudices, en concevant des stratégies de prévention et des interventions efficaces, et en intégrant des algorithmes dans les données sur les clients afin de cerner de manière proactive les personnes à risque de préjudice.

Deuxièmement, vu que la publicité directe ciblant les clients contribue essentiellement au début des préjudices, imposer des limites au nombre et au type d’incitatifs qui peuvent être utilisés pour favoriser l’augmentation du jeu.

Troisièmement, exiger des fournisseurs des résumés de données annuelles, y compris par décile, moyenne, médiane, pertes les plus élevées et les plus basses, de sorte que les tendances clés et les répercussions préventives puissent être cernées.

Quatrièmement, la dernière recommandation, mais elle est d’une extrême importance, est de modifier le Code criminel afin de définir les termes « conduit » et « administre », qui sont devenus une récitation pro forma dénuée de sens. Pourquoi un construit central du Code criminel demeure indéfini…

Le président : Monsieur Simpson, si vous pouviez conclure, parce que nous sommes…

M. Simpson : Parfait. Je suis à l’avant-dernière ligne.

Pourquoi un construit central du Code criminel demeure indéfini est incompréhensible. Une définition responsabilisera toutes les parties responsables de la fourniture de jeux de hasard au Canada. Merci.

Le président : Passons maintenant à M. Dijkema.

Brian Dijkema, président, Canada, Cardus : Merci de me donner la possibilité de m’adresser à vous ce soir. Je me prononce en faveur du projet de loi S-269. Nous appuyons la création d’un cadre national sur la publicité concernant les paris sportifs.

Pour renforcer le projet de loi, il faut se concentrer sur trois aspects : premièrement, interdire totalement la publicité sur les paris sportifs et, effectivement, sur la publicité concernant les jeux de hasard au sens large, et si ce n’est pas possible, fournir des options agressives pour y parvenir; deuxièmement, rediriger une partie des recettes gagnées par les sociétés au moyen des paris sportifs vers la recherche sur la prévention et le traitement des dépendances et les problèmes de santé mentale que cela entraîne; et troisièmement, améliorer l’efficacité des messages sur la prévention du jeu.

Cardus a récemment réalisé une étude sur les résultats de ces mesures. Il s’agit de l’une des plus grandes expériences du genre menées en Ontario, et les lignes directrices pour le Centre canadien sur la dépendance et la consommation de substances disent que les joueurs ne devraient pas dépenser plus de 1 % du revenu du ménage avant impôt pour le jeu, mais le compte moyen en Ontario dépense 283 $. Notez qu’un joueur pourrait posséder plus d’un compte. Si ce n’est qu’un compte par joueur, cela représente 3,2 % du revenu des ménages mensuel moyen au Canada. Les pertes nettes sont donc plus de trois fois celles jugées sécuritaires par les experts.

Il importe de noter que, lorsque les joueurs dépassent 1 %, ils sont 4,3 fois plus susceptibles de subir un préjudice financier comme une faillite, 4,7 fois plus susceptibles de subir un préjudice relationnel comme de mauvais traitements conjugaux et le divorce, 3,9 fois plus susceptibles de subir un préjudice émotionnel ou psychologique, la dépression, l’anxiété et ainsi de suite, et 4,4 fois plus susceptibles de connaître des problèmes de santé liés au jeu.

Nous avons trois recommandations. La première est de renforcer l’alinéa 3(2)a) en vue d’interdire totalement la publicité sur les paris sportifs, au lieu de simplement restreindre son utilisation. Comme M. Young et M. Simpson l’ont signalé plus tôt, les paris sportifs constituent une forme de jeu à risque élevé, et agit de plus en plus comme des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance dans le cas des terminaux de loterie vidéo, qui causent le plus de dépendance.

Si vous regardez une émission sportive en Ontario, vous êtes susceptibles d’être exposés à 2,8 références aux paris par minute. Cela comprend les enfants qui regardent le hockey, un match de baseball ou quoi que ce soit d’autre. Nous dirions que ces publicités produisent le plus d’impact sur les personnes les plus vulnérables à la dépendance au jeu, et en particulier les mineurs.

Selon le Centre de toxicomanie et de santé mentale, le nombre d’étudiants de la septième à la douzième année qui ont joué en ligne a augmenté, passant de 4 % en 2019 avant que cela ne soit autorisé à 15 % en 2021. Je tiens également à noter que l’on aurait supposément légalisé les paris sportifs afin de répondre à la demande existante sur le marché noir. Si c’était le cas, nous n’aurions pas besoin de publicité. Or, voici où nous en sommes.

Je crois savoir que vous entendrez plus tard un témoin qui ferait état de l’existence d’un important segment du marché noir. Nous avons réalisé des travaux qui disent que cette recherche n’est pas fiable.

Si une interdiction totale n’est pas possible, nous proposons deux recommandations de rechange qui sont progressives. La première est d’interdire la publicité sur les paris sportifs pendant les émissions. C’est ce qu’on a fait au Royaume-Uni. Cela voudrait dire que, pendant la diffusion du match de hockey ou la victoire de l’or par l’équipe nationale féminine canadienne, il n’y aurait pas de publicité sur les paris, ni sur la glace ni sur le terrain. Notre deuxième recommandation secondaire est que le cadre national prévoie des mesures visant à interdire la publicité pendant les matchs. La recherche montre que les paris pendant les matchs, les paris sur le fait de savoir quel joueur gagnera la prochaine mise en jeu ou fera le prochain panier, sont les plus dangereux, car ils sont très rapides, et cela devient comme une machine à sous en ligne. Ces pertes sont énormes et sont des facteurs de dépendance. Cette recommandation a été faite en Australie, et je recommande que le comité l’examine également.

La deuxième recommandation est d’ajouter à l’alinéa 3(2)b) une exigence qui inclut des moyens permettant aux sociétés de jeu, que ce soit les sociétés privées ou les sociétés d’État, de contribuer financièrement à la recherche sur les problèmes de jeu, ainsi qu’à la prévention et au traitement de ces derniers. Les sociétés de jeu investissent des centaines de millions de dollars dans le marketing. Elles en connaissent les rouages, et la recherche montre que cela fonctionne. À notre avis, si elles dépensent autant d’argent en publicité, elles devraient payer une somme égale pour fournir de l’aide aux personnes dépendantes et soutenir la recherche, afin que nous soyons mieux outillés, ce qui ressemble vraiment à ce que M. Simpson a dit plus tôt. Nous avons recommandé la mise en place d’un programme de financement de contrepartie, ce qui signifie que, si les sociétés dépensent un dollar pour la publicité, elles dépensent la même somme pour soutenir les personnes dépendantes et ainsi de suite.

La troisième recommandation, et je pense qu’elle est essentielle, qu’il s’agisse des paris sportifs ou de tout type de pari, est que le paragraphe 3(2) définisse des mesures visant à améliorer l’efficacité des messages de prévention des problèmes de jeu.

Pour l’heure, ce n’est qu’une petite phrase dans les publicités. Si vous écoutez les publicités de la Société des loteries et des jeux de l’Ontario, ou SLJO, ou d’autres, vous verrez une ligne qui dit « Know your limit, play within it », ce qui signifie « Connais tes limites, respecte-les. » Or, des pratiques exemplaires et des études montrent que d’autres formes de recommandations liées à la prévention des problèmes de jeu fonctionnent réellement.

Nous suggérons que, comme les messages sur les paquets de cigarettes, ils notent les torts qui peuvent être causés aux personnes qui deviennent dépendantes, et signalent explicitement qu’il y a des appels à l’action clairs. Les meilleures recherches révèlent que ces messages fonctionnent. Au lieu de dire « Connais tes limites, respecte-les », les publicités pourraient dire quelque chose comme « Qu’es-tu prêt à perdre aujourd’hui? Fixe-toi une limite », puis y mettre fin. Ce sont quelques recommandations pratiques.

Notre travail a été présenté au comité. Nous vous recommandons de le lire. Je veux terminer sur le fait que nous parlons ici ce soir... et je lis des statistiques et je parle de données sur les sciences sociales, mais je pense qu’il est important de se rappeler — et je sais que tous les sénateurs le pensent — qu’il y a parmi nous ce soir des gens qui assistent aux réunions des Gamblers Anonymes et sont ici parce que leur vie a été ruinée par le jeu et la dépendance au jeu. C’est réel, c’est dangereux, et cela ruine la vie des gens.

Je tiens à exprimer mon soutien aux personnes qui s’efforcent de se libérer de leurs chaînes et les encourager à s’en sortir.

Le président : Merci, monsieur Dijkema. Ce soir, nous avons du mal à faire respecter la limite de cinq minutes à nos témoins. Madame Hayes, la parole est à vous.

Helen A. Hayes, agrégée supérieure de recherche, Centre pour les médias, la technologie et la démocratie : Merci, monsieur le président, et chers membres du comité, de m’avoir invitée à me présenter à vous aujourd’hui.

Je m’appelle Helen Hayes, et je suis agrégée supérieure de recherche au Centre pour les médias, la technologie et la démocratie, et candidate au doctorat à l’Université McGill. Une bonne partie de ma recherche se concentre sur les politiques relatives aux technologies canadiennes, et j’insiste fortement sur la réglementation concernant les plateformes et la sécurité en ligne afin de promouvoir les intérêts des jeunes en ligne.

Je suis privilégiée de témoigner devant vous aujourd’hui au nom du Centre pour les médias, la technologie et la démocratie. Hébergé à l’École de politiques publiques Max Bell, le centre mène des travaux interdisciplinaires qui examinent le paysage numérique en évolution rapide du Canada et ses effets sur notre société, notre économie et notre démocratie.

Bien que de nombreux autres témoins qui ont comparu aujourd’hui ou dans des réunions précédentes du comité aient axé leurs déclarations sur les effets psychologiques et d’autres effets sur la santé mentale du jeu en ligne, je vous ferai part de mes opinions et de mon expertise sur l’écosystème en ligne en mettant tout particulièrement l’accent sur les répercussions des pratiques de publicité et de la facilité d’accès aux plateformes de paris sportifs sur le bien-être numérique des jeunes internautes. Cet accent découle de mes travaux sur les pratiques de conception de plateformes en ligne axées sur l’enfant, y compris sur les recherches primaires que j’ai menées auprès de jeunes internautes lors de l’Assemblée jeunesse sur les droits numériques et la sécurité du Canada en juin 2023.

L’écosystème numérique est venu à faire partie intégrante de notre quotidien, façonnant notre manière d’interagir avec le contenu, d’y participer et de le consommer. Il a redéfini les frontières entre les espaces public et privé, changé la nature même de la publicité et du marketing et fourni l’accès à des plateformes qui permettent une participation constante, souvent de manières non réglementées ou difficiles à surveiller. En conséquence, les plateformes de médias sociaux, le jeu en ligne et le divertissement numérique se sont tissé une place dans les habitudes des Canadiens. Dans ce contexte, les paris sportifs et ses publicités présentent des dangers précis.

Par exemple, la facilité d’accès aux plateformes de paris sportifs — accessibles 24 heures sur 24, sept jours sur sept, au seul toucher d’un téléphone intelligent ou d’une souris d’ordinateur — peut créer des environnements où les fonctions immersives et le marketing ciblé encouragent la participation prolongée et les habitudes qui créent l’accoutumance. C’est tout particulièrement préoccupant pour les jeunes internautes, qui non seulement sont plus vulnérables au marketing en ligne, mais deviennent souvent très attachés aux appareils informatiques ou en dépendent pour leurs interactions sociales et la création de communautés.

La Convention relative aux droits de l’enfant et l’Observation générale no 25 sur les droits de l’enfant en relation avec l’environnement numérique insistent sur la nécessité d’interdire la publicité ciblant les enfants, en reconnaissant les préjudices potentiels que ce type de ciblage numérique présente pour leur bien-être mental et émotionnel. Les publicités sur les paris sportifs, lorsqu’elles sont fournies à l’aide des mêmes algorithmes que ceux qui favorisent la participation sur les médias sociaux, peuvent avoir un effet préjudiciable unique, banalisant les comportements de jeu dès un jeune âge en donnant un aperçu de l’accès et en favorisant la facilité d’utilisation.

Fait troublant, nous voyons déjà les effets de ce type de publicité sur la sensibilisation des jeunes et l’utilisation de plateformes de paris sportifs au Canada, ce qui témoigne des répercussions et de la portée que les sociétés de paris sportifs peuvent avoir chez les jeunes internautes.

Des données du Centre de toxicomanie et de santé mentale révèlent que le nombre d’élèves de la 7e à la 12e année qui ont joué en ligne a bondi, passant de 4 % en 2019 à 15 % en 2021. Sans mesures de protection nationales, ces chiffres sont susceptibles d’augmenter.

Pour ces raisons, je pense que le projet de loi S-269 représente une étape nécessaire vers une approche normalisée dans l’ensemble du Canada pour atténuer les risques que présentent les paris sportifs chez les jeunes et d’autres personnes. Je suis particulièrement encouragée par l’inclusion et la prise de conscience explicites des répercussions uniques des paris sportifs sur les mineurs.

Cela dit, j’aimerais proposer trois suggestions pour améliorer l’approche du projet de loi, que j’expliquerai plus en détail sous peu.

Premièrement, on doit explicitement inclure le ministre du Patrimoine dans les consultations obligatoires énoncées dans le cadre national.

Deuxièmement, il faut, tout au plus, aborder, ou, à tout le moins, reconnaître les questions de gouvernance élargies régissant les plateformes dans le cadre national.

Troisièmement, on doit renforcer les protections des jeunes dans le projet de loi.

Je presse le comité de prendre au sérieux la proposition du projet de loi de s’assurer que les consultations obligatoires se tiennent avec les ministres, en incluant explicitement le ministre du Patrimoine dans les consultations en vue de l’élaboration du cadre national, en partie pour aligner certains de ses objectifs sur ceux du programme de sécurité en ligne élargi proposé au pays. En fait, pour être efficace, je pense que tout cadre national doit également tenir compte des questions élargies de gouvernance des plateformes, y compris les décisions liées aux algorithmes et à d’autres conceptions qui influent sur l’accès des gens aux publicités ciblées et leurs interactions avec celles-ci.

J’encouragerais également le comité à renforcer la demande de protection des jeunes dans le projet de loi, notamment en stipulant que le cadre doit évaluer les publicités sur les paris sportifs en fonction de leur probabilité d’attirer et d’atteindre de jeunes internautes.

En résumé, les conséquences bien documentées de l’accès facilité et de l’utilisation accrue des plateformes en ligne qui créent une dépendance, y compris des sites Web sur les paris sportifs, cristallisent la nécessité d’une stratégie nationale pour lutter contre ses méfaits. Mais cela souligne également l’importance absolue de réglementer les plateformes en ligne au sens large, des plateformes qui ont une incidence démesurée — et de plus en plus négative — sur le bien-être mental des Canadiens. Un cadre national doit comprendre une réglementation plus musclée des plateformes, des consultations obligatoires auprès des ministères compétents, et une harmonisation avec le programme élargi de sécurité en ligne et le pays pour garantir la meilleure protection des jeunes en ligne.

Je vous remercie.

Le président : Merci, madame Hayes.

La sénatrice Simons : Monsieur Simpson, je pense que vous avez été le premier à parler de la question des paris pendant les matchs, même si d’autres témoins en ont ensuite dit plus à ce sujet. Il s’agit, bien sûr, de l’une des questions les plus embêtantes. C’est une chose de réglementer les annonces à la télévision et à la radio. Nous pouvons le faire par l’intermédiaire du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, ou CRTC. C’est une chose de réglementer les annonces qui paraissent sur les bandes de publicité autour de la patinoire. Réglementer les publicités sur Internet et pendant les matchs est beaucoup plus difficile, surtout lorsqu’elles ciblent un microgroupe de personnes particulières et leurs faiblesses.

Ce n’est qu’un cadre, parce que beaucoup d’aspects du jeu sont réglementés par les provinces. Il y a un nombre défini de choses que le gouvernement fédéral peut faire de façon unilatérale. Mais d’autres ont dit que, au lieu de réglementer les publicités — ce qui constitue une question de liberté de parole —, que penseriez-vous de réglementer les conditions de la licence des sociétés qui dirigent les activités de paris? Ne s’agirait-il pas d’un moyen plus efficace pour y arriver, alors que le cadre est en cours d’élaboration?

Je ne sais pas qui veut répondre à la question en premier.

M. Simpson : Je vais essayer d’y répondre. Lorsque j’ai parlé des incitatifs directs adressés aux joueurs... il s’agit des choses que l’on peut réglementer. C’est une forme de publicité, mais elle s’adresse à une personne en disant : « Pour ton prochain pari, si tu mets 10 $, nous doublerons la mise. » La personne qui n’envisageait pas de parier se retrouve soudainement à le faire. Ce type d’incitatif peut être repéré et limité pour ce qui est du nombre ou des limites ou carrément éliminé.

Fait intéressant, la Canadian Gaming Association a dit qu’elle voulait des paris sportifs pour que l’on puisse parier sur le résultat d’un match des Leafs ou de la Coupe Stanley. Ce n’est plus ce qui se passe maintenant. La plupart des paris sont liés aux incitatifs à l’interne.

Je pense vraiment que c’est là-dessus que l’on devrait concentrer maintenant notre attention. On devrait imposer des conditions. Certains types d’incitatifs devraient être interdits, et il devrait y avoir des limites imposées à d’autres types.

La sénatrice Simons : Je ne sais pas si quelqu’un d’autre veut répondre à ma question. Pour moi, le défi est de savoir comment réglementer les activités en ligne. Comment réglementer ce qui se passe dans des courriels ciblés qui arrivent sur les téléphones des gens, qui ne sont pas le même type de publicité que vous pouvez réglementer à la télévision?

Y a-t-il quelqu’un qui veut essayer de répondre? Comment vous y prendriez-vous littéralement?

M. Simpson : Des règlements sont adoptés, puis il y a un organisme de réglementation, comme Jeux en ligne Ontario. Il surveille ce qui se passe et impose des amendes s’il voit des violations des règlements. C’est le mécanisme qui serait le plus approprié, selon moi.

La sénatrice Simons : Ce n’est pas quelque chose que le gouvernement fédéral peut faire, et lorsqu’il y a un microciblage et que c’est personnalisé à ce point, c’est difficile à voir, parce que les gens se font envoyer des choses directement sans achat par les médias de masse. Avez-vous une idée de la façon dont cela pourrait fonctionner dans la réalité?

M. Dijkema : Je ne veux pas dire que je connais tous les tenants et aboutissants de la façon dont Google et d’autres entreprises gèrent leurs algorithmes ni la façon dont bet365 ou d’autres entreprises les utiliseront, mais je sais qu’ils sont rationnels. Ils sont codés et, par conséquent, placés de façon à cibler certaines personnes de la même manière, bien que différemment, par rapport à un annonceur qui achète un bloc de temps d’antenne sur Bell et utilise un algorithme similaire.

Il me semble que, même si la question peut être plus complexe en raison de la nature de l’algorithme, il est néanmoins possible pour un organisme de réglementation de le faire, car c’est quelque chose de lisible et qui pourrait être vu et remarqué. Les entreprises elles-mêmes le savent parce qu’elles élaborent des algorithmes qui cibleront certains joueurs et certaines personnes qui font certaines actions.

Je suis d’accord avec vous pour dire que c’est plus compliqué, mais ce n’est probablement pas impossible.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Je vais continuer sur la lancée de ma collègue.

La dernière fois qu’on a parlé de toucher aux algorithmes durant l’étude du projet de loi C-11, disons que la montée des boucliers a été très, très forte. Je ne sais pas si c’est encore quelque chose que l’on peut envisager.

Toutefois, je suis très, très favorable à une réglementation. Je vous ai tous écoutés et vous aviez plein d’idées, mais comme gouvernement fédéral qui présente un projet de loi à l’échelle fédérale, on ne peut pas aller dans ces détails en disant que la moitié des revenus publicitaires devrait aller à des questions de prévention du jeu et de réduction de la dépendance. J’imagine que vos idées pourraient servir à alimenter la discussion de ce comité dans un deuxième temps.

J’ai fait une grande parenthèse, mais je veux revenir sur la question des enfants. Madame Hayes, vous avez cité les Nations unies, qui disent que la publicité ne doit pas cibler les enfants. À vrai dire, il n’y a qu’une province qui a adopté des lois sévères sur la question des jouets et de la nourriture, et c’est le Québec.

Dans le cas de publicité liée au jeu, je suis certaine que les compagnies de paris sportifs vous diraient qu’ils ne ciblent pas du tout les enfants et que ce n’est pas leur problème. Comment pensez-vous qu’il est possible de faire cela?

En fait, je suis très inquiète des chiffres dont vous nous avez part en ce qui concerne les enfants qui jouent et qui peuvent accéder à ces sites de jeu alors qu’ils n’ont pas 18 ans. Vous êtes une chercheuse universitaire. Pouvez-vous nous expliquer comment c’est possible?

[Traduction]

Mme Hayes : Merci de la question. Je l’ai mentionné dans ma déclaration : ma préoccupation a trait à la publicité ciblée auprès des jeunes, comme vous l’avez dit. L’un de mes appels au renforcement des mesures de protection des jeunes dans le projet de loi est de veiller à ce que le cadre tienne compte des jeunes au moyen d’une mesure d’évaluation qui permettrait aux gens d’évaluer les publicités sur les paris sportifs en fonction de leur probabilité d’attirer les jeunes ou d’atteindre les jeunes internautes.

C’est pourquoi je demande une perspective plus large de la sécurité en ligne et de la gouvernance des plateformes sur cette question. Une grande partie de ce dont nous parlons dans l’espace en ligne ou l’écosystème en ligne concerne l’accès des gens au contenu qui leur est fourni par des algorithmes sur les plateformes de médias sociaux et d’autres plateformes Internet.

En réponse à votre question sur la façon de le faire, il faut renforcer la façon d’évaluer les publicités sur les paris sportifs dans le cadre pour inclure leur portée potentielle, au moyen d’algorithmes, en tenant également compte de l’incidence du compte de médias sociaux sur la diffusion de ce contenu et l’accès potentiel des jeunes à ce contenu.

Il n’est pas nécessaire que la publicité cible explicitement les enfants, mais elle doit au moins être accessible aux enfants ou avoir le potentiel d’atteindre les enfants ou les jeunes utilisateurs en ligne.

La sénatrice Miville-Dechêne : Qu’en est-il des 15 % d’enfants qui parient et qui ont moins de 18 ans? Comment est‑ce possible?

Mme Hayes : Je pense que cela témoigne, tout d’abord, de l’accessibilité, pour les jeunes utilisateurs des publicités sur les paris sportifs en ligne et de l’accès des jeunes aux plateformes de paris sportifs en général. Maintenant que nous avons des téléphones intelligents, des ordinateurs portables et davantage de communications par Internet, les jeunes peuvent accéder à ces plateformes, et il est clair qu’ils le font. Je ne suis évidemment pas une experte de la façon dont les gens peuvent accéder aux paris sportifs. Je suis plutôt une experte de la plateforme en ligne et de la sécurité en ligne. Je dirais que, s’ils ont un appareil connecté, ils auront accès et pourront y accéder par divers comptes.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Monsieur Young, avez-vous quelque chose à ajouter sur la question des enfants?

[Traduction]

M. Young : Il ne faut pas oublier que les jeux de hasard chez les jeunes et les jeux de hasard en ligne ne sont pas nouveaux. Ce qui est nouveau, c’est l’énorme quantité de publicité que nous voyons. Autant de publicité stimule la participation. Cette participation existe aussi bien chez les jeunes que chez les personnes âgées.

L’autre chose importante en ce qui concerne les paris sportifs, c’est que les jeunes regardent les sports. Les jeunes adorent le sport, et nous voulons qu’ils aiment regarder les sports. Mais s’ils regardent des sports, ils seront exposés à la publicité.

L’environnement en ligne est difficile. Je pense qu’on pourrait réaliser de grands progrès en réduisant la quantité de publicité dans les jeux ou en interdisant les événements sportifs en direct.

On pourrait réaliser beaucoup de progrès en essayant simplement de contrôler un peu les choses, car, pour l’instant, les chiffres ne sont pas très bons.

La sénatrice Miville-Dechêne : Merci.

Le président : Avant de passer à la sénatrice Deacon, j’ai une question pour tous les membres du groupe. Depuis l’autorisation des paris sportifs en ligne, y a-t-il eu une augmentation de la dépendance au jeu? Avons-nous des statistiques à ce sujet? Avant la légalisation des paris sportifs en ligne, ces activités se déroulaient dans des ruelles sombres et, bien sûr, par l’intermédiaire de forces malveillantes et d’organisations criminelles qui en tiraient profit.

La légalisation des paris sportifs en ligne a-t-elle fait augmenter les niveaux de dépendance proprement dits?

M. Young : Les premiers chiffres dont nous disposons l’indiquent, oui. Comme je l’ai dit dans mon exposé, aucune organisation ne surveille systématiquement les préjudices liés au jeu au Canada. Nous sommes obligés de réaliser des études ponctuelles. Avant 2018, les taux de problèmes de jeu et de participation ont été assez stables au Canada, pendant 20 ans. En fait, entre 2002 et 2018, les taux ont diminué.

En 2018, les taux étaient d’environ 0,6 %, mais nous n’avons pas de chiffres nationaux pour l’instant. L’étude la plus récente dont nous disposons est un sondage en ligne que j’ai mentionné dans mon exposé, qui provient de Recherche en santé mentale Canada; ce n’est pas une étude épidémiologique formelle. L’organisation a constaté une augmentation de 7 %, et 7 %, c’est une augmentation de plus de 1 000 % des préjudices. Nous n’avons pas beaucoup plus de données que celles-là.

La seule autre chose est l’augmentation des appels aux lignes d’aide pour les problèmes de jeu, qui ont également augmenté de manière significative.

Les premiers indicateurs montrent que, oui, le nombre d’appels a augmenté jusqu’à présent. Dans quelle mesure? Nous n’en sommes pas sûrs, car personne ne fait le suivi et n’assure la surveillance qui sont si nécessaires pour comprendre le phénomène.

M. Simpson : J’aimerais proposer qu’on ne mette pas l’accent uniquement sur la dépendance. Les personnes qui subissent des préjudices viennent de tous les horizons en ce qui concerne le jeu. En fait, des études sur les jeux de hasard en milieu réel montrent que plus des deux tiers des préjudices touchent des joueurs non dépendants. Ce sont des gens qui dépensent plus que ce qu’ils peuvent se permettre et qui en subissent les conséquences sur le plan de la viabilité financière, des relations familiales, du travail, et cetera. Les deux tiers des préjudices touchent des joueurs non dépendants.

Je propose que nous mettions l’accent sur les préjudices et que nous établissions un principe selon lequel la réduction des préjudices imputables au jeu est l’objectif. Ce faisant, nous réduirons également le nombre de personnes dépendantes.

M. Young : J’aimerais ajouter quelque chose, également. En matière de politique sur les drogues, nous avons ce qu’on appelle la courbe en U. Lorsque les drogues sont interdites et que nous avons une prohibition extrême, nous constatons une augmentation des préjudices. Cela est principalement dû à l’offre de drogues toxiques, nous le savons tous.

Nous savons également que, dans la courbe, il y a l’autre aspect, qui est la commercialisation. C’est pourquoi, lorsque nous effectuons des études de coûts, la substance la plus coûteuse au Canada est l’alcool, car elle est très largement consommée. Lorsque le Canada a légalisé le cannabis, le cadre réglementaire a utilisé ce modèle parce qu’il voulait une réglementation appropriée. Il voulait permettre aux gens d’y avoir accès, mais pas les encourager à en consommer. C’est pourquoi la promotion du cannabis est soumise à des lignes directrices strictes.

M. Dijkema : M. Young a utilisé l’analogie appropriée. La meilleure analogie est non pas le projet de loi C-11 et le projet de loi à l’étude, mais la publicité sur les cigarettes, le cannabis et tout cela. Voilà le genre de discussion que nous devons avoir.

En ce qui concerne la nature des préjudices causés, nous avons réalisé des études sur les joueurs et la manière dont cela fonctionne. C’est indéniable, et les données probantes sont claires : le jeu est régressif, en ce sens que les personnes pauvres ou les plus vulnérables dépensent un pourcentage beaucoup plus élevé de leur revenu pour le jeu. Par conséquent, cela fonctionne comme un impôt régressif et un impôt que le gouvernement utilise souvent au lieu d’une répartition plus juste de l’impôt.

Nous savons également avec certitude, grâce aux données probantes, que les machines de jeux électroniques, qui vous permettent de récupérer vos pertes et de passer rapidement d’un jeu à l’autre, causent la plus forte dépendance. C’est exactement ce qui se passe avec les paris sportifs, les paris progressifs sur une partie unique et les paris pendant la partie. D’après les données probantes, ce sont ces machines qui sont les plus susceptibles de créer une dépendance à long terme, même si je suis d’accord avec M. Simpson.

Le président : Ma prochaine question... et je crois avoir entendu la sénatrice Simons dire plus tôt que le gouvernement ne peut pas réglementer les publicités diffusées sur les téléphones cellulaires. Ai-je bien entendu...

La sénatrice Simons : J’ai dit que je ne savais pas comment on pouvait les réglementer. Je voulais que quelqu’un essaie de m’expliquer comment cela fonctionnerait.

Le président : À ce sujet, je crois savoir que nous avons depuis des années un registre de numéros de télécommunication exclus au Canada. Nous avons un registre des courriels de marketing non sollicités au Canada. C’est une loi qui est en vigueur dans notre pays depuis plus d’une décennie. Je ne sais donc pas si nos témoins la connaissent, et pourquoi cette loi ne serait pas utile dans ce cas-ci pour aider à freiner une partie de cette activité.

Je ne sais pas si vous connaissez cette loi, mais je sais qu’il existe un registre des appels non sollicités et un registre des courriels non sollicités. Bien sûr, il faudrait s’inscrire pour cela, mais si vous savez que vous souffrez d’une dépendance, ce serait aussi un outil qui permettrait de signaler à ces plateformes : « Il y a un pare-feu, veuillez ne pas me solliciter. »

Je ne sais pas si quelqu’un le sait ou veut faire des commentaires. Sinon, pas de problème; je peux, ainsi que nos recherchistes, faire une analyse à ce sujet.

M. Dijkema : Dans notre article, l’une des recommandations que nous avons approfondies était de créer un lieu unique, où les personnes qui ressentaient une dépendance ou estimaient qu’elles dépensaient trop pourraient elles-mêmes s’empêcher d’accéder à ces plateformes en se désignant et en s’identifiant. Pour l’instant, elles ne peuvent pas le faire, car il s’agit de toute une série de plateformes. Si vous êtes dépendant ou que vous voulez récupérer vos pertes ailleurs, vous pouvez vous inscrire sur huit ou neuf plateformes différentes.

Nous avons donc recommandé un lieu central où vous pouvez vous exclure, pour ainsi dire, de ces plateformes.

En ce qui concerne la nature des courriels — je ne sais pas si c’est possible avec les algorithmes, peut-être que oui... Les publicités arrivent sur les téléphones, défilent ou passent par les applications et l’utilisation d’Internet, que ce soit Google ou ailleurs.

Le président : Merci.

La sénatrice M. Deacon : Merci à tous nos invités d’être ici aujourd’hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.

Ma première question... c’était une étude intéressante de Cardus. Monsieur Dijkema, elle concerne les données démographiques. Vous venez de commencer à en parler, mais je voulais m’assurer que j’ai bien compris, aux fins du compte rendu.

Dans le cadre de vos recherches, avez-vous découvert d’où provient la majeure partie de l’argent du jeu en Ontario? Est-ce que c’est généralement égal dans tous les niveaux de revenu? Vous avez commencé à parler du lien que vous constatez dans les données démographiques entre le revenu des ménages, les personnes vulnérables et le risque de problèmes de jeu. Pouvez‑vous nous en dire un peu plus à ce sujet, s’il vous plaît?

M. Dijkema : Oui, bien sûr. Merci de votre question, madame la sénatrice.

Malheureusement, nous n’avons pas ces données sur les paris sportifs en tant que tels, individuellement. Comme M. Young l’a mentionné, nous n’avons pas d’organisme central qui effectue cette étude.

Cependant, lorsque nous avons examiné le jeu en général avec la Société des loteries et des jeux de l’Ontario, nous avons constaté une différence importante dans les données démographiques. Les plus pauvres — j’essaie simplement de trouver le chiffre exact ici — du quintile le plus élevé ne consacraient que 0,24 % de leurs revenus après impôts au jeu, tandis que ceux du quintile le plus bas y consacraient 0,7 % de leurs revenus. Il s’agissait donc d’une énorme disparité de revenus.

Cela semble être l’inverse absolu de notre code fiscal, qui est progressif. Si vous regardez les graphiques, c’est l’inverse. Les pauvres dépensent plus.

Je suis d’accord avec M. Simpson pour dire que ce ne sont pas seulement les joueurs compulsifs qui subissent des préjudices. Une grande partie des revenus globaux récoltés par la Société des loteries et des jeux de l’Ontario — et on pourrait donc supposer par les grandes entreprises aussi, si cela est vrai pour les paris sportifs — proviennent des joueurs compulsifs. C’est donc également problématique.

La sénatrice M. Deacon : Pour ce qui est de la nécessité d’avoir des données communes à un endroit central, absolument. Comme vous le savez, nous avons un peu plus de données maintenant qu’il y a six mois. À titre de rappel, il y a, dans ce projet de loi, trois demandes, et la deuxième recommandation — la troisième — vise à appuyer cette initiative pour bien comprendre la situation à l’échelle du pays et promouvoir un soutien intergouvernemental.

Ma prochaine question s’adresse à Mme Hayes. Je parraine le projet de loi, et vous avez dit qu’il est très important que le ministre du Patrimoine soit inclus dans le projet de loi, et c’est le cas. Vous avez tout à fait raison. Je me réjouis de savoir que, à ce stade-ci, on est de cet avis.

Mais je veux vous poser une question qui concerne la publicité en ligne. Nous avons entendu dire que cela pourrait vouloir dire que, étant donné que nous ne pouvons réglementer la nature des publicités en ligne, un cadre ne vaudrait peut-être pas la peine d’être envisagé à cet égard, surtout que nous cherchons à protéger les enfants et les jeunes et que ce sont eux qui sont principalement en ligne. Mais nous pouvons envisager un modèle basé sur le Code de la publicité radiodiffusée en faveur de boissons alcoolisées du CRTC. Il ne s’applique pas à l’espace virtuel, mais à ce que je sache, les médias sociaux ne sont pas remplis de publicités de boissons alcoolisées qui ne respectent pas ce code, où des célébrités vous disent qu’une boisson vous rendra plus attirant, pour donner un exemple extrême. C’est un exemple extrême.

Selon ce que je comprends, le code du CRTC est en réalité un code pour les publicités d’alcool en ligne. Ne serait-il pas juste de présumer que les entreprises légitimes de jeu, qui se sont enregistrées au Canada pour mener légalement leurs activités, respecteraient toute directive du CRTC comme le font les entreprises d’alcool?

Mme Hayes : En toute franchise, cela dépasse mon domaine d’expertise. Mais je dirais que le fait de s’assurer qu’aucun contenu n’est accessible aux enfants, comme une publicité qui pourrait être diffusée par une entreprise de paris sportifs — il pourrait s’agir de contenu diffusé par un influenceur ou de toute autre forme de contenu en ligne qui concerne les paris sportifs — pourrait et devrait être examinée dans le cadre. Donc, même s’il existe du contenu qui n’est pas nécessairement une publicité explicite achetée sur Google, sur Meta ou sur certains autres réseaux sociaux pour annoncer explicitement une plateforme ou une application de paris sportifs, cela ne change rien au fait que les jeunes ont accès à du contenu qui pourrait tout de même les encourager à télécharger une application ou à consulter un site Web où ils peuvent continuer à s’adonner à ce genre de jeux en ligne.

M. Simpson : D’un autre point de vue, il faut tenir compte de la protection des consommateurs, des choses que l’on peut et que l’on ne peut faire dans le cadre de la publicité. Si on diffuse de la publicité destinée directement à des consommateurs ou à des personnes qui adoptent d’une façon ou d’une autre un comportement nocif, cela pourrait relever de ce domaine d’expertise.

Ensuite, Statistique Canada a conservé des données nationales sur les jeux de hasard jusqu’à ce que son financement soit retiré en 2011; donc, réinjecter ce financement serait peut-être une option à envisager.

La sénatrice M. Deacon : Merci beaucoup. Je vais poser une question à M. Young, si vous le voulez bien.

L’Ontario — je crois que c’était à la fin de février ou au printemps — a tout récemment interdit la participation d’athlètes à des publicités. Malgré cela, des athlètes comme Connor McDavid, pour ne donner qu’un exemple, participent encore à des publicités pour des entreprises de paris sportifs à condition que ces publicités incluent des messages qui encouragent d’une façon ou d’une autre le jeu responsable.

À mon avis, c’est un peu comme une échappatoire. Il demeure le porte-parole d’une entreprise en particulier dans ce cas-ci, et je me demandais ce que vous pensiez de tout ce processus de publicité, voire de manipulation psychologique.

M. Young : Il s’agit quand même d’annonces publicitaires, donc le message que retiennent les jeunes ou toute autre personne qui voient ces publicités, c’est le jeu et la célébrité, qui leur dit de jouer de façon responsable. Pour être honnête, il est important de souligner toute cette idée de jeu responsable. Lorsque cette idée a été initialement proposée, il y a longtemps, il était également question de la responsabilité des entreprises de jeu, mais il est maintenant question de la responsabilité individuelle.

L’un des problèmes, c’est que cela peut être très stigmatisant, parce que si vous n’êtes pas responsable, alors vous êtes irresponsable. Par ailleurs, il s’agit d’une approche très commode que de se dire que l’on peut vous inonder de publicités et de possibilités de jouer. C’est maintenant à vous de le faire de manière responsable, et tout va bien aller.

Cette solution présente de multiples couches de problèmes.

La sénatrice M. Deacon : Merci beaucoup.

La sénatrice Clement : Merci à la marraine. Je soutiens ce projet de loi, et je crois comprendre que tous nos témoins disent qu’ils le soutiennent et souhaiteraient qu’il aille plus loin. Je comprends les limites.

J’ai eu à discuter avec un jeune homme en tant que partie prenante. J’avais besoin de lui parler parce qu’il détenait l’expertise en technologie. C’était il y a quelque temps. Nous nous rencontrions en ligne, et la conversation l’a amené à révéler sa dépendance au jeu. Il était très jeune. C’était surprenant de voir à quel point il était vulnérable et dévasté et qu’il en parlait néanmoins à une étrangère. Ça semblait être un appel à l’aide, et je n’étais pas certaine de ce que je devais faire.

Je veux revenir sur ce que vous avez dit au sujet des données, monsieur Young. Vous avez parlé de la nécessité de disposer de plus de données. Qui recueillerait ces données? Qui financerait la recherche dont nous avons de toute évidence besoin pour aller de l’avant, afin de prouver aux gens que nous devons dépenser plus d’argent pour le traitement? Qui coordonnerait cela? Que faut-il? J’aimerais que vous vous penchiez un peu là-dessus.

M. Young : C’est une excellente question. Tout d’abord, il faut une tierce partie impartiale, comme Statistique Canada, un autre organisme de la santé publique du Canada ou un groupe quelconque digne de confiance.

Pour ce qui est du financement, il se pourrait, comme il a été proposé ici, qu’une proportion des recettes soit versée à une entité qui peut effectuer ce travail. Par ailleurs, pour bien effectuer ce type de contrôle et de surveillance, il nous faut plus que des enquêtes par autodéclaration, ce qui est habituellement fait, mais nous voulons communiquer avec des coroners pour savoir combien de suicides avaient peut-être un lien avec le jeu, combien de faillites avaient peut-être un lien avec le jeu, et il est même question de dissolution de relations; il y a d’autres types de problèmes, comme la demande de traitements.

Nous procédons ainsi à l’égard d’autres substances. Nous procédons ainsi à l’égard des opioïdes : nous examinons les décès causés par les opioïdes. Il existe un modèle pour la procédure à suivre. C’est simplement que nous ne faisons pas ce travail en ce qui concerne le jeu.

En raison des nombreux conflits d’intérêts qui surviennent quelque part dans l’industrie du jeu, il arrive souvent que les sondages qui examinent la prévalence des préjudices liés au jeu soient effectués par les mêmes entités qui offrent également des possibilités de jeu aux Canadiens. C’est loin d’être l’idéal.

La sénatrice Clement : Je m’adresse au représentant de Cardus; je voudrais apporter une lueur d’espoir. Vous avez dit que certains messages fonctionnent, et d’autres, non. Comment savez-vous qu’ils fonctionnent? Avez-vous des preuves qu’ils fonctionnent, et comment recueillez-vous ces preuves? Je parle des données. Comment pouvons-nous prouver aux gens que nous devons examiner la situation plus en profondeur?

M. Dijkema : Il y a des études. Notre mémoire portait sur des études qui ont été effectuées concernant l’efficacité des messages sur le jeu responsable, et ce que nous savons au sujet de ce qui ne fonctionne pas, c’est ce qui préoccupait la sénatrice Deacon : Connor McDavid, qui est un héros du hockey, envoie un message du type — apprenez à connaître vos limites. Les études ont montré que certaines choses fonctionnent et se sont avérées efficaces. Habituellement, les messages les plus efficaces sont clairement des appels à l’action et visent à faire bien comprendre les conséquences. Plutôt que de faire allusion à la préoccupation de M. Young quant au fait de dire, eh bien, est-ce que je suis responsable en faisant cela, il pourrait s’agir d’un message objectif, du genre, si vous dépensez autant d’argent, vous avez sans doute un problème. Si vous en dépensez encore plus, vous devriez vous arrêter cette fois-ci.

Il y a une foule d’études, dont, je crois, le comité a une copie, qui montrent ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas, et, selon notre troisième recommandation, si nous ne pouvons faire tout cela, nous pouvons au moins les obliger à faire des publicités sur le jeu responsable ou à reconnaître les préjudices, comme c’est le cas pour les cigarettes. Lorsqu’on regarde un paquet de cigarettes, on y voit les conséquences; les photos dégoûtantes de tumeurs de la langue et ainsi de suite. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions faire de même à cet égard. Il s’agit simplement de faits objectifs, et la science sociale nous montre que les gens qui s’adonnent aux jeux de hasard réagissent plus à ce genre de messages.

J’appuie également le commentaire de M. Young. La Canadian Gaming Association vous dira, lorsqu’elle viendra témoigner devant le comité en octobre, qu’il y a un immense marché noir. En réalité, ces données probantes ne sont pas fiables. Nous avons des documents qui montrent que les chiffres ont été inventés. Ce que nous voulons dire, c’est que, si le marché noir est si grand et qu’il y avait une justification stratégique à la légalisation des paris sportifs, aucune publicité ne serait nécessaire, et s’ils veulent faire de la publicité, ils doivent au moins payer pour la recherche afin que nous puissions, en tant que Canadiens, comprendre les préjudices liés au jeu et prendre les mesures nécessaires pour atténuer et inverser ces préjudices.

La sénatrice Clement : Une dernière chose, qui n’a aucun lien : madame Hayes, vous allez publier un livre sur le vote en ligne pour les municipalités de l’Ontario. J’ai bien hâte. Merci.

Mme Hayes : Merci.

La sénatrice Dasko : Je remercie tout le monde d’être ici. J’aimerais commencer par M. Young. Vous avez parlé des chiffres que vous avez en ce qui concerne l’augmentation du recours et de la dépendance au jeu. Les gens s’adonnent davantage aux jeux de hasard; 7 % des Canadiens ont des problèmes de jeu. Ce chiffre est plus élevé que celui que vous avez donné. Vous avez présenté beaucoup de statistiques. J’aimerais connaître votre opinion sur le projet de loi. Le projet de loi va-t-il contribuer à une réduction des problèmes que vous avez mentionnés? Va-t-il réduire la prévalence du jeu ou les problèmes de jeu? Le projet de loi aura-t-il une incidence sur les problèmes précis que vous avez mentionnés? Si c’est le cas, comment cela va-t-il se passer? Comment le projet de loi va-t-il résoudre les problèmes que vous avez mentionnés?

M. Young : Merci. Je crois qu’il le permettra. Je crois qu’il permettra de contrer une situation hors de contrôle. Nous présentons ces changements liés aux politiques, et je ne suis pas certain de ce qu’étaient les objectifs des politiques, et si l’un d’entre eux était lié à la santé publique. Ce n’est pas clair, en Ontario et à l’échelle nationale. Faire quelque chose pour contrôler la situation est une bonne chose. Je suis chercheur; je ne suis pas un avocat ni un analyste des politiques. L’analyse n’est pas ma spécialité, et je ne sais pas comment les choses vont se dérouler exactement. Mais endiguer le problème de jeux ou élaborer un cadre national pour réglementer la publicité sur les jeux, envisager de faire de la recherche, comprendre les répercussions du jeu sur les Canadiens sont toutes des choses qui sont véritablement importantes pour que l’on puisse se pencher sur un enjeu sur lequel personne ne semble se pencher à l’heure actuelle. Un jour, nous allons nous retrouver face à une multitude de préjudices et de données faisant état de préjudices, et nous ne pourrons pas nécessairement établir un lien avec les jeux de hasard, mais il se peut que ce soit lié aux jeux de hasard.

Je crois que ce projet de loi est important si on veut essayer de commencer à s’attaquer à la situation.

La sénatrice Dasko : En ce qui concerne la réduction de la prévalence du jeu, comment cela va-t-il se passer?

M. Young : S’il y a une réduction des publicités sur le jeu, cela réduira le nombre de personnes qui s’adonnent au jeu, au fil du temps, ce qui entraînera une réduction du nombre de personnes qui subissent des préjudices.

Nous savons que les préjudices qui touchent une population sont directement proportionnels à la fréquence du recours au jeu dans une population, comme c’est le cas pour l’alcool, le cannabis et les produits dangereux. C’est ainsi que les choses se passent essentiellement.

La sénatrice Dasko : Donc, le projet de loi réduirait la quantité de publicités?

M. Young : Là, ce n’est plus dans mon champ d’expertise. Je crois que oui, mais je ne suis pas avocat ni analyste des politiques. Du point de vue de la recherche, c’est l’hypothèse. Si le projet de loi réduit la quantité de publicités, il devrait diminuer la participation aux jeux de hasard et les préjudices.

M. Dijkema : Nous avons des preuves. Si je peux me permettre, à la note de bas de page 43, de notre article, on cite une analyse systématique de la littérature sur les liens entre les publicités et les politiques en matière de publicité et les préjudices liés aux jeux de hasard. Encore une fois, j’en fais part au comité, mais les études disent toutes qu’il y a un lien de causalité très clair entre les préjudices et la quantité de publicités. Plus il y a de publicités, plus le risque de préjudice est grand et plus la publicité est susceptible d’être liée à des préjudices.

C’est une énorme étude systématique. Il y a également dans le Journal of Behavioural Addictions une étude qui appuie ces conclusions; le phénomène est donc relativement bien documenté dans la littérature.

La sénatrice Dasko : [Difficultés techniques] ... mènera à la réduction du nombre de publicités?

M. Dijkema : Si le projet de loi imposait des restrictions sur les publicités ou faisait ce que nous recommandons, c’est-à-dire de ne plus les permettre, cela réduirait les préjudices, et nous en serions très heureux.

La sénatrice Dasko : Monsieur Dijkema, j’aimerais en savoir plus sur les messages de prévention concernant les jeux de hasard. Vous avez parlé de l’étiquetage des produits du tabac, des images sordides, tout cela. Les messages de prévention ne se limitaient pas à cela. C’était les publicités télévisées elles‑mêmes, qui étaient d’ailleurs très visibles il y a une dizaine d’années lorsque les messages de prévention commençaient à être plus nombreux.

Qu’est-ce qui serait comparable aux messages percutants figurant sur l’emballage? Y aurait-il quelque chose de semblable?

Je souhaite également souligner que les publicités préventives ont été commandées par les gouvernements. Ce sont eux qui l’ont fait. Ce n’était pas l’industrie. Personne d’autre ne l’avait demandé. C’est bel et bien les gouvernements qui les ont commandées. Ils ont exigé la modification de l’étiquetage des produits du tabac et ont diffusé des publicités sur les dangers du tabac. Je me demandais si vous pouviez m’en dire un peu plus sur les messages qui seraient diffusés.

M. Dijkema : Encore une fois, je m’appuie sur les études pour le démontrer. Des études ont été effectuées sur ce qui est susceptible de modifier le comportement des gens. Vous pouvez diffuser des messages et, bien sûr, certains sont ignorés et d’autres sont plus efficaces. C’est pourquoi on paie des entreprises de marketing, et c’est pourquoi il se fait des recherches en sciences sociales sur le sujet.

Les recherches montrent que les publicités qui exposent clairement les conséquences d’un acte précis, ou qui emploient un langage clair pour parler des limites seront vraisemblablement plus efficaces. Encore une fois, je vais m’en prendre à la plateforme de OLG, parce que je viens de l’Ontario et que notre étude portait principalement sur les paris sportifs en Ontario. Le langage que OLG utilise est très vague. Ce sont des messages du genre : « Dépasser ses limites, ce n’est plus du jeu. » La responsabilité est mise sur les épaules du consommateur, même s’il serait beaucoup plus utile de diffuser un message objectif disant que, par exemple, des études canadiennes montrent que, si vous dépensez plus de 1 % de votre revenu, vous risquez 4,7 fois plus d’être victime de violence familiale, de divorcer ou quelque chose du genre.

Ces chiffres sont réels. Les données canadiennes les appuient. C’est le type de publicité qui doit être diffusé, plutôt que des messages vagues. Une personne qui dépense plus de 1 % de son revenu, selon le revenu moyen des ménages en Ontario, dépensera plus de 89 $ par mois sur les paris sportifs. Elle risque d’être exposée à tous les préjudices de la liste. Si elle dépense 233 $, si je ne me trompe pas, le risque triple.

Nous savons que des préjudices sont causés. Si vous voulez des publicités qui transmettent efficacement le message de rester responsable, c’est le meilleur moyen de le faire.

La sénatrice Dasko : Merci.

Le sénateur Klyne : Madame Hayes, premièrement, j’ai une question d’ordre général à vous poser : est-ce que la Convention relative aux droits de l’enfant et l’observation générale numéro 25 sur les droits de l’enfant sont une entité que l’on peut consulter ou demander à consulter? Ou, est-ce que cela ressemble à...

Mme Hayes : C’est certainement quelque chose que vous pouvez consulter. Je serais enchantée de la donner au comité. Plusieurs organisations de la société civile ont également fourni un contexte supplémentaire et ont commenté ces deux documents. Je peux les transmettre au comité.

Le sénateur Klyne : Ce serait apprécié. Merci.

Je suis très intéressé, et enchanté de savoir que vous portez une attention particulière aux répercussions des pratiques en matière de publicité et de la facilité d’accès aux plateformes de jeux de hasard en ligne sur le bien-être numérique des jeunes utilisateurs d’Internet. Je suis d’accord avec votre position.

Vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire une statistique qui provenait du Centre de toxicomanie et de santé mentale, selon laquelle le pourcentage d’étudiants de 12 à 18 ans qui ont joué à des jeux de hasard et d’argent en ligne a bondi, passant de 4 % en 2019 à 15 % en 2021, et cette tendance à la hausse se maintiendra si des mesures de protection nationales ne sont pas mises en place.

Je souhaite que nous, les membres du comité et moi-même, nous penchions sur les mesures de protection nationales.

Vous avez également fait trois suggestions pour améliorer l’approche du projet de loi. L’une de ces suggestions est d’inclure explicitement la ministre de Patrimoine canadien, et les parrains du projet de loi ont applaudi cette suggestion. Vous avez également suggéré de régler, ou du moins, de reconnaître dans le cadre national, les problèmes de gouvernance globaux des plateformes. Pour finir, vous avez dit que nous devons renforcer le volet du projet de loi, qui porte sur la protection des jeunes.

Avez-vous songé à inclure le Conseil du jeu responsable ou la Canadian Gaming Association, qui rassemble tous les casinos, y compris ceux qui offrent des paris en ligne sur un seul événement sportif? Cela inclut des entités comme la Saskatchewan Indian Gaming Authority, qui détient les droits sur les paris sur un seul événement sportif en Saskatchewan, seulement pour les résidents de la province. Bien évidemment, il y a une façon d’éviter des fuites à l’extérieur de la province.

Cela remonte à l’époque où trop d’argent fuyait vers les casinos de Vegas, de l’Alberta et, plus loin à l’ouest, de la Colombie-Britannique, mais nous avons érigé un mur central, ici. Avez-vous envisagé de les inclure?

Maintenant que vous me dites qu’il existe une entité, allez‑vous également inclure la Convention relative aux droits de l’enfant et l’Observation générale numéro 25 sur les droits de l’enfant? Je suis ravi de constater que vous pensez qu’une stratégie nationale doit inclure une réglementation plus robuste, des consultations obligatoires et un programme de sécurité en ligne pour assurer le mieux possible la protection des jeunes sur le Web. Il y a deux ou trois questions qui se cachent sous cela, mais ma seule question est de savoir si vous avez envisagé ces autres entités, le Conseil du jeu responsable, la Canadian Gaming Association et la Convention relative aux droits de l’enfant. Est‑ce que cela améliorerait le projet de loi?

Mme Hayes : Je crois fermement que le fait de consulter le plus de parties prenantes possible renforcera le projet de loi. Une partie de mes travaux, tant au centre que dans mes propres recherches universitaires, concerne la participation politique et l’engagement public des parties prenantes, y compris, premièrement, l’engagement des parties prenantes et les consultations obligatoires avec toutes les parties concernées. Cela renforcera sans aucun doute le cadre et le projet de loi lui‑même.

Vous pourriez également inclure les jeunes. Les jeunes, comme nous l’avons entendu plus tôt, admettent leur dépendance aux jeux de hasard et déclarent leurs autres interactions sur les plateformes de jeu. Ils auraient probablement beaucoup de bonnes choses à dire sur la façon dont s’est développée leur dépendance ou dont ils en sont venus à interagir avec les plateformes de paris sportifs en ligne.

En règle générale, il est absolument nécessaire de tenir les sociétés responsables de la manière dont elles donnent aux gens l’accès aux plateformes de paris sportifs. Cela inclut, bien évidemment, ici, comme je l’ai mentionné pour l’Observation générale des Nations unies, tout organisme qui a un lien avec les droits de l’enfant et la protection des enfants en ligne, y compris des organismes comme 5rights, Children and Screens, Fairplay et le Centre pour les médias, la technologie et la démocratie. Ils peuvent témoigner des répercussions de l’environnement numérique sur les jeunes.

La sénatrice Julie Miville-Dechêne (vice-présidente) occupe le fauteuil.

La vice-présidente : Sur ce, nous n’avons plus de temps. Je vous remercie de vos commentaires. À vrai dire, j’ai été grandement perturbée par vos observations. C’est troublant et, en tant qu’êtres humains, nous ne pouvons pas rester indifférents. C’est un autre préjudice en ligne qui s’ajoute, et il y en a beaucoup trop. C’est tout simplement incroyable.

Le sénateur Leo Housakos (président) occupe le fauteuil.

Le président : Honorables sénatrices et sénateurs, je tiens à rappeler au public qui nous écoute avec grand intérêt que nous sommes le Comité sénatorial permanent des transports et des communications.

Dans le deuxième groupe de témoin, ce soir, le comité accueille en personne M. Kevin Desjardins, président de l’Association canadienne des radiodiffuseurs; et Mme Shelley White, cheffe de la direction du Conseil du jeu responsable, par vidéoconférence. Nous vous souhaitons la bienvenue. Merci d’être avec nous ce soir. Nous commencerons par écouter vos remarques préliminaires, pour cinq minutes à la fois. Nous commencerons par M. Desjardins, puis ce sera à Mme White, et il y aura ensuite une période de questions et réponses avec mes collègues.

Monsieur Desjardins, allez-y.

Kevin Desjardins, président, Association canadienne des radiodiffuseurs : Je remercie monsieur le président et les membres du comité de me donner l’occasion de comparer devant vous ce soir. C’est un grand plaisir de retrouver le comité. J’ai peut-être tiqué de l’œil lorsqu’on a mentionné le projet de loi C-11, mais ce n’est pas grave; j’espère que ce sera mieux cette fois-ci.

Je suis enchanté d’être de retour parmi vous. Je représente les plus de 700 stations et services membres de l’Association canadienne des radiodiffuseurs. Nous sommes ravis d’avoir l’occasion de vous faire part de certaines informations sur l’évolution du phénomène relativement récent des publicités sur les paris sportifs et sur ce qu’ont fait les membres de notre association pour s’engager de façon responsable.

Pour commencer, il est important de se rappeler la raison pour laquelle les paris sur un seul événement sportif ont été légalisés au Canada. La réglementation du marché des paris sportifs permet de réduire considérablement les marchés gris et noirs et de rehausser la protection des joueurs. Cela a permis de sortir cette activité de l’ombre où les malfaiteurs pouvaient exploiter les Canadiens. La publicité joue un rôle clé en encourageant les Canadiens à délaisser les marchés du jeu gris et noirs en faveur des paris sportifs légaux et réglementés.

Par ailleurs, les radiodiffuseurs ont une longue histoire de publicité responsable. Nos membres savent qu’ils ont la responsabilité de s’assurer d’agir dans ce nouveau marché de manière consciencieuse et de respecter le cadre réglementaire normalisé exhaustif qui encadre le marché. Nos membres ne diffusent pas de publicités sur les paris sportifs pendant les émissions destinées majoritairement aux mineurs, et ils ne font aucun appel à l’action comme « pariez maintenant » dans les publicités diffusées ou les messages commandités. Toutes les publicités sont autorisées par thinktv et respectent donc les lignes directrices sur la publicité adoptées par la Commission des alcools et des jeux de l’Ontario et ils continueront de le faire dans les marchés futurs.

Nous savons que, au-delà des exigences de la Commission des alcools et des jeux de l’Ontario, certains de nos membres ont défini des limites internes et volontaires sur le nombre de publicités sur les jeux de hasard qu’ils acceptent par heure de diffusion. Nous reconnaissons les inquiétudes liées à la quantité de publicités sur les paris sportifs soulevées au moment de l’introduction de la légalisation, mais il demeure important de reconnaître qu’il s’agit d’une industrie émergente et que les nouveaux intervenants cherchent à s’établir. De plus, dans le nouveau système bien réglementé de l’Ontario, les services de paris sportifs n’ont pas le droit de proposer des incitatifs promotionnels aux nouveaux clients, comme ils le font déjà dans d’autres marchés, en particulier aux États-Unis. Donc, ils se concentrent plutôt sur la promotion de leur marque.

Cela rappelle d’un certain côté les publicités à l’ère de la bulle Internet. Un nouveau marché qui a émergé de nulle part, qui semblait omniprésent, mais qui s’est normalisé au fil du temps. Ce que nous avons observé en matière de publicité ces deux dernières années n’est pas représentatif de ce que nous anticipons. Nos membres nous ont déjà dit qu’ils avaient remarqué que les entreprises demandent moins de temps de publicité.

De plus, les premières recherches montrent que, même si la sensibilisation aux paris sportifs augmente, le nombre de joueurs actifs reste à un niveau historique, ce qui signifie que l’effet principal des publicités est d’inciter les joueurs à quitter les marchés gris et noir pour aller dans le marché réglementé.

Pour ce qui est du projet de loi proposé, l’Association canadienne des radiodiffuseurs croit qu’il empiète prématurément et inutilement sur les travaux des organismes de réglementation provinciaux. Comme nous le savons, au Canada, bien des choses qui commencent dans l’optimisme se terminent dans le fédéralisme. Les multiples couches de cadre réglementaire sur les paris sportifs créeront de la confusion et empêcheront les organismes de réglementation provinciaux d’apporter les changements qu’ils jugent nécessaires, selon l’évolution du marché dans leurs provinces.

En effet, on voit que d’autres provinces, en plus de l’Ontario, proposent des paris sportifs légaux en ligne. Nous pensons que la meilleure approche est de permettre aux autorités provinciales de travailler ensemble et d’apprendre les unes des autres, plutôt que de leur imposer un cadre réglementaire.

Enfin, j’aimerais encourager le Sénat à ne pas prendre de mesures à cet égard, en faisant une politique publique, pour relancer la discussion sur la légalisation. On a déjà discuté et débattu des avantages de la légalisation des paris sportifs et de la création d’un marché réglementé. Ce marché nouvellement réglementé nécessite un régime de publicité responsable qui met l’accent sur la dissimulation ou l’interdiction des risques, qui annuleraient les avantages du marché légal de la publicité.

Merci, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président : Merci, monsieur.

Je donne la parole à Mme White.

Shelley White, cheffe de la direction, Conseil du jeu responsable : Bonsoir, honorables sénatrices et sénateurs.

Au nom du Conseil du jeu responsable, j’aimerais vous remercier de m’avoir invitée à vous présenter notre point de vue sur le projet de loi S-269.

Ce soir, je vous parle depuis le Portugal, où je prononce une allocution dans le cadre d’une conférence de l’industrie du jeu qui porte sur le jeu responsable, sur le croisement entre les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance et le jeu responsable, ainsi que sur la façon dont cette industrie peut renforcer son engagement à l’égard de la responsabilité sociale.

Depuis plus de 40 ans, le Conseil du jeu responsable est un organisme canadien de bienfaisance sans but lucratif dont l’objectif est de prévenir les méfaits liés au jeu et d’en réduire les conséquences. Nous le faisons tous azimuts et travaillons avec tous les intervenants clés qui ont une influence dans le domaine. Nous travaillons avec des entreprises et avec les consommateurs. Nous travaillons avec l’industrie pour lui donner accès aux recherches, à la formation, à l’accréditation et à un leadership éclairé, et nous travaillons avec le public pour lui donner accès à des services de prévention, d’éducation et d’information et à divers programmes pour nous assurer qu’il a les informations nécessaires pour comprendre les risques et les éviter.

Le Canada est considéré comme un chef de file en matière de jeu responsable, et nous sommes fiers d’en faire partie. Depuis 2019, le Conseil du jeu responsable a travaillé en collaboration avec le gouvernement de l’Ontario, la Commission des alcools et des jeux de l’Ontario et Jeux en ligne Ontario sur des politiques et des stratégies de protection des consommateurs, qui ont mené à l’élargissement du marché réglementé.

Nous travaillons actuellement avec d’autres provinces du Canada, comme l’Alberta, sur des régimes de protection des consommateurs, car les provinces cherchent à élargir la réglementation sur leurs marchés.

Depuis l’arrivée des paris sur une seule épreuve sportive et l’expansion des paris en ligne réglementés en Ontario, comme nous le savons, nous avons tous observé une augmentation de la publicité sur les jeux de hasard, dans toutes les formes de médias, de la télévision aux panneaux d’affichage en passant par la radio, les médias sociaux et la publicité en ligne. Les recherches sur les conséquences directes du marketing et de la publicité sur les jeux de hasard ont montré que l’exposition accrue à ces publicités peut normaliser les jeux de hasard, tout en nuisant à la compréhension du risque général qui y est associé.

Ces études ont montré non seulement que l’exposition à la publicité normalise les jeux de hasard, mais aussi qu’elle peut accroître la probabilité des comportements de jeu et, par ricochet, entraîner des préjudices possibles liés au jeu.

Nous savons que certaines populations sont plus sensibles que d’autres aux préjudices liés au jeu, y compris les jeunes, les jeunes adultes et certaines populations à risque, comme les personnes ayant déjà des problèmes de santé mentale. Les jeunes et les jeunes adultes sont exposés à un risque accru de préjudices liés au jeu. On a montré que leur participation aux jeux de hasard augmente généralement pendant l’adolescence et atteint son maximum au début de l’âge adulte, quand les risques des préjudices liés au jeu sont également accrus. Les jeunes et les jeunes adultes sont également plus sensibles aux incitatifs financiers et aux biais cognitifs, ce qui peut entraîner des préjudices accrus liés au jeu. La réglementation du marketing et de la publicité sur les jeux de hasard est particulièrement préoccupante en raison des conséquences qu’elle peut avoir sur les personnes vulnérables, comme les jeunes et les jeunes adultes. C’est en pensant à ces personnes vulnérables que je m’adresse à vous aujourd’hui.

Le Conseil du jeu responsable pense qu’il est impératif d’élaborer des normes et des lignes directrices claires, fondées sur des données probantes en matière de marketing et de publicité, pour aider à réduire les effets de la publicité et des offres promotionnelles sur les personnes vulnérables. Nous pensons que la protection du consommateur est une priorité commune, et un cadre national solide favoriserait la collaboration et entre les gouvernements provinciaux, les organismes de réglementation, les exploitants, les ligues sportives et les autres parties prenantes et les aiderait à prendre des mesures. Chaque partie prenante doit jouer le rôle qui lui revient pour s’assurer que les garde-fous adéquats sont mis en place pour protéger ceux qui sont exposés à un risque accru de subir les préjudices du jeu.

Il faut s’assurer qu’un règlement est en place pour protéger les jeunes et les jeunes adultes contre le marketing et la publicité sur les jeux de hasard conçus pour plaire aux jeunes, comme le recours à des personnages sous licence, à des célébrités à et des influenceurs sur les médias sociaux.

Toutes les formes de marketing et de publicité sur les jeux de hasard doivent être incluses dans les lignes directrices. Il faut examiner les répercussions de la publicité numérique, du marketing social, du microciblage et des autres nouvelles plateformes. On doit s’assurer qu’il existe dans le cadre proposé des règles selon lesquelles les gens peuvent refuser facilement les courriels promotionnels et la collecte de données.

Afin d’offrir une protection supplémentaire aux populations les plus vulnérables, il faut imposer une limite d’âge pour restreindre l’accès aux mineurs. Les lignes directrices doivent être revues chaque année pour s’assurer qu’elles concordent avec les nouvelles formes de jeu et de publicité, et doivent être renforcées au besoin.

Les organismes de réglementation provinciaux doivent surveiller de près le marketing et la publicité des exploitants pour s’assurer qu’ils respectent le règlement, et doivent prendre des mesures lorsque le règlement n’est pas mis en œuvre.

Le président : Madame White, pourriez-vous terminer votre déclaration préliminaire? Nous n’avons pas beaucoup de temps, ce soir.

Mme White : Certainement. Les exploitants de sites de jeu doivent investir dans la recherche sur le jeu responsable, les évaluations, les campagnes de sensibilisation et de prévention destinées au public ainsi que dans la formation. Nous devons adopter une approche collaborative et holistique en matière de diffusion de l’information, de promotion de la recherche et d’amélioration continue des programmes de prévention.

Pour conclure, honorables sénatrices et sénateurs, un cadre solide pour l’élaboration de normes en matière de marketing et de publicité nous aidera à nous assurer que des mesures de protection adéquates sont en place et que les personnes vulnérables sont protégées. Merci beaucoup.

Le président : Merci.

La sénatrice Simons : Monsieur Desjardins, je suis contente de vous revoir. Je sais, moi aussi, à quel point il a été difficile pour les radiodiffuseurs canadiens de trouver des sources de revenus, ces dernières années. Je me demandais si vous pouviez nous donner une idée de l’importance de la publicité sur les jeux de hasard pour le résultat net de vos stations?

M. Desjardins : Je ne pourrai probablement pas vous donner un chiffre exact.

La sénatrice Simons : Je ne demande pas un montant.

M. Desjardins : La publicité sur les jeux de hasard a été une source de revenus importante pour les radiodiffuseurs à un moment où leurs coffres se vidaient dangereusement.

Aujourd’hui, les marchés de la publicité peuvent être cycliques, et comme je l’ai dit plus tôt, c’était lié à l’essor d’Internet, à un moment donné. Certaines choses reviennent, et elles sont cycliques. Je crois que nous en sommes à un moment très précis, à savoir la phase d’introduction de ce marché au Canada, et je pense que nous savons que le marché va se rétracter quelque peu, et nous voyons déjà des signes.

Il ne s’agit certainement pas d’un élément stratégique à long terme pour le secteur de la publicité, mais c’est un élément important pour le moment, surtout pour certains services.

La sénatrice Simons : D’une certaine façon, les jeunes ne passent pas beaucoup de temps à regarder la télévision traditionnelle. Pour être honnête, dans l’ensemble, ce sont les personnes de l’âge des sénatrices et des sénateurs qui regardent la publicité à la télévision.

Ce serait tellement plus simple de réglementer les radiodiffuseurs, car cela peut se faire dans le cadre du CRTC. Serait-il injuste d’imposer des restrictions à la publicité, alors qu’il est beaucoup plus difficile de réglementer et de limiter ce qui se passe en ligne?

M. Desjardins : Il y a déjà un certain nombre de cas où le gouvernement du Canada n’a pas pu réglementer les activités en ligne de la façon dont il réglemente les activités de radiodiffusion traditionnelles. Donc, s’engager dans quelque chose où on veut simplement supprimer la publicité pendant la Soirée du hockey, peu importe ce qui se passe en ligne... eh bien, ainsi soit-il. Je ne pense pas que ce soit une façon cohérente de procéder. Ce serait facile, mais je ne pense pas que ce serait nécessairement efficace.

La sénatrice Simons : Je me fais un peu l’avocate du diable, mais voici une question sur la logique du projet de loi. On a beaucoup entendu dire que cette publicité est dangereuse, mais personne n’a vraiment parlé de ce qui explique en grande partie ce phénomène, à savoir qu’elle est agaçante. Je pense que les gens ont été outrés par des choses comme les matchs de la finale de la Coupe Stanley. Je ne suis pas le marché cible. Je n’avais jamais vu ni entendu aucune de ces publicités avant que les Oilers d’Edmonton y participent. Il y avait alors ces publicités, et je me suis dit, ah! là là, non seulement c’est une triste politique publique, mais elles sont aussi tout à fait exaspérantes.

Dans quelle mesure pensez-vous que les réactions des gens à ces publicités tiennent non pas à leur position morale ou en matière de politique publique, mais simplement au fait qu’ils sont exaspérés par la répétition de ces publicités des plus pauvres?

M. Desjardins : Je ne suis pas sûr d’être d’accord avec tout ce qui a été dit, mais je dirais que, comme je l’ai souligné, c’est un nouveau marché. Il est très différent. On pourrait supprimer les publicités sur les camionnettes pendant six mois et les rediffuser ensuite à la même fréquence, et les gens diraient « mon Dieu, il y a tellement de publicités sur les camionnettes! » Le fait est qu’il s’agit d’une nouveauté, d’un petit choc pour les personnes qui n’ont pas l’habitude de voir ce genre de choses. Il y a quelques réactions à cet égard. Mais je ne pense pas que l’on puisse créer une politique publique pour ménager les sensibilités particulières de chacun.

La publicité est encore très importante. Ces quatre dernières années, nous avons eu de longues discussions sur l’importance du contenu canadien et de l’actualité canadienne.

La sénatrice Simons : En effet.

M. Desjardins : En effet, et ce n’est pas fini. Ce que je veux dire, c’est que la publicité est vitale pour tout cela.

La sénatrice Simons : Oui.

M. Desjardins : Et, si l’on continue de trouver des raisons d’interdire la publicité ou de la réglementer parce qu’elle heurte la sensibilité des gens, notre nation n’en sera que plus appauvrie, et on aura davantage de contenu provenant de l’étranger.

La sénatrice Simons : Merci beaucoup.

La sénatrice M. Deacon : Je vais essayer de poser trois petites questions, et j’y reviendrai. Monsieur Desjardins, merci d’être ici. L’Alberta a fait récemment part de son intention d’emboîter le pas à l’Ontario et d’autoriser les exploitants privés à entrer sur les marchés provinciaux, avec les publicités qui s’ensuivront inévitablement.

Quelle place les radiodiffuseurs prendront-ils dans l’espace publicitaire si le règlement sur la publicité de l’Alberta est différent du règlement de l’Ontario? Je sais que sur la câblodistribution de Bell, on peut en tout temps changer de fuseau horaire, ce qui permet aux téléspectateurs d’un bout à l’autre du pays de suivre des événements différents. Mais qu’en est-il des publicités sur les patinoires ou sur les maillots de la Ligue canadienne de football pour des exploitants de sites de jeux, quand on peut parier légalement dans une province, mais pas dans l’autre? Pouvez-vous les flouter selon la région? Qu’est-ce qui se passe?

M. Desjardins : Non, je ne pense pas que ce soit possible, pas plus que flouter ou interdire les publicités provenant des programmes américains.

Mais, pour commencer, je pense que la Commission des alcools et des jeux de l’Ontario a établi un bon ensemble de normes. Cela donnera une avance aux autres provinces qui arrivent en ligne. Au bout du compte, la publicité sera autorisée... et je crois que vous allez discuter avec quelqu’un de thinktv, dans les prochaines semaines. Ils pourront autoriser ces publicités d’une manière qui respecte ces règles.

La sénatrice M. Deacon : Compte tenu de cela, si on se dirige vers une situation où les provinces autorisent certains paris privés sur leur territoire, je pense à l’alcool. Nous avons une norme nationale en matière de publicité sur l’alcool. Ne serait-il pas utile pour les radiodiffuseurs qu’il y ait un seul ensemble de publicités sur les jeux de hasard d’un bout à l’autre du pays?

M. Desjardins : Le marché est encore en développement, et je pense qu’il relève encore de la compétence provinciale. Ce n’est peut-être pas la pire des idées que les provinces tirent parti de ce qu’une autre province a établi au moment de l’ouverture de ce marché, et qu’elles puissent peut-être améliorer les normes, par exemple. Il est encore trop tôt pour imposer une norme nationale, à ce stade.

La sénatrice M. Deacon : D’accord. Passons au dimanche soir. Je ne vous ai pas oubliée, madame White. Je vais vous revenir avec une question.

Je vais prendre l’exemple du dimanche soir pour parler des sports. En fin de semaine, il y avait un segment sur le football du dimanche soir de la Ligue nationale de football, et il est passé du flux de NBC au studio de TSN. Il y avait deux personnes, dont un ancien joueur, qui parlaient des cotes des paris par exemple sur le joueur qui fera le premier toucher; ce segment était commandité par Fan Duel, avec un logo qu’on ne pouvait certainement pas manquer. Ce logo avec cet affichage ne constituerait-il pas de la publicité, aussi flagrante soit-elle?

M. Desjardins : Je pense que c’est un contenu commandité. Donc oui, il ferait partie de ce programme. Je ne pense pas que ce soit différent de ce qui se fait dans d’autres États. C’est certainement quelque chose que vous verrez si vous regardez, disons, la transmission en direct des États-Unis d’un match de football collégial, par exemple, les samedis. Vous verrez ce genre de choses.

La sénatrice M. Deacon : Le contenu de TSN, en tant que radiodiffuseur national, pourrait compliquer les choses, mais pour le moment, ce n’est qu’en Ontario que l’on peut légalement parier avec FanDuel. Pourquoi cette plateforme devrait-elle être autorisée à faire de la publicité dans tout le pays, alors que d’autres administrations, peut-être de crainte que leurs populations développent une dépendance au jeu, ont choisi de ne pas ouvrir leurs marchés? Je sais que c’est trop tôt, et qu’on n’en est qu’au début, mais c’est important pour notre réflexion à long terme.

M. Desjardins : Je m’excuse, c’est tard pour moi, dans la soirée.

Le fait est que, si un habitant de l’une de ces autres provinces voit ce genre de publicité, il ne pourra quand même pas avoir accès à ces applications à moins d’être un résident de l’Ontario, où c’est la norme. Je comprends ce que vous dites. Au bout du compte, je sais que les gens ne peuvent pas avoir accès à ces applications s’ils ne sont pas des résidents de l’Ontario.

La sénatrice M. Deacon : Merci. Madame White, avec tout ce que vous avez entendu jusqu’ici, y a-t-il des commentaires que vous aimeriez ajouter sur des questions que nous n’avons pas abordées, mais qui ont trait à votre expérience?

Mme White : Bien sûr. Nous serions d’accord pour dire qu’il faut établir un meilleur équilibre en matière de publicité, par rapport à la situation actuelle. Il y a beaucoup trop de publicités, et elles sont à la fois agaçantes et potentiellement dangereuses pour les personnes vulnérables. Je pense qu’il faut certainement étudier cette question.

De plus, pour assurer ce meilleur équilibre, il faut s’assurer qu’il y a davantage de publicités sur le jeu responsable sur le marché. Nous avons en fait travaillé en collaboration avec thinktv, deux années d’affilée, pour créer des messages d’intérêt public qui sont des publicités sur le jeu responsable.

L’un des facteurs de différenciation à prendre en compte, c’est que les exploitants autorisés ont légalement le droit de faire de la publicité. L’un des avantages liés du fait que les exploitants autorisés peuvent faire de la publicité, c’est que le public saura lesquels sont autorisés, par rapport au marché noir des exploitants non autorisés, ce qui est un facteur de différenciation très important.

Pour ce qui est du cadre national, je dirais qu’il aurait l’avantage de fournir à chacune des provinces des lignes directrices cohérentes en matière de jeux de hasard, de marketing et de publicité.

La sénatrice M. Deacon : Merci.

Le sénateur Cardozo : Je remercie les deux témoins d’aujourd’hui. Selon moi, les arguments semblent indiquer que ce n’est pas encore le moment de mettre en place une réglementation, parce que c’est nouveau. D’un autre côté, puisque c’est nouveau, c’est le moment de mettre en place une réglementation; il faudrait commencer à réglementer maintenant plutôt que lorsque tout sera déjà en place.

Quant à la question générale de la publicité, il est possible de mettre en place un règlement fédéral de l’un des deux types, ou des deux types, axé sur la publicité. Madame White, je crois que vous parlez également d’un cadre qui s’appliquerait à d’autres formes de publicité.

À coup sûr, si chaque province met en place son règlement sur la publicité, et si c’est l’organisme de réglementation provincial des jeux de hasard qui le fait, on finira avec 10 ou 13 types de règlements différents. Étant donné que les médias sont nationaux — le contenu en ligne est certainement disponible à la fois au Canada et à l’étranger —, il se passera beaucoup de choses en même temps. Il me semble que, étant donné que nous entrons dans ce nouveau monde, ce serait le moment de mettre les choses en ordre plutôt que d’attendre plusieurs années pour voir ce qui se passera.

Je demanderais à M. Desjardins de commencer, puis j’aimerais que Mme White commente, s’il vous plaît.

M. Desjardins : Oui. Tout en reconnaissant la compétence des provinces dans ce domaine, je pense qu’il serait préférable que les provinces s’adressent au gouvernement fédéral, plutôt que ce soit le gouvernement fédéral qui leur impose quelque chose. Je pense que, du fait qu’elles y arrivent les unes après les autres, elles n’essaieront probablement pas de réinventer la roue à chaque fois, mais tenteront de la perfectionner, chaque fois qu’elles auront l’occasion de le faire.

En ce qui concerne le fait de devancer le marché avant même son ouverture dans les provinces, je ne suis pas sûr que cela soit nécessairement utile. Mais, encore une fois, on laissera les organismes de réglementation provinciaux faire ce travail de sensibilisation entre eux et potentiellement auprès du gouvernement fédéral.

Le sénateur Cardozo : Je n’ai jamais vu une personne avoir autant confiance en la synchronisation des provinces, mais ce n’est qu’un commentaire.

Madame White, qu’en pensez-vous?

Mme White : Compte tenu des recherches que j’ai citées plus tôt dans mes observations et des personnes vulnérables qui sont à risque, nous appuyons l’élaboration d’un cadre national. L’avantage, c’est qu’il pourrait fournir une orientation cohérente à chacune des provinces, au fur et à mesure qu’elles élaborent les normes réglementaires en matière de jeu, de marketing et de publicité, en gardant à l’esprit qu’il faut des normes pour assurer un jeu responsable.

Le sénateur Cardozo : Je peux concevoir que le gouvernement fédéral définisse les normes en matière de radiodiffusion, parce qu’elles relèvent de la compétence fédérale, mais je ne le vois pas dire aux autorités régissant les jeux de hasard dans tout le pays comment le faire.

Mme White : Oui, je comprends que les jeux de hasard relèvent des provinces, je pense donc que le fait de donner aux radiodiffuseurs ce cadre national fournirait certainement à chacune des provinces des lignes directrices utiles concernant les pratiques exemplaires en matière de jeux de hasard, de marketing et de publicité.

Le sénateur Cardozo : Ce serait pour les radiodiffuseurs, et vous ne voudriez pas réglementer ou essayer de réglementer tout ce qui se passe en ligne?

Mme White : Oh! non. J’ai dit dans ma déclaration qu’il serait important que le cadre s’applique à tous les canaux utilisés pour communiquer avec le public et les joueurs au sujet des jeux de hasard.

Le sénateur Cardozo : Merci.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Je vais vous poser ma question en français.

Madame White, puisque vous faites partie d’une association qui, je le comprends, surveille les radiodiffuseurs et ce qui se passe en ligne, et pour savoir un peu ce qui se passe dans l’industrie du pari sportif, quelle évaluation faites-vous des radiodiffuseurs que représente M. Desjardins en matière de publicité pour le pari sportif? Est-ce qu’à votre avis, ce qu’on voit à la télévision — moi, je ne regarde pas les sports, alors je ne peux pas juger — correspond à une quantité normale de publicité qui n’est pas dommageable? Est-ce qu’il y en a trop? Ou alors, est-ce qu’il ne devrait pas y en avoir pendant les matchs?

J’aimerais que vous me donniez votre évaluation, parce qu’on a eu l’évaluation de M. Desjardins, qui semble dire que vous suivez les règles, que cela se passe bien et que vous êtes responsables. Est-ce que vous pensez la même chose, madame White?

[Traduction]

Mme White : Madame la sénatrice, je ferai de mon mieux pour répondre à toutes vos questions. Il se peut que je ne le puisse pas.

Quand nous avons collaboré avec les intervenants de thinktv, nous avons constaté qu’ils comprennent les inquiétudes liées à l’augmentation du nombre de publicités, et les radiodiffuseurs ont pris quelques mesures, pour cette nouvelle saison des sports, pour réduire le nombre de publicités sur les jeux de hasard.

Ensuite, comme je l’ai dit, ils ont également investi et ils collaborent avec nous pour nous permettre de créer des publicités sur le jeu responsable, et ils nous ont réservé du temps pour diffuser ces publicités sur le jeu responsable, ce qui représente des millions de dollars de temps d’antenne, et nous en sommes très reconnaissants. Nous savons que ces publicités ont des répercussions, étant donné le nombre de commentaires et de rétroactions que nous recevons lorsque nous mesurons et évaluons la qualité de ces publicités.

La difficulté, c’est que nous avons 48 exploitants, en Ontario, et qu’ils se disputent tous les parts de marché. Nous savons, d’après ce qui se passe dans d’autres provinces où on a ouvert le marché en ligne, qu’il est courant qu’il y ait une augmentation du nombre de publicités. Il y a également une augmentation du nombre de personnes qui jouent en ligne. Cela finira par diminuer, au fil du temps, quand l’effet de nouveauté sera passé.

Cela dit, au Conseil du jeu responsable, nous croyons très fermement qu’il est extrêmement important, comme l’ont dit certains témoins du groupe précédent, de tenir compte des risques uniques que représentent les publicités sur les jeux de hasard pour les jeunes et les jeunes adultes et de prendre des mesures pour prévenir ces risques.

[Français]

La sénatrice Miville-Dechêne : Est-ce qu’il y a des radiodiffuseurs qui travaillent avec le Conseil du jeu responsable? Est-ce que vous mettez en ondes des publicités pour enjoindre les parieurs à être responsables? Oui, il y a de la publicité, mais est-ce qu’il y a autre chose? Ce qui se passe à Think TV se passe-t-il également chez d’autres radiodiffuseurs pour essayer de contrôler les préjudices?

M. Desjardins : Think TV est un organisme qui aide à évaluer la publicité pour dire si elle peut être mise à l’antenne ou non. Tout cela se fait vraiment à travers Think TV, dont mes membres font partie également. Je sais que c’est quelque chose sur quoi ils travaillent. Je ne sais pas exactement quelle est la proportion des publicités qui parlent de parier de façon responsable. Quand on entend dire qu’il y a plus d’appels qui sont faits à ces lignes d’aide, je crois que cela prouve que les gens sont plus à jour ou au fait sur les services ayant trait aux paris, mais ils connaissent aussi les ressources. Il y a plus de gens qui acceptent d’avoir recours à ces ressources. Avant, on n’entendait pas parler de ces ressources. Cela montre, d’une certaine manière, comment ces publicités peuvent être équilibrées.

[Traduction]

La sénatrice Dasko : Ma question s’adresse à M. Desjardins. Je suis heureuse de vous revoir.

Pensez-vous que ce projet de loi réduira le volume des publicités sur ce sujet, à savoir les paris sportifs? Pensez-vous vraiment qu’il permettra d’y parvenir?

M. Desjardins : Quand je vois le libellé du projet de loi, je me dis que c’est bien l’objectif du projet de loi : réduire et restreindre le volume des publicités sur les jeux de hasard. Je pense que, quoi que l’on dise d’autre à propos du cadre, c’est l’objectif final.

J’aimerais revenir en arrière et parler du cannabis. Le cannabis est revenu deux ou trois fois dans notre discussion, ici. Le régime des publicités sur le cannabis qui a découlé de la légalisation était très restrictif, et l’une des difficultés que nous avons rencontrées au cours des cinq dernières années, c’est qu’il n’y avait pas assez de gens qui quittaient le marché noir ou le marché gris du cannabis pour entrer sur le marché légitime. Je dirais que c’est en partie parce que la publicité joue un rôle, quand on veut que les gens quittent ces marchés et aillent sur le marché légitime, légal et réglementé.

Je dirais qu’il y a des gens qui utilisent la publicité comme un combat par procuration pour le recriminaliser le cannabis ou l’interdire de nouveau. Au bout du compte, rien ne montre que les résultats que les gens souhaiteraient atteindre seront atteints grâce au contrôle de la publicité.

La sénatrice Dasko : Les témoins précédents ont certainement dit qu’il existe une relation entre les publicités et la prévalence du jeu, cette relation existe donc. J’aimerais rester sur la question du cadre, un instant.

La question était la suivante : va-t-il limiter, restreindre ou réduire la publicité? Mais n’est-il pas possible — compte tenu de la compétence provinciale dans ce domaine, et puisqu’il faut consulter les provinces — que les provinces s’opposent et disent, nous voulons le faire à notre façon, et l’Ontario va élaborer son propre cadre, l’Alberta l’adoptera peut-être, et une autre province le prendra ou fera le sien, ce qu’elles peuvent faire puisqu’elles ont compétence dans ce domaine? Il n’est pas nécessaire d’avoir un règlement national identique. Cela pourrait être des mesures provinciales disparates, comme beaucoup d’autres choses le sont.

M. Desjardins : Et je pense que c’est pour cette raison que notre instinct nous dit que, d’autant plus qu’il s’agit d’un secteur en développement et d’une responsabilité provinciale, il faut laisser les provinces décider entre elles si elles veulent élaborer un cadre conjoint ou un cadre fédéral, plutôt qu’imposer quelque chose à l’échelon fédéral. Mais avoir plusieurs cadres superposés sèmerait la confusion et empêcherait les provinces d’être aussi efficaces qu’elles le voudraient pour refléter leurs propres normes communautaires.

La sénatrice Dasko : Selon vous, elles peuvent s’opposer, vrai ou faux?

M. Desjardins : Si on impose une norme fédérale, elle limiterait donc la capacité d’une province à s’opposer.

La sénatrice Dasko : Vrai. Le gouvernement fédéral pourrait donc imposer quelque chose?

M. Desjardins : Oui, potentiellement.

La sénatrice Dasko : Oui, d’accord. Merci.

Le président : J’aimerais remercier les témoins d’être venus, d’avoir répondu à nos questions et d’avoir contribué à notre étude.

(La séance est levée.)

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