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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 83

Le mercredi 8 octobre 2003
L'honorable Lucie Pépin, Président intérimaire


LE SÉNAT

Le mercredi 8 octobre 2003

La séance est ouverte à 13 h 30, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES FEMMES

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, octobre est le Mois de l'histoire des femmes. Cette année, le thème du mois, c'est «Quoi! Les femmes ne pouvaient voter?»

[Français]

Comme tout bon sénateur le sait déjà, le 18 octobre marque la Journée de la personne. C'est aussi l'occasion de souligner le jour où le Sénat est devenu l'instrument de reconnaissance entière des droits juridiques de la femme au Canada.

[Traduction]

Les femmes ont fait de grands progrès sur la scène publique depuis qu'elles ont obtenu le droit de vote. C'est aussi depuis ce moment que le Canada est devenu un modèle pour les autres sociétés, comme pays qui reconnaît le caractère inhérent et inaliénable des droits et libertés des femmes. Le fait que chaque citoyen du Canada tient pour acquise l'égalité des femmes et que cette égalité soit devenue chose normale pour les Canadiens prouve à quel point nos valeurs ont évolué dans le contexte plus vaste de l'histoire des femmes dans le monde.

[Français]

Aujourd'hui encore, le Sénat est un meneur dans la représentation des femmes dans notre législature. Dans l'autre Chambre, seulement 21 p. 100 des sièges sont occupés par des femmes alors qu'ici, au Sénat, 36 p. 100 des distingués membres sont des femmes.

[Traduction]

Dans tous nos partis politiques, les femmes doivent encore surmonter de nombreux obstacles pour entrer dans la vie publique. Tous les partis reconnaissent l'importance d'accroître la participation des femmes comme candidates. Nos valeurs nationales nous imposent de respecter, de saluer même la voix des femmes dans nos tribunaux et nos assemblées législatives aussi bien que dans chaque rue et chaque ménage de la nation.

Les femmes peuvent être fières des efforts qu'elles ont déployés dans le passé pour accéder à la pleine égalité, car ces efforts ont permis par la suite de confirmer les droits universels de tous les peuples. Nous avons appris que les différences que nous jugions jadis importantes sont en fait insignifiantes et que la paix et la prospérité ne viennent que lorsque les sociétés ouvrent les bras à tous leurs membres.

Honorables sénateurs, le Mois de l'histoire des femmes est le moment indiqué pour réfléchir aux moyens de mieux faire participer les femmes à l'édification de notre politique publique future. Nous saurons que nous avons réussi le jour où il ne sera plus nécessaire de calculer le pourcentage des femmes dans n'importe quel domaine et où nous tiendrons leur présence pour acquise.

LE DÉCÈS D'ISRAEL H. ASPER, O.C.

HOMMAGES

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, je rends aujourd'hui hommage à un visionnaire, en l'occurrence Israel Asper. En premier lieu, nous offrons nos condoléances les plus sincères et les plus profondes aux membres de sa famille. Nos pensées les accompagnent dans ce moment de deuil.

Hier après-midi, lorsque je suis revenu de déjeuner, la séance était déjà commencée et je suis entré juste au moment où le sénateur Carstairs rendait hommage à Izzy dont elle annonçait le décès. Il va sans dire que j'ai eu un choc en apprenant qu'il était décédé. Je crois que nous sommes encore sous le coup de l'émotion et que nous n'avons pas encore accepté la nouvelle. Il n'est tout simplement pas possible qu'il ait quitté ce monde. Malheureusement, c'est la réalité; l'indestructible Izzy nous a quittés.

Winnipeg vit un deuil profond suite au décès de ce personnage qui était véritablement un grand homme. Il est impossible de le remplacer. C'était un véritable original. Sa vision perdurera grâce à sa famille qui la poursuivra. Nous lui sommes tous reconnaissants, particulièrement à Winnipeg, de cette vision dont nous récolterons les fruits pendant bien des années encore. Néanmoins, Izzy tenait d'abord et avant tout à redonner à la collectivité, à son pays et, bien sûr, au monde, une partie de ce qu'il avait eu. Nous lui serons toujours infiniment reconnaissants de cette générosité.

Que Dieu vous bénisse, Izzy. Vous nous manquerez.

[Plus tard]

L'honorable Joyce Fairbairn: Honorables sénateurs, je ne voulais pas laisser passer la journée sans rendre hommage à Izzy Asper. On a beaucoup parlé partout au Canada, dans les médias et dans cette enceinte, des nombreuses qualités de M. Asper, de ses réalisations et de ses projets étonnants dans le monde des affaires, du journalisme, des communications, de la haute finance et de la politique.

Je débutais ma carrière de journaliste, dans les années 60, lorsque j'ai connu M. Asper. Hier, lorsque notre leader m'a dit, en entrant dans cette enceinte, qu'Izzy était décédé subitement, j'ai tout de suite pensé à la gaieté et à la bonté de cet homme exceptionnel, deux traits de caractère qui ne ressortent pas toujours des histoires et des souvenirs qu'on rapporte à son sujet.

Il est impossible de décrire tout ce qu'il a fait pour la ville de Winnipeg. Les efforts qu'il a faits en vue de susciter un sens de l'urgence, un sentiment de fierté et un dynamisme enthousiaste pour chaque région de l'Ouest canadien ne tomberont pas dans l'oubli.

M. Asper était aussi un époux et un père merveilleux. Il nous manquera.

[Français]

L'HONORABLE MARCEL PRUD'HOMME

FÉLICITATIONS POUR L'HONNEUR REÇU DE L'ASSOCIATION CANADIENNE LIBANAISE-SYRIENNE

L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, c'est avec grand plaisir et en toute amitié que je souhaite aujourd'hui rendre hommage à l'honorable sénateur Marcel Prud'homme, qui vient d'être honoré par l'Association canadienne libanaise-syrienne.

Dimanche dernier, notre collègue s'est vu décerner par cette association le 2003 Lifetime Achievement Award lors d'une réception au Château Vaudreuil. Deux raisons ont sans doute motivé l'octroi de ce prix: la longue et fructueuse carrière politique et la profonde et sincère amitié que le sénateur Prud'homme entretient à l'endroit des communautés syriennes et libanaises au Canada.

Je dois admettre que je connais Marcel Prud'homme depuis longtemps. Je ne risque pas d'être dans l'erreur si j'avance que notre collègue est un être passionné, animé d'une grande énergie et faisant preuve d'une détermination remarquable.

Il se lance à fond pour défendre les causes auxquelles il croit, au risque de faire sourciller au passage. Mais Marcel Prud'homme est de ceux qui vont au bout de ce qu'ils entreprennent, coûte que coûte.

En effet, il avait à peine 30 ans lorsqu'il a été élu député à la Chambre des communes, après avoir fait sa marque dans le militantisme étudiant. Avant son élection, il avait aussi occupé des responsabilités auprès de l'aile jeunesse du Parti libéral.

Élu lors d'une élection partielle en 1964, il est systématiquement réélu député de Saint-Denis de 1965 à 1988. Voilà un parcours enviable difficile à égaler en politique, vous en conviendrez.

En 1993, le premier ministre Mulroney lui propose de siéger au Sénat. Marcel Prud'homme accepte de continuer son travail parlementaire du côté de la Chambre haute, car il croit fermement à la nature bicamérale de notre Parlement et au travail de réflexion qui caractérise notre Chambre.

Durant sa longue carrière, le sénateur Prud'homme a toujours démontré un intérêt particulier pour les questions liées à la défense, à la sécurité et aux affaires étrangères. Il a aussi fait de nombreux voyages à travers le monde et a joué un rôle actif au sein des associations parlementaires.

Je tiens à offrir à l'honorable sénateur Prud'homme mes plus sincères félicitations pour le prix qu'il a reçu et qu'il mérite pleinement. J'invite mes collègues à se joindre à moi pour lui rendre hommage et reconnaître la qualité de son engagement.

[Traduction]

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, je tiens moi aussi à rendre hommage à mon collègue, qui siège ici à titre de sénateur indépendant, et qui a été nommé par le très honorable Brian Mulroney. J'assure tous les sénateurs ici présents que le fait d'être son voisin est une véritable source d'inspiration parce qu'il représente ce que doit être un vrai parlementaire. Il fait valoir tous les aspects d'une question, mais, lorsqu'il prend position, il a généralement raison. Il a soutenu nombre d'entre nous, lorsque nous débutions dans la carrière parlementaire. Lorsque je suis arrivé dans l'autre Chambre, il était assis dans la section d'en face, mais il n'a jamais hésité à faire part de son expérience et à offrir des conseils.

[Français]

Pour un Métis, ce n'est pas mal. Le travail de mon collègue Marcel Prud'homme est remarquable. Je le félicite et lui souhaite bonne chance.

(1340)

M. JEAN PEDNAULT

L'honorable Pierrette Ringuette: Honorables sénateurs, permettez-moi de souligner le 15e anniversaire de transplantation d'un cœur à un ami personnel et à un citoyen fort aimé et respecté par toute la population du Madawaska. En effet, le 17 octobre prochain, notre journaliste préféré, Jean Pednault, célébrera le 15e anniversaire de sa transplantation cardiaque à Ottawa. Il faut dire que notre ami, il y a 15 ans, a fait prier tout un groupe alors qu'il attendait un nouveau cœur.

Comme on dit souvent dans notre coin: le malheur des uns fait le bonheur des autres. Un jeune Torontois de 24 ans perd la vie dans un accident, mais la redonne à notre ami, une merveille de la science et de la santé. Je profite de cette occasion pour inciter tous les Canadiens et Canadiennes à signer leur carte de donneur.

Notre valeureux Jean Pednault, natif de la belle ville de Québec, est un fier Madawaskaien et Brayon d'adoption depuis plus de 34 ans. Sa carrière de journaliste lui a permis de connaître et de reconnaître les gens de notre milieu dans leur quotidien, ce qu'il a su nous transmettre dans ses nombreux articles et éditoriaux. Il a toujours manifesté un intérêt particulier pour les enjeux politiques de tous les partis et paliers de gouvernement, sans toutefois révéler ses intentions de vote. Étant libérale, je le considère comme un libéral alors que d'autres diront qu'il est apolitique. Chose certaine, ce journaliste a toujours su faire la division entre la politique et la partisanerie pure et simple.

En terminant, honorables sénateurs, je me joins à Jean — qui est aujourd'hui à Ottawa pour des examens médicaux annuels qu'il doit subir —, à son épouse Ruth, à ses enfants et à ses petits-enfants ainsi qu'à toute la population du Madawaska pour souligner le 15e anniversaire de sa transplantation cardiaque et lui souhaiter bien d'autres années avec ceux et celles qu'il aime de tout son cœur.

LA JOURNÉE INTERNATIONALE DES PERSONNES ÂGÉES

L'honorable Marisa Ferretti Barth: Honorables sénateurs, mercredi dernier fut la Journée internationale des personnes âgées. Cette journée, qui est célébrée actuellement à l'échelle mondiale le 1er octobre, vise à sensibiliser la population sur l'importance du rôle des personnes âgées et des avantages mutuels du respect et du soutien entre les générations.

Désigner une journée spéciale pour les personnes âgées, c'est non seulement reconnaître leur contribution au développement de notre société, mais c'est également attirer une attention particulière sur les phénomènes du vieillissement.

De nombreuses raisons militent en faveur de la célébration de cette journée du troisième âge. Elle permet tout d'abord d'informer la collectivité sur la place importante et sensible qu'occupent les personnes âgées dans notre vie et dans notre société.

Les personnes âgées sont la mémoire vivante de notre passé et nous permettent, par leurs récits et par leurs expériences, de découvrir notre histoire et de prendre conscience du développement colossal qu'a connu le Canada au cours des siècles derniers. Ceci nous aide grandement à préparer l'avenir des prochaines générations.

Honorables sénateurs, le troisième âge est loin d'être synonyme d'inaction. Au contraire, de nombreuses personnes âgées demeurent très actives à leur arrivée à l'âge de la retraite et elles accomplissent des choses formidables.

Plusieurs d'entre elles s'occupent d'un proche, de personnes âgées ou de malades. Elles développent aussi avec les enfants des relations privilégiées, faites d'indulgence et de patience, qui bien des fois apportent une aide précieuse à leurs parents. Ce sont, d'ailleurs, les personnes âgées qui s'impliquent le plus dans les activités bénévoles du quotidien.

Toutefois, vieillir apporte son lot d'inconvénients. Même si la qualité de vie et la santé des personnes âgées se sont grandement améliorées au cours des dernières années, plusieurs personnes âgées sont aux prises avec des problèmes sérieux de santé et vivent dans la solitude et l'isolement ou dans une extrême pauvreté. Cette journée nous permet de sensibiliser la population à ce phénomène afin que ces personnes ne soient pas oubliées.


(1350)

AFFAIRES COURANTES

PROJET DE LOI DE 2003 SUR LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

PREMIÈRE LECTURE

Son Honneur la Présidente intérimaire annonce qu'elle a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-17, Loi modifiant certaines lois fédérales et édictant des mesures de mise en œuvre de la convention sur les armes biologiques ou à toxines, en vue de renforcer la sécurité publique.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Robichaud, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la séance dans deux jours.)

[Traduction]

LANGUES OFFICIELLES

L'ÉTUDE SUR LA RADIODIFFUSION DE LANGUE FRANÇAISE DANS LES COMMUNAUTÉS DE MINORITÉS FRANCOPHONES—AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER
LE COMITÉ À REPORTER LA DATE DE DÉPÔT DE SON RAPPORT FINAL

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, je donne avis qu'à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que, nonobstant l'ordre du Sénat adopté le 29 avril 2003, la date de dépôt du rapport final du Comité sénatorial permanent des langues officielles sur les mesures à prendre pour favoriser la prestation et l'accès au plus large éventail possible de radiodiffusion de langue française dans les communautés de minorités francophones du Canada soit reportée du 22 octobre 2003 au 12 décembre 2003.

AFFAIRES SOCIALES, SCIENCES ET TECHNOLOGIE

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, je donne avis qu'à la prochaine séance du Sénat, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à siéger à 15 h 30, le mercredi 22 octobre 2003, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

[Français]

RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LA PROCÉDURE À ADOPTER AFIN DE DONNER SUITE AUX PÉTITIONS

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 9 octobre 2003, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement soit autorisé à examiner et à faire rapport, avant le 28 novembre 2003, sur la procédure que le Sénat doit adopter afin de donner suite aux pétitions déposées à la Chambre du Sénat.

AFFAIRES JURIDIQUES ET CONSTITUTIONNELLES

AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER L'ARTICLE 16 DE LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE 1867

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que, le jeudi 9 octobre 2003, je proposerai:

Que le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles soit autorisé à examiner et faire rapport, avant le 28 novembre 2003, sur la portée de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867, qui désigne la ville d'Ottawa comme étant le siège du gouvernement du Canada.

[Traduction]

LES LANGUES OFFICIELLES

LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA—PRÉSENTATION DE PÉTITIONS

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, conformément à l'alinéa 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer des pétitions signées par 2 000 personnes demandant qu'Ottawa, la capitale du Canada, soit reconnue officiellement comme ville bilingue et qu'elle reflète la dualité linguistique du pays.

Les pétitionnaires prient le Parlement du Canada de prendre en considération ce qui suit:

Attendu que la Constitution du Canada reconnaît que le français et l'anglais sont les deux langues officielles de notre pays et ont un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada;

Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;

Que les citoyens ont le droit dans la capitale nationale d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;

Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité linguistique et qui caractérise la nature même de notre pays;

Par conséquent, vos pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, soit déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 à 1982.


PÉRIODE DES QUESTIONS

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

LES ÉTATS-UNIS—L'EXPULSION D'UN CITOYEN CANADIEN EN SYRIE—LE RÔLE DU SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'aimerais revenir au cas de Maher Arar. Comme nous le savons tous, le solliciteur général a refusé d'ordonner la tenue d'une enquête sur le rôle joué par la GRC dans ce fiasco, même si M. Gar Pardy, un haut fonctionnaire des affaires étrangères respecté de tous, a affirmé que des hautes personnalités américaines, dont le secrétaire d'État Colin Powell, avaient laissé entendre que les États-Unis auraient obtenu les renseignements d'une source canadienne du milieu de la sécurité. De plus, le Globe and Mail a rapporté aujourd'hui que le gouvernement du Canada ne voulait pas d'une enquête dans le dossier Arar parce qu'il savait qu'il y avait des choses douteuses.

L'ancienne ministre libérale Diane Marleau a dit que la GRC avait peut-être menti à M. Easter. «Cela sent le pourri», a-t-elle dit. Madame le ministre pourrait-elle nous dire pourquoi le solliciteur général empêche la tenue d'une enquête dans cette affaire?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je l'ai dit hier et je le répéterai aujourd'hui. Ce dossier porte sur les opérations de la GRC et je n'en dirai pas plus.

Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, cette affaire jette certainement le discrédit sur nos institutions de police et de sécurité. La question que nous devrions nous poser est la suivante: ne devrions-nous pas savoir si l'un de nos services de sécurité ou de renseignement, notamment le Service canadien du renseignement de sécurité, SCRS, ou le Centre de la sécurité des télécommunications, aurait fourni des renseignements dans cette affaire? C'est une chose que le Parlement, voire les Canadiens, sont en droit de savoir, n'est- ce pas? Dans l'affirmative, madame le leader du gouvernement ne croit-elle pas que la tenue d'une enquête pourrait servir à dissiper un peu le doute dans cette affaire?

Le sénateur Carstairs: Comme le sénateur le sait, il existe des mécanismes d'examen tant au sein de la GRC que du SCRS. Ces mécanismes ont été mis en place par le Parlement. Ils servent à assurer que nos services de police et de sécurité font leur travail comme il se doit.

Le sénateur Di Nino: Madame le ministre convient-elle que nous devrions recommander la participation du Comité de surveillance des activités de renseignement à une telle enquête?

Le sénateur Carstairs: Le comité de révision du SCRS est chargé en permanence de voir à ce que ce service assume ses responsabilités de façon appropriée.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Les honorables sénateurs se rappelleront que, lorsque le Parlement, y compris cette Chambre, a adopté le projet de loi instituant le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, le comité se composait d'un groupe de Canadiens triés sur le volet. En effet, ils ont tous été assermentés comme membres du Conseil privé pour plusieurs raisons, y compris le fait qu'ils seraient visés par la Loi sur les secrets officiels. Les sénateurs se rappelleront que le Parlement a constitué le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité parce que le Parlement avait conféré au SCRS des pouvoirs qui abrogeaient les droits des Canadiens.

Nous sommes sur la tribune publique dans le cas qui nous occupe, et il faut se demander si les droits d'un citoyen canadien ont été bafoués avec la collaboration de hauts fonctionnaires canadiens. Par conséquent, au lieu de demeurer passif en ce qui concerne les responsabilités du Comité de surveillance des activités de renseignements de sécurité, le gouvernement ne demandera-t-il pas à ce comité de déterminer si le SCRS a enfreint indûment les droits de M. Arar?

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, le comité de surveillance, qui se compose de personnes distinguées d'un peu partout au Canada, y compris d'un ancien premier ministre du Manitoba, mènera ses activités comme bon lui semblera.

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, quelle différence y a-t-il entre rendre public le fait que l'ancien premier ministre Mulroney faisait l'objet d'une enquête de la Gendarmerie royale du Canada — et le gouvernement n'a pas découragé la publicité concernant cette enquête — et ne pas admettre ou nier qu'une enquête semblable, sur des opérations, a peut-être lieu ou non dans le cas que le sénateur Di Nino a soulevé?

(1400)

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, il ne convient pas que le gouvernement du Canada décourage ou encourage les activités de la GRC.

Le sénateur Lynch-Staunton: Pourquoi est-il dans l'intérêt du Parti libéral de s'enorgueillir d'une enquête qui n'a conduit nulle part et pour laquelle il doit encore présenter des excuses, tout en refusant de reconnaître qu'une enquête plus importante pourrait ou non être en cours?

Le sénateur Carstairs: L'honorable sénateur ne peut trouver un seul membre du Cabinet qui s'est réjoui de ce qui arrivait à l'ancien très honorable premier ministre, et ce n'est certes pas mon cas.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, je renvoie le leader du gouvernement à la transcription de la conférence de presse qui a été donnée conjointement par la GRC et MM. Herb Gray et Allan Rock, qui siégeaient au Cabinet à ce moment-là, et durant laquelle ils ont accepté le règlement à l'amiable avec M. Mulroney. En même temps, cependant, M. Rock — et je prendrai garde à mon interprétation de son expression — a déclaré, sans en être attristé, que l'enquête de la GRC se poursuivait.

Le sénateur Carstairs: Contrairement à l'interprétation que l'honorable sénateur fait de l'affirmation voulant que l'enquête se poursuivait, je ne pense pas que quiconque se soit réjoui de cela.

Le sénateur Lynch-Staunton: Qu'on s'en soit réjoui ou non, l'important c'est qu'à l'époque, le gouvernement a reconnu publiquement qu'une enquête de la GRC de nature opérationnelle était en cours. Dans le cas présent, une enquête semblable de nature opérationnelle est-elle en cours? Pourquoi reconnaître des faits dans un cas et les nier dans l'autre?

Le sénateur Carstairs: J'ai signalé au début de cette série de questions que je ne commenterais pas les activités opérationnelles et les politiques connexes de la GRC et je n'en ferai rien.

LA SANTÉ

LE RAPPORT DU COMITÉ CONSULTATIF NATIONAL SUR LE SRAS ET LA SANTÉ PUBLIQUE

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Hier, le Comité consultatif national sur le SRAS et la santé publique, dirigé par le docteur David Naylor, a rendu public un rapport intitulé Leçons de la crise du SRAS. Il critique durement la façon dont la crise a été gérée en affirmant que cette gestion était marquée par un manque de leadership ou de collaboration entre les autorités sanitaires fédérales et provinciales et un manque de financement et de main-d'oeuvre, qui était attribuable aux compressions dans le domaine de la santé publique.

Le rapport soutient que Santé Canada a été largement absent sur les premières lignes. L'affirmation la plus grave du rapport est que, malgré les événements survenus, le Canada demeure mal préparé à affronter une autre crise. Quelles mesures le gouvernement fédéral compte-t-il prendre, en collaboration avec ses partenaires provinciaux et territoriaux, pour assurer une intervention plus efficace, et en temps opportun, en cas de toute éventuelle urgence publique nationale dans le domaine de la santé?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, l'honorable Anne McLellan, ministre de la Santé, a indiqué qu'il était essentiel de donner suite très rapidement au rapport du Dr Naylor. Elle a accepté les recommandations. Il est bien évident que tous les paliers de gouvernement voudront les étudier plus en détail.

Les gouvernements fédéral et provinciaux, et espérons que c'est le cas dans toute les provinces, sont d'avis que nous ne pouvons admettre un manque de communication comme celui qu'a relevé le Dr Naylor.

LES URGENCES PUBLIQUES NATIONALES DANS LE DOMAINE DE LA SANTÉ—LES RECOMMANDATIONS D'UN RAPPORT ANTÉRIEUR

L'honorable Wilbert J. Keon: Honorables sénateurs, le Dr Naylor a déclaré que la plupart des recommandations présentées dans le rapport avaient déjà été présentées dans un rapport commandé par le gouvernement fédéral il y a près de dix ans. La Déclaration du Lac Tremblant, publiée en 1994, recommandait d'accélérer le transfert d'informations entre les autorités de la santé fédérales et provinciales, d'améliorer le contrôle des maladies, de fixer des priorités et d'élaborer des modalités de préparation en vue des prochaines menaces, d'améliorer les communications concernant la santé publique durant les crises et de former des partenariats entre les gouvernements et les organismes de santé publique. Madame le leader du gouvernement au Sénat pourrait-elle nous dire pourquoi les recommandations de ce rapport antérieur n'ont jamais été mises en application?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Pour la simple raison, selon moi, que personne ne croyait qu'il y avait urgence en la matière. Puisque nous avons maintenant vécu la flambée de SRAS, ce qui a attiré l'attention de tous sur la situation de la santé publique dans ce pays, je crois que la réaction sera maintenant appropriée.

LES ANCIENS COMBATTANTS

LE PROGRAMME POUR L'AUTONOMIE DES ANCIENS COMBATTANTS—L'ADMISSIBILITÉ DES VEUVES

L'honorable Michael A. Meighen: Honorables sénateurs, je suis convaincu que vous avez tous été aussi heureux que moi d'apprendre que le premier ministre avait décidé de revoir la décision qui, arbitrairement, a privé 23 000 veuves d'anciens combattants des prestations du Programme pour l'autonomie des anciens combattants. D'après les informations des médias, un haut fonctionnaire aurait confirmé que ces veuves maintenant exclues du programme pourraient bientôt obtenir de l'aide. Elles ont été exclues sans raison autre que celle qu'elles ne touchaient pas ces prestations au moment où il a été décidé de les prolonger la vie durant.

Les veuves qui touchaient ces prestations en vertu de l'ancien programme d'un an étaient les seules admissibles à ce prolongement. Il a été décidé en mai dernier que si les prestations de veuve prévues par l'ancien programme se terminaient en avril dans un cas et en juin dans l'autre, les prestations étaient accordées dans le premier cas, mais non dans le deuxième.

Ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat, qui semble avoir été très réceptive lorsque j'ai soulevé la question la première fois et dont l'éloquence a certainement provoqué un revirement dans les cercles gouvernementaux. Peut- elle nous dire ce qu'on entend par «bientôt»? Peut-elle préciser la date où ces veuves non admissibles pourraient obtenir de l'aide? À défaut, peut-elle expliquer pourquoi le gouvernement répugne tant à fixer une date?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le montant en cause est beaucoup plus élevé qu'on ne l'avait envisagé au départ, mais je peux confirmer qu'on étudie la question de près en ce moment.

Je profite de l'occasion pour répondre à une question que l'honorable sénateur a posée la semaine dernière au sujet des couronnes. On m'informe que chaque bureau de sénateur sera contacté. Si des sénateurs souhaitent obtenir une couronne à placer devant un cénotaphe dans leur localité, ils pourront l'obtenir.

Le sénateur Meighen: Je remercie l'honorable leader de cette information.

Honorables sénateurs, j'ai remarqué que le leader du gouvernement au Sénat était incapable de préciser ce qu'on voulait dire par «bientôt». J'ai bon espoir qu'elle pourra nous le dire le plus tôt possible, avant la fin de la session j'espère.

L'ENVIRONNEMENT

LE RAPPORT DE LA COMMISSAIRE À L'ENVIRONNEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT DURABLE

L'honorable W. David Angus: Honorables sénateurs, pour la deuxième fois en deux ans, j'interviens au sujet d'une question soulevée dans le rapport de la commissaire à l'environnement et au développement durable. En effet, dans le rapport qu'elle a présenté cette semaine, la commissaire à l'environnement et au développement durable du Canada, Johanne Gélinas, exprime sa préoccupation devant l'écart criant entre les engagements du gouvernement fédéral en matière d'environnement et les mesures qu'il prend pour les respecter. En réalité, elle utilise un terme particulier pour qualifier le bilan du gouvernement en matière d'environnement. En effet, elle dit que le gouvernement a accumulé un déficit environnemental et elle précise ce qui suit:

Les bonnes intentions ne suffisent pas. S'engager en faveur de l'environnement et du développement durable est important, mais respecter les engagements annoncés l'est encore davantage.

Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire ce que le gouvernement entend faire au sujet de ce déficit environnemental?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, parmi les gestes posés par le gouvernement, et dont nous sommes d'ailleurs très fiers, il y a la signature du Protocole de Kyoto et la mise en place d'un plan qui permettra au Canada d'atteindre les objectifs prévus. Des contributions précises ont été apportées. À titre d'exemple, des fonds nouveaux de l'ordre de 7 millions de dollars ont été affectés sur les cinq prochaines années à un programme national et coordonné en matière scientifique dans le but d'améliorer notre compréhension de la présence environnementale. Nous avons commencé à affecter des montants substantiels à l'environnement dans le dernier budget.

Est-ce suffisant pour répondre à tous les désirs de la commissaire? Non, et c'est bien parce qu'elle continuera à nous talonner, si vous me passez l'expression, pour que nous fassions meilleur accueil à ses rapports.

LA SANTÉ

LE RAPPORT DE LA COMMISSAIRE À L'ENVIRONNEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT DURABLE—LE RÉGIME D'EXAMEN DES PESTICIDES

L'honorable W. David Angus: Honorables sénateurs, j'aimerais faire un suivi au sujet d'un problème particulièrement grave sur ce qu'elle a qualifié de faiblesses de la gestion des pesticides par le gouvernement.

(1410)

Bien que ce soit la quatrième fois depuis 1998 que la commissaire soulève le problème des faiblesses présentées par le régime fédéral de gestion des pesticides, elle se dit perturbée que le gouvernement ne soit toujours pas en mesure de veiller à ce que les pesticides anciens utilisés au Canada soient sûrs. Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous expliquer pourquoi il en est ainsi?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le problème que posent malheureusement de nombreux pesticides, c'est qu'ils n'étaient pas soumis à des évaluations avant 1994. Ces évaluations se déroulent graduellement. Il ne sert à rien de nier que l'examen de certains de ces pesticides n'avance toujours pas vite; c'est une réalité. La commissaire nous a justement adressé un reproche à ce sujet. Une mesure législative adoptée en 2002 prévoit des effectifs supplémentaires pour cet organisme de réglementation particulier. J'espère que nous trouverons dans les prochains rapports une note favorable précisant que nous progressons davantage que nous ne l'avons fait jusqu'à maintenant.

Le sénateur Angus: Honorables sénateurs, dans le chapitre sur les pesticides, la commissaire mentionne plusieurs fois la gestion de l'information. Elle rappelle notamment que le gouvernement a promis, en 1994, de créer une base de données sur l'utilisation des pesticides afin de mieux cibler les activités de recherche, de surveillance et d'assurance de la conformité. Hélas, la banque de données n'est pas encore opérationnelle. Madame le leader du gouvernement au Sénat peut-elle nous dire quand ou même si la base de données sera créée?

Le sénateur Carstairs: Selon les renseignements qui m'ont été fournis, grâce aux sommes prévues dans le dernier budget et à l'adoption de la loi, nous serons en mesure de créer et d'exploiter cette banque de données. Je ne sais pas exactement quand tout cela se fera, mais j'espère que ce sera le plus tôt possible.

LA DÉFENSE NATIONALE

L'AFGHANISTAN—LE DÉCÈS DE DEUX SOLDATS—LA CONVENANCE DES VÉHICULES NON BLINDÉS—LA DÉMISSION DU MINISTRE

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, hier, en réponse à des questions que je lui posais au sujet des véhicules qu'utilisent les Forces canadiennes en Afghanistan, madame le leader du gouvernement a répondu ce qui figure à la page 2021 de nos débats:

Honorables sénateurs, les militaires estiment qu'ils disposent maintenant de matériel sûr et adéquat.

N'oublions pas, en réfléchissant à cette réponse, que le général Cameron Ross, directeur général des opérations de maintien de la paix, a démissionné à la perspective de la mission du Canada en Afghanistan et en raison d'autres questions relatives à la sécurité et à la convenance du matériel, que nos alliés américains nous avaient prévenus de ne pas participer à cette mission avec du matériel inadéquat, que ces véhicules seront bientôt remplacés par Dieu sait quoi et que le gouvernement du Canada vient d'ordonner, paraît-il, à ses troupes de ne pas utiliser les véhicules utilitaires légers tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de certaines lignes de démarcation dans ce pays.

Comme le ministre de la Défense nationale s'est clairement engagé à démissionner si le matériel et l'équipement envoyés aux troupes canadiennes n'étaient pas adéquats, cela m'amène à poser à madame le leader du gouvernement au Sénat la question suivante: le ministre de la Défense nationale a-t-il démissionné ou a-t-il discuté de cette possibilité avec le premier ministre?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il n'a pas offert sa démission et il n'avait pas à le faire. Comme vous le savez, les décisions concernant la façon de mener l'opération sont prises par les officiers sur le terrain. Ils disposent d'un certain nombre de choix. Lorsqu'ils ont envisagé, hier, la possibilité que ce soit un attentat terroriste — ils ne sont pas arrivés à cette conclusion, mais croient que ce pourrait être le cas —, ils ont commencé à prendre des précautions supplémentaires. Je pense que nous devons faire confiance aux officiers responsables de la mission de Kaboul car eux, mais surtout les soldats, font de l'excellent travail.

L'AFGHANISTAN—LA MORT DE DEUX SOLDATS—LA PRÉSENCE DU MINISTRE ET DU CHEF D'ÉTAT-MAJOR DE LA DÉFENSE AUX FUNÉRAILLES

L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, madame le ministre peut-elle nous dire si toute cette question a un rapport avec la situation extrêmement regrettable et, à mon avis, sans précédent, où de hauts gradés des forces armées directement concernés ont demandé que le chef d'état-major de la Défense et le ministre de la Défense nationale n'assistent pas au service funèbre d'hier?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Absolument pas. Comme les honorables sénateurs le savent maintenant, le premier ministre du Canada et le ministre de la Défense se trouvaient à Petawawa lorsque les dépouilles des deux soldats ont été ramenées au Canada et qu'on leur a rendu tous les honneurs militaires. Si le ministre de la Défense et le chef d'état-major de la Défense n'ont pas assisté aux funérailles, hier, c'est parce qu'on a demandé que ce soit une cérémonie familiale et communautaire. On n'a pas voulu en faire un événement médiatique, mais un événement familial. Le ministre de la Défense a respecté cette demande et n'a pas assisté aux funérailles.

L'AFGHANISTAN—LA MORT DE DEUX SOLDATS—LA FIABILITÉ DES VÉHICULES BLINDÉS

L'honorable Gerry St. Germain: Ma question s'adresse également au leader du gouvernement et porte sur le même sujet. Le véhicule dans lequel les deux militaires ont perdu la vie, l'Iltis, sera apparemment remplacé, selon le ministre de la Défense nationale, par un véhicule de marque Mercedes. Le ministre a clairement déclaré que les véhicules utilisés étaient inadéquats et qu'ils seraient immédiatement retirés du service. Je l'ai entendu dire à la télévision. Pourquoi le ministre exposerait-il la vie du personnel dans des véhicules inadéquats? Je crois savoir que les Mercedes ne sont pas tellement meilleurs.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Le ministre de la Défense n'a jamais dit que ce véhicule était inadéquat.

Le sénateur St. Germain: Il a certainement laissé entendre que le véhicule était inadéquat dans les circonstances; on demande pourtant à nos soldats de risquer leur vie. Le sénateur Forrestall a clairement interrogé le ministre à ce sujet. Je déteste penser cela, mais je crois honnêtement qu'il y a un rapport entre cela et le fait que le ministre de la Défense nationale et le chef d'état-major de la Défense ont été priés de ne pas assister aux funérailles. J'en suis certain. J'ai passé une semaine avec les militaires, et je sais à quel point le budget pour le matériel est insuffisant et je sais ce que l'on demande à ces gens-là de faire. Je crois que c'est le premier indice selon lequel nos militaires et leur famille de partout au Canada ont de sérieuses réserves. Ils nous disent: «Nous allons faire le travail. Nous nous sommes portés volontaires pour le faire, mais nous devons avoir du matériel adéquat pour faire notre travail. Nous n'en avons pas et on nous demande de nous acquitter de fonctions qui mettent injustement notre vie en danger.»

Le sénateur Carstairs: Honorables sénateurs, les soldats canadiens ne sont jamais envoyés sur le terrain sans matériel adéquat. Ils ont du matériel adéquat et varié. C'est aux commandants qu'il appartient de déterminer quelle pièce de matériel ils utiliseront à tel ou tel moment.

Le sénateur St. Germain: Lors de la guerre au Kosovo, honorables sénateurs, nos forces aériennes ont dû utiliser des batteries des forces aériennes espagnoles pour faire démarrer nos avions. Qu'on nous épargne les âneries selon lesquelles nos militaires disposent de matériel adéquat. Ce n'est pas le cas. J'ai passé une semaine à Greenwood, en Nouvelle-Écosse. Nos militaires là-bas ont dû louer des avions civils parce que le matériel ne leur permet pas de s'acquitter des fonctions qu'ils sont censés exécuter. C'est une honte.

Le sénateur Carstairs: L'honorable sénateur fait erreur.

(1420)

LES FONDS POUR LA MARINE

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. La frégate Toronto doit partir pour le golfe Persique en février prochain. Depuis le 11 septembre 2001, près de 95 p. 100 des marins canadiens ont participé à la guerre contre le terrorisme. Ils sont maintenant près du point de rupture. Ils sont épuisés, vidés. D'après les rapports, les déploiements ont établi qu'à part les problèmes de dotation, il manque de pièces de rechange pour maintenir la flotte en mer. La Marine a dû prendre des pièces dans des navires qui rentraient pour équiper les navires en partance.

Est-ce que l'honorable sénateur peut nous dire si le budget supplémentaire prévoit des fonds destinés exclusivement à la Marine canadienne? Est-ce que madame le leader peut assurer à la Chambre que le NCSM Toronto disposera d'un équipage et d'un matériel suffisants d'ici février prochain?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Des renseignements détaillés sur les fonds prévus pour la Marine canadienne peuvent être obtenus auprès du Comité des finances nationales qui a entrepris l'étude du budget.

Je peux assurer à l'honorable sénateur que si nos troupes ne sont pas parties pour Kaboul sans un équipement adéquat, le NCSM Toronto ne quittera pas son port d'attache sans un armement suffisant.

LE DÉPLOIEMENT DU NCSM TORONTO—LE TRANSFERT DE MATÉRIEL D'AUTRES FRÉGATES

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Je me demande si l'honorable sénateur peut se renseigner puis informer la Chambre des équipements à bord du NCSM Toronto qui ont été prélevés sur les onze autres frégates. Par exemple, quelle frégate a perdu l'un de ses radars au profit du NCSM Toronto? Combien des canons de calibre .50 du Toronto ont toujours été à bord de cette frégate? De toute évidence, l'équipage du navire viendra de toutes les autres frégates. Le Sénat peut-il avoir accès à une liste des équipements du NCSM Toronto prélevés sur les onze autres frégates pour le rendre opérationnel, apte à prendre la mer et capable de remplir sa mission dans le golfe Persique?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Comme l'honorable sénateur le sait, je ne dispose pas de ces renseignements en ce moment. Je vais donc me renseigner et les obtenir pour lui.

LA SANTÉ

LA FOURNITURE DE MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES AUX PAYS AFRICAINS

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat. En réponse à une demande de l'envoyé spécial des Nations Unies pour le sida en Afrique, Stephen Lewis, le gouvernement fédéral a annoncé qu'il modifierait notre législation sur les brevets pour permettre aux sociétés qui fabriquent des médicaments génériques de fournir des produits antiviraux à prix réduit aux pays africains. Cette mesure est possible à cause d'une entente conclue en août par l'Organisation mondiale du commerce pour permettre aux pays pauvres d'importer des médicaments génériques dans des circonstances précises. Quand le gouvernement a-t-il l'intention de déposer les mesures législatives en question?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois savoir que le gouvernement déposera le projet de loi le plus tôt possible. J'ai eu le plaisir de lire aujourd'hui que nous aurons, dans cet effort, la coopération de nos partenaires de l'ALENA.

LE FONDS MONDIAL DE LUTTE CONTRE LE SIDA, LA TUBERCULOSE ET LE PALUDISME—LA CONTRIBUTION DU GOUVERNEMENT

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, M. Lewis a encore demandé aux pays occidentaux d'honorer leur engagement d'accroître leur contribution au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme des Nations Unies. Le Comité des affaires étrangères de la Chambre des communes a demandé au premier ministre de tripler notre contribution actuelle de 100 millions de dollars. Le mois dernier, à la session extraordinaire de l'Assemblée générale des Nations Unies qui a discuté du sida, le premier ministre Chrétien semblait dire que le Canada fournirait un financement accru. Est-ce que madame le leader du gouvernement au Sénat peut nous dire si le financement accru pour la lutte contre le sida mentionné par le premier ministre ira au Fonds mondial et, si c'est le cas, quel en est le montant et quand le gouvernement le versera-t-il?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): L'honorable sénateur a raison de dire que le Canada s'est engagé à verser un total de 100 millions de dollars, mais il importe de se rendre compte que ce sont des dollars américains et non canadiens, qui iront au Fonds mondial entre 2001 et 2004. Par conséquent, le Canada se classe septième parmi l'ensemble des pays donateurs. Je comprends facilement que l'honorable sénateur nous invite à donner davantage. Je vais certainement transmettre sa demande à qui de droit.

[Français]

RÉPONSES DIFFÉRÉES À DES QUESTIONS ORALES

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer en cette Chambre deux réponses différées à deux questions orales, l'une de l'honorable sénateur Keon, posée le 23 septembre 2003, concernant les Instituts de recherche en santé du Canada, programme de financement des chercheurs de niveaux intermédiaire et supérieur et une réponse à la question orale posée le 18 juin 2003 par l'honorable sénateur Tkachuk, concernant les différences de traitement fiscal entre l'excédent des caisses de retraite des secteurs public et privé.

LA SANTÉ

LES INSTITUTS DE RECHERCHE EN SANTÉ DU CANADA—LE PROGRAMME DE FINANCEMENT DES CHERCHEURS DE NIVEAUX INTERMÉDIAIRE ET SUPÉRIEUR

(Réponse à la question posée le 23 septembre 2003 par l'honorable Wilbert J. Keon)

Depuis la création des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), un certain nombre d'initiatives fédérales liées à la recherche en santé ont été mises en oeuvre, par exemple le Programme des chaires de recherche du Canada et la Fondation canadienne pour l'innovation.

Les IRSC ont donc adapté leurs programmes pour éviter tout chevauchement important pour ce qui est des dollars alloués à la recherche par le fédéral et pour s'assurer que les IRSC financent des travaux dans des domaines de recherche spécialisés. Grâce à des investissements accrus qui ont vu le budget des IRSC doubler pour se chiffrer à 617 millions de dollars par année, les IRSC financent maintenant plus de 7 500 chercheurs et stagiaires par l'entremise de subventions stratégiques et de fonctionnement.

LES FINANCES

LES RÉGIMES DE RETRAITE—LA DIFFÉRENCE ENTRE LES EXCÉDENTS DU SECTEUR PUBLIC ET CEUX DU SECTEUR PRIVÉ

(Réponse à la question posée le 18 juin 2003 par l'honorable David Tkachuk)

Une modification proposée aux règles régissant l'excédent des caisses de retraite permettra aux régimes de retraite conjoints à cotisations déterminées d'accepter des cotisations conjointes employeur-employés jusqu'à concurrence d'un excédent de 25 p. 100.

Cette modification placera les régimes de retraite conjoints à cotisations déterminées sur un pied d'égalité avec les régimes traditionnels privés à prestations déterminées. Elle permettra également une stabilisation des cotisations des employés et des niveaux d'actif de ces régimes, comme c'est déjà le cas pour les régimes traditionnels, en vertu des règles actuelles régissant les excédents.

La différence ne vise pas du tout à empêcher les entreprises de «dissimuler» leurs profits dans les régimes de retraite. Il s'agit d'un changement structurel qui aura pour effet, à la longue, de placer les régimes conjoints sur un pied d'égalité avec les régimes traditionnels.


ORDRE DU JOUR

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'aimerais aborder, dans les affaires du gouvernement, l'article no 3, soit la troisième lecture du projet de loi C-6. Nous reviendrons ensuite à l'ordre proposé au Feuilleton.

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR LE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES

TROISIÈME LECTURE—SUSPENSION DU DÉBAT

L'honorable Jack Austin propose: Que le projet de loi C-6, Loi constituant le Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières des Premières nations en vue de permettre le dépôt, la négociation et le règlement des revendications particulières, et modifiant certaines lois en conséquence, soit lu une troisième fois sous sa forme modifiée.

— Honorables sénateurs, le 25 septembre 2003, le Sénat a adopté une motion renvoyant le projet de loi C-6, concernant le règlement et la négociation des revendications particulières, au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones afin que celui-ci étudie les répercussions, sur le projet de loi C-6, de la récente décision de la Cour suprême reconnaissant au peuple métis le statut de nation autochtone distincte.

Le comité s'est réuni le mardi 30 septembre pour entendre M. Allan Macdonald, directeur du Bureau de l'Interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits. Le comité a également entendu Mme Audrey Stewart, directrice générale des Revendications particulières, et M. Robert Winogron, avocat- conseil principal au ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. En résumé, ils ont dit que, du point de vue juridique, les décisions de la Cour suprême du Canada dans les affaires Powley et Blais n'avaient aucune incidence sur le projet de loi C-6, dont la portée se limite aux revendications particulières déposées en vertu de traités et d'accords conclus avec des bandes indiennes selon les modalités prévues à l'article 26 du projet de loi C.6.

Les décisions Powley et Blais concernent, dans l'affaire Powley, la revendication par les Métis du droit de chasse ancestral et, dans l'affaire Blais, l'admissibilité au transfert de ressources aux termes de la loi. Dans l'affaire Powley, une communauté métisse particulière a démontré que, étant donné ses pratiques de chasse, elle avait conservé un droit de chasse ancestral. L'affaire n'est pas allée plus loin. Dans l'affaire Blais, il a été déterminé que le droit revendiqué par les Métis au sujet des ressources n'était pas un droit ancestral de cette communauté métisse. Dans les deux affaires, les motifs de la décision sont spécifiques et ne font allusion ni dans un cas ni dans l'autre aux droits des Indiens inscrits.

Un témoin supplémentaire a comparu le 1er octobre: le professeur Larry Chartrand, de la Faculté de droit de l'Université d'Ottawa. C'est un Métis spécialisé dans les revendications des Métis. Le professeur Chartrand a reconnu qu'il ne représentait aucun groupe métis en particulier et que les opinions qu'il proférait étaient les siennes uniquement. Il a parlé plus particulièrement de deux choses. Premièrement, du fait que la Cour suprême se rapprochait de la position qu'ont toujours eue les Métis, à savoir qu'ils devraient être considérés comme des Indiens aux fins de l'article 91.24 de la Loi constitutionnelle de 1867. Il pense que c'est ce qui ressort de la reconnaissance par la Cour suprême du droit de chasse dans l'affaire Powley. Deuxièmement, il a affirmé que, sous le rapport de la loi ou des politiques, on devrait modifier le projet de loi C-6 pour y inclure les Métis afin que toutes les revendications territoriales en vertu de quelque entente que ce soit puissent être déposées. Il a même donné un ou deux exemples de revendications territoriales possibles.

Le professeur Chartrand fonde son argument juridique sur la prémisse que toutes les communautés autochtones doivent être traitées de manière égale. Je trouve cette idée extrêmement discutable. Cependant, il a soulevé un bon point en qualifiant d'injuste et d'inéquitable la politique fédérale à l'égard des Autochtones. Je pense que la plupart des membres du comité seront d'accord avec lui sur ce point.

(1430)

Le 2 octobre, le comité a entendu le témoignage de M. Bryan Schwartz, conseiller spécial de l'Assemblée des Premières nations. Ce dernier a réaffirmé l'opposition déjà manifestée par les Autochtones à l'égard du projet de loi C-6, et il a lu une lettre du grand chef Phil Fontaine, qui déplore encore une fois le manque de représentation officielle de l'Assemblée des Premières nations et le fait qu'on n'autorise pas celle-ci à participer au processus de nomination des membres du tribunal et d'autres intervenants principaux.

Les propos suivants de M. Schwartz concernant l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 sont particulièrement intéressants:

Selon le principe de l'égalité, il n'est pas nécessaire, ni est-il même permis, dans certains cas, de traiter de manière identique des groupes différents. Il faut tenir compte de façon appropriée de leur histoire, de leurs droits, de leurs intérêts et de leurs choix politiques distinctifs.

Plus tard, dans son témoignage, M. Schwartz a indiqué ceci:

Le tribunal a reconnu, autrement dit, que les Premières nations et les Métis ont, du moins pour quelques fins importantes, une histoire et une situation constitutionnelles qui ne sont pas les mêmes. Dans l'arrêt Lovelace, la Cour suprême du Canada reconnaît que la situation juridique et sociale distinctive des Premières nations est telle que le gouvernement peut concevoir des programmes de concert avec les Premières nations et qui visent uniquement les Premières nations, sans forcément inclure les Métis.

Et d'ajouter:

Tout de même, comme les revendications particulières des Premières nations font depuis longtemps l'objet d'un déni de justice, les Premières nations ne sauraient attendre pendant qu'un nouveau processus de consultation se déroule

Je devrais mentionner que Roger Jones, de l'Assemblée des Premières nations, était aussi présent avec M. Schwartz pour défendre la position de l'assemblée.

Le mardi 7 octobre, M. Peter Hutchins, avocat comptant de nombreuses années d'expérience dans le domaine du droit et des questions se rapportant aux Autochtones, a donné au comité un aperçu des politiques fédérales concernant les Autochtones. Il est aussi d'avis que:

[...] non seulement les Métis sont des Autochtones au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, mais il existe une responsabilité fédérale spéciale à leur égard en vertu de l'article 91.24.

La question dans tout cela est de déterminer s'il existe quelque entrave juridique que ce soit au droit du Parlement de promulguer le projet de loi C-6. Il est clair que le projet de loi C-6 et les droits des Métis — quels qu'ils soient et peu importe le moment où ils seront établis — sont deux choses distinctes.

On ne doit pas voir les revendications des Métis comme ayant un impact sur le droit du Parlement de légiférer à l'égard des Indiens de plein droit. Cependant, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones prend bien note des questions non réglées qui touchent les Métis et recommande que le gouvernement du Canada se penche sur ces questions — et sur l'affaire Powley — le plus tôt possible.

Revenons au projet de loi C-6. Le Sénat a entendu ce que j'avais à dire à l'étape de la deuxième lecture et lors des débats sur les amendements. Je ne répéterai pas ce qui a déjà été consigné au compte rendu, sauf pour certains points clés.

Le gouvernement, les Premières nations, la Commission sur les revendications particulières des Indiens et bien d'autres ressentent de plus en plus d'inquiétude à l'égard du processus existant de règlement de revendications particulières et considèrent que le besoin d'une réforme se fait de plus en plus sentir. Honorables sénateurs, le fait est que l'absence d'un organisme indépendant pour régler les revendications particulières n'est pas la seule faille du système actuel. Un autre obstacle majeur au règlement des revendications particulières est la lenteur excessive du système.

Je suis certain que tous les sénateurs ont entendu dire que l'arriéré de revendications particulières non réglées s'est constamment accru au fil des années. Entre avril 1970 et juin 2003, seulement 252 des 1 201 revendications particulières soumises ont été réglées. Actuellement, il y a plus de 550 revendications particulières qui en sont à diverses étapes du processus de règlement, et le nombre de revendications particulières soumises augmente chaque année. Honorables sénateurs, tout le monde reconnaît que cet état de chose est inacceptable. Il est clair qu'il faut agir, et dès maintenant.

Honorables sénateurs, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a tenu des audiences du 30 avril au 11 juin de cette année. L'Assemblée des Premières nations a témoigné à trois occasions. Des fonctionnaires du gouvernement, des représentants des Premières nations appartenant à diverses organisations d'un bout à l'autre du pays, la Commission sur les revendications particulières des Indiens et des juristes ont également témoigné.

Les témoins des Premières nations entendus par le comité ont déclaré que le projet de loi C-6 ne reprend pas tous les aspects de l'avant-projet de loi figurant au rapport du groupe de travail mixte. Ce groupe a étudié les étapes précises du règlement des revendications entre 1996 et 1998. Le fait que les recommandations n'aient pas été acceptées totalement par le gouvernement du Canada préoccupait grandement l'Assemblée des Premières nations.

Parmi les autres préoccupations figuraient l'absence de processus conjoint de nomination à la commission et au tribunal, le plafond de 7 millions de dollars visant les indemnités maximales accordées par les tribunaux, et l'absence d'un examen ultérieur de la loi mené conjointement par le Canada et l'Assemblée des Premières nations.

Les témoins du gouvernement ont également fait part au comité de la nécessité d'une responsabilité financière lorsque la loi prévoit l'établissement d'un organisme compensatoire comme le tribunal ainsi que de l'autorisation prévue au projet de loi en ce qui concerne la modification par règlement du plafond des indemnités.

Je veux souligner que le projet de loi n'impose aucun plafond en matière d'indemnisation décidée par la commission. De plus, ce projet de loi et son fonctionnement doivent, selon le texte, être révisés au cours des trois à cinq années suivant l'entrée en vigueur afin de déterminer les changements devant y être apportés.

Honorables sénateurs, je résume des heures de témoignage, mais je vous assure que le comité évalue ces témoignages attentivement et de façon responsable, d'ailleurs son rapport les prend en considération. Honorables sénateurs, à la fin des audiences, le comité était convaincu que le projet de loi C-6 constituait un progrès important pour le traitement équitable de revendications particulières. Le projet de loi crée exactement le type de structure bipartite indépendante du ministère des Affaires indiennes que recommandaient la commission Penner de 1983, la Commission sur les revendications particulières des Indiens et bien d'autres. Il stipulera le règlement final de certaines revendications.

Les requérants qui ne veulent pas être soumis au plafonnement des indemnités du tribunal ne sont pas obligés d'y recourir. Ils ont le choix.

Honorables sénateurs, je souhaite mentionner un autre aspect important. Pour la première fois, les obligations fiduciaires font partie des obligations juridiques pouvant donner lieu à une revendication particulière.

J'ajouterais que, tout au long de ses délibérations sur le projet de loi C-6, le comité s'est toujours montré soucieux des préoccupations énoncées par les témoins des Premières nations. Il en est résulté que le comité a adopté d'importants amendements qui ont amélioré le projet de loi sous divers rapports. Ainsi, le comité a élevé à 10 millions de dollars l'indemnité maximale actuelle. Il a ajouté un article garantissant à tout revendicateur la possibilité d'exercer des pressions auprès du ministre relativement aux nominations à la commission et au tribunal. Le comité a modifié l'article du projet de loi traitant de l'examen, afin que les Premières nations puissent faire des observations sur la mise en oeuvre de la loi. Le comité a aussi ajouté un article permettant au tribunal de convoquer des témoins et d'ordonner la production de documents se rapportant aux revendications soumises à la commission.

Honorables sénateurs, voilà des modifications substantielles qui profiteront aux Premières nations ayant des revendications particulières.

Le comité a examiné attentivement les points additionnels suivants, soulevés durant ses travaux sur le projet de loi C-6. Il a tiré les conclusions ci-dessous sur deux questions, à savoir la nécessité de pouvoir renoncer à toute indemnité et la possibilité que des retards constants dans le processus de règlement des revendications particulières soient suffisamment importants pour justifier l'inclusion d'observations dans le quatrième rapport du comité à la Chambre, le 12 juin. Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur ces observations, dans lesquelles il est demandé au ministre d'accorder une attention particulière aux sujets qu'elles contiennent en entreprenant l'examen de la mise en oeuvre de la loi, trois ans après l'entrée en vigueur de celle-ci.

Honorables sénateurs, il n'y a aucune doute, vous déduirez de mes propos que je considère le projet de loi C-6 comme une mesure législative en constante évolution. Il a emprunté un parcours long et sinueux avant d'être présenté. Il n'en demeure pas moins que la cause des Premières nations a gagné du terrain. Pour la première fois, celles-ci disposeront d'un cadre juridique leur ouvrant la voie à une réparation de la part du gouvernement. Honorables sénateurs, cela ne signifie pas que ce cadre juridique soit coulé dans le béton. Il représente seulement le début d'une ère nouvelle dans le processus de règlement des revendications particulières. Des améliorations seront nécessaires. Notre rôle de parlementaires est de veiller à ce que ces améliorations soient apportées quand le besoin s'en fait sentir.

(1440)

Honorables sénateurs, je suis sûr que nous suivrons la progression du projet de loi C-6, que nous tiendrons compte des questions soulevées au cours de ce débat et devant le comité et que nous reconnaîtrons que le projet de loi, malgré l'opposition formelle de l'Assemblée des Première nations, fait progresser le processus de règlement des revendications particulières.

Je demande aux honorables sénateurs d'appuyer le projet de loi.

L'honorable Gerry St. Germain: L'honorable sénateur acceptera-t-il des questions?

Le sénateur Austin: Très volontiers.

Le sénateur St. Germain: J'ai deux questions. L'APN, qui représente nos Premières nations au plus haut niveau, s'est énergiquement opposée à différents éléments et mentionne le groupe de travail conjoint. À ce stade, quand il dit et répète qu'il veut traiter ouvertement des questions autochtones, pourquoi le gouvernement fait-il abstraction de cette organisation qui, je le crois, demande sincèrement une représentation adéquate dans l'établissement des commissions, qui ne semblent être actuellement qu'un prolongement du MAINC?

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je crois que le sénateur St. Germain a raison de noter que l'Assemblée des Premières nations agit en toute sincérité. Elle a participé activement au groupe de travail conjoint de 1996 à 1998, et beaucoup de choses ont été convenues. Au nom de l'Assemblée des Premières nations, un ami du sénateur St. Germain et de moi-même, le chef Edward John, a présidé le groupe de travail. Le chef John est également avocat et membre du Barreau de la Colombie-Britannique.

Une fois que le groupe de travail a présenté son rapport, le gouvernement a dû évaluer dans quelle mesure il lui était possible d'accepter les recommandations formulées. Je voudrais aborder trois aspects. D'abord, le gouvernement du Canada ne pouvait pas donner suite au voeu de l'Assemblée des Premières nations d'être traitée dans les textes législatifs comme un organe quasi souverain. L'Assemblée ne peut pas être établie dans les textes de loi comme étant la représentante de toutes les collectivités des Premières nations. De toute façon, ces collectivités n'acceptaient ni unanimement ni en grande majorité que l'APN joue ce rôle particulier.

Je conviens avec le sénateur St. Germain que l'Assemblée des Premières nations représente un nombre important de collectivités autochtones. Toutefois, elle n'a pas reçu de ces collectivités le mandat de jouer un rôle législatif. Les chefs n'ont pas adopté une résolution à cet effet.

Ensuite, l'Assemblée des Premières nations a réclamé un droit de veto lui permettant de rejeter les nominations au tribunal et au centre. Il est parfaitement impossible pour le gouvernement du Canada de céder une part de sa compétence en la matière à une organisation quelconque, autochtone ou non, dans des circonstances ce genre. Il incombe au gouvernement de gouverner et d'assumer ses responsabilités devant le pays.

En ce qui concerne le plafond, le gouvernement se trouvait dans une situation où il devait contrôler le montant des indemnités que le tribunal indépendant pouvait accorder. Par conséquent, il a imposé un plafond de 7 millions de dollars, que le Sénat souhaite porter à 10 millions. Toutefois, le gouvernement peut faire abstraction du plafond à n'importe quel moment et accepter une revendication portant sur un montant supérieur.

Honorables sénateurs, je pourrais poursuivre très longtemps. Le sénateur St. Germain et moi-même avons eu de nombreuses discussions à ce sujet, mais je sais qu'il a une autre question à poser.

Le sénateur St. Germain: Je remercie l'honorable sénateur de sa réponse.

Ma question suivante traite des Métis. Pourquoi n'attendons-nous pas? L'honorable sénateur a mentionné dans son intervention que la question des Métis suivra une voie distincte. C'est très intéressant, mais certaines des revendications pouvant provenir des Métis pourraient avoir des chevauchements ou entrer autrement en conflit avec des règlements territoriaux. La plupart des revendications particulières sont liées à des terres. Pourquoi ne pas poursuivre avec précaution compte tenu de la décision historique de la Cour suprême du Canada concernant la reconnaissance des Métis aux termes de l'article 35? Cette décision devrait pour le moins déclencher des négociations sérieuses avec la nation métisse.

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je voudrais corriger une impression, qui découle peut-être de la motion présentée le 25 septembre.

La décision Powley ne reconnaissait pas les Métis comme nation autochtone. Le Parlement canadien, lui, a accordé cette reconnaissance aux Métis en 1982, à l'article 35. Je crois que c'est l'une des mesures les plus progressistes que le Parlement ait prises depuis des décennies.

Ensuite, les Premières nations, représentées par leur conseil — je suis en train de lire la déclaration —, ne souhaitent pas que leurs revendications soient retardées ou combinées aux revendications d'autres peuples autochtones. Il a été clairement établi que les Inuits sont exactement dans la même situation. Ils ont des circonstances très différentes de celles des Indiens inscrits et des Métis. Je dirais que les Inuits sont les plus avancés du point de vue de la reconnaissance de leurs droits et de leur place.

La Cour a traité particulièrement de cette question dans l'affaire Lovelace. La Cour suprême du Canada a clairement établi que les trois groupes autochtones doivent être traités selon leur propre histoire, leurs coutumes et leurs circonstances.

La situation des Métis et l'article 91.24 ont été depuis longtemps un sujet de préoccupation pour moi-même et pour beaucoup de gens. Il y a des dizaines d'années, le gouvernement du Canada a décidé que les Métis ne devaient pas être considérés comme des Indiens aux termes de l'article 91.24, qui attribue la responsabilité des Indiens au gouvernement fédéral en vertu de la Constitution. Il a fallu aller devant les tribunaux pour inclure les Inuits comme Indiens aux fins de la Loi sur les Indiens. Les Métis ont également intenté une action en justice, mais l'affaire n'est pas encore passée devant les tribunaux.

Il est clair que les membres du comité comprenaient parfaitement la situation dans laquelle les Métis se trouvent. Je crois que tous les membres du comité et, je l'espère, tous les sénateurs devraient, à titre prioritaire, exercer des pressions sur le gouvernement pour qu'il règle la question des Métis. L'affaire Powley fait avancer leur cause en reconnaissant le droit autochtone de chasse dans une collectivité qui a exercé ce droit et n'y a jamais renoncé.

À part l'affaire Powley, nous avons à régler une autre question, celle de traiter les Métis avec justice.

(1450)

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, j'aimerais parler du projet de loi C-6. Y a-t-il une autre question?

L'honorable Charlie Watt: Le sénateur Austin serait-il disposé à accepter d'autres questions?

Le sénateur Austin: Oui.

Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, le sénateur Austin nous a déclaré qu'il fallait prendre des mesures. Certes, il y a longtemps que cela aurait dû être fait, mais je ne suis pas sûr que l'instrument dont nous traitons aujourd'hui est bien adapté à ces mesures à prendre. Cela pourrait bien ne pas être le cas.

Honorables sénateurs, j'aborde une question dont le sénateur a touché un mot, celle des actions en justice entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux entre 1936 et 1939. C'est à cette époque que les Inuits du Nord ont constaté qu'ils relevaient de l'article 91.24. À cette époque, la Compagnie de la baie d'Hudson était le seul instrument utilisable dans le Nord. Lorsque la Compagnie de la Baie d'Hudson a hérité d'une dette de 3 000 $ pour l'exonération accordée à la population du Nord au cours de la période de famine, des litiges sont apparus entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux. Ces litiges se sont poursuivis de 1936 à 1939. Ils visaient à déterminer à qui incombait la responsabilité fiduciaire. En 1939, un jugement a finalement été rendu. La décision judiciaire était contre le gouvernement fédéral et en faveur du gouvernement provincial, parce que la population inuite relevait du gouvernement fédéral.

Il existait un certain flou pour ce qui est de déterminer précisément qui relevait de l'article 91.24. Dans certains cas, on a décidé que les Inuits relevaient de cet article, mais, dans d'autres cas, on a décidé que non. C'est ce qui ressort avec évidence de l'examen du litige et des négociations qui ont eu lieu de 1970 à 1975.

Hier, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones a entendu le témoignage de M. Peter Hutchins, spécialiste chevronné de la question des droits autochtones. J'ai connu M. Hutchins quand il était jeune homme et c'est à peine si je l'ai reconnu hier parce qu'il a maintenant les cheveux tout blancs. Cela ne veut pas dire qu'il est vieux, mais cela montre qu'il a livré des combats difficiles pendant de nombreuses années à titre de représentant des peuples autochtones. À titre d'avocat, M. Hutchins se spécialise dans les litiges et la négociation.

Il a expliqué en quoi le projet de loi C-6 violerait les droits autochtones. À son avis, la situation est assez claire. Il estime que la décision amène à se demander si les Métis sont visés par le paragraphe 91.24. Il faut tirer cela au clair.

Pourquoi devons-nous adopter ce projet de loi à toute vapeur alors que nous en sommes presque à l'étape où, probablement très bientôt, nous aurons un nouveau programme? Je n'arrive pas à comprendre pourquoi nous devons adopter cette mesure législative en toute hâte.

Plus important encore, les témoins que nous avons entendus sont tous unanimes. Le sénateur Austin soutient qu'il faut agir maintenant. Il est peut-être vrai qu'il faille agir maintenant, mais je me demande si nous fournissons aux Inuits l'instrument approprié. Leur permettra-t-il de réaliser des progrès au chapitre de leurs droits? Je ne le pense pas. Les Inuits nous ont répété à maintes et maintes reprises que cette mesure législative est inapplicable. Si tel est le cas, pourquoi ne suspendons-nous pas le débat jusqu'à ce que nous ayons pu examiner l'ensemble des questions concernant les Autochtones?

Le sénateur Austin n'était pas présent hier lorsque M. Hutchins a analysé le projet de loi C-6 dans ses rapports avec l'article 35 et l'article 91.24. Nous avons tendance à traiter séparément des dispositions de l'article 35. Comme M. Hutchins l'a dit, les compartiments créés par le système deviennent de plus en plus petits.

Pourquoi le sénateur Austin n'a-t-il pas parlé du témoignage de M. Hutchins? Peut-être n'a-t-il pas eu accès à la transcription des délibérations. J'aimerais connaître son avis sur ce qu'a dit hier M. Hutchins.

Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, j'ai étudié en fait la transcription des délibérations. J'ai lu trois fois le témoignage de M. Hutchins. Je l'ai cité et je crois avoir présenté un compte rendu honnête de son principal argument.

Pour le reste, il est évident que le sénateur Watt et moi-même convenons d'une chose: nous ne sommes pas d'accord sur l'importance qu'il y a à adopter le projet de loi C-6. Le sénateur Watt a recouru à d'habiles tactiques parlementaires pour exprimer son point de vue. Je l'en félicite, comme je le félicite pour son discours.

Le sénateur Watt: Cette intervention a-t-elle une substance quelconque?

Le sénateur Austin: Je ne sais pas ce que l'honorable sénateur veut dire par «substance quelconque». J'ai fait de mon mieux pour expliquer le projet de loi et le travail du comité. J'attends avec intérêt toute contribution que le sénateur Watt serait autorisé à faire aux termes de notre Règlement. Je peux assurer à l'honorable sénateur que j'écouterai avec le plus grand soin tout ce qu'il aura à dire sur le projet de loi C-6.

Le sénateur Watt: Je remercie l'honorable sénateur

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, au sujet du projet de loi C-6 concernant les revendications particulières, le 23 septembre, le Sénat a renvoyé le projet de loi au Comité sénatorial permanent des peuples autochtones pour que soient étudiées les répercussions de la récente décision de la Cour suprême reconnaissant les Métis comme nation autochtone distincte. À cette fin, le comité a entendu des témoins qui ont présenté leur point de vue sur l'application de la décision de la Cour suprême en ce qui a trait au projet de loi.

Le gouvernement est d'avis que la décision Powley n'a pas d'effets sur le projet de loi dont nous sommes saisis. Il croit que cette affaire touche exclusivement les droits autochtones, tandis que le projet de loi C-6 porte sur les revendications particulières relatives aux droits autochtones. C'est un point de vue étroit. Comme l'a dit un témoin, la décision Powley nous a donné l'occasion de faire preuve d'une certaine créativité. Elle pourrait fort bien avoir des répercussions sur toute politique ou mesure législative que le gouvernement décide adopter à l'avenir, si elle établit des distinctions entre les Métis et les autres communautés indiennes.

D'après le paragraphe 38 de la décision, on ne peut nier aux Métis leur pleine qualité de peuples distincts, titulaires de droits et dont les pratiques qui font partie intégrante de leur culture bénéficient de la protection constitutionnelle prévue par le paragraphe 35(1). Le libellé de la décision est très clair, tout comme le sont les conséquences.

Honorables sénateurs, je crois que l'affaire Powley est la première d'une série qui permettra de définir la place des Métis au Canada, beaucoup comme l'affaire Guérin l'avait fait dans le cas des Premières nations.

Le problème que nous avons et qu'a eu le comité est que beaucoup de témoins n'ont pas voulu comparaître simplement parce que la décision de la Cour suprême était beaucoup trop récente.

(Le débat est suspendu.)

[Français]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, il est maintenant 15 heures, et conformément à l'ordre adopté par le Sénat le 7 octobre 2003, je dois interrompre les délibérations du Sénat afin de poser la question sur le sous-amendement de l'honorable Kinsella, sur le projet de loi C-25.

[Traduction]

Le vote aura lieu à 15 h 30. Convoquez les sénateurs.

(1530)

PROJET DE LOI SUR LA MODERNISATION DE LA FONCTION PUBLIQUE

TROISIÈME LECTURE—REJET DU SOUS-AMENDEMENT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Harb, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-25, Loi modernisant le régime de l'emploi et des relations de travail dans la fonction publique, modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur le Centre canadien de gestion et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Beaudoin, appuyée par l'honorable sénateur Comeau, que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 12, à la page 126, par substitution aux lignes 9 à 13, de ce qui suit:

«30.(1) Les nominations — internes ou externes — à la fonction publique par la Commission sont indépendantes de toute influence politique, sont fondées sur le mérite et sont faites par concours ou par tout autre mode de sélection du personnel permettant d'établir le mérite relatif des candidats qui, de l'avis de celle-ci, sert les intérêts de la fonction publique.

(1.1) Malgré le paragraphe (1), une nomination peut être fondée sur le mérite individuel dans les circonstances prévues par règlement de la Commission.

(2) Une nomination est fondée sur le mérite individuel.»

Sur le sous-amendement de l'honorable sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur Stratton, que la motion d'amendement soit modifiée:

a) par substitution, au passage «par substitution, aux lignes 9 à 13», de ce qui suit:

«a) par substitution, aux lignes 9 à 12»;

b) par substitution, au passage «(2) Une nomination est fondée sur le mérite individuel», de ce qui suit:

«b) par substitution, à la ligne 32, de ce qui suit:

général,

(iv) l'opportunité de réaliser l'égalité en milieu de travail afin de corriger les désavantages subis, dans le domaine de l'emploi, par les personnes qui appartiennent à un groupe désigné au sens de l'article 3 de la Loi sur l'équité en matière d'emploi, de sorte que l'effectif de l'employeur reflète leur représentation au sein de la population apte au travail».

(La motion d'amendement, mise aux voix, est rejetée.)

POURLES HONORABLES SÉNATEURS

Angus Kinsella
Atkins Lawson
Beaudoin LeBreton
Cochrane Lynch-Staunton
Comeau Meighen
Di Nino Murray
Doody Nolin
Forrestall Prud'homme
Gustafson Robertson
Johnson St. Germain
Kelleher Stratton
Keon Tkachuk—24

CONTRELES HONORABLES SÉNATEURS

Adams Hubley
Austin Jaffer
Bacon Joyal
Baker Kirby
Biron Kolber
Bryden LaPierre
Callbeck Lapointe
Carstairs Léger
Chalifoux Losier-Cool
Chaput Maheu
Cook Mahovlich
Cools Massicotte
Corbin Moore
Cordy Morin
Day Pearson
De Bané Phalen
Downe Plamondon
Fairbairn Poulin
Ferretti Barth Ringuette
Fraser Robichaud
Furey Roche
Gauthier Sibbeston
Gill Sparrow
Graham Stollery
Harb Watt
Hervieux-Payette Wiebe—52

ABSTENTIONSLES HONORABLES SÉNATEURS

Aucune.

PROJET DE LOI SUR LE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES

TROISIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Austin, appuyée par l'honorable sénateur Joyal, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-6, Loi constituant le Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières des Premières nations en vue de permettre le dépôt, la négociation et le règlement des revendications particulières, et modifiant certaines lois en conséquence, sous sa forme modifiée.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Les honorables sénateurs n'auront pas oublié que le sénateur Stratton avait commencé à parler avant la tenue du vote. Il a utilisé quelque trois minutes de son discours de 15 minutes. Or, pour des raisons que les sénateurs comprendront, le sénateur Stratton a prévu de se rendre à Winnipeg pour assister aux funérailles d'un éminent Canadien, et il a un avion à prendre.

Je propose que le débat soit ajourné, de manière à ce que le sénateur puisse terminer son discours ultérieurement.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'appuie pas cette motion. Nous reprenons la question pour la deuxième fois. Le premier vol à destination de Winnipeg est à 17 h 40, et il est maintenant 15 h 35. Si le sénateur Stratton ne peut pas prononcer son discours sous prétexte qu'il a un avion à prendre, je crains que son excuse ne soit pas valable.

Le sénateur Forrestall: Les voyageurs doivent être à l'aéroport une heure avant le départ.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, je ne connais pas l'horaire de tous les vols d'Air Canada ou de n'importe quel autre transporteur aérien. Je dis simplement au Sénat que le sénateur Stratton m'a dit qu'il devait se rendre à l'aéroport afin de s'envoler vers Winnipeg où il doit assister aux funérailles d'un éminent Canadien à qui on a rendu hommage dans cette enceinte.

Le sénateur Stratton a commencé son discours. S'il n'y avait pas eu autant de questions et si le dernier sénateur à prendre la parole n'avait pas donné d'aussi longues réponses, il ne fait aucun doute que son discours aurait été terminé.

Tous les honorables sénateurs en savent autant que moi à ce sujet.

Je propose l'ajournement au nom du sénateur Stratton afin qu'il puisse terminer son discours.

Le sénateur Carstairs: Un autre d'entre vous est-il disposé à intervenir au sujet du projet de loi C-6? Si c'est le cas, nous pourrions céder immédiatement la parole à cet honorable sénateur.

Le sénateur Kinsella: Je n'ai absolument rien contre cette façon de faire, pourvu que je puisse sauvegarder les 12 minutes restantes du sénateur Stratton. Selon moi, la demande de l'honorable leader du gouvernement est raisonnable. Si d'autres honorables sénateurs souhaitent participer au débat, je n'y vois pas d'inconvénient pourvu que le sénateur Stratton puisse terminer son discours.

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, quelque chose ne va manifestement pas. Nous sommes saisis d'une motion du sénateur Kinsella proposant l'ajournement du débat au nom du sénateur Stratton. Nous ne pouvons en faire abstraction et passer tout simplement à un autre orateur.

Le sénateur Kinsella a présenté une motion. Cette dernière devrait être mise aux voix.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Les honorables sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix: Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire: Il est proposé par l'honorable sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur Lynch-Staunton, que le débat soit ajourné au nom du sénateur Stratton jusqu'à la prochaine séance du Sénat.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: Non.

Des voix: Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Son Honneur la Présidente intérimaire: À mon avis, les non l'emportent.

Et deux honorables sénateurs s'étant levés:

Son Honneur la Présidente intérimaire: Convoquez les sénateurs.

Le timbre retentira pendant une heure. Le vote aura lieu à 16 h 40.

(1640)

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

POURLES HONORABLES SÉNATEURS

Adams Keon
Atkins Kinsella
Beaudoin LeBreton
Biron Lynch-Staunton
Comeau Massicotte
Cools Nolin
Di Nino Prud'homme
Forrestall Robertson
Gill St. Germain
Gustafson Tkachuk
Kelleher Watt—22

CONTRELES HONORABLES SÉNATEURS

Austin Harb
Bacon Hubley
Baker Jaffer
Bryden Joyal
Callbeck Kolber
Carstairs LaPierre
Chalifoux Léger
Chaput Losier-Cool
Cook Maheu
Corbin Mahovlich
Cordy Moore
Day Pearson
De Bané Ringuette
Downe Robichaud
Fairbairn Sibbeston
Fraser Stollery
Gauthier Wiebe—35
Graham

ABSTENTIONSLES HONORABLES SÉNATEURS

Hervieux-Payette Sparrow—3
Lavigne

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, je déclare la motion rejetée. Nous reprenons le débat.

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, je propose, avec l'appui du sénateur Prud'homme, d'ajourner le débat.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai vu que le sénateur Gill était prêt à prendre la parole. La coutume veut que l'on permette au sénateur de poursuivre le débat avant de recevoir une motion d'ajournement.

Le sénateur St. Germain: Je suis d'accord avec cela.

[Traduction]

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, eu égard au rappel au Règlement fait par le leader adjoint du gouvernement, le Règlement précise que le rejet d'une motion de ce genre doit être suivi d'une intervention. Je suppose donc que cette intervention sera le discours du sénateur Gill.

(1650)

[Français]

L'honorable Aurélien Gill: Honorables sénateurs, depuis que le projet de loi C-6 a été renvoyé au Comité des peuples autochtones, le 28 septembre, nous avons entendu des témoins, entre autres Peter Hutchins, à titre personnel, et des représentants des Premières nations. Ces derniers comparaissaient au nom du nouveau chef national, Phil Fontaine.

Vous vous rappellerez qu'en Chambre, avant le 28 septembre, lorsque nous débattions du projet de loi C-6, un amendement de l'honorable sénateur Charlie Watt proposait que ce projet de loi soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Cet amendement a été changé suite à des discussions. Certains sénateurs avaient mentionné qu'il y aurait lieu d'envoyer le projet de loi au Comité des peuples autochtones plutôt qu'au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. C'est ce que nous avons fait.

Entre-temps, l'affaire Powley a été soulevée en Chambre. Un amendement a été proposé en tenant compte des discussions sur le cas Powley. Vous vous souviendrez qu'avant cela, de nombreuses discussions ont eu lieu sur les revendications particulières des Autochtones. Par hasard, l'affaire Powley est survenue et le débat a été rétréci à ce cas.

Néanmoins, nous avons entendu des témoins qui ont parlé du cas Powley, mais aussi de réclamations territoriales générales concernant les Premières nations. Encore une fois, je l'avais dit auparavant et je le répète, la grande majorité des témoins, Autochtones et non-Autochtones, voulait que ce projet de loi soit complètement aboli ou qu'il y ait des amendements majeurs. Je le répète car il est important que l'on sache que la démocratie au pays joue de temps en temps et ne fonctionne pas de temps en temps.

La grande majorité des Autochtones des Premières nations voulaient avoir des changements majeurs ou annuler le projet de loi parce qu'ils considéraient que le projet de loi ne respectait pas les objectifs des Premières nations.

On se demandait si le nouveau chef national, Phil Fontaine, disait la même chose et allait dans le même sens que le précédent chef national, Matthew Coon Come. Nous avons eu la preuve au comité que le chef national actuel, Phil Fontaine, demande, en insistant énormément, au gouvernement de ne pas adopter ce projet de loi et de prendre plus de temps pour en discuter. Peter Hutchins, un expert, nous a dit: «Attendez, prenez votre temps, il y a des choses majeures dans ce projet de loi.»

Si vous me le permettez, je vais vous citer une lettre déposée au Comité des peuples autochtones. Je comprends que vous ne connaissez pas le contexte parce que vous n'étiez pas au comité. Je déplore l'absence du parrain du projet de loi à cette occasion. Sa présence aurait aidé à comprendre davantage le contexte.

Cette lettre, adressée à la présidente du comité et signée par Phil Fontaine, dit, et j'en cite quelques petits passages:

Depuis plusieurs années, l'APN et des responsables fédéraux font partie d'un groupe de travail mixte chargé d'envisager ce qu'il faudrait exiger d'un organisme de règlement des revendications particulières qui se veut efficace. Fort d'un esprit de partenariat sans précédent, le groupe de travail mixte a produit un modèle de système viable et efficace. L'exercice pourrait servir d'exemple à suivre en fait de coopération à l'élaboration de politiques.

Le gouvernement fédéral, quant à lui, a rejeté le modèle proposé par le groupe de travail mixte et a mis fin à la consultation. Il a produit un projet de loi qui maintient, plutôÎt qu'il ne règle, les problèmes connus par le passé, notamment l'atermoiement et le conflit d'intérêts de la part du gouvernement fédéral.

Il n'est pas trop tard. Malgré tout ce qui s'est produit, si le gouvernement fédéral souhaite revenir à un dialogue constructif qui est respectueux des deux parties et qui est axé sur les résultats, il constatera la bonne volonté de l'APN en tant que partenaire.

Le gouvernement fédéral peut encore se réunir avec l'APN, rétablir l'esprit de partenariat et travailler avec elle pour produire un projet de loi sur le règlement des revendications particulières qui sera à l'avantage de tous les Canadiens.

J'aimerais ajouter ceci. Plusieurs se demandaient si l'Assemblée des Premières nations se préoccupait uniquement d'eux et pas des autres.

[Traduction]

Premièrement, l'APN préconise le règlement raisonnable et équitable des revendications fondées de tous les peuples autochtones, y compris les Inuits et les Métis.

[Français]

C'est une lettre signée par Phil Fontaine, chef national des Premières nations. Certains se demandaient si le chef actuel appuyait les positions du chef national précédent, Matthew Coon Come; la lettre de quatre pages est très claire et elle a été transmise et déposée au Comité des peuples autochtones. Je vous suggère de vous y référer si vous voulez en savoir davantage.

Je vous le demande instamment: quand allons-nous commencer à établir un partenariat réel? Pourquoi ce système? Pourquoi les gens ne nous permettraient-ils pas d'avoir ce partenariat, pas seulement pour les Premières nations mais pour l'ensemble des Canadiens? Je sais que tout le monde est fatigué des conflits ici et là. Beaucoup de personnes se demandent quoi faire. Il y a une chose sûre à faire. Il faut faire confiance, comme on doit faire confiance normalement. Il faut que vous fassiez confiance aux chefs des Premières nations, peu importe ce qu'on dit sur leur réputation.

Je vous dirai que j'ai été chef pendant dix ans. Pendant plusieurs années, j'étais responsable des Affaires indiennes et du Nord au Québec. Pendant tout ce temps, j'étais responsable du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien et de l'administration. Pendant tout ce temps, je n'ai jamais trouvé un chef coupable d'une fraude quelconque. Je ne dis pas qu'il n'y a pas eu des problèmes de gestion, des erreurs, il y en a partout. Je n'ai pas vu un chef pendant tout ce temps, et je les connais, qui a été condamné ou accusé de malhonnêteté par la population autochtone. Aujourd'hui, on pose encore des jugements.

Je déborde un peu de la discussion. On est porté à juger de façon globale que les Autochtones ou les Indiens ne sont pas capables de décider par eux-mêmes et que quelqu'un doit décider pour eux. Je me le suis fait dire en cette Chambre par certains sénateurs. Si nous en sommes à ce stade, sommes-nous encore en démocratie? Ce serait à l'avantage de tout le monde au Canada de laisser les Autochtones régler leurs problèmes et apporter des solutions qui leur conviennent.

J'aimerais en terminant, honorables sénateurs, proposer un amendement au projet de loi.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Aurélien Gill: Honorables sénateurs, je propose:

Que le projet de loi C-6 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit lu une troisième fois, dans six mois de ce jour.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion d'amendement?

(1700)

L'honorable Marcel Prud'homme: L'honorable sénateur a dit qu'il avait été responsable, dans sa vie précédente, du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Afin que les sénateurs saisissent bien l'importance de son expérience, pourrait-il répéter cette partie de ses responsabilités précédentes et récentes? Cela nous donnerait une meilleure idée de ses connaissances et, pour nous qui en avons moins, cela nous renseignerait. Nous serons peut-être plus intelligents.

Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, très brièvement, c'est évident que je ne peux pas mentionner tout ce que j'ai fait. J'ai un certain âge. Je peux dire que j'ai passé ma vie dans le monde autochtone. Je suis né dans une communauté, dans une réserve, j'y suis encore et je vais y mourir.

J'ai été chef pendant plusieurs années. J'ai été enseignant, au début, dans les écoles indiennes. J'ai été directeur général au ministère des Affaires indiennes et du Nord pour l'ensemble du Québec. Le sénateur Watt et les autres s'en souviennent. J'ai été gestionnaire pour le ministère des Affaires indiennes au Québec. Évidemment, j'ai été commissaire aux revendications particulières pendant quelques années. J'ai dû démissionner lorsque j'ai été nommé au Sénat.

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, à la lumière de ce que l'honorable sénateur Gill a dit, il est presque un témoin expert en la matière.

Le chef des Premières nations, M. Fontaine, a dit qu'il y avait un problème de conflit d'intérêts qui n'était toujours pas réglé. Je me souviens avoir posé des questions au parrain du projet de loi, avant que nous décidions de le renvoyer au Comité des peuples autochtones, justement à cause de ces problèmes de conflit d'intérêts. Comme avocat, on ne peut pas permettre qu'un système judiciaire soit mis en place si on laisse planer un nuage de conflit d'intérêts. Suite à l'expérience professionnelle de l'honorable sénateur, j'aimerais qu'il nous parle de ce conflit d'intérêts.

Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, je ne suis ni avocat ni conseiller juridique. Le sénateur Austin dit que la nouvelle institution que l'on crée actuellement est créée à l'extérieur du ministère des Affaires indiennes. Je suis d'accord avec lui.

Par qui est-ce fait? Qui décidera des montants d'argent? Qui décidera de la nomination des juges? Je comprends que ce sera à l'extérieur du ministère des Affaires indiennes. Avant, ces sujets étaient décidés par le ministère. Qui décidera maintenant des nominations des juges et pour établir le temps de réponse à une réclamation territoriale des communautés à travers le Canada? Qui dira au ministre qu'il doit répondre, négativement ou positivement? Il y a une amélioration par rapport à ce qui existait. Depuis toujours, il y a des rapports annuels.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, le temps de parole de l'honorable sénateur est écoulé. Demandez-vous la permission de poursuivre?

Le sénateur Gill: J'en fais la demande.

Des voix: D'accord.

Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, des rapports annuels ont été présentés par des commissaires dont je faisais partie. La même chose revenait tout le temps, chaque année. On demandait plus d'indépendance, un encadrement qui obligeait le ministre à répondre. Oui ou non, mais qu'il réponde! On voulait également que de vraies règles de négociation s'établissent, c'est-à-dire pas de décision avant d'avoir entendu tous les arguments et avant d'avoir négocié sur des montants d'argent et autres.

Maintenant, il y a un plafond au montant d'argent, on ne donne pas de temps limite pour les réponses du ministre.

Il y a des communautés qui négocient. Je parle en connaissance de cause car ma nation, les Innus, négocie depuis 1975. Pensez-vous que cela va changer? Je ne vois pas d'amélioration. Je n'étais pas sûr, parce qu'au début, je ne croyais pas avoir toute l'information. Tous les gens intéressés à la cause, avocats ou autres, tous ceux que nous avons reçus au comité disent la même chose: Est-ce que le parrain du projet de loi, le sénateur Austin, est le seul à avoir le pas avec quelqu'un d'autre? Ils suivent la trace du sénateur Austin. Il y a une expression en montagnais qui dit «il y a ceux qui battent les traces, et ces traces peuvent être bonnes ou mauvaises». Ce projet de loi comporte, à mon sens, des conflits d'intérêts; on y retrouve juge et partie. C'est très clair.

Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, l'idée de retourner le projet de loi au comité était de réentendre d'autres témoins pour éclairer la lanterne des sénateurs sur les conflits d'intérêts et sur l'installation d'un régime judiciaire respectueux des droits fondamentaux que nous désirons voir maintenus au Canada. Avez-vous entendu des experts en la matière et que vous ont-ils dit?

Le sénateur Gill: Une grande partie des témoins qui ont comparu avaient une formation juridique. Soit ils représentaient des groupes, soit ils se représentaient eux-mêmes. C'était très clair car les gens doivent s'identifier au comité. La majorité avaient une expérience de gestionnaires, de récipiendaires ou défenseurs de ces groupes. Un bon nombre de témoins étaient juristes. La majorité étaient contre le projet de loi.

Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, la question de conflit d'intérêts est fort grave. Les témoins ont-ils spécifiquement commenté ces conflits d'intérêts et ont-ils offert des solutions?

Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, ils en ont fait part. Depuis toujours, le ministère des Affaires indiennes est vu comme juge et partie. Ce n'est pas nouveau. C'est pour cela qu'il faut que cela change, pour avoir une certaine équité et une certaine objectivité. Plusieurs personnes l'ont mentionné, on ne peut le nier.

Le sénateur Nolin: Ont-ils offert des solutions de rechange?

Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, la majorité des témoins, d'une part favorisaient l'abolition de ce projet de loi, parce qu'on ne sentait pas de progrès et, d'autre part, ils demandaient des amendements majeurs sur les montants d'argent plafonnés sur une limite de temps pour recevoir des réclamations, et beaucoup d'autres amendements.

Il y a eu une amélioration du côté du plafond financier. Le montant initial de 7,3 millions de dollars a été haussé à 10 millions de dollars. C'est une recommandation du comité. Je ne sais pas si elle sera adoptée. En réalité, il n'y a pas de limite de temps, d'améliorations majeures ailleurs. Il n'y a que des arrangements administratifs.

(1710)

[Traduction]

L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, j'ai écouté attentivement l'honorable sénateur qui nous a informés que le chef Phil Fontaine avait pris position à cet égard. Je n'étais pas au courant de ce nouveau développement.

Le sénateur Gill pourrait-il nous dire quand a été expédiée la lettre dont il a fait lecture et à qui elle était adressée?

[Français]

Le sénateur Gill: La lettre est datée du 2 octobre 2003 et est adressée au sénateur Thelma Chalifoux, la présidente du comité. Elle est signée par Phil Fontaine, le chef national.

[Traduction]

Le sénateur Cools: La lettre est-elle adressée à madame le sénateur Chalifoux en sa qualité de présidente du Comité sénatorial permanent des peuples autochtones?

[Français]

Le sénateur Gill: J'imagine que oui parce c'est inscrit: Chairperson, Senate Standing Comittee on Aboriginal Peoples.

[Traduction]

Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, il me semble que cette lettre et les opinions qui y sont exprimées sont importantes dans le cadre du débat et de l'étude qu'effectue le Sénat. Je n'avais pas pris connaissance de ces nouveaux renseignements que je juge très importants.

Le sénateur Gill a cité la lettre du chef Fontaine. Le sénateur Gill pourrait-il déposer cette lettre au Sénat aujourd'hui afin qu'elle soit inscrite au compte rendu et que les sénateurs puissent en prendre connaissance dès demain?

[Français]

Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, je ne connais pas la procédure; la permission devrait-elle être demandée à la destinataire de la lettre, le sénateur Chalifoux? Faudrait-il demander la permission au comité? Je ne connais pas la procédure.

[Traduction]

Le sénateur Cools: C'est simple. L'honorable sénateur n'a qu'à demander la permission du Sénat pour déposer la lettre, puis à remettre la lettre aux greffiers.

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?

Des voix: D'accord.

[Traduction]

L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, le sénateur Gill accepterait-il de répondre à au moins une question?

[Français]

Le sénateur Gill: Si elle n'est pas trop difficile.

[Traduction]

Le sénateur Watt: Je sais que l'honorable sénateur a participé de manière directe aux activités établies dans le passé pour les peuples autochtones. Comme il l'a dit, il a été directeur général à Québec. Autrement dit, il dirigeait le ministère des Affaires indiennes à Québec, ce dont je me souviens très bien. Lorsqu'il était directeur général, savait-il qu'il y avait des conflits au sein même du ministère? Peut-il nous donner plus d'explications à ce sujet?

[Français]

Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, j'ai toujours essayé d'œuvrer, peu importe mes responsabilités, en accord avec les priorités des Premières nations en pensant qu'on devait servir le Canada. J'ai toujours servi d'une façon, à mon avis, correcte. Je l'ai fait en servant les Autochtones et le pays. J'ai senti ce conflit, depuis toujours.

[Traduction]

L'honorable Gerry St. Germain: Honorables sénateurs, j'ai une question. Je suis à Ottawa depuis vingt ans, soit dix ans à l'autre endroit et dix ans au Sénat. Au cours des ans, j'ai cerné la manière partisane dont nous travaillons. Dans le domaine des affaires autochtones, nous avons tenté de travailler de manière non partisane.

Lorsque nous avons travaillé à l'entente conclue avec les Nisga'a, nous avons eu quelques différends. Cependant, lorsqu'une personne telle que le sénateur Gill s'exprime, il fonde sa position sur son expérience.

Avec tout le respect que je dois au sénateur Austin, il n'est pas Autochtone. C'est un grand Canadien et il a accompli un travail formidable en Colombie-Britannique. Toutefois, il a été congédié et son congédiement constitue, à mon avis, une atteinte aux droits des Autochtones.

Les sénateurs Gill, Watt et Adams sont ravis de leurs liens avec le Parti libéral. Toutefois, cette question s'élève au-dessus du libéralisme, du conservatisme et de l'alliancisme.

L'honorable sénateur a-t-il l'impression que les droits et les préoccupations des Autochtones sont bafoués lorsqu'on veut faire adopter de force et à toute vapeur le projet de loi et notamment ses dispositions sur la nomination des commissaires?

[Français]

Le sénateur Gill: Mon sentiment est oui, c'est exact. Ce n'est pas d'aujourd'hui. Ce n'est pas nouveau. Cela fait très longtemps. Je me demande: quand va-t-on arrêter?

[Traduction]

Le sénateur St. Germain: Je ne sais à quel moment cela va cesser. Aujourd'hui, nous avons parlé de la situation des Métis. Le sénateur Austin, qui a été, en 1982, l'un des promoteurs de la Charte canadienne des droits et libertés, m'a corrigé. Il a eu raison de me signaler que les droits des Métis découlent directement de la charte des droits. Cependant, pour faire reconnaître leurs droits, les Métis ont dû se rendre jusqu'en Cour suprême. Si ces droits ont été inscrits dans la charte, pourquoi les Métis ont-ils dû porter la cause Powley jusqu'à la Cour suprême pour que leurs droits de chasse soient reconnus? Le sénateur Austin affirme qu'ils possèdent ces droits en vertu de la Constitution. Ils doivent néanmoins les réclamer en Cour suprême.

Le sénateur Gill a raison de dire aux Canadiens que les droits de nos peuples autochtones ont été brimés dès le début, qu'il se soit agi des pensionnats, des réserves ou de toute autre question. Ce n'est pas ce qu'ils souhaitaient. Est-ce que l'honorable sénateur croit que cela va cesser un jour?

[Français]

Le sénateur Gill: Malgré tous mes sentiments et toute mon émotivité, je pense que, malgré tous les problèmes que nous affrontons, j'ai confiance.

[Traduction]

L'honorable Willie Adams: Honorables sénateurs, je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur le Président intérimaire: Honorables sénateurs, vous plaît-il d'adopter la motion?

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je demande la raison de l'ajournement. Je crois que la motion du sénateur Gill n'a pas été présentée. Est-ce que l'on ajourne le débat sur l'amendement? L'amendement n'a pas été proposé, je ne crois pas. La question n'a pas été posée. Je n'ai aucun problème à ce que la motion d'ajournement soit accordée sur la motion d'amendement. Je veux être certain que la question sur la motion d'amendement ait été posée, que le débat ait suivi sur cet amendement et que l'on ajourne sur la motion d'amendement du sénateur Gill. Je veux clarifier la situation.

(1720)

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Je suis d'accord parce que j'ai attendu que Son Honneur propose l'amendement. La solution est très simple. Si Son Honneur veut bien présenter l'amendement proposé par le sénateur Gill.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, il est proposé par le sénateur Gill, appuyé par le sénateur Watt:

Que le projet de loi C-6 ne soit pas maintenant lu une troisième fois mais qu'il soit lu une troisième fois dans six mois de ce jour.

Le sénateur Adams: Honorables sénateurs, je propose l'ajournement du débat.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Plaît-il aux sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(Sur la motion du sénateur Adams, le débat est ajourné.)

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR LA MODERNISATION DE LA FONCTION PUBLIQUE

TROISIÈME LECTURE—MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Harb, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-25, Loi modernisant le régime de l'emploi et des relations de travail dans la fonction publique, modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur le Centre canadien de gestion et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois;

Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Beaudoin, appuyée par l'honorable sénateur Comeau, que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 12, à la page 126, par substitution, aux lignes 9 à 13, de ce qui suit:

«30. (1) Les nominations — internes ou externes — à la fonction publique par la Commission sont indépendantes de toute influence politique, sont fondées sur le mérite et sont faites par concours ou par tout autre mode de sélection du personnel permettant d'établir le mérite relatif des candidats qui, de l'avis de celle-ci, sert les intérêts de la fonction publique.

(1.1) Malgré le paragraphe (1), une nomination peut être fondée sur le mérite individuel dans les circonstances prévues par règlement de la Commission.

(2) Une nomination est fondée sur le mérite individuel».

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je suis heureux de participer à ce débat. Le projet de loi C-25 remplace le mérite relatif par le mérite individuel, délègue des pouvoirs aux gestionnaires à des cadres inférieurs, facilite la tenue de concours lorsqu'un seul candidat est retenu et limite les possibilités d'intervention par la Commission de la fonction publique.

Le Commissariat à la protection de la vie privée avait plus ou moins le droit de régler à sa guise les questions relatives au personnel.

Le rapport de vérification des pratiques d'embauche du Commissariat à la protection de la vie de la Commission de la fonction publique et le rapport de la vérificatrice générale nous révèlent les types de problèmes que suscite la délégation de pouvoirs en l'absence de mesures de protection adéquates.

Je pense, en particulier, à la possibilité, pour les gestionnaires, de truquer les concours de façon qu'un seul candidat satisfasse aux critères de qualification. Honorables sénateurs, le comité a souvent été averti que les gestionnaires pouvaient modifier les critères de qualification de façon à ce qu'il n'y ait qu'un seul candidat qui réponde aux critères. Ceux qui ne croient pas que ce soit possible feraient bien de jeter un coup d'oeil au rapport de la vérificatrice générale. Voici ce qu'elle écrit, sous la rubrique «Le Commissariat a manipulé le processus pour favoriser des candidats»:

Nous avons relevé des concours où des critères de sélection favorisaient un candidat en particulier, mais n'étaient pas pertinents au poste. Dans plusieurs cas, les exigences linguistiques ont été modifiées pour correspondre au profil du candidat favorisé plutôt qu'aux exigences du poste lui- même.

Dans un autre cas, la préférence a été donnée à une personne ayant l'expérience des «médias écrits», expérience qui semblait sans rapport avec le travail à effectuer. Quand le commissariat voulait embaucher un candidat en particulier, de l'extérieur de l'organisation, qui connaissait très peu la Loi sur la protection des renseignements personnels et les autres lois pertinentes, il accordait peu de poids à cette connaissance. Quand le commissariat voulait exclure des candidats de l'extérieur, il exigeait une connaissance approfondie des lois relatives à la protection de la vie privée.

Honorables sénateurs, nous devons nous assurer que les critères de qualification ne puissent être modifiés sans l'accord de la Commission de la fonction publique. Il y a sûrement une leçon à tirer du fiasco du Commissariat à la protection de la vie privée.

Au cours d'une conférence de presse, la vérificatrice générale a dit qu'elle était révoltée par ce qu'elle avait trouvé. Elle précise ce qui suit, dans son communiqué:

J'ai le regret de vous annoncer que notre vérification a révélé une défaillance majeure des contrôles de gestion et que l'ancien commissaire et certains cadres de direction ont fait une utilisation abusive des fonds publics pour leur compte personnel.

Ce qui est encore plus troublant, c'est la façon dont les employés ont été traités. Le coût humain est important. Je crains que les torts ne soient encore plus grands si ce cas inhabituel était généralisé à l'ensemble des employés du Commissariat à la protection de la vie privée et à l'ensemble de la fonction publique. Cela nuirait grandement aux milliers de femmes et d'hommes honnêtes et dévoués qui sont au service des Canadiens partout au pays.

Elle poursuit:

L'ancien commissaire et certains cadres de direction ne se sont pas acquittés de leurs obligations de gestion et les organismes centraux n'ont pas pris les mesures nécessaires quand ils ont pris connaissance des problèmes. C'est pourquoi la situation a persisté pendant aussi longtemps.

Parmi les nombreuses découvertes faites par la vérificatrice générale, mentionnons les éléments suivants: premièrement, que les postes étaient surclassifiés, ce qui entraînait des coûts salariaux élevés, et qu'il y avait du favoritisme lors de l'embauche et des primes de rendement injustifiées; deuxièmement, l'ancien commissaire a reçu un paiement inapproprié de 15 000 $; troisièmement, des états financiers ont été falsifiés pour camoufler le fait que les dépenses étaient supérieures à la limite approuvée par le Parlement, à savoir par nous; quatrièmement, l'ancien commissaire à la protection de la vie privée a engagé des dépenses élevées pour des voyages et des activités d'accueil et, dans de nombreux cas, la valeur obtenue en contrepartie était faible.

La vérificatrice générale a également dit que: «les mécanismes de dénonciation sont perçus comme inefficaces ou inexistants».

Elle a ajouté que les employés:

considéraient les mécanismes de divulgation concernant des actes fautifs ou une mauvaise gestion financière comme généralement inefficaces et offrant peu de protection — voire aucune — aux membres du personnel qui pourraient informer un agent supérieur ou l'Agent de l'intégrité de la fonction publique.

Elle a dit que les employés avaient

... parlé du climat de travail malsain qui régnait au Commissariat, où l'ancien commissaire intimidait le personnel. Les entrevues ont fait état invariablement d'exemples de comportement autoritaire de la part de l'ancien commissaire ou de certains cadres qui exécutaient ses directives, comportement que les employés qualifiaient de «régime de terreur».

Elle a en outre précisé:

... on a relaté à maintes reprises, au cours des entrevues, des cas où l'ancien commissaire avait humilié le personnel, lui avait fait des commentaires inappropriés et avait fait preuve d'intolérance à son égard [...] ce qui est un comportement inacceptable au sein de la société canadienne et dans la fonction publique en particulier.

Certains employés ont dit qu'on les avait découragés de consigner leurs préoccupations en dossier; ceux qui l'ont fait ont été maltraités.

Honorables sénateurs, elle nous a également dit que «certains employés se sont effondrés alors qu'ils racontaient comment ils avaient été traités». Elle a déclaré:

Nous avons appris que certains employés qui s'étaient opposés à l'ancien commissaire ou à son cercle intime, ou qui leur avaient déplu, avaient été chassés de l'étage du bureau du commissaire et exclus des réunions auxquelles ils auraient dû assister, n'avaient pas été autorisés à mettre leur nom sur des rapports et avaient été transférés à d'autres postes. Dans un cas, le travail d'un employé a été donné à contrat.

Pour ce qui est des valeurs essentielles de la fonction publique, on a constaté:

... un mépris flagrant des quatre valeurs fondamentales de la dotation adoptées par la Commission de la fonction publique: l'objectivité politique (y compris le favoritisme bureaucratique), la justice, l'équité et la transparence. Nous avons trouvé des preuves amplement suffisantes montrant que l'on évitait de tenir des concours pour doter les postes et que l'on contournait les processus de dotation établis par la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Nous avons relevé des cas où des personnes embauchées étaient des amis, des connaissances ou d'anciens collègues de l'ancien commissaire ou des cadres supérieurs.

(1730)

La vérificatrice générale a donné l'exemple d'un emploi pour étudiant qui a été créé pour l'amie du fils de l'ancien commissaire; cet emploi commandait un salaire de 50 p. 100 supérieur au salaire habituel payé à un étudiant embauché pour l'été et il était assorti d'une charge de travail extrêmement légère même si l'étudiante demandait davantage de travail.

Honorables sénateurs, une partie du problème est attribuable au fait que la Commission de la fonction publique est paralysée ces dernières années par un manque de ressources, ce qui complique davantage les vérifications visant à déceler les promotions et les procédures d'embauche inadéquates. Une partie du problème tient au fait que la Commission de la fonction publique n'a pas été assez vindicative. Une partie du problème est attribuable au fait qu'elle a cru les cadres du Commissariat à la protection de la vie privée lorsqu'ils ont dit qu'ils progressaient dans leur recherche d'une solution aux problèmes qui avaient été soulevés.

Comme l'a mentionné la Commission de la fonction publique dans sa réponse à la vérificatrice générale, son programme de surveillance «...dépend de la volonté de l'administrateur général ou l'administratrice générale d'assurer le suivi aux préoccupations soulevées, la CFP intervenant en dernière instance».

Selon un article paru dans l'Ottawa Citizen du 30 septembre 2003, Greg Gauld, vice-président de la Politique et responsabilisation en matière de mérite à la Commission de la fonction publique, aurait déclaré que «c'est probablement le pire (cas) qu'il nous ait été donné de voir en matière de dotation».

Ce qui suit est tiré du Sommaire des principales constatations de la vérification effectuée par la Commission de la fonction publique:

L'équipe de vérification a constaté que:

Les stratégies, plans et politiques du Commissariat à la protection de la vie privée (CPVP) mis en œuvre à l'appui des activités de dotation et de recrutement sont inadéquats;

Les rôles et les responsabilités en matière de dotation ne sont ni définis ni exécutés de façon adéquate;

Les communications liées aux activités de dotation sont inadéquates;

Les systèmes de rapports et de contrôle concernant les activités de dotation sont inadéquats;

L'agencement des processus de dotation et des sources de candidats et de candidates ne permet pas au CPVP de relever le défi de mettre en œuvre un mandat renforcé;

La dotation des postes autres que ceux de cadre de direction n'est pas conforme au cadre législatif et stratégique pertinent;

De façon générale, la dotation des postes de cadre de direction par la Commission de la fonction publique (CFP) est conforme au cadre législatif et stratégique pertinent. Cependant, certaines mesures laissent planer un doute quant à l'application des valeurs de dotation;

Le CPVP respecte les exigences techniques des politiques qui régissent la divulgation, à l'interne, des préoccupations que pourraient avoir les membres du personnel du CPVP concernant la dotation. Ces exigences englobent celles de la Politique sur la divulgation interne d'information concernant les actes fautifs au travail. Toutefois, cela ne constitue pas un mécanisme efficace de correction des actes fautifs en dotation.

Les constatations de la présente vérification montrent qu'il y a de graves irrégularités sur le plan de la gestion et des opérations de dotation et de recrutement au CPVP.

Honorables sénateurs, le principe du mérite et la loi régissant la dotation des postes autres que ceux de cadre de direction ont été gravement bafoués. Toutefois, le projet de loi C-25 permettrait d'établir des exigences de dotation sur mesure afin de favoriser une personne en particulier. N'avons-nous rien appris? Les commentaires de l'équipe de vérification sur la dotation des postes autres que ceux de cadre de direction n'offrent qu'un avant-goût de ce à quoi on pourra s'attendre une fois que le projet de loi C-25 sera adopté. Pour ce qui est de la dotation au cours de la période allant de septembre 2000 à juin 2003, on peut lire ce qui suit dans le rapport:

L'équipe de vérification a constaté que la dotation des postes autres que ceux de cadre de direction n'est pas conforme au cadre législatif et stratégique pertinent.

... l'équipe de vérification a constaté une tendance à établir des exigences de dotation sur mesure afin de favoriser une personne en particulier. Le type d'opérations relevé soulève un doute quant au respect des valeurs de dotation.

La dotation a été confiée à des gestionnaires qui n'ont pas respecté les procédures approuvées, ce qui a donné lieu au commentaire suivant:

L'absence de stratégies, de plans et de politiques en matière de gestion des ressources humaines a entraîné la prise de décisions individuelles en matière de dotation, ce qui n'est pas nécessairement dans le meilleur intérêt à long terme du CPVP. Tout cela contribue à une perception de non-respect des valeurs de dotation, plus particulièrement en ce qui a trait à l'égalité d'accès et à l'absence de favoritisme bureaucratique.

Chaque personne interrogée constate qu'au sein du CPVP, les gestionnaires décident en fonction du résultat souhaité, soit la personne qu'ils souhaitent recruter ou promouvoir, et le personnel des ressources humaines fait en sorte «que cela se produise». Résultat: une indifférence générale à l'égard des valeurs de dotation, ce qui mine le cadre législatif en vigueur.

Honorables sénateurs, convient-il vraiment de choisir le mérite individuel de préférence au mérite relatif? Est-il souhaitable de laisser tomber certaines mesures de sauvegarde en vigueur à l'heure actuelle dans le processus de dotation?

En ce qui concerne les systèmes de rapports et de contrôle sur la dotation, on nous dit que:

Les cadres supérieurs ne demandent ni ne reçoivent d'information liée aux résultats des activités de dotation; ils ne reçoivent que les rapports d'étape sur les activités permanentes de dotation. Les rapports sur la dotation, l'équité en matière d'emploi et les langues officielles destinés aux organismes centraux ne sont pas utilisés aux fins de la prise de décisions par les gestionnaires.

Un examen de quelques nominations a donné lieu aux observations suivantes:

sur 35 reclassifications (concernant 27 employés), 13 avaient fait l'objet d'une mutation ou d'un transfert préalable et parmi elles, cinq [...] ont été reclassifiées dans une période d'un mois et deux autres [...] dans une période de quatre mois; une telle approche constitue une menace pour l'égalité d'accès et la transparence;

un nombre total de 34 fonctionnaires ont été mutés ou transférés et sept d'entre eux [...] ont reçu leur rémunération provisoire le jour même de l'entrée en vigueur de la mutation ou le jour suivant; cette situation soulève des doutes quant au respect de la compétence, de l'égalité d'accès et de la transparence;

la situation d'emploi de 13 personnes a été convertie de période temporaire (ou emploi contractuel) à période déterminée ou indéterminée par voie de concours publics pour lesquels les exigences de dotation ont été établies sur mesure afin que ces personnes réussissent; là encore, il y a menace à l'égalité d'accès et à la justice;

dans 22 dossiers, on a constaté que la documentation visant à démontrer le respect du principe du mérite était inadéquate (aucune évaluation ou évaluation incomplète, aucune liste d'admissibilité valide, irrégularités et modifications non appropriées au regard des exigences linguistiques et en matière de sécurité);

sept personnes pourraient devoir leur recrutement au CPVP, et dans certains cas leur avancement subséquent, à des relations professionnelles ou personnelles antérieures avec l'ancien commissaire à la protection de la vie privée.

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorable sénateur, le temps qui vous était imparti est écoulé. Désirez-vous demander la permission de continuer?

Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, je demande effectivement la permission de continuer.

Des voix: D'accord.

Le sénateur Di Nino: Je vous remercie, honorables sénateurs.

L'honorable Jean-Robert Gauthier: Je fais vraiment de mon mieux pour suivre l'argument qu'expose le sénateur Di Nino. Il parle du sous-amendement à la motion principale et je ne comprends pas pourquoi il soulève la question de la classification parce qu'elle n'a rien à voir avec le principe du mérite. C'est l'employeur qui établit les normes de classification et c'est la commission qui s'occupe du mérite. Ce sont deux choses totalement différentes.

Le sénateur Di Nino: Si l'honorable sénateur me permet de terminer, je répondrai aux questions plus tard.

Le gouvernement refuse encore de légiférer pour assurer la protection des dénonciateurs, alors que la vérificatrice générale soutient ce qui suit:

Une majorité de membres du personnel et de gestionnaires interrogés ont indiqué qu'ils avaient peur de représailles relativement aux nominations futures s'ils se plaignaient d'actes fautifs au CPVP. Ils ont également mentionné un manque de confiance à l'endroit des organismes centraux qui, à leur avis, ne jouent pas un rôle de surveillance efficace dans la protection des fonctionnaires qui portent plainte.

Honorables sénateurs, sérieusement, je ne comprends pas pourquoi le gouvernement voudrait adopter ce projet de loi dans son état actuel, sachant à l'avance le genre de manchettes qu'il risque de provoquer dans trois ou quatre ans d'ici. Le projet de loi C-25 est peut-être un cheval de Troie que le régime sortant laisse en cadeau à M. Martin.

Dans sa réponse écrite au rapport de la vérificatrice générale, la présidente du Conseil du Trésor déclare: «Je remercie la vérificatrice générale du travail qu'elle a accompli dans ce dossier. Ses conclusions me préoccupent et me troublent au plus haut point... Ce n'est pas là la fonction publique que je connais.»

(1740)

Honorables sénateurs, nous ne pouvons en toute bonne foi adopter le projet de loi C-25, mesure prévoyant une réforme de la fonction publique qui pourrait fort vraisemblablement reposer sur une idée fausse de la réalité. Adressez-vous aux fonctionnaires ordinaires et ils vous diront qu'ils savent souvent qui va gagner un concours avant même que celui-ci soit annoncé. Il existe à tout le moins de la transparence en vertu des règles actuelles, ainsi que des mécanismes visant à maintenir un équilibre. Adressez-vous à des fonctionnaires appartenant à une minorité visible et bon nombre d'entre eux vous diront que la discrimination en milieu de travail nuit à leurs possibilités d'avancement, en dépit des mesures de protection qui existent déjà. Demandez à des fonctionnaires ordinaires s'ils seraient disposés à dénoncer des gestes répréhensibles et ils vous répondront qu'ils ne tiennent absolument pas à mettre leur carrière en péril.

Nous aimerions croire que la possibilité que l'on repère des problèmes semblables dans d'autres petits fiefs au sein du gouvernement n'existe pas, mais nous ne savons pas si c'est le cas. Pourtant, on nous demande de déléguer plus de pouvoirs vers le bas.

Honorables sénateurs, nous devons réexaminer sérieusement la façon dont ce projet de loi influe sur le principe du mérite, la façon dont il fait tomber les mesures de protection existantes, ou encore le manque de protection accordée aux dénonciateurs, et la façon dont il permet de déléguer vers le bas le pouvoir d'embauche de la Commission de la fonction publique. Le projet de loi doit être modifié afin de veiller à ce que les gestionnaires ne puissent changer unilatéralement les descriptions d'emploi simplement pour les adapter aux personnes qu'ils veulent embaucher. Il doit être modifié pour éviter que les cas de favoritisme bureaucratique relevés par la vérificatrice générale ne puissent se reproduire.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Consiglio Di Nino: Par conséquent, honorables sénateurs, je propose, appuyé par le sénateur Nolin, que la motion d'amendement soit modifiée:

a) par substitution, au passage «à la page 126, par substitution, aux lignes 9 à 13», de ce qui suit:

«a) à la page 126, par substitution, aux lignes 9 à 12»;

b) par adjonction, après les mots «indépendantes de toute influence politique», de ce qui suit:

«et de favoritisme bureaucratique»;

c) par substitution, au passage «de la Commission. (2) Une nomination est fondée sur le mérite individuel», de ce qui suit:

«de la Commission».; et

b) à la page 127, par adjonction, après la ligne 9, de ce qui suit:

«(3) Les qualifications mentionnées à l'alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i) et toute norme de qualification mentionnée au paragraphe (1) établies pour une nomination à un poste ou à une catégorie de postes s'appliquent aux nominations futures à ce poste ou cette catégorie de postes, sauf si l'administrateur général ou l'employeur a modifié ces qualifications ou normes de qualification, selon le cas, avec l'approbation de la Commission».

[Français]

Le sénateur Gauthier: Honorables sénateurs, je veux prendre la parole sur cet amendement. Puis-je avoir une copie de l'amendement? J'ai été trois ans à l'hôpital, ils m'ont dit que j'étais impatient.

[Traduction]

J'ai le sous-amendement. Je souhaite intervenir à ce sujet étant donné que j'ai travaillé fort au projet de loi C-25 et que l'occasion ne m'a pas encore été fournie d'exprimer mes observations sur la motion principale. Conformément à la pratique, j'ai le droit d'intervenir au sujet de ce projet de loi.

(Sur la motion du sénateur Gauthier, le débat est ajourné.)

LA LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADA

PROJET DE LOI MODIFICATIF—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Carstairs, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Graham, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-34, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (conseiller sénatorial en éthique et commissaire à l'éthique) et certaines lois en conséquence.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, le leader du gouvernement a attiré notre attention sur le travail du sénateur Oliver lors de la présentation de ce projet de loi. Le sénateur Oliver est le porte-parole de l'opposition relativement à ce projet de loi. J'aimerais obtenir la permission de la Chambre pour proposer l'ajournement du débat au nom du sénateur Oliver, de manière à ce qu'il dispose de toute la période de 45 minutes. Toutefois, je ne voudrais pas entraver la progression de nos travaux sur ce projet de loi si d'autres sénateurs souhaitent intervenir maintenant.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): J'inviterais les honorables sénateurs qui ont l'intention de se prononcer sur ce projet de loi à le faire aujourd'hui ou demain, lorsqu'il y aura un peu plus de temps. Nous acceptons l'invitation de l'honorable sénateur Kinsella voulant que l'ajournement demeure au nom de l'honorable sénateur Oliver. Même si quelqu'un devait parler avant lui, il conserverait son rang de deuxième orateur après le leader du gouvernement.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Oliver, le débat est ajourné.)

(1730)

[Traduction]

PROJET DE LOI SUR LA DÉNONCIATION DANS LA FONCTION PUBLIQUE

DEUXIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Kinsella, appuyée par l'honorable sénateur Murray, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-6, Loi visant à favoriser la prévention des conduites répréhensibles dans la fonction publique en établissant un cadre pour la sensibilisation aux pratiques conformes à l'éthique en milieu de travail, le traitement des allégations de conduites répréhensibles et la protection des dénonciateurs.—(L'honorable sénateur Kinsella).

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, j'ai appris que j'ai 40 minutes de plus pour parler.

Il a été question du projet de loi S-6 dans les discussions en comité sur le projet de loi C-25. Il existe un rapport entre ces deux mesures législatives. Le sénateur Di Nino a effectivement soulevé la question de la dénonciation dans ses propos cet après-midi.

L'importance de créer un cadre législatif favorisant la dénonciation a suscité beaucoup d'attention dans les médias dernièrement, en raison surtout des événements survenus au Commissariat à la protection de la vie privée et des commentaires de la vérificatrice générale.

Honorables sénateurs, le modèle contenu dans le projet de loi S-6 est exactement le même que celui qui était proposé dans le projet de loi ayant franchi l'étape de la deuxième lecture et reçu l'appui du comité au cours de la session précédente, mais qui, comme vous le savez, est mort au Feuilleton au moment de la prorogation. Le Sénat joue un rôle important en maintenant cette question devant le Parlement, même sous la forme de ce projet de loi. Je préférerais continuer de débattre de cette mesure législative après avoir vu ce qu'il advient du C-25. Je sais que les honorables sénateurs d'en face voudront se prononcer sur ce que propose la présidente du Conseil du Trésor. Il nous faudra examiner cette question lorsque nous ferons l'étude du projet de loi C-25.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, le débat est ajourné.)

[Français]

DROITS DE LA PERSONNE

BUDGET POUR L'ÉTUDE SUR DES INTÉRÊTS SPÉCIFIQUES—RAPPORT DU COMITÉ—RECOURS AU RÈGLEMENT—DÉCISION DU PRÉSIDENT

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Chaput, appuyée par l'honorable sénateur Trenholme Counsell, tendant l'adoption du cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (budget—étude sur des témoignages pour la défense d'intérêts spécifiques concernant les droits de la personne), présenté au Sénat le 25 septembre 2003.—(Décision du Président).

Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, hier, tandis que le débat sur la motion d'adoption du cinquième rapport du Comité permanent des droits de la personne allait commencer, le sénateur Lynch-Staunton a invoqué le Règlement. Le leader de l'opposition a déclaré que l'ordre de renvoi aux termes duquel le Comité des droits de la personne exerce actuellement ses activités ne prévoyait pas l'autorisation d'effectuer des déplacements. Le mandat actuel du comité, comme le sénateur l'a souligné, l'autorise à entendre des témoins qui défendent des intérêts spécifiques concernant les droits de la personne. Comme il l'a ajouté, il n'est nullement question de voyage dans ce mandat. Le sénateur Lynch-Staunton a soutenu, et je cite: «La pratique a toujours été que, si un comité croit qu'il doit voyager pour remplir son mandat, il en fasse la demande dans le mandat initial afin que le Sénat soit informé, au moment de la demande, de la façon exacte dont le comité compte exécuter le mandat que lui confie le Sénat.» Le leader de l'opposition a ensuite cité deux ouvrages faisant autorité en matière parlementaire selon lesquels les comités doivent s'en tenir à leur ordre de renvoi et ne pas y déroger. Se fondant sur l'avis de ces deux ouvrages, le sénateur Lynch-Staunton a fait valoir que le Comité permanent des droits de la personne, en vertu de son mandat, doit limiter son étude à la seule région de la capitale nationale «car aucun pouvoir ne lui a été délégué pour qu'il mène son étude à l'extérieur de cette zone géographique».

[Traduction]

En réponse, madame le sénateur Maheu a examiné la nature du mandat du comité et l'importance du déplacement envisagé à Genève et à Strasbourg. Comme le sénateur l'a expliqué, ces déplacements sont essentiels au travail du comité, car ils lui permettent de mieux comprendre les obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne et d'avoir un aperçu de la structure des organismes assurant la protection et la promotion des droits de la personne sur la scène internationale. En conclusion, le sénateur Maheu a rappelé que le déplacement envisagé, comme celui que le comité a effectué au Costa Rica dans le cadre d'une étude antérieure, fait avancer le travail du Sénat.

Le leader adjoint du gouvernement, le sénateur Robichaud, a expliqué que la démarche suivie par le comité pour faire autoriser le déplacement, par le dépôt d'un rapport, est conforme aux pratiques du Sénat. Tout comité qui entreprend une étude spéciale l'obligeant à se déplacer doit d'abord préparer un budget estimatif des frais de déplacement. Le Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration examine ensuite le rapport de ce budget et formule ses recommandations, après quoi le comité doit présenter un rapport au Sénat. Le rapport, qui comprend en annexe le détail des frais de déplacement approuvés par la Régie interne, doit être adopté par le Sénat. Sans la sanction du Sénat, le comité ne peut se déplacer.

Ce rappel au Règlement a suscité d'autres interventions de la part des sénateurs Kinsella, Stratton et Nolin à l'appui de la position générale adoptée par le sénateur Lynch-Staunton. Je remercie tous les honorables sénateurs de leur contribution à ce débat. Durant la session en cours, cette question a été soulevée à quelques reprises. Pas plus tard qu'en mai dernier, le sénateur Lynch-Staunton a maintes fois discuté avec le sénateur Kenny des procédures actuelles d'établissement des coûts d'études de comité.

Peu importe les mérites ou les lacunes de nos procédures d'établissement des budgets des comités concernant les demandes de déplacement, en ma qualité de Présidente, je suis liée par les pratiques et les politiques que le Sénat a lui-même approuvées. Depuis 1986, le Sénat a observé certaines directives sur ce qu'on appelle les «dépenses spéciales», notamment les déplacements, qui peuvent survenir dans le cadre des études de comité. Ces directives figurent à l'annexe II du Règlement du Sénat.

En plus d'énoncer les étapes à suivre pour obtenir l'autorisation de se déplacer dont a fait mention le sénateur Robichaud, l'alinéa 2:02 des directives prévoit ce qui suit:

Un avis de motion visant à constituer un comité spécial ou à autoriser un comité à faire une étude spéciale ne doit contenir aucune mention de dépenses spéciales, mais doit indiquer la date à laquelle le comité doit faire rapport au Sénat.

Ce passage laisse entendre qu'aucun ordre de renvoi confiant une «étude spéciale» à un comité ne devrait contenir d'autorisation générale de se déplacer.

[Français]

Hier, certains sénateurs ont parlé d'une précédente étude du Comité des droits de la personne sur la Convention interaméricaine des droits de l'homme. Le Sénat a adopté cet ordre de renvoi le 21 novembre 2002, lequel ne contenait aucune mention de déplacement conformément à l'alinéa 2:02 des directives. Il autorisait simplement le comité à étudier «l'adhésion possible du Canada à la Convention américaine relative aux droits de l'homme» et à faire rapport le 27 juin 2003. Durant ses travaux, le comité a constaté qu'il devait se rendre au Costa Rica pour bien remplir son mandat, même si l'ordre de renvoi initial ne prévoyait aucun déplacement. Pour obtenir du Sénat la permission d'aller à San José, le comité a suivi la procédure énoncée dans les directives. Il a préparé un budget qui a été soumis au Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration puis a demandé au Sénat, au moyen d'un rapport distinct, la permission de voyager.

L'objet du cinquième rapport n'est pas différent. Les étapes suivies par le Comité des droits de la personne pour demander l'autorisation de se rendre à Strasbourg et à Genève respectent les directives établies. Je déclare donc qu'il n'y a pas matière à rappel au Règlement et que le débat sur le cinquième rapport peut maintenant commencer.

Honorables sénateurs, il est maintenant 18 heures. Conformément au paragraphe 13(1), je quitterai le fauteuil jusqu'à 20 heures.

Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

[Traduction]

L'honorable Anne C. Cools: Votre Honneur, je crois qu'il est recevable de demander aux honorables sénateurs s'ils veulent tenir compte de l'heure. Je crois, Votre Honneur, que vous auriez dû poser la question.

(La séance est ajournée jusqu'à 20 heures.)

(2000)

Le Sénat reprend sa séance.

Le sénateur Carstairs: Le vote!

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Honorables sénateurs, notre Règlement ne nous permet pas de débattre de la décision du Président, et je respecte cela, même si je ne partage pas nécessairement sa conclusion.

Cela fait ressortir, du moins à mon avis, la nécessité de revoir les modalités et directives que les comités sont censés respecter lorsqu'ils demandent qu'un mandat leur soit confié et qu'un budget leur soit accordé à cet égard. J'ai déjà parlé de cela auparavant. Je ne répéterai pas en long et en large tout ce que j'ai déjà expliqué, mais je me contenterai de dire que j'exhorte le Comité de la régie interne à établir des lignes directrices rigoureuses au sujet des mandats des comités, à insister pour que les mandats soient clairs, à insister pour que, si des déplacements sont nécessaires, il en soit fait mention dans le mandat initial et à insister pour qu'un budget soit inclus par la même occasion. Par conséquent, lorsque nous serons saisis de la question la première fois, nous pourrons en discuter, non pas de manière fragmentaire comme nous le faisons trop souvent, mais de manière globale et nous pourrons alors régler l'affaire une fois pour toutes.

Ce que je dénonce en l'occurrence — et cela n'a rien à voir avec mon opinion du Comité des droits de la personne —, c'est la façon de procéder. En mai, le mandat du comité ne prévoyait pas de déplacements, mais quelques mois plus tard, le comité nous dit qu'il lui faut un budget complémentaire pour faire une chose qu'il avait omis de mentionner la première fois.

Cela dit, c'est un appel lancé au Comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, qui a déjà beaucoup de travail à faire, mais qui peut siéger pendant n'importe quel ajournement ou prorogation du Sénat, pour qu'il établisse des lignes directrices et nous soumette une procédure faisant en sorte qu'un comité qui a besoin d'un mandat sache qu'une fois ce mandat confirmé, il ne peut plus s'adresser à nous de nouveau.

Cela dit, je vais parler du pour et du contre de la mission elle- même. Je n'ai aucune objection à l'égard de cette dernière. Il est tout à fait approprié que le Comité des droits de la personne puisse rencontrer des experts dans ce domaine dans le monde entier. Cela ne me pose aucun problème. Le problème est de savoir si c'est le bon moment pour le faire. À moins qu'un porte-parole du gouvernement ne puisse me contredire, il est évident, d'après ce que nous entendons et lisons, qu'après le 7 novembre, nous allons ajourner nos travaux jusqu'à la fin de janvier ou peut-être jusqu'en février. Cela veut dire que, si des membres du comité peuvent faire ce voyage maintenant, à leur retour, à moins qu'ils ne puissent faire rapport très rapidement, nous ne pourrons profiter des connaissances qu'ils auront acquises grâce à ce voyage.

Je propose ceci à la présidente du comité: ne serait-il pas préférable de retarder ce voyage à une époque où vous savez qu'à votre retour, vous aurez le temps de préparer le rapport et de le déposer à un moment où le Sénat siégera? Si, après le 7 novembre, nous mettons fin à nos travaux pour ne les reprendre qu'au début de l'année prochaine, cela veut dire que votre voyage ne profitera pas au Sénat, qui l'aura pourtant autorisé, à moins que vous ne vous engagiez à déposer un rapport d'ici le 7 novembre.

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je voudrais remercier le leader de l'opposition au Sénat de son intervention. Les sénateurs Beaudoin et LaPierre seront du voyage. Le sénateur Beaudoin a pour habitude de fournir des renseignements très détaillés à notre institution. C'est une source intarissable de connaissances. Nous allons rencontrer des groupes qui ont déjà critiqué notre gouvernement. Un rapport sera certes préparé lorsque nous serons à Genève et à Strasbourg. Est-ce que cela répond aux préoccupations du sénateur?

Le sénateur Lynch-Staunton: Ce qui m'inquiète, c'est que les bénéfices que l'on pourra tirer de ce voyage ne seront connus qu'après notre départ le 7 novembre prochain. D'ici à ce que nous revenions, après la prorogation — à moins bien sûr que le gouvernement ne puisse nous assurer qu'on ne prévoit pas proroger les travaux —, votre comité sera dissous et tous les efforts que vous aurez faits auront été vains et les renseignements que vous aurez recueillis et dont nous aurions pu profiter, inutiles. Il n'est peut-être pas pratique pour ceux qui sont prêts à partir de repousser la date du voyage, mais ce pourrait être mieux pour ceux d'entre nous qui aimeraient tirer profit de ce que le comité pourrait apprendre au cours de ses voyages.

L'honorable Sharon Carstairs (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, nous pourrions peut-être combiner les suggestions faites par les sénateurs Maheu et Lynch-Staunton. Les sénateurs et les membres des divers comités peuvent préparer des rapports provisoires. Je ne peux pas dire à notre collègue s'il y aura prorogation ou non parce que je n'en sais tout simplement rien. Toutefois, j'aimerais proposer au sénateur Maheu que le comité dépose un rapport provisoire sur son voyage le 7 novembre au plus tard. Cela permettrait à tous les sénateurs de profiter de son expérience.

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, j'aimerais poser une question au sénateur qui vient de prendre la parole. Qu'est-ce que cette question de prorogation dont il a parlé? Comment le gouvernement pourrait-il justifier une prorogation alors que...

Le sénateur Carstairs: Je soulignerais que c'est le sénateur Lynch- Staunton qui en a parlé.

Le sénateur Kinsella: Ma question est la suivante: étant donné la présence de soldats canadiens en Afghanistan, le problème non résolu de la vache folle qui touche les éleveurs canadiens de bovins de boucherie, la période propice à la grippe qui est à nos portes et la possibilité de devoir faire face à une réapparition du SRAS, les graves dommages causés par le passage récent d'un ouragan sur la côte est et les feux de forêts qui ont causé des dommages sur la côte ouest, comment le gouvernement peut-il songer à suspendre les travaux du Parlement plus tôt que ce qui est prévu au calendrier ou même songer à une prorogation?

Le sénateur Carstairs: Je ne sais pas du tout d'où vient cette idée à l'honorable sénateur. Le leader de l'opposition a soulevé la question des rumeurs et des insinuations qu'il a entendues. Je ne peux ni confirmer ni infirmer ces rumeurs et insinuations parce que, honnêtement, cette décision relève du premier ministre. Bien que je l'admire, que je le respecte et que j'aimerais croire faire partie de ses proches, il ne se confie pas à moi sur des sujets tels que la prorogation du Parlement du Canada.

(2010)

L'honorable John G. Bryden: Je poserai ma question au leader de l'opposition au Sénat. Selon son raisonnement, nous pourrions ne pas bénéficier de l'expérience du comité si ce qu'il imagine qui pourrait se produire se produit effectivement. Dans ce cas, ne devrions-nous pas annuler les projets de voyage de tous les comités jusqu'à ce que la question soit résolue, de façon que nous puissions bénéficier de ce qu'ils feront lorsqu'ils voyageront? Ne devrions- nous pas annuler tous les projets de voyages?

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, j'encourage le Comité des droits de la personne à se rendre à Genève et à Strasbourg. Je suis heureux qu'il envisage d'y aller. Je ne sais pas exactement qui la présidente veut emmener avec elle, mais c'est là une autre question.

Je n'aime pas la façon dont le comité a abordé la question. La Présidente intérimaire a rejeté le recours au Règlement. Soit. Je dis pour la dernière fois, du moins cette semaine, que nous devrions élaborer une procédure plus efficace, pour éviter de perdre du temps à cause de questions administratives courantes.

Est-ce que je souhaite que les comités ne voyagent pas? Au contraire. Je veux cependant que leurs projets de voyages soient connus au moment où ils demandent un certain mandat. Je ne veux pas être informé des projets de voyages six mois plus tard, comme s'il s'agissait d'une question secondaire. C'est tout ce que je voulais dire dans le recours au Règlement.

En ce qui concerne le choix du moment, je crois qu'il est mauvais du point de vue du Sénat, compte tenu de la possibilité de prorogation avant la fin de l'année. Bien entendu, le leader du gouvernement ne peut pas faire de commentaires à ce sujet, mais nous avons déjà abordé la question. D'habitude, les rumeurs de prorogation se vérifient.

Des voix: Le vote!

Le sénateur Maheu: Honorables sénateurs, je tiens à dire au leader de l'opposition que je suis consternée par l'opposition du leader adjoint de son parti au voyage du Comité des droits de la personne, d'autant plus que cette opposition vient de quelqu'un qui manifeste plus que tout autre au Sénat son intérêt pour les droits de la personne.

Je signale aux honorables sénateurs que lorsque nous avons initialement demandé notre budget, les déplacements y étaient prévus. Comme tous les comités, notre budget a été modifié parce qu'il n'y avait pas suffisamment d'argent dans le budget du Comité de la régie interne. Mais les déplacements y étaient prévus.

Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, c'est comme fouetter un cheval mort. Le fait est que, dans son mandat initial, elle n'a pas demandé de déplacement. La formule que je prône pour tous les comités, c'est de présenter simultanément une demande et un budget. C'est tout ce que je dis. Sur présentation du mandat initial, on devrait présenter en même temps une demande et un budget, afin que nous puissions les débattre et les approuver simultanément, de manière à éviter des heures d'un débat inutile et non productif comme celui que nous tenons en ce moment.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, si je comprends bien, nous reprenons le débat sur la motion qui nous est soumise. Je voudrais prendre part à ce débat.

Si vous consultez le Feuilleton, le débat porte sur la motion du sénateur Chaput, appuyée par le sénateur Trenholme Counsell, tendant à l'adoption du cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne. Voilà ce qui nous est soumis. Je n'ai entendu l'explication d'aucun des motionnaires sur cette motion. Peut-être pourrions-nous leur donner l'occasion de nous l'expliquer. S'ils ne souhaitent pas le faire, j'ai quelques commentaires à formuler au sujet de la motion qui nous est soumise.

Honorables sénateurs, la motion propose l'adoption d'un rapport qui compte trois paragraphes et une annexe. Ce n'est qu'en lisant cette annexe qu'on découvre le but du voyage.

Je suis d'accord sur ce que vient de dire le leader de l'opposition relativement au travail des comités; les comités sont effectivement au service du Sénat et celui-ci a le devoir d'énoncer clairement le mandat qu'il veut donner à un comité. Si nous ne l'avons pas fait dans le passé, nous devons accepter cette responsabilité.

MOTION D'AMENDEMENT

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Par conséquent, honorables sénateurs, nous devrions apporter un amendement à la motion dont nous sommes saisis en modifiant le cinquième rapport.

Je propose donc, appuyé par l'honorable sénateur Nolin:

Que le cinquième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne soit modifié par l'ajout, après les mots «autorisé à voyager à l'extérieur du Canada», de ce qui suit:

MANDAT POUR VOYAGER

1. À l'occasion de sa visite au bureau des Nations Unies, à Genève, le Comité se renseignera sur le respect du Canada quant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations Unies et au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels;

2. À l'occasion de sa visite à la Cour des droits de l'homme du Conseil de l'Europe, à Strasbourg, le Comité se renseignera sur l'application de la Charte sociale européenne à titre de modèle pour le Canada; et

3. Le comité fera rapport au Sénat le 4 novembre 2003 au plus tard.

Honorables sénateurs, j'appuie cette motion et je tiens simplement à dire que le travail du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, qui siège à Genève, fait appel à certains des plus grands experts du monde en matière de droits de la personne à l'échelle internationale. Il importe de noter que, à titre de pays, nous sommes partie à de nombreux organes des Nations Unies en matière de droits de la personne, en vertu du droit international conventionnel. Notre pays donne un exemple dont nous pouvons nous enorgueillir sur le plan de l'établissement de normes. Par conséquent, dans notre intérêt national et dans l'intérêt de tous les pays de la planète, nous devons nous assurer hors de tout doute que nous respectons toutes les dispositions des pactes internationaux.

C'est en 1976, à la suite d'une initiative datant de 1966, que les Nations Unies proposèrent de ratifier deux traités spéciaux offrant un mécanisme d'application des droits reconnus par le monde entier dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, proclamée le 10 décembre 1948. Il a fallu de 1948 à 1966 pour que la communauté internationale se mette d'accord sur le type de mécanismes qui conviendraient pour mettre en vigueur les droits qu'elle avait reconnus. Dans le cadre du processus qui avait eu lieu au cours de cette période, il avait été déterminé qu'il convenait de faire appel à deux ensembles de mécanismes, l'un pour la protection et la promotion des droits civils et politiques — les plus directement justiciables — et l'autre pour la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels.

(2020)

Il est important que nous disions cela dans cette Chambre. Les honorables sénateurs se souviendront qu'un comité mixte réunissant la Chambre des communes et le Sénat s'est réuni ici et a présenté un rapport lors du débat de Charlottetown. On peut lire à la page 88 du rapport mixte qu'il n'existait rien de tel que de véritables droits sociaux. Le comité avait tort en cela. Non seulement il existe des droits sociaux, mais le Canada, en ratifiant le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, a accepté d'assumer diverses obligations en vertu du droit international conventionnel, pour que ces droits sociaux et économiques soient respectés.

Ce voyage nous permettra d'apprendre énormément de choses. Cette motion, qui vise à modifier le rapport, parle de la visite de notre comité à Strasbourg et se concentre plutôt sur la Charte sociale européenne que sur la Convention européenne des droits de l'homme car nous sommes nombreux à croire que, à titre de Canadiens, nous n'avons le genre de charte sociale que nous devrions avoir. Nous pourrons apprendre comment les membres de la Communauté européenne, qui regroupe tant de pays si différents, avec des systèmes de gouvernance aussi divers, ont réussi à s'entendre et à adopter une charte sociale commune qui donne effet à l'exercice des droits à la santé, à l'éducation, aux loisirs et au travail. Ce sont là des droits d'ordre social au sujet desquels un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat a eu l'audace de dire, dans un rapport, qu'ils n'étaient pas vraiment des droits de la personne. Or, ce sont manifestement des droits de la personne et les honorables sénateurs membres du Comité permanent des droits de la personne en apprendront davantage au sujet de ces droits si, à Strasbourg, ils s'informent de la teneur de nos obligations internationales aux termes du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Honorables sénateurs, en 1966, le premier ministre Pearson a écrit à ses homologues de toutes les provinces du Canada. Nous nous rappelons tous comment, au début des années 80, nous avons appris qu'il y a, au Canada, une convention constitutionnelle en vertu de laquelle le pouvoir fédéral ne peut être exercé et aucun traité modifiant le pouvoir des provinces ne peut être signé sans l'accord préalable des provinces. C'est pour cette raison que le premier ministre Pearson a écrit à ses homologues des provinces.

Honorables sénateurs, savez-vous ce qui s'est produit? En 1976, toutes les provinces et territoires canadiens ont répondu au premier ministre qu'ils acceptaient que le Canada dépose l'instrument de ratification, non seulement à l'égard du pacte concernant les droits civils et politiques, mais aussi à l'égard du pacte concernant les droits économiques, sociaux et culturels.

Honorables sénateurs, depuis 1976, nous avons une norme en matière de droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, que toutes les provinces et tous les territoires canadiens ont acceptée. Il n'aurait pas été très difficile pour nous d'envisager une charte sociale puisque nous avions déjà cette entente. Au début des années 80, lorsque nous avons tenté d'élaborer une charte nationale des droits et libertés, l'ignorance, au Canada, de ces pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques s'est révélée haut et fort. Nombre de provinces et territoires ne s'étaient pas rendu compte que, en matière de droits de la personne, nous étions déjà tenus de respecter la norme qui avait fait l'objet d'un accord écrit entre les provinces et le gouvernement fédéral et que cet accord avait été validé par le dépôt de l'instrument de ratification.

Pour ces raisons, je suis d'accord avec le leader de l'opposition pour dire qu'il est tout à fait essentiel non seulement que le Comité des droits de la personne du Sénat analyse le système des Nations Unies, mais aussi que nous apprenions beaucoup du système européen. La visite du comité ne devrait pas être simplement une réunion mondaine. Elle doit être ciblée et notre ordre de renvoi aurait dû dire que nous voulions que notre comité étudie les pactes avec les représentants des Nations Unies et aille en apprendre le plus possible sur l'amélioration des droits de la personne au niveau national, à partir de l'expérience de la Communauté européenne. C'est pour cette raison que je propose cette motion d'amendement.

Des voix: Bravo!

Son Honneur la Présidente intérimaire: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion d'amendement?

(La motion d'amendement est adoptée.)

L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): L'amendement vient de notre côté, mais aucune copie n'en a été distribuée. J'insiste pour que lorsqu'un amendement est soumis, il y ait des copies pour tous les sénateurs. Ce n'est pas pour faire perdre du temps ici. C'est une question de respect pour le travail de notre institution. Allons-nous voter?

L'honorable Laurier L. LaPierre: Pourquoi ne pas présenter l'amendement à l'avance? Vous avez des photocopieuses comme nous tous?

Le sénateur Lynch-Staunton: Pourquoi ne pas adresser cette remarque au sénateur Gill et à d'autres tant que vous y êtes?

Le sénateur Kinsella: Où voulez-vous en venir?

Le sénateur LaPierre: Je veux savoir ce que nous faisons maintenant.

Le sénateur Kinsella: Nous ajournons le débat et nous étudierons cette question demain.

[Français]

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je crois que la question a été posée. Le vote a été pris et vous avez nettement indiqué que la motion était adoptée.

L'honorable sénateur Lynch-Staunton a dit que nous devrions avoir une copie de la motion d'amendement devant nous et que nous devrions respecter l'opinion de tous les sénateurs. Je suis entièrement d'accord.

C'est pour cette raison que nous avons adopté l'amendement de l'honorable sénateur Kinsella, qui est toujours très bien informé. Son amendement était tout à fait à point. Nous avons entièrement confiance en son jugement. Nous sommes tout à fait d'accord avec ce qu'il a dit. Nous serions prêts pour la question sur la motion principale.

Le sénateur Lynch-Staunton: J'aimerais savoir si la présidente du Comité des droits de la personne accepte l'amendement et si elle est prête à se plier à la date limite pour le dépôt de son rapport. Jusqu'à maintenant, je n'ai pas reçu cette assurance.

[Traduction]

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, lorsque nous avons parlé de rédiger un rapport préliminaire à notre retour de Genève et de Strasbourg, j'ai dit que nous le ferions là-bas. Je suis bien consciente des deux pactes et je suis bien consciente des deux comités. Nous rencontrerons tous les intervenants qu'il sera possible de rencontrer à Genève et au sein de l'Union européenne.

Le sénateur Kinsella: En tant que présidente du comité, madame le sénateur voit-elle un problème avec l'échéance du 4 novembre prévue pour le dépôt de ce rapport au Sénat?

Le sénateur Maheu: Non.

Le sénateur Carstairs: Le vote!

Son Honneur la Présidente intérimaire: Plaît-il aux sénateurs d'adopter le rapport sous sa forme modifiée?

(La motion est adoptée, et le rapport modifié est adopté.)

(2030)

BUDGET POUR L'ÉTUDE SUR LES ASPECTS JURIDIQUES CLÉS AYANT UNE INCIDENCE SUR LA QUESTION DES BIENS IMMOBILIERS MATRIMONIAUX SITUÉS
SUR UNE RÉSERVE EN CAS DE RUPTURE D'UN MARIAGE OU D'UNE UNION DE FAIT—ADOPTION DU RAPPORT DU COMITÉ

Le Sénat passe à l'étude du sixième rapport du Comité sénatorial permanent des droits de la personne (budget—étude sur le partage des biens matrimoniaux immobiliers dans les réserves), présenté au Sénat le 7 octobre 2003.—(L'honorable sénateur Maheu).

L'honorable Shirley Maheu propose: Que le rapport soit adopté.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

[Français]

LES TRAVAUX DU SÉNAT

L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Les honorables sénateurs seraient-ils d'accord pour que tous les articles qui n'ont pas été abordés soient reportés à la prochaine séance du Sénat, sans qu'ils perdent leur place respective au Feuilleton?

L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, y aurait-il possibilité de traiter du dernier article au Feuilleton, qui concerne le projet de loi S-20? Cet article semble piétiner depuis quelques jours. Il s'agit de l'amendement à la Loi sur le droit d'auteur à la page 18, le no 149.

Le sénateur Robichaud: L'honorable sénateur Nolin fait référence au dernier point à l'ordre du jour, soit l'article 149. S'il y avait consentement, on pourrait traiter maintenant de ce point à l'ordre du jour, reporter tous les autres articles et passer ensuite à l'ajournement.

[Traduction]

L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Je n'ai pas d'objection à ce que tous les autres articles soient reportés. Nous examinons la motion no 149. Cependant, je voudrais que certaines observations soient clairement consignées au compte rendu avant que nous ne commencions à nous prononcer sur cette question.

Je prévois, et j'ai tenté d'obtenir un consensus hier, que la teneur de cette motion sera adoptée. Cependant, si nous procédons en présentant une motion en bonne et due forme, je voudrais tout simplement attirer l'attention de tous les sénateurs sur le paragraphe 58(2) du Règlement, dont voici le texte:

Un sénateur qui désire corriger des irrégularités ou des erreurs dans un ordre, une résolution ou un autre vote du Sénat, en donne avis d'un jour, et la correction n'a lieu qu'avec le consentement d'au moins les deux tiers des sénateurs présents.

Si je comprends bien, cette motion est visée par ce paragraphe. Je m'attends bien à ce que la motion soit adoptée à l'unanimité, mais je veux qu'il soit clair que, si le vote avait été contesté, il aurait nécessité le consentement des deux tiers des sénateurs présents.

[Français]

Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, je suis d'accord.

[Traduction]

L'honorable Joseph A. Day: Honorables sénateurs, je propose l'adoption de la motion inscrite à mon nom.

[Français]

Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, je ne veux pas compliquer les choses. Il faut simplement s'assurer que le consentement a été accordé pour que tous les articles soient reportés à la prochaine séance du Sénat, sauf, bien sûr, l'article no 149.

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je suis certain que les membres du Comité sénatorial permanent des banques et du commerce n'auront aucune objection à se faire retirer un mandat pour le donner à un autre comité.

Le président du comité est absent ce soir, et nous sommes déjà très occupés avec la Loi sur les arrangements avec les compagnies ainsi qu'avec la Loi sur les faillites et l'insolvabilité.

[Traduction]

Le sénateur Day: Honorables sénateurs, j'ai déjà parlé aux présidents des deux comités. Il appartient normalement au Comité des banques de traiter d'un brevet d'invention, qui constitue une sorte de propriété intellectuelle.

[Français]

Son Honneur la Présidente intérimaire: L'honorable sénateur Robichaud a proposé que tous les articles à l'ordre du jour soient reportés à la prochaine séance du Sénat, sauf l'article no 149. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

[Traduction]

LA LOI SUR LE DROIT D'AUTEUR

PROJET DE LOI MODIFICATIF—ADOPTION DE LA MOTION PORTANT DESSAISISSEMENT DU COMITÉ DES BANQUES ET DU COMMERCE ET RENVOI
AU COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES SOCIALES, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE

L'honorable Joseph A. Day, conformément à l'avis donné le 7 octobre 2003, propose:

Que le projet de loi S-20, Loi modifiant la Loi sur le droit d'auteur, qui avait été renvoyé au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce, soit retiré audit comité et renvoyé plutôt au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.

(La motion est adoptée.)

[Français]

(Le Sénat s'ajourne au jeudi 9 octobre 2003, à 13 h 30.)


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