Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
2e Session, 37e Législature,
Volume 140, Numéro 84
Le jeudi 9 octobre 2003
L'honorable Lucie Pépin, Présidente intérimaire
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE DES QUESTIONS
- ORDRE DU JOUR
- ANNEXE
LE SÉNAT
Le jeudi 9 octobre 2003
La séance est ouverte à 13 h 30, la Présidente intérimaire étant au fauteuil.
Prière.
[Traduction]
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
L'HONORABLE DOUGLAS ROCHE
FÉLICITATIONS À L'OCCASION DE LA PUBLICATION DE SON LIVRE THE HUMAN RIGHT TO PEACE
L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, je diviserai ma déclaration en deux parties. Premièrement, je souhaite informer les honorables sénateurs que notre collègue Douglas Roche, qui est aussi mon ami, vient de publier un livre traitant d'un sujet très important. Il est intitulé The Human Right to Peace et publié aux éditions Novalis.
Félicitations, sénateur Roche.
Des voix: Bravo!
LA JOURNÉE MONDIALE DE LA VUE
L'honorable Yves Morin: Honorables sénateurs, la deuxième partie de ma déclaration concerne le fait que se tient aujourd'hui la Journée mondiale de la vue.
[Français]
Plus tôt aujourd'hui nous avons mis nos lunettes de soleil devant le Parlement pour marquer notre solidarité au programme «Vision 2020: le droit à la vue». Ce programme est le fruit d'une collaboration entre diverses organisations canadiennes et internationales dont l'Organisation mondiale de la santé. Elle a pour but d'éradiquer, parmi les causes de cécité, celles qui peuvent être prévenues.
[Traduction]
Au Canada, l'Institut national canadien pour les aveugles est le fer de lance de l'initiative Vision 2020. Chaque année, l'INCA aide plus de 100 000 Canadiens aveugles, handicapés visuels ou sourds- aveugles à participer pleinement à tous les aspects de la société canadienne. L'une de ses priorités est d'assurer le financement de la recherche dans le domaine de la déficience visuelle. Cela a fonctionné par le passé.
Honorables sénateurs, grâce à la recherche, il y a plus de chirurgies de la cataracte annuellement qu'il y a de naissances. La recherche fonctionne au présent. Les chercheurs canadiens ont fait progresser de manière importante la recherche dans le domaine de la vision. Cependant, ils ont besoin de notre appui, non seulement en cette Journée mondiale de la vue, mais à tous les jours.
[Français]
LA JUSTICE
LA CONSTITUTIONNALITÉ DE LA PROHIBITION PÉNALE À L'ÉGARD DE L'USAGE DU CANNABIS À DES FINS RÉCRÉATIVES OU THÉRAPEUTIQUES
L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, depuis le début de l'année, une confusion malsaine existe au Canada sur la constitutionnalité de la prohibition pénale à l'égard de l'usage du cannabis à des fins récréatives ou thérapeutiques.
Considérant les décisions récentes de la Cour d'appel de l'Ontario dans les affaires Hitzig et J.P., j'aimerais brièvement vous rappeler le contexte juridique et historique dans lequel ce tribunal a rendu ses deux jugements. Pour la compréhension de tous, il est fort approprié de bien saisir les arcanes de cet imbroglio, qui ont été corrigés par la Cour d'appel.
Cette longue saga judiciaire a débuté en juillet 2000 lorsque la Cour d'appel de l'Ontario, dans l'affaire Parker, a déclaré que l'interdiction générale de posséder du cannabis au Canada était inconstitutionnelle puisqu'elle interdisait l'utilisation de cette substance psychoactive à des fins thérapeutiques. Or, afin de permettre au gouvernement fédéral de modifier la loi en ce sens, le tribunal a suspendu l'application de son jugement jusqu'en juillet 2001.
Suivant cette décision, le gouverneur en conseil a adopté, en juillet 2001, le Règlement sur l'accès à la marijuana à des fins médicales, une première mondiale. À l'époque, Santé Canada croyait bien avoir résolu cette problématique soulevée par l'affaire Parker.
En janvier 2002, deux décisions émanant de tribunaux ontariens ont compliqué l'atmosphère. Dans un premier temps, prétextant que Santé Canada refusait d'offrir du cannabis aux patients qui jouissaient d'une autorisation fédérale afin d'en consommer à des fins thérapeutiques et que, conséquemment, ils devaient s'approvisionner par le biais du marché noir avec tous les risques que cela implique, la Cour supérieure de justice de l'Ontario, dans l'affaire Hitzig, a déclaré inconstitutionnel le règlement adopté en juillet 2001.
Dans un deuxième temps, presque concurremment, un tribunal inférieur de Windsor, toujours en Ontario, dans l'affaire J.P. — on fait référence à des initiales car il s'agit d'un jeune contrevenant et on ne peut déclarer l'identité de ce jeune contrevenant —, ce tribunal inférieur de Windsor a statué que le règlement adopté en juillet 2001 ne constituait pas une réponse législative adéquate à la décision dans l'affaire Parker. Pour être valide, la nouvelle politique gouvernementale en matière de cannabis thérapeutique aurait dû, selon le tribunal, faire l'objet d'amendements à la loi. Cette décision a été confirmée par la Cour supérieure de justice de l'Ontario en mai 2003.
L'effet combiné de ces deux décisions a été de faire en sorte qu'à partir de juillet 2001, il n'existait tout simplement plus, à tout le moins en Ontario, de prohibition à l'égard de la simple possession de cannabis, peu importe qu'il soit utilisé à des fins récréatives ou thérapeutiques. D'ailleurs, la confusion créée par ces deux décisions a fait en sorte que plusieurs corps policiers de l'Ontario ont cessé d'appliquer la loi dans ce domaine.
Honorables sénateurs, la Cour d'appel de l'Ontario, dans ses deux jugements, puisque ces deux décisions ont été portées en appel par le procureur général du Canada, donc la Cour d'appel de l'Ontario, dans deux jugements, a mis fin cette semaine à cette confusion. En effet, ce tribunal a renversé cette décision.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Je voudrais informer l'honorable sénateur que son temps de parole est écoulé.
Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, je vous demanderais la permission de terminer mon exposé qui peut se résumer à deux pages.
Son Honneur la Présidente intérimaire: J'espère que l'honorable sénateur réalise qu'il empêche plusieurs de ses collègues de prendre la parole.
Le sénateur Nolin: La Cour d'appel de l'Ontario, pour ce faire, n'a déclaré que quelques dispositions du règlement inconstitutionnelles, parce qu'elles imposaient une restriction arbitraire aux patients désireux d'obtenir du cannabis produit pour des fins thérapeutiques. Sont visés par cette décision: le recours, dans certains cas, à l'avis d'un deuxième médecin pour utiliser du cannabis, l'interdiction pour le consommateur de rémunérer son fournisseur et, enfin, la restriction entourant le nombre de producteurs qui peuvent fournir du cannabis à un patient.
Avec cette décision, la cour a fait d'une pierre deux coups puisque non seulement elle a confirmé la validité du règlement et légitimé indirectement les activités des Clubs Compassion, mais elle a également annulé la décision de la Cour supérieure dans l'affaire J.P. en rétablissant l'interdiction de posséder du cannabis à des fins récréatives en Ontario.
(1340)
Toutefois, dans les provinces de la Nouvelle-Écosse, de l'Île-du- Prince-Édouard et de la Colombie-Britannique, où les tribunaux ont rendu des décisions semblables à celles des juges ontariens, l'incertitude quant à la validité de cette interdiction persiste. Cela dit, la Cour d'appel de l'Ontario a envoyé un message très clair au Parlement du Canada: nous devrons cesser de tergiverser dans ce dossier et prendre nos responsabilités afin d'éliminer toute confusion entourant l'usage du cannabis, tant à des fins thérapeutiques qu'à des fins récréatives.
[Traduction]
LA NOUVELLE-ÉCOSSE
L'OURAGAN JUAN
L'honorable Jane Cordy: Honorables sénateurs, au cours de la nuit du 28 septembre 2003, la Nouvelle-Écosse a été la proie de la pire tempête qu'elle ait connue en quarante ans. Environnement Canada avait émis des avertissements d'ouragan, mais la plupart d'entre nous, étant des optimistes de l'Est, nous sommes dit que les ouragans perdent toujours de la force avant d'atteindre la côte et qu'il en serait de même dans ce cas-ci.
Or, l'ouragan Juan est bel et bien arrivé avec toute sa furie et son cortège de pluies torrentielles et de vents qui soufflaient à plus de 140 km/heure. Plus de 300 000 résidants se sont retrouvés sans électricité. À Halifax, les cours ont été annulés pendant une semaine dans les écoles et les universités, parce qu'on craignait pour la sécurité des étudiants. De nombreuses rues ont été bloquées par des arbres tombés, dont certains ont même été arrachés jusqu'à la racine et ont, dans bien des cas, détruit les trottoirs. Au moins trois personnes ont été tuées quand un arbre s'est abattu sur leur véhicule.
Les historiques Public Gardens et le parc de la pointe Pleasant ont été gravement touchés et il faudra de nombreuses années avant que ces lieux ne se remettent du cataclysme.
Les Néo-Écossais sont solides et ont relevé de nombreux défis dans le passé. Le lendemain de l'ouragan, la générosité d'esprit a fait surface et une foule de gens se sont mobilisés pour s'entraider. L'électricité a été rétablie presque partout, ce qui n'est qu'une mince consolation pour ceux qui sont encore dans le noir, mais devant l'ampleur de la dévastation, on ne peut s'étonner qu'il ait fallu tant de temps.
Les équipes de la société d'électricité de la Nouvelle-Écosse ont travaillé pendant de longues heures, jour après jour. Le Nouveau- Brunswick et l'État du Maine ont envoyé des équipes pour aider à rétablir l'électricité. En outre, plus de 800 membres des Forces canadiennes ont participé au nettoyage. Les Néo-Écossais ont été ravis de leur générosité. L'Organisation de gestion des urgences de la municipalité régionale de Halifax, dont les représentants avaient comparu devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense une semaine auparavant, a coordonné une fantastique intervention d'urgence.
Honorables sénateurs, les Néo-Écossais viennent de vivre dix jours d'épreuve. Néanmoins, leur résistance et leur disposition à l'entraide ont pris le pas dès que le processus de reconstruction a été mis en branle.
LA JOURNÉE MONDIALE DE LA SANTÉ MENTALE
L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, le 10 octobre a été proclamé la Journée mondiale de la santé mentale. La Fédération mondiale pour la santé mentale et l'Organisation mondiale de la santé parrainent cette journée qui vise à sensibiliser la population mondiale à l'importance de la santé mentale et à lui faire mieux comprendre les troubles mentaux. L'entreprise est vaste car dans tous les pays, au sein de toutes les populations et de tous les groupes d'âge, les malades mentaux sont victimes de discrimination.
Cette année, la journée se déroule sous le thème «Les troubles affectifs et comportementaux des enfants et des adolescents». Ces troubles, qui sont nombreux, comprennent l'autisme, la schizophrénie, la dépression, les troubles de l'alimentation et les idées suicidaires.
Les enfants canadiens sont trop souvent touchés par ces troubles. L'Association canadienne pour la santé mentale estime que près de 20 p. 100 des enfants au Canada souffrent d'un trouble mental pouvant être diagnostiqué. Le taux de suicide chez les enfants et les jeunes de 21 ans et moins au Canada est l'un des plus élevés dans le monde. D'autres statistiques sur la santé mentale des petits Canadiens sont tout aussi décourageantes.
Selon l'Organisation mondiale de la santé, l'absence d'une santé mentale de qualité, dès les premières années de la vie, mènerait à des troubles mentaux avec des conséquences à long terme. Cette carence sape le respect des pratiques sanitaires exemplaires et restreint l'aptitude à la sécurité et à la productivité des sociétés.
On se sent souvent impuissants devant les problèmes de santé mentale dans notre société, surtout lorsqu'ils touchent les enfants. Il existe des services d'aide, mais les problèmes de santé mentale sont difficiles à diagnostiquer, si bien que nombre d'enfants et d'adolescents ayant des troubles mentaux n'obtiennent pas l'aide dont ils ont besoin. Les adultes, que ce soit les parents, les gardiennes, les enseignants ou les médecins, doivent être sensibles non seulement au bien-être physique des enfants avec qui ils sont en contact, mais aussi à leur santé mentale. Prendre le temps de se poser des questions sur un trouble comportemental qui semble à la fois grave et chronique peut donner lieu au traitement réussi d'un tel trouble qui, autrement, continuerait à faire souffrir. En promouvant les habitudes associées à une santé mentale saine en tant que mesure de prévention, les adultes peuvent mieux protéger les enfants dont ils s'occupent.
Honorables sénateurs, espérons que le thème de la Journée mondiale de la santé mentale contribuera à l'amélioration du bien- être émotionnel des enfants et des adolescents dans notre pays et sur toute la planète.
Sur une note personnelle, j'ajoute que je suis honorée de siéger au comité sénatorial qui étudie maintenant cette question très importante. Il faut agir.
LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
ISRAËL ET LA SYRIE—L'AGGRAVATION DES TENSIONS
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, je tiens à reprendre à mon compte les propos de mon collègue de Dartmouth. L'électricité n'a été rétablie chez moi que ce matin, et mon épouse est grandement soulagée. Elle n'a plus à transporter l'eau à l'étage.
Honorables sénateurs, je voudrais attirer votre attention sur le Proche-Orient. Comme de nombreux autres observateurs, j'en suis sûr, je regarde avec inquiétude s'accumuler une fois encore dans cette région les nuages menaçants de la guerre.
Après ce qu'on ne peut décrire que comme un week-end d'une terrible violence, avec tout d'abord un attentat suicide à Haïfa, puis une frappe aérienne d'Israël contre un camp d'entraînement de terroristes en Syrie, je crois savoir que la Syrie et Israël ont échangé des menaces d'intervention militaire et qu'Israël a autorisé la mobilisation des unités de réserve.
Malheureusement, des informations des 24 dernières heures veulent que les Israéliens aient renforcé leur frontière septentrionale avec la Syrie et le Liban en y ajoutant une brigade, et deux autres unités se dirigeraient vers le nord. Selon d'autres informations, deux autres unités israéliennes de la taille d'un bataillon seraient mises en place face à la Cisjordanie et à la bande de Gaza.
La perspective d'un conflit entre Israël et la Syrie, même si elle n'a jamais été absente, constituerait une menace pour la sécurité de 193 Canadiens qui assurent le maintien de la paix sur le plateau du Golan.
Je demande au leader du gouvernement au Sénat, par l'entremise de son adjoint, de transmettre ces préoccupations au gouvernement, auquel je demande de prendre toutes les mesures possibles pour connaître la situation actuelle des forces israéliennes et syriennes près du plateau du Golan. Je l'exhorte également à prendre de plus grandes précautions pour protéger les militaires canadiens sur ce théâtre d'opérations, ce qui pourrait aller jusqu'à leur retrait si cela devenait nécessaire. J'invite aussi le ministre des Affaires étrangères à prendre toutes les mesures possibles pour atténuer les tensions et rétablir une certaine stabilité dans la région.
[Français]
AFFAIRES COURANTES
L'ASSOCIATION INTERPARLEMENTAIRE CANADA-FRANCE
DÉPÔT DU RAPPORT DE LA XXXIIe RÉUNION ANNUELLE, TENUE DU 6 AU 15 JUILLLET 2003
L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l'Association interparlementaire Canada-France à la XXXIIe réunion annuelle tenue à Paris, Angers et Vannes, en France, du 6 au 15 juillet 2003.
(1350)
RÈGLEMENT, PROCÉDURE ET DROITS DU PARLEMENT
AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À ÉTUDIER LE PROCESSUS DE NOMINATION DES TITULAIRES DE POSTE DES HAUTS FONCTIONNAIRES
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je donne avis que, le mardi 14 octobre 2003, je proposerai:
Que le Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement examine le processus de nomination des titulaires de poste des hauts fonctionnaires du Parlement pour l'uniformiser, afin qu'ils soient nommés selon une procédure établie devant recevoir l'aval des deux Chambres du Parlement;
Que les dispositions nécessaires soient mises en place pour relever ces hauts fonctionnaires de leur poste au moyen d'une résolution conjointe du Sénat et de la Chambre des communes, et pour cause;
Que le Comité fasse rapport au plus tard le 28 novembre 2003.
BIBLIOTHÈQUE DU PARLEMENT
AVIS DE MOTION AUTORISANT LE COMITÉ MIXTE À PERMETTRE LA DIFFUSION DE SES DÉLIBÉRATIONS
L'honorable Yves Morin: Honorable sénateurs, je donne avis que, le mardi 14 octobre 2003, je proposerai:
Que le Comité mixte permanent de la Bibliothèque du Parlement soit autorisé à permettre la diffusion de ses délibérations publiques par les médias d'information électronique de manière à déranger le moins possible ses travaux.
LES LANGUES OFFICIELLES
LE STATUT BILINGUE DE LA VILLE D'OTTAWA—PRÉSENTATION DE PÉTITIONS
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, conformément à l'article 4h) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer en cette Chambre les pétitions de 2 000 signataires supplémentaires aux 4 000 déjà déposés demandant de déclarer Ottawa, la capitale du Canada, une ville bilingue afin qu'elle reflète la dualité linguistique du pays.
Les pétitionnaires prient le Parlement de considérer les points suivants:
Que la Constitution du Canada reconnaît le français et l'anglais comme les deux langues officielles de notre pays ayant un statut et des droits et privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du gouvernement du Canada.
[Traduction]
Que l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 désigne la ville d'Ottawa comme le siège du gouvernement du Canada;
Que les citoyens ont le droit, dans la capitale nationale, d'avoir accès aux services offerts par les institutions du gouvernement du Canada dans la langue officielle de leur choix, soit en français, soit en anglais;
Que la capitale du Canada doit être le reflet de la dualité linguistique qui est au cœur de notre identité collective et qui caractérise la nature même de notre pays;
Par conséquent, vos pétitionnaires demandent au Parlement de confirmer dans la Constitution du Canada qu'Ottawa, la capitale du Canada, soit déclarée officiellement bilingue en vertu de l'article 16 de la Loi constitutionnelle de 1867 à 1982.
[Français]
PÉRIODE DES QUESTIONS
LE SÉNAT
LA PÉRIODE DES QUESTIONS—LE NOMINATION D'UN REMPLAÇANT EN L'ABSENCE DU LEADER DU GOUVERNEMENT
L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, même si nous adressons toutes nos questions au leader adjoint du gouvernement au Sénat, étant donné l'absence du leader du gouvernement j'ai l'impression que nous recevrions pour seule réponse une garantie, de sa part, de transmettre nos questions au leader du gouvernement au Sénat. Peut-être pouvons-nous profiter de ce moment pour suggérer aux membres du Comité sénatorial permanent du Règlement, de la procédure et des droits du Parlement d'étudier la possibilité que deux personnes soient en mesure de répondre à nos questions. Qui sait — suite aux prochaines élections — peut-être y aura-t-il des absences dans certaines provinces et que se présentera la nécessité de nommer un deuxième sénateur ministre! C'est ma prédiction.
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai aucun problème avec la suggestion du sénateur Prud'homme. Il est, en effet, regrettable que madame le leader du gouvernement au Sénat n'ait pu être présente aujourd'hui, en raison de circonstances extraordinaires et spéciales. J'aimerais vous rappeler, honorables sénateurs, qu'il est tout à fait de mise d'adresser des questions aux présidents des différents comités. Ce serait tout à fait à l'ordre.
AFFAIRES ÉTRANGÈRES
LE CONFLIT AU MOYEN-ORIENT—DEMANDE AU COMITÉ D'UNE ÉTUDE
L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au président du Comité sénatorial permanent des affaires étrangères. Étant donné la situation dramatique qui se complique de plus en plus au Moyen-Orient, surtout aux frontières entre la Syrie, Israël et la Palestine; étant donné que des Canadiens sont au Plateau du Golan; et étant donné notre intérêt et notre réputation internationale: le temps n'est-il pas venu pour votre comité, qui devrait être le comité le plus connu au Canada, de songer à étudier cette question qui risque de compliquer la vie des soldats canadiens au Moyen-Orient?
Après 20 ans sans étude sur le Moyen-Orient, la Chambre des communes commence à étudier la question musulmane — il y a 1,2 milliard de musulmans dans le monde. En tant que président du Comité des affaires étrangères, accepteriez-vous d'inscrire à votre agenda la question du conflit moyen-oriental et non pas toute la question des relations entre le Canada et le monde arabe?
[Traduction]
L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, comme le savent les sénateurs, les comités du Sénat sont des instruments du Sénat. Le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères a été extrêmement pris par des questions touchant les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Hier et avant- hier, nous avons entendu des témoins intéressants, sur la question pertinente du taux de change des dollars canadien et américain et sur la question de savoir si la hausse du dollar canadien nuirait à notre commerce avec les États-Unis. Ce sont là certaines des questions dont le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères est actuellement saisi.
N'oublions pas que le comité a un renvoi du Sénat. Si le Sénat demande au comité d'examiner quelque chose, alors le comité est tenu de le faire. Dans ces conditions, je dois dire que, compte tenu du calendrier qui s'annonce, comme nous pouvons tous le constater, je ne vois pas très bien où nous pourrions trouver le temps d'examiner cette question.
J'aimerais ajouter que, comme le sait le sénateur Prud'homme, le sénateur Corbin a présenté une motion sur cette question.
L'honorable Eymard G. Corbin: J'en ai donné avis.
Le sénateur Stollery: Je me suis trompé: le sénateur Corbin a donné avis de la motion. Voilà où en est la question.
Nous savons tous qu'il existe d'importantes questions concernant la frontière israélo-syrienne et le Liban: nous en sommes tous conscients. Je suis parfaitement d'accord avec le sénateur Prud'homme. Mais je suis préoccupé par le fait que le comité ait reçu un important ordre de renvoi pour lequel nous avons déjà déposé le volume I de nos conclusions au Sénat en juin. Nous travaillons assidûment à la question du taux de change, afin de pouvoir également déposer le volume II avant l'ajournement.
Le sénateur Prud'homme est certainement un parlementaire d'expérience, comme c'est également mon cas, et il connaît le calendrier autant que moi. Tel est actuellement l'état des choses en cours en ce qui concerne le Comité des affaires étrangères.
Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, j'ai une question complémentaire. Je fais maintenant partie du Sénat depuis 10 ans. Auparavant, j'ai siégé à l'autre endroit durant 30 ans. Les gens ont tendance à tourner autour du pot. Nous savons que les pressions sont tellement intenses que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères — à mon avis, le plus prestigieux des comités du Sénat — s'est tenu à l'écart du sujet du Moyen-Orient. Le comité étudie constamment les relations entre le Canada et les États-Unis. Personne ne s'y oppose, mais chaque fois que nous publions un rapport, il est déjà dépassé parce que la situation évolue si vite.
(1400)
Il y a déjà tant d'études sur les relations Canada-États-Unis et tant d'échanges concernant les deux pays qu'on se demande parfois si ce n'est pas un moyen d'éviter d'autres sujets. Je le répète: une étude sur le Moyen-Orient a commencé en 1982 et s'est terminée en 1985. Ensuite, nous n'avons plus jamais touché au Moyen-Orient.
Honorables sénateurs, compte tenu de la situation explosive qui règne dans la région, je me demande si un comité aussi prestigieux que le Comité sénatorial permanent des affaires étrangères n'a pas le devoir de prendre l'initiative, au lieu d'attendre tranquillement les événements pour y réagir. Malheureusement, je suis privé de l'honneur de siéger au Comité des affaires étrangères. L'honorable sénateur le sait, mais je tiens à dire que si j'avais été membre du comité, j'insisterais et je proposerais des motions. Je suis membre du Comité des banques. Ce n'est pas mal, mais j'espère que le président du Comité des affaires étrangères fera preuve de leadership et nous permettra de revivre l'époque du défunt sénateur George Van Roggen, de Vancouver, qui a dirigé un comité des plus prestigieux et qui n'avait pas peur de s'attaquer aux questions les plus difficiles. Je vous en prie, n'essayez pas d'éviter ce problème difficile, parce que la question du Moyen-Orient menace de nous exploser en pleine face. Si cela se produit, il sera trop tard pour nous.
Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, le sénateur Prud'homme a très éloquemment exprimé son point de vue sur le sujet. Tout d'abord, permettez-moi d'expliquer aux honorables sénateurs que le Comité des affaires étrangères n'a pas constamment étudié les relations Canada-États-Unis. En fait, depuis le débat sur le libre-échange de 1987 ou 1988, je ne me souviens pas que nous ayons jamais abordé ce sujet. Nous procédons actuellement à un examen de l'Accord de libre-échange. C'est un sujet très important qui a des répercussions sur la vie de millions de Canadiens.
Honorables sénateurs, il y a de nombreuses questions importantes dans le monde. Nous pourrions siéger 24 heures sur 24, 365 jours par an, sans pouvoir régler les problèmes de ce monde tellement étendu et tellement complexe. Nous devons faire des choix. Les membres du comité ont pris les décisions nécessaires. Nous avons décidé qu'il était important, à l'occasion du 15e anniversaire de l'Accord de libre-échange nord-américain, d'examiner cet accord. C'est à cela que le comité est actuellement attelé. Comme je l'ai dit, si le Sénat décide que nous devrions aborder un sujet différent, nous nous conformerons à ses ordres, car nous sommes les serviteurs du Sénat. Toutefois, en ce moment, comme président, ma première responsabilité est envers les membres du comité.
Je veux ajouter que tout sénateur peut assister aux réunions d'un comité. Aucune règle ne l'interdit. Voilà où nous en sommes. Nous travaillons très fort pour mener à terme les audiences concernant le taux de change, sujet qui fait les manchettes de tous les journaux du pays. C'est ce que nous faisons en ce moment.
L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur Stollery. Quand il dit que tout sénateur peut assister aux réunions de son comité, cela veut-il dire que le sénateur Prud'homme n'est pas exclu de ces réunions?
Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, je ne fais même pas partie du Comité de sélection. Toutefois, depuis des années, il est entendu que n'importe quel sénateur peut assister à une réunion de comité. Bien entendu, cela s'applique au sénateur Prud'homme, qui est un membre fort éminent du Parlement et du Sénat.
Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, permettez-moi de corriger un malentendu. Je n'ai pas dit que je n'assistais pas, car j'assiste en fait aux réunions du Comité des affaires étrangères. J'ai dit que je ne peux pas être membre du comité et, depuis dix ans, j'estime que c'est injuste. On m'a clairement dit que je pouvais demander d'être membre de n'importe quel autre comité, que je ne serais pas admis au Comité des affaires étrangères et que je savais pourquoi. Lorsque le sénateur Corbin ouvrira le débat sur sa motion, je vous en donnerai les raisons.
Toutefois, sénateur LaPierre, il est entendu que n'importe quel sénateur peut assister à n'importe quelle réunion de n'importe quel comité. Je le fais. J'assiste souvent aux réunions parce que je m'intéresse à beaucoup de sujets. Je parle ici d'être membre d'un comité. Le fait d'assister aux réunions est une question différente.
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Ma question s'adresse au distingué président du Comité des affaires étrangères. Même s'il est vrai que le sénateur Prud'homme, comme tout autre sénateur qui n'a pas été choisi par le Comité de sélection et approuvé par le Sénat comme membre du comité, peut assister aux réunions, n'est-il pas vrai que seuls les membres peuvent proposer une motion et voter?
Le sénateur Stollery: Honorables sénateurs, c'est tout à fait exact. Toutefois, je voudrais ajouter à l'observation du sénateur Kinsella qu'à l'instar de la plupart des Comités des affaires étrangères du monde, nous n'étudions pas beaucoup de projets de loi parce que la nature des affaires étrangères ne s'y prête pas. Par conséquent, le nombre de votes qui ont lieu est relativement limité parce que nous essayons, dans toute la mesure du possible, de former un consensus quand nous examinons un sujet. Par conséquent, même si ce que l'honorable sénateur a dit est vrai, la situation qu'il évoque ne se produit pas très fréquemment.
Le sénateur Kinsella: N'est-il pas vrai que le Comité des affaires étrangères a étudié le projet de loi concernant l'ALENA? Compte tenu du fait que le gouvernement Chrétien-Martin avait dit qu'il se débarrasserait de l'ALENA, est-ce que l'honorable sénateur s'attend à recevoir dans un proche avenir un projet de loi abrogeant cet accord?
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, cette question est tout à fait hors de la portée des questions auxquelles un président de comité peut répondre. Cette question est davantage une question de politique du gouvernement, et un président de comité ne peut y répondre.
[Traduction]
LA SÉCURITÉ NATIONALE ET LA DÉFENSE
LE NOUVEAU-BRUNSWICK—LES ALLÉGATIONS SELON LESQUELLES CAMPBELLTON SERAIT UN POINT D'ENTRÉE POUR DES CLANDESTINS
L'honorable John G. Bryden: Honorables sénateurs, voici l'occasion de poser des questions aux présidents de comité, et je cherche depuis un certain temps une telle occasion, celle de poser des questions aux présidents de certains comités. Ils sont rarement présents ici à la période des questions.
Le sénateur Stollery: Je suis présent.
Le sénateur Bryden: Je veux parler de ceux des comités intéressants — non, je ne veux pas dire cela. Déjà hier, je savais que le président du Comité de la défense ne serait pas ici.
L'honorable Gerald J. Comeau: J'invoque le Règlement.
L'honorable B. Alasdair Graham: Les recours au Règlement ne sont pas permis durant la période des questions.
Le sénateur Comeau: On n'est pas censé mentionner l'absence de sénateurs de la Chambre.
Le sénateur Bryden: Je ne fais pas allusion à l'absence de sénateurs de la Chambre; je parle des présidents. Je parle de titulaires de poste. Je ne parle pas de personnalités marquantes. Je ne sais pas, mais je me suis levé hier parce que j'avais cru voir le vice-président du Comité de la défense. Il était présent, mais malheureusement la période s'était écoulée avant que j'aie pu lui poser ma question. Il était ici aujourd'hui. La raison pour laquelle ma question est importante, c'est que si le président ou le vice-président était présent, j'aurais demandé sur quoi le Comité permanent de la sécurité nationale et de la défense s'est fondé pour affirmer que des clandestins pénètrent en Amérique du Nord en passant par le port de Campbellton, au Nouveau-Brunswick. Cela a été signalé dans tous les journaux du Canada atlantique.
(1410)
Les habitants de Campbellton ont crié au scandale et ne savent pas sur quoi repose cette allégation. Moi aussi, j'aimerais le savoir. Il n'est pas inhabituel que le comité fasse des allégations de cabotin, mais ces allégations doivent être en partie fondées. Voilà ce que j'aurais demandé au président ou au vice-président si l'un ou l'autre avait été là.
[Français]
RÉGIE INTERNE, BUDGETS ET ADMINISTRATION
LA RÉUNION AVEC LES REPRÉSENTANTS DE LA CHAÎNE POLITIQUE DU CANADA
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, j'aurais une question à poser à la présidente du Comité de la régie interne, des budgets et de l'administration qui, en passant, fait un bon travail.
Des voix: Bravo!
Le sénateur Gauthier: Aujourd'hui, le comité devait rencontrer des représentants de CPAC concernant la radiodiffusion de nos débats en comité, entre autres. La réunion a été annulée. La présidente peut-elle nous dire quand aura lieu la prochaine réunion avec les représentants de CPAC?
L'honorable Lise Bacon: Honorables sénateurs, la réunion a été reportée et non annulée. Nous tiendrons une réunion dès que nous aurons trouvé une date acceptable pour les deux groupes, les membres du comité et les représentants de CPAC.
[Traduction]
LE SÉNAT
LES QUESTIONS POSÉES AUX PRÉSIDENTS DE COMITÉ PENDANT LA PÉRIODE DES QUESTIONS
L'honorable Peter A. Stollery: Honorables sénateurs, je veux poser une question au leader adjoint du gouvernement au Sénat. Depuis quand pose-t-on des questions aux présidents de comité pendant la période des questions? Pour moi, c'est une nouveauté et j'aimerais en savoir davantage.
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, le Règlement prévoit que des sénateurs puissent poser des questions aux présidents de comités permanents en autant que ces questions traitent de matières relevant des travaux de ce comité.
[Traduction]
ORDRE DU JOUR
PROJET DE LOI SUR LE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS PARTICULIÈRES
TROISIÈME LECTURE—MOTION D'AMENDEMENT—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Austin, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Joyal, c.p., tendant à la troisième lecture du projet de loi C-6, Loi constituant le Centre canadien du règlement indépendant des revendications particulières des Premières nations en vue de permettre le dépôt, la négociation et le règlement des revendications particulières, et modifiant certaines lois en conséquence, tel que modifié;
Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Gill, appuyée par l'honorable sénateur Watt, que le projet de loi C-6 ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit lu une troisième fois dans six mois de ce jour.
L'honorable Nick G. Sibbeston: Honorables sénateurs, je veux parler brièvement du projet de loi C-6. Certains sénateurs ont exprimé des craintes au sujet de l'adoption de ce projet de loi, comme s'il allait être préjudiciable aux Autochtones de notre pays, comme s'il allait leur rendre la vie plus difficile au lieu de l'améliorer. Certains ont laissé entendre que le projet de loi était la pire chose qui puisse arriver aux Autochtones et qu'il constituait un véritable recul pour eux. Je veux m'insurger contre cette façon de voir. Le projet de loi C-6 améliorera la vie des Autochtones de notre pays. Je vais expliquer ce qui m'incite à penser ainsi.
Je n'ai pas pris cette décision à la légère. Je suis sensible aux actions des autres sénateurs autochtones qui tentent de retarder l'adoption de cette mesure législative proposée et qui espèrent probablement faire traîner les choses jusqu'à ce qu'il y ait un nouveau chef et un nouveau gouvernement capables peut-être d'améliorer cette mesure législative. Cependant, je crois que ce projet de loi devrait aller de l'avant. Les dispositions du projet de loi tendant à établir une commission et un tribunal sont constructives et devraient être adoptées.
Si les honorables sénateurs se donnent la peine d'examiner les délibérations de notre comité et les exposés présentés, ils verront que mes interventions et mes questions étaient tranchées. J'ai interrogé les fonctionnaires ainsi que le ministre des Affaires indiennes et ses collaborateurs. J'ai posé des questions très précises et soulevé de nombreuses préoccupations au sujet du projet de loi.
Je suis également sensible à la position de l'APN, de ses représentants et des Autochtones qui ont comparu devant notre comité pour faire connaître leurs points de vue sur le projet de loi C- 6. Je suis sensible à leurs aspirations. Grâce au travail effectué en comité, nous avons amélioré le projet de loi dans une certaine mesure.
Nous avons beaucoup entendu parler de l'historique de ce projet de loi et je n'entends pas revenir là-dessus. Cependant, nous devrions tous nous rappeler qu'il y a d'abord eu la création d'un groupe de travail mixte. Lorsque ce groupe de travail a terminé ses travaux, après deux ans, on s'attendait à ce que le gouvernement adopte ses recommandations, mais il ne l'a pas fait. Même le gouvernement reconnaît que le projet de loi diverge de façon marquée des recommandations à au moins deux égards: le processus de nomination et le plafond financier relatif au tribunal. L'APN a relevé d'autres domaines.
Des membres du comité, y compris votre serviteur, ont demandé pourquoi le projet de loi différait du rapport du groupe de travail mixte. Nous avons demandé pourquoi le projet de loi ne reflétait pas exactement les recommandations du groupe de travail compte tenu de tout le travail qui avait été fait. Le ministre et ses collaborateurs ont répondu.
Quatre questions nous ont paru être les plus importantes lorsque nous avons étudié le projet de loi: premièrement, l'indépendance de la commission et du tribunal; deuxièmement, le processus de nomination et la consultation en général; troisièmement, le retard dans le processus de prise de décisions, car on souhaitait vivement qu'un mécanisme permette de prendre des décisions en fin de compte et que le ministre ne puisse retarder la prise de décisions; quatrièmement, le plafond financier relatif au tribunal.
Le comité a apporté des modifications à trois de ces aspects du projet de loi et fait des observations au sujet de deux autres. J'aborderai deux de ces aspects.
Je traiterai tout d'abord des nominations et du plafond financier. Le groupe de travail mixte a recommandé que le ministre et l'APN procèdent conjointement aux nominations à la commission et au tribunal, ainsi qu'à leur renouvellement. Le projet de loi C-6 proposait une nomination entérinée par un décret sur la seule recommandation du ministre. Un processus mixte de nomination à ce genre de poste est presque sans précédent. C'est lié au système démocratique du gouvernement du Canada, et à la responsabilité qui incombe à ce dernier. Des cabinets sont constitués et ils prennent les décisions au nom du gouvernement. C'est ce qui explique la façon dont le projet de loi était libellé. En effet, il accordait au ministre et au cabinet le pouvoir de décision final concernant les nominations aux tribunaux et aux commissions.
(1420)
Il existe quelques exemples de processus semblables, mais il s'agit presque toujours de cas où un conseil et un ministre recommandent conjointement la personne à nommer à la présidence du conseil. Il y a donc des précédents mais, en règle générale, il n'en existe pas pour ce genre d'organisme et certainement pas pour les tribunaux. Qui plus est, aucun mécanisme n'était prévu au cas où le gouvernement et l'APN ne pourraient s'entendre sur des nominations.
Toutefois, le comité s'est rendu compte qu'il ne serait pas juste d'écarter complètement les Premières nations de ce processus. Par conséquent, plusieurs modifications ont été apportées. Le ministre est désormais tenu de demander aux revendicateurs de présenter des candidatures pour les nominations et il devra veiller à ce que toutes les Premières nations du pays soient représentées au moment de l'examen dont fera l'objet le centre dans trois à cinq ans d'ici.
Le ministre veut que tout le processus des revendications particulières fonctionne. Je sais qu'il s'est personnellement engagé à ce que soient établis la commission et le tribunal et à ce qu'ils soient aussi efficaces que faire se peut.
La question du plafond financier a suscité un débat très animé. On a laissé entendre que les revendications impliquant de grosses sommes ne pourraient faire l'objet d'un règlement. Je tiens à le dire le plus clairement possible: il n'y a ni plafond ni limite quant au montant d'une revendication dont la commission peut être saisie. Il n'y a aucune limite quant à l'importance du règlement qui peut être négocié. Ces dernières années, des revendications portant sur des montants de 1 million, 5 millions, 20 millions et même 100 millions ont fait l'objet de règlements. Lorsque le budget du ministère était dépassé, le ministre a demandé et obtenu des fonds supplémentaires pour les règlements. À ce jour, le gouvernement a dépensé environ 1,4 milliard de dollars pour quelque 225 revendications concernant des traités qui n'avaient pas été honorés. Je n'ai aucun doute que le processus sera amélioré, qu'il sera plus rapide et plus efficace.
Nous avons essayé de compter le nombre de revendications en cours au pays. Selon les estimations, le Canada devra dépenser entre quatre milliards et cinq milliards de dollars en règlements. Quelque 600 revendications devront être traitées dans le cadre de ce processus, sinon dans le cadre de procédures judiciaires.
Il incombe au gouvernement de régler la question. Une formule, établie dans le projet de loi, expose de façon générale les sommes qui seront dégagées au nom du gouvernement pour le règlement de ces revendications. Tous les gouvernements sont responsables de l'argent qu'ils dépensent. J'ai déjà été à la tête d'un gouvernement, et je suis au courant des responsabilités qui incombent aux gouvernements et aux Cabinets. Ils ne peuvent se permettre d'être saisis de revendications de plusieurs milliards de dollars sans avoir l'argent nécessaire. Aussi, d'après ce que je comprends, les dispositions du projet de loi sont rédigées de façon que le gouvernement fédéral puisse exercer un certain contrôle sur les sommes qui seront dégagées pour le règlement des revendications. Il n'est pas réaliste de croire que le gouvernement puisse dépenser sans compter à cette fin. Les dispositions contenues dans le projet de loi visent à permettre au gouvernement d'exercer un certain contrôle sur les sommes que le Cabinet dégagera pour assurer le règlement des revendications.
Les membres du comité s'interrogeaient au sujet du plafond de 7 millions, qui a été porté à 10 millions. Je suis convaincu que, dans l'avenir, lorsque ce projet de loi sera examiné, le plafond sera de nouveau relevé.
Le tribunal doit constituer un dernier recours, auquel on ne s'adresse que dans deux circonstances bien précises. Si le ministre juge qu'une revendication n'est pas fondée, l'auteur de la revendication peut demander au tribunal de se prononcer sur le bien-fondé de celle-ci. Si le tribunal juge la revendication fondée, des négociations pourront alors être amorcées.
On peut aussi recourir au tribunal si les négociations ont échoué et qu'il n'y a pas d'accord en vue sur le montant du dédommagement. Le tribunal représente donc un recours ultime. Les Autochtones peuvent s'adresser à lui, mais il leur faut dès lors renoncer à un dédommagement de plus de 10 milliards de dollars. C'est quand même un bon point de départ, et je suis convaincu que l'on relèvera ce plafond avec les années.
Le gouvernement a dit qu'il lui fallait user de prudence et se montrer responsable sur le plan financier. Voilà pourquoi il a limité le montant et le nombre des règlements imposés par le tribunal chaque année. Ce n'est pas déraisonnable de sa part, comme je l'ai expliqué. Le gouvernement doit exercer un certain contrôle financier dans ce domaine.
Le comité entretenait des réserves au sujet de la nécessité de renoncer à un dédommagement dépassant cette limite en échange d'un jugement sur le bien-fondé d'une revendication, et il a interrogé le gouvernement à ce sujet. Si le tribunal ne peut pas rendre de décisions sur des réclamations dépassant le montant limite fixé, c'est que, selon le gouvernement, il faut commencer par mettre le système en place et voir ensuite comment il fonctionnera avant d'essayer de l'améliorer, car personne ne sait parfaitement pour l'instant s'il fonctionnera ou non. Je suis convaincu que, avec le temps, on y apportera des améliorations et des modifications.
Honorables sénateurs, ce projet de loi n'est pas parfait. Il est évident qu'il ne donne pas aux Autochtones tout ce qu'ils réclament, mais à mon avis, c'est un pas dans la bonne direction. Je suis au gouvernement depuis longtemps et chaque fois que j'ai tenté d'obtenir des changements, j'ai constaté qu'on ne pouvait pas tout changer d'un seul coup. Les changements se font petit à petit, pas à pas, à force de travail et de ténacité. C'est ainsi que le gouvernement fonctionne et j'espère qu'il en ira de même pour le Centre du règlement des revendications particulières.
J'espère que les sénateurs jugeront que le projet de loi C-6 constitue une étape importante qui nous permettra de résoudre certaines des revendications toujours en suspens au pays et qu'ils comprendront qu'il ne s'agit là que d'une première étape. Je serai ici dans 5, 10 ou 15 ans et j'aurai la chance de revoir ce dossier. Ce n'est pas une loi qu'on peut se contenter d'adopter puis d'oublier. Le projet de loi contient une disposition qui prévoit que le ministre devra consulter les Premières nations d'ici trois à cinq ans et j'ai hâte de voir ce qu'il aura à nous dire à ce sujet dans quelques années. Je lui poserai alors certainement des questions sur les améliorations et les progrès qui auront été enregistrés. Nous pouvons tous nous assurer que ce projet de loi, de même que le système qu'il instaurera, partira sur le bon pied, qu'il fonctionnera convenablement et qu'il permettra de répondre aux aspirations et aux revendications des peuples autochtones.
Honorables sénateurs, je vous exhorte aujourd'hui à adopter ce projet de loi. Il n'est pas parfait, mais j'aimerais que vous y voyiez une première étape positive dans la lutte des peuples autochtones de notre pays pour obtenir justice.
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, le sénateur pourrait-il répondre à une demande de précisions?
Le sénateur Sibbeston: Oui.
(1430)
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, nous venons d'entendre le sénateur Sibbeston dire que le projet de loi était imparfait. Aurait- il l'obligeance de nous expliquer de quelle façon, à son avis, le projet de loi est imparfait?
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, le projet de loi n'est pas parfait parce que les Autochtones du pays n'ont pas le même rôle et la même influence pour ce qui est de la nomination des membres de la commission et du tribunal. Dans un monde parfait, le gouvernement fédéral et les Autochtones auraient des droits égaux. Est-ce que notre gouvernement, notre régime démocratique et notre système de gouvernement dans lequel le Cabinet est le responsable ultime permettent cette situation?
Pour ce qui est du tribunal...
Des voix: Règlement!
Son Honneur la Présidente intérimaire: Je regrette d'interrompre l'honorable sénateur Sibbeston, mais son temps de parole est écoulé. Demandez-vous la permission de poursuivre?
[Français]
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'aimerais que l'on accorde la permission à l'honorable sénateur Sibbeston pour qu'il puisse terminer sa réponse à une question de l'honorable sénateur Kinsella.
[Traduction]
Le sénateur Sibbeston: Il y a un autre point sur lequel je voudrais attirer votre attention au sujet du tribunal lui-même. Le tribunal est censé être un dernier recours. On n'y fait appel qu'en cas de rupture des négociations. Les Autochtones peuvent s'adresser à lui pour obtenir une décision basée sur le bien-fondé de la revendication. À l'heure actuelle, si les Autochtones s'adressent au tribunal, ils renoncent automatiquement à toute indemnité supérieure à 10 millions de dollars. Il aurait été préférable que cette restriction n'existe pas. J'ai l'impression qu'avec le temps, le plafond sera relevé. Un jour, peut-être, le tribunal n'aura pas à respecter un plafond et pourra prendre sa décision en fonction des circonstances de chaque cas. Mais c'est une autre question.
Les limites financières constituent un autre sujet de préoccupation. En ce moment, le gouvernement fédéral prévoit ou est sur le point de prévoir environ 250 millions de dollars par an pour le règlement des revendications particulières. Ne vaudrait-il pas mieux prévoir un ou deux milliards pour régler rapidement toutes les revendications? Il faut du temps pour les examiner. Le gouvernement ne peut s'occuper que d'un certain nombre de revendications chaque année à cause du temps qu'il faut pour les examiner. Oui, ce serait bien de ne pas avoir un plafond, mais ce n'est pas le cas.
L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je voudrais demander au leader adjoint du gouvernement sur quels critères il se fonde pour déterminer qui sera autorisé à continuer à parler. Parfois, c'est seulement quand quelqu'un a fini de poser des questions. À d'autres moments, une permission est accordée pour prolonger le temps de parole. Ensuite, il y a deux questions de plus, ou une question et demie. Le leader adjoint vient juste de donner la permission à l'honorable sénateur de terminer sa réponse. C'est tout.
Quels sont les critères? Si nous accordons la permission de prolonger la période réservée aux questions, c'est que le sujet suscite un grand intérêt. Or il se trouve que ma question est la même que celle du sénateur Kinsella. Je ne sais pas ce qui se passe. J'étais sur le point de poser la même question. Nous sommes ici pour faire en sorte que chaque projet de loi soit aussi parfait que possible.
Tout d'abord, je ne connais pas les critères. J'aimerais les connaître pour qu'à l'avenir, je sache à quoi m'en tenir avant de donner la permission de prolonger le temps de parole. S'il s'agit seulement d'une question ou d'une question et demie, je voudrais le savoir pour être au courant des règles appliquées.
Le sénateur Kinsella: C'est un recours au Règlement. À vous de décider.
Le sénateur Prud'homme: Ce n'était qu'un recours au Règlement.
L'honorable Charlie Watt: Honorables sénateurs, il n'y a pas de doute que le sujet suscite de l'intérêt. Beaucoup d'entre nous voudraient poser des questions sur le point soulevé par l'honorable sénateur Sibbeston. Par conséquent, j'aimerais que ce débat se poursuive un peu plus longtemps pour que chacun puisse comprendre exactement de quoi nous parlons.
Le sénateur Kinsella: Quelle est la décision au sujet du recours au Règlement?
Son Honneur la Présidente intérimaire: Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Watt: Honorables sénateurs, je ne suis pas d'accord sur l'aperçu présenté par le sénateur Sibbeston. À ma connaissance, quand le projet de loi était encore au comité et qu'il a été question de voter pour porter l'affaire devant le Sénat, l'honorable sénateur s'est abstenu. Je voudrais qu'il dise d'une façon absolument claire de quel côté il se range. En un sens, nous parlons de choses qui auront des répercussions considérables sur nos gens.
Comme l'honorable sénateur a examiné le projet de loi — il semble avoir pris la bonne direction —, il aura quelques éléments positifs aujourd'hui ou peut-être demain. Toutefois, demain ne tardera pas. Ceux qui s'occupent du projet de loi au niveau politique, surtout parmi les élus, sont présents aujourd'hui, mais ils ne seront pas là demain. Le sénateur Sibbeston a signalé qu'il serait présent pendant les 15 prochaines années. Je crois qu'il m'en reste autant.
Le sénateur Prud'homme: Il vous reste 16 ans!
Le sénateur Watt: Peut-être plus qu'à vous.
Il est important de veiller à ce que les outils que nous forgeons pour le public canadien et les Autochtones soient utiles et puissent donc servir à de bonnes fins.
L'honorable sénateur dit que le tribunal est un dernier recours. Qu'est-ce qui arrive si le ministre décide de ne pas répondre à la demande et que le tribunal reste handicapé à jamais? Supposons qu'au cours de leurs délibérations, les revendicateurs déterminent qu'une revendication vaut bien plus que 10 millions de dollars, qu'elle vaut en fait 50, 100 ou 200 millions de dollars? C'est une très nette possibilité car il faut des années de recherches et de travail de même nature, selon les capacités disponibles. Ils transmettent alors l'information à la commission en précisant que leur revendication s'élève non pas à 10 millions de dollars, mais à plus de 100 millions. Le ministre ne dit absolument rien. C'est son privilège. Toutefois, après toutes les années consacrées au processus, les revendicateurs finissent par se rendre compte qu'ils n'ont pas d'autre choix que de s'adresser au tribunal. C'est ce qui va se produire à moins de modifier sensiblement cet aspect du projet de loi.
Que pense l'honorable sénateur de cette situation? C'est presque une tromperie. Les gens peuvent passer par tout le processus, puis constater en définitive qu'il n'y a rien. Voilà ce que ces outils ont d'imparfait: ils sont incomplets. Une seule personne détient beaucoup trop de pouvoir.
Le sénateur Gill a clairement dit hier qu'il faut corriger cet aspect, le clarifier et le régler une fois pour toutes. Voilà où réside le conflit d'intérêts. Est-ce qu'un homme, un ministre élu ou nommé par le premier ministre, a le droit de contrôler la vie des gens? Non. Ce n'est pas un droit. Nous sommes en 2003. J'aurais pu comprendre dans le temps, quand il y avait un mouvement dans le pays et que les gens n'avaient pas le choix.
Le sénateur Chalifoux: Quelle est la question?
Le sénateur Watt: J'ai déjà posé la question, sénateur Chalifoux. Que pense l'honorable sénateur de tant d'incertitude pour les Autochtones? Je ne crois pas que nous devrions accepter cela.
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, nous devons considérer notre système de gouvernement, notre régime démocratique et le genre d'exécutif que nous avons dans notre pays. Le premier ministre et le Cabinet prennent les décisions au nom du gouvernement. Notre régime de gouvernement est ainsi fait. En général, les gouvernements préservent jalousement leur capacité de faire des nominations. Le système est nécessaire pour que les décisions appartiennent en dernier ressort à un gouvernement. S'il arrivait que d'autres groupes, d'autres personnes, puissent également participer aux nominations, le système ne fonctionnerait pas. Il serait paralysé. Qu'arriverait-il si aucune décision n'était prise au sujet des nominations? La question demeurerait-elle en suspens, sans avoir été réglée? Quelqu'un doit prendre la décision au bout du compte. C'est notre régime de gouvernement qui fonctionne ainsi.
(1440)
Le sénateur Watt a soulevé la question des conflits d'intérêts, à laquelle le sénateur Gill a fait allusion hier. Dans notre système de gouvernement, des nominations sont faites à la magistrature et aux tribunaux. J'ai siégé brièvement à un tribunal sur les droits de la personne, à une commission semi judiciaire qui examinait des questions liées aux droits de la personne. J'ai été nommé à ce tribunal. Dès qu'on est saisi d'une question, on se concentre sur cette dernière et on tente de son mieux de rendre une décision juste. Je crois savoir que le sénateur Gill a siégé à un organisme semblable à celui dont il est question ici, qui examine les revendications particulières. Je voudrais lui demander si, lorsqu'il a été nommé à cet organisme, il s'est senti obligé de suivre la ligne du gouvernement -fédéral. Je ne crois pas que ce soit le cas. On rend essentiellement une décision en tenant compte des enjeux dont on est saisi. On n'est pas vraiment conscient de l'opinion du gouvernement. On tente de rendre la décision la plus équitable possible.
Il n'existe pas d'autre système. Aucune autre démarche n'est possible dans notre système de gouvernement, où le gouvernement nomme des personnes à des tribunaux et des commissions. Nous devons accepter ce système et espérer que les personnes nommées ne sont pas en situation de conflit d'intérêts. Nous devons espérer qu'elles pourront rendre des décisions de leur mieux, peu importe qui les a nommées.
Honorables sénateurs, j'ai assez confiance dans le système. Je suis peut-être naïf. Cela tient peut-être au fait que je viens du Nord, où nous avons réussi à bien nous entendre avec le gouvernement, où les Autochtones participent pleinement aux opérations gouvernementales, eux dont toute la vie était jadis régie par Ottawa, par l'entremise de commissaires. Après de longues batailles politiques, nous avons fini par reprendre notre destinée en mains. Je connais donc les rouages de l'appareil gouvernemental et j'ai assez confiance dans notre régime démocratique et dans notre mécanisme de nominations, car c'est le seul système que nous ayons.
Je n'ai aucune crainte et aucun doute que le ministre est plein de bonne volonté. Je crois fermement que les nominations qu'il fera à cet organisme, à la commission et au tribunal, seront justes. Il nommera, de toute évidence, les personnes les plus compétentes au Canada. Elles prendront les meilleures décisions possibles en fonction des faits dont elles disposeront.
Le sénateur Watt a mentionné que je me suis abstenu de voter en comité. La politique, c'est l'art du possible, autrement dit l'art de faire ce qu'il vous est possible de faire. Lorsque je me suis abstenu de voter l'autre jour, il était question de renvoyer le projet de loi C-6 au comité et je me suis surpris à me demander si nous accomplirions quelque chose en retardant l'étude de ce projet de loi de six mois, soit jusqu'à ce que nous ayons un nouveau gouvernement et un nouveau chef. Pendant un instant, j'ai pensé qu'il pourrait y avoir des changements, qu'un nouveau gouvernement présenterait un projet de loi bonifié. Après mûre réflexion, j'en suis venu à la conclusion qu'il était préférable d'adopter le projet de loi sous sa forme actuelle.
Laissons le processus suivre son cours. Laissons au gouvernement le temps d'établir une commission et un tribunal. Dans trois ou cinq ans, nous pourrons procéder à un examen et faire rapport sur le déroulement des choses. À mon avis, ce sera alors le moment propice pour déterminer si le projet de loi C-6 produit vraiment les résultats que nous espérons tous.
J'ai donc décidé que j'appuierais le projet de loi et que je donnerais une chance au gouvernement au lieu de retarder davantage l'adoption de cette mesure législative. Si nous retardons le projet de loi, qui sait si nous ne signerons pas son arrêt de mort?
L'honorable Pierre Claude Nolin: Honorables sénateurs, même si le sénateur Sibbeston ne l'a pas précisé, dois-je comprendre qu'il n'appuie pas la motion d'amendement du sénateur Gill?
Le sénateur Sibbeston: Effectivement, je ne l'appuie pas.
Le sénateur Nolin: L'une des raisons pour lesquelles le sénateur Gill propose un tel amendement est la fameuse lettre du grand chef Fontaine. Le sénateur Sibbeston savait-il que cette lettre avait été envoyée à la présidence du comité?
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, j'ai pris connaissance de cette lettre hier, en même temps que mes collègues. Cependant, je demeure convaincu. Les organisations prennent position. Nous sommes en politique, un milieu où l'on entend les opinions de différentes personnes et différentes organisations qui essaient d'influencer nos décisions. J'ai certes pris la lettre en considération et j'ai estimé que, malgré la position de l'APN, nous agirions dans le meilleur intérêt des Autochtones en adoptant le projet de loi maintenant.
Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, avant de faire une telle déclaration, le sénateur Sibbeston a-t-il pris au moins le temps de lire la lettre? L'honorable sénateur a-t-il lu la lettre en entier ou a-t-il présumé l'intention de ceux qui l'ont écrite?
[Français]
Le sénateur Robichaud: On ne peut pas prêter une intention à l'honorable sénateur, et voilà exactement ce que l'honorable sénateur Nolin essaie de faire.
[Traduction]
Le sénateur Nolin: Je vais répéter ma question, pour que ce soit bien clair.
L'honorable John Lynch-Staunton (leader de l'opposition): Tout ce qu'il veut savoir, c'est si vous avez lu la lettre.
Le sénateur Nolin: Le sénateur a-t-il lu la lettre avant de faire la déclaration qu'il a faite dans sa réponse précédente? Le sénateur Sibbeston a-t-il lu cette lettre?
Le sénateur Lynch-Staunton: Ce n'est qu'hier qu'il en a entendu parler pour la première fois. Ne l'embrouillez pas.
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, je n'ai pas lu la lettre. J'ai passé des jours et des semaines à écouter les témoignages des représentants de l'APN, mais je n'ai pas lu la lettre qui a été déposée hier. Je la vois comme un énoncé de principes de la part du nouveau grand chef de l'APN.
Le sénateur Lynch-Staunton: Comment le savez-vous si vous ne l'avez pas lue?
Le sénateur Sibbeston: C'est comme cela que je la vois. C'est la position générale du chef de l'APN. Je ne crois pas que cette position soit très différente des témoignages que nous avons entendus pendant des jours et des semaines. Je suis plus influencé par les témoignages que j'entends que par une lettre.
Le sénateur Nolin: Honorables sénateurs, le sénateur Sibbeston ne pense-t-il pas que ce serait faire preuve de respect envers le chef ou le représentant d'une importante organisation, qui a pris le temps d'écrire à la présidente du comité, que de lire au moins la lettre avant de faire des remarques sur le but visé par cette lettre et d'attendre à la prochaine séance du Sénat pour faire de telles remarques ou même pour répéter la remarque qu'il vient de faire? Cela serait au moins une preuve de respect envers un groupe de Canadiens dignes de respect et ce qu'ils représentent, et envers un homme qui a été élu par eux.
L'honorable Jack Austin: Je me demande si le sénateur Sibbeston me laisserait lui poser une question avant qu'il ne réponde à cette question.
(1450)
Le sénateur Kinsella: Paul Martin n'est pas encore premier ministre.
Le sénateur Sibbeston: C'est bon d'obtenir tant d'attention.
Le sénateur Nolin: Vous commentez des choses que vous n'avez pas lues.
Le sénateur Sibbeston: Je respecte beaucoup Phil Fontaine, le grand chef de l'APN. Je respecte de façon générale l'organisation qui représente les Premières nations de notre pays.
Le sénateur Kinsella: De façon générale, lorsque cela vous convient.
Le sénateur Sibbeston: Ce que je dis, c'est qu'il ne faut pas faire un plat de cela. Je sais que la lettre a été déposée hier et je sais qu'il y a une lettre contenant la position de M. Fontaine. Cependant, il y a plus. Nous avons entendu pendant des jours et des semaines des témoignages et cela a influencé ma décision plus qu'une simple lettre. Sitôt que j'en aurai terminé ici, je la lirai.
Le sénateur Kinsella: Après les votes!
Le sénateur Nolin: J'ai une dernière question pour le sénateur. Monsieur, par respect pour notre collègue qui a décidé de présenter un amendement à la motion du fait de cette lettre, lisez au moins la lettre et attendez jusqu'à demain ou à la prochaine séance pour intervenir.
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, cela ressemble beaucoup à la motion qui a été présentée pour renvoyer en fin de compte le projet de loi au comité.
Le sénateur Kinsella: C'est une question tout à fait différente.
Le sénateur Nolin: Lisez la lettre.
Le sénateur Sibbeston: Je trouve que cette motion manque de respect à l'égard de la présidente et des membres du comité qui ont étudié pendant des semaines le projet de loi C-6. Je vais vous dire, l'affaire Powley n'a aucune répercussion sur ce projet de loi.
Le sénateur Nolin: Lisez la lettre.
Le sénateur Sibbeston: Je n'ai pas beaucoup de considération pour des amendements présentés par des gens comme ceux qu'on retrouve sur les banquettes de l'opposition.
Le sénateur Austin: Honorables sénateurs, je voudrais poser une question au sénateur Sibbeston. Je suis intervenu hier au Sénat. J'ai précisé dans mon discours le témoignage fait devant notre comité par M. Schwartz, avocat-conseil de l'Assemblée des Premières nations. Il a lu la lettre de M. Fontaine, qui a été examinée. Les membres du comité qui sont au Sénat aujourd'hui vont s'en rappeler, j'en suis persuadé.
Les questions du sénateur Nolin sont, selon moi, basées sur une fausse prémisse. Le comité a étudié en profondeur la lettre de M. Fontaine qui a été bien présentée par un avocat très compétent, M. Schwartz, que j'ai longuement cité hier.
Je crois que le sénateur Sibbeston n'était pas présent pour cette partie des audiences du comité, n'est-ce pas?
[Français]
Le sénateur Nolin: J'ai posé ma question suite à une réponse du sénateur Sibbeston.
[Traduction]
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, il est vrai que j'étais absent, la semaine dernière lorsque le comité a tenu une réunion à laquelle assistait un représentant de l'Assemblée des Premières nations et au cours de laquelle il semble qu'une copie de la lettre de M. Fontaine a été déposée. Je dois admettre que j'étais absent et que j'ai pris connaissance de cette lettre hier seulement.
Le sénateur Corbin: J'invoque le Règlement. Le sénateur Sibbeston a dit que c'était manquer de respect à la présidence du comité que de renvoyer le projet de loi au comité. Ce n'était pas la décision d'une personne, mais la décision du Sénat. L'honorable sénateur laisse-t-il entendre qu'il y a eu un manque de respect de la part du Sénat?
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, je dis que je ne crois pas qu'il arrive très souvent au Sénat d'adopter une motion visant à renvoyer le projet de loi au comité, après que celui-ci eut travaillé pendant des semaines et des mois à étudier un rapport. Je crois que c'est plutôt inhabituel.
Le sénateur Kinsella: Au contraire!
Le sénateur Sibbeston: Depuis le peu de temps que je suis ici, je n'ai pas vu une telle chose. Je me suis dit, compte tenu de tout le temps que nous avons consacré à l'étude du projet de loi: «Nous avons travaillé tellement fort en comité. Nous y avons mis beaucoup de temps et d'énergie. Pourquoi est-il renvoyé au comité?» Le seul élément nouveau, à mon avis, c'était la décision de la Cour suprême. Voilà la raison pour laquelle le projet de loi C-6 a été renvoyé de nouveau au comité. Je sais que ma première réaction, je l'avoue, a été de me décourager. «Est-ce que le Sénat a l'impression que nous n'avons pas fait notre travail correctement? Pour quelle raison renvoie-t-on au comité un travail qu'il a déjà fait?»
Le sénateur Lynch-Staunton: Parce que le projet de loi est imparfait.
Le sénateur Nolin: Il a besoin d'être étudié plus à fond.
Le sénateur Lynch-Staunton: Vous avez dit vous-même qu'il était imparfait. Améliorons-le.
Le sénateur Kinsella: Avez-vous lu le projet de loi?
[Français]
L'honorable Aurélien Gill: Honorables sénateurs, j'ai déjà entendu dire dans ma vie passée qu'il était très difficile pour les minorités de se faire entendre. En règle générale, on dit que les murmures de la minorité se font enterrer par les cris de la majorité. Je pense que c'est ce qu'on est en train d'appliquer à la Chambre haute du Canada.
Je vois une répétition du paternalisme qu'on a toujours vécu. Quand le sénateur Austin se porte à la défense du sénateur Sibbeston, c'est du paternalisme. J'aimerais poser une question à l'honorable sénateur, et j'espère que ce sera le sénateur Sibbeston qui me répondra. L'honorable sénateur a raison lorsqu'il dit que nous avons passé beaucoup de temps sur le projet de loi C-6. Pouvez-vous me dire quelles sont les différences entre les règlements de l'ancienne Commission des revendications particulières des Indiens et le projet de loi que l'on veut maintenant mettre en place? Je voudrais savoir si votre groupe a vécu des expériences avec l'ancienne Commission des revendications particulières des Indiens? Avez-vous vécu des effets de la revendication?
[Traduction]
Le sénateur Sibbeston: L'honorable sénateur demande quelle différence il y a. Ce que j'en comprends, c'est que, jusqu'à présent, toute la question des revendications particulières rentre dans le cadre de la Loi fédérale sur les enquêtes. À une époque, le gouvernement fédéral a décidé d'établir une commission d'enquête pour examiner des revendications particulières. À mes yeux, c'est peu important. Quand un gouvernement établit une commission d'enquête, il peut aussi l'abolir.
Selon la conception que je me fais de notre pays, le Canada, il faut, pour traiter des revendications particulières des Autochtones, quelque chose de plus profond, de plus significatif, de plus définitif, de plus important, pour ainsi dire, le faire au moyen d'un projet de loi, comme celui dont nous sommes saisis. Le gouvernement, plutôt que de tenir une petite enquête, à laquelle il peut mettre fin à tout moment selon sa fantaisie, nous a maintenant proposé un projet de loi. Celui-ci a déjà été présenté à la Chambre des communes et le Sénat en est maintenant saisi. Le Parlement aura maintenant affaire à un organisme qui sera créé pour traiter les revendications particulières. À mes yeux, c'est beaucoup plus profond et beaucoup plus significatif. C'est une mesure beaucoup plus déterminante, si vous voulez, que les enquêtes que nous avons connues jusqu'à présent. Dans mon esprit, c'est un très grand pas, un pas positif en avant.
En outre, le projet de loi comporte des dispositions relatives à l'indépendance. Aux termes de la Loi fédérale sur les enquêtes, les nominations à une commission d'enquête dépendent exclusivement du ministre et de la bonne volonté du gouvernement. Selon le présent projet de loi, au moins, le processus de nomination des membres de la commission et du tribunal est beaucoup plus ouvert.
(1500)
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui constitue, à mon avis, un progrès dans le traitement des diverses revendications non résolues des Autochtones dans notre pays. C'est un pas en avant. Faisons ce pas.
[Français]
Le sénateur Gill: L'honorable sénateur parle d'un processus de nomination. Ce processus se fera-t-il de façon indépendante, sans intervention du ministre des Affaires indiennes?
[Traduction]
Le sénateur Sibbeston: Je crois qu'il ne se fera pas de façon moins indépendante que s'il s'était agi de la Cour suprême du Canada. Le gouvernement nomme les juges de la Cour suprême du Canada. Doutons-nous jamais de l'indépendance de la Cour suprême? C'est la même situation. Quand un ministre fait des nominations, nous devons avoir confiance qu'il choisira les personnes qui possèdent les meilleures compétences pour jouer le rôle qui leur incombe au sein des commissions et des tribunaux. Il faut avoir confiance dans le système en place. Autrement tout le système canadien serait un échec et devrait être remis en question.
Les dispositions de ce projet de loi ne sont pas différentes. Quelqu'un au gouvernement doit prendre cette décision. Nous avons amendé le projet de loi C-6 de manière à ce que le ministre soit tenu dorénavant de consulter les auteurs des revendications et, au bout de trois à cinq ans, toutes les Premières nations du pays. Cette exigence n'existait pas avant l'amendement. Il nous a fallu déployer beaucoup d'efforts pour avoir l'amendement. Nous n'avons pas simplement ratifié d'office un projet de loi venant de l'autre endroit. Nous avons beaucoup travaillé et nous avons écouté les Premières nations qui se sont présentées. Nous avons fait de notre mieux compte tenu des pouvoirs qui nous ont été conférés.
Je trouve un peu triste que les Premières nations, les peuples autochtones, doivent voir dans le Sénat un endroit où ils peuvent obtenir justice. Ils devraient pouvoir l'obtenir dans le cours normal de leurs relations avec le gouvernement fédéral. Pourquoi mettent-ils tous leurs espoirs dans le Sénat seulement? Le gouvernement devrait traiter équitablement avec eux en tout temps. Il faut reconnaître ce fait. Même si nous, au Sénat, faisons de notre mieux, nous avons des limites. Nous ne pouvons que continuer de faire de notre mieux dans toute la mesure du possible compte tenu des circonstances.
[Français]
Le sénateur Gill: Honorables sénateurs, je fais confiance au gouvernement. La population élit des députés en qui elle a confiance. La population fait confiance aux ministres qui ont été nommés par le premier ministre. Selon un sondage effectué auprès des gens des Premières nations, leurs dirigeants ont également été élus démocratiquement. Alors comment fonctionne la démocratie? Ne fonctionne-t-elle que pour un seul volet de la société canadienne en oubliant les autres. Pourquoi l'honorable sénateur est-il prêt à faire autant confiance au ministre des Affaires indiennes, qui n'est d'aucune façon mandaté par la population autochtone? Comment êtes-vous prêt à faire confiance au ministre des Affaires indiennes et à ne pas faire confiance à notre chef national, élu par les chefs qui, eux, ont été élus par les populations locales?
[Traduction]
Le sénateur Sibbeston: J'ai certes du respect pour nos dirigeants autochtones. Au Sénat, nous sommes dans le monde du gouvernement fédéral et du Parlement. Au sein de notre système de gouvernement, les ministres sont responsables de différents dossiers. Dans le cas des Autochtones, la responsabilité incombe au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. C'est là notre système de gouvernement.
Les Territoires du Nord-Ouest, région d'où je viens, luttent depuis longtemps pour obtenir un gouvernement responsable. Les Autochtones ont déployé de grands efforts, et ils ont assez bien réussi. Le Nunavut a été créé en 1999 et les aspirations des Inuits ont été réalisées. J'ai participé à cette réalisation.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, notre expérience avec le gouvernement fédéral nous a amenés à haïr ce dernier, comme d'autres le haïssent également, mais nous travaillions de façon progressive, au point où nous avons un jour évincé le commissaire fédéral. Nous avons chassé le gouvernement fédéral à force de travail acharné et de persévérance.
Il y a des revendications territoriales dans les Territoires du Nord- Ouest. Je suis chanceux et je reconnais que les Autochtones d'autres régions du pays ont la vie plus difficile parce qu'ils évoluent au milieu de nombreux non-Autochtones dont les antécédents remontent à plus loin. Dans le Nord, le gouvernement fédéral a fait mieux qu'ailleurs et a réglé des revendications territoriales avec la majorité des peuples autochtones. Les peuples autochtones du Nord sont en plein essor. Ils participent au gouvernement et à tous les aspects de la société. Les Autochtones sont des partenaires dans l'exploitation des mines de diamant dans le Nord. Un jour, les Autochtones seront les propriétaires d'un tiers du gazoduc de la vallée du Mackenzie, qui passera dans leur région.
Bien que j'entretienne une certaine méfiance à l'égard des gouvernements, je constate que, grâce à la collaboration, au travail acharné et au progrès constant, on peut aboutir à des résultats positifs. Je n'entretiens pas de grande méfiance ni d'aversion à l'égard du gouvernement fédéral contrairement à d'autres. Dans le cas qui nous occupe, le ministre, M. Nault, a de bonnes relations avec le Nord. La première année où j'ai occupé les fonctions de sénateur, le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien est venu dans le Nord quatre fois, du jamais vu auparavant. J'ai vu le ministre à l'oeuvre dans le Nord, dans ses rapports avec les Autochtones, et son attitude est très positive. Il a fait de nombreuses concessions et il a très bien fait dans ses rapports avec les Autochtones du Nord et dans le traitement qu'il leur a réservé.
Dois-je supposer que le ministre a cette même attitude et cette même prédisposition à l'égard des Autochtones dans le reste du pays? C'est tout ce que je souhaite. Je m'attends à ce qu'une fois ce projet de loi adopté, il s'emploiera avec ferveur à mettre sur pied la commission et le tribunal. Je m'attends également à ce que ces deux organismes fassent leur travail et donnent des résultats. J'ai confiance.
Le sénateur Lynch-Staunton: Le sénateur Sibbeston n'a pas répondu à la question fondamentale posée par le sénateur Gill. Je lui poserai cette question différemment, en citant la lettre datée du 2 octobre que le grand chef Fontaine a fait parvenir au président et aux membres du Comité permanent des peuples autochtones, et qu'il n'a pas lue. La lettre dit ceci:
Peu d'organisations fonctionnent de façon aussi démocratique que l'APN. Le chef national doit détenir un mandat d'au moins 60 p. 100 des chefs qui représentent l'écrasante majorité des Premières nations. Aucune organisation ne convient mieux pour consulter les revendicateurs et ceux qui pourraient présenter des revendications et pour se faire leur interprète. Sa position sur le projet de loi C-6 est appuyée par les Premières nations aux niveaux régional et local dans l'ensemble du Canada. Il n'existe aucun clivage entre la base et les dirigeants.
Je tiens seulement à savoir si le sénateur Sibbeston partage ce point de vue.
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, ce n'est pas parole d'Évangile. Je crois certaines de ces affirmations, mais il faut reconnaître que, comme dans les milieux politiques, certains pensent différemment dans différentes régions du pays. Par conséquent, les affirmations de quelqu'un ne valent pas nécessairement pour tout le pays.
Cette lettre n'est pas de la main de Dieu. Certaines affirmations qu'elle renferme sont sans doute vraies, mais les Autochtones sont répartis partout au pays et il est impossible qu'ils partagent tous la même opinion sur certaines choses. Je respecte le point de vue de M. Fontaine, mais je sais qu'il y a des groupes au pays qui appuient le projet de loi C-6.
(1510)
Le sénateur Lynch-Staunton: Simplement pour mettre les choses au clair, je signale que M. Fontaine a signé «Phil Fontaine, chef national» non «Dieu».
Ma question est la suivante: quel rôle l'honorable sénateur considère-t-il que l'Assemblée des Premières nations joue en qualité d'organisme représentant les Autochtones? À mon avis, l'honorable sénateur fait abstraction de l'Assemblée des Premières nations et je trouve cela fort difficile à admettre.
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, je crois que nous pourrions être dans une nouvelle ère où le chef de l'Assemblée des Premières nations entretiendra des relations harmonieuses avec le gouvernement fédéral et collaborera pour éviter que nous nous retrouvions encore dans une situation où on fait appel au Sénat pour apporter des changements. Il est à souhaiter que dans le cadre de ses activités quotidiennes, l'APN fasse des tractations, rencontre les représentants du gouvernement fédéral et les ministres du Cabinet et prenne des décisions judicieuses pour que ce ne soit pas nous qui devions, en fin de compte, résoudre ces problèmes.
Je suis optimiste et je crois que nous sommes entrés dans une nouvelle ère où l'Assemblée des Premières nations entretiendra des rapports harmonieux avec le gouvernement fédéral et qu'un grand nombre de questions seront réglées.
L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, dans le but de mettre en lumière la question soulevée par le sénateur Sibbeston, je lui pose une question visant à faire inscrire au compte rendu la réponse à sa question.
L'honorable sénateur est-il au courant que, dans leur sagesse, les Pères de la Confédération ont créé le Sénat et lui ont confié des tâches bien précises, dont l'une est de promouvoir et de protéger les intérêts des régions et des minorités? S'il est effectivement au courant de cette responsabilité, pourquoi s'interroge-t-il sur le rôle du Sénat dans ce dossier?
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, je suis entièrement convaincu du bien-fondé du mandat du Sénat, comme l'a indiqué l'honorable sénateur. Je reconnais le rôle que nous jouons, notamment en qualité de représentants des régions et des minorités. Je disais simplement que cela nous faciliterait la tâche si l'APN traitait, dans le cours normal de ses affaires, les grandes questions qui opposent les Autochtones au gouvernement fédéral. J'ai le sentiment qu'ici, dans le Sud, les relations entre le gouvernement fédéral et les Autochtones ne sont pas très harmonieuses. C'est l'impression que j'ai; c'est tout ce que j'en dis.
J'espère qu'au cours des prochaines années les relations s'amélioreront et que des décisions seront prises. L'hiver dernier, j'ai vu adopter un projet de loi sur le Yukon, à la rédaction duquel les Premières nations avaient participé. La Chambre, puis notre comité en ont été saisis. Les Autochtones du Yukon, présents à la table, ont dit qu'ils avaient participé à la rédaction du projet de loi et ils en ont appuyé les dispositions avec enthousiasme. Nous étions très heureux de pouvoir confirmer et approuver le contenu de ce projet de loi.
Le projet de loi C-6 est très différent de certains autres projets de loi que nous avons vus. Les honorables sénateurs se souviendront du projet de loi C-7. Il y a aussi d'autres projets de loi attendus, au sujet desquels l'Assemblée des Premières nations, les Premières nations et le gouvernement fédéral semblent avoir des positions diamétralement opposées.
Je dis simplement qu'il faut espérer que nous sommes maintenant dans une ère nouvelle où l'Assemblée des Premières nations et les groupes autochtones peuvent entretenir des relations cordiales avec le gouvernement et collaborer à la rédaction des lois. Ainsi, lorsque nous serons saisis des projets de loi, il y aura peu de modifications à y apporter et nous pourrons les appuyer avec enthousiasme. C'est tout ce que je dis.
Le sénateur Di Nino: Honorables sénateurs, ce n'est pas une réponse suffisante. Cela ne répond pas à la question. Si nous n'avons rien à faire, ou si peu, les contribuables canadiens devraient fermer cette Chambre et nous renvoyer chez nous.
En fin de compte, l'honorable sénateur ne convient-il pas que, dans un monde parfait, ces choses merveilleuses peuvent se produire, mais que lorsqu'elles ne se réalisent pas il doit y avoir un endroit où les gens, les communautés, puissent obtenir un traitement équitable? C'est précisément le rôle de cette assemblée. C'est la raison pour laquelle les sénateurs sont ici. C'est pourquoi ils devraient être encouragés à être ici, et non pas interrogés sur la raison de leur présence en cet endroit.
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, je souscris de tout coeur à ce que vient de dire le sénateur. Cette Chambre est le lieu où les minorités, les peuples autochtones et les habitants d'autres régions peuvent faire valoir leurs points de vue.
Dans le cas qui nous occupe, certaines personnes appuieront le projet de loi, d'autres s'y opposeront. Je suis convaincu que la région que je représente, les Territoires du Nord-Ouest, l'appuiera. Dans une certaine mesure, ce projet de loi n'est même pas applicable, parce qu'il est ici question de traités et de revendications territoriales des temps modernes. Ces nouveaux accords sur les revendications territoriales mettent de côté les griefs historiques.
À certains égards, dans ma région du pays, les Territoires du Nord-Ouest, le projet de loi C-6 ne sera pas très souvent appliqué. Nous n'avons qu'une réserve et, à ma connaissance, elle n'a qu'une ou deux petites revendications d'un montant probablement inférieur à un million de dollars. Toutefois, je suis conscient de la situation qui règne ailleurs dans le pays. Des revendications en attente totalisant des milliards de dollars doivent être réglées dans les quelques prochaines années.
Je considère le projet de loi C-6 comme un mécanisme qui nous permettra de prendre un bon départ pour régler certaines de ces revendications de longue date. Je suis bien d'accord que le Sénat du Canada est l'endroit tout désigné pour traiter de ces questions.
Qui peut dire si l'honorable sénateur a plus ou moins raison que moi pour ce qui est de représenter des régions ou des gens? J'ai clairement pris position, de même que le sénateur Chalifoux. Nous appuyons le projet de loi. Le fait que d'autres ne l'appuient pas ne signifie pas qu'ils ont plus raison que nous. En définitive, les honorables sénateurs doivent décider par eux-mêmes de ce qui est juste et équitable.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, le sénateur Sibbeston parlait dans le cadre du débat sur l'amendement du sénateur Gill, c'est-à-dire la motion proposant que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit lu une troisième fois dans six mois.
L'honorable Laurier L. LaPierre: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Ce n'est pas exactement ce que dit l'amendement. La motion de l'honorable sénateur Gill, appuyée par l'honorable sénateur Watt, est ainsi libellée en anglais:
... that Bill C-6 be not now read the third time, but that it be read the third time this day six month hence.
Ce jour est le jeudi 9 octobre 2003. La troisième lecture n'aura pas lieu dans six mois de ce jour. Ai-je bien compris?
Des voix: Non, non.
Le sénateur LaPierre: Est-ce bien ce que dit le Feuilleton? Il ne dit pas en anglais: «...this day six months from now».
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je voudrais remercier le sénateur Sibbeston.
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, quelqu'un avait la parole au moment où le Règlement a été invoqué.
Le sénateur Cools: Y a-t-il un recours au Règlement? Sur quoi porte le débat? De quoi discutons-nous?
Le sénateur Prud'homme: Honorables sénateurs, le sénateur LaPierre a invoqué le Règlement sur la base de la version anglaise de la motion. Je demande cependant aux honorables sénateurs de lire le texte français, qui est tout à fait exact.
[Français]
Que le projet de loi soit lu une troisième fois dans six mois de ce jour.
Vous avez raison et vous avez tort. Vous avez raison, que le projet de loi serait lu dans six mois à compter d'hier, mais ce n'était pas une obligation qui devait se faire hier. La troisième lecture est reportée dans six mois de ce jour. C'est l'expression consacrée lorsqu'on veut remettre un projet de loi.
(1520)
Le sénateur LaPierre: Doit-on prendre la version française ou la version anglaise? L'honorable sénateur pourrait-il se taire? La version anglaise est une chose; la version française en est une autre. Laquelle doit-on prendre?
[Traduction]
Le sénateur Cools: Je précise qu'il n'y a pas de recours au Règlement. Cette intervention ne constitue pas un véritable recours au Règlement. Par ailleurs, elle nous a sans doute procuré un peu d'humour et de légèreté et c'est toujours utile.
Le sénateur LaPierre: Elle n'a pas le droit de m'insulter.
Une voix: Personne ne vous insulte.
Le sénateur Cools: Devrais-je recommencer? Je disais qu'il n'y a pas de recours au Règlement et que l'intervention ne représente pas un recours au Règlement admissible car la motion dont nous sommes saisis, et dont parlait le sénateur Sibbeston, est absolument limpide. En fait, l'intervention a apporté un peu de réconfort car l'humour est toujours utile, et la légèreté toujours bienvenue, dans le cadre d'un débat.
Ce qui s'est déroulé fut un échange très sérieux. Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres sénateurs, mais j'ai été profondément touchée par les propos du sénateur Sibbeston. Je ne suis pas certaine de les approuver, mais j'ai été touchée. J'ajouterais même que le sénateur Sibbeston est un homme qui suscite beaucoup de respect au Sénat et dans son coin de la planète. Je le dis très sérieusement.
Je m'empresse d'ajouter que le grand chef Phil Fontaine mérite également un profond respect. À mon avis, nous devons entendre ses propos, y réfléchir et en tenir compte.
En réalité, honorables sénateurs, il n'y a aucune confusion possible au sujet de l'intention ou de la signification de la motion, car, après tout, les motions sont proposées à un moment particulier, mais elles ne peuvent prendre effet que le jour même où elles sont adoptées. Par conséquent, l'expression «ce jour» désigne le jour où la motion est effectivement adoptée. Par conséquent, si la motion était adoptée aujourd'hui, la période de six mois commencerait aujourd'hui même. En d'autres termes, si la motion n'était adoptée que dans cinq mois, la période de six mois serait retardée d'autant, et elle débuterait le jour de l'adoption, puisque «ce jour» désigne normalement le jour de la prise d'effet. Cela me paraissait plutôt clair. J'ai cru que nous prenions cette intervention comme une distraction.
J'ignore si je peux le faire maintenant, mais je voudrais poser aux honorables sénateurs une question sur la lettre à laquelle tout le monde s'est reporté. Hier, le sénateur Gill a demandé la permission de déposer la lettre du grand chef Fontaine. J'ai alors présumé qu'il demandait également à ce que la lettre soit annexée au compte rendu de nos délibérations d'hier.
[Français]
Son Honneur la Présidente intérimaire: L'honorable sénateur Cools a modifié le débat en répondant à une première question de l'honorable sénateur LaPierre. Ensuite, l'honorable sénateur Cools a fait un rappel au Règlement qui n'est pas valable actuellement.
[Traduction]
Le sénateur Cools: Je ne crois pas avoir changé le cours du débat. J'ai parlé du rappel au Règlement, et je me suis montrée très cohérente, Votre Honneur.
Je disais que la question de cette lettre était revenue à quelques reprises. Elle est pertinente pour l'adoption de cette motion parce qu'elle a été un élément fondamental dans les déclarations du sénateur Gill.
En outre, pour ce qui est du rappel au Règlement et de la motion, je voulais savoir pourquoi la lettre ne figurait pas en annexe au hansard d'hier. En lisant le hansard et les Journaux du Sénat, j'ai appris que la lettre figurerait non pas dans le compte rendu des débats, mais parmi les documents parlementaires parce qu'il semble que le sénateur Gill n'a pas été assez explicite dans sa requête. En fait, il n'a pas fait de requête. C'est Son Honneur qui est intervenue et qui a présenté une telle requête.
Puisque cette lettre compte beaucoup dans les échanges d'aujourd'hui, figurera-t-elle en annexe du compte rendu des débats d'aujourd'hui?
Son Honneur la Présidente intérimaire: Plaît-il aux sénateurs que la lettre figure en annexe des Débats du Sénat d'aujourd'hui?
Des voix: D'accord.
(Le texte du document figure à la p. 2100 des Débats du Sénat d'aujourd'hui.)
L'honorable Willie Adams: Je propose l'ajournement du débat.
Son Honneur la Présidente intérimaire: J'invite aimablement le sénateur à se lever et à utiliser le microphone la prochaine fois parce que, d'ici, nous n'entendons rien de ce qu'il dit.
L'honorable sénateur Adams propose...
Le sénateur Kinsella: Non, nous avons un rappel au Règlement à trancher.
[Français]
Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, plusieurs d'entre vous ont l'impression qu'il y a actuellement un rappel au Règlement de la part de l'honorable sénateur LaPierre. La Chambre devrait donc nous indiquer s'il y a ou non un rappel au Règlement. Ensuite, nous pourrions poursuivre le débat et passer à la motion d'ajournement de l'honorable sénateur Adams.
Le sénateur LaPierre: Honorables sénateurs, j'agis selon la volonté du peuple. Je retire donc mon rappel au Règlement.
[Traduction]
Je peux le présenter de nouveau dans six mois à compter de ce jour. Entre-temps, je crois que nous devrions poursuivre ce débat tout à fait fascinant, à condition que le sénateur Cools n'ait pas trop de choses à dire.
Des voix: Oh! Oh! Retirez cela.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. J'ai toujours considéré qu'il n'était pas permis dans cette enceinte de formuler des remarques caustiques ou déplaisantes sur les sénateurs. J'ai le droit de m'exprimer.
Le sénateur LaPierre: Je retire tout ce que j'ai dit.
Le sénateur Cools: Il n'y a rien d'autre à ajouter.
Le sénateur Kinsella: Je crois que le temps de parole est toujours au sénateur Sibbeston. J'avais pris la parole pour poser à l'honorable sénateur une question sur la motion dont nous sommes saisis, qui est la motion du sénateur Gill demandant que le projet de loi ne soit pas lu une troisième fois maintenant, mais qu'il soit lu dans six mois à compter de ce jour. J'ai supposé que le sénateur parlait de cette question.
La demande de précisions que j'adresse au sénateur Sibbeston est la suivante: Quel tort peut-il réellement y avoir à faire la troisième lecture de cette motion maintenant plutôt que dans six mois?
(1530)
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, je pense que le sénateur Kinsella connaît la réponse à cette question. La réponse, c'est qu'il n'y a aucun mal, mais il n'y a aucun avantage non plus. Il n'y a pas d'avantage, car, comme le sait le sénateur, dans le climat politique actuel, une prorogation sonnerait carrément le glas de ce projet de loi, et il nous faudrait alors tout recommencer le travail que nous avons fait jusqu'à maintenant. À mon avis, ce ne serait pas une utilisation prudente ou judicieuse de nos ressources. J'ai déterminé qu'il serait préférable d'adopter ce projet de loi pendant la session parlementaire actuelle.
Le sénateur Kinsella: L'honorable sénateur ne reconnaît-il pas qu'il existe à cet endroit une pratique de longue date selon laquelle aucun travail n'est perdu? Ainsi, lorsque la Chambre étudie un projet de loi et qu'un comité s'est penché sur celui-ci, tous les documents et témoignages qui ont été déposés au comité peuvent être soumis à nouveau au comité, même dans le cadre d'une nouvelle législature. Pourquoi le sénateur croit-il que le travail important qui a été accompli serait perdu?
Le sénateur Sibbeston: Je reconnais qu'il ne serait peut-être pas nécessaire de recommencer toutes les audiences du comité et le reste; comme le dit l'honorable sénateur, ces documents et témoignages sont conservés, et nous pourrions partir de là.
La politique étant ce qu'elle est — et le sénateur en connaît les rouages — qui sait qui sera le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien dans l'avenir? Qui peut dire quelles seront les vues du premier ministre et du gouvernement et qui sait s'ils seront disposés à appuyer des projets de loi comme celui-ci? Actuellement, alors que nous savons que le gouvernement appuie ce projet de loi et qu'il est prêt à y donner suite, je pense que nous devrions être opportunistes, aller de l'avant et l'adopter.
Le sénateur Kinsella: L'honorable sénateur est-il en train de laisser entendre que, dans l'éventualité improbable où M. Martin deviendrait premier ministre, sous un gouvernement Martin, le projet de loi serait meilleur ou pire? Autrement dit, ce projet de loi serait-il meilleur sous le premier ministre Chrétien ou sous un gouvernement Martin?
Le sénateur Sibbeston: C'est une question purement politique. Je ne doute pas que le gouvernement sera meilleur. Lorsque nous aurons adopté ce projet de loi pendant la session actuelle, nous pourrons alors nous employer, dans le prochain gouvernement, à rendre ce projet de loi encore meilleur. C'est mon opinion.
Le sénateur Kinsella: Les honorables sénateurs ont-ils raison de déduire que, selon l'honorable sénateur, l'adoption de la motion du sénateur Gill, que nous examinons actuellement, c'est-à-dire que le projet de loi ne soit pas lu une troisième fois maintenant mais plutôÎt dans six mois, n'aura pas de conséquence fâcheuse?
En outre, l'honorable sénateur nous a informés qu'il n'avait pas lu la lettre du chef Fontaine, qui est datée du 2 octobre, mais peut-il nous dire s'il a pris connaissance du projet de loi C-6 et lu toutes ses pages?
Le sénateur Sibbeston: Honorables sénateurs, j'assure à l'honorable sénateur que j'ai lu le projet de loi à maintes reprises. Je l'ai lu avant de me mettre au lit. Je l'ai relu le matin à mon lever. Je l'ai lu plusieurs fois et je le connais bien. En outre, je suis au courant des amendements dont il a fait l'objet puisque j'y ai été mêlé de près.
Pour ce qui est de citer textuellement le projet de loi, pour l'instant je ne le peux pas. Toutefois, je le connais relativement bien dans ses grandes lignes.
Le sénateur Kinsella: Pourriez-vous nous dire combien de pages compte le projet de loi?
Le sénateur Austin: C'est irrespectueux.
(Sur la motion du sénateur Adams, le débat est ajourné.)
[Français]
AVIS DE MOTION VISANT L'ATTRIBUTION D'UNE PÉRIODE DE TEMPS
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je vous informe que je n'ai pas pu en arriver à une entente pour savoir combien de temps pourrait être dévolu à l'étude de ce projet de loi.
Alors, conformément à l'article 39, je donne avis que, lors de la prochaine séance du Sénat, je proposerai:
Que, conformément à l'article 39 du Règlement, pas plus de six heures de délibérations ne soient attribuées à l'étude à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-6, Loi constituant le Centre canadien indépendant des revendications particulières des Premières nations en vue de permettre le dépôt, la négociation et le règlement des revendication particulières, et modifiant certaines lois en conséquence.
Que, lorsque les délibérations seront terminées ou que le temps prévu pour le débat sera écoulé, le Président interrompe, au besoin, les délibérations en cours au Sénat et mette aux voix immédiatement et successivement toute question nécessaire pour disposer de l'étape de la troisième lecture dudit projet de loi; et
Que tout vote sur appel nominal sur lesdites questions soit pris conformément au paragraphe 39(4) du Règlement.
[Traduction]
LES TRAVAUX DU SÉNAT
L'honorable Noël A. Kinsella (leader adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, étant debout et ayant la parole, je propose que le Sénat s'ajourne maintenant.
[Français]
Son Honneur la Présidente intérimaire: L'honorable sénateur Kinsella, appuyé par l'honorable sénateur Lynch-Staunton, propose l'ajournement du Sénat. Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Que ceux qui sont contre la motion veulent bien dire non.
Des voix: Non.
Son Honneur la Présidente intérimaire: Je pense que les non l'emportent.
Honorables sénateurs, je déclare que la motion est rejetée.
PROJET DE LOI SUR LA MODERNISATION DE LA FONCTION PUBLIQUE
TROISIÈME LECTURE—SUITE DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Day, appuyée par l'honorable sénateur Harb, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-25, Loi modernisant le régime de l'emploi et des relations de travail dans la fonction publique, modifiant la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur le Centre canadien de gestion et apportant des modifications corrélatives à d'autres lois;
Et sur la motion d'amendement de l'honorable sénateur Beaudoin, appuyée par l'honorable sénateur Comeau, que le projet de loi ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit modifié, à l'article 12, à la page 126, par substitution, aux lignes 9 à 13, de ce qui suit:
«30. (1) Les nominations — internes ou externes — à la fonction publique par la Commission sont indépendantes de toute influence politique, sont fondées sur le mérite et sont faites par concours ou par tout autre mode de sélection du personnel permettant d'établir le mérite relatif des candidats qui, de l'avis de celle-ci, sert les intérêts de la fonction publique.
(1.1) Malgré le paragraphe (1), une nomination peut être fondée sur le mérite individuel dans les circonstances prévues par règlement de la Commission.
(2) Une nomination est fondée sur le mérite individuel».
Et sur le sous-amendement de l'honorable sénateur Di Nino, appuyée par l'honorable sénateur Nolin, que la motion d'amendement soit modifiée
a) par substitution, au passage «à la page 126, par substitution, aux lignes 9 à 13», de ce qui suit:
«a) à la page 126, par substitution, aux lignes 9 à 12»;
b) par adjonction, après les mots «indépendantes de toute influence politique», de ce qui suit:
«et de favoritisme bureaucratique»;
c) par substitution, au passage «de la Commission. (2) Une nomination est fondée sur le mérite individuel», de ce qui suit:
«de la Commission.»; et
b) à la page 127, par adjonction, après la ligne 9, de ce qui suit:
«(3) Les qualifications mentionnées à l'alinéa 30(2)a) et au sous-alinéa 30(2)b)(i) et toute norme de qualification mentionnée au paragraphe (1) établies pour une nomination à un poste ou à une catégorie de postes s'appliquent aux nominations futures à ce poste ou cette catégorie de postes, sauf si l'administrateur général ou l'employeur a modifié ces qualifications ou normes de qualification, selon le cas, avec l'approbation de la Commission.».
L'honorable Jean-Robert Gauthier: Honorables sénateurs, je prends la parole au sujet du sous-amendement de l'honorable sénateur Di Nino, mon collègue et ami. Il est question d'un amendement proposé par le sénateur Beaudoin, qui est un avocat, un constitutionnaliste et un bon ami. L'amendement du sénateur Di Nino n'est, selon moi, pas acceptable; je m'explique.
L'amendement principal du sénateur Beaudoin exprime le principe du mérite presque de la même façon que dans la loi en vigueur actuellement. Ce faisant, le sénateur Beaudoin réintroduit dans la nouvelle loi toute la jurisprudence qui a alourdi et bureaucratisé le système actuel de dotation, lequel est décrié depuis nombre d'années. Le sénateur Beaudoin est un bon avocat, il pense donc en termes de droit et il a voulu utiliser la jurisprudence, car ce sont les tribunaux qui, jusqu'à maintenant, interprétaient le principe du mérite; ce n'était pas dans la loi. Il n'y avait aucune définition dans la loi. À maintes reprises, il a fallu aller devant les tribunaux.
La loi actuelle prévoit que la Commission de la fonction publique peut faire des nominations par concours, selon le mérite relatif — c'est l'article 10 — et qu'elle peut faire des nominations en se basant sur le mérite individuel, autrement dit en confrontant le candidat à des normes de compétence, selon l'article 10(2).
(1540)
Le projet de loi C-25 ne change pas ce pouvoir. La Commission de la fonction publique pourra continuer de faire des nominations par concours ou, dans la nouvelle loi, par «processus de nomination annoncée» — la terminologie varie, mais la signification demeure la même. La commission pourra continuer de faire des nominations, basées sur le mérite individuel, par le biais du processus de nominations non annoncées, en vertu de l'article 33 du projet de loi.
Le projet de loi C-25 ne fait pas expressément référence à des processus basés sur le mérite individuel, mais il permet qu'on puisse se servir de tels processus pour combler un poste. La Commission de la fonction publique continuera de déterminer quand on utilisera le mérite individuel et comment l'utiliser. Cette nouvelle loi ne présente rien de nouveau à ce chapitre.
L'élément nouveau est que le projet de loi remplace l'interprétation rigide du principe du mérite élaboré par les tribunaux par une nouvelle approche qui permet à la commission de prendre en considération plus de facteurs, tels que l'équité en emploi. Cet élément ne faisait pas partie de la loi actuelle, on le faisait par exception. L'interprétation actuelle du mérite par les tribunaux ne permet pas de prendre en considération ce genre de facteur. Il faut toujours prendre le meilleur candidat, et les tribunaux ont imposé des règles rigides et prescriptives sur la façon de déterminer qui est le meilleur candidat.
Le projet de loi C-25 va beaucoup plus loin pour nous protéger des abus dans l'utilisation du mérite individuel. On a expressément prévu qu'un abus dans le choix du processus de nomination utilisé pour doter un poste par un gestionnaire est un motif de plainte devant le Tribunal de dotation de la fonction publique. Cet élément est nouveau.
Il existe toute une gamme de mécanismes pour nous protéger d'autres abus dans le domaine. Citons, par exemple, le pouvoir de la Commission de la fonction publique d'imposer des conditions de délégation de pouvoir. Habituellement, la commission déléguait ses pouvoirs au sous-ministre qui, lui, déléguait ses pouvoirs à un gestionnaire. La commission devait surveiller et vérifier régulièrement la façon dont on fonctionnait, avec le peu de personnel et de ressources dont elle disposait. Elle ne faisait pas toujours ce travail de façon continue ou soutenue.
La commission avait, par exemple, un pouvoir d'enquête. Elle pouvait effectuer des vérifications. Il existe plusieurs autres éléments nouveaux.
L'honorable sénateur Di Nino, lors de son discours hier, a cité le rapport de Mme Sheila Fraser dans le dossier de M. Radwanski. Le rapport fut cité dans sa quasi-totalité afin d'appuyer son argument. À la page 2069, on peut lire:
Nous devons nous assurer que les critères de qualification ne puissent être modifiés sans l'accord de la commission. Il y a sûrement une leçon à tirer du fiasco du Commissariat à la protection de la vie privée.
Quel est le lien avec le principe du mérite? Aucun. La classification des postes relève de l'employeur et non de la Commission de la fonction publique.
Permettez-moi de citer la vérificatrice générale du Canada au sujet du projet de loi C-25:
C'est mon interprétation de la loi C-25 que le rôle de la Commission de la fonction publique est clarifié...
Ce qu'on fait.
...ça devient beaucoup plus un rôle de surveillance plus rigoureux que ce qui se fait aujourd'hui. Je pense que cela viendrait aider beaucoup les situations comme ça.
Parlons de l'amendement proposé par l'honorable sénateur Di Nino. Il fut mention dans son discours de favoritisme bureaucratique. La question est importante, je l'avoue. Toutefois, cette question est prévue dans la loi.
L'un des motifs de plainte qui peut être utilisé permet aux fonctionnaires d'aller devant le Tribunal de dotation s'ils ont une plainte concernant le favoritisme bureaucratique. Il s'agit d'un abus de pouvoir que l'on peut contester.
Les administrateurs généraux ont présentement le pouvoir d'établir les qualifications nécessaires pour un poste, un pouvoir que maintient la loi actuelle. On a changé les termes. Autrefois, on parlait de normes de sélection. On disait que, pour un poste donné, il fallait une personne qui possède certaines qualifications. Aujourd'hui, on parle de qualifications et non de normes de sélection. Les administrateurs actuels ont le pouvoir d'établir les qualifications nécessaires pour un poste, un pouvoir que maintient le projet de loi C-25, au paragraphe 30(2). Les qualifications nécessaires pour doter un poste donné varient, évidemment, en fonction des nouvelles connaissances, des forces et des faiblesses des employés en place, des besoins changeants d'une bonne administration. Il faut être à la page, et les qualifications du poste sont certes appelées à changer. S'il est question d'un poste d'avocat, d'ingénieur, ou que le poste à combler exige certaines compétences, on devra se conformer à ces exigences. L'employeur en décidera ainsi, et non la Commission de la fonction publique. Voilà, à mon avis, un pas dans la bonne direction.
Si la Commission de la fonction publique, comme le propose l'honorable sénateur Di Nino, était chargée de surveiller tous les changements et le processus de qualification, on n'en finirait plus. La commission serait chargée de surveiller chaque norme établie, et cela risquerait de ne pas accélérer le processus. Le projet de loi C-25 propose justement le contraire. On veut permettre aux gestionnaires de bien gérer et administrer leur département.
Il est essentiel que, dans l'esprit du projet de loi C- 25, on vise une accélération du processus. Il faut également une surveillance sérieuse de la mise en œuvre et du rendement de chacun de nos fonctionnaires et de nos gestionnaires, à savoir quel est le processus d'embauche. Ces objectifs font clairement partie du projet de loi C-25.
Le projet de loi C-25 contient des mesures solides de protection contre le favoritisme bureaucratique. Notre comité a tenu neuf réunions au cours desquelles nous avons entendu 42 témoins. Le sujet est revenu à quelques reprises, et je n'ai entendu personne critiquer cette question. D'ailleurs, j'ignore la raison pour laquelle cette question est soulevée à l'étape de la troisième lecture.
L'article 17 du projet de loi veut que la Commission de la fonction publique effectue des vérifications. On a élargi son autorité et on lui a donné des pouvoirs. La commission devra s'assurer que les nominations sont faites selon le mérite. Elle devra s'assurer que s'effectue une vérification continue. On lui donnera les ressources humaines et financières nécessaires pour faire ce travail.
Je ne comprends pas que l'on puisse suggérer que la commission fixe les normes de qualification. Là n'est pas l'esprit de la loi. Le pouvoir a été transféré à l'employeur, le Conseil du Trésor et, par délégation, au gestionnaire.
(1550)
La responsabilité revient donc au Conseil du Trésor et, par délégation, à ceux qui sont chargés de bien administrer la fonction publique.
Le sénateur Beaudoin, dans son amendement principal, voudrait ajouter le favoritisme bureaucratique. Il a surtout parlé de ce que nous appelons le mérite relatif par rapport au principe du mérite individuel. Il n'y a pas beaucoup de différences entre l'un et l'autre. L'un est un système et l'autre est une fonction.
Rétablir le paragraphe 32 sous sa forme actuelle dans le projet de loi C-22, rétablir l'ancienne loi va à l'encontre de l'esprit de la loi. Cela va même à l'encontre de l'amendement du sénateur Beaudoin. Si nous acceptions l'amendement du sénateur Di Nino, on reculerait et on abolirait l'esprit ou la portée de l'amendement du sénateur Beaudoin.
Honorables sénateurs, je voudrais garder mon droit de parole à l'étape de la troisième lecture. L'amendement du sénateur Di Nino, qui est fait de bonne foi, nuirait énormément. Selon ma conception des choses, les deux amendements nous mettraient en recul de la réalité du projet de loi C-25. Adoptons le projet de loi C-25, mais pas les amendements qui sont devant nous.
[Traduction]
L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, il ne devrait subsister aucun doute dans l'esprit des honorables sénateurs quant au respect que je porte au sénateur Gauthier. Mes propos s'appuyaient sur l'histoire d'horreur racontée par la vérificatrice générale à la Chambre. Comme l'a si justement indiqué le sénateur Gauthier, mon discours était composé en majeure partie d'extraits du rapport de la vérificatrice, où j'ai puisé mon inspiration. L'amendement que j'ai proposé se voulait utile.
L'honorable Serge Joyal (Son Honneur le Président suppléant): Sénateur Di Nino, le temps alloué au sénateur Gauthier pour son intervention est écoulé. L'honorable sénateur demande-t-il la permission de continuer?
Le sénateur Di Nino: J'aimerais avoir la permission de continuer pendant un moment.
Son Honneur le Président suppléant: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Son Honneur le Président suppléant: Sénateur Gauthier, acceptez- vous de répondre à une question du sénateur Di Nino?
Le sénateur Gauthier: Oui.
Le sénateur Di Nino: Merci, honorables sénateurs. J'ai proposé cet amendement en toute bonne foi afin d'améliorer le projet de loi dans le but d'éviter que de telles situations ne se reproduisent à l'avenir. Le sénateur Gauthier a soulevé des bons points dans son discours.
J'aimerais lui poser la question suivante: croit-il que, dans sa forme actuelle, le projet de loi C-25 a tout ce qu'il faut pour prévenir la répétition de ce genre d'abus, peut-être de nature criminelle?
Le sénateur Gauthier: Je le crois, et je vais vous dire pourquoi. Le projet de loi impose d'entrée de jeu un gros «si», eu égard aux personnes responsables de la mise en application du projet de loi et de la surveillance du principe du mérite du côté de la Commission de la fonction publique.
[Français]
Si ce processus de vérification de la fonction publique est vraiment sérieux, je pense qu'il fonctionnera. De l'autre côté, le Conseil du Trésor est chargé de l'administration et de bien gérer. Si leur système est en place, qu'il est bien suivi et que les vérifications sont faites sérieusement, cela fonctionnera. Ce qui est arrivé dans le cas de M. Radwanski, c'est qu'il n'a pas été surveillé, ni par le vérificateur général, ni par le Conseil du Trésor, ni par la Commission de la fonction publique. Les deux rapports ont été présentés après le fait. Ils ont réalisé qu'il y avait des choses qui se passaient en dotation qui n'étaient pas normales. Il y avait des surclassifications. Ils ont joué avec le système en pensant que personne ne les surveillait. S'il y a une bonne surveillance et une bonne mise en œuvre du projet de loi C-25, celui-ci réussira.
[Traduction]
Le sénateur Di Nino: Je n'ai manifestement pas atteint mon objectif, du moins aux yeux du sénateur Gauthier. C'est une importante condition. Les personnes ne respectant pas les règles commettent des abus et posent des gestes criminels. Elles posent les gestes aboutissant à une activité criminelle.
L'honorable sénateur a-t-il un meilleur amendement à recommander? Il semble très familier avec cette question. L'honorable sénateur est-il en mesure de présenter un meilleur amendement que je pourrais appuyer pour atteindre l'objectif que visait l'amendement que j'ai proposé hier?
Le sénateur Gauthier: Je dois reconnaître que je n'ai pas l'intention de modifier ce projet de loi à ce stade-ci. Au fil des ans, j'ai acquis une longue expérience des affaires de la fonction publique. J'étais là lorsque M. D'Avignon a présenté son rapport sur le principe du mérite dans les années 70. J'étais là lorsque M. Finckelman a présenté son rapport sur l'administration dans la fonction publique. J'étais présent et actif à cette époque-là. Durant ma carrière de 20 ans à la Chambre des communes, j'ai été pendant huit ans porte- parole de mon parti dans les dossiers de la fonction publique. J'étais au courant des problèmes. Je crois comprendre que l'honorable sénateur parle d'activité criminelle, et cela ne peut être correct. Je ne prétends pas que semblable activité a eu lieu, mais vous me dites que de telles allégations peuvent avoir été faites. Mme Robillard, la présidente du Conseil du Trésor, et moi n'estimons pas qu'il y a eu des activités criminelles.
Le sénateur Di Nino:...ou des abus
Le sénateur Gauthier: C'est ce qui en est pour le moment.
Son Honneur le Président suppléant: Les honorables sénateurs sont- ils prêts à se prononcer sur le sous-amendement?
(Sur la motion du sénateur Comeau, le débat est ajourné.)
[Français]
LA LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADA
PROJET DE LOI MODIFICATIF—DEUXIÈME LECTURE—REPORT DU DÉBAT
L'ordre du jour appelle:
Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Carstairs, c.p., appuyée par l'honorable sénateur Graham, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-34, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada (conseiller sénatorial en éthique et commissaire à l'éthique) et certaines lois en conséquence.
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, les sénateurs qui veulent prendre la parole sont invités à le faire tout en respectant le droit de parole en deuxième place, qui normalement revient à l'opposition, et qui leur accorde un temps de 45 minutes.
(Report du débat.)
(1600)
AFFAIRES SOCIALES, SCIENCES ET TECHNOLOGIE
RETRAIT DE L'AVIS DE MOTION VISANT À AUTORISER LE COMITÉ À SIÉGER EN MÊME TEMPS QUE LE SÉNAT
L'ordre du jour appelle:
Que le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à siéger à 14 heures, le mardi 7 octobre 2003, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, cette motion n'a plus sa raison d'être car la date à laquelle elle devait s'appliquer est passée. Je propose, avec le consentement des honorables sénateurs, de retirer cette motion du Feuilleton.
Son Honneur le Président suppléant: Vous plaît-il d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est retirée.)
L'AJOURNEMENT
Permission ayant été accordée de revenir aux avis de motion du gouvernement:
L'honorable Fernand Robichaud (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:
Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'au lundi 20 octobre 2003, à 14 heures.
L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, certains sénateurs ont déjà pris des engagements pour le lundi 20 octobre, et le vendredi de la semaine suivante. Ma question a pour but de faciliter l'organisation de notre programme d'activités. On parle de siéger le lundi 20 octobre plutôt que le mardi 21 octobre, ce avec quoi je suis d'accord. Avez-vous l'intention de faire de même pour les trois semaines qui suivront?
Le sénateur Robichaud: Honorables sénateurs, je comprends très bien la question de l'honorable sénateur, à savoir, s'il y a possibilité que la Chambre du Sénat siège les vendredis et les lundis. Je répondrai, oui, mais aussitôt que l'on sentira le besoin de le faire, on tentera d'en informer, par l'intermédiaire de la Chambre, les honorables sénateurs.
Son Honneur le Président suppléant La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
(Le Sénat s'ajourne au lundi 20 octobre 2003, à 14 heures.)
ANNEXE
OFFICE OF THE NATIONAL CHIEF BUREAU DU CHEF NATIONAL
Assembly of First Nations Assemblée des Premières Nations
Le 2 octobre 2003
Le sénateur Thelma Chalifoux
Présidente
Comité sénatorial permanent des peuples autochtones
Édifices du Parlement
Rue Wellington
Ottawa (Ontario)
K1A 0A4
* TRADUCTION
Madame le sénateur et membres du Comité sénatorial des peuples autochtones,
L'Assemblée des Premières Nations (APN) a été invitée à commenter les répercussions de la décision rendue dans l'affaire Powley sur le projet de loi C-6. Quelques observations s'imposent au préalable. Avant de commenter cette décision, il importe de tirer au clair le contexte des questions plus vastes qui entourent le projet de loi C-6.
Pendant plusieurs années, l'APN et des fonctionnaires fédéraux ont participé à un Groupe de travail mixte chargé d'étudier les exigences auxquelles devait répondre un organisme efficace de règlement des revendications particulières. Dans un esprit de partenariat sans précédent, le Groupe a produit un modèle de système sain et efficace. Ce travail aurait dû constituer un jalon dans l'élaboration coopérative de la politique.
Ce qui s'est plutôt passé, c'est que le gouvernement fédéral a rejeté le modèle proposé par le Groupe et a mis fin aux consultations. Il a proposé un projet de loi qui, loin de résoudre les problèmes du passé, les perpétue, notamment les retards et le conflit d'intérêts où se trouve le gouvernement fédéral.
L'APN a demandé de façon répétée la reprise de ses entretiens directs avec le Canada afin d'élaborer un projet de loi qui soit vraiment juste et efficace. Jusqu'à maintenant, elle n'a pas reçu de réponse favorable.
Il n'est pas trop tard. Malgré tout ce qui s'est passé, si le gouvernement fédéral veut renouer un dialogue constructif qui se déroule dans le respect et soit axé sur les résultats, il trouvera du côté de l'APN un partenaire bien disposé.
De graves problèmes juridiques et constitutionnels ont été relevés dans le projet de loi C6. En effet, le projet de loi est non seulement malsain sur le plan de la politique, mais aussi incompatible avec les principes de la justice naturelle, notamment la nécessité qu'un organisme d'arbitrage jouisse d'une authentique indépendance. Un fiduciaire doit non seulement éviter les conflits d'intérêts, mais aussi tenir compte des manquements à ses obligations envers les Premières nations avec une diligence raisonnable et sans exclure arbitrairement des catégories entières de revendicateurs des Premières nations, par exemple ceux à qui on a promis unilatéralement des réserves qu'ils n'ont jamais obtenues. Je l'affirme respectueusement, le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones n'a pas su cerner ces problèmes ni s'y attaquer de façon satisfaisante. Sur certaines questions, il semble subsister une incompréhension tout à fait fondamentale. La plus élémentaire justice exige qu'on dissipe cette incompréhension.
Il y a plus d'un an, l'APN a déposé publiquement une analyse juridique détaillée du projet de loi. Les préoccupations alors exprimées demeurent. Elles sont appuyées par une jurisprudence qui n'est pas moins importante que l'affaire Powley. Il serait regrettable que les Premières nations constatent que les tribunaux sont leur seul recours pour obtenir une réaction constructive à ces préoccupations. Le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles devrait avoir toute latitude pour étudier maintenant les problèmes soulevés et trouver les moyens de s'y attaquer de façon constructive. Si le ministère de la Justice a des réponses d'ordre juridique, il devrait les documenter et les rendre publiques pour que la population puisse les étudier et les commenter.
Les amendements que le Sénat a proposés jusqu'à maintenant sont insatisfaisants. L'APN n'a jamais eu la possibilité de les commenter devant un comité sénatorial.
Un amendement « permet » à ceux qui présentent des revendications particulières de faire des propositions au sujet de la nomination des commissaires, mais le ministre conserve le pouvoir de nomination.
Le texte législatif n'accorde aucun rôle à l'APN, qui est un organisme national auxquelles les Premières nations ont délégué le pouvoir de coordonner les propositions et de s'associer au gouvernement fédéral pour veiller à ce que seules des personnes compétentes et impartiales soient nommées.
L'amendement qui relève le plafond des revendications particulières de 3 millions de dollars (et fait ainsi passer le maximum à 10 millions de dollars) est un progrès, mais trop modeste. Pour la plupart des revendications, si on se fie à des prévisions indépendantes et dignes de foi, on ne pourrait pas s'adresser au Tribunal.
Un autre amendement porte sur un aspect extrêmement limité du problème de conflit d'intérêts. Le contrôle fédéral sur les nominations et leur renouvellement subsiste, tout comme subsiste pour les fonctionnaires fédéraux (mais non pour les membres des institutions des Premières nations) l'accès privilégié aux postes des nouveaux organismes.
Un autre amendement encore permet à celui qui comparaît devant la Commission de s'adresser au Tribunal pour obtenir une assignation. Ce mécanisme ne saurait remplacer le droit dont sont privés les revendicateurs, soit obtenir une enquête publique de la Commission sur une revendication, avec publication d'un rapport. Une minorité de revendicateurs pourra s'adresser au Tribunal, mais, pour les revendications qui dépassent le plafond, il n'y aura aucun moyen efficace d'exercer des pressions sur un gouvernement fédéral qui, déraisonnablement, tergiverse ou rejette une revendication.
Le gouvernement fédéral peut toujours rencontrer l'APN, rétablir l'esprit d'un bon partenariat et travailler avec l'Assemblée pour élaborer un projet de loi qui sera dans l'intérêt de tous les Canadiens. Si on agit rapidement pour régler les revendications, on favorisera le développement économique et social des Premières nations et des collectivités qui vivent près d'elles. On fera disparaître un obstacle qui empêche depuis longtemps la réconciliation et on aidera à réorienter les relations entre les Premières nations et les autorités fédérales, qui au lieu de chercher à réparer les erreurs du passé, tâcheront de bâtir l'avenir ensemble. Si le gouvernement préfère persister dans la voie de l'unilatéralisme et imposer un projet de loi fondamentalement injuste, les Premières nations n'auront d'autre choix que de recourir énergiquement aux solutions de nature judiciaire et politique.
L'APN a été invitée avec un très court préavis à commenter la décision Powley.
Il ne doit y avoir aucun doute au sujet de certains principes fondamentaux :
Tout d'abord, l'APN est en faveur d'une réponse raisonnable et juste aux justes revendications de tous les peuples autochtones, y compris les Inuits et les Métis.
Deuxièmement, l'APN reconnaît le pluralisme des Premières nations ainsi que des peuples désignés à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. L'égalité n'exige pas que différents groupes soient traités de façon identique, et il arrive même qu'elle ne le permette pas. Leur histoire, leurs droits, leurs intérêts et leurs choix politiques propres doivent être pris en considération comme il convient.
Pour ce qui est des détails de l'affaire, il importe de reconnaître que la décision Powley n'est pas la seule décision rendue par la Cour suprême du Canada qui soit ici pertinente. Dans l'affaire Blais, la Cour suprême du Canada a décidé que les Métis n'étaient pas des « Indiens » au sens de la Loi constitutionnelle de 1930. Il semble que les motifs invoqués par la Cour s'appliqueraient assurément à la question de savoir si les Métis sont des Indiens aux fins du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867. Autrement dit, la Cour a reconnu que les Premières nations et les Métis ont, au moins sur quelques points importants, des histoires et un statut constitutionnels différents. Dans l'affaire Lovelace, la Cour suprême du Canada a reconnu que la situation juridique et sociale propre aux Premières nations voulait dire que le gouvernement pouvait concevoir des programmes en partenariat avec les Premières nations qui valent pour elles uniquement, et pas nécessairement pour les Métis. Il ne s'agit aucunement de nier que les Métis soient un peuple autochtone qui a des droits, et que les gouvernements (p. ex., la Loi sur le Manitoba, la législation albertaine sur les établissements métis) ont créé des programmes distincts pour tenir compte des droits des Métis.
Pour régler les revendications particulières, il est raisonnable et acceptable que le gouvernement fédéral et l'APN conçoivent, de façon particulière, et fassent fonctionner en collaboration un système réservé aux revendications des Premières nations. Depuis plus d'un siècle, la Loi sur les Indiens vise à accorder aux Premières nations un contrôle de plus en plus grand sur les terres et les actifs des Indiens. C'est de cette loi que découlent de nombreuses revendications particulières. La Loi sur les Indiens, comme la Cour suprême du Canada le signale dans l'affaire Blais, a établi une distinction claire entre les Indiens et les Métis.
L'APN reconnaît que les organisations métisses ont présenté des revendications fondées sur leur propre histoire et leurs propres droits constitutionnels. Elle se réjouirait du règlement juste et rapide de ces problèmes par les gouvernements provinciaux. Le gouvernement fédéral aurait peut-être même un rôle à jouer à cet égard.
Toutefois, étant donné la longue histoire de déni de justice que les Premières nations ont vécue dans le contexte des revendications particulières, on ne saurait leur demander d'attendre encore pendant qu'on procède à de nouvelles consultations. Pendant des décennies, les efforts du passé n'ont pu aboutir à un consensus, mais les discussions bilatérales entre l'APN et les fonctionnaires fédéraux ont donné le modèle du Groupe de travail mixte, et nous n'avons que trop attendu la mise en place d'un système juste fondé sur ce modèle.
L'un des aspects du projet de loi C-6 qui fait le plus problème est qu'il vise à écarter l'APN de son rôle – pleinement reconnu dans le Groupe de travail mixte et par lui – dans la coordination et l'expression de l'opinion des Premières nations sur les nominations et dans l'examen du nouveau système après une période de trois ans. Peu d'organisations fonctionnent de façon aussi démocratique que l'APN. Le chef national doit détenir un mandat d'au moins 60 p. des chefs qui représentent l'écrasante majorité des Premières nations. Aucune organisation ne convient mieux pour consulter les revendicateurs et ceux qui pourraient présenter des revendications et pour se faire leur interprète. Sa position sur le projet de loi C-6 est appuyée par les Premières nations aux niveaux régional et local dans l'ensemble du Canada. Il n'existe aucun clivage entre la base et les dirigeants. Les Premières nations de tout le Canada rejettent toute tentative du gouvernement fédéral pour empêcher l'APN de participer pleinement à la création ou au fonctionnement d'un système vraiment juste et efficace sous prétexte que le Canada à d'autres peuples autochtones en dehors des Premières nations. Le gouvernement fédéral devrait être disposé à s'engager dans des processus de politique distincts avec l'APN d'une part et, le moment venu, avec les représentants légitimes des Métis d'autre part.
Le gouvernement fédéral continue de sous-financer le règlement des revendications particulières. L'arriéré s'alourdit. Des dettes qui engagent l'honneur de la Couronne et concernent des obligations prévues par la loi n'ont toujours pas été réglées. Des collectivités continuent de souffrir. Il faut que les autorités fédérales dégagent plus de ressources pour honorer leurs obligations. L'APN n'accepte aucun modèle fédéral dans lequel les revendications des Métis s'ajouteraient à celles des revendicateurs existants, alors que les ressources prévues restent identiques, voire diminuent. Les revendications des Métis, non encore définies de façon satisfaisante, devraient être abordées à part, selon leur mérite, et les gouvernements fédéral et provinciaux doivent fournir le financement supplémentaire nécessaire à partir de leurs propres ressources plutôt qu'en niant les droits des Premières nations et en les dépouillant.
Soit dit en passant, on prendra note que l'affaire Powley portait sur une revendication particulière à un site. La revendication en cause ne relèverait pas du mandat de l'organisme chargé des revendications particulières prévues dans le modèle du Groupe de travail mixte ou dans le projet de loi C-6. Parce que le gouvernement fédéral a insisté, aucun des deux modèles ne permet la présentation de revendications fondées sur les droits ou les titres autochtones. On remarquera également que le gouvernement fédéral a insisté pour limiter la portée de l'expression «revendications particulières» (p. ex., en excluant les revendications qui ont moins de 15 ans) pour permettre une meilleure focalisation. Il existe sans nul doute des problèmes difficiles, complexes et distincts qui mettent en cause les Métis et qui pourraient et devraient faire l'objet d'un autre dialogue et d'un autre système.
Dans l'immédiat, l'APN espère qu'on reprendra le travail là où le Groupe de travail mixte l'a laissé et que la raison et le dialogue reprendront leurs droits, pour créer un mécanisme juste, efficace, indépendant et accessible afin de régler les revendications particulières.
Je vous prie de recevoir, Madame le sénateur et membres du Comité sénatorial des peuples autochtones, l'expression de mes sentiments respectueux.
Le chef national,
Phil Fontaine