Rapport du comité
Le mercredi 17 mai 2023
Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts a l’honneur de présenté son
DIXIÈME RAPPORT
Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi S-236, Loi modifiant la Loi sur l’assurance-emploi et le Règlement sur l’assurance-emploi (Île-du-Prince-Édouard), a, conformément aux ordres de renvoi du mardi 7 juin 2022 et du jeudi 3 novembre 2022, examiné ledit projet de loi et, conformément à l’article 12-23(5) du Règlement, recommande que le Sénat abandonne l’étude du projet de loi S-236.
Le comité a examiné le projet de loi et a présenté son rapport au Sénat le 23 juin 2022. En raison des préoccupations formulées par le directeur parlementaire du budget et d’autres intervenants, le 3 novembre 2022, le Sénat a adopté une motion visant à renvoyer le projet de loi au comité afin d’entendre d’autres témoins, dont le directeur parlementaire du budget.
Entre le 16 juin 2022 et le 31 janvier 2023, le comité a tenu sept réunions à ce sujet pour entendre des représentants du gouvernement, deux anciens parlementaires canadiens, le commissaire des travailleurs et travailleuses (Commission de l’assurance-emploi du Canada), le directeur parlementaire du budget ainsi que des représentants de deux associations commerciales, d’une organisation syndicale et d’une organisation de la société civile. Le comité a également reçu trois mémoires écrits et un rapport datant de 2021 de la Commission de l’assurance-emploi du Canada intitulé Analyse finale de l’examen des limites de l’assurance-emploi.
Depuis 2014, le régime d’assurance-emploi divise la province de l’Île-du-Prince-Édouard en deux régions économiques de l’assurance-emploi, soit l’agglomération de recensement (AR) de Charlottetown et la région de l’Île-du-Prince-Édouard qui exclut l’AR de Charlottetown. Le projet de loi S-236 propose de rétablir une seule région économique de l’assurance-emploi pour l’Île-du-Prince-Édouard.
De l’avis du comité, le régime d’assurance-emploi devrait faire en sorte que les personnes vivant dans des régions où les conditions du marché du travail sont semblables soient traitées de la même façon quant à l’admissibilité aux prestations d’assurance-emploi, au taux de prestation et à la durée des prestations. La taille de la population et de la région géographique devrait aussi être prise en compte.
Par conséquent, le comité recommande au Sénat de ne pas adopter le projet de loi S-236 pour les raisons suivantes.
Le comité tient à exprimer sa frustration à l’égard du fait que les représentants d’Emploi et Développement social Canada n’ont pas été plus transparents avec les données et le contexte pertinents lors de leur comparution initiale. Un réexamen du projet de loi n’aurait peut-être pas été nécessaire si le comité avait reçu dès le départ des réponses plus complètes de la part des représentants.
Dans le cadre de ce réexamen, le directeur parlementaire du budget a comparu devant le comité. Dans ce témoignage, il a souligné que le fait de fusionner les deux régions d’assurance-emploi de l’Île-du-Prince-Édouard générera des économies d’environ 76,6 millions de dollars pour le gouvernement fédéral entre 2021-2022 et 2025-2026, ou sur une période de cinq ans. Cela dit, le comité a également entendu dire que la fusion des deux régions de l’assurance-emploi de l’Île-du-Prince-Édouard en une seule région entraînerait une perte nette d’environ 13 millions de dollars par année en prestations d’assurance-emploi pour les prestataires de la province. Cela représenterait une réduction d’environ 15,3 millions de dollars dans les régions rurales de l’Île-du-Prince-Édouard, et plus de 2,7 millions de dollars en prestations versées à Charlottetown. Cette information n’a pas été fournie au comité par les représentants d’Emploi et Développement social Canada lors de l’examen initial du projet de loi; selon un Résumé de l’étude d’impact de la réglementation, le coût prévu pour la division de la province en deux régions était d’un million de dollars en 2014.
L’Analyse finale de l’examen des limites de l’assurance-emploi (ci-après, le rapport) comprend l’option de n’avoir à nouveau qu’une seule région d’assurance-emploi pour l’Île-du-Prince-Édouard. C’était d’ailleurs l’intention du projet de loi S-236 et conforme aux demandes formulées par des Prince-Édouardiens lorsqu’ils ont comparu devant le Sénat et la Chambre des communes. Il existe plusieurs théories pour étayer cette option, et elles peuvent être interprétées de différentes façons dans l’analyse qui est présentée.
Le comité ne peut ni recommander ni utiliser convenablement ce rapport en vue de procéder à un examen du projet de loi S-236. Les questions qui ne concernent que l’Île-du-Prince-Édouard et qui constituent l’unique objet du projet de loi S-236 ont été intégrées dans un examen national. L’examen national ne contient aucune analyse fiscale. De plus, il ne se penche pas sur les répercussions des autres solutions possibles pour les clients du régime d’assurance-emploi relativement à la prestation des services et, en particulier, à la dotation.
Le manque d’homogénéité dans le rapport est mis en évidence lorsque l’analyse est appliquée à l’Île-du-Prince-Édouard, sans aucune évaluation selon laquelle, dans le cas de l’application de ces limites, les personnes ont des qualifications et des prestations différentes de part et d’autre de la rue.
De plus, le rapport reposait sur le principe d’une réinitialisation des données tous les cinq ans plutôt que sur les données les plus récentes de Statistique Canada. Il n’est pas assez souple pour refléter ou reconnaître adéquatement les environnements socioéconomiques en évolution rapide. L’Île-du-Prince-Édouard en est un parfait exemple. Malgré la position d’Emploi et Développement social Canada, la situation en matière d’emploi à l’Île-du-Prince-Édouard a rapidement évoluée vers une situation de quasi plein emploi. Le régime d’assurance-emploi ne s’adapte pas assez rapidement aux circonstances actuelles et aux régions.
Actuellement, certaines régions manquent cruellement de main-d’œuvre et d’autres sont confrontées à de graves pénuries d’emplois, et le régime d’assurance-emploi ignore cette réalité. Cela est particulièrement évident dans le cas de l’Île-du-Prince-Édouard.
Respectueusement soumis,
Le président,
ROBERT BLACK