Délibérations du Comité sénatorial spécial
sur la Modernisationdu Sénat
Fascicule n° 2 - Témoignages du 23 mars 2016
OTTAWA, le mercredi 23 mars 2016
Le Comité sénatorial spécial sur la modernisation du Sénat se réunit aujourd'hui, à 12 h 2, pour examiner les façons de rendre le Sénat plus efficace dans le cadre constitutionnel actuel.
Le sénateur Tom McInnis (président) occupe le fauteuil.
[Traduction]
Le président : Honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue.
Du 26 au 28 octobre 2015, un groupe d'une quarantaine de sénateurs conservateurs, libéraux indépendants et indépendants se sont réunis afin de discuter des modifications à apporter au Sénat du Canada dans le cadre de ce qu'on appelle désormais les séances de travail sur la modernisation du Sénat. Ces séances étaient présidées par les sénateurs Stephen Greene et Paul Massicotte. Bien que ces deux sénateurs soient membres de notre comité, ils ont été invités à comparaître aujourd'hui à titre de témoins pour discuter avec nous du résultat des séances de travail et du rapport subséquent qui a été déposé au Sénat.
Pour le public qui suit nos délibérations, le rapport Greene-Massicotte sera publié sur le site web du comité spécial, à l'onglet « Mémoires ». Sénateur Greene et sénateur Massicotte, je sais que vous connaissez bien la procédure, donc je vous prie de nous présenter votre exposé sans plus tarder, après quoi les membres du comité vous poseront des questions, j'en suis certain. La parole est à vous.
L'honorable Stephen Greene : Merci. Nous apprécions beaucoup avoir été invités à comparaître devant le Comité sénatorial spécial sur la modernisation. Nous sommes spéciaux, nous le savons tous.
Pourquoi se pencher sur la modernisation du Sénat maintenant? Il y a un profond désir de changement et d'amélioration parmi les Canadiens et les sénateurs en vue de rendre le Sénat plus pertinent, utile, crédible et productif, de sorte qu'il serve mieux les Canadiens. C'est aux sénateurs qu'il incombe de faire en sorte que les activités du Sénat soient plus pertinentes dans le processus parlementaire et qu'elles répondent mieux aux besoins des Canadiens. Si nous n'arrivons pas à améliorer le Sénat, il n'y a que les sénateurs eux-mêmes qui seront à blâmer.
L'honorable Paul J. Massicotte : Notre approche est simple : nous avons invité tous les sénateurs à participer à toutes les étapes du processus, y compris les sénateurs indépendants. Tous ont reçu plusieurs invitations à participer à nos travaux. Comme notre président l'a souligné à juste titre, environ 40 sénateurs ont accepté notre invitation. Nous leur avons soumis un questionnaire, non seulement pour alimenter leur réflexion, mais pour nous faire une idée des enjeux. Nous voulions que chacun contribue à la démarche pour déterminer comment nous pouvons améliorer le Sénat, donc nous avons sollicité l'opinion de tous. C'est sur cette base que nous avons préparé les séances de travail d'octobre. Celles-ci se sont étalées sur une période de trois jours. Grâce aux réponses fournies dans le questionnaire, nous savions quelles étaient les questions les plus litigieuses parmi les sénateurs et nous avions une bonne idée également des questions les plus susceptibles de susciter un vaste consensus.
Les séances d'octobre s'articulaient autour de trois principaux volets. Le premier prévoyait une discussion sur notre mission, notre raison d'être et notre travail; le deuxième portait sur la meilleure manière de gérer le concept de la « partisanerie », ce qu'il signifie, comment nous la gérons et comment nous arrivons à faire notre travail malgré nos opinions, nos valeurs ou nos biais; le troisième volet, enfin, portait sur 10 thèmes clés qui, selon le questionnaire, méritaient une discussion approfondie pour que nous puissions parvenir à un résultat.
Le premier jour, nous avons surtout discuté des résultats de l'élection, puisque la séance avait lieu peu après. Nous avons débattu d'un énoncé de mission. Nous avons également parlé des principes directeurs du Sénat.
[Français]
Mardi, nous avons abordé la partisanerie, à savoir comment nous pourrions faire en sorte qu'elle fonctionne dans le cadre de nos objectifs. Nous nous sommes divisés en groupes pour discuter de la démocratie. Puis, la dernière journée, nous avons axé nos discussions sur les opérations du Sénat. L'ordre du jour a été distribué à tous. Nous avons tenu un débat dynamique, nourri et sérieux.
[Traduction]
Le sénateur Greene : Nous allons maintenant vous présenter un sommaire des réponses au questionnaire et de la discussion. L'analyse qui suit se fonde sur les 28 questionnaires remplis. Nous avons choisi de présenter notre analyse sous forme de diagrammes circulaires. Ce type de diagramme est simple et a un excellent effet visuel, mais il est limité en ce sens qu'il ne se prête pas facilement à la représentation des questions ouvertes, qui étaient nombreuses.
Veuillez noter que contrairement à ce qui a été mentionné en introduction, nous avons déplacé quelques diapositives, afin d'aborder la partisanerie et l'énoncé de mission un peu plus tard.
En 1865, sir John A. Macdonald a déclaré ce qui suit :
Une Chambre haute ne serait d'aucune utilité si elle n'exerçait pas, quand elle le juge opportun, le droit de s'opposer à un projet de loi de la Chambre basse, de l'amender ou de le retarder. Elle ne serait d'aucune utilité si elle se bornait à sanctionner les décrets de la Chambre basse. Elle doit être une chambre indépendante, jouissant de sa propre liberté d'action, car elle n'est utile que comme organe de réglementation, qui considère calmement les projets de loi proposés par la chambre populaire, mais elle ne s'opposera jamais aux souhaits délibérés et compris du peuple.
Je vous invite à bien remarquer les mots « s'opposer à un projet de loi... l'amender ou le retarder ». Ce sont ses mots. Il n'a jamais dit « rejeter » un projet de loi.
Plus récemment, en 2014, la Cour suprême a affirmé que :
Le Sénat est une des institutions politiques fondamentales du Canada. Il se situe au cœur des ententes ayant donné naissance à la fédération canadienne.
La Cour suprême a ensuite confirmé la nature et le rôle fondamentaux du Sénat à titre d'assemblée législative complémentaire chargée de porter un second regard attentif aux projets de loi, et non d'organe rival. Tous les répondants au questionnaire avaient reçu la même mise en contexte. Ils avaient reçu la documentation à l'avance et l'ont traitée en conséquence.
Nous leur avons posé cette question : « Estimez-vous que les usages, les procédures, les conventions et Règlement actuels du Sénat lui permettent d'exercer son rôle constitutionnel dans la démocratie canadienne conformément aux principes énoncés par John A. Macdonald et la Cour suprême? »
La majorité des répondants se sont déclarés satisfaits, parce qu'ils croient que c'est simplement un changement culturel qu'il faut au Sénat. D'autres sénateurs se sont plutôt dits d'avis que le Règlement et l'usage forcent le conflit partisan. Beaucoup de répondants ont donné des exemples précis de façons dont le Règlement et nos usages empêchent le Sénat de bien faire son travail.
La question suivante était : « Si vous avez répondu "non'' à la question précédente, quels sont les deux ou trois principaux problèmes ou obstacles qui empêchent le Sénat de remplir son rôle? Comment proposeriez-vous de les résoudre ou de les supprimer? » Les sénateurs ont fourni de nombreuses réponses détaillées. L'un d'eux a parlé de la partisanerie institutionnelle, qu'il explique en ces termes : « Bien que la partisanerie soit attendue et même encouragée, dans une certaine mesure, nous avons, au fil du temps, institutionnalisé le rôle du parti, de sorte qu'il est très difficile pour les sénateurs d'y échapper et de voter autrement que selon la ligne de parti. Le Sénat n'a pas été constitué pour que les sénateurs votent selon la ligne de parti. »
Un autre sénateur a indiqué qu'il y avait trois problèmes principaux : premièrement, la nomination des dirigeants au Sénat par la Chambre des communes; deuxièmement, le choix du Président de façon partisane; troisièmement, le pouvoir absolu d'un leadership partisan.
Un autre sénateur a écrit : « Les sénateurs ne devraient pas participer aux réunions de leur parti politique, ils devraient conserver leur indépendance comme le but du Sénat le dicte. Tous les sénateurs devraient ainsi défendre et garder à l'esprit les intérêts du Canada dans leurs délibérations, sans égard à la politique. »
Une autre question leur a été posée, la 2a) : « Si l'on vous confiait le mandat de concevoir, en repartant de zéro, le fonctionnement d'une Chambre haute dont la principale fonction serait d'examiner les projets de loi émanant du gouvernement, comment organiseriez-vous cette assemblée sénatoriale idéale constituée de 105 sénateurs dévoués et sages? Quels seraient pour vous les principaux enjeux ou principes directeurs? »
Nous avons reçu de très nombreuses réponses, dont voici quelques exemples. « Éliminons la préoccupation des projets de loi d'initiative parlementaire au Sénat. Dissuadons les sénateurs d'en déposer puisqu'ils minent le processus. » « Cessons d'autoriser la récitation de grandes déclarations des sénateurs. » Aussi : « Pour l'examen des principaux projets de loi émanant du gouvernement, exigeons que le ministre comparaisse devant le Sénat pour contre-examen. »
D'autres ont répondu : « Le principal principe fondamental de l'organisation du travail des sénateurs est évident : nous devons nous acquitter du mandat que nous confère la Constitution, qui consiste à faire efficacement contrepoids aux décisions de la Chambre basse, y compris de l'exécutif » et « Les solutions sont simples et évidentes, elles sont déjà à la portée de chaque sénateur. »
Un sénateur a dit : « Mon principal objectif serait d'organiser les travaux du Sénat en fonction de deux choses : premièrement, l'étude des projets de loi et deuxièmement, les délibérations des comités. Ainsi, les délibérations des comités seraient au cœur de l'organisation. Si le Sénat plaçait les comités au cœur de tous ses autres principes directeurs, il pourrait se concentrer sur le travail méticuleux, mais important qui est souvent bâclé à la Chambre. »
Du plan des sièges à la Chambre, est-ce un problème? Comment devrait-il être revu?
Comme vous pouvez le voir, la majorité des sénateurs sont ouverts à l'idée de modifier l'attribution des sièges pour l'organiser en fonction d'autres principes. Différentes réponses ont été choisies. On pourrait revoir le plan des sièges en fonction de l'ancienneté, de l'ordre alphabétique, selon la forme d'un théâtre; on pourrait faire en sorte que les présidents des comités soient un peu l'équivalent des ministres à la Chambre des communes ou que les sièges soient répartis par région. D'autres estiment que la configuration actuelle ne pose pas problème et qu'il ne s'agit pas d'un enjeu important.
Du calendrier du Sénat : devrait-il être identique à celui de la Chambre des communes ou adapté au cheminement des projets de loi?
En grande majorité, les sénateurs ont indiqué qu'il devrait être adapté au cheminement des projets de loi. Cela rejoint un thème récurrent des réponses, c'est-à-dire que le Sénat peut être différent de la Chambre des communes, et qu'il devrait l'être, si cela pouvait lui permettre de mieux faire son travail. Cependant, personne n'a vraiment dit qu'il devrait être identique à celui de la Chambre des communes.
De l'horaire hebdomadaire : devrait-il y avoir plus de trois jours de séance?
La diversité des réponses témoigne de la complexité de l'enjeu. Le Canada est très vaste, et le temps de déplacement pour se rendre à Ottawa varie pour chaque sénateur. Beaucoup d'horaires intéressants ont été proposés, mais la question est très imprécise, et pas moins de 10 sénateurs ont critiqué le fait qu'on pose même la question.
De l'horaire quotidien : le temps est-il utilisé de façon efficace? Comme on peut le voir, la majorité des sénateurs ont déterminé que non. Les réponses montrent comment le Sénat pourrait gagner en efficacité et donnent des idées de façons d'améliorer son fonctionnement. Beaucoup estiment que nos mercredis matin pourraient être utilisés à meilleur escient — nous savons tous ce que cela signifie — et que le Sénat devrait se réunir le jeudi matin, après quoi les comités se réuniraient dans l'après-midi, pour que les sénateurs puissent mieux prévoir leur départ.
Beaucoup de sénateurs en ont également profité pour parler de la période des questions et de l'idée de la limiter ou de l'abandonner.
Des déclarations des sénateurs : sont-elles importantes?
La grande majorité des répondants a répondu « oui ». La plupart d'entre eux les estiment importantes, mais parmi ceux-ci, il y a des sénateurs qui croient qu'elles sont parfois mal utilisées ou ennuyantes.
Sur la période des questions, la très grande majorité des répondants a indiqué qu'il s'agissait d'une perte de temps. Il y a eu beaucoup de commentaires négatifs sur la période des questions. La plupart souhaiteraient qu'on abandonne la structure des questions qui oppose les partis de l'opposition au gouvernement. Les répondants ont lancé diverses idées, dont celles de limiter la période des questions à un jour par semaine, par exemple, ou de la limiter à des questions et réponses écrites. Une autre personne recommande de réorienter la période des questions afin de cibler seulement les travaux des comités.
Du Feuilleton : les réponses étaient partagées, mais il semble y avoir une volonté de faire mieux. Comme vous pouvez le constater, une grande partie des répondants a indiqué « aucun commentaire », et beaucoup de sénateurs n'ont pas répondu à la question.
Sur le cheminement des projets de loi émanant du gouvernement : les voix réclamant un changement n'étaient pas très fortes, même parmi les sénateurs qui souhaitent un changement. De même, il y a une personne qui a dit que le Règlement devrait rester tel quel, mais qu'il devrait être respecté. Il se dégage un vaste consensus selon lequel les projets de loi émanant du gouvernement sont une priorité et qu'il faut les examiner d'une manière ou d'une autre dans un délai raisonnable.
Sur le cheminement des projets de loi d'initiative parlementaire : la grande majorité des sénateurs réclament un changement à cet égard. Les réponses varient beaucoup, certains les estiment importants, d'autres considèrent qu'il s'agit d'une perte de temps. Plusieurs croient qu'il faut les examiner d'une manière ou d'une autre, alors que d'autres sont contents que ces projets de loi ne soient pas traités selon le même degré de priorité.
Sur le cheminement des projets de loi du Sénat : cette question n'a pas suscité beaucoup de commentaires ni même d'intérêt. Les quelques commentaires exprimés font clairement état d'une division. Cette question ne semble pas revêtir une grande importance, mais je dirais qu'elle est importante pour quelques personnes.
Sur le déroulement des travaux de la Chambre : cette question était peut-être trop vague, puisque 70 p. 100 des répondants n'y ont pas répondu ou ont écrit « aucun commentaire ».
Dans le Sénat idéal, le Règlement devrait-il contraindre le Sénat à tenir des votes sur tous les projets de loi? Le Règlement devrait-il permettre leur emploi tactique pour retarder un projet de loi? Dans l'affirmative, pendant combien de temps?
C'est une autre question qui semblait précise, mais à laquelle beaucoup de sénateurs étaient embêtés de répondre, et ils sont nombreux à l'avoir évitée pour passer tout de suite à la question suivante.
Une limite de temps devrait-elle être imposée, dès leur présentation, aux projets de loi émanant du gouvernement, aux projets de loi d'initiative parlementaire, aux projets de loi du Sénat? Pourquoi ou pourquoi pas?
Comme vous pouvez le constater, une faible majorité des répondants s'est dite en faveur d'un changement. Encore une fois, cette question fait partie d'une série de questions destinées à examiner divers aspects de l'organisation de notre journée de travail. Bien qu'aucun consensus ne ressorte de ces chiffres, beaucoup de répondants ont donné des idées intéressantes. Un sénateur a dit : « La mort législative par attrition n'est pas la solution. Cette pratique dénigre le rôle, la réputation et la crédibilité de l'institution. »
Un autre a déclaré : « La limite devrait se limiter seulement aux projets de loi émanant du gouvernement, au moment de leur présentation. » Un autre ajoute : « Je crois qu'il y a une limite de temps imposée aux projets de loi émanant du gouvernement à la Chambre des lords. Si le Sénat n'aime pas un projet de loi, il devrait le modifier et le renvoyer à la Chambre et non le retarder. »
Maintiendriez-vous le format actuel de débat des projets de loi, avec ces ajournements fréquents? Ou préféreriez- vous un regroupement des débats, assorti de pauses, selon un échéancier établi, afin de permettre aux sénateurs d'entreprendre des recherches complémentaires et de se former une opinion en toute connaissance de l'échéancier?
Une grande majorité, soit les trois quarts des répondants, se sont exprimés en faveur d'un changement. Les sénateurs étaient réceptifs à cette question et y ont donné des réponses enthousiastes. Ils ont affirmé que « l'avantage d'un échéancier des débats serait d'accroître la participation et la qualité des débats, en plus de contribuer à créer de la cohésion et une impulsion favorisant le débat sur un thème, plutôt que toute la Chambre attende que chaque sénateur dont c'est le tour s'exprime quand la question est soulevée. »
L'attribution de temps doit-elle être modifiée?
Les réponses à cette question sont incertaines. La plupart des sénateurs sont satisfaits de l'attribution du temps pour les projets de loi émanant du gouvernement, mais ils se plaignent du temps attribué aux projets de loi d'initiative parlementaire.
De la longueur des déclarations : cette question n'a pas suscité de grande passion chez les sénateurs. Remarquez que parmi les changements réclamés, certains sénateurs voudraient qu'il y ait plus de temps alloué aux déclarations. J'aimerais vous dire que c'est une blague, mais non.
Des ressources mises à la disposition des comités : si la plupart des sénateurs ont indiqué que les ressources mises à leur disposition étaient suffisantes, bon nombre d'entre eux ont répondu qu'ils souhaiteraient que le budget du cabinet des chefs de partis soit réorganisé pour consacrer plus d'argent aux comités et aux présidents des comités. Bref, les plaintes ne portent pas tant sur l'ampleur des ressources mises à la disposition du Sénat que sur la façon dont elles sont réparties.
Des ressources mises à la disposition des sénateurs : la plupart des sénateurs ne se plaignent pas de l'ampleur de leurs budgets, mais souhaiteraient jouir d'une plus grande marge de manœuvre pour l'embauche, la passation de contrats et leurs dépenses budgétaires.
Des caucus régionaux du Sénat : certains estiment que c'est la réforme la plus importante que les sénateurs pourraient opérer; certains vont même jusqu'à dire que la participation à ces caucus devrait être obligatoire. D'autres mentionnent que les caucus régionaux devraient se donner un objectif, puisqu'ils ne peuvent pas obtenir de consensus afin de coordonner les intentions de vote comme les caucus politiques. D'autres s'inquiètent des ressources qui seraient attribuées à ces caucus s'ils étaient établis.
De la télédiffusion et webdiffusion des travaux de la Chambre : comme vous pouvez le voir, la majorité est pour. Certains répondants envoient le message clair qu'ils seraient prêts à accepter la télédiffusion seulement si d'autres changements sont apportés au Sénat. Beaucoup de sénateurs jugent que la télédiffusion ou la webdiffusion des travaux est une priorité absolue. D'autres réponses confirment que ce devrait être une priorité du Sénat, qui contribuerait énormément à communiquer ce que fait le Sénat et comment il le fait. Certains répondants craignent que les caméras n'aggravent la situation parce qu'elles susciteraient de grandes discussions partisanes pour la galerie.
Du vote électronique à la Chambre : l'idée ne suscite pas beaucoup d'enthousiasme; elle est souvent perçue comme une perte de temps et une préoccupation qui ne nous concerne pas pour l'instant. D'autres estiment que nous devrions nous pencher sur la question plus tard.
Des votes de parti : quel est leur rôle au Sénat? La position des sénateurs varie, certains estiment que les votes de parti n'ont pas leur place au Sénat, alors que d'autres estiment qu'ils y jouent un rôle particulier, notamment pour les votes de confiance, les votes sur le budget ou ce qu'on appelle les votes de troisième catégorie.
Des présidents des comités : comment devraient-ils être choisis? Cette question touche les réformes démocratiques que le Sénat pourrait décider d'entreprendre. L'élection des dirigeants des caucus et du Président font partie de ce courant de pensée. Plusieurs personnes mentionnent qu'il faudrait établir une sorte de concours auquel participerait tout le Sénat.
De la participation aux comités : comment les membres des comités devraient-ils être choisis et par qui? Comme vous pouvez le voir, la volonté de changement est dominante. Les sénateurs estiment que les membres des comités devraient être choisis différemment de la manière actuelle, bien que certains jugent pertinent que les membres des comités et les dirigeants soient nommés, ne serait-ce que par souci d'efficacité. Mais même chez ces répondants, on sent un désir de changement quant à la constitution des comités sénatoriaux. Un répondant a dit qu'il devrait y avoir un genre de concours.
Le Sénat devrait-il s'ériger en exemple de démocratie dans son propre fonctionnement? L'écrasante majorité répond que oui, bien que cette réponse n'ait pas suscité beaucoup d'idées.
Si vous avez répondu « oui » à la question précédente, le Sénat devrait-il élire ou proposer son Président? Comme vous pouvez le voir, tous les répondants ont répondu oui. Il n'y a qu'une autre question qui a suscité l'unanimité, et le sénateur Massicotte vous en parlera.
Le mandat du Président devrait-il être limité dans le temps? Dans l'affirmative, que serait une limite raisonnable? Ici, les réponses varient beaucoup, et certains croient qu'il ne devrait pas y avoir de limite de temps explicite au mandat. Certains tenants de cette idée vont même jusqu'à proposer qu'il y ait un mandat par législature, ce qui constituerait de facto une limite de temps. L'idée d'un mandat de trois ans reçoit beaucoup d'appuis.
Devrions-nous permettre au Président d'avoir le dernier mot en matière de procédure et de Règlement, ou bien devrions-nous maintenir le droit que possède la Chambre d'infirmer une décision du Président? Dans l'affirmative, à quelles conditions? La grande majorité des répondants estime que la Chambre devrait maintenir ce pouvoir. Un certain nombre de sénateurs croit que le Président pourrait jouir d'un plus grand pouvoir si le Sénat pouvait choisir lui-même son Président.
Les dirigeants des caucus devraient-ils élus par les sénateurs? La grande majorité a répondu que oui. Bien que nous ayons recueilli toutes sortes de propositions sur les dirigeants qui devraient être élus, comment et par qui, la plupart des répondants conviennent que les sénateurs devraient participer davantage à leur sélection.
Qui devrait nommer les leaders des deux côtés du Sénat? Les répondants estiment clairement que les leaders devraient être choisis par les sénateurs, par leurs caucus ou dans la Chambre, s'ils ne sont pas associés à un parti. Même les répondants qui se sont dits d'avis que le gouvernement devrait nommer les leaders ont mentionné que les leaders ne devraient pas exercer de pouvoir sur leurs collègues, mais plutôt travailler à faire connaître le programme du gouvernement au Sénat.
Je vous rappelle que ce questionnaire a été rempli il y a six ou huit mois, en juillet 2015. Nous avons reçu la plupart des réponses en août, et les autres en septembre. Le tout s'est déroulé avant les élections, donc cela remonte à déjà longtemps. Les sénateurs conservateurs ne pouvaient pas imaginer perdre les élections, donc je suppose que bon nombre des réponses ont été influencées par les élections qui s'en venaient, entre autres choses.
Je crois que l'atmosphère au Sénat a changé de façon marquée, et si les sénateurs répondaient au même questionnaire aujourd'hui, ils seraient plus nombreux à réclamer un changement et à accepter le changement. Néanmoins, un nombre considérable de sénateurs sont en faveur d'un changement dans au moins certains domaines.
Le sénateur Massicotte : Lors des séances du mois d'octobre, après avoir examiné le questionnaire, qui a servi à exprimer diverses opinions, dont nous vous avons fait part, nous nous sommes retroussé les manches. Je dois ajouter que le sénateur Tannas et le sénateur Campbell ont organisé des discussions au sujet de nos valeurs et des bonnes et mauvaises expériences du Sénat, car nous voulons répéter les bonnes expériences et tirer des leçons des mauvaises. Ensuite, nous nous sommes penchés sur notre mission.
Au sein de toute organisation d'importance, lorsqu'il s'agit d'organiser le travail, il est important d'énoncer notre raison d'être, notre mission, notre travail et d'expliquer comment nous pouvons être utiles et crédibles. Nous avons tenu un grand débat sur ce sujet. Certains étaient convaincus qu'on ne parviendrait jamais à un consensus parce que les opinions diffèrent considérablement. Nous ne nous prêtons pas assez souvent à ce genre d'exercice. Nous consacrons beaucoup de temps et d'énergie à faire quoi? C'est pour répondre à cette question que nous avons tenu ce débat. Nous avons commencé par montrer des diapositives portant sur les questions et les réponses obtenues. Par exemple, une des questions était la suivante :
[Français]
Pensez-vous que la déclaration de sir John A. Macdonald, qu'il a prononcée il y a 150 ans, et celle qu'a donnée la Cour suprême du Canada en 2014 constituent un tout relativement cohérent?
[Traduction]
La réponse est claire : 96 p.100 des gens estiment que c'est cohérent, ce qui est très bien.
[Français]
Voici une autre question : croyez-vous que toute modification qui pourrait être apportée au fonctionnement ou aux usages du Sénat du Canada aujourd'hui doive être conforme aux principes constitutionnels énoncés par sir John A. Macdonald et la Cour suprême du Canada? Dans les faits, 93 p. 100 des sénateurs y sont entièrement favorables et bon nombre ont affirmé que le Sénat doit remplir sa mission et que ces déclarations reflètent le rôle que doit jouer le Sénat.
Une autre question que nous avons abordée est la suivante : croyez-vous que le rôle législatif d'un sénateur s'appuie sur une sensibilité particulière aux régions, aux minorités et aux segments sous-représentés de la population, afin de chercher à créer les meilleures lois possible? Encore ici, 82 p. 100 sont d'accord avec cette déclaration et la plupart des sénateurs sont entièrement d'accord sur l'importante dynamique qui règne au Sénat. Près de 7 p. 100 affirment qu'il s'agit d'enjeux secondaires, alors que d'autres n'y accordaient aucune importance. Le désaccord porte surtout sur l'interprétation fédérale du Sénat, une institution qui relève de la loi fédérale, des politiques fédérales et de la législation fédérale et non des enjeux régionaux, sauf lorsqu'ils empiètent sur les compétences fédérales;
Nous nous sommes posé une autre question, à savoir si le rôle du Sénat et le mandat fondamental d'un sénateur consistent également à travailler au sein de comités afin d'étudier, en vue d'en faire rapport, les questions importantes pour notre société et de chercher et de réussir à produire les meilleurs rapports possible. Dans la négative, nous avons demandé aux sénateurs d'expliquer comment ils envisagent ce rôle et le travail des comités.
C'est l'une des deux questions où nous avons obtenu un résultat unanime, et un appui énorme pour le Sénat, évidemment, tout au long du questionnaire, et pour le travail axé d'abord sur les comités, et ensuite vers d'autres responsabilités. Lorsque nous avons examiné les questions et les réponses reçues, nous avons préparé un projet qui énonce notre mission, notre but, notre raison d'être, et à la suite du travail très important effectué par le sénateur Joyal, qui a joué un rôle clé, en réponses à sept documents modificatifs, nous sommes arrivés à un consensus très large, qui se reflète dans ce rapport. Prenons, par exemple :
[Traduction]
Le Sénat est la Chambre haute du Parlement bicaméral du Canada.
[Français]
Il s'agit d'un point important.
[Traduction]
Le Sénat joue un rôle complémentaire important...
[Français]
— encore une fois, selon le jugement de la Cour suprême ±
[Traduction]
... à celui de la Chambre des communes élue, en s'acquittant des tâches suivantes : poser un second regard objectif indépendant — « indépendant » étant un terme très important — en tenant tout particulièrement compte des intérêts nationaux du Canada, des peuples autochtones, des régions, des minorités et des segments sous- représentés de la population canadienne.
[Français]
Numéro deux.
[Traduction]
Étudier les politiques, rédiger des rapports et mener des enquêtes sur des enjeux publics qui touchent les Canadiens.
Je dois admettre que le numéro trois ne figurait pas sur notre première ébauche, mais le sénateur Joyal a fait valoir des arguments très importants. Selon lui, un sénateur doit comprendre, communiquer et représenter les opinions et les inquiétudes de divers groupes, d'un point de vue propre à lui. Cela revient à dire que nous sommes des membres de la collectivité, alors nous sommes des représentants du Sénat dans la collectivité, et d'un autre côté, nos expériences de vie dans la collectivité nous sont utiles dans le cadre de notre travail au Sénat. Essentiellement, il y a en quelque sorte un échange.
Je dois dire très honnêtement que ce troisième point répond à une question chaudement débattue au cours des deux dernières années concernant le vérificateur général. Nous nous sommes demandé si nous avions un tel rôle à jouer ou si nous avions un rôle strictement législatif. Nous avons tous convenu que nous avons un rôle très important à jouer au sein de la collectivité. Nous devons représenter la collectivité, et, de ce point de vue, ce troisième point est important.
Nous nous sommes dits très satisfaits du résultat. Nous pouvons toujours apporter des améliorations, mais après avoir rédigé sept ébauches, je crois que nous sommes parvenus à un large consensus.
Nous avons ensuite traité de la question de la partisanerie. C'est une question complexe, comme vous le savez. Je vais vous lire une question qui porte là-dessus.
[Français]
Pensez-vous que le Sénat du Canada d'aujourd'hui et toute modification qui pourrait être apportée à son fonctionnement ou à ses usages doivent être conformes aux principes constitutionnels énoncés par sir John A. Macdonald et la Cour suprême du Canada? Comme vous pouvez le constater, 93 p. 100 sont d'accord, et c'est très important. N'oubliez pas que Macdonald, dans la citation présentée plus tôt, accordait l'importance à l'indépendance, le but étant d'opposer et d'amender, mais jamais contre la volonté du peuple. Or, la Cour suprême nous a rappelé que notre rôle principal, c'est le second examen objectif. Autre question.
[Traduction]
Du rôle de la partisanerie : est-il nécessaire qu'un sénateur soit défini par son appartenance à un parti politique?
Il s'agit d'une question très chaudement débattue. Les opinions sont assez partagées. Un des sénateurs a répondu ceci : « Je ne m'oppose pas à ce que les sénateurs soient membres d'un parti et je crois qu'il serait très difficile de faire accepter un changement à cet égard. Cependant, je crois que le changement de culture que nous voulons opérer viendra beaucoup du fait que les sénateurs ne feront pas partie d'un caucus national et, lorsque cela se produira, il sera sans doute beaucoup plus facile de faire accepter des restrictions sur le plan de l'appartenance à un parti politique. » Un autre sénateur a dit ceci : « Ce n'est pas nécessaire. Toutefois, si les sénateurs sont disposés à assumer comme il se doit leur rôle et responsabilités constitutionnels, même s'ils agissent à l'encontre des considérations politiques partisanes, alors l'appartenance à un parti politique pourrait continuer d'être une composante du Sénat. » Un autre sénateur a répondu ceci : « La partisanerie au Sénat est devenue un obstacle à une gouvernance efficace. » Un autre a écrit ceci : « L'appartenance à un parti politique ne mène pas nécessairement à la partisanerie. La partisanerie est un choix et elle peut exister dans n'importe quel système. »
Vous pouvez constater que les opinions divergent considérablement.
[Français]
La prochaine question visait la participation au caucus national. Êtes-vous d'accord ou non? Les opinions sont très divisées. Plusieurs sénateurs croient que cette question représente l'un des plus grands obstacles à l'indépendance du Sénat, mais encore, on remarque une division d'opinion assez forte.
Une autre question concerne la participation au caucus des partis au Sénat. Dans ce cas-ci, 52 p. 100 étaient d'accord et n'y voyaient pas de problème, mais, encore une fois, les réponses étaient liées aux obligations constitutionnelles.
[Traduction]
Il y avait ensuite la question suivante : comment définiriez-vous brièvement la partisanerie?
Je dois dire que c'est le nœud du problème. Nous n'avons pas tous la même définition et nous perdons beaucoup de temps à dire les mêmes choses, mais pas au sujet du même problème. Je vais vous lire quelques définitions qui ont été données. En voici une : « La partisanerie est un préjugé favorable à l'égard d'une cause. » Un autre sénateur a écrit ceci : « Engagement envers un ensemble d'idées et de croyances qui est, de façon générale, représenté par un parti politique donné. » Une autre personne a écrit ceci : « La partisanerie c'est quand, malgré les preuves accablantes, on continue à voter selon l'idéologie au lieu du sens commun ou de la logique. »
En prévision de discussions futures, je vous mentionne que certains dictionnaires définissent la partisanerie comme un parti pris en faveur d'un résultat prédéterminé. Il est important de garder cela en tête. Ce n'est pas lié à l'appartenance à un parti politique, c'est un parti pris, et c'est ce qui est le plus important. Si nous sommes d'accord sur cette définition, le débat devient beaucoup plus éclairé lorsque nous convenons que nous ne sommes pas d'accord. C'est ce que dit le dictionnaire et nous devrions nous en tenir à cette définition.
Une autre question était la suivante : quels sont le rôle et l'objet de la partisanerie au Sénat?
Un sénateur a écrit : « La partisanerie en tant que parti pris irrationnel favorable à un parti politique n'a pas sa place au Sénat. »
Un autre a dit : « C'est un bon outil de gestion, mais elle peut aussi devenir un obstacle. » Une autre personne a écrit ceci : « Elle est importante surtout car elle fournit des résultats prévisibles et stables, à travers un processus guidé par des individus partageant la même vision. Elle est destructive lorsqu'elle exige une obéissance aveugle à des enjeux ayant besoin d'être débattus. »
La question suivante est celle-ci : devrions-nous définir, peut-être dans un code, quel niveau de partisanerie est approprié ou non? Dans l'affirmative, comment le définiriez-vous?
Si on examine les résultats, on constate que 59 p. 100 des gens ont répondu non. Les sénateurs ne sont pas en faveur de cette idée, essentiellement parce qu'ils croient qu'il serait difficile, voire irréaliste, de mettre cela par écrit.
Tout ce débat — et nous avons tous nos opinions — amène en conclusion la question suivante : quelle est la meilleure façon d'intégrer la partisanerie dans la culture du Sénat tout en assurant le respect de son mandat constitutionnel de chambre de second examen?
Souvent, nous avons une croyance ou un parti pris, mais nous pensons tous que nos partis pris sont rationnels et logiques. Comment traiter cette question? Comment pouvons-nous nous assurer de remplir notre rôle le plus important — celui de chambre de second examen — et, de façon plus importante, d'agir dans l'intérêt des Canadiens, et non pas dans l'intérêt de notre parti politique?
C'est une question personnelle, dans une large mesure. En tant qu'institution, il y a certaines choses que nous pouvons faire pour nous assurer de maintenir cela.
Permettez-moi de soulever quelques points. Dans l'histoire du Sénat — et je dois dire qu'il y a eu une amélioration au cours des six à neuf derniers mois —, nous avons souvent voté d'une certaine manière et fait obstruction au nom de certaines opinions, sous l'influence probablement d'un parti ou du caucus national ou régional, mais il ne devrait pas en être ainsi. Nous savons tous que, lorsque 99,9 p. 100 des gens votent dans un certain sens au sein d'un caucus et que les autres votent différemment, quelqu'un a tort ou, probablement, nous avons tous tort. Il y a quelque chose qui ne va pas dans ce processus. Les Canadiens nous attribuent 100 millions de dollars par année pour que nous fassions notre travail, et lorsque nous votons ainsi, on constate qu'il y a quelque chose qui cloche dans ce processus.
Je vais vous faire part de quelque chose. Au Sénat australien, le tiers de tous les projets de loi gouvernementaux sont modifiés et améliorés. À la Chambre des lords, les deux tiers de tous les projets de loi gouvernementaux sont modifiés et améliorés.
Si je regarde ce qui s'est passé ici au cours des 30 ou 40 dernières années, je constate que nous avons modifié en moyenne un projet de loi du gouvernement par année. Ce chiffre monte à deux lorsque la majorité au Sénat n'est pas la même que la majorité à la Chambre des communes. Je dirais qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Je crois qu'il faut changer cela, et je pense que nous sommes tous d'avis qu'un changement s'impose. Il est impossible que nos projets de loi soient parfaits quand on sait que les projets de loi de la Chambre des lords en Angleterre et de l'Australie sont de toute évidence imparfaits. Nos projets de loi ne sont pas parfaits, et je crois qu'il y a du travail à faire à cet égard. Nous pourrons discuter plus tard de la façon dont nous pouvons nous y prendre pour changer cela.
Le sénateur Greene : Pour établir où nous en sommes dans le processus, il est important de comprendre ce que nous avons fait jusqu'ici. Il y a eu six étapes. La première était celle du questionnaire, qui a servi à cibler les aspects qui pourraient faire consensus. La deuxième étape a été le travail en équipe dirigé par le sénateur Tannas en vue de définir ce que comporterait une résolution établie selon la méthode SMART. La troisième étape a été la sélection des sujets et des membres des sous-groupes de six ou sept personnes. La quatrième étape a été la discussion en sous-groupes à propos de sujets soigneusement définis en vue d'aboutir à une résolution. La cinquième étape a été la présentation à la séance plénière des résolutions afin de discuter longuement de ce que chacun considère approprié ou non. La dernière étape a été l'étude du libellé de chaque résolution, qui a mené à l'établissement d'une liste d'idées.
Lors des deuxième et troisième jours des séances de travail, nous avons réparti les participants en sous-groupes présélectionnés. Chaque groupe s'est vu attribuer un sujet précis provenant d'une liste d'une dizaine de sujets découlant du questionnaire et de l'exercice mené par le sénateur Tannas. Les sous-groupes disposaient d'une heure pour dresser une liste des arguments favorables et défavorables au sujet discuté, élaborer une résolution selon la méthode SMART, qui signifie spécifique, mesurable, atteignable, réaliste et temporellement définie, et tenter d'en arriver à un consensus. On a ensuite demandé aux sous-groupes de retourner à la séance plénière pour une discussion approfondie et pour parvenir à un consensus. Tous les participants ont reçu un document faisant état en détail des 10 sujets. Les cinq sujets qui concernent la démocratie au Sénat ont fait l'objet d'une discussion le deuxième jour, et les cinq sujets liés aux activités du Sénat ont fait l'objet d'une discussion le troisième jour.
Le premier groupe devait se pencher sur la question de savoir si le Sénat devrait s'ériger en exemple de démocratie dans son propre fonctionnement. Les questions posées étaient les suivantes : comment les présidents des comités devraient-ils être choisis et par qui? Comment les membres des comités devraient-ils être choisis et par qui?
Le deuxième groupe s'est penché sur la question de savoir s'il est important ou pas qu'un sénateur appartienne à un parti. Les questions étaient les suivantes : est-il nécessaire qu'un sénateur soit défini par son appartenance à un parti politique? La participation au caucus national est-elle obligatoire? Et que dire des caucus des partis au Sénat?
Le troisième groupe a examiné la question de savoir si les votes soumis à la discipline de parti ont un rôle. Les questions étaient les suivantes : les votes dictés par le parti ont-ils un rôle au Sénat? Si oui, comment le définir et l'appliquer?
Le quatrième groupe a étudié la question de savoir si le Président doit servir d'autorité suprême.
Le cinquième groupe s'est penché sur la sélection et le rôle des dirigeants des caucus. On lui a posé les questions suivantes : les dirigeants des caucus devraient-ils être élus par les sénateurs? Dans l'affirmative, tous devraient-ils être élus ou certains devraient-ils être nommés? Dans l'affirmative, lesquels devraient être élus ou nommés?
Le troisième jour portait sur les activités du Sénat. Le premier groupe s'est penché sur la période des questions. On lui a posé la question suivante : devrait-on éliminer, modifier ou garder dans sa forme actuelle la période des questions? Le groupe a répondu qu'on devrait conserver la forme actuelle de la période des questions, selon laquelle un ministre comparaît devant le Sénat.
Le deuxième groupe s'est penché sur les activités du Sénat et les questions relatives au Feuilleton. Les questions étaient les suivantes : devrait-on modifier le format du Feuilleton pour permettre le regroupement des débats? Devrait- on maintenir le format actuel des débats des projets de loi, avec ses ajournements fréquents?
Le troisième groupe a examiné les questions relatives aux relations et aux communications. On lui a posé les questions suivantes : devrait-on télédiffuser ou webdiffuser les travaux de la chambre? Y a-t-il des propositions pour améliorer les communications et rapports non partisans du Sénat? Les caucus régionaux ou l'attribution des places selon les régions faciliteraient-ils la communication et les rapports?
Le quatrième groupe a étudié les questions influant sur ce qui différencie le Sénat de la Chambre des communes. Les questions étaient les suivantes : le plan des sièges à la chambre devrait-il respecter les principes de la partisanerie ou d'autres principes? Le calendrier du Sénat devrait-il être identique à celui de la Chambre des communes? L'horaire quotidien du Sénat est-il utilisé de façon efficace?
Le cinquième groupe s'est penché sur les comités permanents et spéciaux du Sénat. Les questions étaient les suivantes : les comités sont-ils trop nombreux ou insuffisants? Les comités devraient-ils être plus petits? Les comités devraient-ils avoir des ressources accrues en matière de communication? Faudrait-il davantage de comités spéciaux sur les enjeux publics?
La sénatrice Cools : Qu'est-ce qu'un comité spécial?
Le sénateur Massicotte : Il s'agit d'un comité formé pour discuter d'un sujet en particulier.
Le sénateur Greene : Le présent comité est en quelque sorte un comité spécial.
La sénatrice Cools : On peut le définir comme un comité spécial. D'accord, je comprends.
Le sénateur Massicotte : Je vous rappelle qu'il y avait 10 grands sujets. Ils ont fait l'objet d'une discussion par des groupes de cinq à sept personnes pendant une heure. Chaque sous-groupe devait parvenir à un consensus, dresser une liste des arguments favorables et défavorables et déterminer ce qu'il allait recommander à l'ensemble du groupe. Chaque sous-groupe a discuté pendant une heure du sujet et il a ensuite fait une présentation en plénière pour faire valoir ses idées et obtenir un consensus. Vous allez constater que certains sous-groupes n'ont pas obtenu de consensus, et nous en parlerons plus tard. Certains ont obtenu un consensus.
Je vais décrire les 11 sujets qui ont reçu un appui presque unanime. Un large consensus s'est dégagé à la suite des discussions en sous-groupes. Je vais vous faire part des résultats. N'oubliez pas qu'il y a eu de longues discussions, non seulement au sujet de l'idée, mais aussi du libellé. En premier lieu, nous sommes parvenus à un consensus au sujet de l'énoncé de mission, dont j'ai parlé plus tôt. Je ne vais pas le lire à nouveau.
[Français]
Le deuxième élément concernait la sélection et l'autorité du Président. La conclusion à laquelle nous sommes arrivés est que le Sénat devrait élire, au moyen d'un scrutin secret, le sénateur dont la candidature aurait été soumise à l'examen du gouverneur général en vue de la nomination du Président du Sénat pour un mandat d'une durée maximale de trois ans. Les décisions prises par le Président sur l'interprétation du Règlement pourraient être contestées par l'assemblée. En d'autres mots, les sénateurs sont unanimes pour dire que nous devrions nommer ou élire nous-mêmes notre Président, ce qui est effectivement très important.
Nous avons atteint un consensus également au sujet de la période des questions. Dans le but de faire meilleur usage de leur temps, les sénateurs devraient restructurer la période des questions de manière à mettre l'accent sur les principaux enjeux des travaux des comités, sur les rapports des comités, et sur d'autres questions essentielles liées au travail des comités. Ainsi, la période des questions devrait être rebaptisée « période des enjeux ». En outre, les ministres et les agents du Parlement devraient, de temps à autre, être convoqués dans l'enceinte du Sénat pour répondre aux questions des sénateurs sur les enjeux qui relèvent de leurs compétences.
Comme le sénateur Greene l'a fait remarquer plus tôt, c'est la pratique que nous avons adoptée depuis quelque mois, qui se révèle être une expérience très valable et qui a beaucoup d'utilités. Les commentaires sont positifs. Je remercie les sous-comités qui ont suggéré cette recommandation.
Quant aux déclarations des sénateurs, il existe un consensus en ce qui a trait à l'importance des déclarations et au fait qu'elles devraient continuer à diffuser les nouvelles d'intérêt et d'actualité. Les sénateurs devraient connaître et respecter les règles, et éviter les opinions et les questions controversées, selon les délais prévus au Règlement. En d'autres mots, simplement, il s'agit d'une pratique utile, mais il faudrait revenir à la base et s'interroger sur le but de cette période des déclarations des sénateurs. Souvent, les déclarations traitent de sujets plutôt personnels qui ne s'adressent pas au public. Il faut faire respecter la règle plus sévèrement.
Dans le cas des hommages à l'occasion du départ à la retraite d'un sénateur, ils devraient se limiter à un bref remerciement de la part des leaders. Les autres discours devraient être prononcés pendant la réception du Président. L'orientation proposée suppose que, si les caméras sont présentes dans la salle du Sénat, le fait de rendre hommage à un de nos collègues pendant une heure ou deux ne représente peut-être pas la meilleure façon d'utiliser notre temps, du point de vue de la population canadienne.
En ce qui concerne la diffusion, les communications et les relations, le Sénat devrait diffuser ses délibérations à la télévision et sur le Web. C'est assez évident. On en parle depuis longtemps et je crois qu'il est temps de passer à l'action. C'est une question de transparence et de communication. C'est une proposition qui a beaucoup de mérite, surtout si nous mettons en œuvre les autres changements.
Par ailleurs, les réunions informelles des caucus régionaux devraient avoir lieu de temps à autre.
[Traduction]
Si vous examinez les résultats du questionnaire, vous pouvez voir que la majorité des gens s'entendent pour dire que nous devrions être davantage axés sur les régions. Quand il a été question de déterminer ce que les sénateurs devraient faire, comment ils devraient organiser le travail et comment les sièges devraient être répartis, nous ne sommes pas parvenus à un très large consensus. Il faudrait discuter du fait que nous devrions adopter une perspective davantage fédérale plutôt que régionale. Il est vrai que, lorsque le Sénat a été créé dans la Constitution, l'accent a été mis considérablement sur la représentation régionale. En fait, c'était le fondement. On pourrait faire valoir que cela a beaucoup changé, car la Cour suprême et les provinces ont largement pris le relais. En effet, les premiers ministres des provinces et des territoires se réunissent annuellement. Quelqu'un a fait valoir que la nécessité pour le Sénat d'être axé sur les régions est moins grande et moins pertinente.
Rien ne nous empêche de rencontrer à l'occasion ou de façon régulière des gens qui partagent les mêmes intérêts régionaux que nous. Quoi qu'il en soit, nous ne sommes pas parvenus à nous entendre sur autre chose, je dois dire très honnêtement. Nous devrions encourager cela, car ce serait peut-être une bonne expérience, mais je dois dire que nous ne sommes pas parvenus à d'autres consensus.
Le sénateur Greene : Je crois que cela pourrait mieux fonctionner dans certaines régions. Par exemple, dans les Maritimes, je pense que cela pourrait fonctionner très bien, mais peut-être pas aussi bien dans d'autres régions.
Le sénateur Massicotte : Passons aux questions relatives au Feuilleton. Si vous vous rappelez les résultats du questionnaire, vous vous souvenez qu'il y avait un très large appui en faveur de la modification du processus de nos délibérations. Durant la période des questions — la sénatrice Bellemare a d'ailleurs soulevé ce point récemment —, il n'y a pas de débat. Je crois que la sénatrice Stewart Olsen a expliqué qu'il y a un débat, mais qu'il est isolé. Nous ne savons pas quand il continuera. Certaines personnes prennent la parole, mais je ne sais pas combien de gens écoutent. Le débat doit également avoir une valeur ajoutée.
C'est en écoutant le débat que nous apprenons des choses, et il est certes plus intéressant de savoir que nous allons discuter d'un certain sujet à une date précise. Les débats malheureux à propos de la suspension de certains sénateurs ont suscité un très grand intérêt. Il y a eu une série de discours, et ce processus nous a permis d'apprendre. En ce moment, c'est décousu, car on ne sait pas ce qui se passe et n'importe qui peut mettre fin au débat. Un changement important s'impose. Il est cependant difficile de déterminer comment apporter ce changement.
Nous avons demandé des conseils au greffier en ce qui concerne le sous-comité. Voici ce que nous pouvons recommander : les sénateurs devraient recevoir le Feuilleton détaillé plutôt que le Feuilleton général, car il y en a apparemment deux; les sénateurs ne devraient pas pouvoir ajourner le débat sur un projet de loi d'initiative parlementaire, un projet de loi du Sénat ou une motion pour une période de 15 jours plus d'une seule fois, et l'article 6- 10(2) du Règlement devrait être modifié en conséquence; la liste des questions au Feuilleton devrait être présentée plus clairement et être facile à suivre; le terme « inscrit » devrait être évité, mais on devrait maintenir la possibilité pour les sénateurs de prendre la parole sur chaque question. La procédure serait la suivante : chaque jour, un sénateur qui souhaite prendre la parole sur une question donnée devra en donner avis à son leader adjoint ou au Président. Au début de la séance, chaque question ayant fait l'objet d'un avis sera traitée d'abord par le sénateur ayant donné l'avis, puis par tout sénateur voulant également prendre la parole sur la question. Lorsque toutes les questions ayant fait l'objet d'un avis auront été traitées, le greffier fera l'annonce des questions n'ayant pas fait l'objet d'un avis, pour offrir aux sénateurs l'occasion de s'exprimer sur ces questions. Si aucun sénateur ne s'exprime sur une question n'ayant pas fait l'objet d'un avis, aucune autre question ne sera soulevée et la séance sera ajournée.
Ainsi, nous pourrions être libres d'exprimer notre opinion en tout temps, faire régner un peu plus d'ordre, éviter les ajournements fréquents des débats et essayer de les regrouper un peu plus. Je ne suis pas sûr qu'il en serait ainsi, mais des gens ayant plus d'expérience en la matière peuvent probablement nous aider.
Pour ce qui est de l'élection des agents des caucus, les caucus du Sénat devraient élire tous les agents au scrutin secret, pour des mandats d'une durée déterminée par chaque caucus.
Je dois signaler à ce stade-ci que je pense que tous les caucus voient maintenant cette obligation d'un bon œil, certainement sans influence de notre part. J'ai eu de nombreuses discussions à ce sujet avec les deux caucus.
En ce qui a trait à la question de la composition et de la présidence des comités, le besoin de changer le processus de nomination des membres des comités se faisait fortement sentir, mais la question a tout de même été chaudement débattue compte tenu des contraintes imposées.
Nous en sommes arrivés à ce qui suit : pour chaque session parlementaire, le Sénat sélectionnera les membres des comités par l'entremise du Comité de sélection élu au scrutin secret par l'ensemble du Sénat conformément aux directives convenues par la direction des partis politiques reconnus au Sénat; l'ensemble du Sénat élirait au scrutin secret le comité de la régie interne conformément aux directives convenues par la direction des partis politiques reconnus; les membres du Comité de sélection devront provenir des quatre divisions sénatoriales du Canada; le Comité de sélection exercera ses pouvoirs et établira la composition des comités et des sous-comités conformément aux directives convenues par la direction des partis politiques reconnus au Sénat; le Comité de sélection assumera la responsabilité de tous les changements aux comités permanents. Une fois formés, les comités éliront au scrutin secret leurs présidents, leurs vice-présidents et les troisièmes membres du comité directeur, conformément aux directives convenues par la direction des partis politiques reconnus au Sénat. Et ce processus fera l'objet d'un examen au bout d'une année.
C'est difficile parce que l'on peut plaider en faveur de la représentation proportionnelle et de l'obligation de satisfaire. C'est la raison pour laquelle on se réfère constamment aux lignes directrices ou au cadre convenus par la direction. En somme, l'élection des membres du Comité de sélection — la sélection des membres du comité — doit se faire au scrutin secret par les membres plutôt que de manière officieuse par la direction, comme c'est le cas actuellement. Un cadre est nécessaire pour parvenir à nos fins, mais en ayant le plus de liberté possible. C'est ce que nous avons dit. Nous ne savons pas si ce cadre fonctionnera, mais mettons-le à l'essai pendant un an et nous y apporterons des améliorations en cours de route. Nous verrons ensuite.
[Français]
La sénatrice Bellemare : Que signifient les directives dont a convenu la direction des partis politiques reconnus au Sénat?
[Traduction]
Le sénateur Massicotte : C'est une bonne question, monsieur le président. Je propose de la reporter.
Le président : Nous inscrirons votre nom sur la liste.
Le sénateur Massicotte : Nous avons également discuté des comités permanents et spéciaux du Sénat. Tous s'entendaient pour dire que le Sénat devrait profiter de sa capacité à examiner et à mettre en lumière rapidement les enjeux médiatisés ou d'actualité dans ses comités permanents ou spéciaux, s'il y a lieu. Les comités constituent le joyau du Sénat. Par conséquent, le Sénat devrait consacrer plus d'énergie à l'examen du mandat, de la taille et de la composition des comités permanents — c'est-à-dire pas toujours le maximum —, afin de toujours renforcer cet atout. Les rapports des comités devraient être dotés d'un important budget de communication afin de mettre en valeur le travail de tous les membres des comités, y compris en ce qui concerne les médias sociaux et les activités de sensibilisation.
En somme, c'est conforme aux questions. Les comités sont un aspect important du Sénat. Nous faisons du très bon travail. Tout ce que nous disons, c'est qu'il faut être plus rapide et plus pertinent, et qu'il faut adapter, s'il y a lieu, la composition des comités et les questions étudiées, comme on le fait parfois dans d'autres pays, où l'on procède très rapidement et de manière très dynamique. C'est essentiellement ce que nous disons ici.
Le sénateur Greene : Nous passons maintenant à la liste des enjeux en suspens n'ayant pas reçu consensus lors des séances. Ces enjeux auraient pu être réglés, mais nous n'en sommes pas arrivés à une conclusion ou, dans certains cas, nous ne les avons pas du tout examinés.
Sur la liste — et nous recommandons que le comité s'en serve pour progresser le plus possible —, le premier point est « Aucun vote de parti », avec ou sans exception. Nous n'avons pas pu nous entendre là-dessus ni sur la participation au parti politique lors de caucus nationaux, sénatoriaux ou régionaux.
Nous n'avons pas pu régler la question des sénateurs indépendants. Chose certaine, à l'époque, c'est-à-dire en octobre, cette question ne nous a pas tous touchés de la même façon que maintenant étant donné qu'il est probable que nous ayons actuellement le plus grand nombre d'indépendants de l'histoire du Sénat. C'est une question urgente que le comité doit régler.
Nous ne nous sommes pas vraiment penchés sur la question des caucus régionaux, des projets de loi omnibus ou, enfin, de la période restreinte pour la prise de décision des projets de loi et l'autorité finale de la Chambre des communes sur nos amendements. Autrement dit, quelle procédure devons-nous suivre après l'amendement d'un projet de loi? Devons-nous nous soumettre à l'autorité finale de la Chambre?
Le sénateur Massicotte : Je terminerai en disant que, pendant les trois jours de séances, nous nous sommes surtout penchés sur la façon dont nous menons nos activités au Sénat, organisons les comités, améliorons nos relations de travail et tâchons d'être plus pertinents et crédibles. Il s'agit vraiment d'un grand nombre de questions de régie interne. Ce sont des choses que nous pouvons régler parce que, en tant que sénateurs, nous savons ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Nous avons donc réglé ces questions.
Soyons très clairs : de toute évidence, je pense que notre comité se concentre là-dessus, mais nous voulons rappeler à tout le monde que ce n'est qu'un seul pied de ce que nous considérons comme un tabouret à quatre pieds. Les trois autres points d'appui sont très importants, et je crois que nous devons le reconnaître pour que le Sénat puisse parvenir à ses fins.
Il y a la question de l'intégrité et de la responsabilité financières. Le vérificateur général a grandement attiré l'attention là-dessus. Nous avons indiqué que c'est déjà à l'étude par le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration. Je crois qu'aborder une seule des quatre questions pose problème. Selon moi, la question est réglée, mais nous devrions tout de même en tenir compte dans le cadre de notre propre modernisation.
Il y a également la question de la communication efficace et transparente. C'est un enjeu très important. Une fois de plus, nous indiquons que c'est déjà à l'étude par le Comité sénatorial de la régie interne, des budgets et de l'administration.
La quatrième question est celle des règles d'éthique et des mesures de disciplines fortes et cohérentes. C'est une chose que nous n'avions pas il y a un an et demi, mais qui est très importante. J'ai indiqué que le Comité sur l'éthique et les conflits d'intérêts des sénateurs s'est penché là-dessus, de manière satisfaisante pour la plupart d'entre nous, je crois. C'est une amélioration très importante que nous avons apportée au cours des deux dernières années pour essentiellement répondre à une demande de la population canadienne.
Merci, monsieur le président. Nous sommes maintenant prêts à répondre aux questions.
Le sénateur Joyal : J'aimerais d'abord vous féliciter du travail que vous avez accompli. C'est très utile à notre réflexion et à l'amélioration du fonctionnement de l'institution.
Lorsque j'ai consulté la liste de recommandations, j'ai essayé de déterminer l'ordre dans lequel certaines recommandations nécessiteront la modification du Règlement du Sénat. Dans l'éventualité où des recommandations nécessiteraient la modification de la Loi sur le Parlement du Canada, il faudrait l'assentiment de la Chambre des communes, dont les recommandations pourraient empiéter sur la Constitution. Ce serait alors une autre histoire.
Avez-vous essayé de dresser la liste des recommandations auxquelles le Sénat pourrait immédiatement donner suite lui-même? Il n'appartient qu'à nous de modifier les règles. En revanche, s'il faut modifier la Loi sur la Parlement du Canada, nous devons obtenir l'assentiment de la Chambre des communes, ce qui est toujours plus difficile ou complexe. À moins de vouloir rêver en couleur, nous devrions probablement éviter de toucher à la Constitution pour le moment. Ce n'est pas impossible, mais nous ne pouvons pas nous attendre à ce que ce soit fait à court terme. Avez- vous accompli cet exercice pour ce qui est des recommandations?
Le sénateur Massicotte : Non, mais nous avons rencontré les deux chefs de caucus, et ils ont débattu de la question. Par exemple, en ce qui a trait au Président du Sénat, le libellé que nous avions présenté proposait d'en faire une question de coutume. Autrement dit, nous avons demandé de coopérer. Il faut ensuite se demander si on peut nommer qu'une seule personne. Pour que cela fonctionne, il en faut trois. Il faudrait idéalement modifier la Loi sur le Parlement du Canada. Lorsque nous avons rencontré le ministre il y a deux ou trois semaines, il a mentionné qu'on était d'avis que la loi ne pourrait être modifiée sans modification constitutionnelle, ce qui poserait problème. Selon les chefs de caucus, l'autre point à aborder concerne les règles, pas la Constitution.
Le sénateur Joyal : Pour ce qui est du statut du Président, je suis du même avis que le gouvernement, à savoir que cela nécessiterait une modification constitutionnelle. C'est ce que j'ai proposé il y a 12 ans lors de la présentation d'un projet de loi par le sénateur Oliver. À l'époque, le Président a laissé le débat se poursuivre. Aucune décision officielle n'a été prise au sujet du projet de loi, mais je pense qu'il y a moyen de contourner le problème si le Sénat choisi certains candidats, pas un seul, comme le fait le conseil consultatif spécial auprès du premier ministre. Cinq noms sont proposés pour chaque poste à pourvoir.
Nous pourrions envisager une règle voulant que le Sénat, au début d'une session, propose trois, quatre ou cinq candidats issus de chaque groupe au Sénat. Le Parti conservateur pourrait en proposer un, à l'instar du Parti libéral ou des indépendants, s'ils décident de se regrouper. Le premier ministre pourrait choisir parmi ces candidats lequel il recommanderait au gouverneur général. Nous respecterions ainsi l'esprit de la Constitution dans la mesure où le premier ministre procède de manière semblable pour recommander la nomination de sénateurs au gouverneur général ou de juges à la Cour suprême du Canada ou aux cours supérieures des provinces, ce qui cadre avec la prérogative de la Couronne. Ainsi, la prérogative de la Couronne demeure intacte, nous maintenons la capacité relative à la sélection et nous respectons l'esprit de la convention. Ce serait un grand pas en avant pour donner suite à la recommandation du comité.
C'est une façon de promouvoir l'idée voulant que le Sénat participe à la décision visant à déterminer quel sénateur serait recommandé au gouverneur général. Pensez-vous que ce serait la bonne approche?
Le sénateur Massicotte : Les deux chefs de caucus croient que cette approche pourrait fonctionner sans que nous ayons à modifier la Loi sur le Parlement du Canada.
Le sénateur Joyal : L'article 34 de la Constitution demeurerait inchangé, et nous pourrions au moins prendre part aux processus de sélection.
Le sénateur Massicotte : Ils ont tous les deux offert de s'entendre là-dessus. Votre opinion est probablement mieux fondée compte tenu de votre expérience, et les chefs de caucus sont d'accord avec vous.
Le sénateur Joyal : Si la décision demeure exclusivement celle de l'ensemble du Sénat, cela voudrait dire que la majorité de sénateurs prenant part à la sélection appuierait une seule personne, dont le nom serait choisi par scrutin. Le premier ministre serait libre de choisir le parti politique ou le groupe d'indépendants dont serait issue la personne recommandée. Nous éviterions ainsi les critiques voulant que le Président actuel ait été nommé par le gouvernement parce que les conservateurs qui étaient au pouvoir formaient le parti majoritaire. Chaque groupe aurait son mot à dire en proposant un candidat de son choix.
Le président : C'est une proposition très intéressante. Je vais revenir à vous.
La sénatrice McCoy : J'ai l'avantage d'avoir participé aux séances. J'appuierais votre proposition en en vantant les mérites. Nous avons discuté de cette question de manière plus générale. C'est une façon sensée d'aborder notre situation. C'est un bon point de départ. Lors des séances, je n'ai ménagé aucun effort pour vous féliciter. Je tiens à vous féliciter de nouveau pour que cela figure au compte rendu, plus particulièrement pour la façon dont vous avez dirigé les séances de travail. Elles étaient parfaitement non partisanes, collaboratives et inclusives. Vous avez vraiment animé de bonnes discussions.
Je me suis personnellement opposée à certains des résultats, mais les séances étaient bien façonnées et bien dirigées. Une fois de plus, félicitations, et merci d'avoir contribué à la création d'un Sénat du XXIe siècle.
Il y a un point que je voulais plus particulièrement souligner, à savoir ce que vous avez dit à propos de s'entendre sur la signification de partisanerie. Il serait très utile de formuler à partir de votre présentation une ferme recommandation en ce sens. Je vois que vous hochez la tête; dois-je en déduire que vous êtes d'accord?
Le sénateur Greene : C'est très difficile.
Le sénateur Massicotte : Dites-vous que nous devrions adopter une motion pour accepter la définition du dictionnaire? Ce mot y est très bien défini, mais nous ne l'employons pas correctement la plupart du temps.
Le sénateur McCoy : J'ai consulté l'Oxford English Dictionary, et il doit y avoir le Larousse ou un autre dictionnaire en français. Le sens de bias est très similaire dans l'Oxford English Dictionary, et vous avez employé ce mot ainsi que predetermined. En fonction des définitions des dictionnaires, nous pourrions nous entendre sur une acception et peut- être encourager l'emploi de party affiliation, qui n'a pas une connotation aussi forte. Nous pourrions employer ce terme lorsque nous discutons d'autres questions, ce qui nous donnerait une marge de manœuvre un peu plus grande, un peu plus de latitude pour satisfaire aux désirs de beaucoup de nos collègues.
Je voulais également vous féliciter de ce que vous avez dit ce matin, à savoir que cela s'est fait le 23 octobre, ce qui signifie que les réponses aux questions ont été fournies après les élections. Je crois que la plupart des gens pensaient encore que le Sénat était formé de partis reconnus et qu'il n'y en avait que deux, ce qui veut dire que la force imaginative des sénateurs n'avait pas été pleinement mise à contribution, je crois, comme vous le dites, pour répondre à certaines des questions. Je ne veux pas tenir ce genre de discours à ce stade-ci, mais, alors que vous prépariez la présentation, un groupe a annoncé qu'il sera dorénavant indépendant et non partisan, et qu'il s'efforcera de promouvoir l'indépendance et non-partisanerie. Par conséquent, le terme « parti politique reconnu » doit revêtir le même sens que nous lui avons donné dans certaines de ces recommandations.
Voici une question, car votre liste n'est pas exhaustive, même si elle est étoffée. Je crois que l'on commence à penser qu'il serait utile de s'entendre de manière provisoire sur les choses que nous pouvons régler étant donné qu'elles font l'objet d'un vaste consensus. Pouvez-vous recommander au comité une manière de procéder pour arriver à une entente? Vous avez très bien géré les séances de travail, mais je crois que les 15 membres du comité devront encore discuter de ces points. Avez-vous une recommandation quant à la façon dont nous pourrions procéder?
Le sénateur Greene : Pour quelques-uns de ces aspects, en particulier la notion d'indépendance, la dynamique a changé, entre autres. Nous n'avons pas traité de cette notion, mais si nous l'avions fait, cela n'aurait pas été de la même façon que nous le ferions aujourd'hui. Ce serait bon à savoir, même si nous représentons l'ensemble du Sénat et que nous sommes assez nombreux au sein de ce comité. Il pourrait être bien — je lance simplement l'idée — de préparer un bref questionnaire sur la notion d'indépendance, pour tous les sénateurs. Cela pourrait se faire rapidement. C'est simplement une idée, mais il s'agit d'un outil de recherche. C'est ainsi que je vois les choses.
Le sénateur Massicotte : J'apporterais une légère nuance. La question était utile pour obtenir l'information, mais la notion d'indépendance est plutôt complexe. Il revient au comité de décider comment aborder la question, mais de tous les enjeux en suspens, c'est probablement l'enjeu le plus important et le plus fondamental; c'est un enjeu très important dont il faut traiter incessamment. S'il le souhaite, le comité pourrait nous demander, à Stephen et à moi... Quelqu'un devrait étudier la question de façon plus approfondie et présenter des recommandations plus sérieuses sur la marche à suivre à cet égard. Autrement dit, quelqu'un doit consacrer plus de temps aux questions liées au financement, aux comités et aux mesures législatives, puis présenter des solutions quelconques auxquelles le comité pourra répondre.
Ma recommandation serait de procéder par l'intermédiaire d'un sous-comité, car il y a beaucoup de travail à faire. Le sous-comité pourrait diffuser un questionnaire ou, à tout le moins, rencontrer tous ceux qui ont une opinion sur le sujet, puis présenter des recommandations représentant un consensus.
La sénatrice Cools : Dans le vocabulaire parlementaire — la terminologie parlementaire —, on entend par indépendant quelqu'un qui n'est pas un ministre.
Le sénateur Massicotte : Sans appartenance politique.
La sénatrice Cools : Non; cela n'avait rien à voir avec l'appartenance politique. Le terme « indépendant » servait autrefois à décrire les parlementaires qui ne faisaient pas partie du Cabinet, c'est-à-dire ceux qui n'étaient pas ministres, car seuls les ministres sont tenus — sous peine de sanctions, peut-être, autrefois — d'appuyer le gouvernement. Les autres parlementaires, qu'on appelait autrefois les « indépendants », sont libres de voter comme bon leur semble. C'est pour cette raison que les Britanniques utilisent encore aujourd'hui cross-benchers, « apostats », au lieu du terme « indépendant ».
Sachons que nous devrons un moment donné revenir aux définitions initiales sous-jacentes à ces questions, sans quoi nous serons totalement perdus.
Le président : J'en prends bonne note.
La sénatrice Cools : Merci. C'était un rappel au Règlement d'ordre mineur.
La sénatrice McCoy : Nous devrions peut-être en discuter à huis clos, parce que d'autres personnes veulent avoir l'occasion de poser des questions et il ne nous reste que trois quarts d'heure. Nous pourrions toutefois utiliser une variation, dans un questionnaire, ne serait-ce que pour avoir l'avis de tout le monde, traiter simplement des points qui font consensus et voir si un consensus se dégage pour ces autres points. On pourrait procéder par voie électronique de façon à pouvoir progresser. Cela pourrait aussi être une solution.
Le président : Le comité directeur en prendra note et examinera la question.
La sénatrice Stewart Olsen : J'ai aussi pensé à un questionnaire en raison des changements qui ont déjà été apportés.
Je constate que cet aspect précis a été abordé dans votre sondage, mais qu'on n'y a pas vraiment porté attention, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici, en fait. Nous sommes ici pour deux raisons et cela a évolué au fil du temps. Par conséquent, je pense que le comité doit chercher à savoir s'il convient de maintenir les choses en l'état où elles ont évolué ou s'il convient de revenir à notre mandat, qui est d'examiner les lois et de représenter nos régions respectives.
Les Pères de la Confédération ont créé le Sénat pour amadouer les provinces de l'Atlantique, qui perdaient tous leurs pouvoirs et accordaient des pouvoirs considérables à l'Ontario et au Québec. C'est essentiellement ce qui s'est passé. Donc, voulons-nous en faire un point de départ? Nous devons prendre une décision à ce sujet, car ce que je constate, c'est que tout le monde se concentre sur ses propres intérêts particuliers; cela coûte très cher et nous n'avons aucun consensus. Une personne pourrait dire qu'elle porte un intérêt particulier aux chiens d'assistance et pourrait par conséquent parcourir le pays pour en faire la promotion. C'est aussi une question d'intérêts partisans; vous n'avez pas abordé la question des intérêts particuliers.
À mon avis, le Québec a agi de façon plutôt adéquate lorsqu'il a décidé que les sénateurs viendraient de districts sénatoriaux. Au Nouveau-Brunswick, nous réussissons assez bien parce que nous venons d'une partie distincte, heureusement, et nous sommes en quelque sorte répartis dans ces régions. Je pense toutefois qu'il s'agit d'un aspect pour lequel nous devrons parvenir à une conclusion, parce qu'au Canada atlantique, le public croit que nous sommes ici pour renforcer la présence de la région à Ottawa. On n'a probablement pas le même point de vue dans le reste du Canada, mais c'est ce que pensent les gens de ma région. L'autre aspect, évidemment, est d'examiner les lois.
Je pense que cet aspect doit être traité dans notre description de tâches, sans quoi tous les nouveaux sénateurs qui seront nommés feront ce qu'ils voudront, car c'est ce qu'on voit actuellement. Des gens intelligents, des gens de bien sont nommés au Sénat, mais il n'y a aucune description de tâches. Personne n'indique aux gens ce qu'ils peuvent faire ou non; ils prennent donc leurs propres décisions quant à leurs activités, je ne suis pas certaine que c'était là l'intention au départ.
Le sénateur Massicotte : Quant aux projets spéciaux — je ne connais pas le terme exact —, nous avons discuté en privé des mesures à prendre à cet égard. C'est un enjeu important. Le juge Binnie a soulevé la question dans le rapport qu'il a présenté plus tôt cette semaine. C'est un peu vague en raison des différences entre les lettres qui ont été distribuées et le Règlement du Sénat. Nous avons conclu que cela ne faisait pas partie de notre mandat et que cela devrait relever du mandat du comité de la régie interne parce que l'enjeu principal n'est pas de savoir qui le fait, mais plutôt de savoir qui en assume les coûts. C'est un enjeu distinct, mais important dont il faut traiter, et je dirais que le Comité de la régie interne est le mieux placé pour le faire.
La sénatrice Stewart Olsen : Cependant, ce comité devrait avoir une recommandation quelconque à présenter au comité de la régie interne, car j'estime que les choses de ce genre ne devraient pas relever du comité de la régie interne.
[Français]
La sénatrice Bellemare : Je vais poursuivre dans la veine que la sénatrice Stewart Olsen. Je crois qu'elle soulève un point fondamental, celui de notre description de tâches. Nous avons une tâche à remplir, qui est celle de nous moderniser, et nous n'avons pas beaucoup de temps. Il y a aussi la question à savoir comment nous allons y arriver. Or, je m'interroge sur le côté pragmatique.
[Traduction]
Nous pourrions peut-être commencer ce rapport et voir où cela nous mène tout en traitant de divers points, comme la description de tâches et le mandat du Sénat. Nous pourrions traiter de ces questions ici et inviter des gens à nous aider, si nécessaire.
En ce qui concerne l'organisation de notre travail, nous avons déjà commencé quelque chose. À mon avis, la question des sénateurs indépendants est un enjeu important qu'il faudra régler, étant donné que de nouveaux sénateurs seront nommés. Tout est interrelié. Je dirais que la raison pour laquelle nous n'avons pas une description de tâches, c'est qu'il était probablement plus facile de procéder ainsi. On nous demandait de nous prononcer sur des projets de loi émanant du gouvernement en faisant abstraction des allégeances politiques, des whips et de tout le reste.
Si nous choisissons de ne plus procéder de cette manière et de nous concentrer sur le rôle que nous sommes censés jouer, je pense que nous devrions nous concentrer sur les enjeux dont nous sommes saisis. Nous avons une ébauche, qui n'est pas parfaite, mais cela a commencé au mois d'octobre et les gens ont répondu à des questions. Nous pourrions à tout le moins essayer d'en discuter entre nous pour savoir s'il y a consensus ou non par rapport à tous ces enjeux. Devrions-nous faire une étude et inviter des gens à témoigner? Nous savons que nous accueillerons lord Hope au cours d'une de nos séances et que nous aurons alors l'occasion de discuter de la question des sénateurs indépendants.
Je pense donc qu'il est important de nous concentrer sur les résultats des travaux du comité et d'en faire notre point de départ. C'était mes observations.
Le président : Merci. Écoutez, nous devrons bientôt lever la séance. Nous voulons tous être à la Chambre du Sénat dès le début. Je crois comprendre que la séance sera très courte.
La sénatrice Cools : Aujourd'hui, le Sénat siège pour cinq minutes à compter de 13 h 30.
Le sénateur Massicotte : À compter de 14 heures.
Le président : À 14 heures. Nous devrions essayer de terminer d'ici 13 h 50. Je vous demande d'être brefs dans vos questions et vos réponses, s'il vous plaît.
La sénatrice Cools : Chers collègues, je vous remercie de votre travail. J'ai une question pour vous. Elle porte sur une question qui me préoccupe beaucoup, car j'estime que ces événements découlent de principes et de mesures qui sont contraires à tout ce pour quoi le Sénat a été créé. Je parle plus précisément de la vérification menée par le vérificateur général du Canada qui a nécessité, pour reprendre les propos du vérificateur général, des milliers d'heures du temps de chacun des sénateurs sur une période de deux ans.
Vous semblez vous être penchés sur le comportement des sénateurs, mais c'est là le nœud du problème pour les sondages que vous menez : ils portent principalement sur les comportements humains.
Pouvez-vous m'expliquer, si vous avez réfléchi à la question, pourquoi et comment des gens très intelligents, des gens formidables — les sénateurs — ont-ils appuyé l'idée d'inviter le vérificateur général à faire une vérification au Sénat? Le vérificateur a indiqué qu'il s'agissait d'une vérification du rendement, tandis que la sénatrice LeBreton était d'avis qu'il s'agissait d'une vérification exhaustive. Je me demande si vous pourriez m'aider, à l'aide de vos connaissances des comportements humains, en particulier ceux des sénateurs, à comprendre comment une telle hérésie a pu se produire, si ce n'est pas une apostasie.
Le sénateur Massicotte : La question est si facile que je vais laisser Stephen y répondre.
Le sénateur Greene : Fondamentalement, je crois que c'était la chose à faire à l'époque.
La sénatrice Cools : Mais je ne le crois pas.
Le sénateur Greene : Eh bien, je ne sais pas. En fin de compte, le premier ministre a indiqué que c'était une dépense judicieuse à long terme, car cela constituait une base sur laquelle le Sénat pourrait s'appuyer pour aller de l'avant, et que cela contribuerait à assurer à la population qu'il n'y aurait pas d'autres cas, et cetera.
Cela dit, je conviens que cela a été un exercice coûteux en temps et en efforts pour nous tous, mais en fin de compte, même si le processus ne s'est pas toujours déroulé comme nous l'aurions souhaité, je pense que c'était une bonne idée à l'époque et qu'elle semble toujours bonne aujourd'hui.
La sénatrice Cools : J'ai une autre question. Dans ce cas, comment est-il possible que vous et d'autres sénateurs en arriviez à ces conclusions étant donné que selon la Loi sur le vérificateur général, le vérificateur général est ce qu'on appelle un « titulaire d'une charge créée par la loi »? On entend toutes sortes de balivernes selon lesquelles il serait un haut fonctionnaire du Parlement, alors que ce n'est pas le cas.
Le nœud du problème, c'est que son statut ne lui accorde aucun pouvoir que ce soit pour agir ainsi. C'était contraire à la loi à laquelle il est assujetti; le seul organisme auquel il est tenu de faire rapport est la Chambre des communes. J'aimerais donc que l'on compare cela à la Constitution canadienne et aux principes constitutionnels qui sous-tendent la création du poste de vérificateur général.
Et je n'ai aucune réticence à dire publiquement que ce rapport était une charge disgracieuse contre de nombreux sénateurs innocents, travaillants et compétents, dont certains ont de longs états de service; c'est une honte et cela porte ombrage au Bureau du vérificateur général. Je peux continuer, si vous voulez.
Le sénateur Greene : Si nous voulons discuter davantage de cette question...
Le président : Stephen, j'aimerais vraiment poursuivre.
La sénatrice Cools : Nous cherchons à moderniser le Sénat, et nous acceptons de telles choses.
Le président : Je comprends votre commentaire, et j'en ai pris note.
Le sénateur McIntyre : Messieurs, je vous remercie de votre exposé et de votre excellent travail. Je n'ai pas l'intention de faire écho à tous les commentaires qui ont été faits. J'ai trouvé qu'ils étaient à la fois intéressants et fort utiles.
Nous n'en sommes qu'à notre deuxième réunion. J'ai le sentiment que nous allons dans la bonne direction.
Cela dit, sans vouloir minimiser les propositions qui ont été faites, je pense que le comité devrait étudier sérieusement la recommandation du sénateur Joyal et la question du maintien de la prérogative de la Couronne. C'est tout ce que j'ai à dire pour le moment. Merci.
La sénatrice Cools : Elle doit être maintenue. C'est la nature même d'une prérogative.
Le sénateur Tannas : J'ai deux ou trois commentaires. Premièrement, je voulais revenir aux propos de la sénatrice Stewart Olsen concernant la description de tâches. Je suis tout à fait d'accord là-dessus. Cette description de tâches ne fera sans doute pas l'unanimité, mais je pense que nous devons chercher une solution qui convient à la majorité et aller de l'avant. L'idée selon laquelle nous pouvons décider de nous-mêmes de nos activités et de la façon de dépenser l'argent des contribuables est une façon de penser digne des XIXe et XXe siècles; nous ne pouvons agir ainsi. Je pense donc que le comité devra se pencher sur la question un moment donné, et que l'énoncé de mission sera utile. Je crois qu'il faut commencer par l'énoncé de mission, puis passer à la description de tâches qui en découle.
Encore une fois, sénateur Massicotte, vous avez indiqué que le juge Binnie a fait d'excellents commentaires pour appuyer l'idée d'inclure d'autres intérêts que les questions législatives dans notre énoncé de mission sans que la situation devienne chaotique.
J'ai une question pour vous, messieurs. La dynamique a changé; il y a un an, nous n'avions pas prévu qu'une majorité de sénateurs indépendants puisse diriger le Sénat. Nous ne l'avions pas prévu. Je pense que nous sommes tous conscients de ce qui nous attend. L'idée d'un comité de sélection et le fait que certains tiennent absolument au maintien du statu quo, un souhait qui est voué à l'échec parce que la majorité est formée de sénateurs indépendants... Cela n'a rien de réaliste; des gens indépendants et sans allégeance politique, cela n'existe pas. Par conséquent, il ne sera pas possible de former des comités selon une méthode proportionnelle.
Nous ne l'avions pas envisagé à ce moment-là, mais je me demande si l'une des façons d'analyser la situation actuelle — et la situation future — ne serait pas d'élire la totalité des membres et les présidents des comités, en accordant toutefois un droit de retrait proportionnel à tout parti politique. Ainsi, les partis pourraient fonctionner comme ils l'ont toujours fait, si leurs caucus respectifs le souhaitent, mais tous les autres auraient l'occasion de participer.
Nous devrons manifestement mettre en place un mécanisme quelconque qui nous permettra de prendre des sanctions disciplinaires pour les questions liées aux présences, à la participation et à ce genre de choses, mais il y aurait un droit de retrait plutôt qu'une solution pour laquelle on propose que les lignes directrices relèvent des leaders de parti. Je suis plus que jamais convaincu que nous n'aurons pas de directives des leaders de partis et que cela pourrait entraîner des retards. J'aimerais avoir vos commentaires sur tous ces aspects.
Le sénateur Massicotte : C'est un enjeu très important. La donne a changé depuis notre réunion d'octobre. À mon avis, la solution se fera en deux étapes. L'objectif ultime, si nous y parvenons un jour, est d'éliminer les votes selon la ligne de parti. Si tout le monde est libre de voter comme bon lui semble, la question de savoir qui assurera la présidence et la vice-présidence des divers comités n'aura plus beaucoup d'importance. Il ne sera pas très important que chaque comité compte des membres prêts à défendre la position de leurs partis respectifs. Cela pourrait être sans importance, un jour. Toutefois, c'est important pour certaines personnes qui siègent au Sénat actuel, et elles tiennent à ce que leur vote soit soumis à une certaine discipline, à une certaine influence.
Je ne crois pas me tromper en disant que les dirigeants actuels de tous les partis soutiennent que les votes ne sont aucunement soumis à la discipline de parti. Nous faisons valoir que nous convainquons tout simplement les gens de la bonne décision et qu'ils y réfléchissent. Peu importe, les votes ne sont pas soumis à la discipline de parti.
Un jour, les sénateurs ne seront pas soumis à la discipline de parti, à savoir qu'une grande influence ne sera pas exercée sur eux quant à leur vote; cela devrait être purement démocratique. Autrement dit, en ce qui concerne le Comité de sélection, les présidents et les vice-présidents devraient toujours être élus par les membres du comité. Cependant, si vous vous souvenez du processus que nous avons suivi, la première résolution de ce sous-comité relativement à cette question ne disait pas « lignes directrices des dirigeants ». Ensuite, les gens ont prétendu que nous avions un problème, parce qu'ils se demandaient comment nous nous y prendrions pour nous assurer que les deux tiers des sénateurs d'un comité sont conservateurs. Comment nous assurons-nous que cela reflète proportionnellement la composition du Sénat?
Nous n'arrivions pas à trouver les mots justes; nous avons donc dit que nous laisserions les dirigeants convenir d'une structure. Par exemple, ils n'ont aucune influence sur les sénateurs qui seront élus — il y a toujours des votes —, mais ils élaborent une structure pour s'assurer que c'est proportionnel.
Je crois que c'est la première étape. Il faut conserver cette structure ou avoir une certaine forme de structure en place, parce que c'est encore important pour certaines personnes.
Par exemple, si nous avons un comité de trois sénateurs indépendants ou libéraux indépendants, certains diront que ce n'est pas juste et que cela devrait être proportionnel.
Je crois que nous avons besoin de cet aspect durant un certain temps. Nous pourrions examiner de nouveau la question dans un an ou deux et nous départir de toute structure et tenir des votes libres, mais je crois que c'est un peu prématuré pour l'instant.
Le sénateur Tannas : Au sujet de la recommandation sous sa forme actuelle, nous inclurions des lignes directrices concernant la représentation proportionnelle, selon ce que détermineraient les dirigeants. Est-ce exact?
Le sénateur Greene : Ce seraient des lignes directrices sur la proportionnalité pour refléter la composition du Sénat. C'est en gros ce que cela signifie.
La sénatrice McCoy : Et aussi la décision relative au monopole.
Le sénateur Greene : Par exemple, nous pourrions avoir une situation où les indépendants souhaitent qu'il y ait un vote, tandis que les conservateurs souhaitent que les personnes soient nommées.
Le sénateur Massicotte : Ce sera de ce parti ou de ce groupe.
La sénatrice Bellemare : Il faut sans aucun doute le reformuler autrement.
Le sénateur Greene : Nous devrons peut-être passer par là. Cela ne me plaît pas, mais nous devrons peut-être passer par là.
Le sénateur Massicotte : Avant de nous pencher sur cette question, je crois qu'il serait utile de nous demander comment gérer la question des indépendants. Je crois que nous devons nous entendre sur certains principes quant à la manière de le faire; nous pourrons ensuite modifier les recommandations. Nous devons en gros déterminer la façon dont les indépendants devraient être traités. Je crois que nous devrions les traiter de la même manière que les autres. Leur financement et leurs droits de participer devraient être les mêmes. Je crois que nous devons nous entendre sur cette question avant de l'examiner plus en détail.
La sénatrice McCoy : Ce n'est pas encore le cas, mais nous y sommes presque.
Le sénateur Eggleton : Je vous remercie tous les deux de votre exposé et de votre excellent travail dans ce dossier. J'ai participé aux séances de travail qui ont eu lieu immédiatement après les élections. De très bonnes idées en ont découlé. Certaines sont assez simples, mais le Sénat pourrait sembler plus efficace si nous le modernisions ou si nous en adoptions très rapidement quelques-unes.
Je crois que les deux idées qui méritent des études approfondies concernent la sélection des membres et des présidents des comités et du Président. Je suis d'accord avec ce qu'a dit le sénateur Joyal au sujet d'un système qui fonctionnerait avec la composition actuelle, mais nous sommes en pleine évolution. D'ici la nomination du prochain Président, ce ne sera peut-être plus aussi pertinent que ce l'est maintenant. D'autres formules pourraient être plus pertinentes dans le cas du Président ou des membres et des présidents des comités. Il est fort possible que d'ici la fin de la présente législature les sénateurs indépendants soient majoritaires au Sénat, selon le qualificatif que vous attribuez à un libéral ces jours-ci. Nous ne sommes jamais vraiment certains nous-mêmes de ce que nous sommes, mais nous sommes certains de notre philosophie.
Le sénateur Joyal : Je croyais que vous étiez un ancien maire de Toronto.
Le sénateur Eggleton : Je sais que je suis libéral, avec une minuscule, au fond de moi.
Cela importe peu, parce que la situation change; elle évolue. Nous devons déterminer ce qui pourrait fonctionner pour le moment présent, mais cela doit être flexible en vue de pouvoir l'adapter à long terme.
J'aimerais vous poser une question concernant la toute première recommandation émanant du comité, et je crois qu'elle a été acceptée dans l'ensemble. Cela concerne le projet d'énoncé de mission, le second regard objectif, les études réalisées par les comités et les différentes perspectives que nous apportons sur divers aspects, comme la Constitution; certains sont particulièrement doués dans des domaines, tandis que d'autres s'intéressent grandement à des sujets; des sénateurs soulèvent des questions utiles à l'ensemble du processus.
Il y a un aspect qui n'a pas été mentionné, et c'est de demander des comptes au gouvernement. Cela fait-il nécessairement partie de la responsabilité du Sénat? Des sénateurs ont pris la parole au Sénat il y a peu de temps pour dire qu'il faut demander des comptes au gouvernement. Je les ai entendus le réclamer haut et fort. Ce n'est pas mon opinion. Néanmoins, qu'en pensez-vous?
Le sénateur Greene : Pour ce qui est du Sénat, je suis d'avis que l'examen des projets de loi est la seule occasion où nos travaux visent au sens large à « demander des comptes au gouvernement ». C'est tout.
Le sénateur Massicotte : Je vais ajouter mon grain de sel. Je ne suis pas spécialiste, et j'aimerais demander l'opinion du sénateur Joyal. Cependant, selon mes lectures de ce qu'en disent des spécialistes, ce n'est pas notre responsabilité au Sénat de demander des comptes au gouvernement. C'est le rôle de la Chambre des communes. Le Sénat ne se prononce pas sur la confiance. Je répète seulement ce que des spécialistes en disent. Le sénateur Joyal connaît très bien le sujet. Pourrions-nous avoir votre opinion à ce sujet?
Le sénateur Joyal : Merci. Je sais que d'autres sénateurs aimeraient poser des questions, et je ne voudrais certainement pas empiéter sur leur temps, étant donné qu'il est déjà 13 h 40. Toutefois, c'est une question que nous pourrions examiner. Ce n'est pas une manière pour moi de me défiler. J'ai bel et bien une opinion sur la question.
Cet enjeu a été soulevé lors des séances de travail. Lorsque nous accueillerons le prochain panel devant le comité, nous pourrions lui poser cette question en premier. Je peux évidemment participer à cette discussion, mais je préférais, monsieur le président, poursuivre le tour de table. Merci de la perche tendue, mais je crois que ce serait préférable de faire ainsi.
[Français]
La sénatrice Tardif : Je vais poser une brève question aux deux membres et ensuite apporter un commentaire sur une chose qui a été dite. D'abord, je tiens à vous remercier et à vous féliciter. J'étais également présente à la session du mois d'octobre, où j'ai pu constater l'excellent travail qui a été accompli. Je pense que nous sommes arrivés à un consensus sur certaines recommandations.
Cela dit, seuls 28 questionnaires ont été remplis, ce qui représente environ 25 p. 100 des répondants. Avez-vous le sentiment que les recommandations, qui ont fait l'objet d'un consensus chez ceux et celles qui ont répondu au questionnaire, susciteraient aussi l'engagement des autres sénateurs qui n'ont pas participé au questionnaire? Autrement dit, les autres 75 p. 100 de sénateurs seraient-ils d'accord avec les 25 p. 100 qui ont répondu au questionnaire sur l'ensemble des recommandations pour lesquelles nous avons obtenu un consensus?
D'autre part, j'aimerais faire un commentaire sur la description de tâches. Je deviens assez nerveuse lorsqu'il est question de description de tâches, car, lorsqu'on parle du rôle des sénateurs — dont traitent la Constitution du Canada et le jugement récent de la Cour suprême —, je crois qu'il est assez défini. Lorsqu'on parle d'un rôle législatif, d'un rôle d'enquête, d'un rôle de représentation, soit dans les régions ou pour les groupes minoritaires, on trace alors les grandes lignes de notre travail. Lorsqu'on essaie de décrire davantage la description de tâches, chacun de nous interprète son rôle de façon différente. Il serait difficile d'arriver à une description de tâches beaucoup plus précise. C'est mon commentaire, et je vous laisse avec la question que je vous ai posée.
[Traduction]
Le sénateur Greene : Je remets en cause votre 25 p. 100, parce qu'il n'y avait pas 105 sénateurs. Seulement 82 pouvaient participer aux séances; cela s'approche donc plus du tiers.
Le sénateur Tannas : Est-ce que 40 sénateurs ont répondu à votre questionnaire?
Le sénateur Greene : Nous avons reçu 28 réponses, et 40 sénateurs ont participé aux séances. Je ne connais pas la répartition entre les partis politiques des 28 réponses reçues, mais plus du tiers du caucus conservateur et plus de la moitié du caucus libéral étaient présents. C'était très représentatif à l'époque. Par contre, la donne a depuis changé, et je crois donc que les résultats pencheraient un peu plus du côté du changement dans un grand nombre de domaines. Si le questionnaire était distribué aujourd'hui, nous aurions un plus grand nombre de réponses. Il était difficile pour certains de répondre aux questions.
Premièrement, je ne sais pas si tout le monde nous faisait confiance, à Paul et à moi. Il y avait cet aspect. Deuxièmement, nous étions au beau milieu d'une élection générale, et les sentiments partisans étaient forts. Certains ont décidé presque d'un commun accord de ne pas y participer. D'autres exerçaient des pressions pour que les gens n'y participent pas. De nombreux sénateurs y ont tout de même participé.
Aujourd'hui, ces pressions se sont dissipées.
La sénatrice Tardif : Y avait-il un sentiment que nous donnerions suite à certaines des recommandations qui font l'unanimité?
Le sénateur Greene : À mon avis, oui.
Le sénateur Massicotte : À la fin des trois jours, nous avons demandé à tout le monde ce qu'étaient la prochaine étape et le mandat. Nous avons convenu de ce que nous ferions concernant les médias. La prochaine étape est de rencontrer individuellement les dirigeants des caucus. Nous ne ferons pas de commentaires concernant ces rencontres pour des raisons de confidentialité, mais les dirigeants des deux caucus ont depuis dit publiquement qu'ils étaient en gros d'accord avec la modernisation du Sénat. Ce n'est pas une approbation unilatérale. Ils approuvaient dans l'ensemble nos recommandations, sans en divulguer les détails. Nous avons reçu un très vaste appui.
Le sénateur Joyal : J'aimerais vous amener à réfléchir au sujet de la partisanerie au Sénat. J'essaye de m'imaginer que, dans un cas extrême, le Sénat pourrait être composé de 105 sénateurs indépendants. Cela semble être la logique utilisée actuellement en ce qui a trait aux nominations.
En nous fondant sur ce que nous avons appris de nos expériences passées et présentes, quelle est l'utilité de l'allégeance ou de l'affiliation politique au Sénat? Je suis contre l'idée que le Parti libéral me dise comment voter, et j'ai déjà été à l'encontre de la volonté de mon parti. Je ne m'en cache pas. Je parle d'enjeux où je ne pouvais pas suivre la ligne de parti, pour le dire ainsi. Même si je suis contre la ligne de parti, je crois que la présence d'un parti ou d'un regroupement de personnes qui partagent les mêmes vues sous une affiliation politique a sa place au Sénat. Voici pourquoi.
Le système de Westminster se fonde sur un gouvernement et une position. Il y a le gouvernement en place et le gouvernement en attente, soit l'opposition. Le gouvernement en attente est résolu dans ses décisions, parce qu'il prétend qu'il formera, un jour, le gouvernement en place. Cela permet de maintenir l'équilibre qui assure l'existence du système. L'existence des partis est essentielle en vue de préserver le principe du gouvernement responsable. Si le gouvernement tombe, il y a immédiatement un autre groupe qui est prêt à former le gouvernement. C'est l'essence même du système.
Comme vous l'avez justement dit, le Sénat ne peut pas faire tomber le gouvernement. Un projet de loi du gouvernement peut être rejeté par le Sénat, mais le gouvernement ne démissionnera pas le lendemain. Le principe du gouvernement responsable n'existe pas au Sénat. Cependant, ce qui existe au Sénat en ce qui a trait à la présence des partis, c'est que le parti en place, minoritaire ou majoritaire, au Sénat a tout intérêt à s'assurer du bon fonctionnement de l'institution, c'est-à-dire veiller au bon déroulement des délibérations et à la présence de suffisamment de membres du parti pour que les délibérations aient lieu. Il faut respecter une gamme de règles en ce qui concerne la régie interne, l'intégrité publique, l'éthique, et cetera.
Il y a une institution au Sénat qui s'en charge. Ces règles sont respectées, tant qu'il y a une opposition qui peut être majoritaire ou minoritaire au Sénat et qui a une conscience ou une responsabilité similaire. Si cela disparaît complètement, nous ne sommes plus que 105 personnes. En tant que sénateur, quelle est ma responsabilité à l'égard de l'ensemble de l'institution? Suis-je responsable de m'assurer qu'il y a suffisamment de sénateurs présents chaque jour dans les comités pour entendre les délibérations et protéger la crédibilité de l'institution?
Je trouvais intéressante l'idée d'être plus indépendant, mais je me considérais comme suffisamment indépendant, même si je suis membre en règle d'un parti politique. Si nous décidions d'abolir la présence de tous les partis, ce qui est essentiellement des groupes de personnes qui partagent les mêmes vues, qui sera responsable de l'ensemble de l'institution à tout moment de son existence? Voilà en gros mon dilemme à ce stade.
Même si je suis pour un groupe de sénateurs indépendants qui est structuré et qui participe aux comités et aux délibérations, ces sénateurs votent aux élections, lisent les journaux et suivent les nouvelles. Ils sont au courant des décisions relatives aux enjeux de l'heure sur les scènes internationale, nationale, régionale et locale. Le Sénat est une institution, et quelqu'un doit se charger de son bon fonctionnement et de la protection de sa crédibilité. Cette responsabilité est liée d'une certaine manière à la présence d'un parti qui représente le gouvernement et d'un autre parti qui prétend l'être si l'autre tombe. Je répète que cette question me tiraille. Même si vous y avez réfléchi et que je suis sympathique à l'idée d'avoir des indépendants — il m'arrivait parfois d'avoir l'impression d'en être un d'une certaine manière —, j'essaie de trouver un juste équilibre en vue de l'objectif de modernisation du Sénat.
Le président : C'est très bien, mais nous devons arriver à une conclusion. Dans tout ce que j'ai lu, il n'était jamais question d'éliminer la partisanerie. Il était toujours question d'en avoir moins. C'est ce que vous voyez; c'est un point intéressant.
J'ai une idée. Nous allons organiser une séance non officielle au cours de laquelle nous discuterons de deux ou de trois sujets que nous pourrons vraiment explorer en détail sans être contraints par le temps. Vous recevrez un avis à ce sujet, et j'espère que vous y participerez tous.
Je tiens à vous remercier tous les deux de ce que vous avez fait. Vous avez organisé une conférence de trois jours, puis vous avez rédigé un rapport et formulé des recommandations. Il ne faut pas non plus passer sous silence l'aide qu'ont apportée à cet égard les sénateurs Tannas et Campbell. C'est digne de mention. Vous avez fait un excellent travail, et nous vous en remercions énormément.
(La séance est levée.)