Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts
Fascicule no 4 - Témoignages du 10 mars 2016
OTTAWA, le jeudi 10 mars 2016
Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts se réunit aujourd'hui, à 8 h 2, pour poursuivre son étude sur les priorités pour le secteur agricole et agroalimentaire canadien en matière d'accès aux marchés internationaux.
Le sénateur Ghislain Maltais (président) occupe le fauteuil.
[Français]
Le président : Le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts reprend ses audiences ce matin. Mon nom est Ghislain Maltais, je suis un sénateur du Québec et président du comité. Je vais demander à mes collègues de se présenter, en commençant par notre vice-président.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : Sénateur Terry Mercer, de la Nouvelle-Écosse.
La sénatrice Merchant : Bonjour. Je m'appelle Pana Merchant, de la Saskatchewan.
Je suis désolée, monsieur le président, mais je vais devoir partir très bientôt parce que je préside le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation. La séance commence à 8 h 30, de l'autre côté, dans l'édifice du Centre. Je vais rester pour un petit moment seulement. J'en suis désolée.
[Français]
La sénatrice Tardif : Bonjour. Je suis Claudette Tardif, de l'Alberta.
[Traduction]
La sénatrice Unger : Betty Unger, de l'Alberta.
[Français]
Le sénateur McIntyre : Bonjour. Je suis Paul McIntyre, du Nouveau-Brunswick.
Le sénateur Dagenais : Bonjour. Je suis Jean-Guy Dagenais, du Québec.
[Traduction]
Le sénateur Ogilvie : Kelvin Ogilvie, Nouvelle-Écosse.
[Français]
Le président : Aujourd'hui, nous accueillons, du Syndicat des producteurs de bleuets du Québec, M. Marc Larouche, président. Bienvenue, monsieur Larouche. Nous accueillons aussi, de Fruit d'Or, pour nous parler des canneberges, M. Martin Lemoine, président, et bien sûr, de la Fédération des producteurs acéricoles du Québec, cette grande entreprise québécoise, M. Simon Trépanier.
Merci, messieurs, d'avoir accepté notre invitation. C'est très important pour notre rapport. Je crois que chacun des membres du comité a un grand intérêt à vous rencontrer ce matin. Nous disposons d'une heure avec vous. Afin de nous assurer que tout le monde puisse poser des questions, je vais vous demander un peu de discipline dans la longueur de vos mémoires, de même qu'à mes collègues, pour que les questions et réponses soient courtes. Ainsi, chacun pourra poser des questions, qui seront fort pertinentes au secteur agricole.
Monsieur Trépanier, à vous la parole.
Simon Trépanier, directeur général, Fédération des producteurs acéricoles du Québec : Bonjour, honorables membres du comité sénatorial. C'est un grand honneur pour moi aujourd'hui de venir vous parler du sirop d'érable du Canada et du Québec. D'ailleurs, ma présentation, qui saura être la plus courte possible, est accompagnée d'un document en français, qui sera traduit au cours des prochains jours pour en permettre une lecture plus approfondie.
J'aimerais soulever trois points. Je vous parlerai d'abord de ce qu'est la Fédération des producteurs acéricoles du Québec. Puis, je vous parlerai du contexte d'exportation de notre « or blond » canadien. Enfin, je vous ferai part de quatre demandes afin d'aider le Canada à accroître ses parts de marché et l'exportation des produits de l'érable partout dans le monde.
Qu'est-ce que la Fédération des producteurs acéricoles du Québec? Nous sommes une fédération provinciale qui regroupe 12 syndicats locaux. Le Québec est divisé en 12 secteurs. Chaque secteur compte des producteurs, qui nomment des représentants à l'échelon provincial au Québec. Nous comptons 7 300 entreprises membres, qui regroupent 13 500 producteurs de sirop d'érable au Québec. Le Québec représente environ 90 p. 100 de la production canadienne de sirop d'érable. Nous sommes également coordonnateurs du Comité aviseur canadien de l'érable, un regroupement des quatre provinces qui font du sirop d'érable, soit la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, le Québec et l'Ontario. L'Ontario et le Nouveau-Brunswick sont deux autres provinces qui produisent une bonne quantité de sirop d'érable pour l'exportation; la Nouvelle-Écosse, dans une proportion moindre. Ces quatre associations font partie du Comité aviseur canadien de l'érable. C'est également au nom de ce comité que je présente les enjeux au comité sénatorial en termes d'exportation.
C'est avec beaucoup de plaisir que je vous parle de l'année 2015, une année mémorable pour le sirop d'érable, parce que nous avons fracassé deux records. En effet, l'année 2015 marque pour le Canada des exportations record de produits de l'érable dans le monde. Le précédent record datait de 2007. Or, selon les données de Statistique Canada publiées au mois de janvier dernier, nous avons battu ce record. Près de 93 millions de livres ont été exportées partout dans le monde. Cela a permis de diffuser l'image du Canada sur plusieurs continents.
Souvent, on se demande, à la blague, ce que les gens à l'extérieur du Canada savent de notre pays. On parle de la Gendarmerie royale du Canada, de certains emblèmes, comme le castor et, souvent, le sirop d'érable n'est pas loin derrière. Cela nous sert énormément justement pour faire fructifier l'économie. D'ailleurs, au-delà de ces records, vous remarquerez dans les tableaux qui figurent à notre document, à la page 6, des exportations de 93 millions de livres. À la page 7, vous verrez que le Québec a fracassé, en 2015, ses records de vente de sirop en vrac.
La fédération gère une réserve stratégique de sirop. Nous avons une usine-entrepôt ou nous accumulons le sirop lorsque dame nature est très généreuse. Lorsqu'elle l'est moins, nous nous servons du sirop en réserve pour alimenter le marché et éviter une rupture de stock, qui pourrait s'avérer extrêmement déstructurante dans un marché où l'approvisionnement doit être parfait pour l'exportation.
À la page 7, vous voyez les chiffres de vente de l'agence qui s'élèvent à 103 millions de livres. Encore une fois, ce chiffre révèle, tant en termes d'exportations canadiennes qu'en termes de ventes pour l'agence, un record en 2015. Visiblement, nous sommes sur une belle lancée pour les produits de l'érable.
L'érable canadien n'a pas toujours été à l'avant-scène. Vous remarquerez à la page 9 un intéressant graphique qui illustre la production des États-Unis par rapport à la production canadienne depuis 1840. On constate que, avant 1930, les Américains produisaient beaucoup plus de sirop d'érable que les Canadiens. Par contre, depuis 1930, c'est le contraire, les Canadiens se sont mis à développer le secteur de l'érable.
Au cours des 15 dernières années, la progression des entreprises d'ici est très intéressante. Je tiens à mentionner de très fortes augmentations du nombre d'entailles au Nouveau-Brunswick, grâce à l'ouverture du développement de terres publiques dans ce secteur. Au Québec, on constate l'ajout de 11 millions d'entailles depuis 15 ans. En Ontario, il y a une augmentation grandissante des ventes directement au consommateur, parce que la population locale est très importante. Ottawa et Toronto sont de très bons marchés pour la vente des produits de l'érable.
Que représente l'érable au Canada? C'est grosso modo 13 000 emplois équivalents temps plein comme l'illustrent les tableaux à la page 9. On sait que l'acériculture n'occupe pas tout le monde à temps plein. Toutefois, lorsqu'on ramène cet emploi en équivalent temps plein, cela correspond à 13 000 emplois au Canada, ce qui est considérable. En annexe figure un rapport de 2013 réalisé par une firme indépendante, qui permet de documenter l'apport de l'érable à l'économie canadienne.
À la page 10, vous voyez l'impact sur le produit intérieur brut. On parle de trois quarts de milliards de dollars. Évidemment, les productions laitières ou de porc ont des chiffres plus élevés. Cependant, à trois quarts de milliards de dollars d'impact sur l'économie canadienne, on ne parle plus d'artisanat, comme on le faisait dans les années 1960 ou 1970. Nous sommes passés à une industrie qui amène beaucoup de capitaux à l'échelle canadienne.
En terminant, quant aux revenus de taxation, forcément avec le commerce viennent les taxes perçues à l'échelle provinciale, fédérale et locale. Selon une firme d'agroéconomistes, qui a mené une étude en 2013, l'impact est de 136 millions de dollars de retour direct à l'État en taxes diverses.
Cela étant dit, du point de vue de la présentation générale, il ne faut pas baisser les bras. Il faut continuer à développer. En ce qui concerne l'exportation, nous sommes confrontés à quatre défis très importants. On dit souvent qu'une photo vaut 1 000 mots. Je vous invite à regarder la photo à la page 12. Ce produit est disponible en France. Il s'appelle Canadian Maple Hut Organic Canadian Syrup (sirop d'érable bio-organique). Vous voyez l'image d'une cabane à sucre avec deux érables, les fameux seaux et la feuille d'érable. Ce produit ne contient que 5 p. 100 de sirop d'érable. On est en présence de concurrence frauduleuse à l'étranger, à tort ou à raison, ce qui cause beaucoup de problèmes à l'industrie acéricole. Les gouvernements fédéraux, par l'entremise des programmes Agri-marketing et Agri-innovation, entre autres, ont beaucoup aidé l'industrie canadienne des produits de l'érable à exporter. D'autres pays font la promotion de produits qui ne contiennent pas ou peu de sirop d'érable. Nous croyons que le gouvernement canadien devrait produire un rapport par l'entremise de votre comité sénatorial pour encourager le Canada à obtenir la reconnaissance internationale pour son sirop d'érable.
Cette reconnaissance peut être faite au moyen d'un outil qui appartient à l'ONU : le Codex Alimentarius. Il s'agit d'un document provenant de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture qui, dans le cadre des accords internationaux, aide les divers gouvernements à statuer sur des descriptions de produits. À titre d'exemple, qu'est-ce que la canneberge, le bleuet, le miel, le lait? Entre pays, il est important de définir les produits le plus précisément possible. À l'heure actuelle, le sirop d'érable ne fait pas partie des produits décrits dans le Codex Alimentarius de l'ONU. En tant que Canadiens, l'une des mesures prioritaires est d'encourager l'inscription du sirop d'érable au Codex afin qu'à l'avenir les législateurs d'autres pays puissent reconnaître notre produit à juste titre. C'est pourquoi nous croyons que le comité sénatorial pourrait nous aider dans cette démarche pour éviter des aberrations comme celles que nous avons mentionnées.
Abordons maintenant le développement des marchés. Les États-Unis représentent notre marché principal de sirop d'érable, car 60 p. 100 de nos exportations y sont destinées. La concurrence règne autour de ce produit. Les Américains comme les Canadiens cherchent à s'approvisionner, d'abord et avant tout, avec un produit local. Donc, le Canada ne doit pas s'asseoir sur ses lauriers, compte tenu de la conjoncture, et doit chercher à diversifier ses marchés, parce que nous ne pouvons plus compter uniquement sur les États-Unis. Nous devons exporter notre produit vers d'autres pays. La fédération, avec l'aide du Programme Agri-marketing, a financé des projets ailleurs dans le monde, notamment au Japon, au Royaume-Uni et en Inde. Depuis un an et demi, nous faisons de la promotion du sirop d'érable canadien en Inde. Nous nous tournons vers d'autres pays comme l'Allemagne, la France et l'Australie, qui représentent des marchés intéressants à développer. Par contre, compte tenu de la valeur du dollar canadien sur ces marchés, notre pouvoir d'intervention a diminué. C'est excellent pour le prix du produit lorsqu'on l'exporte. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'acheter de la publicité dans d'autres pays, nous n'avons pas la même marge de manœuvre qu'auparavant. Dans ce contexte, Agriculture et Agroalimentaire Canada devrait revoir ses priorités dans ce dossier pour s'assurer que notre pouvoir de diversification du marché et l'aide du gouvernement soient maintenus. Il s'agit de notre deuxième demande.
Troisièmement, abordons la question de la qualité du sirop d'érable à l'exportation. Comme vous le savez, le sirop d'érable n'est pas un produit à haut risque pour la santé des consommateurs. Nous ne sommes pas en présence de la viande ou du lait, des produits très fragiles qui peuvent facilement être contaminés. Le sirop d'érable est un produit stable qui s'exporte facilement. Depuis 15 ans, l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) s'est retirée de la vérification du sirop d'érable pour laisser le soin au secteur privé d'inspecter ce produit. Cela peut nuire à l'image du Canada. Il faut se rappeler qu'en 2012, l'important vol de sirop d'érable a été détecté par la Sûreté du Québec. Plus de 6 millions de livres de sirop d'érable, soit 19 millions de dollars, ont été volés dans les réserves stratégiques. Trente personnes ont été arrêtées, dont certaines ont avoué leur culpabilité. L'enquête va bon train, mais l'image du Canada a été entachée. Pourquoi? Parce que les voleurs utilisaient des contenants non alimentaires pour exporter ce produit. Heureusement, ces éléments n'ont pas été rendus publics. Il n'en demeure pas moins que les voleurs ont employé des méthodes qui n'étaient pas de haut niveau sur le plan alimentaire. Ainsi, l'ACIA ne doit pas baisser les bras. Elle doit redorer l'image du sirop d'érable et s'assurer que le produit est exporté dans des contenants conformes.
Enfin, la page 16 porte sur les outils de mise en marché dont se sont dotés les producteurs québécois. Au Québec, une loi autorise les producteurs à se donner des leviers économiques pour coordonner et assurer un approvisionnement constant de l'industrie. Ces outils ont été mis en place — entre autres, la réserve stratégique depuis 2000 — et ont porté leurs fruits. On constate la stabilité du marché, du prix et de l'approvisionnement de l'industrie de transformation, ainsi que l'augmentation des exportations. Ce sont grâce à ces piliers que le Québec et le Canada a réussi à se développer.
Forcément, les producteurs des autres provinces, sans contribuer directement aux outils du Québec, en bénéficient. C'est au nom de toute la filière canadienne que nous croyons que ces outils sont très structurants. Avant les années 1990 et 2000, nous étions à la merci de dame nature. Quand la production était bonne, les prix chutaient en raison des surplus de stocks. Quand la production était mauvaise, en raison de dame nature, les prix augmentaient du simple au triple, ce qui était très déstructurant pour l'industrie. Mettez-vous à la place d'une entreprise qui veut exporter ailleurs. Si elle n'a aucune capacité d'assurer son approvisionnement, comment peut-elle réussir à développer un nouveau marché, par exemple en Suède ou en Australie, s'il n'y a aucune garantie d'approvisionnement? La réserve, qui est un pilier majeur, permet de garantir cet approvisionnement et assure à toutes les parties prenantes de s'entendre sur un prix stable pendant deux ou trois ans.
En février dernier, le Québec, par l'entremise de son ministre de l'Agriculture, M. Pierre Paradis, a commandé un rapport externe au sociologue M. Florent Gagné. Ce rapport, qui a été déposé au Québec, a semé un peu d'inquiétude dans les industries acéricoles québécoise et canadienne. Pourquoi? Parce que ce rapport a compromis les outils de mise en marché collective. Dans son rapport, le sociologue recommandait d'alléger et de retirer certains de ces outils, ce qui nous a ramenés à l'époque des années 1990 où très peu d'outils existaient. L'industrie acéricole québécoise s'oppose aux recommandations contenues dans ce rapport. Sans vouloir en faire un débat — ce n'est pas la mission du comité sénatorial —, je vous invite à lire brièvement les analyses et les recommandations de ce rapport et d'examiner sérieusement ce dossier. À l'heure actuelle, nous croyons qu'en traitant ce dossier de cette façon, le gouvernement du Québec risque de provoquer une instabilité du marché des produits canadiens de l'érable. Ce ne sera pas l'ensemble des consommateurs et des parties prenantes qui en bénéficieront, mais plutôt ceux qui souhaitent des règles de contrôle et de supervision moins sévères. Je termine ainsi mon exposé et je vous remercie de votre attention.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Trépanier. Nous passons maintenant à M. Marc Larouche, président du Syndicat des producteurs de bleuets du Québec.
Marc Larouche, président, Syndicat des producteurs de bleuets du Québec : Merci. Tout d'abord, je voudrais vous remercier de l'invitation que vous nous avez faite de vous expliquer un peu ce qu'est le bleuet sauvage au Québec et son importance.
Je ne suivrai pas précisément le texte qui vous a été remis, et je vais plutôt parler dans mes mots. Cependant, vous retrouverez l'essentiel de mon discours dans le texte.
Je vais tout d'abord vous expliquer ce qu'est le bleuet sauvage, pour bien le différencier. Je vais parler un peu de l'organisation qui représente les producteurs, le Syndicat des producteurs de bleuets du Québec, et je vais brosser le portrait du secteur, du marché, et de la problématique et des besoins des producteurs.
Pour commencer, qu'est-ce que le bleuet sauvage? Je voudrais d'abord préciser que ce n'est pas celui que l'on voit souvent dans les comptoirs d'épicerie, dans des petits contenants transparents, qui sont des bleuets qui proviennent soit des États-Unis ou du Chili, entre autres. Le bleuet sauvage est un bleuet qui est produit seulement dans des endroits particuliers où le bleuet était déjà présent dans la nature. Le bleuet sauvage, ce n'est pas un plant qu'on met en terre. On part d'un endroit où il y avait déjà la présence de bleuets sauvages dans le sous-bois, on rase la forêt et on fait des aménagements physiques qui permettent aux bleuets sauvages en place de s'installer à 100 p. 100. Ensuite, on aménage l'endroit pour en faire la cueillette avec des équipements mécanisés. Il faut donc enlever les souches, les branches, les bosses pour pouvoir cueillir sans difficulté. On doit attendre environ 10 ans avant d'avoir une bleuetière bien implantée. Cela prend environ 10 ans pour partir d'une forêt jusqu'à une bleuetière avec un bon rendement.
Je voudrais préciser que la cueillette du bleuet sauvage ne se fait que sur 50 p. 100 de la superficie. En tout temps, la moitié de la superficie est en production de végétation, tandis que l'autre est en production de bleuets. C'est l'inverse l'année suivante. C'est donc 50 p. 100 de la superficie qui produit du bleuet chaque année, l'autre moitié étant en production de végétation. Tous les deux ans, après la cueillette, on fauche la bleuetière jusqu'au ras du sol, et la végétation s'installe lors du premier été. Le deuxième été, ce sont des fruits. C'est de cette façon que l'on obtient le meilleur rendement.
J'aimerais préciser que l'on travaille très fort pour différencier le bleuet sauvage du bleuet en corymbe, parce que le bleuet sauvage a des propriétés particulières. Tout le monde connaît bien les propriétés santé et nutraceutiques, en particulier, du bleuet sauvage, d'où l'importance de le faire connaître, et de le produire, bien sûr. C'est une demande qui en croissance à travers le monde.
L'organisation représentant les producteurs est le Syndicat des producteurs de bleuets du Québec, qui existe depuis 30 ans. Quand il a été créé, le bleuet sauvage était produit essentiellement au Saguenay—Lac-Saint-Jean, à l'origine, d'où le fait que notre plan conjoint s'applique uniquement à la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean et un peu au nord de la Mauricie. Bien entendu, l'objectif est d'inclure tous les producteurs de bleuets sauvages, entre autres ceux de la Côte-Nord, une région qui est en développement, ainsi que d'autres régions comme l'Abitibi et la région de Charlevoix.
Nous avons un plan conjoint, une mise en marché collective. Le syndicat regroupe environ 300 producteurs, ce qui représente environ 85 p. 100 de la production de bleuets sauvages au Québec, dans la région du Saguenay—Lac-Saint- Jean.
Parmi les producteurs, on compte neuf coopératives de cueilleurs de bleuets. Ce sont de grands territoires de 1 000 à 2 000 acres qui ont été développés et où on a créé une coopérative, dans chaque communauté. Au Lac-Saint-Jean, il y en a neuf. C'est une façon intéressante de permettre à plusieurs personnes d'être membres de la coopérative, et on parle de 30 à 40 personnes par coopérative dans chaque communauté. Les gens doivent cueillir, il y a une gestion qui se fait de la coopérative, et les revenus sont retournés aux personnes de la communauté. C'est un bon principe qui donne accès à tout le monde.
Notre syndicat est affilié à l'Union des producteurs agricoles depuis 2012 et nous avons un siège au conseil général de l'Union des producteurs agricoles.
Je vous donne maintenant le portrait du secteur québécois, parce que, tout à l'heure, je parlais du syndicat au Saguenay—Lac-Saint-Jean. Au Québec, on parle d'une superficie totale d'environ 80 000 acres, soit à environ 35 000 hectares, qui sont situés à 60 p. 100 sur des terres du domaine de l'État, donc des terres publiques, et environ à 40 p. 100 sur des terres privées. La répartition dans l'ensemble du Québec est environ 85 p. 100 au Saguenay—Lac-Saint-Jean, 12 à 15 p. 100 sur la Côte-Nord, et 5 p. 100 dans le reste du Québec, y compris en Abitibi, laquelle commence également à se développer pour la production de bleuets sauvages.
Au total, au Québec, on parle d'environ 500 producteurs. Au Saguenay—Lac-Saint-Jean, il s'agit de la deuxième production agricole en importance. Ce n'est plus tout à fait la cueillette artisanale. C'est donc la deuxième cueillette en importance après l'industrie laitière. Vous avez un dépliant qui fait ressortir l'aspect économique, qui est très sommaire. Disons que la valeur de la production à la ferme représente environ 50 millions de dollars. Si on inclut le volet de la transformation, on parle de 100 millions de dollars supplémentaires. Quant à la contribution au produit intérieur brut, il s'agit de 90 millions de dollars. Ce que je trouve intéressant, c'est que la vente de nos bleuets à l'extérieur du pays permet d'apporter de l'argent neuf aux régions. Sur le plan économique, c'est très positif pour les régions. Cela représente environ 1 000 emplois à temps plein pour l'instant.
En ce qui a trait à la transformation, au Québec, il y a principalement deux entreprises qui font la transformation du bleuet sauvage. Je voudrais préciser que 98 p. 100 de cette transformation est congelée. Donc, 98 p. 100 du produit des deux usines de transformation qui sont situées au Saguenay—Lac-Saint-Jean est congelé.
Il faut dire que le bleuet sauvage ne se conserve qu'environ deux semaines à l'état frais. Il est donc difficile de faire la mise en marché du produit frais, sur une courte période dans l'année. Étant donné que c'est un plant sauvage, on ne peut pas le planter ailleurs dans le monde. Si on pouvait le planter dans l'hémisphère Sud, on pourrait à ce moment-là mettre sur le marché du bleuet toute l'année, mais ce n'est pas possible. C'est un produit sauvage, et j'insiste sur ce fait, parce qu'ils sont rares, aujourd'hui, les fruits qu'on peut acheter à l'épicerie qui ont la caractéristique d'être sauvages, avec toutes les propriétés du bleuet sauvage. C'est la nature qui a développé ce fruit à 100 p. 100, et on ne le modifie aucunement. Ce sont les espèces sauvages qu'on cueille.
Pour parler rapidement du marché, vous avez, dans le dépliant, un tableau qui indique où vont nos bleuets : 15 p. 100 du marché du bleuet sauvage congelé est consommé au Canada, et 85 p. 100 est exporté dans une trentaine d'autres pays.
Si vous regardez le schéma que vous avez ici, au cours des trois dernières années, environ 50 p. 100 de la production était exportée aux États-Unis; 35 p. 100 en Europe, 15 p. 100 en Asie, et le reste dans d'autres pays. Donc, la demande est en croissance, ce qui est principalement dû aux propriétés santé. Il y a des groupes d'Asiatiques qui viennent chaque année nous visiter, en autre des Chinois et des Japonais, et aussi des Allemands. Ils viennent voir ce qu'est le bleuet sauvage, et ils sont toujours très impressionnés. En particulier, le Japon est très exigeant en termes de qualité du produit. Il cherche des fruits de la meilleure qualité possible, car il apprécie beaucoup la qualité.
Ce que je peux vous dire aussi, c'est qu'au Québec, il y a encore un potentiel de développement de bleuetières, mais il faut tout de même travailler très fort pour le faire connaître et surtout pour le différencier du bleuet en corymbe qui, lui, est en production mondiale, qui accapare les marchés et qui, finalement, devient un compétiteur.
Sans vouloir nuire à personne, nous pensons qu'il faut appuyer la Wild Blueberry Association of North America (WBANA) et Agri-marketing Canada, qui font la promotion du bleuet sauvage aux quatre coins de la planète. Nous devons continuer à les appuyer, parce que nous allons nous faire écraser par le bleuet en corymbe, qui est en très forte production partout dans le monde.
Mon cinquième point concerne la problématique du bleuet sauvage et les besoins des producteurs. Il y a huit recommandations que j'aimerais pouvoir résumer. D'abord, je précise que la production de bleuet sauvage, au Québec, est difficile. Si vous regardez le tableau devant vous, vous voyez des courbes et vous remarquerez que la courbe du bleuet sauvage est en dents de scie. Certaines années sont très bonnes et d'autres sont très mauvaises, et il faut éviter cela. Il faut en arriver à diminuer ces fluctuations de mise en marché. Ce qui se produit très souvent, c'est qu'une année où on a du bleuet, les clients les aiment et en redemandent, et l'année suivante, il n'y a plus de bleuets, ou on n'en a pas assez. Donc, c'est un problème.
Le président : Je vais vous demander d'accélérer, car le temps file.
M. Larouche : J'en étais à mon dernier point. Donc, le principal problème, c'est le gel. En moyenne, on a des pertes d'environ 50 p. 100 de notre potentiel, qui sont dues au gel des fleurs. Au printemps, ce sont les fleurs qui, lors d'une matinée froide, vont tout simplement geler, et le fruit est détruit. C'est le principal problème. Ce sont ces fluctuations qui font que les producteurs ont de la difficulté à maintenir leur entreprise et à défrayer les coûts de production.
Il faudrait une protection mieux adaptée par la financière agricole pour supporter ces fluctuations. On sait que le principe d'évaluation est toujours basé sur un historique qui témoigne de nos difficultés. On a aussi besoin de beaucoup de recherche. La production du bleuet sauvage est jeune, il y a seulement environ 30 ou 40 ans tout au plus qu'on produit commercialement du bleuet. La contribution du Syndicat des producteurs de bleuets du Québec a été de 1,25 million au cours des 10 dernières années. Cela démontre l'importance d'appuyer davantage la recherche, parce qu'on a besoin d'améliorer nos rendements.
Les rendements au Québec sont à peu près à 50 p. 100 de ceux du Nouveau-Brunswick, particulièrement à cause du gel. Il faut améliorer la productivité et les rendements, parce qu'actuellement, nous ne sommes pas compétitifs. Je dirais même que nous sommes environ au tiers du rendement des bleuetières sauvages du Maine.
Aussi, il serait souhaitable de mettre en place un centre d'expertise. Au Saguenay—Lac-Saint-Jean, il y a la ferme expérimentale de Normandin, où travaillent des chercheurs. Il n'y a qu'un chercheur qui travaille sur le bleuet actuellement et, à mon avis, ce n'est pas suffisant. Il faut profiter de cette structure pour créer une équipe de chercheurs pouvant contribuer à l'amélioration des rendements et de la production du bleuet sauvage.
Évidemment, il faut appuyer davantage la promotion internationale par la WBANA, l'association dont j'ai parlé plus tôt. Il faut également assurer le maintien des fermes familiales, qui sont très importantes pour l'économie des régions. Vous connaissez la tendance sur le plan agricole; c'est l'accaparement des terres, c'est la grosse entreprise qui achète. Le principe de la ferme familiale dans le secteur du bleuet est important, car il crée une dynamique. Il crée aussi une passion, un intérêt et une fierté. Le jour où il n'y aura plus de fermes familiales, c'est toute une dynamique de collectivités qui risque d'être affectée.
Ma sixième recommandation, c'est bien sûr de poursuivre les démarches de ratification d'accords bilatéraux avec les autres pays. Je mentionne la Chine, parce que nos transformateurs nous disent parfois que, si les barrières tarifaires avec la Chine étaient levées, ce serait extraordinaire pour le marché du bleuet sauvage. Donc, l'élimination des barrières tarifaires serait excellente pour notre produit, étant donné que 85 p. 100 de la production est vendue à l'extérieur. On devrait aussi appuyer davantage les groupes-conseils. Étant donné qu'il s'agit d'une jeune production et qu'on travaille avec un produit sauvage, les groupes-conseils sont très importants pour nous aider à améliorer nos pratiques culturales.
Finalement, il est important de favoriser la consommation de ce fruit, que ce soit au sein des institutions publiques comme les écoles, les hôpitaux et les centres communautaires, et que le gouvernement encourage la consommation du bleuet sauvage chez les jeunes en particulier. Tout cela aurait pour avantage d'encourager l'industrie du bleuet sauvage tout en diminuant les coûts de soins de santé, je peux vous le garantir. Je termine là-dessus.
Le président : Merci beaucoup, monsieur Larouche. Nous entendons maintenant M. Martin Lemoine, de l'Association des producteurs de canneberges du Québec.
Martin Lemoine, président, Fruit d'Or : Je représente aujourd'hui l'industrie de transformation au Québec, mais je suis président de Fruit d'Or, une entreprise qui transforme environ le tiers des canneberges du Québec.
Actuellement, le Canada produit environ 30 p. 100 des canneberges à l'échelle mondiale, et c'est une production qui se fait dans l'Ouest, en Colombie-Britannique, et dans l'Est, principalement au Québec et dans les Maritimes. Le Québec produit près des deux tiers des canneberges canadiennes, soit plus de 60 p. 100. C'est une production qui a pris de l'ampleur au cours de la dernière décennie, et elle a plus que doublé.
Je suis très fier de dire qu'au Québec, notre production est très concurrentielle. Les rendements sont très bons et le climat nordique favoriser beaucoup la production. La particularité qui s'est développée est que le Québec est le chef de file mondial de la production de canneberges biologiques. L'entreprise que je représente a pris beaucoup d'expansion avec la canneberge biologique au cours des dernières années, et cela lui ouvre des portes au niveau mondial. Cela est aussi très bon pour l'image canadienne.
Plus de 95 p. 100 des canneberges doivent être congelées et transformées avant de devenir un produit de consommation. Chez Fruit d'Or, 80 p. 100 de la production est exportée. Les Américains sont importants, ils représentent 37 p. 100 de notre marché, mais l'Europe est tout aussi importante pour nous, dans une portion semblable. Pour ce qui est de l'Asie, il s'agit pour nous de marchés émergents qui offrent un très grand potentiel.
Les principaux produits sont la canneberge séchée et les concentrés de jus. Notre but et celui de toute l'industrie, c'est que ces produits soient transformés le plus possible ici, au Canada, pour amener de la valeur ajoutée et des retombées économiques. Chez Fruit d'Or, cela représente un chiffre d'affaires de plus de 80 millions de dollars et, pour une entreprise comme la nôtre, qui est encore en croissance, c'est une belle production.
Pour ce qui est des marchés internationaux, soit le but de notre rencontre, aujourd'hui, je vais être assez bref. Je remercie le gouvernement canadien d'avoir investi du temps pour négocier des accords économiques, entre autres, l'entente avec l'Europe, qui est très importante pour nous. Sur la canneberge séchée par exemple, il y a actuellement un tarif de 17,6 p. 100 en Europe, alors que le Chili, qui produit également de la canneberge, a une entente depuis plus de 10 ans avec l'Europe et ne paie pas de douanes, ce qui nous fait mal. Nous avons donc très hâte que cette entente avec l'Europe soit entérinée.
Il y a eu de beaux progrès dans le travail fait par le gouvernement canadien au sujet de l'harmonisation des normes biologiques avec le Japon, les États-Unis et l'Europe, ce qui est très apprécié. À propos de l'Asie, nous croyons que le Partenariat transpacifique est très positif pour nous et que, même s'il s'agit de marchés émergents, il y aura des retombées positives à long terme pour notre production. Il y a l'entente avec la Corée conclue l'an passé, mais nous devons rattraper le terrain perdu par rapport aux Américains qui l'ont entérinée un peu avant nous. Nous sommes vraiment dans un monde globalisé avec un marché mondial. La Chine représente beaucoup de potentiel; nous y exportons déjà environ 4 à 5 p. 100 de nos fruits, et c'est probablement le marché qui va croître le plus au cours des prochaines années.
La production de canneberge est unique en Amérique, et on en trouve un peu au Chili. C'est une production automatisée qui n'a pas besoin d'énormément de main-d'œuvre, et nous sommes assez bien outillés pour demeurer concurrentiels pour les prochaines décennies, ici au Canada. C'est une production qui a encore beaucoup de potentiel de développement dans l'Est du Canada.
Un autre aspect, c'est la fluidité pour traverser les frontières avec les États-Unis. Je crois qu'il y a déjà du travail qui a été amorcé à ce sujet. Il est important aussi de maintenir et de soutenir les initiatives de développement de marchés. Il est important d'appuyer les transformateurs et les gens qui font la commercialisation des produits à l'extérieur du Canada et d'augmenter la visibilité du produit, par exemple, grâce à la présence des produits canadiens dans les salons internationaux, parce que c'est notre porte d'entrée et notre vitrine. À ce sujet, nous sommes chanceux, parce que le Canada a une belle image sur la scène internationale.
Toutefois, les normes sanitaires élevées au Canada, qui sont parmi les plus sévères au monde, seraient un point à améliorer, puisqu'elles occasionnent des coûts supplémentaires aux transformateurs et aux producteurs, qu'il s'agisse de la protection de l'environnement ou d'autres aspects qui ne sont pas toujours appliqués aux produits importés.
Je pense qu'il y a du travail à faire quant aux douanes canadiennes pour contrôler la qualité des produits importés, relativement au contrôle des pesticides ou du respect de l'environnement, afin de nous assurer qu'ils ont au moins l'équivalence de nos normes canadiennes.
Nous ne sommes plus concurrentiels si nous exigeons des normes très élevées pour nos produits, que nous n'exigeons pas pour les produits importés. Par exemple, pour l'exportation de fruits frais, quand nous exportons des canneberges fraîches, il y a des normes aux douanes qui sont très sévères, comme la grosseur des fruits. Par contre, les Américains envoient souvent leurs produits au Canada, des produits qui ne respectent pas les normes américaines. Malheureusement, nous n'avons pas vraiment de normes à nos frontières, ou très peu, ce qui crée de la concurrence déloyale. Cela résume ma présentation. Merci beaucoup.
Le président : Avant de passer aux questions, permettez-moi de vous présenter deux autres membres du comité : la sénatrice Beyak, de l'Ontario, et le sénateur Oh, de l'Ontario également. La première question sera posée par le vice- président du comité, le sénateur Mercer.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : Messieurs, je vous remercie beaucoup d'être là. Vous nous avez fait d'excellents exposés.
Monsieur Trépanier, vous avez eu la grande gentillesse d'inclure de bonnes recommandations, et il se peut que vous en retrouviez certaines dans notre rapport, quand nous l'aurons rédigé. Merci beaucoup.
Ce qui est en jeu, c'est toujours la disponibilité des terres nécessaires à la production de cultures comme les canneberges et les bleuets en particulier. Il faut de très grandes superficies pour cela. Je sais que les bleuets n'exigent pas un sol de grande qualité et que les canneberges se cultivent en terrain humide. Il me semble qu'il y a place pour l'expansion, car nous avons de grandes superficies de terres qui ne sont pas aussi arables qu'en Saskatchewan, par exemple, particulièrement dans l'est. Aussi, nous avons beaucoup de milieux humides qui pourraient servir à de telles cultures.
Est-ce qu'on projette d'étendre la production sur d'autres terres, en particulier la culture de bleuets et de canneberges?
[Français]
M. Larouche : La production de bleuets sauvages ne se fait pas sur des sols arables au même titre que le maïs, le foin ou la luzerne. Les bleuetières commerciales de bleuets sauvages sont développées à partir d'une forêt de pin gris, le plus souvent, où il y avait déjà présence de bleuets, et ce sont des sols très acides et donc mauvais pour l'agriculture. Le développement de bleuetières commerciales, de bleuets sauvages, n'empiète pas sur les terres agricoles déjà en place, mais permet plutôt d'agrandir les superficies agricoles existantes.
M. Lemoine : La canneberge se produisait auparavant dans des milieux humides, et particulièrement sur des terres noires en Colombie-Britannique. Tous les nouveaux développements depuis plus de 10 ans se font sur des sols sablonneux qui ont de meilleurs rendements, et sur des sols acides, parce que la canneberge est une cousine du bleuet sauvage. Donc, la canneberge se produit maintenant en terrain sablonneux d'assez haut niveau, parce qu'on inonde pour la récolte. Je ne connais pas beaucoup les Prairies; il y a probablement des potentiels et il faudrait déterminer s'il y a des terrains sablonneux pour cela.
M. Larouche : Le Québec, en particulier, a récemment décidé d'imposer des tarifs de baux qui ont augmenté de 400 p. 100 subitement. C'est à peu près quatre fois le taux des baux au Nouveau-Brunswick, ce qui fait que nous ne sommes pas compétitifs actuellement. C'est pour cette raison que nous avons demandé au gouvernement du Québec d'ajuster les baux pour les rendre comparables à ceux des autres provinces, entre autres avec les Maritimes.
Nous avons également suggéré un taux progressif pour démarrer une bleuetière, parce que, comme je vous disais tantôt, avant qu'elle ne soit rentable, il faut prévoir 10 ans de travail. Alors, si le taux des baux est trop élevé en partant, il est impossible d'agrandir ou de démarrer.
Le président : Il va falloir en parler au ministre de l'Agriculture du Québec.
Le sénateur McIntyre : Merci pour vos présentations, messieurs. Décidément, nous avons le sirop d'érable et les petits fruits, notamment la canneberge et le bleuet sauvage. Il ne manque que les crêpes, mieux connues sous le nom de pancakes, pour faire un bon déjeuner santé.
Cela étant dit, j'ai deux questions. La première concerne le Partenariat transpacifique, et la deuxième touche le recrutement de la main-d'œuvre.
En écoutant la présentation de M. Lemoine, je comprends que Fruit d'Or accueille bien la signature du texte du Partenariat transpacifique. J'aimerais, très brièvement, connaître les préoccupations du Syndicat des producteurs de bleuets du Québec et de la Fédération des produits acéricoles du Québec.
En ce qui concerne la main-d'œuvre, lors d'une réunion précédente, le comité a constaté que certains secteurs de production éprouvent de la difficulté à recruter et réclament plus de souplesse dans l'embauche des travailleurs étrangers temporaires. Toutefois, le gouvernement fédéral a récemment annoncé le lancement d'un réexamen complet du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Est-ce que vous partagez la préoccupation de ces secteurs en ce qui concerne l'embauche de travailleurs? Dans l'affirmative, quelles devraient être les priorités de la révision du Programme des travailleurs étrangers temporaires?
M. Trépanier : Pour ce qui est des travailleurs étrangers, la Fédération des producteurs acéricoles du Québec a demandé au gouvernement canadien de reconnaître l'acériculture comme étant une production à laquelle les travailleurs étrangers pourraient être admissibles. Comme le besoin en main-d'œuvre est souvent lié à l'entaillage, activité qui se produit en janvier et février, cela pourrait permettre de compléter le séjour d'un travailleur étranger, qui est plutôt consacré à la production maraîchère en serre ou lors des récoltes qui se produisent plus tard dans l'année. On sait que le programme fait l'objet d'une révision à l'heure actuelle, mais on souhaiterait que l'acériculture s'ajoute à la liste des secteurs qui pourraient bénéficier du programme.
En ce qui a trait au Partenariat transpacifique, les producteurs acéricoles du Canada sont heureux des négociations. Comme mes collègues l'ont mentionné, nous avons éliminé certaines barrières tarifaires. Cela ne fait qu'encourager la production ou l'exportation du produit. Est-ce qu'il y aura une incidence sur le prix au consommateur à l'étranger? Parfois, d'autres maillons de la chaîne vont récupérer les 10 à 15 p. 100 de taxes qui tombent. Toutefois, en fin de compte, le fait d'avoir moins de taxes favorise la production ou l'exportation, donc nous sommes heureux de cet accord.
M. Larouche : On apprécie bien sûr l'élimination des barrières tarifaires, et on souhaite que cela continue. Le bleuet sauvage est cultivé uniquement dans le nord-est de l'Amérique du Nord, soit au Québec, dans les Maritimes et dans le Maine. Il n'est cultivé nulle part ailleurs. Il n'y a aucune raison d'imposer des barrières tarifaires, car on ne crée pas de compétition avec d'autres acteurs de l'extérieur en ce qui concerne le bleuet sauvage. On encourage donc beaucoup cette initiative et on apprécie les améliorations à cet égard, étant donné que 80 p. 100 de notre produit est vendu à l'extérieur du Canada.
Pour ce qui est des travailleurs étrangers, on commence à en avoir besoin. Le principe de la bleuetière familiale fait en sorte que, bien souvent, c'est la famille qui s'occupe de la cueillette. C'est une belle activité familiale, un peu comme les vendanges en Europe.
M. Lemoine : Quant au dossier des travailleurs étrangers, nous appuyons la position du Conseil de la transformation alimentaire du Québec. Nous avons, en tant que producteurs, des travailleurs étrangers l'été à titre de travailleurs saisonniers. Cette main-d'œuvre est très importante. Les retards nous ont causé des difficultés l'an dernier. Des travailleurs sont arrivés en retard et nous n'avons pas pu faire le désherbage comme nous le voulions. Pour la courte période des récoltes, il faut que nous puissions continuer à utiliser des travailleurs étrangers dans nos usines. Il est impossible de trouver suffisamment de personnes pendant cette courte période de deux mois. Dans notre région, tout le monde fait des récoltes de canneberges, et il n'y a pas suffisamment de main-d'œuvre. On doit donc continuer à jouir de cet avantage.
La sénatrice Tardif : Merci à vous trois de vos excellentes présentations. Mes questions s'adresseront à M. Trépanier.
Mardi, nous avons entendu des représentants de l'Association des érablières-transformateurs des produits de l'érable. Ils ont indiqué au comité que les quotas devraient être éliminés au Québec, car c'est la seule province à avoir des quotas pour le sirop d'érable. Cette élimination viserait à rendre le produit plus compétitif. Or, votre point de vue semble différent. Croyez-vous que le maintien des quotas rend votre produit plus compétitif sur les marchés internationaux?
Deuxièmement, vous avez mis beaucoup d'emphase sur la recherche. Je crois que vous avez investi, depuis 2005, environ 7 millions de dollars dans des projets de recherche. Quel a été l'impact de ces projets de recherche sur la compétitivité et la productivité de votre industrie?
M. Trépanier : Vous soulevez une très bonne question, dans le contexte du rapport Gagné qui a été diffusé par le gouvernement il y a un mois. En gros, au Québec, on retrouve deux grands acteurs de l'industrie. Il y a d'un côté les producteurs, au nombre de 7 000 fermes. D'autre part, il y a environ 50 acheteurs autorisés de sirop d'érable en vrac. C'est essentiellement ce sirop d'érable qui est exporté.
Entre les deux, il y a un groupe d'environ une dizaine d'entreprises qui sont à la fois productrices et transformatrices. Ce sont elles que vous avez entendues. Sans vouloir dénigrer leur leadership et leur sens de l'entrepreunariat, ces entreprises bénéficient actuellement de la stabilité des outils de mise en marché qui ont été apportés au Québec. Ce que cherche ce groupe, à l'heure actuelle, c'est d'être libérés des contraintes, que les producteurs ont adoptées démocratiquement, pour augmenter leur taux de production et d'exportation. Si on permet à certains de profiter d'une libéralisation complète du marché, cela fera en sorte que d'autres producteurs perdront ces marchés.
Comme industrie, veut-on revenir aux années 1990 où il n'y avait pas de limite de production? Cela faisait en sorte que, lorsque le prix du produit était bon, les gens augmentaient leur production. Lorsqu'il y avait surproduction, le prix chutait de 3 $ la livre à 1 $ la livre. Cette grande variation du prix du produit qu'il y avait avant les contingents faisait en sorte que certains étaient capables de passer au travers, mais chaque année, on voyait des entreprises fermer. Imaginez avoir un budget pour un produit à 3 $ la livre et que le prix tombe à 1 $ la livre. Certains réussissaient à traverser la crise, mais la majorité des entreprises n'y arrivaient pas.
Le contingentement, qui est une limite du nombre d'entailles, ne constitue pas une limite de production, et il est important de le souligner. Par contre, le producteur peut améliorer sa productivité pour augmenter le nombre de livres de sirop que permettent ces entailles. Ce groupe veut donc profiter de l'ouverture des marchés pour aller sur de nouveaux marchés. Or, à l'heure actuelle, les transformateurs, qui sont des acheteurs en vrac, sont en train d'ouvrir ces marchés.
En gros, la limite du contingentement à la production que nous avons assure la stabilité du prix et du développement. Lorsqu'on regarde les records de 2015, ce n'est pas en retirant cet outil que l'industrie canadienne de l'érable pourra se développer. Ce groupe se développera, mais ce sera au détriment de l'ensemble de l'industrie de l'érable, et j'estime que ce ne serait pas bien pour l'économie canadienne.
Pour ce qui est de la recherche...
Le président : Je m'excuse, mais avant de passer à la recherche, la sénatrice Unger aurait une question supplémentaire.
[Traduction]
La sénatrice Unger : Ma question s'adresse à M. Trépanier. Vous avez utilisé le mot « outils ». Vous parliez de la gestion de l'offre, n'est-ce pas?
M. Trépanier : Ce n'est pas exactement la gestion de l'offre telle que nous la connaissons pour la production du lait et des œufs. Nous exportons le produit, alors il ne s'agit pas exactement des mêmes outils, mais ce sont essentiellement des outils qui sont utilisables au Québec.
La sénatrice Unger : Quel pourcentage des producteurs appuient le système actuel, et quel processus existe-t-il pour les producteurs qui veulent changer le système s'ils en sont insatisfaits?
M. Trépanier : Depuis quatre ans maintenant, nous menons un sondage scientifique qui vise à demander à tous nos membres s'ils sont satisfaits de la façon dont la fédération s'occupe du sirop d'érable au Québec. Depuis quatre ans, le sondage indique que 75 p. 100 de nos membres sont satisfaits ou très satisfaits de la façon dont nous gérons leur produit au Québec.
Vingt-cinq pour cent des gens ne sont pas satisfaits, mais s'il est une chose importante à propos des gens qui ne sont pas satisfaits, c'est qu'ils voudraient recevoir l'argent de la vente de leur produit plus rapidement.
Ce qu'il faut que vous compreniez, c'est que la réserve stratégique de sirop d'érable que nous avons créée en 2000 sur 15 ans aide à stabiliser les besoins des entreprises de conditionnement. Cependant, quand vous mettez du sirop en réserve, les producteurs ne sont manifestement pas payés. Certains producteurs ne veulent pas participer à la réserve, sauf que la réserve assure à l'industrie un prix stable et une demande stable pour les entreprises de conditionnement.
Si ces producteurs ne sont pas satisfaits, il faut que vous sachiez que c'est parce qu'ils ne veulent pas contribuer à la réserve. C'est l'une de leurs grandes préoccupations. Veulent-ils que nous nous débarrassions de tous ces outils? Probablement pas. Avec 75 p. 100 de répondants satisfaits, faut-il retirer tous les outils qui ont été mis en place?
La sénatrice Unger : Quand même, si des gens sont insatisfaits, les petits producteurs devraient pouvoir exporter leurs propres produits sans avoir à participer à votre système. Est-ce possible? Est-ce qu'ils peuvent gagner leur vie?
M. Trépanier : Oui. Il y a deux façons d'exporter le produit. Vous pouvez le vendre directement aux consommateurs dans de petites bouteilles — comme des cruches —, ou vous pouvez exporter ailleurs, vers des épiceries ou des marchés. Ce n'est pas un problème. C'est possible.
Si vous voulez exporter en vrac, vous devez racheter votre produit. Il faut comprendre qu'au Québec, il y a une association d'entreprises de transformation des produits de l'étable. Cette industrie achète le produit au prix que nous fixons. Il faut comprendre que les gens qui exportent 90 p. 100 de la production canadienne l'achètent à un prix stable. Ils ne veulent pas devoir faire concurrence à d'autres qui chercheraient à contourner le système et à racheter le produit à un prix inférieur.
C'est pourquoi la stabilisation que nous avons procurée au Québec est bonne pour les producteurs, en particulier les petits producteurs. Quand vous vendez votre produit à Costco, êtes-vous en mesure de négocier avec Costco si vous êtes un petit producteur d'une région rurale de la province? Parfois, il est préférable de travailler ensemble afin que vous puissiez conclure un marché avec Costco, Walmart ou Sobeys. Sobeys veut une grande quantité de sirop.
[Français]
Le sénateur Dagenais : Ma question s'adresse à M. Trépanier. Ce soir, notre premier ministre est à la Maison- Blanche et il mangera peut-être un gâteau à l'érable préparé avec du sirop d'érable du Vermont. C'est dommage de gâcher un si bon gâteau. Lorsque la reine est venue au Canada en juin 2010, elle a pu goûter à un dessert préparé avec du vrai sirop d'érable. Vous avez fait référence au rapport Gagné et aux producteurs qui sont préoccupés par le marché. Nos voisins américains produisent désormais du sirop d'érable, un peu comme du pétrole. Ils le produisent et le gardent pour eux, ce qui nuit à notre marché d'exportation vers les États-Unis. Avez-vous pensé à une stratégie pour éviter la baisse des exportations vers les États-Unis, étant donné qu'ils représentent notre principal marché?
M. Trépanier : En fait, les exportations canadiennes des produits de l'érable vers les États-Unis ont connu une augmentation au cours des cinq dernières années, ce qui est surprenant. Pourquoi? Parce que l'augmentation de la demande américaine est telle que les Américains sont incapables d'y suffire. Deux des grands importateurs de sirop d'érable du Québec sont des entreprises d'embouteillage de sirop d'érable du Vermont. Vous achetez du sirop d'érable aux États-Unis et, sur le contenant, il est indiqué que le produit est embouteillé au Vermont. Pourtant, dans 90 p. 100 des cas, c'est du sirop d'érable du Canada. Les journalistes n'iront pas jusqu'à demander d'où provient le sirop d'érable embouteillé au Vermont, mais la plupart du temps, c'est du sirop d'érable du Canada.
[Traduction]
Le sénateur Oh : Merci, messieurs.
J'ai visité la région de production de bleuets de la Colombie-Britannique, dans le Lower Mainland. On prétend là- bas être la plus importante région de production de bleuets au monde. Je ne suis jamais allé dans la région du Québec où l'on cultive le bleuet, mais j'aimerais avoir l'occasion de le faire.
Qu'en est-il des prix? Pouvez-vous comparer les prix de la Colombie-Britannique et du Québec?
[Français]
M. Larouche : Selon les données obtenues du Food Institute, ou encore les prix dérivés à l'exportation, le prix des bleuets sauvages est généralement plus élevé que celui des bleuets qui sont cultivés en Colombie-Britannique. Il est plus difficile de cultiver des bleuets sauvages. Les rendements sont moins élevés, cela coûte plus cher, et ce n'est pas le même produit. Le bleuet sauvage étant ce qu'il est, on parle d'environ 20, 25, 30 cents la livre de plus pour le bleuet sauvage, mais parfois le prix peut varier selon certains facteurs.
Le président : Messieurs, je vous remercie infiniment de vos témoignages. Je suis convaincu que vous allez retrouver bon nombre de vos recommandations dans notre rapport final. Nous vous souhaitons une bonne récolte. La production du sirop d'érable est commencée, puis ce sera la cueillette des bleuets sauvages et des canneberges. Nous vous souhaitons un bon retour chez vous.
Nous recevons maintenant Les Producteurs de lait du Québec, dont M. Alain Bourbeau est directeur général, et la Fédération des producteurs d'œufs du Québec, dont M. Serge Lebeau est secrétaire et M. Emmanuel Destrijker est membre du conseil d'administration. Bienvenue, messieurs. Merci d'avoir répondu à l'invitation du comité, c'est très important pour nous. Cependant, le temps étant ce qu'il est, je vais vous demander de faire vos présentations le plus rapidement possible afin de laisser plus de temps aux sénateurs pour poser leurs questions. Je sais qu'ils ont beaucoup d'intérêt. Toutefois, la séance doit se terminer à 10 h.
Serge Lebeau, secrétaire, Fédération des producteurs d'œufs du Québec : Si vous le permettez, je vais lire mon texte, ce qui me permettra de respecter les sept minutes consenties. Au nom de tous les producteurs membres, la Fédération des producteurs d'œufs du Québec tient à remercier le Comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts de lui avoir permis de déposer ce mémoire. Celui-ci vise à dresser le portrait de la production des œufs au Québec et à exposer le point de vue de notre secteur relativement aux marchés internationaux.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, permettez-nous de dire quelques mots sur notre organisation. La Fédération des producteurs d'œufs du Québec représente 111 producteurs d'œufs sur le territoire québécois. Le Québec est la seconde province productrice d'œufs au Canada. Nous avons 4,5 millions de poules qui pondent 117 millions de douzaines par année. Ce volume comble en majeure partie les besoins des Québécois en œufs en coquille, soit les œufs que vous mangez probablement à la maison le matin. La firme québécoise moyenne abrite plus de 39 000 poules pondeuses. À titre comparatif, la ferme moyenne américaine en abrite 1,1 million.
La filière des œufs au Québec génère des revenus annuels de presque 300 millions de dollars et crée des emplois à plus de 3 000 personnes. Il y a un tableau dans le mémoire qui reprend les faits saillants du secteur des œufs de consommation du Québec.
J'aimerais maintenant dire quelques mots sur le système réglementaire qui encadre notre production et la gestion de l'offre. C'est en 1972 que le Parlement fédéral adopte une loi fédérale, la Loi sur les offices de commercialisation des produits agricoles. Cette loi permet de contrôler la production en tenant compte de l'historique de production des provinces. Elle a également donné lieu à la signature de l'accord fédéral-provincial visant à mettre en place un système global de commercialisation des œufs au Canada et de la gestion de l'offre.
Elle a aussi permis la création du Conseil national de commercialisation des produits agricoles, appelé aujourd'hui le Conseil des produits agricoles du Canada et l'Office canadien de commercialisation des œufs, rebaptisé depuis les Producteurs d'œufs du Canada. Plus spécifiquement, la gestion de l'offre est le mécanisme par lequel les producteurs de lait, de la volaille et des œufs du Québec et du Canada ajustent leur production afin de répondre aux besoins des consommateurs d'ici.
Ces productions sont principalement destinées aux marchés intérieurs. Ce système ne cause aucune distorsion sur les marchés internationaux, puisqu'il a comme objectif principal d'approvisionner le marché domestique. Les productions sous gestion de l'offre représentent 40 p. 100 des recettes de l'agriculture québécoise. Elle représente près de 30 p. 100 des recettes de l'Ontario et 20 p. 100 des recettes de l'ensemble de l'agriculture du Canada. Dans les provinces maritimes, elle compte pour 33 p. 100 des recettes de l'ensemble des productions :
À l'origine, il y a presque 45 ans, la gestion de l'offre a été mise en place pour stabiliser les revenus des producteurs et des productrices agricoles et mettre fin à l'injection massive de fonds gouvernementaux en soutien aux producteurs. Ces systèmes ont encore tout leur sens aujourd'hui, et force est de reconnaître qu'ils sont avantageux pour toute la société québécoise et canadienne. En effet les consommateurs ont accès à des produits de grande qualité en quantité suffisante et à des prix raisonnables.
Les producteurs reçoivent du marché une rémunération basée sur leurs coûts de production, et les transformateurs obtiennent une grande stabilité de leur approvisionnement ainsi que des résultats financiers enviables. Ce mode de production favorise une agriculture respectueuse des ressources et des personnes, une agriculture efficace et à dimension humaine répartie sur l'ensemble du territoire québécois et canadien.
En ce qui concerne les priorités de notre secteur en matière de marchés internationaux, il importe de vous mentionner que notre objectif, depuis l'adoption de la loi fédérale sur les offices de commercialisation des produits de la ferme, en 1972, est principalement d'approvisionner le marché intérieur et non d'exporter. D'ailleurs, les exportations canadiennes d'œufs et d'ovo-produits représentent moins de 1 p. 100 de la production totale en 2015.
Nos actions se sont donc concentrées sur le développement du marché domestique depuis 45 ans. Nos efforts ont porté leurs fruits, puisque la consommation a augmenté de 38 p. 100 de 2010 à 2015. Il importe également de préciser que la fédération n'est pas contre les exportations de produits agricoles et alimentaires. Notre système de production et de mise en marché et la nature même de notre produit, frais et peu transformé, nous éloignent toutefois de cet objectif. La forte valeur protéique de notre produit associé à son faible coût nous permet de croire que la croissance de notre secteur se poursuivra au cours de prochaines années, même si nos efforts se concentrent sur le marché domestique.
L'accès aux marchés internationaux se traduit pour nous plutôt par des accès que le Canada a consentis au fil des négociations commerciales. Tout d'abord, il s'agit de l'Accord de libre-échange avec les États-Unis, de l'accord de libre-échange Canada, États-Unis, Mexique, soit l'ALENA, et de l'accord avec l'Organisation mondiale du commerce, sans oublier, plus récemment, bien qu'il ne soit pas finalisé, le Partenariat transpacifique.
Ces accords font en sorte que le Canada donne accès aujourd'hui à 21,4 millions de douzaines d'œufs. Ces quantités seraient majorées de 19 millions de douzaines si le Partenariat transpacifique était ratifié. Ces quelque 40 millions de douzaines représenteront 6 p. 100 de la production canadienne. Nous croyons que, pour préserver notre système, il faut limiter ces importations, sans quoi il y aura un point de bascule qu'il n'est pas souhaitable de franchir.
En conclusion, bien que la Fédération des producteurs d'œufs du Québec ne soit pas contre les exportations de produits agricoles et alimentaires, nous concentrerons nos efforts, au cours des prochaines années, comme nous l'avons fait dans le passé, à développer le marché domestique. Les accès au marché que le Canada a déjà consentis lors de traités commerciaux doivent être limités à leur niveau actuel.
Conséquemment, nous demandons au gouvernement fédéral de maintenir les conditions nécessaires à une gestion de l'offre efficace en protégeant les trois piliers qui assurent la pérennité de ce système, soit le contrôle de la production et de l'importation, et une politique de prix couvrant les coûts de production.
Comme le dirait le célèbre auteur Eugène Ionesco dans une pièce de théâtre écrite en 1954, « L'avenir est dans les œufs », et ce, même si nos efforts sont déployés essentiellement sur le marché québécois et canadien.
Alain Bourbeau, directeur général, Les Producteurs de lait du Québec : Merci de nous accueillir ici ce matin. Je ne vais pas lire le texte que je vous ai soumis; je vais le résumer. Je vous invite à le consulter et je vais me référer à certains passages, essentiellement pour aller rapidement.
Notre organisation, Les Producteurs de lait du Québec, est une organisation démocratique qui représente les 5 600 fermes laitières du Québec. Elle a la responsabilité de négocier les conditions de vente du lait au nom de tous les producteurs de la province. Comme vous pouvez le voir à la page 2, le secteur laitier est très important dans notre province. Il contribue à près de 80 000 emplois directs et indirects. Nous parlons d'environ 2,4 milliards de ventes à la ferme et d'une contribution d'environ 6 milliards de dollars au PIB, sans compter les retombées fiscales au niveau municipal, provincial et fédéral, qui sont de l'ordre de 1,3 milliard de dollars. J'aimerais souligner aussi que nos presque 6 000 fermes sont de petits entrepreneurs qui investissent quelques dizaines ou centaines de milliers dollars, et on estime que leur contribution annuelle à l'investissement est de l'ordre de 300 millions de dollars par année, ce qui représente une contribution majeure à l'économie canadienne.
Je vais résumer ma présentation en trois volets. Le premier vise à souligner les attentes que nous avons plus particulièrement à l'égard du gouvernement dans deux volets. Ensuite, j'expliquerai brièvement comment notre secteur peut se distinguer dans un contexte commercial, suivi de quelques remarques sur la compétitivité.
Quant à nos attentes à l'égard du gouvernement, j'en soulignerai deux. La première concerne les ententes commerciales. De façon très claire, nous sommes tout à fait en faveur des accords commerciaux que notre pays peut conclure avec d'autres partenaires. On comprend que le Canada est un pays dont la prospérité est intimement liée au commerce international et, par conséquent, nous appuyons cela.
Toutefois, nous avons une certaine sensibilité. Nous savons que tous les pays ont des cibles offensives et des cibles défensives dans une négociation, et des secteurs sensibles. Or, dans les deux dernières négociations importantes que le Canada a réalisées, des concessions importantes ont été faites au niveau du secteur laitier.
Donc, ce que nous demandons au gouvernement, c'est d'envisager la possibilité, si ces ententes ont été avantageuses globalement pour notre pays et que notre secteur ait dû faire des concessions pour permettre qu'elles se réalisent, qu'il y ait une contrepartie de compensation qui soit également reconnue à notre secteur. C'est l'essentiel des demandes qui sont décrites à la page 5 de notre présentation. Essentiellement, il s'agit de maintenir les programmes qui ont été offerts en octobre dernier par le gouvernement précédent, et qui sont présentement en révision.
Le second enjeu sur lequel j'aimerais attirer votre attention et qui est abordé à la page 5 de notre document, c'est celui de l'importation des protéines laitières. Bien entendu, on ne s'oppose pas à l'importation de protéines laitières, sauf qu'elles doivent se faire à l'intérieur des ententes commerciales qui ont été négociées de bonne foi avec nos partenaires. À cet égard, certaines décisions administratives ont été prises qui, selon nous, ne respectent pas l'esprit et la lettre des ententes négociées.
Présentement, les concentrés sous forme de lait diafiltré ont été considérés comme étant seulement des concentrés, et ils peuvent entrer au pays sans aucun tarif. Cependant, lorsqu'ils sont jugés à la lumière de l'application réglementaire de l'ACIA, cette agence n'agit pas de façon cohérente avec l'autre agence, ce qui crée une situation non compétitive pour nos producteurs et engendre des coûts importants, comme il est décrit dans notre document.
À ce chapitre, nos demandes sont bien énoncées à la page 6 du document et nous avons mis de l'avant un certain nombre de solutions. Cette problématique a été soulevée et reconnue par toutes les parties lors de la campagne électorale, donc il y a un consensus sur la nature du problème et sur les solutions. Ainsi, il ne manque qu'une volonté politique pour y arriver.
J'aimerais maintenant très brièvement expliquer comment notre secteur peut se distinguer quant à la conquête des marchés. Le lait canadien est produit selon des normes de qualité élevées. Avec les consommateurs, aujourd'hui, on ne peut se contenter de leur dire que nous sommes bons; nous devons le prouver. En ce sens, nous avons entrepris la mise en place d'un système d'accréditation par une partie indépendante à l'égard de six volets qui concernent nos pratiques de production et qui permettra de confirmer des normes de production à l'égard de la qualité, de la gestion des risques, du bien-être animal, de la traçabilité, de la biosécurité et de l'environnement.
La mise en œuvre de ces volets est partiellement complétée, et nous avons un échéancier sur quelques années. Les trois premiers volets sont déjà faits; le bien-être animal, la biosécurité et l'environnement se feront au cours des prochaines années. Il est clair que le soutien du gouvernement pour favoriser et encourager la mise en œuvre de ces programmes serait certainement apprécié, et peut-être que les programmes de compensation qui ont été évoqués seront l'occasion de mettre l'accent sur cet aspect.
Finalement, parlons de la compétitivité de nos entreprises, à la page 8. Ce qui a peut-être été défaillant dans les dernières négociations, c'est le fait que le Canada n'ait pas adopté une approche à armes égales avec les autres pays, puisque dans le domaine laitier, notre politique agricole repose sur une politique tarifaire, alors que la politique agricole des pays avec lesquels nous avons négocié repose sur du soutien interne.
Or, dans la négociation, ces politiques de soutien interne ont été exclues, ce qui a défavorisé notre secteur et le Canada. À l'avenir, nous pensons que de telles négociations devraient soit exclure l'agriculture, ou sinon, faire en sorte que les autres pays tiennent compte également de leur politique agricole dans la négociation.
Enfin, je parlerai brièvement des entreprises de transformation. Le secteur de la transformation fromagère sera affecté par l'arrivée de fromages fins dans les prochaines années. L'industrie des fromages fins au Canada se situe essentiellement au Québec et est principalement supportée par des artisans, des gens qui ont des entreprises relativement petites. Elles ont d'excellents produits, mais, malheureusement, elles n'ont pas la masse critique d'expertise et les ressources nécessaires pour s'engager sur les marchés d'exportation. Pour le faire, elles auraient besoin d'un soutien pour obtenir une intelligence de marché, pénétrer les réseaux de distribution, et aller à la conquête des marchés sur la base de la valeur ajoutée de leurs produits.
En conclusion, je dirais que certaines décisions administratives et commerciales ont nui aux producteurs laitiers au cours des dernières années. Le gouvernement a le pouvoir d'intervenir et il doit le faire pour maintenir un secteur laitier intérieur fort. Le potentiel d'exportation ne se trouve pas principalement dans le marché à valeur ajoutée ni dans celui des produits de commodité, qui sont desservis par des pays qui soutiennent financièrement, par le truchement de subventions, leur production laitière. Il faut miser sur la qualité distinctive de notre production et appuyer les transformateurs dans le développement de produits innovateurs et dans leur capacité de commercialisation.
Le président : Merci. La première question va au vice-président du comité.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : Monsieur Lebeau, dans votre exposé, vous avez parlé d'un point de bascule. Ce sont les mots que vous avez dits : un « point de bascule » qui amènerait des problèmes. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, je vous prie?
[Français]
M. Lebeau : Oui, tout à fait. Avec le Partenariat transpacifique, nous allons augmenter l'accès à notre marché jusqu'à 6 p. 100. Il est certain que, plus que cet accès au marché augmente, plus le système, qui est la gestion de l'offre, est mis en péril. Il arrivera un temps où, si on augmente encore et qu'on est inondé de produits qui viennent de l'extérieur, il sera extrêmement difficile de maintenir le système actuel. C'est ce que j'ai voulu dire au sujet du point de bascule. Est-ce 6, 7 ou 8 p. 100? C'est difficile à dire, c'est peut-être 5 p. 100. Essentiellement, ce que je disais, c'est qu'il ne faut pas augmenter indûment cet accès, parce qu'on risque de mettre en péril le secteur de la gestion de l'offre. C'est ce que j'ai voulu dire.
[Traduction]
Le sénateur Mercer : J'ai visité plusieurs producteurs d'œufs au Canada, dont certains gros producteurs, mais aussi de petites fermes familiales très prospères. Nos amis américains, en raison de la taille de leurs exploitations, regarderaient ces fermes avec surprise et se demanderaient comment elles survivent et réussissent à prospérer.
Je dis souvent des Producteurs de lait du Québec qu'il s'agit du groupe de pression le plus puissant au pays, collectivement. Il faut les en féliciter, parce qu'ils travaillent ensemble et font passer leur message.
Comme nous en avons parlé ici, j'ai été un peu surpris d'entendre des groupes de gestion de l'offre dire qu'ils appuient le PTP. Cependant, il y a toujours un « mais ». Quel est le grand « mais » pour les producteurs laitiers? Est-ce le fromage?
[Français]
M. Bourbeau : En ce qui a trait aux accords commerciaux, la problématique est la suivante : lorsqu'on dit que tout est sur la table, ce n'est pas tout à fait le cas pour nos pays partenaires. La politique agricole du Canada en matière de produits laitiers repose sur des mécanismes tarifaires. La politique agricole des Américains repose sur une politique budgétaire.
Dans le cadre de la négociation du Partenariat transpacifique, les politiques de soutien interne n'ont pas été mises sur la table par les autres pays; le « mais » que vous avez évoqué est donc essentiellement là. Cela a fait en sorte que le Canada, dans le contexte de cette négociation, a été invité à faire des concessions dans le domaine de sa politique agricole, alors que les autres pays, dont la politique agricole repose sur le soutien interne, n'ont pas été invités à le faire à leur tour.
Il est évident que dans ce contexte, notre sensibilité était très grande et que nous ne voulions pas permettre des ouvertures plus importantes que ce que nos concurrents permettent. Par exemple, le Canada importe présentement environ 8 p. 100 de sa consommation de produits laitiers. Dans le cadre des deux derniers accords négociés, ces accès seront de l'ordre de 14 p. 100 et seront garantis. L'Europe et les États-Unis importent environ 1 à 3 p. 100 de leur consommation intérieure; malgré la gestion de l'offre au Canada, on peut dire que nos marchés sont beaucoup plus ouverts que ne le sont ceux de nos concurrents.
Le sénateur McIntyre : Ma question s'adresse à M. Bourbeau. Vous avez soulevé la question des protéines laitières et vous avez un peu piqué ma curiosité. Je comprends qu'il y a le lait diafiltré et les matières protéiques de lait, et je comprends également que le lait diafiltré en provenance des États-Unis est exempté de droits de douane, alors que les matières protéiques de lait sont soumises à des contingents tarifaires.
Cela étant dit, les producteurs de lait du Québec dénoncent-ils toujours en groupe les importations massives de lait diafiltré en provenance des États-Unis? Je sais qu'ils l'ont fait dans le passé, mais est-ce que cela pose toujours un problème majeur?
M. Bourbeau : Tout à fait. Je vous remercie de soulever cet enjeu. Je comparaissais hier à titre de témoin au Comité de l'agriculture de la Chambre des communes, et le thème de la séance publique était celui des protéines laitières. Nous sommes toujours extrêmement préoccupés par cet enjeu, et particulièrement par l'incohérence des agissements de l'Agence des services frontaliers du Canada et de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.
Comme vous l'avez bien compris et indiqué, lorsque ces produits entrent, s'ils sont sous forme sèche, leur concentration est à plus de 85 p. 100. Ils sont alors classés en vertu du chapitre 35 des tarifs douaniers et ils sont effectivement libres d'accès. Ils sont considérés comme un ingrédient lors de la fabrication fromagère et leur usage est permis dans certaines limites.
Le problème du lait diafiltré, c'est qu'il s'agit de la forme liquide de l'autre produit. La teneur en protéines de cette forme liquide est la suivante : pour 100 kilos du produit, il y a environ 15 à 17 kilos sous forme solide. Notre compréhension est la suivante : une proportion de 15 p. 100 est effectivement un concentré et il devrait être répertorié comme étant sous le chapitre 4. On a un différend d'interprétation à cet égard.
Nous faisons également valoir qu'il s'agit d'un concentré pour l'Agence des services frontaliers du Canada. Si le lait diafiltré sous sa forme liquide est considéré comme un concentré, l'ACIA devrait le considérer également comme un ingrédient et gérer le niveau d'usage en fonction de sa réglementation. C'est de ce point de vue qu'il y a incohérence actuellement, et c'est ce que l'on demande au gouvernement de corriger.
Le sénateur McIntyre : Ai-je le temps de poser une deuxième question?
Le président : Oui, allez-y.
Le sénateur McIntyre : Monsieur Bourbeau, je comprends également que l'an passé — je pense que c'était à l'été 2015 —, certains producteurs laitiers ont dû se débarrasser de leur lait écrémé, faute de ne pouvoir le vendre sur le marché canadien. Je comprends également que cette situation s'expliquerait par une demande importante de beurre et de crème, ainsi qu'une capacité de transformation inadéquate et une faible demande de lait liquide. Croyez-vous que le Partenariat transpacifique serait une bonne occasion pour votre secteur de développer de nouveaux marchés et d'éviter ainsi les situations de surproduction?
M. Bourbeau : Merci encore. Ce que j'aimerais préciser, d'entrée de jeu, c'est qu'aucun lait de ferme n'a été jeté à l'été 2015. Tout le lait au Québec a été l'objet d'une première transformation. Le lait écrémé est un sous-produit de la fabrication de beurre; bien sûr, c'est un produit qui peut être valorisé et, effectivement, la production importante ou la demande importante de crème et de beurre est une bonne nouvelle pour l'industrie. Toutefois, cela a eu pour effet qu'un certain volume de lait écrémé n'a malheureusement pas pu être séché.
Je ne crois pas que le Partenariat transpacifique, d'emblée, soit la meilleure solution, bien que cela puisse effectivement ouvrir la voie à certains marchés d'exportation. Nous sommes déjà des exportateurs de poudre de lait écrémé dans les limites de nos capacités; le principal problème est lié au fait que les ingrédients importés qui entrent ici d'une certaine façon déplacent les utilisations potentielles de ce lait écrémé, même s'il est offert à prix compétitif.
J'aimerais vous rassurer sur le fait que ce n'est pas du lait qui a été jeté, mais du lait écrémé. On a récupéré la crème, mais ce sous-produit, malheureusement, n'a pas pu être séché. Si le temps me le permettait, je pourrais vous l'expliquer beaucoup plus en détail, parce qu'un certain nombre d'éléments sont impliqués. Je pourrais également vous expliquer certains choix industriels qui ont été faits pour fabriquer de façon prioritaire du fromage, par exemple. Cela a fait en sorte que les capacités de transformation beurrière ont plutôt été utilisées par certains sous-produits.
Le sénateur McIntyre : Merci, vous m'avez rassuré et vous avez répondu à mes préoccupations.
Le sénateur Dagenais : Merci à nos invités.
J'aimerais revenir sur la question de la gestion de l'offre. Je vais régulièrement aux États-Unis et je vais vous donner un exemple concret : j'ai acheté — pas moi, parce que c'est ma femme qui fait l'épicerie, mais nous étions ensemble — une douzaine d'œufs chez Maxi à 4,50 $ et, curieusement, trois semaines plus tard, nous avons acheté une douzaine d'œufs chez Winn-Dixie qui se détaillait à 1,50 $. Ma conjointe me fait remarquer que ce sont les mêmes œufs. On a acheté également un contenant de 4 litres de lait à 1,99 $. On a beau dire que la qualité est meilleure ici, mais je n'ai pas eu connaissance d'Américains qui sont décédés d'avoir mangé des œufs et bu du lait.
La gestion de l'offre maintient des prix élevés au Canada; ne pensez-vous pas que cela pourrait nous nuire à un moment donné, en raison des différents accords signés? Évidemment, les Américains seront très agressifs. Je suis certain que vous aurez une bonne réponse, alors je vais vous écouter et je vais ensuite appeler ma conjointe pour lui expliquer.
M. Bourbeau : Merci de soulever cet enjeu, parce qu'il est effectivement souvent évoqué. Il est vrai que, lorsqu'on regarde un panier de produits, il y a des différences. Si on prend le prix le plus bas aux États-Unis et le prix le plus élevé au Canada, effectivement, les exemples que vous donnez sont réels. Cependant, lorsqu'on prend un panier de produits et qu'on regarde un peu partout aux États-Unis, il n'y a pas un prix américain, mais bien plusieurs prix, comme au Canada. Si vous consultez les annexes du document que je vous ai remis, nous y abordons cette question.
La différence n'est pas substantielle. Si on compare, par exemple, un litre de lait dans différents pays, que ce soit aux États-Unis, au Canada ou même en Europe, on parle peut-être de 1,50 $ ou de 1,80 $, dépendamment du format. Oui, certaines comparaisons nous sont défavorables, mais dans l'ensemble, la différence n'est pas importante. Ce qu'il faut aussi comprendre, c'est que le régime de subvention aux États-Unis fait en sorte que, au premier abord, le prix peut paraître un peu plus élevé, mais les producteurs ont reçu une subvention pour leur production. Il y a également des subventions qui sont indirectes : lorsqu'on pense au régime d'accès à l'eau potable aux États-Unis, il n'est pas considéré comme subvention agricole, mais plusieurs canaux d'irrigation en Californie sont entretenus par les budgets de l'armée américaine. C'est le genre de subtilités qui rendent difficile la comparaison.
Pour finir, avant de laisser la parole à mes collègues, je mentionnerai que beaucoup de produits ont un prix final qui n'a rien à voir avec le lait au départ. Je vais vous donner l'exemple d'un fromage. Dans tous les fromages que vous consommez, il y a à peu près 7 $ de lait. Que vous preniez un brie à 50 $ ou un cheddar à 15 $, il y a 7 $ de lait. Si on les vendait à moitié prix, il n'y aurait pas beaucoup de différence à la fin. Il faut comprendre que beaucoup de produits au Canada qui ne sont pas sous le régime de la gestion de l'offre sont tout de même plus chers que les produits qui le sont, parce que la taille de nos marchés, la structure des réseaux de distribution, et cetera, font en sorte que les produits, pour un tas d'autres raisons que la gestion de l'offre, peuvent être plus chers au Canada qu'aux États-Unis.
Le sénateur Dagenais : Bonne réponse.
Emmanuel Destrijker, membre du conseil d'administration, Fédération des Producteurs d'œufs du Québec : Je voudrais ajouter un point, sénateur. J'étais aux États-Unis également, il y a deux semaines — je n'ai pas la même chance que vous, c'est moi qui fais les courses d'épicerie quand nous allons là-bas —, et j'ai payé une douzaine d'œufs 2,59 $ chez Publix, en Floride. On est loin de 1,5 $. L'autre point, c'est que, au Québec, notre prix aux producteurs a baissé de 0,09 $, il y a deux semaines environ. On n'a pas vu cette baisse se répercuter sur les prix aux consommateurs. Oui, parfois notre prix aux producteurs diminue, mais cette baisse est rarement reportée sur le prix au consommateur; en revanche, quand on hausse le prix aux producteurs, c'est souvent répercuté. Ce sont de petites choses qui font que le prix que le consommateur paie, relativement au prix que le producteur reçoit, peut présenter des écarts importants.
Le sénateur Dagenais : Je vais vous donnez un truc : n'allez pas chez Publix, et prenez plutôt la carte Winn-Dixi, où il y a des spéciaux le jeudi.
La sénatrice Tardif : Récemment, j'ai lu que Les Producteurs de lait du Québec avaient changé leur stratégie de marketing en raison d'un nouveau contexte commercial et des ententes du Partenariat transpacifique et avec l'Union européenne. Est-ce que cette nouvelle stratégie de marketing ne vise qu'à défendre les parts de marché ici, au Canada, ou désirez-vous tirer avantage de ces accords internationaux et trouver de nouveaux marchés?
M. Bourbeau : En fait, nous avons changé d'agence pour soutenir nos efforts et nos projets de marketing. Nous allons tenter de nous développer différemment sous un autre angle, afin de faire un lien plus clair avec nos pratiques, soit la façon dont nous produisons le lait, ce qu'on appelle la profession. Il s'agit de montrer aux Canadiens d'où vient leur produit, comment il est fabriqué et de les rassurer sur sa qualité. C'est un peu ce que je décrivais dans l'annexe, pour montrer que le lait canadien a une valeur ajoutée grâce aux valeurs de ceux qui le produisent et de la discipline qu'ils s'imposent pour protéger l'environnement, pour des raisons de biosécurité.
Il faut comprendre que le marché d'exportation des denrées agricoles est un marché de grande volatilité. En effet, de façon assez générale, tous les pays produisent d'abord pour leur population. Je le mentionnais tout à l'heure, à part la Nouvelle-Zélande, qui est un modèle agricole très particulier, la production laitière qui est l'objet d'un commerce international est relativement marginale. À peu près 8 à 9 p. 100 de la production laitière mondiale fait l'objet d'un commerce international. Oui, l'exportation peut être un débouché intéressant, mais pour nourrir la planète, on a besoin de toutes les agricultures de la planète, et toutes ne peuvent être similaires. Le Canada est un pays nordique, par exemple. Le capital avec le lequel nous produisons notre bien est vivant, et produire de la nourriture avec un capital vivant implique des contraintes. Si on veut que l'agriculture canadienne continue d'être prospère, on doit d'abord et avant tout s'assurer d'avoir une agriculture canadienne forte qui servira les citoyens à proximité. En fin de compte, parce que la qualité de notre lait est plus grande et que le savoir-faire de nos artisans fromagers est spécifique, nous pouvons certainement miser sur ces produits à valeur ajoutée pour conquérir des marchés. Cela, on peut le faire.
La sénatrice Tardif : Est-ce la même chose pour les œufs?
M. Lebeau : Oui, tout à fait. J'ajouterais une chose, et je le souligne dans mon mémoire. Si on considère les producteurs américains, l'œuf est un produit qui ne se transporte pas très bien sur de longues distances. Je mentionnais que la ferme moyenne représentait 1,1 million de poules aux États-Unis, alors que, au Canada, la moyenne est d'environ 22 000 poules. Cinq producteurs américains produisent chacun autant que toute la production canadienne. C'est une production excessivement intégrée.
Encore là, faire de la concurrence à ces producteurs, ce serait impossible d'après moi. Si on enlevait les tarifs demain matin, on pourrait compter avec une main le nombre de producteurs qui pourraient rester au Canada. Notre voisin du Sud a une échelle de production complètement différente de la nôtre.
D'autre part, nous n'avons pas changé d'agence de publicité.
[Traduction]
Le sénateur Oh : Selon une étude de l'Institut Fraser, on estime que le PTP pourrait représenter pour le Canada un avantage estimé à 0,5 p. 100 du PBI, ou 9,9 milliards de dollars. Pouvez-vous nous parler de cette estimation? Avez- vous réalisé une évaluation de l'incidence économique du PTP sur votre secteur?
[Français]
M. Bourbeau : En fait, notre compréhension de l'entente commerciale du Partenariat transpacifique pour le Canada a d'abord été qu'il s'agissait d'un objectif stratégique d'être partie prenante d'un accord qui, dans une région du monde, représente un potentiel important à long terme. Le Canada ne pouvait pas se priver d'être dans un train qui pourrait apporter son commerce vers de nouveaux horizons. Le Canada avait déjà un accord commercial avec les principaux pays membres; nous avions déjà un accord de libre-échange avec les États-Unis, nous en avons avec plusieurs pays membres du PTP. Cette facilité de commerce, nous l'avions déjà. Les nouveaux pays ne représentaient pas pour le Canada des enjeux importants, à court terme à tout le moins, et c'est ce que l'Institut Fraser confirme. Des études un peu similaires aux États-Unis montrent que, en soi, il n'y aura pas, du moins à court terme, de retombées extraordinaires. Cependant, d'un point de vue stratégique à plus long terme, on comprend que c'était le premier intérêt du Canada que de faire partie de cet ensemble économique.
M. Lebeau : De notre point de vue, le fait de concentrer plus de marchés aura de façon certaine un impact, que ce soit dans le secteur laitier, le secteur de la volaille ou dans notre secteur. Ce n'est pas pour rien que le gouvernement précédent avait tout de même déterminé qu'il y avait des compensations à offrir aux producteurs ou aux transformateurs. Déjà, même le gouvernement était d'accord pour dire qu'il y aurait un impact sur nos secteurs. Oui, dans le fond, les 2,5 p. 100 que nous allons consentir représentent une production que les producteurs ne pourront pas réaliser, et il est certain qu'il y aura un impact financier.
M. Bourbeau : J'aurais un complément d'information. Il faut comprendre que, pour accéder au marché des autres, il faut avoir des prix qui sont suffisamment bas pour y entrer. Il est difficile de percer le marché d'autres pays en raison des prix intérieurs qui sont plus bas. Si on prend l'exemple du marché de l'Union européenne, il est très difficile de percer ces marchés. Ce ne sont pas les tarifs qui protègent l'entrée. Ils reçoivent des subventions sur leurs prix, ainsi les producteurs sont en mesure d'assumer des prix beaucoup plus bas. La barrière à l'entrée n'est pas un tarif, mais l'effet d'une subvention, qui permet aux producteurs de supporter un prix plus bas. C'est une autre manière de protéger leur marché.
[Traduction]
La sénatrice Beyak : Pour les gens du public qui regardent nos séances à la télé — je suis toujours étonnée devant le nombre de Canadiens qui lisent nos rapports et regardent nos séances — le sénateur McIntyre a parlé du lait diafiltré et des protéines liquides. Pourriez-vous nous parler davantage des nouveaux produits qui sont offerts aux consommateurs pour qu'ils sachent ce qu'ils achètent, que ce soit de provenance canadienne ou américaine?
[Français]
M. Bourbeau : Je peux vous donner quelques indications sur la nature de ce produit. Quand la vache produit du lait, il y a des nutriments et ceux-ci se divisent en trois grandes familles : le gras, les protéines et le lactose. Pour fabriquer du fromage, la protéine est la plus importante. Lorsqu'elle est en présence d'un milieu acide ou de certaines bactéries, elle va s'agglomérer, un peu comme le lait qui coagule dans le jus d'orange. C'est la façon de fabriquer du fromage. Quand on prend cette portion du lait et qu'on enlève l'eau, on obtient les concentrés protéiques. Le lait est composé de 85 p. 100 d'eau et de 15 p. 100 de solides. Dans 100 litres de lait, on retrouve environ 4 kilos de gras, 3,5 kilos de protéines et 5 kilos de lactose et d'autres solides. On s'intéresse à la portion des protéines qui servira plus rapidement à fabriquer du fromage.
Du point de vue de la qualité, il n'y a pas vraiment d'éléments négatifs. Le consommateur n'a pas lieu de s'inquiéter. Par contre, le lait produit aux États-Unis n'est pas nécessairement soumis aux mêmes exigences environnementales ou sanitaires en ce qui concerne les médicaments vétérinaires. Les pratiques sociales ne sont pas les mêmes non plus. Au Canada, on doit respecter des normes pour nos travailleurs. Or, vous n'êtes pas sans savoir que dans tout le sud-ouest américain, de nombreux travailleurs n'ont pas de statut très clair. Disons les choses clairement : il y a de la main- d'œuvre à bon prix qui travaille dans des conditions qu'on ne tolérerait pas ici, au Canada. C'est la provenance des ingrédients qui est surtout importante. Je tiens à vous rassurer qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter quant aux produits qui contiennent ces ingrédients, mais sur le plan éthique et commercial, ce n'est pas dans l'intérêt de nos gens de choisir ces ingrédients.
[Traduction]
Le sénateur Moore : Merci, messieurs, d'être là.
Monsieur Bourbeau, j'ai une question pour vous au sujet de votre exposé. Elle découle de la question du sénateur McIntyre au sujet du lait diafiltré. Vous avez parlé de l'incohérence des agissements de l'Agence des services frontaliers du Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments. L'Agence des services frontaliers du Canada n'établit pas les tarifs. D'après ce que je comprends, elle les applique. Donc, pourquoi une agence canadienne devrait-elle prendre des décisions qui feraient du tort, comme dans le cas dont vous parlez, aux producteurs laitiers du Canada? Est-ce que les exportateurs américains qui se présentent à la frontière essaient de faire passer des règlements sur le commerce sous le nez de l'ASFC en disant : « Vous devez interpréter cela de cette façon »? Je suis sûr que si c'était l'inverse et que des Canadiens essayaient d'exporter aux États-Unis, l'interprétation qu'ils obtiendraient ne leur serait pas favorable. Comment est-ce possible?
[Français]
M. Bourbeau : Effectivement, vous avez raison. L'Agence des services frontaliers du Canada ne définit pas les tarifs. Ce sont les ententes commerciales qui le font. L'agence joue un rôle d'interprétation et décide quel produit appartient à telle ou telle catégorie. Les premières décisions sont prises aux frontières. L'Agence des services frontaliers du Canada détermine, par exemple, que le produit A est un lait diafiltré, qui doit être inscrit au chapitre 35 à titre d'ingrédient laitier. Lorsque l'ACIA tombe sur ce produit, elle devrait le qualifier d'ingrédient et de concentré protéique à plus de 85 p. 100. Le problème, à l'heure actuelle, c'est que lorsque le produit passe sous les yeux de l'Agence des services frontaliers du Canada, elle le qualifie d'ingrédient à plus de 85 p. 100. Lorsque le même produit arrive sous les yeux de l'ACIA, ce n'est pas un ingrédient, c'est du lait. Il n'y a pas un regard continu et constant entre les deux agences. C'est là que j'affirme qu'il y a un problème de cohérence.
[Traduction]
Senator Moore : Je comprends. Qui a le dernier mot ici? Est-ce le ministre de l'Agriculture? Cela se produit depuis quelques années, et cela a coûté 200 millions de dollars à nos fermiers l'année passée; ce sera peut-être la même chose cette année. Je ne sais pas, mais cela ne peut pas être une bonne chose.
J'ai lu dans votre mémoire un commentaire selon lequel le ministre a dit certaines choses à ce sujet. Il est au courant. Il sait que c'est sérieux, et ainsi de suite, mais qui doit agir et que faut-il faire? Est-ce à lui qu'il incombe de le leur dire? Il n'a aucun pouvoir sur l'ASFC, qui relève de la Sécurité publique. Mais il faut que quelqu'un dise à l'ASFC qu'elle doit suivre l'interprétation et les règles de l'ACIA. Qui le fait?
[Français]
M. Bourbeau : La réponse à votre question se trouve à la page 6 de notre document. Tout cela demande une collaboration. C'est un enjeu qui concerne plusieurs responsabilités ministérielles. C'est comme si on assistait à un match de ping-pong qui n'en finit plus. Notre première recommandation est la création d'un comité interministériel qui réunirait dans une même pièce tous les décideurs. L'Agence des services frontaliers du Canada relève du ministère de la Sécurité publique. L'ACIA est sous la responsabilité de deux ministres. Tous les enjeux qui touchent la santé publique sont sous la responsabilité de la ministre de la Santé. Les règlements qui sont de nature économique et administrative sont sous la responsabilité du ministre de l'Agriculture. La réglementation sur les normes de fabrication fromagère relève du ministère de l'Agriculture. De toute évidence, il y a un manque de communication. Lorsqu'un ministère fait une interprétation, l'autre agence devrait le voir de la même façon. Le ministre de l'Agriculture est responsable de l'ACIA pour l'application de la réglementation sur les fromages. Les normes de fabrication n'empêchent pas l'innovation. Les normes visent à rassurer les consommateurs que le produit qu'ils achètent est bel et bien un fromage. Il faut appeler les choses par leur nom. Si vous fabriquez autre chose, ne l'appelez pas un fromage. Tous les pays appliquent des normes et le Canada ne doit pas faire exception.
Le président : Vous n'êtes pas sans savoir que le Canada est reconnu à l'échelle mondiale comme l'un des pays qui produisent le meilleur lait. Il en est de même pour la qualité de ses œufs. Cependant, je déplore votre service de marketing. Je suis grand-père et, le samedi, je vais acheter du lait, mais je dois faire le tour de l'épicerie avant de trouver le comptoir des produits laitiers et des œufs. C'est ainsi dans tous les supermarchés. N'y aurait-il pas moyen de faire en sorte qu'en entrant dans l'épicerie, après les légumes, on trouve les produits laitiers? Peut-être que les personnes responsables de votre marketing pourraient réfléchir à cette idée.
M. Bourbeau : Je vais vous répondre très rapidement. À titre d'analogie, nous vendons des arbres, et le lait que vous allez acheter, ce sont les meubles. Notre côté traite davantage de la matière première. Savez-vous pourquoi les détaillants procèdent ainsi? C'est parce que les produits laitiers et les œufs sont des denrées très présentes dans le régime d'une grande partie des Canadiens. Leur but est de vous faire parcourir tout le magasin et de vous exposer à tous les autres produits. Je ne l'invente pas. C'est la raison pour laquelle, dans tous les magasins d'alimentation, le comptoir le plus éloigné de la porte est celui des produits laitiers. Cela oblige le consommateur à passer devant 50 000 autres stimuli pour qu'il achète d'autres produits. On l'a déjà souligné, pour vous rassurer, mais on n'a pas eu de succès. Si vous le dénoncez, vous aussi, peut-être qu'on remédiera à la situation.
Le président : C'est que, une fois rendu aux produits laitiers, le chariot est plein d'autres choses, et il n'y a presque plus de place pour y mettre le lait et les œufs.
M. Bourbeau : Ils ont donc atteint leur objectif.
Le président : Merci beaucoup de votre présence. Vous allez certainement retrouver de vos recommandations dans notre rapport. Merci d'avoir pris le temps de venir nous voir, car c'est très important pour nous. Merci et bon retour.
M. Bourbeau : Nous vous remercions de nous avoir invités.
Le président : Je demande aux membres de rester quelques minutes après que nos invités auront quitté la salle, car nous aurons un autre point à traiter.
Ce matin, chacun d'entre vous a reçu une copie du budget pour l'année 2016. C'est une proposition de budget que nous vous soumettons. Il vous revient de l'approuver, de le remettre en question ou de le transformer. Vous en êtes propriétaires. Nous le présenterons au comité du budget.
La sénatrice Tardif : Est-ce que vous nous proposez des dates?
Le président : Pour les voyages, ou la date finale pour déposer le budget?
La sénatrice Tardif : Les deux.
Le président : Le greffier du comité va répondre à votre question.
Kevin Pittman, greffier du comité : Très brièvement, nous vous proposerons des choix de semaines au mois de mai. Nous choisirons les semaines qui susciteront le plus d'intérêt. Quant au voyage, les dates seront fixées en fonction de l'exposition à laquelle nous voulons assister.
Aïcha Coulibaly, analyste, Bibliothèque du Parlement : L'exposition aura lieu du 7 au 9 novembre.
[Traduction]
Le président : Sénateur Moore, avez-vous une question?
Le sénateur Moore : En ce qui concerne la présentation du budget, est-ce que nous allons faire cela aujourd'hui? Il faut que cela aille au comité de régie interne. Quand lui sera-t-il soumis?
M. Pittman : La date précise n'a pas été fixée, mais ce qui se passerait, avec la semaine de relâche qui s'en vient, c'est que nous l'adopterions maintenant par anticipation.
Le sénateur Moore : Voulez-vous une motion, monsieur le président?
Je propose :
Que la demande de budget suivante, découlant de notre ordre de renvoi visant l'accès aux marchés internationaux et s'élevant à 401 236 $ pour l'exercice se terminant le 31 mars 2017, soit approuvée aux fins de présentation au Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration après l'examen final réalisé par l'administration du Sénat et supervisé par le Sous-comité du programme et de la procédure.
[Français]
Le président : Est-ce que tout le monde est d'accord?
Des voix : Oui.
Le président : Adoptée. Sur ce, nous levons la séance.
(La séance est levée.)