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AGFO - Comité permanent

Agriculture et forêts

 

Délibérations du Comité sénatorial permanent de
l'Agriculture et des forêts

Fascicule no 44 - Témoignages du 20 mars 2018


VANCOUVER, le mardi 20 mars 2018

Le Comité sénatorial permanent de l’agriculture et des forêts se réunit aujourd’hui, à 8 h 30, pour étudier l’impact potentiel des effets du changement climatique sur les secteurs agricole, agroalimentaire et forestier.

La sénatrice Diane F. Griffin (présidente) occupe le fauteuil.

[Traduction]

La présidente : Je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent de l’agriculture et des forêts. Je suis la sénatrice Diane Griffin et je viens de l’Île-du-Prince-Édouard. Je demanderais aux membres du comité de se présenter. Nous commencerons par le vice-président, le sénateur Maltais.

Le sénateur Maltais : Sénateur Ghislain Maltais, Québec.

La sénatrice Gagné : Raymonde Gagné, Manitoba.

Le sénateur R. Black : Rob Black, Ontario.

La présidente : Le comité poursuit aujourd’hui son étude sur l’impact potentiel des effets du changement climatique sur les secteurs agricole, agroalimentaire et forestier. Bien sûr, nous sommes très heureux d’être aujourd’hui à Vancouver. Nous avons entendu de superbes présentations hier. Vous êtes notre premier groupe aujourd’hui, et nous avons hâte de recueillir vos impressions sur la façon dont la province lutte contre le changement climatique.

Notre premier groupe se compose de M. Werner Kurz, chercheur à l’Institut du Pacifique pour des solutions climatiques à l’Université de Victoria, qui travaille aussi à l’emploi de Ressources naturelles Canada, Kathy Martin, chercheuse au Centre des études alpines du Département des sciences forestières et de la conservation à l’Université de la Colombie-Britannique, qui travaille aussi à l’emploi du gouvernement fédéral, pour Environnement Canada, de même que Lisa Wood, professeure adjointe en Science et gestion des écosystèmes, à l’Université Northern British Columbia.

Je vous remercie d’avoir accepté notre invitation à comparaître aujourd’hui. C’est très apprécié. Je vous invite maintenant à nous présenter vos exposés, après quoi nous vous poserons des questions à tous les trois. Nous commencerons par M. Kurz.

Werner Kurz, chercheur, Institut du Pacifique pour des solutions climatiques, Université de Victoria, à titre personnel : Je vous parlerai aujourd’hui des solutions possibles pour atténuer le changement climatique dans le secteur forestier de la Colombie-Britannique, mais notre équipe a aussi réalisé des analyses similaires à l’échelle du Canada et à l’échelle internationale.

L’Institut du Pacifique pour des solutions climatiques a été établi en 2008. Il s’agit d’un consortium qui regroupe quatre universités de la Colombie-Britannique. Il mène actuellement cinq grands projets, dont le projet de gestion du carbone des forêts, réalisé sous ma direction. Il regroupe des collaborateurs des universités, du Service canadien des forêts et du gouvernement de la Colombie-Britannique.

Je suis également chercheur principal au Service canadien des forêts, à Victoria. J’y dirige l’équipe responsable du Système national de surveillance, de comptabilisation et de production de rapports concernant le carbone des forêts. Les outils que nous avons mis au point au cours des 30 dernières années sont utilisés au Canada et dans le monde par les gouvernements, les universités, ainsi que l’industrie et les organisations environnementales.

Le changement climatique influe sur les mesures d’atténuation à notre disposition. Les effets du changement climatique sur nos forêts seront à la fois positifs et négatifs. En effet, nous constaterons une croissance accrue et des changements dans les taux de mortalité. Nous observerons aussi, et c’est déjà le cas, des changements dans les taux de perturbation. Il est donc nécessaire de bien comprendre où, quand et comment ces effets se feront sentir pour concevoir des stratégies d’atténuation du changement climatique et d’adaptation aux changements climatiques pour le secteur forestier.

Les forêts jouent un rôle central dans le cycle du carbone parce que le poids sec du bois se compose à 50 p. 100 de carbone. Ainsi, un mètre cube de bois, ce qui correspond à peu près à un poteau de téléphone, renferme environ une tonne de dioxyde de carbone qui a été retiré de l’atmosphère. Ce carbone se transforme en biomasse, et l’oxygène est libéré dans l’atmosphère.

Globalement, nous rejetons environ 35 milliards de tonnes de dioxyde de carbone dans l’atmosphère par la combustion de combustibles fossiles et la fabrication de ciment. À cela s’ajoutent 5 milliards de tonnes liées à la déforestation et aux changements dans l’utilisation des terres et ce, principalement dans les pays en développement. La bonne nouvelle, c’est qu’environ la moitié seulement du carbone libéré dans l’atmosphère par l’activité humaine y reste, parce que plus de l’autre moitié est captée par les océans et surtout les forêts, qui éliminent environ 30 p. 100 de toutes les émissions d’origine humaine dans le monde.

Nous nous intéressons vivement au potentiel des forêts comme puits de carbone parce qu’il pourrait être beaucoup touché par le changement climatique. À la diapositive suivante, vous voyez la représentation d’un million de mètres cubes de bois. En Colombie-Britannique, on en produit environ 67 chaque année. Il s’agit là de carbone retiré de l’atmosphère grâce à la croissance des arbres. De plus, en repoussant, les forêts en retirent encore plus de l’atmosphère. Le carbone contenu dans le bois de la Colombie-Britannique représente à lui seul plus de carbone que tout ce que peuvent émettre les autres secteurs combinés. Ainsi, la façon dont nous utiliserons ce bois déterminera la durée de la séquestration du dioxyde de carbone et le temps qui s’écoulera avant qu’il ne soit libéré de nouveau dans l’atmosphère.

Concrètement, les forêts éliminent des émissions de dioxyde de carbone dans l’atmosphère, qui se transforment en produits de valeur comme des bâtiments en bois massif, des patinoires et d’autres biens au service de la société.

On discute de la meilleure façon de gérer nos forêts. Ces deux graphiques illustrent deux façons de faire opposées. Le premier, celui du haut, illustre une stratégie mettant l’accent sur la conservation et l’optimisation de la quantité de carbone captée par les écosystèmes forestiers. Elle se traduira par une exploitation moindre et des programmes de conservation, mais le prix à payer en sera une moindre quantité de bois pour répondre aux demandes de la société en combustible et en produits du bois. Cette privation nous portera à utiliser davantage de combustibles fossiles et d’autres produits à fortes émissions de carbone comme l’acier et le béton pour répondre à la demande.

L’autre stratégie consiste à optimiser la quantité de carbone que nous retirons de l’atmosphère à l’aide des forêts. Cela signifie de garder nos forêts plus jeunes, d’accroître leur exploitation et d’offrir plus de biocarburants et de produits du bois à la société, mais en contrepartie, nous pouvons réduire les émissions associées aux combustibles fossiles et aux autres produits à fortes émissions comme le béton.

À titre de scientifiques, nous souhaitons alimenter la discussion en quantifiant les différentes stratégies d’atténuation et leurs effets sur l’atmosphère. Ainsi nous évaluons les mesures d’atténuation possibles au moyen d’une approche systémique telle que celle proposée par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat dans un rapport publié en 2007, auquel nous avons contribué.

L’idée, c’est que nous ne pouvons pas seulement nous concentrer sur la quantité de carbone séquestrée dans les écosystèmes forestiers, nous devons aussi quantifier la quantité de carbone captée dans les produits de bois récoltés, de même que les changements dans les émissions attribuables à l’utilisation de ces produits du bois; c’est ce qu’on appelle les avantages du remplacement de matériaux à fortes émissions par des produits du bois. Nous évaluons le rendement de ces mesures d’atténuation par rapport à un scénario de référence sans activité d’atténuation.

Diverses options s’offrent à nous pour atténuer l’effet du changement climatique grâce aux activités forestières. Il y a toutes sortes de choses qu’on puisse faire dans les forêts pour accroître l’utilisation des puits de carbone, retirer davantage de dioxyde de carbone de l’atmosphère et réduire les sources d’émissions notamment par une réduction du brûlage des rémanents. Il existe des moyens de séquestrer davantage de carbone dans les produits de bois par l’optimisation de la rétention du carbone dans les produits du bois de longue durée. Nous pourrions atténuer davantage les effets du changement climatique grâce à l’utilisation de produits du bois de ce type plutôt que d’acier et de béton.

Notre équipe a analysé quelques options. Comme vous pouvez le voir à la diapositive suivante, nous utilisons le même cadre d’analyse depuis une vingtaine d’années pour évaluer et consigner les émissions de gaz à effet de serre des forêts aménagées du Canada à la lumière de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Nous avons un modèle écosystémique qui décrit la séquestration de carbone dans les arbres, le bois mort, la litière et le sol. Nous disposons d’un modèle sur les produits ligneux récoltés qui nous permet d’estimer de combien les émissions diminuent ou augmentent selon que les produits du bois sont plus ou moins accessibles.

Nous avons réalisé et publié un certain nombre d’examens par les pairs, mais je ne vous présenterai que l’une des études, compte tenu des contraintes de temps. Cet article a été publié l’an dernier par notre équipe de l’institut. Il présente les mesures d’atténuation possibles pour le secteur forestier de la Colombie-Britannique. Nous estimons que d’ici 2050, la Colombie-Britannique pourra atteindre son objectif de réduction des émissions de 35 p. 100 grâce aux activités du secteur forestier, et ce, à un prix inférieur à 100 $ la tonne d’équivalent CO2, en plus des avantages socioéconomiques associés. Nous croyons même que le secteur pourrait contribuer encore davantage à cet effort si des mesures encore plus ambitieuses sont prises.

La diapositive suivante est un peu compliquée. Elle présente le résumé de 12 scénarios. Je n’aurai pas le temps de les présenter en détail, mais on voit que différentes activités produiront différents résultats pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans divers secteurs. Si l’on prend l’élément le plus à droite, qui correspond au portefeuille, on voit que l’objectif de réduction de 35 p. 100 de la Colombie-Britannique d’ici 2050 sera atteint. Cela passera par une exploitation accrue des puits forestiers et une réduction des émissions des sources non ligneuses, mais le prix à payer pour cela sera une augmentation des émissions associées aux produits du bois. Lorsqu’une barre dépasse la ligne, cela signifie que les émissions augmenteront. À l’inverse, quand la barre est sous la ligne, les émissions diminueront. La ligne noire correspond à l’effet net de toutes ces mesures combinées.

Dans le graphique suivant, les changements apportés aux systèmes qu’on trouvait dans le graphique que je vous ai montré un peu plus tôt sont intégrés au portefeuille. Ce portefeuille, dont les activités varient selon les régions, permettrait de réduire les émissions des écosystèmes forestiers. Ce scénario mise sur l’exploitation accrue des puits des écosystèmes forestiers. Il cause toutefois une augmentation des émissions associées aux produits du bois que nous utilisons, particulièrement aux biocarburants. Cependant, cette stratégie nous permet de réduire les émissions associées aux combustibles fossiles et à d’autres produits.

La diapositive suivante fait état des principaux messages à en retenir. En gros, la meilleure façon d’atténuer les effets du changement climatique grâce à l’utilisation de produits du bois consiste à utiliser ces produits pour séquestrer le carbone longtemps, notamment dans les bâtiments. Si nous utilisons le bois pour atteindre des facteurs de déplacement élevés, nous nous trouverons à utiliser du bois plutôt que des matériaux comme le béton, l’acier et le plastique, dont la fabrication génère des émissions importantes de par les procédés utilisés et la consommation de combustibles fossiles.

De nos jours, les constructeurs comme les architectes reconnaissent l’importance des produits ligneux de longue durée. Vous pouvez voir ici quelques exemples du type de bâtiments construits aujourd’hui. On voit à droite le plus haut immeuble contemporain de 18 étages en bois au monde, qui se trouve ici, à Vancouver. Il s’agit de l’édifice Brock Commons de l’Université de la Colombie-Britannique. Il importe de souligner que non seulement ces édifices contiennent une grande quantité de bois, mais qu’ils peuvent être très esthétiques.

Si nous voulons continuer d’utiliser le bois pour atteindre nos objectifs d’atténuation du changement climatique, nous devons aussi faire une gestion durable de nos forêts. Nous devons veiller à la recroissance des arbres. Il y a toutes sortes de façons dont nous pouvons optimiser les puits de carbone forestiers et réduire les sources d’émissions par des traitements sylvicoles comme l’éclaircie, la fertilisation ou d’autres formes d’aménagement forestier durable.

Il importe aussi de mentionner que dans l’histoire, assez peu d’activités d’aménagement forestier intensif ont été menées au Canada parce que d’un strict point de vue économique, ce n’est pas viable. Par contre, si l’on pouvait payer les services à l’écosystème afin de compenser pour tous les bienfaits associés au retrait de dioxyde de carbone de l’atmosphère grâce aux forêts et à l’aménagement forestier, il sera beaucoup plus facile pour la société de mener des activités mettant en valeur les puits de carbone dans les forêts.

En Colombie-Britannique, par exemple, les activités d’aménagement forestier génèrent 5 millions de tonnes d’émissions de dioxyde de carbone par année à cause du brûlage des rémanents. Il y a diverses raisons à cela, mais il est possible d’utiliser autrement cette biomasse, notamment pour la production de biocarburants liquides ou d’autres produits utiles pour la société.

Avant de terminer, permettez-moi de mentionner un autre effet très important du changement climatique qui se fait déjà ressentir dans les forêts de la Colombie-Britannique. Vous avez probablement entendu parler de la grande éclosion de dendroctone du pin ponderosa qui a décimé les forêts de la Colombie-Britannique et dont l’effet équivaut à l’émission d’un milliard de tonnes de CO2 dans l’atmosphère au cours des 10 dernières années, mais les feux de forêt de 2017 ont aussi été exceptionnels. La zone brûlée est la plus grande jamais enregistrée en Colombie-Britannique dans l’histoire connue. Plus de 1,2 million d’hectares de forêt ont brûlé. En l’espace de quelques semaines, les feux ont produit environ trois fois plus d’émissions que tous les autres secteurs de la Colombie-Britannique. Nous évaluons les émissions de dioxyde de carbone attribuables à ces feux de forêt à environ 180 millions de tonnes. Comme je l’ai dit, cela équivaut au triple des émissions de tous les autres secteurs combinés. Les autres recherches que nous menons visent à nous permettre de comprendre comment, où et quand le changement climatique touchera nos forêts, ce que nous pouvons faire pour accélérer la recroissance après une perturbation et comment nous pouvons réduire le risque de perturbations.

En conclusion, nous ne pourrons pas atteindre nos objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre sans nous efforcer d’abord et avant tout de réduire notre consommation de combustibles fossiles. Nous pouvons également utiliser le secteur forestier pour mettre en valeur les puits de carbone et ce qu’on appelle les émissions négatives nettes.

L’équipe de recherche de l’institut, de concert avec les scientifiques du Service canadien des forêts et du ministère des Forêts de la Colombie-Britannique, se demande comment le secteur forestier peut contribuer à atténuer les effets du changement climatique, comment les forêts seront touchées par les changements dans l’environnement et quelles politiques pourraient nous aider à atteindre nos objectifs d’atténuation à moindre coût et avec l’appui du public.

Le secteur forestier de la Colombie-Britannique peut contribuer grandement aux mesures d’atténuation, mais il est également vulnérable aux effets du changement climatique. Parmi les stratégies d’atténuation efficace, notons l’aménagement forestier durable, l’utilisation de produits ligneux de longue durée pour la séquestration de carbone, la substitution et la génération de bioénergie.

À titre de référence, je vous fournis aussi une liste de publications. Vous trouverez plus d’information sur ce projet et nos publications sur Internet. Je vous remercie beaucoup de votre attention.

La présidente : Merci de votre exposé.

Kathy Martin, professeure et chercheuse scientifique principale, Département des sciences forestières et de la conservation, Université de la Colombie-Britannique, à titre personnel : Je vous parlerai aujourd’hui des effets du changement climatique, de ce que nous en savons et de la faune qui peuple les forêts et les montagnes de l’Ouest canadien.

En préambule, je mentionne que la Colombie-Britannique se démarque par sa grande biodiversité. On y trouve 14 zones biogéoclimatiques, dont 12 zones forestières. Ces terres représentent les deux tiers du territoire de la Colombie-Britannique. Elles comprennent les forêts tempérées et boréales et s’étendent des forêts côtières humides et des chênaies-parcs jusqu’au sommet des montagnes et aux hautes steppes arbustives sèches, en passant par des zones désertiques.

Plus de 75 p. 100 du territoire de la Colombie-Britannique est considéré montagneux, c’est-à-dire qu’il se situe au-delà de 1 000 mètres d’altitude. Cette grande biodiversité forestière et montagneuse crée une très grande diversité faunique. La Colombie-Britannique abrite 80 p. 100 des mammifères et 70 p. 100 des oiseaux au Canada.

Aujourd’hui, je parlerai des divers phénomènes qui rendent les habitats forestiers et montagneux, ainsi que la faune elle-même, vulnérables aux effets du changement climatique, j’aborderai la difficulté de mesurer et de prévoir cette vulnérabilité et je ferai quelques propositions pour favoriser leur résilience au changement climatique. J’ai préparé quelques notes, que je n’ai pas remises à tout le monde, mais vous pourrez les avoir un peu plus tard.

Je parlerai d’abord de la vulnérabilité des environnements montagneux au changement climatique. Les environnements montagneux sont particulièrement vulnérables au changement climatique puisque ces habitats se composent de gradients environnementaux abrupts de par l’élévation et l’aspect qui leur sont propres. Pour vous en donner un exemple, pour chaque élévation supplémentaire de 100 mètres, on observe une diminution de la température moyenne de 0,65 degré. Pour atteindre la même diminution moyenne de température en latitude, il faut se déplacer de 90 kilomètres vers le nord. On observe donc le même changement 100 mètres plus haut que 90 kilomètres au nord. Ainsi, un infime changement de température peut avoir une très grande incidence sur l’habitat forestier montagneux.

Voici mon résumé des différents degrés de réactivité des systèmes au changement climatique. Premièrement, le climat change. Vous avez entendu de nombreuses présentations à ce sujet. C’est un fait mesurable, et tous les modèles climatiques affichent des résultats comparables, ce n’est qu’une question de degré. Les habitats changent aussi. Ici, on peut aussi observer des réactions définies et mesurables, mais elles sont moins prévisibles, comme mes collègues du secteur forestier vous en ont sûrement parlé hier et aujourd’hui, au fur et à mesure qu’on monte en altitude et que les types d’arbres changent.

Pour la faune, c’est autrement plus complexe, et les réactions varient d’une communauté forestière à l’autre, et même entre des espèces très proches, selon leur histoire de vie, leur écologie et les conditions de l’habitat où elles vivent. Ainsi, il faut d’abord et avant tout souligner l’importance fondamentale de bien comprendre l’écologie des espèces pour prévoir leurs réactions au changement climatique.

J’ai mis en référence deux documents très utiles. Il y a déjà deux rapports qui ont été produits à ce sujet : État des populations d’oiseaux du Canada 2012 et État des populations d’oiseaux de l’Amérique du Nord 2016. Ces deux documents de référence sont le fruit de la compilation réalisée par des organismes fédéraux, provinciaux et non gouvernementaux. Ils présentent les diverses populations d’oiseaux et les menaces qui pèsent contre elles. On y évalue la menace que représente le changement climatique et on y recommande des mesures d’intervention. On évalue que les populations d’oiseaux dans les forêts ont diminué, de manière générale, de 10 p. 100 au total. Les espèces vivant dans les forêts les plus matures sont celles ayant connu le déclin le plus abrupt.

Le changement climatique y est présenté comme la quatrième principale menace après l’urbanisation des forêts matures du continent, bien que dans la plupart des cas, il y ait un lien entre le changement de l’habitat et les effets du changement climatique. Je conclurai là-dessus.

Le changement climatique peut avoir des effets directs et indirects sur la faune. Il est peut-être plus simple d’en observer les effets directs, mais les effets indirects sont probablement les plus prévalents. Il y a des effets à court terme comme les hausses de température, la fréquence accrue des événements météorologiques, la baisse des températures minimales et tout et tout, puis il y a les effets à long terme qui touchent l’habitat. Je vais vous donner un exemple de chacun.

Dans le cadre de mes travaux sur la résilience et l’adaptation au changement climatique chez les espèces des milieux montagneux et forestiers, j’étudie la fréquence et la gravité accrues des événements extrêmes. On a beau chercher des moyens, mais quand survient un événement mortel, comme une tempête de deux jours qui gèle tout ou inonde tout, le moyen aura assez peu d’effets. Nous étudions toutefois à quel point ces oiseaux, ces animaux arrivent à s’adapter aux événements, aux intempéries quotidiennes comme aux tempêtes qui durent plusieurs jours ou aux événements extrêmes. Nous avons pu l’observer sur l’un de nos sites, et nous nous sommes rendu compte que les événements ordinaires d’une journée seulement ne posent pas de problème; les animaux peuvent y résister. En revanche, les événements qui durent plusieurs jours, comme de la pluie ou une tempête en plein milieu de la saison de reproduction, peuvent avoir des répercussions, selon la température. Il y a un lien entre la température et les précipitations. Si une tempête survient en période chaude, qu’il fait en moyenne 8 degrés, il n’y a pas de problème, ils pourront très bien s’en sortir. Par contre, si la tempête survient par temps froid, les problèmes de nidification seront de trois à neuf fois plus grands que les taux de référence. Nous déterminons alors qu’il s’agit de l’effet théorique de ces phénomènes sur l’aptitude des oiseaux à s’adapter aux événements extrêmes. Pouvons-nous prévoir s’il y aura davantage de tempêtes chaudes ou froides pendant la saison de la reproduction de mai et juin?

Quand je demande aux chercheurs qui font de la modélisation climatique s’il y aura plus de tempêtes chaudes ou froides dans telle partie de la province, ils me répondent qu’ils ne peuvent pas encore le prévoir. Cela montre bien un autre des défis à relever pour répondre aux questions que le comité se pose. Premièrement, il faut déterminer l’effet du changement des conditions environnementales sur les organismes ciblés et leur aptitude à s’y adapter, mais nous n’y arrivons pas encore. Nous devons ensuite nous doter de modèles climatiques plus précis sur les plans temporel et spatial. Par exemple, beaucoup de ces modèles se fondent sur une période d’un mois ou établissent des mesures annuelles ou mensuelles, alors que bon nombre de ces événements ne dureront que quelques heures ou quelques jours.

L’échelle spatiale, c’est autre chose, surtout dans les milieux montagneux. Nous devons élaborer des modèles climatiques permettant de prédire les conditions attendues à de plus petites échelles temporelle et spatiale. Des travaux sont déjà en cours à l’Université de la Colombie-Britannique et ailleurs. Vous rencontrerez peut-être un de ces scientifiques cet après-midi.

Ensuite, le changement climatique aura des effets sur l’habitat à long terme. En raison de la hausse des températures, la limite forestière se déplacera vers le nord. À des altitudes élevées, les arbres et les arbustes modifient le type d’habitat et la connectivité. Pour les espèces sauvages des forêts de basse altitude, ce mouvement ascendant se traduit par une augmentation de la superficie d’habitat. Toutefois, pour les espèces vivant en haute montagne, le déplacement ascendant de la limite forestière entraîne une plus grande fragmentation et la perte d’habitat. Le changement climatique fera des gagnants et des perdants.

Selon nos modèles climatiques, l’habitat approprié pour les espèces alpines des montagnes côtières de la Colombie-Britannique diminuera de 50 à 75 p. 100 d’ici 2080 à cause des changements d’origine climatique. Cela signifie que la taille des parcelles diminuera et que la distance qui les sépare augmentera, ce qui réduit ainsi la connectivité. Il nous faut chercher à conserver les populations viables. Nous devons faire en sorte que ces populations demeurent reliées ou, du moins, nous soucier des populations qui semblent gravement séparées.

Je veux terminer en disant un mot sur l’adaptation et la résilience de la faune face au changement climatique. Il s’agit d’un survol général de bon nombre d’écosystèmes. Globalement nous constatons que les écosystèmes intacts, comme les forêts, les montagnes et les déserts, ont une forte influence modératrice sur les effets du changement climatique. En fin de compte, plus un système est simplifié, plus la vulnérabilité de son habitat et de la faune au changement climatique a de répercussions. Les espèces sont moins résilientes dans un écosystème détérioré ou modifié.

Nous pouvons dire qu’on considère que les écosystèmes matures qui comprennent un grand nombre d’espèces ont un portefeuille de biodiversité plus complexe. Un portefeuille plus complexe signifie qu’ils sont plus résilients face à la perte de biodiversité puisque ces systèmes complexes ont plus de chances de conserver des fonctions s’il y a des perturbations environnementales.

Nous devons réussir à garder des fonctions écosystémiques complexes dans les habitats de nos forêts et de nos montagnes pour faire face au changement climatique. À cet égard, les oiseaux et d’autres espèces sauvages peuvent être de bons indicateurs de l’état de l’écosystème. En ayant toutes les cartes en jeu, on a plus de chances de pouvoir gérer un événement à court terme ou à long terme que si l’on n’en a que la moitié.

J’ai inclus dans mes notes un certain nombre de références concernant les études dont j’ai parlé aujourd’hui. Merci.

La présidente : Excellent. Merci.

Lisa Wood, professeure adjointe, Science et gestion des écosystèmes, Université Northern British Colombia, à titre personnel : En fait, Mme Martin a conclu sur un sujet qui convient très bien par rapport à ce dont je voulais d’abord parler.

Mes recherches portent surtout sur l’adaptation des arbres et des forêts aux effets directs du changement climatique dont a parlé Mme Martin. Quelles sont les répercussions du changement de température, de la fréquence des tempêtes et du changement des précipitations sur nos arbres et nos forêts? Il y a ensuite les effets indirects. Dans quelle mesure le changement climatique a-t-il des répercussions sur les composantes de la santé des forêts? De quelle façon modifie-t-il la fréquence de feux de forêt? Je vais parler des effets directs. Comment la température et les précipitations influencent-elles nos arbres et nos forêts?

Je suis également une forestière professionnelle inscrite en Colombie-Britannique. J’ai travaillé un peu dans le secteur. J’ai toujours ce lien quant à ce que nous pouvons faire pour mieux gérer les choses pour renforcer la résilience de nos forêts au changement climatique.

À mon avis, les effets du changement climatique sont directement liés à notre capacité de maintenir la résilience de nos forêts. Comme l’a dit Mme Martin, une forêt résiliente en est une qui a une très grande biodiversité. Si nous avons un paysage et des peuplements forestiers structurellement variés et riches en biodiversité composés d’éléments riches en biodiversité et structurellement variés, nous aurons alors un système plus résilient pouvant lutter contre tous les effets directs ou indirects du changement climatique. C’est important, non seulement sur le plan environnemental pour les espèces sauvages, la qualité de l’eau, la préservation des forêts à des fins d’utilisation, mais également sur le plan économique, pour le maintien d’un approvisionnement constant en bois qui soit durable.

Dans la province, et partout au Canada, un grand nombre de personnes étudient tous ces effets indirects. Des gens comme Alex Woods, Nick Ukrainetz et Greg O’Neill, du service des forêts, ici, et Sally Aitken, de l’Université de la Colombie-Britannique font beaucoup de travaux sur les effets indirects des forêts et leur productivité associée à la résilience.

Les forêts de la Colombie-Britannique sont-elles résilientes actuellement? Je répondrais oui, non et nous l’ignorons. Cela s’explique par le fait que nous avons certaines forêts qui sont préservées. Elles ont une très grande biodiversité. Elles sont bien adaptées au site, et elles poussent depuis longtemps. Nous sommes dans une période de transition dans laquelle les forêts sont de plus en plus fortement aménagées. Dans cette transition, depuis les 40 dernières années de plantation en Colombie-Britannique, nous exerçons une gestion adaptative. Nous essayons différents traitements sylvicoles. Nous plantons différentes essences et déterminons ce qui fonctionne selon les sites. C’est une expérience d’apprentissage pour nous. Nous avons maintenant des plantations forestières âgées de 40 à 50 ans. Certaines, qui se trouvent sur la côte, sont un peu plus âgées, mais à l’intérieur de la Colombie-Britannique, d’où je viens, nos plus vieilles plantations ont environ 40 ans. J’examine dans quelle mesure elles sont adaptées au changement climatique et quels types de bois et d’arbres nous pouvons nous attendre de voir au cours des 50 prochaines années pour l’approvisionnement en bois et la création de cette belle forêt résiliente au changement climatique.

Ce sont en partie ces peuplements forestiers aménagés qui ne sont pas résilients. Dans les débuts de nos activités de plantation, il s’agissait en grande partie de plantation monospécifique. Nous avons planté de nombreuses essences similaires partout sur le territoire. Nous nous concentrons dans le Nord de la Colombie-Britannique, pour l’approvisionnement en bois, sur l’aménagement de ce que nous appellerions les essences de prédilection. Nous plantons seulement deux ou peut-être trois essences pour constituer nos produits forestiers. Le pin de Murray et l’épinette blanche sont nos essences de prédilection dans l’intérieur de la Colombie-Britannique. Ils entrent dans la composition des produits que nous produisons et fabriquons ici en Colombie-Britannique.

La province compte quelques autres essences. Plus au sud et vers la côte, nous avons probablement en tout huit essences de prédilection à aménager environ. Ce sont des espèces que nous plantons et que nous gérons activement en tant qu’aménagistes forestiers.

Plus globalement, concernant ce que nous considérons comme nos essences acceptables, nous pourrions ajouter peut-être sept autres espèces à ce bassin, ce qui porte à 15 le nombre de conifères différents dans la province pour lesquels nous pratiquons une forme quelconque d’aménagement forestier dans deux zones biogéoclimatiques de la Colombie-Britannique. Dans la partie nord-est, il s’agit de notre zone boréale à épinette blanche et épinette noire se trouvant dans des régions très spécifiques. Nos forêts d’épinette d’Engelmann et sapin subalpin sont des forêts à fortes émissions. À deux ou trois endroits, nous considérons les essences feuillues comme des essences de prédilection ou acceptables; or, ce sont les seuls endroits dans l’extrémité nord-est de la Colombie-Britannique.

Dans le reste de la province, la plupart du temps, les essences feuillues sont considérées comme celles qui ne sont pas préférées et acceptables pour l’aménagement. Pour l’essentiel, nous les éliminons en tant qu’espèces concurrentes à nos conifères. Je considère cela comme un problème sur le plan de la résilience, car nous diminuons la biodiversité de nos forêts qui, comme nous venons de la définir, est très liée à la résilience.

Un volet sur lequel nous pourrions vraiment mener beaucoup plus d’études et apporter des améliorations dans le cadre de notre gestion, c’est l’intégration de ces essences à nos régimes d’aménagement; l’examen de la mesure dans laquelle la connectivité des forêts de feuillus et des forêts de conifères favoriserait une meilleure résilience; et peut-être même une réflexion sur la réalisation de gains économiques découlant de cela. Si nous pouvions inciter, sur le plan économique et environnemental, les détenteurs de permis forestiers à examiner leurs feuillus, alors un meilleur tableau serait dressé. Si les avantages se limitent à l’aspect environnemental, ne favorisent pas la création d’emplois et ne sont pas financièrement avantageux pour l’entreprise, la pilule est difficile à avaler. Les motiver au moyen d’incitatifs à la création d’un marché pour les essences feuillues de l’Ouest constituerait une façon d’envisager de créer une forêt plus résiliente en général en Colombie-Britannique.

Notre province étudie les réactions des essences au changement climatique. Comment le changement climatique modifie-t-il leur croissance au fil du temps? J’ai fait des travaux sur ce volet. J’étudie le pin de Murray et l’épinette blanche dans la partie nord de l’intérieur de la Colombie-Britannique; les effets qu’a le climat sur notre bois depuis les 50 dernières années; et ce qui se passe sur le plan de la croissance des arbres. Je découvre des choses intéressantes. Nous constatons que dans les zones où les précipitations ne sont pas limitées, les arbres bénéficient d’un environnement plus chaud. La température augmente, mais le niveau de précipitations est toujours correct. À ces endroits, la croissance est forte. Les arbres adorent cela. Ils sont très productifs.

En même temps, lorsque j’examine le bois de ces essences, au niveau cellulaire, je constate qu’il s’agit de jeunes arbres ou d’arbres d’âge moyen. Ils ne sont pas encore arrivés à maturité, mais ils produisent de très grandes cellules à parois minces. Ça va pour l’instant, car nous avons une série de limites acceptables quant à ce qui ferait un bon produit. Au bout du compte, c’est quelque chose à surveiller. Si nos cellules continuent de croître et de s’amincir, elles sont aussi moins denses et moins solides structurellement que le seraient nos cellules plus épaisses et plus petites. Cela entraînera probablement un changement dans la qualité du produit provenant des arbres qui poussent à ces endroits.

Ensuite, nous avons des zones vraiment différentes où la réaction est très particulière à l’emplacement. La quantité d’eau que reçoivent ces sites en une année diminue. Ce sont des zones où les quantités de précipitation sont plus faibles et elles sont sensibles à la sécheresse. Bien souvent, nous constatons que les arbres qui poussent à ces endroits sont résistants à la sécheresse. Ils vont bien. Ils survivent pour le moment, mais ils poussent beaucoup plus lentement qu’ils pousseraient s’il y avait au moins un peu plus de précipitations. Ils poussent plus lentement. Ils produisent de très petites cellules dont les parois sont très épaisses, ce qui est exactement l’inverse de ce que nous avons observé sur les autres zones. Ces arbres produisent du très bon bois, mais pas en grande quantité, de sorte que notre approvisionnement en bois diminue. Nous avons ces deux types de sites très différents.

L’autre principale observation que j’ai faite jusqu’à maintenant, c’est que, en haute altitude, nous avons des arbres qui sont très sensibles à la température estivale, aux pics estivaux. Comme le disait Mme Martin, un peu plus haut en altitude, il y a une énorme différence de température. Ils sont très sensibles aux changements de température l’été.

Dans nos zones de plus basse altitude, ils ne sont pas très sensibles à la température estivale. Ils profitent d’une saison de croissance de plus en plus longue. Ils réagissent vraiment à nos régimes de précipitation et de température du printemps et de l’automne. Ils poussent plus longtemps et deviennent plus larges tout au long de la saison, et il y a peut-être un peu plus de carbone dans leurs parois cellulaires, ce qui est bon pour la séquestration.

Je vais m’arrêter là. Mon principal message, c’est qu’il nous faut comprendre ce qui se passe chez nos essences et comment elles interagissent à l’échelle du paysage pour produire de la résilience.

Voici mes réflexions sur ce qu’il faut faire maintenant. Sur le plan de la gestion, nous devons définir clairement les priorités du public et du gouvernement relativement au changement climatique. J’investis beaucoup d’efforts à l’échelle provinciale à l’heure actuelle. Parfois, si l’on dit à des gens qu’ils doivent gérer le changement climatique, cela peut leur sembler très ambigu et angoissant. Il est vraiment important de définir clairement ce que cela signifie pour des aménagistes forestiers. Il nous faut créer des incitatifs pour favoriser une augmentation de la biodiversité et de la structure et examiner les choses à l’échelle du paysage. Nous devons inciter les compagnies forestières à communiquer entre elles de sorte que nous utilisions le bois de manière optimale et que nous créions des paysages résilients, possiblement en créant un marché pour le bois de feuillus de l’Ouest canadien. Nous avons besoin d’un incitatif économique pour créer la biodiversité et, bien entendu, poursuivre nos recherches sur les effets cumulatifs, les associations d’espèces dans la forêt et une planification à l’échelle du paysage holistique. Merci.

La présidente : Très bien. Merci.

C’est le vice-président du comité, le sénateur Maltais, qui posera les premières questions.

[Français]

Le sénateur Maltais : Mesdames et messieurs, bienvenue. Merci de vos témoignages. Juste avant d’entrer dans le vif du sujet, monsieur Kurz, j’aimerais que vous m’expliquiez un peu la loi sur les forêts en Colombie-Britannique.

Si j’ai bien compris, 95 p. 100 du territoire appartient à la Couronne, et la Couronne délivre des permis d’exploitation aux deux entreprises forestières ou minières. Quelles sont les obligations de ces entreprises, une fois qu’elles ont signé le contrat avec le gouvernement, pour exploiter tant de mètres carrés de bois? Quelles sont les obligations qu’elles ont envers le gouvernement?

[Traduction]

M. Kurz : Je devrais dire tout d’abord que je suis un scientifique des écosystèmes qui se penche sur les cycles du carbone et non sur les règles, mais je vais essayer de répondre à votre question brièvement.

En Colombie-Britannique, entre 95 et 96 p. 100 des forêts sont des forêts publiques, des forêts qui appartiennent à la Couronne. La Couronne délivre des permis, en fonction d’une zone ou du volume, à des compagnies forestières qui ont le droit et l’obligation de récolter du bois là-bas. Cela s’accompagne de toute une série d’obligations pour le rétablissement des forêts. Après une certaine période, il faut montrer que les arbres sont considérés comme étant établis. Cela veut dire qu’il doit y avoir un nombre suffisant d’essences acceptables sur le site. Il faut s’attendre à ce que ces arbres établis soient libres de croître et qu’il n’y ait pas de concurrence exercée par des arbustes ou d’autre végétation. On s’attend à ce que les compagnies utilisent la régénération naturelle ou l’ensemencement, la plantation, et cetera, pour établir une forêt et surveiller sa performance par la suite.

Il y a de nombreuses autres obligations sur la construction routière, l’entretien des ponceaux, et cetera. En gros, l’essentiel, c’est que dans les zones où les forêts sont exploitées à des fins commerciales, il est obligatoire de rétablir la croissance de la forêt. Il n’est pas obligatoire de rétablir les forêts sur les territoires de récolte non liée à l’exploitation du bois. En Colombie-Britannique, la superficie forestière totale est d’environ 55 millions d’hectares, et on peut faire de la récolte sur 23 millions d’hectares. Dans le reste de la zone forestière, si des feux de forêt ou des insectes détruisent la forêt, personne n’a l’obligation de rétablir la forêt.

Dans le cadre de l’initiative sur le carbone forestier, notamment, la Colombie-Britannique investit des fonds dans le rétablissement des forêts dans des zones où il n’y a pas de récolte. Par conséquent, il n’est pas obligatoire de la part de l’industrie de rétablir ces forêts. Utiliser des ressources publiques pour le faire permet d’améliorer un puits de carbone, ce qui autrement ne se produirait pas ou, du moins, pas assez rapidement.

[Français]

Le sénateur Maltais : Ma question était d’établir comment on bâtissait une forêt. En règle générale, la politique qui s’applique, en tout cas dans l’Est du Canada, c’est « un arbre coupé, un arbre planté », pour éviter qu’il y ait une génération d’arbres indigènes non utiles qui n’absorberont pas le carbone, contrairement aux résineux. Alors, je pense que vous ne l’avez pas, cette politique. C’est parce que si vous laissiez le territoire se repeupler naturellement, il y aurait une population indigène de peu de valeur qui prendrait X années avant d’arriver à maturité et n’absorberait pas le carbone nécessaire, comme les résineux. C’est ma compréhension. Bien sûr, la politique d’un arbre coupé, un arbre planté, ça évite 20 ans de non-absorption de carbone. Je pense que la nature fait bien ce qu’elle fait. Si un arbre à maturité absorbe une quantité X de carbone, un arbre en croissance va en absorber moins, mais à une plus longue échéance, il va l’absorber. C’est ma compréhension de ce point.

Vous avez dit au début une chose qui m’a frappé. Vous avez fait beaucoup d’études en Colombie-Britannique, dans des universités de la Colombie-Britannique, et à l’international. Quelles sont les universités à l’international avec qui vous avez travaillé? Lesquelles avez-vous consultées pour en arriver à votre rapport?

[Traduction]

M. Kurz : Au cours des 15 dernières années, nous avons travaillé avec le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, qui représente plusieurs centaines de scientifiques de diverses universités partout dans le monde. Nous travaillons en étroite collaboration avec les services des forêts du Canada, des États-Unis et du Mexique. Nous collaborons aussi étroitement avec le Centre commun de recherche de l’Union européenne, qui représente 26 pays utilisant notre modèle. Nous travaillons avec diverses universités au pays : l’Université de Toronto, l’Université Laval, l’Université de la Colombie-Britannique, l’Université Simon Fraser, l’UNBC et de nombreuses autres.

Le travail réalisé est le fruit de la collaboration de nombreux scientifiques de partout dans le monde. Nous publions de nombreuses publications scientifiques évaluées par les pairs dans le but d’établir la crédibilité de notre travail. Le système que nous utilisons pour faire rapport des émissions et suppressions de gaz à effet de serre dans les forêts du Canada est également assujetti à un examen international en vertu de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques.

Je ne sais pas si cela répond à votre question.

[Français]

Le sénateur Maltais : Oui. En Colombie-Britannique, quelle est la quantité de carbone forestier représentée quant aux émissions de gaz à effet de serre? Quel est le pourcentage concernant par exemple le carbone agricole ou le carbone industriel?

[Traduction]

M. Kurz : Tout d’abord, l’importance relative du secteur forestier varie grandement au fil du temps. Dans les années 1990, les forêts de la Colombie-Britannique étaient surtout des puits de carbone, puisque les taux de croissance étaient supérieurs aux émissions de dioxyde de carbone, malgré l’exploitation forestière.

L’année 2000 a marqué le début de grands changements, puisque le dendroctone du pin ponderosa a commencé à affecter ce qui représente aujourd’hui environ 17 millions d’hectares de terre de la Colombie-Britannique, sur une période de 10 ans. Le puits de carbone a été réduit de manière drastique, puisque des arbres qui autrement auraient poussé ont cessé d’éliminer le dioxyde de carbone dans l’atmosphère et que les arbres morts ont commencé à en libérer.

De plus, nous avons connu une série de feux de forêt. Ceux de 2017 ont été les pires, mais ceux de 2003 et de 2004, entre autres, ont été très dommageables également. Le bilan du carbone des forêts et la contribution au bilan provincial varient grandement d’une année à l’autre et d’une décennie à l’autre. Au cours des dernières années, les forêts ont été une source nette d’émissions en raison de ces grandes perturbations.

[Français]

Le sénateur Maltais : Mais il demeure quand même le poumon nécessaire à l’absorption du carbone. Je pense que l’on s’entend là-dessus.

J’aurais une petite question pour Mme Martin, si vous le permettez. Vous avez parlé bien sûr des effets du réchauffement de la planète sur l’ornithologie. Quels sont les effets sur la faune, comme les cervidés, que ce soit le caribou, l’orignal ou la chèvre de montagne? Quels sont les effets sur leur vie des différences de température que vous avez notées?

[Traduction]

Mme Martin : Oui, c’est la même tendance générale. C’est l’incertitude. Je crois qu’on a fait un certain travail pour les ongulés en Alberta. De façon générale, les conditions hivernales incertaines du Canada représentent un problème important pour bon nombre des espèces de montagne, comme les ongulés et le chevreuil. Le réchauffement ou le givrage précoces peuvent représenter un énorme problème pour les mammifères qui hibernent. S’il fait habituellement -30 degrés et que la température atteint les 10 degrés et qu’il pleut, pour ensuite geler de nouveau, c’est très difficile pour les marmottes, les picas et bon nombre d’autres mammifères qui hibernent ou non. Les taux de mortalité sont élevés. Pour les espèces résidantes, les conditions hivernales incertaines représentent un gros problème. Les hivers plus doux ne les aident pas.

La sénatrice Gagné : Quel est le pourcentage d’arbres récoltés chaque année en Colombie-Britannique? Monsieur Kurz, le savez-vous?

M. Kurz : Beaucoup moins de 1 p. 100 de la zone par année. Je n’ai pas de pourcentage exact. Je ne le sais pas.

La sénatrice Gagné : C’est moins de 1 p. 100.

M. Kurz : Beaucoup moins de 1 p. 100. Je pourrai vous transmettre les chiffres.

La sénatrice Gagné : C’est bon. Disons que c’est moins de 1 p. 100 des arbres qui sont coupés chaque année. On réintègre ces arbres dans la forêt, n’est-ce pas? Après la coupe, il y a la reforestation. Comment cette reforestation est-elle gérée? Quels sont les facteurs dont vous tenez compte lorsque vous prenez des décisions relatives aux espèces d’arbres qui sont plantés dans ces forêts?

Mme Wood : Les aménagistes forestiers respectent certaines normes de densité. Les nôtres sont des lignes directrices provinciales désignant les espèces qui conviennent aux divers sites. Notre province est divisée en 14 zones biogéoclimatiques, selon les régimes climatiques actifs sur les sites, la topographie, les espèces forestières dominantes, les régimes hydriques et les régimes nutritifs des forêts. Tous ces facteurs sont pris en compte. Il faut que l’espèce choisie pour un site donné soit appropriée pour la zone dans laquelle elle se trouvera et son régime hydrique, et il faut tenir compte de ce qui poussait naturellement dans la zone avant la récolte. Bien sûr, nous encourageons toujours la plantation d’espèces qui étaient déjà présentes de façon naturelle au départ. Nous avons toutefois réalisé certains progrès à cet égard. Certaines lois provinciales permettent désormais de tenir compte d’un éventail de progrès en raison des changements climatiques.

Premièrement, l’aménagiste forestier tiendra compte des stocks. Nous avons des stocks génétiquement améliorés que nous considérons être des sources de semences de catégorie A, qui ont fait l’objet de recherches et d’essais en ce qui a trait à la résistance aux organismes nuisibles ou à l’amélioration de la productivité. Ces stocks seraient donc plantés dans la zone appropriée.

La sénatrice Gagné : Qu’en est-il de la résistance? Quels sont les facteurs pris en compte?

Mme Wood : Nous ne plantons plus de monocultures. Pour accroître la biodiversité, il faut éviter de planter les mêmes espèces. Il faut les mélanger le plus possible. Dans certaines régions de la Colombie-Britannique, surtout au nord, une seule espèce prolifère dans l’ensemble d’une zone. Elles peuvent avoir une faible résilience naturelle. Nous tentons de respecter le processus naturel tout en renforçant la résilience des espèces. Nous n’allons pas planter 10 espèces différentes simplement pour la forme.

Nous en tenons compte, mais nous avons besoin de plus d’information sur les associations d’espèces, sur leurs interactions et sur la réaction d’une espèce à la présence d’une autre. Les forestiers ne voudront pas planter deux espèces côte à côte si elles se livrent une concurrence directe et que cela ne donne pas de bons résultats.

Nous voulons miser sur la dynamique de deux, trois ou quatre espèces qui vont très bien ensemble. Nous voulons tirer profit des diverses ressources, à divers moments complémentaires, plutôt que d’avoir des espèces qui se livrent une concurrence directe, afin de créer une bonne source d’approvisionnement en bois et une belle forêt résiliente pour les autres éléments qui la composent, comme les animaux sauvages.

M. Kurz : J’aimerais ajouter deux choses : la réglementation sur la provenance des semences a toujours été très stricte. On ne peut pas prendre les semences d’une région pour les planter plus loin. On a toutefois introduit le concept de la migration assistée. Comme l’a fait valoir Mme Martin, le changement climatique est associé à un décalage des zones de température vers les nord. Puisqu’il faut beaucoup de temps pour qu’un arbre atteigne la maturité, l’idée derrière la migration assistée est de prendre une espèce indigène et de la déplacer quelque peu vers le nord en prévision du climat futur. Bien sûr, il faut faire attention de ne pas trop déplacer les espèces, parce qu’elles doivent survivre au climat d’aujourd’hui.

J’aimerais aussi faire suite aux commentaires de Mme Wood sur l’importance des espèces feuillues. Tout comme les conifères, les feuillus éliminent le dioxyde de carbone de l’atmosphère. Ils agissent eux aussi à titre de puits de carbone, mais ils présentent également d’autres caractéristiques comme la réduction des risques de feu de friches à certaines périodes de l’année. Leur cime ne s’embrase pas aussi facilement que celle des conifères.

La sénatrice Gagné : Pardon.

M. Kurz : Leur cime ne s’embrase pas, donc le feu ne pénètre pas autant à l’intérieur du feuillage lorsqu’il y a des feuilles vertes. Les feuillus jouent un rôle important dans la résistance d’un paysage à un incendie.

Enfin, ils ont une autre incidence sur le climat. Ils reflètent la lumière du soleil de diverses façons. L’albédo, la fraction de la lumière du soleil qui est reflétée dans l’atmosphère, détermine le réchauffement de la surface de la Terre. Sur une surface glacée, tout est reflété. Si la glace fond et qu’il y a des eaux libres, elles absorberont la chaleur. Il en va de même pour les forêts. Les forêts de couleur foncée absorbent plus de chaleur. Les espèces feuillues de couleur plus pâle refléteront la chaleur. On peut donc moduler les impacts du changement climatique, non seulement par l’entremise des gaz à effet de serre, mais aussi par l’entremise d’autres impacts biophysiques sur le système climatique.

Mme Martin : Je vais éclaircir un dernier point et Mme Wood pourra probablement vous fournir des détails sur nos forêts à haute altitude et sur le cadre temporel de la plantation. Bien sûr, les entreprises veulent des arbres que l’on peut planter rapidement afin de respecter leurs obligations relatives au peuplement forestier. Souvent, les événements climatiques se produisent après que le peuplement est établi et toutes les espèces meurent, comme cela a été le cas dans les zones à épinette d’Engelmann et à sapin subalpin. Il y a aussi beaucoup plus d’incertitude. Non seulement la croissance est-elle plus lente, mais l’incertitude est aussi plus importante. Mme Wood voudra peut-être aborder ce sujet.

Mme Wood : Oui, c’est exact. Pour vous donner plus de détails à ce sujet, nos obligations en tant qu’aménagistes forestiers prennent fin lorsque les arbres sont établis. Je ne sais pas si tout le monde connaît ce terme. Nous l’avons utilisé à quelques reprises ici. Si l’on procède à l’évaluation d’un peuplement forestier de 10 ou 15 ans, qui est libre de la plupart des effets perturbateurs, qui pousse bien, qui a la bonne densité et qui est beau, alors nous en avisons le gouvernement et le détenteur du permis forestier n’est plus responsable de gérer ce peuplement. À partir de ce moment, jusqu’à ce que le peuplement arrive à maturité — à 80 ou à 100 ans — il ne sera plus surveillé ni géré.

Nous réalisons aujourd’hui que bon nombre d’organismes nuisibles et de perturbations arrivent après cette période. Personne ne surveille les arbres. Personne ne fait le suivi. On reconnaît maintenant cela et on prend certaines mesures pour y remédier, mais il n’y a rien dans la loi pour veiller à ce que cela se fasse.

Le sénateur R. Black : J’ai quelques questions à vous poser. Qui est responsable de l’éradication des espèces feuillues dont vous avez parlé? Est-ce que ce sont vos aménagistes forestiers?

Mme Wood : Oui. Bon nombre des espèces feuillues font concurrence aux arbres de récolte. Ainsi, les titulaires de permis forestier les éliminent de façon mécanique ou chimique aux premiers stades, selon ce qui est permis dans la région et selon leur nombre ou leur degré de concurrence. Tous les calculs font l’objet d’une décision de la part des gestionnaires.

Le sénateur R. Black : C’est dans le but d’atteindre le stade de la croissance autonome, n’est-ce pas?

Mme Wood : C’est exact. C’est pour veiller à ce que les arbres de récolte n’aient pas de concurrence à ce stade.

Le sénateur R. Black : Est-ce que la capacité des feuillus, des conifères et des autres espèces à absorber ou à séquestrer le carbone varie?

M. Kurz : La capacité d’une espèce à séquestrer le carbone est directement proportionnelle au taux de croissance et à la densité relative du bois. Un mètre cube de bois de chêne sera beaucoup plus lourd qu’un mètre cube d’épinette, mais en règle générale, l’épinette accumule le carbone beaucoup plus rapidement que le chêne. Ce sont de grandes généralisations.

Le sénateur R. Black : Oui.

M. Kurz : En gros, la quantité de bois produite est proportionnelle à la quantité de carbone captée dans l’atmosphère.

Le sénateur R. Black : Dans l’une des diapositives supplémentaires de votre document, vous abordez la question des zones de démonstration de la gestion du carbone forestier. Sont-elles nombreuses dans votre province?

M. Kurz : Non, pas du tout pour le moment. Je ne crois pas qu’aucune région de la province ne soit désignée comme telle. C’est une idée dont j’ai discuté avec plusieurs personnes au Canada et ailleurs dans le monde. J’étais en Suède la semaine dernière et j’y ai fait la même proposition.

Si nous voulons atténuer les changements climatiques par l’entremise de la gestion forestière, il faut investir des fonds, ce qui signifie qu’il faut avoir le soutien du public. Pour cela, il faut montrer aux populations essentiellement urbaines ce qui se passe dans l’arrière-pays. À l’heure actuelle, cette information n’est pas disponible. On voit souvent des campagnes qui montrent la laideur des coupes à blanc. On voit rarement des photos qui montrent l’état des forêts dans les 10, 20, 50 ou 100 années qui suivent une coupe à blanc.

Pour tirer parti de l’énorme potentiel des forêts et, de façon plus générale, de la gestion des terres, pour contribuer à l’atténuation des changements climatiques, nous devons pouvoir montrer au public que les conditions futures souhaitées peuvent être atteintes dans ces forêts, qu’il s’agisse de la biodiversité, des combinaisons d’espèces ou d’autres.

Ainsi, je vois l’occasion de créer des zones de démonstration où nous pourrions tenir un dialogue avec les intervenants sur les résultats des mesures prises il y a 10 ou 30 ans. Dans le contexte de la gestion adaptative, nous surveillons ce qui a été mis en œuvre. Nous examinons les résultats. Nous utilisons les données pour réviser nos approches en fonction de ce qui a bien fonctionné et ce qui n’a pas fonctionné.

Le sénateur R. Black : J’aimerais vous poser une dernière question au sujet de l’utilisation des produits du bois. On voit ici quelques photos de grands immeubles. Savez-vous si on a largement utilisé les technologies du bâtiment écologique dans le secteur agricole?

M. Kurz : Avant, toutes les étables étaient faites en bois.

Le sénateur R. Black : C’était avant.

M. Kurz : Non, je n’ai pas d’exemple à vous donner, mais cela ne veut pas dire qu’ils n’existent pas. Bien sûr, je crois que les grandes structures agricoles d’aujourd’hui sont faites en…

Le sénateur R. Black : En ciment.

M. Kurz : En ciment, mais on voit ici la photo d’une patinoire de hockey de 1,5 hectare. On peut construire de très grandes structures avec des poutres en bois modernes. Avant, on utilisait des arbres de très grande taille, qui n’existent plus ou qu’on ne veut pas utiliser à cette fin. On utilise plutôt des arbres plus petits, qu’on coupe selon diverses formes puis qu’on colle ensemble. Ainsi, on peut créer des produits de bois d’ingénierie qui présentent de très bonnes caractéristiques, qui emmagasinent le carbone et qui remplacent l’acier et le béton.

La présidente : J’aimerais vous poser quelques questions avant que nous entreprenions la deuxième série de questions. Le gouvernement du Canada dispose de deux principaux outils. L’un a trait à la réglementation des forêts et de l’utilisation des terres, à l’exception des parcs nationaux et d’autres terres de la Couronne qui appartiennent au gouvernement fédéral. En gros, la réglementation relève de la compétence provinciale, alors je ne vais pas vous demander de nous faire des suggestions, parce que nous ne travaillons pas vraiment dans ce domaine.

L’autre outil important, ce sont les instruments économiques. Vous avez dit qu’on pouvait avoir recours à certaines mesures incitatives pour atteindre la biodiversité. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Les deux autres témoins voudront peut-être aussi intervenir. Quels incitatifs financiers ou politiques le gouvernement du Canada peut-il prendre pour améliorer la diversité de nos forêts et avoir une plus grande incidence sur les changements climatiques?

Mme Wood : Oui, absolument. L’une des questions précises dont on a beaucoup parlé en Colombie-Britannique et à laquelle nous n’avons pas donné suite, c’est d’essayer de diversifier l’industrie des produits et de créer des produits à valeur ajoutée. Nous en tirerions tout un éventail d’avantages, et pas seulement pour les changements climatiques et la résilience des forêts.

Il y a une certaine réticence à aller de l’avant avec ces mesures. Il faut des investissements massifs pour aménager des usines de fabrication pour différentes essences de bois afin d’essayer de trouver les meilleures tables de séchage et les meilleurs calendriers de fabrication pour différentes essences de bois. Quels types de produits seront les mieux fabriqués? Où se trouve le marché pour ces produits? Pour ce faire, il faut recueillir des renseignements sur le marché et construire des installations.

Les sociétés forestières qui existent à l’heure actuelle en Colombie-Britannique, à tout le moins les grandes sociétés, sont réticentes à investir de l’argent lorsque les résultats sont incertains. Des mesures incitatives pourraient contribuer financièrement à la conception ou à la création de produits, à tout le moins au stade exploratoire en utilisant des essences qui existent à l’heure actuelle, mais qui sont nouvelles dans le monde des produits, et nous devons investir dans la conception de produits tout en gardant à l’esprit l’utilisation d’une plus grande variété d’essences. Ce serait très utile.

De nombreuses recherches doivent être menées pour établir des liens avec l’industrie, ce qui offrirait notamment des occasions d’exécuter des projets pilotes et des projets à l’échelle opérationnelle pour déterminer si un régime de sylviculture fonctionnera dans une région donnée afin d’accroître la résilience.

Pour terminer, ce qui me vient à l’esprit se rapporte à ce que M. Kurz a dit plus tôt à propos des résidus forestiers. Nous avons des piles de bois que nous ne sortons pas des forêts. On les brûle habituellement dans la province, ce qui crée des émissions de carbone. Les détenteurs de permis actuels sont réticents à autoriser qu’il y ait un autre type de permis ou qu’un autre exploitant vienne récupérer ce bois pour fabriquer des produits. Ce bois pourrait être utilisé et transformé en produits.

On pourrait offrir des incitatifs aux sociétés forestières pour les amener à participer avec d’autres intervenants, fabricants ou exploitants de plus petite taille en vue d’utiliser le bois résiduel à d’autres fins. Ce bois ne serait pas brûlé. Ce serait une autre avenue.

M. Kurz : Étant donné que la gestion des forêts relève des provinces et des territoires, le rôle du gouvernement fédéral pour offrir des incitatifs, comme Mme Wood l’a dit, est lié à la création d’innovation et à la recherche.

De plus, mon organisme a joué et continue de jouer un rôle important pour fournir les renseignements et les outils afin d’aider les 13 provinces et territoires à accomplir le travail qui est difficile de faire en vase clos. Quelques-unes des provinces les plus grandes ont d’importants projets de recherche, mais le type de travail qui est fait et les défis associés aux changements climatiques touchent l’ensemble des provinces et des territoires. La résilience des forêts, les répercussions des changements climatiques et les stratégies d’adaptation et d’atténuation peuvent être prises en compte dans les types d’outils qui sont élaborés par le gouvernement fédéral et sa communauté de recherche.

J’ai un point additionnel que je veux soulever concernant les répercussions à long terme. Les forêts de l’ouest de l’Amérique du Nord — Canada, Colombie-Britannique, Oregon, Washington, Idaho et Californie — ont toutes été altérées par plus d’un siècle de suppression des incendies. Par conséquent, nous avons enregistré d’importantes accumulations de forêts homogènes principalement composées de conifères. C’était acceptable lorsque les répercussions des changements climatiques étaient négligeables, mais avec les changements climatiques, nous voyons que les répercussions des feux de forêt sont inédites dans l’ensemble de l’ouest de l’Amérique du Nord.

Il est très difficile de déterminer comment nous pouvons améliorer la sécurité des collectivités et les perspectives à long terme pour nos forêts dans le contexte des changements climatiques. Je répète que des mesures doivent être prises à l’échelle internationale et interprovinciale. Le gouvernement fédéral doit certainement assumer un rôle pour régler ces enjeux par l’entremise de travaux de recherche.

La présidente : Après que Mme Martin aura répondu à cette question, j’aurai une autre question à poser sur la recherche et le financement.

M. Kurz : Certainement.

Mme Martin : Comme on l’a mentionné, le rôle du gouvernement fédéral est de créer de l’innovation. De plus, le mandat de l’industrie forestière va bien au-delà d’une gestion durable des récoltes et de la sylviculture. Il inclut la gestion de la faune et des pêches, la conservation des espèces en péril, les loisirs, l’intégrité des bassins hydrographiques, de même que les valeurs autochtones et culturelles.

En ce qui concerne la faune, 88 p. 100 des oiseaux forestiers sont des oiseaux migrateurs. Par conséquent, ils sont visés par la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs. L’un de ses objectifs généraux consiste à faire en sorte que les oiseaux communs restent communs. Les aires protégées ne suffiront pas à s’occuper de plus de 200 espèces d’oiseaux terrestres que l’on retrouve dans ces forêts.

À la lumière de ces faits, il y a certainement des incitatifs à examiner des processus et des principes écologiques en matière de gestion des forêts. Nous venons de mentionner l’aspect compétitif des arbres feuillus pour ce qui est du débroussaillage chimique et physique. Or, les arbres feuillus tels que le tremble et le bouleau sont des fixateurs d’azote. Il n’est pas toujours clair qu’il y a une compétition féroce, mais le tremble et le bouleau, plus particulièrement, sont extrêmement importants. Ce sont des éléments clés pour la diversité faunique.

Pour les oiseaux cavicoles, 96 p. 100 des 5 000 nids que nous avons trouvés sont dans des trembles. Les trembles sont essentiels. On n’en trouve pas dans ce secteur. C’est seulement 15 p. 100 des tiges, mais ils retiennent beaucoup d’eau. Ils peuvent probablement offrir de nombreux autres avantages. Les trembles à maturité suppriment les drageons. Si l’on pense aux principes écologiques, on pourrait probablement aussi réduire les coûts de fonctionnement.

La présidente : C’est intéressant. Pour revenir à la recherche et au financement fédéral pour la recherche, un autre fonds a été annoncé récemment. Le Partenariat canadien pour l’agriculture a été annoncé récemment par l’honorable Lawrence MacAulay, ministre d’Agriculture et Agroalimentaire Canada. C’est un programme de recherche partagée sur cinq ans entre le gouvernement fédéral et les provinces. Je sais qu’il est lié à l’agriculture, mais ce sont 3 milliards de dollars sur cinq ans qui ont été annoncés le 28 février. Savez-vous s’il y a un fonds équivalent pour les forêts?

M. Kurz : Le gouvernement fédéral a du financement de catégorie A et C pour la recherche. Je ne suis pas au courant d’une annonce de financement aussi important pour les forêts. Comme vous le savez, dans le cadre du Fonds pour une économie à faibles émissions de carbone, il y a un certain nombre d’initiatives qui s’occupent de la gestion du carbone forestier. Cinq des projets qui ont été approuvés dans quatre provinces utiliseront les activités dans le secteur forestier pour essayer de réduire l’empreinte carbone, mais ils ne se consacrent pas à la recherche. Ils se concentrent sur la mise en œuvre de ces activités.

La présidente : Je pense que vous avez tous renforcé dans mon esprit le fait que la recherche sera un élément clé à l’avenir. Qu’en est-il de certaines initiatives que nous avons essayées dans le passé? Madame Wood, vous avez parlé des plantations de 40 ans qui seront bien adaptées aux mesures qui sont prises à l’heure actuelle concernant les changements climatiques, et je pense donc que la recherche serait extrêmement importante.

Mme Wood : Absolument. Les travaux de recherche que j’ai entrepris sur ces plantations étaient liés à la qualité du bois et à l’incidence des changements climatiques. Ils ont été financés par Ressources naturelles Canada. Le financement n’était pas aussi élevé que celui offert dans le cadre du Programme d’innovation forestière par l’entremise du Centre canadien sur la fibre de bois à Ressources naturelles Canada. C’est ce programme qui finance ce type de recherche depuis quelques années. Nous pourrions certainement bénéficier d’un financement plus important. Le nombre de demandes que le programme peut financer est limité. Il n’accorde habituellement pas plus de 100 000 $ par année à un projet de recherche donné. C’est à peu près le financement que je reçois à l’heure actuelle.

La présidente : Un financement pluriannuel serait probablement intéressant, de même que du financement plus élevé pour la recherche. Ce serait important.

Mme Wood : Absolument. Oui, le financement à plus long terme est particulièrement important.

M. Kurz : Si vous êtes un scientifique dans une université ou tout autre établissement et que vous vous demandez si le financement pour la recherche est suffisant, vous connaîtrez la réponse, peu importe le pays où vous allez.

La présidente : Je le sais.

M. Kurz : À mon avis, ce qui est unique au Canada et dans le monde entier, c’est que la situation est en train de changer considérablement en ce qui concerne les mesures prises pour lutter contre les changements climatiques et l’engagement du gouvernement pris dans l’Accord de Paris et d’autres engagements internationaux pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Collectivement, nous dépenserons des centaines de milliards de dollars pour atténuer les répercussions et les changements climatiques. Dans le cadre de nos recherches, nous essayons notamment de déterminer si une partie de l’argent peut contribuer à accroître l’efficacité de ces investissements et démontrer qu’à long terme, par l’entremise de programmes de surveillance et de recherche, les contribuables tireront un rendement maximal de leur argent, tant pour ce qui est des choix initiaux en matière d’investissements que pour les conséquences à long terme.

Comme je vous l’ai montré dans l’un des graphiques, les options d’atténuation ne sont pas toutes également efficaces. Elles ne sont pas toutes également coûteuses ou peu coûteuses. Aider la communauté des politiques par l’entremise de données scientifiques fait ressortir les résultats et fait participer les intervenants dans un dialogue sur les résultats et les conditions futures escomptées. Que ce soit la résilience ou la biodiversité, la présence ou l’absence de feuillus, tous ces choix ont des répercussions sur la qualité du bois, les puits de carbone, la biodiversité, et cetera. Pour aborder ces nouvelles questions, il faudra du financement pour la recherche.

La présidente : C’est exactement la raison pour laquelle j’ai posé la question. Merci beaucoup des réponses que vous avez données.

Nous commencerons la deuxième série de questions avec le sénateur Maltais.

[Français]

Le sénateur Maltais : Je remarque, monsieur Kurz, que votre régime forestier de la Colombie-Britannique est très différent de ce qu’on retrouve dans l’Est du Canada. Je vous invite à aller voir le régime forestier du Nouveau-Brunswick et celui du Québec. Au Nouveau-Brunswick, il y a 75 ans, ils ont mis en place — il faut dire que ce n’est pas la Couronne qui est propriétaire, c’est une entreprise privée — une politique forestière tout à fait innovatrice. Dans un autre Parlement où j’étais responsable des dossiers du Québec, de la politique forestière, nous avons collaboré étroitement, les deux provinces ensemble pour avoir un régime forestier tout à fait adéquat.

Lorsque j’entends l’expression « coupe à blanc » de la part des scientifiques comme vous, les cheveux me dressent sur la tête, parce que ça n’existe plus dans l’Est du Canada. Et la politique d’un arbre coupé, un arbre planté devrait s’appliquer ici aussi. Il faudrait que cet effort ne provienne pas nécessairement du gouvernement, mais de ceux qui en retirent des bénéfices, c’est-à-dire les entreprises.

L’Ontario a adopté une politique semblable à celle du Québec également dans le domaine forestier. On n’a plus de raison en 2018 d’avoir des coupes à blanc. On n’a pas de raison non plus d’attendre qu’une génération de feuillus pousse et meure avant de reboiser avec des arbres originaux. Il n’y a pas de raison pour ça. Je ne comprends pas le système que vous avez, et je suis obligé de dire qu’il ne correspond pas à ce que nous avons dans l’Est du Canada. Je comprends que la Colombie-Britannique est très particulière à cause de sa géographie, son climat, ses montagnes et les essences qui s’y trouvent. Mais dites-moi une chose : est-ce que le gouvernement de la Colombie-Britannique est sensible à ce qui se passe dans ses forêts?

[Traduction]

M. Kurz : Les analyses que nous menons couvrent l’ensemble des provinces et des territoires du Canada, y compris le Québec et le Nouveau-Brunswick. Je connais très bien les pratiques de gestion des forêts dans les deux provinces. Nous travaillons étroitement avec les deux provinces pour une partie des travaux que nous effectuons à l’échelle nationale. Je crois que l’on effectue encore des coupes à blanc dans les deux provinces. Ce n’est peut-être pas dans la même mesure qu’en Colombie-Britannique, mais c’est une pratique de gestion des forêts légitime et appropriée dans certains environnements.

En Colombie-Britannique, on procède à des coupes à blanc à des niveaux variables. Il y a diverses mesures de rétention pour protéger des habitats fauniques et d’autres éléments.

La raison pour laquelle toutes les forêts en Colombie-Britannique ne sont pas plantées est l’abondance de graines et la présence d’une régénération naturelle dans les forêts. Par exemple, lorsqu’ on coupe des arbres l’hiver, la survie des jeunes plants est déjà établie.

Au lieu de légiférer qu’il faut planter des arbres à chaque hectare où l’on effectue des coupes, la Colombie-Britannique met l’accent sur le résultat. Comme nous en avons discuté plus tôt, il y a la notion de la croissance libre. Les travailleurs forestiers doivent établir que d’ici quelques années, une forêt qui répond à certaines exigences se serait régénérée à cet endroit.

Le reboisement n’est pas toujours l’option privilégiée car on peut vouloir avoir la diversité des semences naturelles. Rien ne dit que les arbres naturels atteignent des dimensions inférieures aux arbres plantés. Dans certains cas, on peut avoir les avantages des arbres naturels qui se régénèrent. Ce sont souvent les mêmes essences.

Mme Wood : J’ai une chose à ajouter. Nous sommes tenus de reboiser tous les secteurs où nous coupons des arbres. Plus de 95 p. 100 de nos blocs de coupe sont reboisés car nous reconnaissons que le reboisement est plus rapide que la régénération naturelle. La régénération naturelle devrait être utilisée un peu plus qu’elle l’est en ce moment car elle accroît la diversité. La majorité de nos blocs de coupe sont reboisés après que le bois a été récolté. Nous, en tant que province, plantons actuellement plus d’arbres que nous en récoltons sur nos terres.

M. Kurz : Les arbres qui sont plantés sont sélectionnés pour certaines caractéristiques, notamment des taux de croissance accrus, une résilience plus forte aux maladies et divers autres éléments qui font partie du programme de sélection des arbres, afin de veiller à ce que les puits de carbone soient établis rapidement.

Mme Martin : Je pourrais également mentionner la rétention variable pour la faune. Des sections de forêts anciennes qui sont coupées peuvent également être très avantageuses pour de nombreuses espèces sauvages. Il y a un certain nombre de mandats inopérables tels que la coupe de sections de forêts anciennes le long des routes.

La complexité de ce système et les lignes directrices relatives aux pêches qui exigent qu’il faut laisser une lisière d’arbres à un certain nombre de mètres le long des ruisseaux abritant du poisson, et cetera, couvrent la majorité des espèces sauvages. C’est une bonne chose d’avoir la complexité des sections de forêts anciennes dans une matrice d’arbres plus jeunes.

[Français]

Le sénateur Maltais : Permettez-moi de vous arrêter, madame Martin, mais ça existe depuis 40 à 50 ans au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Alors, lorsqu’on parle d’une coupe à blanc nécessaire, oui, mais elle est balisée, c’est-à-dire qu’il y a des aires de protection pour les animaux. Il n’y a pas de coupe à moins de 90 mètres d’un cours d’eau pour la protection d’un cours d’eau et des poissons qui y naviguent. Alors ça, c’est réglé. Mais vous m’avez dit une chose : vous plantez plus d’arbres que vous en coupez. Où les mettez-vous?

[Traduction]

Mme Wood : Une partie provient du boisement ou du reboisement de terres non boisées auparavant. L’autre partie, c’est que nous plantons plus d’arbres que nous en récoltons pour assurer la densité future du couvert forestier. Parfois, 1 600 tiges par hectare seront plantées, si bien que le couvert forestier sera moins dense.

[Français]

Le sénateur Maltais : Combien de temps ça prend à un sapin, à une épinette ou à un pin gris d’atteindre la maturité normale ici? Est-ce que c’est 40, 50, 60 ans ou 70 ans?

[Traduction]

Mme Wood : Tout dépend du site. Dans les secteurs côtiers, ce peut être 40 ans. À Prince George, dans le nord de la Colombie-Britannique, d’où je viens, ce peut être 80 ou 90 ans.

[Français]

Le sénateur Maltais : C’est pour ça que je vous pose la question. Dans l’Est, la maturité d’un arbre à l’état naturel arrive après 80 à 90 ans lorsqu’on fait du reboisement. Je vous invite à aller le voir chez Irving et même au Québec. Vingt-cinq ans après, on est prêt à refaire la coupe. Bien sûr, il y a un entretien de la forêt et un scarifiage régulier qui se fait chaque année. On évite... la forêt peut devenir un jardin autant qu’en agriculture si on l’entretient bien. Vous avez des forêts extraordinaires, c’est magnifique. C’est reconnu dans tout le monde en dehors de la Colombie-Britannique. Même en Chine. Nous sommes allés en Chine voir le groupe Produits de bois canadien qui y est présent. Il y a même un petit quartier chinois qui est bâti avec votre bois. C’est de toute beauté. Je pense que les efforts gouvernementaux... vous êtes des scientifiques bien sûr, vous n’êtes pas des politiciens, mais nous sommes aussi des politiciens, et ce qui nous intéresse, c’est de veiller à ce que cette forêt joue son rôle de poumon en Colombie-Britannique. C’est votre rôle dans vos recherches de vous assurer que ce soit fait.

Vous avez livré un témoignage intéressant, je vous remercie infiniment. Merci.

[Traduction]

La présidente : Merci.

Sénatrice Gagné, vous pouvez poser la dernière question.

La sénatrice Gagné : Je me demande si trois espèces sont menacées de disparition au Canada.

Mme Martin : Les gens disent que l’épinette noire est en train de disparaître au Québec, dans la forêt boréale, et que les changements climatiques changeront sa vigueur et sa croissance.

Mme Wood : Je ne sais pas quelle est la situation dans toutes les régions du Canada, mais en Colombie-Britannique, notre pin à écorce blanche se trouve dans des écosystèmes à haute altitude dominés par le pin et entretient une relation de mutualisme avec une espèce de cassenoix, qui est un oiseau. La portée est devenue limitée, possiblement en raison des influences du climat. Chaque fois que les oiseaux sont touchés dans cette relation, les arbres le sont aussi, et vice versa. Je pense que cette relation est particulièrement délicate.

Avec le peuplier faux-tremble dans les Prairies, il y a d’énormes problèmes. Nous ne savons pas s’ils sont liés au climat, mais c’est fort possible.

La sénatrice Gagné : Comment le Canada peut-il prévenir la disparition de ces semences? Y a-t-il une banque de semences au Canada?

Mme Wood : Oui, nous avons beaucoup de semences. À l’échelle provinciale, nous avons d’importants entrepositaires de semences. J’imagine que ce pourrait être fait à l’échelle nationale également.

La sénatrice Gagné : Je pense à la banque de semences en Norvège. Je me demandais si nous expédions des semences d’arbres à cette banque, ou avons-nous une banque précise pour les semences d’arbres?

Mme Martin : C’est une bonne question que vous devriez adresser à Sally Aitken cet après-midi, à l’Université de la Colombie-Britannique. Elle pourra vous fournir les détails.

Le sénateur R. Black : Si elle ne le savait pas, maintenant elle le sait.

La présidente : Je remercie les témoins. Nous avons eu une excellente réunion. L’heure et demie a passé très vite, et nous étions évidemment captivés par vos propos.

Mme Martin : Merci.

La présidente : Nous allons maintenant nous préparer pour notre mission d’information.

(La séance est levée.)

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