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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

2e Session, 35e Législature,
Volume 135, Numéro 11

Le jeudi 25 avril 1996
L'honorable Gerald R. Ottenheimer, Président pro tempore


LE SÉNAT

Le jeudi 25 avril 1996
La séance est ouverte à 14 heures, le Président pro tempore étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

La Journée du livre au Canada

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je regrette que le sénateur Lynch-Staunton ne soit pas avec nous aujourd'hui, mais je compte sur l'aide du sénateur Berntson.

Honorables sénateurs, je voudrais souligner que le Canada célèbre pour la première fois aujourd'hui la Journée du livre. Je tiens à féliciter l'auteur canadien Lawrence Martin, l'organisme Writers' Development Trust et toute l'industrie du livre, y compris les auteurs et les libraires partout au pays, qui se chargent de promouvoir cette journée.

Le thème de cette année, c'est « Donnez un livre et voyez le résultat». J'ai cru qu'il n'y avait pas meilleur destinataire que mon collègue, le chef de l'opposition au Sénat. Je lui donne ce livre, que je confie maintenant à son collègue, en espérant qu'il lui procurera autant de plaisir que j'en ai eu. Le livre porte sur un Canadien fort distingué et vieil ami d'un grand nombre d'entre nous, et s'intitule Rogue Tory: The Life and Legend of John G. Diefenbaker.

L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Je vous remercie sincèrement.

L'honorable David Tkachuk: Heureusement, vous n'avez pas acheté ce livre dans les Maritimes, car vous auriez payé la TPS. J'espère que vous l'avez acheté en Alberta.

Le sénateur Fairbairn: Ces livres viennent de Lethbridge.

La taxe sur les produits et services

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-Le changement de la politique libérale

L'honorable David Tkachuk: Honorables sénateurs, comme beaucoup de Canadiens, j'ai observé avec une fascination croissante le revirement de M. Chrétien et des membres de son Cabinet à propos de la TPS et, comme beaucoup de mes concitoyens, je suis devenu de plus en plus amer devant le peu de sincérité avec lequel les libéraux cherchent à nous convaincre qu'ils n'ont jamais promis d'abolir la TPS.

En réfléchissant à cette question, j'ai été saisi du désir de dire quelque chose. Je voulais dire ce que je pensais et ajouter ma voix à celles du nombre croissant de Canadiens ordinaires qui sont mécontents devant le refus inébranlable de M. Chrétien de s'excuser et de nous avouer que la politique libérale à l'égard de la TPS n'était qu'une ruse électorale, et devant le refus également inébranlable de la vice-première ministre de respecter sa promesse de démissionner de son siège de députée si la TPS n'était pas abolie.

Pour aider les sénateurs à décrire cette attitude, j'ai estimé qu'il me fallait faire un peu de recherche; aussi, avant de prendre la plume, j'ai consulté la Jurisprudence parlementaire de Beauchesne. J'ai été bien inspiré de le faire, car cet ouvrage m'a appris de façon bien claire que je ne pouvais pas essayer de décrire la tentative du premier ministre d'abolir la TPS dans les mêmes termes que ceux qu'utilisent mes concitoyens pour la décrire aujourd'hui. En effet, je ne pourrais pas dire que le politicien se soustrait à l'obligation de dire la vérité, qu'il a cherché à présenter la réalité sous un faux jour et l'a faussée délibérément, ni qu'il a été en cela malhonnête, hypocrite ou sournois. Cela me laissait malheureusement sans rien à dire. Je tiens simplement à prévenir mes collègues sénateurs que si nous utilisons des expressions comme celles-là, nous pourrions être obligés de nous excuser.

Je suis ensuite passé à mon second sujet de préoccupation, à savoir le refus cynique de la part de Mme Copps de reconnaître qu'elle devrait avoir l'honnêteté de donner suite à sa promesse de démissionner. Encore une fois, j'ai jugé prudent de consulter l'ouvrage de Beauchesne, où j'ai encore une fois trouvé de sages conseils. J'y ai appris que je ne pourrais pas dire que Mme Copps a fait une fausse promesse qui visait à tromper volontairement, et que je ne pourrais pas dire d'elle qu'elle est une outre pleine de vent et la qualifier d'honorable seulement par courtoisie. Je me suis donc trouvé encore une fois avec pas grand-chose à dire.

Même si Beauchesne me conseille de ne pas parler du premier ministre et de la vice-première ministre en utilisant les expressions que j'ai citées, j'ai trouvé un mot que nous pourrions tous utiliser, mais il est presque de même nature que celui qu'utilisent nos concitoyens canadiens qui ne siègent pas ici.

(1410)

C'est en 1993 que je me suis rendu compte que le gouvernement actuel n'allait pas abolir la TPS. J'ai trouvé un certain réconfort dans mes moments les plus sombres en pensant à l'avantage que cela comportait: Sheila Copps serait tenue de démissionner. J'étais persuadé que cela aiderait le pays.

Je félicite les libéraux pour s'être montrés si politiquement corrects, après ce que Sheila Copps a déclaré hier soir. Naturellement, le premier ministre, en tant qu'homme provenant du Canada français, ne pouvait être le seul - et je ne crois pas que l'expression soit antiparlementaire - dont les paroles avaient dépassé la pensée. On peut dire qu'il a commis un lapsus.

Nous avons maintenant une vice...

Son Honneur le Président pro tempore: À l'ordre, s'il vous plaît. Je dois signaler que le temps accordé à l'honorable sénateur est écoulé. L'honorable sénateur peut poursuivre son inter- vention, mais seulement avec le consentement du Sénat, ce qu'il ne semble pas avoir, à moins que mon ouïe ne me joue des tours.

Les sénateurs sont conscients que le Règlement précise bien le temps de parole qui leur est accordé et signale que le président est obligé de les aviser dès que leur temps est écoulé. L'honorable sénateur peut poursuivre s'il a le consentement du Sénat. Sinon, il devra s'arrêter ici.

[Français]

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales- Provenance des fonds à répartir aux trois provinces maritimes

L'honorable Jean-Maurice Simard: Je vais vous lire l'éditorial dans Le Devoir de ce matin, sous la signature de Jean-Robert Sansfaçon.

À propos d'un individu incapable de s'extraire d'une situation qu'il sait être dommageable pour lui-même, certains psychologues expliqueront qu'«un malheur connu vaut mieux qu'un bonheur inconnu». Tel un être en détresse, les libéraux fédéraux viennent de confirmer ce dont tous les Canadiens n'ont jamais douté: la TPS tant honnie est là pour rester.

Inutile de s'étendre longtemps sur le fait que les libéraux fédéraux viennent d'exposer dans un cercueil en platine leur promesse la plus populiste et la plus démagogique de la dernière campagne électorale, celle de scrapper la TPS. Contentons-nous de leur rappeler l'ardeur mise pendant 4 années à combattre cette taxe de tous les malheurs, jusqu'à encourager une ridicule guerre d'usure au Sénat.

C'est à cause de telles promesses chantées sur toutes les tribunes, puis abandonnées aux temps chauds comme de vieilles mitaines devenues inutiles, que les citoyens sont toujours plus méfiants à l'égard de la classe politique et sceptiques à l'écoute de leurs chants de sirène.

Un chat est un chat: en promettant de remplacer la méchante TPS par une taxe pleine de qualités et dépourvue de tout défaut, les libéraux fédéraux ont...

Beauchesne m'interdit de dire en cette Chambre ce que tout le monde a compris.

Si cela leur semble une faute mineure, il n'en est rien. Une ministre comme Sheila Copps qui s'était engagée à rien de moins que démissionner advenant que son parti ne respecte pas sa promesse, devrait au moins avoir la décence de présenter des excuses. De même pour le nouveau premier ministre de Terre-Neuve, Brian Tobin, qui non seulement fut l'un des plus forts en thèmes parmi les croisés anti-TPS, mais qui aujourd'hui joint l'insulte à la bêtise en affirmant que l'abolition de la TPS eût été «destructive and irresponsable». Comme récompense pour sa fidélité aux amis fédéraux, M. Tobin obtient pour son île de 575 000 habitants un cadeau de 350 millions (soit 600 $ par tête) à titre «d'aide à l'adaptation», montant puisé à même le budget fédéral et qui lui permettra de faire passer la pilule auprès de ses électeurs bafoués par une promesse non tenue.

Soit dit en passant, où Ottawa prendra-t-il le milliard de dollars d'aide à l'adaptation qui seront répartis au cours des quatre prochaines années entre les trois provinces maritimes?

Pour respecter la tradition et les règlements de cette Chambre, je poursuivrai ma déclaration la semaine prochaine.

Les Affaires étrangères

Les conséquences du bombardement israÉlien sur la population et les infrastructures libanaises

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je serai très clair et très bref. Je voudrais qu'il y ait beaucoup plus d'interventions. Tout comme l'a conseillé le sénateur Finlay MacDonald, je souhaiterais des questions courtes qui appellent des réponses courtes.

Je le dis très amicalement au leader du gouvernement. La période des questions d'hier a été incroyablement longue. Ceci nous empêche de poser des questions. Les séances du Sénat sont intéressantes parce que nous pouvons échanger entre nous.

Israël continue d'attaquer le Liban. Des sénateurs libéraux, conservateurs et indépendants connaissent très bien le Liban. Cinq cent mille personnes sont aujourd'hui déplacées. Hier, il paraît que je n'ai pas été trop clair.

Non seulement elles sont déplacées, mais on continue de bombarder les infrastructures, la route qui amène l'eau, les victuailles à ceux qui sont encore perdus dans les villages du sud du Liban. C'est inacceptable. Je demande au leader du gouvernement de rappeler au ministre des Affaires étrangères, qu'Israël refuse de respecter la résolution 425 du 19 mars 1978. Par la même occasion, il pourrait communiquer ma désapprobation à l'ambassadeur d'Israël.

C'est là l'origine du problème, de là la naissance du Hezbollah. Tant et aussi longtemps que le sud du Liban sera occupé, il n'y aura pas de paix possible. Le risque commence à se répandre et c'est malheureux. Il y avait un processus de paix. Cette résolution est extraordinaire. Hier, l'OLP a fait le rappel de cette déclaration malheureuse et inacceptable.

[Traduction]

Il est clair que cette résolution de l'OPL appelant à la destruction d'Israël est inacceptable. Cette position a maintenant été abandonnée. C'est donc un progrès. Cependant, il semble que chaque fois que des progrès sont réalisés quelque part au Moyen- Orient, un autre problème vient envenimer la situation.

Encore une fois, je compatis aux souffrances de la population du Liban. Je ne doute pas que les autres sénateurs en feront autant.


AFFAIRES COURANTES

Agriculture et Forêts

Dépôt du rapport du comité

L'honorable Leonard J. Gustafson: Honorables sénateurs, conformément au paragraphe 104(1) du Règlement du Sénat, j'ai l'honneur de déposer le premier rapport du comité sénatorial permanent de l'agriculture et des forêts. Ce rapport traite des dépenses engagées par le comité durant la première session de la 35e législature.

(Voir le texte du rapport dans les Journaux du Sénat d'aujourd'hui.)

L'ajournement

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit à mardi prochain, le 30 avril 1996, à 14 heures.

Son Honneur le Président pro tempore: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

(1420)

La Société de développement du Cap-Breton

La création d'un comité spécial

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, j'ai appris que des discussions ont eu lieu entre les deux côtés de cette Chambre et qu'il a été décidé de renoncer à l'avis et d'adopter la motion suivante.

Je propose donc, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 57(1)d) du Règlement:

Qu'un comité spécial du Sénat soit formé pour examiner, afin d'en faire rapport, le rapport annuel et le plan d'entreprise de la Société de développement du Cap-Breton et d'autres questions connexes;

Que douze sénateurs, dont trois constituent un quorum, soient nommés pour faire partie de ce comité;

Que le comité ait le pouvoir de faire comparaître des personnes et produire des documents, d'entendre des témoins, de faire rapport de temps à autre et de faire imprimer au jour le jour documents et témoignages, selon les instructions du comité;

Que le comité soit autorisé à siéger pendant les séances et les ajournements du Sénat; et

Que le comité présente son rapport final au plus tard le 15 juin 1996.

Son Honneur le Président pro tempore: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

Son Honneur le Président pro tempore: Plaît-il aux honorables sénateurs d'adopter la motion?

L'honorable Marcel Prud'homme: Honorables sénateurs, je remercie l'honorable sénateur Murray de m'avoir mis au courant de la motion, qui nécessitait notre consentement unanime. Je suggère, non pas dans le cas de cette motion, mais dans le cas des motions du même genre à l'avenir, que nous appliquions une pratique en usage aux Nations Unies. Quiconque propose la création d'un comité doit donner une idée de ce qu'il coûtera avant qu'il puisse être constitué.

Je ne dis pas cela pour critiquer le sénateur Murray. Je suis tout à fait disposé à appuyer sa motion. Je siégeais ce matin au comité de régie interne et il semble que nous ayons toujours besoin d'argent. Je suggère ceci au Sénat: ne devrions-nous pas imiter les Nations Unies, qui ont su résister à l'habitude de multiplier les comités de toutes sortes sans prévoir combien ils coûteront?

Nous devrions tenir des consultations pour connaître les coûts avant de donner notre approbation. Il est très difficile de refuser des fonds une fois que le budget a été soumis au Sénat. Je n'aimerais pas approuver un projet aujourd'hui et devoir en refuser le budget par la suite. Il serait bon, cependant, d'avoir à l'avance une idée du coût d'un comité spécial dont la création va être approuvée par le Sénat.

L'honorable Eymard G. Corbin: Honorables sénateurs, je ne veux pas retarder les choses. Cependant, que je sache, il était question qu'un organe soit créé au sein du comité actuel afin d'examiner cette affaire - ce que j'estime tout à fait valable et important, comprenez-moi bien. Or, je me rends compte que nous sommes en train de créer un comité spécial.

En principe, je n'ai rien contre, mais cela m'amène a la question suivante: la date du 15 juin fixée pour la présentation du rapport est-elle réaliste? Je comprends qu'il faille indiquer une date dans une motion comme celle-ci, mais cette date est-elle réaliste?

En général, quand nous nous embarquons dans des études pareilles, il y a toujours des choses que nous n'avions pas prévues et l'affaire prend des proportions de plus en plus grandes. Comment pouvons-nous être sûr que le calendrier établi est réaliste?

Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je puis seulement dire ce que je pense en tant qu'auteur de la motion. À mon avis, le calendrier que nous avons établi et qui prévoit la présentation du rapport le 15 juin est non seulement réaliste, mais nécessaire. Le fait est que le plan de la société est actuellement entre les mains du gouvernement qui devra prendre très bientôt une décision.

Si les sénateurs qui font partie du comité veulent faire des recommandations ou faire part de leur point de vue, il faut que ce soit fait rapidement si nous voulons que le gouvernement en tienne compte.

(La motion est adoptée.)


PÉRIODE DES QUESTIONS

La taxe sur les produits et services

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-La provenance des fonds destinés à la transition-La position du gouvernement

L'honorable Jean-Maurice Simard: Honorables sénateurs, ma première question porte sur le déficit projeté pour l'exercice qui s'est terminé le 31 mars 1996.

Le 6 mars 1996, on apprenait dans le budget fédéral que le gouvernement allait respecter son objectif d'un déficit de 32,7 milliards de dollars pour l'exercice financier 1995-1996. Deux semaines plus tard, le gouvernement a trouvé des fonds, comme par magie, pour amener la région de l'Atlantique à accepter l'harmonisation avec la TPS sans pour autant manquer son objectif de 32,7 milliards. Six semaines plus tard, lors de l'annonce de mardi, la somme était portée à 961 millions. Le ministre des Finances affirme qu'il peut imputer cette somme au budget de l'an dernier tout en respectant son objectif.

J'ai une courte question qui ne demande qu'une réponse courte, du moins je l'espère. La ministre peut-elle expliquer comment on peut avoir créé un milliard de dollars à partir de rien en seulement six semaines?

Peut-elle nous assurer que les chiffres présentés dans le budget n'ont pas été trafiqués ou maquillés, comme les sénateurs de ce côté-ci l'ont dit à maintes reprises en cette enceinte?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, d'abord, je veux qu'on comprenne bien qu'il n'y a pas eu de maquillage des chiffres. Le ministre des Finances a dit que la compensation offerte et tout ce qui concerne le protocole d'entente avaient déjà fait l'objet de discussions avec les provinces de l'Atlantique il y a un certain temps et que le gouvernement avait les moyens de verser cette compensation au cours de cet exercice-là.

Le sénateur Simard: Honorables sénateurs, à mon avis, l'intégrité des politiques du gouvernement est mise en doute par l'annonce faite mardi au sujet de la TPS, ainsi que l'intégrité des comptes du gouvernement. Les 961 millions de dollars sont entièrement imputés à un exercice financier qui s'est terminé il y a trois semaines, avant la signature de l'entente. Cependant, cet argent sera versé sur quatre ans à partir de l'exercice qui commence le 1er avril 1997. Je défie la ministre d'expliquer, ou n'importe quel autre représentant du gouvernement si elle en est incapable, comment il se fait qu'un accord prévoyant des paiements à verser au cours des exercices ultérieurs peut être conclu au cours de l'exercice courant au moyen d'une somme entièrement passée dans le déficit de l'exercice dernier.

(1430)

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, je ne peux que répéter ce que j'ai déjà dit. La manière dont se fera l'harmonisation a été précisée dans le budget. L'offre a été faite aux provinces au cours du dernier exercice. On me dit que, dans ce cas, l'élément de passif éventuel s'applique à l'exercice 1995-1996.

Le sénateur Simard: Honorables sénateurs, dans les bilans ordinaires, le passif éventuel des entreprises ou des gouvernements est inscrit sous ce titre. Il n'est pas nécessairement inscrit chaque fois au compte de l'excédent budgétaire ou au compte du déficit. Cependant, les vérificateurs et les comptables agréés notent habituellement au bilan quel est le passif éventuel.

Je n'hésite absolument pas à accuser encore une fois le gouvernement de trafiquer les états financiers, de les manipuler, pour plaire au premier ministre et à tous les ministres et pour tromper les Canadiens. Ce n'est pas la première fois que cela se produit. Le gouvernement a préparé des plans quadriennaux et quinquennaux à l'égard de tous ces budgets des dépenses. Je me souviens d'avoir entendu dire, au cours de cinq ou six années, que les budgets des dépenses de MM. Wilson et Mazankowski étaient faux. J'affirme aux honorables sénateurs que je n'ai aucun mal à établir un parallèle entre ces deux groupes de budgets.

Il est maintenant évident qu'un accord signé cette année, qui entraîne un déficit, sera imputé à l'année dernière. Les paiements seront effectués au cours des quatre prochaines années, à compter d'avril 1997. Ce n'est là qu'une forme de comptabilité ingénieuse. C'est trompeur et malhonnête.

Cette semaine est la semaine des excuses. Nous avons entendu le général Boyle s'excuser hier d'avoir oublié qu'il avait autorisé une certaine note de service. Paul Martin a aussi présenté des excuses cette semaine. J'espère que le leader du gouvernement au Sénat va présenter des excuses, d'une part au nom du gouvernement qui a trafiqué les états financiers et, d'autre part, au nom de Sheila Copps, qui n'a pas encore présenté des excuses. Il n'est jamais trop tard.

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, comme je l'ai dit en répondant à la première question de l'honorable sénateur, le ministre des Finances n'a absolument pas trafiqué les états financiers du Canada. Il a été très ouvert et il a répondu à ces questions. De toute évidence, ses réponses n'ont pas satisfait mon collègue. Cependant, il a été très clair au sujet du procédé de négociation de l'accord avec les trois provinces de l'Atlantique, soit le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve, et au sujet de la période d'application du passif éventuel.

J'ai écouté attentivement la question de mon collègue et la comparaison qu'il a faite entre le passé et le présent. Je suis tout à fait satisfaite non seulement du budget des dépenses, mais aussi des résultats de mon collègue, le ministre des Finances, quant à ses objectifs de réduction du déficit. Il a, année après année, réduit le déficit pour les Canadiens. Les résultats dépassent ses propres prévisions, à telle enseigne que le déficit baisse plus rapidement que ce qui avait été prévu à l'origine.

L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, le leader du gouvernement admettra que, quelle que soit l'année dans laquelle le passif éventuel apparaît, le gouvernement a emprunté l'année dernière et emprunte cette année pour payer son aide transitoire, ou quel que soit le terme approprié, à ces provinces? J'ai vu les chiffres donnés aux ministres à l'autre endroit en ce qui concerne les montants qui pourraient être accordés à certaines autres provinces, en particulier au Manitoba et à la Saskatchewan, si elles acceptaient d'harmoniser leur taxe de vente avec la TPS.

Est-ce que la ministre pourrait confirmer les montants qui seront mis à la disposition de ces provinces et d'autres provinces et nous faire savoir dans quel exercice financier ces montants seront débités?

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, comme le sénateur Murray le sait, et comme il l'a indiqué, le gouvernement a encore beaucoup de travail à faire avant de parvenir à une taxe de vente nationale d'un océan à l'autre. Le ministre des Finances s'y emploiera de son mieux. Je transmettrai la question de mon collègue et je lui fournirai une réponse lorsque j'en obtiendrai une.

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-Les avantages retirés par les Canadiens des provinces de l'Atlantique-La position du gouvernement

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, hier, en réponse aux questions, le leader du gouvernement au Sénat disait que les Canadiens de la région atlantique profiteront financièrement de cette nouvelle «ponction fiscale» des libéraux. Le leader du gouvernement au Sénat a raison. Si une mère célibataire va acheter une nouvelle voiture, elle économisera 100 $ ou 200 $. Si une famille en difficultés décide d'acheter un nouveau téléviseur, elle paiera 40 $ de moins. Mais qu'arrivera-t-il lorsqu'elles paieront leur note d'électricité ou de mazout, ou lorsqu'elles achèteront un livre pour les enfants ou même un journal? Où sont les avantages alors?

Est-ce que la ministre responsable de l'alphabétisation pourrait se lever et s'excuser auprès des Canadiens de la région atlantique qui, loin de profiter de l'initiative fiscale du gouvernement, en souffriront énormément?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme je l'ai dit ces derniers jours en réponse aux questions de mes collègues d'en face, les trois provinces de la région atlantique qui ont choisi d'harmoniser leur taxe de vente pour créer un système simplifié et intégré tireront effectivement profit de cette initiative. Comme je l'ai dit précédemment, au lieu de faire preuve de pessimisme au sujet des avantages pour cette région, il faut féliciter les dirigeants de ces provinces d'avoir eu la clairvoyance d'agir au nom de la population qui les avait élus et de prendre une mesure qui va beaucoup profiter à leur région.

(1440)

Mon collègue parle de cas individuels et c'est tout à fait valable. Certains ministres de ces provinces atlantiques ont fait de même, indiquant quels seraient les avantages moyens pour une famille, ce que l'on peut espérer de cette nouvelle taxe. Mais cela va beaucoup plus loin, car on permet en particulier aux entreprises de la région de devenir plus compétitives, vu qu'elles n'auront plus à payer des taxes sur des taxes sur des taxes. Les consommateurs de la région y gagneront aussi, non seulement parce qu'ils économiseront de l'argent, mais aussi parce que les prix des achats qu'ils font quotidiennement sont plus faciles à comprendre en raison de la simplification de cette taxe.

Lorsque l'on prend tous ces aspects en considération, l'harmonisation apparaît comme très prometteuse pour la région de l'Atlantique. Elle va réduire la charge fiscale des habitants de cette région et leur montrer qu'il y a un avenir plus brillant en termes d'emplois, de croissance économique, de possibilités commerciales et d'exportations internationales. Ces provinces ont fait un travail admirable pour parvenir à cette entente avec le gouvernement fédéral. J'invite les autres provinces de ce pays à travailler de la même façon de sorte que leurs citoyens puissent également profiter d'une taxe nationale intégrée.

Le sénateur Lynch-Staunton: Pourquoi n'avez-vous pas dit cela pendant le débat sur la TPS?

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-La possibilité d'un remboursement aux contribuables ontariens-La position du gouvernement

L'honorable Consiglio Di Nino: Honorables sénateurs, je dois reconnaître que l'honorable ministre devient très bonne pour ce qui est de prononcer des discours, mais je souhaiterais qu'elle réponde à ma question.

La ministre a peut-être raison. Les provinces de l'Atlantique vont peut-être profiter de cette nouvelle initiative du gouvernement fédéral. S'il y a un avantage, c'est peut-être un pot-de-vin d'un milliard de dollars qu'on leur a offert aux dépens des autres provinces comme celle de la ministre, l'Alberta, et la mienne, l'Ontario, qui devront payer 400 millions de dollars environ sur ce pot-de-vin d'un milliard de dollars.

La ministre va-t-elle s'engager à demander au gouvernement s'il est prêt à trouver une façon de rembourser aux contribuables ontariens ces 400 millions de dollars qu'on leur prend par tricherie, ou à réduire les compressions dans les paiements de transfert versés à l'Ontario pour aider les contribuables de la province à faire face à leurs propres problèmes de dette et de déficit?

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'accepte mal que mon honorable collègue emploie des mots comme «pot-de-vin» ou «tricherie». Ce qui s'est passé dans la région de l'Atlantique, c'est que les gouvernements ont profité d'une occasion qui leur était offerte, comme toute autre province pourrait le faire, d'ailleurs. On a établi une formule claire pour chaque province qui subit une perte de recettes pendant la période de transition dans le cadre de l'harmonisation. Cela touche les provinces de l'Atlantique. Cela s'appliquerait également aux provinces de la Saskatchewan et du Manitoba qui auraient, elles aussi, droit à de l'aide pendant la période de transition.

Lorsqu'on est confronté à un changement structurel comme celui-ci au Canada, que ce soit dans le domaine de l'imposition ou en ce qui concerne - et certains de mes vis-à-vis en ont ri quand je l'ai dit l'autre jour - les énormes changements qui se sont produits dans le secteur du transport du grain dans l'Ouest du pays il y a un an, tous les gouvernements fédéraux, y compris celui auquel mon honorable collègue appartenait, offrent une compensation pendant la période de transition.

Les avantages que la région de l'Atlantique tirera de ce système vont enrichir cette région d'une façon qui, nous l'espérons et nous le croyons, l'aidera à vivre de paiements de péréquation réduits, et cela vaut pour le reste du Canada aussi. Cela pourrait aider les habitants de l'Ontario, de la Colombie-Britannique et de l'Alberta.

Il n'y a aucune raison pour que les régions du pays aient peur de coopérer pour le bien commun de la nation. Ce n'est pas un fédéralisme bassement mercantile. Il s'agit d'aider toutes les régions du pays aussi bien en périodes de vaches grasses que durant les périodes de vaches maigres. Tout au cours de notre histoire, toutes les régions du pays ont connu des moments difficiles et reçu l'aide des autres régions.

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-La non-incidence sur les recettes-La rationalisation du concept-La position du gouvernement

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, ce n'est pas le moment de réagir à un discours mais, croyez-moi, comme je suis originaire de la région de l'Atlantique, j'aurais beaucoup à redire au sujet des observations de la ministre. Ceux d'entre nous qui viennent du Canada atlantique - ou, du moins, ceux qui n'affichent pas leur sectarisme avec autant de vigueur et de fougue que certains des libéraux de l'autre côté - s'inquiètent beaucoup de ce que seront les factures d'électricité et les transactions immobilières dans quatre ans et se demandent comment les gens feront pour vivre. Vous et moi savons que le gouvernement taxera d'autres choses.

Ma question au sujet de l'harmonisation est simple. En 1993, le premier ministre a promis de supprimer la TPS sans que cela ait une incidence sur les recettes. Peu importe ce qui s'est produit; il a dit que s'il supprimait la TPS, cela n'aurait aucune incidence sur les recettes. On m'informe que, en plus des fonds qu'il a injectés dans les provinces de l'Atlantique, le gouvernement fédéral versera, dans le cadre de l'harmonisation de la TPS et de la TVP, 364 millions de dollars sur quatre ans à ma province, le Nouveau-Brunswick. Ce montant est censé compenser des pertes de 680 millions de dollars en recettes. À mon avis, ce n'est que le début. J'aimerais que le leader explique cette harmonisation et cette non-incidence sur les recettes.

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Votre Honneur, le ministre des Finances a dit que la taxe fédérale dans cette région n'aura aucune incidence sur les recettes. Les recettes seront réduites dans la région de l'Atlantique, ce qui est précisément la raison pour laquelle on a mis en place un mécanisme de rajustement transitoire.

Le sénateur a présenté des chiffres. J'en ferai part à mon collègue et tenterai de lui donner une réponse d'ici la semaine prochaine. Il m'est impossible d'examiner ces chiffres aujourd'hui et je ne prétends pas pouvoir le faire. Je tâcherai de donner une réponse au sénateur.

Le sénateur a parlé du sectarisme flagrant dont témoignent certains sénateurs de ce côté-ci de la Chambre.

Le sénateur Robertson: Ceux de la région de l'Atlantique.

Le sénateur Fairbairn: De la région de l'Atlantique? Je regarde autour de moi et j'aperçois, des deux côtés de la Chambre, quelques-uns des meilleurs représentants du Canada atlantique au Parlement du Canada. Ces sénateurs ont à coeur les intérêts de leur province et de leur région. Il est absolument impensable que des sénateurs qui ont le moindrement de coeur et d'intelligence puissent parler sérieusement de corruption et de tricherie dans ce cas-ci.

(1450)

Nous sommes convaincus que, avec la bonne volonté qui a animé ces négociations et la bonne volonté des premiers ministres de ces provinces qui ont été élus pour représenter la population, cette région et le Canada tout entier en tireront des avantages et se prépareront à un avenir meilleur si nous pouvons étendre ce processus au niveau national. C'est là notre objectif.

Le sénateur Robertson: Honorables sénateurs, je ferais valoir à l'honorable ministre que ce gouvernement n'est pas le premier à oeuvrer en faveur de l'harmonisation. Nombreux sont les obstacles. Trois premiers ministres libéraux des provinces de l'Atlantique ont donné leur aval. Je doute que personne de ce côté-ci de la Chambre ne me contredirait si je disais que votre tâche serait beaucoup plus facile si l'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique avaient à leur tête des gouvernements libéraux.

Soyons réalistes à cet égard. Vous avez bénéficié du soutien de vos amis. Mais je vous le dis, madame la ministre, les gens vont pâtir parce que cette taxe s'appliquera à toutes sortes de choses que notre population n'a plus les moyens d'acheter.

Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, mon honorable collègue a tout à fait raison de dire que les premiers ministres de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick et de Terre-Neuve appartiennent au Parti libéral. Ils ont été élus avec une confortable majorité pour gouverner les citoyens de ces provinces.

Le sénateur Lynch-Staunton: Vous avez été élus pour abolir la TPS, pas pour l'harmoniser!

Le sénateur Fairbairn: Ils ont agi dans l'intérêt de la population de leurs provinces respectives. En agissant ainsi, ils ont fait preuve de bonne volonté, d'intelligence et de beaucoup de...

Le sénateur Lynch-Staunton: Et vive le chaos!

Le sénateur Fairbairn: ...perspicacité. Ils ont agi de la sorte parce que c'est avantageux pour leur région.

Je mettrais mon honorable collègue au défi de trouver en ce pays un premier ministre qui, sans renoncer pour autant à son credo et à ses principes, ne soit pas toujours en quête d'avantages et tout disposé à défendre les intérêts de la population de sa province et de sa région.

Mon honorable collègue a peut-être raison. S'il y avait un premier ministre libéral en Ontario ou, plaise à Dieu, en Alberta, ils auraient probablement la force, la perspicacité et l'enthousiasme nécessaires pour adhérer à ce programme et en faire profiter la population de leurs provinces respectives.

[Français]

L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-La possibilité d'une compensation rétroactive au Québec-La position du gouvernement

L'honorable Jean-Claude Rivest: Honorables sénateurs, ma question a trait également à la TPS. J'ai été associé à d'autres personnes, dont mon excellente amie le sénateur Bacon, au gouvernement du Québec, qui a uniformisé sa taxe de vente avec la TPS fédérale sans aucune espèce de compensation.

Le gouvernement canadien, compte tenu du règlement qu'il vient d'accorder aux provinces maritimes, indemnisera-t-il rétroactivement le gouvernement du Québec et le peuple du Québec dans le dossier de la TPS?

[Traduction]

L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, la réponse est oui; la province du sénateur Rivest s'est effectivement engagée dans la voie de l'harmonisation il y a quelques années. Sauf erreur, l'harmonisation sera achevée cette année. Le Québec n'a cependant pas perdu de recettes au moment de l'harmonisation. L'Ontario et la Colombie-Britannique seraient dans la même position si elles suivaient son exemple. Elles ne perdraient pas de recettes non plus. D'après la formule utilisée, le Québec ne doit pas normalement recevoir d'indemnisation rétroactive parce qu'elle n'a pas subi de perte, ni alors, ni maintenant, à cause de l'harmonisation.

Ce que le Québec a fait a été utile, car il a amené les entreprises de cette province à souligner que l'harmonisation avait simplifié et amélioré...

Le sénateur Lynch-Staunton: Allons donc!

Le sénateur Fairbairn: L'harmonisation a assurément amélioré le processus et réduit les coûts.

[Français]

Le sénateur Rivest: J'aimerais signaler au leader du gouvernement qu'au Québec, antérieurement à la TPS fédérale, il n'y avait pas de taxe de vente sur les services. La population du Québec n'a pas été pénalisée par l'harmonisation. Cela a coûté quelque chose aux citoyens du Québec de la même façon qu'il en coûtera aux gens des provinces maritimes qui ont décidé d'harmoniser leur taxe de vente.

Vous êtes au courant des échos provenant du gouvernement du Québec. Il se prépare à demander au gouvernement canadien non pas de nier la décision prise par le gouvernement de M. Bourassa, mais d'octroyer aux citoyens du Québec les mêmes bénéfices que ceux accordés aux citoyens des provinces maritimes.

Je suis convaincu que si d'autres provinces du Canada décident d'harmoniser leur taxe de vente, elles vont demander exactement le même traitement que celui accordé aux gouvernements libéraux des provinces maritimes.


[Traduction]

ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur le programme de protection des témoins

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable Lorna Milne propose: Que le projet de loi C-13, Loi instaurant un programme de protection pour certaines personnes dans le cadre de certaines enquêtes ou poursuites, soit lu pour la deuxième fois.

-Honorables sénateurs, j'ai le plaisir aujourd'hui de proposer la deuxième lecture du projet de loi C-13 sur le programme de protection des témoins. Ce projet de loi est identique au projet de loi C-78 de la dernière session de la législature actuelle. À l'autre endroit, tous les partis l'ont appuyé et je suis certaine que les sénateurs l'approuveront également.

La protection des informateurs et des témoins représentent d'importants instruments de lutte contre le crime, surtout le crime organisé. Les personnes qui aident la police à lutter contre le crime ont toutes les raisons de craindre pour leur sécurité, mais la promesse qu'elles seront protégées les encourage à collaborer.

Depuis 12 ans, ou depuis 1984, la GRC assure un programme administratif visant à protéger les informateurs et les témoins. Le coût de ce programme est aujourd'hui de l'ordre de 3,4 millions de dollars par an, soit d'environ 30 000 $ par cas en moyenne. Dans quelque 60 p. 100 des cas, le coût est inférieur à 20 000 $. Environ la moitié des cas ont un lien avec le crime organisé. Selon les données que nous possédons, dans 85 à 90 p. 100 des cas faisant appel à la protection de témoins, une condamnation résulte de la comparution d'un témoin bénéficiant d'une protection.

Honorables sénateurs, le gouvernement a décidé d'agir pour améliorer l'efficacité de cet instrument de lutte contre le crime en proposant un cadre légal qui prévoit un système de protection national uniforme et équitable, tout en garantissant que les deux parties à un accord de protection jouissent de droits et de responsabilités clairement définis. Le programme actuellement en place est imparfait parce qu'il ne prévoit aucune obligation de rendre compte. La mise en place d'un cadre légal fait entrer tout le programme dans le domaine public et garantit plus de transparence et une plus grande obligation de rendre compte.

En vertu de cette mesure, la GRC présentera un rapport annuel au solliciteur général qui en fera déposer un exemplaire devant chaque Chambre du Parlement. Le projet de loi a pour objet d'aider les services de police à enquêter et à intenter des poursuites en cas de crimes graves. Le solliciteur général a présenté cette mesure pour donner suite à une promesse du livre rouge d'améliorer la sécurité dans nos rues et nos collectivités.

Il faut noter que le but déclaré du projet de loi est d'aider la GRC ou un service de police auquel elle est liée par contrat. Certains trouveront peut-être intéressant d'apprendre que cette définition exclut le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, de l'application de la loi puisqu'il ne s'agit pas d'un organisme chargé de l'application de la loi.

(1500)

La mesure à l'étude fournira le fondement législatif et un énoncé clair et uniforme pour la mise en application des programmes fédéraux de protection des témoins sous la direction du commissaire de la GRC. Les honorables sénateurs devraient se rappeler qu'il existe déjà de ces programmes administrés par d'autres organismes chargés de l'application de la loi au Canada, qu'ils soient provinciaux ou municipaux. Cette mesure n'a pas pour objet de les remplacer.

Le projet de loi C-13 énonce des critères très clairs permettant de déterminer qui est admissible à la protection de la GRC. Une personne qui témoigne dans un procès, un informateur ou même un agent de police peuvent bénéficier de protection quand une enquête ou un procès les met en danger. De plus, la famille immédiate de cette personne peut elle aussi être admissible à cette protection.

Une personne ne peut bénéficier du programme que si le commissaire de la GRC juge qu'elle répond aux critères d'admissibilité clairement énoncés dans le projet de loi. Dans le cas où l'on décide de refuser à quelqu'un le bénéfice de ce programme, le projet de loi stipule qu'on doit lui communiquer par écrit les motifs de cette décision; il est d'ailleurs possible de se prévaloir de la procédure de la GRC concernant les plaintes du public pour obtenir réparation.

Le projet de loi vise notamment à supprimer le risque de malentendus entre la GRC et les personnes qu'elle protège. Il est malheureusement arrivé dans le passé que des désaccords et des malentendus entraînent des litiges. La Loi sur le programme de protection des témoins donne à la GRC le pouvoir légal de conclure un accord avec une personne à protéger. En fait, pour qu'une personne bénéficie de ce programme, il faut qu'un accord de protection soit conclu officiellement. Cet accord doit comporter une disposition stipulant que la GRC est tenue de prendre toutes les mesures raisonnables pour assurer la protection de l'informateur ou du témoin.

Le projet de loi précise les fonctions de la GRC, mais exige également que tous les accords de protection comportent certaines obligations que doit respecter le bénéficiaire, c'est-à-dire la personne protégée. Ces obligations sont les suivantes: premièrement, le bénéficiaire doit collaborer avec les autorités en fournissant les renseignements ou les éléments de preuve requis dans le cadre de l'enquête ou de la poursuite amorcée par la GRC.

Deuxième et troisième obligations du bénéficiaire: s'acquitter de toutes ses obligations financières et juridiques, à l'exception de celles visées expressément par l'accord. D'ailleurs, cette disposition a été ajoutée par le comité de l'autre endroit afin d'empêcher les bénéficiaires de participer au programme dans le but de se soustraire à leurs obligations juridiques ou financières.

Quatrièmement, le bénéficiaire doit s'abstenir de participer à une activité qui constitue une infraction à une loi, qui compromet le programme ou sa sécurité ou qui compromet la sécurité d'un autre bénéficiaire. Je tiens à préciser que toute infraction du genre pourrait entraîner la fin de la protection accordée au bénéficiaire.

Cinquièmement, le bénéficiaire doit collaborer et exécuter les demandes que peut valablement formuler la GRC pour assurer la sécurité du bénéficiaire.

Ces cinq conditions constitueront les éléments de base de tout accord de protection d'une source ou d'un témoin que ratifiera la GRC. D'autres conditions pourront s'ajouter aux éléments de base déjà énoncés.

Aux termes du projet de loi, le commissaire peut mettre fin à la protection d'une source ou d'un témoin si le bénéficiaire omet de communiquer des renseignements pertinents ou contrevient aux obligations mentionnées dans l'accord de protection. Si le commissaire décide de mettre fin à la protection, la GRC doit donner un avis raisonnable au bénéficiaire et lui préciser les raisons de cette décision. Si le bénéficiaire conteste la décision, le projet de loi lui donne accès au processus de plaintes du public qui existe déjà.

Le commissaire communiquera pas écrit les motifs de sa décision de refuser à un témoin le bénéfice du programme ou de mettre fin à la protection d'un bénéficiaire. Les témoins et bénéficiaires ainsi visés pourront utiliser ces motifs pour fonder leurs plaintes.

Le projet de loi renferme aussi une disposition interdisant de communiquer des renseignements au sujet des bénéficiaires, sauf dans des circonstances bien précises et bien définies. Quiconque enfreindra cette disposition législative sera poursuivi et puni. Dans les cas où une personne publie ou communique, au sujet d'un bénéficiaire, des renseignements qui sont déjà du domaine public, on considérera qu'aucune infraction n'a été commise, mais s'il faut, pour une raison quelconque, communiquer certains renseignements, les personnes à qui les renseignements auront été fournis sont également tenues par la loi de ne pas les transmettre à d'autres.

Un comité de l'autre endroit a proposé d'ajouter le mot «sciemment» à la disposition qui traite de cette infraction, afin de bien préciser que seuls ceux qui, consciemment ou intention- nellement, portent atteinte à la sécurité des bénéficiaires sont passibles de poursuites.

Le projet de loi comporte aussi une disposition permettant au bénéficiaire de soutenir légalement que sa nouvelle identité a toujours été sa seule identité. Ainsi, le bénéficiaire qui remplit une demande de passeport et prétend n'avoir jamais changé de nom ne pourrait faire l'objet de poursuites.

Le projet de loi autorise la GRC à conclure des accords avec des corps policiers provinciaux ou municipaux et, dans certains cas, avec des gouvernements étrangers, pour leur permettre de participer au programme de protection des témoins, conformément au principe de récupération des coûts. Compte tenu de ce principe, les accords avec les autres organismes ne sont pas censés accroître le fardeau financier fédéral. Comme je l'ai déjà mentionné, le programme coûte actuellement 3,4 millions de dollars par année, et l'on ne s'attend pas à ce qu'il augmente.

Enfin, le projet de loi oblige le commissaire à présenter au Parlement un rapport annuel et à ajouter le programme au champ d'étude de la Commission des plaintes du public contre la GRC. Ces mesures, comme je l'ai dit, visent à accroître l'obligation de rendre compte dans le cadre du programme.

En conclusion, en prévoyant cette autorisation législative pour un programme administratif de la GRC qui est déjà en place, le gouvernement veut renforcer un outil d'application de la loi qui s'est avéré très efficace, notamment pour les enquêtes et les poursuites liées au crime organisé. Par ailleurs, le projet de loi répond aux besoins de la GRC et des personnes qu'elle protège. Les droits et responsabilités de chaque partie visée dans le projet sont très clairement définis. On s'attend à ce que la limpidité du projet de loi élimine pratiquement tout risque de malentendu entre la police et ses témoins.

En établissant ce fondement législatif pour le programme, on assurera une application uniforme de la politique, et le fonctionnement ainsi que la portée des accords de protection seront mieux définis, ce qui accroîtra les chances que les deux parties respectent leur part de l'entente.

J'attends avec impatience les séances du comité au cours desquelles nous pourrons examiner le projet de loi plus en détail.

(Sur la motion du sénateur Berntson, le débat est ajourné.)

[Français]

La Loi sur les contraventions

Projet de loi modificatif-Deuxième lecture

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool propose: Que le projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi sur les contraventions et d'autres lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

-Honorables sénateurs, je suis heureuse de m'adresser à vous aujourd'hui pour vous entretenir du projet de loi illustrant concrètement la ferme volonté de ce gouvernement de collaborer avec les autorités provinciales et territoriales et de voir à éliminer les chevauchements coûteux. Les modifications proposées par le projet de loi C-16 sont le fruit de consultations soutenues avec les provinces et les territoires. Ces modifications à la Loi sur les contraventions visent à créer un moyen efficace et économique d'implanter le régime adopté par le Parlement en 1992, et à renforcer ainsi l'application de la législation fédérale.

Comme vous le savez, en vertu du droit actuel, une personne qui est accusée d'une infraction réglementaire fédérale, comme le simple geste de cueillir une fleur sur les terrains de la Commission de la capitale nationale, fait face à la même procédure pénale qu'une personne qui est accusée de voie de fait simple. L'agent de la paix qui constate l'infraction doit rédiger une dénonciation selon le format prévu au Code criminel, puis la faire assermenter devant un juge de paix, qui émet alors un bref de mise en accusation qui doit être signifié au contrevenant en personne. Le bref informe le contrevenant de l'accusation qui a été portée contre lui et lui ordonne de se présenter en cour à une date précise. Le contrevenant doit alors comparaître devant un tribunal et ce, même s'il est prêt à reconnaître qu'il est coupable de l'infraction et à ne présenter aucune défense.

[Traduction]

Honorables sénateurs, l'actuelle Loi sur les contraventions, qui n'est pas encore en vigueur, prévoit une méthode simplifiée de sanctionner les infractions fédérales. Le recours aux procès-verbaux qu'elle propose se veut une solution de rechange à la procédure sommaire coûteuse et insuffisante que prévoit le Code criminel à l'heure actuelle. La formule des procès-verbaux ressemble à celles qui existent dans la plupart des provinces. En autorisant les autorités idoines à dresser un procès-verbal à quiconque contrevient au règlement régissant les petites embarcations, par exemple, la loi va mener à une meilleure exécution de la loi fédérale.

Un aspect très important de la Loi sur les contraventions, c'est qu'une fois qu'un délit est considéré comme une contravention aux termes de la loi, toute personne reconnue coupable d'un tel délit s'expose seulement à des sanctions civiles et administratives. Elle ne s'attire plus les conséquences d'une condamnation au criminel, comme avoir un casier judiciaire, faire prendre ses empreintes digitales ou peut-être même se faire saisir son passeport. La loi vise aussi à alléger la charge de travail des agents d'exécution de la loi, des procureurs et des tribunaux dont le Code criminel prévoit la participation à l'heure actuelle en supprimant l'instruction de causes où le prétendu délinquant veut plaider coupable et payer l'amende fixée.

Les modifications prévues dans le projet de loi C-16 sont proposées par les provinces et ne sont qu'un autre exemple de l'esprit de collaboration qui existe entre les deux ordres de gouvernement. Ces modifications vont permettre d'appliquer aux contraventions fédérales les peines prévues au provincial et au territorial.

[Français]

Plutôt que de mettre en place une infrastructure fédérale complexe et coûteuse pour le traitement des contraventions fédérales, il sera beaucoup plus économique d'utiliser le régime pénal en vigueur dans une province ou un territoire. Les provinces ont, en effet, développé au cours d'une année une très grande expertise du traitement des billets de contravention. Plusieurs d'entre elles ont d'ailleurs des organismes centraux capables de traiter efficacement, et à un coût raisonnable, une quantité importante de contraventions. L'Ontario et le Québec, par exemple, se sont dotées de systèmes informatisés centraux très avancés et suffisamment puissants pour traiter de façon économique toutes les contraventions émises sur leur territoire, y compris les contraventions fédérales.

Grâce aux modifications proposées par le projet de loi C-16, un agent de l'autorité, au sens de la Loi sur les contraventions, par exemple, un agent de police qui constate une contravention fédérale commise au Québec, pourra tout simplement utiliser le constat d'infraction en vigueur dans cette province. Une fois ce constat d'infraction délivré, la contravention sera alors traitée par la province de la même façon que s'il s'agissait d'une contravention provinciale.

Bien que le régime pénal de chaque province et territoire puisse désormais s'appliquer aux contraventions, il reviendra encore au gouverneur en conseil de désigner quelle infraction fédérale sera qualifiée de contravention et quel sera le montant de l'amende pour cette contravention. En ce qui a trait à l'amende, elle sera la même partout au Canada, mais le projet de loi permettra aux provinces de percevoir sur les contraventions fédérales les frais administratifs et les dépens qu'elles imposent sur leurs propres contraventions.

[Traduction]

Comme les provinces et les territoires ne sont pas tous en mesure d'intégrer les contraventions fédérales dans leurs systèmes respectifs, le projet de loi C-16 prévoit aussi la possibilité que la loi entre en vigueur province par province. On compte que la première entente sera conclue en 1996 et que la loi sera en vigueur partout d'ici à trois ans.

[Français]

En conclusion, honorables sénateurs, ces modifications à la Loi sur les contraventions permettront aux deux niveaux de gouvernement de collaborer à réduire les coûts associés à l'administration de la justice ainsi que les dédoublements inutiles, tout en donnant aux Canadiens et aux Canadiennes un système efficace et peu coûteux pour assurer le respect de la loi.

[Traduction]

Hon. Duncan J. Jessiman: Honorables sénateurs, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-16, Loi modifiant la Loi sur les contraventions. Comme M. Gordon Kirkby, le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, l'a expliqué à la Chambre des communes le 28 mars 1996, pour comprendre ce projet de loi, il est important de bien connaître la loi qu'il modifie, à savoir la Loi sur les contraventions, qui a reçu la sanction royale le 12 octobre 1992. Jusqu'à maintenant, toutefois, cette loi n'a pas encore été proclamée.

Pour en apprendre un peu plus sur la Loi sur les contraventions, j'ai d'abord lu le compte rendu des délibérations du comité législatif pour les séances du 30 avril 1992 au 20 mai 1992. Ensuite, j'ai lu les Débats du Sénat du 9 septembre 1992, où l'honorable R. James Balfour a parlé sur le projet de loi C-46 d'alors, Loi sur les contraventions. D'autres sénateurs ont pris part au débat, notamment notre Président, l'honorable sénateur Molgat, et l'honorable sénateur Corbin. Troisièmement, j'ai lu les délibérations du comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles du 22 septembre 1992, dont étaient membres les sénateurs Beaudoin, Cools, Di Nino, Doyle, Lewis, Nurgitz et Stanbury. L'honorable sénateur Bonnell était également présent et a pris part à la discussion. Quatrièmement, j'ai lu un document d'information sur les modifications proposées à la Loi sur les contraventions composé par la Direction des communications et des services exécutifs du ministère de la Justice et datant de décembre 1995. Cinquièmement, j'ai lu un résumé des modifications proposées à la Loi sur les contraventions datant du 20 mars 1996 et préparé par le ministère de la Justice. Sixièmement, j'ai lu les Débats de la Chambre des communes du 29 mars, lorsque Gordon Kirkby a pris la parole sur le projet de loi C-16. Enfin, j'ai lu le projet de loi C-16 tel qu'adopté par la Chambre des communes le 29 mars 1996.

Malheureusement, c'est il y a vingt ans, en 1976, que la Commission de réforme du droit a recommandé l'adoption d'une telle loi. Après que les conservateurs eurent pris le pouvoir en 1984, Stan Darling, député conservateur de Parry Sound- Muskoka, a fait pression pour l'adoption de ce projet de loi en 1992. Malgré les refus qu'il a essuyés auprès de deux ministres, le très honorable Ray Hnastyshyn et l'honorable Douglas Lewis, il est revenu à la charge et a finalement eu gain de cause auprès de la très honorable Kim Campbell, qui a fait adopter le projet de loi en 1992.

Le 4 mai 1992, devant le comité chargé de l'étude du projet de loi, M. Russell MacLellan, député de Cap-Breton-The Sydneys, a posé la question suivante à M. Daniel C. Préfontaine, premier conseiller en politiques, Valorisation de l'action réglementaire et Justice applicable aux autochtones, ministère de la Justice:

[...] ce projet de loi me semble tout à fait clair, bien qu'il doit contenir certains pièges. La Commission de la réforme du droit a recommandé cette procédure en 1976, et le ministre a été saisi de la question depuis 1986. Pourquoi a-t-on mis tant de temps à déposer ce projet de loi pour une question de forme qui semble tout à fait simple?

M. Préfontaine a répondu ceci:

Nous avons commencé à étudier le besoin pour ce genre de procédures principalement dans le contexte du Règlement relatif à la circulation sur les terrains du gouvernement. À cette époque, nous tentions de recenser les compétences des ministères fédéraux et les divers accords d'application de la loi passés avec les provinces pour administrer ce règlement relatif à la circulation.

Lorsque nous nous sommes mis à étudier la question en profondeur, et suite aux très importants travaux de la Commission de la réforme du droit, de nombreuses questions ont été soulevées relativement aux casiers judiciaires et ce qu'il faudrait en faire, relativement aux empreintes digitales, aux jeunes contrevenants, et aux liens possibles avec la Loi sur les infractions et procédures que préparait l'Ontario à cette époque.

Avec tout le pain que nous avions sur la planche, nous avons continué de travailler en ce sens et nous avons essayé de déterminer quel serait le meilleur modèle, la meilleure approche à suivre. À cause de tout cela, nous y avons mis beaucoup d'efforts, car il s'agit effectivement d'une question de procédure... Ce n'est que lorsque nous avons réalisé que de telles mesures auraient un effet sur le problème de la congestion des tribunaux que nous avons fait de ce projet de loi une priorité. C'est une priorité aujourd'hui à cause de tous les éléments qui sont entrés en jeu au fil des ans.

(1520)

Nous nous inquiétions des questions relatives à la Charte jusqu'à ce que les tribunaux nous disent que non, ce n'était pas un problème si nous avions une approche administrative différente d'une province à l'autre, quoiqu'il faudrait être aussi logique que possible dans une loi nationale.

Voilà tous les éléments qui sont entrés en jeu au cours de nos travaux, auxquels j'ai participé personnellement. Il fallait également une volonté de la part d'un ministre pour dire oui, c'est quelque chose qui doit se faire, cela tarde mais nous devons le déposer. La ministre Campbell l'a fait en déposant ce projet de loi en décembre dernier.

C'était en 1991.

Comme vient de le dire le sénateur, la Loi sur les contraventions soustrait certaines infractions mineures à l'application du Code criminel et de certaines autres lois fédérales. Elle vise à empêcher que les auteurs d'infractions à des lois fédérale mineures, infractions qui ne seraient normalement pas considérées comme des actes criminels, n'encombrent le système judiciaire. Elle soustrait à l'application du Code criminel et d'autre lois fédérales certaines infractions mineures à la réglementation fédérale, créant ainsi une nouvelle catégorie d'infractions mineures dont les auteurs ne sont plus traduit en justice.

Honorables sénateurs, aux termes de la loi adoptée par l'ancien gouvernement progressiste-conservateur, les contre- venants devaient tout de même assumer les conséquences de leurs actes en recevant une contravention qui était ensuite déposé au greffe. Le contrevenant pouvait admettre sa culpabilité en signant la contravention et en payant l'amende. On a voulu faire en sorte que les amendes puissent être payées à des institutions financières comme les banques. Les contrevenants pouvaient également plaider non coupable et demander la tenue d'un procès. Le cas échéant, ils devaient se soumettre aux procédures judiciaires habituelles. Cette façon de faire est plus adéquate et moins coûteuse que l'application des procédures prévues en vertu du Code criminel pour ce type d'infractions.

Comme l'expliquait le sénateur Balfour en 1992, la loi comportait trois objectifs principaux. Premièrement, elle décriminalisait les infractions mineures à la réglementation fédérale. Les sénateurs qui sont membres du comité des affaires juridiques et constitutionnelles savent en quoi consiste la décriminalisation de certains actes. Deuxièmement, la loi visait à soustraire aux procédures judiciaires les cas où il n'y avait pas de contestation. Le troisième objectif était d'assurer une meilleure application des amendes.

Toutefois, la difficulté d'appliquer cette loi provenait du fait que douze ministères et organismes fédéraux sont responsables de centaines de milliers d'infractions possibles. Le but du projet de loi est d'en désigner environ 3 000 seulement comme des infractions pouvant être traités en vertu d'une procédure sommaire. Les infractions de cette catégorie comprennent le fait de conduire un bateau à grande vitesse trop près d'une rive; chasser sans permis valide; camper sans permis dans un parc; cueillir des fleurs dans un parc fédéral; enfreindre les règlements de stationnement sur des terres fédérales, et autres infractions du genre.

Si l'on ajoute à cela les dix gouvernements provinciaux et les deux territoires, qui seront bientôt trois, on peut imaginer le casse-tête administratif que ce sera de coordonner les divers aspects de cette mesure.

Comme le ministère de la Justice s'en charge activement depuis plus de dix ans, on peut espérer qu'il réussira maintenant à mettre le nouveau système en branle en 1996, comme notre cher sénateur vient de nous l'assurer.

Il y a autre chose qui inquiète les parlementaires, soit le fait qu'environ 3 000 infractions prévues dans la loi seront prescrites par règlement. Le gouvernement en place sera donc libre de choisir les infractions qui s'appliqueront. En vertu de ce projet de loi, il est aussi possible de permettre aux autorités policières de choisir d'émettre une contravention ou de porter une accusation, suivant les directives administratives émises par chaque ministère.

Il serait préférable que les infractions et les directives soient examinées par le Parlement avant l'entrée en vigueur de ce projet de loi. Toutefois, si cela devait prendre encore dix ou vingt ans, nous ferions mieux, pour des raisons pratiques, de l'adopter sans attendre. C'est une question que nous poserons aux représentants du ministère de la Justice quand ils se présenteront au comité.

Une autre question qui avait inquiété certains sénateurs libéraux lorsque le Sénat avait été saisi de cette mesure législative est le fait que le comité des affaires juridiques et constitutionnelles n'avait pas invité les gouvernements des 10 provinces et des deux territoires à lui présenter des observations écrites ou verbales, ainsi que le prévoit l'Annexe I du Règlement du Sénat du Canada. J'espère que cette question sera également examinée à l'étape de l'étude en comité.

Pour ce qui est du projet de loi C-16 lui-même, en plus d'apporter à la loi certaine modifications d'ordre technique et de régie interne, il permet au gouverneur en conseil de rendre le régime pénal d'une province ou d'un territoire applicable, avec les adaptations nécessaires, aux contraventions fédérales commises dans cette province ou ce territoire; autorise le ministre de la Justice à conclure avec le gouvernement d'une province ou d'un territoire, leurs municipalités ou leurs représentants, des accords portant sur l'application de la loi, notamment des ententes sur la poursuite des contraventions, sur l'imposition des amendes et l'exécution de leur paiement. Le projet de loi autorise aussi le ministre de la Justice à conclure avec le gouvernement d'une province ou d'un territoire ou leurs municipalités des accords portant sur le partage des revenus provenant des amendes imposées et comprend des dispositions relatives à la façon de comptabiliser le partage des revenus provenant de ces amendes. Il assure le respect de certains principes fondamentaux, peu importe qu'une contravention soit poursuivie selon le régime pénal fédéral ou selon un régime pénal provincial.

Il n'y a pas de doute que de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes en faveur de cette mesure législative et que nous attendons avec impatience sa mise en oeuvre dans un délai aussi raisonnable que possible. Nous voulons bien sûr poser aux fonctionnaires du ministère certaines questions concernant les règlements et la liste des contraventions qui seront visées, les lignes directrices que chaque ministère devra suivre, le dépassement des délais pour la proclamation de l'entrée en vigueur de ce projet de loi et le fait que le projet de loi C-16 a été adopté dans l'autre endroit en une journée sans avoir été renvoyé à un comité en dépit du fait qu'il exigeait quelques modifications.

Je répète que j'appuie le but général de la Loi sur les contraventions ainsi que les amendements prévus dans ce projet de loi, la possibilité qu'offre cette mesure législative de réduire les frais d'administration du système judiciaire du Canada et de faire en sorte de mieux faire respecter la réglementation fédérale.

Je recommande donc que le projet de loi C-16 soit renvoyé au comité. Il serait utile que les fonctionnaires témoignent devant le comité pour expliquer les amendements apportés si précipitamment au projet de loi C-16 et dire pourquoi rien n'a été fait pour que la Loi sur les contraventions ne soit promulguée avant aujourd'hui. Je crois que lorsque nous aurons reçu des réponses satisfaisantes à ces questions, nous pourrons appuyer sans réserve ce projet de loi.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu une deuxième fois.)

Renvoi au comité

Son Honneur le Président pro tempore: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

L'honorable Rose-Marie Losier-Cool: Honorables sénateurs, avant de proposer que ce projet de loi soit renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, je voudrais remercier le sénateur Jessiman de ses commentaires. Je serai très heureuse de travailler avec lui au comité.

(Sur la motion du sénateur Losier-Cool, le projet de loi est renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)

(1530)

Le discours du Trône

L'Adresse en réponse-Suite du débat

L'ordre du jour appelle:

Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Bacon, appuyée par l'honorable sénateur Rompkey, c.p., tendant à l'adoption d'une Adresse à Son Excellence le Gouverneur général en réponse au discours qu'elle a prononcé lors de l'ouverture de la deuxième session de la 35e législature-(5e jour de la reprise du débat).

L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, je voudrais commencer par féliciter le sénateur Bacon et le sénateur Rompkey, qui ont respectivement proposé et appuyé l'Adresse en réponse au discours du Trône, de leur excellente contribution à ce débat. Je pense qu'elles étaient parmi les meilleures que j'ai jamais entendues dans cette Chambre.

L'une des caractéristiques du discours du Trône est le défi que le gouvernement a adressé au secteur privé, l'invitant à produire des emplois pour les jeunes Canadiens. Il est clair, comme le premier ministre l'a dit par la suite, que l'entreprise a un rôle majeur à jouer dans l'élimination de ce que l'on appelle le déficit humain du chômage.

M. Martin a ensuite présenté son budget, qui est une réalisation remarquable à bien des égards. Les analystes de tout le pays ont applaudi le ministre des Finances pour sa défense du développement des programmes sociaux dans ce pays.

Dans un acte que certains ont comparé à la quadrature du cercle, M. Martin a également respecté sa promesse de poursuivre ses progrès vers l'élimination du déficit fiscal. Le gouvernement s'en est tenu à son engagement difficile de responsabilité financière. Il était logique et juste que l'on demande à l'entreprise d'assumer sa part du fardeau du déficit humain du chômage. Ou, comme le ministre Manley l'a si bien dit, il est temps que les compagnies deviennent des partenaires réelles dans la société.

Le premier ministre a demandé aux entreprises, grandes et petites, d'investir un pour cent supplémentaire de leur budget salarial dans la création d'emplois pour les jeunes Canadiens. Cet engagement de 1 p. 100 sera la preuve que le Canada peut fonctionner non seulement pour les puissants et les privilégiés, mais aussi pour les millions de Canadiens ordinaires. Cet engagement de la part de la communauté d'affaires serait central pour la restauration, dans notre pays, d'un partenariat basé sur la confiance.

[Français]

Honorables sénateurs, nous vivons à une époque où deux réalités se côtoient dans la même décennie. Pendant que l'exportation monte en flèche, résultat de la confiance avec laquelle les Canadiens accueillent les défis de la nouvelle économie, il nous faut aussi endurer les coûts humains engendrés par la restructuration de l'industrie de par le monde.

[Traduction]

Le gouvernement du Canada protège encore et toujours les Canadiens contre les pires répercussions de la transformation radicale que subit l'économie mondiale. Sans notre engagement constant envers les programmes sociaux, les Canadiens connaîtraient l'immense fossé qui sépare les travailleurs à revenu élevé et les travailleurs à faible revenu dans des pays comme la Grande-Bretagne et les États-Unis. Cependant, honorables sénateurs, le gouvernement ne peut à lui seul protéger les citoyens contre les répercussions de la révolution technologique et le fort mouvement de restructuration que l'on a observé au cours de la présente décennie. Ces phénomènes ne respectent pas les frontières nationales des États souverains.

Des termes tels que «prévisibilité» et «sécurité» semblent appartenir à une époque révolue. Les jeunes en particulier sont durement frappés par la transition rapide qui s'opère vers le nouvel ordre économique. Bon nombre s'inquiètent de ce que l'avenir leur réserve. Ils voient des entreprises afficher des profits records pendant que des milliers de travailleurs sont licenciés. La confiance du public dans les milieux d'affaires n'a jamais été aussi ébranlée. Les tribunes radiophoniques sont inondées d'appels exigeant que l'on mette un terme aux profits excessifs des sociétés. Les gens se demandent si un marché de plus en plus compétitif n'exclut pas à tout jamais de larges segments de notre population. Ils s'inquiètent des conséquences sur notre société de l'existence d'une classe de citoyens marginalisés, en chômage chronique ou sous-employés.

[Français]

Derrière ces inquiétudes se profile la crainte légitime que provoque la technologie de l'informatique, une force omni- présente qui menace de faire disparaître beaucoup d'emplois, que ce soit de vendeurs, de commis de banque ou de cadres intermédiaires.

[Traduction]

Le gouvernement s'inquiète vivement du sentiment d'impuissance que ressentent de nombreux Canadiens face à l'insécurité dans leur vie. Bien entendu, on se préoccupe surtout de l'avenir de nos jeunes. Comment les élève-t-on? Comment forme-t-on de véritables citoyens, c'est-à-dire des gens qui agissent activement, de façon responsable, pour le bien de leur collectivité, de leur pays et du monde extérieur? Comment pouvons-nous élever et éduquer les citoyens canadiens si un capital social de confiance s'amenuise et disparaît?

Comme le premier ministre l'a bien compris, nous n'aurons pas d'unité durable au Canada si nous ne croyons pas les uns dans les autres. L'appel qu'il a lancé au monde des affaires, qu'il a invité à participer à l'établissement d'une nouvelle politique nationale, est au coeur du rétablissement d'une économie fondée sur la confiance.

Pendant ce temps, le gouvernement soutient fermement le monde des affaires qui est confronté à tous les défis de la mondialisation, défis qui sont liés au rétrécissement du temps et de l'espace découlant des progrès technologiques, ainsi qu'au cycle de vie de plus en plus court des produits et des services. Le premier ministre ne comprend que trop bien que les capitalistes intelligents du monde entier s'inquiètent également beaucoup des répercussions du manque d'emplois, des effets négatifs de la réduction des effectifs, ainsi que des problèmes d'instabilité qui y sont associés.

De nos jours, toutes nos institutions sont soumises à des pressions et à des difficultés sans précédent. Cela touche l'entreprise moderne, l'université, le gouvernement, le mouvement syndical, toutes nos institutions. Je compare les craintes d'aujourd'hui au sentiment que les gens éprouvaient à une époque lorsqu'ils croyaient que le monde était plat et que s'ils naviguaient trop loin, ils pouvaient tomber dans les abysses du néant. Cependant, des gens ont relevé le défi, ils sont allés au-delà de ce qui était alors connu et ils ont tracé une nouvelle voie pour l'avenir.

[Français]

Aujourd'hui, honorables sénateurs, l'esprit novateur et le goût de l'aventure des Canadiens ont déjà commencé à se manifester. Nous en voyons les signes partout autour de nous.

[Traduction]

Pour commencer, nos exportations mondiales montent en flèche. Depuis deux ans, nos ventes sur le marché américain connaissent une croissance spectaculaire. Cependant, le plus important, c'est l'explosion de nos exportations vers des pays comme la Chine, le Chili, le Brésil, le Japon, l'Australie et le Mexique, qui montre, selon moi, que les entreprises canadiennes sont suffisamment solides pour s'implanter sur les marchés étrangers qu'on retrouve au-delà de notre principal partenaire commercial.

Ce sont les compétences mêmes que nous, Canadiens, avons dû acquérir pour bâtir une vaste infrastructure moderne dans tout le pays dont les grands marchés naissants d'aujourd'hui ont besoin pour étendre leurs propres infrastructures et leurs propres industries. Il est question, bien entendu, de la production d'électricité, y compris l'hydro-électricité, de systèmes de communications et de transport, de techniques de pointe dans la mise en valeur des ressources naturelles et de services financiers à l'échelle internationale.

Nous mettons à profit nos compétences pour produire notre propre technologie. Les Canadiens excellent dans l'exportation de produits manufacturés à valeur ajoutée - dans les domaines des logiciels et des télécommunications -, ce qui permet de créer des emplois reposant sur le savoir. Pour ces raisons mêmes, le Canada est devenu un protagoniste respecté de la nouvelle économie. Il ne faut pourtant pas oublier le plus important: la mention «fabriqué au Canada» est un gage universellement respecté dans l'économie mondiale. La feuille d'érable rouge symbolise un pays qui, avec ses produits à valeur ajoutée, exporte aussi ses valeurs: le sens moral et la tolérance, la justice et la stabilité - ce qui est sans doute notre avantage comparatif naturel le plus important.

En cette décennie démente des années 90, nous voyons coexister les deux mondes, l'ancien et le nouveau. Les chiffres de mars sur l'emploi - 44 000 emplois ont été créés - montrent que le Canada progresse dans de nouvelles avenues. Le spectre des compressions n'en continue pas moins de hanter bien des Canadiens. Elles n'inquiètent pas seulement les milliers de Canadiens qui ont été directement touchés, mais, j'oserais le dire, un grand nombre de nos capitalistes les plus féconds.

Pour en revenir à la question de confiance, je crois que les entreprises doivent montrer qu'Équipe Canada n'est pas une vaine abstraction, que c'est un véritable effort d'équipe. C'est ce que le premier ministre a réclamé dans le discours du Trône: un véritable effort d'équipe. Nous devons montrer aux Canadiens que leur pays n'appartient pas qu'aux riches et aux privilégiés, mais aussi aux millions de simples citoyens.

À notre époque, l'entreprise a besoin, plus que jamais, non seulement de travailleurs hautement compétents, capables d'intégrer les connaissances essentielles pour réussir dans l'économie nouvelle, mais aussi de personnes de la plus haute intégrité, élément essentiel à notre société qui est en train de réinventer ses institutions. On peut dire que nous avons besoin - je ne songe pas uniquement au secteur privé, mais aussi aux Canadiens de toutes les sphères d'activité - de plus de personnes inspirées par des idées plus grandes qu'elles-mêmes, animées par un impératif moral qui les pousse à travailler pour que le monde, après elles, soit meilleur qu'elles ne l'ont trouvé.

Nous avons besoin de personnes qui savent aller à contre-courant, qui croient, pour reprendre les mots de Matthew Arnold, que ce n'est pas tout dans la vie que d'avoir et obtenir; il faut aussi être et devenir. Dirons-nous que ce sont des idéalistes?

Peut-être, car, à notre époque, nous avons besoin d'eux plus que jamais, de ces Canadiens qui sont prêts à ouvrir des voies nouvelles et à se donner pour servir les intérêts à long terme de nos ressources naturelles les plus importantes, nos ressources humaines.

[Français]

Rappelons-nous que le Canada n'est pas un point de départ, mais une destination à atteindre. Nos ancêtres ont été stimulés par des rêves plus grands que nature.

[Traduction]

Ensemble, ils ont conçu une culture politique de respect d'autrui. Ensemble, ils ont inventé une culture politique de politesse et de courtoisie. Au long des décennies, cette culture politique est devenue aussi instinctive aux Canadiens que l'est notre passion pour la justice et l'équité. C'est cependant la confiance, et la foi les uns dans les autres, qui est le ciment de notre fédération. Cette foi, cette confiance ont été mises à rude épreuve en cette décennie. Beaucoup d'entre nous ont tendance à l'oublier, c'est cette foi, cette confiance, qui constituent l'infrastructure spirituelle de notre pays.

[Français]

Nous devons tenter ensemble de retrouver cette confiance et cet espoir, car nous avons une responsabilité unique et essentielle en tant que Canadiens.

[Traduction]

Je l'ai constaté bien clairement il y a quelques semaines quand je me suis rendu à Québec. Cela faisait plusieurs années que je n'y étais pas allé. Je voulais voir ses attractions touristiques et sentir le pouls de cette ville bien spéciale. Je sentais le besoin d'y aller depuis octobre dernier, quand nous avons failli perdre l'une des régions les plus essentielles de notre pays. Durant mon séjour, j'ai été si réconforté que je me suis demandé comment je pourrais convaincre davantage de mes concitoyens de visiter cette belle ville qui symbolise tout le drame et toute la passion de notre passé, et le grand fleuve qui servait de porte d'entrée à notre continent.

Pour de nombreux touristes, Québec est célèbre pour le champ de bataille des Plaines d'Abraham. Cependant, pour ceux qui comprennent la ville, la véritable histoire réside dans une entente entre des peuples d'origines ethniques et d'expériences ancestrales très différentes. La véritable histoire réside dans une entente entre les Canadiens, sans égard à leur patrie ancestrale, une entente qui a été conçue pour laisser le monde dans un état meilleur que celui dans lequel on l'avait trouvé.

J'ai fait une promenade dans la neige sur les Plaines d'Abraham. Une petite plaque a attiré mon regard. J'ai enlevé la neige qui la recouvrait et je l'ai lue. Honorables sénateurs, j'ai été étonné d'y voir en gros caractères les mots «Ô Canada». J'ai lu cette plaque avec fascination. Voici ce qu'elle disait:

Cet hymne national glorieux, dont les paroles sont de sir Adolphe Routhier et la musique de Calixa Lavallée, a été chanté pour la première fois à l'occasion du premier Congrès catholique canadien-français,

lors de la fête de saint Jean-Baptiste,

le 24 juin 1880.

J'ai lu et relu ces lignes plusieurs fois. J'avais peine à croire que les mots de notre magnifique hymne national avaient été chantés pour la première fois il y a 116 ans, lors de la saint Jean-Baptiste, à Québec.

Je me suis demandé ce qu'il faudrait pour que ce grand événement soit repris en 1996 ou en 1997. Je me suis demandé comment nous pourrions revenir à cette confiance mutuelle toute simple qui, il y a si longtemps, a poussé nos ancêtres à unir leurs voix à Québec pour rendre un hommage émouvant à la «terre de nos aïeux».

[Français]

Honorables sénateurs, la réponse n'est vraiment pas si difficile. Il ne faut pas oublier que si nous sommes une grande nation, c'est que nous nous sommes fait confiance mutuellement pendant des décennies.

[Traduction]

Nous partageons des valeurs qui sont tout aussi naturelles pour nous que l'air que nous respirons. Aujourd'hui, pour une raison ou une autre, nous devons, ensemble, trouver le moyen de rétablir cette confiance et cette compréhension. Nous ne devons jamais abandonner notre pays.

Nous sommes Canadiens et, comme nos ancêtres, nous avons des promesses à tenir et beaucoup de travail à faire avant de nous endormir.

[Français]

Transports et communications

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L'honorable Lise Bacon, conformément à son avis du mercredi, le 24 avril 1996, propose:

Que le comité sénatorial permanent des transports et des communications soit autorisé à siéger à 16h30 les mardis pendant son étude du projet de loi C-14, Loi maintenant l'Office national des transports sous le nom d'Office des transports du Canada, codifiant et remaniant la Loi de 1987 sur les transports nationaux et la Loi sur les chemins de fer et modifiant ou abrogeant certaines lois, même si le Sénat siège à ce moment-là et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.

(La motion est adoptée.)

(Le Sénat ajourne à 14 heures, le mardi 30 avril 1996.)


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