Débats du Sénat (Hansard)
Débats du Sénat (hansard)
2e Session, 35e Législature,
Volume 135, Numéro 18
Le mardi 14 mai 1996
L'honorable Gildas L. Molgat, Président
- Le Sénat
- DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
- AFFAIRES COURANTES
- PÉRIODE
DES QUESTIONS
- La
justice
- La vente des avions Airbus à Air Canada-Les allégations de conspiration visant à frauder le gouvernement fédéral-Le rôle de la Gendarmerie royale du Canada dans l'enquête-La position du gouvernement
- La vente des avions Airbus à Air Canada-Les allégations de conspiration visant à frauder le gouvernement fédéral-L'approbation de l'enquête-La position du gouvernement
- La vente des avions Airbus à Air Canada-Les allégations de conspiration visant à frauder le gouvernement fédéral-L'approbation de l'enquête-Le niveau hiérarchique de la décision-La position du gouvernement
- La
taxe sur les produits et services
- L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-Les pouvoirs de la future Commission canadienne du revenu-Demande de précisions
- L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-La situation des employés contractuels au centre de Summerside-La position du gouvernement
- L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-Les études sur les conséquences défavorables-Demande de réponse
- Recensement Canada
- Les travaux publics et les services gouvernementaux
- L'économie
- Le Sénat
- Dépôt des réponses à des questions au Feuilleton
- La
justice
- ORDRE
DU JOUR
- Projet de loi sur la Commission du droit du Canada
- Projet de loi sur certains accords concernant l'aéroport international Pearson
- Les travaux du Sénat
- Le Code criminel
- Projet de loi sur l'Association canadienne des ex-parlementaires
- L'enfance maltraitée et négligée
- Projet de loi sur certains accords concernant l'aéroport international Pearson
- Les travaux du Sénat
- La Société de développement du Cap-Breton
- Loi sur certains accords concernant l'aéroport international Pearson
- Projet de loi concernant l'assurance-emploi
- Projet de loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur
LE SÉNAT
Le mardi 14 mai 1996
La séance est ouverte à 14 heures, le Président étant au fauteuil.Prière.
[Traduction]
Programme d'échange de pages avec la Chambre des communes
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, je voudrais vous présenter deux pages de la Chambre des communes qui ont été choisis pour participer au programme d'échange avec le Sénat cette semaine.[Français]
Adèle Séguin, de Sudbury, Ontario, étudie à la faculté des lettres de l'Université d'Ottawa. Elle se spécialisera en communications. Je lui souhaite la bienvenue. Elle pourrait peut-être justement m'aider dans mes communications.
[Traduction]
Honorables sénateurs, Hillary Stedwill, de Regina, en Saskatchewan, poursuit lui aussi ses études à l'Université d'Ottawa. Il étudie à la faculté des lettres et se spécialise en anglais. Bienvenue au Sénat.
DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS
Le Sénat
Inauguration de l'impression à l'interne
L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, c'est un heureux jour qui fera date dans l'histoire du Sénat. La journée marque une étape de notre évolution. Aujourd'hui, tous les honorables sénateurs ont sur leurs bureaux les premiers exemplaires des Débats du Sénat, des Journaux du Sénat et du Feuilleton et Feuilleton des Avis imprimés à l'interne. Jusqu'ici, ces documents étaient imprimés pour nous, en vertu d'un contrat, par le Groupe Communication Canada, auparavant l'Imprimeur de la Reine. Désormais, l'impression relève complètement de la responsabilité des employés du Sénat.Cette transition a commencé, il y a quelques mois, sous la direction de mon prédécesseur, le regretté sénateur Earl Hastings. Ce dernier avait demandé au sénateur Cohen d'examiner les conclusions d'un comité des employés concernant les documents officiels du Sénat. Une des options consistait à faire imprimer le hansard et d'autres documents par une entreprise privée. Le comité des employés a rejeté cette option, pensant qu'il serait moins coûteux d'assumer nous-mêmes l'impression, à la condition d'acheter la technologie nécessaire et de donner à nos employés la formation appropriée.
Après mûre réflexion, le comité de la régie interne a donc présenté un budget des dépenses supplémentaire et le Sénat a fait l'acquisition d'un nouveau système d'impression au coût de 875 000 $. Ce matériel permettra au Sénat d'économiser plus de 600 000 $ par an au chapitre des coûts d'impression. Le montant total des économies prévues par le comité des employés a été confirmé par un vérificateur indépendant, spécialiste des vérifications techniques. Les dépenses en capital pour imprimer le hansard seront complètement amorties en moins de 18 mois et l'impression sera d'une qualité et d'une apparence inchangées. Dorénavant, les seuls travaux d'impression faits à l'externe porteront sur des documents de nature spécialisée, notamment les invitations sur papier gaufré pour la cérémonie de la rentrée parlementaire.
(1410)
Je sais que les honorables sénateurs se joindront au sénateur Di Nino, à tous les membres du comité sénatorial permanent de la régie interne, des budgets et de l'administration, et à moi-même pour rendre hommage au travail accompli par tant de nos employés pour que ce projet soit couronné de succès. Je tiens à saluer tout spécialement des gens qui sont actuellement présents à la tribune. Je félicite Jean-Guy Béland, chef de l'imprimerie, et les opérateurs de machines Gil Gorley, Jean- Marc Gagnon et Robert Ethier. Nous sommes également reconnaissants envers Richard Greene, greffier adjoint du Sénat, Jean-Pierre Lavoie, directeur des services, Hélène Bouchard, chef du Service informatique, et Michael Shreve, coordonnateur du Centre des publications du Sénat.
La République populaire de Chine
La reconduction par les États-Unis du traitement de la nation la plus favorisée pour la Chine
L'honorable Jack Austin: Honorables sénateurs, je voudrais parler quelques instants de nos relations stratégiques avec la Chine. Sans presque que l'on s'en rende compte, le moment approche rapidement où sera tranchée une des questions stratégiques les plus importantes en matière de commerce mondial. Je veux parler des relations entre les États-Unis et la Chine, et plus particulièrement de la décision que le président Clinton doit prendre de reconduire ou non pour une autre année le traitement de la nation la plus favorisé pour la Chine.La loi américaine sur le commerce extérieur oblige le président à décider chaque année s'il faut renouveler le traitement de la nation la plus favorisée pour la Chine, et la date limite tombe cette année le 4 juin. Le Congrès s'est réservé dans la loi le droit d'annuler la décision du président. Or, c'est une année d'élections aux États-Unis, et les relations entre les États-Unis et la Chine ne sont pas paisibles.
En 1995, la Chine a affiché un excédent de la balance commerciale de plus de 35 milliards de dollars américains avec les États-Unis, ne le cédant qu'au Japon sur ce plan. Ce fait est exacerbé par des conflits portant sur certaines pratiques relatives à la propriété intellectuelle, sur un prétendu transfert de dispositifs nucléaires névralgiques, sur des questions de droits de la personne, sur les menaces adressées à Taiwan et sur le futur statut démocratique de Hong Kong. Sont également en jeu la position américaine sur les conditions d'entrée de la Chine au sein de l'Organisation mondiale du commerce et le rôle de la Chine dans le conflit entourant les îles Spratley. Ajoutons à ce cocktail la montée de la rhétorique protectionniste aux États-Unis, associée aux mesures américaines pour imposer une vision plus bilatérale de leurs intérêt commerciaux.
Il ne fait aucun doute que le retrait du traitement de la nation la plus favorisée nuirait gravement à l'économie chinoise et à l'émergence de la Chine comme membre de la communauté commerciale internationale. Cela pourrait également causer des torts considérables à Hong Kong et à Taiwan. Ce pourrait être la fin de Hong Kong comme centre financier et commercial international et comme tête de pont de la démocratie en Asie.
Les États-Unis causeraient également un tort énorme à leur propre économie, avec une poussée à la hausse des prix à la consommation et des pertes d'emplois dans les secteurs de l'exportation et de l'importation. La Chine répliquerait en perturbant les structures commerciales asiatiques et mondiales. Ce qui ennuie les États-Unis, c'est que malgré l'énorme impact que le retrait du traitement de la nation la plus favorisée aurait sur le commerce mondial, la Chine ne prend pas la menace au sérieux. Les États-Unis ne réussissent pas à trouver des moyens pour amener la Chine à changer de comportement.
Comme les coûts sont disproportionnés, la menace de suppression de la clause de la nation la plus favorisée n'a pour les États-Unis qu'une valeur minime. Il serait logique que le Congrès annule sa loi visant à réviser cette clause et s'efforce plutôt, par des encouragements et non des menaces, de faire de la Chine un membre de la communauté internationale qui respecte les règles du commerce. Les États-Unis doivent savoir que ni le Canada, ni le Japon, ni l'Europe ne se rallieront à leur décision de mettre la Chine au ban du commerce mondial. Des sanctions unilatérales américaines n'auraient aucune chance de réussir. Ce devrait être la dernière fois que les États-Unis se permettent ce genre de débat national stérile.
Tous les pays commerçants, les États-Unis compris, doivent admettre qu'il y va de leur intérêt stratégique que la Chine soit un membre à part entière de la communauté. Après tout, ce pays représente le quart de la population mondiale. Son PIB augmente chaque année à un rythme supérieur à 10 p. 100. D'après la Banque mondiale, l'économie chinoise sera d'ici à l'an 2010 la plus importante du monde en chiffres absolus, mais non au prorata de la population.
L'entrée de la Chine dans le réseau du commerce mondial doit se faire étape par étape, en prenant les problèmes commerciaux les uns après les autres. Dans ce domaine, rien n'est jamais donné. C'est un travail constant que de construire un monde pacifique. Il est faux de prétendre que la Chine est hostile à la paix dans le monde, comme certains le pensent. Elle a toute raison de vouloir la paix mondiale. Sa prospérité future en dépend. Permettez-moi de reprendre les propos que le chancelier Helmut Schmidt a tenus il y a des années au sujet de la politique ouest-allemande à l'égard de l'Allemagne de l'Est et de la Russie:
Quiconque voit les autres comme des ennemis ne peut instaurer la paix. Quiconque refuse de discuter avec les autres ou de les écouter s'interdit de les comprendre.
Environ huit ans ont passé depuis que le président ou le premier ministre de Chine a été accueilli à Washington ou que le président ou le vice-président des États-Unis s'est rendu à Beijing. Cette année, le président Clinton est allé à Tokyo, à Seoul et à Moscou, mais il a évité Beijing. Le président Eltsine rentre tout juste d'une visite à Beijing, et on dit que les relations sino-russes sont meilleures qu'elles l'ont été ces 40 dernières années.
Son Honneur le Président: Sénateur Austin, je dois vous informer que la période de trois minutes prévue pour votre déclaration de sénateur est terminée.
Le sénateur Austin: Puis-je continuer encore quelques instants?
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
Le sénateur Austin: La Chine n'a pas rendu la tâche facile aux États-Unis ou à tout autre pays occidental démocratique. La violation des droits de la personne en Chine, les pressions exercées sur Taiwan et Hong Kong et le transfert de technologies nucléaires sont autant de questions qui suscitent des inquiétudes. Elles ne peuvent cependant pas justifier le fait d'éviter d'avoir des relations sérieuses avec la Chine. Au contraire, les États-Unis ont toutes les raisons du monde de chercher à établir un dialogue régulier avec les hautes autorités chinoises.
Le Canada a appliqué la bonne méthode avec la Chine. Nous faisons l'impossible pour intégrer ce pays en pleine expansion au système international. Le premier ministre Chrétien, neuf des premiers ministres provinciaux du Canada et un grand nombre de ministres fédéraux se sont rendus en Chine au cours des deux dernières années pour amorcer un dialogue sur plusieurs questions, comme le commerce international, la sécurité mondiale et régionale, la gestion de l'environnement, le perfectionnement du régime juridique de la Chine, le respect des droits de la personne et la gestion des affaires publiques, pour n'en nommer que quelques-unes. À leur tour, d'aussi hauts dignitaires chinois sont venus au Canada, y compris le premier ministre Li Peng en octobre dernier et le président du Congrès populaire national, Qiao Shi, en avril, et ont été accueillis par le Président du Sénat, Gil Mogat.
Nos relations avec la Chine exigent de la patience, de la persévérance, de la détermination et de la bonne volonté. Si les États-Unis adoptaient une attitude semblable à la nôtre, nos efforts ne pourraient qu'en profiter. La première étape consiste à abandonner la révision annuelle de la loi concernant la nation la plus favorisée.
Le programme de dons d'organes
L'honorable John G. Bryden : Honorables sénateurs, cet après-midi, je voudrais attirer l'attention des sénateurs sur un article qui a paru le mardi 7 mai 1996 dans le Telegraph Journal. Je vous recommande à tous la lecture de cet article qui s'intitule «Le cadeau le plus précieux; l'ultime prix».Il a été très bien accueilli au Nouveau-Brunswick et a reçu l'approbation d'autres médias, y compris à Maritime Noon, l'émission de la radio de Radio-Canada qui est diffusée à partir de Halifax.
L'article est signé par le sénateur Simard. Il s'agit du récit personnel quoique détaché de son rendez-vous manqué avec la mort et de la transplantation miraculeuse qui lui a sauvé la vie in extremis et qui a notamment permis qu'il revienne nous harceler, nous, les sénateurs de ce côté-ci.
Son article est aussi un témoignage éloquent en faveur du régime canadien d'assurance-maladie, de la compétence de nos médecins et du miraculeux programme de don d'organes. C'est un long article. J'espère que les honorables sénateurs le liront, mais je voudrais en citer ici quelques passages. Voici :
Surtout, je veux que vous compreniez que je suis en vie aujourd'hui parce qu'un simple citoyen a apposé sa signature au verso de son permis de conduire et a accepté de faire don de ses organes en cas de mort subite. [...]
Même si aucune transplantation n'est pratiquée dans les hôpitaux du Nouveau-Brunswick, notre régime provincial de soins de santé offre un excellent programme de don d'organes dans des centres qui s'assurent de trouver des organes, de les préserver et de les expédier dans les hôpitaux spécialisés de Halifax et du Québec. Il y a une bonne raison économique au fait qu'on ne pratique pas de transplantation ici. La population n'est tout simplement pas assez nombreuse pour soutenir un programme qui exige de 20 à 25 transplantations de chaque organe par année pour être viable. En fait, nos médecins font preuve d'un grand professionnalisme en acceptant de se passer d'une discipline médicale prestigieuse afin que tous les Canadiens bénéficient des meilleurs soins à prix abordable.
(1420)
C'est là une raison évidente pour nous d'être fiers du régime canadien d'assurance-maladie. Grâce à la bonne volonté et au bon sens de tous, il est efficace pour tous les Canadiens, offre des soins de grande qualité au moyen des dernières découvertes de la technologie de pointe, et nos spécialistes de la transplantation sont parmi les meilleurs au monde. Je suis un témoignage vivant de l'excellence de leur travail. Et nous ne devrions jamais accepter de nous faire damer le pion par des pays comme les États-Unis, où la qualité des soins est directement liée à la capacité de payer.
Bien sûr, les habitants du Nouveau-Brunswick ont parfaitement le droit d'obtenir une transplantation dans les provinces voisines.
La politique s'estompe rapidement sur un lit d'hôpital. L'expérience remet les choses dans leur juste perspective. Si mon médecin avait été un partisan libéral en règle, j'aurais voté pour lui.
Le sénateur termine sur une note très importante:
Mais, je n'oublierai jamais que, sans le profond humanisme et le parfait altruisme d'un étranger, je ne serais pas ici aujourd'hui.
Des voix: Bravo!
AFFAIRES COURANTES
Projet de loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux
Rapport du comité
L'honorable Pierre De Bané, vice-président du comité sénatorial permanent des finances nationales, présente le rapport suivant:Le mardi 14 mai 1996
Le comité sénatorial permanent des finances nationales a l'honneur de présenter son
QUATRIÈME RAPPORT
Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-7, Loi constituant le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et modifiant ou abrogeant certaines lois, a, conformément à l'ordre de renvoi du jeudi 28 mars 1996, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement.Respectueusement soumis,
Le président,
DAVID TKACHUK
(Sur la motion du sénateur De Bané, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
Comité spécial sur le projet de loi d'amendement de la Constitution
Dépôt du rapport du comité
L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, conformément à l'article 104 du Règlement du Sénat, j'ai l'honneur de déposer le rapport final du comité spécial sénatorial sur le projet de loi C-110, Loi concernant les modifications constitutionnelles. Ce rapport traite des dépenses que le comité a engagées durant la première session de la 35e législature.(Le texte du rapport figure dans les Journaux du Sénat de ce jour.)
L'ajournement
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, ce soit au mercredi 15 mai 1996, à 13 h 30.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
La Loi canadienne sur les droits de la personne
Projet de loi modificatif-Première lecture
Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-33, Loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne.(Le projet de loi est lu une première fois.)
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?
(Sur la motion du sénateur Graham, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)
Affaires sociales, sciences et technologie
Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat
L'honorable Mabel L. DeWare, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)a) du Règlement, propose:Que le comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie soit autorisé à siéger à 14 heures cet après-midi, le 14 mai 1996, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendue à cet égard.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
PÉRIODE DES QUESTIONS
La Justice
La vente des avions Airbus à Air Canada-Les allégations de conspiration visant à frauder le gouvernement fédéral-Le rôle de la Gendarmerie royale du Canada dans l'enquête-La position du gouvernement
L'honorable Richard J. Doyle: Honorables sénateurs, ma question d'aujourd'hui s'adresse à madame le leader du gouvernement au Sénat et a trait à la Gendarmerie royale du Canada et aux efforts que cette dernière continue de déployer pour ternir la réputation du 24e premier ministre du Canada.Je m'en tiendrai à l'infamie de la GRC parce que madame le leader nous a assuré à maintes reprises depuis le 23 novembre 1995 qu'aucun ministre de son gouvernement n'était au courant de l'engagement d'agents de la GRC en Suisse par le gouvernement dans sa déclaration effrontée que M. Mulroney était la figure centrale d'un scandaleux stratagème visant à extorquer des millions de dollars en pots-de-vin pour l'achat des Airbus pendant qu'il était premier ministre du Canada.
Au mois d'avril dernier, M. Mulroney a déclaré que cette persécution avait des relents de fascisme. C'est ce qu'il a dit à l'occasion de l'audience préliminaire de l'action en libelle diffamatoire qu'il a intentée contre le gouvernement actuel. Même si le tribunal avait alloué trois jours pour l'interrogatoire préalable, les avocats du gouvernement, après seulement une journée et demie, ont abandonné leur interrogatoire. La deuxième phase du procès, au cours de laquelle les avocats de M. Mulroney pourront interroger ceux qui l'accusent, est fixée au 15 mai.
Le leader du gouvernement au Sénat saura sans doute que les avocats de la GRC ont demandé, hier, un report de cette audience à l'an prochain, soit au 10 janvier 1997.
La question est irrésistible: pourquoi? On nous a dit que la GRC ne voulait pas compromettre son enquête sur les accusations de paiements illégaux dans l'affaire Airbus.
(1430)
Je demande au leader du gouvernement au sénat: faut-il en conclure que le gouvernement du Canada demande maintenant à l'ancien premier ministre d'attendre gentiment pendant que sa police tentera de recueillir des preuves pour étayer l'accusation détaillée qu'elle a portée il y a plus de six mois?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme le sénateur le sait, cette affaire est maintenant devant les tribunaux. Je ne veux donc pas faire d'observations à cet égard. D'ailleurs, je n'en connais pas les détails.
Ainsi que le sénateur l'a fait remarquer, la GRC a fait savoir qu'elle souhaitait avoir plus de temps pour déposer une défense. Je suppose que les avocats de la GRC exposeront leurs motifs devant le tribunal. Je n'ai rien d'autre à ajouter.
Le sénateur Doyle: Honorables sénateurs, la ministre est-elle en train de nous dire encore une fois que l'affaire des Airbus est toujours exclusivement et entièrement entre les mains de la GRC ou, plus précisément, d'un sergent de la GRC?
Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, cette enquête a été confiée à la GRC et est toujours entre les mains de cette dernière. Je n'en sais pas plus.
Le sénateur Doyle: Honorables sénateurs, nous avons appris que les avocats de la GRC ont dit au tribunal hier que la demande d'aide adressée au gouvernement suisse était fondée sur «des renseignements provenant d'une source indépendante et jugés suffisamment dignes de foi pour être vérifiés, qu'ils soient vrais ou faux».
La ministre pourrait-elle voir dans cette déclaration l'interprétation que certains d'entre nous, de ce côté-ci, ont vue, à savoir que le sergent de la GRC n'avait rien d'autre qui puisse justifier sa terrible accusation que l'imagination de la presse de scandales du Canada?
La vente des avions Airbus à Air Canada-Les allégations de conspiration visant à frauder le gouvernement fédéral-L'approbation de l'enquête-La position du gouvernement
L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, dans le communiqué de presse intitulé «Le délai supplémentaire demandé pour la préparation de la défense dans la poursuite de M. Mulroney contre le gouvernement du Canada et d'autres parties», on lit ceci:Des avocats de la GRC et du gouvernement du Canada ont présenté une requête...
...en ce sens.
Sauf erreur de ma part, c'est la première fois que le gouvernement du Canada s'associe formellement, ou en tout cas publiquement, à l'enquête de la GRC sur ce que l'on appelle maintenant l'affaire Airbus.
Lorsqu'il a été question de cette affaire publiquement pour la première fois, le ministre de la Justice, le solliciteur général et même le premier ministre ont déclaré tout ignorer de l'enquête et ont ajouté qu'ils ne s'y associeraient en aucune manière parce qu'ils ne voudraient pas donner l'impression qu'il y a une ingérence politique dans une enquête strictement policière.
Aujourd'hui, nous voyons le gouvernement du Canada s'associer à la GRC pour demander que le tribunal retarde des audiences en prétextant que les renseignements confidentiels qui pourraient être divulgués à cette occasion risquent de compromettre l'enquête. Je ne peux qu'en déduire que le gouvernement, qui voulait se dissocier de l'enquête l'automne dernier, y est maintenant très étroitement mêlé puisqu'il s'est allié aux avocats de la GRC pour présenter au tribunal une requête qui intéresse tout particulièrement la GRC, car elle a directement trait aux répercussions du procès au civil sur le déroulement de son enquête.
Maintenant que le gouvernement a formellement endossé l'enquête en s'associant à cette requête, est-ce que le leader du gouvernement au Sénat peut nous dire si le gouvernement est satisfait du déroulement de l'enquête jusqu'à maintenant?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, les suppositions contenues dans la question de l'honorable sénateur sont les siennes. Je ne peux pas répondre à sa question aujourd'hui. Je ne sais rien du contenu de cette enquête. Je transmettrai la question à mes collègues pour voir si je peux lui apporter des précisions.
Le sénateur Lynch-Staunton: Honorables sénateurs, je trouve cela extraordinaire que, dans une affaire aussi délicate que celle-ci, où un ancien premier ministre a été dépouillé de la présomption d'innocence et déclaré criminel dans des documents officiels du gouvernement, le leader du gouvernement au Sénat ne puisse pas nous donner une idée de la position du gouvernement sur cette question.
Le communiqué de presse est clair. Il dit que le gouvernement appuie la demande d'extension de la GRC. Par conséquent, le gouvernement appuie l'enquête. Par conséquent, on ne peut que supposer qu'il appuie la façon dont l'enquête s'est déroulée jusqu'à maintenant - et je réponds maintenant à ma propre question.
Dans le document public traduit que le ministère de la Justice a envoyé aux autorités suisses en septembre dernier, document qui est au coeur de l'enquête de la GRC que le gouvernement du Canada appuiera en se présentant avec la GRC devant le tribunal demain pour demander que le procès civil soit retardé, on peut lire ceci:
L'enquête revêt une importance spéciale pour le gouvernement canadien parce que des activités criminelles menées par l'ancien premier ministre sont en cause.
Dans un document officiel envoyé aux autorités suisses, le gouvernement du Canada a déclaré criminel un citoyen canadien sans porter d'accusation contre lui dans son propre pays. Ce citoyen canadien a été ainsi dépouillé de la présomption d'innocence.
Nous avons lu et relu comment le ministre de la Justice, Allan Rock, lorsqu'il est intervenu au sujet d'une certaine affaire à Montréal, a confirmé le caractère sacré de la primauté du droit et de la protection de la Constitution. Par conséquent, il convient que je pose cette question. Le gouvernement du Canada appuie-t-il ce paragraphe, qui n'est pas hors contexte, tiré d'une lettre envoyée aux autorités suisses en septembre dernier par le ministère de la Justice? Je veux citer encore un extrait de cette lettre, qui dit ceci:
L'enquête revêt une importance spéciale pour le gouvernement canadien parce que des activités criminelles menées par l'ancien premier ministre sont en cause.
Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, comme je l'ai dit à mon collègue plus tôt, je vais prendre note des questions du sénateur, demander des éclaircissements et lui transmettre ensuite les informations pertinentes.
(1440)
La vente des avions Airbus à Air Canada-Les allégations de conspiration visant à frauder le gouvernement fédéral-L'approbation de l'enquête-Le niveau hiérarchique de la décision-La position du gouvernement
L'honorable Lowell Murray: Honorables sénateurs, madame le leader du gouvernement pourrait peut-être joindre des renseignements supplémentaires à l'information qu'elle nous communiquera. Elle pourrait peut-être vérifier à quel niveau il a été décidé que le gouvernement et la GRC allaient demander un délai supplémentaire de sept mois avant de déposer la défense. Cette décision a-t-elle été prise par Kimberley Post? Par un sous-ministre ou par un ministre? La ministre peut-elle vérifier comment la décision a été prise? Les ministres responsables de la GRC et du ministère de la Justice étaient-ils au courant?Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, je communiquerai les questions posées par mon collègue. Comme je le disais, les tribunaux sont présentement saisis de cette affaire à Montréal. Par conséquent, je suis sûre que les honorables sénateurs pardonneront mon ignorance de ces dossiers. Je transmettrai cependant les questions de tous les honorables sénateurs qui ont pris la parole aujourd'hui à mes collègues et je verrai ce que je pourrai obtenir.
Le sénateur Murray: Honorables sénateurs, je voudrais ajouter un nom à la liste de ceux au sujet desquels je désire savoir s'ils étaient au courant de la demande de prolongation de délai ou s'ils y ont donné leur consentement. J'ai parlé du ministre responsable de la GRC et du ministre de la Justice. J'ajouterai le premier ministre à la liste.
La taxe sur les produits et services
L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-Les pouvoirs de la future Commission canadienne du revenu-Demande de précisions
L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. J'ai ici une copie d'un protocole d'entente sur l'harmonisation des taxes de vente conclu entre le gouvernement fédéral et les trois provinces de l'Atlantique. Je voudrais faire remarquer à madame le leader du gouvernement au Sénat qu'il s'agit d'un protocole d'entente et non pas d'un accord, comme elle l'a dit au Sénat.Le point cinq crée la Commission canadienne du revenu à laquelle participent des représentants des provinces. Cependant, le protocole d'entente précise bien que le gouvernement fédéral a le dernier mot. N'est-ce pas là ôter aux provinces certains pouvoirs en matière de taxes et les donner à la Commission canadienne du revenu?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, mon collègue a raison lorsqu'il dit qu'il s'agit d'un protocole d'entente entre le gouvernement fédéral et les trois provinces du Canada atlantique. Pour ce qui est de la Commission, elle n'a pas été créée. Elle fera partie des efforts en vue d'établir une taxe nationale. J'essaierai d'obtenir de plus amples renseignements pour mon collègue.
Le sénateur Phillips: Honorables sénateurs, le protocole d'entente précise une date pour la création de la commission. Ma question avait trait au transfert des pouvoirs en matière de taxe provinciale. Je remarque que ma collègue ne répond pas à la question et j'en conclus que je connais déjà la réponse.
L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-La situation des employés contractuels au centre de Summerside-La position du gouvernement
L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, ma question suivante a trait à l'article 14, relatif aux ressources humaines. Les articles 14 et 15 stipulent que le gouvernement fédéral assumera la responsabilité de l'administration fiscale et que les employés provinciaux se verront offrir un emploi au gouvernement fédéral, dans la mesure du possible et en nombre correspondant à la charge administrative ainsi créée. Je trouve passablement étrange que nous prévoyions une pareille disposition alors que nous mettons à pied des milliers de fonctionnaires fédéraux.Toutefois, j'ai une question précise à poser sur le centre de la TPS de Summerside. Une partie importante des employés de ce centre sont des employés contractuels. Par exemple, ils peuvent travailler six mois et être mis à pied trois mois, quand la charge de travail diminue, puis être réembauchés pour six mois. Combien de ces employés contractuels seront remplacés par des employés des centres fiscaux provinciaux en application de cette offre d'embauche?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je ne peux pas répondre à la question du sénateur Phillips aujourd'hui. Je ne suis pas tout à fait sûre que je pourrai obtenir une réponse précise à cette question, mais j'essaierai.
L'harmonisation avec les taxes de vente provinciales-Les études sur les conséquences défavorables-Demande de réponse
L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, je me rends compte que le sénateur devra s'informer à ce sujet. Ce faisant, je me demande s'il lui serait possible de réitérer en même temps ma demande au sujet des études dont je réclame le dépôt. Je vois d'après l'expression de madame le leader du gouvernement qu'elle a complètement oublié cette demande. Je suis heureux de pouvoir lui rappeler qu'elle s'était engagée à déposer toute étude effectuée par le gouvernement fédéral et les provinces concernant l'harmonisation de la TPS.L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie le séanteur de me rafraîchir la mémoire. Je verrai à donner suite à cette demande antérieure de mon collègue.
Recensement Canada
Les travailleurs contractuels-Les critères de sélection-La position du gouvernement
L'honorable Gerald J. Comeau: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat et porte sur le recensement de 1996, qui a d'ailleurs lieu aujourd'hui.Auparavant, les Canadiens pouvaient déposer leur candidature au bureau du recensement pour se faire embaucher, sans égard à leur affiliation politique. Le gouvernement libéral a changé cette pratique, exigeant maintenant que seuls sont admissibles ceux dont le nom figure sur la liste établie par le ministre de l'Industrie, John Manley. Est-ce que madame le leader approuve la position du gouvernement qui est d'accorder ces 35 000 emplois à des gens pistonnés ou serait-elle en faveur du retour à l'ancienne méthode d'embauche?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je désapprouve totalement les commentaires de mon honorable collègue sur la nature de ces postes. Je pense que les recenseurs ont été choisis selon leurs mérites et leurs qualités. Je n'ai absolument aucun doute qu'ils feront un travail de première classe pour les Canadiens et qu'ils s'acquitteront fort bien de cette tâche très importante.
(1450)
Le sénateur Comeau: Est-ce que la ministre nie spécifiquement l'existence de listes «A» et «B», la liste «A» ayant été présentée par des députés et la liste «B» regroupant les gens qui peuvent se porter candidats pour les postes qui restent? Nie-t-elle spécifiquement que ces listes existent?
Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, je me garderai bien de faire le moindre commentaire, n'étant pas au courant des listes dont parle le sénateur Comeau. Je ne confirme ni ne nie quoi que ce soit de ce genre.
Ce que je lui dis, c'est que les gens qui ont été choisis pour faire le recensement du Canada, l'ont été avec soin, en fonction de leur aptitude à s'acquitter de cette tâche. J'ai pleinement confiance qu'ils s'en acquittent fort bien, d'un bout à l'autre du pays, à l'intention des Canadiens.
Les travaux publics et les services gouvernementaux
Le projet d'éliminer les subventions fédérales tenant lieu de taxes municipales-La position du gouvernement
L'honorable J. Michael Forrestall: Je voulais demander à la ministre ce qu'elle pense de certains articles de presse que j'ai lus récemment, qui font état de l'intention du gouvernement de réduire considérablement les subventions qu'il verse en remplacement des taxes aux municipalités du Canada. Le gouvernement n'est pas tenu de payer ces taxes, mais nous savons tous qu'une entente est en vigueur depuis 1949 à cet égard et qu'elle a toujours été satisfaisante.Je citerai le cas de Halifax, puisque c'est celui qui m'intéresse, mais la situation est la même de St. John's à Vancouver. Dans le cas de la nouvelle municipalité de Halifax, je crois savoir que la réduction serait de l'ordre d'un million de dollars. L'élimination d'une somme aussi importante de son budget causerait de graves difficultés pour la toute nouvelle administration.
La ministre peut-elle nous indiquer si les articles de presse sont véridiques ou si ce ne sont que des spéculations?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je demanderais au sénateur Forrestal de bien vouloir me faire parvenir ces articles de presse afin que je puisse examiner la question pour lui.
Le sénateur Forrestall: Je les transmettrai au bureau du leader du gouvernement au Sénat incessamment. Entre-temps, pendant que la ministre s'informe à ce sujet, peut-elle nous dire si, à son avis, ces informations pourraient venir du Cabinet. Je ne lui demande pas de divulguer des secrets du Cabinet, mais simplement de nous dire si c'est une forme de réduction des coûts envisagée par le gouvernement. Je dis cela sachant très bien que la réponse à cette question, c'est que tout est envisageable. Certes, de telles compressions sans consultation préalable, sans échanges sérieux avec les provinces, auraient des conséquences fâcheuses. Est-ce que le gouvernement serait prêt à discuter de cette question? L'a-t-il fait?
Le sénateur Fairbairn: Honorables sénateurs, j'attends avec impatience les coupures de presse de mon collègue. Je demanderai alors l'avis de gens mieux informés que moi sur ce point fort important.
L'économie
Les déclarations du gouverneur de la Banque du Canada-La position du gouvernement
L'honorable Erminie J. Cohen: Honorables sénateurs, la semaine dernière le gouverneur de la Banque du Canada disait que la guerre contre l'inflation a eu tellement de succès qu'il y a maintenant un risque de déflation. Le gouverneur disait que ce serait dévastateur pour l'économie parce que, selon ses propres mots:Dans une situation de déflation, les gens ont fortement tendance à repousser leurs achats, car ils espèrent que le mois suivant ou le mois d'après, le prix sera inférieur.
Honorables sénateurs, en dépit de cette mise en garde et en dépit du rapport publié la semaine dernière par la Banque de Nouvelle-Écosse disant que le taux réel de chômage est plus près de 13 p.100 que du taux officiel de 9,4 p. 100, la Banque du Canada n'est toujours pas prête à baisser les taux d'intérêt.
J'adresse ma question au leader du gouvernement au Sénat. Est-ce que le gouvernement prend au sérieux l'avertissement du gouverneur qu'il y a un risque de déflation? Si oui, comment a-t-il l'intention de répondre à cette menace?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je me suis intéressée également aux déclarations du gouverneur. Il est certain que si une déflation se produisait dans ce pays, ce serait mauvais pour l'économie, mais nous n'aurons pas de déflation.
Ces derniers mois, le gouverneur de la Banque du Canada a remarqué que le taux d'inflation approchait du niveau inférieur de la plage cible qu'il s'est fixé et, par conséquent, la Banque du Canada a baissé les taux d'intérêt. Je pense que les indicateurs des dernières semaines montrent que l'économie s'accélère et que la croissance s'améliorera dans les mois à venir, ce qui placera le programme du gouvernement de création d'emplois - qui a été très favorable au cours des quatre derniers mois - sur une bonne trajectoire pour le reste de l'année.
Je ne voudrais pas prétendre connaître ce que le gouverneur de la Banque du Canada pourrait faire ou ne pas faire dans une situation donnée. Cependant, notre économie est forte et s'améliore, et les finances du pays sont également en bon état, comme le faisait remarquer le premier ministre, hier soir.
Le Sénat
Les réponses aux questions orales et écrites posées avant la prorogation-La position du leader du gouvernement
L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, voici une question à l'adresse du leader du gouvernement au Sénat. Elle a sa source dans la décision que Son Honneur le Président a rendue la semaine dernière concernant l'effet de la prorogation sur les réponses différées à des questions orales.Or, il y a cinq ans aujourd'hui, le 14 mai, l'honorable sénateur Bosa a posé une question semblable au leader du gouvernement de l'époque, le sénateur Lowell Murray.
La décision rendue la semaine dernière semble indiquer qu'en l'absence de toute règle en la matière il appartient au leader du gouvernement de déterminer la politique à suivre relativement à l'effet de la prorogation sur les réponses différées.
Il y a cinq ans jour pour jour, sur le même sujet, le sénateur Murray s'est exprimé en ces termes:
[...] j'ai décidé que les questions orales et, en fait, une question écrite en suspens devraient être répondues.
Et il ajouta:
En fait, le sénateur Doody a des réponses différées à donner aujourd'hui.
C'était à la suite de la prorogation de 1991.
Ma question à l'adresse du leader du gouvernement au Sénat est la suivante: quelle est la politique du leader en ce qui concerne les réponses aux questions inscrites au Feuilleton ou les promesses faites avant la prorogation?
L'honorable Joyce Fairbairn (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je n'ai pas devant moi le texte des propos du sénateur Murray. Je crois qu'il s'agissait alors d'un certain nombre de questions orales et, peut-être, d'une question écrite. En tout cas, pour ce qui concerne les questions orales, je suis tout à fait disposée à respecter le précédent créé par le sénateur Murray.
Dépôt des réponses à des questions au Feuilleton
Les anciens combattants-L'achat de véhicules-Demandes de renseignements
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 6 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.Le Conseil du Trésor-L'achat de véhicules-Demandes de renseignements
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 13 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.Le ministère de diversification de l'économie de l'Ouest-L'achat de véhicules-Demandes de renseignements
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement) dépose la réponse à la question no 25 inscrite au Feuilleton par le sénateur Kenny.(1500)
ORDRE DU JOUR
Projet de loi sur la Commission du droit du Canada
Troisième lecture
L'honorable Landon Pearson propose: Que le projet de loi C-9, Loi concernant la Commission du droit du Canada, soit lu pour la troisième fois.Son Honneur le Président: Vous plaît-il, honorables sénateurs, d'adopter la motion?
L'honorable William M. Kelly: Honorables sénateurs, permettez-moi de prendre quelques instants pour expliquer certaines observations que j'ai faites au Sénat le 23 avril touchant le projet de loi C-9. En particulier, je veux répondre à certaines questions que mon bon ami, le sénateur MacDonald, a soulevées. Il s'est moqué du fait que j'ai laissé entendre dans mes observations que le ministère de la Justice pouvait ou devait s'acquitter des fonctions qu'on entend confier à la Commission du droit du Canada. Je voudrais préciser plusieurs choses pour répondre à cela.
Premièrement, lorsqu'on a démantelé la première Commission de réforme du droit, on a confié les fonctions dont elle s'acquittait et qui vont maintenant revenir à la nouvelle Commission du droit du Canada à la Division de réforme du droit du ministère de la Justice. D'aucuns, notamment le vérificateur général du Canada, ont reproché à la Commission de réforme du droit initiale de ne pas bien s'acquitter de ses fonctions conformément à la loi qui la régissait, de ne pas rendre les comptes voulus au ministre, et de ne pas mener ses activités de façon économique, efficiente et efficace. Par contre, rien ne prouve que la Division de réforme du droit du ministère de la Justice ne s'acquitte pas bien de ces fonctions.
Deuxièmement, en lisant la description du gouvernement de la façon de fonctionner de la nouvelle commission, je me suis aperçu qu'elle va sous-traiter toutes ses activités de recherche à des universitaires et d'autres juristes et constitutionnalistes de l'extérieur. Je ne comprends pas pourquoi cela exige une certaine dépendance et pour quelles raisons on ne pourrait pas se charger du travail de façon plus efficiente au ministère au lieu d'en arriver à un dédoublement de l'administration au sein de la nouvelle commission.
Troisièmement, je crois que le projet de loi C-9 soulève une question fondamentale: ne pouvons-nous plus nous attendre à des conseils d'experts indépendants et objectifs en matière de politique de la part de notre fonction publique qui est à la fois neutre et non partisane? Devons-nous établir un nouvel organisme chaque fois que nous avons besoin de conseils indépendants en matière de politique? Dans l'affirmative, je crois alors que nous avons un grave problème auquel nous devons nous attaquer.
Je sais bien qu'une certaine indépendance s'impose dans un processus de révision du droit, ne serait-ce que pour des motifs de perception. Le modèle que j'avais en tête, qui a été appliqué avec succès ailleurs, comporte les éléments suivants: un comité consultatif formé de spécialistes de l'extérieur serait créé par le ministre en vertu du pouvoir légal dont il jouit déjà. Les membres toucheraient des indemnités journalières et leurs frais leur seront remboursés. Les fonctions de secrétaire seraient occupées par un fonctionnaire du ministère qui serait chargé d'assurer la coordination des activités du comité consultatif liées à la rédaction des rapports et à la sous-traitance. La sous-traitance, les demandes de propositions, les contrats, les paiements sur livraison relèveraient de la direction de l'administration du ministère de la Justice. Le comité consultatif s'occuperait de la direction des études. En outre, le comité consultatif serait chargé d'examiner les résultats des travaux.
Nous sommes tous d'avis que les gouvernements doivent faire preuve de plus de jugeote. L'objet premier de mes observations sur le projet de loi C-9 est de nous amener à nous demander si la voie qui nous est proposée, à savoir le quasi-retour à l'ancienne commission du droit du Canada, est ou bien un exemple de jugeote ou bien une mesure décidée à la hâte pour remplir une promesse du livre rouge.
Le sénateur Pearson: Honorables sénateurs, je déplore que le sénateur Kelly n'ait pu assister aux réunions du comité et soulever ces questions dans le cadre de notre discussion avec les représentants du ministère de la Justice. À la fin, tous ses collègues et les sénateurs de ce côté-ci ont été tout à fait persuadés que la restructuration proposée allait résoudre une bonne partie des problèmes qu'il vient de soulever.
Pour ma part, je suis sûre que la structure proposée dans ce projet de loi est préférable à celle qui existait au sein de la Commission de réforme du droit pour ce qui est de la capacité d'engager, de façon indépendante, des citoyens ordinaires de tout le pays, même si j'ignore si des gens versés dans le droit sont considérés comme tout à fait ordinaires. Après avoir écouté les témoignages, je suis persuadée que ce nouvel organisme répondra beaucoup mieux aux besoins de la société canadienne dans son ensemble.
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu une troisième fois, est adopté.)
Projet de loi sur certains accords concernant l'aéroport international Pearson
Deuxième lecture-Recours au Règlement-maintien de la Décision de la présidence-recours au rêglement additionnel
Permission ayant été accordée de passer à l'article 3 de l'ordre du jour:Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, au moment où l'on s'apprêtait à reprendre le débat en deuxième lecture du projet de loi C-28, le sénateur Kinsella s'y est opposé en invoquant le Règlement. Son objection se fonde sur deux arguments essentiels. Il soutient premièrement que le message reçu de la Chambre des communes est erroné. Deuxièmement, il estime que les délibérations sur le projet de loi à la Chambre des communes étaient contraires aux procédures parlementaires établies. Après sa déclaration, plusieurs autres sénateurs ont participé à la discussion sur le rappel au Règlement et je tiens à les en remercier.
J'ai compulsé les Débats du Sénat et consulté les ouvrages de procédure qui font autorité et suis prêt à rendre ma décision. Je répondrai aux questions soulevées par le sénateur Kinsella et par les autres sénateurs dans l'ordre qui convient.
Le premier point que j'aborderai concerne une observation faite par le sénateur MacEachen à propos du moment choisi pour invoquer le Règlement. Il a raison quand il affirme qu'une objection portant sur une entorse au Règlement doit être formulée au moment où l'irrégularité est constatée et avant qu'il ne soit plus pertinent de le souligner. L'ouvrage Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, 6e édition, pose ce qui suit au commentaire 319, à la page 99:
Tout député a le droit, le devoir même, de signaler au président un manquement au Règlement. Il lui est permis d'interrompre le débat et d'exposer brièvement le problème au président. Il se doit de le faire dès qu'il constate quelque irrégularité dans les délibérations en cours. Il importe d'attirer l'attention du président sur le manquement au moment opportun, soit lorsqu'il se produit.
Puis, au commentaire 321:
Tout rappel au Règlement portant sur la procédure doit être soulevé promptement et avant que les délibérations n'aient atteint un point où l'objection ne serait plus pertinente.
Bien que le sénateur Kinsella ait lié son rappel au Règlement au message qui a été reçu il y a quelques jours, l'objection met en cause plus que le message. En outre, le sénateur Lynch-Staunton a fait remarquer à juste titre que le Règlement du Sénat restreint la possibilité de soulever une objection de procédure quand un projet de loi est présenté et lu pour la première fois. Le sénateur Phillips a aussi fait valoir cet argument. Conséquemment, je suis d'avis que le sénateur Kinsella a invoqué le Règlement dans un délai convenable.
[Français]
Citant Erskine May Parliamentary Practice, 21e édition, page 510, le sénateur Kinsella a déclaré et je cite:
[...] si un projet de loi est renvoyé à l'autre Chambre par erreur, ou si un autre type d'erreur est découvert dans la procédure, un message est envoyé pour que le projet de loi puisse être retourné ou que l'erreur soit corrigée d'une manière ou d'une autre.
Au-delà du message, l'erreur qui constitue le pivot de son argument est le traitement qui a été fait du projet de loi à la Chambre des communes. Bien que le message qui nous a été envoyé indique que le projet de loi C-28 a été adopté par la Chambre, le sénateur Kinsella affirme que la Chambre n'a pas respecté les règles et qu'elle a envoyé au Sénat un projet de loi imparfait. D'après le sénateur, le projet de loi C-28 n'a pas la même forme que celle qu'avait le projet de loi C-22 au moment de la prorogation, ce qui, soutient-il, est contraire à l'ordre adopté par la Chambre des communes elle-même le 4 mars 1996. Le sénateur Lynch-Staunton a alors réitéré et résumé la position du sénateur Kinsella lorsqu'il a demandé si le projet de loi a été retourné au Sénat dans la même forme qu'il était au moment de la prorogation de la dernière session. Pour lui, il est clair que la réponse à cette question est non.
[Traduction]
En réponse à cet argument, le sénateur Stanbury a soutenu que le Sénat n'avait pas le droit ou le pouvoir d'examiner les délibérations de la Chambre des communes. Citant le commentaire 4 de la sixième édition du Beauchesne, le sénateur a noté un privilège important de toutes les assemblées législatives, le droit de régir leur procédure interne. Pourtant, selon le sénateur Stanbury, le rappel au Règlement poursuit précisément l'objectif suivant:
on invite [...] le Président à détruire une tradition parlementaire et des conventions constitutionnelles [...] .
(1510)
En plus de présenter une objection concernant le moment choisi pour effectuer ce rappel au Règlement, le sénateur MacEachen a soutenu que toute comparaison entre le projet de loi C-22 de la dernière session et le projet de loi C-28 actuellement au Sénat était non pertinente. La prorogation a, comme il l'a déclaré, tout effacé et «il importe peu que le projet de loi C-22 ait été présenté lors de la dernière session». Il a ensuite ajouté:
La Chambre des communes a le droit de nous transmettre un projet de loi dans quelque état que ce soit, et nous avons le droit de l'étudier comme nous l'entendons.
C'est donc là le coeur de l'argumentation présentée concernant ce rappel au Règlement: d'un côté, on soutient que ce projet de loi ne peut être accepté par le Sénat dans sa forme actuelle parce qu'il n'est pas identique au projet de loi C-22 étudié par le Parlement au moment de la prorogation, et de l'autre, on avance que toute comparaison entre les deux projets de loi est non pertinente et qu'examiner cette question équivaut à s'ingérer dans la procédure interne de l'autre endroit. Il m'incombe, à titre de Président, de déterminer si ce rappel au Règlement est fondé.
[Français]
Or, je juge que les pouvoirs de la Présidence se limitent et doivent se limiter au mandat qui lui est donné en vertu de la tradition et du Règlement du Sénat. L'article 18 du Règlement prévoit ainsi que le Président maintient l'ordre et le décorum. Le Règlement explique également mon rôle en ce qui touche l'étude des motions et l'appel aux votes. Les responsabilités du Président se limitent de plus à la procédure suivie au Sénat. Ma compétence ne s'étend pas au-delà des quatre murs de cette salle. C'est en tenant compte de ces restrictions que je dois examiner la teneur de l'objection soulevée par le sénateur Kinsella.
On a allégué que le message était erroné, mais je ne vois pas clairement en quoi. Bien que j'estime que le Sénat aurait le droit de saisir l'autre endroit d'un problème comme celui-là, on peut supposer qu'il le ferait seulement s'il avait des preuves incontestables en main. Si le message concernait un projet de loi prévoyant des dispositions financières qui ne serait pas accompagné de la recommandation royale prescrite, le Sénat aurait le droit de le renvoyer aux Communes car, aux termes de l'article 81 du Règlement, le Sénat ne doit pas procéder à l'étude de projets de loi de cette nature sans la recommandation du représentant de la Reine.
[Traduction]
Par ailleurs, si le message portait atteinte aux privilèges du Sénat ou empiétait sur la capacité du Sénat de mener ses affaires comme il lui semble, le Sénat pourrait envisager de prendre les mesures appropriées. Dans le cas présent, cependant, je ne trouve rien qui justifie l'allégation selon laquelle le message ou le projet de loi contient une erreur ou une imperfection quelconque.
Le Sénat a reçu le projet de loi C-28 de l'autre endroit tel qu'il a été adopté le 19 avril 1996. La note sur la page titre indique que ce projet de loi est «dans le même état où était le projet de loi C-22 de la première session de la trente-cinquième législature, tel qu'adopté par la Chambre des communes au cours de cette session». Le message accompagnant le projet de loi et signé par le greffier de la Chambre des communes déclare que la Chambre ordonne «que le greffier: porte ce projet de loi au Sénat et demande son adhésion». Rien dans le message ou le projet de loi ne justifie quelque ingérence que ce soit de ma part en tant que Président du Sénat.
Pour ce qui est des délibérations de la Chambre des communes, comme je l'ai dit auparavant, je ne suis aucunement habilité à examiner pareille question dans le cadre d'un rappel au Règlement. Je n'ai pas le droit de me pencher sur les délibérations de l'autre endroit afin de déterminer s'il a respecté la procédure parlementaire. Le privilège de cette Chambre, comme celui de la nôtre, de régir sa procédure interne est incontestable et ne peut être remis en question. Cependant, si la Chambre des communes elle-même détermine qu'une erreur a été faite dans la transmission au Sénat du projet de loi C-28, elle peut en aviser le Sénat en conséquence en lui adressant un autre message, ce qui serait conforme à la règle citée par le sénateur Kinsella dans Erskine May à la page 510. Jusqu'à maintenant, nous n'avons reçu aucun avis de la Chambre des communes. On me demande plutôt de me prononcer sur une objection soulevée ici, mais, comme j'ai tenté de l'expliquer, ce n'est pas de mon ressort. Je ne peux accepter une objection fondée sur la prémisse voulant que l'autre endroit ne s'est pas conformé à la procédure parlementaire. Il appartient au Sénat seul de déterminer la manière dont il étudiera ce projet de loi. Je dois statuer que le Sénat peut procéder à l'étude du projet de loi.
Et deux honorables sénateurs s'étant levés.
Son Honneur le Président: Les honorables sénateurs interjettent-ils appel de la décision de la présidence?
L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Oui, Votre Honneur.
Son Honneur le Président: La question sur laquelle le Sénat doit se prononcer est donc la suivante: la décision du Président est-elle maintenue? Que les sénateurs qui sont en faveur veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Son Honneur le Président: Que les sénateurs qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Son Honneur le Président: À mon avis, les oui l'emportent.
Et deux honorables sénateurs s'étant levés.
Son Honneur le Président: Sur quoi les whips se sont-ils entendus?
Le sénateur Berntson: Il est convenu que le timbre sonnera pendant 30 minutes.
Son Honneur le Président: Nous voterons donc à 15 h 45.
Convoquez les sénateurs.
(1550)
(La décision du Président, mise aux voix, est maintenue.)
POUR
LES HONORABLES SÉNATEURS
Adams, Anderson, Austin, Bacon, Bonnell, Bosa, Bryden, Carstairs, Cools, Corbin, Davey, De Bané, Fairbairn, Gauthier, Gigantès, Graham, Haidasz, Hays, Hébert, Hervieux-Payette, Kenny, Kirby, Landry, Lawson, Losier-Cool, MacEachen, Maheu, Marchand, Milne, Pearson, Petten, Pitfield, Poulin, Riel, Rizzuto, Robichaud, Rompkey, Roux, Sparrow, Stewart, Taylor, Watt, Wood-43 |
CONTRE
LES HONORABLES SÉNATEURS
Andreychuk, Atkins, Balfour, Beaudoin, Berntson, Cogger, Cohen, Comeau, DeWare, Di Nino, Doyle, Forrestall, Kelleher, Kelly, Keon, Kinsella, Lavoie-Roux, LeBreton, Lynch-Staunton, Murray, Phillips, Rivest, Rossiter, Simard, Spivak, Stratton-26 |
ABSTENTIONS
LES HONORABLES SÉNATEURS
Aucune |
Vous plaît-il d'adopter la motion?
Recours au Règlement
L'honorable Orville H. Phillips: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement.
Le projet de loi C-28 est un projet de loi punitif. Essentiellement, ce genre de mesure vise un cas, des circonstances ou un groupe particuliers et doit s'appliquer de façon rétroactive. Dans ce cas-ci, ce projet de loi punitif vise un groupe restreint de personnes, à savoir celles qui ont négocié un contrat concernant l'aéroport Pearson. Il ne vise pas la population en général. Il est donc limité à un cas précis et à un groupe de personnes précis.
Ce genre de projet de loi soustrait l'affaire à la compétence des tribunaux. Il suspend les droits normalement accordés aux citoyens en vertu de la common law.
J'attire l'attention des honorables sénateurs sur les articles suivants du projet de loi C-28. L'article 3, qui stipule que les accords ne sont pas entrés en vigueur et n'ont aucun effet juridique, annule ces accords. L'article 4 annule tous les engagements, droits et intérêts prévus par les accords. L'article 7 supprime le droit de poursuites en vertu de la common law. L'article 8 supplante les tribuanux et annule les actions ou autres procédures intentées avant l'entrée en vigueur de la Loi. L'article 9 dispose que nul ne peut obtenir d'indemnité. Tous les droits ordinaires ont donc été annulés.
Honorables sénateurs, le dépôt de ce projet de loi suggère qu'il y a eu méfait. La question n'est pas de savoir si ce méfait est réel ou imaginaire. Le gouvernement impose un projet de loi pourvoyant à un châtiment sans procès sans même nous dire quelle infraction a été commise.
J'attire l'attention des honorables sénateurs sur un discours prononcé par l'honorable sénateur Pitfield, le 7 juillet 1994. Je ne vais pas entrer dans les détails du discours. Je suis sûr que les honorables sénateurs se le rappellent aussi bien que moi. Le sénateur Pitfield disait qu'à son avis ce n'était pas la bonne façon de procéder. Je suis sûr que tous les honorables sénateurs se sentent mal à l'aise face à ce procédé.
Honorables sénateurs, la question est la suivante: Le gouvernement a-t-il le droit de déposer un projet de loi punitif? J'en doute fort. Rappelons-nous une décision rendue récemment au Sénat par Son Honneur le Président, le 28 novembre 1995, au sujet du projet de loi S-11.
Cette décision dit qu'en 1984, le Président de l'autre endroit avait jugé une mesure irrecevable. Dans sa décision, le Président du Sénat disait ce qui suit:
Comme le sénateur Kinsella l'a fait remarquer, le Président de la Chambre des communes a statué en 1984 que le projet de loi était irrecevable. Dans sa décision, le Président a fait remarquer que la procédure relativement aux projets de loi portant confiscation et mort civile ou aux projets de loi punitifs était tombée en désuétude en Grande-Bretagne depuis des années et qu'elle «n'a jamais existé au Canada».
Honorables sénateurs, je n'ai connaissance d'aucune décision depuis le 28 novembre dernier qui ait pour effet de modifier cette décision de Son Honneur le Président.
La question est la suivante: Le gouvernement a-t-il un droit dans cette Chambre qu'un sénateur n'a pas? Si un sénateur ne peut pas présenter de projet de loi portant confiscation et mort civile ou un projet de loi punitif, le gouvernement ne le peut pas davantage.
Je crois que la présidence n'a d'autre choix que de reconnaître la décision rendue en novembre 1995. Aussi, je demande à la présidence de revenir sur sa décision et de rendre la même décision que celle qu'elle a rendue précédemment au sujet des projets de loi portant confiscation et mort civile et des projets de loi punitifs.
(1600)
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, le mardi 23 avril, nous prévoyions commencer le débat de deuxième lecture du projet de loi C-28. Le sénateur Kirby allait proposer que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois lorsque le sénateur Lynch-Staunton invoqua le Règlement, soutenant que le Parlement ne pouvait pas être saisi de ce projet de loi qui nous venait de la Chambre des communes à cause d'événements qui se déroulaient alors dans un tribunal de Toronto. Mercredi dernier, la présidence a rendu sa décision. Encore une fois, le sénateur a voulu proposer que le projet de loi soit lu pour la deuxième fois et, encore une fois, il en a été empêché par un rappel au Règlement, soulevé cette fois-ci par le sénateur Kinsella.
Le sénateur Berntson: Encore une fois à très juste titre.
Le sénateur Graham: Encore une fois, aucun précédent n'a été cité à l'appui du rappel au Règlement. La présidence a pris la question en délibéré et, encore une fois, le sénateur Kirby n'a pas pu parler.
Aujourd'hui, la présidence a rendu sa décision sur le recours au Règlement du sénateur Kinsella. Encore une fois, le sénateur Kirby a voulu prendre la parole et, encore une fois, l'histoire s'est répétée et on a invoqué le Règlement. Par conséquent, le sénateur Kirby n'a toujours pas pu prendre la parole.
Le sénateur Berntson: À juste titre.
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, deux conclusions sont à tirer de ce qui s'est passé ces deux dernières semaines. D'abord, il est clair que, pour une raison ou pour une autre, l'opposition ne veut pas laisser parler le sénateur Kirby.
Le sénateur Lynch-Staunton: À ce moment-ci.
Le sénateur Graham: Au lieu de se montrer intéressés ou curieux de ce que le sénateur Kirby a à dire au sujet de ce projet de loi prétendument haineux et de la façon dont il entend le défendre et le faire avancer, l'opposition veut museler le sénateur.
Des voix: Non!
Le sénateur Graham: L'opposition veut nous empêcher de débattre ce projet de loi d'après sa valeur. Je crois qu'elle craint le débat ouvert. L'opposition ne veut pas débattre ce projet de loi; elle veut tuer cette mesure législative avant même qu'elle ait été débattue.
Le sénateur Lynch-Staunton: Nous aurions pu faire cela il y a deux ans.
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, le deuxième point que je veux soulever, c'est que nous sommes témoins d'une série de rappels au Règlement successifs...
Le sénateur Berntson: On ne peut en soulever qu'un à la fois.
Le sénateur Graham: ...visant à retarder les travaux du Sénat. Le mardi 23 avril, le sénateur Lynch-Staunton et le sénateur Berntson ont fait allusion au rappel au Règlement qui a été soulevé mercredi dernier. Toutefois, ils ne l'ont pas soulevé à ce moment-là; ils ont plutôt choisi de le garder en réserve. Nous devons nous demander pourquoi.
Honorables sénateurs, la réponse est évidente. L'opposition avait besoin d'un autre moyen d'empêcher le sénateur Kirby de parler au cas où la décision du Président ne lui serait pas favorable. C'est exactement ce qui s'est passé la semaine dernière, et c'est exactement ce qui s'est passé encore une fois aujourd'hui. Cela pourrait durer indéfiniment - chaque jour, un nouveau rappel au Règlement spécieux pourrait être soulevé. Que le rappel au Règlement soit fondé ou non n'a aucune importance, car l'objectif visé est d'empêcher à tout prix le sénateur Kirby de parler.
Le sénateur Lynch-Staunton: De parler maintenant.
Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, les rappels au Règlement, doivent être soulevés à la première occasion parce que, s'il y a infraction au Règlement, la situation doit être corrigée le plus rapidement possible.
En effet, dans la décision qu'il a rendue aujourd'hui, le Président a dit ceci:
Le premier point que j'aborderai concerne une observation faite par le sénateur MacEachen à propos du moment choisi pour invoquer le Règlement. Il a raison quand il affirme qu'une objection portant sur une entorse au Règlement doit être formulée au moment où l'irrégularité est constatée et avant qu'il ne soit plus pertinent de le souligner. L'ouvrage Jurisprudence parlementaire de Beauchesne, 6e édition, pose ce qui suit au commentaire 319, à la page 99:
Tout député a le droit, le devoir même, de signaler au président un manquement au Règlement. Il lui est permis d'interrompre le débat et d'exposer brièvement le problème au président. Il se doit de le faire dès qu'il constate quelque irrégularité dans les délibérations en cours. Il importe d'attirer l'attention du président sur le manquement au moment opportun, soit lorsqu'il se produit.
Puis, au commentaire 321:
Tout rappel au Règlement portant sur la procédure doit être soulevé promptement et avant que les délibérations n'aient atteint un point où l'objection ne serait plus pertinente.
C'est ce que le Président a dit aujourd'hui dans sa décision.
Le rappel au Règlement du sénateur Phillips ne répond pas aux critères. Le fait de garder des rappels au Règlement en réserve et de les soulever à un moment précis pour des raisons tactiques est, à mon avis, une marque de mépris à l'endroit de tous les sénateurs.
Honorables sénateurs, s'il y a des rappels au Règlement...
Le sénateur Berntson: Puis-je emprunter votre mirliton?
Le sénateur Graham: ...qui, par définition, concernent le bon déroulement des travaux de cette Chambre, ils devraient être soulevés immédiatement. Nous accordons une grande priorité aux rappels au Règlement parce qu'ils portent justement sur notre façon de procéder en tant qu'assemblée. Toutefois, lorsqu'on se sert de cette priorité à d'autres fins, à mon avis, cela dégrade non seulement le processus, mais aussi, honorables sénateurs, le Sénat lui-même.
L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, il est toujours agréable d'écouter notre ami l'érudit sénateur Graham, qui a certainement appris au cours de sa carrière que, lorsque vous ne pouvez pas négocier sur le fond, vous négocier sur les détails historiques. Nous avons reçu une leçon de révisionnisme d'une histoire qui n'est pas très éloignée de nous.
Dans le texte du sénateur Graham, j'ai relevé avec intérêt qu'il citait la décision du Président. J'ai été intrigué qu'il ne nous cite pas le dernier paragraphe de la page trois de cette décision qui dit:
[...] le sénateur MacEachen a soutenu que toute comparaison entre le projet de loi C-22 de la dernière session et le projet de loi C-28 actuellement au Sénat était non pertinente. La prorogation a, comme il l'a déclaré, tout effacé...
Le sénateur Graham n'a pas non plus précisé que le Président déclare ceci au troisième paragraphe de la page 5 de sa décision:
Le Sénat a reçu le projet de loi C-28 de l'autre endroit tel qu'il a été adopté le 19 avril 1996. La note sur la page titre indique que ce projet de loi est «dans le même état où était le projet de loi C-22 de la première session...
Honorables sénateurs, dans le rappel au Règlement du sénateur Phillips, nous ne discutons pas de l'historique du projet de loi, mais bien de la question de savoir si le projet de loi C-28 est un projet de loi punitif.
Comme le sénateur Phillips l'a fait remarquer, le Président a rendu une décision le jour de mon anniversaire, le 28 novembre, soit il y a cinq mois et demi, sur un rappel au Règlement venant de moi et concernant un projet de loi, le projet de loi S-11, que notre collègue, le sénateur Cools, voulait présenter. Le Président a déclaré que ce projet de loi était un projet de loi punitif, ce qui ne correspond ni à notre tradition ni à notre pratique, et que, par conséquent, il devait être rayé du Feuilleton. C'est ce qui a été fait après la décision du Président.
(1610)
Fondamentalement, mon collègue le sénateur Phillips invoque le Règlement parce que, sauf erreur, il considère le projet de loi C-28 comme une mesure prévoyant un châtiment sans procès. Nous devons nous livrer non pas à une discussion politique ni à une leçon d'histoire révisionniste, mais à une sérieuse réflexion, car ce qui est bien dans ce qu'a dit le sénateur Graham - comme saint Augustin, nous trouvons quelque chose de bon dans tout - c'est que le projet de loi C-28 dont nous sommes saisis pose de graves difficultés au Sénat parce qu'il est sans précédent. C'est ce que le sénateur Graham a fait valoir, et je suis d'accord avec lui. En d'autres termes, nous n'avons pas un ensemble de précédents simples sur lesquels nous fonder. D'une certaine manière, nous naviguons en eaux inconnues. Cependant, le mieux que nous puissions faire, comme le sénateur Phillips l'a fait pour nous, c'est d'examiner les usages et les décisions du Sénat, dont celle du 28 novembre 1995.
Qu'est-ce qui, dans le projet de loi C-28, nous permettrait de nous livrer à une réflexion et de discuter afin d'essayer de déterminer si cette mesure prévoit un châtiment sans procès? Le sénateur Phillips nous a expliqué certains critères à appliquer pour tenter de déterminer cela. L'un de ces critères consiste à déterminer si la mesure s'applique à une personne ou à un groupe identifiable de personnes. Autrement dit, l'exercice du pouvoir de l'État ou du Parlement a-t-il pour effet de traiter différemment une personne ou un groupe de personnes et de lui faire subir des conséquences auxquelles ne serait pas exposée la collectivité? À mon avis, c'est ce que fait le projet de loi C-28, car il imposera un châtiment à un groupe de personnes et il les privera d'une indemnité que deux jugements des tribunaux leur avait reconnue.
Le deuxième critère que le sénateur Phillips porte à notre attention et en fonction duquel nous devons évaluer le projet de loi C-28, c'est la question de savoir si le Parlement imposera un châtiment sans procès à un groupe de personnes ou s'il les lésera d'une manière rétroactive. C'est exactement ce que fera le projet de loi C-28 si jamais il a force de loi.
Il y a un troisième critère qui consiste à déterminer si le pouvoir du Parlement, exercé envers un groupe de personnes et non pas envers la collectivité en général, d'une manière universelle, a des incidences négatives sur une indemnité ou un droit que ces personnes ont fait confirmer par les tribunaux. Évidemment, c'est exactement ce qui se produit en l'occurrence.
Un quatrième critère concerne les répercussions de pareille mesure par rapport au principe de la common law voulant que les groupes de personnes aient tous les droits sauf ceux qui leur sont retirés, comme c'est le cas en l'occurrence, par le Parlement. Encore une fois, c'est ce que fait le projet de loi C-28, le caractère rétroactif de cette mesure étant évident.
Ce ne sont là que quelques-uns des points à propos desquels nous avons de graves réserves, de nouvelles réserves autres que celles que nous avons déjà mentionnées et au sujet desquelles une décision a été rendue le 28 novembre. Je pense que le rappel au Règlement du sénateur Phillips est très important et que le Président devrait rendre une décision reconnaissant sa légitimité.
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs, je voudrais parler de ce rappel au Règlement. Je vais essayer de faire de mon mieux sur cette question difficile. Toute cette situation, aujourd'hui, démontre que, en tant que parlementaires, nous devrions accorder beaucoup plus d'attention à cette question des pouvoirs du Sénat.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-28 est recevable, même si la décision du 28 novembre 1995 du sénateur Molgat, au sujet du projet de loi S-11, pourrait sembler prouver le contraire et donc empêcher son étude dans cette Chambre. Le sénateur Phillips et le sénateur Kinsella ont prétendu que c'était un projet de loi punitif et, en apparence, le projet de loi C-28 est effectivement un projet de loi punitif. Selon la décision du 28 novembre du sénateur Molgat, il ne devrait pas être étudié dans cette Chambre. Ayant appuyé le projet de loi C-28, je demande au sénateur Molgat de revoir et d'annuler sa décision du 28 novembre 1995, de façon à ne pas mettre en péril le projet de loi C-28.
Le sénateur Molgat, dans sa décision concernant le projet de loi S-11, un autre projet de loi punitif, disait au sujet de son admissibilité au Sénat:
[...] Le projet de loi S-11 est irrecevable. L'ordre de deuxième lecture de ce projet de loi doit être annulé et le projet de loi rayé du Feuilleton.
Cette décision faisait suite à un rappel au Règlement soulevé par le sénateur Kinsella le 19 octobre 1995, au sujet du projet de loi S-11. Ce rappel au Règlement avait été soulevé par le sénateur Kinsella avant même la proposition de la deuxième lecture; c'est la même chose qui se passe cette fois-ci, au sujet du projet de loi C-28.
Le sénateur Molgat disait dans sa décision:
Lorsque, le jeudi 19 octobre, l'ordre du jour a appelé la deuxième lecture du projet de loi S-11, [...] le sénateur Kinsella a invoqué le Règlement pour s'opposer à l'étude du projet de loi parce que celui-ci ne cadre pas avec les traditions, les usages et les règles de cette Chambre.
Le sénateur Molgat continue:
Dans son analyse de la nature et de la portée du S-11, le sénateur Kinsella conclut que le projet de loi est assimilable à un projet de loi portant confiscation de biens et mort civile, c'est-à-dire un projet de loi d'intérêt public d'une catégorie étrangère à nos usages.
La véritable question était l'objection du sénateur Kinsella au projet de loi S-11, une espèce de projet de loi d'intérêt public étranger à nos usages. Je ne connais pas d'exemple d'autres projets de loi punitifs de cette nature.
Ce jour-là, le sénateur Molgat notait ma position disant:
Le sénateur Cools soutient qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi portant confiscation de biens et mort civile, mais d'un projet de loi punitif, et que notre Parlement a le pouvoir d'adopter un projet de loi de ce genre.
Honorables sénateurs, le sénateur Kinsella, appuyé par le Président pro tempore, le sénateur Ottenheimer, et le leader de l'opposition, le sénateur Lynch-Staunton, voyaient loin et étaient très novateurs. Ils ont utilisé un rappel au Règlement pour empêcher que l'on propose une question avant même qu'elle ne soit proposée, autrement dit pour prévenir le débat. La question n'ayant pas été posée, le sénateur Kinsella a alors demandé au Président de juger sur le fond, l'admissibilité et l'à-propos de procéder à l'étude du projet de loi S-11 au Sénat.
(1620)
Le sénateur Kinsella a réussi dans les deux initiatives. Il a obtenu une décision de la présidence, un cas de jurisprudence parlementaire, un précédent dans lequel le Président a d'abord confirmé le stratagème. Le Président a dit en gros que l'on pouvait invoquer le Règlement avant que la question soit posée, et ce, en dépit de toutes les citations tirées de Beauchesne, puis il a souscrit à l'argument que le sénateur Kinsella a avancé, à savoir le rejet d'un projet de loi parce qu'il s'agissait d'un projet de loi pourvoyant à un châtiment sans procès.
Honorables sénateurs, le rejet d'un projet de loi par le Président est un fait sans précédent parce que la pratique parlementaire veut que les présidents ne sauraient rejeter des projets de loi, attendu que si un président peut rejeter un projet de loi, il peut les rejeter tous.
Honorables sénateurs, j'ai demandé à Son Honneur le Président d'annuler la décision qu'il a rendue le 28 novembre 1995.
Le 6 novembre 1995, quelques jours après que le recours au Règlement du sénateur Kinsella et avant la décision de Son Honneur le Président, j'ai soulevé une question de privilège à propos des mêmes affaires pour contester la validité de l'initiative du sénateur Kinsella visant à demander une décision de la présidence. Afin de faire valoir mon point de vue, j'ai cité les commentaires 296 et 240 de la cinquième édition de Beauchesne. Le commentaire 296, qui traite du cas où l'on invoque le Règlement avant qu'une question ne soit posée, dit ceci:
Un principe capital veut que nul député ne prenne la parole excepté sur une question dont la Chambre est saisie.
C'est précisément la situation dans laquelle le sénateur Kirby se trouve actuellement.
Le commentaire 240, qui traite des pouvoirs qu'a le Président de se prononcer sur le fond et la forme des projets de loi, dit ceci:
Le Président ne statuera pas en matière constitutionnelle ni sur des points de droit, même si elles se posent au titre d'un recours au Règlement ou d'une question de privilège.
À l'époque, j'ai soutenu que le Président n'avait aucun rôle à jouer dans cette affaire et que c'était au Sénat dans son ensemble à prendre la décision. Le 23 novembre 1995, Son Honneur a rendu une décision sur la question de privilège et a déclaré qu'il ne voyait rien de répréhensible dans les actions des sénateurs Kinsella, Ottenheimer et Lynch-Staunton. Quelques jours plus tard, le 28 novembre 1995, il a rendu une décision sur le rappel au Règlement en faveur du sénateur Kinsella, en jugeant qu'un projet de loi punitif, le projet de loi S-11, était irrecevable au Sénat.
Honorables sénateurs, j'estime que le projet de loi C-28 concernant l'aéroport Pearson est un projet de loi punitif. Un projet de loi punitif éteint les droits en common law et en equity, empêche les procédures ordinaires, remplace et supplante les tribunaux et corrige un problème en particulier en légiférant dans un cas particulier, en imposant la décision du Parlement à n'importe quelle faute. Naturellement, c'est le Parlement qui définit ce qu'on entend par une faute.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-28 est une mesure extraordinaire qui invoque les pouvoirs judiciaires du Parlement sous une forme législative. L'article 3 du projet de loi C-28 annule les accords en déclarant qu'ils n'ont aucun effet juridique; l'article 4 déclare inexistants les engagements, droits, titres, intérêts, domaines et obligations prévus par les accords; l'article 7 annule tout droit en common law de poursuivre sur la responsabilité contractuelle ou délictuelle; et l'article 8 rejette toute action ou autre procédure actuellement devant les tribunaux. Enfin, l'article 9 nie tout droit à une indemnité de Sa Majesté. Le projet de loi C-28 reflète l'expression de Blackstone selon laquelle le Parlement peut bien remplacer les tribunaux, les procédures judiciaires, la common law et les procédures ordinaires et imposer sa loi à la place. Le Parlement peut exercer à loisir ce pouvoir extraordinaire.
Honorables sénateurs, le projet de loi C-28 est une bonne mesure législative qu'on devrait adopter. On a signé les accords sur l'aéroport Pearson dans les derniers jours du mandat du gouvernement de la première ministre Campbell, quelques jours avant les élections générales fédérales du 25 octobre 1993.
Le sénateur Berntson: Venez-en au fait.
Le sénateur Cools: Ces accords ont beaucoup attiré l'attention et ont fait l'objet de bien des promesses électorales. L'honorable Jean Chrétien, qui était alors chef de l'opposition et qui s'attendait à remporter les élections a averti précisément toutes les parties intéressées que le nouveau gouvernement n'honorerait pas les accords ou les contrats touchant l'aéroport Pearson conclus à la veille des élections. Le gouvernement sortant de Kim Campbell a signé ces contrats, défiant ainsi M. Chrétien et allant ainsi à l'encontre de la décision prévue de l'électorat.
Au cours du débat que le Sénat a tenu le 7 juillet 1994 sur le projet de loi C-22, prédécesseur du projet de loi C-28, le sénateur Pitfield a souligné l'état particulier du projet de loi C-22, disant que c'était:
[...] un projet de loi qui empêche de façon précise tout recours judiciaire.
Sur la question d'action fautive, il a dit:
[...] il me semble que l'odeur de scandale ou d'immoralité qui flotte autour du projet de loi C-22 [...]
À propos du recours au pouvoir judiciaire du Parlement, le sénateur Pitfield a ajouté:
[...] les tribunaux étaient parfois tout simplement exclus d'un domaine par le genre de justice rudimentaire que nous pouvons voir dans le cas du projet de loi C-22.
La justice rudimentaire à laquelle recourt le Parlement pour exclure toute autre autorité découle exceptionnellement d'un projet de loi punitif. Le projet de loi C-28 corrige un méfait, un délit du gouvernement précédent et de ses contractants. Il exclut les droits issus de la common law et les tribunaux et impose la volonté du Parlement.
Honorables sénateurs, l'exécution de ces contrats était un méfait, une inconduite, une action fautive. Il importe peu de savoir si ce méfait constitue une infraction au Code criminel ou un manquement à une convention politique. Il s'agissait d'une inconduite. Le projet de loi C-28 corrige cette inconduite et déclare que la conclusion de ces contrats par les parties en question était un méfait auquel le Parlement doit remédier.
Le 19 octobre, lorsque le sénateur Kinsella a fait un rappel au Règlement en insistant pour dire que le Parlement ne pouvait pas adopter le projet de loi S-11, j'ai soutenu énergiquement que le Parlement avait le pouvoir d'adopter des projets de loi punitifs et j'ai cité les sources autorisées. J'ai affirmé que, en tant que grand enquêteur du pays, le haut tribunal qu'est le Parlement est l'autorité suprême du Canada et dispose des moyens punitifs, inquisitoriaux et judiciaires nécessaires pour exercer sa fonction gouvernementale. Bien que ces pouvoirs et ces projets de loi soient rarement utilisés, et que certaines personnes ayant des intérêts contraires, comme les sénateurs de l'opposition, affirment que les pouvoirs du Parlement à l'égard de projets de loi punitifs sont dépassés, le Parlement conserve ces pouvoirs. J'ai cité la 21e édition du Treatise on the Law, Privileges, Proceedings and Usage of Parliament d'Erskine May, qui confirme ces pouvoirs et qui dit:
[...] ces pouvoirs n'ont jamais été officiellement abolis.
Une autorité en matière parlementaire, sir William R. Anson, dans son ouvrage intitulé The Law and Custom of the Constitution, Volume 1: Parliament, mentionne les pouvoirs du Parlement à l'égard des projets de loi punitifs, disant:
Je ne parle pas des lois, dont la forme est législative et la teneur judiciaire, des lois portant confiscation de biens et mort civile et des lois punitives. Une loi du Parlement, comme nous le savons, peut faire n'importe quoi.
Je le répète aux honorables sénateurs:
Une loi du Parlement, comme nous le savons, peut faire n'importe quoi. Elle peut créer une infraction qui n'était pas, lorsqu'elle a été commise, une infraction contre quelque loi que ce soit; elle peut imposer à celui qui commet l'infraction ainsi créée une peine qu'aucun tribunal ne pouvait infliger. La procédure est législative et la loi qui la prévoit ne diffère en rien des lois portant sur quelque autre question que ce soit d'importance publique.
L'autorité canadienne en matière parlementaire, Alpheus Todd, dans son ouvrage intitulé The Practice and Privileges of the Two Houses of Parliament, reconnaît que:
Au moyen d'une loi portant confiscation de biens et mort civile ou d'une loi punitive, n'importe qui peut être condamné pour trahison ou pour un crime, et une peine peut lui être infligée au-delà ou en contravention de ce que prévoient les lois existantes.
Mais quand on peut se pourvoir en invalidation, de telles lois doivent être envisagées jalousement, étant donné la dangereuse licence que les Chambres du Parlement se sont permise, compte tenu de la nature mixte et indéterminée de leurs capacités législatives et judiciaires quand elles sont unies, et du fait que ce sont des lois adoptées à posteriori, pour servir à des fins rétroactives.
Les lois punitives sont utilisées à des fins rétroactives et sont gardées jalousement. Les pouvoirs d'invalidation du Parlement, les lois portant confiscation de biens et mort civile et les lois punitives représentent les formes les plus élevées de la compétence judiciaire du Parlement. Ils expriment le jugement réuni de la Couronne, du Sénat et de la Chambre des communes.
Honorables sénateurs, le gouvernement avait le choix entre invalider la décision de l'ex-première ministre Kim Campbell et de son Cabinet et procéder au moyen d'une loi punitive. Pour des raisons parlementaires et politiques, le premier ministre Chrétien a opté en faveur d'une loi punitive. Le projet de loi C-28 a un caractère propre et chirurgical et entraîne moins d'accusations que l'invalidation de la décision de Mme Campbell et de son Cabinet.
Honorables sénateurs, l'article 18 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 est l'instrument statutaire qui a importé au Canada les coutumes, pratiques et usages de la loi du Parlement du Royaume-Uni. Le problème qui se pose à nous n'est pas de savoir si le Parlement a le droit d'adopter un projet de loi punitif. Le problème réside dans le jugement que Son Honneur a rendu le 28 novembre 1995, à savoir que le Parlement ne peut pas adopter un projet de loi punitif, et sa contradiction...
(1630)
Son Honneur le Président: Honorable sénateur Cools, je ne veux pas vous interrompre, mais je vous rappelle que les décisions de la présidence peuvent faire l'objet d'appels, mais pas d'un débat.
Le sénateur Cools: J'allais rendre hommage à Votre Honneur.
Je ne crois pas que Son Honneur voulait, par son jugement, faire entrave au projet de loi C-28 ou au Parlement, ni compromettre le projet de loi C-28. Dans sa décision du 8 mai 1996, en réponse au recours au règlement par lequel le sénateur Lynch-Staunton avait demandé l'arrêt de l'étude du projet de loi C-28, la présidence a confirmé les pouvoirs du Sénat.
Son Honneur le Président: Honorable sénateur Cools, je regrette de vous interrompre, mais je répète que les décisions de la présidence peuvent faire l'objet d'appels, mais pas d'un débat - pas parce qu'il s'agit de ma décision, mais parce c'est le Règlement du Sénat.
Le sénateur Cools: Je cite à nouveau le Beauchesne, qui prévoit ceci:
Le Président ne décide d'aucune question d'ordre constitutionnel ni juridique, bien qu'il soit permis de soulever une question de ce genre par rappel au Règlement ou question de privilège.
Je peux citer la décision que la présidence a rendue, le 8 mai 1996, lorsqu'elle a déclaré que les questions soulevées par le sénateur Lynch-Staunton et l'opposition étaient:
[...] des questions pouvant être examinées et débattues par l'ensemble des sénateurs. Ce ne sont pas des questions que je peux trancher en tant que Président de cette Chambre.
Le sénateur Kinsella en a appelé de cette décision, qui a finalement été adoptée par l'ensemble du Sénat. Deux positions contradictoires cohabitent désormais ici. L'une veut que le projet de loi C-28 soit antiréglementaire et l'autre, qu'il soit réglementaire. Ma position est très claire: le projet de loi C-28 est réglementaire.
La question qui se pose vraiment à nous est de savoir où finit le pouvoir de la présidence et où commencent les pouvoirs du Parlement canadien. Le Parlement canadien comprend Sa Majesté la reine, le Sénat et la Chambre des communes. Honorables sénateurs, l'étude des projets de loi et les pouvoirs du Parlement sont des questions qui relèvent vraiment des deux Chambres du Parlement. Je crois que la question de savoir si le Parlement a le droit d'adopter des projets de loi en général et des projets de loi punitifs en particulier relève de l'ensemble des sénateurs. On nous dit que les questions de cette nature ne doivent pas être soumises à la présidence.
C'est une question à débattre. Le fait est que l'opposition ne veut tout simplement pas que le projet de loi C-28 soit adopté, alors que nous voulons qu'il le soit. J'estime, honorables sénateurs, que nous devons résoudre le problème entre nous et ne pas y mêler la présidence.
L'honorable Allan J. MacEachen: Honorables sénateurs, je veux faire deux observations qui, je l'espère, faciliteront les travaux du Sénat en conformité de son Règlement.
Ma première observation concerne les arguments que le sénateur Phillips a fait valoir et la question de savoir si son rappel au Règlement est fondé à la lumière de ceux-ci.
Si j'ai bien compris le sénateur Phillips - et j'ai essayé de l'écouter au milieu de distractions considérables -, il a dénoncé le projet de loi et certains de ses articles. Est-ce exact?
Le sénateur Phillips: J'ai énuméré ceux qui, selon moi, prouvent qu'il s'agit d'une mesure prévoyant un châtiment sans procès. Je ne les ai cependant pas décrits gratuitement.
Le sénateur MacEachen: J'ai donc bien compris le sénateur lorsqu'il a dit qu'il trouvait certains articles du projet de loi répugnants. En réponse à cela, je tiens à signaler à l'honorable sénateur qu'il existe une solution pour les dispositions répugnantes, et qu'on peut se pencher sur celles-ci à une certaine étape de l'étude du projet de loi. Si celui-ci franchit l'étape de la deuxième lecture, il est alors renvoyé à un comité. Le comité est alors saisi de ces dispositions. Il est donc possible de les examiner et de régler le problème à cette étape.
Si le sénateur Phillips trouve que l'une des dispositions impose un châtiment sans procès, il peut alors proposer un amendement. Il dispose d'une solution. Si, effectivement, il trouve cela totalement répugnant, il peut s'y opposer. Cependant, à cette étape-ci, il est prématuré d'invoquer le Règlement à propos d'une question qui peut être réglée directement, à une étape ultérieure de l'étude du projet de loi. C'est pour cette raison qu'un des commentaires de Beauchesne traite de cette question.
Si l'on prend un commentaire isolément, on se demande parfois ce qu'il fait là. Si, toutefois, on regarde le Parlement dans son ensemble, on comprend mieux.
Au commentaire 322 de sa 6e édition, Beauchesne dit:
Lors de l'étude d'un projet de loi, on ne doit pas invoquer le Règlement sur des questions qui pourraient être réglées par un amendement.
Le sénateur Phillips a invoqué le Règlement pour une question qui pourrait être réglée par un amendement ou une discussion au comité. Par conséquent, si c'est un projet de loi prévoyant des peines et des pénalités, celles-ci doivent être énoncées dans des articles. Elles n'existent pas quelque part dans l'atmosphère; elles doivent être précisées concrètement dans le projet de loi. Le sénateur Phillips peut s'en donner à coeur joie au comité en proposant des amendements, en rejetant des articles et en supprimant les peines et les pénalités. Ses objections au projet de loi peuvent être soulevées au comité.
Son Honneur devrait tenir compte du commentaire, qui, je le répète, se lit comme suit:
322. Lors de l'étude d'un projet de loi, on ne doit pas invoquer le Règlement sur des questions qui pourraient être réglées par un amendement.
C'est assez clair. C'est ce que dit le Beauchesne, auquel Son Honneur a fait allusion avec profusion dans sa décision d'aujourd'hui. Cet ouvrage fait autorité, oui ou non? Doit-on en tenir compte ou non? Le Beauchesne nous dit que cette question doit être réglée en comité. Ce n'est pas un rappel au Règlement. Je suis d'accord là-dessus.
Je voudrais parler également du point d'ordre général soulevé par le sénateur Graham, à savoir, est-il légitime d'invoquer le Règlement aujourd'hui, la semaine prochaine ou la semaine suivante? Seulement trois semaines après que le projet de loi a été appelé, nous traitons de rappels au Règlement. Cela va totalement à l'encontre des commentaires que Son Honneur a cités aujourd'hui, comme, par exemple:
Tout député a le droit, le devoir même, de signaler au président un manquement au Règlement.
Ce projet de loi a été appelé le 23 avril. Nous sommes maintenant le 14 mai et il y a un rappel au Règlement. Où est le commentaire?
Le sénateur Kinsella: Où voulez-vous en venir?
Le sénateur MacEachen: Il y a un temps où il faut respecter les règles et les ouvrages faisant autorité, mais il y a un délai de prescription à respecter. En l'occurrence, il y a prescription depuis un certain temps déjà.
Le sénateur Lynch-Staunton: Où voyez-vous cela?
Le sénateur MacEachen: Dans les ouvrages. Tout rappel au Règlement portant sur la procédure doit être soulevé promptement, ce mot étant pris dans son acception la plus large. Cependant, réagir le 14 mai à quelque chose qui est survenu le 23 avril n'est pas agir «promptement», aux termes des ouvrages de référence.
(1640)
Votre Honneur, il doit y avoir prescription, sinon le Sénat tombe dans le ridicule. Si les membres de l'opposition ont d'autres rappels au Règlement à soulever, qu'ils le fassent tout de suite pour que nous n'ayons pas à revenir sur la question la semaine prochaine. Les rappels au Règlement doivent être soulevés promptement. Un sénateur a le devoir, voire l'obligation, de signaler au Président toute irrégularité dès qu'il la constate. Si nos vis-à-vis pensent à quelque chose maintenant, ils doivent le dire.
Je crois qu'il y a aujourd'hui prescription. Si nous voulons respecter le Règlement, il serait insensé de continuer comme nous sommes partis. Puisque le projet de loi a été présenté le 23 avril et que le Sénat en est encore saisi le 14 mai, il est raisonnable de dire à Votre Honneur et à tous les honorables sénateurs que tous les rappels au Règlement doivent être soulevés et étudiés maintenant. Sans cela, il ne sert à rien d'avoir des règles ou des procédures parlementaires ou de citer le Beauchesne. Si on n'entend pas respecter le Beauchesne, il ne nous sert à rien de l'avoir devant nous sur le bureau.
Je ne lancerais jamais notre livre vert comme une députée l'a fait pour un autre livre à la Chambre des communes, parce que je respecte l'interprétation que le Beauchesne donne des règles parlementaires. Beauchesne, appuyé par la décision qu'a rendue tout à l'heure le Président, nous dit que tout parlementaire a le droit, voire l'obligation, de porter immédiatement à l'attention du Président tout rappel au Règlement.
Le sénateur Berntson: Nous le ferons.
Le sénateur MacEachen: On aurait pu dire que c'était agir promptement le 23 avril, peut-être le 24, ou même le 25. Le 28 avril, c'était déjà pousser un peu loin. Cependant, il serait insensé de prétendre que le 14 mai, il n'est pas trop tard. Dire qu'il faut invoquer promptement le Règlement, pour ensuite laisser passer trois semaines, c'est aller à l'encontre non seulement de la lettre, mais aussi de l'esprit du Règlement.
Honorables sénateurs, je ne fais pas montre d'une rigueur excessive dans l'application du Règlement. Je dis simplement que trois semaines après la présentation du projet de loi, nous pouvons à juste titre demander, et le Président peut exiger, que tous les rappels au Règlement soient soulevés et débattus sur-le-champ. Si les honorables sénateurs d'en face ont d'autres rappels au Règlement, qu'ils les présentent. Nous en discuterons aujourd'hui. N'attendez pas l'ajournement pour demander à vos recherchistes d'aller fouiller dans les greniers pour étudier les ouvrages de référence afin de déterminer si d'autres rappels au Règlements peuvent être tirés de derrière les fagots et soulevés demain. Je pense que la plaisanterie a assez duré et je voudrais que le Président le confirme.
Des voix: Bravo!
L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Il est intéressant, honorables sénateurs, de constater que les seuls arguments présentés contre le rappel au Règlement du sénateur Phillips n'ont rien à voir avec le rappel au Règlement lui-même, mais sont plutôt des manifestations de frustration de la part des sénateurs qui ont le sentiment que nous retardons indûment la deuxième lecture d'un projet de loi auquel nous nous opposons manifestement. Permettez-moi de tirer les choses au clair quant à ce que nous essayons de faire.
Tout d'abord, nous n'essayons pas de priver le sénateur Kirby de son droit de parler de ce projet de loi. Nous voulons simplement lui faire comprendre, à lui et à ses collègues, ce qui se passera s'ils entreprennent la deuxième lecture, sans compter les répercussions que cela aura.
Le sénateur MacEachen dit que trois, quatre ou six semaines se sont écoulées et qu'il est temps de cesser ces absurdités. Cependant, le temps a peut-être passé, mais nous en sommes encore à la même étape que lorsque la deuxième lecture de ce projet de loi a été appelée. La procédure est la même, et elle est correcte. Ce que nous faisons est tout à fait correct du point de vue de la procédure. C'est peut-être ennuyeux et frustrant pour nos amis d'en face qui sont impatients d'entreprendre l'étude de ce projet de loi, mais c'est le genre de chose qu'ils doivent subir de temps à autre.
Puisque nous citons la décision du Président, citons-la en entier, particulièrement la partie qui traite du moment où un rappel au Règlement peut être soulevé. Le Président a également dit ceci:
Bien que le sénateur Kinsella ait lié son rappel au Règlement au message qui a été reçu il y a quelques jours, l'objection met en cause plus que le message. En outre, le sénateur Lynch-Staunton a fait remarquer à juste titre que le Règlement du Sénat restreint la possibilité de soulever une objection de procédure quand un projet de loi est présenté et lu pour la première fois.
C'est ce que le sénateur MacEachen nous avait demandé de faire. Lorsque nous avons soulevé les deux premiers rappels au Règlement, il a dit que nous aurions dû les soulever plus tôt et qu'ils étaient irrecevables parce qu'ils n'avaient pas été soulevés au moment où nous avons senti qu'il y avait un probleme. En rendant sa décision sur le point que j'ai soulevé et que le sénateur Phillips a appuyé, le Président a dit ceci:
Conséquemment, je suis d'avis que le sénateur Kinsella a invoqué le Règlement dans un délai convenable.
Du point de vue de la procédure, nous en sommes toujours à la même étape où nous étions lorsque la deuxième lecture du projet de loi a été appelée. Nous avons avancé sur le calendrier, mais pas du point de vue de la procédure.
Le sénateur MacEachen: Il n'y aucun lien entre les deux.
Le sénateur Lynch-Staunton: Nous n'accablerons pas le Président en soulevant toute une série de rappels au Règlement. Par courtoisie pour le Président...
Le sénateur MacEachen: Nous les voulons tous aujourd'hui.
Le sénateur Lynch-Staunton: ...nous estimons qu'il serait injuste de l'accabler en soulevant 12 ou 15 rappels au Règlement, ce que nous pourrions facilement faire.
Le sénateur McEachen: Il est bien rémunéré. Faites-les.
Le sénateur Lynch-Staunton: Par courtoisie pour Son Honneur et pour le Sénat, nous croyons préférable de les aborder un à un.
Votre Honneur, je suis sûr que votre décision sur ce rappel au Règlement sera plus facile à rendre que pour les deux autres, puisqu'aucun argument n'a été formulé contre l'objet du rappel au Règlement, mais contre le fait qu'il ait été effectué.
Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, le sénateur McEachen a attiré notre attention sur la documentation relative à la procédure parlementaire.
Le sénateur Austin: Le sénateur Kinsella a déjà pris la parole au sujet de ce rappel au Règlement.
Le sénateur Kinsella: Une décision a été rendue le 28 novembre 1995 et acceptée par le Sénat. Nous devons nous fonder sur ce précédent. La documentation concernant la procédure parlementaire est utile, mais ce n'est pas notre principale source d'information. Le Règlement du Sénat du Canada et les décisions et précédents établis au Sénat constituent notre principale source de documentation.
Le sénateur McEachen: Je suis d'accord avec l'honorable sénateur. Nous avons eu une discussion, ayons une décision aujourd'hui. Si des honorables sénateurs désirent faire des rappels au Règlement, écoutons-les. Référons-nous aux principales citations auxquelles le Président s'est lui-même référé aujourd'hui.
Le sénateur Phillips: Honorables sénateurs, on me permettra peut-être de répondre à certaines observations qui ont été faites. Je signale que le sénateur Graham, qui a dénoncé la perte de temps, avait un long discours préparé d'avance.
Le sénateur Bernston: Et qu'il a prononcé.
Le sénateur Phillips: Toutefois, le discours ne portait pas sur le rappel au Règlement.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'était tout à fait à côté du sujet.
Le sénateur Phillips: Je ne vois rien qui puisse excuser le temps qu'a épuisé le sénateur Graham. Il m'a fallu quatre fois moins de temps pour soulever mon rappel au Règlement. J'ai cherché à être bref, ce qui m'est difficile.
Le sénateur a voulu ensuite savoir pourquoi tous les rappels au Règlement n'avaient pas été soulevés en même temps. Le sénateur MacEachen a aussi soulevé ce point. Le sénateur Lynch-Staunton a répondu à cela. Si deux ou plusieurs rappels au Règlement avaient été soulevés en même temps, le sénateur Graham et le sénateur MacEachen s'y seraient opposés.
Je veux revenir à plusieurs choses qu'a dites le sénateur MacEachen, après quoi je me reporterai brièvement aux remarques du sénateur Cools.
Le sénateur MacEachen a dit que les articles auxquels je m'opposais avaient été modifiés. Je conteste, honorables sénateurs. Au cours de la dernière législature, le Sénat a conclu qu'un grand nombre de ces articles étaient répugnants. Ils ont été modifiés parce qu'ils étaient répugnants et ont été renvoyés à la Chambre des communes pour la même raison. Qu'est-ce que cela a donné? Le projet de loi est revenu au Sénat inchangé. Contrairement à ce que dit le sénateur MacEachen, aucune modification n'avait été apportée.
On dit que nous devons prendre une décision aujourd'hui car une ou deux semaines se sont déjà écoulées. Le sénateur se souvient certainement du débat sur la TPS. À son retour de Bruxelles, il a fait durer le débat pendant une période considérable. J'aimerais bien que le sénateur s'en souvienne.
Le sénateur MacEachen: Mais ce n'était pas un rappel au Règlement.
Le sénateur Phillips: Ce n'était pas un rappel au Règlement. C'était tellement irrecevable que je puis comprendre qu'il n'aime pas qu'on le lui rappelle.
Le sénateur Cools a manifestement fait beaucoup de recherches à ce sujet. Je ne veux pas l'insulter, mais je sais que ses arguments sont tout aussi mauvais que ceux qu'ont avancés le sénateur Graham et le sénateur MacEachen.
Je ne suis pas d'accord notamment sur ses remarques à propos du pouvoir du Parlement. Si j'ai bien compris madame le sénateur, elle a dit que le Parlement a le pouvoir de supplanter les tribunaux. Je ne crois pas que cela s'applique dans une démocratie. Un gouvernement, surtout un gouvernement majoritaire comme celui-ci, pourrait supplanter les tribunaux. Imaginez le tollé si l'une des Chambres du Parlement essayait de supplanter la Cour suprême du Canada.
Les honorables sénateurs de l'autre côté se plaignent des rappels au Règlement qui ont été soulevés. Dans la dernière partie de sa décision du 28 novembre 1995, le Président a dit:
En l'absence d'un précédent ou d'une preuve concluante du contraire, j'estime devoir prendre acte de dispositions de l'article 1 du Règlement du Sénat:
Dans tous les cas non prévus au Règlement, le Sénat et ses comités suivent [...] les coutumes, usages, formalités et procédures de l'une ou l'autre des Chambres du Parlement du Canada.
Par conséquent, j'accepte la décision rendue par le Président de la Chambre des communes en 1984 et statue que, pour des raisons semblables, le projet de loi S-11 est irrecevable.
Et voici la partie intéressante, honorables sénateurs:
Pour conclure, je pourrais ajouter qu'il existe d'autres moyens à la disposition du sénateur Cools pour répondre aux opinions du public dont elle est saisie et que le sénateur pourrait envisager de prendre.
Je fais remarquer au gouvernement qu'il existe d'autres options. J'espère que les honorables sénateurs de l'autre côté auront l'honnêteté et suffisamment d'intégrité pour examiner les autres options qui s'offrent à eux. N'allons pas de l'avant avec un projet de loi qui n'a pas de précédent dans l'histoire du Canada.
L'honorable Anne C. Cools: Honorables sénateurs...
Son Honneur le Président: Sénateur Stewart?
Le sénateur Cools: C'est toujours pareil, Votre Honneur. C'est la troisième fois aujourd'hui que ça se produit.
Son Honneur le Président: Je vous demande pardon?
Le sénateur Cools: Vous le faites constamment.
L'honorable John B. Stewart: Honorables sénateurs, le sénateur Phillips s'est plaint que ce projet de loi est un projet de loi punitif. Un projet de loi punitif est une mesure qui impose un châtiment.
Le sénateur Lynch-Staunton: Voilà.
Le sénateur Stewart: Un tel projet de loi a été adopté par le Parlement pour imposer un châtiment à la suite d'un délit ou d'une infraction, généralement de nature politique. Historiquement, c'était une forme de châtiment pour les cas qui n'étaient pas prévus dans la loi.
Honorables sénateurs, ce n'est pas ce que fait ce projet de loi. C'est vrai que certains entrepreneurs visés par le projet de loi n'apprécieront pas le traitement prévu à leur endroit, mais il n'y a rien qui présente leurs pertes comme un châtiment. Ces pertes sont une conséquence de la politique du gouvernement. C'est bien clair que l'intention n'est absolument pas d'imposer un châtiment, puisque les entrepreneurs recevront une indemnisation pour les dépenses qu'ils ont engagées dans la préparation de leur soumission.
Voilà sur ce point: ce n'est pas un projet de loi punitif, et les arguments dans le sens contraire ne sont pas pertinents, pour l'essentiel.
Je veux faire valoir un autre point, honorables sénateurs, et le sénateur Phillips a déjà admis celui-là. Il a dit que certaines dispositions du projet de loi dont le Sénat est maintenant saisi figuraient déjà dans le projet de loi précédent et qu'on s'y était opposé au comité. Comment ces dispositions se seraient-elles rendues au comité si le Sénat avait jugé le projet de loi irrecevable à la dernière session? Il ne peut pas jouer sur les deux tableaux. Si ces dispositions sont punitives dans le présent projet de loi, elles étaient punitives dans le projet de loi précédent, à la dernière législature. Le sénateur ne peut pas jouer sur les deux tableaux.
Selon moi, comme je l'ai déjà dit, ce ne sont pas des dispositions punitives. Elles étaient recevables à la dernière session et elles le sont maintenant. Elles peuvent être débattues et modifiées. Si un projet de loi est approuvé sur la question de principe, il faut le renvoyer au comité. Le sénateur Phillips pourra alors, comme l'a dit le sénateur MacEachen, s'amuser à proposer des amendements, et je suis sûr qu'ils seront examinés très sérieusement.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je tiens à m'excuser de cet emportement. Cependant, je perds un peu patience lorsque je me lève pour parler et que Son Honneur m'interrompt sans cesse; il le fait constamment, par habitude.
Son Honneur le Président: Honorable sénateur Cools, je regrette de devoir vous interrompre. Je le fais seulement lorsque vous dépassez le temps alloué ou que vous contrevenez aux règles du Sénat. C'est la procédure que j'entends appliquer à tous les honorables sénateurs. Je n'utilise pas de règles différentes pour certains sénateurs.
Le sénateur Cools: Honorables sénateurs, je ne demandais pas des règles spéciales. Je m'excusais tout simplement auprès de mes collègues, en expliquant que je trouve un peu frustrant de me faire interrompre lorsque je me lève pour prendre la parole alors que d'autres sénateurs sont reconnus avant moi. Cette situation est difficile à accepter et je perds un peu patience. Cependant, cela est tout à fait normal ici.
(1700)
Je voudrais répondre au sénateur Phillips. Premièrement, il a parlé de la Cour suprême du Canada et a déclaré qu'il y aurait un tollé de protestation contre le fait que le Parlement s'exprime au nom de la population canadienne et que sa voix l'emporte sur celle des tribunaux.
Je signale au sénateur Phillips que le tollé au pays a été en faveur de l'annulation des accords concernant l'aéroport Pearson. La population a protesté durant la campagne électorale et elle a donné un mandat clair au chef de l'opposition, M. Jean Chrétien.
Le sénateur Lynch-Staunton: Parlez-nous donc de la TPS.
Le sénateur Cools: On pourra y revenir une autre fois.
La population a exprimé clairement son mécontentement à l'égard de la signature et de l'exécution de ces contrats. Je voudrais dire au sénateur Phillips que le gouvernement du Canada, M. Chrétien et le projet de loi C-28 bénéficient de l'appui total de la population canadienne.
Deuxièmement, le sénateur Phillips a parlé de la Cour suprême du Canada. La Cour suprême, constituée en vertu de la Loi sur la Cour suprême, est une créature, une création du Parlement du Canada.
Le sénateur Lynch-Staunton: C'est une création de la Constitution canadienne.
Le sénateur Cools: La Constitution canadienne autorise seulement le Parlement à adopter une loi créant un tribunal de la plus haute instance. La Cour suprême du Canada n'a pas d'autre existence constitutionnelle que celle-là. La Loi sur la Cour suprême du Canada est une loi du Parlement du Canada. Cela ne fait aucun doute.
Le sénateur Lynch-Staunton: Un tribunal est une création de la Constitution.
Le sénateur Cools: J'essaie de tenir compte des questions soulevées par le sénateur Phillips.
Pour ce qui est des us et coutumes, si le Parlement a ces pouvoirs, c'est précisément conformément aux anciens us et coutumes du Parlement qui ont été importés au Canada. La source de ces pouvoirs se trouve dans ces us et coutumes.
Enfin, pour ce qui est de défendre le droit du gouvernement d'adopter de telles initiatives, j'aimerais dire - parce que le sénateur Lynch-Staunton et les autres n'arrêtent pas de faire référence aux affaires qui sont actuellement devant les tribunaux - que je trouve ces actions en justice concernant les accords sur l'aéroport Pearson troublantes. Je rappelle aux sénateurs d'en face que les tribunaux de ce pays ont l'obligation légale de tenir compte, sur le plan juridique, de ce qui se passe dans cette enceinte, voire dans les deux chambres du Parlement.
Honorables sénateurs, les sénateurs de l'opposition prétendent qu'ils peuvent faire un rappel au Règlement quand ça leur chante, que le Sénat soit saisi d'une question ou non. Et c'est exactement ce qu'ils font depuis un certain temps, et avec le plus grand succès. Son Honneur pourrait sans doute se prononcer aussi là-dessus.
Le projet de loi est en bonne et due forme. J'exhorte tous les sénateurs à voter de manière à mettre fin à ce retard.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, j'ai écouté soigneusement toutes les présentations des honorables sénateurs. Je les en remercie. Je remercie en particulier ceux qui ont dit qu'ils intervenaient pour m'aider. Je l'apprécie.
Je suis également au stade où je pourrais rendre ma décision, mais je voudrais vérifier quelques points de droit très particuliers ainsi que des déclarations antérieures. Je demanderais donc à l'honorable sénateur Corbin d'assumer la présidence. Je vais demander à deux de mes assistants de m'accompagner. J'espère pouvoir revenir et rendre ma décision assez rapidement.
Les travaux du Sénat
Recours au Règlement
L'honorable J. Michael Forrestall: Honorables sénateurs, j'invoque le Règlement. Je demande que le leader adjoint du gouvernement envisage ce qui suit. Il y a un projet de loi d'initiative parlementaire qui devait être étudié par le comité permanent plus tôt cet après-midi. Un certain nombre de témoins sont venus de North Bay et voudraient bien que l'on étudie la question ce soir.Je dirais que si nous commençons maintenant l'étude du projet de loi C-14, sur les transports au Canada, nous allons être ici jusqu'à l'ajournement et nous n'aurons vraisemblablement pas la possibilité de siéger en tant que comité pour étudier le projet de loi d'initiative parlementaire. Nous sommes prêts à reprendre au point où nous en sommes maintenant demain matin ou demain après-midi.
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, nous étions prêts à nous attaquer au projet de loi C-14 jeudi dernier, mais le débat a été ajourné pour permettre aux sénateurs Spivak et Forrestall de parler, vu qu'ils ne pouvaient être ici jeudi. Nous avons donc accepté de reporter l'ordre à aujourd'hui.
Nous pouvons reporter la motion de troisième lecture, cette fois-ci pour faciliter l'audition de témoins en comité en ce qui concerne le projet de loi S-7 du sénateur Kelleher, mais à condition que nous ayons l'engagement des deux parties que nous serons en mesure de faire la troisième lecture demain et de préférence en terminer avant l'ajournement de cette semaine.
Le sénateur Forrestall: Honorables sénateurs, je remercie le leader adjoint du gouvernement. Bien entendu, nous pouvons en prendre l'engagement. Cinq amendements ont été proposés. Je peux vous dire que nous n'avons pas l'intention d'essayer de retarder ce projet de loi. Après tout, c'est un projet de loi que nous appuyons. Toutefois, nous avons certaines observations à faire à son sujet.
Je ne peux pas donner au leader adjoint une promesse absolue, étant donné que je ne suis qu'un seul sénateur.
Le sénateur Graham: Dans ce cas-là, honorables sénateurs, nous pourrions passer aux autres articles de l'ordre du jour sur la base de cette entente.
Les leaders des deux partis sont d'accord pour que, lorsque l'ordre du jour sera épuisé cet après-midi, le Sénat s'ajourne à loisir jusqu'à ce que la présidence convoque la Chambre pour recevoir les projets de loi de l'autre endroit qui, je crois comprendre, pourraient être adoptés plus tard dans le courant de l'après-midi.
J'imagine que nous pourrions procéder à la première lecture des projets de loi renvoyés par l'autre endroit vers 18 h 30. Il nous faudrait alors consentir à ne pas tenir compte de l'heure à 18 heures.
Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, êtes-vous d'accord avec cette proposition?
Des voix: D'accord.
Le Code criminel
Projet de loi modificatif-Deuxième lecture-Report du débat
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Cools, appuyée par l'honorable sénateur Haidasz, c.p., tendant à la deuxième lecture du projet de loi S-4, Loi modifiant le Code criminel (détournement de la justice)- (L'honorable sénateur Kinsella).
L'honorable Noël A. Kinsella: Reportée.
L'honorable William M. Kelly: Honorables sénateurs, puis-je faire une observation? Je me trompe peut-être, mais je croyais comprendre qu'en mon absence, le sénateur Kinsella voulait reporter cet article en mon nom. Si c'est exact, je voudrais que cette motion soit reportée en mon nom et qu'elle soit inscrite comme telle.
Son Honneur le Président suppléant: Est-ce d'accord, honorables sénateurs?
Des voix: D'accord.
(La motion est reportée.)
Projet de loi sur l'Association canadienne des ex-parlementaires
Deuxième lecture
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur la motion de l'honorable sénateur Maheu, appuyé par l'honorable sénateur Gigantès, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-275, Loi constituant l'Association canadienne des ex-parlementaires- (L'honorable sénateur Kinsella).
L'honorable Noël A. Kinsella: Honorables sénateurs, l'objet du projet de loi C-275 nous a été expliqué par notre collègue, le sénateur Maheu, au début de l'étape de la deuxième lecture. Je n'ai rien contre la substance du projet de loi, mais j'ai certaines réserves que je tiens à exprimer, parce que tous les sénateurs devraient, à mon avis, en prendre connaissance.
Les honorables sénateurs se souviendront que le sénateur Kenny a déjà tenté l'expérience, en présentant un projet de loi du Sénat qui portait sur les carburants de remplacement. Le projet de loi a été rapidement étudié au Sénat et un message a été envoyé à l'autre endroit. Les honorables sénateurs qui ne savent pas ce qu'il advient des projets de loi du Sénat, une fois qu'ils sont envoyés à l'autre endroit, auraient intérêt à écouter ce qui suit.
Contrairement au Sénat, qui étudie rapidement les projets de loi d'initiative parlementaire dont l'étude a été amorcée à la Chambre des communes, la Chambre des communes traite de façon très différente les projets de loi d'initiative parlementaire proposés par les sénateurs. Au Sénat, ces projets de loi franchissent les trois étapes, sont étudiés en comité et sont adoptés, et un message est ensuite envoyé à la Chambre des communes. Malheureusement - et c'est là l'essentiel de mes réserves - un projet de loi proposé par un sénateur et adopté au Sénat du Canada n'obtient pas de traitement spécial lorsqu'il est envoyé à la Chambre des communes. Il est traité comme tout autre projet de loi d'initiative parlementaire, aux termes du Règlement de l'autre endroit.
Honorables sénateurs, le temps est venu pour le Sénat de réexaminer ce processus. Lorsqu'un député présente un projet de loi, ce projet de loi entre dans un système de loterie. Il peut être tiré au sort comme il peut ne pas être tiré au sort. Il me semble que la démarche devrait être toute autre, lorsqu'il s'agit d'un projet de loi qui a été adopté par la moitié du Parlement, et qu'un tel projet de loi ne devrait pas faire l'objet d'une loterie. Lorsqu'un projet de loi d'intérêt privé du Sénat est lu pour la première fois à l'autre endroit, il fait l'objet d'une loterie et a les mêmes chances d'être tiré au sort que tout autre projet de loi.
Je ne tiens pas à retarder l'adoption du présent projet de loi, car je n'en conteste nullement le contenu, mais je voudrais l'utiliser à l'étape de l'étude en comité pour examiner le processus. Peut-être que le sénateur Maheu, qui a une bonne expérience récente de l'autre endroit, pourrait nous guider à cet égard. Je crois que le même problème s'est posé, il y a peu de temps, au sénateur Kenny. La Chambre des communes est actuellement saisie d'un de nos projets de loi, soit le S-2. J'ose croire que le comité qui se penchera sur ce projet de loi trouvera le moyen de faire que les projets de loi d'initiative parlementaire qui sont adoptés par le Sénat soient traités de la même façon que les autres.
L'honorable Colin Kenny: Honorables sénateurs, j'ai écouté les remarques du sénateur Kinsella avec beaucoup d'intérêt. Il a décrit de façon exacte la situation qui se produit lorsqu'un projet de loi d'intérêt privé est présenté au Sénat. C'est un processus très dégradant que d'attendre le résultat d'un tirage au sort et de comparaître devant un très petit comité qui doit décider si notre projet de loi est valable ou non. Nous devrions trouver une façon d'examiner officieusement le processus de concert avec l'autre endroit.
Lorsque j'ai discuté de mon projet de loi avec les gens de l'autre endroit, ils se sont presque excusés de m'obliger à me soumettre à tout le processus, mais j'ai dû le faire de toute façon. Ils seraient peut-être prêts - si nous pouvons trouver le bon moyen de les encourager - à repenser leur façon de procéder. Peut-être que le meilleur moyen serait de leur signaler la rapidité avec laquelle nous traitons les projets de loi qui nous sont envoyés.
Son Honneur le Président suppléant: Je suis prêt à donner la parole au sénateur Maheu, mais je tiens à rappeler aux sénateurs que, si elle prend la parole maintenant, cela aura pour effet de clore le débat à l'étape de la deuxième lecture.
L'honorable Sharon Carstairs: Honorables sénateurs, je présume que le projet de loi C-275 sera renvoyé au comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Je vous assure que nous examinerons la question que vous avez soulevée, même si elle n'est pas directement reliée au projet de loi.
L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, je tiens à signaler que ce projet de loi vient du Président de la Chambre des communes. Je lui ai déjà parlé à ce sujet. Je crois comprendre qu'un des greffiers de la Chambre sera présent au comité demain si nous renvoyons le projet de loi ce soir. Cette personne sera en mesure d'expliquer la procédure au comité.
(La motion est adoptée, et le projet de loi est lu une deuxième fois.)
RENVOI AU COMITÉ
Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?(Sur la motion du sénateur Maheu, le projet de loi est renvoyé au comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.)
L'enfance maltraitée et négligée
La mort de Matthew Vaudreuil-Interpellation-Suite du débat
L'ordre du jour appelle:Reprise du débat sur l'interpellation de l'honorable sénatrice Cools attirant l'attention du Sénat sur la mort par maltraitance et négligence du petit garçon de cinq ans Matthew Vaudreuil causée par sa mère, Verna Vaudreuil, en juillet 1992 et sur l'enquête du juge Thomas J. Gove sur les services de protection de l'enfance en Colombie- Britannique relativement à l'horrible mort par maltraitance et négligence de Matthew Vaudreuil et sur le rapport du juge Gove Report of the Gove Inquiry into Child Protection in British Columbia, novembre 1995- (L'honorable sénateur Berntson).
L'honorable Eric Arthur Berntson (chef adjoint de l'opposition): Honorables sénateurs, je cède la parole au sénateur Carstairs sur cette question.
L'honorable Sharon Carstairs: Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd'hui pour contribuer à l'interpellation amorcée par le sénateur Cools sur le décès de Matthew Vaudreuil et l'enquête subséquente du juge Gove sur la raison pour laquelle les services de protection de l'enfance n'ont pas réussi à sauver ce jeune garçon de cinq ans.
Comme le sénateur Cools l'a souligné dans son discours, Matthew était bien connu au ministère des Services de protection de l'enfance de la Colombie-Britannique. En fait, à l'exclusion des superviseurs, 21 travailleurs sociaux, voire 25, selon certains, étaient responsables de ce dossier. Soixante rapports ont été faits sur le bien-être et la sécurité de cet enfant. Or, malgré ces 60 rapports, le 9 juillet 1992, Matthew est mort par asphyxie causée par sa mère Verna Vaudreuil, qui a tenu la main sur sa bouche.
Ainsi que le sénateur Cools l'a fait ressortir, l'une des fautes des services de protection de l'enfance de la Colombie- Britannique dans le cas de Matthew est de ne pas avoir reconnu les besoins de l'enfant. Au contraire, les travailleurs sociaux ont placé les besoins de la mère avant ceux de Matthew. Je voudrais bien pouvoir dire que c'est un cas isolé au Canada, mais hélas tel n'est pas le cas.
Cependant, et malheureusement, le système de protection de l'enfance a laissé tomber Matthew de bien d'autres façons. Dans son rapport Report of the Gove Inquiry into Child protection, le juge Gove déclare:
C'est au niveau de l'enquête que l'on retrouve les pires carences dans l'histoire de Matthew.
Le juge a démontré que les travailleurs sociaux qui ont enquêté était mal formés et inexpérimentés. Pour une raison ou une autre, ils n'ont jamais interrogé Matthew. Il est vrai qu'il n'avait que cinq ans. Cependant, on peut parler à un enfant de cinq ans. On peut lui demander ce qu'il vit. On peut lui demander s'il mange à sa faim. On n'utilise pas de mots comme alimentation, mais on peut lui demander, par exemple: «Matthew, qu'est-ce que tu as mangé ce matin?» Pourtant, jamais un travailleur social n'a demandé à Matthew si l'on s'occupait bien de lui.
Dans son rapport, le juge Gove déclare:
[...] l'historique du cas, y compris les dossiers du ministère même, ne semblent pas faire partie d'une enquête. Des 25 travailleurs sociaux et surveillants de district qui se sont occupés du cas de Matthew et de sa mère, et qui ont témoigné devant la commission d'enquête, aucun n'avait consulté le dossier de Verna Vaudreuil ou examiné soigneusement le dossier de Matthew.
Pas un!
Il a également dit ceci:
Chaque nouvel intervenant a recommencé à neuf...
...sans connaître les antécédents qui auraient montré, si l'intervenant y avait eu accès, que l'enfant avait été maltraité et négligé.
Le juge Gove a ajouté ce qui suit:
Si les intervenants avaient eu accès à une base de données informatisée contenant des renseignements détaillés sur les enquêtes antérieures, ils auraient pu faire une évaluation plus rapide et professionnelle des risques.
Tous ces renseignements auraient pu avoir une incidence sur l'avenir de Matthew. Il aurait pu être pris en charge par les services sociaux. Il aurait pu être placé en foyer nourricier. Il aurait pu bénéficier de services intensifs de soutien à domicile à long terme si on avait décidé de le laisser chez lui. Rien de cela ne s'est produit.
Une des recommandations les plus importantes du juge Gove était la suivante:
Le ministère devrait abandonner le formulaire d'accueil sous forme de liste de contrôle et exiger plutôt que les travailleurs sociaux chargés de l'accueil portent des jugements professionnels...
Pourvu, évidemment, qu'ils soient des professionnels.
...sur les enquêtes et évaluations qu'ils effectuent, jugements qui devraient être résumés dans une base de données informatisée.
Le gouvernement de la Colombie-Britannique a répondu au cas de Matthew. Il a admis que ce cas n'avait pas été bien traité. Il a essayé de mettre en place de nouveaux systèmes qui, espérons-le, empêcheront un autre enfant de subir le même sort que Matthew.
Je voudrais parler cet après-midi de la nécessité d'avoir un registre des cas d'enfants maltraités au Canada. Le comité permanent de la justice et du solliciteur général a fait une recommandation en ce sens et le Centre canadien sur la violence faite aux femmes a formulé une recommandation similaire dans son rapport.
Un des obstacles majeurs à la création d'un registre national est le fait que les provinces n'ont pas de politique uniforme. Certaines possèdent des registres, alors que d'autres n'en ont pas. Enfin, les registres qui existent ne sont pas uniformes. On sait que la Constitution reconnaît aux enfants le droit de circuler librement d'une province à l'autre. Malheureusement, nous savons aussi que, lorsqu'elles apprennent qu'elles feront l'objet d'une enquête, certaines personnes font leurs valises et déménagent avec toute la famille dans une autre province.
Nous savons aussi que la création d'un registre national des cas d'enfants maltraités soulève des questions importantes. Le concept n'est pas simple. Il doit y avoir des mécanismes de protection des personnes injustement accusées de violence à l'égard des enfants, tout comme il doit y avoir le même genre de protection pour les enfants innocents qui n'ont pas demandé à devenir des victimes d'exploitation.
Honorables sénateurs, il faudrait établir un système informatique qui permettrait une communication entre les provinces et les territoires. Un registre de la sorte aiderait sans aucun doute les autorités à procéder à des vérifications sur une famille ou un individu. Il faudrait mettre à jour constamment le registre national de façon à ce que, quand un travailleur social y entre une information, cette information soit immédiatement disponible à l'échelle nationale.
En fait, il existe des registres provinciaux en Ontario, en Nouvelle-Écosse et au Manitoba. Celui que je connais le mieux est celui du Manitoba. Le Manitoba a en fait deux registres: un registre des cas d'enfants maltraités, qui sert à dépister les enfants à haut risque et leurs familles, et un registre des auteurs de sévices, qui sert à dépister les employés qui pourraient éventuellement s'occuper d'enfants. Lorsque l'auteur des sévices ne s'occupe pas directement d'enfants, le cas est traité comme une agression de la part d'une tierce partie et le nom de la personne n'est pas inscrit au registre.
Le ministère de la Justice du Manitoba étudie actuellement des mesures pour suivre les récidivistes qui ont commis des infractions sexuelles sur des enfants. Les noms sont inscrits au registre pour différentes raisons, d'abord, lorsqu'une personne est réputée avoir été condamnée au criminel pour des mauvais traitements infligés à un enfant. Ensuite, lorsqu'un tribunal considère qu'un enfant a besoin de protection contre certains mauvais traitements; dans ce cas, il s'agit généralement d'un tribunal de la famille.
Cela se produit aussi lorsqu'un comité spécial, se fondant sur l'opinion d'un médecin ou d'un psychologue ou sur toute autre preuve à l'appui, juge qu'un enfant a été maltraité. Dans tous les cas appartenant à cette dernière catégorie, le ministère doit aviser toutes les parties que leurs noms seront inscrits dans le registre et, à moins que celles-ci ne déposent une objection officielle, le ou les noms sont inscrits 60 jours plus tard.
(1730)
Les appels sont entendus par le comité d'examen du registre. Toutes les informations contenues dans les deux registres sont confidentielles, et il faut obtenir la permission du directeur des registres pour y avoir accès. Les organismes mandatés peuvent demander cette permission au directeur et avoir accès aux informations des deux registres, s'il est prouvé qu'ils doivent avoir ces données pour faire enquête et déterminer si un enfant a besoin de protection.
Cependant, on peut aussi demander l'accès aux registres pour évaluer les familles d'accueil et veiller à ce que ceux à qui l'on confie ces enfants déjà marqués soient bien légitimes. Les aides familiales et les parents adoptifs peuvent aussi faire l'objet d'enquêtes, tout comme les auxiliaires parentaux. Les employeurs autres que les organismes mandatés ont accès uniquement au registre des cas d'enfants maltraités et uniquement pour vérifier si le nom d'une personne y est inscrit.
En Ontario, le système est quelque peu différent. Naturellement, cela fait partie de la difficulté de mettre sur pied un registre national des cas d'enfants maltraités. À moins que les provinces ne soient toutes d'accord pour utiliser le même système, ce ne serait pas un exercice valable. Actuellement, il n'y a aucun échange d'informations. Non seulement y a-t-il des situations comme celle de la Colombie-Britannique, où l'information ne circule même pas au sein de la province, ce qu'elle essaie de corriger, mais nous savons qu'il n'y a pas d'échange d'informations entre les provinces. Le problème réside dans l'établissement de normes nationales pour les registres provinciaux des cas d'enfants maltraités et, espérons-le, l'établissement d'un registre national des cas d'exploitation.
Je répète, honorables sénateurs, que ce n'est pas quelque chose de facile à obtenir. Toutefois, c'est quelque chose qui vaut la peine qu'on y consacre du temps, et je le recommande à tous les sénateurs.
(Sur la motion du sénateur Cools, le débat est ajourné.)
Projet de loi sur certains accords concernant l'aéroport international Pearson
Deuxième lecture-Rappel au Règlement-Décision de la présidence-report du débat
L'ordre du jour appelle:Deuxième lecture du projet de loi C-28, Loi concernant certains accords portant sur le réaménagement et l'exploitation des aérogares 1 et 2 de l'aéroport international Lester B. Pearson-(Décision de la présidence).
Son Honneur le Président: Si vous le désirez, honorables sénateurs, je suis prêt à rendre ma décision en ce qui concerne le rappel au Règlement du sénateur Phillips.
Des voix: D'accord.
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, le recours au Règlement soulevé par l'honorable sénateur Phillips précisait que ce projet de loi est une mesure punitive. J'ai fait des recherches approfondies pour déterminer ce qu'est exactement une mesure punitive et je dois dire que je n'ai pas trouvé beaucoup d'information sur le sujet. J'ai donc dû me reporter aux dictionnaires.
Voici ce qu'on trouve dans le Jowitt's Dictionary of English Law, à la définition de «Bills of pains and penalties»:
Projet de loi punitif: projet de loi présenté, généralement à la Chambre des lords, mais parfois à la Chambre des communes, dans le but de punir un individu sans procès régulier. Un projet de loi portant confiscation de biens et mort civile impose toujours la peine capitale; un projet de loi punitif inflige une peine inférieure.
Plus loin, dans le même dictionnaire, à la rubrique «Pains and Penalties, Bills of», on trouve:
Lois servant à condamner pour trahison ou pour un crime, ou pour infliger une peine au-delà ou en contravention de ce que prévoient les lois existantes, pour une raison spéciale.
Honorables sénateurs, je trouve que ce projet de loi ne tombe pas dans cette catégorie. De plus, je signale sur une citation tirée de Erskine May, à la page 68:
Comme dans le cas des lords, le rôle constitutionnel des Communes pour ce qui est d'adopter des lois portant confiscation de biens et mort civile et des lois punitives, ainsi que de poursuivre pour des infractions passibles de destitution devant les lords, est maintenant d'un intérêt historique plutôt que d'actualité. Cependant, ces pouvoirs n'ont jamais été abolis officiellement.
Honorables sénateurs, on s'aperçoit qu'ils ont maintenant été abolis dans la pratique britannique. On constate qu'ils ne s'appliquent pas à ce projet de loi, même dans la définition initiale.
Pour en revenir à notre propre ouvrage de référence, Beauchesne, à la page 198, au commentaire 623, il est clair que:
L'usage canadien et le Règlement de la Chambre ne connaissent d'autres types de projets de loi que les projets de loi d'intérêt public et privé.
Je comprends parfaitement qu'il y a deux points de vue différents au sujet de ce projet de loi. Il suffit d'écouter ce débat pour savoir qu'il est très controversé. Cependant, c'est au Sénat de décider et, si cette mesure est renvoyée au comité, c'est à lui alors qu'il incombera de trancher, et non au Président. Je déclare que ce projet de loi est d'intérêt public et qu'on devrait aller de l'avant avec cette mesure.
Honorables sénateurs, l'honorable sénateur Kirby, appuyé par l'honorable sénateur Davey, propose: Que le projet de loi C-28 soit lu une deuxième fois.
L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Nous sommes prêts.
Les travaux du Sénat
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, nous pouvons peut-être retarder les choses quelques minutes.L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Nous avons entendu le sénateur MacEachen. Vous ne devez pas retarder les choses. Soyez ferme et poursuivez.
Le sénateur Graham: Nous avons une motion inscrite au nom du sénateur Murray. Nous pourrions peut-être l'étudier à ce stade-ci.
(1740)
La Société de développement du Cap-Breton
Autorisation au comité spécial de siéger en même temps que le Sénat
L'honorable Lowell Murray, conformément à l'avis du 9 mai 1996, propose:Que le comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton soit autorisé à siéger le 28 mai 1996, à 15 heures, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l'application du paragraphe 95(4) du Règlement soit suspendu à cet égard.
-Honorables sénateurs, j'avais donné avis de cette motion l'autre jour, en l'absence inévitable du président du comité spécial du Sénat sur la Société de développement du Cap-Breton, le sénateur Rompkey. Les honorables sénateurs savent que, en constituant le comité, nous avions fixé au 15 juin la date du dépôt de son rapport. Nous devons entendre un certain nombre de témoins sous peu et le comité, dans sa sagesse, a décidé de demander au Sénat l'autorisation de siéger le mardi 28 mai, pour entendre les représentants de la société d'État et du syndicat, et peut-être d'autres témoins, de 9 h 30 jusqu'à 18 heures au moins.
Je demande aux honorables sénateurs d'appuyer cette motion.
(La motion est adoptée.)
Loi sur certains accords concernant l'aéroport international Pearson
Deuxième lecture-Report du débat
L'ordre du jour appelle:Deuxième lecture du projet de loi C-28, Loi concernant certains accords portant sur le réaménagement et l'exploitation des aérogares 1 et 2 de l'aéroport international Lester B. Pearson.
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, la permission est-elle accordée de revenir à l'article no 3 des affaires du gouvernement?
Des voix: Non.
Son Honneur le Président: La permission est-elle accordée?
Des voix: Non.
Son Honneur le Président: La permission n'est pas accordée.
(Le Sénat s'ajourne à loisir.)
Le Sénat reprend sa séance.
Projet de loi concernant l'assurance-emploi
Première lecture
Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-12, concernant l'assurance-emploi.(Le projet de loi est lu une première fois.)
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?
L'honorable B. Alasdair Graham (leader adjoint du gouvernement): Avec la permission du Sénat, à la prochaine séance.
Son Honneur le Président: Permission est-elle accordée, honorables sénateurs?
L'honorable Jean-Maurice Simard: Non.
Son Honneur le Président: La permission n'est pas accordée.
(Sur la motion du sénateur Graham, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 16 mai 1996.)
Projet de loi de mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur
Première lecture
Son Honneur le Président annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur.(Le projet de loi est lu une première fois.)
Son Honneur le Président: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?
(Sur la motion du sénateur Graham, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 16 mai 1996.)
(Le Sénat s'ajourne à 13 h 30, le mercredi 15 mai 1996.)